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Monsieur le Président, au cours des dernières années, plusieurs scandales ont effectivement éclaté au sein de la GRC, notamment en ce qui a trait au harcèlement sexuel dont certains membres ont été victimes lors des dernières années. De plus, plusieurs Canadiens se sont vus troublés en quelque sorte par les mesures disciplinaires trop clémentes qu'ont reçues certains des agents accusés d'inconduite grave. Les révélations faites autour de ces scandales ont grandement miné la confiance des Canadiens envers cette noble institution qu'est la GRC. J'aimerais donc revenir rapidement sur ces différents scandales afin de mettre ce projet de loi en contexte.
Plus de 200 femmes qui travaillent et qui ont travaillé pour la GRC au cours des dernières années ont intenté un recours collectif contre la GRC pour harcèlement sexuel. La première audience en cour a eu lieu il y a un peu plus d'un mois, mais le recours collectif n'a pas encore été accepté par les tribunaux. Plusieurs poursuites individuelles d'agentes se sont ajoutées à ce recours judiciaire.
À la suite de ces nombreux scandales, le gouvernement a donc déposer le projet de loi afin de raffermir la confiance du public envers la GRC.
De 1994 à 2011, on a tenu 750 audiences disciplinaires graves d'un bout à l'autre du Canada. Pendant la même période, 206 membres réguliers et civils ont démissionné de la GRC. De 2000 à 2011, on a relevé que 715 nouvelles affaires disciplinaires graves ont été déposées, ce qui représente en moyenne environ 83 cas par année.
Ces différents scandales de harcèlement et cas disciplinaires graves nous amènent à accueillir favorablement le dépôt de ce projet de loi. Le problème de harcèlement est une préoccupation publique urgente pour tous les Canadiens et les Canadiennes.
Depuis des mois, le NPD fait effectivement pression auprès du ministère de la Sécurité publique afin qu'il fasse de la question du harcèlement sexuel dans la GRC une priorité de son ministère. Par conséquent, le projet de loi ne s'attaque malheureusement pas tout à fait et directement aux problèmes systémiques ancrés dans la culture de la GRC et ne permettra pas de changer le climat actuel qui règne au sein de la GRC.
Le ne semble pas avoir pris en compte les différentes recommandations du groupe de travail sur la gouvernance et les changements culturels au sein de la GRC. Ce projet de loi vise donc à simplifier le processus de règlement des problèmes en milieu de travail qui était vu par plusieurs comme étant lourd et mal adapté aux changements des pratiques en milieu de travail.
En 2007, le groupe de travail sur la gouvernance et le changement culturel à la GRC avait qualifié le processus comme étant trop formel, juridique et procédural. Plus récemment, le commissaire Paulson, par l'entremise d'une lettre ouverte à tous les Canadiens, avait fait part de ses inquiétudes concernant le système disciplinaire de la GRC qui était trop archaïque et beaucoup trop lourd sur le plan administratif. Ces problèmes limitent la capacité du système disciplinaire à assurer que la conduite des membres est bien gérée, que des mesures disciplinaires adéquates sont prises dans les cas d'inconduite, ou au besoin à faire en sorte que les mauvais éléments sont tout simplement renvoyés.
À l'heure actuelle, les gestionnaires de la GRC qui doivent régler les problèmes de harcèlement doivent suivre deux processus complètement différents. Le premier est établi par la politique du Conseil du trésor et le deuxième est établi en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Il y a donc une possibilité que ces deux politiques entrent en contradiction, ce qui pourrait amener une certaine confusion à l'égard des droits des parties visées.
Le projet de loi propose donc de donner au commissaire le pouvoir d'établir un cadre unique pour la tenue d'enquête sur les problèmes de harcèlement et le règlement de ceux-ci. De plus, le projet de loi donnera au commissaire de la GRC un nouveau pouvoir de décider des mesures disciplinaires qui seront appropriées. Cela comprendra le pouvoir de nommer et de renvoyer les membres.
La première chose que nous pouvons constater est que le ministre de la Sécurité publique a adopté une solution simpliste devant un problème qui est beaucoup plus large en accordant simplement un pouvoir final au commissaire en ce qui concerne le congédiement des employés, notamment. Ceux-ci sont d'ailleurs un peu inquiets du dépôt de ce projet de loi.
Le projet de loi n'aborde d'aucune façon la syndicalisation des membres de la GRC. La GRC étant le seul corps policier qui n'est pas représenté par un syndicat et qui n'est pas non plus soumis à une convention collective, l'Association professionnelle de la Gendarmerie royale du Canada a donc des préoccupations concernant la sécurité d'emploi des membres de la GRC et le pouvoir extraordinaire que le commissaire s'est vu attribué en matière de congédiement. Mais les conservateurs ne veulent aucunement aborder cette question.
Si le projet de loi donne davantage au commissaire la capacité d'établir un processus plus efficace pour régler les problèmes de harcèlement tout en donnant plus de pouvoir en matière de discipline, il ne pourra établir au sein de la GRC un vrai changement de culture qui est nécessaire pour éliminer les problèmes de harcèlement ainsi que ceux qui sont reliés d'une façon générale à la discipline et au comportement des officiers de la GRC. Pour preuve, le commissaire Paulson a lui-même affirmé que des mesures législatives seules sont insuffisantes pour regagner la confiance du public, et que de profondes réformes sont nécessaires pour s'attaquer aux graves problèmes sous-jacents au sein de la GRC, afin de favoriser un environnement de travail plus ouvert et respectueux pour tous ses membres.
Le commissaire a également mentionné au Comité permanent de la condition féminine que le problème dépasse largement la question du harcèlement sexuel.
Il est nécessaire que cette situation change du tout au tout. Je considère que le ministre aurait dû profiter de ce projet de loi pour y inclure une politique claire afin de contrer le harcèlement sexuel. Le ministre n'a donc pas pris tous les intervenants du milieu policier et civil. Il sera aussi nécessaire que le gouvernement prenne connaissance des conclusions des deux rapports qui devraient éclairer le problème du harcèlement sexuel au sein de la GRC, le problème de la Commission des plaintes du public contre la GRC et l'évaluation de la GRC sur les questions de genre.
Passons maintenant à un autre aspect du projet de loi qui vise à reformer l'ancienne Commission des plaintes du public contre la GRC en mettant sur pied une nouvelle commission civile des plaintes appelée la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes contre la GRC, et en mettant en oeuvre un nouveau cadre afin de gérer les enquêtes sur les incidents sérieux impliquant des membres.
Le projet de loi va établir une nouvelle commission civile d'examen de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada pour remplacer la Commission des plaintes du public contre la GRC.
Ce projet de loi donnera donc plusieurs pouvoirs à la nouvelle commission, dont celui de réaliser ses propres examens des politiques de la GRC pour veiller à l'observation des directives du ministre, des lois et des règles applicables. Il donnera un droit d'accès aux renseignements qui relèvent de la GRC ou qui sont en sa possession. Il établit de nouveaux pouvoirs d'enquête, dont celui de contraindre des témoins et des officiers à témoigner et de rendre obligatoire la production de preuves et de documents. Il permet également à la commission de réaliser des enquêtes sur les plaintes en collaboration avec d'autres organes de traitement des plaintes. Finalement, la commission relèvera du ministre de la Sécurité publique et du commissaire de la GRC, et ses recommandations seront non contraignantes.
Les conservateurs promettent depuis des années de charger un organisme de surveillance indépendant d'enquêter sur les plaintes contre la GRC, comme l'avait recommandé le Groupe de travail sur la gouvernance et le changement culturel à la GRC. Le groupe avait recommandé l'adoption d'un modèle selon lequel un organisme serait chargé d'examiner tout incident ou tout aspect des opérations de la GRC jugé problématique et de proposer des recommandations exécutoires. Or, avec ce projet de loi, nous constatons que la promesse du gouvernement n'a pas été remplie.
La « nouvelle » commission civile des plaintes proposée par ce projet de loi a une étrange ressemblance avec la Commission des plaintes du public contre la GRC, car tout comme elle, la nouvelle commission n'est pas totalement indépendante, malheureusement. Elle fait rapport non pas à la Chambre des communes, mais au ministre de la Sécurité publique. Nous aurions également aimé qu'on accorde plus de pouvoirs à un organe indépendant civil externe, afin d'enquêter sur des accidents graves ayant causé la mort ou des blessures corporelles graves par des membres de la GRC. Ce type d'enquête sera confié en majeure partie aux corps de police municipaux ou provinciaux, et ce, même si beaucoup d'entre eux n'ont pas d'organe d'enquête civile. Certaines enquêtes, selon les circonstances, continueront donc d'être faites par la GRC elle-même.
Les Canadiens veulent que ce type d'enquête soit fait par un organisme externe de la GRC. C'est de cette façon que l'on augmentera la confiance des Canadiens envers notre institution. Le projet de loi ne permet donc pas d'obtenir plus de transparence et une meilleure surveillance indépendante de la GRC. Le projet de loi mène simplement au même organe qui présente des recommandations non contraignantes au ministre.
Nous sommes d'avis que ce projet de loi est un bon pas dans la bonne direction, mais il ne va pas assez loin. Nous allons alors l'appuyer afin qu'il soit étudié en comité, où nous proposerons des amendements.
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Monsieur le Président, en premier lieu, je tiens à vous féliciter de votre nomination et votre entrée en fonctions qui se fait aujourd'hui.
J'ai le plaisir de prendre la parole sur le projet de loi . Le NPD va appuyer le projet de loi C-42 et votera en conséquence en deuxième lecture. Toutefois, on aimerait y apporter des amendements considérables, afin de corriger les aspects les plus problématiques du projet de loi, particulièrement pour améliorer la surveillance et veiller à la tenue d'enquêtes indépendantes. Il convient également d'accroître l'indépendance, vis-à-vis la GRC et le ministre, de la nouvelle commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada.
La confiance de la population canadienne envers la GRC a été mise à l'épreuve au cours des dernières années, compte tenu des nombreux scandales dont la GRC a fait l'objet. Ce sont maintenant les multiples cas d'intimidation et de harcèlement en milieu de travail qui viennent encore noircir la réputation de la Gendarmerie royale du Canada.
Lors de la nomination du nouveau commissaire Paulson en novembre 2011, ce dernier a été très clair sur les priorités qu'il se promettait de défendre et de promouvoir, c'est-à-dire l'imputabilité et le leadership. Il est primordial que le plus important corps de police du Canada rende des comptes et ne donne pas l'impression d'être au-dessus des lois.
Le projet de loi a été déposé afin de moderniser les structures et de les rendre plus efficaces. Il vise notamment à sanctionner ou congédier plus rapidement un membre accusé d'une infraction. Non seulement, par celle-ci, viole-t-il les normes et les lois qu'il est censé défendre, mais il nuit aussi considérablement à l'image de l'organisation.
Dans l'allocution qu'il a prononcée à la suite de sa nomination à la tête de la GRC, M. Paulson a dit:
Le travail que nous faisons est important, mais la façon dont nous le faisons l’est tout autant et peut avoir des répercussions considérables sur la vie des Canadiens. J’en suis conscient.
En un sens, c'est très rassurant de savoir que le commissaire se préoccupe non seulement des résultats, mais aussi du contexte dans lequel le travail pour y arriver est effectué.
Évidemment, la GRC est une organisation immense — je ne l'apprends à personne —, qui emploie quelque 30 000 personnes et dont les activités ont souvent une portée internationale. Le commissaire avouait d'ailleurs avoir « beaucoup de pain sur la planche alors que nous continuons de transformer la GRC. » Faire le ménage dans tout cela n'est pas chose facile, et nous en convenons. Ce projet de loi est un petit pas, mais il reste à voir si cela aidera réellement le commissaire dans l'atteinte des objectifs de responsabilité et d'imputabilité qu'il s'est fixés.
La sortie de la caporale Catherine Galliford, en novembre 2011, a poussé plusieurs autres femmes à suivre ses traces. Dès le lendemain du reportage sur les allégations de Mme Galliford, la policière Krista Carle est sortie publiquement pour dénoncer non seulement les abus dont elle aurait été victime, mais aussi le manque de collaboration et d'empathie de la part de ses anciens supérieurs qui entretenaient le régime de silence et de peur dans lequel devait travailler la victime. Mme Carle affirme: « Je sais qu'au moins six femmes qui ont quitté la force ou qui y sont toujours ont subi du harcèlement ». Elle ajoute: « Je suis certaine qu'il y en d'autres qui craignent de le dire de crainte d'être victimes de représailles ». Le cas de Mme Carle a été réglé à l'amiable en 2007, mais elle a tout de même senti le besoin de dénoncer la situation.
Puis en décembre 2011, la caporale Élisabeth Couture a, elle aussi, intenté une poursuite contre la GRC pour des motifs de harcèlement professionnel. Selon les médias, la jeune femme est actuellement en congé de maladie à cause du stress causé par ces incidents.
Au Manitoba, une autre femme a publiquement dénoncé le harcèlement sexuel et le racisme dont elle aurait été victime. Marge Hudson était la seule policière autochtone au Manitoba à l'époque de son entrée en fonction. Elle aurait connu des années difficiles alors qu'on aurait comploté pour la pousser à démissionner.
Puis, l'ancienne constable Janet Merlo a déposé un recours collectif auprès de la Cour suprême de la Colombie-Britannique au nom de plus de 150 anciennes et actuelles policières, qui allèguent de nombreux cas de discrimination et de harcèlement sexuel au sein de la force.
Le commissaire Paulson s'est dit conscient que le harcèlement existe au sein de la GRC et que ce n'était malheureusement pas un phénomène nouveau, mais que les mentalités doivent changer et que ces comportements ne doivent jamais être tolérés, ce qui est tout à son honneur. « D’abord, je commencerai par m’attaquer au problème du harcèlement et du harcèlement sexuel au travail », a dit M. Paulson le jour de sa nomination.
Plusieurs critiques du projet de loi se demandent comment cette structure plus sévère permettra d'enrayer les problèmes spécifiques du sexisme et du harcèlement en milieu de travail dans la mesure où, bien souvent, ce n'est pas nécessairement le processus de plainte qui est en jeu, mais la reconnaissance du geste et la volonté même d'enclencher ce processus. Le commissaire Paulson l'a d'ailleurs lui-même exposé.
[Traduction]
Le commissaire a dit que de bonnes politiques relatives à la gestion des plaintes sont en place, mais que le problème, c'est de faire en sorte qu'elles soient respectées.
[Français]
C'est la raison pour laquelle on parle plutôt de la nécessité de changer la culture de la Gendarmerie royale du Canada. Le a d'ailleurs défendu l'efficacité de son projet de loi à cet égard en statuant, dans les termes originaux, que:
[Traduction]
En vertu de cette mesure législative, le commandant sera tenu responsable s'il permet qu'une culture négative persiste. À mon avis, cette disposition contribuera énormément à changer cette culture.
[Français]
Malheureusement, nous savons tous qu'aucune loi ne peut forcer un tel changement.
À la suite des conclusions accablantes du rapport Brown de 2007, qui réclamait ni plus ni moins qu'une révision complète de « toute la culture, la gouvernance et la structure de gestion existant actuellement au sein de la GRC », le ministre de la Sécurité publique de l'époque avait refusé la tenue d'une enquête publique, favorisant plutôt la création du Groupe de travail sur la gouvernance et les changements culturels à la GRC.
Le groupe de travail a rendu son rapport en décembre de la même année. Près d'une cinquantaine de recommandations y sont formulées, soit 49, mais trois sont essentielles pour entamer un véritable changement de culture, améliorer la gouvernance et paver la voie à l'application des autres propositions.
La première recommandation consistait à établir la GRC en tant qu'entité distincte au sein du gouvernement ayant son propre statut d'employeur, ce qui impliquerait de lui octroyer le plein pouvoir de gérer ses finances et son personnel dans le cadre de paramètres généraux déjà approuvés par le Parlement.
Ces nouveaux pouvoirs exigeraient une structure différente au sein de la Gendarmerie royale du Canada, ce qui nous mène à la deuxième recommandation, soit la création d'un conseil civil de gestion de la GRC, responsable de l'ensemble du fonctionnement de l'organisation et de son administration, c'est-à-dire la surveillance des finances, des ressources, des services, des biens, du personnel, des approvisionnements, etc., et qui rendrait compte au Parlement par l'entremise du ministre.
Finalement, la troisième recommandation de base du groupe de travail est la création, par voie législative, d'une commission indépendante d'examen des plaintes et de surveillance des activités de la Gendarmerie royale du Canada, soit la CIEPSA. Cette commission aurait les mêmes fonctions que la CEE et la CPP, avec des pouvoirs accrus similaires à ceux d'un ombudsman. Elle présenterait des rapports publics et ses décisions seraient exécutoires pour le commissaire.
David Brown, qui présidait la commission, a affirmé, lors de la présentation du rapport de son groupe de travail, que la GRC n'était pas un ministère comme les autres, et ne devrait pas l'être. Il ajoute, dans son rapport, que:
Sur plusieurs plans, l'approche de gouvernance de la GRC a été fondée sur un modèle de services de police d'une autre époque et conçu uniquement pour cette époque. [...] aucune de ces recommandations ne portera ses fruits si nous ne procédons pas aux changements structurels fondamentaux que nous proposons.
Il serait malhonnête de ne pas reconnaître l'influence des recommandations du rapport Brown et du groupe de travail dans l'élaboration du projet de loi , c'est-à-dire celui dont nous discutons présentement.
Cependant, il semble assez évident que les recommandations au coeur de la réforme prônée par ces deux rapports ont été diluées, notamment en ce qui a trait à la notion de reddition de compte au Parlement et au caractère exécutoire des décisions de la nouvelle commission civile. Pourtant, le rapport Brown dit bien que: « la confiance du public et de la collectivité de la GRC en ces résultats ne s'obtiendra que par une surveillance civile complète. » Selon nous, cette surveillance passe par des rapports publics aux élus.
Quant au statut d'employeur distinct, le projet de n'en fait pas du tout mention.
Étant donné la nature et l'importance des responsabilités qui incombent à une organisation comme la GRC, le groupe de travail avait écrit que:
Pour bien examiner cette question [celle de la gouvernance et de l'administration de la Gendarmerie royale du Canada], il faudrait lancer un débat d'une grande envergure au sujet des politiques publiques sur le modèle de services de police le mieux approprié au Canada et à ses citoyens.
Il est à penser que bien qu'il ne soit pas du mandat du groupe de travail de commander un tel débat, le simple fait de l'avoir écrit prouve l'importance que les membres accordent à cet exercice, d'autant plus que les recommandations qu'ils ont formulées ne semblent pas avoir eu la résonnance escomptée.
Nous aurons une meilleure idée de la réaction des gens touchés lors des audiences en comité. Nous voterons en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture pour qu'il y ait des audiences en comité qui permettront d'examiner à fond le projet de loi. Pour l'instant, les échos semblent nous indiquer que le projet de loi ne va pas assez loin dans la nature et la profondeur des changements apportés à la structure et à l'organisation de la GRC pour assurer un véritable changement de culture.
Le projet de loi vise donc à faire en sorte que les pouvoirs viennent finalement avec des responsabilités, et les membres devront en prendre acte. Mais disons-le, ce projet de loi met beaucoup de responsabilités et de pouvoirs entre les mains du commissaire. Ce dernier aura notamment les tâches suivantes: élaborer les procédures concernant les enquêtes et le règlement des différends lors d'allégations d'inconduite de la part d'un membre; établir un système de gestion informelle des conflits à l'intérieur des balises existantes du Conseil du Trésor. En effet, la dualité des deux systèmes de plainte — un sous l'égide du Conseil du Trésor et l'autre relatif à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada — entraîne souvent des lourdeurs et de la confusion au sein de l'organisation.
On donne ici deux mandats très vastes au commissaire, lesquels devront être utilisés de façon très prudente et très analytique afin de s'assurer qu'il est en mesure de les remplir.
Fait surprenant, cependant, le projet de loi a été déposé sans attendre les résultats de l'examen commandé par le nouveau commissaire sur les relations hommes-femmes et la place de la femme au sein de la GRC, de même que les conclusions de l'enquête indépendante que mène la Commission des plaintes du public contre GRC, ou la CPP, sur le harcèlement en milieu de travail. Ces deux rapports doivent être déposés d'ici la fin de l'année.
Il est vraiment à espérer que le commissaire attendra de pouvoir consulter et de prendre acte des résultats de ces deux rapports avant de procéder à d'autres changements, alors que ces derniers devaient justement servir à mieux cerner les problèmes de harcèlement au sein de l'organisation.
Selon le Bureau du dirigeant principal des ressources humaines du Conseil du Trésor, le projet de loi « [confère] au commissaire des pouvoirs de gestion des ressources humaines semblables à ceux des administrateurs généraux de la fonction publique fédérale et à ceux des chefs de services policiers de grande envergure au Canada. Ceci inclut [notamment] le pouvoir de nommer, promouvoir, discipliner, rétrograder ou mettre fin à l'emploi de tous les membres [...] ».
Ces cas iraient tout de même devant un comité de discipline, mais le commissaire pourrait en appeler de la décision du tribunal, voire la modifier. De plus, ces pouvoirs pourraient être utilisés pour une variété de raisons non disciplinaires, comme l'absentéisme ou le mauvais rendement.
Il est difficile de savoir à quel point ce pouvoir accru du commissaire est lié à la décision controversée du gouvernement de vouloir réduire le nombre de catégories d'employés, passant de trois à deux. Les membres civils, des employés spécialisés sans formation policière assistant directement les policiers, deviendront désormais de simples fonctionnaires, et cette catégorie serait tout simplement dissoute.
D'entrée de jeu, je crois qu'il est important de dire que le rapport Brown et le rapport du groupe de travail qui a suivi étaient tous les deux favorables à ce changement. Cela allait alléger la structure et éviter toute confusion dans les droits et responsabilités des diverses catégories d'employés.
Au-delà des rapports, cependant, deux visions s'affrontent sur cette question, et la décision est loin de faire l'unanimité. D'une part, les quelque 4 000 membres civils perçoivent ce geste de ne plus les considérer comme étant des membres de la Gendarmerie royale du Canada comme un manque de reconnaissance, voire une démotion. L'un deux, sous le couvert de l'anonymat, a d'ailleurs confié que le problème n'était pas de faire partie de la fonction publique, mais plutôt de ne plus être considéré comme étant un membre de la GRC. On accentuerait ainsi le fossé entre ces employés et les membres en bonne et due forme, et ce, pour des considérations budgétaires puisque ce changement mettrait en péril leurs avantages sociaux et ferait épargner plus de 190 millions de dollars au gouvernement. Ce montant a cependant été contesté par le commissaire, qui évalue plutôt les épargnes à seulement 10 millions de dollars par année.
Ce projet d'enlever une catégorie d'employés n'est pas vraiment nouveau. Depuis plus de 15 ans, le gouvernement et la GRC proposent ce changement, sans succès. Malgré tout, cette possibilité n'est plus à l'étude, mais elle devient réalité avec le projet de loi , et ce, malgré un rejet formel de plus de 90 % des membres civils lors d'un sondage interne mené en 2010.
Il est vrai que ces gens n'occupent pas des fonctions policières à proprement parler, mais ils sont bien plus que du personnel administratif.
D'autre part, en acceptant ce changement, les membres civils acquerront grâce à leur situation des protections qu'ils n'avaient pas avant, notamment le droit de se syndiquer et, corollairement, le droit de grève. De plus, ils seront protégés contre les nouveaux pouvoirs discrétionnaires du commissaire octroyés par le projet de loi en matière de ressources humaines. Ils ne seraient plus traités comme des membres, donc avec la même sévérité que les policiers, mais comme des fonctionnaires. Les travaux en comité nous permettront — du moins, nous le souhaitons — de comprendre les deux côtés de la médaille et de mieux cerner les conséquences d'une telle décision.
La responsabilité et l'imputabilité se veulent donc au coeur de ce projet de loi, qui vise, selon le , à s'assurer que la GRC répondra de ses actes autant devant ses membres que devant le public. En créant une commission civile des plaintes contre la GRC, le gouvernement essaie de nous faire croire que l'organisation rendra désormais des comptes à la population.
Or la différence réelle en ce qui concerne la transparence vient simplement du fait que les membres nommés à cette commission ne proviendront pas de la Gendarmerie royale du Canada. Évidemment, c'est la base, mais selon moi, il est malhonnête de dire que la composition de la commission fera en sorte que cette dernière rendra des décisions dont elle devra rendre compte à la population. C'est l'une de nos grandes déceptions liées à ce projet de loi. La GRC devrait rendre des comptes au Parlement et non pas seulement au ministre de la Sécurité publique. De cette façon, la commission serait réellement indépendante.
En conclusion, je crois que la GRC est encore l'un des corps policiers paramilitaires les plus respectés au monde, mais devant l'ampleur des scandales et les pressions du NPD, le gouvernement conservateur a été forcé d'agir avant que la confiance du public ne s'effrite trop. Il faudra donc attendre le travail en comité pour connaître davantage les conséquences du projet de loi, mais une chose est certaine: ce gouvernement avait le devoir d'agir et il a tardé à le faire. Je vous renvoie aux multiples questions qui ont été posées lors de la session précédente, celle du printemps. En effet, période des questions après période des questions, nous avons demandé au de rendre compte de la situation. Il a répondu de façon évasive lorsque la question était posée. C'est ainsi pour la plupart des réponses que nous obtenons à la période des questions.
Le nouveau commissaire a réitéré plusieurs fois son intention et sa volonté d'intervenir. Il reste à savoir si ce que ce gouvernement propose l'aidera ou non. Il ne faut jamais oublier qu'au-delà de sa responsabilité de faire respecter la loi, le gouvernement, qui est l'ultime responsable, doit tout faire en son pouvoir pour dissiper toute apparence d'être au-dessus de celle-ci.
C'est la raison pour laquelle le NPD appuiera, à l'étape de la deuxième lecture, la , parce qu'il y avait des situations urgentes, nombreuses et extrêmement problématiques en ce qui a trait au harcèlement sexuel au sein de la GRC. Nous allons proposer plusieurs amendements à l'étape de la deuxième lecture qui sont, selon nous, essentiels pour que ce projet de loi soit efficace et réponde aux multiples plaintes et critiques formulées par rapport au statu quo non seulement par des membres de la GRC, mais aussi par des personnes en particulier qui se sont rendues jusque devant la cour pour faire valoir leur droit de travailler dans la dignité au sein du corps policier en question. Pour que ces objectifs soient réellement atteints, nous devons veiller à ce qu'il y ait effectivement des mécanismes qui assurent l'indépendance de la commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada — et nous pensons qu'il y a un problème à cet égard —, afin d'améliorer la surveillance et de veiller à ce que la tenue d'enquêtes soit réellement indépendante.
C'est la raison pour laquelle nous demandons au gouvernement, lorsque ce projet de loi atteindra le niveau du comité, de permettre l'analyse la plus exhaustive possible. Ainsi, nous pourrons comprendre réellement quels seraient les mécanismes qui pourraient permettre à ce projet de loi de remplir ce mandat. J'inviterais fortement le gouvernement à prendre acte des divers groupes de travail et commissions, dont le groupe de travail Brown, et le rapport qui a été produit afin de s'assurer que le projet de loi atteindra ses objectifs. Ainsi, on pourra — sans les oublier, parce qu'on ne doit jamais les oublier — finalement mettre de côté toutes les conduites abusives et désastreuses en ce qui a trait à l'atmosphère de travail et s'assurer que les plaintes sont réglées et que des situations comme celles qu'ont vécues ces femmes au sein de la GRC ne se reproduiront plus.
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Monsieur le Président, je veux d'abord vous féliciter pour l'obtention de votre poste.
J'ai le grand plaisir de prononcer ce discours sur le projet de loi . Ce projet de loi concerne la GRC et vise à rétablir la confiance de nos concitoyens et de nos concitoyennes envers cette institution. Il vise aussi à rétablir la confiance des membres de la GRC en leur institution. Il faut comprendre que ceux-ci ont des conditions de travail très particulières. Ils sont appelés à répondre à des situations dangereuses. Selon moi, il est essentiel de rétablir la confiance des membres de la GRC envers leur institution. Nous le leur devons, compte tenu du travail qu'on leur demande de faire.
Il était vraiment temps de tenir ce débat à la Chambre. Plusieurs mesures auraient dû et pu être prises depuis plusieurs années, que ce soit par ce gouvernement ou par les gouvernements qui l'ont précédé. Entre autres, en 2006 et en 2007, plusieurs rapports ont été publiés, dont l'un par le juge O'Connor et un autre par le groupe de travail mandaté pour donner des conseils sur le renforcement de la responsabilisation et de la gouvernance de la GRC.
Dans le rapport du juge O'Connor, publié en 2006, au sujet du cas de Maher Arar, on recommandait au Parlement de mettre en place un organisme de surveillance de la GRC semblable au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité.
En 2007, le Groupe de travail sur la gouvernance et le changement culturel à la GRC suggérait de mettre en place un conseil d'administration indépendant, ce qui permettrait d'assurer aux Canadiens que le gouvernement ne puisse pas intervenir directement dans les activités de la GRC et donner de soi-disant conseils au commissaire, qui relève directement du ministre.
Depuis, plus de 200 femmes membres de la GRC ont déposé un recours collectif destiné à dénoncer les pratiques de harcèlement sexuel au sein de leur organisation. Il y a eu aussi une série de problèmes qui ont miné la confiance des Canadiens en la GRC, notamment des incidents graves comme celui de la mort de Robert Dziekanski.
Ces problèmes ne sont pas nouveaux et sont connus depuis des années. Pour qu'on ouvre le débat, 200 femmes ont dû porter plainte et plusieurs scandales ont dû éclater. Je trouve dommage qu'on ait perdu du temps et qu'on ait aussi mis en danger la santé et la sécurité de certains membres de la GRC, ainsi que, par le fait même, celles de Canadiens.
Je suis infirmière, mais j'ai aussi commencé des études en santé et sécurité au travail. Je m'intéressais particulièrement à la dimension de la santé psychologique au travail. De plus, étant une femme, les situations de harcèlement sexuel m'intéressent. On aurait vraiment été gagnants si on avait travaillé plus tôt à cette question, car en laissant le climat s'envenimer, on s'est peut-être privés du travail de personnes qui, concrètement, auraient pu contribuer à la GRC. Il faut vraiment transformer cette culture organisationnelle. Cette question m'intéresse donc particulièrement.
Par ailleurs, je veux préciser que la GRC a depuis longtemps servi le Canada avec dévouement. Si ces incidents ont ébranlé la confiance du public envers la GRC, je suis toutefois convaincue que celle-ci pourra redorer son blason, reprendre son rôle et regagner la confiance du public et, par le fait même, celle de ses membres.
Ce projet de loi contribue donc à plusieurs choses. Il renforce notamment la confiance du public à l'égard de la GRC en tant qu'institution chargée de la sécurité nationale du Canada. Ce but est extrêmement important et nous sommes tous d'accord là-dessus.
Ce projet de loi vise aussi à renforcer la transparence et la responsabilité publique dans le maintien de l'ordre et de la sécurité. C'est une autre étape essentielle pour restaurer la confiance des Canadiens dans leurs institutions. Ce projet de loi a pour but de réformer les procédures en matière d'enquêtes disciplinaires et de mettre sur pied une nouvelle commission civile des plaintes.
J'aimerais prendre un moment pour parler de cas de harcèlement sexuel et de mauvaise conduite qui sévissent au sein de la GRC et dont on a beaucoup entendu parler. Le harcèlement n'est pas tolérable et ne doit pas être pris à la légère. Souvent, c'est un problème beaucoup plus global qu'un seul cas particulier de harcèlement.
Il y a un cas que beaucoup connaissent et qui s'est passé en Colombie-Britannique. Le fait d'endurer du harcèlement sexuel pendant des années laisse des traces graves chez une personne et peut changer pour le pire sa vie et celle de sa famille, ainsi que sa relation conjugale. Ce sont des choses qu'il faut vraiment prendre au sérieux.
Dans le cas de la GRC, le mécanisme de plainte et de prise de mesures consistant à transférer une personne accusée de harcèlement dans une autre province n'est pas du tout une solution. Si quelqu'un a un problème de harcèlement sexuel, son transfert dans une autre province ne fait que déplacer le problème d'une province à l'autre. Du point de vue de la culture organisationnelle, si une personne accusée d'un tel comportement a tendance à avoir une influence négative sur ses plus jeunes collègues et qu'on la transfère à un autre endroit, on déplace le problème. De plus, on risque d'en créer un nouveau. En effet, des jeunes membres de la GRC seront peut-être influencés par une personne qui a un comportement inacceptable et qui n'a pas nécessairement compris, suite à son accusation, qu'elle devait changer son comportement et savoir ce qui était à l'origine de celui-ci, et de quelle manière elle devait évoluer pour être sûre que cela ne se reproduise plus. En plus de déplacer quelqu'un d'une province à l'autre, on ignore totalement la victime et son traumatisme.
Comme je l'ai souligné, cela peut mettre d'autres femmes en danger ailleurs et faire d'autres victimes. On ignore alors un problème récurrent de culture générale professionnelle qui ne met absolument rien en place pour changer la situation. On parle de culture organisationnelle et générale, mais ce sont simplement des phrases, des petits comportements qui sont normaux pour tout le monde mais qui débouchent sur du harcèlement sexuel. Quand il est question de harcèlement sexuel, il faut revoir la culture organisationnelle et éduquer tous les membres sur ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Il faut aussi qu'ils sachent pourquoi ce n'est pas acceptable, pourquoi quelque chose qui peut paraître banal pour quelqu'un, dans les faits, peut conduire à une fâcheuse tendance. C'est un problème très sérieux qui doit être considéré globalement. Il ne faut pas simplement transférer l'accusé et le déplacer d'un endroit à un autre.
Si l'on veut restaurer la confiance du public dans les institutions de sécurité publique et également celle des membres de la GRC, en particulier les femmes, dans leur milieu de travail, il est très important de proposer des changements au fonctionnement interne de la GRC et des procédures en matière de plaintes. Tous les honorables députés ici à la Chambre s'entendent qu'on ne peut pas se passer de la compétence des femmes dans un milieu de travail comme la GRC. S'il n'est pas inspirant pour une femme d'entrer à la GRC, cette dernière se prive alors du talent de milliers de Canadiennes qui peuvent apporter une contribution exceptionnelle. Ne serait-ce que pour cette raison, il est très important de prendre cette question au sérieux et de restaurer la confiance du public, afin de d'assurer que la GRC ne se prive pas du talent de Canadiennes qui, compte tenu de tout ce qui se passe, pourraient choisir une autre carrière étant donné le risque ou leur manque de confiance dans cette institution.
Elles pourraient ne plus avoir confiance et se dire que, si elles vont travailler à la GRC, elles ne seront peut-être pas protégées. Elles se demanderont si on fera vraiment quelque chose pour elles si elles vivent des situations difficiles. Il est très important de restaurer cette confiance.
Il est inacceptable de continuer à agir de la même manière et il nous faut agir. Nous appuierons donc le projet de loi afin qu'il soit étudié en comité pour y être enrichi, bonifié et vraiment adapté aux besoins des femmes, et afin qu'il prévienne le harcèlement sexuel.
Par ailleurs, si je parle particulièrement des femmes aujourd'hui, j'aimerais préciser que les victimes d'intimidation ou de harcèlement, qu'il soit sexuel ou non, ne sont pas uniquement des femmes. Ce genre de mauvais comportement doit être pris très au sérieux.
Si j'ai insisté autant sur les femmes, c'est évidemment à cause des 200 femmes qui ont déposé un recours collectif. Cependant, je suis consciente que des hommes font probablement face aux mêmes problèmes de harcèlement et d'intimidation, et qui sont incapables d'exercer leur métier dans des conditions normales. C'est aussi inquiétant. Il fallait vraiment passer à l'action pour résoudre ce problème.
Ce projet de loi, en effet, fait un pas dans cette direction grâce à la réforme du processus disciplinaire. Cependant, je trouve dommage et dommageable que le gouvernement ne propose pas qu'on travaille spécifiquement à une politique interne contre le harcèlement afin de définir clairement les pratiques et comportements acceptables et inacceptables, notamment en ce qui a trait au harcèlement sexuel, à la mauvaise conduite et à l'intimidation.
Je voudrais également signaler que les réformes disciplinaires nécessaires à la GRC qui doivent être modifiées en raison de leur longueur et de leur complexité ne devraient pas être décidées à la légère ou faire l'objet d'une solution trop simpliste. Il faut comprendre que la GRC est un milieu non syndiqué. Je pense qu'il est important d'établir un équilibre dans le processus disciplinaire, car le personnel n'a pas d'organisme pour le défendre individuellement.
Comme je le disais, les membres de la GRC consacrent leur carrière à aider et à servir les Canadiens. Il serait inacceptable qu'ils puissent faire l'objet d'un licenciement arbitraire. Il faut réformer le processus disciplinaire pour qu'il soit plus fonctionnel et serve les victimes le mieux possible, mais il ne faut pas tomber dans l'excès inverse.
Par exemple, le projet de loi ajoute de nouvelles dispositions aux clauses relatives aux relations de travail et donne au commissaire de la GRC le pouvoir de nommer et de renvoyer des membres.
Toutefois, le projet de loi donne au commissaire de la GRC la capacité de créer un processus plus efficace afin de répondre aux plaintes de harcèlement sexuel, et j'approuve cet effort.
Depuis des mois, le NDP fait pression sur le gouvernement pour qu'il fasse une priorité de la question du harcèlement sexuel et des mauvaises pratiques dans la GRC. Le projet de loi ne s'attaque pas directement aux problèmes systémiques ancrés dans la culture de la GRC, et nous voulons exprimer clairement que ce projet de loi ne permettra pas, en lui-même, de changer le climat actuel qui règne au sein de la GRC.
Cependant, je pense que c'est un effort qu'il faut poursuivre. Il faut envoyer ce projet de loi en comité pour trouver les meilleures solutions possibles.
J'espère aussi que mes honorables collègues, lorsque ce projet de loi sera en comité, accepteront des amendements et seront ouverts aux discussions. Lorsqu'on parle d'un problème aussi grave, d'un problème qui touche la culture organisationnelle et d'un problème devenu systémique, les solutions simplistes ne suffisent pas. Il n'y a pas de solutions magiques. C'est devenu tellement complexe qu'il faut prendre le temps de s'arrêter.
Je reconnais qu'il est très difficile de déposer un projet de loi parfait au premier tour. C'est d'ailleurs pour ça que le comité est là. Il aura la chance d'entendre des témoins et de discuter du projet de loi pour l'enrichir et le rendre fonctionnel.
Le but de ça n'est pas de se faire du capital politique d'un bord ou de l'autre, mais de permettre à une institution telle que la GRC, qui représente tellement en matière de tradition et d'histoire, de redorer son blason, de récupérer des membres et de susciter l'intérêt des gens qui voient la GRC comme un problème. De plus, cela va susciter l'intérêt des jeunes à vouloir enrichir cette institution.
Tous les honorables députés doivent travailler ensemble et discuter de ce projet de loi avec l'esprit ouvert en cherchant à l'améliorer du mieux qu'ils le peuvent pour faire de cette institution ce qu'elle était auparavant, une institution vraiment remarquable. J'espère vraiment qu'on va constater cette ouverture de la part de mes collègues lorsque ce projet de loi sera étudié en comité.
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Monsieur le Président, je suis heureux de dire quelques mots au sujet de cet important projet de loi. En fait, le Parti libéral est tout à fait favorable au renvoi de celui-ci au comité. Quand le gouvernement a décidé de présenter de nouveau ce projet de loi en juin, il aurait difficilement pu en obtenir le crédit comme s'il s'était agi de l'une de ses initiatives propres, car en réalité, s'il l'a fait, c'est parce que le commissaire Paulson a insisté pour obtenir des changements en raison des limites que comporte son mandat. C'est quand la lettre a été rendue publique que le gouvernement a commencé à prêter l'oreille à certaines de ces préoccupations. Nous reconnaissons que c'est en grande partie grâce au commissaire que nous pouvons avoir ce débat.
Après avoir prononcé le mot « débat » et présenté le projet de loi hier, le gouvernement s'est empressé de proposer une motion portant que la question soit mise aux voix. Or, le député de a posé une question et soulevé des points fort pertinents. Le caucus conservateur compte des députés qui ont fait partie de la GRC, et il serait intéressant d'entendre leur point de vue sur le sujet. Cela risque cependant peu de se produire, puisque le gouvernement a décidé de limiter le temps consacré au débat sur le projet de loi. C'est quelque peu décevant, mais pas du tout étonnant. Depuis que les conservateurs sont majoritaires, leur façon d'agir et de gouverner n'est plus du tout la même. Et le style de gouvernement qu'ils nous imposent depuis ce temps n'a rien de réjouissant.
La conduite des agents de police, qu'ils fassent partie de la GRC ou d'un corps policier local, revêt une importance cruciale pour le public. Mais, ce qui est tout aussi important, c'est la façon dont nous traitons les plaintes à cet égard, et cette question touche l'essence même du projet de loi.
Je voudrais d'abord porter quelques points à l'attention des autres députés, parce que c'est un dossier qui me tient profondément à coeur. J'ai eu l'occasion de servir dans les Forces canadiennes et j'ai tiré une grande fierté du rôle qu'elles jouent dans le monde. Or, il ne faut pas oublier que, pour éviter que cette perception soit ternie et pour faire en sorte que l'on reconnaisse que les Forces canadiennes étaient et continuent d'être une grande institution, il est capital que de nombreuses personnes déploient de multiples efforts.
Quelques personnes à peine suffisent à entacher la réputation de l'ensemble des forces aux yeux du public. Les activités des Forces canadiennes sont surveillées de très près. Lorsque des gestes regrettables sont posés, même s'ils sont réprouvés par la très grande majorité des militaires, ils réussissent malheureusement à influencer les perceptions du public, en raison de l'importance disproportionnée que leur accordent souvent les médias ou de l'angle selon lequel ceux-ci présentent les faits.
Le même principe s'applique à la GRC. En posant mes questions, j'ai souvent parlé du rôle important que jouent les agents de la GRC dans notre société.
J'ai assisté à de nombreuses cérémonies de remise des certificats de citoyenneté où on voyait un agent de la GRC portant la tunique rouge. Après la cérémonie, les néo-Canadiens veulent se faire photographier avec les agents de la GRC. Hier, j'ai parlé des agents de la GRC sur la Colline, et des touristes qui veulent se faire photographier à côté d'eux.
Ce service de police fait généralement l'objet de toutes sortes d'éloges dans le monde entier. De nombreux services de police partout dans le monde ont vu la GRC comme un modèle à suivre dans leur propre pays, parce que le service de police national du Canada a démontré sa grande valeur. Nous devons reconnaître cela d'emblée, car après tout, même si le projet de loi dont nous sommes saisis concerne la conduite des membres de la GRC, je crois qu'il est important de souligner le travail extraordinaire accompli par la GRC au cours des dernières décennies, depuis la naissance de notre pays.
Je peux parler de cas particuliers où j'ai eu le privilège de travailler avec des membres de la GRC, que ce soit lorsque j'étais dans les forces armées, ou quand j'étais député à l'Assemblée législative du Manitoba. À Spruce Grove, il y avait un résidant en particulier, Al Pasquini, un agent de la GRC à la retraite, qui a apporté une immense contribution à cette collectivité. Démontrant beaucoup de bonne volonté, cet homme a notamment été bénévole au sein du Comité sur la justice et les jeunes afin de travailler auprès des jeunes de la collectivité. Sa contribution a été très positive. Al a également travaillé bénévolement avec de nombreux autres organismes. Il arrivait qu'on me téléphone pour me dire qu'il allait être dans tel ou tel restaurant afin de recueillir des fonds pour la lutte contre le cancer.
Si on jette un coup d'oeil à la vie de la plupart des agents de la GRC, on constatera que ce sont des Canadiens absolument remarquables, qui sont très fiers de faire partie de la GRC. Voilà le genre d'histoires qu'il faut faire connaître. Je ne crois pas qu'Al soit unique. Les gens constateront que la majorité des agents de la GRC jouent un rôle très actif, qui va bien au-delà du salaire qu'ils reçoivent, et que ce sont d'excellents ambassadeurs. Grâce aux efforts de ces professionnels, les Canadiens ont, dans l'ensemble, un respect profond et généralisé pour la GRC. J'en suis conscient, et c'est pourquoi je l'ai signalé dès le début de mon intervention.
Comme je l'ai dit, la conduite des agents de police est prise très au sérieux, qu'il s'agisse d'agents de la GRC ou de tout autre corps policier. Quand j'étais porte-parole en matière de justice au Manitoba, les corps policiers, dont la GRC, faisaient l'objet de multiples discussions, notamment à propos de Winnipeg. Nous avons parlé des quelques personnes qui étaient à l'origine des problèmes qui avaient entraîné des perceptions négatives dans la population. Nous avons aussi parlé des problèmes qui peuvent survenir, créer la controverse et nuire au moral des policiers. Ces mêmes éléments s'appliquent à la GRC.
Le harcèlement sexuel n'est pas arrivé du jour au lendemain. C'est un problème qui existe depuis plusieurs années, et je crois que parmi les agents actuels de la GRC, une grande majorité auraient souhaité que le gouvernement agisse beaucoup plus rapidement qu'il ne l'a fait. Il est dommage que le gouvernement ait attendu aussi longtemps avant de proposer une tentative de solution au harcèlement sexuel. Pourquoi le gouvernement a-t-il tardé à se pencher sur ces problèmes sérieux que sont le harcèlement sexuel et le faible moral au sein de la GRC?
Cela étant dit, il m'apparaît positif d'accorder plus de pouvoir au commissionnaire, puisqu'il sera ainsi en mesure de traiter bon nombre des problèmes qui lui sont soumis et qui sont soumis à nos agences.
Pour ce qui est du harcèlement sexuel et des conséquences importantes que ce phénomène a eues sur le service, nous pouvons parler de ce que ces gens ont dû endurer pendant leur carrière. Même quand il s'agit d'un incident unique, c'est un problème très sérieux.
Les membres de la GRC devraient être rassurés de savoir que s'ils ont une préoccupation de cette nature, il y a un endroit où ils peuvent présenter une plainte. Ils devraient avoir l'assurance que lorsqu'ils déposent une plainte, cette dernière sera réglée de sorte qu'ils se sentent à l'aise de demeurer au sein de la force et qu'ils sachent qu'ils seront traités équitablement. Au bout du compte, ils devraient avoir autant de chances qu'un autre d'obtenir une promotion. Par conséquent, une structure doit être en place pour faire en sorte que les gens se sentent à l'aise d'exprimer leurs préoccupations dans leur milieu de travail. Par ailleurs, il faut savoir qu'il y aura des conséquences, qui peuvent varier considérablement.
Au fil des ans, nous avons entendu parler des conséquences sous forme de mesures disciplinaires de toutes sortes, allant d'amendes aux rétrogradations, en passant par des périodes de probation et des congédiements. Ce sont les types de mesures disciplinaires qui sont imposées. Nous devons nous assurer que les gens ont confiance au système pour que le plaignant, que ce soit un membre de la force ou du public, sache que le problème sera réglé d'une manière juste, transparente et responsable.
Je pense que le projet de loi est une tentative de changer le système pour accroître la transparence et la reddition de comptes. Selon nous, c'est une bonne chose puisque le gouvernement fédéral compte de nombreux ministères et qu'on pourrait inclure le secteur privé.
Un incident qui survient au sein d'un ministère ou du secteur privé ne suscite pas autant l'intérêt qu'un incident qui survient au sein d'une force policière, dont on entendra beaucoup parler. À la GRC, dans les Forces canadiennes, voire ici même à la Chambre, si quelque chose d'important se produit, on y accordera beaucoup plus d'attention.
Personnellement, je n'y vois aucun problème, mais je crois que nous devons être conscients de cette situation. Par conséquent, nous devons disposer d'un processus qui permet la prise de décisions relativement rapides pour que, en fin de compte, nous puissions déterminer très clairement s'il y a quelque chose qui cloche. Si c'est le cas, nous devons être rassurés à l'idée qu'une décision sera prise en vue de résoudre le problème le plus rapidement possible.
Selon moi, il est très pertinent d'accorder plus de pouvoirs aux provinces, car tout ne se résume pas à une simple question de perception, bien que celle-ci soit extrêmement importante. Des décisions doivent être prises afin que, autant que possible, des organisations de l'extérieur fassent enquête sur des incidents qui se produisent à l'interne. La GRC ne fait pas exception à la règle. Lorsqu'un incident grave se produit au sein d'un service de police local, celui-ci fait souvent appel à la GRC en sa qualité de tierce partie pour faire enquête et pour formuler des idées quant à la façon de rétablir la situation.
Selon mon interprétation du projet de loi, les gouvernements provinciaux auraient l'occasion de jouer un plus grand rôle lorsque surviennent des incidents graves, ce qui pourrait comprendre diverses questions comme le moment choisi pour tenir l'enquête. À l'étape de l'étude par le comité, il serait intéressant d'entendre les différentes provinces — peut-être même un ministre provincial de la Justice ou d'autres intervenants — nous dire ce que, selon elles, il est important de faire pour que l'on tienne compte du rôle de l'examen indépendant. En fin de compte, qu'il s'agisse d'élargir le rôle joué par les provinces ou d'envisager la possibilité d'accorder plus de pouvoirs au commissaire, ces considérations pourraient faciliter la prise de décisions plus judicieuses et, qui plus est, la capacité de gérer la question du moral de l'effectif qui, parfois, est plutôt bas au sein de la GRC parce que des membres ont l'impression que leurs griefs et leurs plaintes ne sont pas traités convenablement.
Le projet de loi est important pour deux raisons. Premièrement, il vise à faire en sorte que les membres qui se sentent lésés aient le sentiment que justice sera faite s'ils portent plainte. Je pense que cette mesure législative nous aidera à réaliser cet objectif. Deuxièmement, il nous permettra de prendre les mesures nécessaires pour que la population continue de faire confiance à la GRC, et ce, malgré quelques cas isolés. Il faut être conscient du fait qu'un très faible pourcentage des agents de la GRC pourraient être ce que l'on appelle des indésirables qui gâchent tout. La très grande majorité des agents de la GRC se comportent de façon remarquable, aussi bien au travail que dans leur vie privée.
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Monsieur le Président, je suis content de voir que vous assurez de nouveau la présidence cet automne après avoir travaillé d'arracher-pied pour vos électeurs cet été. Ce n'est pas pour obtenir davantage de temps de parole que je dis cela; je tenais simplement à ce que vous sachiez que nous sommes très heureux que vous soyez parmi nous.
J'appuierai le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture parce que, bien qu'il présente un certain nombre de lacunes, il s'agit tout de même d'un pas dans la bonne direction. Nous espérons que le projet de loi protégera mieux les membres de la GRC en milieu de travail et qu'il renforcera la confiance du public dans cette institution. Je tiens à le préciser parce que les policiers, tout comme les autres premiers intervenants, risquent leur vie tous les jours au travail, et les Canadiens leur en sont très reconnaissants. Il est tout à fait normal que les membres de la GRC, dont le mandat est la protection des Canadiens, puissent aller travailler en sachant qu'ils seront eux-mêmes protégés en milieu de travail.
Les gouvernements en situation majoritaire ont la chance de vraiment améliorer les choses et de prendre des mesures concrètes. Malheureusement, le projet de loi ne va pas assez loin. J'appuierai son renvoi au comité parce que je pense que nous pouvons faire en sorte que tant les députés que la GRC soient fiers de cette mesure législative.
Nous pouvons aller plus loin en adoptant une politique anti-harcèlement claire à la GRC qui énoncerait des normes de comportement et des critères précis pour l'évaluation du rendement de chaque employé. Une telle politique est nécessaire pour jeter les bases d'un processus équitable et méthodique. Malheureusement, le projet de loi , s'il était adopté dans sa forme actuelle, est loin du compte.
En outre, le projet de loi ne va pas assez loin pour répondre directement aux préoccupations des femmes qui servent dans la GRC. Les néo-démocrates demandent que des mesures urgentes soient prises pour rendre le milieu de travail plus inclusif et sécuritaire pour les femmes à la GRC. Ce projet de loi a été présenté sans attendre les conclusions de la vérification interne de l'égalité entre les sexes à la GRC, laquelle a été commandée par la commission et est toujours en cours. L'approche des conservateurs n'accorde pas une place prioritaire aux femmes qui servent dans la GRC.
Une autre critique formulée par des membres du public — touchés et préoccupés par les répercussions qu'aurait le projet de loi —, c'est que la nouvelle Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC proposée ressemble vraiment beaucoup à l'actuelle Commission des plaintes du public contre la GRC, surtout parce qu'elle ne serait pas totalement indépendante et ne ferait pas rapport à la Chambre des communes. Elle ferait plutôt rapport au comme c'est actuellement le cas de l'actuelle commission.
La nouvelle commission serait également très limitée dans sa capacité d'entreprendre des enquêtes indépendantes. En outre, ses conclusions seraient présentées uniquement sous forme de recommandations non contraignantes au commissaire et au ministre. Nous devons lever ces restrictions, autoriser la commission à mener des enquêtes vraiment indépendantes et rendre ces recommandations exécutoires. À l'étape de l'étude au comité, nous concentrerons nos efforts sur la levée de ces restrictions qui entravent l'indépendance de la nouvelle commission.
En outre, ce projet de loi ne crée pas d'agence dotée de pouvoirs réels, puisque les enquêtes principales concernant les accidents ayant entraîné un décès ou des lésions corporelles graves seraient dans la plupart des cas confiées aux services de police municipaux ou provinciaux — même si certains d'entre eux ne possèdent pas d'organisme d'enquête civil —, ou continueraient d'être menées par la GRC elle-même.
Le projet de loi est un pas dans la bonne direction, raison pour laquelle je l'appuierai à l'étape de la deuxième lecture, tout en espérant que nous pourrons l'améliorer au comité.
Je crois que le personnel de la GRC mérite mieux et je suis certain qu'en améliorant ce texte de loi nous parviendrons à rétablir la confiance du public à l'égard de cette très importante institution nationale.
Mon collègue d' a formulé des commentaires très intéressants hier, et j'aimerais approfondir certaines des questions qu'il a abordées.
Tout d'abord, il est vrai que la Chambre aurait dû être saisie de ce projet de loi beaucoup plus tôt. C'est urgent, car la confiance de la population à l'égard de la GRC est ébranlée. C'est un problème pour les agents de la GRC, qui font un travail difficile et très dangereux et qui, bien souvent, ne reçoivent pas le soutien dont ils ont besoin dans leur milieu professionnel. Évidemment, c'est aussi important pour les dirigeants de la GRC, qui doivent apporter les changements nécessaires. Mais, d'abord et avant tout, je crois qu'il faut rétablir la confiance des Canadiens à l'égard de leur force de police internationale.
Depuis longtemps, la GRC offre d'excellents services aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Par contre, au cours des dernières années, depuis la période libérale, la confiance de la population à l'égard de la GRC a diminué en raison d'un nombre croissant d'incidents mettant en cause l'usage de la force. Ce problème ne touche pas seulement la population, mais aussi les agents de la GRC.
Le deuxième objectif du projet de loi est de promouvoir l’obligation de rendre compte au public et la transparence des forces de l’ordre. Nous convenons tout à fait que cette question est essentielle si nous voulons atteindre le premier objectif, à savoir rétablir la confiance de la population à l'égard de la GRC. Nous ne pouvons le faire qu'en améliorant la transparence des forces de l'ordre et leur obligation de rendre des comptes au public.
La troisième raison qui justifie la réforme de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, elle aussi énoncée dans le préambule du projet de loi, concerne les rapports de la GRC avec les gouvernements provinciaux et régionaux et les administrations municipales avec lesquels sont conclus des arrangements. Ces arrangements sont conclus de bonne foi, mais les gouvernements jugent souvent qu'ils ne peuvent pas prendre part comme il se doit au maintien de l'ordre ou que les mesures de reddition de comptes de la GRC ne sont pas suffisantes lorsque des événements qui se sont produits dans leur territoire soulèvent des questions.
Une quatrième mesure, comme indiqué dans le préambule du projet de loi, consiste à promouvoir la meilleure conduite possible au sein de la GRC. C'est bien entendu un objectif qu'approuvent les gouvernements, les membres de la GRC et le grand public. Nous savons que pratiquement tous les membres de la GRC s'efforcent d'atteindre ce niveau d'excellence tous les jours. Toutefois, nous devons énoncer clairement ce qui arrive dans les cas où la conduite d'un membre laisse à désirer, en indiquant clairement les conséquences et les procédures, afin que les droits des membres de la GRC qui travaillent au service des Canadiens soient protégés et qu'ils ne soient pas soumis à des procédures arbitraires dans le cadre de mesures disciplinaires.
Enfin, dans le préambule du projet de loi, il est indiqué que la loi doit être modifiée pour créer un cadre qui permet une réforme continue, afin d'éviter que la même situation ne se reproduise dans 25 ans, puisque les gouvernements, les uns après les autres, se sont montrés incapables de résoudre ces questions et de faire preuve de leadership en la matière.
Nous, membres de l'opposition officielle, appuyons les objectifs du projet de loi et je suis d'avis que nous pouvons aller plus loin. Nous pouvons même nous entendre sur les secteurs clés d'intervention signalés dans le sommaire du projet de loi. Bien que dans celui-ci, on compte seulement deux secteurs d'intervention essentiels, j'en vois moi-même trois.
Premièrement, nous convenons que des mesures doivent être prises pour renforcer l’organisme actuel d’examen et de traitement des plaintes pour la GRC. La Commission des plaintes du public contre la GRC a fourni un précieux service, mais nous avons des doutes quant à sa pleine indépendance et sa capacité à superviser des enquêtes indépendantes.
Deuxièmement, nous jugeons qu'un cadre devrait être en place pour les enquêtes sur les incidents graves ayant causé la mort ou des blessures importantes, afin de rendre ces enquêtes plus transparentes. À notre époque, le public est sans équivoque à cet égard: il n'accepte plus que les services policiers mènent des enquêtes sur eux-mêmes lorsqu'il s'agit d'incidents très graves. Nous sommes d'avis que non seulement un processus d'enquête indépendant augmenterait la confiance du public, mais qu'il profiterait aussi aux membres de la GRC, car il garantirait que le public comprend les résultats des enquêtes, en plus de rétablir une fois pour toutes la réputation des membres.
Enfin, il faut revoir les processus de discipline, de traitement des griefs et de gestion des ressources humaines.
Le ministre a cité des témoignages au sujet de choses qui prennent beaucoup trop de temps à se régler, et nous savons tous que c'est vrai. Ce qui manque, c'est une indication claire pour les membres de la GRC quant aux normes à respecter et aux conséquences, justes et équitables, qui s'ensuivraient s'il advenait que ces normes soient transgressées.
De plus, les membres de la GRC qui déposent des griefs doivent pouvoir compter sur le fait que leurs préoccupations seront entendues dans les meilleurs délais et que leurs griefs peuvent être réglés sans qu'on ait à y consacrer de nombreuses années.
Nous sommes donc d'accord avec les réformes proposées à la Loi sur la GRC.
Nous croyons notamment qu'il est essentiel de permettre au commissaire de la GRC de procéder à la réforme des mesures disciplinaires afin de régler les problèmes de harcèlement sexuel au sein de cette organisation. Nous aimerions que le gouvernement fasse preuve de leadership et qu'il accorde au commissaire le mandat d'établir une politique claire contre le harcèlement ainsi qu'un processus clair définissant à la fois les normes de comportement relatives au harcèlement sexuel et des critères précis d'évaluation de tous les employés dans ce domaine très important.
Même si je viens de dire que nous sommes d'accord pour ce qui est des objectifs de ce projet de loi et des domaines qui doivent faire l'objet d'une réforme, je n'ai pas pris la parole aujourd'hui uniquement pour lancer des fleurs au ministre. Nous, de l'opposition, sommes préoccupés par l'inaction des gouvernements libéraux et conservateurs, notamment en matière de transparence et de reddition de comptes.
Le gouvernement actuel est au pouvoir depuis 2006 et, nous en convenons, il a hérité de l'inaction du gouvernement précédent. Toutefois, c'était il y a six ans maintenant, et depuis, trois ministres et deux commissaires de la GRC se sont succédé, et nous commençons tout juste le processus de réforme de la loi visant à en arriver à des mesures qui feront vraiment une différence dans le rendement et la vie du personnel de la GRC en 2012.
Pendant ce temps, plus de 200 femmes membres de la GRC ont déposé un recours collectif concernant des pratiques de harcèlement sexuel au sein de leur organisation. C'est sans compter une série de problèmes qui ont miné la confiance du public en la GRC concernant des enquêtes sur des incidents graves.
Nous avons déjà passé un temps fou sur cette question et disposons de nombreuses études proposant des solutions à ces problèmes. Le gouvernement — et c'est tout à son honneur — a créé un groupe de travail qui a publié un rapport en 2007, il y a près de cinq ans, contenant d'importantes recommandations sur la réforme de la culture de la GRC et de son système disciplinaire, et sur la Commission des plaintes du public contre la GRC.
Il y a eu un examen interne, terminé en 2008, de la politique sur le recours à des observateurs indépendants dans les cas où un corps policier enquête sur ses propres activités.
Pour sa part, le juge O'Connor a formulé des recommandations dans le cadre de son enquête sur l'affaire Maher Arar concernant les activités relatives à la sécurité nationale de la GRC en 2006.
Plus récemment, Paul Kennedy, l'ancien président de la Commission des plaintes du public contre la GRC, a formulé des recommandations, d'abord en 2009, concernant les enquêtes sur des incidents graves, et encore lorsqu'il a comparu devant le Comité de la justice, en janvier de l'année dernière. Il avait alors proposé des solutions pour améliorer l'indépendance du poste qu'il occupait.
Ce ne sont donc pas les idées qui manquent.
Toutefois, à la suite d'une question posée plus tôt au ministre, il n'est pas clair pourquoi le gouvernement donne seulement suite à certaines des recommandations formulées dans les rapports publiés. Il est difficile de déceler le fil directeur de ce projet de loi.
Nous avons dit que le gouvernement devait faire preuve de leadership, mais selon nous, le leadership ne se résume pas aux seules mesures législatives. Je m'en voudrais donc de passer sous silence les mesures prises par le gouvernement à propos de la GRC et de la Commission des plaintes du public.
Pas plus tard que cette semaine, le gouvernement a mis à pied deux employés de la Commission des plaintes du public contre la GRC, alors que cette dernière fait actuellement l'objet d'une réforme et s'est lancée dans un vaste exercice d'examen des plaintes de harcèlement sexuel à la GRC. Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de mettre à pied des employés de la commission alors que celle-ci tente justement de régler la crise des plaintes de harcèlement sexuel dans laquelle nous nous trouvons?
Toujours cette semaine, 149 employés de soutien de la GRC ont reçu un avis de mise à pied, dont 42 seulement en Colombie-Britannique. Or, les services importants que ces gens offrent aident la GRC à faire son travail au quotidien. On ne parle pas ici d'agents en uniforme, mais d'employés qui travaillent un peu partout dans l'organisation, que ce soit au laboratoire judiciaire, au service du recrutement ou ailleurs, et qui s'acquittent de tâches essentielles à la bonne marche de la GRC.
En ce qui concerne la Commission des plaintes du public contre la GRC, le gouvernement a agi de façon plutôt singulière. Quand M. Kennedy a formulé les recommandations musclées que l'on sait à propos des enquêtes, le gouvernement a choisi de ne pas reconduire son mandat. Nommé en 2005, M. Kennedy avait été reconduit dans ses fonctions chaque année depuis. Mais voilà qu'aussitôt qu'il fait connaître ses recommandations, il ne constitue plus le premier choix du gouvernement pour occuper le poste de commissaire aux plaintes du public.
Le nouveau commissaire suppléant, Ian McPhail, d'abord nommé de façon intérimaire pour une période d'un an, vient de voir son mandat renouvelé pour une deuxième année. J'insiste sur le fait qu'il s'agit de mandats d'un an, car la personne qui occupe ce poste devrait être indépendante du gouvernement si elle veut être en mesure de faire son travail et assurer un contrôle civil des activités de la GRC. Or, comment cette personne peut-elle espérer faire son travail en toute confiance quand elle sait qu'elle risque de perdre son poste année après année?
Même si je trouve encourageant que le projet de loi dont la Chambre est saisie porte à cinq ans la durée possible du mandat du président du nouvel organisme civil d'examen, je crains que le gouvernement ne continue à s'en tenir aux nominations renouvelables annuellement, ce qui lui donne beaucoup trop pouvoir sur ce qui devrait être une commission indépendante.
Ce ne sont là que quelques-unes des préoccupations que suscite chez moi le projet de loi . Je dois cependant admettre que je suis content de faire partie du comité qui se penchera sur ces questions, s'il franchit l'étape de la deuxième lecture.
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Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi . Celui-ci s'intitule , mais le gouvernement a choisi d'utiliser le titre court, soit Loi visant à accroître la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada. Le gouvernement aime bien faire du nom des projets de loi une forme d'opération de relations publiques. Ce procédé sert non seulement à camoufler tout ce que prévoit le projet de loi, mais aussi à répondre aux préoccupations de la population.
On peut dire sans se tromper que, jusqu'à tout récemment, la Gendarmerie royale du Canada était une institution à laquelle les Canadiens vouaient un grand respect. Tant les membres des corps policiers que les simples citoyens voyaient dans la GRC l'incarnation d'un système de justice adhérant à des normes élevées en matière de professionnalisme.
J'ai commencé à pratiquer le droit en 1980. À mes débuts, la GRC était reconnue par les autres services de police comme étant le corps policier d'élite du Canada. Les services de police de ma province et d'autres provinces se sont inspirés pendant de nombreuses années des normes de la GRC en matière de formation, de mise en place de procédures, de méthodes d'enquête, de conduite et d'éthique.
Je ne fais que répéter ce que bien d'autres ont dit avant moi, notamment des membres de la GRC. J'ai d'ailleurs parlé à bon nombre d'entre eux au cours des dernières années. On s'inquiète pour l'institution et pour sa capacité d'inspirer le degré de confiance et de respect nécessaire à un corps policier. D'aucuns ont parlé à juste titre de la haute estime dont jouit la GRC de par le monde pour ce qui est de son efficacité, de ses techniques d'enquête, de ses compétences techniques et de son expertise médico-légale qu'elle met à la disposition d'autres services de police partout dans le monde. Grâce à la GRC, nous avons grandement contribué à offrir de la formation dans d'autres pays dans le cadre d'accords internationaux et d'initiatives des Nations Unies.
Nous avons toutefois constaté qu'il existe, parfois à un niveau hiérarchique très élevé au sein de la GRC, un manquement qu'il faut corriger. La plus récente controverse a trait à des plaintes de harcèlement sexuel et, ce qui est encore plus grave je suppose, à l'incapacité à donner adéquatement suite à ces plaintes. Même s'il y a effectivement eu des cas de harcèlement sexuel, comme le rapport publié aujourd'hui l'a souligné d'après un sondage mené auprès de 426 membres de la GRC en Colombie-Britannique, la majorité des répondants n'avaient pas l'impression que cette forme de harcèlement était endémique dans l'organisation. Ils ont toutefois exprimé de la frustration au sujet du traitement réservé aux cas existants et du nombre élevé de cas non signalés.
Cela ne signifie pas que ce problème est endémique dans l'ensemble de l'organisation. Nous ne condamnons pas la GRC à cause de la présence de cas de harcèlement sexuel, mais plutôt pour avoir omis de réagir adéquatement aux incidents qui ont été rapportés et pour avoir omis d'assurer un environnement qui facilite la déclaration de tels incidents, et où les victimes de harcèlement sexuel — car il s'agit à 99 % de femmes — disposent d'un endroit sûr pour soumettre leur plainte sans craindre des représailles.
C'est important. Il est également important que le public ait confiance dans notre service de police national, qui représente notre pays de façon symbolique, que ce soit sur nos pièces de monnaie ou grâce à son Carrousel. La GRC est reconnue à l'étranger comme un symbole à la fois du Canada et de respect. Même le vieil adage, qui se veut un compliment je suppose, selon lequel la GRC attrape toujours le ou la coupable, est emblématique de la bonne réputation dont jouit la GRC dans la culture populaire canadienne. Il faut toutefois procéder à des changements.
Il s'agit ici de déterminer si le projet de loi convient à la tâche. Nous savons que la GRC et que la haute direction de la GRC doivent pouvoir régler les problèmes de comportement inadéquat. Nous savons qu'il doit y avoir une surveillance civile efficace, comme en font foi les nombreux discours prononcés à la Chambre à ce sujet au fil des ans. Il doit aussi y avoir un processus équitable de traitement des griefs, selon lequel toutes les plaintes, qu'elles portent sur le harcèlement sexuel, la rémunération et les avantages sociaux ou encore le comportement d'un agent à l'endroit d'une autre personne, soient traitées de façon équitable et en temps opportun. Voilà ce qu'il faut faire.
Malgré l'atmosphère actuelle, qui nous amène à parler du problème du harcèlement sexuel parmi les principales raisons ayant récemment provoqué un tollé autour de la responsabilité des agents et de la GRC elle-même, il me semble étonnant que ce projet de loi ne prévoie aucune norme et ne contienne même pas un énoncé sur le caractère inacceptable du harcèlement sexuel dans une organisation et dans le cadre des relations de travail. C'est peut-être une question de politique dans certaines organisations. Mais, dans une institution de cette nature, qui est considérée comme quasi militaire et qui est caractérisée par une hiérarchie où les agents doivent obéir à leurs supérieurs, il est particulièrement important de veiller à ce que ceux qui exercent l'autorité sur les autres se voient interdire de façon explicite d'en abuser, particulièrement pour se livrer au comportement gravement répréhensible qu'est le harcèlement sexuel.
Comme l'a mentionné l'intervenant précédent, on nous annonce aujourd'hui les résultats d'une enquête réalisée il y a cinq ou six mois, dans laquelle on a interrogé un nombre assez grand de membres de la GRC en Colombie-Britannique. Selon un rapport interne, les femmes de la GRC ne font pas confiance au système de la GRC pour traiter les plaintes des victimes de harcèlement sexuel. Elles omettent fréquemment de signaler des conduites qui leur semblent condamnables.
Les participantes ont affirmé clairement qu'elles craignaient de signaler les cas de harcèlement parce qu'elles pourraient ainsi nuire à leur avancement et à leur carrière en général. Elles risqueraient de devenir le bouc émissaire de leur superviseur à la moindre occasion.
Certains ont également fait valoir que la GRC est reconnue pour envoyer ailleurs ceux qui font une plainte, au lieu de régler le problème. Dans ce contexte, je dois contester la déclaration que le ministre a faite hier pendant son discours. Selon lui, nous n'avons qu'à donner aux gestionnaires de première ligne le pouvoir de prendre des décisions. En fait, nous n'avons qu'à leur donner plus de pouvoirs pour qu'ils puissent aborder les problèmes qui surviennent.
Nous appuyons le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture et notre porte-parole en matière de sécurité publique, le député d', s'est exprimé de façon très éloquente à ce sujet hier. Nous appuyons la mesure législative, car nous savons qu'il est nécessaire de régler certains problèmes au sein de la GRC, d'accroître la responsabilisation et de donner au personnel la capacité de régler ces problèmes. Cependant, nous devons nous assurer qu'il n'y aura pas uniquement un effet de retour du pendule, dans un sens comme dans l'autre, parce que nous donnons plus de pouvoirs aux hauts placés, sans nous assurer que ce qui doit être fait est bel et bien fait. C'est ma perception des choses et ma crainte à l'égard de cette mesure législative.
Il faut établir des échéanciers en ce qui concerne les griefs. Il faut établir des échéanciers pour régler les situations problématiques. Il faut fixer des normes, plus particulièrement en ce qui concerne la conduite et le comportement. À cet égard, il est souhaitable d'établir un code de déontologie. Cela dit, nous devons également établir une procédure officielle.
Je m'inquiète de l'absence de mesures de contrôle nécessaires lorsque je constate que dans le cadre d'une procédure de règlement des griefs, le commissaire a le pouvoir de prendre des décisions sans appel et exécutoires et qu'il peut déléguer ces pouvoirs à l'un de ses subalternes qui, en retour, peut lui aussi les déléguer à un subalterne. On se trouverait dans une situation où quelqu'un rendrait une décision sans appel et exécutoire sans avoir recours à des tierces parties ou à des civils et sans égard aux normes établies, comme on le fait dans les autres sphères de la vie publique.
Cette préoccupation a été soulevée au sein des forces armées, où la situation est similaire. Les comités des griefs ne font pas assez appel à des gens de l'externe, et tout s'effectue dans le contexte militaire. C'est la même chose dans le cas de cette mesure législative. Le processus de règlement des griefs ne comporterait pas les mesures de contrôle souhaitées.
La plupart des enjeux dont il est question ne se limitent pas nécessairement aux questions concernant la police. Ils portent plutôt sur la rémunération, le traitement équitable ou le fait qu'une allocation de repas a été accordée comme il se doit. Oui, nous devons régler rapidement ces aspects, mais de façon équitable, et non arbitraire.
Nous devons établir un processus en ce qui concerne les griefs et la conduite, qui pourrait donner lieu au congédiement, sans que des pouvoirs soient établis arbitrairement par le commissaire. La mesure législative proposée donnerait au commissaire le droit absolu de nommer ou de renvoyer des membres, mais ces décisions pourraient être revues par un comité de déontologie, ce qui est probablement une bonne chose.
Si on prévoit créer un code de conduite, il faudra que quelqu'un puisse l'interpréter et le faire respecter. Mais après avoir parcouru ce projet de loi, je ne vois pas clairement qui aurait cette responsabilité ni qui ferait partie du comité de déontologie. Ce sont des points que le comité examinerait de près. À titre d'exemple, nous aimerions que le code de déontologie explique précisément ce qu'est le harcèlement sexuel et l'interdise.
Nous avons des codes de déontologie à propos de l'usage de la force. De toute évidence, l'emploi de la force par la GRC et d'autres corps policiers dans certaines circonstances est aussi un sujet de préoccupation pour bien des gens. En Colombie-Britannique, nous avons eu une enquête sur l'affaire Dziekanski. D'autres cas partout au pays remettent aussi en question le comportement d'agents de la GRC ou d'autres corps policiers. Cette question ne concerne pas que la GRC; les normes, ainsi que les comportements et la conduite des agents, sont remis en question.
Ces cas entraînent des poursuites judiciaires, à l'occasion, ou des examens et des enquêtes. Il doit exister un code de déontologie bien établi et des procédures disciplinaires qui s'appliquent quand de telles mesures sont nécessaires. Il faut pouvoir compter sur une procédure bien établie, afin que les agents soient protégés s'ils sont accusés d'avoir commis certains écarts de conduite. Tout cela doit être équitable. Je crois qu'hier mon collègue d' a employé le mot « équilibre ». Il faut trouver un juste équilibre, et non passer directement à l'autre extrême parce que certains considèrent qu'actuellement, personne n'exerce un pouvoir suffisant.
J'aimerais aussi souligner, comme d'autres l'ont déjà fait, qu'une mesure législative ne pourra pas, à elle seule, changer la culture de la GRC. Ce changement doit venir des dirigeants et du travail de sensibilisation. Peut-être faudra-t-il aussi faire participer des gens de l'extérieur de la GRC, qui pourront contribuer à régler certains de ces problèmes. Au sein de la GRC, on sait que ces problèmes existent, puisqu'ils ne sont pas récents. De multiples rapports ont fait état de préoccupations à propos de la structure de la GRC et ont souligné les problèmes qui existent dans cet organisme, mais aucune solution n'a encore été mise en place. Ces solutions ne viendront pas toutes des dirigeants. Les dirigeants doivent assurer le leadership, certes, mais on peut faire venir d'autres personnes qui contribueront à régler les problèmes.
Il s'agit d'un rapport interne commandé après la nomination du commissaire Paulson. Le commissaire lui-même a juré d'éradiquer ce qu'il a qualifié de « comportements mal intentionnés » à la GRC. C'est bien beau de vouloir éradiquer des comportements, mais il faut aussi changer la culture, et ça, c'est une autre paire de manches. Il ne suffit pas d'adopter une mesure législative. Il faut remplacer l'ancienne culture par une autre, axée sur le respect: le respect des autres, le respect des femmes, le respect des citoyens et le respect du fait que les policiers ont le droit d'utiliser la force pour garder la paix. Or, la force doit toujours être utilisée judicieusement. C'est une grosse responsabilité que nous conférons aux policiers. Et nous nous attendons à beaucoup de la part de ceux à qui une telle responsabilité est confiée.
Il est intéressant de signaler que, dans la réponse au rapport interne — un rapport plutôt accablant selon ce qu'on peut lire aujourd'hui dans le Globe and Mail —, la majorité des répondants n'ont aucunement foi dans le processus actuel de signalement. On comprend maintenant pourquoi il y a des cas de harcèlement — sexuel ou autre — qui ne sont pas signalés. C'est pourtant la terrible conclusion à laquelle en viennent les membres de la GRC qui ont participé à la rédaction de ce rapport interne. Résultat: le moral des troupes est au plus bas et la confiance des gens envers leurs supérieurs, et envers la chaîne de commandement elle-même, est ébranlée.
La réaction du commandant divisionnaire de la GRC en Colombie-Britannique, le sous-commissaire Callens, a été d'envoyer une centaine d'agents suivre une formation sur la manière de traiter plus rapidement les enquêtes sur les plaintes et d'en faire le suivi. C'est ce que la GRC a déclaré. C'est très bien de traiter rapidement les enquêtes et d'en faire le suivi, mais ça ne nous dit pas pourquoi il y a du harcèlement sexuel à la GRC. Pourquoi tolère-t-on de tels comportements? Est-ce que ça fait partie de la culture? Y a-t-il des causes plus profondes, auxquelles on devrait s'attaquer non pas à coups de mesures législatives, mais de l'intérieur, à la GRC? On parle d'un travail colossal, et il faudra peut-être avoir recours a de l'aide externe.
Je suis conscient qu'il s'agit d'une tâche imposante et que le Parlement ne peut pas tout régler avec des mesures législatives. Il n'en demeure pas moins que celle dont la Chambre est aujourd'hui saisie constitue un pas dans la bonne direction. Nous voyons d'un bon oeil que les têtes dirigeantes aient les pouvoirs nécessaires pour s'attaquer aux problèmes et pour le faire le plus rapidement possible.
Certaines des mesures qui sont proposées dans ce projet de loi nous préoccupent, cependant. Il devra y avoir de nombreux amendements avant que l'opposition officielle ne le juge acceptable. Nous ferons tout ce que nous pourrons à l'étape du comité pour obtenir satisfaction.
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Monsieur le Président, c'est pour moi un privilège d'intervenir dans le débat sur le projet de loi . Comme nous le savons tous, ce dernier a été présenté quelques jours avant que le Parlement ne s'ajourne pour l'été. Il découle des nombreux défis auxquels la GRC a été confrontée au cours des dernières années, en raison des nombreuses luttes, des scandales de harcèlement sexuel, des processus internes et du sentiment de manque de confiance à l'égard de la GRC, l'une de nos institutions les plus emblématiques.
Je parlerai en faveur du renvoi du projet de loi au comité, car cela nous permettra d'examiner en détail les principaux problèmes qu'il pose. Cependant, avant d'aller plus loin, j'aimerais faire écho aux préoccupations soulevées par l'intervenant précédant au sujet de l'absence de débat de la part d'une partie des députés.
Nous chérissons notre démocratie parlementaire et nous en sommes fiers. Cela ne fait pas longtemps que je siège à la Chambre et pourtant, j'ai souvent été témoin du manque de respect à l'égard de notre démocratie parlementaire. Je n'ai qu'à penser aux motions de clôture et d'attribution de temps, et à tous les stratagèmes utilisés pour museler le débat.
Dans une démocratie parlementaire, le gouvernement propose et l'opposition critique, pas dans l'unique but de s'opposer, mais de débattre — d'abord à la Chambre puis au comité — d'une mesure législative, afin que la version finale qui sera adoptée — après avoir été examinée, débattue et analysée sous tous les angles — serve au mieux les intérêts des Canadiens.
Nous avons été réduits au silence en avril, en mai et en juin — tous ces mois —, mais aujourd'hui je n'éprouve pas le même sentiment étrange à l'égard de cette mesure législative importante que le gouvernement a présentée à la Chambre. Un débat ne se résume pas à une conversation entre quelques personnes. Pour que ce débat soit vraiment efficace, des ministériels doivent répondre aux préoccupations que nous soulevons, répondre à nos questions et expliquer certaines dispositions du texte de loi. Voilà en quoi consiste un débat. Ensuite, nous examinons la mesure législative en fonction de ses mérites.
Je me fais l'écho de l'intervenant précédent qui a dit que l'absence de débat et de réponse d'une partie des députés semble être un manque flagrant de respect à l'égard de notre démocratie parlementaire et de notre rôle de parlementaires élus. Nous sommes ici, dans cette institution très respectée, pour débattre et non pas uniquement pour rester assis en silence.
Je suis très fière de ce qu'accomplit la GRC. C'est elle qui sert la partie Surrey de ma circonscription, , et j'ai toujours été sincèrement impressionnée par le professionnalisme, le dévouement et l'éthique professionnelle de ses agents.
Le gouvernement a présenté un projet de loi afin d'accroître la confiance de la population envers la Gendarmerie royale du Canada et la responsabilité de cette dernière. Cela dit, il ne suffit pas de coucher des mots sur papier pour accroître la responsabilité de la GRC.
Nous demandons à nos femmes et à nos hommes en uniforme d'assumer une lourde responsabilité, celle de protéger les Canadiens, et ils n'y manquent pas. Cependant, nous devons également donner à la GRC les moyens d'embaucher le personnel nécessaire et lui fournir les outils et les ressources requis pour permettre aux membres de remplir leur rôle, que ce soit dans le cadre de leurs fonctions d'agent de la Gendarmerie royale du Canada, de procédures d'enquête ou de démarches de criminalistique ou encore dans la mécanique interne de l'organisme. Le gouvernement sabre 149 postes à la Gendarmerie royale. Il s'agit pourtant du même gouvernement qui ne rate pas une occasion de promettre entre autres l'accroissement de la sécurité de nos collectivités et l'intensification de l'activité policière et de la vigilance. La suppression de postes me semble plutôt contraire à cette position.
Je tiens aussi à porter à l'attention des députés le fait que 42 des postes abolis se trouvent en Colombie-Britannique. Certains de ceux éliminés à l'échelle du pays visent les services chargés des enquêtes et de la criminalistique. Je me demande quelle confiance les gens peuvent accorder à la GRC lorsqu'on ne lui donne pas les outils nécessaires pour s'acquitter de sa tâche. Pour accroître la confiance de la population envers cette institution emblématique, les membres de la GRC doivent pouvoir remplir leur rôle et exercer les fonctions que nous leur avons confiées. Or, nous les privons de certains outils fondamentaux.
Je veux parler de l'un des principaux éléments à l'origine de cette mesure législative, à savoir la litanie d'allégations de harcèlement sexuel au sein de la GRC. Personne à la Chambre n'est en faveur du harcèlement sexuel, où que ce soit, et lorsqu'il y en a dans une de nos institutions emblématiques, dont la raison d'être est de protéger les citoyens, il y a de quoi s'inquiéter. Nous devons nous rappeler que la grande majorité des membres de la GRC ne sont pas concernés par ces allégations. Toutefois, même une seule allégation en est une de trop. Il y en a eu un grand nombre et il faut faire quelque chose.
Ce n'est pas simplement en adoptant une mesure législative que nous pouvons nous attaquer à un problème comme le harcèlement sexuel et à la culture qui, sans l'avoir encouragé, a permis qu'il y en ait, et que nous pouvons changer cette culture et mettre fin au harcèlement sexuel. Lorsqu'il est question des grandes causes du problème, nous entendons dire que la culture doit changer, en l'occurrence la culture hiérarchique et la culture de responsabilisation. Oui, il faut que des lois et des processus soient en place, mais ils doivent être clairs, transparents et indépendants de sorte que les enquêtes et les conséquences ne soient pas l'apanage de ceux qui font partie de l'institution. Toutefois, à titre d'enseignante et de conseillère, je pense que ni le Parlement ni le commissaire ne peut imposer un changement de culture et cela s'applique à n'importe quelle institution. Pour opérer un changement de culture à la GRC, ou dans toute autre institution, il faut obtenir l'adhésion de la majorité. La façon de l'obtenir est de faire participer, de manière significative, la collectivité et la GRC et de veiller à ce que la GRC joue un rôle dans la solution.
Lorsque j'ai lu ce projet de loi, j'ai entre autres été préoccupée par le pouvoir qui serait donné au ministre. On dirait une nouvelle tendance. Prenez l'immigration. Toutes les mesures législatives dans ce domaine qui ont été présentées récemment semblent donner encore plus de pouvoir au ministre de l'Immigration. Mes propos ne visent personne en particulier, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire de donner aux ministres autant de pouvoir et de contrôle.
Il faut chercher à instaurer un processus auquel participeraient les forces policières, les collectivités et les différents organismes de façon à mettre en place des structures jouissant d'une grande indépendance. Si une commission indépendante était chargée d'étudier ce dossier, de qui devrait-elle relever? Du Parlement. C'est le Parlement qui devrait s'occuper de cette question.
Le commissaire a entrepris une enquête portant entre autres sur l'équilibre entre les sexes. Or, son rapport n'a pas encore été publié. Certains éléments du projet de loi sont donc prématurés, mais il aurait aussi fallu, il y a longtemps, prendre des mesures pour régler la question du harcèlement sexuel qui se pose actuellement. On ne peut pas attendre un, deux, trois, voire quatre ans avant de régler les questions de harcèlement sexuel. Nous savons tous le tort que cette situation cause non seulement aux personnes concernées, mais aussi à la GRC. Le déroulement des choses me préoccupe énormément.
Le fait d'accorder autant de pouvoir au ministre et de concentrer les pouvoirs entre les mains du commissaire me préoccupe aussi. J'ai appris au fil des ans que la primauté du droit et l'application régulière de la loi sont des valeurs fondamentales au Canada. Les Canadiens veulent que les personnes qui sont accusées d'un délit bénéficient de l'application régulière de la loi, ce qui ne veut pas dire qu'ils veulent que l'affaire traîne pendant des années devant les tribunaux. Il faut que le processus soit très clair et que les droits des personnes accusées soient respectés. Sans quoi, un danger nous guette, à savoir que tous les pouvoirs soient entre les mains de quelques personnes qui pourraient en venir à croire qu'elles peuvent faire à leur guise sans que les autres ne disposent d'aucun recours. Ce n'est pas ainsi que les choses se font au Canada. Il faut absolument veiller à éviter une telle situation.
Selon moi, personne n'est d'avis que les affaires de la GRC et d'autres institutions ne devraient pas faire l'objet d'une surveillance. Par contre, cette surveillance doit nous faire progresser, non creuser des fossés.
J'ai pu discuter avec des agents de la GRC dans ma circonscription. L'été est le temps de l'année où nous retournons dans nos circonscriptions pour rencontrer nos électeurs dans des barbecues et sur la rue. D'autres personnes viennent nous voir individuellement. Mes conversations avec des agents de la GRC m'ont beaucoup impressionnée. C'est un groupe qui a l'impression d'être accablé actuellement. Ils sont tenaillés par l'insécurité et le sentiment que suscitent en eux l'évolution actuelle des choses, l'inconnu qui les attend et l'épée de Damoclès qui leur pend au-dessus de la tête. Ils craignent d'être moins bien outillés et de devoir en faire quand même davantage. Ils ne savent même pas quels seront leurs recours et leurs droits lorsque les nouveaux systèmes seront en vigueur.
Lorsque des gens comme ces agents sont inquiets de la sorte, eux qui ont des années d'expérience au cours desquelles ils ont servi vaillamment leurs concitoyens, nous devons leur prêter une oreille attentive. Un projet de loi aussi obscur et tortueux que celui-là engendrera davantage de confusion et ne tient pas vraiment compte des mesures à court terme dont nous avons parlé en mai et en juin. Nous avons besoin de ces mesures immédiatement. Nous devons aussi établir des mécanismes indépendants, mais équitables pour tous.
Je ne pense pas qu'on puisse rechercher pour soi un traitement équitable qui désavantage les autres. Le projet de loi qu'on nous propose d'adopter à la Chambre des communes doit mettre à la disposition des hommes et des femmes qui portent l'uniforme les recours dont ils ont besoin et auxquels ils ont droit.
Remettre le pouvoir entre les mains du ministre constitue une tout autre orientation. Les services de police n'ont plus alors l'indépendance et le professionnalisme que nous attendons. Si le ministre dispose de pouvoirs extraordinaires lui permettant d'annuler les décisions, de donner des ordres et de déléguer des responsabilités partout et en tout temps, l'instabilité gagne la GRC et la société en général parce qu'on ne sait plus clairement qui prend les décisions, qui est en fin de compte responsable et qui doit rendre des comptes pour ces comportements.
Je suis devenue enseignante parce que je suis convaincue que toute situation peut être améliorée. J'espère que, lorsque nous en serons à l'étape de l'étude du projet de loi par le comité, dont notre porte-parole fait partie, les membres issus de l'opposition se verront accorder le temps nécessaire pour apporter au projet de loi des amendements qui le rendront plus acceptable pour l'opposition et nous permettront en outre de mieux progresser.
S'il y a une chose que j'ai apprise au fil des ans, tant auprès des enfants que des adultes, c'est que ce n'est pas en punissant les gens qu'on arrive à faire changer leur comportement. Par conséquent, cela ne donnera rien de légiférer davantage en ce sens.
Je recommanderais vivement que la GRC joue un rôle plus actif. Ses agents sont très préoccupés par l'atteinte à leur réputation. Ceux à qui j'ai parlé sont aussi indignés et bouleversés que nous par les cas de harcèlement sexuel et les autres scandales. Ils veulent faire partie de la solution. Je pense qu'il n'est ni astucieux ni stratégique de les écarter de la solution, ou du groupe qui trouvera une solution, et je me demande si l'on veut sérieusement aborder les problèmes qui existent au sein de la GRC et qui exigent notre attention.
Je le répète, j'exhorte le gouvernement à revoir sa position qui consiste à centraliser les pouvoirs dans les mains des ministres et qui n'est pas dans l'intérêt de notre démocratie. J'exhorte aussi le gouvernement à débattre de la question. Nous sommes à la Chambre des communes, là où des débats ont lieu entre différents partis. Si je siégeais du côté du gouvernement, je voudrais prendre part aux discussions sur une mesure législative si je la prenais au sérieux. Rester tranquillement assis gaspille l'argent des contribuables et va à l'encontre de la démocratie parlementaire, parce que les contribuables nous élisent pour que nous participions activement au Parlement. C'est pour cela que nous sommes ici.
Je pourrais aborder de nombreux autres sujets, mais je vois que mon temps de parole est écoulé. Je conclus en disant que nous ne pouvons pas changer une culture ni bâtir la confiance ou renforcer la responsabilité en écrivant des mots sur du papier, mais plutôt en agissant et en faisant participer les gens de façon constructive et respectueuse.
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Monsieur le Président, avant de commencer, j'aimerais remercier ma collègue de de ses commentaires. Nous discutons de la participation des députés à l'adoption du meilleur texte de loi possible. De ce côté-ci de la Chambre, au Sénat et ailleurs, nous avons des gens venant d'horizons différents et qui pourraient être très utiles.
Si l'objectif est d'améliorer un texte de loi, tous les députés devraient en débattre et en discuter ouvertement. C'est ce qui est censé se passer à la Chambre. Les ministériels semblent déjà avoir le sentiment du devoir accompli et sont prêts à faire adopter cette mesure législative. Manifestement, nous avons l'intention de faire notre devoir de député, c'est-à-dire examiner la mesure législative, la commenter et essayer de l'améliorer. Avec le concours des nombreuses personnes intelligentes qui siègent à la Chambre, tous partis confondus, je suis certaine que nous y parviendrions si la démocratie suivait son cours et si on nous permettait de participer en bonne et due forme au processus législatif.
En tant que porte-parole libérale en matière de condition féminine, je suis particulièrement contente de pouvoir intervenir dans le débat sur ce projet de loi. Je travaillais sur ce dossier depuis plus d'un an lorsque j'ai commencé à recevoir de nombreux appels d'autres membres de la GRC concernant le harcèlement sexuel. Je suis ravie de constater que le gouvernement a pris des mesures et a répondu aux appels du commissaire Paulson et d'autres intervenants qui lui demandaient d'améliorer les mesures législatives existantes et de délier les mains du commissaire.
Est-ce suffisant? À mon avis, le texte de loi est incomplet dans sa forme actuelle, mais nous allons corriger ses lacunes à la Chambre et au comité.
Comme le savent la plupart des députés, de nombreux députés ont été informés de cas de harcèlement sexuel et professionnel à la GRC et s'impliquent dans ce dossier. Cependant, il est malheureux qu'il ait fallu tant d'incidents pour que le gouvernement décide finalement de réformer, à contrecoeur, la GRC. Néanmoins, c'est une première étape. Allons-y une étape à la fois.
D'entrée de jeu, je tiens à dire très clairement qu'à l'instar de tous mes collègues à la Chambre, j'éprouve le plus profond respect envers la GRC et tous les agents des diverses divisions et villes qui travaillent sans relâche pour assurer notre sécurité. Au fil des ans, la GRC est devenue un emblème fier et honorable de notre pays. Lorsqu'on demande aux gens ce qu'ils pensent du Canada, une des premières choses qui leur viennent à l'esprit, ce sont les gendarmes de la GRC et leur tunique rouge. Nous sommes très fiers d'eux. J'ai bon espoir que, grâce au travail du commissaire Paulson et d'autres responsables, les changements nécessaires seront apportés à cette organisation.
Malgré cet héritage, au cours des dernières années, la GRC a acquis une très mauvaise réputation, surtout parce qu'elle n'a pas réussi à composer avec certaines réalités culturelles internes, ce qui, malheureusement, lui a valu des critiques très négatives. Le projet de loi constitue peut-être la première étape à franchir en vue de régler certains de ces problèmes. Je dis « certains de ces problèmes », car je ne suis pas convaincue que cette mesure législative permettra de régler tous les problèmes qui ont été relevés. Je crains qu'elle n'atteigne pas son objectif si le gouvernement n'est pas disposé à écouter les personnes touchées. Le problème ne se situe pas simplement au niveau des processus; il est beaucoup plus profond que cela.
Dernièrement, je me suis entretenue avec le sénateur Roméo Dallaire, que nous connaissons tous. Nous sommes au courant des exploits militaires du sénateur Dallaire qui relèvent carrément de l'héroïsme. Au cours de cette conversation, le sénateur a fait des rapprochements entre la situation des forces armées au début des années 1990 et celle de la GRC de nos jours. Nous nous souvenons tous de certains des défis auxquels le MDN a dû faire face au début des années 1990. La plupart de ces problèmes étaient attribuables à une forme de culture qui n'avait pas changé ou qui était dépassée. Les forces armées faisaient les manchettes pour des raisons très négatives et les commentaires dévastateurs fusaient de toutes parts. Par conséquent, la confiance du public à l'égard des forces armées a de nouveau été ébranlée, et on a exigé des changements véritables. À l'époque, il fallait moderniser la culture militaire.
Une bonne partie du contenu du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui vise à faire avancer les choses. Cette mesure législative a pour objet de moderniser l'organisation et de changer des choses qui n'étaient pas acceptables il y a 20 ans, mais qui, pour une raison ou une autre, ont perduré. Dans bien des cas, les femmes sont victimes de harcèlement sexuel dans différents contextes. Il semble que, dans certains milieux, comme celui des forces armées ou de la police, les risques de faire l'objet d'intimidation ou de harcèlement sexuel soient plus nombreux.
Le gouvernement libéral avait un problème à régler lorsqu'il a tâché de remédier aux résultats d'une publicité très négative au sein des forces armées et à leur sujet. Le gouvernement libéral de l'époque a apporté les changements voulus. Il a modernisé le ministère de la Défense nationale et les forces armées. Il a mis en place une équipe de la haute direction qui a changé en profondeur les Forces armées canadiennes. Cette équipe avait été expressément chargée de modifier la culture militaire à différents égards: la façon de se traiter mutuellement et de traiter les personnes de différents niveaux de même que la nécessité de se respecter les uns les autres et d'exclure le harcèlement de la culture de l'organisme. C'était faire preuve d'un véritable leadership, et c'est ce genre de leadership qui est de nouveau nécessaire pour s'attaquer au harcèlement sexuel et à l'intimidation en milieu de travail qui, à ce qu'on entend, ont cours au sein de la GRC.
Le commissaire lui-même le demande. Le commissaire Paulson a témoigné devant le Comité permanent de la condition féminine. Il a bel et bien dit qu'il avait besoin que des modifications soient apportées à la loi pour lui délier les mains et lui permettre de prendre des mesures efficaces à l'égard de ceux dont il sait qu'ils ne respectent pas les règles comme ils le devraient. Je veux bien être optimiste, mais je constate davantage une réaction prudente reposant sur une stratégie de relations publiques qu'un leadership de ce genre.
C'est en partie pourquoi il est si important qu'on débatte de la question à la Chambre et que ce projet de loi sont renvoyé au comité, où on pourra vraiment en débattre et le renforcer afin qu'il ne devienne pas simplement une opération de relations publiques, et qu'il serve véritablement à résoudre les problèmes qui, nous le savons tous, existent au sein de la GRC.
Les 138 personnes qui ont porté plainte pour harcèlement à l'endroit de la GRC ont posé un geste grave, qui risque fort de mettre fin à leur carrière, mais tel ne devrait pas être le cas. Ces personnes savent qu'elles ont mis fin à leur carrière, mais elles croyaient suffisamment à la GRC pour vouloir qu'un changement s'y produise malgré tout.
Le commissaire de la GRC n'aurait pas non plus dû être obligé de faire une sortie publique pour forcer le gouvernement à réagir aux problèmes existant au sein de la GRC. C'était irresponsable de la part du gouvernement. Manifestement, le commissaire avait le sentiment que la seule façon d'aborder le sujet en public était devant le Comité permanent de la condition féminine. Il jugeait que c'était nécessaire. Une telle déclaration était pour lui le seul moyen de provoquer des changements. Encore aujourd'hui, selon le Hill Times, les ministériels qui font partie du Comité permanent de la condition féminine répugnent à aborder la question de façon ouverte et transparente.
Je félicite le comité permanent, dont je suis la vice-présidente, de s'être attaqué au problème du harcèlement et du harcèlement sexuel. Plutôt que de se concentrer uniquement sur la GRC, comme je l'aurais préféré, le comité élargit son champ d'action et se penche sur une douzaine de ministères fédéraux. Nous examinons les politiques en matière de harcèlement sexuel. Certains ministères en ont une, d'autres pas. Tous devraient en avoir une. Je tiens à féliciter le comité pour le leadership dont il fait preuve à ce sujet. Un examen en règle de la question du harcèlement sera bénéfique pour les ministères et les employés fédéraux, et servira d'exemple aux provinces et aux Canadiens. Voilà ce que j'aimerais que le comité fasse. Je félicite le comité de son initiative. Il a fallu jouer des coudes pour y parvenir, mais c'est fait. Nous allons nous pencher ensemble sur ce dossier cet automne.
C'est tout bonnement insultant, pour des gens comme Jamie Hanlon, Nancy Arias et Catherine Galliford, que le gouvernement hésite à se pencher sur la question des changements qui doivent être faits à la GRC. Ces personnes rêvaient de faire partie de cette institution, mais leur rêve s'est transformé en cauchemar lorsqu'elles se sont trouvées face à un système qui, selon certains témoignages, tolérait, voire favorisait parfois, le harcèlement
Ces questions doivent être réglées. Les mauvais traitements, l'intimidation sexuelle et le harcèlement professionnel ne devraient jamais être tolérés. Il ne devrait y avoir de tels problèmes dans aucun organisme canadien, surtout pas à la GRC.
Pour vous en donner une idée, je tiens à lire un passage d'un courriel que j'ai reçu et qui a été écrit par une victime de harcèlement sexuel à la GRC. Voici ce que cette femme a dit au sujet du projet de loi :
Le projet de loi C-42 est une mesure importante qui fait progresser les choses. Par contre, il ne règle pas du tout la grave question de la violence au travail qui existe depuis plus de 20 ans à la GRC. C'est pour cette raison qu'il est impératif qu'on écoute ce que les victimes ont à dire et que les gens aient à rendre compte de leurs actes. C'est le seul moyen de faire collectivement progresser les choses.
Il s'agit là d'une déclaration très importante de la part d'une personne qui sait ce qui se passe, qui a été victime de ce genre de harcèlement et qui veut que la situation s'améliore à la GRC.
Quoi qu'il en soit, bien des services policiers suivront la situation de près, car beaucoup de choses se produisent dans notre merveilleux pays qui, pour toutes sortes de raisons, ne sont pas déclarées.
Personne ne veut perdre son emploi. Personne ne veut compromettre ses chances d'avancement, ce qui est un risque encore trop réel. Or, il s'agit de problèmes extrêmement sérieux. J'espère que le Comité permanent de la condition féminine donnera l'occasion à ces femmes de se faire entendre. Les hommes aussi ont leur mot à dire, mais il faut écouter ces femmes, parce qu'elles sont là pour les bonnes raisons. Elles veulent que les choses changent et s'améliorent. Je suis d'accord, et j'espère sincèrement que le gouvernement s'attaquera sérieusement à ce problème lorsque le projet de loi sera renvoyé au comité.
Dans le même ordre d'idées, en mai dernier, le commissaire Paulson, de la GRC, a fait état, dans une lettre ouverte, des contraintes qui l'empêchent actuellement de se débarrasser de ce qu'on pourrait appeler les « pommes pourries » de son organisme. Jamais, en 13 ans, je n'avais encore vu le dirigeant d'un ministère, un sous-ministre ou un commissaire envoyer une lettre ouverte à un journal pour demander qu'on l'aide à faire le ménage dans son organisation. Il lui a fallu une dose incroyable de courage. Le a pris la chose très au sérieux, s'est attelé à la tâche et a présenté le projet de loi .
La lettre ouverte du commissaire allait dans le même sens que le témoignage qu'il a livré devant le Comité permanent de la condition féminine. Il avait alors déclaré que, selon ses agents, la GRC était incapable de régler ce problème. Ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est le commissaire Paulson, le chef de la GRC.
Si on se rappelle la manière dont les libéraux ont réagi quand ce problème est survenu dans l'armée, ils créeraient aujourd'hui un groupe distinct, formé de gens ne faisant pas partie de la GRC, et le chargeraient de s'attaquer à tous ces problèmes et de recommander des solutions. En plus du travail que nous faisons dans le cadre du projet de loi , il devrait y avoir une équipe distincte, formée de spécialistes du domaine, qui produirait des résultats tangibles.
Quand on y pense, il aura fallu que le commissaire soit exaspéré au point d'appeler à l'aide pour que le gouvernement intervienne.
Le ministre dira certainement qu'il prend les mesures qui s'imposent, mais je ne vois pas en quoi le fait de réorganiser le système de traitement des griefs et de donner plus de pouvoirs au commissaire changera quoi que ce soit aux nombreux cas comme celui du tristement célèbre sergent Don Ray. Ce dernier a avoué que, pendant trois ans, il a eu des relations sexuelles avec des subalternes, a consommé de l'alcool en leur compagnie sur les lieux de travail et les a harcelées sexuellement. Il a également abusé de son autorité en favorisant l'embauche de femmes.
Ce sont des gestes très compromettants de la part d'un agent de la GRC. Que lui est-il arrivé? Au lieu de faire face à des accusations, le sergent Ray a été privé de 10 jours de salaire. Il a intimidé et harcelé des femmes en service et tout cela a duré des années. Des femmes auraient été renvoyées, licenciées et ainsi de suite, mais qu'est-il arrivé au sergent Ray? Il a été suspendu pendant dix jours et a été muté à un autre détachement.
Je me demande où se trouve cet autre détachement. Si, à Edmonton ou au Manitoba, une femme a de la difficulté à rentrer chez elle, est-ce que le sergent Ray, par une nuit obscure, l'aidera à réparer sa voiture par exemple alors qu'elle est coincée? Je ne me sentirais pas en sécurité de le savoir dans les environs. Il est tout à fait incroyable qu'il s'en soit tiré avec une suspension de 10 jours.
Quoi qu'il en soit, je pense que nous pouvons convenir qu'il ne s'agit pas d'une erreur administrative. Le problème est beaucoup plus grave.
C'est justement pour cela que je pense que le projet de loi ne suffirait pas à aborder les problèmes de culture sans un véritable débat, qui devrait avoir lieu à la Chambre, sans un dialogue ouvert et sans plusieurs amendements proposés par le comité.
J'espère que le comité sera en mesure d'amender le projet de loi, que ses travaux ne seront pas paralysés et qu'il pourra entendre des gens qui occupent divers postes à la GRC, qu'ils fassent l'objet de poursuites ou d'autres mesures. J'espère que l'on permettra à ces personnes de témoigner devant le comité et qu'on les encouragera à le faire. Ainsi, le comité aura un portrait global de la situation. Il pourra apporter les amendements nécessaires et recommander la formation d'une équipe qui veillera à ce que les changements requis soient apportés au sein de la GRC. Nous ne voulons pas d'un autre projet de loi qui n'a pas de mordant et qui n'a aucune capacité réelle de faire quoi que ce soit.