ENVI Rapport du Comité
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Rapport minoritaire du parti LIBéRALIl est remarquable qu’un comité permanent s’intéressant à l’environnement et au développement durable entreprenne une étude sur la qualité de l’eau du bassin des Grands Lacs et parvienne à ne jamais mentionner les enjeux liés aux changements climatiques et à niveau de l’eau dans ses recommandations. Le rapport fait référence aux répercussions néfastes des changements climatiques sur les Grands Lacs et les efforts déployés pour régler des problèmes environnementaux chroniques, mais aucune recommandation n’est formulée pour réagir à cette importante question. En outre, le rapport mentionne à de nombreuses reprises que le niveau de l’eau est bas, mais, encore une fois, aucune recommandation sur cette question n’est présentée. On voudrait nous faire croire que l’on peut étudier la qualité de l’eau sans s’intéresser à la quantité de l’eau, aux effets des changements climatiques et à la fréquence croissante des phénomènes météorologiques extrêmes. Si l’on adopte une perspective étroite et restreinte, on se retrouve avec des recommandations étroites, restreintes et, en fin de compte, plutôt inutiles. Voici la liste des paragraphes du rapport qui font référence aux changements climatiques (nous soulignons) : (50) Les problèmes associés à la pollution de source diffuse dans les Grands Lacs sont exacerbés par l’arrivée de nouvelles espèces envahissantes qui modifient le réseau trophique, les changements dans l’utilisation des terres et d’autres interventions humaines, sans compter le changement climatique. Selon un témoin, ces facteurs « ont changé la donne[1] ». (58) Enfin, le changement climatique semble un facteur aggravant. Les températures plus chaudes causent une plus grande évaporation, notamment en hiver si la couche de glace n’est pas suffisante[2]. L’évaporation accrue contribue à faire baisser les niveaux d’eau, surtout dans les zones peu profondes, où l’eau se réchauffe plus rapidement, favorisant la croissance d’algues. Par ailleurs, une plus grande quantité de phosphore dissous se retrouve dans les bassins hydrographiques, et ce phénomène est attribuable à « une augmentation du ruissellement ainsi que de la fréquence des pluies fortes et des périodes de fonte des neiges en raison des changements climatiques[3] ». (85) Il semble y avoir plusieurs causes expliquant les bas niveaux d’eau soutenus dans le lac Huron et le lac Michigan, qui sont essentiellement les deux lobes d’un même lac. En outre, le dragage de la rivière Sainte-Claire dans les années 1950 et 1960 et l’érosion subséquente dans la région, ont fait en sorte que l’eau s’écoule plus rapidement du bassin. Le changement climatique a aussi été pointé du doigt par un certain nombre de témoins. Ce phénomène provoque non seulement une augmentation des eaux de ruissellement en raison des orages violents plus fréquents[4], mais aussi vient réduire la couche de glace en hiver, ce qui contribue à accroître l’évaporation et à faire baisser les niveaux d’eau. (90) Les Grands Lacs, cependant, constituent un système dynamique susceptible aux changements. Le fait que la prolifération d’algues connaît une recrudescence malgré la réduction constante des rejets de phosphore montre qu’il faut tenir compte de nouveaux facteurs dans la planification des efforts de restauration. Les sources diffuses de phosphore et autres polluants sont désormais de sérieuses préoccupations. La réaction du système des Grands Lacs à ces intrants est exacerbée par d’autres changements se produisant dans le système en raison de l’arrivée d’espèces envahissantes, des changements climatiques et des répercussions de la croissance démographique dans la région. (101) Certaines initiatives ont néanmoins été mises en œuvre afin de faciliter la communication de pratiques exemplaires. L’Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent a mis sur pied un site Web consacré aux pratiques exemplaires et, de manière semblable, un Service municipal d’adaptation et de résilience, qui vise les techniques d’adaptation aux changements climatiques. (131) Le quatrième et dernier enjeu qui, selon les témoins, nécessite des mesures de gestion préventive et adaptative sont les changements climatiques. Ces changements ont des répercussions sur toutes les espèces sauvages — tant les espèces indigènes que les espèces envahissantes — de même que sur l’usage de l’eau par les humains, comme la consommation, la pêche, le transport de marchandises et les loisirs. En outre, les changements climatiques font échouer les efforts déployés pour améliorer la qualité de l’eau dans les Grands Lacs. (132) Des témoins ont recommandé l’adoption de mesures d’atténuation et d’adaptation relativement aux changements climatiques. Sur le plan des mesures d’atténuation, la réduction des émissions de gaz à effet de serre passera par des engagements supplémentaires non seulement de la part de tous les ordres de gouvernement, mais aussi de l’ensemble de la communauté internationale. Les mesures d’adaptation sont, nécessairement, un objectif de nature locale. (133) L’adaptation aux changements climatiques comporte plusieurs facettes. Par exemple, un témoin a expliqué que « certaines espèces sont incapables de frayer dans des eaux tempérées, et elles sont donc vouées à disparaître. Nous devons prendre des initiatives et veiller aux intérêts de ces poissons. » Il a suggéré de s’inspirer de la situation aux États-Unis et de leurs pratiques de gestion des habitats, « car les températures que l’on observe aujourd’hui là-bas sont celles qui règneront chez nous demain ». (134) Un autre témoin a souligné qu’il est nécessaire de renforcer le pouvoir de retenir l’eau dans le lac Huron — le seul Grand Lac du Canada où cette capacité est pour l’heure inexistante — afin de mieux gérer les répercussions des changements climatiques. De la même manière, il faudra adapter les pratiques agricoles aux changements climatiques, et les communautés et les villes devront renforcer leur résilience aux changements. Plus particulièrement, un témoin a enjoint au gouvernement fédéral d’aider les communautés à réagir aux inondations et aux périodes de sécheresse, qui s’accroîtront en raison des changements climatiques. (135) De manière plus générale, comme l’a indiqué un témoin, « toutes les décisions que nous prenons relativement aux eaux devront tenir compte de l’impact des changements climatiques ». (144) Il est également important de détenir des connaissances et de l’information sur les changements qui pourraient se produire à l’avenir. Un témoin a mentionné, par exemple, le besoin d’avoir accès à de l’information sur les scénarios de croissance démographique et les prévisions liées aux changements climatiques pour « démontrer la nécessité de gérer la situation et de s’y adapter. Les responsables de la gestion des bassins hydrographiques et du littoral doivent avoir accès aux données sur les changements climatiques et aux informations se rapportant spécifiquement à la région des Grands Lacs. Ce n’est pas quelque chose que nous pouvons faire à l’échelle locale. » Chacun de ces paragraphes montre que le changement climatique exacerbe presque tous les problèmes environnementaux qui affligent les Grands Lacs, qu’il s’agisse de la pollution par le phosphore, des faibles niveaux d’eau ou des espèces envahissantes, lesquels signalent tous l’importance de mettre en place des mesures d’adaptation et d’atténuation. Par exemple, le paragraphe 135 est clair : « toutes les décisions que nous prenons relativement aux eaux devront tenir compte de l’impact des changements climatiques ». De même, aux paragraphes 132, 134 et 144, on demande au gouvernement de prendre des mesures pour contrer le changement climatique ou de faciliter l’accès aux données sur le phénomène. Pourtant, et inexplicablement, il n’est nullement question du changement climatique dans la liste de recommandations. Le Comité permanent a entrepris cette étude pour recenser les problèmes de la qualité de l’eau dans le bassin des Grands Lacs et pour présenter des solutions à ce sujet au gouvernement. Or, les neuf recommandations approuvées par la majorité conservatrice ne prévoient aucune mesure décisive ou nouvelle. Dans six de ses recommandations, le Comité invite le gouvernement « à continuer » à faire le peu qui est fait actuellement. Dans deux autres, il lui propose « d’envisager » des solutions qui ont été abordées expressément par les témoins et étudiées par le Comité. La dernière recommandation est formulée de la manière la plus vague possible, soit « que le gouvernement fédéral aborde les Grands Lacs comme un écosystème et de manière holistique ». L’étude fait ressortir clairement que le changement climatique est un facteur aggravant majeur qui nuit à notre capacité de régler les nombreux problèmes qui touchent les Grands Lacs. On ne saurait trop insister sur l’importance de la plus importance réserve d’eau douce sur la planète. Les Grands Lacs sont la source d’eau potable de plus de 30 millions de Canadiens et d’Américains. Malgré les répercussions bien connues du changement climatique, le gouvernement a récemment réduit le programme de qualité de l’air et de lutte contre le changement climatique de 70 % (Rapport sur les plans et priorités 2014-15). Pour composer avec la grande question de la qualité de l’eau, il faut d’abord admettre que le changement climatique fait obstacle à nos mesures d’atténuation et d’adaptation et s’efforcer de présenter des recommandations qui tiennent compte de la situation et qui invitent le gouvernement à agir. Le Parti libéral demande donc au gouvernement de prendre les mesures suivantes :
[1] M. Jeff Ridal, directeur exécutif, l’Institut des sciences environnementales du fleuve Saint-Laurent, mémoire, 27 mars 2014. [2] ENVI (27 mars 2014) (M. Bruce). [3] Ibid. [4] ENVI (8 April 2014) (Mme Nancy Goucher, gestionnaire de programme, Protection environnementale du Canada). |