La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, et de la motion voulant que cette question soit maintenant mise aux voix.
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Monsieur le Président, essentiellement, le projet de loi donne suite à plusieurs recommandations soumises en 2003 par le très honorable Antonio Lamer, ancien juge en chef de la Cour suprême du Canada, concernant la Loi sur la défense nationale. Il faut comprendre que si le système de justice militaire fait partie intégrante du système juridique canadien et que son existence est expressément reconnue par la Charte canadienne des droits et libertés, il s'agit d'un système parallèle distinct du système de justice civile. Ce système distinct de justice militaire au sein des Forces canadiennes a un important rôle à jouer, car il est chargé de répondre aux besoins particuliers de la communauté militaire, notamment en matière de discipline, d'efficacité et de moral des troupes.
Il est important d'abord de noter que plusieurs tentatives législatives ont été faites afin d'implanter le rapport Lamer de 2003. Avant les dernières élections, les députés ont travaillé studieusement afin de modifier l'ancêtre du projet de loi , soit le projet de loi . Le NPD avait réussi à faire adopter plusieurs amendements afin de mieux protéger les intérêts des hommes et des femmes qui servent dans les Forces canadiennes. Le NPD avait, par exemple, apporté des changements concernant l'autorité du chef d’état-major de la défense dans le processus de griefs. Nous avons aussi réussi à modifier la composition du comité des griefs afin qu'il soit composé de civils dans une proportion de 60 %, et nous avons réussi à faire en sorte qu'une personne condamnée pour certaines infractions mineures pendant un procès sommaire ne reçoive pas de casier judiciaire.
Profitant de la mort du projet de loi au Feuilleton et de sa nouvelle majorité parlementaire, le gouvernement conservateur a choisi de jeter aux poubelles le compromis obtenu lors de la législature précédente. C'est du gaspillage et c'est antidémocratique.
Nous appuyons plusieurs mesures contenues dans le projet de loi . Nous souhaitons depuis longtemps la mise à jour du système de justice militaire. Après tout, les membres des Forces canadiennes sont soumis à des normes de discipline très élevées et méritent un système judiciaire soumis à des normes comparables. Cependant, nous trouvons que le projet de loi pourrait aller beaucoup plus loin. Nous devons profiter du projet de loi C-15 pour réformer les systèmes de procès sommaires et de griefs, et renforcer la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire.
Commençons par les procès sommaires. Il est important de savoir que la plupart des questions disciplinaires sont jugées au niveau du procès sommaire. Il s'agit habituellement d'infractions moins graves. On pense, par exemple, à l'insubordination, les querelles, les écarts de conduite, les absences sans autorisation, l'état d'ébriété et la désobéissance. Il y a deux problèmes liés à ce système, à notre avis. D'une part, plusieurs offenses mineures sont passibles d'un casier judiciaire. Ces offenses sont sans doute très importantes pour la discipline militaire, mais elles ne méritent pas un casier judiciaire.
Beaucoup de Québécois et de Canadiens seraient choqués d'apprendre que les gens qui ont servi notre pays avec bravoure peuvent avoir un casier judiciaire pour une simple offense liée à l'insubordination. C'est d'autant plus dommage que ce genre d'infractions complique de façon importante le retour à la vie post-militaire. Les casiers judiciaires nuisent à l'obtention d'un nouvel emploi, limitent les possibilités de déplacement à l'extérieur du pays et rendent plus difficile l'obtention d'un appartement.
Or, comme l'a souligné l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique en février 2011, même « les officiers militaires qui imposent des peines lors de procès sommaires souhaitent faire une démonstration de discipline au sein de l'unité et décourager de futures infractions, et non pas infliger à un accusé les conséquences allant avec le fait d'avoir un casier judiciaire dans le monde civil.
Permettez-moi une petite parenthèse pendant qu'il est question de la transition des militaires vers la vie civile. Aujourd'hui même, le vérificateur général du Canada a publié un rapport très dur à l'endroit du gouvernement conservateur concernant la transition à la vie civile des militaires malades ou blessés. Le rapport révèle une multitude de tracasseries administratives compliquant cette transition. Voici un extrait:
Les membres des Forces canadiennes et les vétérans, des même que le personnel [...] trouvent le processus de transition complexe, lent et difficile à comprendre et à exécuter. [...] Il reste difficile d'obtenir les services et avantages voulus en temps et lieu. Cette situation est due à des critères d'admissibilité complexes, au manque d'information claire sur le soutien offert, à la lourdeur de la paperasserie et à la nécessité d'améliorer davantage les services de gestion de cas.
En somme, le gouvernement conservateur a encore beaucoup de chemin à faire pour favoriser une transition harmonieuse de nos militaires, qu'ils soient blessés ou non, vers la vie civile. Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait notamment profiter du projet de loi pour favoriser cette transition en réduisant de manière notable les offenses militaires passibles d'un casier judiciaire.
On me dira que le projet de loi prévoit déjà de restreindre le nombre d'infractions passibles d'un casier judiciaire. C'est l'un de ses aspects positifs, mais à notre sens, le projet de loi devrait aller beaucoup plus loin. Lors de la précédente législature, nous avions proposé d'étendre la liste des infractions pouvant être considérées mineures, donc qui ne méritent pas de casier judiciaire, si le délit en question reçoit une peine mineure. L'amendement étendait également la liste des peines pouvant être imposées par un tribunal sans que celles-ci ne soient inscrites au casier judiciaire. Pensons par exemple à une réprimande, à une amende équivalant à un mois de salaire ou à d'autres peines mineures. Nous proposerons sans doute à nouveau ces amendements en comité.
Par ailleurs, il faut savoir qu'avec le système de procès sommaire, la procédure et les droits de l'accusé ne sont pas les mêmes que dans les tribunaux civils. Par exemple, il est impossible de contester devant les tribunaux les verdicts ou les sentences des procès sommaires. Toute forme de contestation judiciaire est virtuellement impossible, parce qu'il n'y a pas de transcription des procès et parce que l'accusé ne peut pas se faire représenter par un avocat.
Au NPD, nous croyons que si une personne est assujettie à des conséquences graves telles qu'un casier judiciaire ou une peine d'emprisonnement, elle devrait avoir droit à la meilleure protection qu'offre le droit en matière de procédure. D'ailleurs, ce principe a été réitéré par la Cour suprême du Canada en 1987 dans l'affaire Wigglesworth.
J'ai beaucoup insisté sur la question des procès sommaires, mais je voudrais aussi soulever deux autres problèmes dans le projet de loi .
Depuis des années, le Comité des griefs des Forces canadiennes a fait l'objet de beaucoup de plaintes. Nous croyons qu'une partie du problème réside dans le fait qu'il n'est pas un corps civil externe et indépendant. Actuellement, des employés retraités des Forces canadiennes y siègent. Pour mieux faire ressortir le caractère indépendant du comité des griefs, l'article 11 du projet de loi modifie le paragraphe 29.16(1) de la Loi sur la défense nationale afin de désigner l'entité sous une nouvelle appellation, soit le Comité externe d'examen des griefs militaires.
Nous croyons que le gouvernement devrait aller au bout de sa logique et imposer qu'au moins 60 % des membres du comité des griefs n'aient jamais été officiers ou militaires dans les Forces canadiennes. Cette proposition avait été adoptée en mars 2011 pour le projet de loi . Elle n'a cependant pas été retenue dans le projet de loi . Nous déplorons que le gouvernement conservateur mine ainsi l'important travail accompli par tous les membres du Comité permanent de la défense nationale, de même que les recommandations précédemment formulées par les représentants des Forces canadiennes. Il est important que cet amendement soit inclus de nouveau.
Nous croyons aussi que l'on pourrait améliorer sensiblement le système de griefs militaire en accordant plus de pouvoir au chef d'état-major pour résoudre des aspects financiers découlant des griefs. Nous aurons des amendements à nouveau en ce sens.
Finalement, j'aimerais encore une fois souligner l'importance de mieux protéger contre les punitions injustes les plaignants qui présentent une plainte de bonne foi. Nous croyons qu'il faudrait renforcer les pouvoirs de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire afin qu'elle agisse comme un organisme de surveillance. La commission devrait notamment avoir le pouvoir d'enquêter et de faire rapport au Parlement.
En terminant, j'espère que ce gouvernement prendra le temps de considérer nos amendements, afin de mieux protéger les hommes et les femmes qui servent dans les forces.
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Monsieur le Président, la genèse de la , aussi appelée , dont nous sommes saisis, a en fait commencé il y a plus de neuf ans, en septembre 2003, lorsque, à la suite d'un examen prévu par la loi, le juge Lamer a présenté 88 recommandations qui devaient être mises en oeuvre sans délai pour renforcer la Loi sur la défense nationale. Qu'a-t-on fait à ce jour? Rien n'a bougé.
Tout d'abord, nous avions un gouvernement libéral qui a choisi d'ignorer les recommandations et de ne rien faire du temps qu'il était au pouvoir.
Ensuite, nous avons eu un gouvernement conservateur qui — et c'est tout à son honneur —, a présenté un projet de loi. Toutefois, le gouvernement a décidé de proroger le Parlement, ce qui n'était pas à son honneur; le projet de loi est donc mort au Feuilleton. Il s'agissait alors du projet de loi , en 2007. À ce moment-là, il y avait déjà quatre ans que les recommandations avaient été formulées.
En 2008, il y a eu le projet de loi . Les conservateurs avaient encore une fois présenté un projet de loi, mais ils ont ensuite déclenché des élections surprises, enfreignant ainsi leur propre loi sur les élections, ce qui, encore une fois, a eu pour conséquence de faire mourir le projet de loi au Feuilleton.
Il y a enfin eu le projet de loi , en 2010. À l'étape de l'étude par le comité, tous les partis, y compris celui du gouvernement, ont convenu d'une série d'amendements à y apporter. Pourquoi devons-nous réclamer à cor et à cri les amendements que le gouvernement a fait disparaître?
C'est cavalier, c'est arrogant et c'est contraire aux usages du Parlement que de faire disparaître les dispositions sur lesquelles tout le monde s'entend. Ce n'est pas la première fois que les conservateurs nous font le coup. Il suffit de penser au système d'octroi de l'asile, et évidemment au projet de loi dont la Chambre est saisie. On dirait que le gouvernement, au lieu de tenir compte de ce que les Canadiens lui disent, n'a d'oreille que pour ceux qui sont assis en face.
Nous en avons contre certains aspects en particulier du projet de loi, notamment en ce qui concerne les pouvoirs qu'il confère au chef d'état-major de la Défense relativement au processus de traitement des griefs. À l'époque du projet de loi , nous avions recommandé que ces pouvoirs soient accrus, proposition qui s'inscrivait dans le droit fil de la recommandation du juge Lamer. Le gouvernement était d'accord il y a deux ans, mais il ne l'est plus aujourd'hui. Qu'est-ce qui s'est passé?
Il a été question de modifier la composition du comité des griefs afin qu'au moins 60 % de ses membres soient des civils. D'ailleurs, l'article 11 du projet de loi avait été amendé. Comme le gouvernement avait donné son accord, nous croyions que tout était dit. Mais voilà qu'il change à nouveau d'avis. Qu'est-ce que le gouvernement a à redire contre les amendements convenus?
J'ai été représentant syndical très longtemps; trop longtemps, en fait. Il faut que les gens aient le sentiment qu'à l'issue d'un grief, il y aura un résultat équitable. Et pour qu'il y ait un résultat équitable, il faut qu'une décision finale et contraignante soit prise par un tiers qui n'est lié d'aucune façon aux deux parties en cause. Si, dans le cadre normal des relations d'emploi, il s'agit généralement de l'employeur et de l'employé, dans le cas qui nous intéresse, il s'agit plutôt de l'armée et du soldat.
En effet, quand un soldat a un grief à faire valoir, il s'adresse à ses supérieurs hiérarchiques. Selon nous, les personnes concernées doivent être convaincues que leurs démarches seront résolues rapidement et aboutiront à une décision finale, contraignante et impartiale. Normalement, cette décision est prise par un tiers indépendant, comme un arbitre dans un processus d'arbitrage. Or, tant que le gouvernement et l'armée vont continuer à ne nommer que des militaires et des ex-militaires, ce processus ne pourra pas être considéré comme juste.
Peut-être qu'un jour, ces changements pourront voir le jour. Peut-être, par exemple, que nos chances seront meilleures en 2015. Mais d'ici là, nous ne pouvons que nous étonner que le gouvernement refuse de faire ce qu'il avait pourtant accepté de faire il y a deux ans.
Enfin, nous avons réclamé que l'article 75 du projet de loi soit modifié de façon à ce que les personnes qui sont reconnues coupables d'une infraction à l'issue d'un procès sommaire n'obtiennent pas injustement un dossier criminel.
Pour les civils, les procès sommaires ressemblent à ce qui se passe entre un patron et son employé. Lorsqu'un employé fait une erreur et qu'il est appelé au bureau de son patron, celui-ci dispose d'un ensemble de mesures disciplinaires qu'il peut appliquer. L'employé peut être rétrogradé ou renvoyé chez lui sans être payé. Si la faute est trop grave ou qu'elle se produit trop souvent, l'employé peut être congédié ou on peut lui faire consulter des spécialistes. Les possibilités sont nombreuses.
Cette situation est très semblable à ce qui se passe dans un procès sommaire. La personne qui est appelée au bureau de son patron ne peut habituellement pas avoir recours aux services d'un avocat. Aucun compte rendu n'est fait de la rencontre. La seule chose qui peut être écrite, c'est la décision d'imposer une sanction. À bien des égards, le procès sommaire ressemble à ce qui se passe dans un milieu de travail. Le problème, c'est que, chez les militaires, le procès sommaire peut entraîner la création d'un dossier criminel permanent.
Une telle situation serait impensable dans tout autre milieu de travail au pays. Nulle part ailleurs, une personne ne pourrait se retrouver avec un casier judiciaire sans avoir d'abord subi un procès criminel au cours duquel elle aurait eu le droit d'être représentée par un avocat, le droit de ne pas s'auto-incriminer et le droit d'être entendue devant un juge et un jury au besoin. Ces droits sont respectés dans le cadre des procès criminels. C'est le genre de choses sur lesquelles repose notre démocratie et pour lesquelles ces soldats se battent dans d'autres pays, en vue qu'elles soient instaurées. Et voici qu'on leur dit qu'eux-mêmes n'y ont pas droit, qu'ils ne peuvent pas bénéficier des mêmes protections que les autres Canadiens.
Un casier judiciaire entraîne de graves conséquences. Il est très difficile pour une personne qui quitte l'armée de trouver un emploi si elle possède un casier judiciaire. Il lui est aussi très difficile de voyager, d'aller à l'étranger. On a vu récemment le cas de personnes qui ont été refoulées à la frontière canadienne en raison d'un casier judiciaire.
Il n'est ni juste ni normal que des gens traînent un casier judiciaire pour le restant de leur vie à l'issue de ce qui est essentiellement une rencontre dans le bureau du patron. C'est ce genre de mesures que nous devons retirer du projet de loi. Nous sommes conscients que le gouvernement a fait un pas dans cette direction, mais il s'est arrêté à mi-chemin. Il n'est pas allé jusqu'à exclure le type d'infractions qui, à notre avis, ne valent pas un casier judiciaire.
Voici un exemple qui montre pourquoi le processus militaire de règlement des griefs n'est pas efficace. J'essaie d'aider une personne dans ma circonscription qui a déposé un grief contre les forces armées. Cet homme a quitté les forces armées parce qu'on lui avait dit que la meilleure façon d'obtenir ce dont il avait besoin était de quitter les rangs, puis de les réintégrer. Lorsqu'il a tenté de le faire, il a essuyé un refus. Il a donc déposé un grief.
Il a écrit au commandant, qui lui a répondu: « Je ne peux rien faire tant que vous n'aurez pas déposé de grief. » C'est donc ce qu'il a fait. On lui a répondu qu'il s'y était pris beaucoup trop tard, qu'il aurait dû le faire depuis des mois. Toutefois, il disposait maintenant d'une réponse. Il a donc écrit au commandant, qui lui a répondu: « Vous avez raison. Le règlement disant que vous aviez le droit de réintégrer les forces armées était en place à ce moment-là; nous aurions donc dû le faire. Je le modifie donc dès à présent de manière rétroactive afin que vous ne puissiez pas revenir. »
Voilà le genre de justice militaire qu'on dispense à l'heure actuelle dans les forces armées — le genre de résultat qu'on peut attendre du processus de règlement des griefs. C'est une parodie du système. Pourquoi appeler cela un processus de règlement si c'est pour aboutir à ce résultat? Aussi bien ne pas en avoir un.
Le processus de règlement des griefs existe pour une bonne raison. À l'occasion, les gens doivent discuter de ce qui s'est passé. Ils doivent prendre le temps de comprendre que d'aucuns ont fait une promesse qu'ils n'ont pas tenue ou pris une décision injuste, et chercher une solution. Toutefois, au bout du compte, il doit y avoir un organisme décisionnel impartial.
Le juge Lamer l'avait recommandé et nous sommes du même avis. Nous avions proposé un amendement pendant la dernière législature. Le gouvernement avait accepté l'amendement, mais celui-ci n'a pas été inclus dans le projet de loi dont nous sommes saisis. La seule excuse qu'ont trouvée les conservateurs jusqu'ici, c'est que l'amendement priverait 700 000 anciens militaires de leur droit de faire partie de ce tribunal. Il reste 34 millions d'autres personnes qui peuvent en faire partie. Cela laisse beaucoup de choix.
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Monsieur le Président, comme plusieurs citoyens, pour ne pas dire probablement tous les citoyens de ce pays, je suis toujours intéressé de voir comment finissent les rapports que les gouvernements successifs demandent à de très honorables personnalités, voire à des experts, qui souvent sont neutres ou dignes de crédibilité dans leur champ d'expertise spécifique. Certains de ces rapports sont relégués aux oubliettes, d'autres sont légèrement repris et d'autres, enfin, incitent le gouvernement à prendre des mesures qui vont de l'avant. L'utilisation intelligente de ces rapports donne souvent une bonne indication de la volonté d'agir des gouvernements.
Dans le cas qui nous préoccupe aujourd'hui, les résultats sont plutôt décevants. Lorsque le très honorable Antonio Lamer, ancien juge de la Cour suprême et expert dans les questions que nous débattons aujourd'hui, a déposé son rapport à l'automne 2003, nous avions devant nous 88 recommandations concernant la justice militaire, la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, le processus de griefs et le Grand Prévôt des Forces canadiennes.
Après de nombreuses tentatives, le projet de loi était attendu comme une réponse aux nombreuses recommandations du rapport Lamer. Cependant, encore une fois, c'est la déception devant la timidité des conservateurs à solutionner le problème de façon complète. Cela dit, les conservateurs, comme leur nom l'indique, ne sont pas des progressistes mais des conservateurs et, pour aller de l'avant, il faut plutôt compter sur ce côté-ci de la Chambre.
Déception donc, car seulement 28 recommandations ont été intégrées dans le projet de loi. Le plus dommage, c'est que de précédents amendements importants, adoptés à la fin de la dernière session parlementaire, n'ont pas été inclus dans le projet de loi . Qu'on me permette de souligner ici que pour un gouvernement qui, si souvent, se dit ou s'autoproclame le champion de la lutte contre la paperasse, il y a là comme une contradiction. Le travail avait été fait. Il y avait une entente. Mais oups, c'est la poubelle de récupération, enfin j'espère au moins la poubelle de récupération pour tout ce travail. On recommence le processus pour présenter encore moins cette fois-ci. Drôle de façon de prôner l'efficacité et la rationalisation du travail au sein même de notre institution!
Venons-en au coeur même de ce projet de loi et, faute de temps, je me concentrerai sur les questions qui concernent les procès sommaires parce que c'est probablement, selon moi, les questions qui touchent le plus l'ancienne clientèle que j'ai servie pendant 25 ans. Je parle de jeunes étudiants qui, pour toutes sortes de raisons dans leur vie, choisissent la carrière militaire soit parce que cela correspond à des goûts personnels innés, soit pour parfaire des études ou encore pour aller chercher une expertise probante. Cependant, la caractéristique de tous ces jeunes, c'est qu'ils sont jeunes. Au moment de leur engagement, je suis vraiment très loin d'être convaincu qu'ils connaissent les tenants et aboutissants de l'engagement qu'ils vont prendre.
Le NDP appuie depuis longtemps la mise à jour nécessaire du système de justice militaire. Le système de justice militaire est encore aujourd'hui dans notre pays un système draconien. Son héritage provient d'une tradition militaire qui n'est plus de notre temps. Il est grandement temps de le réformer.
Ce projet de loi qui est devant nous doit cependant nous permettre d'aborder les problèmes de face. C'est malgré tout une occasion unique de se pencher sur notre système de justice militaire. Alors, ne fuyons pas le débat et tentons, si possible, d'améliorer encore une fois ce système.
Les membres des Forces canadiennes font face à des exigences disciplinaires élevées, ce qui est aisément compréhensible. Toutefois, nous demandons en retour que le système de justice qui leur est appliqué soit tout aussi précis et exigeant. C'est la moindre des choses que nous devons offrir à nos soldats. Il en va de la relation de confiance entre les forces armées et le système de justice auquel ils sont soumis. Pour cette raison, le NPD est déçu du résultat contenu dans ce projet de loi.
Le projet de loi ne traite pas adéquatement de l'injustice que créent les procès sommaires. Je donnerai quelques incongruités qu'on retrouve dans ce projet de loi. Trouve-t-on normal, dans un État de droit et une démocratie aussi développée que la nôtre, qu'au sein de notre armée, on puisse tenir des procès sommaires sans que les accusés puissent consulter le conseil? Trouve-t-on acceptable que les accusés ne puissent pas consulter les transcriptions de leur procès pour la bonne raison qu'il n'y a pas de procès?
Je sais bien que le gouvernement lutte contre la paperasserie, mais quand même, dans des affaires aussi délicates que la justice, qu'elle soit militaire ou civile, la transcription d'un procès est une garantie, me semble-t-il, contre les dérapages ou les abus.
Qu'on me laisse citer au passage les propos du colonel Michel W. Drapeau, colonel à la retraite des Forces armées canadiennes et expert en droit militaire. Il s'indignait des conséquences juridiques d'une condamnation, par suite d'un procès sommaire. Il disait ceci:
Il est presque impossible [pour un soldat condamné] de contester devant les tribunaux, parce que les verdicts ou les sentences des procès sommaires ne peuvent faire l'objet d'appel.
C'est une autre incongruité dans notre système.
Le colonel Drapeau ajoutait ceci:
De plus, toute autre forme de contestation judiciaire est presque impossible, parce qu'il n'y a pas de transcription des procès et que l'accusé ne peut pas se faire représenter par un avocat.
C'est encore une autre incongruité, s'il en est une.
Encore une fois, trouve-t-on acceptable que le juge soit en réalité le commandant de l'accusé? S'il n'y a pas là un conflit d'intérêts, cela en a à tout le moins toutes les apparences.
Toutes ces dispositions sont, à mes yeux, beaucoup trop sévères dans bien de circonstances. Il est exact qu'au sein même de nos forces armées les écarts de conduite existent et qu'il faut les sanctionner. On peut bien comprendre ça, mais bien souvent ces actes sont des infractions mineures et ne valent pas que tout cela soit inscrit dans un casier judiciaire.
Je suis allé jeter un coup d'oeil sur ce à quoi pouvaient ressembler ces infractions mineures. On parle, par exemple, de querelles, d'écarts de conduite, d'absences sans autorisation, d'ébriété, de désobéissance. J'ai vu, reconnu, confronté et conjugué toutes ces caractéristiques maintes fois, dans des comportements d'adolescents à qui je devais enseigner. Or, à quel âge commence-t-on à penser vraiment à s'enrôler dans l'armée, si ce n'est très souvent entre 16 ans et 18 ans? Voilà des caractéristiques qui sont très fréquentes, de façon passagère, chez des adolescents qui tentent de se confronter avec le monde des adultes. Chacun de ces comportements pris indépendamment dans la vie civile ne risque pas d'apporter de très grande conséquence. Or, dans la vie militaire, il en est tout autrement.
Gardons à l'esprit que nos forces armées doivent être disciplinées et exemplaires en tout temps, certes. À ce titre, il faut bien évidemment punir justement toute conduite abusive, tout manque à la règle, à la discipline, au code de conduite qui régit nos forces armées. Cependant, il importe également de garder en tête que nos soldats doivent garder confiance en leur propre justice.
Au sein du fonctionnement de la justice militaire, le procès sommaire est la forme la plus courante de tribunal militaire. Quatre-vingt-seize pour cent des cas se règlent habituellement par des procès sommaires. De nombreux soldats sont, au cours de leur carrière, confrontés à cette instance judiciaire particulière. C'est une méthode disciplinaire pour traiter les infractions commises par les militaires canadiens. La cour martiale, c'est l'exception, c'est les 4 % qui restent. C'est bien heureux qu'il en soit ainsi. Cela prouve que l'indiscipline au sein de notre armée est un phénomène qui ne prend pas une très grande ampleur. Les procès sommaires sont donc là pour traiter rapidement de petites infractions d'ordre militaire. Cela doit se faire rapidement, au sein de l'unité, pour maintenir la discipline de nos forces armées.
Le problème que je veux soulever ici est celui des conséquences juridiques de ces procès sommaires. Les Canadiens et les Canadiennes savent-ils qu'une condamnation mineure dans le cadre d'un procès sommaire entraîne un casier judiciaire? Voilà, un problème de fond.
Je rappellerais cet exemple qui nous avait été soumis par un collègue libéral et qui traitait d'un mégot de cigarette qui avait été déposé dans une poubelle plutôt que dans un cendrier, à l'endroit réservé, selon le code. Je peux bien comprendre que, dans le monde militaire, particulièrement si on est à côté d'un dépôt de munitions, ça peut être considéré comme un risque sérieux. Toutefois, il en va quand même d'une différence gigantesque entre le traitement qu'on fera de cette offense dans le régime militaire et celui qu'on ferait dans le régime civil.
J'irai directement à la conclusion. Il est attristant de voir que, là où on avait un consensus sur de larges pans de ce qu'était le projet de loi , le projet de loi ne le reflète pas.
On peut donc poser cette question au gouvernement: pourquoi se contente-on de faire si peu, quand nous avions déjà une entente pour faire beaucoup plus?
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Monsieur le Président, je suis ravie d'intervenir à propos du projet de loi .
Ma circonscription compte trois filiales de la Légion royale canadienne, et je suis fière qu'elles aident nos anciens combattants et nos militaires en service. J'ai rencontre de nombreux anciens combattants canadiens qui m'ont parlé de ce qui les préoccupe. Le projet de loi concerne la justice militaire, un enjeu important.
Je suis heureuse d'exprimer mes inquiétudes à la Chambre relativement à une politique malavisée qui, au bout du compte, portera atteinte aux membres des Forces canadiennes. Le projet de loi propose des solutions à des problèmes qui perdurent au sein du système de justice militaire, mais ce n'est pas la première fois qu'on tente de les régler.
Je souligne avant tout que nos militaires sont tenus de respecter des normes fort élevées lorsqu'ils défendent les valeurs canadiennes — la démocratie, la justice et la paix — à l'étranger. Les Forces canadiennes méritent un système de justice militaire qui respecte ces valeurs en toute circonstance, y compris dans le cadre de la procédure de grief et aux commissions d'examen des plaintes. Le gouvernement conservateur a choisi de ne pas le leur offrir.
Le gouvernement a décidé de s'opposer à un amendement déjà adopté au comité, amendement qui portait sur l'article 11 du projet de loi C-41, qui aurait permis de modifier la composition du Comité des griefs pour que des civils représentent 60 % des membres. La recommandation du comité parlementaire était pourtant simple: certains membres du Comité des griefs des Forces canadiennes devraient provenir de la société civile.
Pourquoi les conservateurs ont-ils exclu du projet de loi les amendements qu'a proposés le NPD au projet de loi C-41 le printemps dernier et qui ont été adoptés? Ce faisant, ils sapent les recommandations formulées par les représentants des Forces canadiennes au cours de la dernière session.
Voici ce qu'on peut lire dans le rapport Lamer de 2003 au sujet du processus de règlement des griefs et de son importance:
[...] à l'opposé des autres organisations, les plaignants n'ont ni syndicat ni association d'employés par l'intermédiaire desquels ils peuvent donner suite à leur grief [...] Pour le moral des membres des FC, il est essentiel que leurs griefs soient réglés de façon équitable, transparente et rapide.
[Français]
C'est une des premières raisons pour lesquelles on ne trouve pas normal que, depuis le projet de loi , on ait laissé tomber des amendements proposés par le NPD. Je vais continuer à parler des raisons pour lesquelles on ne pourra malheureusement pas voter en faveur de ce projet de loi.
Ce projet de loi a été déposé à la suite d'une série de projets de loi qui sont passés par la Chambre des communes dans les 10 dernières années. Il y a eu d'abord les projets de loi et , qui sont morts au Feuilleton en raison de la prorogation du Parlement en 2007 et des élections de 2008. En juillet 2008, on a déposé le projet de loi , qui est revenu en force et qui simplifiait la structure, mais il est aussi mort au Feuilleton. En 2009, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié ce projet de loi et a fait neuf recommandations pour le modifier, mais on n'a pas pu continuer.
En 2010, on a déposé le projet de loi , qui s'est rendu jusqu'en comité, où on a proposé des amendements. Malheureusement, il est mort au Feuilleton également. Là, on dépose le projet de loi . Comme l'ont mentionné mes collègues, on avait proposé des amendements en comité, lesquels avaient été acceptés, mais on les laisse tomber maintenant.
Je vais reprendre ce que ma collègue vient juste de dire au sujet de l'arrogance du gouvernement. Il nous dit toujours que nous ne voulons pas travailler avec lui, que nous votons contre les projets de loi et que nous nous opposons à toutes sortes de choses. Là, il va nous dire que nous nous opposons à un meilleur projet de loi de justice militaire pour les anciens combattants.
Ce projet de loi contient plein de choses qu'on ne peut pas accepter. De plus, on a présenté des amendements qui me semblent très pertinents. On avait proposé des changements dans la composition du comité des griefs afin qu'il soit composé à 60 % de civils. On avait proposé qu'on donne un pouvoir au chef d'état-major de la défense dans le processus de grief, ce qui répondait directement à une recommandation du rapport Lamer.
On avait proposé qu'une personne condamnée pour une infraction pendant un procès sommaire ne soit pas injustement sujette à un casier judiciaire.
Je voudrais revenir sur le casier judiciaire. Présentement, le système des Forces armées canadiennes est très rigoureux et la discipline est très importante. Ces personnes doivent représenter notre pays. Elles doivent être droites, justes et, pour ainsi dire, très disciplinées.
Présentement, il existe une liste des cinq infractions qui sont considérées mineures et qui font en sorte que la personne ne reçoit pas de casier judiciaire. Cela veut dire que sur 27, 22 peines mineures peuvent conduire à un casier judiciaire la personne délictueuse.
Je n'avais pas regardé ma liste, mais mon collègue de vient de nous dire qu'une de ces infractions était une absence non motivée. Je trouve assez comique qu'une absence non motivée puisse mener à un casier judiciaire.
Je vais parler d'une expérience personnelle. Avant d'être ici, j'ai enseigné aux adultes dans deux écoles, à Sherbrooke et à Québec. Malheureusement, dans mes cours, beaucoup de jeunes adultes avaient des casiers judiciaires. Ils me disaient à quel point cela freinait leur vie et compliquait leur recherche d'emploi, par exemple. En effet, il faut toujours répondre à la question demandant si on possède un casier judiciaire. C'est sûr qu'on doit dire la vérité. Ces personnes disent la vérité. Elles disent qu'elles ont un casier judiciaire. Cela peut faire peur à un employeur, c'est normal. Si on connaît mieux le sujet et qu'on sait que c'est un comportement de la sorte qui a entraîné un casier judiciaire, cela change un peu les choses.
Avoir un casier judiciaire peut aussi nous empêcher de voyager. Par exemple, c'est plus difficile d'aller aux États-Unis. Quelqu'un qui a fini sa vie militaire et qui a ramassé de l'argent pour aller aux États-Unis passer une fin de semaine à Disneyland avec ses enfants pourrait se faire refuser l'entrée aux États-Unis parce qu'il a un casier judiciaire. Cela prend des proportions grotesques.
Je considère qu'on a l'occasion de changer cela. Il y a des choses qui ne sont pas normales et qui sont démesurées. On peut avoir un casier judiciaire pour une absence non motivée. Ce sont des choses qu'on peut changer, et on devrait saisir l'occasion de le faire puisqu'on étudie présentement le projet de loi.
Le gouvernement nous dit justement que c'est long, la paperasse, et que c'est long, faire avancer les choses. Je suis d'accord, parfois c'est long, et c'est la raison pour laquelle ça fait 10 ans qu'on étudie ce projet de loi.
On ne veut pas que le projet de loi meure au Feuilleton. On veut qu'il soit adopté, mais qu'il le soit de façon logique et responsable, afin de faire avancer les choses.
On peut décider que des peines considérées mineures ne donnent pas un casier judiciaire. C'est l'occasion de le faire maintenant, et on ne doit pas passer à côté.
Je voulais ajouter à ce que dit l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique. Il s'agit d'une traduction, qui dit que les officiers militaires qui imposent des peines lors des procès sommaires souhaitent faire une démonstration de discipline au sein de l'unité et décourager de futures infractions — jusque là, tout va bien —, et non pas infliger à un accusé les conséquences allant avec le fait d'avoir un casier judiciaire dans le monde civil.
L'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique met ainsi l'accent sur le fait que le casier judiciaire a des conséquences dans le monde civil. On ne voudrait pas aller trop loin.
Comme je l'ai mentionné plus tôt dans mon discours, c'est très important pour le monde militaire d'être très discipliné, mais cela va un peu trop loin.
Il est certain que nous sommes pour une réforme de la loi entourant le système militaire.
Le projet de loi ne va pas assez loin. Parmi les 88 recommandations du juge Lamer, seulement 28 ont été retenues, ce qui ne représente même pas la moitié d'entre elles. Parmi les amendements proposés par le NPD, aucun n'a été retenu non plus. Pour nous, ce projet de loi ne va pas assez loin et pour cette raison, nous devrons voter contre lors du prochain vote.
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Monsieur le Président, le système de justice militaire auquel sont soumis les membres des Forces canadiennes est complètement dépassé. Ma collègue vient justement d'en parler. On en discute, on l'évalue et on l'étudie depuis 2003. Présentement, il prive les hommes et les femmes en uniforme, qui ont risqué leur vie au service du Canada, d'avoir accès aux mêmes protections juridiques que les autres citoyens canadiens partout ailleurs en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.
Le NPD appuie depuis longtemps la mise à jour nécessaire du système de justice militaire. Nous croyons que le système judiciaire militaire devrait être soumis à une rigueur qui est comparable aux règles auxquelles sont soumis les membres des Forces canadiennes en matière de discipline. C'est pour cette raison que nous nous félicitons de la révision dont fait actuellement l'objet le système de justice militaire dans le cadre du projet de loi . Nous nous félicitons également du fait que ce projet de loi reprenne certaines des recommandations de l'ancien juge de la Cour suprême du Canada, le très honorable Antonio Lamer, détaillées dans le rapport qu'il a déposé en 2003 et portant sur l'examen indépendant de la Loi sur la défense nationale.
Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction afin d'uniformiser encore davantage le système de justice militaire et le système de justice civile. Par contre, il ne va pas assez loin — comme vous l'avez entendu depuis le début de ce débat d'aujourd'hui — pour réformer certains aspects de la loi qui m'apparaissent essentiels. De plus, ce projet de loi n'intègre que 28 des 88 recommandations énoncées par l'ancien juge Lamer. Le fait que ce projet de loi n'aille pas suffisamment en profondeur est d'autant plus décevant que de nombreux amendements importants proposés par le NPD et adoptés à l'étape du comité pour le projet de loi — qui portait sur le même sujet mais qui a été relégué aux oubliettes à cause des élections — n'ont malheureusement pas été inclus dans le projet de loi . Ce sont aussi les revendications des députés de l'opposition depuis le début de ce débat. C'est sûr qu'on le répète, mais c'est important de dire que du travail a été effectué en comité, que des experts se sont prononcés, que les Forces armées canadiennes ont également fait des recommandations et qu'il y a eu un rapport. C'est comme si on revenait presque à la case départ, parce que le gouvernement fait fi de toutes ces recommandations.
Le gouvernement peut-il nous dire pour quelles raisons il n'a pas retenu les amendements de l'opposition officielle, dans le cadre du projet de loi ? L'adoption de ces amendements pour le projet de loi nous apparaissait comme une avancée positive et constructive. Le gouvernement peut-il nous dire pour quelle raison ces amendements ne sont désormais plus acceptables?
Le travail effectué par les comités est fastidieux. C'est le résultat d'une importante collaboration entre les députés de tous les partis. C'est un travail qui ne mérite pas d'être réduit ainsi à néant. En omettant d'inclure tous nos amendements dans le projet de loi , les conservateurs minent le travail important accompli en comité, et celui de la Défense nationale dans ce cas-ci, de même que les recommandations formulées par les représentants des Forces canadiennes lors de la dernière session parlementaire.
Ainsi, de nombreuses lacunes subsistent au sein du projet de loi . Nous demandons au gouvernement conservateur de modifier plus en profondeur ce projet de loi afin que la Loi sur la défense nationale et les autres lois relatives fassent l'objet de réformes appropriées.
Le système de procès sommaires, probablement un des aspects les plus scandaleux de l'actuel système de justice militaire, doit faire l'objet d'importantes réformes. En effet, les amendements actuels au projet de loi ne s'attaquent pas suffisamment à l'injustice des procès sommaires. Vous savez ce qu'est un procès sommaire? La plupart des Canadiens n'ont aucune idée de ce que constitue un procès sommaire et seraient choqués d'apprendre que des citoyens canadiens sont soumis à ce genre de procédure. Un procès sommaire, ça veut dire qu'un membre des Forces canadiennes serait jugé par son commandant, c'est-à-dire son propre patron, qu'il n'aurait pas droit à un avocat, qu'il n'aurait pas droit de faire appel à la procédure et qu'aucune transcription ne serait faite de tout le procès.
Présentement, une condamnation lors d'un procès sommaire dans les Forces canadiennes entraîne la constitution d'un casier judiciaire en plus. Le procès sommaire reste la méthode disciplinaire la plus utilisée pour traiter les infractions commises par les militaires canadiens. Par exemple, en 2008-2009, 96 % des cas ont été réglés par procès sommaire. Je tiens ici à dénoncer la nature trop sévère du procès sommaire dans le cadre des infractions mineures.
Par infractions mineures, nous entendons entre autres l'insubordination, les querelles et les écarts de conduite. Il m'apparaît disproportionné qu'une condamnation pour ce genre de délits mène à la constitution d'un casier judiciaire. Oui, je reconnais l'importance de la discipline militaire au sein des Forces armées canadiennes. M. Michel Drapeau, expert en droit militaire et colonel à la retraite, a dit ceci:
La discipline est non seulement essentielle au maintien de l'efficacité des forces armées, mais aussi au respect de la primauté du droit au sein de ces dernières, surtout en situation de grand danger au combat.
Par contre, je m'inquiète grandement des conséquences que peut avoir un casier judiciaire dans la vie des membres des Forces canadiennes, après la carrière militaire. Par exemple, un casier judiciaire signifie que le militaire en question aura de grandes difficultés à trouver un emploi, à louer un appartement et même à voyager.
Trouve-t-on exagérées, voire injustes, toutes ces conséquences imposées pour un délit mineur? Moi, oui. Je trouve que c'est insensé, que c'est complètement injuste et que ce n'est pas égal à ce qu'on demande aux membres des Forces armées.
Cette question avait déjà fait l'objet d'un amendement lors de l'étude du projet de loi . En effet, le NPD demandait que soit allongée la liste des infractions qui pouvaient être considérées comme mineures et qui ne méritaient pas de casier judiciaire si le délit en question recevait une peine mineure. Le NPD avait demandé que cette liste passe de 5 à 27 infractions. Il demandait aussi l'allongement de la liste des peines qui pouvaient être imposées par le tribunal, sans que celles-ci soient inscrites au casier judiciaire. Ça change toute à fait les choses.
Pourquoi cet amendement, adopté au printemps dernier, n'est-il pas maintenant inclus dans le projet de loi ? Le projet de loi prévoit-il une exemption pour que certains délits ne soient plus portés au casier judiciaire? Ce n'est pas suffisant. Le projet de loi doit aller plus loin. Les amendements proposés par le NPD doivent être inclus comme ils l'étaient dans le cas du projet de loi . Le système de justice militaire doit impérativement s'adapter à la réalité du XXIe siècle. Les règles et les dispositions actuelles sont vraiment dépassées. Le Royaume-Uni, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Irlande ont déjà jugé utile de changer le processus des procès sommaires.
Qu'attend le Canada pour faire la même chose? Comment se fait-il que le gouvernement conservateur accuse du retard sur cette question aussi vitale que celle des droits humains et des droits des militaires canadiens qui sont également, je tiens à le rappeler, des citoyens canadiens?
Après tout, ne serions-nous pas absolument outrés si ce genre de procédure avait lieu dans un contexte civil? Moi, je suis certaine que personne n'accepterait ça. Les Canadiens seraient absolument choqués d'apprendre que les militaires qui ont si bravement servi notre pays peuvent avoir un casier judiciaire en raison de failles dans le système judiciaire militaire.
Le projet de loi devrait également comprendre une réforme du système de griefs. À l'heure actuelle, le comité des griefs, censément indépendant, ne permet pas l'examen externe des griefs en question. Plus ironique encore, le projet de loi C-15 change le nom de ce comité pour celui de « Comité externe d'examen des griefs militaires ». Je ne vois pas en quoi changer de nom rend le comité plus indépendant. En effet, les employés oeuvrant au sein de ce comité sont des employés retraités des forces armées, ce qui ne fait pas de cet organe un véritable organe externe et indépendant.
De véritables amendements doivent être apportés en ce qui a trait au processus de nomination. En mars 2011, le NPD avait suggéré que 60 % des membres du comité des griefs soient composés de gens qui n'avaient jamais été officier ou militaire dans les Forces canadiennes. Cet amendement a été retenu dans le projet de loi . Au risque de me répéter, le gouvernement peut-il nous expliquer encore pourquoi cet amendement ne figure plus dans le projet de loi ? Je crois qu'il est primordial que cet amendement soit inclus dans le projet de loi.
Toujours en lien avec le processus de griefs, le NPD a également dénoncé le manque de pouvoir du chef d'état-major pour résoudre les aspects financiers découlant de ces griefs.
Ce n'est pas tout. Il y a aussi la question de la Commission d'examen des plaintes. On demande que les pouvoirs de la commission soient augmentés pour qu'elle puisse enquêter et faire rapport au Parlement.
Pour toutes ces raisons, parce que le gouvernement a fait du projet de loi le projet de loi qui est complètement injuste, inadéquat et incomplet, le NPD va s'opposer à ce dernier. En effet, il manque encore beaucoup d'amendements et beaucoup d'équité à l'intérieur même de ce projet de loi.
Voilà, je suis prête à répondre aux questions de mes collègues.
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Monsieur le Président, nous discutons aujourd'hui du projet de loi . Le projet de loi C-15 a pour but de renforcer la justice militaire et est une réponse au rapport de l'ex-juge en chef Antonio Lamer et du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
En fait, le projet de loi n'a intégré que 28 des 88 recommandations du rapport Lamer. Essentiellement, le projet de loi C-15 est la nouvelle tentative de projet de loi visant à renforcer la justice militaire. On n'a qu'à penser au projet de loi déposé en 2010, qui tentait aussi de répondre au rapport Lamer. Toutefois, ce projet de loi avait, lui, réussi à créer un certain consensus entre les différents partis et le gouvernement.
Nous y avions apporté une série d'amendements, fruit des négociations en comité. Or, le projet de loi est loin d'être un calque parfait du projet de loi . Le projet de loi C-15 ne comprend pas les amendements pourtant importants ayant été adoptés par le comité lors de la dernière session parlementaire.
Parmi ces amendements, on y retrouve certains du NPD, c'est-à-dire l'autorité du chef d'état-major de la Défense nationale dans le processus des griefs, qui résulte d'une des recommandations du rapport Lamer. D'autre part, il y avait aussi des changements à apporter dans la composition du comité des griefs de manière à ce qu'il soit composé à 60 % de civils. Finalement, il y avait aussi la disposition garantissant qu'une personne condamnée pour une infraction pendant un procès sommaire n'avait pas à être injustement sujette à un casier judiciaire.
Évidemment, lorsqu'on en fait l'analyse, ce projet de loi comprend plusieurs réformes importantes. En fait, le soutien du NPD concernant une mise à jour du système de justice militaire ne date pas d'hier. Nous avons constaté depuis longtemps qu'il existe un réel besoin à cet égard. C'est une pure question de logique, sachant que les membres des Forces canadiennes sont assujettis à des règlements pour le moins sévères. Dans un tel contexte, il faut compenser cette réalité en ayant recours à un système judiciaire soumis à des normes à tout le moins comparables. Cependant, plusieurs différences s'imposent néanmoins en ce qui concerne la justice militaire et civile, qui doivent être prises en considération si l'on veut que ce système de justice soit véritablement équitable.
Le projet de loi comporte de nombreuses lacunes qui doivent être prises en compte par le gouvernement. On peut distinguer les lacunes du projet de loi en les attribuant à trois champs d'action distincts: la réforme du système de procès sommaires, la réforme du système des griefs et le renforcement de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire.
En ce qui concerne la réforme du système de procès sommaires, les amendements compris dans ce projet de loi n'ont pas fait l'objet d'une examen convenable. Ce qui en ressort, c'est la sévérité des procédures pour certains membres des Forces canadiennes condamnés pour des infractions mineures entraînant inévitablement la création d'un casier judiciaire. De plus, ce processus judiciaire ne permet pas aux accusés de consulter un conseiller, et le juge des accusés est nul autre que leur commandant. Un tel processus simplifié et rapide est approprié dans un contexte purement disciplinaire au sein des Forces canadiennes, mais ce qui est proposé est d'un tout autre ordre.
Il faut préciser ici que le fait d'avoir un casier judiciaire a une incidence bien réelle. Ce n'est pas une simple question de discipline comme celle qui a cours dans les forces armées, et pour cause. Un tel changement aurait des conséquences néfastes pour les membres des forces armées en tant que civils, d'où l'importance de faire une telle distinction entre civil et militaire dans les procès sommaires.
Nous devons nous mettre dans le contexte d'infractions d'ordre militaire considérées comme étant mineures, et non pas comme le fait le projet de loi, soit des infractions d'ordre criminel. C'est une distinction importante à faire dans un tel cadre légal où il est question des droits de l'accusé.
Tout ça pour dire que le processus et les finalités entourant la réforme du système de procès sommaires ne mèneront pas à des procès équitables et pourra causer un tort considérable aux membres des forces armées dans leur vie alors qu'il n'y a aucune raison pour cela.
Les peines découlant des procès sommaires ne sont simplement pas conçues à cet effet. Il s'agit de montrer l'exemple, de renforcer la discipline et de décourager de futures infractions. Dans un tel contexte, le processus peut être vu comme normal pour les forces armées en raison des manquements et délits mineurs qui y sont traités, mais on est loin de la constitution de casiers judiciaires.
Le but des procès sommaires réside justement dans le fait de traiter rapidement des infractions d'ordre militaire mineures. C'est une différence fondamentale entre les cours martiales et les procès sommaires que nous devons faire ressortir. À cet égard, si on se fie aux chiffres en ce qui concerne le traitement des infractions commises par les militaires canadiens, on se rend compte que la majorité des cas font l'objet d'un procès sommaire. Ce n'est qu'une minorité des infractions qui font l'objet d'une comparution en cour martiale.
Parlons un peu de certaines des fameuses infractions criminelles dont il est question ici. On retrouve, par exemple, l'insubordination, les querelles, les écarts de conduite, les absences sans autorisation et la désobéissance à un ordre. Il ne s'agit pas là d'infractions criminelles, mais bien de manquements à la discipline militaire. Or un casier judiciaire rendra difficile la réintégration dans la vie civile pour des raisons bien évidentes. La recherche d'un emploi, la location d'un appartement et, pour ceux qui aiment voyager, les voyages deviendront difficiles.
Il faut surtout savoir que les membres des Forces canadiennes retraités ont aussi eu tendance à prendre leur retraite alors qu'ils étaient beaucoup plus jeunes, en moyenne, que les autres retraités canadiens. On voit donc à quel point cela peut causer de réels problèmes pour ces derniers. Est-ce une façon adéquate de rendre justice que de mener à la constitution d'un casier judiciaire aux répercussions difficiles à évaluer, et ce, sans juge professionnel et sans défense formelle pour les accusés, tout cela dans un contexte où il s'agit bien d'infractions mineures?
D'autre part, les amendements que nous avions proposés au projet de loi afin d'étendre la liste des infractions et des peines exclues de la constitution d'un casier judiciaire n'ont pas été retenus. Il s'agissait de peines jugées mineures et il n'était pas convenable qu'elles fassent l'objet d'un casier judiciaire, mais, par ailleurs, il serait convenable qu'elle fassent l'objet de mesures disciplinaires, sans pour autant que l'on dépasse une amende équivalente à un mois de salaire. C'est une nuance importante à faire et il faut s'assurer que ces amendements figurent bel et bien dans le projet de loi .
Un autre amendement qui n'a pas été retenu dans ce projet de loi concerne la réforme du système des griefs. Nous voulions que le comité des griefs soit composé d'au moins 60 % de membres n'ayant jamais servi en tant qu'officier ou militaire dans les Forces canadiennes. C'est un préalable capital si l'on veut s'assurer d'obtenir la perception d'un corps civil externe et indépendant, comme il se doit.
On y retrouvait également un amendement visant à augmenter l'autorité du chef d'état-major de la défense dans le processus des griefs. Rien n'a été fait à cet égard. Il faut faire en sorte que le règlement des griefs se fasse de façon équitable, transparente et rapide.
La Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire figure aussi parmi les lacunes de ce projet de loi. Nous devons augmenter les pouvoirs de la commission de manière à ce qu'elle ait la capacité d'enquêter à juste titre tout en soumettant son rapport au Parlement. Il faut la renforcer davantage, notamment en lui donnant plus de pouvoir dans le but qu'elle agisse en tant qu'organisme de surveillance. Or cela fait défaut dans le présent projet de loi puisque cette question n'a presque pas été abordée.
Il est aujourd'hui question de réformer le système de justice militaire, afin de le renforcer de sorte qu'il soit plus conforme au système de justice civile tout en s'assurant que la justice soit rendue de façon juste et équitable pour les membres des Forces canadiennes. Ce n'est pas le cas, compte tenu de plusieurs des changements proposés dans ce projet de loi. De manière générale, ce dernier a tendance à créer des problèmes plutôt que de résoudre les problèmes existants. Il est crucial que le gouvernement revoie ce projet de loi afin d'y inclure nos amendements adoptés en comité dans le cadre de l'étude du projet de loi et dont on ne retrouve plus la trace.
C'est notre devoir de garantir aux membres des Forces canadiennes le droit à un système de justice qui leur donne un traitement juste et équitable. C'est la moindre des choses que nous leur devons.
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Monsieur le Président, je suis un peu déçu de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui. J'aurais été plus content de prendre la parole au sujet du projet de loi qui a été présenté à la dernière législature et d'appuyer cette mesure législative très importante. En proposant le projet de loi , c'est comme si le gouvernement était revenu à une version antérieure. La mesure législative dont nous sommes saisis correspond davantage à une version antérieure du projet de loi de la dernière législature. Tous les partis ont participé au débat sur le projet de loi C-41 et ont convenu d'en faire progresser l'examen jusqu'à l'obtention d'une mesure législative acceptable pour tous. Mais ce n'est pas du tout ce que souhaite le gouvernement.
Le projet de loi prévoit plusieurs changements importants, et le NPD est favorable à la modernisation du système de justice militaire, qui s'impose depuis longtemps.
Les membres des Forces armées canadiennes doivent respecter des normes extrêmement élevées en matière de discipline. C'est pourquoi ils sont en droit de s'attendre à ce que le système judiciaire soit tenu de se conformer à des normes comparables. Bien que cela ne soit pas une question prioritaire pour la plupart des gens, un grand nombre de Canadiens seraient consternés d'apprendre que les gens qui servent notre pays avec courage peuvent se retrouver avec un casier judiciaire en vertu d'un système de justice dans lequel la loi n'est pas appliquée de façon régulière comme dans les tribunaux criminels civils. En vertu du système de justice militaire actuel, un soldat peut se retrouver avec un casier judiciaire pour avoir commis une infraction mineure comme l'insubordination, les querelles, le désordre, l'absence sans permission et même l'ivresse. Ces infractions peuvent être extrêmement importantes au regard de la discipline militaire, nous en conviendrons tous probablement, mais elles ne justifient pas la création d'un casier judiciaire.
Un casier judiciaire peut rendre la vie très difficile après le service militaire. En effet, il devient beaucoup plus difficile de trouver un emploi, de louer un appartement ou de voyager à l'étranger lorsqu'on a un casier judiciaire. Nos courageux militaires ont assez de défis à relever lorsqu'ils réintègrent la société civile, sans devoir en plus porter le fardeau d'un casier judiciaire.
Le NPD se battra pour que le système de justice militaire soit plus équitable pour les hommes et les femmes qui portent l'uniforme et qui mettent leur vie en danger afin de servir le Canada.
Les sujets abordés dans le projet de loi ne sont pas nouveaux et, comme on l'a entendu à maintes reprises aujourd'hui, ils remontent au moins à l'examen indépendant de la Loi sur la défense nationale, qui a été présenté en 2003 par le très honorable Antonio Lamer, ancien juge en chef de la Cour suprême.
Les éléments contenus dans le projet de loi ont déjà figuré dans des versions précédentes de cette mesure législative. Il y a eu le projet de loi , qui est mort au Feuilleton en 2007 en raison de la prorogation du Parlement. Nous nous souvenons tous de cette merveilleuse période. Puis, il y a eu le projet de loi , qui est lui aussi mort au Feuilleton après que l'actuel gouvernement eut été reconnu coupable d'outrage au Parlement.
Le projet de loi qui est entré en vigueur en juillet 2008 simplifiait la structure des cours martiales et mettait en place un moyen de choisir un type de cour martiale qui se rapprochait davantage du système civil.
En 2009, le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié le projet de loi C-60 et recommandé neuf modifications à la Loi sur la défense nationale.
En 2010, le projet de loi a été présenté en réponse au rapport de 2003 et au rapport du comité sénatorial. Il contenait des dispositions concernant la justice militaire, comme la réforme de la détermination de la peine, la présence des juges militaires dans les comités, les procès sommaires, les comités de la cour martiale, le grand prévôt, ainsi que des dispositions limitées relatives au traitement des griefs et au processus d'examen des plaintes concernant la police militaire. Le projet de loi est essentiellement semblable à la version du projet de loi C-41 qui a été adoptée par le comité lors de la dernière législature, sauf qu'il ne contient aucun de ces amendements.
Les amendements conservés comprennent la composition des cours martiales et l'inamovibilité des juges militaires. Cependant, d'autres amendements importants adoptés à l'étape de l'étude par le comité à la fin de la dernière session parlementaire n'ont pas été inclus dans le projet de loi . Les amendements suivants, qui avaient été proposés par le NPD, sont exclus du projet de loi actuel: celui qui concernait les pouvoirs du chef d'état-major de la Défense dans la procédure de règlement des griefs, conformément aux recommandations du juge Lamer; celui qui changeait la composition du comité des griefs, pour qu'il comprenne au moins 60 % de civils; celui qui garantissait qu'une personne déclarée coupable d'une infraction à l'issue d'un procès sommaire ne se verrait pas injustement imposer un casier judiciaire.
Si un député ministériel voulait bien intervenir dans ce débat, je lui demanderais ce qui, dans ces amendements, est si effrayant et si dangereux que le gouvernement a voulu les retirer du projet de loi avant de le présenter de nouveau. Je doute cependant d'avoir la possibilité de poser cette question.
Je m'oppose au projet de loi parce qu'il présente des lacunes sur lesquelles il faut se pencher de nouveau, car les amendements que j'ai mentionnés ont été retirés de la version précédente du projet de loi. Il arrive bien trop souvent que le gouvernement massacre un projet de loi dont les erreurs avaient été corrigées avant de le présenter de nouveau au Parlement. C'est une tendance de plus en plus fréquente. Dans les deux ans et demi qu'il reste avant les prochaines élections, je me demande combien d'autres mesures les conservateurs vont encore démolir avant de les présenter au Parlement.
Les amendements du projet de loi ne traitent pas adéquatement de l'injustice des procès sommaires. Une condamnation lors d'un procès sommaire pour une infraction d'ordre militaire dans les Forces canadiennes entraîne la constitution d'un casier judiciaire. Les procès sommaires sont tenus sans que les accusés puissent consulter un conseiller juridique; il n'y a ni appel ni transcription du procès; de plus, le juge est le commandant de l'accusé. Je me demande s'il y a beaucoup de civils qui voudraient être jugés par leur patron.
Ces procès sont trop sévères pour certains membres des Forces canadiennes qui sont reconnus coupables d'infractions mineures d'ordre militaire. Le projet de loi prévoit une exception en vertu de laquelle un certain nombre d'infractions n'entraîneraient plus la création d'un casier judiciaire, pour autant qu'elles sont punies d'une peine mineure, définie par la loi, ou d'une amende inférieure à 500 $. Il s'agit d'un des aspects positifs du projet de loi, mais on ne va pas assez loin.
À la dernière législature, lors de l'étude en comité, le NPD a proposé des amendements au projet de loi qui faisaient passer de 5 à 27 les infractions considérées comme mineures et ne devant pas mener à un casier judiciaire. Pour les cas où l'infraction devait être assortie d'une peine mineure, le NPD avait également proposé d'allonger la liste des peines pouvant être imposées par un tribunal sans entraîner la création d'un casier judiciaire pour l'auteur de l'infraction, de manière à y inclure, notamment, le blâme, la réprimande et une amende équivalant à un mois du salaire de base. Voilà qui constituait une amélioration importante dans le cas des procès sommaires. Cet amendement n'a toutefois pas été retenu dans le projet de loi . Nous voulons qu'il y soit inclus.
Un autre point qui devrait être modifié concerne le Comité externe d'examen des griefs militaires. À l'heure actuelle, le comité n'a pas de mécanisme en place pour des examens externes. Le comité est composé d'officiers à la retraite, dont certains ont quitté l'armée depuis peu. Si l'on souhaite que le Comité des griefs des Forces canadiennes soit perçu comme une entité de surveillance civile indépendante — ce qu'il est censé être —, le processus de nomination doit être modifié pour refléter cette réalité. Par conséquent, certains membres du comité devraient être choisis au sein de la société civile.
Le NPD souhaite inclure une disposition selon laquelle 60 % des membres du comité n'ont jamais servi dans les Forces canadiennes à titre d'officier ou de militaires du rang. Cet amendement au projet de loi avait été adopté en mars 2011, mais il n'a pas été retenu, lui non plus, dans le projet de loi . Il semble qu'il n'existe aucun amendement valable que les conservateurs ne souhaitent éliminer. Il est important que cet amendement soit lui aussi réintroduit dans le projet de loi.
Une autre lacune importante du système militaire de griefs, c'est que contrairement à la recommandation du rapport Lamer, le chef d'état-major de la Défense n'a pas, à l'heure actuelle, le pouvoir de résoudre les aspects financiers découlant d'un grief. Bien que le d'alors ait accepté cette recommandation, aucune mesure concrète n'a été prise au cours des huit dernières années pour mettre en oeuvre cette dernière. Au comité, le NPD a proposé d'apporter un amendement en ce sens au projet de loi . L'amendement avait été adopté en mars 2011, mais on l'a de nouveau retiré du projet de loi . Il devrait en faire partie.
Un autre aspect du projet de loi auquel il faut s'intéresser porte sur la nécessité de renforcer la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Le projet de loi modifie cette dernière en établissant un délai dans le cadre duquel le grand prévôt des Forces canadiennes devra résoudre les plaintes, ainsi que protéger les plaignants de sanctions pour avoir déposé une plainte de bonne foi. Bien qu'il s'agisse d'un pas dans la bonne direction, le NPD croit qu'il faut en faire plus pour donner davantage de pouvoir à la commission. On n'a pas pris soin de prévoir les dispositions législatives nécessaires pour permettre à la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire de jouer le rôle d'organisme de surveillance.
Je serai heureux de répondre à des questions. Les députés d'en face manifestent leur déception, mais je me ferai un plaisir de vous mêler à la conversation.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole au sujet de ce projet après avoir posé tant de questions à son sujet.
Tout d'abord, comme j'interviens à la suite du député de , je tiens à le féliciter à l'occasion de ses fiançailles. J'ai rencontré sa merveilleuse fiancée et je suis ravie d'apprendre qu'ils vont bientôt se marier.
J'aimerais commencer mes observations en disant que j'ai débattu de nombreux projets de loi depuis que j'ai été élue à la Chambre. Il est toutefois très rare et inhabituel qu'un seul parti débatte d'un projet de loi. Quelque chose se trame ici et il faut tirer les choses au clair.
J'apprécie le fait que tant de députés néo-démocrates, qui forment l'opposition officielle, aient pris le temps d'intervenir aujourd'hui au sujet de ce très important projet de loi. Ils ont donné un bon aperçu historique des origines de ce projet de loi et des problèmes qui y sont associés.
En fait, je me souviens que vous, monsieur le Président, avez débattu de ce projet de loi à la législature précédente. Il s'agissait alors du projet de loi C-41, une version antérieure du projet de loi actuel dont les dispositions étaient très semblables. Je dois dire que nous regrettons le fait que vous ne puissiez plus débattre de projets de loi, mais nous sommes très heureux de vous voir occuper le poste de vice-président.
Le projet de loi a un long historique et porte sur un dossier très important, où des changements en profondeur auraient dû être apportés depuis longtemps. Comme le député de vient de le souligner, d'autres pays ont pris des mesures adéquates à cet égard, tandis que nous accusons un retard considérable.
Le rapport de M. Antonio Lamer, ancien juge en chef de la Cour suprême, a été présenté en 2003, il y a déjà bon nombre d'années, et je suis désolée de voir qu'il a fallu tout ce temps pour présenter un projet de loi, qui sera renvoyé au comité, je présume. Nous espérons qu'après l'étude par le comité, le projet de loi nous reviendra avec les amendements proposés par le NPD il y a longtemps.
La justice militaire est une question très importante, et il est particulièrement important que soit respecté le principe voulant que les membres des Forces canadiennes aient accès à un système équitable et équilibré, qui protège leurs droits. Après avoir lu le projet de loi pour en comprendre les effets et les omissions, on ne peut faire autrement que se poser beaucoup de questions fondamentales sur les raisons pour lesquelles les membres des Forces canadiennes sont soumis depuis longtemps à un système où leurs droits ont été tout simplement niés.
Même si nous appuyons de nombreux éléments du projet de loi et si nous pensons qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction, nous avons dû répéter sans cesse aujourd'hui que trois questions fondamentales sont absentes du projet de loi. On ne va pas assez loin dans les changements qui doivent être apportés au système de procès sommaires, dans les changements au système de règlement des griefs et dans le renforcement de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. J'aimerais axer mon intervention sur ces trois questions.
Concernant le système de procès sommaires, ce qui saute aux yeux, à la lecture du projet de loi, est l'insuffisance des mesures pour remédier à l'iniquité de ce système. Comme l'ont souligné mes collègues, les procès sommaires sont intentés aux membres des forces armées qui ont commis des infractions mineures. Pourtant, ils peuvent quand même se retrouver avec un casier judiciaire.
Ils n'ont ni le droit de consulter un avocat ni le droit de faire appel. Il n'existe aucun compte rendu écrit d'un tel simulacre de procès, et le juge est le commandant de l'unité de la personne inculpée. On ne peut considérer de telles règles que comme une injustice flagrante. Il est profondément troublant qu'elles soient restées en vigueur pendant aussi longtemps.
Apporter des changements au système de procès sommaires est selon moi essentiel pour les membres des forces armées et pour toute personne au pays qui attache de l'importance à la justice, à l'équilibre et à l'équité avec lesquelles les gens doivent être traités.
Nous trouvons très préoccupant que ce projet de loi ne remédie pas à ce problème fondamental. L'insubordination, les querelles, le tapage, les absences sans permission, l'ivresse et la désobéissance à un ordre légitime pourraient notamment constituer une infraction militaire dite mineure. Dans un système civil, les gens pourraient être accusés de ces infractions, mais si un procès avait lieu, ils auraient droit à un avocat, à une audience, à un juge et peut-être même à un jury. Or, dans le système des procès sommaires, l'accusé n'y a pas droit, alors qu'il risque d'être trouvé coupable d'une infraction criminelle. C'est une grave lacune de ce projet de loi et nous voulons qu'elle soit corrigée.
Comme l'ont souligné bon nombre de mes collègues, le NPD a travaillé d'arrache-pied pour amender la version précédente de cette mesure législative, le projet de loi . En fait, lorsqu'il était à l'étude au comité, au mois de mars 2011, nous voulions faire passer de 5 à 22 le nombre d'infractions qui ne justifient pas la création d'un casier judiciaire.
Nous avons travaillé très fort au comité. Je ne siégeais pas au comité, mais je suis certaine que des témoins ont été entendus. Nous savons que plusieurs témoins et organismes importants, comme l'association des libertés civiles de la Colombie-Britannique — qui a soulevé plusieurs préoccupations et exposé les lacunes fondamentales du projet de loi — ont envoyé de l'information.
Nous avons donc présenté ces amendements et le comité les a approuvés. C'est un exemple où le travail au comité a porté ses fruits. C'était constructif. Comme il se doit, des amendements ont été proposés, à l'étape de l'étude au comité, pour améliorer le projet de loi.
Or, surprise, au début de la nouvelle législature le gouvernement présente une nouvelle mesure législative, le projet de loi , qui ne contient pas lesdits amendements. C'est un grave problème.
Par principe, nous nous opposons à ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. C'est notre manière de protester, de dire que le processus a été gravement miné et que le gouvernement aurait dû agir de façon responsable, tenir compte du travail constructif qui avait été accompli à l'égard des versions antérieures du projet de loi et présenter une nouvelle version qui reflète la volonté de la Chambre.
Il est vraiment déplorable qu'aucun ministériel n'ait accepté de répondre à cette question aujourd'hui. Nous l'avons soulevée à maintes reprises à la Chambre. C'est une question très simple. Nous nous la sommes posée mutuellement, car les ministériels refusent d'y répondre. Nous avons demandé pourquoi les députés conservateurs et le gouvernement conservateur ont omis ces amendements.
Nous n'en sommes pas sûrs. Tout ce que nous pouvons faire, c'est supposer que c'est une forme d'optique unilatérale, d'arrogance de la part du gouvernement, qui estime qu'il peut laisser les amendements de côté sans plus de considération. Si ce n'est pas le cas, nous serions très heureux que des ministériels prennent la peine de nous expliquer pourquoi les amendements ne figurent pas dans le projet de loi .
Le deuxième élément clé sur lequel nous voulons nous pencher est la réforme du comité d'examen des griefs. Il s'agit d'un autre processus fondamental du système de justice militaire. Dans ce cas-ci, nous avions proposé des amendements et des mesures dont nous avions convenu pour renforcer le projet de loi. Il s'agit réellement d'un principe extrêmement simple.
Ce principe repose sur l'idée selon laquelle le processus doit comporter un volet externe et indépendant. En fait, l'amendement qui avait été proposé par le NPD à l'étape de l'étude en comité précisait qu'au moins 60 % des membres du comité ne devaient être ni des officiers ni des militaires du rang des Forces canadiennes. Cet amendement avait lui aussi été approuvé dans le cadre du projet de loi , mais n'a pas été inclus dans le projet de loi . Il nous semble très important que le comité dispose d'une certaine indépendance, d'une perspective plus large. Il y a donc lieu de se demander pourquoi l'amendement n'a pas été retenu.
Enfin, notre troisième préoccupation porte sur le renforcement de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Nous estimons — et nous avions aussi présenté un amendement à ce sujet — que la commission devrait être considérée comme un organe de surveillance, qui serait chargé de superviser le système dans son ensemble et qui aurait l'autonomie et les pouvoirs nécessaires pour enquêter et faire rapport au Parlement. Cette mesure non plus n'a pas été incluse dans le projet de loi.
Pour ces trois raisons, nous refusons d'appuyer le projet de loi pour le moment.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour participer au débat, comme nombre d'entre nous de ce côté-ci de la Chambre. C'est beau à voir. Je suis heureux que le ait ajouté son grain de sel au débat, mais nous espérons que d'autres députés des autres partis se joindront à la discussion. Ce débat revêt une grande importance pour les Forces canadiennes et pour leur modernisation.
Comme certains l'ont mentionné, le très honorable Antonio Lamer, qui était l'un de nos plus éminents hommes de lois, a apporté sa contribution à notre pays à de nombreux égards. Nous lui avons rendu hommage à la suite de son décès il y a quelques années. J'ai eu la chance de faire sa connaissance dans un contexte social et c'est quelqu'un qui a apporté sa contribution à notre système de bien des façons. Il a aussi examiné des questions liées à la justice à Terre-Neuve et a aidé cette province à réformer certains de ses systèmes. Le rapport qu'il a présenté en 2003 était approfondi. C'était aussi un plan qui nous indiquait ce que nous devions faire. Selon lui, nous devions moderniser le système de justice militaire.
Il est quelque peu étrange que le gouvernement souhaite renvoyer le projet de loi au comité et le faire adopter. Comme l'a mentionné ma collègue de , la Chambre a déjà été saisie de deux autres versions de ce projet de loi, notamment lorsqu'un gouvernement minoritaire était au pouvoir, mais le projet de loi est abruptement mort au Feuilleton en raison d'une prorogation.
Il faut prendre cela avec un grain de sel lorsque le gouvernement reproche aux autres partis à la Chambre, surtout le NPD, de ralentir les choses. Ce sont les conservateurs qui ont décidé de mettre fin aux travaux de la Chambre en ayant recours à la prorogation parce qu'ils craignaient de perdre le pouvoir.
Afin de bien comprendre le projet de loi et le contexte dans lequel il a été présenté, il faut rappeler que le gouvernement répète sans cesse que l'armée est importante et qu'il faut absolument appuyer les troupes; il en a fait sa marque de commerce. Cependant, lorsque nous confrontons ces affirmations à la réalité, qu'il soit question de la réforme du système de justice — ce dont nous débattons aujourd'hui — ou du soutien accordé aux anciens combattants, surtout ceux qui ont servi en Afghanistan, il y a un écart entre les beaux discours du gouvernement et les résultats obtenus.
Il faut aussi tenir compte de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire dans le débat sur le projet de loi. Nous avons longuement débattu du rôle de la commission lorsqu'il a été question des détenus. Pendant ce débat, on a fait valoir à la Chambre que le gouvernement ne s'était pas montré responsable et qu'il aurait pu en faire davantage pour appuyer la commission.
Les conservateurs ont nommé un nouveau président. Ils n'ont pas jugé utile de renouveler le mandat de l'ancien président parce qu'il faisait bien son travail. Les conservateurs n'ont pas suffisamment fourni de documents à la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, ce qui a mené à une crise au Parlement, et l'un de vos prédécesseurs a été obligé de trancher la question, monsieur le Président.
Il est important de comprendre le contexte. Si la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire est incapable de bien s'acquitter de son mandat, alors le système s'expose à des ratés.
Nous mettons sur pied ces entités pour faire en sorte qu'il y ait des audiences équitables et une application régulière de la loi. C'est extrêmement important. Toutefois, si le pouvoir exécutif interfère et n'appuie pas la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, qu'il s'agisse d'y nommer un président ou de veiller à ce qu'elle dispose de tout le matériel dont elle a besoin pour faire son travail, alors nous avons un dilemme. Ce dilemme, c'est que la commission n'est plus réellement indépendante. Son indépendance est compromise en raison du manque de coopération du pouvoir exécutif, comme nous l'avons vu dans le cas mentionné plus tôt, où le ministère de la Défense nationale, le ministre et, ultimement, le Cabinet, ont négligé de fournir des documents.
Il faut plus de clarté. Comme certains intervenants l'ont mentionné, d'autres pays se sont penchés sur la question. La CEPPM est une importante institution établie pour traiter de questions comme celles qui ont fait surface dans l'enquête sur la Somalie et gérer la situation lorsque les choses tournent mal au sein de l'armée. Manifestement, c'est une organisation distincte, une institution distincte, et elle a besoin de méthodes différentes pour traiter de questions de justice. Il faut vraiment la moderniser. Nous avons soutenu haut et fort que la CEPPM doit jouir d'une complète indépendance. Le gouvernement doit satisfaire aux demandes de la commission et non lui mettre des bâtons dans les roues.
Comme l'ont dit mes collègues, le projet de loi ne va pas assez loin pour véritablement régler certains problèmes relatifs aux griefs.
De nouveau, permettez-moi de lire à la Chambre certaines statistiques importantes concernant le recours aux procès sommaires. Il semble que le procès sommaire soit la méthode disciplinaire la plus souvent utilisée dans l'armée canadienne. Beaucoup de gens sont consternés de prendre connaissance des statistiques qui existent à ce sujet. En 2008 et 2009, 96 % des 1 865 cas ont fait l'objet d'un procès sommaire. Les 4 % restants, soit 67 cas, ont été renvoyés devant la cour martiale. Il est important de souligner que si on ne tient pas compte de la question des procès sommaires, il n'est pas possible de régler véritablement le grand problème, soit la modernisation de notre système de justice militaire.
Si le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et l'Irlande sont en mesure de composer avec cet héritage des procès sommaires, pourquoi ne pouvons-nous pas y arriver ici, au Canada? Je viens d'énumérer des modèles fonctionnant selon le système de Westminster qui ont réussi à régler le problème. Par conséquent, ce n'est certainement pas notre système parlementaire qui nous empêche d'agir. Les pays que je viens d'énumérer y sont arrivés. Les Parlements de ces pays relèvent tous de la tradition de Westminster. Pourquoi le gouvernement conservateur est-il incapable de passer à l'action? Nous avons fait état de ce problème à maintes reprises. Nous avons débattu de ce projet de loi dans ses versions précédentes, lorsque le Président siégeait en tant que député à la Chambre.
Le gouvernement dit qu'il fera ce qui doit être fait lorsque le projet de loi sera renvoyé à un comité. Les ministériels connaissent déjà le problème. Pourquoi n'ont-ils pas tenté de le régler plus tôt? Pourquoi n'ont-ils pas tenté de le régler après peut-être la deuxième mouture du projet de loi? Nous sommes maintenant saisis de la troisième mouture. Le gouvernement aurait pu agir bien avant. Si le gouvernement souhaite examiner la question de façon exhaustive, il aurait pu mettre les éléments en place. Il aurait pu renforcer la Commission des plaintes concernant la police militaire et régler la question des procès sommaires et du processus de règlement des griefs.
Comme je l'ai déjà signalé, l'armée est une institution différente. Mon père a participé à la Deuxième Guerre mondiale en tant que sergent. Il racontait souvent des blagues au sujet de son rôle dans l'armée. Comme il était sergent, il devait parfois faire régner la discipline au sein des troupes. Tout le monde devait se conformer au code en vigueur. Les temps ont changé depuis. Il est temps de moderniser le système, et c'est pourquoi nous pouvons difficilement appuyer le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture.
Nous nous attendons à ce que le gouvernement nous dise pourquoi il n'a pas fait le travail plus tôt. Nous demandons aux autres partis de l'opposition de prendre en considération les problèmes qui se posent. Agissons comme il se doit. Faisons le travail correctement, afin que nous puissions appuyer pleinement nos militaires.
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Je me fie à votre jugement, monsieur le Président, et même s'il s'agit d'une expression couramment utilisée, je la retire.
Il n'en demeure pas moins que le gouvernement est résolu à faire adopter coûte que coûte — et sans l'amender — son projet de loi, alors que les amendements que le NPD avait proposés à l'époque, et que la Chambre des communes et le comité avaient adoptés, étaient dans l'intérêt des membres des Forces canadiennes.
Quand on regarde la manière sans équivoque dont le gouvernement a agi envers les militaires et leur famille, on constate que la tendance est au manque de respect. Il n'y a pas d'autre façon de le dire. Le gouvernement refuse d'amender une mesure législative bourrée de lacunes qui mettra les militaires dans une situation pour le moins délicate. Et comme si ce n'était pas suffisant, voilà que le gouvernement prend l'habitude de manquer de respect aux militaires et aux anciens combattants.
Ce ne sont pas les exemples qui manquent, à commencer par les coupes de 226 millions de dollars dans le budget d'Anciens Combattants Canada. Résultat: 500 postes partis en fumée. Les conservateurs peuvent bien dire que tout va bien et qu'ils vont s'organiser pour fournir les services malgré les compressions, mais comme les néo-démocrates — et le porte-parole officiel du NPD pour les anciens combattants — l'ont dit à maintes reprises, les répercussions sur les services offerts aux anciens combattants ne font aucun doute. Le manque de respect envers les militaires et les anciens combattants non plus, soit dit en passant.
Il y a de nombreux exemples semblables. Notre équipe qui s'occupe du dossier des anciens combattants, le député de , qui est le porte-parole du NPD sur cette question, ainsi que le député de Québec, ont dit à la Chambre que de nombreux anciens combattants n'ont pas accès aux services dont ils ont besoin. On n'a qu'à penser aux anciens combattants qui ont demandé de consulter des psychologues au ministère des Anciens Combattants et dont la demande a été rejetée.
Des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale se sont vus refuser le remboursement de monte-escaliers qui leur auraient donné accès aux étages de leur résidence parce que ces étages n'ont pas été estimés être des espaces essentiels. On a refusé d'offrir des soins à des anciens combattants dans des hôpitaux qui leur sont destinés parce qu'ils ne respectaient pas des conditions très précises, et ce, même s'ils avaient combattu pour notre pays. Un certain nombre de dossiers médicaux d'anciens combattants ont été rendus publics.
Il ne s'agit pas d'une simple série d'accidents. Le débat d'aujourd'hui révèle que le gouvernement fait systématiquement preuve de mépris envers les anciens combattants: le gouvernement refuse d'améliorer un projet de loi qui renferme de très graves lacunes qui nuiront aux membres des Forces canadiennes.
De ce côté-ci de la Chambre, le caucus du NPD défendra les membres des Forces canadiennes parce que nous estimons qu'il s'agit de la chose à faire. Les anciens combattants ont risqué leur vie pour notre pays, et le moins que les députés puissent faire pour eux, c'est d'adopter des mesures législatives qui leur témoigneront du respect qu'on leur doit. Or, ce projet de loi rate sa cible. Voilà pourquoi nous nous y opposons. Voilà pourquoi nous voterons contre ce projet de loi.