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AGRI Rapport du Comité

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Opinion dissidente : Cultivons l’avenir 2

Nouveau Parti démocratique du Canada

Bien que nous apprécions le contenu et la plupart des témoignages identifiés dans le rapport du Comité sur Cultivons l’avenir II, nous croyons dans sa forme actuelle de ce rapport, plusieurs problèmes flagrants subsiste dans le rapport. Il ne reflète pas suffisamment les éléments importants soulevés par les nombreux témoins qui ont exprimé leurs préoccupations devant le comité. Le rapport ne tient pas adéquatement compte de certains des besoins les plus sérieux auxquels est confronté le secteur agricole et agroalimentaire canadien et ne met pas suffisamment l’accent sur le soutien dont auront besoin les agriculteurs, les détaillants et les consommateurs dans les années à venir.    

Nous approuvons les recommandations relatives au soutien de la gestion des approvisionnements dans le cadre des futures négociations commerciales.

Afin de préparer le terrain pour le développement d’un secteur agricole et agroalimentaire solide, le NPD a présenté une série additionnelle de recommandations :

  1. Commencer l’élaboration immédiate d’une stratégie alimentaire pancanadienne
  2. Établir une gestion de rendement transparente et efficace des programmes de gestion des risques de l’entreprise 
  3. Contrer la détérioration des ressources visant à assurer la salubrité des aliments
  4. Renforcer la recherche publique et assurer le financement stable à long terme en matière d’innovation agricole
  5. Évaluer et répondre aux besoins régionaux des secteurs agricoles et agroalimentaires
  6. Adopter une approche prudente en matière de gestion des risques relativement à l’utilisation de la biotechnologie
  7. Assurer le bien-être animal et répondre à la demande des consommateurs pour de meilleures conditions d’élevage
  8. Enquêter sur la concentration dans les marchés de détail et de distribution
  9. Encourager le développement du secteur coopératif

Ce rapport dissident présente ces recommandations en ordre de priorité.

Recommandation 1 : Commencer l’élaboration immédiate d’une stratégie alimentaire pancanadienne

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada facilite le développement d’une stratégie alimentaire pancanadienne et qu’il initie des discussions sur les liens entre cette stratégie et Cultivons l’avenir II. (OU de l’inclusion de la stratégie dans Cultivons l’avenir II)

Le Canada a besoin d’une stratégie alimentaire pancanadienne qui renforce la production alimentaire locale et bâtit des liens entre les consommateurs, les détaillants, les institutions publiques et les producteurs. Une telle stratégie représenterait également une opportunité de réduire les barrières d’entrée pour les nouveaux agriculteurs et restaurer le système canadien de sécurité alimentaire. Cultivons l’avenir II est défini comme étant un « accord multilatéral […] pour l’agriculture au Canada » (site web d’Agriculture et Agroalimentaire Canada) et il est ainsi approprié que la stratégie alimentaire pancanadienne fasse partie de son mandat :

« Le programme Cultivons l'avenir 2 marquera une évolution par rapport aux anciens cadres et visera à aider le secteur à se positionner pour répondre aux possibilités futures et aux défis à relever, et créera les conditions qui favoriseront la compétitivité, la durabilité et l'adaptabilité à long terme en mettant l'accent sur la capacité et l'autonomie de l'industrie. » (site Internet d’Agriculture et Agroalimentaire Canada)

Malgré l’inclusion de la Stratégie nationale sur les exploitations agricoles et les entreprises agroalimentaires dans leur plus récente plateforme, et en dépit des nombreux témoignages entendus de la part de plusieurs témoins au sujet du rôle important qu’a le gouvernement fédéral en tant que facilitateur d’une telle stratégie,  ce comité en est venu à la conclusion de ne pas recommander l’inclusion de ce processus dans Cultivons l’avenir II : 

« En outre, pour assurer l’efficacité optimale des efforts déployés pour aider les agriculteurs, nous allons développer une Stratégie nationale sur l’agriculture et l’agroalimentaire afin d’orienter la politique fédérale au cours des années à venir. La Stratégie reposera sur les efforts que nous déployons pour soutenir les fermes familiales, améliorer la salubrité des aliments et ouvrir de nouveaux marchés pour les produits agricoles canadiens de classe mondiale. » (Plateforme du Parti conservateur 2011)

Il est dommage que cette promesse de campagne n’ait pas été respectée. Étant donné que plusieurs autres pays de l’OCDE ont adopté des stratégies alimentaires, notamment la Grande-Bretagne, l’Écosse, l’Australie et l’Irlande, le Canada accuse du retard. De plus, bon nombre d’organisations canadiennes ont élaboré des stratégies alimentaires nationales qui devraient être étudiées par le Comité. Ces organisations incluent Sécurité alimentaire Canada (Pour une politique alimentaire populaire), la Fédération canadienne de l’agriculture, le Conference Board du Canada et l’Institut canadien des politiques agroalimentaire. Qui plus est, le NPD a commencé à élaborer une stratégie alimentaire pancanadienne (La nourriture de l’esprit — Vers l’adoption d’une stratégie alimentaire canadienne).

Recommandation 2 : Établir une gestion de rendement transparente et efficace des programmes de gestion des risques de l’entreprise 

Étant donné le fait que la recommandation 15 décrit les éléments critiques d’opportunité et de transparence dans les programmes de gestion des risques de l’entreprise, le ministère devrait instaurer la tenue obligatoire d’un examen semi-annuel afin de garantir que le ministère respecte ses engagements en matière d’amélioration de la gestion de ce type de programmes et que le programme atteint ses objectifs opérationnels.

Plusieurs témoins ont exprimé le fait que les préoccupations principales à l’égard de la mise en œuvre de la gestion des risques de l’entreprise sont relatives au manque de prévisibilité et aux délais lorsqu’il est question des paiements. Les conclusions du chapitre 3 du rapport du vérificateur général de l’autonome 2011 (Les paiements versés aux producteurs — Agriculture et Agroalimentaire Canada) ont confirmé plusieurs de ces préoccupations :

Le rapport du vérificateur général recommande au point 3.46 :

Agriculture et Agroalimentaire Canada devrait analyser le traitement des paiements au titre d’Agri-stabilité et d’Agri-investissement de manière plus systématique et assurer le suivi des mesures correctives prises pour améliorer le versement en temps opportun des paiements destines aux producteurs.  

Le ministère a exprimé son accord et s’est engagé à mettre en œuvre pleinement cette recommandation d’ici avril 2013.

AAC examinera plus attentivement la conception des programmes de soutien du revenu dans les discussions liées à l’initiative Cultivons l’avenir 2, et il analysera ses procédures de paiement afin d’accélérer le traitement des demandes. À cet égard, la mise en œuvre récente d’une nouvelle version du système de traitement des demandes offrira à AAC la capacité de générer de façon plus systématique des rapports sur le traitement de ces demandes. Le Ministère aura recours à cette capacité pour accélérer les versements faits aux producteurs. Cette recommandation sera mise en œuvre dans son intégralité en avril 2013 avec l’initiative Cultivons l’avenir 2.

Nous nous félicitons du fait que la recommandation 15 aborde ces questions, mais nous croyons qu’elle ne va pas suffisamment en profondeur pour assurer que l’examen du rendement se fasse en temps opportun. Étant donné que ces programmes représentent un gagne-pain déterminant pour les agriculteurs, ils devraient faire l’objet d’un examen semi-annuellement afin de résoudre les problèmes éventuels qui pourraient surgir au niveau de la mise en œuvre et garantir que les ressources sont dirigées en conséquence.     

Recommandation 3 : Contrer la détérioration des ressources visant à assurer la salubrité des aliments

Que le ministère garantisse une augmentation des ressources destinées aux inspections de la salubrité des aliments et adopte immédiatement les principales recommandations du rapport de l’enquêteure indépendante sur l’éclosion de listériose de 2008.

Étant donné les récentes compressions infligées à l’Agence canadienne d’inspection des aliments, les néo-démocrates sont profondément préoccupés par les risques encourus pour la santé des Canadiens. Le ministère devrait cesser immédiatement toute élimination de postes d’inspecteurs de première ligne et augmenter les ressources afin d’assurer le maintien de la qualité des aliments canadiens. Le rapport de l’enquêteure indépendante sur l’éclosion de listériose de 2008 comprenait 57 recommandations, dont la plupart n’ont pas été adéquatement considérées ou adoptées par le ministère.   

Les témoignages entendus par le Comité mettaient l’accent sur le besoin d’inspecter plus en profondeur les importations de substances alimentaires :

« En ce qui a trait à l’inspection et à l’évaluation des aliments importés, le comité a été amené à croire que les règles étaient les mêmes pour les importations et les exportations, que les producteurs canadiens luttaient à armes égales, et que tout était géré de façon équitable. Or, rien n’est plus faux. Bien qu’il existe un ensemble de règles, on ne l’applique pas de la même façon. On accorde toujours la priorité à l’inspection des aliments exportés, car si on ne le fait pas, il n’y aura pas d’exportation. C’est plutôt discrétionnaire dans le cas des importations. Je dirais qu’on inspecte 100 p. 100 des exportations par rapport à 2 p. 100 des importations. » (Bob Kingston, président national, Syndicat de l’agriculture, Témoignages, 1re session, 41e législature, 15 février 2012)

L’Association médicale canadienne a mis en garde les Canadiens de « manger à leurs propres risques. » En faisant référence à l’éclosion de listériose, elle a souligné des erreurs flagrantes dans la politique fédérale : « les erreurs de politiques du gouvernement ont contribué à l’apparition de cette épidémie…l’épidémie de listériose nous rappelle que le gouvernement de M. Harper a annulé la plupart des progrès accomplis par les gouvernements précédents en ce qui a trait à la gouvernance de la santé publique. … Et la listériose est probablement l’élément le moins important. » [Traduction] (Journal de l’Association médicale canadienne, éditorial, 7 octobre 2008). Étant donné ces avertissements répétés, le temps est venu pour le ministère d’assurer le niveau de préparation le plus élevé relativement à toute urgence dans le système alimentaire et que les lacunes dans le système actuel d’inspection de la salubrité des aliments soient comblées. 

Recommandation 4 : Renforcer la recherche publique et assurer le financement stable à long terme en matière d’innovation agricole

Le financement dédié à la science et à l’innovation et offert par Agriculture et Agroalimentaire Canada devrait être maintenu à des niveaux suffisants en termes financiers, de la qualité de l’offre et de la durée prévue afin d’assurer que nos institutions publiques s’adonnent à de la recherche de classe mondiale, et devrait être régi afin de contrôler et résoudre les conflits d’intérêts potentiels dans la recherche et la commercialisation.  

Présentement, le manque de prévisibilité en matière de financement a des répercussions sur les activités de recherche. Les fonds dédiés à la recherche fournis par l’industrie peuvent avoir une portée limitée et répondent parfois aux besoins spécifiques des intérêts individuels d’une entreprise. Il est évident que la recherche publique est essentielle pour combler les lacunes qui ne peuvent pas être comblées par l’industrie.

Le rapport du printemps 2012 du vérificateur général a relevé des domaines clés sur lesquels se concentrer afin d’accroître la capacité de recherche à AAC. Le rapport mettait le doigt sur le manque de documentation adéquate et de financement prévisible, de même que sur la mauvaise utilisation de capitaux. Ceci est inacceptable.   

Un grand nombre de témoignages a confirmé le besoin d’avoir du financement à long terme et plus stable :

« Je veux souligner les messages contenus dans le document au sujet de l’importance de l’innovation pour améliorer la compétitivité du secteur et atteindre la durabilité. Il est important de favoriser une collaboration entre le secteur public et le secteur privé, et de pouvoir compter sur un financement constant pour la recherche et le développement. » (K. Peter Pauls, professeur et président, département de l’agriculture végétale, Témoignages, 1re session, 41e législature, 25 octobre 2012)

« ...Troisièmement, nous encourageons l’élaboration de programmes pour les problèmes en émergence qui ne sont pas restreints par l’échéancier de cinq ans. » (K. Peter Pauls, professeur et président, département de l’agriculture végétale, Témoignages, 1re session de témoignages, 41e législature, 25 octobre 2012)

« Deuxièmement, nous commençons à viser plutôt le court terme. Par le passé, nous avions des horizons de planification de 7 à 10 ans; nos horizons se limitent maintenant à une ou deux années. Notre principal concurrent à bien des égards est l’Australie. Ce pays s’est inspiré de notre programme de centres d’excellence et l’a intégré dans l’ensemble de son système agroalimentaire par l’entremise du GRDC. Je crois que nous devrions examiner de nouveau nos horizons dans le domaine. » (Peter W.B. Phillips, professeur, École supérieure de politique publique Johnson-Shoyama, Témoignages, 1re session, 41e législature, 27 octobre 2011)

« Il semble que les intervenants précédents ont parlé de la question du temps, un aspect dont nous devons tenir compte, car nous disposons maintenant de moins de temps pour bien des mécanismes de financement, et nous devons y penser. En Europe, la plupart des pays ont maintenant des plans allant jusqu’en 2025 ou 2030 dans le cadre de leurs programmes, qu’ils ne modifient pas. Ils peuvent adapter au fil des ans, en fonction des leçons tirées de l’expérience, mais ils ont établi des plans pour les 20 ou 30 prochaines années afin de déterminer comment ils souhaitent développer leur secteur agricole. Pour notre part, nous tendons à prévoir les choses pour deux ou quatre ans. Nous devrions regarder à plus long terme. »  (M. Murray McLaughlin, président et premier dirigeant, Sustainable Chemistry Alliance, Témoignages, 1re session, 41e législature, 27 octobre 2011)

« Nous craignons que les initiatives de recherche à long terme, soit le fondement de la recherche publique au pays, en souffrent dans un avenir rapproché, compte tenu de ce dilemme de financement. C’est ce type de recherche qui permet en grande partie au Canada d’être un chef de file en matière d’agriculture. » (Bob Kingston, président national, Syndicat de l’agriculture, Témoignages, 1re session, 41e législature, 15 février 2012)

Recommandation 5 : Évaluer et répondre aux besoins régionaux des secteurs agricoles et agroalimentaires

Étant donné la volonté du secteur d’approvisionner le marché alimentaire local, le cadre stratégique de Cultivons l’avenir II devrait inclure des politiques gouvernementales qui évaluent et répondent aux besoins des producteurs et des réseaux de distribution régionaux, ce qui permettrait ainsi de soutenir les systèmes alimentaires locaux qui sont à proximité des consommateurs et répondent à leurs besoins. 

La demande pour les produits alimentaires locaux est en augmentation (comme le démontre l’augmentation des marchés agricoles sur une base annuelle). Un sondage d’Ipsos Reid réalisé en 2009 a conclu que « la popularité des marchés agricoles est sans précédent, avec près de 9 répondants sur 10 disant apprécier pouvoir se rendre dans les marchés agricoles et les fermes où ils peuvent acheter des aliments frais directement de la ferme et rencontrer le cultivateur en personne. » 28 millions de visites dans les marchés agricoles ont eu lieu au Canada en 2008 (Les marchés agricoles Canada, étude sur l’impact économique, 2008).  

Des témoins ont affirmé que :

« Les systèmes alimentaires locaux sont utiles pour deux raisons principales. Premièrement, ils renforcent les connaissances relatives aux aliments (ce qui sera essentiel si les prévisions s’avèrent justes et que le prix des aliments continue d’augmenter pour les prochaines générations). Deuxièmement, les systèmes alimentaires alternatifs servent de parechoc entre les consommateurs urbains et le marché international. » [Traduction]  (Evan Fraser, Témoignages, réunion no 8, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 octobre 2011)

Il y en présentement un manque de leadership dans l’identification des besoins d’un nombre croissant de producteurs locaux et leurs consommateurs régionaux. Cultivons l’avenir II devrait adopter une approche régionale avec pour objectif d’identifier les opportunités et les obstacles au sein des marchés alimentaires locaux, ainsi que les stratégies potentielles pour répondre aux besoins des producteurs et des consommateurs.

Recommandation 6 : Adopter une approche prudente en matière de gestion des risques relativement à l’utilisation de la biotechnologie

1)  Que le gouvernement entreprenne un examen approfondi des réglementations régissant les semences, les poissons et les animaux génétiquement modifiés, dans le but de :

  • Mettre en œuvre les 58 recommandations de la Société royale du Canada
  • Instaurer la transparence dans les études et les processus d’autorisation scientifiques
  • Créer un mécanisme qui tient compte des répercussions sur le marché dans les processus d’autorisation
  • Créer une catégorie distincte de réglementations pour régir les semences, les poissons et les animaux génétiquement modifiés

2)  Qu’une entité indépendante soit créée afin que les données scientifiques pertinentes soient assujetties à l’examen par des pairs

3)  Imposer un moratoire immédiat sur aliments/animaux/poissons, luzerne et blé génétiquement modifiés jusqu’à ce qu’un examen réglementaire soit mené et que des règles modernisées  entrent en vigueur.    

Étant donné la complexité scientifique des cultures alimentaires génétiquement modifiées et les nombreuses considérations économiques, environnementales et sociales que nous avons soulevées tout au long de l’examen du Comité sur les biotechnologies, les néo-démocrates croient que le gouvernement a clairement le devoir d’appliquer ces recommandations. 

Sur l’ensemble de l’annexe A : Au cours des audiences du Comité sur l’industrie de la biotechnologie, lors de la 40e législature, 3e session, le rapport de Cultivons l’avenir II avait adopté une approche équilibrée dans la documentation des propos des nombreux témoins. Il est dommage toutefois que la logistique ait empêché le comité de poursuivre l’étude après l’élection de la 41e législature. Cette étude aurait pu offrir des recommandations adéquates au gouvernement concernant la direction à suivre pour l’avenir. 

L’annexe A rapporte d’importantes préoccupations qui ont été exprimées tout au long de la période d’étude en ce qui a trait aux semences, poissons et animaux génétiquement modifiés. Les lacunes et les oublis dans les réglementations canadiennes régissant cette technologie ont été soulevés à maintes reprises, ce qui fait croire que ces dernières n’ont pas su s’adapter à la croissance de l’industrie. Le fait qu’il n’y ait pas, en vertu de l’approche scientifique actuelle quant à nos réglementations, qui s’appuient sur la science privée et des processus décisionnels opaques, de mécanismes permettant de tenir en compte le rejet par les marchés ou même une catégorie particulière dédiée aux animaux génétiquement modifiés est inacceptable. Par exemple, les agriculteurs inquiets que leurs marchés établis soient compromis par la commercialisation des semences génétiquement modifiées comme la luzerne ou le blé ou les animaux génétiquement modifiés comme ceux de la marque Enviropig, n’ont aucun recours à part celui d’organiser des manifestations publiques et amorcer de longues démarches de lobbying auprès du gouvernement. Cela est épuisant et prend du temps précieux aux agriculteurs pour pratiquer leurs activités principales d’agriculture.

Les études ont démontré que les retombées positives des cultures génétiquement modifiées prônées par ses tenants, sont souvent exagérées et que dans plusieurs cas, sont annulées par les répercussions négatives comme la résistance accrue des parasites et des mauvaises herbes aux applications chimiques qui accompagnent les cultures génétiquement modifiées, le rejet par les marchés, et la contamination involontaire des stocks de semences non génétiquement modifiées pour ne nommer que ceux-là. À ce jour, les promesses souvent répétées que la modification génétique révolutionnerait l’agriculture en termes de réduction de l’utilisation de produits chimiques, d’augmentation du rendement, de tolérance climatique et d’améliorations nutritionnelles ne sont restées que des promesses. Entre-temps, il reste que les améliorations de la qualité des plantes et des animaux résultent grandement des méthodes de sélections traditionnelles. Les « bénéfices » de la modification génétique se limitent surtout à rendre certaines cultures commerciales ayant beaucoup de valeur imperméable aux effets destructeurs des pesticides et des herbicides. Il est estimé que 130 différentes espèces d’herbes sont désormais résistantes au Roundup, ce qui force les agriculteurs à faire usage de quantités plus grandes et de variétés plus toxiques d’herbicides, ce qui mènera inévitablement à plus de résistance.    

Beaucoup de discussions portent sur l’idée fausse de la « coexistence », c’est-à-dire la capacité de cultures traditionnelles d’exister aux côtés de cultures génétiquement modifiées. La contamination involontaire se produit et continuera de se produire. L’introduction de la luzerne  Roundup Ready génétiquement modifiée, une culture vivace pollinisée par des abeilles, établirait sans aucun doute la futilité de la coexistence. Il reste certain toutefois que la luzerne génétiquement modifiée serait hautement dommageable à l’agriculture biologique et traditionnelle.      

En février 2000, la Société  royale du Canada (SRC), le principal organisme canadien de chercheurs et d’universitaires éminents, a organisé un « Groupe d’experts sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire » à la demande d’Environnement Canada, de Santé Canada et de l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Le groupe d’experts avait pour mandat d’évaluer le système réglementaire canadien et les besoins en termes de capacité scientifique pour faire face aux produits dans le futur. Le groupe d’experts de la SRC a émis 58 recommandations concernant des changements dans le système de réglementations, dont plusieurs auraient d’importantes répercussions. Le gouvernement a répondu avec un « plan d’action », mais une seule des recommandations a finalement été mise en œuvre. Qui plus est, afin d’éviter d’avoir à réglementer la science d’ingénierie génétique émergente, le gouvernement canadien a créé un nouveau terme et une nouvelle catégorie, « les végétaux à caractères nouveaux » (et « les aliments nouveaux ») qui comprennent ce qui a été génétiquement modifié, mais également les cultures produites par d’autres technologies comme la sélection traditionnelle et  la mutagenèse (au cours de laquelle des produits chimiques et des rayonnements de gamma sont utilisés afin d’induire des mutations à des gènes).   Il n’y a pas d’étiquetage, de traçabilité ou d’études sur la santé humaine qui permettraient de découvrir d’éventuels problèmes après la mise en marché. 

L’annexe A mentionne l’avis de ceux qui croient que les cultures génétiquement modifiées sont essentiellement équivalentes aux cultures traditionnelles. Les faits montrent toutefois que cette affirmation est complètement fausse. Dans l’histoire naturelle, l’échange de gènes entre les espèces n’a pas eu lieu, à l’exception de certains cas où par exemple, il y a eu un transfert horizontal de gènes entre des espèces de bactéries. Les espèces qui sont très proches pourraient être en mesure de se croiser, comme un âne et un cheval, mais leur progéniture serait généralement infertile (ex. une mule). La technologie de l’ADN recombiné ou l’ingénierie génétique permet aux chercheurs de déplacer du matériel génétique entre des espèces et  même des règnes, par exemple entre une tomate et un poisson. Plusieurs études continuent de soulever des questions ou de contribuer à la documentation scientifique publique en émergence relativement aux processus d’ingénierie génétique qui souligne l’imprévisibilité inhérente de la manipulation transgénique et au sujet de laquelle nous avons implicitement besoin davantage d’études. 

Recommandation 7 : Assurer le bien-être animal et répondre à la demande des consommateurs pour de meilleures conditions d’élevage

Ce comité recommande que le gouvernement appuie l’industrie dans ses efforts d’effectuer la transition vers des systèmes possédant de meilleures conditions d’élevage afin de répondre aux demandes et aux tendances des consommateurs.

Le 4 mai 2012, Tim Hortons a annoncé des initiatives importantes afin d’améliorer le bien-être animal des cochons et des poulets. L’entreprise a demandé l’élimination des stalles de gestation pour les truies et s’est engagée à s’approvisionner pour plus de 10 % de ses œufs, auprès de poulaillers où règnent de meilleures conditions d’élevage, d’ici la fin de 2013[1]. Tout récemment, McDonald, Wendy’s, Compass Group et Burger King ont annoncé une nouvelle politique d’élimination de l’utilisation des cages de gestation et de cages en batterie de leur chaîne d’approvisionnement aux États-Unis[2]. Au Comité, des témoins ont également souligné le pouvoir grandissant des préférences des consommateurs en ce qui a trait au traitement des animaux :  

« D’autre part, nous savons que les consommateurs désirent en savoir plus sur les méthodes d’élevage. Certains pays ont d’ailleurs adopté des mesures rendant obligatoire l’étiquetage d’œufs pondus par des poules en cage. Cet étiquetage, qui est obligatoire dans certaines régions en Australie depuis 2012, s’est traduit par une augmentation de 90 p. 100 des ventes des œufs pondus par des poules en liberté dans certains magasins. Dans l’Union européenne, c’est en 2004 qu’on a rendu obligatoire la mention de la méthode de production sur les œufs, et en janvier 2012, on a interdit carrément l’utilisation de cages pour l’élevage des poules. Aux États-Unis, l’étiquetage obligatoire figure parmi les modifications proposées en 2012 à la Loi sur l’inspection des œufs, modifications qui ont été présentées au Congrès le mois dernier et qu’appuient la United Egg Producers ainsi que notre pendant américain, la Humane Society of the United States. » (Sayara Thurston, militante, Humane Society International/Canada, Comité, témoignages, réunion no 26, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 février 2012)

Cultivons l’avenir II devrait identifier les meilleures pratiques pour assurer la réussite des efforts de transition vers de meilleures conditions d’élevage. Toute barrière réglementaire ou législative à l’amélioration des systèmes afin de répondre aux demandes des consommateurs pour de meilleures conditions d’élevage devraient être éliminées.

Recommandation 8 : Enquêter sur la concentration dans les marchés de détail et de distribution

Ce comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada enquête sur les déséquilibres éventuels du pouvoir du marché dans la chaîne alimentaire.

Étant donné la concentration inquiétante des producteurs et des détaillants dans le secteur canadien de l’alimentation, cela représente un domaine particulièrement important d’enquête pour le ministère. Alors que le  Bureau de la concurrence du Canada tolère de hauts niveaux de concentration dans l’industrie agricole et agroalimentaire, des éléments de preuve supplémentaires provenant d’autres marchés, comme l’Europe, contribueraient à informer les régulateurs au Canada des critères et bénéfices distincts d’un marché véritablement diversifié. Qui plus est, des recherches plus approfondies doivent être effectuées sur les caractéristiques et les effets changeants de la concentration verticale dans le secteur alimentaire canadien. Cette étude est essentielle étant donné les changements récents dans la mise en marché des grains due à l’élimination du guichet unique que constitue la Commission canadienne du blé.  

Recommandation 9 : Encourager le développement du secteur coopératif

Ce comité recommande que le gouvernement soit rétabli l’Initiative de développement coopératif au sein de Cultivons l’avenir 2.

Les coopératives ont été des outils efficaces de développement agricole et rural, incluant l’industrie de production primaire et la production à valeur ajoutée. Le gouvernement a récemment annulé l’Initiative de développement coopératif, un programme qui depuis 2003 a aidé à mettre sur pied des centaines de coopératives à travers le pays.