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CIIT Rapport du Comité

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NÉGOCIATIONS EN VUE D’UN ACCORD ÉCONOMIQUE ET COMMERCIAL GLOBAL (AECG) ENTRE LE CANADA ET L’UNION EUROPÉENNE

INTRODUCTION

Avec ses 27 États membres[1], une population totale de pres de 500 millions d’habitants et un produit intérieur brut (PIB) de plus de 16 billions de dollars canadiens en 2010, l’Union européenne (UE) constitue le plus grand marché unique au monde. L’UE, en tant qu’entité intégrée, est le deuxieme partenaire commercial du Canada pour les biens et services, ainsi que la deuxieme source et destination d’investissement direct a l’étranger du Canada. Le Canada et l’UE entretiennent également des liens culturels, linguistiques et historiques qui ont été tissés de longue date.

En mai 2009, le Canada et l’UE ont annoncé le début de négociations en vue d’un accord économique et commercial global (AECG). La premiere ronde officielle de négociations a eu lieu en octobre de la meme année; depuis, d’autres rondes de négociations ont suivi chaque trimestre. Selon les représentants canadiens et européens, les deux parties souhaitent conclure les négociations en 2012.

En plus de la libéralisation des échanges commerciaux, les négociations visant a conclure un AECG entre le Canada et l’UE s’étendent a plusieurs autres themes ayant le potentiel de favoriser l’intégration économique entre les deux parties, tels que la protection des investissements, les marchés publics et la mobilité de la main-d’ouvre.

Démarche et mandat du comité

Le 27 septembre 2011, le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes (ci-apres le Comité) a décidé d’entreprendre une étude portant sur les négociations en vue d’un AECG entre le Canada et l’UE. Le principal objectif du Comité était de s’assurer qu’un tel accord, s’il est signé et mis en ouvre, sera dans l’intéret des Canadiens.

Dans ce contexte, le Comité a tenu des audiences durant les mois d’octobre et novembre a Ottawa pour connaître le point de vue des intervenants canadiens sur les principaux enjeux de ces négociations. La moitié des membres du Comité se sont ensuite rendus a Bruxelles et a Paris en décembre afin de rencontrer des parlementaires européens, des représentants des gouvernements nationaux, ainsi que des intervenants européens qui sont impliqués ou qui ont un intéret dans les négociations, dans le but de mieux cerner les avantages et les défis que représentent celles-ci en plus de souligner les priorités du Canada dans ces négociations.

Lors de ses déplacements en sol européen, le Comité a pu compter sur les séances d’information et le soutien logistique offerts par la Mission du Canada aupres de l’UE et les ambassades du Canada en Belgique et en France.

Structure du rapport

Le présent rapport rend compte de l’étude du Comité. Il donne de l’information sur les sujets examinés, fait état du travail effectué par le Comité a Bruxelles et a Paris et fournit des recommandations au gouvernement. Le rapport s’articule autour de deux grands themes, soit le processus de négociation et les effets escomptés d’un AECG Canada-UE. Dans le cas de ce dernier, les sujets suivants seront considérés : le commerce des marchandises, le commerce des services et la mobilité de la main-d’ouvre, la protection de l’investissement, les marchés publics et les droits de propriété intellectuelle.

CONTEXTE

Relations commerciales entre le Canada et l’Union européenne[2]

L’UE est le deuxieme partenaire commercial du Canada, apres les États-Unis. En 2010, les exportations canadiennes de biens et services a destination de l’UE se sont chiffrées a 49,1 milliards de dollars et les importations canadiennes en provenance de l’UE a 55,2 milliards de dollars.

L’UE gagne en importance comme partenaire commercial du Canada, surtout en tant que destination pour les exportations canadiennes. De 2005 a 2010, la valeur des exportations de biens canadiens vers l’UE a augmenté a un taux annuel de 6,7 %, soit davantage que le déclin annuel moyen de 1,8 % des exportations canadiennes dans le monde.

En 2010, les principaux produits exportés par le Canada vers l’UE comprenaient l’or, les aéronefs, les diamants, l’uranium et le minerai de fer, alors que la liste des principaux produits importés par le Canada en provenance de l’UE était constituée des produits pharmaceutiques, du pétrole brut et léger, des automobiles et du vin.

L’Ontario et le Québec ont été les deux plus importants exportateurs de biens canadiens vers l’UE en 2010, avec des exportations respectives de 17,2 et 7,9 milliards de dollars.

En ce qui a trait au commerce dans le secteur des services, les échanges commerciaux bilatéraux du Canada avec l’UE ont totalisé 28,0 milliards de dollars en 2010, les exportations de services comptant pour 12,9 milliards de dollars et les importations de services pour 15,1 milliards de dollars. Le Canada était un importateur net de services de voyage et de transport et de services gouvernementaux en provenance de l’UE en 2010. Le Canada avait toutefois un excédent commercial avec l’UE dans le secteur des services commerciaux cette année-la.

Tout comme c’est le cas avec le commerce de biens et services, l’UE est la deuxieme source et destination d’investissement direct a l’étranger du Canada, apres les États-Unis. Le stock d’investissement direct canadien au sein de l’UE s’est établi a 145,7 milliards de dollars en 2010, ce qui représentait 23,6 % de tous les investissements directs du Canada a l’étranger. De meme, le stock d’investissement direct au Canada en provenance de l’UE s’est chiffré a 148,7 milliards de dollars en 2010, ce qui représentait 26,5 % de tous les investissements directs étrangers au Canada.

Autant au niveau du commerce des biens et des services que de l’investissement, le Royaume-Uni demeurait le plus important partenaire du Canada au sein de l’UE en 2010. Les échanges bilatéraux de biens et services entre le Canada et le Royaume-Uni ont totalisé 35,3 milliards de dollars, tandis que l’investissement direct bilatéral entre les deux pays s’est élevé a 112,3 milliards de dollars cette année-la,

Historique des négociations

Lors du Sommet Canada-UE a Berlin en 2007, les deux parties ont convenu de mener une étude conjointe afin de déterminer les couts et les avantages liés a un partenariat économique plus étroit, en portant une attention particuliere aux effets potentiels de la suppression des barrieres existantes, principalement les barrieres non tarifaires, sur le flux de biens, de services et de capitaux entre le Canada et l’UE.

Les résultats de cette étude ont été publiés le 16 octobre 2008 dans un rapport intitulé Évaluation des couts et des avantages d'un partenariat économique plus étroit entre l'Union européenne et le Canada. L’évaluation conjointe ayant démontré qu’un accord de libéralisation du commerce Canada-UE serait avantageux pour les deux parties, le Canada et l’UE ont entrepris de cerner les sujets précis qui seraient abordés dans les négociations officielles. Les résultats de cet exercice visant a établir la portée des négociations ont été publiés en mars 2009 dans un rapport intitulé Rapport conjoint Canada-Union européenne : Vers un accord économique approfondi. Le rapport contient un vaste programme de négociation, incluant la libéralisation des échanges commerciaux et d’autres mesures qui favoriseraient l’intégration économique entre les deux parties.

Le Canada et l’UE ont annoncé le lancement de négociations formelles en vue d’un AECG lors du Sommet Canada-UE du 6 mai 2009, a Prague, en République tcheque. Depuis, neuf rondes de négociations ont eu lieu.

Bien que la portée des ententes commerciales négociées par le Canada ne se soit pas étendue aux gouvernements sous-nationaux dans le passé, un AECG Canada-UE mettrait vraisemblablement fin a cette façon de faire si les deux parties parviennent a s’entendre. En effet, l’UE a insisté des le début pour que les provinces et les territoires[3] canadiens soient couverts par l’accord.

PROCESSUS DE NÉGOCIATION

Un accord de libéralisation du commerce entre deux ou plusieurs États représente un processus complexe pouvant prendre plusieurs années a compléter, surtout si celui-ci couvre un large éventail de sujets comme c’est le cas avec les discussions visant a conclure un AECG entre le Canada et l’UE. Dans ce contexte, de nombreux témoins que le Comité a entendus a Ottawa et plusieurs participants qu’il a rencontrés en Europe s’entendent pour dire que les négociations actuelles progressent rapidement dans les circonstances. Bien que la fin de l’année 2011 ait été initialement fixée comme date butoir afin de conclure un accord, celle-ci a été repoussée a 2012. A cet effet, Steve Verheul (négociateur commercial en chef, Canada-UE, ministere des Affaires étrangeres et du Commerce international) a dit :

Concernant la date butoir de 2012 pour la fin des négociations, nous estimons que c'est assez réaliste. Nous avons eu une discussion a Bruxelles la semaine derniere avec mon homologue et il est du meme avis. Tout comme nous, les Européens veulent conclure tres rapidement ces négociations. Alors, apres la série de négociations d'octobre, nous allons nous engager dans une phase de négociations encore plus intense, visant a en arriver a une entente sur la plupart des questions principales au cours des premiers mois de l'année prochaine[4].

Tout au long de sa mission en Europe, le Comité s’est fait dire que la crise de la dette souveraine qui sévit en Europe actuellement ne devrait pas avoir d’effets néfastes sur les négociations en cours pour la conclusion d’un AECG avec le Canada. Au contraire, plusieurs participants que le Comité a rencontrés prétendent que le commerce constitue un élément clé de la stratégie de sortie de crise des instances européennes et qu’a cet égard, un accord de libéralisation du commerce avec le Canada constituerait une réalisation importante afin de mettre cette stratégie en place. Le Comité a également appris que le Danemark, qui occupe pour six mois la présidence tournante de l’UE depuis le 1er janvier 2012, a inscrit la conclusion d’accords commerciaux bilatéraux avec certains partenaires clés, dont le Canada, dans sa liste de priorités afin de stimuler la croissance et l’emploi au sein de l’UE.

Consultations

La question des consultations dans le cadre des négociations actuelles entre le Canada et l’UE a été soulevée a plusieurs occasions lors des rencontres tenues a Ottawa et en Europe. Bien qu’il n’y ait pas de consensus, la majorité des témoins que le Comité a entendus s’entendent pour dire que le mécanisme de consultation du gouvernement du Canada est inclusif. Ils estiment etre consultés régulierement et que leurs points de vue sont suffisamment pris en considération. Au sujet des consultations, Jacques Pomerleau (président, Canada Porc International) a déclaré : « Nous apprécions beaucoup d’avoir été consultés des le début des négociations, et d’avoir été tenus informés de tous les développements concernant nos produits[5] ».

La participation des provinces et territoires canadiens au processus de négociation d’un AECG avec l’UE a été abordée a plusieurs reprises. En effet, bien que la réglementation des échanges et du commerce soit une compétence constitutionnelle exclusivement fédérale, la négociation d’accords commerciaux plus exhaustifs que ceux négociés dans le passé fait en sorte que des engagements dans des spheres de compétence provinciale ou partagée sont plus probables.

Une plus grande participation des provinces et territoires au processus de négociation rend celui-ci plus complexe étant donné le niveau de coordination que cela implique dans l’élaboration de la position canadienne. Ceci étant dit, cette coopération devrait permettre d’éviter une situation dans laquelle une province ou un territoire s’opposerait au texte d’un éventuel accord et mettrait en péril la mise en vigueur des certaines provisions de l’accord.

Étant donné que les négociateurs européens veulent inclure les marchés publics aux niveaux provincial, territorial et municipal dans un AECG et qu’ils ont fait de cette inclusion une priorité, la consultation des différents ordres de gouvernement au Canada est d’autant plus importante. A cet égard, Don Downe (président, Comité permanent des finances et des relations intergouvernementales, Fédération canadienne des municipalités) estime que le gouvernement du Canada comprend bien la position des municipalités canadiennes relativement aux négociations pour un AECG avec l’UE. Selon lui, les municipalités supportent le commerce libre et équitable entre le Canada et ses partenaires commerciaux, mais qu’un éventuel accord avec l’UE devra respecter et protéger l'autonomie et les prises de décisions des municipalités.

A ce sujet, le ministre du Commerce international a dit au Comité qu’il avait rencontré le Conseil d’administration national de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) a Nelson, en Colombie-Britannique, pour discuter des négociations sur l’AECG Canada-UE et qu’il avait assuré les membres de celui-ci qu’il était tres sensible aux préoccupations particulieres du FCM.

Dans son témoignage, Stuart Trew (chargé de la campagne sur le commerce, Conseil des Canadiens), a indiqué au Comité que certaines municipalités canadiennes avaient néanmoins adopté une attitude plus critique a l’égard des négociations de l’AECG Canada-UE.

Lors de sa mission en Europe, le Comité a constaté que l’UE fait face a une dynamique semblable au Canada alors que la Commission européenne a comme mandat de représenter les intérets de 27 pays différents. Les représentants des gouvernements nationaux rencontrés lors de la mission ont affirmé etre suffisamment informés par la Commission européenne lors des présentes négociations et ont expliqué le fonctionnement du Comité de la politique commerciale grâce auquel des représentants de la Direction générale sur le commerce de la Commission européenne donnent une mise a jour hebdomadaire aux 27 États membres sur les dossiers qui touchent le commerce.

Ceci étant dit, les États membres de l’UE ne sont pas impliqués directement dans les négociations puisqu’ils ont donné le mandat a la Commission européenne de négocier en leur nom. Ainsi, le Comité a noté que les provinces et territoires canadiens jouent un rôle davantage proactif que les États membres de l’UE lors des présentes négociations visant a conclure un AECG entre le Canada et l’UE.

Ratification et mise en vigueur d’un accord économique et commercial global

La question de la ratification et de la mise en ouvre d’un AECG, tant au Canada qu’au sein de l’UE, a été soulevée a plusieurs reprises lors de la mission du Comité en Europe. En ce qui a trait au processus en vigueur au sein de l’UE, le Comité a appris que la procédure de ratification d’un éventuel AECG avec le Canada dépendra de la portée de l’accord. Dans un cas ou un accord inclurait uniquement des domaines dans lesquels l’UE dispose d’une compétence exclusive, la ratification se fera selon la procédure législative ordinaire en vertu de laquelle un projet de loi doit etre adopté conjointement par le Parlement européen et le Conseil de l’UE, ce dernier étant constitué de ministres des 27 États membres.

Dans le cas d’un accord mixte, c’est-a-dire un accord incluant des domaines dans lesquels les compétences sont partagées entre l’UE et les États membres, en plus de la procédure législative ordinaire au niveau européen, les 27 États membres devront ratifier l’accord individuellement. Les États membres de l’UE auraient donc une plus grande influence sur l’issue des négociations dans ce deuxieme scénario.

Certains participants rencontrés en Europe ont évoqué la possibilité que des enjeux entre le Canada et l’UE qui ne font pas partie des négociations pourraient néanmoins avoir une incidence sur la ratification d’un accord au Parlement européen ou par les parlements des États membres européens. La chasse aux phoques, les organismes génétiquement modifiés (OGM) et l’imposition de visas aux ressortissants de certains États membres européens par le Canada ont été cités en exemple. Ceci étant dit, les députés du Parlement européen que le Comité a rencontrés, dont certains sont membres de la Commission du Parlement européen sur le commerce international, ont affirmé que de tels enjeux ne devraient pas influencer la ratification d’un éventuel AECG Canada-UE par le Parlement européen.

Le Comité a d’ailleurs constaté que les négociations visant a conclure un AECG entre le Canada et l’UE a le support des principaux groupes politiques représentés au Parlement européen, dont le Groupe du Parti populaire européen et l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates, qui a eux-seuls représentent plus de 60 % de la députation européenne.

Étant donné le niveau de développement économique et social du Canada, des députés européens rencontrés lors de la mission du Comité croient qu’un AECG entre le Canada et l’UE obtiendrait l’approbation du Parlement européen le temps venu. L’exemple de l'Accord de libre-échange UE-Corée du Sud a été cité en exemple a cet égard. Cet accord représentait la premiere opportunité pour le Parlement européen de tester ses nouveaux pouvoirs législatifs en matiere de politique commerciale depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne. Malgré des divergences initiales sur le contenu de l’accord, celui-ci a finalement été adopté par le Parlement européen le 2 février 2011 par 465 voix contre 128 (19 abstentions).

En ce qui a trait a la mise en vigueur d’un AECG au Canada, la question de l’application des clauses d’un accord au niveau provincial et territorial a été soulevée a quelques reprises par des participants européens. Relativement a cette question, le Comité a fait valoir qu’en vertu de la constitution canadienne, le gouvernement fédéral est pleinement responsable de la mise en ouvre et du respect des traités internationaux, mais que lorsque le Canada contracte des obligations qui relevent de la compétence des provinces et des territoires dans un accord, il revient aux provinces et aux territoires de s’acquitter de ces obligations[6].

Le Comité a rappelé a ses interlocuteurs européens que l’application des obligations qui relevent de la compétence des provinces et des territoires n’a pas été un probleme pour le Canada dans le passé. Qui plus est, un vaste processus de consultation a été mis en place afin de s’assurer que les avis des provinces et des territoires soient pris en considération dans l’élaboration des positions de négociation du Canada.

EFFETS ESCOMPTÉS D’UN AECG ENTRE LE CANADA ET L’UNION EUROPÉENNE

La majorité des témoins canadiens voient d’un oil positif les négociations visant a conclure un AECG entre le Canada et l’UE et estiment que les effets d’un accord seront positifs. S’appuyant sur l’étude conjointe se penchant sur les couts et avantages d’un AECG réalisée par le Canada et l’UE, qui a été rendue publique avant le début des négociations, le ministre du Commerce international a noté qu’un tel accord devrait injecter 12 milliards de dollars de plus par année dans l’économie canadienne et augmenter les échanges bilatéraux de 38 milliards de dollars, soit une hausse de 20 %. Le ministre a également indiqué : « […] un accord de libre-échange signifierait une hausse de pres de 1 000 $ du revenu moyen des familles canadiennes, sans oublier les 80 000 nouveaux emplois qui devraient etre créés au Canada[7] ».

Qui plus est, les représentants du ministere des Affaires étrangeres et du Commerce international (MAECI) considerent que l’étude sous-estime probablement les gains escomptés pour le Canada puisqu’elle s’appuie, entre autres, sur l’hypothese voulant que les négociations du cycle de Doha a l'Organisation mondiale du commerce (OMC) aient été conclues avec succes lorsque l’AECG entrera en vigueur. Ces négociations étant dans une impasse, les avantages d’un AECG avec l’UE pourraient etre d'autant plus significatifs pour le Canada puisque celui-ci jouirait d’un avantage plus grand sur le marché européen comparativement aux autres partenaires commerciaux n’ayant pas conclu un accord commercial préférentiel avec l’UE.

On a fait valoir au Comité que de toutes les négociations commerciales entreprises par le Canada, dont l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), les négociations pour un AECG avec l’UE sont appelées a avoir l’impact le plus important pour le Canada. Selon Milos Barutciski (associé et coprésident, Commerce international et pratiques de placement, Bennett Jones, Chambre de commerce du Canada), qui a participé aux négociations de l’ALÉNA alors qu’il était employé au sein de la fonction publique fédérale, l'AECG entre le Canada et l’UE va plus loin que l’ALÉNA dans ses ambitions et aurait, pour le Canada, des incidences positives plus grandes encore. M. Barutciski a toutefois reconnu que la transition pour certains secteurs serait plus difficile que d’autres apres l’entrée en vigueur d’un AECG entre le Canada et l’UE.

Pour certains témoins, un AECG avec l’UE représenterait une occasion pour le Canada de diversifier ses relations commerciales. Selon Roy MacLaren (président canadien, Forum sur le Commerce Canada-Europe), les exportations sont effectivement si importantes pour l’économie canadienne qu'il n’est pas sage de ne dépendre que d'un seul marché comme c’est le cas actuellement pour le Canada envers les États-Unis. Cela étant dit, le Comité prend note également du fait que le MAECI a souligné l’importance des États-Unis en tant que premier partenaire commercial du Canada.

Dans le meme ordre d’idées, Jean-Michel Laurin (vice-président, affaires mondiales, Manufacturiers et exportateurs du Canada) a affirmé :

La conclusion de l'AECG pourrait aider les manufacturiers et les exportateurs canadiens a diversifier leurs ventes sur de nouveaux marchés d'exportation, a accroître leur présence en Europe a un moment ou ils cherchent a trouver de nouvelles possibilités d'affaires et a positionner le Canada comme une destination plus attrayante pour l'investissement dans le secteur manufacturier en donnant aux entreprises canadiennes un acces privilégié, en franchise de droits, aux deux plus grands marchés au monde, c'est-a-dire l'Union européenne et les États-Unis[8].

On a également dit au comité qu’étant donné le contexte économique international, plus précisément la crise de la dette souveraine dans plusieurs pays européens et le ralentissement économique aux États-Unis, des réflexes protectionnistes pourraient bien voir le jour dans ces endroits. A cet égard, Sam Boutziouvis (vice-président, Politique internationale et budgétaire, Conseil canadien des chefs d’entreprise) a dit que des négociations fructueuses entre le Canada et l’UE pour un AECG enverraient un puissant signal de croissance aux investisseurs et aux entreprises au Canada et a l'étranger.

Bien que la plupart des témoins entendus au Canada soient optimistes quant aux retombées d’un AECG, plusieurs d’entre eux considerent qu’un accord entre le Canada et l’UE ne devrait pas se faire au détriment des pouvoirs et des capacités du gouvernement en matiere de réglementation. A cet effet, le ministre du Commerce international a affirmé :

[…] nous sommes résolus a conserver les pouvoirs et les capacités du gouvernement en matiere de réglementation. Les produits, les services et le savoir-faire du Canada sont a vendre; ses reglements et ses pouvoirs gouvernementaux ne le sont pas. Les entreprises étrangeres qui font des affaires au Canada doivent, comme toujours, se conformer a toutes les lois et a tous les reglements du pays[9].

D’autres témoins étaient toutefois plus pessimistes quant aux retombées générales d’un AECG. Scott Sinclair (agrégé supérieur de recherche, Centre canadien de politiques alternatives) a affirmé que les tarifs moyens du Canada et de l’UE appliqués aux importations sont déja peu élevés et que les obstacles commerciaux traditionnels entre le Canada et l'UE sont peu nombreux. Selon lui, la réduction ou l’élimination de ces tarifs et obstacles ne donnera pas une impulsion tres forte a l’économie canadienne.

Stuart Trew estime quant a lui que les négociations d’un AECG entre le Canada et l’UE pourraient compromettre la démocratie canadienne. Il a dit :

Depuis que les négociations ont été entamées au sujet de l’AECG entre le Canada et l’Union européenne en 2009, nous en sommes venus a comprendre que cet accord ne constitue pas une simple entente commerciale, mais plutôt un accord élargi portant sur la gouvernance économique. L’AECG repoussera les limites juridiques régissant les politiques sociales et environnementales de telle sorte que notre démocratie sera compromise[10].

Du côté européen, bien que les participants rencontrés lors de la mission du Comité a Bruxelles et a Paris aient manifesté leurs inquiétudes quant a certains sujets, ceux-ci estiment de façon générale qu’un AECG entre le Canada et l’UE sera bénéfique pour l’UE.

Les sections qui suivent offrent une étude plus approfondie des sujets qui revetent un intéret particulier pour les Canadiens et les Européens a la lumiere des témoignages et des rencontres du Comité quant a un AECG entre le Canada et l’UE.

Commerce des marchandises

Comme toute négociation de libéralisation du commerce, l’AECG comprend plusieurs mesures visant a augmenter la circulation de biens entre les deux régions, y compris l’élimination des droits de douane. Pour certains témoins toutefois, les barrieres non tarifaires au commerce, telles que les reglements et les standards divergents, semblent toutefois représenter une entrave encore plus importante au commerce de marchandises entre le Canada et l’UE que les droits de douane.

L’acces aux marchés agricoles constitue généralement un des enjeux les plus litigieux lors de négociations commerciales bilatérales ou multilatérales. A la lumiere de ce que les membres du Comité ont entendu sur des questions comme les OGM, la gestion de l’offre et les regles d’origine, les négociations pour un AECG entre le Canada et l’UE ne font pas exception a cette regle. En effet, le Comité a constaté que la libéralisation du commerce pour certains biens agricoles constitue une question délicate tant pour le Canada que pour l’UE.

Puisque les droits de douane sur la plupart des produits non agricoles canadiens et européens sont déja relativement faibles dans l’ensemble, les questions entourant ces produits n’ont pas soulevé de grandes inquiétudes lors des audiences du Comité a Ottawa et en Europe.

L’optique canadienne

Étant donné que la majorité des exportations canadiennes vers l’UE et des importations canadiennes en provenance de l’UE est composée de produits manufacturiers[11], le Comité note qu’un AECG devra prendre en considération les intérets offensifs et défensifs du Canada. Jean-Michel Laurin a signalé ce qui suit :

Nous nous attendons par ailleurs a ce que l'accord soit ambitieux par rapport a l'élimination des tarifs, et nous nous attendons a ce que les tarifs dans des secteurs plus délicats soient éliminés progressivement afin de donner aux manufacturiers canadiens le temps dont ils ont besoin pour mettre en place la capacité de profiter d'un acces plus ouvert au marché européen, mais aussi de s'adapter aux changements sur le marché intérieur qui résulteraient de cet accord[12].

Bien que les représentants du MAECI s’attendent a ce qu’un AECG avec l’UE favorise la création d’emploi dans plusieurs secteurs, ceux-ci ont émis l’opinion qu’il est probable que les plus nombreux gains dans le domaine de l'emploi se situeraient dans le secteur manufacturier grâce a l’acces préférentiel par rapport aux autres fournisseurs qu’un tel accord fournirait, dont les États-Unis.

Qui plus est, un AECG entre le Canada et l’UE pourrait favoriser des entreprises canadiennes concurrentielles a l'échelle mondiale dans des secteurs d’avenir, comme celui des technologies du développement durable. Tel que mentionné par Vicky Sharpe (présidente-directrice générale, Technologies du développement durable Canada), l’UE représente un marché tres vaste pour les technologies vertes et un AECG aiderait les entreprises canadiennes de technologies propres a percer ou de consolider leur présence sur ce marché.

En ce qui a trait au secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire, la plupart des représentants de ce secteur ont fait savoir au Comité qu’ils esperent obtenir un plus grand acces au marché de l’UE dans le cadre des négociations actuelles pour un AECG. Étant donné la taille de son marché, le pouvoir d’achat de ses consommateurs et des gouts alimentaires similaires, l’UE est perçue comme un marché important et stratégique pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien.

Les représentants des secteurs bovin et porcin ont fait savoir que l’acces au marché pour les produits du bouf et du porc sur le marché européen est tres restrictif a l’heure actuelle. John Masswohl (directeur, Relations gouvernementales et internationales, Canadian Cattlemen’s Association) a laissé savoir que bien que le secteur canadien de la viande de bouf puisse supporter la réglementation européenne interdisant les stimulateurs de croissance, le texte d’un AECG devra prévoir un acces illimité et sans droits de douane pour les produits de bouf canadien se qualifiant pour le marché de l’UE. Ce dernier a également demandé que le protocole utilisé pour prouver que la viande canadienne est conforme aux exigences européennes soit le meme que celui s’appliquant aux éleveurs américains qui exportent du bouf sur le marché de l’UE.

Jacques Pomerleau a, quant a lui, partagé le souhait que le Canada puisse obtenir une exemption des droits de douane liés a un contingent tarifaire exclusif au Canada pour les produits du porc, de meme qu’une simplification des procédures administratives liées a son attribution au sein de l’UE.

Une production accrue des produits de bouf et de porc au Canada en raison d’un meilleur acces pour ces produits sur le marché européen serait également bénéfique aux producteurs de grains du Canada, étant donné que les éleveurs d’animaux bovins et porcins sont d’importants consommateurs de céréales fourrageres. Les représentants des producteurs de grains ont également milité en faveur d’une simplification des procédures d'homologation des grains canadiens au sein de l’UE et une politique raisonnable en ce qui a trait au niveau de présence adventice d’OGM, c’est-a-dire la présence accidentelle on non intentionnelle de tels produits dans une cargaison de grains.

Derek Butler (directeur exécutif, Association of Seafood Producers) a abondé dans le meme sens en demandant l'abolition complete et immédiate des tarifs appliqués aux fruits de mer canadiens sur le marché de l’UE, mais tout en implorant le Canada de se montrer vigilant afin que l'abolition de ces tarifs ne s'accompagne pas d'une hausse proportionnelle d'autres barrieres au commerce.

Certains témoins ont formulé de vives réserves quant a la position du Canada sur la gestion de l’offre. Selon eux, le systeme en place au Canada coute non seulement cher a l’économie canadienne, mais la position de négociation du gouvernement fédéral en ce qui a trait a la gestion de l’offre empeche les négociateurs canadiens d’obtenir des concessions de la part de l’UE dans d’autres secteurs. Wally Smith (président, Producteurs laitiers du Canada) a toutefois affirmé au Comité que l’industrie laitiere canadienne est viable, qu’elle crée une activité rurale et protege des emplois et qu’elle contribue a l'économie canadienne.

Les représentants du MAECI ont fait savoir que le Canada et l’UE se sont entendus dans le processus de négociations afin de n'exclure aucune question des discussions se déroulant dans le cadre des négociations. Ceci étant dit, ils ont affirmé qu’ils soutiennent fermement la gestion de l’offre et qu’ils défendront ce systeme avec la meme vigueur qu’au cours des négociations des accords précédents.

Enfin, les représentants du secteur forestier canadien ont fait savoir que leur secteur bénéficierait d’un AECG qui abolirait les droits de douane qui s’applique toujours a certains produits canadiens, tels les panneaux de copeaux orientés et les produits de contreplaqué, et qui rendrait plus transparent le processus de marchés publics de l'UE pour les produits forestiers.

Qu’il s’agisse de produits agricoles ou non agricoles, le Comité constate que les négociations au sujet des regles d’origine risquent d’etre épineuses. L’UE a effectivement fait état de ses craintes de voir les États-Unis se servir de l’AECG avec le Canada comme d’un moyen indirect de pénétrer le marché européen sans avoir a payer de droits tarifaires. Étant donné l’intégration du marché nord-américain et considérant que le Canada et les États-Unis produisent plusieurs produits ensemble (pensons aux automobiles par exemple), plusieurs témoins ont fait valoir au Comité qu’il sera important que cette réalité soit prise en considération dans le texte d’un éventuel AECG afin d’éviter que des biens produits au Canada ne soient pas reconnus comme étant canadiens sur le marché européen.

L’optique européenne

Lors de sa mission en Europe, le Comité a constaté qu’un meilleur acces au marché canadien pour le commerce de marchandises ne représente pas une priorité pour la plupart des participants rencontrés. Le discours de ces derniers était davantage ciblé vers des sujets comme les marchés publics et les droits de propriété intellectuelle. Ceci étant dit, les représentants d’un État membre de l’UE ont tout de meme dit au Comité qu’un meilleur acces pour les automobiles sur le marché canadien était un des principaux objectifs relativement aux négociations en cours visant a conclure un AECG. D’autres participants européens ont ciblé les produits laitiers, principalement les fromages, en tant qu’intéret offensif pour l’UE et ont soulevé des préoccupations quant au mode de commercialisation et aux droits de douane élevés en place pour ces produits au Canada.

Le Comité a également discuté avec des parlementaires européens et français ainsi qu’avec des représentants du secteur agricole et agroalimentaire français des subventions a l’agriculture en Europe et de la Politique agricole commune (PAC) de l’UE. On a fait valoir au Comité que les paiements effectués dans le cadre de la PAC sont maintenant presque entierement découplés du niveau de production des agriculteurs et qu’étant donné les couts supplémentaires associés a la réglementation européenne, les agriculteurs européens ont besoin du soutien financier de l’État. Relativement a la réglementation européenne, les participants européens ont laissé savoir qu’ils militent afin de s’assurer qu’un AECG tiendrait compte de la réalité des agriculteurs européens et que les exportateurs canadiens seraient soumis a la meme réglementation qu’eux.

Sur le sujet des OGM, les représentants des gouvernements nationaux et du secteur agricole et agroalimentaire français rencontrés en Europe ont mentionné que la question des OGM était avant tout politique et que l’opinion publique s’oppose clairement a la commercialisation de tels produits pour la consommation humaine. Le Comité s’est fait dire qu’il est improbable que cette position change dans un avenir rapproché bien que certains participants aient démontré une ouverture envers l’utilisation d’OGM en Europe.

Tel qu’on l’avait fait remarquer au Comité lors des témoignages a Ottawa, la question des regles d’origine a été soulevée par certains participants européens. Ceux-ci ont mentionné que les négociations actuelles pour un AECG se font entre le Canada et l’UE et non l’Amérique du Nord et l’UE, et c’est pourquoi ils veulent s’assurer que les produits canadiens qui bénéficieraient d’un acces privilégié le marché de l’UE en vertu d’un AECG auront un contenu suffisamment canadien.

Commerce des services et mobilité de la main-d’ouvre

L’optique canadienne

Le Comité a remarqué que les services associés aux produits canadiens qui sont exportés a l’étranger ajoutent de la valeur aux chaînes d'approvisionnement et représentent une part croissante de l’activité économique des compagnies canadiennes. A cet effet, plusieurs témoins ont fait valoir l’importance de faciliter la prestation de services entre le Canada et l’UE dans le cadre des négociations pour un AECG, mais également de faciliter le mouvement des entrepreneurs et des travailleurs entre le Canada et l’UE ainsi que la reconnaissance des compétences professionnelles.

On a fait valoir au Comité que le Canada est bien positionné en matiere de commerce des services avec l’UE considérant qu’il enregistre actuellement un excédent commercial avec l'UE au chapitre des services professionnels, lesquels incluent notamment les services juridiques, architecturaux et de génie. Ainsi, un acces accru au marché européen pourrait aider a consolider cette position.

D’autres témoins se sont inquiétés que des sociétés européennes cherchent a obtenir un acces au marché canadien pour la prestation de services publics, comme la gestion des déchets, le transport public et l'eau potable. Scott Sinclair a affirmé :

L’acces inconditionnel aux achats publics, en particulier a l’échelon provincial et local, est la priorité absolue de l’UE dans ces négociations. Les restrictions proposées limiteraient séverement la capacité des gouvernements d’utiliser leur pouvoir d’achat pour augmenter les bénéfices locaux. Les regles interdisent les conditions favorables au développement local, lesquelles sont définies comme des mesures compensatoires, meme lorsque les marchés sont adjugés au terme d’un processus concurrentiel ouvert qui ne fait pas de discrimination contre les fournisseurs étrangers[13].

M. Sinclair a également mentionné qu’il croyait que des municipalités, comme Toronto et d’autres au Québec, avaient appliqué des criteres de développement local dans le cas de contrats importants, dans le domaine du transport public et de l’énergie verte par exemple, et que ceci avait été bénéfique pour leurs collectivités.

A cet égard, Don Downe a indiqué au Comité que d’apres ses informations, le droit des municipalités de contrôler les services publics relevant de leur compétence n’était pas en cause dans les négociations de l’AECG Canada-UE :

Il y a également le fait que certaines personnes ont exprimé des préoccupations, a savoir que nous pourrions perdre notre droit de contrôler nos propres services publics. Cela ne fait pas partie de l’accord tel que nous le percevons. Nous avons présenté cette question au ministre, et on nous a expliqué que cela ne ferait par partie des négociations. Nous avons mis nos préoccupations de l’avant, et nous connaîtrons les résultats au terme des négociations, mais nous avons pu nous faire entendre tres clairement a ce niveau[14].

Alors qu’il énumérait les sept principes qui régissent la position de la Fédération canadienne des municipalités en matiere de commerce international[15], M. Downe a également noté que les négociateurs canadiens et européens semblent s’etre entendus sur un seuil de 8,5 millions de dollars relativement aux achats gouvernementaux pour les projets de construction dans le cadre des négociations pour un AECG. Celui-ci estime que ce seuil est raisonnable, d’autant plus qu’il est compatible avec les seuils applicables en vertu de l’Accord sur les marchés publics de l’OMC et de l’Accord entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement des États-Unis d’Amérique en Matiere de Marchés Publics.

Un défi important qui se pose aux négociateurs de l’AECG en matiere de mobilité de la main-d’ouvre est la compétence provinciale et territoriale en matiere de réglementation des professions et des métiers au Canada. Pour plusieurs professions, il existe des obstacles considérables a la mobilité de la main-d’ouvre interprovinciale et interterritoriale, en raison principalement des différences concernant l’autorisation d’exercer et la reconnaissance des compétences d’une province et d’un territoire a l’autre.

Enfin, le Comité a noté qu’en ce qui a trait a ses engagements relatifs au secteur des services, le Canada a fondé sa démarche sur une « liste négative » dans les accords commerciaux qu’il a conclus précédemment, dont l’ALÉNA, ce qui veut dire que tous les éléments sont compris sauf ceux qui figurent expressément sur la liste. A ce jour, l’UE n’avait jamais adopté cette méthode, s’appuyant plutôt auparavant sur une « liste positive », méthode selon laquelle les engagements portent uniquement sur les domaines précisés dans la liste. Le Comité a appris que l’UE avait toutefois accepté d’adopter l’approche de la liste négative dans le cadre des négociations actuelles entre le Canada et l’UE pour un AECG.

L’optique européenne

La majorité des participants européens qui se sont prononcés sur la question du commerce des services et de la mobilité de la main-d’ouvre ont partagé le désir qu’un AECG permette de réduire les obstacles au commerce des services entre le Canada et l’UE et de faciliter le mouvement des gens d’affaires et des professionnels.

Selon les interlocuteurs de BUSINESSEUROPE, qui représentent les intérets des entreprises privées en Europe, la mobilité de la main-d’ouvre est particulierement problématique au Canada étant donné le manque d’harmonisation des regles provinciales et territoriales. L’exemple de travailleurs européens devant revenir en Europe afin de compléter la paperasserie nécessaire pour passer d’une province ou d’un territoire canadien a une autre a été utilisé afin d’illustrer ce probleme.

Les représentants des gouvernements de certains États membres de l’UE ont expliqué au Comité a quel point l’utilisation d’une liste négative en ce qui a trait a la prise d’engagements relatifs au secteur des services avait été compliquée pour eux. En effet, ces derniers ont du analyser chaque type de service afin de savoir s’ils acceptaient que des engagements de libéralisation soient pris en leur nom -- un exercice qui a pris plusieurs mois a compléter. En rétrospective toutefois, le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG a observé que cet exercice analytique de la part des 27 États membres sera bénéfique pour ces derniers et permettra un accord plus ambitieux en matiere de libéralisation des services.

Pour ce qui est de l’inclusion des services publics au sein de l’AECG, les représentants de deux États membres de l’UE se sont montrés inquiets quant a la définition des services publics dans le texte d’un éventuel AECG et des exemptions qui seront appliquées aux services publics. A ce sujet toutefois, le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG a expliqué qu’en aucun cas un AECG ne forcerait les différents ordres de gouvernement au Canada ou en Europe a privatiser des services qu’ils offrent publiquement. Ceci étant dit, celui-ci considere que lorsque de tels services sont privatisés, les regles devraient faire en sorte de permettre aux fournisseurs de services canadiens et européens d’etre traités équitablement quant a leur chance d’obtenir les contrats de ces gouvernements.

Enfin, des représentants d’un autre État membre de l’UE ont partagé leur espoir que les services culturels soient traités prudemment durant les négociations pour un AECG entre le Canada et l’UE et ont affirmé comprendre la position du Canada qui souhaite inclure une clause d'exemption culturelle similaire que dans les accords de libre-échange qu’il a signés avec d’autres partenaires commerciaux. Ceci étant dit,  ils estiment toutefois qu’il serait utile que les deux parties aient une discussion sur la définition de ce qui constitue un service culturel.

Le délégué général du Québec a Bruxelles et les parlementaires français rencontrés a Bruxelles et a Paris ont signifié l’importance de la diversité culturelle et de protéger celle-ci dans le cadre des négociations entre le Canada et l’UE pour un AECG. Selon eux, cette protection devrait s’étendre tant aux produits qu’aux services culturels.

Protection des investissements

L’optique canadienne

Plusieurs témoins canadiens ont abordé la question de la protection des investissements dans le cadre des négociations pour un AECG. Les représentants du MAECI ont informé le Comité que les premieres discussions avec les négociateurs européens a ce sujet ont eu lieu a l’automne 2011 et que celles-ci n’en sont qu’a leurs débuts. Ceci étant dit, malgré certaines différences d’opinions entre le Canada et l’UE, les représentants du MAECI ont néanmoins fait état des nombreux points sur lesquels les deux parties se rejoignent en matiere de protection des investissements.

Les associations de gens d’affaires et les associations industrielles ont profité de leurs témoignages afin de signifier l’importance de l’investissement direct dans la relation économique entre le Canada et l’UE et se sont tous prononcés en faveur d’un AECG qui aiderait a protéger et a promouvoir les investissements entre les deux régions et a s’attaquer aux barrieres existantes en matiere d’investissement.

Malgré une certaine évolution quant au contenu au fil des ans, le libellé et la structure de presque tous les accords de libre-échange du Canada et de tous ses accords sur la promotion et la protection des investissements étrangers sont similaires au chapitre 11 de l’ALÉNA et incluent des clauses permettant de régler directement les différends entre les investisseurs et les États. A ce chapitre, le Comité a noté que, dans le cadre des négociations actuelles avec le Canada, l’UE avait obtenu pour la premiere fois un mandat des 27 États membres afin de négocier un chapitre sur la protection des investissements qui pourrait inclure de telles clauses permettant de régler directement les différends entre les investisseurs et les États.

Certains témoins se sont inquiétés de l’inclusion de clauses permettant de régler directement les différends entre les investisseurs et les États au sein d’un éventuel AECG. Pour Scott Sinclair et Stuart Trew, de telles clauses conferent des droits spéciaux aux investisseurs étrangers qui leur permettent de contourner les systemes judiciaires nationaux et de contester les reglements sociaux, environnementaux et économiques qui nuisent a leur profit. Pour eux, le Canada et l'UE sont dotés de systemes judiciaires murs et respectés. Ainsi, l'inclusion de clauses permettant l'arbitrage des différends entre les investisseurs et les États dans le texte d’un AECG ne serait pas justifiée.

Pour Jason Langrish (directeur général, Forum sur le Commerce Canada-Europe), l’inclusion de telles clauses dans un AECG entre le Canada et l’UE est importante puisque meme si le Canada dépend énormément du commerce et l’investissement étranger, celui-ci ne compte pas sur des ressources comparables a d’autres pays comme les États-Unis ou la Chine. Il est donc irréaliste selon lui de s'attendre a ce que les entreprises canadiennes pétitionnent leur gouvernement pour agir en leur nom a chaque fois que celles-ci ont un probleme relativement a un investissement a l’étranger.

Toujours selon M. Langrish, la disposition concernant les différends entre un investisseur et un État a été avantageuse pour le Canada dans le cadre de l'ALÉNA et cette disposition a été invoquée dans un nombre tres limité de cas par rapport au volume d'échanges commerciaux et aux investissements entre les signataires de l’accord.

Pour d’autres témoins, la clé des négociations pour un AECG entre le Canada et l’UE sera de trouver un compromis entre la promotion des investissements entre le Canada et l’UE et le maintien des pouvoirs des gouvernements en matiere de réglementation. Daniel Schwanen (vice-président associé, Politiques commerciales et internationales, Institut C.D. Howe) a notamment déclaré :

L'ouverture du commerce et des investissements internationaux pour autant qu'elle soit assujettie a des regles convenues assurant une juste concurrence, et que les gouvernements conservent leur capacité d'établir des reglements et des normes pour protéger l'intéret public ou aider les plus défavorisés, sera propice a la création d'emplois durables, a l'innovation et a la croissance économique[16].

L’optique européenne

A la lumiere de ses entretiens a Bruxelles et Paris, le Comité constate que la relation d’investissement entre le Canada et l’UE est aussi valorisée en Europe qu’elle l’est au Canada.

On a fait valoir au Comité l’importance de s’attaquer aux barrieres existantes en matiere d’investissement entre les deux pays. A cet égard, le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG s’est inquiété de certaines mesures canadiennes en matiere d’investissement, notamment la Loi sur Investissement Canada, qui affecte la prévisibilité nécessaire aux investisseurs étrangers dans certains cas.

Le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG a affirmé que les politiques en matiere d’investissement au sein de l’UE sont prévisibles et transparentes. Selon celui-ci, certains États membres s’inquietent d’ailleurs du fait que l’UE semble etre trop généreuse en ce qui a trait a ses politiques en matiere d’investissement comparativement a l’acces et aux opportunités qui s’offrent aux compagnies européennes a l’étranger.

Les représentants d’un État membre de l’UE ont fait savoir au Comité qu’ils considerent que les investisseurs européens sont bien protégés au Canada étant donné l’efficacité et la qualité du systeme judiciaire canadien. C’est pourquoi les négociations avec le Canada pour un AECG en ce qui a trait a la protection des investissements ne représentent guere une priorité a leurs yeux

Marchés publics

L’optique canadienne

On a fait valoir au Comité qu’une plus grande ouverture des marchés publics au Canada, principalement au niveau provincial, territorial et municipal, représente une des priorités des négociateurs européens et il semble a ce niveau que ceux-ci devront obtenir des concessions de la part des provinces, des territoires et des municipalités du Canada pour que les négociations réussissent.

On a rappelé au Comité que la portée des accords commerciaux que le Gouvernement du Canada a négociés par le passé ne s’étendait ni aux gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux ni aux sociétés d’État. Cette situation a toutefois changé en 2010, avec la signature de l’Accord sur les marchés publics entre le Canada et les États-Unis, en vertu duquel les provinces, les territoires et certaines municipalités canadiennes se sont temporairement engagés, pour la premiere fois, a permettre aux sociétés américaines de soumissionner en vue d’obtenir des contrats d’une administration gouvernementale du Canada.

Les représentants du MAECI ont confirmé que le Canada a accepté d’ouvrir certains marchés a l’UE dans le cadre des négociations pour un AECG. Cela étant dit, les représentants du MAECI ne s’attendent pas a ce qu’un AECG Canada-UE modifie la situation actuelle de façon significative en ce qui concerne les marchés publics gouvernementaux. Steve Verheul a dit :

En ce qui concerne les marchés publics gouvernementaux, il faut garder a l’esprit que nous allons ouvrir certains marchés a l’Union européenne, mais nous ne prévoyons pas de changements importants dans la plupart des cas. Notre systeme de marchés publics au Canada est déja tres ouvert. Les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral ont souvent des contrats avec des fournisseurs étrangers; alors, nous ne prévoyons pas un changement énorme[17].

Fait a noter, les négociateurs canadiens bénéficient de l’appui des provinces et des territoires relativement a l’inclusion d’un chapitre touchant les marchés publics dans un AECG entre le Canada et l’UE. A cet effet, Steve Verheul a affirmé :

Lorsque nous faisons une offre a l'UE sur les marchés publics gouvernementaux, cette derniere a reçu l'appui total des provinces et des territoires, qui ont été d'une aide précieuse dans l'élaboration de ces offres. Alors, le processus de consultation est plus poussé que tout ce que nous avons connu auparavant dans ces questions[18].

Bien que la question des marchés publics soit souvent traitée comme un sujet pour lequel le Canada négocie de façon défensive, plusieurs témoins ont rappelé au Comité que beaucoup de compagnies canadiennes dans différents secteurs de l’économie ont également des intérets offensifs sur les marchés publics de l'UE. Ce dernier représente effectivement un marché de plus de 2 billions de dollars qui a été largement inexploité de la part des compagnies canadiennes jusqu’a ce jour. Jean-Michel Laurin et Don Downe ont dit espérer que ce que le Canada concédera aux Européens en matiere d'acces aux marchés publics ouvrirait la porte a des gains similaires pour les entreprises canadiennes au sein de l'UE.

Du point de vue des municipalités canadiennes, Don Downe a également expliqué que les seuils minimums au-dessus desquels les marchés publics seraient visés par un AECG devront etre raisonnables. Des seuils trop bas ou trop larges pourraient obliger les municipalités a lancer des appels d'offres, meme quand ce processus n'est ni réaliste, ni justifié sur le plan financier.

Certains témoins ont exprimé leurs craintes quant a l’impact qu’une libéralisation des regles s’appliquant au mécanisme d’adjudication des marchés publics pourrait avoir sur la capacité des différents ordres de gouvernement au Canada de créer de l'emploi, de protéger l'environnement et d’aider les groupes marginalisés. Theresa McClenaghan (directrice exécutive et conseillere juridique, Association canadienne du droit de l’environnement), par exemple, a dit espérer qu’un AECG ne pavera pas la voie a la privatisation de certains services publics et a une participation du secteur privé dans des services comme l'eau potable et les eaux usées. Celle-ci a affirmé que son association a toujours appuyé la propriété et la gouvernance publiques des systemes d'eau potable et d'eaux usées pour des raisons de responsabilité, de sureté et de rentabilité. Cela étant dit, comme nous l’avons souligné plus haut, le ministre du Commerce international a dit au Comité que les pouvoirs du gouvernement et sa capacité a réglementer n’étaient pas a vendre dans le cadre des négociations sur l’AECG Canada-UE.

L’optique européenne

A la lumiere des entretiens tenus lors de sa mission, le Comité a pu confirmer que l’acces aux marchés publics canadiens, plus précisément la participation et le consentement des municipalités, des provinces et des territoires canadiens, représentait un des principaux intérets de l’UE dans les négociations actuelles.

Les représentants d’un État membre ont tenu a rassurer le Comité que les négociations pour un AECG visent a garantir l’absence de discrimination et une concurrence loyale dans l’adjudication des marchés publics, mais qu’il n’est pas question de favoriser la privatisation de quelque service que ce soit. Selon eux, la question de la privatisation est une question externe aux négociations en cours entre le Canda et l’UE.

Le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG a dit espérer que les négociations actuelles permettront de fournir aux entreprises européennes un acces garanti aux marchés publics des provinces, des territoires et des municipalités canadiennes, d’autant plus que les États membres de l’UE sont prets a en faire autant. En effet, bien que l’UE ait inclus les contrats adjugés par ses entités sous-centrales et des sociétés d’État dans ses engagements aux termes de l’Accord sur les marchés publics de l’OMC, le Canada est exclu de la liste des pays bénéficiaires en raison du principe de réciprocité.

Le négociateur en chef de la Commission européenne pour l’AECG a tenu a noter que malgré les défis qui demeurent, il est confiant que les deux parties trouveront un terrain d’entente sur la question des marchés publics.

Les représentants du Comité social économique européen ont fait écho a l’optimisme du négociateur européen lorsqu’ils ont affirmé qu’il est normal que la question des marchés publics souleve des questions quant a leur impact sur la prestation de services publics. Selon leur expérience, cet enjeu n’est pas problématique en fin de compte puisque la question de la privatisation ne fait pas partie des négociations pour un accord comme l’AECG.

Droits de propriété intellectuelle

L’optique canadienne

Le Comité a constaté que la question des droits de propriété intellectuelle représente un enjeu des négociations pour lequel les revendications de l’UE devraient etre nombreuses. En effet, outre le renforcement de la protection du droit d’auteur, la reconnaissance du systeme d’indication géographique européen et la liste des produits qui s’y rapporte, on s’attend a ce que l’UE demande au Canada de modifier son régime de propriété intellectuelle en ce qui concerne les brevets accordés aux produits pharmaceutiques.

La majorité des témoignages portant sur les droits de propriété intellectuelle ont porté sur ce dernier point, soit les brevets accordés aux produits pharmaceutiques au Canada. Le Comité a constaté qu’il existe des opinions contradictoires quant a l’impact potentiel de modifications du régime actuel au Canada vers un régime qui ressemblerait davantage au modele européen.

Les représentants des compagnies de recherche pharmaceutique du Canada ont expliqué que, selon eux, l'AECG offre l'occasion au Canada de renforcer son régime de propriété intellectuelle en ce qui concerne le secteur des sciences de la vie. Plus précisément, ceux-ci demandent que le Canada effectue certains changements qui bonifieraient le  droit d’appel des innovateurs, prolongeraient de deux ans la protection des données et autoriseraient le rétablissement de la durée des brevets. Selon Russell Williams (président, Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada), les droits de propriété intellectuelle contribuent a protéger et a encourager l'innovation dans tous les secteurs industriels et a chaque fois que le Canada a renforcé son régime a cet égard dans le passé, cela a eu non seulement des effets bénéfiques sur les patients et le systeme de santé canadiens, mais également sur l'économie canadienne.

Toujours selon Russell Williams, les pays européens protegent davantage les droits de propriété intellectuelle que le Canada et, pour la plupart d’entre eux, les dépenses de santé représentent un pourcentage du PIB inférieur a celui du Canada.

Debbie Benczkowski (chef de la direction par intérim, Société Alzheimer du Canada) est venue appuyer la position des compagnies de recherche pharmaceutique du Canada en affirmant que son organisation croit que la réforme des normes relatives a la propriété intellectuelle des médicaments au Canada garantirait la continuité des investissements axés sur les connaissances, lesquels pourraient représenter une somme de 12 milliards de dollars.

Les représentants de l’Association canadienne du médicament générique ne partagent pas le meme avis. S’appuyant sur une étude universitaire qu’ils ont commandée, ces derniers estiment que des modifications au régime de propriété intellectuelle s’appliquant aux brevets accordés aux produits pharmaceutiques en conformité avec les propositions de l’UE dans le cadre des négociations pour un AECG auraient pour effet de retarder la mise en marché des médicaments génériques de trois ans et demi en moyenne. Cela signifie une augmentation de couts de 2,8 milliards de dollars par année pour les systemes de santé canadiens.

Selon Barry Fishman (président du conseil, Association canadienne du médicament générique), des études montrent que la prolongation de la durée des brevets ne se traduit pas par une augmentation des investissements en R-D par les fabricants de médicaments d'origine au Canada. Selon lui, la motivation principale des demandes des compagnies pharmaceutiques relativement au régime de propriété intellectuelle canadien dans le cadre des négociations pour un AECG est l’augmentation de leurs profits, d’autant plus que la plupart d’entre elles ont leur siege social en Europe.

Les représentants du MAECI ont affirmé au Comité bien connaître les positions des différents intervenants canadiens sur la question des brevets pharmaceutiques. Ceci étant dit, a l’heure actuelle, le Canada n’a fait aucune concession dans ce domaine et il est possible que le Canada ne bouge pas sur cette question d’ici la fin des négociations pour un AECG.

Enfin, des représentants des Manufacturiers et exportateurs du Canada ainsi que des Producteurs laitiers du Canada ont dit au Comité que le Canada ne doit pas céder aux demandes de l'UE sur la question des indications géographiques. Selon eux, il ne faut pas nuire a la capacité des producteurs canadiens de dénommer et de promouvoir certains produits agroalimentaires courants, comme le fromage parmesan ou feta.

L’optique européenne

La question du régime canadien concernant les brevets accordés aux produits pharmaceutiques a monopolisé les conversations que le Comité a tenues sur le sujet des droits de propriété intellectuelle lors de sa mission en Europe.

Tant les représentants de BUSINESSEUROPE que ceux de certains États membres de l’UE ont fait savoir qu’une meilleure protection des brevets pharmaceutiques au Canada était une priorité cruciale de l’UE dans le contexte des négociations pour un AECG. Ces derniers ne considerent pas qu’une plus grande protection des brevets se traduise par une hausse notable des couts pour le systeme de santé canadien. Qui plus est, ceux-ci considerent que le Canada tirera profit d’une protection accrue puisque ceci devrait se traduire par une hausse de la recherche et de l’innovation au pays.

Toujours en matiere de droits de propriété intellectuelle, l'UE a manifesté son inquiétude quant a la protection existante des droits d'auteur au Canada. Le Comité note toutefois qu’un projet de loi du Gouvernement du Canada sur la modernisation du droit d’auteur, déposé a la Chambre des communes en septembre 2011, devrait répondre a plusieurs des préoccupations de l’UE.

Le Comité a également constaté que l’UE cherche effectivement a obtenir la reconnaissance officielle du systeme d’indication géographique européen pour certains produits agroalimentaires, principalement des fromages[19].

Tant les parlementaires européens que français ont partagé leur conviction que les négociateurs canadiens et européens réussiront a trouver un terrain d’entente sur les questions de droits de propriété intellectuelle.

CONCLUSION

Les membres du Comité ont entendu des témoignages variés durant leur étude sur un AECG entre le Canada et l’UE. Bien que certains témoins aient soulevé des préoccupations, la majorité d’entre eux  ont mentionné qu’ils appuyaient un AECG et qu’ils étaient d’avis que les effets d’un tel accord seraient positifs pour le Canada. Meme son de cloche en Europe, ou la quasi-totalité des participants que le Comité a rencontrés appuie les négociations actuelles et croit qu’un AECG favorisait l’intégration économique entre les deux régions.

Le Comité a constaté que les négociations pour un AECG entre le Canada et l’UE progressent rapidement comparativement a ce qui est la norme internationale en matiere de négociations d’accords de libéralisation du commerce entre deux ou plusieurs États. A la lumiere de ses entretiens avec des interlocuteurs européens, le Comité conclut également que la crise de la dette souveraine qui sévit en Europe actuellement ne devrait pas avoir d’effets néfastes sur les négociations en cours.

Le Comité salue la participation accrue des provinces et des territoires canadiens au processus de négociation d’un accord qui pourrait etre plus exhaustif que ceux négociés par le Canada dans le passé. Cette coordination entre les différents ordres de gouvernement au Canada devrait faciliter la mise en vigueur d’un AECG, d’autant plus que celui-ci pourrait inclure des engagements dans des spheres de compétence provinciale ou territoriale.

En conséquence, le Comité recommande :

Recommandation 1

Reconnaissant que l’Union européenne est un partenaire commercial historique et naturel, que le Gouvernement du Canada renforce ses liens avec elle et, qu’en 2012, le Gouvernement du Canada conclue avec l’Union européenne un accord économique et commercial global qui procure un avantage net au Canada.

Recommandation 2

Afin d’aider les entreprises canadiennes et de promouvoir les occasions d’affaires au sein de l’Union européenne, que le Gouvernement du Canada s’appuie sur les témoignages des intervenants et les consultations tenues aupres d’eux afin d’inciter les entreprises canadiennes a commercer avec l’Union européenne.

Recommandation 3

Reconnaissant qu’en vertu du Traité de Lisbonne, le Parlement européen a accru son influence et son pouvoir sur la politique étrangere et l’adoption d’accords commerciaux, que le Gouvernement du Canada et le Comité s’emploient a renforcer leurs relations avec les divers groupes politiques représentés au Parlement européen afin d’assurer l’adoption de l’accord de libre-échange économique global avec l’Union européenne.

Recommandation 4

Que le Gouvernement du Canada développe un plan proactif afin d’accroître la valeur ajoutée des exportations canadiennes dans le but de conserver l’acces aux marchés pour les exportations, tout en bénéficiant de plus grandes retombées économiques au Canada et en réduisant les répercussions environnementales.


[1]              La Croatie doit devenir le 28e État membre de l’Union européenne le 1er juillet 2013.

[2]              Toutes les données de cette section proviennent de Statistique Canada.

[3]              La participation des municipalités aux accords commerciaux se fait de maniere indirecte étant donné que les assemblées législatives provinciales adoptent des lois relativement aux municipalités conformément au paragraphe 92(8) de la Loi constitutionnelle de 1867.

[4]              Témoignages, réunion no 5, 6 octobre 2011.

[5]              Témoignages, réunion no 11, 15 novembre 2011.

[6]              Le gouvernement fédéral ne peut pas imposer le respect des traités internationaux dans des domaines ne relevant pas de sa compétence. Lorsqu’un accord touche un domaine de compétence provinciale, seules les assemblées législatives provinciales peuvent mettre en ouvre les dispositions pertinentes. Au bout du compte, toutefois, étant donné que les provinces et les territoires ne signent pas d’accords commerciaux internationaux, il incombe au gouvernement fédéral de défendre ses propres actions, ainsi que celles des provinces et des territoires dans l’éventualité d’un différend dans le cadre de ces accords.

[7]              Témoignages, réunion no 5, 6 octobre 2011.

[8]              Témoignages, réunion no 6, 18 octobre 2011.

[9]              Témoignages, réunion no 5, 6 octobre 2011.

[10]           Témoignages, réunion no 13, 22 novembre 2011.

[11]           En 2010, les biens manufacturés ont représenté 54,3 % de la valeur des exportations canadiennes de biens vers l’UE et 89,9 % de la valeur des importations canadiennes de biens en provenance de l’UE.

[12]           Témoignages, réunion no 6, 18 octobre 2011.

[13]           Témoignages, réunion no 12, 17 novembre 2011.

[14]           Témoignages, réunion no 5, 18 octobre 2011.

[15]           Les sept principes sont énumérés a la page 11 du témoignage de M. Downe, disponible a l’adresse suivante : http://www.parl.gc.ca/content/Committee/411/CIIT/Evidence/EV5177802/CIITEV06-F.PDF.

[16]           Témoignages, réunion no 14, 24 novembre 2011.

[17]           Témoignages, réunion no 5, 6 octobre 2011.

[18]           Ibid.

[19]           L’Accord entre le Canada et la Communauté européenne relatif au commerce des vins et des boissons spiritueuses, signé le 16 septembre 2003, assure une protection des indications géographiques des vins et spiritueux canadiens et européens.