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Monsieur le Président, je propose:
Que la question de privilège concernant les déclarations à la Chambre des communes par le député de Mississauga—Streetsville soit renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Monsieur le Président, je tiens à vous remercier pour la décision que vous venez de rendre à la Chambre des communes. Je la lirai en détail plus tard, mais je voulais faire quelques observations préliminaires sur ce que j'ai entendu aujourd'hui et sur le débat qui a précédé cette décision.
Nous venons de présenter une motion d'outrage au Parlement relativement à la conduite du député de . Comme vous l'avez signalé dans votre décision, le critère ou le seuil que nous utilisons à la Chambre des communes pour conclure qu'il y a, de prime abord, outrage au Parlement est très élevé. Ce n'est pas une décision facile à rendre. Les Canadiens seraient peut-être surpris d'apprendre que les règles qui régissent la Chambre, comme les conservateurs et vous l'avez signalé, tendent à accorder le bénéfice du doute aux députés. Dans bien des cas, il y a des divergences d'opinions et des interprétations différentes des faits. C'est normal dans le cadre d'un débat sain. Si nous accusions les députés d'outrage chaque fois que les faits étaient présentés de manière différente, nous serions ici toute la journée.
Les trois conditions que vous avez établies sont très précises et très difficiles à réunir, mais le député de est parvenu à le faire. Il faut prouver que l'affirmation était erronée, que le député le savait au moment de la faire et qu'il avait l'intention d'induire la Chambre des communes et les Canadiens en erreur. C'est tout un exploit de parvenir à remplir ces trois conditions, comme le député l'a fait non pas une seule fois, mais à deux reprises, lorsqu'au cours du débat concernant la loi sur le manque d'intégrité des élections, il a soutenu avoir été personnellement témoin de certains actes. C'est un exploit qu'aucun député ne devrait tenter de réaliser, mais que ce député a pourtant réussi.
Si nous nous penchons actuellement sur cette question, c'est que nous la renvoyons au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Je pense que certains de mes collègues prendront la parole à ce sujet et j'espère que des députés ministériels le feront également. Quand le comité abordera ce dossier, il pourra se fonder non seulement sur votre décision, mais aussi sur les propos tenus dans le cadre du présent débat.
Je voudrais souligner certains de ces propos, que le leader du gouvernement reconnaîtra certainement puisqu'ils sont de lui. Dans sa défense du député conservateur de , il a fait valoir certains arguments que le comité devra considérer. Permettez-moi donc de citer les propos en question, car ils ne sont pas dénués d'intérêt.
Il a dit ce qui suit lorsque nous avons soulevé la question de privilège:
Nous savons tous, je crois, qu'il est d'usage à la Chambre de croire tous les députés sur parole et de présumer que leurs déclarations sont exactes et vraies. Nous avons tous le bénéfice du doute, ce qui veut dire que lorsque nous nous trompons, nous avons le devoir de rectifier les faits [...]
C'est exactement ce qui s'est produit ici. Quand le député de Mississauga-Streetsville a constaté qu'il avait tenu des propos erronés à la Chambre, il est intervenu pour rétablir les faits.
[...] si nous discutons actuellement de cette question de privilège, c'est justement parce que le député a pris son devoir au sérieux et qu'il a pris la peine de rectifier les faits.
J'aimerais dire deux choses. La première, c'est que l'attitude du gouvernement semble être de féliciter le député de d'avoir sciemment trompé la Chambre. Or, le député s'est mal exprimé, il a induit la Chambre en erreur — à défaut de pouvoir dire qu'il a « menti » —, il a pris la parole pour dire qu'il s'était trompé, et il voudrait maintenant tourner la page.
Il me semble que féliciter les députés, d'une part, d'avoir fait une telle chose, puis, d'autre part, d'avoir pris la parole pendant 30 secondes pour rejeter leurs propos, laisse croire, à tort, aux députés qu'ils peuvent avancer de fausses preuves dans leur discours et ne pas dire la vérité, puis déclarer deux semaines plus tard qu'ils se sont mal exprimés et qu'il faut passer à autre chose. Ça ne fonctionne pas ainsi. La nature même du Parlement et de la Chambre nous empêchent de fonctionner ainsi.
Le député a déclaré qu'il ne veut pas que son intervention ait des conséquences néfastes. Rappelons les trois conditions: il faut prouver que les députés ont induit la Chambre en erreur, qu'ils savaient alors qu'ils trompaient les députés, et qu'ils l'ont fait consciemment.
Le député ne veut pas que son intervention ait des conséquences néfastes sur les députés, mais j'ai une solution: ne pas induire la Chambre en erreur. Ne pas sciemment répandre des faussetés sur une mesure législative aussi fondamentale que la Loi électorale. Ne pas prétendre qu'il faudrait féliciter le député d'avoir dit des choses erronées sur cette loi fondamentale et d'avoir eu le courage — j'utilise ce mot avec prudence — de prendre la parole, non pas une, mais deux fois, pour rectifier avec désinvolture les faits.
J'y reviens, car nous allons explorer la raison d'être du nouvel engouement du député pour la vérité. J'espère que le gouvernement encouragera cette exploration. Dans son intervention durant le débat, le a déclaré que le député mériterait d'être félicité, car il a pris la parole pour essayer de rectifier ses propos, en disant qu'il s'est mal exprimé. Pourquoi s'est-il mal exprimé?
Plusieurs articles ont paru dans les médias et nous devrons les examiner au comité. Nous espérons convoquer le député de afin qu'il puisse défendre ses actions. Selon les articles publiés dans les médias depuis, notamment dans le Globe and Mail, Élections Canada a été informé en raison de la gravité des propos tenus. J'ai quelques citations tirées des médias si vous en avez besoin, monsieur le Président.
Il a déclaré qu'il avait été témoin de fraude électorale et qu'il avait vu des gens prendre les cartes de vote d'autres Canadiens et les apporter dans les bureaux de campagne du parti où des bénévoles s'en sont servis pour voter. Cela sème la confusion quant aux pièces d'identification envoyées aux Canadiens. Je crois que mon collègue de pourrait en parler davantage.
Le député de a déclaré qu'il avait été témoin de ces agissements. Et il s'est servi de ces prétendues preuves — qu'il a ensuite admis avoir inventées de toutes pièces — pour appuyer le projet de loi du gouvernement sur le manque d'intégrité des élections. Voilà les preuves qu'ils ont utilisées.
Peut-être que la seule raison pour laquelle il a fait volte-face, c'est parce qu'Élections Canada a déclaré qu'un député avait été témoin de fraude électorale. Élections Canada voulait avoir plus d'information, car il semblait y avoir eu un problème. Il y a peut-être un problème avec les cartes d'information des électeurs qui doit être réglé. Premièrement, il faudrait peut-être demander au député d'expliquer à Élections Canada et aux Canadiens pourquoi, s'il a été témoin d'un crime, il ne l'a pas signalé. C'est intéressant pour un parti qui veut sévir contre la criminalité.
Deuxièmement, s'il a été témoin de fraude électorale, pourquoi n'est-il pas allé voir Élections Canada pour dire qu'il a vu quelque chose de grave, que des gens ont été privés de leur droit électoral, que des votes ont été truqués et que des bulletins de vote ont été mis dans des boîtes de scrutin? Il n'a rien fait. Il s'est contenté de s'en servir comme preuve à la Chambre des communes. On aurait pu penser qu'il ferait preuve d'un peu plus de discernement.
En ce qui concerne l'outrage, il est important de comprendre que le barre est très haute. C'est vous qui l'avez placée, monsieur le Président, ainsi que d'anciens Présidents, pour donner des balises aux députés.
Il existe d'autres exemples, dont celui que vous avez mentionné dans votre décision. Un ancien ministre de la Défense, Art Eggleton, a été reconnu coupable d'outrage au Parlement après avoir parlé du transfert de prisonniers afghans. Il a été reconnu coupable d'outrage, puisqu'il a délibérément induit la Chambre en erreur sur un sujet très grave.
Les députés se souviendront du tristement célèbre document dans lequel l'ancienne ministre Bev Oda avait inséré le mot « not », pour ensuite affirmer que cela ne s'était jamais produit et que tout cela était faux. Or, c'était la vérité. Elle avait refusé d'accorder du financement à un groupe important, KAIROS. C'était la raison de son geste.
Et voilà que le député de induit la Chambre en erreur, en toute connaissance de cause, à propos d'un sujet aussi fondamental que la Loi électorale. Il n'y a rien de louable dans le fait qu'il ait été forcé de revenir sur ses propos et d'en admettre la fausseté. Au contraire, c'est grave.
J'ai été assez déconcerté par l'attitude du leader du gouvernement à la Chambre, qui semblait célébrer ce moment. C'est à se demander quelle motivation les anime ici. Voilà une question qu'il faut explorer en comité. Il en va de l'intérêt de tous les députés et de tous les Canadiens.
Le mot « outrage » représente une notion intéressante. Il s'agit du point de référence utilisé lorsqu'un député dépasse les bornes. J'ai pensé vérifier la définition du mot, que l'on utilise parfois de façon un peu désinvolte. J'ai donc cherché la définition. La voici:
Offense ou injure extrêmement grave — de parole ou de fait. Affront, injure, insulte, offense.
Ce n'est pas tant du député de dont il est question, mais bien du Parlement du Canada. On dit d'une personne qui a été reconnue coupable d'outrage qu'elle a fait injure à quelqu'un ou quelque chose, en l'occurrence la Chambre des communes. En d'autres mots, la Chambre a été traitée avec mépris.
De ce côté-ci de la Chambre, nous sommes d'un autre avis. Selon nous, cette enceinte est un endroit sacré où l'on cherche à aller au fond des choses. Nous demandons des comptes au gouvernement concernant ses dépenses, ses politiques, ses lois. La loi à l'étude touche l'essence même de tous nos efforts à servir le public. Nous tous ici présents sommes prêts à défendre des élections libres et justes.
Nous venons tout juste d'entendre un député plaider pour un débat d'urgence et une mûre réflexion.
J'ai entendu mon amie d'Halifax féliciter le gouvernement pour ses efforts concernant l'Ukraine, où les gens luttent et meurent pour défendre le principe de gouvernement démocratique. Or, le débat sur la loi sur le manque d'intégrité des élections porte justement sur cette question.
Nous avons ici affaire à un député qui a été élu en bonne et due forme et qui, alors même qu'il défendait ce projet de loi en invoquant des cas de fraudes électorales, n'a dit pas la vérité. Par la suite, le , qui, tout comme moi, doit respecter les principes démocratiques fondamentaux de la Chambre, a affirmé qu'il ne faut pas condamner le député, mais plutôt l'encenser. Or, le député, d'une façon ou d'une autre, s'est fait prendre, puis s'est excusé du bout des lèvres, pour enfin faire preuve d'un peu plus de remords. Il s'agit bel et bien d'outrage au Parlement et d'outrage aux députés.
Les conditions sont respectées. Rappelons aux députés où ils peuvent le constater. À la page 75 de l'ouvrage d'Erskine May, A treatise on the law, privileges, proceedings and usage of Parliament, on peut constater que le « privilège parlementaire » est décrit comme étant « la somme des privilèges particuliers à chaque Chambre, collectivement [...] et aux membres de chaque chambre individuellement, faute desquels il leur serait impossible de s'acquitter de leurs fonctions ».
Sans ces règles, nous ne pouvons pas faire notre travail. Nous avons découvert que le seul fait sur lequel le gouvernement se fondait pour avancer qu'il y avait eu des cas de fraude électorale, que ce projet de loi est nécessaire et que les députés devraient donc l'appuyer, était faux. Nous tenons pour acquis que les députés sont de bonne foi; or, nous avons découvert que le député n'a pas dit la vérité.
Rappelons-nous ce que le député de a dit dans ses prétendues excuses:
[...] j'invoque le Règlement en ce qui concerne le débat qui a eu lieu le 6 février [...]
Au cours du débat, j'ai fait à la Chambre une déclaration qui est inexacte [et] [j]e tiens seulement à mettre en évidence [...] que je n'ai personnellement vu personne prendre des cartes de vote dans des poubelles ou dans des boîtes postales [...] de tours d'habitation. Je n'ai pas été personnellement témoin de cette activité et je tiens à le préciser.
Voici l'affirmation que le député voulait corriger. Il a dit:
[...] j'aimerais revenir un peu sur le système de recours à un répondant. [...] Le jour où les cartes de vote sont distribuées dans les boîtes postales communautaires de ces immeubles, la plupart d'entre elles finissent par être jetées aux poubelles ou dans les bacs bleus. En fait, j'ai vu de mes propres yeux des gens ramasser des cartes de vote qui ne leur étaient pas destinées, puis se rendre au bureau de campagne du candidat qu'ils appuient [...]
Il est fascinant d'entendre le député affirmer les avoir observé se rendre à d'autres bureaux de campagne, mais si c'est le cas, soit. Ce sera à lui de se justifier. Je suppose qu'il visite d'autres bureaux de campagne ou peut-être avait-il seulement accès à un seul. Ensuite, il a dit:
[...] se rendre au bureau de campagne du candidat qu'ils appuient et les remettre à d'autres personnes, qui, à leur tour, communiquent avec les bureaux de scrutin où ils ont des amis qui peuvent se porter garants pour eux, sans qu'ils n'aient à présenter de pièce d'identité.
La ministre n'est-elle pas d'avis que le projet de loi permettra de mettre un terme à cette pratique?
Voilà qui dit tout: « La ministre n'est-elle pas d'avis que le projet de loi permettra de mettre un terme à cette pratique? » Il affirme avoir parlé d'un problème de fraude électorale. Il a dit qu'il pensait qu'il y avait fraude électorale, parce qu'il en a été témoin, et c'est pourquoi il fallait adopter ce projet de loi pour l'enrayer. N'est-ce pas? Non. C'est faux. C'est un des éléments de preuve que le gouvernement a cités.
Le , expression que j'utilise au sens large, s'est fait poser toutes sortes de questions par l'opposition et a essuyé maintes critiques de la part du directeur général des élections, d'experts en matière électorale et même, imaginez, de Preston Manning. Qu'est-ce que ce ministre à la Réforme démocratique a dit en réponse à nos questions sur les problèmes dans le projet de loi? Il a dit qu'il y avait des preuves que des gens avaient commis de la fraude électorale. Il a invoqué des préoccupations et des théories du complot selon lesquelles c'est un problème et qu'il fallait donc adopter le projet de loi.
C'est une solution à la recherche d'un problème, et en l'absence d'un problème, ils vont en inventer un. Ils induisent la Chambre en erreur en affirmant avoir été témoins de telles incidences de fraude.
Voici l'autre chose qu'a dite le député. Le député de a dit:
J'ai posé une question cet après-midi à la ministre d'État à la Diversification de l'économie de l'Ouest. Je pense que mon collègue d'York-Sud-Weston sera en mesure de comprendre, parce qu'il y a beaucoup d'immeubles à appartements dans sa circonscription, tout comme dans la mienne.
Il a eu beaucoup de temps pour réfléchir. Va-t-il continuer sur la même voie? S'est-il trompé plus tôt, ou va-t-il renchérir? C'est un élément de preuve si convaincant. Un député en fonction a été témoin de fraude électorale, il a vu des gens tricher durant les élections. Eh bien, il a renchéri.
Il a poursuivi:
Je tiens à raconter quelque chose que j'ai vu de mes propres yeux. Le jour où les cartes d'information de l'électeur sont distribuées par la poste, des gens, lorsqu'ils retournent à la maison, prennent ces cartes et les jettent aux poubelles. Or, j'ai déjà vu des travailleurs de campagne électorale ramasser une dizaine de ces cartes. Pourquoi font-ils ça? Parce qu'ils les remettent ensuite à des gens qui iront voter illégalement grâce à un répondant. Il faut mettre un terme à cette pratique.
Leur projet de loi mettrait un terme à cette pratique. Quelle pratique? Une pratique qui n'a jamais eu lieu. Pourquoi devrions-nous avoir cette mesure législative?
Si a est faux et que nous soulevons les préoccupations b, c et d, alors, soudainement, b, c et d deviennent beaucoup plus logiques. S'il n'y a pas de fraude de la part d'électeurs, si les problèmes dont le ministre ne cesse de parler et que le député de continue de mentionner n'existent pas, c'est qu'il y a autre chose.
Ce que disent Neufeld, l'auteur du rapport que le ministre se plaît à citer, les Canadiens interrogés et les spécialistes du domaine qui traitent de la question, c'est qu'il s'agit d'un projet de loi de nature partisane.
C'est du jamais vu dans l'histoire du Canada. Quand il a été question de réformer les lois électorales, le gouvernement a toujours abondamment sollicité l'opposition et les Canadiens, quels que soient le parti au pouvoir, la situation historique, les préférences politiques ou le débat du jour. Pourquoi? Parce qu'il ne s'agit pas du Parti conservateur du Canada. Il ne s'agit pas de ses chances de conserver sa mince majorité.
Il s'agit de la population canadienne. Il s'agit de la société démocratique que nous avons bâtie et pour laquelle nous avons combattu au fil des générations. Voilà de quoi il devrait s'agir, mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit dans ce cas-ci.
De quoi est-il question? Qu'est-il advenu de ce débat? Quelle est l'utilité de la Chambre des communes si, lorsqu'on débat d'un sujet aussi fondamental que notre législation électorale et la légitimité même des gouvernements à adopter des lois et des budgets, des députés l'induisent en erreur pour ensuite venir dire, quelques semaines plus tard: « Oubliez ça. La langue m'a fourché. Passons à autre chose. », en cherchant ainsi à convaincre les autres députés ainsi que tous ceux qui sont à notre écoute? Ces personnes s'intéressent à ce qui se passe. Elles ne tombent pas dans le cynisme, même si Dieu sait qu'elles auraient toutes les raisons de le faire. Elles ont vu le gouvernement détruire le recensement, renvoyer et bâillonner les chercheurs et refuser systématiquement de tenir compte des faits. Lorsque les faits ne cadrent pas avec leur argumentaire, les conservateurs pervertissent la logique au point de la rendre méconnaissable.
C'est encore une fois le cas. C'est tout un tour de force de la part du député de ; il a réussi à faire quelque chose qu'à peine une poignée de députés sont parvenus à faire dans l'histoire de notre pays, c'est-à-dire se rendre coupable d'outrage au Parlement.
J'ignore comment il peut ensuite affirmer à ses électeurs qu'il les représente bien. Seul lui pourrait répondre. Je ne comprends pas comment le , le et tous les ministériels qui l'appuient peuvent se sentir à l'aise dans cette situation ou ne pas avoir l'impression qu'ils ont franchi la limite de l'acceptable et se sont fait prendre.
Qui aurait cru que ce que nous disons dans cette enceinte compte vraiment? Qui aurait cru que des gens sont vraiment à l'écoute, des gens comme les employés d'Élections Canada, des gens comme ceux qui ont pris part aux élections où le député a affirmé avoir été témoin d'actes frauduleux? Qui aurait cru qu'ils étaient à l'écoute et que, lorsqu'ils ont eu vent des actes de fraude électorale commis au cours de cette campagne, ils étaient d'avis qu'il fallait faire quelque chose étant donné que, si c'était vrai, cela constituait un problème?
Ô surprise, ce n'était pas vrai. Ô surprise, les paroles comptent vraiment lorsqu'un représentant d'Élections Canada ou du Parti conservateur communique avec le député pour lui dire: « Je sais ce que vous avez dit. Le Parti conservateur déforme constamment la vérité, mais il se peut que vous ayez induit la Chambre en erreur. Vous avez peut-être menti. Vous devez présenter vos excuses aux autres députés et tenter de limiter les dégâts. »
Cette situation discrédite tous les autres arguments avancés par le gouvernement, le et le quant à la nécessité de ce projet de loi.
Le projet de loi est censé régler de soi-disant problèmes. Toutefois, il a maintenant été prouvé que l'un des principaux arguments du gouvernement, qui a été invoqué à deux reprises à la Chambre, est faux. C'était une rumeur. Il s'agissait d'une histoire inventée de toutes pièces.
Le député de a beaucoup de comptes à rendre. C'est ce qu'il fera devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous convoquerons d'autres témoins qui pourront nous éclairer sur la façon dont on a découvert le pot aux roses. A-t-il perdu la carte pendant un instant?
Pour nous, il s'agit d'une situation grave. L'outrage au Parlement est l'une des pires choses qu'un député puisse faire à la Chambre et à sa réputation. Nous devons rétablir cette réputation, et non l'entacher davantage.
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Monsieur le Président, la motion qui a été présentée est extrêmement importante. Ce dont nous discutons cet après-midi, c'est la responsabilité qu'ont les députés de tenir des propos exacts et véridiques à la Chambre. En fait, chaque fois qu'un député prend la parole, même à l'extérieur de la Chambre des communes, nous espérons tous que ses affirmations sont exactes. Or, on a dit certaines choses à la Chambre cet après-midi qui, selon moi, sont inexactes, et je voudrais rectifier les faits.
Le leader parlementaire de l'opposition a affirmé plusieurs fois dans son intervention que le député de avait menti. C'est tout simplement faux.
Tout comme l'avait fait le Président Milliken dans sa décision au sujet de l'affaire Eggleton, dans la décision qu'il a rendue aujourd'hui, le Président a indiqué croire que le député n'avait pas eu l'intention d'induire la Chambre en erreur et ajouté qu'il soumettait uniquement l'affaire au comité à des fins d'examen et de clarification. Je m'insurge contre le député d'en face, qui essaie de faire passer les déclarations du député de pour des mensonges, parce que ce n'est clairement pas la conclusion à laquelle en est venu le Président.
L'autre chose que je voudrais souligner, et je crois que je n'apprendrai rien aux députés, du moins aux plus expérimentés, comme l'a dit ma collègue de , tous les députés, sans exception, sont à l'occasion portés à déformer quelque peu la réalité dans leurs propos, pour l'embellir ou l'exagérer. Devons-nous encourager cela? Certainement pas. Est-ce que cela se produit fréquemment? Absolument.
Aujourd'hui même, à la période des questions, dans une question préparée, un député libéral, le député de , s'est trompé sur le nombre de budgets déficitaires du gouvernement dans sa question au . J'ai remarqué cet exemple, mais il y en a peut-être eu d'autres.
Le Président a souligné, tout comme mon collègue, que des critères doivent être réunis pour qu'il y ait matière à privilège. Le député de est un ancien membre du Cabinet. Il était le ministre responsable de Revenu Canada, si je ne m'abuse. Je suis convaincu qu'il sait de quoi il parle lorsqu'il est question d'économie et de finances. Je crois qu'il savait pertinemment quel est le bilan du gouvernement et que celui-ci n'est pas de huit budgets déficitaires consécutifs, comme il l'a laissé entendre dans sa question. Ce n'est tout simplement pas le cas, et je suis convaincu que le député de le savait.
Deuxièmement, je crois qu'il savait très bien que sa déclaration était fausse quand il l'a prononcée. Troisièmement, il savait que sa déclaration, telle qu'il la formulait, était fausse.
Dans ce contexte, devrait-on considérer qu'il y a matière à question de privilège dans les propos du député de ? J'en doute, car de telles déclarations sont monnaie courante au Parlement.
Des voix: Oh, oh!
M. Tom Lukiwski: Monsieur le Président, je ne cherche pas à défendre ses déclarations. Je ne soutiens pas non plus qu'il a mal agi. Les députés libéraux chahutent parce que cette situation ne leur plaît pas. La vérité est dure à avaler. Si mes collègues souhaitent tenir un débat sérieux à ce sujet, je les encourage à écouter.
Selon moi, des déclarations de ce genre sont peut-être trop fréquentes au Parlement. Mais devrait-on les considérer comme un outrage? Le député d'en face continue de soutenir que oui, mais je crois qu'il fait fausse route. Le Président a simplement confié ce dossier au comité pour qu'il l'examine.
Deux ou trois faits ont déjà été établis. Nous savons que le député de a tenu des propos erronés. Il l'a reconnu ouvertement. Il a repris la parole à la Chambre et reconnu que ses propos du 6 février étaient inexacts, il a rectifié les faits, et il s'est excusé. Nous connaissons maintenant tous les faits relatifs à ce dossier.
D'après les députés d'en face, ce qui s'est produit constituait un outrage et le député de a induit la Chambre en erreur délibérément. Le Président a pourtant laissé entendre dans sa décision que ce n'était pas le cas.
Le problème qui se pose maintenant, c'est que le député de pourrait se voir imposer des sanctions parce qu'il a repris la parole pour rectifier ses propos erronés. Si on punit les gens pour une correction, la vérité risque de rester souvent cachée sous le tapis.
Je crois que les députés de l'opposition conviendront avec moi que, si le député de n'avait pas rectifié les faits, s'il n'avait pas admis avoir fait des déclarations erronées, rien ne serait arrivé. En fait, monsieur le Président, j'aimerais souligner un élément qui n'a pas encore été mentionné pendant le débat, à ma connaissance. Avant de revenir rectifier les faits à la Chambre, le député les a rectifiés au sein du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Quand le ministre d'État à la réforme démocratique a témoigné devant le comité, le député de a parlé des cartes d'identité de l'électeur et du recours à un répondant. Il a expliqué que certains de ses anciens employés, à l'époque où il n'était pas encore député, lui avaient dit avoir souvent vu des gens fouiller dans les boîtes de recyclage et les poubelles des immeubles d'appartements pour ramasser les cartes d'identité de l'électeur. Il a souligné qu'il s'agissait d'une anecdote et qu'il n'avait pas été témoin de ces gestes. Je crois que cela montre bien que le député de n'avait pas l'intention d'induire la Chambre en erreur.
Je soulignerai un autre fait. Le leader parlementaire de l'opposition se demandait si les propos du député de avaient été tenus délibérément, dans le cadre d'un discours. Je signale que ce n'était absolument pas le cas.
Lorsqu'il a tenu ces propos inexacts — je ne dis pas le contraire, car manifestement, ils l'étaient —, il faisait une intervention impromptue. Ce qu'il a dit ne faisait pas partie d'un discours. Pour moi, cela signifie sans l'ombre d'un doute qu'il ne tentait pas d'induire délibérément la Chambre en erreur. Si les arguments avaient fait partie d'un texte, je devrais sans doute reconnaître que c'était une déformation délibérée des faits, mais il l'a fait dans le feu de l'action, pendant une intervention impromptue.
Toutefois, à en croire les députés de l'opposition, il mérite maintenant d'être puni par un verdict d'outrage parce qu'il a corrigé les faits. Je ne sais combien de fois les députés d'en face ont eux aussi frôlé le seuil à ne pas dépasser, en affirmant quelque chose qui n'était pas vrai, qui n'était pas exact. Pourtant, on ne les a pas déclaré coupables d'outrage lorsqu'ils ont déformé les faits, que ce soit pendant la période des questions ou lors d'un débat sur une mesure législative.
Cela devrait-il se produire? Absolument pas. Est-ce que j'aimerais que tous les propos tenus dans cette enceinte soient sensés, pondérés et exempts de la partisanerie dont nous sommes trop souvent témoins? Bien entendu.
Les députés d'en face, et plus particulièrement le député de , qui chahute et qui rigole...
C'est vous qui m'amusez.
Monsieur le Président, il est probablement un champion de la déformation des faits. Pourtant, je ne crois pas que nous ayons jamais vu...
Il n'est pas un menteur. C'est pour cela.
M. Tom Lukiwski: Monsieur le Président, quelqu'un soulever une question de privilège ou tenter de le faire reconnaître coupable d'outrage.
Parce que vous ne le pouviez pas.
M. Tom Lukiwski: Monsieur le Président, est-ce parfois de mauvais goût? Assurément. Est-ce personnel? Souvent, ce l'est. Les députés de ce côté-ci de la Chambre font-ils de même? Oui, nous le faisons.
Mes collègues d'en face ne cessent d'affirmer que la présidence a jugé que le député a menti, ce qui n'est pas le cas. Ils devraient peut-être rétablir les faits parce que la présidence n'a pas conclu que le député de avait délibérément induit la Chambre en erreur. Elle n'a pas conclu que le député avait menti. Elle a seulement dit que le comité devrait examiner ses déclarations du 6 février et tenter de les éclaircir.
Même si je sais que l'opposition veut convaincre les Canadiens que mon collègue de Mississauga—Streetsville avait des raisons malhonnêtes de faire ces remarques, je vous suggérerais, ainsi qu'à tous les députés, qu'il a simplement fait ce que beaucoup d'entre nous avons fait par le passé: dans le feu du débat: il a dépassé les bornes.
Il n'y a aucune excuse pour ce genre de comportement. Nous avons la responsabilité de dire les choses comme elles sont. Toutefois, si une personne peut affirmer aujourd'hui à la Chambre qu'elle n'a jamais, durant toute sa carrière politique, déformé des propos, jamais fait des déclarations exagérées, jamais peut-être dépassé les bornes durant ses interventions dans un débat, j'invite cette personne à prendre la parole, parce que je n'ai jamais connu quelqu'un qui pouvait faire cette affirmation, et je suis en politique depuis très longtemps.
Nous sommes conditionnés à agir ainsi. C'est ce que nous faisons. Il n'est pas acceptable de se comporter de cette manière. Le député de le reconnaît, et c'est cela qui compte le plus. Personne d'autre n'avait mis en doute les déclarations de mon collègue, avant qu'il intervienne à la Chambre et admette que ce qu'il avait dit le 6 février n'était pas exact. Il s'est excusé pour ses propos. Il a rétabli les faits.
Mon collègue, le leader de l'opposition à la Chambre, affirme que le député ne devrait pas être félicité d'avoir fait ça. Je suis d'accord. Par contre, il ne faudrait surtout pas le blâmer d'avoir rectifié les faits. Il a fait ce que tous les députés responsables devraient faire lorsqu'ils disent à la Chambre quelque chose d'inexact; les députés ont alors le devoir de prendre la parole pour rectifier les faits. C'est ce que mon collègue a fait. Comme je l'ai dit, il l'a fait tout à l'heure au comité lorsque le ministre d'État à la Réforme démocratique a comparu.
Comment peut-on parler des motifs? Le député d'en face parle de motifs. Il veut explorer cet aspect. C'est bien simple. Nous vivons, travaillons et agissons dans un milieu hyperpartisan. On peut sans doute en rejeter la faute des deux côtés de la Chambre. L'opposition dira bien sûr que le caractère partisan et le milieu mesquin que nous connaissons viennent du gouvernement. Or, les mêmes arguments peuvent être servis aux députés d'en face. Comme je l'ai déjà dit, les députés d'en face qui semblent faire le plus de chahut sont les plus prompts à se lancer dans des attaques personnelles, vitrioliques et parfois hyperpartisanes pendant la période des questions. C'est malheureusement le milieu dans lequel nous évoluons.
Soit dit en passant, je me souviens de ce que Jack Layton, l'ancien chef du NPD, a dit lorsqu'il a pris pour la première fois la parole à titre de chef de l'opposition officielle. Il a promis que son parti se distinguerait des autres en respectant le décorum et les autres députés. Cette attitude n'a hélas pas duré longtemps. Comme la plupart des députés, j'ai beaucoup d'admiration pour M. Layton et j'aimerais que ce respect dont il a parlé se manifeste aujourd'hui. L'ambiance serait alors plus propice aux débats.
Quoi qu'il en soit, je rappelle ce que nous savons au sujet de la question qui nous occupe. Le député s'est mal exprimé. Il a admis à la Chambre, le 6 février, qu'il s'était mal exprimé. Il s'est excusé d'avoir dit des choses erronées. Tous les faits sont maintenant établis.
C'est arrivé souvent avant aujourd'hui, ici même, et pas une fois, depuis que je suis député, la personne concernée n'a été reconnue coupable d'outrage au Parlement si elle s'était d'abord excusée.
On dirait bien que ce n'est pas assez pour les députés de l'opposition. Je les comprends. Les partis de l'opposition cherchent à marquer des points politiques avec cette affaire, et je ne peux pas leur en vouloir. C'est leur rôle. Ils se sont opposés au projet de loi , Loi sur l'intégrité des élections. Nous les comprenons. Nous comprenons qu'ils cherchent par tous les moyens à retarder le processus, à faire de l'obstruction, voire à faire avorter la mesure législative. Je comprends. Et selon moi, c'est ce qui se cache véritablement derrière la motion dont la Chambre est aujourd'hui saisie.
Si on veut parler de motifs, demandons-nous d'abord pour quels motifs la question de privilège a été soulevée, sinon retarder le plus possible l'étude de la Loi sur l'intégrité des élections au comité.
Monsieur le Président, comme vous le savez pertinemment, du point de vue de la procédure, le débat d'aujourd'hui pourrait durer indéfiniment. Aucun projet de loi ne sera mis à l'étude tant que le débat ne prendra pas fin.
J'ai été quelque peu étonné, honnêtement, de voir que l'opposition n'a pas précisé d'échéancier dans sa motion proposant de renvoyer la question au comité. Voilà qui aurait sans doute forcé le comité à s'en occuper sans délai, retardant d'autant l'étude du projet de loi . Peut-être que l'opposition va proposer un amendement en ce sens. Quoi qu'il en soit, je crois qu'il s'agit des véritables motifs qui poussent l'opposition à tenir le débat d'aujourd'hui.
En conclusion, je conviens — et je suis certain que mon collègue, le député de , en conviendra aussi — que, lorsqu'un député tient des propos erronés, il est de son devoir de les corriger. La Chambre ne devrait jamais tolérer qu'un de ses députés tienne des propos erronés, que ce soit par rapport à une mesure législative ou dans le cadre d'un débat. Cela étant dit, quand doit-on punir un député parce qu'il a fait amende honorable? Pourquoi un député qui a pris sur lui de revenir sur ce qu'il a dit devrait-il devenir une victime?
Je ne m'attends à aucun argument raisonnable de la part de l'opposition. Il est cependant essentiel que les faits soient clairement établis: la présidence considère que personne n'a cherché délibérément à induire la Chambre en erreur; le renvoi au comité vise simplement à voir clair dans tout cela et à déterminer ce que le député a dit exactement, et pourquoi.
Là-dessus, nous sommes d'accord. Pour le reste, qu'on ne vienne pas me dire que le député a délibérément tenté d'induire la Chambre en erreur, parce que ce n'est tout simplement pas le cas.
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Monsieur le Président, d'emblée, je pense qu'il est très important de souligner que le fait d'induire intentionnellement la Chambre des communes en erreur contrevient à notre Règlement et que cela constitue un outrage au Parlement.
Il est très important de ne laisser planer aucun doute sur les déclarations du député de . Voici ce qu'il a déclaré le 6 février dernier:
Monsieur le Président, j'aimerais revenir un peu sur le système de recours à un répondant. Je sais que la ministre représente une ville urbaine. Pour ma part, je viens d'une région semi-urbaine de Mississauga, où l'on trouve de nombreuses tours d'habitation. Le jour où les cartes de vote sont distribuées dans les boîtes postales communautaires de ces immeubles, la plupart d'entre elles finissent par être jetées aux poubelles ou dans les bacs bleus.
Je m'apprête à citer le passage important qu'il faut mettre en évidence. Voici les propos exacts que le député a tenus le 6 février:
En fait, j'ai vu de mes propres yeux des gens ramasser des cartes de vote qui ne leur étaient pas destinées, puis se rendre au bureau de campagne du candidat qu'ils appuient et les remettre à d'autres personnes, qui, à leur tour, communiquent avec les bureaux de scrutin où ils ont des amis qui peuvent se porter garants pour eux, sans qu'ils n'aient à présenter de pièce d'identité.
C'est ce que le député a déclaré. Ce n'est pas un lapsus. Il a tenu ces propos dans le cadre du débat au sujet d'une mesure législative très importante, le projet de loi , durant lequel le gouvernement utilise, autant que possible, les notes d'allocution fournies par le Cabinet du . Le discours du Cabinet du premier ministre est cohérent. Ce député s'est peut-être quelque peu éloigné du discours officiel et a fait une déclaration qu'il croyait être exacte à l'époque.
Il ne fait aucun doute que les gens auraient été induits en erreur s'il s'était avéré que cette déclaration était fausse. Il a tenu les propos que j'ai cités au début février. J'ai trouvé très intéressant que, quelques semaines plus tard, il prenne la parole pour présenter ses excuses à la Chambre. Voici ce qu'il a déclaré le 24 février:
[...] j'invoque le Règlement en ce qui concerne le débat qui a eu lieu le 6 février à propos de la Loi sur l'intégrité des élections.
Au cours du débat, j'ai fait à la Chambre une déclaration qui est inexacte. Je tiens seulement à mettre en évidence le fait que je n'ai personnellement vu personne prendre des cartes de vote dans des poubelles ou dans des boîtes postales communautaires de tours d'habitation. Je n'ai pas été personnellement témoin de cette activité et je tiens à le préciser.
Le lendemain, une question de privilège a été soulevée. J'ai eu l'occasion de répondre au nom du Parti libéral. Je vais répéter exactement ce que j'ai dit au nom du Parti libéral. J'ai alors dit:
Nous devrions obtenir plus d'explications auprès du député afin de savoir pourquoi il a attendu si longtemps avant de présenter des excuses. Est-ce parce que Élections Canada a communiqué avec lui après avoir examiné sa déclaration? C'est une allégation très grave. Le député a-t-il fait part de ses préoccupations à Élections Canada avant d'en parler à la Chambre?
Je crois que le député s'est rétracté hier parce qu'il croyait que sa déclaration à la Chambre allait être examinée très sérieusement par Élections Canada et par d'autres intervenants, puisque l'accusation qu'il a lancée à l'étape de la deuxième lecture était grave. À en croire sa déclaration, le député aurait eu connaissance d'un comportement illégal lors de ces élections.
Voilà ce que j'ai dit au sujet de la question de privilège.
Le lendemain, un reportage est paru dans un média. Je crois que nous devrions rendre à César ce qui appartient à César. Disons que ce reportage portait sur des allégations ou des préoccupations exprimées par Stephen Best, agent principal de l'Animal Alliance Environment Voters Party. Il a porté plainte auprès du directeur général des élections du Canada, Marc Mayrand, au sujet de l'allégation de M. Butt et s'est fait répondre que le dossier serait transmis au commissaire aux élections fédérales.
Voici une citation tirée de cet article:
« J'ai demandé que l'on consulte les dossiers d'Élections Canada afin de déterminer si d'éventuels actes de fraude électorale avaient été portés à notre attention, que ce soit ici, à l'administration centrale, ou encore au bureau du directeur du scrutin de Mississauga—Streetsville. J'ai aussi soumis les renseignements que vous m'avez transmis à l'examen indépendant du commissaire aux élections fédérales afin qu'il détermine s'il y a lieu de réagir » a répondu M. Mayrand dans un courriel qu'a fourni M. Best.
M. Best a porté plainte le 7 février, lendemain du jour où M. Butt a fait les allégations contentieuses à la Chambre des communes.
J'ai carrément demandé au secrétaire parlementaire si Élections Canada, le commissaire ou quiconque à Élections Canada avait communiqué avec le député en question. Il m'a répondu qu'il l'ignorait et qu'il n'en avait pas parlé.
Le député de devrait avouer la vérité. Nous devrions lui donner la possibilité de venir témoigner ouvertement au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, auquel je siège. Il serait également souhaitable qu'un représentant d'Élections Canada vienne aussi y témoigner. Peut-être serait-il même pertinent de demander à M. Best de faire de même. L'important, c'est d'aller au fond des choses et de déterminer si, oui ou non, le député de Mississauga—Streetsville a sciemment induit la Chambre en erreur.
Lorsque j'examine l'information qui m'a été fournie, je crois, à la lumière de mes années d'expérience comme parlementaire, qu'il y a lieu d'approfondir la question afin d'aboutir à un certain consensus. Je tiens à insister sur le mot « consensus ». Nous sommes conscients que les ministériels sont majoritaires au comité, mais nous devons tout de même parvenir à un consensus sur la manière de gérer cet incident afin de présenter un rapport à la Chambre.
J'aurais encore tant à dire. Pensons à toute la question du manque de confiance des Canadiens envers ce dont nous débattons aujourd'hui au comité, le projet de , celui-là même dont parlait le député.
Nous sommes confrontés à de très graves problèmes. Nous devons nous fier à ce que disent les députés à la Chambre et nous devons croire qu'ils rapportent les faits correctement. Bien sûr, il arrive qu'on commette des erreurs sans mauvais intention, mais je dirais que ce dont il est ici question va bien au-delà d'une quelconque erreur involontaire. C'est du moins l'impression que j'en ai. Voilà pourquoi les députés libéraux appuient la motion visant à renvoyer la question au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous voudrions que tout cela se règle dans les plus brefs délais.
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Je m'excuse, monsieur le Président. Je pensais que le problème était que j'utilisais le reste du titre. Je cherchais simplement à le nommer au complet dans l'intérêt des interprètes. Ce n'était pas mon intention. Malheureusement, j'étais trop clair.
C'est par souci de précision que je citais M. Ling et son article. Essentiellement, il disait que le ministre n'avait toujours pas expliqué pourquoi, selon lui, il existe un risque de fraude. Il a dit que le ministre n'avait rien expliqué, et ensuite il a dit:
[...] le député de Mississauga—Streetsville a tenté de le faire durant le débat. Il a dit à la Chambre qu'il avait vu des travailleurs de campagne ramasser des piles de cartes d'identification des électeurs et les distribuer à des électeurs bidon avant de les accompagner au scrutin.
[...] à moins que [le député de Mississauga—Streetsville] soit un super espion et qu'il traquait ces travailleurs de campagne (ou encore à moins que c'était ses propres travailleurs de campagne qui agissaient de la sorte) c'est complètement absurde et inventé de toutes pièces.
Il faut quand même présenter une deuxième pièce d'identité pour utiliser ces cartes d'identification [...]. Il n'a jamais été possible de s'en servir comme seule pièce d'identité.
Il faudrait féliciter le gouvernement d'avoir rallongé la liste de pièces d'identité utilisables, mais il n'a pas du tout su expliquer pourquoi ces deux changements s'imposent.
Ce n'est qu'en lisant ça que j'ai constaté l'existence de contradictions. En effet, les cartes d'information de l'électeur peuvent être utilisées — et elles l'ont été aux élections de 2008 et de 2011 — avec une autre pièce d'identité. Elles correspondent à une deuxième pièce d'identité et elles visent principalement à confirmer l'adresse de l'électeur, même si le nom de celui-ci y figure.
Advenant le cas où toutes ces cartes sont livrées par exemple dans un immeuble d'habitation et que les locataires d'un appartement reçoivent une carte qui était destinée au locataire précédent, il leur serait impossible de l'utiliser. Il faudrait qu'ils se disent: « J'ai reçu ça par la poste. C'est adressé à Jean Tremblay et je suis Jean Gagnon. Je vais donc créer une fausse pièce d'identité pour pouvoir utiliser cette carte que je viens de recevoir par hasard par la poste et qui ne m'est pas adressée. Je vais les utiliser ensemble pour pouvoir aller voter frauduleusement. » C'est complètement invraisemblable, et c'est ce qu'a relevé M. Ling.
Par la suite, dans quelques-unes de ses déclarations, y compris celle faite le 13 février devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, le député spéculait puisqu'il a présenté les faits comme étant anecdotiques. Il en avait entendu parler par autrui. Il ne disait plus que c'était quelque chose qu'il avait vu. Il supposait que ces personnes avaient usurpé les cartes d'information de l'électeur pour aller voter en faisant appel à un répondant.
Il s'agit de deux choses distinctes. De fait, dans son témoignage, en réponse peut-être à la question que j'ai posée, peut-être à celle d'une autre personne, le ministre a clairement indiqué qu'il s'agissait de deux situations différentes. D'une part, les cartes d'information de l'électeur seraient interdites en vertu du projet de loi . Elles doivent être accompagnées d'une deuxième pièce d'identité et sont un des éléments permettant d'identifier formellement l'électeur. D'autre part, le recours à un répondant ne nécessite pas de pièce d'identité; une personne peut se porter garante d'une autre à certaines conditions.
Je me suis finalement rendu compte que, lorsque notre collègue de a établi — tant dans sa première déclaration que par la suite — un lien entre les cartes d'identité de l'électeur et le fait qu'elles étaient utilisées pour le recours à un répondant, ce lien était complètement faux, peu importe qu'il ait été témoin des gestes ou non. Quand je m'en suis rendu compte, j'ai pu cesser de tourner en rond pour tenter d'établir la gravité du problème qu'il décrivait, comme je m'y étais employé pendant des heures ce jour-là, en après-midi et en début de soirée. Je tiens à souligner que j'ai été induit en erreur, de façon très concrète, parce que j'ai cru les propos du député.
Mon collègue de la Saskatchewan, le secrétaire parlementaire, a très bien résumé la situation quand il a dit que nous exagérions tous et que nous étions conditionnés ainsi. Je suis à la Chambre depuis deux ans seulement, mais je ne crois vraiment pas que tous les députés soient conditionnés à déformer les faits, pour reprendre l'idée de mon collègue de la Saskatchewan.
Il nous arrive de faire des erreurs. Il nous arrive d'exagérer. Mais il faut vraiment être dans un autre univers pour présenter une histoire comme un fait vécu alors que c'est faux, puis la répéter une deuxième fois la même journée sans se rendre compte qu'elle était fausse la première fois et qu'on ne devrait probablement pas la répéter. De toute évidence, le ministre qui parraine le projet de loi manque sérieusement de preuves quand il dit s'inquiéter des fraudes, réelles ou potentielles, qui pourraient être causées par les cartes d'identité de l'électeur et le recours à un répondant. Il n'a pas pu soumettre un seul élément de preuve, mis à part un sketch comique réalisé à Montréal.
C'est pourquoi certains de ses collègues sont venus à la rescousse et ont dit que nous avions besoin de preuves. Quelles meilleures preuves y a-t-il que des anecdotes? Si ce ne sont pas les députés qui ont agi ainsi de leur propre chef, il est possible qu'on leur ait dit qu'ils siégeaient ici depuis un certain temps et que, s'ils ne pouvaient pas fournir des preuves, ils devraient agir comme s'ils en avaient quand même et les appeler des anecdotes. C'est ce qui s'est passé. Si nous lisons le compte rendu du très bref débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi , nous constatons que le député de n'est pas le seul à avoir raconté cette anecdote. C'est ce que je vais l'appeler maintenant. Au début, il a déclaré à tort qu'il avait été témoin de ce qu'il racontait mais, plus tard au comité, il s'est corrigé, et il a affirmé que c'était une anecdote.
Quand on dit à des personnes de fournir des preuves quand il n'y en a pas, cela les incite, dans une certaine mesure, à dépasser les bornes. J'ai dit aux médias à quelques reprises que je n'étais pas prêt à affirmer que le député avait menti. Il a clairement induit la Chambre en erreur. Il a tenu des propos erronés. J'ai été assez sévère à son égard. J'ai dit qu'il hallucinait peut-être, qu'il fantasmait simplement. Toutefois, d'une façon ou d'une autre, il était motivé par la nécessité d'aider le gouvernement à fournir des preuves pour expliquer pourquoi le projet de loi s'en prend aux fraudes électorales commises par les citoyens ordinaires et relègue complètement à l'arrière-plan les fraudes organisées, alors que nous savons que les activités ou les bases de données d'au moins un parti politique ont récemment été liées à ce genre de fraudes.
Il ne fait aucun doute que le projet de loi a tout changé. Il vise principalement à éliminer les irrégularités qui, supposément, créent des risques de fraude. Au début, le ministre voulait faire croire aux gens que les irrégularités constituaient des fraudes, mais il s'est rendu compte que les gens comprenaient rapidement que ce n'était pas une bonne comparaison.
Je suis d'accord avec mon collègue de la Saskatchewan, que je respecte sincèrement, que nous sommes conditionnés à agir de manière partisane, voire parfois trop partisane. Toutefois, j'ai du mal à accepter sa déclaration selon laquelle les représentants élus de la Chambre sont universellement conditionnés à agir comme l'a fait notre collègue de et à faire des déclarations inexactes.
Il est très important de savoir qu'il ne s'agit pas d'une petite déclaration trompeuse. Je ne suis pas ici simplement pour parler du fait que j'ai entrepris de trouver dans quelle mesure la déclaration était vraie. Elle a été partiellement corrigée 19 jours plus tard, car le député s'est rétracté mais sans retirer tout ce qu'il avait dit. Je reviendrai là-dessus si le temps me le permet.
La réalité, c'est que, à elle seule, la déclaration aurait créé l'impression, une fois rapportée (d'ailleurs elle a été signalée parmi de nombreux Canadiens attentifs), que le problème présenté existe véritablement.
Le député aurait vu des gens prendre des cartes d'électeurs qui avaient été jetées, probablement parce qu'elles avaient été envoyées à la mauvaise adresse ou parce que les destinataires étaient si vexés de notre système politique qu'ils n'avaient aucune intention d'aller voter ou quelque chose du genre. Le député aurait donc vu ces gens se rendre à un bureau de campagne et remettre ces cartes à des personnes qu'il ne nomme pas. Puis, à ce moment, le témoignage prend fin et on nous laisse supposer que ces cartes sont utilisées pour voter, alors que, comme je l'ai déjà expliqué, la combinaison de la carte d'électeur et du système de répondant ne fonctionne pas.
Cette déclaration a créé une énorme confusion.
Je m'en suis rendu compte uniquement parce que je me suis adonné à lire l'article de M. Ling soulignant que cette combinaison ne fonctionne pas et que la déclaration était donc probablement fausse. Pendant quelque 19 jours, les journalistes et les Canadiens suivaient attentivement le dossier et se demandaient si c'était vrai ou faux. C'est grave
Ajoutons que, 2 semaines plus tard — 17 jours plus tard, pour être exact — notre collègue du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a transformé un incident dont il avait été témoin en une anecdote, ce qui n'améliore pas vraiment les choses. Il aurait tout simplement pu se camper sur ses positions et dire qu'il aurait dû admettre qu'il s'agissait d'une anecdote et que, malgré le peu de preuves, il allait continuer à relater les choses sous forme d'anecdote. Il n'a pas, tout simplement, lâché le morceau et affirmé qu'il avait dit quelque chose de tout à fait erroné; il n'a pas fait marche arrière ni cessé d'utiliser cet exemple, et ce, même s'il siège au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre chargé d'étudier le projet de loi en question. Non.
Je pense qu'on peut ainsi constater que les ministériels sont, d'une façon ou d'une autre, incités à utiliser des anecdotes pour expliquer la décision du gouvernement d'interdire le recours aux cartes d'information de l'électeur et aux répondants.
Ce n'est pas anodin. Tous les députés doivent maintenant savoir que 120 000 électeurs ont eu recours à un répondant en 2011.
Par contre, les gens ne savent peut-être pas que plus de 800 000 aînés et patients dans des établissements de soins à longue durée ont utilisé la carte d'information de l'électeur, et qu'environ 75 000 Autochtones dans les réserves en ont fait autant. En outre, parmi les étudiants qui ont participé à une série de projets pilotes dans les campus, 62 % d'entre eux ont présenté cette carte comme deuxième pièce d'identité.
Selon ce que je sais, presque un million de Canadiens ont eu recours aux cartes d'information de l'électeur et il n'y a eu aucun cas, ni même aucun soupçon, de fraude, et j'aimerais bien qu'on me prouve le contraire. Il n'y a eu absolument aucun cas de fraude.
Cela se rapporte à ce que je disais tout à l'heure. Malheureusement, les mots employés par notre collègue, le député de , ont eu des répercussions. Ses propos donnaient l'impression que cette pratique adoptée par Élections Canada relativement au droit de vote pouvait donner lieu à de la fraude. Élections Canada avait déterminé qu'elle commencerait à utiliser les cartes d'identité de l'électeur comme deuxième pièce d'identité à titre d'essai à compter de 2008, car dans certains cas, il s'agissait de la façon la plus simple de fournir une adresse. Cette pratique a été étendue en 2011.
Cela dit, le député a d'un seul coup miné la crédibilité de ce système et suscité indirectement de la confusion, car le citoyen moyen ne savait pas que la carte d'identité de l'électeur ne pouvait pas être utilisée seule. Il a aussi créé de la confusion lorsqu'il a dit qu'il existait un lien entre cette carte et le recours à un répondant, alors que ce n'est pas du tout le cas.
Je vais terminer mon discours en revenant à mon argument de départ, soit que la présidence a rendu une bonne décision en déclarant que cette question doit être renvoyée au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous méritons tous des explications plus complètes que celles qui nous ont été fournies.
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Monsieur le Président, c'est un grand honneur, comme toujours, de prendre la parole à la Chambre au nom des habitants de Timmins—Baie James.
Il n'y a pas de quoi être heureux ce soir car le gouvernement conservateur abaisse encore une fois de plus le niveau à la Chambre en dénaturant le modèle de Westminster auquel nous tenons tant.
Quand je dis que c'est un honneur et un privilège de représenter les habitants de Timmins—Baie James, c'est parce qu'ils m'ont élu et qu'ils décideront un jour peut-être d'élire quelqu'un d'autre. C'est un choix que je respecterai. J'ai cependant certaines obligations à remplir tant que je suis ici.
Il y a certains mots que nous utilisons. Nous utilisons le mot « privilège ». C'est un mot intéressant. Nous avons des privilèges en tant que députés. Par exemple, nous jouissons d'un privilège nous mettant à l'abri de poursuites en diffamation afin que, dans certains cas, nous puissions débattre à la Chambre de façon parfois animée. Il nous arrive d'avoir à poser des questions qui, plus tard, s'avèrent sans fondement, mais notre rôle à titre de parlementaires est de poser des questions et de déterminer si les habitants du Canada sont représentés. Nous jouissons de certains privilèges nous permettant de faire notre travail.
Cependant, ce privilège est assorti d'une responsabilité claire. Les députés d'en face l'ignorent peut-être, mais nous sommes des législateurs. C'est notre travail d'adopter les lois du Canada. Nous faisons partie d'un plus grand système législatif dans la tradition de Westminster. Ce qui est décidé ici constitue un précédent que vont étudier d'autres démocraties parlementaires.
Une de nos principales responsabilités en tant que députés est de dire la vérité à la Chambre, autrement dit, de ne pas mentir. Je ne parle pas du fait d'embellir, d'exagérer, de nuancer ou d'éviter. Ce sont toutes des choses qui arrivent à la Chambre, mais l'obligation de ne pas mentir est un principe fondamental car le mensonge fausse le travail des parlementaires.
Nous devons mettre la situation en contexte. Il est très rare de pouvoir juger qu'il y a, de prime abord, outrage au Parlement. Les gens s'excusent tout le temps pour toutes sortes de choses à la Chambre. Dès qu'ils s'excusent, l'affaire est close.
Je repense au cas de Jim Prentice, qui vient également de Timmins, en 2006. J'ai employé un langage coloré à propos d'un certain comportement humain dans la salle de bain lorsque j'ai pensé à sa réponse. Plus tard, j'ai reconnu que c'était déplacé et je me suis excusé. J'ai employé un langage coloré, ce qui n'a rien à voir avec le fait de fausser le travail du Parlement et d'essayer de le compromettre.
Si on cherche le mot « outrage » dans le dictionnaire, on constate que l'outrage au Parlement constitue une ingérence dans le travail du Parlement.
On a jugé que le cas du député de satisfaisait aux trois critères suivants. Premièrement, il a fait une déclaration qui était fausse. En réalité, il n'a pas fait cette déclaration une fois, mais deux. Deuxièmement, il savait que ses propos étaient trompeurs. Troisièmement, il les a prononcés dans l'intention d'induire la Chambre en erreur.
Voyons ce qu'il a fait. Nous sommes saisis d'un projet de loi qui vise à empêcher les électeurs de voter. C'est une mesure législative très troublante parce que ce que le gouvernement a décidé de faire ne règle pas les problèmes qui ont ressorti des élections de 2011, c'est-à-dire les vastes problèmes liés à l'entrave à l'exercice du droit de vote et la fraude électorale au moyen d'appels automatisés. Le système judiciaire canadien a été saisi de l'affaire et a jugé qu'il y avait eu de nombreux cas d'entrave au droit de vote, dont la piste remontait à la base de données des conservateurs. Élections Canada n'a pas été en mesure d'identifier les responsables parce que le Parti conservateur a fait de l'obstruction en ne présentant aucun témoin et en nuisant à la tentative d'Élections Canada de trouver des témoins. Tout ce que le tribunal a établi, c'est que, partout au Canada, dans des circonscriptions clés, il y eu des tentatives pour priver des Canadiens de leur droit de vote et la base de données des conservateurs a été utilisée dans ce dessein.
On aurait cru que la clarification de la Loi électorale du Canada aurait eu pour objectif de veiller à ce qu'Élections Canada ait le pouvoir de convoquer des témoins et d'examiner qui a eu accès à la base de données qui a été utilisée pour commettre la fraude.
Or, ce n'est pas du tout ce que fait le projet de loi. Il ne fait que détourner l'attention du réel problème. On ne parle plus à la Chambre des cas connus d'entrave à l'exercice du vote et de fraude électorale par des agents inconnus du Parti conservateur. On accuse maintenant des Canadiens ordinaires. Le gouvernement veut nous faire croire que ce sont des Canadiens ordinaires qui fraudent le système électoral. Pourtant, les conservateurs ne peuvent nous donner aucun exemple. C'est problématique puisque nous avons de nombreux exemples où nous savons que des fraudes électorales ont été commises au moyen d'appels automatisés, et je peux nommer les circonscriptions. En revanche, les conservateurs ne peuvent nous donner ne serait-ce qu'un seul exemple où un citoyen canadien a voté frauduleusement ou tenté de porter atteinte au système électoral.
Il y a donc tout lieu de s'interroger sur les motivations du député. Le député de a prétendu à la Chambre avoir été témoin d'un acte criminel. C'est une allégation extraordinaire. Or, mes collègues d'en face nous disent qu'il n'y a rien de mal à cela. Selon eux, tous les députés déforment les faits ou embellissent la réalité. Ils sont conditionnés à agir ainsi. Je ne vois pas comment ils peuvent croire qu'il n'y a rien de mal à prétendre, devant une assemblée législative, avoir été témoin d'un crime qui n'a jamais été commis. C'est pourtant ce qu'a prétendu le député de . Il a affirmé avoir vu des gens ramasser des cartes d'électeur, se rendre au bureau de campagne du candidat qu'ils appuient et les remettre à d'autres personnes, qui se sont ensuite présentées à des bureaux de scrutin sans pièce d'identité accompagnées d'amis qui se sont portés garants pour elles. Il a affirmé avoir été témoin de tels actes criminels.
Plus tard, il a dit qu'il tenait à raconter quelque chose qu'il avait vu de ses propres yeux. Il a prétendu avoir été témoin d'un crime et avoir vu des travailleurs de campagne ramasser une dizaine de cartes d'électeurs et s'en aller. Que faisaient ces gens? Quand on tente d'induire la Chambre en erreur en prétendant avoir été témoin d'actes criminels qui n'ont jamais été commis et avoir des preuves à l'appui alors qu'il n'en existe pas, on fait preuve de mépris envers le Parlement et ses électeurs.
Nos collègues conservateurs disent que nous sommes tous conditionnés à le faire. Je ne pense pas que ce soit le cas. Ils affirment que nous déformons et embellissons. Je ne pense pas que nous soyons élus députés pour mentir aux Canadiens. Je ne pense pas que les mensonges aient leur place à la Chambre des communes. Ce n'est certainement pas le cas, car la tradition parlementaire ne le tolère pas. Pourtant, les conservateurs prétendent le contraire et affirment que les néo-démocrates font preuve d'acharnement en dénonçant les propos du député.
Ce n'est pas la première fois qu'ils défendent une telle position. Le 3 mai 2012, la députée qui est aujourd'hui a affirmé avoir été témoin d'un crime. Elle était visée par des allégations voulant que des appels automatisés frauduleux aient été faits dans sa circonscription pour nuire aux autres partis. Elle a affirmé alors avoir reçu un appel lui disant de se rendre à un autre bureau de vote. C'est sérieux. Si elle savait que des actes de fraude électorale étaient en cours, elle avait le devoir d'en informer les autorités. Lorsqu'elle a été pressée d'indiquer où la fraude électorale avait été commise par les autres partis, dans sa circonscription, elle s'est rétractée. Elle a dit qu'elle était désolée et qu'elle s'était peut-être mal exprimée. C'est sérieux. Il s'agissait de savoir si des crimes avaient été commis, oui ou non.
La question générale dont nous débattons actuellement est celle de l'abus de notre système parlementaire. Depuis que le gouvernement est majoritaire, il mine les travaux des comités. Il crée des rapports qui devraient reposer sur des faits alors que ce n'est pas le cas. Dans l'étude sur les conflits d'intérêts, nous avons vu récemment le gouvernement évacuer complètement les principes de base de la Loi sur la responsabilité et intégrer au rapport des recommandations jamais formulées par personne. Les témoins nous ont indiqué les uns après les autres que nous devions renforcer la Loi sur les conflits d'intérêts, mais les députés conservateurs ont plutôt fabriqué des recommandations à partir de rien et les ont fait adopter par le comité. Voilà ce que j'entends par miner les travaux.
Pourquoi est-ce grave? Parce qu'un système basé sur la tradition de Westminster ne comprend pas les mêmes pouvoirs et contre-pouvoirs que le système législatif des États-Unis. Il est entendu que les élus se comporteront avec un certain degré d'honneur, notamment au sein des comités, où nous sommes censés collaborer les uns avec les autres.
J'en veux pour preuve le projet de loi , que le député d' veut faire adopter dans le seul but de permettre aux conservateurs faisant l'objet d'une enquête d'exiger que le vérificateur général fasse lui aussi enquête ou à ceux qui sont soupçonnés d'avoir enfreint la Loi sur le lobbying d'exiger de la commissaire qu'elle fasse enquête de son côté.
Dans tout le monde occidental, pas un Parlement ne permet à ceux qui font l'objet d'une enquête de rédiger des lois afin de leur permettre de faire enquête sur ceux dont le travail consiste précisément à demander des comptes aux parlementaires et aux lobbyistes. Or, dans le monde où ils vivent, il semblerait que les conservateurs jugent que c'est essentiel.
J'ai demandé au député d' l'autre jour s'il était capable de nous donner un seul exemple pour étayer son projet de loi et ses affirmations sur les agents du Parlement, comme le vérificateur général, qui fait enquête sur ses amis sénateurs; la commissaire à l'éthique, qui s'est intéressée aux agissements des conservateurs occupant les banquettes ministérielles; ou Élections Canada, qui subit les foudres du gouvernement conservateur sous prétexte que le directeur général des élections ne joue pas pour la bonne équipe. J'ai demandé au député de me fournir ne serait-ce qu'un exemple, mais il en a été incapable.
Les conservateurs semblent avoir pris l'habitude de gouverner sans tenir compte des faits. C'est grave, parce que si un régime supposément de droit ne tient pas compte des faits, ce n'est pas un régime de droit.
Je vous demande donc, monsieur le Président, de réfléchir à ce qui a bien pu arriver à ce parti, qui faisait de la reddition de comptes son cheval de bataille. Je me rappelle le rapport minoritaire produit par l'Alliance canadienne lorsque le Parti libéral avait été accusé d'outrage au Parlement. Voici ce que l'Alliance canadienne avait dit à l'époque. J'aimerais bien que les députés d'en face en profitent pour faire un examen de conscience, mais je doute qu'ils osent se prêter à un tel exercice.
On ne peut qualifier cela de simple oubli sous le feu roulant des questions. Il s'agit plutôt d'une tentative délibérée de tromper [...]
Le Parlement ne peut exercer cette vigilance quand on le trompe ou quand on lui ment. Le fait d'induire le Parlement en erreur représente un outrage au Parlement. Cela ne peut être toléré en aucune circonstance [...]
C'est de ça qu'il s'agit aujourd'hui. On parle d'un député qui s'est adressé à la Chambre, deux fois plutôt qu'une, et qui a menti en affirmant avoir été témoin de crimes qui n'ont jamais eu lieu. Il a attendu 19 jours avant de rectifier le tir. Et il ne s'est jamais excusé. C'est le moins qu'il aurait pu faire en pareille circonstance, mais il ne s'est jamais excusé.
Si un député dit à la Chambre qu'il a été témoin d'un crime et qu'il n'a pas agi, il est certainement coupable. Je continue d'appeler mon collègue « honorable », même si ce qu'il a fait n'a rien d'honorable. Si l'honorable député de avait été témoin d'un crime et était certain d'avoir vu une fraude se produire sous ses yeux, la loi l'obligerait à dénoncer cet acte. Mais il ne l'a pas fait, puisqu'il a tout inventé. Il s'est mis dans une position très difficile, car pour défendre un projet de loi du gouvernement conservateur qui priverait des Canadiens de leurs droits électoraux fondamentaux, il a prétendu avoir été témoin de crimes qui n'ont jamais été commis.
Selon la tradition de Westminster, la décision qui sera rendue par le comité ne devra pas tenir compte des seuls intérêts de la machine de guerre conservatrice. Je suis très troublé par leur volonté d'agir de la sorte, puisque les conservateurs ont souvent fait passer leurs propres intérêts avant l'obligation que nous avons tous en tant que parlementaires. C'est ce que nous avons vu dans le cas de Bev Oda, une ministre tombée en disgrâce après avoir été reconnue coupable d'outrage au Parlement à cause d'un mensonge. Y a-t-il eu des conséquences? La réponse est non.
Nous avons constaté que le gouvernement conservateur a prorogé le Parlement, qu'il l'a fermé, afin de clore une enquête sur des cas d'abus envers des détenus afghans. On ne s'est jamais vraiment occupé de ce rapport, et cela porte ombrage au Canada. Les conservateurs ont préféré mettre fin aux travaux parlementaires au lieu de tirer l'affaire au clair.
N'oublions pas l'autre prorogation. Dans ce cas, les conservateurs ont mis fin aux travaux parlementaires pour éviter un vote de défiance. Dans ce cas-ci, l'atteinte aux privilèges démocratiques est encore plus grave.
Si le gouvernement conservateur tente de clore le débat que nous tenons à la Chambre afin de déterminer s'il est acceptable de mentir lors d'un débat sur un projet de loi, il établira un précédent qui montrera à d'autres pays dotés d'un régime parlementaire que le Canada fait peu de cas de la tradition parlementaire. Je crois que les députés seraient d'avis que nous devons nous montrer plus exigeants.
J'ai entendu toutes sortes de boniments de la part des conservateurs ce soir qui nous disent que nous devrions tous nous entendre et nous respecter mutuellement. J'aimerais croire à leurs bons sentiments, mais c'est comme être invité à pique-niquer avec des alligators. Je n'y crois tout simplement pas.
À l'étape de l'étude en comité, j'ai vu tous les bons amendements proposés être systématiquement rejetés. Le travail de fond du Parlement s'effectue toujours à huis clos pour que les conservateurs puissent abuser de leur majorité. Les députés ministériels ne manifestent aucun intérêt à collaborer avec ceux des autres partis.
Pour les conservateurs, employer un langage coloré est synonyme de mentir. Ce n'est pas le cas. Être passionné, ce n'est pas la même chose que déformer la vérité. Ils affirment que tout le monde embellit et déforme les faits. Ce n'est tout simplement pas vrai.
M. Gerald Keddy: Un mensonge est un mensonge, Charlie. Peu importe comment on l'appelle, un mensonge reste un mensonge. Qu'êtes-vous en train de dire? Si on ment parce qu'on jouit de la protection de la Chambre, ça reste un mensonge.
M. Charlie Angus: Levez-vous et traitez-moi de menteur.
Une voix: De toute évidence, si vous l'êtes, même si vous bénéficiez de la protection de la Chambre, ça reste un mensonge.
M. Charlie Angus: Êtes-vous en train de me traiter de menteur?
M. Gerald Keddy: Ce que je dis, c'est que si vous mentez parce que vous jouissez de la protection de la Chambre, c'est quand même un mensonge. Vous vouliez que je me lève. Je suis debout.