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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat et d'appuyer le projet de loi , Loi sur la lutte contre le terrorisme.
Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale a étudié le projet de loi et a entendu différents témoins. Il y a eu un débat de fond qui a porté sur de nombreux aspects, dans le cadre duquel les témoins ont soulevé des points importants et apporté une contribution considérable. Plusieurs thèmes sont ressortis pendant l'étude du projet de loi . J'aimerais en parler pendant mon intervention d'aujourd'hui. Je commencerai avec la nature du projet de loi .
Le projet de loi est d'abord et avant tout une réforme ciblée du droit pénal. Il soulève diverses questions qui dépassent sa portée, mais qui sont en lien avec celui-ci. Le projet de loi ne peut pas répondre à toutes les préoccupations soulevées dans le contexte de la sécurité nationale, et ce n'est pas son objectif. Le gouvernement s'active sur de nombreux fronts pour résoudre d'autres questions de sécurité nationale, en utilisant les moyens les mieux adaptés à l'atteinte de l'objectif, qu'il s'agisse de programme, de formation ou d'autres initiatives législatives. Le projet de loi vise plutôt à rétablir les dispositions du Code criminel relatives aux audiences d'investigation et aux engagements assortis de conditions qui ont cessé de s'appliquer en mars 2007, en les assortissant de nouvelles garanties qui s'ajoutent à celles de la loi originale.
Le projet de loi modifie également le Code criminel afin d’ériger en infraction le fait de quitter ou de tenter de quitter le Canada pour commettre certaines infractions de terrorisme. Il répond aux recommandations faites au cours de l'examen parlementaire de la Loi antiterroriste et comprend d'autres améliorations au Code criminel, à la Loi sur la preuve au Canada et à la Loi sur la protection de l'information.
L'investigation est conçue pour faciliter la collecte, par un juge et à la demande d'un agent de la paix, de renseignements pouvant être utiles dans une enquête sur des infractions terroristes passées ou futures.
La disposition sur l'engagement assorti de conditions permettrait à un agent de la paix de demander à un juge de faire comparaître devant lui une personne afin de déterminer s'il est nécessaire de lui imposer des conditions raisonnables pour prévenir une activité terroriste. Il reviendrait à l'État de démontrer au juge qu'il existe des motifs suffisants pour faire une telle demande et pour imposer des conditions à la personne visée.
La nécessité de ces dispositions fait l'objet d'un débat, et divers témoins nous ont présenté des arguments convaincants à l'appui de la réintégration de ces dispositions dans la loi. Par exemple, le commissaire adjoint James Malizia, du Service divisionnaire de la police de protection, au sein du programme des Enquêtes criminelles relatives à la sécurité nationale de la GRC, a indiqué que de telles dispositions étaient nécessaires pour aider les responsables de l'application de la loi à faire leur travail, tout en soulignant qu'elles devaient être invoquées avec prudence.
Le comité a eu l'occasion d'entendre le témoignage de Maureen Basnicki, cofondatrice de la Coalition canadienne contre le terrorisme. Elle n'est pas d'accord avec les gens qui, au moment où les dispositions sur les investigations et les engagements assortis de conditions ont été introduites dans la législation pour la première fois, les ont qualifiées de réaction de panique du pouvoir législatif après les attentats du 11 septembre 2001. Elle est plutôt d'avis que « loin d'être une réaction exagérée aux attentats du 11 septembre, ces dispositions étaient, en fait, une admission sobre et responsable du danger que pose le terrorisme pour l'avenir de la communauté internationale ». Par conséquent, elle exhorte les députés à penser à la sécurité des Canadiens en examinant le projet de loi et en se prononçant à ce sujet.
Mme Basnicki nous dit ceci:
Le Canada ne devrait pas supprimer des moyens raisonnables de lutte au terrorisme alors que des terroristes sont en train de fourbir leurs armes pour les utiliser contre les Canadiens et d'autres victimes innocentes. Si les dispositions du projet de loi S-7 peuvent toujours être rectifiées ultérieurement, aucune loi du Parlement ne pourra rebâtir les vies détruites par une attaque terroriste future qui aurait pu être évitée.
Le projet de loi vise en outre à modifier le Code criminel afin d’ériger en infraction le fait de quitter ou de tenter de quitter le Canada pour commettre certaines infractions de terrorisme. Ces dispositions sont conçues spécialement pour empêcher des personnes de quitter le Canada afin de participer aux activités d'un groupe terroriste à l'étranger, par exemple, afin de recevoir un entraînement ou de commettre des attentats terroristes.
Certains témoins ont appuyé la création de ces infractions. Par exemple, lors des audiences, Rob Alexander, membre du comité et porte-parole de l'Association des familles des victimes d'Air India 182, a affirmé que les nouvelles infractions proposées sont nécessaires en raison de la mondialisation des activités terroristes et des informations indiquant que des gens quittent le Canada pour participer à des camps d'entraînement terroristes à l'étranger. Selon lui, ces délinquants canadiens potentiels peuvent menacer la vie des militaires des Forces canadiennes en mission à l'étranger. À son avis, les infractions proposées permettraient de réduire ce dilemme au minimum.
Le terrorisme est une pratique odieuse qui nécessite des mesures préventives et proactives. Ces nouvelles infractions permettraient aux forces de l'ordre d'intervenir à l'étape de la planification d'actes de terrorisme et, partant, de les prévenir. Avec les nouvelles infractions proposées, on enverrait un message dissuasif clair qui contribuerait à atténuer les risques de terrorisme. Par surcroît, on pourrait imposer des peines maximales adéquates.
Au cours des débats entourant le projet de loi , certains ont prétendu que celui-ci ne protège pas les droits de la personne. Au contraire, le projet de loi contient de nombreuses mesures pour garantir la protection des droits de la personne. Nous pouvons tous convenir que les mesures antiterroristes doivent assurer la sécurité tout en respectant les droits de la personne.
Prenons l'exemple des investigations. Selon les dispositions relatives à l'investigation, s'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une personne détient des informations sur une infraction liée au terrorisme qui a été commise ou qui sera commise, la cour pourra forcer cette personne à comparaître. Évidemment, le gouvernement a fait beaucoup d'efforts pour empêcher que les témoins subissent des conséquences imprévues lors des audiences.
Premièrement, le procureur général doit donner son consentement avant qu'on entame le processus d'investigation. C'est une mesure procédurale importante qui est conforme à d'autres mesures prévues dans le Code criminel.
Deuxièmement, pour qu'une investigation ait lieu, il faudrait que le juge soit d'avis qu'elle est justifiée. Par exemple, aux termes du projet de loi , pour rendre une ordonnance en vue de recueillir des renseignements, le juge doit avoir l'assurance qu'on a obtenu le consentement du procureur général, et qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une infraction liée au terrorisme a été commise ou sera commise; que des renseignements relatifs à l’infraction ou au lieu où se trouve le suspect sont susceptibles d’être obtenus grâce à l’ordonnance; et que des efforts raisonnables ont été déployés pour obtenir les renseignements par d’autres moyens.
Selon les dispositions figurant dans les versions antérieures de la mesure législative, cette garantie ne s'appliquait qu'aux infractions de terrorisme appréhendées, et non à celles déjà commises. Elle s'appliquerait maintenant tant aux infractions de terrorisme déjà commises qu'à celles qui sont appréhendées, afin de garantir que les investigations ne sont effectuées que lorsque les circonstances le justifient.
Pour ce qui est de la troisième garantie, j'attire l'attention des députés sur le fait que le projet de loi initial, présenté en 2001, conférait le pouvoir d'arrêter une personne sans mandat dans certaines circonstances bien précises, par exemple lorsque la personne était sur le point de s'esquiver, afin de voir à ce qu'elle se présente bien devant un juge. Cela dit, le projet de loi initial ne faisait nullement mention de la durée de la période de détention après l'arrestation. Le projet de loi corrigerait cette lacune puisqu'il prévoit que l'article 707 du Code criminel, qui précise la durée maximale de détention d'un témoin à un procès criminel, s'appliquerait également aux personnes mises sous garde pour prendre part à une investigation. L'article 707 prévoit que la durée totale de la détention d'un témoin ne doit pas dépasser 90 jours et qu'une révision judiciaire doit être effectuée au cours de chaque période de 30 jours.
Enfin, puisqu'il s'agit d'un principe fondamental du système judiciaire de notre pays, la personne nommée dans la demande de collecte de renseignements liée à l'investigation aurait le droit de retenir les services d’un avocat et de lui donner des instructions à toute étape du processus. Nous devons également tous être conscients que les dispositions proposées relativement à l'investigation interdisent formellement à l'État d'utiliser ces renseignements — ou les éléments de preuve en découlant — contre une personne qui a témoigné. Il existe toutefois une exception évidente et logique, qui s'applique dans les cas de poursuites intentées contre des témoins en raison d'allégations de parjure ou de présentation de preuves contradictoires. Bien entendu, cette exception est justifiée.
En 2004, la Cour suprême du Canada s'est penchée sur cette interdiction formelle et a rejeté l'argument selon lequel la tenue d'une investigation porte atteinte au droit d'une personne de garder le silence et à son droit à la protection contre l'auto-incrimination. La Cour a également étendu la protection de l'immunité contre l'utilisation de la preuve ou de la preuve dérivée, qui est prévue à l'article 83.28 du Code criminel, au-delà du contexte de la procédure, afin de couvrir les audiences en matière d'extradition et d'expulsion.
D'ailleurs, à ce sujet, je tiens à rappeler aux députés que le projet de loi serait examiné à la lumière du jugement de la Cour suprême du Canada afin que la protection de l'immunité contre l'utilisation de la preuve ou de la preuve dérivée, qui est prévue dans cet article, soit étendue aux audiences d'extradition et d'expulsion. Bref, le projet de loi S-7 intègre des garanties appropriées et justes.
La question de l'examen et de la reddition de comptes a également été soulevée durant le débat et la discussion sur le projet de loi. Le projet de loi S-7 contient un grand nombre de dispositions relatives à la présentation de rapports et à l'examen parlementaire , ainsi que de nombreuses dispositions de caducité. Le projet de loi exige que le Parlement examine les dispositions concernant l'investigation et l'engagement assorti de conditions avant la date où elles cesseront d'avoir effet. Ces mesures seraient soumises à une autre disposition de caducité. Elles viendraient donc à échéance après cinq ans, à moins d'un renouvellement par résolution parlementaire.
Enfin, le projet de loi prévoit, tout comme la loi originale, le dépôt de rapports annuels par le gouvernement fédéral et les provinces sur le recours à ces dispositions.
Toutefois, le projet de loi renforcerait les exigences relatives au dépôt de rapports annuels parce que, dans leurs rapports annuels, le procureur général et le ministre de la Sécurité publique seraient aussi tenus d'indiquer s'ils croient que ces dispositions devraient rester en vigueur et de justifier leur position. Les processus de reddition de comptes intégrés dans le projet de loi sont exhaustifs et robustes.
En conclusion, les mesures proposées dans le projet de loi sont nécessaires, proportionnées et équilibrées, et elles sont assorties de nombreuses garanties. J'exhorte tous les députés à voter pour le projet de loi.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , Loi sur la lutte contre le terrorisme. Mes collègues néo-démocrates et moi-même n'avons pas appuyé cette mesure à l'étape de la deuxième lecture, et nous continuons de nous y opposer, puisque les audiences du Comité de la sécurité publique de la Chambre des communes ont révélé que le gouvernement a beaucoup d'intentions cachées.
De plus, le rétablissement de dispositions provenant de la Loi antiterroriste de 2001 pose aussi problème, malgré l'ajout de certaines balises. Mes collègues y reviendront pendant le débat à l'étape de la troisième lecture.
Pour ma part, je me concentrerai sur ce point: les audiences du comité ont confirmé que, malgré les balises supplémentaires que vient de décrire le secrétaire parlementaire, le projet de loi pose de graves problèmes en ce qui touche les droits de la personne et la primauté du droit.
Pendant les audiences du comité sur le projet de loi , mes collègues néo-démocrates et moi-même avons soulevé plusieurs questions concernant les nouvelles infractions qu'établit cette mesure, mais nous n'avons jamais reçu de réponse complète du gouvernement.
Nous sommes toujours préoccupés par certaines des nouvelles infractions ciblant ceux qui « tentent de quitter le Canada ». Nous sommes particulièrement troublés — et c'est un élément essentiel — par le lien entre ces infractions et les mesures antiterroristes qui faisaient partie de la Loi antiterroriste de 2001 et ont été rétablies, et qui portent sur la détention préventive, l'engagement assorti de conditions et les investigations.
Premièrement, d'après les témoignages de la part de la GRC et du SCRS, il ne fait aucun doute que les préoccupations que j'ai exprimées à l'étape de la deuxième lecture étaient tout à fait fondées. Une infraction consistant à tenter de quitter le pays pourrait servir de prétexte pour déclencher, premièrement, une investigation où seraient interrogés les proches et les membres de la communauté qui connaissent le suspect.
Deuxièmement, les renseignements recueillis au cours de cette investigation serviraient à justifier une détention préventive pouvant durer jusqu'à 72 heures, suivi d'un engagement assorti de conditions d'une durée potentielle de 12 mois, qui pourrait, et il est important de le souligner, être suivi, sans procès ou condamnation, d'un emprisonnement pouvant aller jusqu'à 12 mois si la personne refuse les conditions qu'on lui impose ou si on juge qu'elle ne respecte pas ces conditions.
Ces conditions pourraient comprendre — et ce sera sans doute le cas — la confiscation des passeports, afin d'imposer de manière détournée et automatique un régime de mesures restrictives comme celui qu'utilise ouvertement le Royaume-Uni pour empêcher les départs du pays. Il est important de noter que tout cela se déroulerait de manière tacite, sans que la procédure soit débattue ou organisée adéquatement.
Ainsi, cette nouvelle infraction pourrait très bien ne jamais aboutir à aucun procès; c'était peut-être d'ailleurs ce que souhaitait ultimement le gouvernement. Celui-ci va fort probablement s'en servir pour empêcher les déplacements des gens, grâce au rétablissement des dispositions extraordinaires relatives à l'investigation et à l'engagement assorti de conditions.
Le projet de loi a été débattu au Sénat avant d'être renvoyé à la Chambre. Le projet de loi est issu du Sénat. Le ministre de la Justice a clairement affirmé devant le comité de l'autre endroit que les investigations pourraient servir à recueillir des preuves concernant l'intention de quitter le pays à des fins illicites. Or, comme le projet de loi l'indique, les preuves recueillies au cours des investigations ne peuvent être employées dans des procédures criminelles intentées contre une personne interrogée durant l'investigation.
Voilà qui indique clairement qu'on a l'intention d'utiliser les investigations pour interroger les proches, les voisins, les amis et d'autres membres de la communauté d'un suspect, avec tout ce que cela implique de profilage discriminatoire et de harcèlement dans la communauté qui est la cible de surveillance antiterroriste.
Le SCRS et la GRC nous ont effectivement dit de leur faire confiance. Ils disent que, puisque ces dispositions n'ont pas été utilisées avant de devenir caduques, elles ne seront pas utilisées davantage maintenant. On se demande pourquoi le gouvernement insiste pour les rétablir, mais quoi qu'il en soit, nous ne devrions pas nous y fier. La tentative de quitter le pays est une nouvelle infraction qui a de vastes répercussions et le gouvernement a la ferme intention d'utiliser les audiences d'investigation dans le cadre de cette infraction, ou de la série d'infractions qui entre dans cette catégorie.
Au cours du même témoignage présenté au Sénat, le ministre de la Justice a également établi un lien entre les ordonnances d'engagement assorti de conditions et la nouvelle infraction.
Lors des audiences du Comité de la sécurité publique, on a soumis aux témoins du gouvernement l'hypothèse selon laquelle les preuves recueillies lors des audiences d'investigation pourraient servir non seulement de motif pour arrêter une personne avant qu'elle ne quitte le pays, mais aussi de justification pour obtenir un engagement assorti de conditions sans qu'il soit nécessaire d'intenter des poursuites.
Il ne faut pas oublier que l'« engagement assorti de conditions » est une expression élégante qui signifie essentiellement qu'on limite la liberté des citoyens sans procès ni condamnation. Aucun témoin n'a nié qu'il s'agissait d'une voie possible. Il faut se souvenir, je tiens à le répéter, que tout refus de se soumettre aux conditions peut entraîner une période d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 12 mois, sans que la personne ait jamais subi de procès ou été condamnée.
Il s'agit manifestement d'une série de mesures graves et c'est pour cette raison que le NPD s'oppose au rétablissement des dispositions de caducité dont j'ai parlé. C'est aussi pour cela que nous avons insisté pour inclure des garanties supplémentaires visant à accroître la surveillance et la reddition de comptes sur la façon dont ces dispositions seront mises en pratique.
Lors de l'étude en comité, nous nous sommes concentrés sur la présentation d'amendements à propos de ces garanties car, bien franchement, il était acquis que les dispositions envahissantes allaient être acceptées par la majorité conservatrice. Nous avons proposé quelque 18 amendements et aucun n'a été adopté, soit parce que les membres du gouvernement, qui forment la majorité, les ont rejetés, soit parce que le président a jugé qu'ils dépassaient la portée du projet de loi. Dans un cas, ce fut parce que le projet de loi vient du Sénat, ce dont j'espère pouvoir parler.
Ces amendements visaient à accroître la reddition de comptes, tandis que le gouvernement présentait à nouveau ces mesures assujetties à une disposition de caducité dans la Loi antiterroriste originale, créait une nouvelle séries d'infractions pour les personnes quittant le pays, et renforçait, de son point de vue, les sanctions contre les gens hébergeant un terroriste. En tout, 50 % de ces amendements ont été jugés irrecevables. J'ai soutenu, sans succès, que de telles décisions allaient à l'encontre des objectifs législatifs du projet de loi et ne tenaient pas compte d'une décision récente de la présidence sur la façon de déterminer quand un projet de loi devrait être considéré comme une mesure financière. Il s'agit là de questions techniques que nous laisserons de côté pour l'instant.
Il est important de souligner, comme le secrétaire parlementaire l'a fait dans son intervention, que le projet de loi comporte trois objectifs. Quand le président a jugé que certains de nos amendements dépassaient la portée du projet de loi, il ne tenait pas compte de plus d'un objectif.
Le premier objectif est la répression du terrorisme. La deuxième objectif est la protection des droits. Nous admettons que ce projet de loi protège un peu mieux les droits de la personne que le projet de loi de 2001. Il contient notamment une mesure qui accorde le droit à une personne d'être représentée par un avocat avant une investigation. Nous croyons seulement que ce n'est pas suffisant. Finalement, le troisième objectif est la mise en place de mécanismes de surveillance, de reddition de comptes et de transparence des institutions. Ils sont tous liés, mais ils ont des buts différents. À notre avis, tous les amendements que nous avons proposés correspondent à au moins un de ces trois objectifs. Par conséquent, ils ne dépassaient pas la portée du projet de loi.
Le Nouveau Parti démocratique croit que nous devons nous pencher sérieusement sur la question du terrorisme. Cela ne fait aucun doute. Nous devons toutefois veiller à respecter les droits et les libertés.
Voilà pourquoi nous avons présenté les amendements visant à renforcer les dispositions du projet de loi relatives à la surveillance, à la transparence et aux rapports. L'objectif était d'atténuer les répercussions néfastes que le projet de loi pourrait avoir sur les libertés civiles. Ces amendements sont inspirés des témoignages que nous avons entendus au comité et reflètent les valeurs qui, selon nous, sont importantes pour les Canadiens.
Permettez-moi de passer en revue certains amendements que nous avons proposés.
Le premier amendement visait à mettre en place un protocole de coopération inter-organismes entre le SCRS, la GRC, l'ASFC et l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien avant de faire entrer en vigueur l'infraction relative au fait de quitter le pays. En effet, nous sommes d'avis qu'il faut soigneusement circonscrire les pouvoirs exceptionnels de l'État et les assujettir à une rigoureuse surveillance indépendante. C'était l'un des objectifs du protocole. L'amendement a été jugé irrecevable au motif qu'il dépasse la portée du projet de loi.
Or, à notre avis, l'amendement était à la fois nécessaire et cadrait avec la portée du projet de loi, car, au Sénat, le directeur du SCRS a souligné que ces organismes n'ont signé aucun protocole de coopération leur permettant d'appliquer l'infraction relative au fait de quitter le pays. Il a clairement dit que des protocoles de ce genre sont nécessaires.
Les témoins qui ont comparu devant le comité abondaient dans ce sens et nous les avons pris au sérieux. Voilà pourquoi nous avons proposé qu'un protocole de collaboration soit conclu et que le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité — le seul comité de surveillance compétent dans ce domaine — soit obligé d'y souscrire avant que les dispositions n'entrent en vigueur. Selon nous, cet amendement était raisonnable. Or, puisqu'il a été rejeté, nous ne pouvons qu'espérer que les organismes concernés élaboreront un protocole avant l'entrée en vigueur de ces nouvelles infractions.
Le deuxième amendement concernait les conditions dans lesquelles une personne peut être inculpée d'avoir hébergé des terroristes. Le gouvernement veut faire adopter une disposition selon laquelle quiconque héberge ou cache sciemment une personne dont il sait qu'elle se livrera vraisemblablement à une activité terroriste, afin de lui permettre de se livrer à une activité terroriste ou de la faciliter, est coupable d'un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de 10 ans.
Nous voulions remplacer les mots « se livrera vraisemblablement à une activité terroriste » par « a l'intention de se livrer à une activité terroriste ». Notre position, soutenue par des témoignages et des mémoires notamment de l'Association du Barreau canadien, c'est que la vraisemblance est un critère beaucoup trop laxiste, surtout quand on demande à quelqu'un de juger de l'intention criminelle d'une autre personne. Le mot « vraisemblablement » se base beaucoup trop sur des suppositions. Malgré cela, l'amendement a été rejeté.
Le troisième amendement que nous avons proposé visait à garantir que le témoignage recueilli lors d'une investigation ne puisse être utilisé contre la personne ni dans le cadre de poursuites criminelles, comme il est déjà prévu dans le projet de loi, ni dans le cadre d'audiences en matière d'extradition ou d'expulsion. La secrétaire parlementaire a dit que c'était implicite. Or, la Cour suprême a tranché la question il y a près de 10 ans en disant que, en conformité de la Charte, le témoignage ainsi obtenu ne peut être utilisé contre la personne dans le cadre d'audiences en matière d'extradition ou d'expulsion. Les conservateurs l'ont reconnu au comité, mais ont quand même refusé d'ajouter la précision pour que la loi soit claire.
Nous voulions inclure cette précision pour la simple et bonne raison que nous croyons que le droit criminel doit être aussi clair que possible et que nous estimons qu'elle s'impose pour des motifs de cohérence, de prudence et de respect des décisions de la Cour suprême. Or, comme l'amendement a fait l'objet d'une opposition ciblée, on est en droit de croire que le gouvernement espère réellement qu'une Cour suprême nouvellement recomposée réexaminera la question et déterminera que l'utilisation du témoignage ne doit être interdite que dans le cadre de poursuites criminelles. Il n'y a aucune autre explication logique pour justifier l'opposition du gouvernement à cet amendement.
Nous avons également proposé que le droit à un avocat prévu dans le projet de loi soit étendu afin d'inclure le droit à un avocat aux dépens de l'État, c'est-à-dire à l'aide juridique, advenant qu'une personne soit appelée à témoigner au cours d'une investigation. N'oublions pas que les témoins comparaissent dans ces investigations sans nécessairement avoir commis de méfait ou être soupçonnés d'en avoir commis. Dans un tel contexte, nous estimons qu'il importe de nous assurer que les personnes concernées n'aient pas à assumer le coût des investigations menées par l'État.
Nous étions aussi d'avis qu'il était tout particulièrement important de dire que le droit à un avocat est un droit négatif. Les personnes qui en ont les moyens pourront évidemment avoir recours aux services d'un avocat et jouiront ainsi d'une protection beaucoup plus grande que les autres lors des investigations. Dans le cas des personnes qui n'en ont pas les moyens, le projet de loi ne contient aucune disposition leur permettant d'avoir accès à un avocat, et ce, malgré le fait que le Code criminel prévoit une disposition relative à de l'aide juridique nommée par le gouvernement fédéral et financée par l'État.
Un autre amendement proposé nous a permis d'en apprendre davantage sur l'intention que vise le gouvernement en présentant ce projet de loi. Nous avons tenté d'amender la disposition sur l'engagement assorti de conditions afin qu'elle précise sans ambiguïté — et j'insiste là-dessus — que seules les personnes que l'on juge susceptibles de participer à une activité terroriste pourraient être assujetties à l'engagement assorti de conditions. Nous souhaitions éviter que les personnes qui ne sont pas soupçonnées d'activités terroristes soient assujetties aux restrictions à la liberté prévues dans l'engagement assorti de conditions. Nous pensions qu'il était important d'apporter cet amendement amical à une disposition mal rédigée. Toutefois, nous avons été sidérés lorsque, au cours de l'étude article par article du projet de loi, cet amendement que nous pensions amical a été rejeté. À notre grand étonnement, la secrétaire parlementaire a déclaré que le gouvernement souhaitait que la portée de cette disposition continue d'être large précisément parce que l'engagement assorti de conditions pourrait être imposé à une personne qui n'est pas soupçonnée de se livrer à des activités criminelles. Voici ce qu'a déclaré la secrétaire parlementaire:
Dans sa forme actuelle, l'engagement assorti de conditions peut être imposé pour tenter de tuer dans l'oeuf la planification d'une activité terroriste, même si la personne à qui s'applique l'engagement assorti de conditions n'est pas forcément celle qui se livre à une activité terroriste.
L'amendement vise à restreindre l'application de cette mesure.
Il s'agissait ici de l'amendement proposé par le NPD. Puis, elle a ajouté ce qui suit:
Nous nous y opposons parce qu'il ne correspond pas à l'objet sous-jacent de la disposition.
Le gouvernement a déclaré publiquement qu'il souhaitait que des conditions soient imposées à des personnes parfaitement innocentes. Le non-respect de cette disposition pourrait entraîner une peine d'emprisonnement de 12 mois. Est-ce le genre de régime que nous souhaitons voir être implanté au pays?
Nous avons ensuite proposé toute une série d'amendements pour faire en sorte que les dispositions relatives à la présentation de rapports prévues dans le projet de loi soient plus solides et moins générales. Par exemple, nous souhaitions qu'il soit possible d'obtenir des statistiques détaillées sur l'utilisation des dispositions. De nombreux témoins ont indiqué qu'il fallait mettre en place des normes qui permettraient d'éclaircir à quoi serviraient les examens de l'utilisation des dispositions. Nous souhaitions apporter notre aide à ce propos.
Nous voulions aussi que l'information portant sur le contrôle des sorties et sur les systèmes d'information sur les sorties figure expressément dans l'examen. Nous le voulions parce que le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité a dit au comité sénatorial qu'il n'y avait pas de tels systèmes globaux au Canada. Quoi qu'il en soit, lors des audiences du comité, tout indiquait que le gouvernement comptait, d'une façon ou d'une autre, adopter une démarche davantage axée sur l'information globale, ce qui pourrait faire en sorte qu'on instaure des systèmes de contrôle des sorties.
Il était évident, pas dans le projet de loi mais dans une autre mesure législative, que les conservateurs avaient créé les conditions permettant d'avoir plus rapidement accès à l'information sur les sorties par rapport à ce qui est actuellement possible, de sorte qu'on connaîtrait l'identité des passagers avant le décollage des avions et que les agents canadiens pourraient, s'il y a lieu, arrêter des gens dans les appareils. Ces dispositions ne figurent pas dans le projet de loi S-7, mais dans le projet de loi , qui est un projet de loi d'exécution du budget.
Nous nous étions tout simplement inspirés du directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, qui a dit devant le Cabinet que nos propositions visant à renforcer la liste des passagers interdits de vol découlaient directement des nouvelles infractions concernant les sorties du Canada. Or, on ne nous avait donné aucune information sur la nature des débats en cours. Selon nous, il fallait absolument faire en sorte que les mécanismes d'examen à venir permettent de tenir compte du contrôle des sorties et de l'information sur les sorties.
Je crois que mon temps de parle est presque écoulé. Je dois dire, par contre, que les députés d'en face ont chahuté et fait du brouhaha tout le temps qu'a duré mon intervention.
Les amendements auraient aussi fait en sorte qu'un processus d'examen global prévoie expressément la mise en oeuvre des quatre infractions concernant les sorties du Canada...
Des voix: Oh, oh!