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Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur d'intervenir aujourd'hui à la Chambre pour parler du projet de loi .
Comme tous mes collègues, j'étais à la Chambre lorsque le a présenté des excuses historiques à la communauté LGBTQ2. Les chefs de tous les partis représentés à la Chambre ont par la suite fait écho à ces sentiments. Ce fut un moment très émouvant.
Je me souviens d'avoir débattu du mariage entre personnes de même sexe à la Chambre. Je me souviens à quel point le débat avait été difficile et aussi à quel point j'étais fier d'appuyer le projet de loi. Il est très encourageant de constater les progrès qui ont été réalisés à cet égard au pays.
J'ai assisté à un événement organisé par Canadian Human Rights Voice où on rendait hommage à Todd Ross, et M. Ross y a parlé de son expérience. Il a servi dans les Forces armées canadiennes avec distinction. Cependant, encore tout jeune homme, on l'a soumis au détecteur de mensonges et il a été forcé d'avouer à deux étrangers qu'il était gai, chose qu'il n'avait encore révélée à personne, et il a été renvoyé des forces armées. C'était une expérience remarquable de l'entendre raconter son histoire et parler de ce que les excuses du et des chefs de parti signifiaient pour lui. Ces excuses ont déjà un effet positif, on peut le constater. Elles ne sont toutefois pas suffisantes.
Le a affirmé que de telles injustices ne se reproduiraient jamais et que nous ne ferions pas les mêmes erreurs. C'est essentiel, en effet. Il est donc absolument crucial de collaborer avec la communauté des lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres, queers et bispirituels afin de corriger les torts du passé et de voir à ce qu'ils ne se reproduisent plus. Nous sommes fiers de la relation que nous avons avec cette communauté, mais nous savons qu'il reste beaucoup à faire. Le projet de loi jouera un rôle essentiel à cet égard.
Pour bien des gens parmi nous, il est difficile d'imaginer qu'il y a déjà eu un temps où les gens pouvaient être poursuivis au criminel et condamnés en raison du sexe de la personne qu'ils aimaient. À cause de leur orientation sexuelle, les lesbiennes, les gais, les bisexuels, les transgenres, les queers et les bispirituels étaient humiliés et emprisonnés et se retrouvaient avec un casier judiciaire. Leur réputation était pour toujours entachée alors qu'ils n'avaient rien fait de mal avant d'être arrêtés.
Le projet de loi , Loi sur la radiation de condamnations constituant des injustices historiques, créerait un processus qui détruirait de façon permanente le dossier de condamnation des personnes ayant pratiqué de façon consensuelle des activités qui seraient licites aujourd'hui avec un partenaire du même sexe. Il accorderait à la Commission des libérations conditionnelles du Canada le pouvoir d'ordonner la radiation d'une condamnation ou de la refuser. À la suite de cette ordonnance, la personne dont on a radié la condamnation est réputée n'avoir jamais été reconnue coupable de l'infraction en cause.
Ce processus est très différent de ce qui existe déjà. En effet, la suspension du casier judiciaire et la réhabilitation, qui servent à lever les obstacles nuisant à la réinsertion sociale des anciens délinquants, n'entraînent pas la destruction du casier judiciaire. Elles permettent d'en faire abstraction dans la plupart des circonstances, mais le casier judiciaire peut être divulgué ou révoqué dans des cas où la sécurité publique est en jeu. De plus, la suspension du casier judiciaire et la réhabilitation ne peuvent pas être accordées à titre posthume. Les personnes décédées ne peuvent donc pas être innocentées.
En revanche, le gouvernement est pleinement conscient que ces condamnations constituent des injustices historiques et que les personnes visées ne devraient pas être considérées comme des anciens délinquants. Ces condamnations étaient répréhensibles à l'époque, et elles le sont toujours. Elles contreviennent à la Charte et à nos droits fondamentaux. Ces condamnations ont été imposées pour des actes qui n'auraient jamais dû être des crimes. Toutefois, le processus de radiation permettra de les éliminer entièrement et de façon permanente des bases de données fédérales.
Ce processus sera simple pour les milliers de Canadiens visés. La demande sera gratuite. Les personnes admissibles peuvent présenter une demande directement à la Commission des libérations conditionnelles. Dans le cas de personnes décédées, un membre de la famille, un être cher ou tout autre représentant pourra présenter une demande en leur nom, ce qui est conforme à la recommandation du Fonds Égale Canada pour les droits de la personne.
Les demandeurs devront fournir la preuve que la condamnation respecte certains critères, notamment que l'acte visé par l'infraction était entre des personnes du même sexe; qu'il était consensuel; et que les participants étaient âgés d'au moins 16 ans ou qu'ils auraient pu se prévaloir de l'exemption de proximité d'âge aux termes du Code criminel.
Le dossier de la condamnation pourra être détruit dès qu'il aura été confirmé que la demande a été accordée. Cela signifie que lorsque la commission des libérations conditionnelles ordonne la radiation, la GRC doit détruire de façon permanente tout dossier de la condamnation en sa possession. La GRC doit aussi aviser tout ministère ou organisme fédéral, ainsi que toute cour de justice ou force de police provinciale ou municipale qui, à sa connaissance, conserve un dossier judiciaire relatif à la condamnation et leur demander d'en faire autant.
La radiation fait plus qu'expurger le casier judiciaire. C'est une façon de reconnaître que la condamnation était injuste et qu'elle n'aurait jamais dû exister en premier lieu, que c'était contraire aux droits fondamentaux maintenant protégés par la Charte des droits et libertés.
Cela ne veut pas dire que la radiation s'appliquera dans tous les cas. En effet, nous voulons seulement qu'elle s'applique dans les cas qui répondent aux critères. Les casiers judiciaires des personnes déclarées coupables d'activités sexuelles non consensuelles seront maintenus. Les demandes soumises pour une infraction non visée ou par un demandeur non admissible seront également rejetées. Par ailleurs, il serait irresponsable d'appliquer le processus de radiation de façon systématique, puisque cela pourrait mener à la radiation de condamnations pour des gestes qui sont encore criminels.
Cependant, le processus de radiation serait très simple pour les personnes admissibles, y compris les militaires qui, dans certains cas, ont fait l'objet de poursuites aux termes de la Loi sur la défense nationale. À cette fin, nous avons prévu une liste des infractions aux termes du Code criminel et de la Loi sur la défense nationale qui seront visées par le processus de radiation.
Les demandes devront se rapporter à des infractions incluses dans l'annexe de la loi, qui inclura d'abord les condamnations pour sodomie, grossière indécence et relations sexuelles anales.
Par la suite, la loi permettrait au gouverneur en conseil de rendre admissibles à la radiation d'autres formes de condamnation injuste en modifiant, par décret, l'annexe des infractions admissibles et, au besoin, certains critères connexes.
Étant donné qu'il est question de corriger des injustices historiques, si les dossiers judiciaires ou policiers ne sont pas accessibles, les déclarations sous serment peuvent être acceptées comme éléments de preuve.
Il est à noter que toute personne qui tente d'induire en erreur la commission des libérations conditionnelles au sujet d'une condamnation constituant une injustice historique peut être accusée de parjure.
Pour réaliser tout cela, le gouvernement a mis de côté 4 millions de dollars sur deux ans pour mettre en oeuvre le nouveau processus. Des efforts proactifs de communication seront également entrepris pour mieux faire connaître l'initiative, les critères d'admissibilité et le processus de demande aux demandeurs potentiels. Le gouvernement collaborera avec des partenaires fédéraux et des intervenants de la communauté LGBTQ2 pour informer les demandeurs potentiels.
Il nous incombe maintenant de veiller à ce que cela se fasse dès que possible.
Aussitôt le projet de loi adopté, nous pourrons commencer à recevoir des demandes. C'est pourquoi j'encourage tous les députés à adopter le projet de loi le plus rapidement possible. La Commission des libérations conditionnelles du Canada peut commencer à recevoir des demandes dès l'entrée en vigueur de cette mesure législative.
Le gouvernement a annoncé le règlement du recours collectif concernant les gestes commis lors de la purge en même temps qu'il a présenté le projet de loi. Les anciens fonctionnaires, militaires et membres de la GRC touchés par l'oppression et le rejet systémiques sanctionnés par l'État pourront donc recevoir jusqu'à 145 millions de dollars.
L'entente de principe comprend également un investissement minimal de 15 millions de dollars par le gouvernement du Canada pour des projets qui commémoreront et feront état de ces événements historiques pour ne jamais oublier notre passé et ne jamais répéter celui-ci à l'avenir. Il y aura notamment des expositions organisées par le Musée canadien des droits de la personne, un monument national ici, à Ottawa, ainsi qu'une trousse pédagogique pour commémorer la discrimination historique contre la communauté LGBTQ2.
Comme je l'ai mentionné, tout cela représente un pas important, mais non une panacée. La création du pays diversifié et inclusif que nous désirons exigera une collaboration soutenue de la part de tous.
Comme l'a fait remarquer le dans ses excuses, « La discrimination contre les communautés LGBTQ2 ne s'est pas limitée à une époque particulière. Elle dure depuis des siècles. Désormais, nous voulons être le partenaire et l'allié des Canadiens qui font partie des communautés LGBTQ2. »
C'est pourquoi nous déployons beaucoup d'efforts, et continuerons de le faire, pour nous attaquer aux problèmes qui touchent les lesbiennes, les gais, les bisexuels, les transgenres, les queers et les personnes bispirituelles.
Je suis extrêmement fier de ce que le gouvernement a accompli jusqu'à maintenant et du travail qu'il continue de faire. Il y a un peu plus d'un an, le a nommé le député d' conseiller spécial pour les questions touchant la communauté LGBTQ2. Par ailleurs, nous avons créé un secrétariat LGBTQ2 à l'intérieur du Conseil privé pour appuyer les initiatives du gouvernement dans ce dossier.
Grâce à l'adoption récente du projet de loi , l'identité et l'expression de genre ont été ajoutées à la liste des motifs de distinction illicite dans la Loi canadienne sur les droits de la personne. Le projet de loi C-16 élargit aussi la portée des dispositions du Code criminel sur la propagande haineuse afin de protéger les personnes ciblées en raison de leur identité de genre ou de leur expression de genre. Le gouvernement a présenté un autre projet de loi, le , en vue d'abroger l'article 159 du Code criminel.
En outre, il travaille actuellement à l'élaboration d'une vision à long terme pour les services de collecte de sang afin de s'assurer que les pratiques en matière de dons sont sûres et non discriminatoires. En fait, dans sa lettre de mandat, la a reçu l'instruction de collaborer avec les provinces et les territoires pour atteindre cet objectif.
Le gouvernement s'apprête à adopter de nouvelles politiques et pratiques visant à éliminer la collecte inutile de renseignements liés au genre dans les formulaires gouvernementaux. En outre, l'identifiant x sera inclus dans le formulaire de demande de passeport. Ainsi, les Canadiens qui ne s'identifient ni comme homme ni comme femme recevront les mêmes services et le même soutien que tout le monde.
Le gouvernement se prépare également à souligner le 50e anniversaire de la décriminalisation de l'homosexualité, en 2019, en finançant une campagne d'information sur le combat livré pour opérer ce tournant historique et les personnes qui l'ont mené.
Par exemple, le fédéral a versé plus de 770 000 $ au Fonds Égale Canada pour les droits de la personne afin d'appuyer le projet d'exposition itinérante intitulée « Legalizing Love: The Road to June 27, 1969 ».
Par ailleurs, je suis fier de souligner que le Canada travaille résolument à la promotion des droits des membres de la communauté LGBTQ2 sur la scène internationale, notamment en tant que coprésident de la coalition sur l'égalité des droits.
Depuis 2014, nous avons fourni du financement à hauteur de 2,9 millions de dollars à des programmes de prévention de la violence, à des campagnes de sensibilisation et à des activités de défense des communautés LGBTQ2 à l'étranger. Ces projets visent entre autres à lutter contre l'homophobie, la transphobie et la biphobie dans les systèmes d'éducation.
Au Canada, nous savons que le taux d'itinérance est anormalement élevé chez les jeunes des communautés LGBTQ2. Selon une étude de Statistique Canada publiée en 2016, bien que les membres des communautés LGBTQ2 forment entre 5 % et 10 % de la population, ils représentent entre 25 % et 40 % des jeunes Canadiens sans-abri. Des installations exceptionnelles destinées exclusivement à cette population très vulnérable sont actuellement en construction à Toronto. Le Centre Égale offrira des logements d'urgence et de transition, de même que des services d'aide psychologique, aux jeunes itinérants de la communauté LGBTQ2.
La semaine dernière, le gouvernement a annoncé qu'il accordait un peu plus de 47 800 $ pour renforcer la sécurité au Centre Égale. Le financement servira à l'installation de caméras de sécurité et de systèmes de contrôle d'accès. Grâce à ces mesures resserrées, le Centre Égale offrira un milieu plus sécuritaire aux résidents, au personnel et aux bénévoles, qui auront ainsi l'esprit plus tranquille.
Je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui tient à protéger les droits fondamentaux de tous les Canadiens. Tous doivent être en mesure de vivre sans avoir à subir la stigmatisation, la violence, la discrimination ou les préjugés, peu importe leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre.
Malheureusement, comme nous le savons tous, à une certaine époque de notre histoire, l'attitude générale par rapport aux enjeux liés à la communauté LGBTQ2 était très différente de celle qui prévaut aujourd'hui. Des personnes pouvaient être accusées et condamnées au criminel tout simplement en raison de leur orientation sexuelle. Elles pouvaient perdre leur emploi, leur gagne-pain et leurs êtres chers. Certaines se voyaient refuser la possibilité de servir leur pays. Elles risquaient d'être intimidées, ostracisées et considérées comme des parias par leur propre gouvernement.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui fera époque. Il marque un tournant majeur et nécessaire pour corriger la discrimination qu'ont trop longtemps subie les Canadiens LGBTQ2. Nous franchissons un jalon important, mais c'est loin d'être le dernier, car, dans le contexte mondial actuel, les réponses aux appels à l'égalité arrivent peu à peu.
Pas plus tard qu'hier, l'Australie a légalisé le mariage homosexuel. Elle a ainsi suivi les traces du Royaume-Uni, de l'Allemagne et de beaucoup d'autres pays. Tous cherchent aussi à réparer les torts que la discrimination a causés, des années durant, aux communautés LGBTQ2 sur leur territoire.
Encore aujourd'hui, beaucoup de personnes LGBTQ2 sont forcées de vivre dans la peur, celle du rejet, de la haine, de la violence et même de la mort, tout simplement parce qu'elles aiment qui elles aiment. Parfois, le fossé est si vaste qu'on dirait deux mondes irréconciliables. Cependant, comme on le sait, l'eau d'une rivière finit un jour par percer le roc; ce n'est pas une question de puissance, mais de persistance. Or, les appels à un monde inclusif où la diversité est valorisée sont plus forts et plus persistants que jamais. Les excuses présentées par tous les chefs à la Chambre en sont un bon exemple. Nous avons uni nos voix pour reconnaître notre part de responsabilité en ce qui concerne les erreurs du passé. Nous avons parlé de l'avenir auquel nous aspirons, pour les Canadiens, oui, mais aussi pour tous les peuples de la planète, un avenir où les droits fondamentaux de la personne sont respectés, y compris un droit aussi simple que celui d'aimer une personne sans craindre les représailles. Voilà ce que nous pouvons défendre et propager.
Je suis fier de présenter ce projet de loi et je presse instamment tous les députés d'appuyer son adoption rapide.
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Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur d'intervenir aujourd'hui au nom du NPD pour appuyer le projet de loi et pour plaider en faveur de son adoption rapide.
En tant que membre de la communauté LGBTQ2, j'ai trouvé que les excuses présentées par le gouvernement la semaine dernière ont constitué un moment historique, qui était attendu depuis longtemps. Ces excuses vont paver la voie vers une société canadienne plus juste et plus inclusive pour tout le monde. J'ai l'impression de suivre les traces laissées au cours des 50 dernières années par de nombreux militants courageux et infatigables. Je tiens aussi à souligner le travail important réalisé par d'anciens députés néo-démocrates, comme Svend Robinson, Libby Davies, Bill Siksay et Craig Scott, qui ont ouvert la voie à la présence de gais et de lesbiennes à la Chambre.
Je tiens tout particulièrement à rendre hommage à mon collègue le député d', dont les efforts infatigables ont permis aux Canadiens transgenres et non binaires de jouir enfin des mêmes protections et des mêmes droits que ceux qui sont consentis à tous les autres Canadiens.
Les excuses qui ont été présentées la semaine dernière par le au nom du gouvernement du Canada ont énormément ému de nombreux Canadiens, dont moi. Alors même que nous célébrions l'occasion et que nous nous réjouissions à l'idée de corriger des injustices passées, il était inévitable que la journée rappelle aussi de mauvais souvenirs au sujet de la souffrance des Canadiens.
En 1965, Everett Klippert, de la Saskatchewan, est devenu le dernier Canadien à être emprisonné parce qu'il était gai. Il a été déclaré délinquant sexuel dangereux et a été condamné à l'emprisonnement à perpétuité en 1966. La Cour suprême du Canada a confirmé sa déclaration de culpabilité jusqu'à ce qu'il soit libéré en 1971, deux ans après que le projet de loi du ministre de la Justice de l'époque, Pierre Trudeau, ait légalisé les actes homosexuels consensuels. Le journaliste John Ibbitson, qui avait dressé le profil de Klippert, a récemment déclaré en entrevue:
Il ne se considérait pas comme un pionnier du mouvement de défense des droits des gais. Il n'était qu'un homme qui aimait conduire des camions et qui, en fin de compte, aimait aussi les hommes.
Everett n'était que le dernier Canadien à être emprisonné pour avoir aimé une personne du même sexe que lui.
D'innombrables Canadiens ont vu leur vie être anéantie et changée radicalement parce qu'ils ont été persécutés en raison de qui ils sont. Bien que des excuses soient les bienvenues et représentent la bonne chose à faire, elles arrivent trop tard pour beaucoup d'entre eux. Elles sont arrivées trop tard pour Everett Klippert.
L'ensemble des changements, des avancées sur le plan juridique et des protections des droits fondamentaux de la personne qu'on a inscrit dans la loi et dans les politiques pour les membres de la communauté LGBTQ2 ont été accomplis parce qu'on a forcé les gouvernements et les institutions publiques à faire ce qui s'imposait contre leur gré. Espérons que cette époque est révolue et que c'est aujourd'hui que nous nous engageons, en tant que Parlement, à mettre fin à toute discrimination sanctionnée par l'État et à commencer à rendre justice aux victimes de cette discrimination, ce qui tarde depuis trop longtemps. Effectivement, espérons que, comme l'indique le titre de l'article d'opinion que Svend Robinson, ancien député du NPD, a publié dans le Globe and Mail, les innombrables Canadiens qui ont été humiliés par les politiques anti-gais pourront enfin commencer à panser leurs blessures.
Grâce aux militants et aux alliés de la communauté LGBTQ2 au Canada, on constate qu'on s'éloigne graduellement de la persécution et de l'imposition de peines injustes pour reconnaître lentement, mais sûrement, les droits des personnes LGBTQ2. Je tiens à donner un bref historique.
En 1969, l'homosexualité a cessé d'être un crime au Canada, mais il a tout de même fallu deux autres années avant qu'on libère Everett Klippert de prison.
En 1975, le doyen de la faculté d'éducation de l'Université de la Saskatchewan a empêché Doug Wilson, un étudiant de cycle supérieur de cette faculté, de superviser des élèves-maîtres dans les écoles parce qu'il était un militant gai. La commission des droits de la personne de la Saskatchewan a rejeté sa plainte de discrimination.
En décembre 1977, le Québec ajoute l'orientation sexuelle dans son code des droits de la personne, devenant ainsi la première province canadienne à adopter une mesure législative sur les droits civils des homosexuels. En 2001, toutes les provinces et tous les territoires en avaient fait autant.
En 1978, les homosexuels sont retirés des catégories de personnes visées par l'interdiction de territoire dans la nouvelle loi sur l'immigration du Canada.
En 1979, la Commission canadienne des droits de la personne recommande, dans son rapport annuel, que l'orientation sexuelle soit ajoutée dans la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'année suivante, la députée Pat Carney dépose le projet de loi C-242, qui vise à interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Ce projet de loi n'est pas adopté. Le député néo-démocrate Svend Robinson présente des projets de loi semblables en 1983, en 1985, en 1986, en 1989 et en 1991.
En 1991, M. Robinson tente de faire ajouter « ou de même sexe » à la définition de conjoint dans la Loi de l'impôt sur le revenu et la loi sur le Régime de pensions du Canada. En 1992, il tente de faire supprimer le terme « du sexe opposé » de la définition de conjoint dans le projet de loi C-55, qui vise à ajouter la définition aux dispositions sur les prestations aux survivants dans la loi sur les régimes de pension fédéraux. Tous les projets de loi proposés sont rejetés.
En 1987, Don Cochrane, un professeur en éducation à l'Université de la Saskatchewan, organise la première conférence Breaking the Silence pour discuter des problèmes auxquels se heurtaient les gais et les lesbiennes dans le système d'éducation. On a célébré la 30e édition de cette conférence cette année, mais cette année-là, les organisateurs ont dû embaucher des agents de sécurité pour protéger les participants contre la violence et le harcèlement verbaux et physiques que leur réservaient les manifestants.
En 1988, Svend Robinson est le premier député à faire connaître publiquement son homosexualité. Il avait été élu à la Chambre des communes pour la première fois en 1979. En 2000, il est élu pour une huitième fois dans la circonscription britanno-colombienne de Burnaby—Douglas, comme elle s'appelait à l'époque.
En 1991, Delwin Vriend, un moniteur de laboratoire du Collège universitaire King, à Edmonton, en Alberta, a été licencié parce qu'il était homosexuel. La Commission des droits de la personne de l'Alberta a refusé de mener une enquête, car l'Individual's Rights Protection Act de l'Alberta ne s'appliquait pas à la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Sept ans après la mise à pied de Delwin Vriend parce qu'il était homosexuel, l'affaire s'est rendue jusqu'à la Cour suprême. Finalement, le 2 avril 1998, la haute cour a jugé à l'unanimité que l'exclusion des homosexuels de l'Individual's Rights Protection Act de l'Alberta constituait une violation de la Charte des droits et libertés.
De plus, cette même année, dans ma collectivité, le centre de services de santé pour gais et lesbiennes de Saskatoon, qui s'appelle maintenant OUTSaskatoon, a ouvert ses portes grâce à la pure détermination et à la ténacité de Gens Hellquist. Ce centre a été créé afin de répondre aux besoins négligés des gais et des lesbiennes de la Saskatchewan sur le plan de la santé, ainsi que sur le plan social et émotionnel.
En août 1992, dans l'arrêt Haig et Birch c. Canada, la Cour d'appel de l'Ontario a jugé que le fait de ne pas inclure l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne était discriminatoire. La ministre fédérale de la Justice de l'époque, Kim Campbell, a réagi à la décision en annonçant que le gouvernement allait prendre les mesures nécessaires afin d'inclure l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.
En novembre 1992, une contestation judiciaire historique a été remportée par Michelle Douglas, qui avait été renvoyée de l'armée en 1989 parce qu'elle était lesbienne. La Cour fédérale a fini par lever, en 1992, l'interdiction de recruter des homosexuels dans l'armée et, cette année-là, pour la première fois, des gais et des lesbiennes ont pu servir avec fierté dans les forces armées.
En mai 1995, la Cour suprême a rendu un jugement dans l'affaire impliquant Jim Egan et Jack Nesbit, deux homosexuels qui ont poursuivi Ottawa pour avoir le droit de réclamer la pension de conjoint en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. Le tribunal a statué contre Egan et Nesbit. Toutefois, les neuf juges ont convenu que l'orientation sexuelle était un motif de distinction illicite selon la loi.
En 1995, un juge ontarien a déclaré que la Loi sur les services à l’enfance et à la famille de l'Ontario enfreignait l'article 15 de la Charte en ne permettant pas aux conjoints du même sexe de faire des demandes d'adoption ensemble. L'Ontario est devenu la première province à légaliser l'adoption par les conjoints du même sexe. La Colombie-Britannique, l'Alberta et la Nouvelle-Écosse ont peu après emboîté le pas.
En 1996, le gouvernement fédéral a finalement adopté le projet de loi C-33 et a ajouté l'orientation sexuelle à la Loi canadienne sur les droits de la personne.
En mai 1999, la Cour suprême du Canada a statué que les conjoints du même sexe devraient avoir les mêmes avantages et obligations que les conjoints de fait de sexes opposés et avoir droit aux mêmes prestations offertes par les programmes sociaux auxquels ils cotisent.
En juin de cette année-là, même si beaucoup de lois devaient être révisées pour qu'elles soient conformes à la décision rendue en mai par la Cour suprême, le Parlement a voté à 216 voix contre 55 pour le maintien de la définition du mariage voulant que ce soit l'union d'un homme et d'une femme.
En février 2000, les libéraux de l'ancien premier ministre Jean Chrétien ont déposé le projet de loi C-23, Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations, afin de donner suite à la principale décision de la Cour suprême. Ce projet de loi avait pour but d'accorder aux couples de même sexe qui vivent ensemble depuis plus d'un an les mêmes avantages et les mêmes obligations que tous les autres conjoints de fait. Le 11 avril 2000, le Parlement a adopté le projet de loi C-23 par un vote de 174 à 72. La loi donne aux couples de même sexe des avantages sociaux et fiscaux identiques à ceux des autres couples.
Au total, le projet de loi a modifié plus de 68 lois fédérales portant sur toute une gamme de questions: les prestations de retraite, la Sécurité de la vieillesse, les déductions fiscales, la protection de la loi sur les faillites et le Code criminel. Malgré cela, les définitions du mariage et des conjoints sont demeurées inchangées.
Le 10 décembre 2000, le révérend Brent Hawkes, de la Metropolitan Community Church, à Toronto, a lu pour la première fois, selon l'ancienne tradition chrétienne consistant à annoncer publiquement l'intention des futurs époux de se marier, des bans qui portaient sur le mariage de personnes de même sexe, en l'occurrence les mariages de deux couples, qui ont eu lieu le 14 janvier 2001. Le lendemain, le gouvernement de l'Ontario a réitéré la position du gouvernement selon laquelle les mariages ne seraient pas reconnus légalement.
C'est aussi au cours de l'année 2000 que Patti Rowley, une enseignante de l'école secondaire Mount Royal de Saskatoon, a assisté, lors d'un congrès des conseils scolaires, à un atelier sur les services de santé pour homosexuels. Un an après, elle a créé, dans cette école, une association fondée sur une alliance entre homosexuels et hétérosexuels. Elle organise toujours, 22 ans plus tard, des réunions hebdomadaires de cette association.
En mai 2002, le juge Robert MacKinnon, de la Cour suprême de l'Ontario, a conclu qu'un élève gai avait le droit d'amener son petit ami au bal des finissants. En juillet 2002, pour la toute première fois, un tribunal canadien s'est prononcé en faveur de la légalité des mariages homosexuels. La Cour supérieure de l’Ontario a jugé que le fait d’interdire le mariage aux couples gais était inconstitutionnel et contrevenait à la Charte des droits et libertés.
En février 2003, le député Svend Robinson a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire qui permettrait les mariages homosexuels. Le gouvernement fédéral avait déjà modifié plusieurs lois afin d'étendre aux partenaires de même sexe les mêmes avantages et obligations qui s'appliquent aux conjoints hétérosexuels de fait. En juin de la même année, la Cour d'appel de l'Ontario a confirmé le jugement rendu par un tribunal inférieur en faveur de la légalisation des mariages homosexuels. D'après le jugement rendu, la définition en common law du mariage viole les droits à l'égalité fondée sur l'orientation sexuelle.
En juin 2003, le gouvernement de l'Ontario a annoncé que la province se conformerait enfin à la loi et enregistrerait les mariages homosexuels. Plus d'une vingtaine de couples ont demandé un permis de mariage, en Ontario, le jour suivant.
En août 2003, le premier ministre Jean Chrétien a juré de ne pas laisser les objections religieuses modifier sa position sur le mariage homosexuel. Il a affirmé que les députés pourraient voter librement sur le projet de loi lorsque celui-ci serait présenté à la Chambre des communes, après son départ à la retraite, en 2004.
En décembre 2003, un tribunal ontarien a conclu qu'Ottawa discriminait les couples de même sexe en refusant aux survivants dont le partenaire était mort avant 1998 les prestations auxquelles ils auraient normalement droit. Le tribunal a déterminé que le versement de ces prestations serait rétroactif au 17 avril 1985, soit à la date à laquelle l'égalité a été ajoutée aux droits garantis par la Charte des droits et libertés.
En décembre 2004, la Cour suprême du Canada a conclu que le gouvernement fédéral pouvait changer la définition du mariage afin d'inclure les couples de même sexe. En février 2005, le gouvernement a finalement saisi la Chambre des communes d'un projet de loi accordant aux partenaires de même sexe la même protection juridique que celle dont jouissent les autres couples mariés. En mai de la même année, un sergent et un adjudant des Forces canadiennes se sont mariés en la chapelle de la base de Greenwood, en Nouvelle-Écosse. Il s'agissait du premier mariage gai de l'histoire de l'armée.
En juin 2005, la Chambre des communes a adopté le controversé projet de loi , Loi sur le mariage civil, par un vote de 158 voix contre 133. Il est entré en vigueur le 20 juillet de la même année, faisant du Canada le quatrième pays à reconnaître officiellement le mariage entre personnes de même sexe, après les Pays-Bas, la Belgique et l'Espagne.
Comme on peut le voir, la route qui a mené aux excuses de la semaine dernière fut parsemée d'embûches, et la résistance a été aussi opiniâtre que la lutte a été difficile, chaque bataille ayant dû être menée de nombreuses fois à de nombreux endroits.
Si les gouvernements, Parlements, services de police et autres institutions créées pour protéger la population continuaient de persécuter et de poursuivre les Canadiens de la communauté LGBTQ, des âmes courageuses et braves ont fait des changements, des changements positifs, en dépit des gouvernements. Une personne, une famille, une communauté à la fois se sont battues et elles ont sauvé des vies. Si ces excuses viennent malheureusement trop tard pour certaines de ces personnes courageuses, elles annoncent un avenir beaucoup plus serein pour celles qui vivent encore. Les excuses sont un premier pas et nous applaudissons le gouvernement pour les avoir faites.
Les néo-démocrates n’avaient pas hésité à demander des excuses dignes de ce nom et ils se félicitent que le gouvernement ait annoncé que le projet de loi comporterait des mesures de réparation. Des excuses sans réparation auraient été vides de sens. Des milliers de gens ont été condamnés injustement au cours des ans pour avoir eu des relations sexuelles consensuelles avec des personnes de même sexe et gardent un casier judiciaire qui leur nuit dans leurs déplacements, leur action bénévole et même la recherche d’un emploi.
Les néo-démocrates se sont battus pour faire en sorte qu’un projet de loi sur la radiation de ces condamnations soit déposé au moment de faire des excuses et nous sommes résolus à collaborer avec tous les parlementaires et le gouvernement pour que cette mesure législative soit adoptée le plus tôt possible. En radiant les condamnations infligées pour avoir eu des relations homosexuelles consensuelles, le gouvernement empêche que tout jugement discriminatoire continue de nuire aux gens dans leur vie quotidienne.
Le projet de loi n'est pas parfait, mais nous pensons que tous les problèmes relevés peuvent être corrigés sans qu'on amende le projet de loi et, par conséquent, qu'on en retarde l'adoption. Les néo-démocrates veulent que le processus de radiation du casier judiciaire des personnes ayant pratiqué de façon consensuelle des activités sexuelles avec une personne du même sexe soit mis en oeuvre dès maintenant. Pour que les excuses du gouvernement soient complètes et valides, il faut rapidement procéder aux mesures de réparation.
Le projet de loi ayant été présenté, nous voulons aussi que le gouvernement continue de veiller à ce que les états de service des membres des Forces armées canadiennes soient revus, qu'il saisisse très bientôt la Chambre du projet de loi visant à abroger l'article 159 du Code criminel et, il va sans dire, qu'il mette fin à l'interdiction empêchant les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes de donner du sang.
Je tiens à remercier tous ceux qui nous ont précédés ainsi que tous les gens qui continuent de bâtir un Canada plus inclusif et plus égalitaire. Malheureusement, il reste encore beaucoup de travail à faire.
Lors de la dernière campagne électorale, je me suis portée candidate dans Saskatoon-Ouest. Mon grand objectif était de mettre fin à l'itinérance. Comme le secrétaire parlementaire l'a dit, les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et queers sont surreprésentés parmi les sans-abri. On estime que de 25 à 40 % des jeunes itinérants font partie de la catégorie des LGBTQ2. Ces jeunes sont plus vulnérables et courent plus de risques de devenir sans-abri à cause de l'homophobie et de la transphobie. Les jeunes lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et queers quittent plus souvent le domicile familial en raison de la violence et des mauvais traitements dont ils sont victimes. Ils ne sont pas en sécurité chez eux. Ils choisissent alors de vivre littéralement dans la rue parce que l'homophobie et la transphobie les empêchent d'être bien accueillis par les centres d'hébergement et les services d'aide. Malgré la législation sur les droits de la personne, la Charte canadienne des droits et libertés et la légalisation du mariage entre personnes de même sexe, l'homophobie et la transphobie sont toujours très présentes au quotidien, dans notre langue et nos comportements, ainsi que dans les politiques et les pratiques de bien des organismes d'aide.
Dans la chronologie des événements que j'ai présentée aujourd'hui, j'ai rappelé de grandes premières canadiennes qui se sont produites dans ma province, la Saskatchewan. Ces événements sont des jalons marquants qui ont permis d'améliorer la vie des lesbiennes, des gais, des bisexuels, des transgenres, des queers et des bispirituels du Canada. Je veux conclure mon intervention en parlant d'une dernière grande première.
Cet automne, la première maison de jeunes LGBTQ2 au Canada, la Pride Home, a ouvert ses portes dans ma circonscription. Cette maison des jeunes est exploitée par l'extraordinaire organisme OUTSaskatoon. En 2016, un sondage mené par OUTSaskatoon a révélé que 40 % des jeunes LGBTQ2 de la région s'étaient déjà retrouvés sans abri à un certain point de leur jeune vie.
Nous espérons tous que viendra le jour où tous les jeunes LGBTQ2 — et, en fait, la totalité des jeunes — auront un foyer chaleureux et rempli d'amour où ils pourront compter sur le soutien de gens compréhensifs, mais, en attendant, heureusement qu'il y a des organismes comme OUTSaskatoon.