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FOPO Rapport du Comité

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EXAMEN DES MODIFICATIONS APPORTÉES À LA LOI SUR LES PÊCHES EN 2012 : RENFORCER LA PROTECTION DU POISSON ET DE SON HABITAT ET LA GESTION DES PÊCHES CANADIENNES

INTRODUCTION

Les océans et les eaux intérieures du Canada abritent une multitude d’écosystèmes où se trouvent certaines des zones de pêche les plus riches au monde. Les pêches commerciales et récréatives contribuent largement à l’économie et à la viabilité de nombreuses collectivités rurales. Toutefois, le poisson n’est pas une simple denrée, c’est aussi un aliment culturel essentiel à la sécurité alimentaire d’une multitude de collectivités. De nombreux poissons, comme le saumon, sont indispensables pour les communautés autochtones en raison de leur importance culturelle et spirituelle. Par conséquent, la conservation et la protection du poisson et de son habitat sont de grands enjeux du point de vue de l’économie, de la viabilité sociale, de la culture et de l’environnement.

La Loi sur les pêches (la Loi) est la principale loi fédérale en matière de gestion des ressources halieutiques canadiennes. Elle contient également des dispositions visant la conservation et la protection du poisson et de son habitat[1]. De nombreuses modifications législatives apportées à la Loi en 2012 sont entrées en vigueur en novembre 2013. Compte tenu des préoccupations dont divers segments de la population ont fait part au gouvernement du Canada à l’égard de ces changements ainsi que de la lettre de mandat du ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, qui demande à celui‑ci de « revoir les modifications à la Loi […] apportées par le gouvernement précédent », le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes a convenu, le 19 septembre 2016 :

[d’]examine[r] et [d’]étudie[r] le champ d’application de la Loi sur les pêches, et en particulier, l’interdiction de causer des dommages sérieux aux poissons; comment l’interdiction est mise en œuvre pour protéger le poisson et l’habitat du poisson; la capacité de Pêches et Océans Canada à assurer la protection du poisson et de son habitat par l’examen des projets, le suivi et l’application de la Loi; les définitions de dommages sérieux aux poissons et des pêches commerciale, récréative et autochtone; le recours aux autorités réglementaires en vertu de la Loi sur les pêches; et d’autres dispositions connexes de la Loi, et de fournir ses recommandations dans un rapport à la Chambre[2].

Le Comité a tenu 10 réunions à Ottawa entre le 31 octobre et le 12 décembre 2016 pour étudier le dossier. Pendant ces réunions, il a examiné des mémoires et entendu de nombreux témoins, en personne et par vidéoconférence, notamment : le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne; des représentants de Pêches et Océans Canada (MPO), de gouvernements provinciaux, d’organisations autochtones, de groupes de pêcheurs, d’organisations non gouvernementales, et de diverses associations d’industries; ainsi que des scientifiques. Les membres du Comité tiennent à remercier les participants qui ont fait part de leurs connaissances et de leurs recommandations au Comité au cours de cette étude.

Le Comité signale que le MPO a tenu, à l’automne 2016, des consultations publiques en ligne sur la Loi et sur la protection de l’habitat du poisson et qu’il a accepté de fournir au Comité les commentaires formulés à cet égard[3]. Or, le Comité n’a pas reçu tous les commentaires soumis par le public au cours des consultations en ligne à temps pour pouvoir les examiner et en tenir compte dans les recommandations formulées dans le présent rapport[4]. Le Comité reconnaît toutefois que les consultations ministérielles constituent un processus distinct de son étude, bien qu’il soit complémentaire.

Le Comité est heureux de déposer le présent rapport, dans lequel il adresse des recommandations au gouvernement fédéral. Les recommandations qui suivent sont fondées sur les témoignages et les mémoires présentés par les participants à l’étude.

CONTEXTE

A.  Compétence fédérale

Aux termes de la Loi constitutionnelle de 1867, les pêches côtières et intérieures relèvent du Parlement fédéral alors que la propriété, les droits civils et l’administration des terres publiques relèvent des gouvernements provinciaux. La Loi sur les pêches a été adoptée en 1868 en vertu de cette compétence. La Loi concerne principalement la gestion des pêches, la conservation et la protection du poisson et de son habitat et la prévention de la pollution des eaux.

Le gouvernement fédéral conserve l’autorité finale pour la gestion de toutes les pêches et de l’habitat du poisson, mais, les tribunaux ayant confirmé la compétence des provinces sur la pêche intérieure, un régime de délégation des pouvoirs administratifs fédéraux aux provinces a été institué pour la pêche de plusieurs espèces. La gestion de l’habitat du poisson, quant à elle, demeure de compétence fédérale[5].

La compétence fédérale en matière de réglementation des pêches et de protection du poisson et de son habitat ne transparaît pas seulement dans l’historique de la Loi sur les pêches, aux termes de laquelle le gouvernement fédéral est tenu d’établir des normes juridiques nationales, mais elle découle aussi des nombreuses obligations internationales du Canada, telles qu’énoncées dans des traités comme l’Accord des Nations Unies sur la pêche et les stocks de poissons et la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique.

B.  Efforts déployés en 2007 pour moderniser la Loi sur les pêches

Après l’ajout des dispositions sur la protection de l’habitat et le renforcement des dispositions sur la prévention de la pollution en 1977, la Loi n’a subi aucun changement marquant jusqu’en 2012. En 2007, on a tenté de remanier la Loi en y apportant des modifications législatives. Cette tentative a pris la forme du projet de loi C‑32, Loi concernant le développement durable des pêches dans les eaux côtières et les eaux intérieures du Canada, qui a été déposé à la Chambre des communes le 29 novembre 2007[6]. Le projet de loi C‑32 est toutefois mort au Feuilleton lors du déclenchement des élections en septembre 2008[7].

Le projet de loi C‑32 tenait compte de la tendance de plus en plus marquée, à l’échelle mondiale, à adopter des stratégies de gestion des pêches mettant l’accent sur la gestion écosystémique, le développement durable et le principe de précaution. En incluant un préambule et des principes d’orientation qui seraient appliqués à la gestion des pêches de même qu’à la conservation et à la protection du poisson et de son habitat, le projet de loi répondait à ces préoccupations. Le préambule proposé reconnaissait également l’importance d’un accès stable aux ressources halieutiques pour la viabilité économique des collectivités de pêcheurs et de l’industrie de la pêche.

C.  Modifications apportées à la Loi sur les pêches en 2012

1.  Mesures de protection du poisson et de son habitat

L’une des plus importantes modifications apportées à la Loi en 2012 est le fait que les mesures de protection sont dorénavant axées sur la productivité du poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou du poisson dont dépend une telle pêche, plutôt que sur l’ensemble des poissons et de leur habitat, comme c’était le cas auparavant. Par ailleurs, avant les modifications législatives apportées en 2012, des dispositions de la Loi interdisaient « de tuer des poissons si ce n’est dans le cadre d’une activité de pêche » (paragraphe 32(1)) et « d’exploiter des ouvrages ou entreprises entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation [DDP] de l’habitat du poisson » (paragraphe 35(1)). Dans les deux cas, des exceptions pouvaient être autorisées par le ministre ou prévues par règlement, ce qui permettait que des répercussions se fassent sentir dans certaines conditions.

En 2012, les deux dispositions ont été remplacées par le nouveau paragraphe 35(1), qui interdit « d’exploiter un ouvrage ou une entreprise ou d’exercer une activité entraînant des dommages sérieux à tout poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou à tout poisson dont dépend une telle pêche ». Cette interdiction s’accompagne de cinq exceptions relatives à des autorisations et à des mesures d’ordre réglementaire. Le nouveau terme « dommages sérieux » est défini ainsi au paragraphe 2(2) : « la mort de tout poisson ou la modification permanente ou la destruction de son habitat ». L’« habitat du poisson », quant à lui, est défini ainsi : « toute aire dont dépend, directement ou indirectement, sa survie, notamment les frayères, les aires d’alevinage, de croissance ou d’alimentation et les routes migratoires ».

Les modifications apportées à la Loi permettent également au ministre de désigner des lieux ayant une importance écologique pour les poissons (paragraphe 37(1.1)). Le ministre peut ainsi exiger un niveau de protection plus élevé pour ces zones, ce qui forcerait les promoteurs à soumettre leurs plans à un examen s’ils proposent d’entreprendre des activités dans ces zones. Cependant, jusqu’à maintenant, les lieux ayant une importance écologique n’ont été définis dans aucun Règlement. Certains témoins, notamment West Coast Environmental Law, ont recommandé le recours à cette disposition utile[8].

2.  Facteurs et objet visant à guider le ministre pour la délivrance d’autorisations et la prise de règlements

Le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne a le pouvoir d’émettre des autorisations qui permettent l’exécution de travaux, d’activités ou d’initiatives causant des dommages sérieux au poisson, dans certaines conditions. L’article 6 de la Loi établit les facteurs dont le ministre doit tenir compte avant de prendre des règlements ou de délivrer des autorisations :

  • l’importance du poisson visé pour la productivité continue des pêches commerciale, récréative et autochtone;
  • les objectifs en matière de gestion des pêches;
  • l’existence de mesures et de normes visant à éviter, à réduire ou à contrebalancer les dommages sérieux causés à tout poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou à tout poisson dont dépend une telle pêche;
  • l’intérêt public.

Le paragraphe 6(1) précise que le ministre doit tenir compte de ces facteurs pour « assurer la durabilité et la productivité continue des pêches commerciale, récréative et autochtone ». Les termes « commerciale », « récréative » et « autochtone », s’agissant de la pêche, ont été ajoutés au paragraphe 2(1).

3.  Cadre pour la conclusion d’ententes avec les ministères fédéraux, les provinces et d’autres intervenants et pouvoir du ministre de mettre en œuvre des programmes et des projets avec des partenaires

Les articles 4.1 à 4.3 ajoutés à la Loi en 2012 fournissent un nouveau cadre légal pour orienter de futures ententes avec les provinces en vue d’atteindre les objectifs de la Loi. Ils permettent également au gouverneur en conseil de déclarer que certaines dispositions de la Loi ou de ses règlements ne s’appliquent pas dans une province si un accord fédéral‑provincial prévoit qu’une disposition d’une loi provinciale a un effet équivalant à celui d’une disposition des règlements fédéraux.

L’article 4.4 confère au ministre le pouvoir de mettre en œuvre des programmes et des projets en collaboration avec des partenaires aux fins de la Loi et d’accorder un appui financier pour faciliter leur mise en œuvre. Le Programme de partenariats relatifs à la conservation des pêches récréatives a été créé en 2013, conformément à l’article 4.4.

En ce qui concerne la délégation de pouvoir, le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne peut également, par règlement (alinéa 35(2)c) et sous‑alinéa 43(1)(i.3)), accorder à d’autres personnes ou entités le pouvoir de délivrer des autorisations aux termes de la Loi modifiée du moment que leurs processus réglementaires cadrent avec les objectifs, l’objet et les facteurs décrits dans la Loi[9]. Le Protocole d’entente de 2013 entre l’Office national de l’énergie et Pêches et Océans Canada est un exemple d’entente de délégation. Conformément à ce protocole d’entente, l’ONE est chargé d’évaluer les effets potentiels sur le poisson et son habitat des projets de pipelines et de lignes de transport d’électricité de son ressort. Si l’Office détermine que le promoteur du projet doit obtenir une autorisation ou un permis, le MPO en sera avisé et aura la responsabilité de délivrer l’autorisation ou le permis requis.

4.  Nouveaux pouvoirs de réglementation

Voici quelques‑uns des pouvoirs de réglementation les plus importants incorporés à la Loi en 2012 :

  • Le Règlement définit clairement les renseignements et les documents que les promoteurs doivent soumettre lorsqu’ils présentent une demande d’autorisation aux termes de l’alinéa 35(2)b) de la Loi.
  • Une fois la demande d’autorisation reçue, le Ministère est tenu de la traiter et de prendre une décision quant à la délivrance de l’autorisation, le cas échéant, dans les délais prescrits par ce règlement.
  • Les normes provenant de sources externes (c’est‑à‑dire qui n’ont pas été élaborées par le MPO) peuvent être reconnues, au besoin, pour orienter les activités dans l’eau ou à proximité.
  • Une équivalence des régimes réglementaires pourrait être établie si le régime provincial respecte ou dépasse les dispositions de la Loi ou les règlements afférents[10].

En vertu de la Loi modifiée, le ministre peut, par règlement, autoriser le rejet de substances nocives appartenant à une certaine catégorie dans des eaux ou des lieux appartenant à une certaine catégorie ou découlant de l’exploitation d’un ouvrage ou d’une entreprise ou de l’exercice d’une activité appartenant à une catégorie d’ouvrages, d’entreprises ou d’activités précise (paragraphe 36(5.2)). En application des paragraphes 35(3) et 36(5.2), le Règlement sur les activités d’aquaculture a été publié le 26 juin 2015. Il établit les conditions autorisant le dépôt de substances novices dans le cadre de l’exploitation d’une installation d’aquaculture.

De nouveaux pouvoirs permettent aussi de prendre toute autre mesure d’ordre réglementaire régissant les ouvrages, les entreprises ou les activités ou visant les eaux de pêche pour lesquels aucune autorisation n’est requise pour causer des dommages sérieux (paragraphes 35(2) et 35(3)). L’outil d’autoévaluation créé par le MPO appelé « Projets près de l’eau » découle de ces nouvelles dispositions. On y énumère les types de plans d’eau, les projets et les critères pour lesquels un examen du MPO n’est pas obligatoire. Même s’il est établi qu’un examen n’est pas requis pour un projet, les promoteurs du projet doivent respecter les Mesures visant à éviter des dommages causés aux poissons et aux habitats des poissons, y compris ceux des espèces aquatiques en péril énoncées par le MPO. Si l’autoévaluation d’un projet détermine que celui‑ci doit être soumis à un examen du MPO, les promoteurs doivent présenter une demande à cet effet.

ARTICLE 35 : DOMMAGES SÉRIEUX AUX POISSONS

A.  Définition et mise en application de l’interdiction de causer des dommages sérieux aux poissons

Selon Justyna Laurie-Lean, de l’Association minière du Canada, les modifications apportées à la Loi en 2012 ont, « dans les faits, […] élargi le champ d’application des interdictions prévues à l’article 35 et multiplié les cas où une autorisation et des mesures d’atténuation sont nécessaires[11] ». Selon Manitoba Hydro, « l'ajout du terme "activité" dans la protection du poisson contre tout dommage sérieux offre, selon nous, une meilleure protection pour les pêches, tout comme l'obligation de rendre compte de tous les incidents entraînant un dommage sérieux, l'obligation d'intervenir pour remédier aux impacts, la prolongation de deux à cinq ans des délais accordés pour le dépôt de plaintes et l'établissement d'une infraction en cas de manquement aux conditions des permis[12] ». Ron Bonnett[13], de la Fédération canadienne de l’agriculture, et Fawn Jackson[14], de la Canadian Cattlemen’s Association, ont expliqué au Comité que l’interdiction prévue dans les versions précédentes de la Loi en matière de détérioration, de destruction et de perturbation (DDP) de l’habitat du poisson et visant les ouvrages et les entreprises relatifs à des infrastructures artificielles, comme les tranchées de drainage et les canaux d’irrigation, ont fait en sorte que « les agriculteurs se sont butés à des coûts et à des obstacles importants ». D’après eux, les plans d’eau artificiels ne devraient pas être considérés comme un habitat du poisson. Ron Bonnett a ajouté qu’il y a eu « de nombreux exemples d’incohérences dans les activités d’application de la loi, de surveillance et de conformité […] au Canada » lorsque la Loi précédente était en vigueur.

Le Comité soupçonne que l’application de l’interdiction de détériorer, de détruire et de perturber l’habitat du poisson aux entreprises ou ouvrages reliés à des infrastructures artificielles aux termes des versions précédentes de la Loi s’explique par le fait que ces infrastructures peuvent servir d’habitat au poisson. Une étude scientifique menée en 2008 révèle que « les drains agricoles […] (fossés) permettent l’écoulement nécessaire des eaux des terres cultivées et peuvent aussi fournir un habitat pour le maintien des peuplements de poissons indigènes[15] ». Les auteurs de cette étude recommandent « de continuer à reconnaître les fossés comme des habitats pour les poissons dans le cadre de la loi des pêches (Loi sur les pêches du Canada); les gestionnaires responsables des fossés et de l’habitat des poissons devraient chercher des méthodes d’entretien des fossés qui soient logiques et défendables scientifiquement et qui visent à préserver la biodiversité et les habitats des poissons, tout en tenant compte des besoins particuliers de l’agriculture ». De même, la Ville de Winnipeg estime qu’« un secteur qui peut sembler présenter peu d’intérêt à un moment l’année peut remplir une fonction très importante à un autre moment » et elle invite les promoteurs de projets à « supposer, en règle générale, que tous les fossés, ruisseaux et marécages constituent des habitats pour le poisson[16] » [traduction]. Le Comité constate que l’article 30 de la Loi, qui donnait au ministre le pouvoir d’exiger l’installation et l’entretien de dispositifs de retenue pour empêcher les poissons d’accéder à des prises d’eau, des fossés, des canaux ou des chenaux, a été abrogé en 2012.

De nombreux autres participants à l’étude ont informé le Comité que la définition de « dommages sérieux » présente dans la Loi actuelle, qui a remplacé la disposition relative à la DDP de l’habitat, crée une certaine confusion quant à la mise en application de l’interdiction. David Browne, de la Fédération canadienne de la faune, a fait remarquer qu’il y a un « manque de clarté quant à la façon dont l’interdiction au titre de l’article 35 s’applique aux altérations temporaires de l’habitat du poisson[17] ». Brett Favaro, quant à lui, a remis en question l’emploi de l’expression « modification permanente » de l’habitat du poisson dans la définition de « dommages sérieux ». Voici ce qu’il a dit :

Qu’est-ce que « permanent » veut dire? Est-ce que cela signifie la durée d’une vie humaine? Peut-on détruire une rivière si on promet de la réparer dans 50 ans? Ou est-ce que cela est considéré comme une altération temporaire? On n’a jamais obtenu des réponses satisfaisantes à ces questions, et la seule conclusion raisonnable était que le libellé allait faire en sorte qu’il est plus facile de causer des dommages à l’habitat du poisson[18].

West Coast Environmental Law[19] a fait savoir au Comité que l’affaire Courtoreille c. Canada est la seule affaire dans laquelle la Cour a commenté les modifications apportées au paragraphe 35(1) de la Loi, jugeant que celles‑ci « accro[issen]t […] le risque de dommages pour le poisson » et « ont fait disparaître la notion de protection de l’habitat du poisson[20] » :

[91] C’est donc dire que les modifications apportées à la Loi sur les pêches ont fait disparaître la notion de protection de l’habitat du poisson du paragraphe 35(1) de cette Loi. Le demandeur a fait valoir que, par suite de cette modification, on ne mettait plus l’accent sur la protection de l’habitat du poisson, mais plutôt sur la protection de la pêche, ce qui offre nettement moins de protection pour l’habitat du poisson, et les mots « dommages sérieux » autorisent à perturber et à altérer de façon non permanente l’habitat […].
[101] […] En outre, pour les raisons que le demandeur a énoncées plus tôt, le fait d’avoir modifié le paragraphe 35(1) de la Loi sur les pêches accroît manifestement le risque de dommages pour le poisson.

Selon Kristi Miller-Saunders, il est également problématique d’exiger que la mort du poisson soit considérée comme un dommage sérieux et elle a fait observer ce qui suit :

[…] un poisson stressé dans son environnement risque d’être fragilisé physiologiquement sans pour autant mourir immédiatement dans l’habitat où il a subi ce stress initial. Il est possible en effet que cet affaiblissement du système immunitaire se manifeste sous la forme d’une incapacité pour ces poissons à s’adapter et à se développer dans de nouveaux habitats. Dans ce cas, il est impossible d’observer la mort du poisson et l’impact qu’a eu l’agent stressant[21].

Zo Ann Morten, de l’organisme The Pacific Streamkeepers Federation, était d’accord avec l’énoncé précédent et elle a signalé qu’un simple changement dans l’environnement, comme la qualité ou la température de l’eau, pouvait faire un tort considérable au poisson et l’empêcher de passer au stade suivant de sa vie, sans que cela soit considéré comme un « dommage sérieux » aux termes de la Loi actuelle[22]. Stephen Sutton, de la Fédération du saumon atlantique, a ajouté que mettre l’accent sur les « dommages sérieux » pour prévenir la détérioration ou la destruction permanente de l’habitat du poisson n’est pas suffisant pour contrer les effets considérables des activités humaines sur la productivité du saumon sauvage :

Le saumon atlantique a des exigences très précises en matière d’habitat en certains points précis de son cycle évolutif et à des périodes précises de l’année. Une dégradation temporaire des habitats essentiels à des moments stratégiques peut avoir des effets importants et durables. Par exemple, la perturbation temporaire de la qualité de l’eau, de son débit ou de sa température à des moments cruciaux de l’automne pourrait rendre inutilisables d’importantes frayères et diminuer beaucoup la productivité du saumon pendant encore bien des années[23].

Stephen Sutton a informé le Comité qu’il est tout aussi inadéquat de centrer la notion de « dommages sérieux » sur la prévention de la mort du poisson. Il a laissé entendre que de nombreuses activités humaines, comme la salmoniculture en cages en filet, ont des effets « qui diminuent la santé et la productivité à long terme des populations de saumons sans en tuer ».

Dan Gibson, de l’Association canadienne de l’hydroélectricité, a lui aussi dit au Comité que la définition de « dommages sérieux » est ambiguë et qu’elle pourrait être interprétée de différentes façons, tant par les intervenants que par le personnel du MPO. Puisque la notion de « dommages sérieux » est au cœur de l’application de l’article 35, des approches divergentes quant à sa mise en œuvre pourraient créer un climat d’incertitude chez les promoteurs de projets. M. Gibson a fait valoir que la mort du poisson pourrait être « interprétée comme englobant la perte d’un poisson, sans que cela produise d’effet important sur les pêches dans leur ensemble[24] ». James Duncan, de Développement durable Manitoba, a présenté au Comité des arguments semblables. À son avis, le manque de clarté de la définition de « dommages sérieux » fait en sorte qu’il est difficile de déterminer avec certitude dans quels cas cette interdiction s’applique[25]. Derek Sturko, sous ministre de l’Agriculture de la Colombie Britannique, a aussi exprimé ses inquiétudes dû au fait que les agents des pêches fédéraux ne mèneraient pas d’enquêtes sur les infractions aux règlements étant donné des difficultés afin de prouver que des « dommages sérieux » ont eu lieu[26].

Jay Walmsley, de l’Association canadienne de l’électricité, a recommandé que cette interdiction « mett[e] l’accent sur la durabilité des pêches par la protection des populations ou des stocks de poissons, et non pas des poissons individuellement », à l’exception des espèces en péril, lorsque des dommages causés à un individu peuvent menacer toute la population d’une espèce[27]. La Nicola Tribal Association[28] et la A‑Tlegay Fisheries Society[29], toutes deux de la Colombie‑Britannique, ont fait remarquer au Comité, tout comme Jay Walmsley, que la Loi actuelle ne définit pas en quoi consiste la « durabilité » des pêches.

D’après Linda Nowlan, de la West Coast Environmental Law, et Margot Venton, d’Ecojustice, l’interdiction de détériorer, de détruire et de perturber l’habitat du poisson est interprétée par les tribunaux depuis 40 ans[30] et « la portée de la disposition concernant la DDP est très vaste pour englober les multiples façons dont l’activité humaine peut causer des dommages à l’habitat du poisson[31] ». Selon elles, « [l]'interprétation judiciaire de la disposition concernant la DDP établit clairement que tout dommage causé à l’habitat, même temporairement, constitue un défi, et elle n’exige pas que le dommage ou le préjudice occasionné aux poissons soit permanent ». Margot Venton a ajouté que le MPO doit établir « des seuils et des objectifs fondés scientifiquement pour l’habitat du poisson au niveau des bassins versants et des écosystèmes » avant de consentir une autorisation touchant un bassin versant ou un écosystème.

Bien qu’il ait aussi recommandé le rétablissement de l’interdiction concernant la DDP, l’organisme Canards Illimités Canada a toutefois fait observer que, aux termes de la Loi précédente, bon nombre de ses « activités et […] chantiers qui visaient la restauration, l’amélioration ou la gestion des milieux humides étaient considérés comme des cas de "destruction des habitats de poisson" par le Ministère[32] ». À son avis, cette interprétation de la Loi a réduit « la capacité [de l’organisme] à mettre en œuvre de nouveaux programmes de conservation visant à protéger et à conserver des habitats essentiels à la sauvagine et à d’autres espèces animales qui dépendent des milieux humides dont les poissons ».

Dans le mémoire présenté par Metro Vancouver, le Comité a aussi appris que, conformément à la réglementation actuelle, l’eau potable du robinet qui contient du chlore est considérée comme une substance potentiellement nocive causant des dommages sérieux au poisson[33]. De l’avis de Metro Vancouver, cette approche peut présenter des difficultés quant à la gestion et à l’exploitation des réseaux publics de distribution de l’eau. Par conséquent, l’organisme a recommandé un « assouplissement des interdictions catégoriques » lorsque les risques réels pour les plans d’eau où vivent des poissons sont très faibles compte tenu du taux de dissipation du chlore, car les risques encourus pour l’exploitation des réseaux publics de distribution d’eau seraient très élevés si le déversement de chlore était interdit. Les paragraphes précédents de la présente section reflètent des témoignages divergents ne s’appuyant sur aucune preuve scientifique ou juridique pour affirmer que les modifications apportées en 2012 ont élargi ou réduit la portée de l’application de l’article 35.

B.  Priorité accordée aux pêches commerciale, récréative et autochtone

1.  Approche préventive en matière de gestion des ressources halieutiques

D’après de nombreux participants à la présente étude, l’accent mis par la Loi actuelle sur la protection de la productivité du poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou du poisson dont dépend une telle pêche, est incompatible avec l’approche préventive en matière de gestion des pêches. Selon Brett Favaro, par exemple, cette priorité n’a aucun fondement scientifique et, à l’heure actuelle, « nous n’avons pas la capacité scientifique de distinguer les poissons selon qu’ils soutiennent une pêche ou non[34] ». Il a ajouté que, en matière de gestion des pêches, et particulièrement dans le contexte des changements climatiques, l’approche prudente consiste à ne pas poser l’« hypothèse […] très risquée » voulant qu’un poisson ou un autre organisme aquatique n’a pas d’importance dans l’écosystème, et plutôt à se concentrer sur la protection de l’intégrité de l’ensemble de l’écosystème puisque l’habitat du poisson est le meilleur indicateur de la productivité du poisson.

2.  Approche écosystémique en matière de gestion des ressources halieutiques

Elizabeth Hendriks, du Fonds mondial pour la nature-Canada, a déclaré au Comité qu’une approche écosystémique en matière de gestion des ressources halieutiques doit tenir compte de la biodiversité et de la protection de tous les poissons, et non seulement du poisson visé par la pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou du poisson dont dépend une telle pêche[35]. Les membres du Comité remarquent aussi que, d’après le rapport de consultation final du MPO sur l’examen de la Loi sur les pêches, la nette majorité de participants (90 %) à la consultation souhaite que la Loi protège tous les poissons et leur habitat, que ces poissons soient pêchés ou non[36].

Kristi Miller‑Saunders a souligné que l’accent mis sur la protection par la Loi ne protège pas les populations de poissons qui ont atteint un plancher record et qui ne sont plus suffisamment abondantes pour en autoriser la pêche, comme c’est le cas de nombreuses populations de saumon sauvage du Pacifique[37]. À son avis, aux termes de l’actuel article 35, il se pourrait que ces poissons « ne soient plus suffisamment protégés pour pouvoir rebondir et recouvrer une certaine viabilité à l’avenir ». Cela irait à l’encontre de la Politique sur le saumon sauvage du MPO[38], qui préconise la conservation de la diversité génétique des populations sauvages pour garantir la durabilité à long terme des ressources halieutiques.

Le Comité prend également note de la préoccupation exprimée par la Nicola Tribal Association au sujet de la nécessité de protéger le poisson pour garantir la viabilité des prédateurs comme les ours, les aigles et les orques[39]. D’après la Ville de Maple Ridge, en Colombie‑Britannique, la priorité accordée actuellement par la Loi à la pêche commerciale, récréative ou autochtone « amoindrit l’importance des liens écologiques qui existent entre les divers éléments des bassins hydrographiques dont dépendent les poissons et les pêches qui y sont associées[40] ». Le Newfoundland and Labrador Environment Network a donc proposé de « remplacer le mot "poisson" par "faune aquatique" dans toutes les parties de la Loi et [de] définir comme il faut les mots "vie aquatique" en tenant compte du réseau alimentaire complet[41] ».

Toutefois, de l’avis des promoteurs de projets, comme Manitoba Hydro, l’accent mis sur la pêche commerciale, récréative ou autochtone et sur le poisson dont dépend une telle pêche ne réduit pas la protection de l’habitat du poisson[42]. Il n’en demeure pas moins que, selon le témoignage présenté par l’Association minière du Canada, « les explications nécessaires [fournies par le MPO] pour appliquer la loi de façon précise et uniforme dans tout le pays sont insuffisantes, notamment en ce qui concerne la façon de distinguer les activités de pêche commerciale, autochtone et récréative ainsi que les poissons visés par ces activités, ou la manière d’évaluer la productivité des pêches[43] ».

3.  Droits de pêche des Autochtones

Selon les Autochtones qui ont participé à l’étude, l’ajout et la teneur de la définition de « pêche autochtone » incorporée à la Loi en 2012 ont réduit la portée de la protection du poisson et de l’habitat du poisson reconnue par les droits et les perspectives autochtones[44]. Le gouvernement Mi’kmaq de Listuguj, au Québec, a fait valoir que les droits de pêche des Autochtones vont bien au‑delà des fins alimentaires, sociales et rituelles[45]. Ces droits comprennent également la pêche commerciale, avec ou sans permis, comme l’a confirmé la Cour suprême du Canada dans l’affaire Marshall. La Première Nation Biigtigong Nishnaabeg, de l’Ontario, a affirmé que la pêche autochtone devrait inclure, au minimum :

[la] pêche pratiquée à des fins économiques, [la] pêche protégée en vertu de traités historiques, [la] pêche traditionnelle actuellement non active en raison des mesures de conservation ou pour toute autre raison, [la] pêche pratiquée en vertu de permis octroyés par des Premières Nations et [la] pêche pratiquée sans permis, mais autorisée par la Loi[46].

Quant à la Première Nation malécite du Nouveau‑Brunswick, elle a laissé entendre qu’en ne protégeant que les espèces visées par une pêche ou le poisson dont dépend une telle pêche, l’actuel article 35 gèle les droits de pêche des Autochtones dans le temps[47]. La Nicola Tribal Association[48] et la Lower Fraser Fisheries Alliance[49], qui se trouvent toutes deux en Colombie‑Britannique, ont soutenu que la vente, l’échange et le troc sont visés par la définition de pêche commerciale dans la Loi actuelle, bien que les tribunaux aient déjà établi que ces activités font partie des droits de pêche autochtones. Par ailleurs, l’Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle‑Écosse a signalé que l’actuel article 35 semble classer la pêche autochtone en troisième place, après les pêches commerciale et récréative. À son avis, cet état de fait rabaisse l’importance de la pêche autochtone, qui est protégée par la Constitution[50].

Le Comité se souvient de l’affaire Courtoreille c. Canada jugée en Cour fédérale et constate que la plupart des participants autochtones à l’étude ont réclamé l’abrogation de l’interdiction de causer des « dommages sérieux » et des définitions de pêche commerciale, récréative ou autochtone qui y sont associées, ainsi que le rétablissement de la disposition portant sur la détérioration, la destruction et la perturbation de l’habitat à l’article 35. De l’avis de ces participants, la Loi devrait protéger toutes les espèces de poisson, et non seulement celles faisant l’objet d’une pêche active, ou les espèces dont dépend cette dernière. Comme l’a dit l’Assemblée des chefs du Manitoba :

Les modifications apportées à la Loi sur les pêches constituent une redéfinition arbitraire et capricieuse de concepts sacrés et inaliénables. Le fait qu’aucune protection fédérale ne soit accordée aux espèces de poisson qui ne sont pas actuellement visées par une activité de pêche va à l’encontre des lois et de la vision du monde des Autochtones[51].

C.  Amélioration de la protection du poisson et de son habitat, ainsi que de la gestion des pêches

La majorité des membres du Comité reconnaît que l’habitat du poisson s’est dégradé lorsque l’ancienne Loi était en vigueur et depuis l’adoption, en 1986, de la Politique de gestion de l’habitat du poisson, et que cette dégradation se poursuit, comme l’a fait remarquer David Browne[52]. Le rapport du printemps 2009 du commissaire à l’environnement et au développement durable a signalé que depuis l’adoption de « la Politique de l’habitat [en 1986], […] de nombreux volets de la Politique n’ont été que partiellement mis en œuvre par le Ministère, voire pas du tout[53] ».

Comme l’a dit David Schindler, le manque actuel de données environnementales, auquel s’ajoute une réduction de la surveillance et de la capacité d’application de la Loi par le MPO au cours des dernières années, fait en sorte qu’il n’est pas possible d’effectuer une analyse quantitative des modifications apportées à la Loi en 2012 relativement à la protection du poisson et de son habitat, trois ans à peine après l’entrée en vigueur de ces modifications[54]. Linda Nowlan a toutefois rappelé au Comité que « le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC, place les poissons d'eau douce et les poissons marins très haut sur la liste des espèces en danger. En fait, le président du COSEPAC dit qu'en tant que groupe, ils constituent le second groupe d'espèces le plus menacé du Canada et que le principal risque pour la plupart de ces poissons d'eau douce, c'est la dégradation et la perte de l'habitat[55]. » Kevin Stringer, du MPO, a dit espérer que le présent examen fournira l’occasion de moderniser la Loi en accordant au MPO l’autorité réglementaire et les ressources nécessaires pour effectuer une analyse quantitative de l’incidence des modifications législatives sur la durabilité du poisson et de son habitat[56].

1.  Dommages sérieux et interdiction de détériorer, de détruire et de perturber l’habitat

La majorité des membres du Comité croit, comme les participants à l’étude, que la définition de « dommages sérieux » n’est pas assez précise et conclut que la notion de « dommage sérieux » présente dans la Loi actuelle ne tient pas pleinement compte des effets néfastes sur le poisson des perturbations subies par son habitat. D’après les témoignages entendus, l’interdiction de causer des « dommages sérieux » n’est pas conforme au Cadre décisionnel pour les pêches intégrant l’approche de précaution du MPO ni à l’engagement du Canada sur Les principes d’une gestion écosystémique des pêches.

Bien qu’il ne se soit peut-être pas écoulé assez de temps pour évaluer pleinement les effets sur le terrain des modifications législatives apportées en 2012, nous estimons qu’il est important d’adopter une approche préventive en matière de protection du poisson et de son habitat et de gestion des pêches. Par conséquent, le Comité recommande:

Recommandation 1

Que le libellé du paragraphe 35(1) de la Loi sur les pêches en vigueur le 29 juin 2012 soit rétabli et ainsi rédigé : « Il est interdit d’exploiter un ouvrage ou une entreprise ou d’exercer une activité entraînant la détérioration, la destruction ou la perturbation de l’habitat du poisson. » Que soit supprimée de la Loi la notion de « dommages sérieux causés au poisson ».

Recommandation 2

Que Pêches et Océans Canada adopte une approche écosystémique en matière de protection et de restauration de l’habitat du poisson afin de préserver la totalité du réseau alimentaire du poisson par :

  1. l’adoption de principes fondamentaux en matière de durabilité;
  2. la protection de l’intégrité écologique de l’habitat du poisson; et
  3. la protection de zones essentielles de l’habitat du poisson;

Recommandation 3

Que, dans le cadre du processus de modification de la Loi sur les pêches, on revoie et peaufine la définition antérieure de la détérioration, de la destruction et de la perturbation (DDP) de l’habitat du poisson, en raison de la possibilité que cette définition soit appliquée de façon incohérente et des limites qu’elle imposait aux organismes gouvernementaux en matière de gestion des pêches et des habitats dans l’intérêt de la productivité du poisson.

Recommandation 4

Que Pêches et Océans Canada mette l’accent à l’article 6 de la Loi sur la protection des habitats prioritaires qui contribuent considérablement à la production du poisson.

Recommandation 5

Que Pêches et Océans Canada accorde un financement accru à la recherche portant sur les sciences écosystémiques.

2.  Élargissement de la protection à tous les habitats

Le Comité a aussi entendu les témoignages de Susanna Fuller, du Centre d’action écologique, et de Trevor Taylor, d’Océans Nord Canada, qui ont parlé de l’importance de réglementer dans la Loi les répercussions des pratiques de pêche sur l’habitat du poisson[57]. David Browne a lui aussi parlé des pratiques de pêche, tout comme de la destruction et altération de l’habitat du poisson par des projets et l’exploitation des terres, comme des causes connues de la dégradation de l’habitat[58]. Bien que le MPO ait mis en place une Politique de gestion de l’impact de la pêche sur les zones benthiques vulnérables, la majorité des membres du Comité estime qu’incorporer cette politique à la Loi améliorera le respect et l’application de la Loi et, par conséquent, recommande ce qui suit :

Recommandation 6

Que la protection contre la détérioration, la destruction et la perturbation de l’habitat du poisson soit étendue à tous les habitats naturels marins et d’eau douce pour garantir une saine biodiversité.

Recommandation 7

Que l’habitat du poisson soit protégé contre les principales activités pouvant lui causer des dommages, comme les pratiques de pêche destructrices et l’effet cumulatif de plusieurs activités.

3.  Exceptions à l’interdiction prévue à l’article 35

Le Comité prend note du point de vue du Conseil des allocations aux entreprises d’exploitation du poisson de fond[59] à l’égard des exceptions prévues à l’actuel paragraphe 35(2), et il estime que les exceptions prévues à l’interdiction de détériorer, de détruire et de perturber l’habitat tiennent comptent des préoccupations de certaines industries, notamment du milieu agricole. À l’heure actuelle, le MPO n’exige pas d’examen pour certains plans d’eau comme les étangs privés, les réservoirs ou les canaux d’irrigation, les drains agricoles et les tranchées de drainage[60]. Des projets comme les ponts, les chaussées et les ponceaux dont a parlé Kate Lindsay, de l’Association des produits forestiers du Canada[61], sont réalisés couramment par le secteur forestier et sont également exemptés de l’examen du MPO, dans la mesure où ils respectent des critères donnés.

Les membres du Comité conviennent avec la Fédération canadienne de l’agriculture qu’il est nécessaire d’établir des lignes directrices claires et faciles à appliquer pour les infrastructures artificielles, et ils recommandent ce qui suit :

Recommandation 8

Que Pêches et Océans Canada intègrent à la Loi sur les pêches des dispositions offrant une protection suffisante et des garanties aux agriculteurs et aux agronomes ainsi qu’aux municipalités.

Recommandation 9

Que Pêches et Océans Canada travaille de concert avec les agriculteurs et les municipalités rurales afin d’offrir des incitatifs et de fournir des conseils d’experts pour conserver et améliorer les populations de poissons ainsi que leur habitat et d’utiliser en dernier recours l’approche d’application de la loi.

Recommandation 10

Que la délivrance des permis soit accélérée pour autoriser les travaux de restauration des infrastructures endommagées ainsi que les travaux d’urgence pour protéger les populations et les collectivités.

Recommandation 11

Que la Loi sur les pêches définisse de façon claire ce qu’est l’habitat du poisson.

4.  Mobilisation des intervenants

Brian Parker, de Développement durable Manitoba, a dit au Comité qu’il faut améliorer les communications entre les intervenants locaux et la direction du MPO. Il a déclaré ce qui suit :

Dans certains cas, il peut être plus difficile de communiquer des problèmes et des points de vue locaux en raison de la thématique du Programme fédéral de protection des pêches. Par exemple, le personnel fédéral qui travaille au Manitoba peut avoir les compétences spécialisées pour examiner un projet pétrolier et gazier local, même si le projet sera généralement attribué à des membres du personnel d’une autre province[62].

Ron Bonnett a également souligné l’importance de la communication et de l’échange de renseignements entre le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les responsables de la conservation[63]. De l’avis d’Elizabeth Hendriks, il est essentiel de mieux informer les Canadiens sur la santé des bassins versants, dans un souci de transparence et afin de déterminer dans quelles zones la protection de l’habitat du poisson doit être renforcée[64]. Le Comité a aussi entendu le témoignage de la Federation of Sovereign Indigenous Nations, de la Saskatchewan, qui prône un engagement accru des Autochtones dans la politique stratégique[65].

Le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 12

Que Pêches et Océans Canada analyse la situation et améliore la communication entre, d’une part, les intervenants de l’industrie de la pêche et, d’autre part, la haute gestion et les décideurs du Ministère.

Recommandation 13

Que les communications au sein de tous les échelons de Pêches et Océans Canada et entre ceux-ci soient améliorées.

La majorité des membres du Comité est d’accord avec Susanna Fuller, qui a insisté sur l’importance de la participation du MPO à des consultations multipartites pour en arriver à une réglementation optimale en matière de protection du poisson et de son habitat tout en tenant compte des circonstances particulières du secteur agricole et des municipalités[66]. L’Alberta Association of Municipal Districts and Counties et la Saskatchewan Association of Rural Municipalities ont rappelé au Comité que les municipalités tiennent compte de la protection de l’habitat du poisson lorsqu’elles planifient des travaux publics. Par exemple, les « plans relatifs aux projets municipaux incluent des dispositions en matière de protection de l’habitat et d’utilisation des terres quand il est question de construire des ponts et des ponceaux[67] ».

5. Interprétation de l’interdiction de détériorer, de détruire et de perturber l’habitat

Pour éviter les interprétations contradictoires de la disposition relative à la détérioration, à la destruction et à la perturbation de l’habitat ainsi que les incohérences liées à son application, au Canada et à l’échelle locale, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 14

Que Pêches et Océans Canada définisse clairement les paramètres de ce qui constitue une violation de la Loi sur les pêches.

Recommandation 15

Que Pêches et Océans Canada crée un comité consultatif composé de membres représentant un vaste éventail d’intérêts qui soumettra régulièrement des recommandations relatives à l’administration et à la mise en application de la Loi sur les pêches. Que ce comité consultatif soit formé, sans s’y limiter, de groupes de l’industrie, de promoteurs de projets, de groupes agricoles, d’administrations municipales et de représentants des secteurs des pêches commerciale, récréative et autochtone.

Recommandation 16

Que le mandat du ministre soit élargi afin de tenir compte de la conservation à long terme et de la protection du poisson et de son habitat lors de l’évaluation de projets qui contreviennent à la Loi sur les pêches.

ARTICLE 35 : AUTORISATIONS

A.  Délai

Ron Bennett a déclaré au Comité que l’expérience des agriculteurs quant aux versions précédentes du processus d’autorisation prévu par la Loi était « caractérisée par de longs délais relatifs aux demandes de permis et d’autorisations » et que les modifications apportées en 2012 ont « amélioré de façon spectaculaire la rapidité et le coût des activités d’entretien régulier et d’amélioration à la ferme[68] ». Fawn Jackson a abondé dans le même sens en disant que de nombreux éleveurs de bovins ont jugé que le processus d’autorisation de DDP de l’habitat était long et représentait un lourd fardeau administratif[69].

Selon Matthew Pickard, de l’Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, « les processus réglementaires devraient être évolutifs et adaptés à la nature, à la portée et à la durée des activités[70] ». En outre, Jay Walmsley a suggéré d’incorporer à la Loi des dispositions sur l’autorisation à long terme ainsi que sur la modification ou le prolongement des autorisations, car bon nombre d’activités du secteur de l’électricité sont réalisées à long terme[71].

Le Comité a aussi entendu le témoignage de Chris Bloomer, de l’Association canadienne des pipelines d’énergie, qui a parlé de l’importance d’un cadre réglementaire qui pourrait « définir clairement les responsabilités, inclure des règles et des processus transparents, favoriser une participation adéquate et tenir compte de la nécessité d’agir rapidement[72] ». Les membres du Comité estiment que la réglementation doit veiller à ce que les autorisations aux termes de l’article 35 soient accordées dans un délai raisonnable et précis et qu’elles tiennent compte des considérations propres aux travaux publics et à l’industrie. Les membres du Comité soulignent également que le Règlement sur les demandes d’autorisation visées à l’alinéa 35(2)b) de la Loi sur les pêches, qui est entré en vigueur en 2013, fixe un délai à l’issue duquel le ministre doit accorder l’autorisation demandée ou informer le demandeur de son refus par écrit.

Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 17

Que Pêches et Océans Canada présente au Comité, dans les deux ans suivant l’examen de la Loi sur les pêches, un rapport dans lequel le processus de demande d’autorisation et l’échéancier des décisions seront expliqués en détail.

B.  Examen des projets : autoévaluation des répercussions des projets

Francis Bradley, de l’Association canadienne de l’électricité, a affirmé que les modifications apportées à la Loi en 2012 ont renforcé la protection du poisson et de son habitat[73]. Les exigences d’auto-déclaration par l’industrie des dommages sérieux causés au poisson, présentées par certains comme un renforcement de la protection, ont été qualifiées de fardeau pour l’industrie par Dan Gibson[74]. Fawn Jackson, quant à elle, a dit au Comité qu’il est important que l’application et la déclaration constituent un fardeau proportionnel au risque que représente le projet[75].

L’examen du MPO n’est pas nécessaire pour les ouvrages, entreprises et activités visés par règlement ainsi que pour les projets jugés à faible risque selon l’autoévaluation du promoteur. À l’heure actuelle, les promoteurs ne sont pas non plus tenus d’informer le MPO de l’exécution de ces projets. Cependant, de nombreux autres participants ont critiqué le fait que le MPO compte sur les autoévaluations remplies par les promoteurs pour simplifier le processus d’autorisation et l’absence de surveillance systématique. C’est notamment l’avis de l’Ontario Federation of Anglers and Hunters[76] et du Comité conjoint de chasse, de pêche et de piégeage, qui représente notamment des Autochtones du Nord du Québec[77]. Le Conseil des Mohawks de Kahnawake, au Québec, a réclamé la création d’un processus d’appel pour « permettre à une nation autochtone ou à toute autre partie intéressée d’exiger qu’un projet désigné comme un "travail mineur" requière l’obtention d’un permis[78] ».

De l’avis de Krystyn Tully, de l’organisme Lake Ontario Waterkeeper, l’autoréglementation n’est pas la bonne solution pour assurer la conformité à la Loi[79]. Pris individuellement, des projets peuvent présenter des faibles risques pour le poisson et son habitat, mais, comme l’a dit Otto Langer, collectivement, ils peuvent représenter une « mort à petit feu ». Il a également affirmé ce qui suit :

D’après ce qui s’est passé en Australie et ailleurs depuis 50 ans, cela ne fonctionne tout simplement pas. Nous allions donc dans la mauvaise direction en espérant que cela fonctionnerait. C’était un vœu pieux. Cela n’a pas marché[80].

Steve Crocker, ministre au sein du gouvernement de Terre‑Neuve‑et‑Labrador, a lui aussi émis des doutes au sujet de l’outil d’autoévaluation. À ses yeux, l’autoévaluation « entraîne des attentes irréalistes quant à la compréhension qu’ont les promoteurs de l’incidence probable de leurs projets sur les plans écologique et biologique[81] ». Il a affirmé qu’un « processus d’évaluation systématique mené par le MPO à l’échelle régionale » offrirait une meilleure protection au poisson et à son habitat. Stephen Sutton a partagé l’opinion du ministre Steve Crocker. Il a déclaré ceci :

Les personnes qui s’adonnent à des activités qui risquent d’être nuisibles ne sont d’ordinaire pas compétentes pour comprendre la complexité des exigences du saumon en matière d’habitat ou pour juger du moment où leurs activités peuvent avoir causé de graves effets. Des obstacles empêchent aussi de signaler le tort qu’on peut avoir causé. Pourtant, l’outil d’autoévaluation actuellement utilisé par Pêches et Océans confie la plus grande partie de la responsabilité de la protection de l’habitat halieutique aux promoteurs. Cela favorise énormément la poursuite des projets sans la surveillance suffisante que permettent le contrôle et l’application de la loi. Nous croyons que cette situation entraîne une perte permanente et cumulative d’habitats qui n’est pas signalée et à laquelle on ne réagit pas, ce qui rend presque impossible l’évaluation des répercussions des projets à venir compte tenu des dégâts antérieurs[82].

Zo Ann Morten a ajouté ce qui suit :

Des études ayant montré que la moitié des promoteurs de Vancouver‑Nord ne savaient pas que leurs égouts pluviaux se déversant dans la rue pouvaient transporter des déchets directement dans les cours d’eau locaux, il me paraît difficile d’imaginer que le commun des mortels puisse décider par lui-même si son activité risque de causer un dommage sérieux au poisson ou à la pêche, localement ou en mer[83].

La Fédération canadienne des municipalités a jugé que la Loi devrait continuer de permettre le recours à un processus d’examen simplifié pour les projets à faible risque, mais que le gouvernement fédéral devrait « examiner la question des projets qui, individuellement, ont un impact mineur sur l’environnement, mais qui, collectivement, peuvent causer des dommages sérieux pour le poisson[84] ». La Newfoundland and Labrador Environmental Industry Association a dit au Comité que « l’absence d’intervention de la part des organismes de réglementation (même pour les projets "à faible risque") présente des défis pour les promoteurs au moment de traiter avec les municipalités et d’autres tiers qui préféreraient obtenir l’assurance que l’organisme de réglementation est au courant du projet et qu’il l’a approuvé[85] ».

Derek Sturko a abordé lui aussi le sujet de l’autoévaluation dans le mémoire qu’il a envoyé au Comité. Le sous‑ministre a signalé que « les critères permettant d’établir qu’un projet représente un faible risque ne sont pas toujours adéquats dans les secteurs fragiles où les habitats ont déjà subi des effets néfastes. En raison de la liste des critères d’examen de projet du MPO et du fait que le Ministère compte sur le promoteur pour interpréter les répercussions du projet sur le poisson, la possibilité que des répercussions présentant des risques élevés soient négligées à l’étape de l’autoévaluation est accrue[86] ». La Commission de gestion des ressources halieutiques et fauniques du Yukon et le Sous‑comité du saumon du Yukon ont soutenu que « le MPO a mis l’accent sur les gros projets, au vu de la baisse de sa capacité en termes de personnel et de ressources, tandis que les petits projets sont laissés pour compte sur le plan des évaluations, de la surveillance de la conformité et de l’exécution, et sont rejetés vers le processus d’autoévaluation, qui clairement ne fonctionne ni au Yukon, ni ailleurs[87] ».

Par ailleurs, la Ville de Port Moody, en Colombie‑Britannique, a recommandé au MPO de renoncer au processus d’autoévaluation et d’« élaborer des politiques qui prévoient des processus d’approbation clairs et qui établissent des normes de rendement rigoureuses, indépendantes et précises afin de protéger les bassins hydrographiques, d’atténuer les conséquences pour les poissons et les bassins hydrographiques et, lorsque cela est inévitable, de compenser ces conséquences[88] ».

Compte tenu des témoignages mentionnés précédemment, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 18

Que tout changement apporté à la Loi sur les pêches relativement à la protection de l’habitat mise sur une diminution du recours à l’autoévaluation par les promoteurs de projets.

C.  Renforcement de la surveillance des répercussions des projets

Brett Favaro a déclaré au Comité qu’il n’existe actuellement aucun registre public ni vérification de l’autoévaluation des projets[89]. Afin de surveiller et de comprendre les répercussions des projets sur le poisson et son habitat, surtout les effets cumulatifs, Martin Olszynski a réclamé la création d’un registre public semblable au site Web Alberta Energy Regulator pour les projets autoévalués, qui contiendrait toutes les demandes d’autorisation au titre de l’article 35, toutes les autorisations et toutes les données de surveillance suivant les autorisations des promoteurs[90].

Jay Walmsley[91] et Susanna Fuller[92] ont ajouté que le recours à un registre public qui mettrait ces dernières en correspondance sur les plans spatial et temporel rendrait le processus d’autorisation plus transparent et responsable. La bande indienne Kitsumkalum de la Colombie‑Britannique a estimé quant à elle que les zones de pêche qui revêtent une importance cruciale pour les peuples autochtones devraient être cartographiées et que ces renseignements devraient être mis à la disposition des promoteurs de projets[93].

Les membres du Comité constatent que les participants aux consultations en ligne menées par le MPO accordent une grande importance à l’information du public. Les moyens de communication privilégiés pour la transmission de l’information sont la mise à jour régulière du site Web, un registre public des projets d’aménagement et de restauration, des rapports annuels au Parlement et les médias sociaux[94].

Le Comité se souvient aussi de la conclusion suivante, tirée du rapport du printemps 2009 du commissaire à l’environnement et au développement durable, au sujet des projets examinés par le MPO :

[…] le Ministère ne dispose pas de beaucoup de documents démontrant qu’il a surveillé la perte réelle d’habitat, qu’il a vérifié si l’habitat avait été protégé par l’imposition de mesures d’atténuation comme condition d’approbation des projets, ou encore qu’il a vérifié la mesure dans laquelle les promoteurs de projet avaient compensé les pertes d’habitat[95].

Le rapport indique également que 23 ans après l’adoption de la Politique de l’habitat, le Ministère ne peut « démontrer que l’habitat du poisson est adéquatement protégé, comme l’exige la Loi sur les pêches ».

Afin d’assurer une surveillance adéquate des répercussions potentielles des projets et de permettre l’analyse des effets cumulatifs, le Comité appuie la suggestion de Brian Parker[96] quant à la nécessité d’établir des normes et des justifications claires en ce qui concerne les exigences de surveillance. Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 19

Que Pêches et Océans Canada mette en place des exigences de surveillance cohérentes destinées aux promoteurs, associées à des normes et à des justifications claires.

Recommandation 20

Que Pêches et Océans Canada investisse dans la création d’une base de données publique et accessible qui permettra de déterminer :

  1. l’emplacement et l’état d’avancement des projets identifiés par le Ministère qui pourraient causer des dommages au poisson et à son habitat (autorisations, suivi des résultats et condamnations), de même que les effets cumulatifs des projets;
  2. l’emplacement des différentes espèces aquatiques;
  3. le suivi à jour des espèces aquatiques en péril et de leur état; et
  4. l’état d’avancement des autorisations.

D.  Orientation des projets et application de la Loi

Patrick McDonald, de l’Association canadienne des producteurs pétroliers, a recommandé que tous les changements apportés à la Loi soient « centrés sur des mécanismes de conformité accrue et sur l’examen approfondi des meilleures pratiques afin d’éviter, d’atténuer et de compenser les dommages touchant les poissons et leur habitat[97] ». Selon lui, le MPO devrait « restaurer les énoncés opérationnels en fonction des activités et/ou élaborer de nouveaux énoncés opérationnels ou des lignes directrices relatives aux pratiques exemplaires, afin de guider les promoteurs vers la meilleure façon d’atténuer ou de gérer les risques associés aux activités de routine[98] ». Par ailleurs, Dan Gibson a fait valoir que la réduction des effectifs dans les bureaux régionaux du MPO a nui aux partenariats entre l’industrie et le Ministère :

Nos membres ont constaté sur le terrain une diminution du nombre d’experts avec lesquels ils travaillaient auparavant, et ce, de Terre-Neuve jusqu’à la Colombie-Britannique. Ils ont peut-être été mutés ou ne travaillent plus pour le ministère. Cela entraîne un affaiblissement de la compréhension mutuelle et de nos relations avec les organismes de réglementation. Nous croyons que le gouvernement devrait envisager sérieusement le rétablissement des ressources perdues afin de rétablir la relation de travail productive qui existait auparavant[99].

Kate Lindsay a réclamé elle aussi que le MPO offre une meilleure orientation aux promoteurs de projets. Elle a expliqué ce qui suit au Comité :

Les énoncés opérationnels ont été une série de lignes directrices efficaces et efficientes, ainsi qu’un mécanisme d’information et de suivi. Ces énoncés permettaient d’établir des calendriers d’intervention et des mesures d’atténuation fondées sur la science à l’usage des promoteurs, relativement à la réalisation d’activités à faible risque, assorties d’objectifs axés sur les résultats. Il s’agissait en l’occurrence d’éviter ou d’atténuer les impacts sur le poisson et son habitat et de permettre au personnel du MPO de concentrer ses efforts sur l’examen plus urgent d’activités qui étaient jugées plus à risque pour le poisson et son habitat[100].

Selon l’organisme Canards Illimités Canada, les projets d’amélioration ou de restauration des habitats ne devraient pas être soumis aux mêmes exigences réglementaires que les projets ayant d’autres objectifs. Par conséquent, l’organisme a proposé qu’une distinction soit clairement établie dans la Loi entre le promoteur et le partenaire d’un projet et que le MPO élabore des exigences opérationnelles distinctes pour les organismes de conservation désirant restaurer l’habitat du poisson[101].

Martin Olszynski a expliqué au Comité que, selon les données relatives aux heures consacrées à l’application de la Loi, il y a eu une « diminution massive » du nombre d’heures consacrées à l’application des dispositions liées à la protection de l’habitat du poisson ou, comme on les appelle maintenant, les dispositions sur la protection des pêches[102]. Le sous-ministre Derek Sturko a noté qu’étant donné la réduction du personnel chargé de l’application de la Loi, la présence du MPO sur le terrain était presque inexistante pour répondre aux violations actuelles ou potentielles[103]. David Browne a ajouté que, pour ce qui est de l’application de la Loi, « il y a eu d’importantes compressions du côté du personnel et de l’équipement [du MPO], et aucun arrangement de rechange n’a été conclu avec les provinces. En outre, peu d’amendes et d’avertissements ont été imposés[104] ». Le ministre Dominic LeBlanc a reconnu que le MPO a réduit de 63 à 16 le nombre de bureaux de protection de l’habitat du poisson au cours des dernières années et il a ajouté ceci :

Une de nos préoccupations est le fait qu’au cours des cinq dernières années, le ministère a subi une série de compressions totalisant 35 millions de dollars qui a entraîné l’abolition de 1 100 postes. Lorsqu’on réfléchit à ces 1 100 postes au cours des cinq dernières années, bon nombre d’entre eux étaient occupés par des responsables de l’application de la loi, par des responsables de la protection des habitats et par des scientifiques[105].

Pour améliorer la conformité, l’application de la Loi et la protection de l’habitat du poisson, Margot Venton a préconisé l’adoption de dispositions qui permettraient aux citoyens préoccupés de « demander au MPO d’enquêter sur une infraction présumée concernant l’habitat du poisson » et de « recourir […] aux tribunaux pour faire respecter la Loi dans les cas où le MPO ne peut ou ne veut pas le faire[106] ». Elle a ajouté que des dispositions relatives aux mesures d’application par les citoyens ont été efficaces dans d’autres administrations et qu’une telle disposition existe déjà dans la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999).

Le Comité prend également note de la suggestion du Comité mixte de gestion de la pêche[107] de la région désignée des Inuvialuit, dans les Territoires du Nord‑Ouest, et de la A‑Tlegay Fisheries Society, de la Colombie‑Britannique, à propos de la création d’« un mécanisme permettant aux gardes-pêche autochtones, aux gouvernements provinciaux et locaux de participer à l’évaluation, au contrôle et à la mise en œuvre des projets[108] ».

Compte tenu des témoignages mentionnés précédemment, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 21

Que Pêches et Océans Canada veille à effectuer des investissements importants pour embaucher plus de personnel sur place afin d’améliorer l’application de la Loi en ce qui concerne l’habitat du poisson, de contribuer aux projets d’amélioration des pêches et d’établir des relations positives axées sur la consultation avec les collectivités locales.

Recommandation 22

Que Pêches et Océans Canada accorde aux secteurs du Ministère responsables de la surveillance, de la conformité et de l’application de la Loi des ressources significatives.

Recommandation 23

Que Pêches et Océans Canada augmente l’effectif responsable de l’application de la Loi sur place en recrutant et en maintenant en poste des surveillants de l’habitat, notamment des agents des pêches affectés à la protection de l’habitat.

Recommandation 24

Que Pêches et Océans Canada veille à ce que le personnel responsable de la protection de l’habitat dispose de la formation et des ressources nécessaires de même que d’un financement à long terme afin d’habiliter les employés sur le terrain à faire leur travail, qui consiste à protéger le poisson et son habitat.

Le Comité recommande également ce qui suit :

Recommandation 25

Que Pêches et Océans Canada rétablisse la Direction générale de la protection de l’habitat et lui fournisse les ressources adéquates pour qu’elle puisse fournir des conseils aux promoteurs de projets qui risquent d’avoir des répercussions sur les habitats marins et d’eau douce et qu’elle puisse assurer la conformité.

E.  Élément déclencheur de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale

Dans le cadre des modifications législatives apportées en 2012, les autorisations accordées aux termes de la Loi sur les pêches ne déclenchent plus le processus d’évaluation environnementale prévu par la nouvelle Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012) (LCEE). D’après Graeme Gawn, de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, sans ce déclencheur :

[…] les collectivités de pêcheurs, les pêcheurs côtiers et les fonds marins ne pourront pas être protégés de l’utilisation grandissante du milieu marin côtier à d’autres fins par d’autres industries. Le dragage, la pose de pipelines et de câbles, les exploitations aquicoles et les installations d’énergie renouvelable sont des activités qui ont une incidence sur l’habitat du poisson et elles doivent à ce titre faire l’objet d’évaluations environnementales rigoureuses avant d’être approuvées[109].

D’après Susanna Fuller, la perte des déclencheurs de l’évaluation environnementale explique en partie pourquoi il est actuellement difficile d’évaluer les effets des modifications apportées à la Loi en 2012 sur le poisson et son habitat[110]. Pour cette raison, des organisations environnementales non gouvernementales et des représentants des Premières Nations ont prôné le rétablissement des éléments déclencheurs de l’évaluation environnementale pour les autorisations accordées aux termes de la Loi sur les pêches[111].

Recommandation 26

Réexaminer le caractère déclencheur de l’évaluation environnementale des autorisations prévues aux articles 32, 35 et 36 de la Loi sur les pêches.

ARTICLE 32 : DESTRUCTION DE POISSONS PAR D’AUTRES MOYENS QUE LA PÊCHE

Selon Elizabeth Hendriks, l’abrogation en 2012 de l’article 32 a créé une lacune dans la protection du poisson contre les activités industrielles[112]. Elle a recommandé le rétablissement de l’article 32 et l’ajout d’interdictions contre les dommages sublétaux aux poissons (p. ex. blessures, réduction du succès reproducteur). Le Comité note que cette position est aussi celle de nombreux autres participants à l’étude, dont la Première Nation crie Mikisew[113] en Alberta, le Conseil tribal de Nuu-chah-nulth[114] en Colombie‑Britannique, et Michael d’Eça, du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut. Michael d’Eça a fait remarquer que la disposition sur la DDP à l’article 35 protégeait l’habitat du poisson, alors que l’article 32 protégeait les poissons eux-mêmes[115].

ACCORDS, DÉLÉGATION DE POUVOIRS, PROGRAMMES ET PROJETS

A.  Cadre juridique des accords avec les provinces

Selon Brian Parker, « [l]a participation des provinces et des territoires est essentielle pour déterminer les répercussions sur la durabilité et la productivité des pêches à long terme, y compris les répercussions cumulatives[116] ». Le ministre Steve Crocker a dit qu’« [u]ne mobilisation et une collaboration […] entre le MPO et les ministères et organismes provinciaux et territoriaux sont essentielles à l’élaboration et la mise en œuvre de politiques législatives claires et efficaces[117] ». Selon l’Alberta Association of Municipal Districts and Counties, la Loi actuelle fournit « un meilleur équilibre entre la surveillance fédérale et l’autonomie locale, en simplifiant les interdictions de nuire à l’habitat du poisson et en incitant les autorités locales à déceler elles-mêmes les répercussions possibles sur l’habitat du poisson[118] ».

Fawn Jackson a signalé au Comité que la Canadian Cattlemen’s Association « encourage la coordination avec les provinces[119] ». Kate Lindsay a ajouté que, afin de réduire le chevauchement en matière de réglementation, quelques éléments des modifications de 2012 devraient être maintenus, en l’occurrence l’équivalence des régimes réglementaires et la reconnaissance des normes élaborées ailleurs qui sont susceptibles d’orienter les activités[120]. Selon Derek Sturko, les accords avec les provinces offrent « des possibilités d’améliorer l’efficience de la réglementation », une approche à guichet unique pour les approbations et un potentiel de délégation aux Premières Nations[121].

Zo Ann Morten s’est dite favorable à ce que l’on continue de pouvoir partager les responsabilités relativement à la protection des poissons et de leur habitat lorsque le régime provincial « impose une norme au moins aussi stricte » que la Loi ou ses règlements[122]. Elle a toutefois ajouté qu’il est indispensable de surveiller les normes et leur application sur le terrain pour s’assurer que les objectifs de protection du MPO sont atteints. Par conséquent, elle juge nécessaire la capacité de se retirer des accords fédéraux-provinciaux lorsque le partenaire provincial n’est plus en mesure d’égaler ou de dépasser les normes établies par la Loi fédérale.

Par contre, le chef Robert Chamberlin, de l’Union of British Columbia Indian Chiefs[123], et Brenda Gaertner, du First Nations Fisheries Council of British Columbia[124], ont trouvé consternant que les Premières Nations soient exclues du cadre juridique prévu aux articles 4.1 à 4.3 pour la conclusion d’accord avec les provinces. Brenda Gaertner a dit ce qui suit :

Les droits inhérents des Autochtones et les droits ancestraux et issus de traités découlant de l’article 35 [de la Loi constitutionnelle de 1982], y compris le titre ancestral, confèrent et maintiendront toujours le droit et la responsabilité pour les Premières Nations de se gouverner et de gérer les ressources halieutiques, les habitats du poisson en eau douce et dans des environnements marins, ainsi que les pêches, et de veiller à la préservation des rivières, des lacs et des eaux comprises dans leurs territoires.

Elle a donc recommandé :

Que la loi habilite le ministère des Pêches et des Océans et le ministre à conclure des accords directement avec des gouvernements de Premières Nations d’une manière qui leur permettrait de faciliter la collaboration entre les Premières Nations, la province et le gouvernement fédéral relativement à la gestion du poisson, de l’habitat du poisson et des pêches.

Selon la Première Nation crie Mikisew, la délégation de pouvoirs fédéraux aux provinces peut poser problème étant donné que les organismes provinciaux ont des « règles plus restrictives en matière de participation des Autochtones à la prise de décision[125] ». Pour la Première Nation, la délégation de ces pouvoirs « irait à l’encontre du rôle important que joue le MPO dans la région des sables bitumineux, où le Ministère est le seul organe de réglementation à avertir que les permis d’utilisation des eaux pour les projets d’exploitation réduiraient l’habitat des poissons s’ils étaient délivrés de la façon approuvée par l’Alberta ».

B.  Délégation du pouvoir ministériel

La Loi permet au ministre de déléguer à d’autres personnes et entités son pouvoir de délivrer des autorisations. À ce sujet, Chris Bloomer a recommandé au Comité que le protocole d’entente entre l’ONE et le MPO soit maintenu[126]. Selon lui, la délégation de ce pouvoir à l’ONE n’affaiblit pas la protection des poissons et de leur habitat. Pour ce témoin, l’ONE est l’organe de réglementation le mieux placé pour ce rôle vu sa connaissance unique de l’historique et des succès des mesures d’atténuation dans le domaine des pipelines.

Le Comité note que la Fédération des Métis du Manitoba et Otto Langer ne partageaient pas l’opinion de Chris Bloomer sur la délégation de ce pouvoir et le protocole d’entente entre l’ONE et le MPO. Otto Langer a réclamé la centralisation de l’expertise au sein de « l’organisme approprié » :

Lorsqu’il s’agit d’une question d’énergie, l’Office national de l’énergie ne devrait s’occuper que de la question de l’énergie. Avons-nous suffisamment de gaz naturel pour les générations futures? Faut-il construire un pipeline qui traverse les frontières provinciales? Pourquoi l’Office national de l’énergie devrait-il décider ce qui est bon pour les poissons dans chaque cours d’eau traversé par le pipeline? Cela n’a aucun sens. Faites en sorte que chaque organisme fasse son travail correctement et efficacement plutôt que de continuer dans la fragmentation que nous connaissons actuellement[127].

Pour la Fédération des Métis du Manitoba, la protection des poissons et de l’habitat aquatique ne fait pas partie du mandat de l’ONE, qui « ne possède pas la capacité, l’expérience, ni le savoir-faire essentiel pour […] évaluer de façon compétente » l’impact des projets énergétiques sur les poissons et l’habitat du poisson[128].

C.  Pouvoir de mettre en œuvre des programmes et projets avec des partenaires

Le Programme de partenariats relatifs à la conservation des pêches récréatives, créé en vertu du pouvoir qu’a le ministre de mettre en œuvre des programmes et des projets avec des partenaires, est l’un des aspects positifs des modifications de 2012 à la Loi que beaucoup de participants à l’étude ont mentionnés. Ron Bonnett a affirmé que « [l]es programmes relatifs aux biens et services écologiques sont un excellent instrument qui devrait être exploré plus à fond si on veut améliorer la qualité de l’habitat du poisson sur les terres agricoles ou à proximité de celles-ci[129] ». Selon Susanna Fuller, il serait possible d’en faire plus, dans le cadre de la réglementation, pour encourager la conservation de l’habitat du poisson[130].

David Browne s’est dit d’avis que le MPO devrait « accroître [s]a capacité de concevoir, de réaliser et d’appliquer un programme de protection de l’habitat du poisson » et « continuer à créer des partenariats avec des ONG et d’autres secteurs de la société pour l’appliquer, parce que le MPO ne peut pas tout faire seul. S’il veut réussir, il devra adopter une approche de coopération et de collaboration pour protéger l’habitat du poisson[131] ».

Jay Walmsley a demandé qu’on se concentre davantage sur « l’établissement de partenariats et les activités de gérance, y compris les initiatives de planification visant à protéger et à rétablir l’habitat du poisson[132] », tandis que le Conseil canadien des pêches a fait valoir que le pouvoir de mettre en œuvre des programmes et des projets avec des partenaires, comme les entreprises de pêche et les groupes de pêcheurs, « favorise la gestion commune[133] ».

Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 27

Que Pêches et Océans Canada continue de financer les projets de conservation et d’amélioration des pêches en collaboration avec les communautés autochtones, les agriculteurs et les organismes de conservation des pêches.

POUVOIR D’AUTORISATION ET DE RÉGLEMENTATION

A.  Facteurs et transparence

Les modifications à la Loi de 2012 précisaient les fins et les facteurs qui doivent guider le ministre dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’autorisation et de réglementation, mais selon Martin Olszynski, il reste impossible aujourd’hui de savoir si, dans un cas donné, le ministre a pris en compte ou non ces facteurs[134]. Selon Susanna Fuller, le ministre dispose d’une telle latitude discrétionnaire que ses décisions s’en tiennent rarement aux conseils des scientifiques ou aux plans de la cogestion[135]. Quant à Michael d’Eça, il s’est inquiété de l’expansion des pouvoirs de réglementation en vertu de l’article 43 de la Loi, qui permet au gouverneur en conseil d’exclure « toute pêche de l’application des définitions de "autochtone", "commerciale" et "récréative[136]" ».

Margot Venton a dit que les facteurs qui éclairent la prise de décision aux termes de la Loi devaient être clarifiés de manière à refléter expressément le souci de l’habitat. Elle a fait valoir que les incohérences que présentait l’exécution de l’interdiction de DDP dans des versions antérieures de la Loi découlaient en partie du vaste pouvoir d’autorisation discrétionnaire conféré au paragraphe 35(2). Pour Mme Venton, le pouvoir d’autoriser la DDP de poissons ou de leur habitant doit se fonder sur des principes clairs et scientifiques. Elle a donc recommandé d’ajouter :

des données fondées sur la science afin de guider toute autorisation à causer un préjudice à l’habitat du poisson, ce qui comprend les effets cumulatifs sur l’habitat du poisson liés aux autorisations individuelles, la stabilité à long terme des écosystèmes dont dépend la santé des stocks de poissons, les besoins en habitat des stocks de poissons en difficulté ou en reconstitution et des espèces aquatiques en péril, ainsi que l’incidence prévue des changements climatiques sur l’habitat en question[137].

Ces facteurs ne sont pas les seuls qu’on a portés à l’attention du Comité. Ainsi, Brenda Gaertner s’est dite d’avis que le ministre devrait être chargé « d’exercer son pouvoir discrétionnaire d’une manière qui satisfait aux exigences de la Loi sur les pêches ainsi qu’à celles du paragraphe 35(1) de notre constitution et celles de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones[138] ». La Première Nation crie Mikisew a de son côté soutenu que le ministre, lorsqu’il use de son pouvoir discrétionnaire, devrait aussi tenir compte des facteurs suivants : le savoir traditionnel, les droits issus de traités, la valeur culturelle possible des poissons ou des zones de pêche pour les peuples autochtones, les principes de la réconciliation et le principe de la précaution[139].

Compte tenu des témoignages entendus, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 28

Que l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre soit assujetti aux principes de la transparence et à la divulgation publique.

B.  Objectifs en matière de gestion des pêches

Les objectifs en matière de gestion des pêches (OGP) forment l’un des quatre facteurs, énumérés à l’article 6, dont le ministre doit tenir compte avant de prendre des règlements ou de délivrer des autorisations. Gary Swanson, de Manitoba Hydro, a soutenu que l’obligation de tenir compte des OGP était logique et nécessaire à la productivité et à la viabilité à long terme des pêches[140]. Dan Gibson a fait valoir que les OGP ne sont pas clairement formulés actuellement, mais que lorsqu’ils sont définis correctement, ils peuvent beaucoup aider l’industrie hydroélectrique à s’assurer que ses installations ou opérations n’aient pas de répercussions négatives sur les poissons[141].

Selon le First Nations Fisheries Council of British Columbia, les OGP devraient tenir compte des objectifs de gestion existants des Premières Nations, lesquels se fondent sur le droit autochtone, le savoir traditionnel et les objectifs établis dans les ententes de cogestion[142].

C.  Règlement sur les activités d’aquaculture

Graeme Gawn a dit du Règlement sur les activités d’aquaculture (RAA), pris en 2015 en application des nouveaux pouvoirs de réglementation accordés en 2012, qu’il a affaibli la protection de la faune marine contre l’utilisation illégale de pesticides dans les élevages de saumon en cages en filet[143]. Selon ce témoin, l’utilisation des pesticides menace la pêche au homard le long des côtes, qui est la pêche la plus lucrative dans l’Est du Canada. Le Comité note que des critiques similaires à l’égard du RAA ont été formulées par l’Eastern Shore Fisherman’s Protective Association de la Nouvelle‑Écosse[144], la Grand Manan Fishermen’s Association du Nouveau‑Brunswick[145] et l’Union des pêcheurs des Maritimes[146].

Susanna Fuller a abondé dans le même sens que Graeme Gawn. Elle a aussi ajouté que, comme les activités d’aquaculture sont maintenant visées par une autorisation par catégorie et une exemption au paragraphe 35(1) de la Loi sur une base individuelle, le dépôt de substances nocives ne fait pas l’objet d’un suivi adéquat[147]. De son côté, le chef Robert Chamberlin, invoquant les conclusions du rapport final de la Commission Cohen, a demandé qu’on retire au MPO le mandat de promouvoir l’industrie et les produits de la salmoniculture[148]. C’était aussi la position de Nikki Skuce, de Northern Confluence, en Colombie-Britannique[149].

Par contre, le ministre Steve Crocker a dit que le RAA apportait selon lui des « précisions » sur les activités d’aquaculture et que tout « examen de la Loi sur les pêches devrait tenir compte de ce règlement [et] veiller à ce que tout changement proposé n’entraîne aucun chevauchement ni aucun conflit par rapport au champ d’application du RAA[150] ». Matt Sullivan, de la P.E.I. Aquaculture Alliance, a lui aussi affirmé que les changements de 2012 à la Loi avaient donné de bons résultats pour l’industrie de l’aquaculture[151], dont la rationalisation du processus d’autorisation des projets à faible risque (comme les concessions à bail d’ostréiculture).

Kristi Miller-Saunders a toutefois lancé un avertissement : vu la productivité déclinante d’un grand nombre de stocks de saumon sauvage du Pacifique, « il est impératif que les règlements mis en place pour réduire au minimum les impacts de l’aquaculture sur les stocks de saumon sauvage se fondent sur des données probantes et que la recherche effectuée en vue de comprendre ces risques soit transparente, objective et indépendante de toute influence de la part de l’industrie[152] ».

MODERNISER LA LOI SUR LES PÊCHES

Des témoins ont affirmé que les conditions d’habitat se sont détériorées sous des versions antérieures de la Loi, et que leur déclin se poursuit aujourd’hui. De nombreux participants à l’étude ont donc proposé l’ajout à la Loi de « mesures de protection modernes ». Comme l’a dit Elizabeth Hendricks, dans le contexte du changement climatique, il faudrait adopter ces mesures pour :

s’assurer que la Loi sur les pêches est adaptée au XXIe siècle et pour en faire la pierre angulaire de la législation environnementale du Canada, en y intégrant des principes de durabilité et, plus précisément, une approche écosystémique; le principe de précaution; la gestion communautaire afin de guider le processus décisionnel relatif à la gestion des pêches, en fonction des effets cumulatifs; des directives normatives sur les objectifs, principes et méthodes de gestion des pêches; enfin, des mesures propices à une meilleure surveillance, à des données ouvertes et à la transparence[153].

A.  Préambule, objet et principes directeurs

Marc Allain, de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, a fait remarquer que la Loi actuelle ne contient pas d’énoncé de son objet[154]. Selon lui, il « est essentiel que l’article « Objet » de la loi assoie sans équivoque l’autorité du ministre relativement à la gestion des pêches pour la réalisation d’objectifs culturels, sociaux et économiques ainsi qu’en ce qui concerne la conservation et la protection du poisson ». Le Comité note que des arguments similaires ont été présentés par la Cape Breton Fish Harvesters Association[155] et les Capitaines-Propriétaires de la Gaspésie[156]. La BC Seafood Alliance[157], le Conseil canadien des pêches[158] et Jay Walmsley ont insisté sur l’importance de la durabilité des pêches :

Le but de la Loi sur les pêches devrait être d’assurer la durabilité des pêches marines et intérieures du Canada en veillant à ce que les considérations environnementales, économiques et sociales, y compris l’incidence sur l’utilisation des ressources aquatiques, soient systématiquement prises en compte dans la gestion des pêches et dans la conservation des poissons et de leur habitat. Les principes fondamentaux devraient être la gestion axée sur les écosystèmes et le développement durable[159].

Susanna Fuller a dit qu’un article « Objet » « permettr[ait] à la loi de servir d’instrument habilitant pour les cadres stratégiques actuels et futurs, y compris ceux qui portent sur les résultats escomptés au chapitre de la conservation et des retombées économiques et sociales[160] ». Pour la Première Nation crie Mikisew et Trevor Taylor, il importait que la Loi « reconnaisse le respect des droits des Autochtones et des droits conférés par les traités ainsi que les dispositions des accords modernes sur les revendications territoriales et l’objectif de la réconciliation[161] ». Le First Nations Fisheries Council of British Columbia, soucieux que la Loi prenne en compte les droits de pêche des Autochtones, a proposé le libellé suivant pour l’article « Objet » :

La présente loi a pour objet d’assurer la protection du poisson, de l’habitat du poisson et des pêches pour les générations actuelles et futures grâce à la protection, à la conservation et à la restauration du poisson, de l’habitat du poisson et de la biodiversité, à l’application du principe de précaution, à la gestion axée sur l’écosystème et à la réconciliation avec les peuples autochtones[162].

De son côté, Manitoba Hydro a dit que « la clé d’une protection efficace des pêches repose sur la description claire de l’intention de la Loi sur les pêches qui vise une intégration plus complète des objectifs de gestion des pêches[163] ». Gary Swanson a donc avancé que l’article 6 actuel mérite « une plus grande importance dans la Loi sur les pêches » et qu’il devrait éclairer toute détermination des dommages causés aux poissons. Quant au British Columbia Commercial Fishing Caucus, il s’est dit d’avis que le processus décisionnel devait être partagé avec les pêcheurs locaux, les Premières Nations et les localités côtières adjacentes[164].

Elizabeth Hendriks a proposé l’ajout d’un préambule qui, comme celui d’autres lois canadiennes comme la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, énoncerait les principes directeurs fondamentaux de la Loi : la prise de décision axée sur des données probantes, l’approche écosystémique, le principe de précaution, la transparence et la reddition de comptes, la cogestion et l’intégration des connaissances traditionnelles autochtones[165]. Trevor Taylor a présenté des arguments similaires sur l’importance d’ajouter un préambule à la Loi : il a notamment rappelé que la Loi sur les océans et la Loi sur les espèces en péril exposent dans leurs préambules ce sur quoi elles se fondent[166].

Recommandation 29

Que le ministre, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en la matière, soit autorisé à exiger comme condition d’obtention d’un permis le respect d’objectifs sociaux et économiques, en plus des objectifs de conservation actuellement prévus.

B.  Rétablissement des stocks de poissons décimés

À l’automne 2016, la commissaire à l’environnement et au développement durable a constaté que, dans le cas de 12 des 15 principaux stocks de poissons se trouvant dans la zone critique et nécessitant un plan de rétablissement, le MPO n’avait ni adopté de plan ni établi de calendrier en vue de son établissement. Le Ministère a accepté la recommandation que lui a adressée la commissaire, soit définir :

des priorités, des cibles et des échéances pour la mise en place de plans de gestion intégrée des pêches, et ce, pour tous les principaux stocks de poissons. Les plans devraient prévoir des objectifs à long terme précis et mesurables, des examens de la performance et des plans de rétablissement pour les stocks dans la zone critique qui sont toujours exploités. Les plans devraient aussi être accessibles au public[167].

Selon Stephen Sutton, l’éventuelle Loi révisée devrait comprendre « des objectifs pour la restauration des populations détruites ou surexploitées et le rétablissement des pêcheries[168] ». De même, Oceana Canada a recommandé que la Loi soit modifiée de manière à « incorporer l’obligation de rétablir les stocks de poissons qui sont tombés sous le seuil d’une population en santé[169] ». Elizabeth Hendriks a fait valoir qu’il fallait inclure dans la Loi des définitions quantitatives de la surpêche et du rétablissement et imposer des plans de rétablissement et des calendriers de reconstitution pour les stocks surexploités et décimés afin d’améliorer la transparence et la responsabilisation politique[170]. Enfin, Susanna Fuller a proposé qu’on exige la présentation d’un rapport annuel au Parlement sur le rétablissement des stocks décimés[171].

Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 30

Que l’éventuelle révision de la Loi sur les pêches prévoie la restauration et le rétablissement des stocks de poissons et de leur habitat.

C.  Inscription dans la loi des politiques de séparation de la flottille et du propriétaire-exploitant

Des politiques sur la séparation de la flottille et le propriétaire-exploitant s’appliquent aux pêches côtières dans l’Est du Canada. Elles visent à « s’assurer que les pêcheurs côtiers demeurent indépendants et que les privilèges découlant des permis de pêche profitent aux pêcheurs et aux collectivités côtières[172] ». La politique sur la séparation de la flottille empêche les entreprises de transformation du poisson d’acquérir des permis de pêche rattachés à un navire côtier d’une longueur de moins de 19,8 m. Quant à la politique sur le propriétaire-exploitant, elle exige des détenteurs des permis de pêche sur navire côtier d’être présents sur le bateau pendant les opérations de pêche.

Graeme Gawn a dit que les pêcheurs côtiers étaient les intendants naturels de l’environnement maritime puisqu’ils dépendent de la mer pour gagner leur vie[173]. Ce sont des pêcheurs qui ont hérité des permis de pêche de « leurs arrière-arrière-grands-pères » et possèdent une connaissance précise de l’environnement local. Graeme Gawn a indiqué que le bien-être et la viabilité économique des collectivités de pêche de l’Est du Canada dépendent de la santé des stocks de poissons et de leurs habitats marins.

Selon Marc Allain, le soutien à la viabilité économique des localités côtières et des pêcheurs côtiers va main dans la main avec la protection de l’habitat du poisson et de la productivité des pêches[174]. Par conséquent, afin d’assurer la protection des stocks de poissons et de l’habitat marin ainsi que la viabilité des collectivités de pêches côtières dans l’Est du pays, la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, l’Eastern Shore Fisherman’s Protective Association de la Nouvelle-Écosse[175], le Gulf Nova Scotia Fleet Planning Board[176], la Prince Edward Island Fishermen’s Association[177] et le Regroupement des pêcheurs professionnels de la Haute et de la Moyenne Côte-Nord[178] ont demandé l’inscription dans la Loi sur les pêches des politiques de séparation de la flottille et du propriétaire-exploitant.

Le ministre Steve Crocker aussi s’est dit en faveur de l’inscription dans la loi des politiques de séparation de la flottille et du propriétaire-exploitant, ainsi que de la politique du MPO exigeant que le pêcheur ait une accréditation de pêcheur professionnel de niveau II pour obtenir le transfert d’une entreprise du noyau[179]. Marc Allain a ajouté qu’il est difficile de détecter et de sanctionner les contournements et les violations de ces exigences si elles ne sont pas liées par règlement aux conditions du permis[180].

D.  Collecte de données de référence

Nick Lapointe, de la Fédération canadienne de la faune, a dit qu’il fallait assurer une surveillance « de référence » des habitats pour que les décisions puissent être prises à l’aune de données scientifiques et que les résultats des projets de remise en état des habitats puissent être évalués[181]. Brenda Gaertner a souligné que le MPO devait s’engager à faire de la surveillance environnementale et à recueillir rigoureusement des données de référence afin que l’impact concret de la Loi puisse être évalué[182]. Dans son Rapport du printemps 2009, le commissaire à l’environnement et au développement durable a lui aussi indiqué que le MPO « ne dispose que de renseignements limités sur l’état de l’habitat du poisson au Canada, c’est-à-dire les stocks de poisson, l’ampleur et la qualité de leur habitat, les contaminants dans le poisson et la qualité générale de l’eau »; il a donc recommandé au Ministère d’« élaborer des indicateurs de l’habitat afin de pouvoir les appliquer aux écosystèmes au sein desquels l’activité humaine est importante[183] ».

Elizabeth Hendriks a réclamé la mise à jour des exigences de la Loi en ce qui a trait à la surveillance et à l’établissement de rapports, et l’ajout de dispositions sur la surveillance par les citoyens. Elle a ajouté qu’« un financement adéquat doit accompagner ces dispositions de sorte que les collectivités, les groupes autochtones et les localités côtières puissent participer activement à la surveillance[184] ».

Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 31

Que le gouvernement du Canada corrige les lacunes connues de la réglementation de manière à ce que Pêches et Océans Canada, en collaboration avec tous les intervenants du secteur des pêches, soit en mesure de répondre à toutes les activités qui causent des dommages aux poissons ou à leur habitat et d’évaluer concrètement les répercussions (p. ex. par la collecte continue de données de référence permettant de déterminer les changements qu’apportent les activités).

E.  Passage des poissons et flux environnementaux[185]

David Browne a dit que les dispositions sur le passage des poissons ont été mises à jour en 2012, mais que, de nature discrétionnaire, elles ne sont généralement pas appliquées. Selon lui, alors que l’Ontario compte plus de 2 500 barrages, moins de 50 possèdent une passe à poissons[186]. Dans son mémoire, la Ville de Maple Ridge, en Colombie‑Britannique, a elle aussi parlé de l’impact des barrages sur le passage des poisons. Elle a recommandé au Comité d’examiner les « exigences prévues par la loi pouvant contribuer à la création de programmes de restauration et d’indemnisation pour les répercussions sur les lieux de pêche historiques associées à des barrages existants ou envisagés et à d’autres infrastructures dans les emplacements naturels[187] ».

Lina Azeez, de la Watershed Watch Salmon Society, a expliqué que les opérations des infrastructures antidébordement, qui sont actuellement exemptées des autorisations prévues par la Loi[188], peuvent avoir des répercussions cumulatives négatives sur l’habitat du saumon. Or, selon l’intervenante, les normes actuelles de lutte contre les inondations ne prennent pas en compte le passage des poissons ni la santé globale de l’écosystème. Dans ce contexte, Randy Christensen a proposé que la loi exige dorénavant que les pratiques antidébordement soient sans danger pour les poissons et que les flux environnementaux soient protégés. Il a aussi demandé que les opérations des infrastructures antidébordement soient assujetties à l’autorisation du MPO[189].

Linda Nowlan a dit que les flux environnementaux sont un élément clé de la protection de l’habitat du poisson et que l’éventuelle Loi renouvelée devrait inclure « une norme nationale juridiquement contraignante sur les flux afin de conserver la quantité, le calendrier et la qualité des débits d’eau[190] ». Selon l’intervenante, la Loi devrait définir – sur l’avis des scientifiques du MPO – dans quelles conditions les altérations du flux constituent une DDP de l’habitat du poisson.

F.  Gain net de l’habitat du poisson

David Browne a prôné l’adoption d’une cible nationale de gain net des habitats du poisson, ce qui permettrait d’expérimenter au chapitre des autorisations, des mesures de compensation et du contrôle des dommages[191]. Il a évoqué les habitats de réserve comme moyen d’atteindre cette cible et recommandé que le MPO recherche avant tout « les gains nets d’habitat dans les bassins hydrologiques déjà touchés[192] », afin non seulement de prévenir les dommages aux habitats du poisson, mais aussi de renverser les préjudices passés et de restaurer les écosystèmes.

Jay Walmsley a aussi mentionné les accords de conservation et la création d’habitats de réserve par des tiers à titre d’« approches novatrices et modernes pour compenser les effets résiduels des projets[193] ». Après avoir précisé qu’il n’avait pas terminé son examen du Guide intérimaire sur les réserves d’habitats gérées par le promoteur que le MPO a publié en 2016 dans le cadre du Programme de protection des pêches, le Port de Vancouver a recommandé « que la capacité de créer des réserves d’habitats soit maintenue puisque cela contribue à accroître la productivité des habitats avant que la nécessité de prendre des mesures compensatoires soit confirmée[194] ».

Le chef Robert Chamberlin, cependant, a fait une mise en garde au sujet des habitats de réserve :

Une entreprise en particulier – que je ne nommerai pas – avait restauré quelques centaines de milliers de mètres cubes d’environnement sous-marin, et, à cause de cette disposition, cette entreprise pouvait détruire la même superficie sur le territoire de notre nation. Cela n’a pas de sens. Ce serait comme détruire un centre récréatif ici à Kenora et en bâtir un nouveau à Toronto, comme si cela pouvait compenser.[195]

Le chef Chamberlin a aussi souligné que les mesures d’atténuation des impacts sur les habitats du poisson devraient être élaborées en partenariat avec les Premières Nations « qui détiennent le titre des terres où la destruction aura lieu ».

Recommandation 32

Que Pêches et Océans Canada renouvelle son engagement envers les politiques dites « aucune perte nette » et « gain net » et consacre davantage d’attention, d’efforts et de ressources à la restauration et à l’amélioration de l’habitat du poisson et de la productivité du poisson; que le Ministère accorde aux promoteurs des projets de la flexibilité pour respecter cette exigence.

G.  Dispositions reflétant les accords de revendications territoriales et les droits constitutionnels ancestraux

Trevor Taylor a informé le Comité que, bien que la Loi ait été modifiée pour tenir compte de certains accords de revendications territoriales en Colombie-Britannique, elle ne reflète pas encore de nombreux autres accords modernes, dont l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut[196] : il « a fallu que les bénéficiaires de cet accord et d’autres entament des procédures judiciaires pour établir que ces accords limitent en fait les vastes pouvoirs discrétionnaires du ministre ». Raymond Andrews, du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, a signalé que la pêche dans les eaux du Nunavut continuait d’être assujettie à la réglementation des Territoires du Nord‑Ouest parce qu’aucun règlement sur le Nunavut n’a été pris dans le cadre de la Loi actuelle[197].

Pour Nunavut Tunngavik Incorporated, l’absence d’un règlement de pêche pour le Nunavut « plus de 23 ans après la conclusion de l’Accord du Nunavut nui[t] à sa mise en œuvre ». L’organisme a ajouté que l’adoption de ce règlement « pourrait grandement contribuer à la réconciliation en cours et offrir des avantages mutuels ainsi que des avantages sur le plan pratique prenant la forme d’une industrie de la pêche mieux réglementée, plus efficace et plus dynamique dans le Nunavut[198] ».

La Commission de gestion de la faune aquatique et terrestre du Yukon et le Yukon Salmon Sub-Committee ont aussi rappelé au Comité que la Loi ne contenait aucune mention explicite des ententes définitives conclues avec les Premières Nations du Yukon, omission qu’il faudrait selon eux corriger[199].

De plus, la Federation of Sovereign Indigenous Nations a réclamé la mise sur pied d’un bureau de conformité aux droits constitutionnels ancestraux afin que les processus décisionnels de la Loi respectent les droits constitutionnels ancestraux et intègrent pleinement les intérêts des Autochtones[200].

CONCLUSION

Le Comité estime que la durabilité des pêches repose sur la vitalité des populations de poissons, lesquelles nécessitent un habitat sain. Par conséquent, c’est notamment par la défense de l’habitat du poisson qu’il est judicieux de commencer si on souhaite protéger les pêches pour les générations futures.

Le Comité tient compte des témoignages qui indiquent que l’habitat du poisson a connu une détérioration sous les versions antérieures de la Loi, et que ce déclin se poursuit aujourd’hui. Nous croyons que des éléments positifs ont été apportés en 2012 à la Loi sur les pêches, mais la majorité des membres du Comité affirme que, à la lumière des témoignages entendus et dans le contexte du changement environnemental, les modifications que nous proposons à la Loi permettront d’améliorer la protection des poissons et de leur habitat de même que la gestion des pêches. Selon nous, les décisions sur l’habitat du poisson et la gestion des pêches doivent être prises de manière transparente, et la prise en compte des faits scientifiques et du savoir traditionnel autochtone doit être un principe inscrit dans la loi.

Le Comité considère que cet examen, outre qu’il a permis d’évaluer les changements législatifs apportés en 2012, représente une occasion unique de moderniser la Loi. Selon nous, les modifications proposées dans le présent rapport traduisent les valeurs que sont la gestion écosystémique, le développement durable, le principe de précaution et la cogestion. Nous soulignons que l’examen s’est déroulé de manière ouverte et non partisane, sans que ses conclusions ne soient déterminées à l’avance.

Enfin, le Comité appelle le gouvernement fédéral et le MPO, en prévision des modifications futures de la Loi, à établir des dispositions de transition et à prévoir les plans et les ressources nécessaires; notamment, un plan de mise en œuvre complet devrait être en place avant l’entrée en vigueur de la modification[201].


[1]              Pêches et Océans Canada [MPO], A Practical Guide to the Fisheries Act and to the Coastal Fisheries Protection Act [disponible en anglais seulement].

[2]              Chambre des communes, Comité permanent des pêches et des océans, Procès-verbal, 19 septembre 2016.

[3]              Chambre des communes, Comité permanent des pêches et des océans, Procès-verbal, 23 novembre 2016.

[4]              Le Comité a reçu le 5 janvier 2017 le rapport final dans lequel sont compilées toutes les données des consultations publiques en ligne menées par le MPO. Les données et les commentaires originaux recueillis pendant les consultations n’ont pas été transmis au Comité.

[5]              Bureau du vérificateur général du Canada, La protection de l’habitat du poisson, chap. 1 dans Rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable – Printemps 2009, 2009.

[6]              Projet de loi C‑32 : Loi concernant le développement durable des pêches dans les eaux côtières et les eaux intérieures du Canada, 2e session, 39e législature.

[7]              Le projet de loi C‑32 était semblable au projet de loi C-45, qui est mort au Feuilleton à la fin de la 1re session de la 39e législature quand le Parlement a été prorogé en septembre 2007.

[8]              Linda Nowlan, conseillère du personnel, West Coast Environmental Law, Témoignages, 23 novembre 2016.

[11]           Justyna Laurie-Lean, vice‑présidente, Environnement et affaires réglementaires, Association minière du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[12]           Gary Swanson, spécialiste sénior de l’environnement, Manitoba Hydro, Témoignages, 30 novembre 2016.

[13]           Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l’agriculture, Témoignages, 21 novembre 2016.

[14]           Fawn Jackson, gestionnaire, environnement et durabilité, Environnement et développement durable, Canadian Cattlemen’s Association, Témoignages, 30 novembre 2016.

[15]           Katie L. Stammler, Robert L. McLaughlin et Nicholas E. Mandrak, « Streams modified for drainage provide fish habitat in agricultural areas », Canadian Journal of Fisheries and Aquatic Sciences, vol. 65, 2008, p. 509 à 522 [en anglais seulement].

[16]           Ville de Winnipeg, Best Management Practices Handbook for Activities In and Around the City’s Waterways and Watercourses, novembre 2005, p. 23 [en anglais seulement].

[17]           David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[18]           Brett Favaro, chercheur scientifique, Fisheries and Marine Institute, Memorial University of Newfoundland, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[19]           West Coast Environmental Law, Habitat 2.0 : Une nouvelle approche à l'égard de la Loi sur les pêches du Canada, mémoire, 23 novembre 2016.

[20]           Courtoreille c. Canada (Affaires autochtones et Développement du Nord), 2014 CF 1244 (CanLII).

[21]           Kristi Miller‑Saunders, directrice, génétique moléculaire, station biologique du Pacifique, MPO, Témoignages, 30 novembre 2016.

[22]           Zo Ann Morten, directrice exécutive, The Pacific Streamkeepers Federation, Témoignages, 7 décembre 2016.

[23]           Stephen Sutton, coordonnateur de la sensibilisation et de la mobilisation communautaires, Fédération du saumon atlantique, Témoignages, 28 novembre 2016.

[24]           Dan Gibson, spécialiste principal de l’environnement, Association canadienne de l’hydroélectricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[25]           James Duncan, directeur, Direction de la faune et de la pêche, Développement durable Manitoba, Témoignages, 28 novembre 2016.

[26]           Derek Sturko, sous‑ministre, ministère de l’Agriculture, gouvernement de la Colombie‑Britannique, Mémoire, 30 novembre 2016 [TRADUCTION].

[27]           Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[28]           Nicola Tribal Association, Mémoire, 31 octobre 2016.

[29]           A-Tlegay Fisheries Society, Mémoire, 30 novembre 2016.

[30]           Linda Nowlan, conseillère du personnel, West Coast Environmental Law, Témoignages, 23 novembre 2016.

[31]           Margot Venton, avocate‑conseil à l’interne et directrice du programme marin, Ecojustice, Témoignages, 28 novembre 2016.

[32]           Canards Illimités Canada, Mémoire, 12 décembre 2016.

[33]           Metro Vancouver, Mémoire, 30 novembre 2016.

[34]           Brett Favaro, chercheur scientifique, Fisheries and Marine Institute, Memorial University of Newfoundland, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[35]           Elizabeth Hendriks, vice‑présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[36]           Nielsen, Delaney + Associates et Publivate, Consultation du MPO sur l’examen de la Loi sur les pêches : rapport final, préparé pour Pêches et Océans Canada, 19 décembre 2016.

[37]           Kristi Miller‑Saunders, directrice, génétique moléculaire, station biologique du Pacifique, MPO, Témoignages, 30 novembre 2016.

[39]           Nicola Tribal Association, Mémoire, 31 octobre 2016.

[40]           City of Maple Ridge, Mémoire, 28 novembre 2016.

[41]           Newfoundland and Labrador Environment Network, Mémoire, 28 novembre 2016.

[42]           Gary Swanson, spécialiste senior de l’environnement, Manitoba Hydro, Témoignages, 30 novembre 2016.

[43]           Justyna Laurie-Lean, vice‑présidente, Environnement et affaires réglementaires, Association minière du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[44]           First Nations Fisheries Council de la Colombie‑Britannique, Mémoire, 29 novembre 2016.

[45]           Gouvernement Mi’kmaq de Listuguj, Mémoire, 30 novembre 2016.

[46]           Première Nation Biigtigong Nishnaabeg, Mémoire, 30 novembre 2016.

[47]           La Nation des Malécites du Nouveau-Brunswick, Mémoire, 30 novembre 2016.

[48]           Nicola Tribal Association, Mémoire, 31 octobre 2016.

[49]           Lower Fraser Fisheries Alliance, Mémoire, 30 novembre 2016.

[50]           Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse, Mémoire, 30 novembre 2016.

[51]           Assemblée des chefs du Manitoba, Mémoire, 30 novembre 2016 [traduction].

[52]           David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[53]           Bureau du vérificateur général du Canada, La protection de l’habitat du poisson, chap. 1 dans Rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable – Printemps 2009, 2009.

[54]           David Schindler, professeur émérite du Killam Memorial, Université de l’Alberta, à titre personnel, Témoignages, 7 décembre 2016.

[55]           Linda Nowlan, conseillère du personnel, West Coast Environmental Law, Témoignages, 23 novembre 2016.

[56]           Kevin Stringer, sous‑ministre délégué, MPO, Témoignages, 2 novembre 2016.

[57]           Trevor Taylor, directeur de la conservation des pêches, Océans Nord Canada, Témoignages, 28 novembre 2016.

[58]           David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[59]           Conseil des allocations aux entreprises d’exploitation du poisson de fond, Mémoire, 30 novembre 2016.

[60]           MPO, Projets près de l’eau. Les plans d’eau artificiels pour lesquels un examen du MPO n’est pas exigé ne doivent pas être reliés à un plan d’eau naturel qui abrite des poissons à quelque moment que ce soit dans l’année.

[61]           Kate Lindsay, directrice, Réglementation environnementale et biologie de conservation, Association des produits forestiers du Canada, Témoignages, 5 décembre 2016.

[62]           Brian Parker, gestionnaire principal des pêches, Direction de la faune et de la pêche, Développement durable Manitoba, Témoignages, 28 novembre 2016.

[63]           Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l’agriculture, Témoignages, 21 novembre 2016.

[64]           Elizabeth Hendriks, vice‑présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[65]           Federation of Sovereign Indigenous Nations, Mémoire, 28 novembre 2016.

[66]           Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[67]           Alberta Association of Municipal Districts and Counties et Saskatchewan Association of Rural Municipalities, Mémoire, 3 novembre 2016.

[68]           Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l’agriculture, Témoignages, 21 novembre 2016.

[69]           Fawn Jackson, gestionnaire, environnement et durabilité, Environnement et développement durable, Canadian Cattlemen’s Association, Témoignages, 30 novembre 2016.

[70]           Matthew Pickard, membre et vice‑président, Environnement et durabilité, Sabrina Gold and Silver Corp., Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, Témoignages, 7 décembre 2016.

[71]           Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[72]           Chris Bloomer, président et chef de la direction, Association canadienne des pipelines d’énergie, Témoignages, 5 décembre 2016.

[73]           Francis Bradley, chef des opérations, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[74]           Dan Gibson, spécialiste principal de l’environnement, Association canadienne de l’hydroélectricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[75]           Fawn Jackson, gestionnaire, environnement et durabilité, Environnement et développement durable, Canadian Cattlemen’s Association, Témoignages, 30 novembre 2016.

[76]           Ontario Federation of Anglers and Hunters, Mémoire, 30 novembre 2016.

[77]           Comité conjoint de chasse, de pêche et de piégeage, Mémoire, 9 novembre 2016.

[78]           Conseil des Mohawks de Kahnawake, Mémoire, 30 novembre 2016.

[79]           Krystyn Tully, vice‑présidente, Lake Ontario Waterkeeper, Témoignages, 14 novembre 2016.

[80]           Otto Langer, biologiste des pêches, à titre personnel, Témoignages, 23 novembre 2016.

[81]           Steve Crocker, ministre, ministère des Pêches, Forêts et Agroalimentaire, gouvernement de Terre‑Neuve‑et‑Labrador, Témoignages, 28 novembre 2016.

[82]           Stephen Sutton, coordonnateur de la sensibilisation et de la mobilisation communautaires, Fédération du saumon atlantique, Témoignages, 28 novembre 2016.

[83]           Zo Ann Morten, directrice exécutive, The Pacific Streamkeepers Federation, Témoignages, 7 décembre 2016.

[84]           Fédération canadienne des municipalités, Mémoire, 30 novembre 2016.

[85]           Newfoundland and Labrador Environmental Industry Association, Mémoire, 29 septembre 2016.

[86]           Derek Sturko, sous‑ministre, ministère de l’Agriculture, gouvernement de la Colombie‑Britannique, Mémoire, 30 novembre 2016 [traduction].

[87]           Commission de gestion des ressources halieutiques et fauniques du Yukon et Sous‑comité du saumon du Yukon, Mémoire, 30 novembre 2016.

[88]           Margot Davis, directrice, Développement durable, Ville de Port Moody, Mémoire, 30 novembre 2016.

[89]           Brett Favaro, chercheur scientifique, Fisheries and Marine Institute, Memorial University of Newfoundland, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[90]           Martin Olszynski, professeur adjoint, Faculty of Law and Affiliated Faculty, Canadian Institute of Resources Law, University of Calgary, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[91]           Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[92]           Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[93]           Bande indienne Kitsumkalum, Mémoire, 30 novembre 2016.

[94]           Nielsen, Delaney + Associates et Publivate, Consultation du MPO sur l’examen de la Loi sur les pêches : rapport final, préparé pour Pêches et Océans Canada, 19 décembre 2016.

[95]           Bureau du vérificateur général du Canada, La protection de l’habitat du poisson, chap. 1 dans Rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable – Printemps 2009, 2009.

[96]           Brian Parker, gestionnaire principal des pêches, Direction de la faune et de la pêche, Développement durable Manitoba, Témoignages, 28 novembre 2016.

[97]           Patrick McDonald, gestionnaire, Sables bitumineux, Association canadienne des producteurs pétroliers, Témoignages, 30 novembre 2016.

[98]           Avant les modifications apportées à la Loi en 2012, les projets qui présentaient un faible risque n’étaient pas assujettis à un examen du MPO aux termes de l’article 35 si les consignes de planification étaient suivies. Ces consignes étaient établies dans les énoncés opérationnels, qui « expos[aient] les mesures à prendre et les conditions à respecter pour éviter de détériorer, détruire ou perturber (DDP) l’habitat du poisson » afin de veiller à ce que le projet soit « conforme au paragraphe 35(1) de la Loi sur les pêches ».

[99]           Dan Gibson, spécialiste principal de l’environnement, Association canadienne de l’hydroélectricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[100]         Kate Lindsay, directrice, Réglementation environnementale et biologie de conservation, Association des produits forestiers du Canada, Témoignages, 5 décembre 2016.

[101]         Canards Illimités Canada, Mémoire, 12 décembre 2016.

[102]         Martin Olszynski, professeur adjoint, Faculty of Law and Affiliated Faculty, Canadian Institute of Resources Law, University of Calgary, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[103]         Derek Sturko, sous-ministre, ministère de l’Agriculture, gouvernement de la Colombie-Britannique, Mémoire, 30 novembre 2016 [TRADUCTION].

[104]         David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[105]         Dominic LeBlanc, ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, gouvernement du Canada, Témoignages, 2 novembre 2016.

[106]         Margot Venton, avocate‑conseil à l’interne et directrice du programme marin, Ecojustice, Témoignages, 28 novembre 2016.

[107]         Comité mixte de gestion de la pêche, Mémoire, novembre 2016.

[108]         A‑Tlegay Fisheries Society, Mémoire, 30 novembre 2016.

[109]         Graeme Gawn, membre du conseil d’administration, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[110]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[111]         Brenda Gaertner, First Nations Fisheries Council of British Columbia, Témoignages, 7 décembre 2016.

[112]         Elizabeth Hendriks, vice-présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[113]         Première Nation crie Mikisew, Mémoire, 30 novembre 2016.

[114]         Conseil tribal de Nuu-chah-nulth, Mémoire, 30 novembre 2016.

[115]         Michael d’Eça, conseiller juridique, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, Témoignages, 7 décembre 2016.

[116]         Brian Parker, gestionnaire des pêches senior, directeur de la faune et de la pêche, Manitoba Sustainable Development, Témoignages, 28 novembre 2016.

[117]         Steve Crocker, ministre, ministère des Pêches, Forêts et Agroalimentaire, gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, Témoignages, 28 novembre 2016.

[118]         Alberta Association of Municipal Districts and Counties, Mémoire, 27 octobre 2016.

[119]         Fawn Jackson, gestionnaire, environnement et durabilité, Environnement et développement durable, Canadian Cattlemen’s Association, Témoignages, 30 novembre 2016.

[120]         Kate Lindsay, directrice, Réglementation environnementale et biologie de conservation, Association des produits forestiers du Canada, Témoignages, 5 décembre 2016.

[121]         Derek Sturko, sous-ministre, ministère de l’Agriculture, gouvernement de la Colombie-Britannique, Mémoire, 30 novembre 2016 [traduction].

[122]         Zo Ann Morten, directrice exécutive, Pacific Streamkeepers Federation, Témoignages, 7 décembre 2016.

[123]         Chef Robert Chamberlin, vice-président, Union of British Columbia Indian Chiefs, Témoignages, 21 novembre 2016.

[124]         Brenda Gaertner, First Nations Fisheries Council of British Columbia, Témoignages, 7 décembre 2016.

[125]         Première Nation crie Mikisew, Mémoire, 30 novembre 2016.

[126]         Chris Bloomer, président et chef de la direction, Association canadienne de pipelines d’énergie, Témoignages, 5 décembre 2016.

[127]         Otto Langer, biologiste des pêches, à titre personnel, Témoignages, 23 novembre 2016.

[128]         Fédération des Métis du Manitoba, Mémoire, 30 novembre 2016.

[129]         Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l’Agriculture, Témoignages, 21 novembre 2016.

[130]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[131]         David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[132]         Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[133]         Conseil canadien des pêches, Mémoire, 30 novembre 2016.

[134]         Martin Olszynski, professeur adjoint, Faculty of Law and Affiliated Faculty, Canadian Institute of Resources Law, University of Calgary, à titre personnel, Témoignages, 31 octobre 2016.

[135]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[136]         Michael d’Eça, conseiller juridique, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, Témoignages, 7 décembre 2016.

[137]         Margot Venton, avocate-conseil à l’interne et directrice du programme matin, Écojustice Canada, Témoignages, 28 novembre 2016.

[138]         Brenda Gaertner, First Nations Fisheries Council of British Columbia, Témoignages, 7 décembre 2016.

[139]         Première Nation crie Mikisew, Mémoire, 30 novembre 2016.

[140]         Gary Swanson, spécialiste senior de l’environnement, Manitoba Hydro, Témoignages, 30 novembre 2016.

[141]         Dan Gibson, spécialiste principal de l’environnement, Association canadienne de l’hydroélectricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[142]         First Nations Fisheries Council of British Columbia, Mémoire, 29 novembre 2016.

[143]         Graeme Gawn, membre du conseil d’administration, Fédération des pêcheurs indépendants au Canada Témoignages, 14 novembre 2016.

[144]         Eastern Shore Fisherman’s Protective Association, Mémoire, 28 novembre 2016.

[145]         Grand Manan Fishermen’s Association, Mémoire, 25 novembre 2016.

[146]         Union des pêcheurs des Maritimes, Mémoire, 29 novembre 2016.

[147]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[148]         Chef Robert Chamberlin, vice-président, Union of British Columbia Indian Chiefs, Témoignages, 21 novembre 2016.

[149]         Nikki Skuce, directrice, Northern Confluence, Mémoire, 30 novembre 2016.

[150]         Steve Crocker, ministre, ministère des Pêches, Forêts et Agroalimentaire, gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, Témoignages, 28 novembre 2016.

[151]         Matt Sullivan, directeur exécutif, P.E.I. Aquaculture Alliance, Témoignages, 5 décembre 2016.

[152]         Kristi Miller-Saunders, directrice, génétique moléculaire, station biologique du Pacifique, ministère des Pêches et des Océans, Témoignages, 30 novembre 2016.

[153]         Elizabeth Hendriks, vice-présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016

[154]         Marc Allain, secrétaire exécutif, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[155]         Cape Breton Fish Harvesters Association, Mémoire, 29 novembre 2016.

[156]         Capitaines-Propriétaires de la Gaspésie, Mémoire, 28 novembre 2016.

[157]         BC Seafood Alliance, Mémoire, novembre 2016.

[158]         Conseil canadien des pêches, Mémoire, 30 novembre 2016.

[159]         Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité Témoignages, 5 décembre 2016.

[160]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[161]         Trevor Taylor, directeur de la conservation des pêches, Océans Nord Canada, Témoignages, 28 novembre 2016.

[162]         First Nations Fisheries Council of British Columbia, Mémoire, 29 novembre 2016.

[163]         Gary Swanson, spécialiste senior de l’environnement, Manitoba Hydro, Témoignages, 30 novembre 2016.

[164]         British Columbia Commercial Fishing Caucus, Mémoire, 30 novembre 2016.

[165]         Elizabeth Hendriks, vice-présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[166]         Trevor Taylor, directeur de la conservation des pêches, Océans Nord Canada, Témoignages, 28 novembre 2016.

[167]         Bureau du vérificateur général du Canada, Assurer la durabilité des principaux stocks de poissons du Canada – Pêches et Océans Canada, Rapport 2, Automne 2016 – Rapports de la commissaire à l’environnement et au développement durable.

[168]         Stephen Sutton, coordonnateur de la sensibilisation et de la mobilisation communautaires, Fédération du saumon atlantique, Témoignages, 28 novembre 2016.

[169]         Oceana Canada, Mémoire, 30 novembre 2016.

[170]         Elizabeth Hendriks, vice-présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[171]         Susanna Fuller, coordonnatrice principale de la conservation marine, Centre d’action écologique, Témoignages, 21 novembre 2016.

[173]         Graeme Gawn, membre du conseil d’administration, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[174]         Marc Allain, secrétaire exécutif, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[175]         Eastern Shore Fisherman’s Protective Association, Mémoire, 28 novembre 2016.

[176]         Gulf Nova Scotia Fleet Planning Board, Mémoire, 25 novembre 2016.

[177]         Prince Edward Island Fishermen’s Association, Mémoire, 25 novembre 2016.

[178]         Regroupement des pêcheurs professionnels de la Haute et de la Moyenne Côte-Nord, Mémoire, 29 novembre 2016.

[179]         Steve Crocker, ministre, ministère des Pêches, Forêts et Agroalimentaire, gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, Témoignages, 28 novembre 2016.

[180]         Marc Allain, secrétaire exécutif, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[181]         Nick Lapointe, biologiste principal spécialiste de la conservation, écosystème d’eau douce, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[182]         Brenda Gaertner, First Nations Fisheries Council of British Columbia, Témoignages, 7 décembre 2016.

[183]         Bureau du vérificateur général du Canada, La protection de l’habitat du poisson, chap. 1 dans Rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable – Printemps 2009, 2009.

[184]         Elizabeth Hendriks, vice-présidente, eau douce, Fonds mondial pour la nature-Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.

[185]         Les flux environnementaux se définissent comme « le niveau, les périodes et la qualité (dans la mesure où cette dernière est influencée par les variations de quantité) de débits d’eau requis pour assurer la pérennité des écosystèmes d’eau douce et estuariens ainsi que la subsistance et le bien‑être des humains qui dépendent de ces écosystèmes ». Voir : Andrew Harwood et coll., Environmental Flow Needs: Approaches, Successes and Challenges, rapport sommaire, produit pour le Conseil canadien des ministres de l’environnement, Ecofish Research Ltd., 25 juillet 2014 [en anglais seulement, résumé en français].

[186]         David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[187]         Ville de Maple Ridge, Mémoire, 28 novembre 2016.

[188]         Lina Azeez, administratrice de projet, Watershed Watch Salmon Society, Témoignages, 30 novembre 2016.

[189]         Randy Christensen, conseiller juridique, Watershed Watch Salmon Society, Témoignages, 30 novembre 2016.

[190]         Linda Nowlan, conseillère du personnel, West Coast Environmental Law, Témoignages, 23 novembre 2016.

[191]         David Browne, directeur de la conservation, Fédération canadienne de la faune, Témoignages, 31 octobre 2016.

[192]         Fédération canadienne de la faune, Mémoire, 30 novembre 2016 [traduction].

[193]         Jay Walmsley, scientifique principale en environnement, Aquatique, Nova Scotia Power, Association canadienne de l’électricité, Témoignages, 5 décembre 2016.

[194]         Port de Vancouver, Mémoire, 30 novembre 2016.

[195]         Chef Robert Chamberlin, vice-président, Union of British Columbia Indian Chiefs, Témoignages, 21 novembre 2016.

[196]         Trevor Taylor, directeur de la conservation des pêches, Océans Nord Canada, Témoignages, 28 novembre 2016.

[197]         Raymond Andrews, conseiller en halieutique, Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, Témoignages, 7 décembre 2016.

[198]         Nunavut Tunngavik Incorporated, Mémoire, 10 novembre 2016.

[199]         Commission de gestion des ressources halieutiques et fauniques du Yukon, Mémoire, 30 novembre 2016.

[200]         Federation of Sovereign Indigenous Nations, Mémoire, 28 novembre 2016.

[201]         Justyna Laurie-Lean, vice-présidente, Environnement et affaires réglementaires, Association minière du Canada, Témoignages, 14 novembre 2016.