Répercussions sur la vie privée de la Loi sur la communication d’information ayant trait à la sécurité du Canada : Un examen prématuré
- Le 18 juin 2015, la 41e Législature du Canada a adopté le projet de loi C-51, la Loi antiterroriste de 2015.
Cette Loi comprenait de nouvelles dispositions sur le partage d’information à
l’intention des organismes de sécurité nationale du Canada. Ces dispositions
formaient la Loi sur la communication d’information ayant trait à la sécurité
du Canada (LCISC).
- Pendant les délibérations du
Comité permanent de la sécurité publique et nationale, divers témoins ont parlé
de la nécessité de ces nouveaux outils de partage de l’information et des
préoccupations potentielles sur la vie privée pouvant découler de leur application.
Comme ces nouveaux outils n’étaient pas encore en place lors de l’examen initial
de la mesure législative provisoire, ces préoccupations étaient théoriques et
reposaient sur des présomptions, et non pas sur des faits.
- Le 18 octobre 2016, le Comité permanent de
l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et
de l’éthique de la Chambre des communes (« le Comité ») a adopté
la motion suivante :
- Que le Comité entreprenne une étude de la Loi sur la communication d’information
ayant trait à la sécurité du Canada, des répercussions qu’elle a eues sur la
vie privée depuis sa mise en œuvre et des modifications qui pourraient être
proposées, s’il y a lieu, au cours des consultations du gouvernement sur la
sécurité nationale et de son étude sur le sujet.
- Le but de cette étude n’était
pas de revoir les préoccupations potentielles en matière de sécurité liées à la
LCISC. Le mandat du Comité consistait plutôt à revoir les répercussions concrètes
sur la vie privée de la Loi depuis sa mise en œuvre il y a moins de deux ans.
- Ce comité a entendu nombre
des personnes qui ont témoigné devant le Comité permanent de la sécurité
publique et nationale lors de son examen du projet de loi C‑51[1]. Bien que
le caucus conservateur apprécie le temps et les efforts de ces témoins, les
témoignages sur les préoccupations potentielles relatives à la vie privée
reposaient une fois de plus largement sur des théories et des présomptions.
- Dans le but
de remplir le mandat de cette étude, le comité a demandé des témoignages
factuels sur les répercussions des nouveaux outils de communication de
l’information de la LCISC sur le droit à la vie privée des Canadiens. À cette
fin, le comité a entendu les organismes de sécurité nationale canadiens qui
utilisent ces nouveaux outils, les organismes de surveillance de la sécurité
nationale canadiens qui examinent l’application de ces nouveaux outils, et le
commissaire à la vie privée, qui évalue tout impact des nouvelles lois sur le
droit à la vie privée des Canadiens.
- Application de la LCISC par les
organismes de sécurité nationale du Canada
- Le but
premier de la LCISC est de permettre aux organismes de sécurité nationale du
Canada de protéger efficacement les Canadiens. Comme l’indique la section 3.1 du
rapport majoritaire, cet outil joue un rôle important dans la sécurité
nationale :
- Un certain
nombre de responsables des institutions fédérales ont décrit les avantages de
la LCISC et affirmé qu’elle est un nouvel outil important pour communiquer l’information
de façon efficace et améliorer la sécurité nationale.
- En plus de protéger les
Canadiens, l’un des principaux objectifs de la LCISC est d’offrir cette protection
tout en maintenant le droit à la vie privée des Canadiens. L’élément central de
cette étude est de déterminer si cet équilibre est atteint. Bien que les
organismes de sécurité nationale du Canada reconnaissent que la LCISC aidera à
assurer notre sécurité nationale, il est difficile de déterminer concrètement
l’impact de ces outils sur la vie privée en raison du peu de temps écoulé
depuis l’entrée en vigueur de la Loi.
- En fait, bien que nombre de
ces organismes de sécurité nationale aient affirmé qu’il n’y a pas
d’utilisation abusive ou de mauvaise utilisation de ces nouvelles dispositions
sur la communication de l’information[2],
ils ont ajouté que la LCISC est relativement nouvelle, et qu’en conséquence,
ils n’ont pas encore eu la possibilité de pleinement déterminer ses effets et
ses impacts[3].
À la lumière du témoignage des organismes de sécurité nationale, nous estimons
qu’il est actuellement impossible de déterminer si l’application des nouvelles
mesures sur la communication de l’information a des répercussions inappropriées
sur la vie privée des Canadiens.
- Examen de
l’application de la LCISC par les organismes de surveillance de la sécurité
nationale
- Pour que ce comité puisse
déterminer les effets concrets de la LCISC sur la vie privée des Canadiens, il
est essentiel d’examiner le témoignage des organismes de surveillance de la
sécurité nationale.
- Le comité a entendu M.
Jean-Pierre Plouffe, le commissaire
du Centre de la sécurité des télécommunications. Pendant son témoignage,
M. Plouffe a dit que bien qu’il examine l’important travail du Centre de la sécurité des
télécommunications (CSTC), il est peu probable que le CSTC va partager
ou recevoir de l’information en vertu de la LCISC.[4]
- De plus, le comité a entendu
la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes
relatives à la Gendarmerie royale du Canada et le Comité de surveillance des activités de renseignement
de sécurité du Service canadien du renseignement de sécurité. Ces deux
organismes de surveillance ont dit au comité qu’ils sont en train de faire les
premiers examens de l’application et de l’utilisation des nouvelles
dispositions sur la communication d’information de la LCISC.[5]
- Compte tenu du témoignage des
organismes de surveillance de la sécurité nationale sur leur examen en cours de
l’application de la LCISC, il est impossible de déterminer s’il y a des effets
concrets sur le droit à la vie privée des Canadiens depuis l’entrée en vigueur
de la LCISC.
- Examen des effets sur
la vie privée par le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada
- Le Commissariat à la
protection de vie privée du Canada joue un rôle critique pour déterminer les
effets de la LCISC sur la vie privée. Aussi, le commissaire a informé le comité
que son bureau a entrepris un examen des institutions du gouvernement du Canada
sur l’application de la LCISC au cours des six premiers mois suivant son entrée
en vigueur, soit du 1er août 2015 au 31 janvier 2016.
- Le commissaire a également dit
au comité que son bureau va procéder à la deuxième phase de sa vérification
afin de déterminer de façon plus exhaustive les effets de la LCISC sur la vie
privée des Canadiens.[6] Comme l’examen est toujours en cours, le comité ne peut pas pleinement
déterminer les effets concrets des dispositions de la LCISC sur le droit à la
vie privée des Canadiens.
- Les membres conservateurs du
Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des
renseignements personnels et de l’éthique de la Chambre des communes
pensent qu’il n’y a pas de priorité plus grande que la protection de la
sécurité des Canadiens. Il est primordial de donner à nos organismes de
sécurité nationale les outils requis pour le faire et de leur permettre de
travailler avec nos alliés. Nous pensons également qu’il est important d’assurer
que notre sécurité nationale est mise en équilibre avec le droit à la vie
privée des Canadiens. Aussi, nous pensons que le mandat de cette étude – examiner
les effets concrets sur la vie privée des nouveaux outils de communication de
l’information de la LCISC – est extrêmement important.
- Bien que certains témoins
aient fait part de préoccupations relatives à la LCISC, ce sont exactement les
mêmes points de vue que ceux exprimés lors de l’examen du projet de loi C-51,
qui reposent sur des théories et des présomptions. La 41e Législature
a étudié les mérites de ces préoccupations et voté en faveur de l’adoption du
projet de loi C-51 et des outils de communication de l’information de la LCISC.
Le mandat du comité ne consistait pas à déterminer si la LCISC aurait dû
être adoptée, mais à déterminer s’il y a eu des effets sur le droit à la vie
privée des Canadiens depuis l’entrée en vigueur de la LCISC.
- Les témoignages ne permettent
malheureusement pas de répondre à cette question. Comme la LCISC est entrée en
vigueur relativement récemment, les organismes de sécurité nationale n’ont pas
eu l’occasion de pleinement utiliser ces nouveaux outils. En outre, les
organismes de surveillance de la sécurité nationale et le Commissariat à la
protection de la vie privée sont en train d’examiner les conséquences de ces
nouveaux outils.
- Voilà pourquoi les membres
conservateurs du comité pensent qu’il est prématuré et imprudent que le comité
propose des changements substantiels à la LCISC.
- À cet effet, nous
recommandons :
Recommandation 1 : Que
le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des
renseignements personnels et de l’éthique entreprenne une
étude de la Loi sur la communication d’information ayant trait à la sécurité du
Canada et de ses répercussions sur la vie privée depuis son entrée en vigueur
dans 3 ans.
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