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Monsieur le Président, c’est avec plaisir que je prends la parole au nom du Nouveau Parti démocratique du Canada pour appuyer le projet de loi .
Mon parti appuie le projet de loi à l’étape de la deuxième lecture, car cette mesure correspond de façon générale à sa position de longue date voulant que les agents de la GRC aient le droit à la négociation collective, si tel est leur vœu démocratiquement exprimé.
Mon parti et moi appuyons bien entendu le renvoi du projet de loi au comité, où nous espérons l’étudier en détail et proposer des amendements pour dissiper quelques préoccupations précises que le libellé actuel suscite. Nous espérons que, grâce à la bonne volonté de tous les partis, nous pourrons apporter des changements constructifs.
L’origine du projet de loi est fort simple. Le projet de loi donne suite à un arrêt de la Cour supérieure de l’Ontario, l’arrêt MacDonnell. En effet, le juge MacDonnell a statué en avril 2009 que le régime de relations de travail prévu par la Loi sur la GRC violait le droit constitutionnel des agents de la GRC de participer librement à des négociations collectives si tel est leur choix
Au départ, le gouvernement était hostile à la syndicalisation des employés de la GRC et il a interjeté appel de façon répétée d’arrêts judiciaires défavorables au régime existant, mais il semble qu’il en soit venu à accepter qu’une certaine forme de syndicalisation dans la GRC est non seulement souhaitable, mais aussi exigée par la loi.
Le projet de loi instaurerait un nouveau régime de relations de travail pour les employés de la Gendarmerie royale du Canada qui travaillent comme policiers. Je le répète, le projet de loi proposé est la réponse du gouvernement à une décision de la Cour supérieure de l’Ontario dont je viens de parler. La cour a estimé qu’il était inconstitutionnel de refuser aux agents de police de la GRC le droit de négociation collective, qui se rattache au droit à la liberté d’association garanti au paragraphe 2d) de la Charte.
Une fois cet arrêt judiciaire rendu, en avril 2009, il n’existait plus aucun mécanisme permettant d’établir un cadre de négociation collective pour les cadres de la GRC et les agents de police. Consciente du risque de vide juridique, la cour a avancé que le Parlement voudrait peut-être créer un cadre législatif pour les négociations collectives. Certes, elle a souligné que ce cadre législatif n’était pas une condition préalable à la mise en place d’un dispositif efficace de négociation collective, mais il devait, pour reprendre ses propos, faciliter grandement les choses.
Compte tenu de cette recommandation, le tribunal a suspendu la déclaration d’invalidité de l’article 96 du règlement, la partie de la loi qui a été invalidée, pendant 18 mois, de façon à laisser au gouvernement la possibilité de présenter une loi régissant les relations de travail des agents de la GRC et je voudrais féliciter le gouvernement d’avoir suivi cette directive du tribunal.
Je voudrais remonter au mois de juin 2008, juste avant les dernières élections fédérales. À l’époque, la GRC avait eu une longue discussion avec le gouvernement au sujet des problèmes de recrutement et de rétention du personnel qu’elle connaissait depuis longtemps. Également, la GRC s’est trouvée confrontée à un certain nombre de problèmes urgents dont je parlerai dans quelques minutes et qui exigent non seulement d’être réglés, mais également la participation des agents et des membres civils de la GRC aux discussions pour trouver une solution.
Le gouvernement conservateur a négocié des augmentations de salaires au cours de l’été 2008 pour résoudre les problèmes de recrutement et de rétention bien réels mis en lumière par les agents de première ligne de la GRC et en fait, la direction de la GRC, et les parties se sont entendues sur des augmentations proportionnelles qui devaient commencer à résoudre ces problèmes.
Que s’est-il passé? Il y a eu la campagne électorale en septembre et octobre. Le 16 octobre, après les élections, nous avons constaté que le gouvernement conservateur reniait ses promesses. Dès qu’il a été élu, en octobre 2008, il a trahi sa promesse à l’égard des augmentations de salaire qu’il avait acceptées pour la GRC juste avant les élections.
J’ai participé au processus de négociations collectives pendant 16 ans. Une des pierres angulaires des relations de travail au Canada est le principe de la bonne foi. Selon ce principe, quand les parties parviennent à un accord, elles doivent respecter cet accord.
Le gouvernement conservateur ne l’a pas fait. Il a rompu sa promesse. Il a rompu son engagement. Il a trahi sa parole. Le gouvernement a trahi les agents qui avaient accepté, à l’été 2008, le modeste pourcentage d’augmentation que le gouvernement n’a pas jugé bon d’honorer. C’est une conduite tout simplement inacceptable et c’est une des principales raisons pour lesquelles les travailleurs envisagent la syndicalisation. Quand l’employeur montre qu’il n’est pas capable de négocier de bonne foi, les travailleurs adoptent un régime qui oblige la partie adverse à négocier dans le cadre des paramètres prévus par la loi, parce qu’on ne peut pas lui faire confiance.
Le gouvernement conservateur qui a rompu sa promesse envers les agents de la GRC est pareil aux gens qui, au cours des élections provinciales de 2009, ont dit aux citoyens de la Colombie-Britannique qu’ils n’instaureraient pas la TVH. Ce sont les mêmes politiciens. Les libéraux de la Colombie-Britannique sont les conservateurs fédéraux. Ils ont également induit en erreur les électeurs de cette province. Ils ont l’habitude de rompre leurs promesses, de faire miroiter certaines choses aux électeurs quand ils veulent obtenir leurs votes et d’agir de façon différente une fois les élections terminées. Je viens d’une circonscription où l’on attache beaucoup de valeur à la démocratie. Les citoyens de Vancouver Kingsway ne tolèrent plus les élus qui promettent de faire certaines choses avant les élections, mais qui agissent de façon différente après les élections.
Le gouvernement a rejeté la demande des agents de la GRC qui voulaient le droit de choisir ou non la négociation collective. N’oublions pas que les agents de la GRC n’ont pas encore choisi d’adhérer à un syndicat et que les néo-démocrates sont neutres à cet égard. Toutefois, nous défendrons tous les travailleurs du pays qui ont le droit de faire eux-mêmes ce choix et le droit de ces travailleurs de prendre ces décisions sans coercition ni intimidation, de leur propre volonté et de leur propre accord après avoir évalué le pour et le contre de la négociation collective. Ce choix incombe uniquement aux travailleurs. Dans ce cas-ci, c’est uniquement aux agents et aux membres civils de la GRC de tout le pays qu’il revient de décider s’ils veulent ou non négocier collectivement.
Le gouvernement conservateur a dépensé l'argent des contribuables, des millions de dollars, pour lutter contre cette simple proposition. Les tribunaux ont statué que la position du gouvernement était inconstitutionnelle, puisque l'interdiction juridique de longue date qui empêche les membres de la GRC d'avoir droit à la négociation collective au pays était une violation de leurs droits prévus par la Charte.
Le gouvernement libéral qui a précédé le gouvernement actuel a, lui aussi, participé à cette violation des droits constitutionnels. Qu'on ne s'attende donc pas à entendre des paroles de sagesse ou de principe de la part du Parti libéral non plus sur cette question, puisque les députés libéraux n'ont rien fait alors que les droits constitutionnels des agents de la GRC du pays étaient violés, réduits et supprimés pendant des décennies.
Je souligne que la GRC est le seul corps policier au pays à ne pas pouvoir se syndiquer. Il est grand temps que nous réglions ce problème. Je suis fier que le Nouveau Parti démocratique soit le seul parti à avoir défendu, dès le départ, le droit des membres de la GRC de se syndiquer.
J'aimerais également parler un peu de l'apport des agents de la GRC. D'après mon expérience, les économies prospères sont celles qui mettent à profit les idées des gestionnaires et des entrepreneurs ainsi que les idées et l'énergie des travailleurs qui exécutent ces directives, le tout conjugué à un cadre gouvernemental qui assure un climat propice tant aux affaires qu'aux syndicats. Ce qui est vraiment important dans le processus de syndicalisation en question, c'est que les agents de la GRC pourront ainsi se faire entendre dans le milieu du travail. Cette voix importante manquait jusqu'à présent.
Je tiens à féliciter quelques personnes. Patrick Mehain, agent de la GRC, s'est dévoué à la lutte de façon courageuse et tout à fait désintéressée pour permettre à ses confrères et consoeurs de la GRC de décider s'ils veulent se syndiquer ou non. Ses efforts lui ont coûté très cher sur le plan professionnel. Il a sans cesse fait preuve du courage auquel on s'attendrait de la part de tout agent de la GRC, mais il s'agit d'un courage qui va au-delà des exigences du devoir.
Je veux également applaudir l'Association canadienne des policiers, en particulier son président, Charles Momy. Cette association a toujours accordé son appui à ses consoeurs et confrères de la GRC pour les aider à profiter du même avantage dont jouissent tous les autres policiers au pays, soit le droit à la négociation collective.
Je voudrais parler un peu de certaines préoccupations que suscite le projet de loi, car il n’est pas parfait.
Premièrement, il limite le choix de l’agent négociateur. Il est dit dans le projet de loi que les agents peuvent choisir le syndicat de leur choix, du moment que c’est un syndicat dont les activités se situent dans le monde de la police. En théorie, cela empiète de façon inacceptable sur le droit d’un travailleur de choisir son agent négociateur. Je laisse toutefois le soin aux agents de la GRC de déterminer s’ils peuvent trouver l’agent négociateur qui leur convient. Je pense qu’ils le peuvent.
Deuxièmement, la loi interdit que certains sujets soient abordés à la table de négociation. Encore une fois, c’est une violation inacceptable, en théorie, du droit de négocier sur n’importe quel sujet touchant le travail. Dans ce cas-ci, la loi interdit à l’agent négociateur de parler des pensions, des nominations, de l’avancement, des mises à pied et des classifications.
On peut comprendre pour les pensions, car la plupart des employés du secteur public participent déjà à un régime de pension établi. Toutefois, il n’y a aucune raison, en droit ou en pratique, pour laquelle l’agent négociateur ou les travailleurs ne doivent pas pouvoir parler de la façon dont leur travail est classifié et formuler des suggestions à cet égard. Il n’y a aucune raison pour laquelle ces travailleurs ne devraient pas pouvoir parler du processus de mise à pied ou d’un processus d’avancement équitable.
Ce sont des aspects des conventions collectives dont les syndicats de tout le pays se sont occupés depuis des décennies. Nous allons donc chercher à établir, au comité, pourquoi le gouvernement pense que l’agent négociateur ne devrait pas pouvoir discuter de ces éléments et avoir son mot à dire, simplement son mot à dire, quant à la façon dont ces aspects importants des relations de travail fonctionnent en pratique. Nous allons essayer de modifier le projet de loi à cet égard.
Je vais également aborder une question qui préoccupe les membres civils de la GRC qui travaillent en collaboration très étroite avec les agents. Ce sont les personnes qui apportent un soutien essentiel et très important aux agents de la GRC dans leurs activités quotidiennes. Elles font du travail scientifique et judiciaire. Les fonctions qu'elles exercent couvrent toute la gamme des activités policières, et elles travaillent en relations étroites avec les agents de la GRC sur le terrain.
Ce projet de loi confère au ministre du Conseil du Trésor le pouvoir autocratique de déterminer à quelle unité de négociation ces employés appartiendront, ce qui constitue également un empiètement inacceptable sur leur droit de choisir qui sera leur agent négociateur et la façon dont ils négocieront.
Comme je l’ai mentionné, la GRC est confrontée à des problèmes pressants dont un bon nombre l’ont placée dans une situation difficile. Je pense pouvoir parler au nom de tous les Canadiens en disant que la GRC a, derrière elle, une longue et fière tradition. Elle est connue depuis longtemps comme une des premières forces policières de notre pays et elle a une riche histoire pleine de triomphes, mais marquée aussi, il faut le reconnaître, par quelques tragédies. Toutefois, les problèmes que nous connaissons aujourd’hui en ce qui concerne la GRC, en tant que parlementaires, et auxquels la GRC doit elle-même remédier sont notamment les suivants.
Elle doit s’attaquer au problème de la supervision de la GRC et élaborer une structure qui rétablira la confiance du public afin que nous sachions que, lorsque des plaintes sont portées contre des agents de la GRC, un processus équitable, transparent et responsable permet de les examiner.
Il y a le problème occasionné par la décision du gouvernement de fermer les détachements d’un seul membre partout dans le pays, particulièrement dans les régions rurales. Ce n’est certainement pas la façon dont le Nouveau Parti démocratique veut voir évoluer la GRC. Nous croyons qu’il faudrait plutôt renforcer ces détachements. Le NPD estime en effet que la présence d’un seul agent dans une petite ville crée des conditions de travail inacceptables et peu sûres pour la personne en cause, mais la solution ne consiste pas à fermer le détachement et à laisser la collectivité sans service de police.
Les néo-démocrates ont appris des élus ruraux que certaines collectivités se trouvent à une heure et demie ou deux heures de route du service de police le plus proche. Qu’arrive-t-il quand il y a une urgence ou un cas de violence familiale? Qu’arrive-t-il dans des situations plus graves, quand il y a un meurtre ou une agression sexuelle? Le gouvernement se vante constamment des mesures qu’il prend pour combattre le crime, alors qu’en réalité, il est en train de fermer les détachements d’un seul membre, ce qui laissera des centaines de milliers de Canadiens à des distances de plus en plus grandes d’un service de police.
Il y a aussi le problème de l’épuisement, du stress et des troubles de stress post-traumatique auquel les agents de la GRC doivent faire face dans l’exercice de leurs fonctions. Ces gens doivent s’acquitter de tâches extrêmement difficiles pour nous protéger. Ils sont souvent les premiers à se rendre sur le théâtre d’accidents, qui sont parfois mortels. Ils doivent intervenir dans les cas de violence familiale, souvent en présence d’enfants. Ce sont eux qui doivent faire enquête sur des crimes épouvantables de nature sexuelle, dans lesquels des enfants sont parfois les victimes. Ce sont les gens qui risquent leur vie tous les jours pour nous préserver du danger. Les agents font tout cela. Nous devons les appuyer.
Il y a des problèmes de moral et, en ce moment, des problèmes de leadership et de style de gestion à la GRC. Il y a aussi le problème de l’utilisation du pistolet Taser. L’autre jour encore, nous avons appris qu’une autre personne est morte au Canada après avoir reçu des décharges de ces pistolets. Nous devons sérieusement envisager de limiter l’emploi de ces armes qui, de toute évidence, ne sont pas utilisées d’une manière appropriée à l’heure actuelle. Il y a aussi des problèmes de responsabilité, dont j’ai déjà parlé, et de surveillance civile.
Nous avons aussi des problèmes de prestation des services. J’ai rencontré récemment des représentants de la Fédération canadienne des municipalités. Ils m’ont dit que le gouvernement fédéral, d’allégeance conservatrice, s’était délesté sur les municipalités et les régions rurales, sans la moindre indemnisation, de responsabilités policières évaluées à 500 millions de dollars. On ne tient pas assez compte des besoins locaux en matière de police. Ces représentants m’ont dit être incapables d’amener la GRC à se charger de faire respecter les règlements municipaux parce qu’elle n’a ni le temps, ni les ressources nécessaires. Là encore, le gouvernement conservateur aime bien faire de la criminalité un enjeu politique et il se targue de sévir contre le crime avec sévérité, mais il ne joint pas le geste à la parole. Voilà ce que m’ont dit les représentants de la Fédération canadienne des municipalités.
Permettez-moi aussi de dire un mot du rôle des syndicats et de l’importance de ce rôle. Au cours des 30 dernières années, la classe moyenne et la classe des travailleurs au Canada ont été durement frappées surtout à cause des politiques conservatrices, à cause des politiques du gouvernement Mulroney que le Parti libéral a reconduites dans les années 1990. Au nom de politiques néolibérales, on a sabré les dépenses de l’État et on s’est délesté de certaines dépenses sur les provinces, ce qui a entraîné une dégradation des services publics au cours des 25 dernières années.
Voici les chiffres. La tranche de 1 p. 100 des Canadiens les plus riches, c’est-à-dire 246 000 Canadiens dont le revenu moyen s’élève à 405 000 $, s’est arrogé près du tiers, soit 32 p. 100, de la croissance des revenus entre 1987 et 2007. C’est une période pendant laquelle nous avons été dirigés par des gouvernements libéraux et conservateurs.
Depuis les années 1970, cette tranche de 1 p. 100 des Canadiens les plus riches a vu sa part du revenu total doubler. Si on considère le groupe de 0,1 p. 100 des plus riches, sa part a triplé. La part des Canadiens qui se situent dans le 0,01 p. 100 des plus riches a augmenté de plus de 500 p. 100. En 2009, 3,8 p. 100 des ménages canadiens contrôlaient des richesses financières de 1,78 billion de dollars, soit 67 p. 100 de toute la richesse au Canada. Voilà ce qui s’est passé sous la gouverne des conservateurs et des libéraux. Les riches se sont enrichis tandis que la classe moyenne et la classe des travailleurs s’appauvrissaient.
Voilà pourquoi la syndicalisation, qui a fait ses preuves comme moyen d’assurer aux travailleurs une plus juste part de l’économie au Canada, est si importante pour la GRC. C’est pour cette raison que les néo-démocrates continueront de défendre les droits de tous les travailleurs canadiens, y compris les employés de la GRC, de recourir à la négociation collective si tel est leur vœu, pour qu’ils aient leur mot à dire dans leur milieu de travail et négocient leurs conditions de travail, y compris leur rémunération, ce qui les aidera à se bâtir une vie meilleure pour eux et leur famille.
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Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que j'interviens dans le débat sur ce projet de loi qui me donne l'occasion de parler du travail extraordinaire des membres de la GRC. S'il y a un sujet sur lesquels tous les députés peuvent s'entendre, c'est bien sur le travail accompli par les agents de première ligne pour assurer la sécurité de nos communautés, mettant ainsi souvent leur propre vie en danger.
En tant que porte-parole du Parti libéral en matière de sécurité publique et nationale, j'ai eu l'occasion de visiter des détachements de la GRC un peu partout au pays et de rencontrer les gens qui y travaillent. Je suis toujours ébahi de voir le travail qu'ils font ainsi que la qualité de gens que nous attirons à la Gendarmerie.
À cet égard, je suis heureux de prendre part au débat et d'appuyer les points positifs du projet de loi. Je soulignerai également quelques faiblesses qui devront être examinées en comité.
Je dirai tout d'abord qu'il est important de se pencher sur les origines du projet de loi. Le député de , qui a pris la parole précédemment, a souligné que ce n'est pas d'hier que la GRC n'a pas le droit à la syndicalisation. Toutefois, il a omis de mentionner que jusqu'en 2008, ce n'était pas un problème.
Je me souviens du jour où le a promis aux membres de la GRC qu'ils auraient droit à la parité avec les autres services de police, ce qui signifie essentiellement qu'ils auraient droit à un salaire égal pour un travail égal. La question avait été soulevée en raison d'un grave problème de recrutement et de rétention des membres. Les membres étaient d'avis qu'ils avaient droit aux mêmes conditions que les autres services de police. Le premier ministre a donné sa parole en 2008. Il a serré la main des agents de la GRC présents et il a fait un discours sur l'importance de la parité.
Quelques mois plus tard, la promesse était rompue. Cet engagement a été balayé du revers de la main et les paroles prononcées, vite oubliées. Les membres de la GRC ont été abasourdis et désarçonnés et ils se sont sentis trahis. Bon nombre d'entre eux ont alors estimé que le temps était venu de réclamer le droit à la syndicalisation.
Tous les autres services de police canadiens ont droit à la négociation collective. On aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement accède aux désirs des membres de la GRC qui réclamaient la tenue d'un vote et le droit de décider pour eux-mêmes — qu'il reconnaisse leur droit démocratique de le faire. Toutefois, le gouvernement n'en a rien fait. Il leur a bloqué le chemin et la question a dû être soumise aux tribunaux.
En avril 2009, la Cour supérieure de l'Ontario a déclaré que l'article 96 du Règlement de la Gendarmerie royale du Canada contrevenait à la liberté d'association de la GRC en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Cette juridiction a déclaré que les membres de la GRC, au nombre de plus de 20 000, avaient bel et bien le droit, à l'instar des autres services de police, de décider d'entamer ou non des négociations collectives et d'être représentés par l'agent négociateur de leur choix.
Mais le gouvernement ne leur a certainement pas facilité la tâche. La GRC a dû se battre pour faire valoir ses droits après la trahision de 2008.
Et ensuite, on ne peut pas dire que le gouvernement se soit empressé de donner suite à la décision de la Cour supérieure de justice de l'Ontario. En effet, il a fallu attendre jusqu'au 17 juin 2010. Le gouvernement a mis plus d'un an avant de présenter cette mesure. Celle-ci a été présentée en juin mais nous commençons à peine le débat à l'étape de la deuxième lecture.
Les comités siègent en ce moment-même, et j'ai justement dû m'absenter quelques instants le temps d'intervenir à la Chambre. Le comité est en train de décider de l'opportunité d'entamer sur-le-champ l'examen article par article de la mesure sur la réhabilitation. Nous avons déjà étudié la première moitié de la mesure, le projet de loi , et nous nous attaquerons au projet de loi , mais le gouvernement nous reproche de ne pas l'adopter immédiatement.
Compte tenu de l'état du projet de loi, cependant, nous en sommes presque au point où un examen article par article s'impose. Le gouvernement lui-même a reconnu que le projet de loi laisse à désirer et nécessite certains amendements, qui n'ont pas encore été présentés, mais il prétend quand même que nous retardons son adoption.
Aucun travail n'a été fait sur ce projet de loi dont nous sommes saisis depuis juin. D'ailleurs, rien n'a vraiment été fait depuis la décision de la cour en avril 2009, mais les ministériels se permettent quand même de s'en prendre à moi et à d'autres députés en disant que n'étudions pas assez rapidement les projets de loi alors que nous essayons de travailler avec diligence au comité. De toute évidence, il ne s'agit pas d'une priorité pour le gouvernement; c'est pour cela que la question traîne encore.
Je vais parler de quelques mesures proposées dans le projet de loi et des mesures que nous appuyons. Je vais également parler rapidement de quelques faiblesses du projet de loi.
S'il est mis en oeuvre, le projet de loi permettra aux membres de la GRC de choisir s'ils veulent continuer à travailler dans un milieu non syndiqué ou de se syndiquer, auquel cas ils seraient représentés par un agent négociateur accrédité. S'ils se syndiquaient, les membres de la GRC n'auraient pas le droit de refuser d'offrir leurs services.
Le projet de loi accorde de nouveaux pouvoirs au commissaire de la GRC, notamment celui de nommer, de promouvoir, de prendre des mesures disciplinaires, de rétrograder ou de licencier les membres, y compris les officiers brevetés.
Le comité devra étudier en détail la portée de ces nouveaux pouvoirs et leur application. C'est un peu préoccupant. Sur le premier point, à savoir le choix de pouvoir se syndiquer ou non, ce droit devrait aller de soi, et les membres de la GRC n'auraient pas dû être obligés de se battre pour l'obtenir dans les dernières années.
Le projet de loi mettrait également en place un Comité consultatif sur la rémunération globale, lequel ferait des recommandations au sur l'ensemble de la rémunération des membres de la GRC qui ne sont pas représentés par un agent négociateur accrédité. Si les membres étaient syndiqués, cela s'appliquerait aux agents de la GRC, aux cadres et aux autres employés non représentés ou exclus de la GRC.
De plus, le projet de loi entraînerait la mise sur pied d'un comité de consultation sur les questions reliées au milieu de travail. Grâce à une série de comités consultatifs et de groupes de travail locaux, divisionnaires, régionaux et nationaux, les membres auraient l'occasion de communiquer leurs points de vue et leurs préoccupations directement aux gestionnaires, individuellement ou en groupe.
Le projet de loi conserverait l'actuel système de gestion informelle des conflits. En plus de la procédure officielle de règlement des griefs, le système continuerait d'offrir des options de résolution des conflits comme la médiation par l'entremise d'un tiers. Le recours à ces options aurait lieu sur une base volontaire, confidentielle et impartiale.
Le projet de loi confère au commissaire le pouvoir de mettre en oeuvre un système disciplinaire restructuré dont l'objectif serait de résoudre les questions de conduite de façon transparente, uniforme et rapide. Les membres de la GRC auraient le droit de renvoyer certaines décisions ou mesures de la gestion à la Commission des relations de travail de la fonction publique, un organisme impartial externe responsable de prendre les décisions.
En outre, le projet de loi propose que la Commission des relations de travail dans la fonction publique agisse à titre de tiers indépendant externe et qu'elle prenne des décisions finales et exécutoires au sujet de certaines questions disciplinaires et de certains griefs des membres de la GRC.
On réclame des changements depuis longtemps, les libéraux en réclament en tout cas, des changements très louables et dignes d'être appuyés. Il serait essentiel que le comité se penche sur certaines dispositions qui suscitent des préoccupations, les dispositions qui limiteraient l'admissibilité au rôle d'agent négociateur. Je ne connais pas les raisons qui justifient ces restrictions et je ne sais pas pourquoi on appliquerait de telles restrictions, mais il faudra qu'on nous l'explique. En tout cas, pour l'instant, cela semble contredire l'esprit de la décision rendue par la Cour supérieure de l'Ontario.
La mesure limiterait la discussion de certaines questions. Le fait qu'on limite la capacité de discuter de la classification, des mises à pied et des promotions me préoccupe. Il s'agit là de sujets de discussion qui font habituellement partie du processus des négociations collectives. Exclure ces sujets de discussion du processus me semble inhabituel. Cela irait à l'encontre de la tradition que respectent d'autres forces policières dans leur processus de négociations collectives. Il faudra qu'on fournisse des explications et que le comité étudie la question.
Quant à la disposition prévoyant que le président du Conseil du Trésor a le pouvoir de déterminer qui sera l'agent négociateur des membres civils, on ne nous a pas fourni de bonnes explications. De toute évidence, il y a des membres civils qui voudraient bien savoir pourquoi le gouvernement a ajouté cette disposition et pourquoi on conférerait un tel pouvoir au président du Conseil du Trésor. Cela les préoccupe. C'est une autre question que le comité devra examiner.
Par ailleurs, je m'inquiète aussi des pouvoirs additionnels conférés au commissaire. Il est nécessaire qu'on nous fournisse des explications plus complètes à cet égard. Ces pouvoirs suscitent des préoccupations, étant donné ce qu'on a entendu dire au sujet de ce qui se passait au sein de la GRC, du chef de l'organisation, de la déficience de la structure au sommet de l'organisation.
À cet égard, puisque cela a des incidences sur la question générale du moral des troupes, du recrutement et de la rétention des employés, il y a lieu de discuter d'autres choses qui se passent au sein de la force policière. Je vais d'abord parler de celles sur lesquelles l'élargissement des pouvoirs du commissaire de la GRC aura une incidence directe.
Commençons par la commission d'enquête menée par le juge O'Connor dans le cadre de laquelle il a conclu que les mécanismes de surveillance dont disposait la GRC étaient totalement inadéquats. À titre d'exemple, le commissaire des plaintes du public contre la GRC n'était pas autorisé à prendre l'initiative d'une enquête lorsque les choses tournaient mal. Il n'était pas habilité à obliger les gens à lui fournir des renseignements, lesquels ne pouvaient lui être donnés que volontairement.
De plus, comme nombre des opérations menées par la GRC — en particulier les opérations en matière de renseignements et de sécurité — font intervenir plusieurs ministères, il n'y a aucun moyen d'assurer le suivi. Si quelque événement survient au sein de la GRC, comme il n'y a aucun moyen de savoir ce qui s'est produit au ministère de l'Immigration ou à l'Agence des services frontaliers du Canada, tout se fait en vase clos.
L'idée d'accorder des pouvoirs supplémentaires au commissaire de la GRC en l'absence d'un mécanisme de surveillance adéquat est, à mon avis, extrêmement inquiétante. Si le rapport du juge O'Connor était récent, on pourrait pardonner au gouvernement de ne pas le mettre en oeuvre. Mais ce rapport a été déposé il y a près de cinq ans déjà. Et même si le gouvernement a dit approuver les conclusions du juge, à savoir que les recommandations devaient être mises en oeuvre immédiatement, le rapport dort toujours sur les tablettes, et aucune mesure n'est prise.
Tout cela est particulièrement inquiétant étant donné la façon dont les choses ont tourné pour M. Arar et ce qu'il a dû endurer dans une prison syrienne.
La même chose s'est produite dans les cas de M. Almalki, de M. Abou-Elmaati et de M. Nureddin. Dans son rapport, le juge Iacobucci réclamé lui aussi la mise en place de ces réformes et de ce mécanisme de surveillance.
D'autres députés et moi étions assis dans une pièce où se trouvait une réplique de la cellule dans laquelle ces messieurs avaient été enfermés. Ceux-ci ont raconté qu'ils entendaient les bruits de pas et qu'ils se demandaient quand on viendrait les chercher dans leur cellule pour les torturer. Compte tenu que la détention et la torture étaient fondamentalement inacceptables au sein du système de renseignement au Canada, nous aurions cru que le gouvernement s'efforcerait de corriger la situation sans tarder, afin d'éviter toute répétition des circonstances et des séances de torture dont ces hommes ont été victimes. Or, nous sommes encore une fois saisis d'une mesure législative qui accorde de nouveaux pouvoirs au commissaire, sans le moindre contrôle.
Je rappelle que Paul Kennedy, qui était le commissaire des plaintes du public contre la GRC, avait aussi fait état du besoin urgent de réforme au sein de sa commission. Il a parlé de l'importance de certains de ces changements et d'un mécanisme de surveillance. Évidemment, comme tous ceux qui critiquent le gouvernement, M. Kennedy a été congédié. Il est évident que son mandat n'a pas été renouvelé parce qu'il formulait des critiques, parce qu'il montrait ce qu'il fallait changer, ce qu'il fallait faire. Le gouvernement s'est débarrassé de lui et c'est vraiment très malheureux, parce que cette personne accomplissait un travail remarquable.
Qui a remplacé M. Kennedy? C'est un avocat spécialisé dans les testaments et les successions qui a versé de très nombreuses contributions au Parti conservateur. Nous ne l'avons pas entendu depuis sa nomination et j'ai bien l'impression que nous ne l'entendrons jamais.
M. Kennedy, quant à lui, prenait la parole presque à toutes les semaines pour parler des changements qui s'imposaient au sein de la GRC. Pourtant, nous n'entendons pratiquement jamais le nouveau commissaire qui, compte tenu de ses antécédents et de ses liens avec le Parti conservateur, est sans doute exactement la personne que le gouvernement souhaitait avoir en poste.
Malheureusement, lorsque des voix indépendantes qui nous éclairent sur certains dossiers inconnus, qui nous donnent l'occasion de connaître la vérité et de savoir ce qui se passe, sont réduites au silence, c'est tout le processus qui est miné. Franchement, il est choquant de voir le gouvernement demander que l'on accorde encore plus de pouvoirs au commissaire, sans la mise en place de mécanismes de surveillance.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier le travail accompli dans le rapport Brown, suite au scandale de la caisse de retraite de la GRC. Dans son rapport, M. Brown disait que des changements structurels importants étaient nécessaires au sein de la GRC en tant qu'organisme. M. Brown a donné deux ans au gouvernement. Il a dit que cet échéancier était serré, mais que les changements proposés pouvaient être apportés dans ce laps de temps. Or, le gouvernement n'a rien fait. Il n'a pas donné suite à un seul des changements proposés par M. Brown. Même s'il s'est dit d'accord avec ces changements, le gouvernement ne les a pas mis en oeuvre. En fait, cela fait environ six mois que le délai de deux ans accordé pour effectuer les changements a expiré.
Il n'est donc pas surprenant, quand nous tenons compte de ces faits, qu'on observe des problèmes de moral au sein de la GRC. Ces personnes courageuses, qui travaillent en première ligne, demandent pourquoi ces changements ne se produisent pas. Elles demandent pourquoi il n'y a pas de réforme dans les échelons supérieurs de l'organisation et pourquoi le gouvernement ignore constamment les recommandations des commissions et des enquêtes.
Le Comité de la sécurité publique a formulé de nombreuses recommandations à cet égard, mais le gouvernement n'en tient pas compte non plus. Il dit qu'il va y donner suite, mais il ne le fait pas.
Nous savons également que M. Kennedy a parlé clairement de la nécessité de prendre des mesures en ce qui concerne les armes à impulsions. Une grande partie des leçons qu'on trouve dans le rapport qu'il a présenté sur le décès de M. Dziekanski n'ont pas été appliquées. On n'a pas mis en oeuvre la plupart de ses recommandations, y compris des recommandations très simples comme fournir des lignes directrices et des consignes concernant l'utilisation des armes à impulsions.
Dans le cas de M. Dziekanski, par exemple, qui s'est fait tirer dessus à plusieurs reprises, la deuxième et troisième fois alors qu'il était déjà maîtrisé et qu'il se tordait de douleur sur le plancher, une recommandation simple consisterait à arrêter de tirer sur une personne lorsqu'elle a été neutralisée. Cela semble être une mesure relativement simple à prendre. Pourtant, on ne l'a pas fait.
Nous savons également que les armes à impulsion doivent clairement être incluses dans l'entraînement des membres de la GRC à la division Dépôt, pourtant, cela ne se fait pas. En ce moment, les armes à impulsion ne font pas partie des cours donnés à cette division. L'utilisation des armes à feu, de la matraque et du vaporisateur de poivre est enseignée, mais pas l'utilisation du pistolet à impulsion ni à quel moment les policiers doivent y avoir recours.
Lorsque je réfléchis au désir manifeste de changement exprimé, je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement s'obstine à ne pas apporter ces changements dont la nécessité tombe sous le sens.
Beaucoup de membres de la GRC me demandent pourquoi toutes ces choses qui tombent sous le sens ne sont pas faites en dépit des rapports très opportuns qui présentent des recommandations claires et concises et précisent comment la mise en oeuvre devrait se faire.
La dernière excuse entendue, lorsqu'on se donne la peine d'en donner une, c'est qu'ils attendaient le rapport du juge Major sur Air India. Après le dépôt de ce rapport, il y a sept ou huit mois, on espérait sincèrement que toutes ces choses en suspens depuis toujours seraient finalement faites.
Hélas, la semaine dernière, le gouvernement a déposé son soi-disant Plan d'action de la Commission d'enquête sur l'affaire Air India, et ce dernier ne prévoit aucune action. Plutôt que d'amorcer les progrès à l'égard de toutes ces questions laissées en suspens depuis des lunes, le document offre de vagues énoncés généraux et ambitieux auxquels on aurait pu s'attendre le lendemain de la publication du rapport du juge Major. Toujours pas le moindre progrès au chapitre de la surveillance.
Dans le cas du rapport du juge Major, qui aborde plusieurs nouveaux aspects, notamment la désignation d'un dirigeant de l'antiterrorisme afin de frayer un passage entre les divers cloisonnements administratifs à cet égard, les familles des victimes du vol d'Air India ont dû attendre tout ce temps pour finalement se faire dire par le gouvernement, six mois après que celui-ci se soit engagé à en accepter les recommandations, qu'en fin de compte il les rejette. Tant pis pour eux.
Pour ce qui est du versement d'une indemnisation à ces familles, c'est bien dommage. Attendez, leur dit-on, et peut-être un jour aurez-vous des nouvelles du gouvernement.
Si l'on prend l'exemple du rapport du juge O'Connor, voilà cinq ans qu'il a été publié et nous attendons toujours. Je me demande si les familles des victimes du vol d'Air India poseront les mêmes questions que la famille de M. Arar cinq ans plus tard, ou les familles de MM. Abou-Emaati, Almalki ou Nureddin.
En conclusion, je crois qu'il est important que nous laissions aux membres de la GRC le soin de décider si oui ou non ils souhaitent se syndiquer.
Le projet de loi doit être renvoyé au comité. Il comporte quelques faiblesses. Toutefois, par égard pour la GRC, ce symbole national qui a désespérément besoin de renouveau, et comme les Canadiens implorent le gouvernement d'apporter des changements qui rendront service à l'organisme, j'exhorte le gouvernement à passer à l'action à l'égard de ce qui lui est demandé et à prendre les mesures qui s'imposent, non seulement par rapport à cette question mais également par rapport à tous les dossiers en suspens.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi . N'eût été la décision d’un tribunal de l'Ontario l'an dernier, on ne parlerait pas aujourd’hui de cette question en Chambre, d’autant plus que le gouvernement s'y oppose d'ailleurs depuis un certain temps.
Il s'agit ici de donner aux membres de la GRC le droit de créer, s'ils le désirent, le syndicat de leur choix. C'est une question dont on parle depuis un certain nombre d'années, et les gouvernements, qu'ils soient libéraux ou conservateurs, n'ont guère fait d'efforts pour faciliter la chose.
En fin de compte, les membres de la GRC ont décidé d'en saisir le tribunal, ce qui leur a coûté beaucoup de temps et d'argent. Lorsque ce dernier leur a donné gain de cause, le gouvernement s'est empressé de présenter un projet de loi qui, à première vue, leur retire certains des droits qu'ils cherchaient à obtenir au départ en s'adressant au tribunal.
Les membres de la GRC veulent pouvoir choisir leur propre agent négociateur. Or, le projet de loi stipule que seul un agent négociateur représentant principalement des employés dans le domaine du maintien de l'ordre peut être accrédité comme syndicat reconnu d'agents de la GRC. Pour le simple profane, ça peut tomber sous le sens, mais en pratique, cela constitue une restriction fondamentale aux droits des travailleurs de choisir leur agent négociateur.
C'est le même problème en ce qui concerne les employés civils. La GRC compte actuellement 24 000 membres, dont 3 000 ou 4 000 seraient des employés civils, d'après ce que le ministre a déclaré aujourd'hui. Eux non plus n'avaient sans doute pas envisagé, lorsqu'ils ont pris la décision de s'adresser aux tribunaux, que leurs droits seraient limités de cette façon. C'est le Conseil du Trésor qui va décider de leur sort.
Le gouvernement conservateur savait depuis plusieurs années que l'affaire était devant les tribunaux. Il savait qu'il risquait d'en sortir perdant, et c'est ce qui est arrivé. Le gouvernement a perdu cette cause, et il a été obligé, par ordonnance du tribunal, de présenter ce projet de loi.
Le gouvernement aurait pu rapidement consulter les membres de la GRC avant de présenter ce projet de loi à la Chambre. Il aurait pu demander aux employés civils leur opinion, plutôt que de se contenter de présenter un projet de loi en prétendant qu'il n'a pas pu consulter les personnes concernées à cause de l'ordonnance du tribunal et que, par conséquent, la consultation n'aurait lieu qu'à l'étape de l'étude en comité.
Le NPD a accepté d'appuyer ce projet de loi pour qu'un comité en soit saisi. Mais il reste maintenant aux employés civils qui m'ont contacté à accomplir toutes les formalités nécessaires pour se faire représenter devant le comité.
Nous savons tous que les comités du Parlement fédéral ne fonctionnent pas de la même façon que ceux de l'assemblée provinciale du Manitoba, que je connais bien, où tout le monde peut venir témoigner. Chez nous, du moment qu'un individu connaît le projet de loi dont il veut parler, il lui suffit de se présenter au moment où le comité se réunit, même si c’est à la dernière minute et même s'ils sont une centaine comme lui à le faire, et il a droit à 10 minutes pour dire ce qu'il a à dire et répondre aux questions. C'est comme ça que nous procédons.
Mais au Parlement fédéral, le comité se réunit à Ottawa. Les membres de la GRC qui habitent à l'extérieur sont-ils censés payer eux-mêmes leurs frais de déplacement pour se rendre à Ottawa et témoigner devant le comité ? Ici, les comités ne fonctionnent pas de la même façon que les comités de ma province. Chez moi, les comités acceptent d'entendre n'importe qui, que ce soit des spécialistes dans le domaine ou de simples citoyens qui se présentent à l'improviste. Ici, c'est un environnement complètement différent.
Ces gens-là ne seront pas invités à témoigner devant le comité s'ils ne sont pas des spécialistes reconnus. C'est en tout cas ce que j'ai constaté avec la déclaration des droits des passagers des lignes aériennes et les autres projets de loi auxquels je me suis intéressé. À Ottawa, le processus est très sélectif.
Je ne suis pas du tout satisfait de la façon dont les choses se déroulent, car j'estime que les employés civils qui m'ont contacté ont tout à fait raison. Ils n'ont pas été consultés avant la rédaction du projet de loi. Nous avons beau leur dire qu'ils auront la chance de témoigner devant un comité, nous savons très bien ce que cela veut dire. Nous savons très bien qu'ils ne seront pas invités par le comité parce que les audiences de ce dernier sont très restreintes, qu’il ne siégera que pendant quelques jours, et qu’il voudra donc entendre des spécialistes de la question.
Cela ne veut pas dire pour autant qu’on n’en parlera pas. Le comité convoquera des spécialistes, et on peut espérer que les employés civils qui sont en contact avec moi seront satisfaits. Il n'en reste pas moins qu'on aurait dû leur faciliter les choses s'ils voulaient témoigner devant le comité.
J'aimerais faire lecture du courriel que m'a envoyé Mme Deneene Curry, de l'avenue Edward, à Transcona, dans ma circonscription. Elle fait partie des employés civils de la GRC qui seront touchés par le projet de loi. Elle me fait part de ses préoccupations au sujet du projet de loi, mais ce sont des préoccupations qu'on aurait certainement pu dissiper si on l'avait consultée avant la présentation du projet de loi.
Elle dit que selon un certain alinéa 20(1)a), des postes d'employés civils risqueront d'être convertis en postes de la fonction publique, et que ce sera le Conseil du Trésor, comme nous l'avons dit, qui déterminera en dernier ressort la catégorie d'un employé au sein de la GRC. Ce qui la préoccupe, c'est que nulle part il n'est question de donner aux employés civils le droit de voter collectivement sur la question ou de décider de leur statut futur.
Je croyais qu'on voulait donner aux membres de la GRC la liberté de décider librement s'ils voulaient se syndiquer et, le cas échéant, auprès de quel syndicat.
Ce n'est pas du tout ce qui est prévu ici. On a l'impression que tout est déjà décidé. S'agissant des employés civils, il semblerait que c'est le Conseil du Trésor qui décidera qui peut les représenter, et s'agissant des agents de police eux-mêmes, ce sera la loi qui le décidera.
J'invite le député de à faire preuve de patience et à m'écouter. Dans tous les groupes de la société canadienne, chaque fois qu'il est question de représentation syndicale, les travailleurs de n'importe quelle province peuvent décider de changer de représentant ou de changer de syndicat. Or, ça ne semble même pas envisagé ici. De la même façon que l'association syndicale traitait leurs préoccupations depuis plusieurs décennies, les membres de la GRC se font imposer aujourd'hui par le gouvernement quels seront leurs représentants et, s'ils ne sont pas contents, je ne vois vraiment pas ce qu'ils pourront faire d'autre.
Nous savons que la GRC, qui compte 24 000 membres, est la seule force policière à ne pas avoir de représentation syndicale, alors qu'elle le réclame. Je crois qu'au Canada, toutes les forces policières de plus de 50 membres ont une représentation syndicale. Le député de le sait peut-être.
Mme Curry ajoute que les employés civils sont considérés comme des experts dans leur domaine, et qu'ils ont une formation et des compétences spécialisées qui sont uniques à la GRC. Ils sont tenus de travailler à des heures variables, souvent à bref préavis, en raison des impératifs des enquêtes et des tribunaux, et ils peuvent être mutés ou envoyés en mission en cas d'urgence, de catastrophe ou d'événements spéciaux comme les Jeux olympiques et le G8, ou encore appelés à combler un manque de personnel. Selon elle, cela ne sera peut-être plus le cas si les employés civils deviennent obligatoirement des fonctionnaires.
Elle précise que les employés civils sont assermentés en qualité de membres de la GRC et qu'ils sont par conséquent assujettis aux mêmes normes, attentes, règlements, habilitations sécuritaires et restrictions de congé que les membres ordinaires de la GRC. Pour toutes ces raisons, il est souvent difficile de recruter des personnes qualifiées pour remplacer ces employés civils, qui préfèrent souvent accepter le poste d'employé civil qui leur est offert plutôt qu'un autre pour lequel ils se sont qualifiés dans une autre organisation, parce qu'ils sont fiers d'appartenir à la GRC et d'offrir leurs compétences à cette organisation. S'ils deviennent fonctionnaires, beaucoup d'entre eux iront certainement chercher du travail à l'extérieur de la GRC, ce qui entraînera la disparition de ressources précieuses et nuira grandement aux enquêtes criminelles en cours.
Elle est inquiète, à juste titre je pense, mais si le gouvernement avait fait l'effort de consulter des gens comme elle avant de présenter son projet de loi, elle ne serait pas, comme d'autres, en train de m'envoyer des courriels à ce sujet. Je suis sûr que je ne suis pas le seul député à recevoir des commentaires sur la question. Nous allons l’informer que le comité va organiser des audiences et lui conseiller de contacter le plus rapidement possible le greffier du comité pour avoir une chance de figurer sur la liste des témoins.
J'ai lu un peu sur la GRC, et j'ai trouvé des faits très intéressants. Très petite au départ, cette organisation s'est peu à peu développée pour finir par compter 24 000 membres et jouer un rôle très important dans notre pays. Mais comme n'importe quelle organisation qui se développe et atteint un tel effectif, de nouveaux problèmes se posent, compte tenu du rôle et du mandat de la GRC.
La GRC agit également sur la scène internationale. Elle a été déployée dans le cadre de missions de l'ONU en Namibie, dans l'ex-Yougoslavie, en Haïti, en Afrique du Sud, au Rwanda, en Bosnie, en Sierra Leone, au Guatemala, au Sahara-Occidental, aux Pays-Bas, en Croatie, au Kosovo et au Timor-Oriental. Lors de ces missions, la GRC ne jouait pas le rôle d'une force officielle de maintien de la paix mais plutôt celui d'une police civile temporaire.
La GRC joue un rôle considérable. Je pourrais décrire tous les autres rôles qui lui incombent. Partout où il n'y a pas de force policière locale, c'est elle qui assume cette responsabilité.
L'organisation a un riche passé, et elle jouit au Canada d'un grand respect depuis plusieurs décennies. En revanche, les nombreux problèmes qui se sont posés au cours des six dernières années sont le signe de grandes difficultés internes. Nous avons entendu parler d'employés stressés et démoralisés, et de toute l’affaire du pistolet Taser. Le public en est arrivé à se poser des questions. Au début, les gens se disaient qu'avec une organisation de cette taille et de cette complexité, il était normal d'avoir quelques problèmes. Mais lorsque ces problèmes se sont multipliés, récemment, les gens en sont arrivés à la conclusion qu'il était temps de faire des changements, et pour le coup, c'en est un.
Peut-être que le gouvernement ne voit pas ce changement d'un bon œil, et qu'il redoute d'avoir une police syndiquée. Toutefois, dans la situation actuelle, quand on a une organisation de 24 000 membres qui fait face à des problèmes aussi divers et aussi complexes, il serait très utile, je pense, ne serait-ce que pour améliorer le moral et réduire le stress des employés, que les membres puissent se syndiquer et aient la liberté de choisir leur syndicat.
Le gros problème à l'heure actuelle, c'est qu'il ne semble pas y avoir, au sein de l'organisation, de mécanisme qui permette vraiment aux gens de s'exprimer. Pendant toutes les années où il y a eu une association syndicale à la GRC, les agents de police hésitaient beaucoup à exprimer leurs préoccupations, de crainte d'être privés d'une promotion, d'être accusés de faire bande à part, ou de subir des représailles de leurs supérieurs.
En leur permettant de constituer leur propre syndicat, il faut espérer que cela atténuerait certains de ces problèmes. Mais finalement, nous ne sommes même pas sûrs à 100 p. 100 qu'ils choisiraient de constituer leur propre syndicat, car j'entends dire qu'on pratique beaucoup l'intimidation.
Je ne sais pas s’il me reste du temps, mais je sais que je n'en ai jamais assez.
M. Brian Jean: C’est à nous.
M. Jim Maloway: Je remercie le député. Je suppose que nous ne sommes qu'à quelques jours de l'annonce des élections, et que nous espérons tous être réélus.
Le projet de loi va être renvoyé au comité, où nous, néo-démocrates, tenterons de faire adopter les amendements requis pour dissiper nos préoccupations. J'ai d'ailleurs fait mention de l'une d'elles tout à l'heure, lorsque je faisais remarquer que les membres de la GRC n'auraient pas le choix de l'agent de négociation qui les représenterait.
Nous voudrions également apporter un amendement portant sur les limitations quant aux sujets qui pourront être abordés à la table de négociation, dont certains font partie intégrante de tout bon contrat de travail, comme les pensions. C'est l'un des sujets sur lesquels nous nous pencherons au comité.
J'ai également parlé des membres civils. Nous y reviendrons aussi au comité.
Je regrette seulement de ne pas pouvoir faire le très intéressant historique de la GRC ni relater les expéditions que ses agents faisaient dans l'Ouest, aux premiers jours de l'organisation, afin de régler certains problèmes particuliers au fort Whoop-Up.