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CIMM Rapport du Comité

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AMC                Affaires mondiales Canada

EI                     État islamique en Iraq et en Syrie (ISIS en anglais), également appelé Daesh (nom arabe) ou État islamique en Iraq et au Levant (EIIL)

HCDH              Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme

HCR                 Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

IRCC                Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

LGBTI              Lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et intersexués

LIPR                Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés

OIM                 Organisation internationale pour les migrations

ONU                Organisation des Nations Unies

OSCE              Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

PDI                  Personne déplacée à l’interne

PAC                 Programme de parrainage d’aide conjointe

PPU                 Programme de protection d’urgence

RDBV               Programme mixte des réfugiés désignés  par un bureau des visas

RIPR                Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés

RPG                 Réfugié parrainé par le gouvernement; réfugié pris en charge par le gouvernement

RPSP               Réfugié parrainé par le secteur privé

SEP                 Signataire d’entente de parrainage

PRÉAMBULE

Le 16 juin 2016, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes (le Comité) a convenu d’examiner de quelle façon le Canada pourrait « mieux appuyer les groupes vulnérables de régions inaccessibles[1] ». Le Comité s’est réuni du 18 au 20 juillet 2016 et a entendu 32 témoins de même que des représentants d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et d’Affaires mondiales Canada. Il a également reçu plusieurs mémoires.

CRI DE DÉTRESSE : ADAPTER LE PROGRAMME D’IMMIGRATION DU CANADA POUR JOINDRE LES GROUPES DE PERSONNES DÉPLACÉES ET LES PLUS VULNÉRABLES

INTRODUCTION

Les déplacements forcés à l’échelle planétaire ont pris des proportions inégalées : 65,3 millions de personnes en sont touchées[2]. De ce nombre, 21,3 millions sont des réfugiés et quelque 10 millions des apatrides. On compte également 40,8 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays[3] à cause de conflits et de violence[4].

Le Canada se joint à d’autres pays pour trouver des solutions durables au problème des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de leur pays. En ce qui concerne les réfugiés, les objectifs du gouvernement du Canada sont clairement énoncés dans la loi, le premier étant « de reconnaître que le programme pour les réfugiés vise avant tout à sauver des vies et à protéger les personnes de la persécution[5] ».

En tant que partie à la Convention relative au statut de réfugiés de 1951 et au protocole s’y rapportant, le Canada, de concert avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), participe activement à la réinstallation de personnes ayant besoin de protection de partout dans le monde. Il fournit également une aide humanitaire aux populations qui vivent dans des zones de conflit, ainsi qu’une aide ciblée pour la sécurité, la stabilisation et le développement[6]. L’étude du Comité portait sur les mesures d’immigration visant à aider les personnes vulnérables et comment leur offrir une protection.

Le Comité a examiné les mesures d’immigration qui pourraient appuyer les groupes vulnérables dans les régions inaccessibles, notamment les mesures de réinstallation accélérée et d’autres mesures humanitaires. L’étude a soulevé d’importantes questions de principe, notamment au sujet de l’ordre de priorité pour la réinstallation des réfugiés au Canada, des mesures qui pourraient être prises pour aider les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, et des moyens à prendre pour améliorer le programme de réinstallation des réfugiés et tirer pleinement parti des possibilités de parrainage par le secteur privé.

Des intervenants et des personnes courageuses qui ont relaté leur expérience au Comité ont mis en évidence les besoins de protection impérieux de divers groupes. Leurs témoignages ont renforcé l’importance de l’engagement du Canada pour la réinstallation des réfugiés et ont démontré qu’un pays ne peut, à lui seul, venir en aide à tous ceux qui ont besoin de protection.

Le présent rapport comprend trois parties. La première expose les mesures d’immigration qui existent pour la protection des groupes vulnérables – réinstallation et motifs humanitaires. Les témoignages présentés au Comité sont exposés dans la deuxième partie, laquelle est divisée en deux sections : l’une présente les thèmes récurrents dans les témoignages, et l’autre, des études de cas choisies par le Comité pour nous aider à comprendre les besoins des collectivités vulnérables et les mesures que peut prendre le Canada pour les aider dans le cadre de programmes d’immigration. Quant à la troisième partie, elle renferme les recommandations du Comité à l’égard de mesures d’immigration en particulier, suivies de la conclusion.

MESURES D’IMMIGRATION ACTUELLES DE PROTECTION

Le HCR est l’organisation mandatée par les Nations Unies pour diriger et coordonner l’action visant la protection des réfugiés dans le monde et pour trouver des solutions aux problèmes des réfugiés. Pour venir en aide aux réfugiés, il emploie depuis toujours trois « solutions durables » : l’intégration locale dans le pays de premier asile, la réinstallation dans un autre pays et le retour dans le pays d’origine, c’est-à-dire le rapatriement.

La Convention relative au statut de réfugiés de 1951 et le protocole s’y rapportant définissent un réfugié comme une personne « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». La définition de réfugié au sens de la Convention est utilisée dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) du Canada et dans son règlement d’application, qui établissent le cadre des mesures d’immigration du Canada permettant d’offrir une protection à partir de l’étranger, notamment les dispositions relatives à la réinstallation et aux motifs d’ordre humanitaire[7].

A. Réinstallation au Canada

Chaque année, le Canada a coutume d’accueillir de 10 000 à 12 000 réfugiés réinstallés, soit un réfugié sur dix réinstallés au niveau mondial[8], dans le cadre de deux principaux programmes : le Programme de réfugiés pris en charge par le gouvernement (RPG) et le programme de réfugiés parrainés par le secteur privé (RPSP). Comme il l’est décrit dans les lignes qui suivent, les réfugiés réinstallés dans le cadre des deux programmes doivent répondre aux mêmes critères d’admissibilité et font partie des plans d’accueil annuels du gouvernement. Dans le cadre du programme de RPSP, les citoyens canadiens et les résidents permanents s’engagent formellement à fournir un soutien social, affectif et financier aux réfugiés et peuvent parfois identifier les personnes qui viendront se réinstaller.

1. Admissibilité

Le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (le Règlement) prévoit deux catégories de réfugiés admissibles à la réinstallation qui obtiendront un visa de résidence permanente : les réfugiés au sens de la Convention outre-frontières et les personnes de pays d’accueil[9].

En vertu du Règlement, la personne qui se trouve hors de son pays d’origine ou dans lequel elle avait sa résidence habituelle peut être désignée un réfugié au titre de la Convention si elle répond à la définition figurant dans la Convention des Nations Unies et exposée plus haut (c.-à-d., personne craignant d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques). La catégorie des personnes de pays d’accueil s’applique à quiconque se trouve hors du pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle et « une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans chacun des pays en cause ont eu et continuent d’avoir des conséquences graves et personnelles pour lui ». Ces deux définitions excluent les personnes à risque dans leur pays d’origine, qu’elles soient déplacées à l’intérieur de ce pays ou qu’elles risquent de subir de la persécution sanctionnée par l’État.

Selon le Règlement, la personne qui a fait une demande d’asile à l’étranger peut obtenir un permis de séjour temporaire afin d’assurer sa protection[10]. Les détenteurs de permis de séjour temporaire peuvent décider de demander la résidence permanente et de se réinstaller, ou encore de retourner dans leur pays[11].

La loi canadienne définit également les personnes qui sont vulnérables ou qui ont un besoin urgent de protection à même ces groupes de réfugiés. Le Programme de protection d’urgence (PPU) prévoit des procédures spéciales pour leur réinstallation : les cas urgents sont recommandés par le HCR, et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) décide dans un délai de 24 à 48 heures si ces personnes seront réinstallées[12]. Un permis de séjour temporaire est délivré aux personnes réinstallées qui ont un besoin urgent de protection, car elles doivent subir un examen d’admissibilité pour obtenir la résidence permanente, ce qui est impossible dans un pareil délai. Dans le cadre de ce processus exceptionnel, les réfugiés peuvent se trouver en sécurité en trois à cinq jours. En 2011, le Ministère a indiqué que ces cas étaient « extrêmement exigeants en ressources, et seul un petit nombre de demandes (maximum de 100) peuvent être traitées de cette manière par année[13] ».

Les termes « besoin urgent de protection » et « vulnérable » sont définis comme suit dans le Règlement :

Besoin urgent de protection La nécessité de protéger une personne appartenant à la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre-frontières, à la catégorie de personnes de pays d’accueil ou à la catégorie de personnes de pays source du fait que sa vie, sa liberté ou son intégrité physique font l’objet d’une menace immédiate et que, si elle n’est pas protégée, elle sera probablement :
  • a) soit tuée;
  • b) soit victime d’actes de violence, torturée, agressée sexuellement ou emprisonnée de façon arbitraire;
  • c) soit renvoyée vers le pays dont elle a la nationalité ou celui où elle avait sa résidence habituelle.
Vulnérable Se dit du réfugié au sens de la Convention ou de la personne dans une situation semblable qui a un plus grand besoin de protection que d’autres demandeurs de protection outre-frontières, du fait que son intégrité physique est plus grandement menacée en raison de sa situation particulière[14].

Pour évaluer l’admissibilité des personnes dont la réinstallation est recommandée, IRCC exige généralement que des entrevues soient réalisées par des agents des visas dans les missions à l’étranger. Les réfugiés réinstallés doivent respecter tous les critères d’admissibilité (ne pas avoir commis de crimes ou de crimes de guerre et ne pas représenter une menace pour la sécurité), mais ils bénéficient d’exemptions relativement à l’interdiction de territoire pour motifs financiers et pour motifs de santé[15].

Par ailleurs, pour traiter la demande de résidence permanente visant une personne reconnue comme réfugiée, l’agent doit déterminer si le demandeur pourra réussir à s’établir au Canada. Cette exigence ne s’applique pas aux personnes qui sont vulnérables ou qui ont un besoin urgent de protection[16].

La capacité de réaliser des entrevues peut être amoindrie par les préoccupations de sécurité à l’égard des réfugiés ou du personnel d’IRCC et pour des raisons d’organisation matérielle. Les membres du personnel sont appelés à travailler avec les gouvernements des pays d’accueil, lesquels doivent permettre aux agents canadiens d’y entrer pour rencontrer les demandeurs et ils doivent autoriser les demandeurs qui répondent aux critères à quitter le pays[17]. Robert Orr, sous-ministre adjoint, Opérations, à IRCC, a expliqué au Comité que « de grandes précautions en matière de sécurité » sont prises alors que le Ministère se prépare à interviewer des Syriens dans le Nord de l’Iraq[18].

2.  Identification des réfugiés aux fins de la réinstallation

a)  Réfugiés parrainés par le gouvernement

Les dossiers des RPG sont généralement portés à l’attention d’IRCC sur recommandation du HCR. Michael Casasola, officier responsable au Canada, HCR, a expliqué au Comité que les critères utilisés pour identifier les candidats jugés prioritaires pour la réinstallation ont été établis avec les 20 pays dotés de programmes de réinstallation[19]. Avant la réinstallation, les personnes ayant besoin de protection doivent d’abord être inscrites aux fins de la détermination du statut de réfugié pour être reconnues comme réfugiés. Elles peuvent ensuite faire l’objet d’une évaluation et d’une priorité pour réinstallation et recommandation[20] en fonction des critères suivants :

Ce sont les critères que nous cherchons, les victimes de violence et de torture. Les catégories les plus communes sont celle des réfugiés à risque et celle des victimes de violence et de torture. Les autres catégories plus communes que cela concerne les besoins de protection juridique et physique. Certaines personnes se trouvent en danger dans le pays d’asile, parce qu’elles peuvent faire partie d’une minorité, alors nous les réinstallons n’importe où ailleurs dans le monde. Certaines sont menacées de refoulement, forcées de retourner dans leur pays d’origine ou peuvent être placées en détention. En effet, on n’est pas censé détenir un réfugié pour le motif que c'est un réfugié[21].

David Manicom, sous-ministre adjoint délégué, Politiques stratégiques et de programmes, IRCC, a rappelé au Comité que le programme de réinstallation du Canada s’harmonise aux efforts déployés à l’échelle mondiale pour venir en aide aux populations vulnérables. Il a expliqué quel est l’avantage de s’allier au HCR et aux autres pays d’accueil :

En travaillant ainsi avec l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés et en contribuant à la réinstallation des populations prioritaires désignées par la communauté internationale, le Canada peut maximiser sa contribution à l’action mondiale visant à aider les personnes vulnérables[22].
[...]
Par le passé, et à maintes reprises, nous avons présidé les consultations tripartites sur la réinstallation auxquelles participe tout le secteur humanitaire et non gouvernemental ainsi que les États membres du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et l’agence elle-même[23].

Le Règlement confère au gouvernement canadien une certaine latitude pour accepter les recommandations, mais on ne sait pas vraiment si ces dispositions ont déjà été invoquées. Le gouvernement peut, par exemple, conclure des ententes avec d’autres organisations de recommandation. Le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté peut aussi désigner toute région géographique dans laquelle il estime que les circonstances justifient la présentation de demandes de visa de résident permanent sans recommandation[24].

b) Parrainage de réfugiés par le secteur privé

De tous les programmes de réinstallation du Canada, le Programme de parrainage privé de réfugiés est unique dans la mesure où des répondants du secteur privé peuvent recommander à IRCC la réinstallation de réfugiés en particulier[25]. Les personnes qui ont signé une entente de parrainage avec IRCC en vue de la réinstallation de réfugiés peuvent désigner les réfugiés qu’ils souhaitent parrainer, mais ces derniers doivent faire partie de la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre‑frontière ou de la catégorie des personnes de pays d’accueil, décrites précédemment. D’autres groupes de parrainage privé (répondants communautaires et groupes de cinq) peuvent seulement parrainer des personnes qui ont été reconnues à titre de réfugiés par le HCR ou par un autre État[26].

c) Programmes mixtes

Il existe deux autres programmes d’accueil de réfugiés qui font appel à la collaboration pour l’identification des réfugiés en vue de leur réinstallation par le gouvernement et le parrainage par le secteur privé, lequel fournit soutien et du financement. Il s’agit du Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas (RDBV) et du Programme de parrainage d’aide conjointe (PAC).

Le Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas est un partenariat entre le HCR, le gouvernement fédéral et les répondants du secteur privé. Dans le cadre de ce programme, le HCR désigne des réfugiés en vue de leur réinstallation, et le gouvernement et les répondants privés fournissent un soutien financier à la famille parrainée pendant sa première année au Canada. Les répondants fournissent aussi un soutien affectif et social pendant cette période[27].

Les RPG ayant des besoins spéciaux peuvent être désignés aux fins du Programme de parrainage d’aide conjointe et reçoivent ainsi une aide accrue[28]. Il existe un programme particulier à l’intérieur de ce programme, le Programme Femmes en péril, qui s’adresse aux femmes et enfants sans famille ni amis, qui risquent davantage de subir de la violence et du harcèlement[29].

Dans le passé, le gouvernement s’est aussi fondé sur des motifs d’ordre humanitaire pour autoriser les répondants privés à s’occuper de la réinstallation d’un groupe en particulier. Ainsi, en 2007, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration alors en poste a émis des directives pour faciliter l’immigration de Vietnamiens apatrides qui vivaient aux Philippines et qui avaient de proches parents au Canada prêts à agir comme répondants privés[30].

3. Plan des niveaux d’immigration, plafonds et répartition

Établi chaque année par IRCC, le Plan des niveaux d’immigration limite le nombre de réfugiés qui peuvent se réinstaller au Canada. L’objectif fixé pour 2016 (entre 41 000 et 44 800 personnes) comprend l’initiative ponctuelle de réinstallation des réfugiés syriens, mais ne tient pas compte des moyens pris traditionnellement par le Canada pour planifier l’arrivée des nouveaux venus. De 2005 à 2014, 11 456 réfugiés sont arrivés en moyenne chaque année au Canada pour s’y réinstaller, ce qui comprend tant les réfugiés pris en charge par le gouvernement que les réfugiés parrainés par le secteur privé[31].

L’objectif global pour les réfugiés comprend des sous-objectifs répartis entre les bureaux des visas à l’étranger. Un plafond est fixé quant au nombre de réfugiés que peuvent parrainer les signataires d’entente de parrainage (SEP); des plafonds secondaires s’appliquent également à certains bureaux des visas. Pour l’année commençant le 1er mars 2016, le nombre total de nouvelles demandes de parrainage prévu pour les SEP est de 10 500[32]. De ce nombre, 1 800 sont réservées aux bureaux de visas d’IRCC où l’arriéré de demandes est le plus élevé, tandis que les autres demandes peuvent être adressées à n’importe quel bureau des visas.

B. Dispositions relatives aux motifs d’ordre humanitaire

Les personnes qui ne répondent pas aux critères établis pour la réinstallation des réfugiés peuvent présenter une demande d’ordre humanitaire conformément aux dispositions de la LIPR qui visent à aider les personnes à surmonter les obstacles liés à l’immigration dans des circonstances exceptionnelles (articles 25 et 25.1 de la LIPR) ou si l’intérêt public le justifie (article 25.2 de la LIPR) selon l’avis du ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Le gouvernement a dit au sujet de ces dispositions :

Étant donné les pouvoirs qu’ils confèrent, les paragraphes 25(1), 25.1(1) et 25.2(1) sont les moyens les plus souples dont nous disposions pour tenir compte des divers motifs pour lesquels des personnes de partout dans le monde peuvent nécessiter une aide humanitaire, entre autres : catastrophes naturelles, crises internationales, ou toute forme particulière de persécution, par exemple celle fondée sur la religion. Le Canada peut recourir à ces outils pour répondre au cas par cas à la situation des personnes et des groupes ayant besoin de protection, et cela où qu’ils se trouvent[33].

Si le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté estime qu’il y va de l’intérêt public d’autoriser l’étude de demandes pour des raisons humanitaires propre à un certain groupe, IRCC n’a nullement besoin de demander une recommandation du HCR pour traiter ces demandes.

M. Manicom, représentant d’IRCC, a indiqué au Comité qu’on a souvent tenu compte des considérations d’intérêt public, mais on en sait peu sur le recours à cette disposition discrétionnaire, car il n’y a pas de rapports publiés régulièrement à ce sujet. M. Manicom a fourni deux exemples à cet égard : l’un où le Canada avait répondu à une demande du HCR et l’autre où il avait demandé au HCR certaines recommandations :

De 2012 à 2014, en réponse à une demande du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés après le séisme de 2010 en Haïti, le Canada a accueilli 40 Haïtiennes et leurs personnes à charge. Ces femmes célibataires avaient été déplacées et soumises à des violences sexuelles et n’avaient pas d’autres protections[34].
[...]
Si nous administrions un programme consacré à un groupe en particulier et que nous demandions pour ce groupe-là, comme nous l’avons déjà fait en vertu de différentes politiques publiques, par exemple — et je vous ai parlé de l’une d’elles à la mise en œuvre de laquelle j’ai contribué, soit pour les Tibétains en Inde — il s’agirait alors d’un programme isolé[35].

À titre d’exemple, on a recouru aux dispositions d’ordre humanitaire pour des raisons d’intérêt public sans devoir s’adresser au HCR comme organisation de recommandation pour accueillir des interprètes afghans qui avaient rendu service aux Forces canadiennes[36].

M. Manicom a confirmé que l’article de loi portant sur les considérations d’intérêt public « pourrait effectivement être invoqué pour la réinstallation de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays […] D’un point de vue strictement légal, cet article confère les pouvoirs nécessaires[37]. »

TÉMOIGNAGES SUR LES MESURES D’IMMIGRATION VISANT À PROTÉGER LES GROUPES VULNÉRABLES

Le Comité a entendu des témoignages sur des populations vulnérables en Europe, au Moyen-Orient, en Asie et en Afrique, où des circonstances très différentes compromettent la sécurité des personnes. Les témoins ont exposé les lacunes et les solutions possibles relativement aux mesures d’immigration du Canada permettant de protéger ces personnes. Malgré la grande diversité des situations, des solutions communes ont émergé, dont le remaniement du programme de réinstallation. Cela étant dit, en dépit des difficultés communes, le Comité reconnaît que chaque groupe vulnérable dont il a été question au cours de l’étude a des besoins qui lui sont propres et qui sont décrits plus à fond dans la section suivante.

A. Thèmes récurrents

1. Améliorer le programme de réinstallation

Comme l’a indiqué Brian Dyck, président de l’Association des signataires d’entente de parrainage de réfugiés, « il est important de nous concentrer sur l’élaboration d’un solide système de réinstallation des réfugiés qui sera en mesure de répondre à la demande et de réagir en même temps aux situations urgentes qui surviennent[38] ».

Des témoins ont mentionné au Comité diverses façons de mieux aider les personnes dans les régions inaccessibles ou d’accès difficile; ils ont longuement discuté des personnes déplacées dans leur propre pays, notamment des processus de recommandation et de sélection qu’il est possible d’utiliser pour la réinstallation.

a) Identifier les groupes vulnérables et en établir la priorité

Comme M. Casasola, du HCR, l’a dit au Comité, l’organisme évalue qu’il y a « 1,19 million de réfugiés à réinstaller. Par contre, il n’y a qu’environ 120 000 places de réinstallation auxquelles peut avoir accès le HCR par les pays de réinstallation, et ce, annuellement[39]. »

De nombreux témoins préconisent le traitement prioritaire des demandes provenant du groupe qu’ils considèrent comme le plus vulnérable. M. Dyck a toutefois rappelé au Comité qu’« il y a beaucoup de groupes oubliés dans le monde et le Comité les a entendus. Connaître la situation critique de ces gens est très important. Toutefois, il est difficile de décider à qui porter assistance quand on ne peut aider tout le monde[40]. »

Des témoins se sont dits favorables à l’application d’une approche normative à la prise de décisions[41]. Janet Dench, directrice du Conseil canadien pour les réfugiés, soutenait que le fait de cibler certains groupes pouvait compromettre l’équité : « [N]ous estimons important de mettre au point des politiques et des programmes qui soient réellement équitables envers tous les réfugiés sans privilégier des nationalités ou des groupes ethniques particuliers […] Les décisions ne doivent pas dépendre du pouvoir de négociation des différents groupes, de leur capacité d’avoir l’oreille du ministre ou d’attirer l’attention des médias. Nous constatons que depuis quelques années le programme de parrainage par des particuliers subit l’influence des priorités ministérielles et nous jugeons cela très problématique[42]. »

D’autres estimaient que le Canada devrait cibler les groupes considérés comme les plus vulnérables parmi les groupes vulnérables[43] :

L’option de la réinstallation dans les pays de destination est généralement réservée aux plus vulnérables, qui ne peuvent pas être rapatriés dans leur pays d’origine ou localement intégrés dans le pays d’accueil tout simplement parce qu’ils ne peuvent pas reprendre le cours normal de leur existence.
Dans le cas de l’Iraq et la Syrie, les groupes vulnérables sont les minorités ethniques et religieuses, les militants politiques, les femmes en danger, les membres de la communauté LGBT, les athées, les convertis et les musulmans laïques[44].

Des témoins ont fait valoir qu’il faudrait accorder la priorité aux peuples victimes de génocide. Chantal Desloges, avocate du Desloges Law Group, a indiqué que « [t]out réfugié redoute à juste titre d’être persécuté, mais tous ne sont pas victimes de génocide[45] ». Des représentants de la Bourse du Samaritain Canada, organisme humanitaire, ont souligné qu’il importe d’appliquer des principes « d’humanité » et « d’impartialité », mais ils estimaient également que « le génocide est le crime le plus haineux » et qu’il faut donc y accorder la priorité[46]. Selon Christine Morrissey, conseillère spéciale, Rainbow Refugee, il conviendrait d’accélérer le traitement dans le cas des groupes vulnérables : « Je crois que lorsque nous recevons une demande provenant très manifestement d’un groupe considéré comme vulnérable, il faut la traiter en priorité. Il faut la mettre sur le dessus de la pile ou sur une pile distincte, plutôt qu’au bas de la pile, où elle devra attendre son tour. C’est ce qui se passe actuellement[47]. »

Il a aussi été question du suivi des priorités et, de l’avis de certains témoins, si le Canada désigne des groupes comme étant prioritaires pour la réinstallation, il serait important de créer un mécanisme permettant de veiller au respect des priorités[48]. Le Comité a appris que pendant un certain temps, IRCC tenait compte de l’appartenance religieuse et ethnique des réfugiés syriens réinstallés. Or, le suivi des priorités (area of focus en anglais ou volet prioritaire) devait se faire manuellement à partir des notes d’entrevue des agents, car le système informatique ne permettait pas de recueillir toutes les données concernant les réfugiés. Bien qu’on ait discuté du suivi des priorités parmi tous les réfugiés réinstallés, cela n’a pas été mis en pratique[49].

b) Recommandation et sélection des groupes vulnérables

Le Comité a entendu des opinions contraires à l’égard du rôle que joue le HCR en recommandant au Canada des groupes vulnérables aux fins de la réinstallation. Mme Dench a indiqué que « [c]’est le HCR qui a pour mandat d’identifier les groupes vulnérables admis à la réinstallation. Nous recommandons de laisser l’initiative au HCR dans cette tâche[50]. » Rabea Allos, directeur, Conseil catholique de parrainage pour réfugiés, considérait pour sa part que « le Canada devrait consulter d’autres organismes ici pour recenser les réfugiés au lieu de suivre le programme du HCR[51] ».

Au dire de témoins, si le gouvernement canadien veut faciliter la réinstallation de personnes déplacées dans leur pays, il n’a pas d’autre choix que de compter sur les organisations autres que le HCR. Soulignant que « [l]e HCR n’a pas le pouvoir légal de recommander au Canada des personnes déplacées à l’intérieur du pays », M. Manicom a donné au Comité l’exemple du gouvernement allemand qui travaillait avec l’Organisation internationale pour les migrations afin d’assurer la réinstallation de femmes et de filles yézidies[52].

Étant donné que le HCR ne peut faciliter l’identification des personnes déplacées dans leur pays d’origine aux fins de la réinstallation, des témoins estimaient que le Canada devrait reconnaître les autres organismes non gouvernementaux qui ont une connaissance intime des réalités locales[53] ou une expertise[54] et qui pourraient jouer ce rôle. Gloria Nafziger, coordonnatrice pour les réfugiés et les migrants, Bureau de Toronto, Amnistie internationale, a expliqué :

Le défi, dans ce programme, consiste à trouver des agents de recommandation adéquats — des organismes, des particuliers — qui ont la capacité, la volonté et les moyens de déterminer lesquelles, parmi toutes les personnes de la catégorie de personnes de pays source, sont les plus vulnérables, car je crois que le critère des personnes les plus vulnérables doit toujours s’appliquer. Je crois que le problème consiste à trouver un organisme pouvant effectivement se charger des recommandations et de la présélection des demandes, mais je ne crois pas que cela doive empêcher l’établissement d’un tel programme[55].

Comme on l’a expliqué précédemment, les candidats à la réinstallation doivent passer une entrevue avec des agents d’immigration canadiens. Dans le cas des personnes vulnérables qui habitent une région où il n’y a pas de bureau de traitement, cette étape occasionne souvent des délais. On considère généralement l’accessibilité comme un obstacle de taille pour les groupes vulnérables. Comme l’a indiqué Drew Boyd, directeur des opérations, The Sentinel Project for Genocide Prevention, « en ce qui concerne le travail dans des environnements instables, un des plus grands obstacles à surmonter est celui de l’accès. Non seulement l’accès, pour les organismes, aux personnes auxquelles ils veulent apporter de l’aide, mais aussi celui permettant aux communautés menacées de participer aux programmes d’aide et d’en tirer parti[56]. » Lorsqu’on a demandé à M. Casasola du HCR s’il avait des pratiques exemplaires à partager, il a répondu :

Le Canada a pour politique d’interviewer les réfugiés; certains pays ont renoncé à le faire […] Si toutes les preuves que nous leur fournissons sur un cas les convainquent, ils acceptent le cas. M. Alexander a observé qu’une des pratiques exemplaires du Canada qui a facilité le mouvement de très grands nombres de Syriens a été de reconnaître tous les réfugiés de prime abord. Cette pratique a réduit le volume de travail puisque les réfugiés étaient acceptés de façon conceptuelle, et je crois que le ministre actuel a adopté cette même approche[57].

Dans le cas des réfugiés syriens, récents et nouveaux, comme il l’est indiqué précédemment, ils sont reconnus comme des réfugiés de prime abord étant donné leur situation, et toute mesure officielle en vue de la détermination du statut de réfugié, incluant l’entrevue, devient superflue.

D’autres témoins convenaient qu’il fallait assouplir les pratiques canadiennes : on était d’avis qu’une seconde entrevue menée par un représentant canadien n’est peut-être pas nécessaire (réfugié de prime abord)[58] ou encore que ces entrevues devraient être faites par téléphone[59].

c) Programme de parrainage privé de réfugiés

Deux témoins ont parlé des coûts liés au Programme de parrainage privé de réfugiés. Jonathan Fon, vice-président, Canadian Asian Community Think Thank, a recommandé d’abaisser l’exigence financière du parrainage[60], qui va de 12 600 $ pour une personne à 32 500 $ pour une famille de six[61]. David Berson suggérait d’abaisser les coûts pour les réfugiés réinstallés en éliminant les prêts de transport[62] dans le cas des réfugiés les plus vulnérables[63].

Mme Nafziger a indiqué qu’il fallait revoir le processus de demande, en particulier les formulaires utilisés pour les recommandations de parrainage, « le système actuel étant souvent trop lourd pour les répondants privés en plus de ne pas permettre de réagir rapidement en temps de crise[64] ».

d) Plans des niveaux d’immigration et plafonds

Bien qu’on ait salué l’initiative du Canada pour la réinstallation d’un grand nombre de réfugiés syriens, M. Casasola, du HCR, invitait « les pays à continuer de développer leurs programmes de réinstallation[65] ». La plupart des témoins qui se sont exprimés au nom de groupes vulnérables ont demandé d’accroître le nombre de places prévues pour la réinstallation[66] ou encore de supprimer la limite[67]. Mme Desloges a demandé à IRCC de « lever les plafonds imposés aux signataires d’ententes de parrainage, ou du moins mieux les gérer. Les parrains privés sont très excités en ce moment, et leur enthousiasme les prédispose à mettre la main à la poche[68]. »

2. Étendre les critères d’admissibilité pour la réinstallation aux personnes résidant dans leur pays d’origine

De nombreux témoins voulaient que des personnes résidant dans leur pays d’origine soient admissibles à la réinstallation. Comme la définition légale de « réfugié » qui est acceptée à l’échelle internationale remonte à 1951, le cadre global pour les réfugiés contient une lacune, car « les personnes déplacées à l’intérieur de leurs pays ne sont, officiellement, guère protégées[69] ». Balpreet Singh, conseiller juridique, World Sikh Organization of Canada, a signalé l’urgence du problème et indiqué que « à l’heure actuelle aucune solution viable ne semble s’offrir aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays[70] ».

Proposant des solutions pour les personnes ayant besoin de protection qui résident encore dans leur pays d’origine, de nombreux témoins ont fait mention de la catégorie de personnes de pays source, une ancienne catégorie pour la réinstallation que prévoyait le

Règlement et qui a été révoquée en 2011[71]. À ce propos, Rainbow Railroad a indiqué :

En cas d’urgence quand un individu ne peut quitter son pays natal, étant donné que le Canada possède déjà une certaine expérience du système des catégories de personnes de pays source, le recours à cette solution pourrait être envisagé dans le cas des personnes courant d’énormes risques, mais qui sont incapables, pour des raisons légitimes, de quitter leur pays d’origine[72].

La catégorie de personnes de pays source permettait aux personnes qui résidaient dans des pays inscrits dans une annexe du Règlement d’être admissibles à la réinstallation si elles étaient gravement et personnellement touchées par une guerre civile ou un conflit armé, étaient détenues sans qu’aucune accusation n’ait été portée ou punies pour un acte qui, au Canada, serait considéré comme l’exercice légitime de droits civils liés à la dissidence politique ou à une activité syndicale, ou qui craignaient d’être persécutées du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leurs opinions politiques ou de leur appartenance à un certain groupe social. En 2011, six pays étaient désignés, soit la Colombie, la République démocratique du Congo, le Salvador, le Guatemala, la Sierra Leone et le Soudan[73]. L’accès direct à des agents des visas canadiens sans recommandation de la part d’un organisme tiers a été accordé pour ces six pays.

Sarita Bhatla, directrice générale, Affaires des réfugiés, IRCC, a exposé les raisons pour lesquelles la catégorie de personnes de pays source a été jugée inefficace en 2011, l’une de ces raisons étant qu’« il était très difficile et très compliqué d’ajouter certains pays à cette liste ou de les supprimer, de façon à suivre l’évolution de la situation dans les différents pays, sans parler des aspects diplomatiques[74] ». Interrogé à ce propos, M. Manicom a toutefois indiqué qu’il était possible de réinstaurer cette catégorie[75].

Des témoins croyaient que la catégorie de personnes de pays source pourrait mieux s’appliquer aux réfugiés parrainés par le secteur privé[76]. Audrey Macklin, professeure, a expliqué :

Le fait de s’appuyer sur des mécanismes privés plus que sur l’aide gouvernementale pour les réfugiés élimine le fardeau pour le gouvernement de trouver une façon proactive d’identifier les réfugiés dans les circonstances où le gouvernement local pourrait ne pas être réceptif et, de fait, pourrait être hostile envers cet effet.[77]

Mme Macklin croyait aussi que la catégorie de personnes de pays source serait plus efficace « dans les circonstances où le gouvernement peut appliquer son système d’immigration – autrement dit, dans un pays où les gens sont capables de quitter, que ce soit pour le regroupement familial ou en tant qu’immigrants économiques ». Cette idée a été reprise par un autre témoin, qui estimait que cette disposition serait utile pour obtenir le libre passage des personnes vers un autre pays[78].

3. Motifs d’ordre humanitaire

Des témoins ont proposé d’invoquer les motifs d’ordre humanitaire pour venir en aide à certains groupes, comme il est indiqué dans la partie suivante sur les études de cas[79]. Mme Desloges a aussi recommandé d’appliquer plus souvent les dispositions à caractère humanitaire :

Le premier [outil] consiste à recourir plus largement aux dispositions à caractère humanitaire de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés pour couvrir les situations où les gens ne sont pas en dehors de leur pays d’origine – par exemple, les personnes déplacées – et les gens qui ne sont pas reconnus par le HCR. Cela couvrirait les personnes qui ne peuvent pas, pour quelque raison que ce soit, avoir accès à l’enregistrement auprès du HCR ou à ses camps[80].

Le Comité a également appris que certaines directives doivent être rédigées à l’intention des agents des visas et des agents d’immigration au Canada afin d’assurer l’application adéquate des articles 25, 25.1 et 25.2 de la LIPR, qui confèrent un pouvoir discrétionnaire, ce qui permettrait d’obtenir de meilleurs résultats dans le traitement des demandes en question[81].

4. Autres programmes d’immigration

Vu le grand nombre de personnes devant être réinstallées et l’impossibilité de répondre aux besoins avec le programme actuel, M. Casasola, du HCR, a invité « les États à élaborer de nouveaux mécanismes d’accès », comme « la réunion de familles, les bourses universitaires, l’apprentissage et les régimes [de travail temporaire][82] ». De l’avis d’autres témoins, la délivrance de permis d’études et de travail assortis de conditions plus souples permettrait à des personnes ayant besoin de protection d’entrer au Canada de façon légitime[83].

Des témoins considéraient que les personnes vulnérables pourraient entrer au Canada au moyen d’un permis de résidence temporaire[84]. Mme Desloges estimait que ces permis pourraient être délivrés dans les cas urgents comportant un risque immédiat[85]. Mme Dench a indiqué que le fait d’avoir des proches au Canada pourrait être un critère pour la délivrance d’un permis de résidence temporaire au cours de crises mettant en cause les droits de la personne[86].

Au sujet de recommandations précises concernant le programme actuel de parrainage de membres de la famille et des moyens de l’améliorer pour aider les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, un témoin a signalé trois changements :

On pourrait donc favoriser la réunification des familles en éliminant des obstacles financiers pour les familles du Canada qui désirent parrainer des membres de leur famille qui sont des PDIP et qui vivent comme s'ils étaient des réfugiés. Le Canada pourrait adopter une définition plus large de la famille, aux fins du parrainage au titre de la catégorie du regroupement familial, de manière encore une fois à cibler les PDIP. Il est très important d'éliminer la règle touchant les membres de la famille visés par l'exclusion de manière à s'assurer que les omissions initiales dans les demandes d'immigration n'entraînent pas nécessairement une séparation permanente[87].

B. Études de cas : Des mesures d’immigration qui varient selon les circonstances

Pour mieux comprendre les besoins en protection et les lacunes des politiques et des règlements d’immigration actuels, le Comité a choisi de se pencher sur la situation de certains groupes vulnérables présents dans des régions inaccessibles. Il a ainsi pris connaissance de groupes dont la sécurité est compromise pour diverses raisons : intolérance religieuse et ethnique, comme dans le cas des sikhs d’Afghanistan et des Rohingyas du Myanmar; régime politique oppressif, comme en Corée du Nord et en Érythrée; non‑respect de droits reconnus au Canada, comme les droits des LGBTI (lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et intersexués) et des écrivains dans différents pays; et conflits armés tels que ceux observés en Ukraine et au Soudan du Sud, et ceux dont sont victimes les assyriens et les yézidis en Syrie et en Iraq.

Les témoignages entendus ont mis en lumière le triste sort réservé à ces différents groupes et ont permis au Comité de prendre toute la mesure de la souffrance que vivent leurs membres et de leurs besoins. Mais le Comité a aussi appris comment exactement le Canada peut y réagir : par exemple, il peut adopter, pour des motifs d’ordre humanitaire, une mesure spéciale afin de réinstaller un groupe de femmes et de filles yézidies, créer un programme permanent de parrainage privé à l’intention des LGBTI, ou offrir aux jeunes Ukrainiens déplacés un plus grand nombre de possibilités de séjour temporaire au Canada.

1. Sikhs d’Afghanistan

Les hindous et les sikhs afghans sont, par quelque définition que ce soit, des personnes assiégées et en grave danger[88].

Des témoins ont dit comment la montée de l’intolérance religieuse et de l’extrémisme en Afghanistan rendent le pays dangereux, et même invivable, pour les sikhs et les hindous. Ils ont noté que le gouvernement afghan avait admis son incapacité à protéger ces minorités, proposant qu’elles soient réinstallées dans leur totalité dans une région commune. Les témoins ont toutefois rejeté cette solution, affirmant qu’elle ne rendrait que plus vulnérables les sikhs et les hindous.

Les témoins en ont dit plus long sur la vulnérabilité des sikhs afghans; ils ont notamment décrit les contraintes qui sont imposées à certaines de leurs libertés :

En Afghanistan, les sikhs sont opprimés dans à peu près tous les aspects de la vie quotidienne. Ils ne peuvent quitter librement leurs maisons par crainte d’être agressés et harcelés. Les sikhs ne peuvent trouver du travail, ni même exploiter librement leurs entreprises. Les enfants sikhs ne peuvent fréquenter l’école par crainte d’être harcelés, agressés physiquement et de subir des pressions pour qu’ils se convertissent. Les femmes sikhes ne peuvent quitter leurs maisons sans être accompagnées et doivent porter la burka. Les filles sont bien souvent mariées avant l’âge de 16 ans, parce que leur famille craint qu’elles soient enlevées, violées, converties de force et mariées si elles n’étaient pas mariées auparavant. Les sikhs et les hindous ne peuvent incinérer leurs morts selon leurs rites, parce que les processions funéraires sont souvent la cible de jet de pierres et empêchés de poursuivre leur chemin. Les funérailles ont lieu de façon clandestine. Les terres dont les sikhs et les hindous sont légalement propriétaires depuis des siècles sont occupées. Les policiers ou les représentants du gouvernement ne sont pas en mesure de faire quoi que ce soit ou ne souhaitent pas le faire. C’est la raison pour laquelle les sikhs et les hindous vivent regroupés dans des gurdwaras[89].

À mesure que la situation se durcit, les sikhs afghans ont de plus en plus de difficulté à voyager, parce qu’ils sont facilement reconnaissables en raison des articles de leur croyance[90]. Ceux qui en étaient capables sont allés vivre en ville ou ont quitté l’Afghanistan. Seuls restent les plus vulnérables, qui n’ont pas les moyens de partir.

M. Singh a indiqué que sikhs et hindous vivent en Afghanistan depuis des centaines d’années, et que s’il y avait un moyen qu’ils puissent continuer de vivre dans leur pays d’origine en toute sécurité, il faudrait s’y consacrer de façon prioritaire. Mais il soupçonne que la vie en Afghanistan est devenue impossible pour la plupart d’entre eux, et c’est pourquoi il demande au Canada – par l’entremise des organisations non gouvernementales concernées – de confirmer ses soupçons. Des témoins ont, par ailleurs, exprimé l’avis que la fuite vers le Pakistan ou l’Inde, pays voisins, n’est pas une solution viable, vu la discrimination dont sont victimes ces populations et le refus systématique des gouvernements d’accorder un statut juridique et de fournir des services aux minorités[91].

Cela dit, le Comité a pris connaissance du travail de feu l’honorable Manmeet Bhullar, ancien député à l’Assemblée législative de l’Alberta. Constatant le sort réservé aux sikhs afghans, M. Bhullar et ses collaborateurs en ont aidé quelques‑uns à obtenir le libre passage vers l’Inde et à s’inscrire comme réfugiés auprès du HCR[92]. Quelque 200 sikhs afghans ont ainsi pu être réinstallés temporairement comme réfugiés dans la région du Pendjab, où ils peuvent étudier et recevoir la formation nécessaire pour exercer un métier. Selon les témoins, M. Bhullar voulait que ce groupe de personnes vulnérables soit réinstallé au Canada. Aujourd’hui, sa famille et sa communauté cherchent à faire de cette vision une réalité.

Des témoins ont jugé que la réinstallation dans des pays tiers est, à long terme, la seule solution viable pour les membres des minorités afghanes[93]. Cependant, ces gens ne seraient actuellement pas admissibles à une réinstallation au Canada, car ils résident dans leur pays d’origine[94]. Pour cette raison, les témoins ont recommandé que les sikhs et les hindous afghans soient admissibles à la réinstallation grâce au rétablissement de la catégorie des personnes de pays source[95]. Selon eux, la communauté sikhe du Canada serait en mesure de jouer le rôle de parrain privé, si cette solution juridique était adoptée[96].

2. Rohingyas d’Asie du Sud-Est

On a décrit [la minorité musulmane des Rohingyas] comme étant la plus persécutée au monde[97].

Les Rohingyas vivent pour la plupart dans l’État de Rakhine, aussi appelé Arakan, au Myanmar. Chris Lewa, directrice du projet Arakan, a parlé des besoins des Rohingyas en protection :

Depuis des décennies, les Rohingyas font l’objet de discrimination et d’exclusion des plus intenses en raison de leur religion et de leur appartenance ethnique. Ils sont devenus apatrides. Leur liberté de circulation est fortement restreinte. Ils sont victimes de violations flagrantes des droits de la personne de la part du gouvernement du Myanmar. Qui plus est, ils ont été la cible, en 2012, de violents massacres intercommunautaires engendrés par l’hostilité de longue date des bouddhistes de l’État de Rakhine à leur égard et au cours des quatre dernières années, 120 000 Rohingyas sont demeurés confinés dans des camps ségrégés pour personnes déplacées, au Myanmar[98].

Le marasme économique et la violence ont forcé plus de 100 000 Rohingyas à fuir leur foyer et à vivre dans des camps de déplacés au Myanmar. Des camps qui, selon Mme Lewa, sont ségrégués, car les autorités n’autorisent pas les Rohingyas à en sortir[99]. Les conditions de vie dans les camps sont des plus pénibles : manque de refuges convenables et d’installations sanitaires. De plus, ceux qui s’y trouvent n’ont pas accès sur place à des services médicaux; l’hôpital local de Rakhine ne permet pas les patients rohingyas.

De nombreux Rohingyas se sont enfuis au Bangladesh, en Thaïlande ou en Malaysie, pays voisins. Beaucoup ne sont toutefois pas inscrits auprès du HCR, et il est difficile d’en estimer le nombre. Mme Lewa a exprimé les vives inquiétudes que suscitent les populations qui ont fui :

Aucun de ces pays n’a ratifié de convention relative au statut des réfugiés ou des apatrides, pas plus qu’il n’a adopté de loi nationale pour la protection des réfugiés. Les Rohingyas qui vivent dans ces pays sont généralement considérés comme des migrants en situation irrégulière. La Malaisie, l’Indonésie et l’Inde autorisent le HCR à aider les réfugiés, y compris les Rohingyas, mais comme l’enregistrement auprès du HCR ne prévoit pas de mécanismes de protection officiels, il leur est souvent difficile d’avoir accès à la protection dont ils ont besoin[100].

Mme Lewa a présenté six recommandations au Comité. Elle a estimé que le Canada devrait améliorer l’admissibilité à la réinstallation en éliminant l’exigence selon laquelle les réfugiés qui viennent s’établir « soient parrainés par des groupes communautaires [et] reconnus et recommandés par le HCR[101] ». Elle s’est aussi dite d’avis que le Canada devrait envisager « la réintroduction de la catégorie des personnes de pays source afin de permettre la réinstallation des Rohingyas particulièrement vulnérables de l’intérieur du Myanmar[102] ». Par ailleurs, Mme Lewa a recommandé que « le ministre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada accroisse le nombre de réfugiés rohingyas sélectionnés par l’intermédiaire de programmes de réinstallation de réfugiés pris en charge par le gouvernement[103] ».

Mme Lewa a proposé en outre que le gouvernement du Canada envisage certaines mesures ne concernant pas l’immigration, par exemple, qu’il continue « de plaider pour la démocratie et le respect des droits de la personne au Myanmar, ainsi que pour le besoin urgent de mettre fin à la marginalisation des Rohingyas[104] », et qu’il poursuive « ses activités de plaidoyer pour la régularisation des réfugiés rohingyas auprès des pays d’Asie, notamment en Malaisie, par l’octroi de permis de travail[105] ». Enfin, Mme Lewa a jugé que le Canada devrait augmenter « son appui à la fourniture des services de base, notamment en ce qui concerne l’éducation des réfugiés rohingyas dans tous les pays[106] ».

3. Transfuges nord-coréens

Le rapport [du Conseil des droits de l’homme des Nations unies] sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée a conclu que les violations aux droits de la personne constituent des crimes contre l’humanité. La gravité, l’ampleur et la nature de ces violations révèlent une situation inégalée dans le monde contemporain[107].

La sénatrice Yonah Martin a comparu devant le Comité pour lui faire part des observations contenues dans un rapport récent du Comité sénatorial permanent des droits de la personne intitulé Les nombreux oubliés : Droits de la personne et transfuges nord‑coréens[108]. Elle a parlé des besoins en protection des transfuges nord‑coréens, aussi bien avant leur départ du pays que durant leur périple vers la liberté :

Les conditions de vie se sont détériorées à des niveaux de privation extrêmes auxquels les droits à la nourriture, à la santé et aux autres besoins essentiels sont catégoriquement refusés. Les Nord‑Coréens qui ont réussi à faire défection l’ont fait pour leur survie et, jusqu’à ce qu’ils aient obtenu refuge dans un pays sûr, leur vie et la vie d’éventuellement trois générations de membres de leur famille demeurent grandement à risque s’ils sont attrapés en Chine pour avoir traversé illégalement la frontière, ou dans d’autres pays de l’Asie du Sud‑Est, s’ils sont rapatriés en Corée du Nord[109].

La sénatrice Martin a expliqué qu’il est très difficile, pour les Nord‑Coréens, de quitter leur pays pour aller vivre en sécurité ailleurs. La plupart des transfuges passent par la Chine, et ensuite par l’Asie du Sud‑Est, notamment la Thaïlande. Le Comité sénatorial a appris que de 70 à 80 % des transfuges nord‑coréens sont des femmes, et que celles-ci sont victimes de violence sexuelle pendant leur voyage. En Thaïlande, les transfuges sont enfermés dans des centres de détention jusqu’à ce qu’ils obtiennent un visa de sortie leur permettant de se rendre en Corée du Sud ou aux États‑Unis, lesquels ont adopté une loi spéciale pour les accueillir. La Corée du Sud considère que toute personne vivant dans la péninsule de Corée est un ressortissant sud‑coréen, et elle accepte donc les transfuges nord‑coréens, mais, comme l’a souligné la sénatrice Martin, bien des transfuges ne veulent pas, notamment par peur, retourner dans la région[110].

Comme la Corée du Sud offre aux transfuges nord‑coréens une solution durable, ces derniers ne sont généralement pas recommandés pour une réinstallation au Canada. La sénatrice Martin a attiré l’attention sur les recommandations que le Comité sénatorial a faites pour remédier à cette lacune dans la protection. Le Comité sénatorial  a notamment recommandé une mesure spéciale afin de réinstaller les transfuges nord‑coréens vulnérables – les femmes, les enfants et ceux détenus en Thaïlande – pour des motifs d’ordre humanitaire; à cet égard, la communauté des Canadiens d’origine coréenne s’est dite prête à collaborer à l’initiative[111]. Le Comité sénatorial a aussi recommandé « que la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés soit modifiée de manière à créer une exception dans la définition de réfugié afin que les transfuges nord‑coréens puissent obtenir le statut de réfugié[112] ».

4. Érythrée

Les violations des droits de l’homme graves, généralisées et systématiques dans le pays, qui engendrent des crimes contre l’humanité, continuent d’être la raison principale motivant le nombre élevé de réfugiés provenant de l’Érythrée[113].

Dans son mémoire présenté au Comité, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, Sheila B. Keetharuth, fait remarquer que la situation des droits de la personne en Érythrée et la situation des réfugiés sont « inextricablement liées ». La rapporteuse spéciale s’est penchée sur le sujet dans différents rapports :

La rapporteuse spéciale a documenté les plus sérieuses violations des droits de l’homme en Érythrée, y compris des dossiers d’exécutions extrajudiciaires, des pratiques délibérément meurtrières aux frontières, des disparitions forcées et des détentions au secret, des arrestations et des détentions arbitraires, de la torture, des conditions d’emprisonnement inhumaines, un service national d’une durée indéfinie équivalent à du travail forcé, de la violence sexiste et le manque de respect pour le droit à la liberté d’expression et d’opinion, de réunion, d’association, de croyances religieuses et de mouvement[114].

Par ailleurs, elle a noté que ces violations des droits de la personne – et tout particulièrement le service national d’une durée indéfinie ainsi que les arrestations et les détentions arbitraires – font fuir les populations, y compris les mineurs non accompagnés. Ceux qui réussissent à sortir du pays doivent ensuite affronter les trafiquants de personnes, les passeurs et la dangereuse traversée du désert du Sahara, puis de la mer Méditerranée.

À propos du manque de protection offerte à l’échelle internationale aux Érythréens, la rapporteuse spéciale a mis en lumière les dangers qui se dressent devant les demandeurs d’asile déboutés et les autres rapatriés, y compris ceux qui ont signé une « lettre d’excuse » ou un « formulaire de regret » comme condition de retour. Elle a également mentionné le fait que les Érythréens sont vulnérables au trafic de personnes et à l’enlèvement contre rançon. Elle a pris soin d’exprimer son inquiétude au sujet des jeunes non accompagnés, qui sont plus exposés à divers risques et ne sont pas toujours pris en charge conformément aux normes internationales par les pays d’accueil. Enfin, la rapporteuse a indiqué que, selon le HCR, « la réinstallation demeure la solution durable la plus viable pour les réfugiés en Éthiopie, mais est uniquement disponible pour un petit pourcentage d’entre eux[115] ».

Dans son mémoire, la rapporteuse spéciale de l’ONU fait quelques recommandations à la communauté internationale. Celles qui suivent concernent tout particulièrement le Canada :

  • « Offrir le statut de réfugié aux citoyens érythréens cherchant une protection conformément aux dispositions de la loi internationale gouvernant les demandes d’asile, et en particulier la Convention relative au statut des réfugiés.
  • Étendre les canaux de migration légale afin de réduire la migration irrégulière pour contrer le passage clandestin et le trafic des personnes tout en traitant les victimes de façon humaine.
  • Cerner des solutions à long terme afin d’aider les réfugiés, y compris l’intégration locale dans le premier pays d’asile et la réinstallation dans les pays tiers et le renforcement de la solidarité internationale afin de partager la responsabilité de prendre soin des réfugiés et des migrants[116]. »

5.  Lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et intersexués

Les activités sexuelles entre personnes de même sexe sont illégales dans 72 États (37 % des États membres des Nations Unies) et sont passibles de la peine de mort dans 13 régions. On peut mourir simplement parce qu’on aime la personne qu’on aime[117].

Des témoins ont parlé des mesures de protection dont ont besoin les membres de la communauté LGBTI dans de nombreux pays. Ils ont noté à ce sujet que « la persécution fondée sur l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre représente un cas unique » à plusieurs égards. Par exemple, Dylan Mazur, directeur général de la Vancouver Association for Survivors of Torture, a signalé que l’homosexualité ou la promotion de l’homosexualité sont des crimes dans plus du tiers des pays du monde. Comme il l’a exprimé, « cela veut dire que leur propre gouvernement a adopté des lois qui criminalisent leur identité; des lois qui criminalisent cette forme la plus fondamentale de l’expression humaine, l’expression du genre et de la sexualité[118] ». En outre, cette forme de discrimination légalisée favorise « une culture de la persécution en toute impunité ». L’organisation Rainbow Railroad a indiqué ce qui suit dans son mémoire :

Les personnes qui se tournent vers nous racontent que souvent, non seulement elles courent le risque d’être arrêtées, emprisonnées ou punies par l’État, mais aussi d’être victimes de persécutions graves de la part la société et de violences, notamment sexuelles, de la part de leur communauté et de leur famille et sont sujettes au chantage. Cependant, elles n’ont pas droit à la protection de la police ou de leur gouvernement en raison de leur orientation sexuelle qui constitue un délit[119].

M. Mazur a fait remarquer que cette forme de persécution est bien différente de celle dont souffrent les personnes ou les groupes touchés par des conflits armés ou la violence politique[120].

Par ailleurs, des témoins ont expliqué qu’il est très difficile, pour les membres de la communauté LGBTI, de trouver un premier pays d’asile où demander la protection auprès du HCR ou le statut de réfugié parrainé par le secteur privé. Pour certains, il est même impossible de quitter leur pays; c’est le cas, par exemple, des lesbiennes originaires d’un pays limitant la liberté de mouvement des femmes non accompagnées d’un homme[121]. En outre, la personne qui quitte son pays risque de devenir plus vulnérable, dans le cas par exemple où le pays d’accueil est hostile aux LGBTI et où des restrictions sont imposées à l’accès des non‑citoyens au travail. Comme Rainbow Railroad l’a indiqué dans son mémoire : « Tomber de Charybde en Scylla, c’est ainsi qu’un demandeur d’asile a qualifié la possibilité de demander l’asile dans un pays voisin[122]. » En raison des longs temps d’attente avant de passer une entrevue au HCR ou de faire traiter leur demande de réfugié parrainé par le secteur privé, ces personnes restent longtemps dans une situation de danger et de vulnérabilité[123]. Des témoins ont signalé que les réfugiés doivent souvent attendre de deux à trois ans avant de passer en entrevue au HCR, tandis que, au Pakistan et au Kenya, les réfugiés parrainés par le secteur privé attendent plus de six ans avant leur réinstallation; au Cambodge et en Égypte, le délai est d’au moins quatre ans[124].

Des militants invités à comparaître devant le Comité ont recommandé la création d’un programme spécial qui permettrait à des parrains du secteur privé de parrainer des membres de la communauté LGBTI qui se trouvent toujours dans leur pays d’origine. Les témoins ont estimé par contre que le renouvellement du programme de la catégorie de personnes de pays source ne serait pas nécessairement la meilleure solution pour les LGBTI persécutés, car elle ne s’appliquerait probablement qu’à quelques pays. Les défenseurs des LGBTI préfèrent mettre l’accent sur le contexte juridique des pays visés, faisant valoir que les personnes vulnérables devraient être admissibles à la réinstallation là où l’homosexualité est considérée comme un crime[125].

Les témoins ont aussi jugé que le programme de parrainage par le secteur privé répondait plus aux besoins des LGBTI[126]. Selon eux, les demandeurs seraient plus disposés à se confier à des gens qui comprennent tacitement la culture gaie et qui sont plus sensibles aux difficultés que doivent surmonter ceux qui demandent une protection en raison de leur orientation sexuelle et qui n’ont souvent d’autre choix, s’ils veulent survivre dans leur pays, que d’agir en hétérosexuels. Les témoins ont fait remarquer que le HCR avait publié des lignes directrices importantes sur la manière d’interviewer les réfugiés gais, mais que leur application faisait parfois défaut[127].

Un projet pilote lancé en 2011 par le gouvernement du Canada, qui ciblait les gens ayant besoin de protection en raison de leur orientation ou de leur identité sexuelle et qui facilitait leur réinstallation au moyen du parrainage privé, a été vu comme une réussite. Des témoins ont demandé que le projet soit pérennisé, et que les demandes de participation soient traitées plus rapidement[128]. Ils ont fait valoir que les longs délais de traitement étaient source de danger pour les réfugiés et de complications pour les parrains du secteur privé, qui doivent rester engagés dans le processus pendant des années, malgré l’évolution de leur situation personnelle.

6. Écrivains

Notre expérience nous a montré combien la rapidité avec laquelle les services d’immigration réagissent peut être importante quand on appuie la demande d’un écrivain sur lequel pèse une menace imminente, voire une menace de mort, simplement parce qu’il a exercé son droit à la liberté d’expression[129].

PEN Canada a attiré l’attention du Comité sur les besoins en protection des écrivains (y compris les blogueurs, les rédacteurs en chef, les journalistes, les dramaturges, les poètes, les éditeurs, les scénaristes et les traducteurs) qui, en exerçant leur liberté d’expression, risquent le harcèlement, l’emprisonnement et même la mort. L’organisation a dit recevoir presque chaque jour des demandes d’assistance immédiate d’écrivains sur lesquels pèse une menace imminente; elle juge donc que les écrivains devraient être reconnus officiellement comme un groupe vulnérable[130].

PEN Canada a souligné l’urgence de protéger les écrivains, à l’instar des journalistes, qui sont admissibles au traitement accéléré de leur demande de visa dans le cadre du Programme de protection d’urgence (PPU) du Canada. L’organisation a cependant rappelé que la désignation au titre du PPU n’est pas facile à approuver[131]. PEN Canada a soutenu que le Canada pourrait accélérer la réinstallation des écrivains en s’appuyant sur le « système de suivi de PEN International pour juger et attester la situation de ces personnes vulnérables ». Elle a noté à ce sujet que le gouvernement de la Norvège se fie régulièrement aux évaluations de PEN[132]. Le Comité des écrivains en prison de PEN International possède une grande expérience du suivi d’écrivains en danger dans le monde entier et jouit d’un statut consultatif auprès des Nations Unies. Il assure le suivi de 700 à 900 cas tous les ans.

7.  Ukrainiens du Donbass et de la Crimée

Autrement dit, la vie est un enfer. Comme je le mentionnais, elle me rappelle la situation dans certains des pires endroits du monde. Comme je l’ai dit il y a quelques minutes, le pire serait que la communauté internationale, y compris le Canada, détourne son regard de cette catastrophe humanitaire[133].

Le Comité a appris qu’en Ukraine, sur une période de deux ans, le pays est passé d’un état sans personne déplacée à 1,8 million de personnes déplacées à l’intérieur de ses frontières, à la suite de l’annexion illégale de la Crimée par la Russie et du conflit dans la région du Donbass[134]. Selon Aleksandr Galkin, directeur, The Right to Protection, les PDI ont besoin de logement permanent et de possibilités d’emploi, et celles qui touchent une pension gouvernementale doivent bénéficier de la sécurité du revenu[135]. Michael Bociurkiw, ancien membre de la Mission de surveillance spéciale en Ukraine de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a expliqué que le retour dans les zones contrôlées par les rebelles présente de grands dangers; quiconque se montre critique envers les rebelles court des risques. Il existe des cas documentés de journalistes et d’autres personnes inscrites à des listes noires qui ont été détenus, qui ont été torturés ou qui sont simplement disparus[136]. Les témoins ont souligné que les gens qui vivent près de la « ligne de contact » ont très peu accès à l’aide humanitaire et médicale à cause des mesures de sécurité et de l’interdiction des livraisons par cargo[137].

Deux témoins, Iryna Dovhan et Oleksandr Gryshchenko, des partisans du gouvernement ukrainien,  ont fait le récit personnel de leur capture et de leur arrestation dans les zones se trouvant aux mains des rebelles. Ils ont dit qu’ils avaient subi des tortures de toutes sortes et que les responsables avaient agi en toute impunité[138]. Le Comité a aussi entendu Gennadii Afanasiev, arrêté et torturé en Crimée, forcé à témoigner contre des gens innocents et condamné à des travaux forcés[139]. Les deux hommes ont imploré le Comité de se rappeler les gens qui sont toujours en prison et de lutter pour leur libération.

Dans les recommandations qu’il a présentées au Canada, M. Bociurkiw a estimé que les programmes actuels d’immigration qui autorisent les séjours temporaires, comme les permis d’études et les échanges de jeunes, pourraient être mis à profit pour offrir des débouchés aux PDI et aux jeunes des régions touchées[140]. Il s’est aussi dit d’avis que les visites d’Ukrainiens devraient être encouragées, notant au passage que le taux de refus des demandes de visa de résident temporaire présentées par des ressortissants ukrainiens a malheureusement été élevé pendant une certaine période. Pour M. Bociurkiw, une autre façon de profiter des programmes actuels d’immigration consisterait à créer un programme de travailleurs temporaires semblable à l’ancien Programme des aides familiaux résidants, qui ciblerait les professionnels déplacés et qui pourraient recevoir l’appui de parrains du secteur privé canadien.

Des témoins ont suggéré par ailleurs des mesures de soutien du peuple ukrainien – des mesures non relatives à l’immigration – que le Canada pourrait adopter ou maintenir. Ont été mentionnées : le maintien des sanctions contre la Russie, un appui soutenu ou accru à l’OSCE et à la Mission de surveillance spéciale en Ukraine de l’OSCE, le maintien du soutien au travail des observateurs électoraux, et de l’aide pour trouver une solution politique au conflit. En outre, le Canada pourrait fournir de l’aide afin de faciliter l’intégration des PDI, la reconstruction des institutions telles que les médias détruits durant le conflit, et la lutte contre la corruption[141]. Enfin, le soutien du Canada à la formation des policiers et des douaniers et au travail des organisations de la société civile a été recommandé[142].

8. Soudan du Sud

La crise au Soudan du Sud est profonde. Une crise politique s’est répercutée sur les droits de la personne, ce qui a eu pour conséquence de causer une crise humanitaire, économique et sécuritaire[143]

David Marshall, chef d'équipe, Mission d’évaluation du Soudan du Sud, Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a publié son dernier rapport en mars 2016, dans lequel il met en lumière les violations des droits de la personne commises au Soudan du Sud depuis décembre 2013. Il constate « une offensive contre‑insurrectionnelle du gouvernement dans l’État d’Unité, en 2015, dans le but évident de semer la terreur chez les civils, notamment par le recours à une violence sexuelle et sexiste généralisée qui a mené à l’enlèvement de femmes et de filles, et par des attaques lancées au hasard dans les villages, lesquelles ont conduit notamment au pillage à grande échelle et au vol de milliers de têtes de bétail[144] ».

On dénombre, au Soudan du Sud, 1,8 million de PDI, dont 200 000 cherchent une protection dans les bases de maintien de la paix des Nations Unies, qui ne sont pas conçues à cette fin. M. Marshall a aussi indiqué que des milliers de gens sont en situation de grave insécurité alimentaire, et la famine n’est pas loin[145].

Les recommandations de M. Marshall ont surtout porté sur des mesures non relatives à l’immigration que le gouvernement du Canada pourrait prendre. Il a recommandé notamment que le Canada s’engage dans la voie d’une « diplomatie vigoureuse » avec le gouvernement du Soudan du Sud, qu’il envisage de mettre en place un embargo sur les armes, qu’il fournisse du personnel militaire et policier à la mission de l’ONU, qu’il soutienne les coalitions de la société civile vouées à la paix et qu’il accorde du financement au plan d’intervention humanitaire de l’ONU et aux programmes de protection et d’aide aux réfugiés du HCR[146]. M. Marshall a conclu, à propos de la situation au Soudan du Sud, que « la solution la plus évidente pour protéger les personnes vulnérables consiste à opérer un changement politique qui mettra fin à l’orchestration de la violence principalement par l’élite politique du pays[147] ».

9. Assyriens d’Iraq et de Syrie

Le gouvernement canadien, comme d'autres gouvernements d'ailleurs, devrait accorder une attention particulière aux minorités ethniques et religieuses de l'Irak et de la Syrie, et tout particulièrement aux peuples syriens, assyriens, mandéens et yézidis, qui sont les autochtones du pays. Si nous ne les protégeons pas en les réinstallant, ces communautés vont disparaître à jamais[148].

Aneki Nissan, président du Centre for Canadian-Assyrian Relations, a comparu devant le Comité pour parler du sort réservé aux assyriens, « une communauté ethnique transnationale membre des églises chrétiennes du Moyen-Orient; ils sont autochtones[149] ». Il a expliqué que les villes et les villages du Nord de l’Iraq peuplés majoritairement d’assyriens ont été attaqués par Daesh[150]. Des centaines de personnes ont été prises en otage et jetées en prison. Dans la ville de Qamichli, des lieux de culte et des commerces assyriens ont aussi été attaqués. M. Nissan a dit que, devant cette flambée de violence, des assyriens ont dû quitter leurs foyers ancestraux. Beaucoup se sont déplacés vers le Nord de l’Iraq où ils vivent dans des « conditions abominables ».

M. Nissan a insisté sur l’urgence d’assurer la sécurité des populations. Il a recommandé que, en premier lieu, le Canada accélère le traitement des demandes d’asile des assyriens[151]. Il a aussi estimé qu’une plus grande assistance devait être apportée aux assyriens du Moyen‑Orient, que ce soit de l’aide aux personnes déplacées ou de l’argent, des armes et de la formation à la nouvelle unité de protection des plaines de Ninive[152].

10. Yézidis

Ce dont les yézidis ont besoin, c'est que le monde entier se porte à la défense de l'humanité[153].

Les yézidis forment une minorité religieuse qui compte environ 700 000 personnes et qui se concentrait dans le Nord de l’Iraq, dans la région du mont Sinjar et sur les plaines de Ninive avant août 2014. Le Comité a appris que le yézidisme, fondé il y a 6 000 ans, est l’une des plus anciennes religions du Moyen‑Orient[154]. Mirza Ismail, représentant de la Yezidi Human Rights Organization, a dit que les « yézidis ont une religion, une culture et une langue propres[155] ».

Le 15 juin 2016, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a publié un rapport intitulé “They Came to Destroy: ISIS Crimes Against the Yazidis[156], dans lequel on peut lire que les yézidis sont victimes de génocide. Le rapport adresse également différentes recommandations à la communauté internationale. Le gouvernement du Canada a lui aussi reconnu ce génocide. Nadia Murad Basee Taha, jeune yézidie de 22 ans, a parlé de façon saisissante, dans son témoignage personnel, du génocide et de l’esclavage sexuel dont elle a été victime.

Mme Murad a décrit comment sa vie quotidienne d’avant, qui reposait sur les études et les amitiés, et la coexistence pacifique avec les autres religions, ont volé en éclats lorsque Daesh a attaqué son village du Sinjar, dans le Nord de l’Iraq, le 3 août 2014[157]. Elle a dit que, après 12 jours de siège, les combattants de Daesh ont regroupé les villageois à l’école et ont séparé les hommes des femmes. Les hommes ont été abattus – plus de 700 en deux heures. Les femmes et les jeunes filles ont été emmenées à Mossoul, en Iraq, où elles ont été gardées en captivité, converties de force, violées et vendues comme esclaves. Les jeunes garçons ont été emmenés à des camps d’entraînement où on les a convertis de force et entraînés pour en faire des kamikazes et des soldats pour Daesh[158].

Cette violence et cette destruction méthodiques, selon ce qu’a relaté Mme Murad, se sont répétées dans des centaines de villages yézidis, et la « situation perdure aujourd'hui pour plus de 3 000 femmes et enfants en Iraq et en Syrie[159] ».

Des témoins ont dit au Comité que plus de 500 000 yézidis sont aujourd’hui déplacés. Parmi eux, bien plus de 100 000 se trouvent dans des camps de réfugiés du HCR, où ils sont tenus à l’écart des autres réfugiés parce que les yézidis ne sont pas en sécurité parmi eux[160]. M. Ismail a parlé d’un attentat ciblant des réfugiés yézidis dans le camp grec de réfugiés de Skaramagas (et montré des images d’après l’attentat), précisant que ce n’était pas un incident isolé[161]. Il a indiqué que les réfugiés yézidis risquent de subir les attaques des partisans de Daesh et d’autres musulmans en Grèce, en Turquie, en Syrie et même en Allemagne.

D’autres témoins ont exprimé l’avis que la protection temporaire accordée aux réfugiés yézidis est insuffisante. Ils estiment que l’aide humanitaire et les soins de santé offerts dans les camps du Nord de l’Iraq font défaut : l’aide ne se rend pas à ceux qui en ont besoin, et les rations alimentaires sont insuffisantes[162]. Selon Raija-Liisa Schmidt-Teigen, de la Bourse du Samaritain de l'Iraq du Nord, « les yézidis savent qu’ils vivent dans une culture et un contexte où on n’éprouve que mépris à leur endroit. Ils ne s’attendent pas à ce qu’on les traite bien dans des systèmes qui normalement devraient être à leur service[163] ».

Pour certains témoins, le même constat s’applique au HCR. Aux dires de M. Ismail, les employés du HCR en Turquie et en Syrie « adoptent une attitude violemment discriminatoire envers les yézidis »; il a des preuves montrant que les réfugiés yézidis doivent attendre de quatre à cinq ans pour passer une entrevue[164].

Les témoins ont expliqué que de nombreux yézidis préféreraient partir plutôt que retourner au Sinjar parce qu’ils n’ont plus confiance dans les peshmergas (forces kurdes) et l’armée iraquienne, qui n’ont pas su les protéger contre Daesh[165]. Ils ont dit qu’ils avaient été abandonnés par leurs voisins et qu’on les avait empêchés de fuir et de s’armer[166].

Au chapitre de la réinstallation, le Comité a écouté le point de vue d’Opération Ezra, un groupe de Winnipeg qui tente de parrainer sept familles yézidies. La première venait tout juste d’arriver après une attente de 18 mois. À propos du long temps d’attente, le représentant d’Opération Ezra, Lorne Weiss, a fourni l’explication suivante : « Dans le cadre d'un processus ordinaire de parrainage privé de réfugiés, ce n'est probablement pas si mal pour immigrer dans un pays comme le Canada. Mais dans le cas de personnes dont la vie est constamment en danger, qui n'ont pas accès à des services, dans une région où les fonctionnaires canadiens ne viennent même pas dans les camps de réfugiés, c'est inacceptable[167]. »

En s’appuyant sur leur expérience, les représentants d’Opération Ezra ont jugé que le programme de parrainage privé « présente beaucoup trop d'obstacles pour constituer une solution efficace ». Ont été mentionnés un processus de demande compliqué et très long, une longue attente pour passer une entrevue et pour subir les examens médicaux et les vérifications de la sécurité, la difficulté d’amener les réfugiés aux bureaux des visas, qui se trouvent souvent à des heures ou à des jours de voiture depuis les camps, de même que les plafonds imposés au nombre de signataires d’entente de parrainage, qui limitent les nouvelles demandes[168]. Ces problèmes ont été confirmés par les représentants de l’Or Shalom Syrian Refugee Initiative qui, en collaboration avec ses partenaires de la région métropolitaine de Vancouver, a mobilisé plus de 3 000 personnes et recueilli plus de 775 000 $, qui serviront à parrainer plus de 100 réfugiés kurdes de Syrie[169].

Enfin, le Comité a appris que des yézidis ont du mal à obtenir une protection suffisante parce qu’ils sont déplacés dans leur pays plutôt que des réfugiés au sens que l’entendent les Nations Unies. Ils n’ont pas les ressources nécessaires pour se rendre dans un autre pays, et il leur est difficile d’obtenir un passeport et d’autres documents officiels de Bagdad[170].

Les témoins ont été unanimes à dire que le Canada devrait agir sans délai pour accueillir les yézidis afin qu’ils puissent vivre en sécurité, et « offrir un refuge à ce peuple menacé d'extinction[171] ». Certains ont indiqué, de manière générale, que les yézidis devraient passer en priorité en vue de la réinstallation au Canada, tandis que d’autres ont présenté au Comité une proposition concrète de programme qui permettrait de réinstaller 400 femmes et filles en tirant profit de la disposition relative aux motifs d’ordre humanitaire et du soutien des parrains privés[172]. D’autres ont exprimé le souhait qu’un grand effort de réinstallation – qui concernerait de 5 000 à 10 000 personnes – soit déployé; d’autres, enfin, ont proposé le parrainage privé d’un grand nombre de familles yézidies en vue de leur réinstallation et de leur intégration.

Pour ce qui est de la sélection des yézidis à réinstaller, plusieurs groupes ont exhorté le Comité à recommander au gouvernement du Canada d’accorder la priorité aux femmes et aux filles qui, après avoir été gardées en captivité par Daesh, ont réussi à fuir. D’autres ont recommandé d’accueillir les yézidis qui ont quitté la Syrie et l’Iraq, mais qui se trouvent toujours en Turquie ou en Grèce[173]. M. Weiss a fait valoir qu’il « serait très facile de faire sortir » de Turquie et d’aider les yézidis qui se sont réfugiés dans ce pays.

Plusieurs témoins ont dit que le gouvernement devrait fournir des ressources et du soutien aux yézidis réinstallés au Canada, étant donné la violence qu’ils ont subie.

Par ailleurs, des témoins ont encouragé le gouvernement du Canada à trouver un moyen de régler les problèmes qui affligent le traitement des demandes et qui nuisent à la réinstallation des yézidis au moyen du programme des RPG et de celui des RPSP. Ils ont également recommandé des solutions telles que l’utilisation de véhicules blindés pour permettre aux agents des visas de se rendre en toute sécurité aux entrevues, ainsi que la tenue d’entrevues par téléphone[174]. Pour sa part, la Yezidi Human Rights Organization a offert de faciliter les déplacements vers les régions yézidies et la désignation de victimes candidates à la réinstallation[175]. Il a aussi été proposé d’utiliser les évaluations du HCR ou même de demander au HCR ou à l’Organisation internationale pour les migrations de réaliser les entrevues pour le compte du Canada[176].

Enfin, des témoins ont présenté des recommandations qui ne concernaient pas l’immigration et qui relevaient plutôt de ministères autres que celui de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté. Par exemple, la Bourse du Samaritain a recommandé « que les députés du Parlement qui participent aujourd'hui s’assurent que les Affaires mondiales Canada et les autres ministères examinent en profondeur et agissent selon ce que le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a esquissé[177] ». D’autres témoins ont recommandé plus précisément que le Canada fournisse de l’aide humanitaire aux yézidis dans les camps (dans le Nord de l’Iraq en particulier), qu’il défende le renvoi d’un dossier de crimes de guerre à la Cour pénale internationale, qu’il se porte au secours des plus de 3 000 yézidis qui sont toujours en captivité, et qu’il contribue à établir une région autonome d’Iraq où les yézidis pourraient vivre en sécurité[178].

Compte tenu des témoignages convaincants qu’il a entendus sur les besoins criants de différents groupes en matière de protection, et du fait que son étude n’a pas permis de prendre connaissance des besoins de bien d’autres populations tout aussi dignes d’être protégées, le Comité estime que le Canada peut et doit en faire plus. Afin de poursuivre dans le sens des efforts déjà déployés par les diverses parties concernées, comme les groupes communautaires, le HCR et les responsables gouvernementaux qui ont participé activement à l’étude, nous présentons les recommandations suivantes au gouvernement du Canada.

AMÉLIORER LE PROGRAMME DE RÉINSTALLATION

Le Canada est un chef de file mondial en matière de réinstallation de réfugiés, ce qu’il démontre non seulement en appliquant des programmes très efficaces, mais aussi en coopérant avec le HCR et en participant à la recherche de solutions durables sur la scène internationale. Cela dit, le traitement des visas des réfugiés réinstallés est parfois trop long pour un programme destiné à sauver des vies. Le programme canadien de parrainage privé revêt une importance critique, car il permet au pays d’en faire plus que si le gouvernement s’occupait de tout. Il offre aussi aux nouveaux arrivants un excellent soutien lorsqu’ils sont accueillis au Canada. Compte tenu de ces réalités, le Comité formule les recommandations suivantes.

RECOMMANDATION 1

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada continue de mener, à l’échelle internationale, des discussions sur la réinstallation afin d’augmenter le nombre de personnes qui peuvent être réinstallées, compte tenu du niveau sans précédent de déplacements forcés enregistré actuellement.

RECOMMANDATION 2

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada accepte de prime abord le statut de réfugié pour certaines populations à risque afin de faciliter leur réinstallation et de réduire le fardeau imposé au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

RECOMMANDATION 3

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada examine la faisabilité de recourir davantage au Programme de protection d’urgence dans les cas confirmés de génocide en cours.

ENVISAGER D’ACCROÎTRE L’ADMISSIBILITÉ À LA RÉINSTALLATION AFIN DE TENIR COMPTE DES GENS QUI VIVENT DANS LEUR PAYS D’ORIGINE

De nombreux témoins ont dit au Comité qu’il était difficile d’utiliser les programmes de réinstallation du Canada afin d’aider les gens qui vivent toujours dans leur pays d’origine. Les témoins ont souligné qu’il est tout simplement impossible, pour certaines personnes, d’essayer de quitter leur pays pour se réfugier ailleurs; d’autres tentent de le faire, mais ils courent alors de grands risques. En outre, le Comité a appris que des parrains du secteur privé sont disposés et prêts à apporter leur aide de façons différentes, et que leur générosité est toujours aussi grande. La création d’une nouvelle catégorie de personnes parrainées par le secteur privé, qui vivent toujours dans leur pays d’origine, mettrait à profit les forces du parrainage privé, comme la capacité des parrains de cibler les personnes vulnérables dont il faudrait recommander la réinstallation et qui méritent un soutien ferme pour la réinstallation, tout en réduisant en partie les sensibilités politiques et diplomatiques de cette catégorie. Pour cette raison, compte tenu des besoins en protection des gens qui se trouvent toujours dans leur pays d’origine, et de la volonté des parrains canadiens du secteur privé, le Comité formule la recommandation suivante.

RECOMMANDATION 4

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada envisage d’établir une catégorie de réinstallation ouvert au secteur privé, pour les personnes qui ont besoin de protection et qui vivent dans leur pays d’origine, semblable à l’ancienne catégorie de personnes de pays source.

UTILISER LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX MOTIFS D’ORDRE HUMANITAIRE

Comme il a été mentionné plus haut, les dispositions discrétionnaires relatives aux « motifs d’ordre humanitaire » qu’on trouve dans la LIPR constituent l’outil le mieux adapté à l’heure actuelle pour assister les gens qui ont besoin d’aide humanitaire, que ce soit en raison d’une catastrophe naturelle, d’une crise internationale ou d’un cas particulier de persécution religieuse ou d’une autre nature. L’établissement d’une politique publique dans le cadre de ces dispositions permet au gouvernement d’appuyer un groupe précis. Cependant, en l’absence d’exigences concernant la production de rapports sur le sujet, il est difficile d’évaluer l’efficacité actuelle du recours aux motifs d’ordre humanitaire, de même que son efficacité éventuelle. Pour remédier à ce problème, le Comité formule la recommandation suivante.

RECOMMANDATION 5

Qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada traite de son application des politiques publiques en fonction des motifs d’ordre humanitaire dans le cadre du rapport ministériel annuel, selon l’article 94 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, afin de mieux faire connaître les programmes existants.

CONCLUSION

Tout au long de son étude, le Comité a entendu des témoignages personnels de souffrances terribles. Il tient à remercier les hommes et les femmes qui lui ont raconté leur histoire et leurs peines de manière aussi simple et franche. Lorsque l’on considère le niveau record de déplacements forcés dans le monde, il faut rendre hommage à tous ceux et celles qui viennent au secours des plus vulnérables. Le Comité salue leur travail remarquable. Cela dit, la réinstallation n’est qu’un des éléments de la solution. Nombreux sont ceux qui vivent aujourd’hui dans des conditions extrêmement pénibles, et le Comité espère que, parmi eux, le plus grand nombre possible auront la chance de trouver rapidement la sécurité et la stabilité, de même qu’un foyer permanent où ils pourront refaire leur vie en toute dignité. Le Comité espère également que son rapport et ses recommandations aideront à renforcer la contribution du Canada à la protection des groupes vulnérables.


[1]              Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de la Chambre des communes (CIMM), Procès-verbal, 16 juin 2016.

[2]              Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés [HCR], Global Trends: Forced Displacement in 2015, p. 2 [Global Trends] [en anglais seulement].

[3]              Les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays ou à l’interne (PDI) sont des personnes qui, sous l’effet de la force ou de contraintes, ont fui ou quitté leur foyer ou leur lieu de résidence habituel, notamment en raison de situations de violence généralisée, de violations des droits de l’homme ou de catastrophes naturelles ou anthropiques, et qui n’ont pas franchi les frontières internationalement reconnues d’un État. Alexander Betts, Gil Loescher et James Milner, UNHCR: The Politics and Practice of Refugee Protection, 2e éd., 2012, p. 133.

[4]              Internal Displacement Monitoring Centre, Global Report on Internal Displacement , 2016 [en anglais seulement].

[5]              Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, al. 3(2)a) [LIPR].

[6]              CIMM, Témoignages, 42législature, 1re session, réunion no 22, 18 juillet 2016, 1305 (Heather Jeffrey, directrice générale, Assistance humanitaire internationale, ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement).

[7]              La LIPR fournit également le cadre pour la détermination du statut de réfugié au Canada et prévoit l’obligation du Canada, en vertu du droit international, de ne pas renvoyer de personnes qui seraient autrement exposées à des persécutions ou à un danger. Ces aspects de la protection ne font cependant pas l’objet de la présente étude et ne seront pas abordés à fond dans le rapport.

[8]              Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Rapport sur les plans et les priorités 2014–2015, Programme 2.2 : Protection des réfugiés.

[9]              Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2012-227, art. 144 à 147 [RIPR].

[10]           RIPR, art. 151.1.

[11]           À titre d’exemple, ce processus a été utilisé lorsque le Canada a fait venir 5 000 Kosovars en 1999 (Opération Parasol) [en anglais seulement].

[12]           IRCC, Vérifications et évaluations, Évaluation du Programme des réfugiés parrainés par le gouvernement et du Programme d’aide au réétablissement, « 3.5 Programme de protection d’urgence », 2011.

[13]           RIPR, DORS/2011-222, Résumé de l’étude d’impact de la réglementation, p. 2156.

[14]           RIPR, art. 138.

[15]           RIPR, par. 139(3) et (4).

[16]           RIPR, par. 139(2).

[17]           RIPR, DORS/2011-222, Résumé de l’étude d’impact de la réglementation, p. 2157.

[18]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 22, 18 juillet 2016, 1350 (Robert Orr, sous-ministre adjoint, Opérations, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration).

[19]           Ibid., 1400 (Michael Casasola, officier responsable au Canada, Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés).

[20]           Ibid., 1420.

[21]           Ibid., 1445.

[22]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1320 (David Manicom, sous-ministre adjoint délégué, Politiques stratégiques et de programmes, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration).

[23]           Ibid., 1340.

[24]           Les facteurs justifiant cette exception sont : l’impossibilité pour les organisations de recommandation de travailler dans ces régions; les besoins de réinstallation de personnes de la région, selon les organisations de recommandation qui possèdent des connaissances approfondies sur cette région; l’importance relative des besoins de réinstallation des personnes de la région, compte tenu de ces besoins à l’échelle mondiale. RIPR, par. 140.3(3).

[25]           Pour de plus amples renseignements, voir IRCC, Guide du Programme de parrainage privé de réfugiés – 2. Programme de parrainage privé de réfugiés, 2.3 Qui peut présenter une demande de parrainage privé?.

[26]           Les répondants communautaires sont des organismes qui peuvent parrainer des réfugiés, des groupes de cinq sont citoyens canadiens ou résidents permanents de cinq membres ou plus, qui agissent ensemble pour parrainer un réfugié afin de le faire venir au Canada. Ils fournissent soutien financier et affectif pendant une année complète. RIPR, al. 53(1)b).

[28]           Les besoins spéciaux sont définis au paragraphe 157(2) du Règlement : un grand nombre de membres de la famille; un traumatisme découlant de la violence ou de la torture, une invalidité physique ou mentale et les effets de la discrimination systémique.

[30]           Gouvernement du Canada, Archivé – Le nouveau gouvernement du Canada facilitera l’immigration des Vietnamiens apatrides qui vivent aux Philippines, 22 mai 2007; Appendice E, 2008 Guide opérationnel OP 4 Traitement des demandes présentées en vertu de l’article 25 de la LIPR.

[32]           IRCC, « Réponse d’IRCC à une demande d’information présentée par le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration, le 18 juillet 2016 ».

[33]           RIPR, DORS/2011-222, Résumé de l’étude d’impact de la réglementation, p. 2158.

[34]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no  27,  juillet 2016, 1320 (David Manicom).

[35]           Ibid., 1335.

[37]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1355 (David Manicom).

[38]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no25, 19 juillet 2016, 1505 (Brian Dyck, président, Association des signataires d’entente de parrainage de réfugiés du Canada).

[39]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no  22, 18 juillet 2016, 1405 (Michael Casasola).

[40]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1510 (Brian Dyck).

[41]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1610 (Audrey Macklin, professeure, Faculté de droit, Université de Toronto, à titre personnel); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1500 (Janet Dench, directrice, Conseil canadien pour les réfugiés).

[42]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1500 (Janet Dench).

[43]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1015 (Rév. Majed El Shafie, fondateur et président, One Free World International); et 1005 (Rabea Allos, directeur, Conseil catholique de parrainage pour réfugiés).

[44]           Ibid., 1005 (Rabea Allos).

[45]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1450 (Chantal Desloges, avocate, Desloges Law Group, à titre personnel).

[46]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1220 et 1225 (John Clayton, directeur des programmes et des projets, Bourse du Samaritain Canada; et Raija-Liisa Schmidt-Teigen, directrice générale d’un centre communautaire, Bourse du Samaritain de l’Iraq du Nord).

[47]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1225 (Christine Morrissey, conseillère spéciale, Rainbow Refugee).

[48]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1040 (Rév. Majed El Shafie); Opération Ezra : Lorne Weiss, président, Synagogue Shaarey Zedek; Nafiya Naso, représentante de la communauté yézidie de Winnipeg; et Rabea Allos).

[49]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1315 (David Manicom).

[50]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no  24, 19 juillet 2016, 1500 (Janet Dench).

[51]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no  26, 20 juillet 2016, 1040 (Rabea Allos).

[52]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no  27, 20 juillet 2016, 1355 (David Manicom).

[53]           Rév. Majed El Shafie, One Free World International, mémoire, p. 7.

[54]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no24, 19 juillet 2016, 1045 (David Berson, coprésident, Or Shalom Syrian Refugee Initiative, Or Shalom Synagogue); Rainbow Railroad, mémoire, p. 5; PEN Canada, Écrivains en danger, mémoire, juillet 2016, p. 4.

[55]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no24, 19 juillet 2016, 1205 (Gloria Nafziger, coordonatrice pour les réfugiés et les migrants, Bureau de Toronto, Amnistie internationale).

[56]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no26, 20 juillet 2016, 0905 (Drew Boyd, directeur des opérations, The Sentinel Project for Genocide Prevention).

[57]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 22, 18 juillet 2016, 1430 (Michael Casasola).

[58]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges).

[59]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1045 (David Berson).

[60]           Jonathan Fon, vice-président, Canadian Asian Community Think Thank, mémoire, p. 2.

[61]           Gouvernement du Canada, Guide de demande de parrainage privé de réfugiés (IMM 5413), « Appendice A – Lignes directrices financières ».

[62]           Dans le cadre du Programme des prêts aux immigrants, une aide est généralement offerte sous forme de prêts pour la réinstallation des réfugiés, qui s’appliquent aux frais de transport jusqu’au Canada, ainsi qu’aux coûts des examens médicaux et des documents de voyage.

[63]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1045 (David Berson).

[64]           Ibid., 1145 (Gloria Nafziger).

[65]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 22, 18 juillet 2016, 1405 (Michael Casasola).

[66]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, 19 juillet 2016, 1025 (Murad Ismael, directeur exécutif, Yazda); aussi 1045 (David Berson); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 0915 (Chris Lewa, directrice, projet Arakan).

[67]           Rainbow Railroad, mémoire, p. 5.

[68]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges).

[69]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1735 (Narindarpal Singh Kang, avocat procureur, The Law Firm of Kang and Company).

[70]           Ibid., 1805 (Balpreet Singh, conseiller juridique, World Sikh Organization of Canada).

[71]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1605 (Audrey Macklin); 1615 (Martin Mark, directeur, Office for Refugees of the Archdiocese of Toronto); 1755 (Narindarpal Singh Kang); et 1805 (Balpreet Singh); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1220 (Christine Morrissey); CIMM, Témoignages, 42législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1405 (Michael Bociurkiw, ancient porte-parole, Mission de surveillance spéciale en Ukraine, Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, à titre personnel); et 1500 (Janet Dench); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 0915 (Chris Lewa);  Rainbow Railroad, mémoire ;de Jasdeep S. Mattoo, avocat-procureur, Kang and Company, mémoire.

[72]           Rainbow Railroad, mémoire, p. 5.

[73]           RIPR, DORS/2011-222, Résumé de l’étude d’impact de la réglementation, p. 2148.

[74]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 22, 18 juillet 2016, 1340 (Sarita Bhatla, directrice générale, Affaires des réfugiés, ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration).

[75]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1345 (David Manicom).

[76]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1605 (Audrey Macklin); et 1805 (Balpreet Singh).

[77]           Ibid., 1605 (Audrey Macklin).

[78]           Ibid., 1755 (Narindarpal Singh Kang).

[79]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1605 (L’hon. Yonah Martin, sénatrice, leader adjointe de l’opposition au Sénat, à titre personnel); et 1615 (Martin Mark); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1030 (Mirza Ismail, président, Yezidi Human Rights Organization International); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges).

[80]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges).

[81]           Ibid.

[82]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 22, 1405 (Michael Casasola).

[83]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1145 (Gloria Nafziger); et 1315 (Michael Bociurkiw).

[84]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1145 (Gloria Nafziger); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges); et 1505 (Janet Dench).

[85]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1455 (Chantal Desloges).

[86]           Ibid., 1505 (Janet Dench).

[87]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1145 (Gloria Nafziger).

[88]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1720 (Balpreet Singh, conseiller juridique, World Sikh Organization of Canada).

[89]           Ibid.

[90]           Ibid.

[91]           Ibid., 1725.

[92]           Ibid. (Tarjinder Bhullar, à titre personnel).

[93]           Ibid., 1725 (Balpreet Singh).

[94]           Ibid., 1750 (Narindarpal Singh Kang).

[95]           Ibid., 1750 (Narindarpal Singh Kang); et 1805 (Jasdeep Mattoo).

[96]           Ibid., 1810 (Balpreet Singh); et 1810 (Tarjinder Bhullar).

[97]           CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 910 (Chris Lewa, directrice, Le projet Arakan).

[98]           Ibid.

[99]           Ibid.

[100]         Ibid.

[101]         Ibid., 0915.

[102]         Ibid.

[103]         Ibid.

[104]         Ibid.

[105]         Ibid.

[106]         Ibid.

[107]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1600 (L’hon. Yonah Martin, sénatrice, leader adjointe de l’opposition au Sénat, à titre personnel).

[108]         Comité sénatorial permanent des droits de la personne, Les nombreux oubliés : Droits de la personne et transfuges nord-coréens, juin 2016.

[109]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 23, 18 juillet 2016, 1600 (L’hon. Yonah Martin).

[110]         Ibid., 1605.

[111]         Ibid., 1635.

[112]         Comité sénatorial permanent des droits de la personne, Les nombreux oubliés : Droits de la personne et transfuges nord-coréens, juin 2016, p. 19, recommandation mentionnée dans les témoignages présentés à la réunion no 23, 18 juillet 2016, 1635.

[113]         Rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Érythrée, Mme Sheila B. Keetharuth, mémoire, p. 2.

[114]         Ibid., p. 3.

[115]         Ibid., p. 9.

[116]         Ibid., p. 10.

[117]         Rainbow Railroad, mémoire, p. 1.

[118]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1155 (Dylan Mazur, directeur général, Vancouver Association for Survivors of Torture).

[119]         Rainbow Railroad, mémoire, p. 2.

[120]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1155 (Dylan Mazur).

[121]         Rainbow Railroad, mémoire, p. 3.

[122]         Ibid.

[123]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1200 et 1215 (Christine Morrissey, conseillère spéciale, Rainbow Refugee).

[124]         Ibid., 1200.

[125]         Ibid., 1200 (Dylan Mazur; Christine Morrissey).

[126]         Ibid., 1215 (Christine Morrissey; Chad Walters, membre du conseil d’administration, Fountain of Hope).

[127]         Ibid. (Christine Morrissey).

[128]         Ibid., 1200.

[129]         PEN Canada, Écrivains en danger, mémoire, juillet 2016, p. 1.

[130]         Ibid.

[131]         Ibid., p. 2.

[132]         Ibid., p. 4.

[133]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1355 (Michael Bociurkiw).

[134]         Ibid., 1310 (Michael Bociurkiw); et 1320 (Aleksandr Galkin, directeur, The Right to Protection).

[135]         Ibid., 1320 (Aleksandr Galkin).

[136]         Ibid., 1310 (Michael Bociurkiw).

[137]         Ibid., 1320 (Aleksandr Galkin).

[138]         Ibid., 1320 (Iryna Dovhan, à titre personnel); 1340 (Oleksandr Gryshchenko, à titre personnel).

[139]         Ibid., 1335 (Gennadii Afanasiev, à titre personnel).

[140]         Ibid., 1315 (Michael Bociurkiw).

[141]         Ibid., 1415.

[142]         Ibid., 1420.

[143]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1210 (David Marshall, chef d'équipe, Mission d’évaluation du Soudan du Sud, Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme).

[144]         Ibid.

[145]         Ibid.

[146]         Ibid., 1215.

[147]         Ibid.

[148]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1005 (Rabea Allos).

[149]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1205 (Aneki Nissan, président, Centre for Canadian-Assyrian Relations).

[150]         Le nom de Daesh vient de l’arabe. Le groupe est aussi connu sous le nom d’État islamique en Iraq et en Syrie (EI ou ISIS en anglais) ou de celui d’État islamique en Iraq et au Levant (EIIL).

[151]         Ibid.

[152]         Ibid.

[153]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1020 (Murad Ismael, directeur exécutif, Yazda, à titre personnel).

[154]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1020 (Nafiya Naso, représentante, Communauté yézidie de Winnipeg, Operation Ezra); Yazda, Global Yazidi Organization, mémoire, juillet 2016.

[155]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1025 (Mirza Ismail, président, Yezidi Human Rights Organization International).

[156]         Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Conseil des droits de l'homme, “They Came to Destroy”: ISIS Crimes Against the Yazidis, A/ HRC/32/CRP.2, 15 juin 2016.

[157]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1005 (Nadia Murad Basee Taha, activiste pour les droits de la personne, à titre personnel).

[158]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1005 (Nadia Murad Basee Taha); Opération Ezra, notes d’allocution, p. 4.

[159]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1010 (Nadia Murad Basee Taha).

[160]         Opération Ezra, notes d’allocution, p. 2; CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1020 (Nafiya Naso).

[161]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1025 (Mirza Ismail).

[162]         Ibid., 1030.

[163]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1220 (Raiija‑Liisa Schmidt‑Teigen).

[164]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1025 (Mirza Ismail).

[165]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1220 (Raiija-Liisa Schmidt-Teigen).

[166]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1030 (Mirza Ismail).

[167]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1105 (Lorne Weiss).

[168]         Ibid., 1025.

[169]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1040 (David Berson).

[170]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1220 (Raiija-Liisa Schmidt-Teigen).

[171]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 26, 20 juillet 2016, 1025 (Lorne Weiss).

[172]         Ibid., 1020 (Rév. El Shafie, fondateur et président, One Free World International).

[173]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 27, 20 juillet 2016, 1225 (John Clayton); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1030 (Mirza Ismail).

[174]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1045 (David Berson).

[175]         Ibid., 1120 (Mirza Ismail).

[176]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 25, 19 juillet 2016, 1450 (Chantal Desloges); CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1045 (David Berson).

[177]         La Bourse du Samaritain, mémoire, p. 1.

[178]         CIMM, Témoignages, 42e législature, 1re session, réunion no 24, 19 juillet 2016, 1025 (Murad Ismael); et 1030 (Mirza Ismail); Marsha Matheson, à titre personnel, mémoire, p. 1; One Free World International, mémoire, p. 5.