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Avant de commencer, monsieur le Président, je tiens à m'assurer que c'est bien à mon tour de parler, parce que je croyais qu'il restait un peu de temps au député de . Il était ici il a un instant. Mais si je suis dans l'erreur, je suis tout à fait prête à prendre la parole.
J'aimerais parler aujourd'hui d'un projet de loi important que j'appuie et qui porte sur un aspect des politiques publiques qui, à mon avis, devrait être étudié plus en profondeur. Le projet de loi nous en donne justement l'occasion. Je parle bien entendu du projet de loi sur la sécurité ferroviaire. Je n'apprendrai rien à personne en disant que ce sujet préoccupe de plus en plus les Canadiens.
Le titre du projet de loi C-52 est « Loi sur la sécurité et l'imputabilité en matière ferroviaire ». Or, même s'il s'agit indéniablement d'une bonne mesure qui nous fait faire un pas dans la bonne direction, elle se concentre surtout sur la reddition de comptes, et passe complètement sous silence la question de la sécurité. Le texte du projet de loi précise ce qui doit être fait en cas d'accident, précise qui est responsable, à combien doit s'élever la couverture d'assurance et qui peut poursuivre qui en vertu du principe du pollueur payeur. Il comporte un certain nombre de dispositions intéressantes, notamment pour les municipalités et les autres entités touchées par les accidents ferroviaires. Il fixe aussi la couverture minimale d'assurance à 1 milliard de dollars. Ces dispositions sont les bienvenues.
La question de la sécurité ferroviaire continue néanmoins de susciter beaucoup de préoccupations. Un grand nombre de témoins qui ont été entendus par le comité ont affirmé que le projet de loi était assurément souhaitable, mais loin d'être suffisant, et que les mesures prises jusqu'ici par Transports Canada pour améliorer la sécurité ferroviaire au lendemain de la tragédie de Lac-Mégantic n'arrivaient pas assez vite et que, même une fois entièrement mises en oeuvre, elles étaient trop timides.
J'aimerais reprendre un exemple que des témoins ont évoqué lors de leur passage au comité. À Lac-Mégantic, le mandat défini par la loi établissait l'assurance minimale obligatoire à 1 milliard de dollars pour les chemins de fer de catégorie 1. Or, les chemins de fer de catégorie 1 ont déjà une telle assurance. Bien entendu, nous ne voulons plus de désastres comme celui de Lac-Mégantic. Souhaitons n'en voir jamais un autre de cette ampleur. Cependant, comme nous savons maintenant que de telles catastrophes sont possibles, il nous incombe d'instaurer des exigences suffisantes en matière d'assurance pour couvrir un désastre de cette gravité. Or, selon les témoins entendus au comité, cette protection devrait être multipliée par six; elle devrait être de 6 milliards de dollars.
Pour ce qui est de la sécurité ferroviaire, au cours des dernières années, il y a eu ce que j'appellerais une avalanche de changements concernant le secteur privé, le secteur public et les types de produits qui sont expédiés. Ensemble, ces changements font en sorte que nous sommes moins en sécurité que nous l'étions auparavant, en dépit des améliorations apportées par Transports Canada et par la ministre. Par exemple, en 2009, il n'y avait que 500 wagons par année qui transportaient des combustibles fossiles hautement inflammables, c'est-à-dire les pétroles bruts inflammables dont la plupart d'entre nous parlent de nos jours. Nous savons que ce nombre a augmenté au cours des deux dernières années, mais en 2013, il y a eu jusqu'à 160 000 wagons transportant des combustibles. L'augmentation du nombre de wagons transportant des produits dangereux sur notre réseau ferroviaire est phénoménale, et c'est sans compter les autres produits dangereux comme le chlore ou d'autres substances dangereuses.
L'Association canadienne des chefs de pompiers, qui a converti ces données en millions de barils, a déterminé qu'il y a actuellement un million de barils de pétrole brut, soit de liquides inflammables de classe 3, qui sont transportés chaque jour sur notre réseau ferroviaire. L'association a également indiqué que, en 2013, soit la dernière année pour laquelle nous avons des statistiques — selon ce que j'ai appris grâce aux témoins —, il y a eu 144 accidents impliquant des produits dangereux, dont sept qui ont donné lieu à un déversement de produits dangereux.
Des mesures ont été prises. J'en ai parlé brièvement plus tôt. Au Canada et aux États-Unis, les organismes responsables de la sécurité des transports établissent des conclusions en matière de sécurité, mais ils n'ont pas les pouvoirs de réglementation nécessaires pour y donner suite.
Les organismes responsables de la sécurité des transports des deux pays ont déterminé, il y a quelque temps déjà, que les wagons DOT-111 ne sont pas sécuritaires pour transporter des substances aussi inflammables et dangereuses.
Nous avons pris quelques mesures, comme l'ont fait les États-Unis, mais il y a un long délai avant leur entrée en vigueur. Alors, nous procédons maintenant à la modernisation des wagons DOT-1232 qui transportent du pétrole brut. On doit terminer la modernisation de ces wagons d'ici 2020; et celle des wagons transportant des substances moins inflammables, d'ici 2025. Malheureusement, jusqu'en 2017, c'est-à-dire pendant deux autres années, les wagons DOT-111 circuleront encore dans nos collectivités. En tout, 80 000 de ces dangereux wagons resteront en service aux États-Unis et au Canada jusqu'à cette date.
Pourquoi ai-je cité des statistiques? C'est pour montrer que la sécurité ferroviaire s'est détériorée et que le transport des marchandises dangereuses a augmenté. En théorie, le chemin de fer est l'un des moyens les plus écologiques et sécuritaires transporter des personnes et des marchandises. Il faut le répéter parce qu'il constitue une partie intégrante de notre infrastructure et, d'après le Parti vert, cela fait trop longtemps que nous n'en tenons pas compte.
Nous devons moderniser nos services aux passagers et investir dans des trains plus modernes et de meilleures assiettes de rail. Nous devons continuellement améliorer l'accès au service ferroviaire pour les voyageurs et investir dans VIA Rail pour les Canadiens d'un bout à l'autre du pays, à tout le moins pour que le service ferroviaire se rende jusqu'à la baie d'Hudson. Il est logique d'offrir un service ferroviaire d'un bout à l'autre du pays, et sa modernisation pour l'adapter au XXIe siècle est un important investissement pour les Canadiens. C'est un aspect important de nos infrastructures de transport.
Le transport des marchandises par rail est plus sécuritaire que par camion pour ce qui est des accidents de la route et, en théorie, il réduit les émissions de gaz à effet de serre. C'est de loin le moyen le plus sécuritaire pour transporter des produits dangereux. Ce qui pose problème, c'est ce qui se fait dans la pratique. Au cours de la dernière décennie — et pas seulement au cours des dernières années —, nous avons constaté des changements à la suite du système de réglementation intelligent, des pressions exercées par le secteur privé pour améliorer la productivité et des compressions gouvernementales. Au final, les risques sont plus élevés à cause des changements dans l'industrie.
Penchons-nous sur le premier point que je souhaite aborder en ce qui concerne la baisse du niveau de sécurité. VIA Rail est une société de la Couronne, mais le transport ferroviaire de marchandises au Canada relève de l'industrie privée. Les sociétés à but lucratif exercent des pressions afin d'améliorer leurs résultats financiers, ce qui est tout à fait légitime de leur part. Toutefois, d'après les travailleurs du secteur ferroviaire — en particulier les travailleurs syndiqués et le syndicat oeuvrant dans cette industrie —, ces pressions ont entraîné une réduction progressive du nombre d'ingénieurs et de cheminots à bord des trains, ce qui pose des problèmes de sécurité.
Nous avons également constaté des lacunes en matière d'entretien des rails. Un certain nombre de déraillements importants survenus récemment ont été causés par des rails et des ponts défectueux. Il y a même eu un accident mortel causé par un pont ferroviaire mal entretenu.
En 2005, un train du CN a déraillé au lac Wabamun, en Alberta, ce qui a causé un déversement considérable, pour lequel le CN a reçu une amende de 1,4 million de dollars, une somme modeste compte tenu de l'ampleur de l'incident. L'enquête a dévoilé que les rails sur lesquels le train se déplaçait étaient usés et n'avaient pas été maintenus en bon état.
Plusieurs autres déraillements ont suivi cet incident marquant survenu en 2005 et le transport ferroviaire de marchandises à travers le Canada est devenu une plus grande source de préoccupations. On s'est interrogé sur ce qu'il fallait faire de plus et demandé au Bureau de la sécurité des transports les mesures qu'il prenait en matière de sécurité ferroviaire.
La décision du gouvernement de passer aux systèmes de gestion de la sécurité a aussi contribué à réduire la sécurité. Il s'agit essentiellement d'une forme de déréglementation, mise en vigueur il y a quelque temps.
J'attire l'attention de la Chambre sur une conclusion tirée d'un rapport publié en 2007 par le Conseil canadien de la sécurité, selon laquelle le système:
[...] permet aux sociétés ferroviaires de s'autoréglementer, ce qui retire au gouvernement la capacité de protéger les Canadiens et leur environnement et qui permet à l'industrie de cacher à la population des renseignements essentiels en matière de sécurité.
On pourrait penser que, ayant adopté un tel système, Transports Canada possède des pouvoirs de surveillance l'habilitant à examiner ces SGS, ou systèmes de gestion de la sécurité, afin d'en vérifier l'efficacité. Toutefois, il semble que ce ne soit pas le cas.
Troisièmement, ce qui nuit à la sécurité de ce système, ce sont les compressions à Transports Canada. Le ministère compte aujourd'hui moins d'ingénieurs qu'auparavant pour vérifier la sécurité ferroviaire. Des médias ont rapporté que 30 postes essentiels de fonctionnaires chargés de la sécurité ferroviaire y sont toujours vacants depuis 2009. Ces postes sont ceux d'ingénieurs qui pourraient notamment prévoir et organiser le retrait des wagons DOT-111 des voies ferrées. Il est de mauvais augure pour les Canadiens qu'il manque de personnel dans le secteur de la sécurité ferroviaire et à Transports Canada pour s'occuper de la manutention des marchandises dangereuses. Le rôle de ce personnel est d'une importance névralgique. À la lumière des compressions budgétaires qu'a subies Transports Canada en 2012, il semble aujourd'hui certain que ces postes ne seront probablement jamais dotés.
Des marchandises dangereuses transitent d'une collectivité à l'autre, comme l'ont rappelé au comité la Fédération canadienne des municipalités et des groupes de citoyens qui s'inquiètent de voir des marchandises dangereuses circuler parmi nos collectivités. Pourtant, nous n'avons pas pourvu les postes clés liés à la sécurité à Transports Canada.
La troisième partie s'appuie sur ce qui se passe dans le secteur privé et la raison pour laquelle de plus en plus de marchandises, plus particulièrement des marchandises dangereuses, sont transportées par rail. En écoutant mon discours, les députés ont probablement compris que j'appuie sans réserve le transport ferroviaire de passagers. J'ai souvent pris le train au Canada; je parcours le pays en train aussi souvent que possible. Souvent, je l'ai fait dans le cadre de campagnes politiques et de visites éclair où il est très important de savoir que nous arriverons à destination à peu près à l'heure indiquée à l'horaire de VIA Rail.
Comme le savent tous ceux qui s'intéressent à l'industrie ferroviaire du Canada, VIA Rail doit louer les rails du CN et d'autres propriétaires de chemins de fer. VIA Rail n'a pas le contrôle des aiguillages ou des feux rouges, jaunes et verts. Autrement dit, le transport ferroviaire de passagers au Canada et l'arrivée à l'heure sont à la merci du transport ferroviaire de marchandises. Étant donné que les trains de marchandises sont de plus en plus longs — trop longs pour se garer sur la voie d'évitement, contrairement aux trains voyageurs de VIA Rail —, les trains voyageurs de VIA Rail doivent souvent attendre des heures pour laisser passer les trains de marchandises.
Comme parlementaires ou autorité de réglementation de Transports Canada, nous ne nous sommes pas suffisamment préoccupés de la longueur des trains de marchandises, du fait que ces trains sont souvent mis en attente et du genre de produits qu’ils transportent. La tragédie de Lac-Mégantic nous a fait prendre conscience de ce qu’ils transportent. Je crois que jamais aucun d’entre nous n’oubliera l’horreur ressentie à l’annonce, le matin du 5 juillet 2013, de la catastrophe qui a tué 47 personnes.
Le Bureau de la sécurité des transports avait déjà approuvé ce qui semblait être un système parfaitement satisfaisant de la part de la Montreal, Maine and Atlantic Railway. La compagnie avait fourni son système de gestion de la sécurité à Transports Canada, et il était tout à fait légal le 5 juillet 2013 pour le conducteur de laisser le train immobilisé sur un terrain surplombant une localité, parce qu’il avait actionné les freins à main en tenant pour acquis que les freins à air ne flancheraient pas. Il avait en fait actionné sept freins à main, alors que le protocole de sécurité de la compagnie prévoyait un minimum de neuf freins à main. Le Bureau de la sécurité des transports a toutefois conclu depuis que les neuf freins à main n’auraient pas suffi à retenir le train si les freins à air avaient flanché.
Comme nous le savons, la tragédie de Lac-Mégantic a été provoquée par un train qui a foncé à toute allure sur une collectivité qui n’avait aucunement conscience de la catastrophe qui allait s’abattre sur elle. Non seulement la collectivité ne savait-elle pas qu’il était légal de laisser un train immobilisé sans surveillance avec des freins à main actionnés et que Transports Canada approuvait cela, mais, en plus, personne ne savait vraiment quel produit inflammable et dangereux se trouvait dans ce train, parce qu’on avait rapporté qu’il s’agissait de pétrole brut.
C’était en fait du pétrole de schiste de Bakken, un composé chimique entièrement différent qui, comme nous l’avons appris avec horreur, a formé une boule de feu qui a détruit une grande partie de cette localité, tué 47 personnes et blessé beaucoup d’autres.
Nous sommes ici aujourd’hui, le 12 mai 2015, mais sommes-nous certains qu’une telle catastrophe semblable à celle de Lac-Mégantic ne pourrait pas survenir dans une autre ville canadienne ? Malgré toutes les mesures de sécurité dont j’ai parlé, et malgré le projet de loi , Loi sur la sécurité et l’imputabilité en matière ferroviaire, il nous faut répondre non.
Nous en savons beaucoup plus sur le pétrole de schiste de Bakken; en outre, les exigences ont été relevées pour que les collectivités soient informées lorsque ce type de pétrole passe sur leur territoire, mais ce pétrole n’est pas le seul qui soit non conventionnel. Par exemple, le bitume mélangé à du diluant devient beaucoup plus inflammable.
J'ouvre une parenthèse, parce que je crois que la chose présente un certain intérêt pour les gens: le bitume, lorsqu’il est chauffé pour pouvoir être stocké dans un wagon sans la présence de diluant, ne présente pour ainsi dire aucun danger. Il ne peut ni se déverser ni exploser.
Toutefois, nous n’avons pris aucune mesure de sécurité pour que les diluants ne soient pas transportés par train. Les diluants sont ces produits qui sont mélangés au bitume. C’est du diluant, une matière toxique et dangereuse, qui était transporté dans le train qui passait par la ville de Calgary, en route pour le nord de l’Alberta, et qui s’est retrouvé suspendu si abruptement au-dessus de la rivière Bow pendant l’inondation lorsque le pont a cédé. Les travailleurs de la ville de Calgary ont dû attacher les wagons avec des câbles pour les empêcher de tomber dans la rivière. Le produit stocké dans ces wagons était du diluant que l’on acheminait dans le nord de l’Alberta, où il devait être mélangé à du bitume solide qui allait ainsi pouvoir être transporté, par oléoduc ou par train, sans qu'on ait à le liquéfier par la vapeur; ce dernier procédé toutefois permettrait de transporter le bitume dans des wagons sans y ajouter du diluant.
Une gamme de substances toxiques et dangereuses sont actuellement transportées par train, et je veux vous parler du témoignage de M. Paul Boissonneault, chef des pompiers du comté de Brant et président de l’Association canadienne des chefs de pompiers. M. Boissonneault a signalé un certain nombre de mesures que nous pourrions prendre pour rendre la situation plus sûre. Nous pourrions notamment prendre une partie des fonds destinés à la formation des pompiers pour aider les gens dans les municipalités et les services d’incendie locaux à faire face aux menaces. Les pompiers ne devraient jamais être exposés à une chose aussi horrible que ce qui est arrivé à Lac-Mégantic — et aucune municipalité non plus; toutefois, les chefs de services d'incendie ont signalé que la préparation des pompiers présente de graves lacunes.
Les pompiers se penchent aussi sur d’autres produits dangereux. Le projet de loi traite de divers types de pétrole brut et de ceux qui sont les plus inflammables et les plus dangereux, bien qu’il ne s’agisse pas du tout de pétrole brut, mais plutôt de produits comme le pétrole de schiste de Bakken ou le bitume mélangé à du diluant. Toutefois, les pompiers font également observer que le propane et le chlore transportés sur nos voies ferrées doivent également faire l'objet de mesures de sécurité dans le projet de loi.
L’information doit circuler beaucoup plus, et le projet de loi permet de faire des pas dans la bonne direction à cet égard. Le projet de loi prévoit une obligation de communication d’informations entre les compagnies ferroviaires et les municipalités aux fins des urgences. Cependant, il faut vraiment plus d’informations sur ce qui circule sur les voies ferrées, et les municipalités ont le droit d’avoir ces informations.
Il faut faire beaucoup plus pour renforcer le Centre canadien d’urgence transport et l’intégrer aux activités réglementaires actuelles. Il faut que les municipalités rencontrent Transports Canada et les transporteurs pour trouver de meilleures façons et des façons plus sûres de transporter les matières dangereuses. Il en existe quelques-unes déjà, comme le « système de commande intégrale des trains ». Ce système est utilisé aux États-Unis et figure dans la loi sur la sécurité ferroviaire de ce pays, bien qu’il ne soit pas encore totalement en œuvre. Il consiste en un système informatisé installé à bord des trains qui donne à l’avance de l'information très claire, très immédiate et en temps réel sur les freins qui commencent à être faibles, les composantes du train qui surchauffent ou encore lorsque la vitesse devient hors de contrôle et que des problèmes surviennent à bord. Le système de commande intégrale des trains fait maintenant partie de la loi américaine sur la sécurité ferroviaire et nous devrions avoir la même chose chez nous.
Nous pouvons également prendre un règlement pour que les convois des trains soient plus courts. Il est beaucoup plus dangereux et difficile de freiner lorsque les trains sont très longs.
Nous avons l’occasion d’en faire beaucoup plus au Canada pour assurer une véritable sécurité ferroviaire. Je vais voter en faveur du projet de loi , mais je ne veux pas qu’un seul Canadien ait l’illusion qu’avec ce projet de loi, nous aurons un réseau de transport ferroviaire sûr. Tel ne sera pas le cas, et les Canadiens méritent d’avoir un réseau ferroviaire réellement sûr.
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Monsieur le Président, je suis très heureux d’avoir l’occasion de prendre la parole, au nom des électeurs de , au sujet du projet de loi
Le train a joué un grand rôle dans la vie et l’histoire de notre pays. Quand j'étais jeune, tous les petits garçons voulaient un train. J’ai grandi dans le Nord de l’Ontario, et mon arrière-grand-père était conducteur de train sur le Sydney Flyer, en Nouvelle-Écosse. Il habitait à Iona, un petit village du Cap-Breton. Il disait toujours que les deux seules choses qu’on trouvait à Iona, c’était des fêtes religieuses et des MacNeill. Mon arrière-grand-père était un MacNeill, et c’était donc lui, John P. MacNeill, qui conduisait le Sydney Flyer. John P. avait le talent de repérer les contrebandiers d’alcool sur le quai de la gare. Il ne se trompait jamais, il avait l’œil. Il disait toujours qu’un homme qui transporte une bouteille de whisky dans son sac de vêtements fait généralement plus attention quand il pose son sac par terre que lorsque la bouteille ne contient pas de whisky.
Mes oncles ont tous travaillé pour la société ferroviaire Ontario Northland, sur le train qui reliait North Bay et Mattawa. À cette époque, les gens travaillaient soit dans les mines du Nord de l’Ontario, comme mon grand-père MacNeill et mon grand-père Angus, soit sur le train Northlander, comme mes oncles.
J’avais un oncle qui, apparemment, buvait un 26 onces tous les soirs, sur la liaison North Bay – Timmins. On disait que ça ne se voyait jamais, même si certains soirs, après avoir bu son 26 onces, il disait qu’il se sentait aussi épuisé que s’il avait travaillé 21 heures d’affilée. Il est mort quand j’étais encore jeune, mais je me souviens qu’il nous racontait des histoires sur ses expériences à bord des trains.
Mon adresse est Mileage 104, c’est-à-dire que j’habite au mille 104 de la voie ferrée de l’Ontario Northland. Chaque matin, j’entends ce magnifique sifflement du train qui passe près de ma maison, en faisant trembler les fondations. Avant, il transportait des passagers, mais plus maintenant. Le gouvernement provincial libéral de Kathleen Wynne a décidé que les habitants du Nord de l’Ontario n’étaient que des citoyens de seconde classe et qu’ils ne méritaient pas des transports publics.
Les transports publics, c’est bon pour les zones urbaines et les électeurs de ces régions, mais ceux du Nord de l’Ontario, ils appartiennent en quelque sorte à une catégorie inférieure. Le gouvernement libéral a donc entrepris de détruire une institution publique vieille de plus de 100 ans, et je veux parler de l’Ontario Northland Transportation Commission.
Le train qui passe chaque jour près de ma maison ne transporte plus que du bois vers des destinations du Sud, comme cela a toujours été le cas, ainsi que des wagons-citernes remplis d’acide sulfurique provenant de la fonderie de Rouyn-Noranda, au Québec. Le train transportait aussi jadis des produits de la fonderie de Timmins, mais les libéraux ont tout détruit avec leur tarification ridicule de l’électricité. Nous nous sommes habitués à voir nos ressources locales partir vers d’autres destinations, mais nous étions aussi capables d’assurer la mobilité de nos gens.
Le week-end dernier, justement, j’ai eu le grand honneur et l’immense bonheur de prendre le train de VIA entre Toronto et Ottawa. J’avais l’impression d’être redevenu un petit garçon: je montais dans le train, je sentais cette odeur très spéciale, je retrouvais le train et les conducteurs. J’ai éprouvé la même excitation, mais aussi une certaine tristesse. Pour beaucoup de régions de notre pays, l’idée d’une stratégie nationale de transport en commun, qui comprend le transport ferroviaire, apparaît comme une idée du XIXe siècle, et non comme un moyen de transport bien moderne du XXIe siècle. J’espère sincèrement que nous réussirons à rétablir des liaisons ferroviaires adéquates dans nos régions dans un proche avenir, c’est-à-dire quand un gouvernement néo-démocrate sera élu en Ontario parce que nous aurons réussi à nous débarrasser de ce gouvernement libéral corrompu.
Les libéraux de l’Ontario devraient se méfier car leur première ministre de droite, la championne de l’austérité, risque fort d’avoir une carrière politique aussi éphémère qu’Alison Redford, qui avait promis d’être une première ministre progressiste pour ensuite se détourner de sa population. Nos collègues de l’Alberta nous ont bien montré ce qu’il fallait faire pour faire élire une femme progressiste.
J’aimerais parler de l'importance des changements qui sont proposés en matière de sécurité des transports, changements que j’estime nécessaires. Le transport des marchandises a énormément changé. Au cours des cinq dernières années, le transport de carburants en provenance de l’Ouest du Canada, surtout par voie ferrée, a augmenté de 28 000 %. Des trains transportent du pétrole extrait des gisements de Bakken qui, on le sait, est extrêmement inflammable. Ils transportent également du bitume dilué et du pétrole brut lourd.
Cette augmentation considérable des volumes transportés pose de graves questions de sécurité, comme on a pu le constater avec la tragédie de Lac-Mégantic.
Il n’en demeure pas moins que ça fait des années qu’on discute, au Parlement, d’une éventuelle tragédie ferroviaire. Je me souviens qu’en 2004, j’essayais déjà d’ouvrir les yeux du gouvernement de Paul Martin, ce qu’il refusait de faire. Le gouvernement libéral estimait en effet que la solution était de privatiser, de laisser les entreprises s’auto-réglementer, de se débarrasser des inspecteurs et d’économiser ainsi de l’argent. C’est dans cet esprit que le gouvernement libéral a apporté des modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire et qu’il a adopté le système de l’autogestion, en nous faisant croire que c’était la voie de l’avenir.
Les libéraux nous ont rejoué le même scénario avec les règles bancaires. À l’époque, ils voulaient modifier la loi canadienne sur les banques pour permettre à ces dernières de s’auto-réglementer. Ils avaient dit à la Chambre des communes que le NPD préconisait une nounoucratie tout simplement parce que nous avions réclamé des règles pour le système bancaire. À l’époque, mes collègues libéraux ne juraient que par la City Bank et tout ce qui se passait aux États-Unis. Nous savons comment ça s’est terminé.
Lorsque tout va bien, c'est facile de dire que nous n'avons pas besoin de règlements. C'est alors facile de dire que nous devrions laisser les choses aller. Or, comme nous le savons, le rôle des parlementaires consiste à veiller à ce qu'il y ait des règles fondamentales qui permettent d'éviter les accidents.
Après que les libéraux eurent instauré des mesures d'autoréglementation, le nombre d'accidents a augmenté, mais comme les sociétés se réglementaient elles-mêmes, elles n'ont pas pris la peine d'en faire état. En 2005, le nombre d'accidents signalés par le CN par rapport à ceux signalés par les autres transporteurs a commencé à mettre la puce à l'oreille du Bureau de la sécurité des transports. Il s'est alors rendu compte qu'il y avait une grande différence entre le nombre de déraillements signalés et réels. En fait, plus de 1 800 déraillements et accidents n'avaient tout simplement pas été signalés, dont 44 qui s'étaient produits sur de grandes artères ferroviaires. Les mécanismes de surveillance sont là pour éviter que les sociétés autoréglementées ne fassent comme à l'époque et ne se donnent pas la peine de signaler les accidents. Il s'agit d'une question très grave, surtout lorsqu'on pense aux accidents qui se sont produits récemment.
Dans ma région du Nord de l'Ontario, il y a eu trois déraillements graves sur la subdivision rurale à Hornepayne et deux à Gogama. Les deux derniers se sont produits les 24 février et 7 mars et impliquaient des trains de marchandises du CN constitués de 100 et 94 wagons. Le 7 mars, le train mesurait 6 089 pieds. Une quantité ahurissante de pétrole brut était transportée sur cette voie.
Le train avait emprunté la subdivision rurale entre Capreol, dans le Sud en direction de Sudbury, et Hornepayne. Elle est principalement constituée d'un long rail soudé et est considérée comme une voie de catégorie 4 en vertu des règles de sécurité du transport. Les voies de catégorie 4 arrivent à l'avant-dernier rang pour la vitesse permise. Les trains qui y transportent des marchandises peuvent se déplacer à 60 milles à l'heure et ceux qui y transportent des voyageurs, à 80 milles à l'heure. Toutefois, nous ne voyons plus beaucoup de trains de voyageurs dans le Nord. Des ordres de ralentissement avaient déjà été donnés en raison de problèmes sur cette voie. Il y a eu un accident à Gogama le 14 février puis un autre le 7 mars. Lors du déraillement du 7 mars, le train roulait en direction est à 43 milles à l'heure et, à 2 h 40 du matin, par une température de 10 degrés Celsius, le train a débarqué des rails et le contenu de wagons s'est déversé dans la rivière Mattagami.
Ce qui était très troublant au sujet des 700 pieds de voie détruite à cette jonction et des wagons qui ont déraillé est qu'il y avait eu passablement de travaux dans notre région, sur la rivière Mattagami, qui est l'un des plus importants réseaux hydrographiques se déversant dans la baie James. On a fait beaucoup d'efforts pour protéger les pêches et créer des frayères. Il est certain que le déversement de pétrole brut lourd suivi de son embrasement dans ce réseau hydrographique a ébranlé les habitants de ma région, qui considèrent ce réseau comme l'un des plus importants du Nord de l'Ontario.
Comme on transporte maintenant beaucoup plus de carburants par train, la sécurité du transport est une question très grave, car un grand nombre de localités ont été construites le long d'une voie ferrée. Il s'ensuit que les trains traversent le centre de nombreuses localités de l'Ouest du Canada et du Nord de l'Ontario. À Sudbury, les voitures attendent aux passages à niveau pendant que les trains filent à toute allure. Si le déraillement survenu près de Gogama s'était produit dans un secteur urbain, il aurait pu être aussi tragique que l'accident ferroviaire de Lac-Mégantic.
Que faisons-nous pour atténuer le danger? Quand il est question du transport de marchandises dangereuses, que ce soit par pipeline ou par rail, il faut toujours veiller à ce qu'il existe des règles pour assurer la surveillance et la sécurité du public. Le projet de loi contient d'excellents éléments, que les néo-démocrates appuieront, notamment l'établissement de niveaux minimaux d’assurance pour les sociétés ferroviaires qui transportent des marchandises dangereuses, en fonction du type et du volume des marchandises transportées, et la création d'un fonds de secours en cas d'accident comme celui de Lac-Mégantic.
Il y a également eu quelques changements, y compris des pouvoirs accrus pour les inspecteurs. C'est important, mais est-ce suffisant? Probablement pas lorsqu'on tient compte des dommages pouvant être causés par un déraillement qui engendrerait une catastrophe ferroviaire. Nous devons en discuter. Le principe du pollueur-payeur est fondamental, et les Canadiens y souscrivent. Nous ne souhaitons pas que le public ait à assumer la responsabilité financière d'une catastrophe ferroviaire. Par conséquent, nous devons nous demander comment nous pouvons établir un régime qui permet aux compagnies d'exploiter les chemins de fer de manière rentable et d'y transporter des marchandises. Nous voulons nous assurer que le transport ferroviaire demeure rentable tout en assurant au public que ce qui s'est produit à Lac-Mégantic ne se reproduira plus jamais. Il n'y aura plus de petite compagnie incapable d'assumer sa responsabilité financière qui pourra tout bonnement s'esquiver. Ce n'est plus envisageable, surtout lorsqu'il y a des pertes de vies humaines et des dommages environnementaux.
Essentiellement, le projet de loi exigerait des compagnies ferroviaires transportant des marchandises dangereuses qu'elles disposent d'une couverture d'assurance minimale et établirait un fonds d'indemnisation en cas de catastrophe qui serait financé par les expéditeurs de pétrole brut. Toutefois, concernant le montant minimal d'assurance, qui irait de 25 millions de dollars pour les compagnies transportant des marchandises à faible risque jusqu'à 1 milliard de dollars pour les compagnies transportant des marchandises à haut risque, il s'agit de déterminer à quel stade l'argent nécessaire serait disponible pour compenser les effets d'une catastrophe potentielle.
J'aimerais comparer ce qui est arrivé à Gogama à ce qui s'est produit à Kalamazoo. Le déversement dans la rivière Kalamazoo à été causé par la fuite d'un pipeline et non par une catastrophe ferroviaire, mais le pipeline transportait du bitume brut. Quand le bitume est entré en contact avec l'eau, le nettoyer n'a pas été une mince tâche. En fait, il en a coûté plus de 1 milliard de dollars pour tenter de retirer le bitume déversé dans la rivière Kalamazoo. Le bitume est un produit dangereux et très difficile à nettoyer, surtout lorsqu'il tombe au fond de l'eau. Les produits chimiques en cause rendent la situation très différente.
Qu'il s'agisse de pipelines ou de transport ferroviaire, on en revient à l'un des problèmes fondamentaux, à savoir qu'il faut s'orienter vers la plus grande valorisation possible à la source pour limiter les risques de dommages environnementaux. Il faut également veiller à tirer profit le plus possible des ressources naturelles brutes produites au Canada. Il faut discuter à la Chambre des communes des moyens permettant de limiter les dommages environnementaux associés à des projets de cette envergure, parce que nous vivons dans un monde où les changements climatiques peuvent entraîner des catastrophes, que le gouvernement s'est carrément enfoui la tête dans les sables bitumineux et qu'il refuse de respecter ses obligations internationales.
Cependant, en tant que Canadiens, nous devons aborder ce problème. Les Canadiens sont très motivés à agir dans ce dossier. La victoire récente du Nouveau Parti démocratique en Alberta nous a permis de constater que les Albertains se préoccupent vivement de l'exploitation durable des ressources et de la réduction des répercussions des gaz à effet de serre. Les Albertains se soucient également de tirer profit au maximum du transport de nos ressources naturelles exceptionnelles, que nous avons la chance de posséder dans l'ensemble du pays, afin que le Canada ne soit pas seulement un lieu où les ressources naturelles sont extraites du sol et expédiées dans des raffineries texanes ou chinoises, mais bien un pays qui tire profit de leur exploitation.
Ce sont toutes des questions interreliées qui doivent faire l'objet de discussions au Parlement. Nous devons tenir une conversation nationale sur l'orientation à prendre.
Le projet de loi, qui fait suite à la tragédie survenue à Lac-Mégantic, est un premier pas dans la bonne direction. Comme je l'ai dit, au Nouveau Parti démocratique, nous voulons poser de nombreuses questions pour déterminer si l'assurance est suffisante. Il va sans dire que nous remettons en question certains chiffres.
Avec les 200 000 barils de pétrole transportés chaque jour, Transports Canada estime qu'une contribution annuelle de 17 millions de dollars pourrait être perçue et ajoutée aux recettes générales. C'est une mesure positive, mais certains ont des réserves. Il faudrait que la mesure soit en place pendant presque 15 ans pour accumuler les 250 millions de dollars nécessaires pour pouvoir intervenir en cas de crise, quelle qu'en soit l'ampleur. Je reviens à la tragédie de Lac-Mégantic qui a causé des dommages se chiffrant à 400 millions de dollars. Par conséquent, cette contribution ne serait assurément pas suffisante.
Dans le sommaire législatif que nous avons reçu de la Bibliothèque du Parlement, le projet de loi modifierait la Loi sur les chemins de fer pour permettre à un gouvernement provincial ou à une municipalité de s'adresser à l'Office des transports du Canada afin de demander le remboursement des coûts engagés à la suite d'un incendie qui, de l'opinion du plaignant, aurait été causé par les activités d'une compagnie de chemin de fer. C'est un rôle important, mais il faut également travailler en étroite collaboration avec les municipalités. Elles sont très inquiètes au sujet des marchandises dangereuses qui sont transportées par des trains qui traversent leurs collectivités et de la nécessité de s'assurer qu'en cas d'explosion comme celle survenue à Toronto, où des voies ferrées traversent des régions de la ville, nous travaillerions tous en collaboration.
La Fédération canadienne des municipalités est certainement d'accord avec le Nouveau Parti démocratique. Elle s'intéresse aux questions d'assurance et de responsabilité. Brad Woodside, le président de la fédération, a demandé « une approche globale qui fait en sorte que les compagnies ferroviaires et les expéditeurs de pétrole brut défraient la totalité des coûts des catastrophes ferroviaires, et qu'ils ne laissent pas les municipalités et les contribuables payer la note ».
C'est un principe fondamental. Les contribuables ne devraient pas subventionner ces opérations. Ces opérations doivent être rentables et indépendantes et assumer les coûts associés aux dommages éventuels au moyen d'une assurance adéquate.
L'Association des chemins de fer du Canada estime que le fonds d'indemnisation ne devrait pas couvrir que les dommages causés par le pétrole brut, mais aussi ceux causés par d'autres marchandises dangereuses comme le chlore, ce qui est un élément très intéressant. Dans ma région, des wagons-citernes pleins d'acide sulfurique circulent sur les chemins de fer. Je me rappelle d'un accident qui s'est produit il y a un certain nombre d'années sur une ligne de l'ONR qui passait juste au sud de Temagami. L'accident s'est soldé par la destruction plus ou moins complète du lac en raison de la quantité d'acide sulfurique qui s'est retrouvée dans l'eau. Ces chemins de fer servent parfois à transporter des marchandises très dangereuses: c'est la raison pour laquelle nous devons adopter une politique globale.
L'Office des transports du Canada a affirmé ceci:
Le déraillement tragique survenu à Lac-Mégantic a soulevé de sérieuses questions au sujet du caractère adéquat de l’assurance responsabilité civile pour faire face à des événements catastrophiques, plus précisément en ce qui a trait aux petites compagnies de chemin de fer.
Il s'agit d'une autre question importante, comme nous avons pu le voir à Lac-Mégantic. Nous avons eu affaire à une petite compagnie véreuse qui, au lendemain du désastre, n'allait pas s'occuper de réparer les pots cassés.
En conclusion, il convient de souligner que l'amélioration de la sécurité ferroviaire et la création d'un fonds sont importantes. Néanmoins, il nous faudra encore discuter pour faire en sorte que l'industrie assume les coûts dont elle est responsable pour éviter que les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral n'aient à payer la note. Nous devons veiller à ce que le gouvernement fédéral continue à jouer un rôle actif. Après toutes ces années où le gouvernement libéral a permis l'autoréglementation et compte tenu de l'augmentation des accidents et du recul de la sécurité qui ont suivi, nous devons veiller à ce qu'il y ait des inspecteurs indépendants et à ce que les compagnies assument leur responsabilité.
En dernier lieu, nous devons poursuivre la conversation que nous avons entamée à l'échelle nationale afin d'établir comment nous allons transformer le pétrole, le bitume et les autres ressources naturelles dans notre pays.
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Monsieur le Président, aujourd'hui, je vais partager mon temps de parole au sujet du projet de loi .
Je suis heureux de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-52, Loi sur la sécurité et l'imputabilité en matière ferroviaire. Ce projet de loi permettrait notamment de partager la responsabilité en matière de transport de marchandises dangereuses entre les sociétés ferroviaires et les expéditeurs. Ensemble, ces intervenants assumeraient les coûts associés aux activités de nettoyage et à l'indemnisation en cas d'accident ferroviaire catastrophique comme celui qui s'est produit à Lac-Mégantic.
Je suis ravi de pouvoir participer au débat d'aujourd'hui, car la sécurité ferroviaire est une priorité majeure dans ma circonscription, Brant, ainsi que dans la ville de Brantford. J'ai rencontré régulièrement les représentants municipaux et les autorités locales pour connaître leurs préoccupations dans la foulée des catastrophes récentes, et je suis heureux que la continue de prendre des mesures énergiques pour accroître la sécurité et la responsabilité de nos chemins de fer.
Je suis également heureux de pouvoir souligner tout le travail et l'engagement du chef des pompiers du comté de Brant, Paul Boissonneault. Il a fait preuve d'un grand leadership à l'égard des problèmes liés à la sécurité ferroviaire qui touchent les collectivités canadiennes. Paul est le grand chef des pompiers du Canada. Pendant son mandat à titre de président de l'Association canadienne des chefs de pompiers, il a voyagé partout au Canada pour veiller à ce que les premiers intervenants et les collectivités canadiennes soient mieux protégées lorsque des marchandises dangereuses sont transportées. Il a fait partie du Groupe de travail sur les plans d'intervention d'urgence ainsi que du comité consultatif sur le transport des marchandises dangereuses. Il a également comparu devant le Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités, notamment lors des délibérations au sujet du projet de loi .
Il a déclaré que l'Association canadienne des chefs de pompiers est généralement favorable au projet de loi parce qu'il définirait le niveau de responsabilité des sociétés ferroviaires de façon beaucoup plus claire pour les demandeurs d'indemnisation, et parce qu'il renforcerait les mesures récemment mises en place par le gouvernement en matière de sécurité ferroviaire. Le chef Boissonneault continue de réclamer d'autres mesures pour renforcer la sécurité et la responsabilité, et nous avons hâte de poursuivre le travail que nous avons amorcé avec lui.
Le projet de loi à l'étude est un autre pas important dans la bonne direction. Les députés se rappelleront que la tragédie survenue en juillet 2013 a été causée par l'explosion de wagons-citernes qui transportaient du pétrole brut.
La quantité de pétrole brut transporté par voie ferroviaire a augmenté de façon spectaculaire. En 2008, il n'y en avait presque pas au Canada, mais en 2013, environ 10,6 millions de tonnes de pétrole étaient transportées par rail chaque année. D'ici à 2017, on s'attend à ce que ce nombre atteigne les 33,9 millions de tonnes par année.
Le transport de pétrole brut par voie ferroviaire continuera de jouer un rôle important pour assurer l'accès de nos ressources aux marchés. Même si on approuvait demain la construction de pipelines à l'est, à l'ouest et au sud des champs pétrolifères et des champs de sables bitumineux, il faudrait attendre de nombreuses années avant qu'ils soient en activité. D'ici là, la seule véritable option sera le transport par rail. Les chemins de fer n'ont pas non plus d'autres choix que d'accepter de transporter des cargaisons de pétrole pour leurs clients. Les obligations de transporteur public prévues dans la Loi sur les transports au Canada sont une caractéristique du réseau ferroviaire qui fait en sorte que les marchandises des expéditeurs puissent accéder aux marchés. Les chemins de fer ne peuvent pas refuser de transporter du pétrole brut simplement parce qu'il est volatil et classé comme marchandise dangereuse. Ils doivent assumer les responsabilités associées au fret qu'ils sont tenus de transporter.
Les chemins de fer sont responsables d'être assurés afin de pouvoir verser des indemnités en cas de catastrophes comme celle de Lac-Mégantic. Le projet de loi à l'étude rehausserait les exigences en matière d'assurance en fixant — pour les chemins de fer réglementés par le fédéral — des niveaux d'assurance minimum qui tiendraient compte de la gravité potentielle des accidents. Ces niveaux iraient de 25 millions à un milliard de dollars, en fonction du type et de la quantité de marchandises dangereuses que transporte le chemin de fer.
Afin d'assurer la conformité, si un chemin de fer omettait d'informer l'Office des transports du Canada d'un changement opérationnel qui influerait sur son assurance, il serait sujet à des sanctions administratives pécuniaires pouvant aller jusqu'à 100 000 $ par infraction.
Comme l'a montré le terrible déraillement qui a eu lieu à Lac-Mégantic, les accidents impliquant du pétrole brut peuvent avoir des effets dévastateurs. Pour les situations où, malgré les exigences accrues, les compagnies de chemin de fer ne seraient pas suffisamment assurées pour couvrir la totalité des dommages qui leur sont imputables, le projet de loi propose une approche en deux volets.
Premièrement, il modifierait le régime de responsabilité applicable aux accidents ferroviaires, y compris ceux impliquant du pétrole brut. Dans un tel cas, les compagnies de chemin de fer directement touchées par l'accident — que ce soit physiquement ou sur le plan opérationnel — seraient tenues responsable jusqu'à concurrence de leur couverture d'assurance, sans que l'on ait à prouver qu'il y a eu faute ou négligence de leur part. Par contre, dans les cas où les coûts d'un accident excéderaient la couverture d'assurance de la compagnie de chemin de fer visée, le projet de loi prévoit un autre moyen d'éponger les coûts sans pour autant s'en délester sur les épaules des contribuables. C'est à cette fin que serait créé le fonds d'indemnisation supplémentaire financé par les expéditeurs.
C'est ce qui nous amène au principe du pollueur-payeur, dont le Canada fera une norme dans les secteurs de l'énergie nucléaire, de la production pétrolière extracôtière, des pipelines et du transport, et plus particulièrement du transport maritime. Les députés se souviendront sans doute que le Canada a été l'un des premiers à faire sien ce principe lorsqu'il a décidé de l'appliquer aux déversements de pétrole en milieu marin. Depuis les années 1970, les armateurs sont rigoureusement tenus responsables des coûts et des dommages découlant d'un déversement de pétrole. Pour couvrir les coûts dépassant la limite de responsabilité des armateurs, le gouvernement a créé la Caisse des réclamations de la pollution maritime, qui s'appelle désormais la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires.
C'est cette approche que nous avons adoptée pour les pétroliers, et le projet de loi à l'étude ferait en sorte qu'elle s'appliquerait également au transport du pétrole brut par chemin de fer. À l'avenir, elle pourrait aussi s'appliquer au transport ferroviaire d'autres matières dangereuses.
Toute responsabilité liée à un accident impliquant du pétrole brut dépassant le niveau d'assurance de la compagnie ferroviaire serait couverte par un fonds financé par les expéditeurs, appelé Caisse d’indemnisation pour les accidents ferroviaires impliquant des marchandises désignées. Ce régime à deux volets prévu dans le projet de loi répartit la responsabilité des dommages causés par des accidents ferroviaires entre les compagnies de chemin de fer et les expéditeurs, en plus de garantir des ressources suffisantes pour couvrir tous les dommages. Cette approche, calquée sur celle utilisée pour le transport maritime, permettrait la réalisation de deux objectifs importants. Premièrement, les victimes auraient plus de chances de voir leur demande d'indemnisation honorée. Deuxièmement, les contribuables n'auraient pas à payer la note pour les dommages à indemniser qui dépasseraient la limite d'assurance.
Bref, le projet de loi à l'étude ferait en sorte que les compagnies ferroviaires maintiennent un niveau d'assurance adéquat. En outre, il définirait clairement leur responsabilité, de sorte que les demandes d'indemnisation à la suite d'un accident ferroviaire ayant causé un déversement de pétrole brut seraient traitées plus rapidement. Enfin, il garantirait la disponibilité du financement nécessaire pour l'indemnisation de tous les dommages liés à un accident.
Soyons clairs. La priorité absolue du gouvernement est la sécurité du système de transport, mais le projet de loi ferait aussi en sorte que ce soit le pollueur qui paie la note en cas d'accident. Je presse les députés d'appuyer cette mesure législative.