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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler du budget de la dissimulation, comme l'appellent maintenant les Canadiens.
Le gouvernement a présenté un budget qui prévoit 41 milliards de dollars en nouvelles dépenses pour faire oublier le scandale de corruption de SNC-Lavalin, un scandale qui a éclaboussé le gouvernement actuel depuis que l' a révélé que le et un groupe de son entourage ont mené une intense campagne d'ingérence politique, de harcèlement, d'intimidation et de pressions inappropriées afin de la convaincre de retirer les accusations au criminel contre SNC-Lavalin, une entreprise accusée de fraude et de corruption totalisant plus de 100 millions de dollars.
J'ai commencé mon discours en soulignant de nombreuses incohérences dans la version du dans cette affaire. Je veux citer certaines de ses paroles qui sont particulièrement importantes dans sa défense.
Lorsque le scandale a été mis au jour, et après que ait démissionné du Cabinet dans la foulée de cette révélation, le a déclaré: « Si qui que ce soit, y compris l'ancienne procureure générale, avait l'impression que le gouvernement ne faisait pas bien son travail ou ne respectait pas les normes strictes qu'il s'était fixées, c'était sa responsabilité de venir m'en parler. C'était leur responsabilité de venir m'en parler et personne ne l'a fait. »
Gerald Butts a ensuite comparu devant un comité parlementaire. Pour tenter de discréditer , il a demandé: si leurs agissements par rapport aux poursuites contre SNC-Lavalin l'inquiétaient à ce point, alors pourquoi n'en ont-ils pas discuté à la mi-septembre, en octobre, en novembre ou en décembre?
La question rhétorique que posent le et ses principaux conseillers est la suivante: si elle avait un problème avec notre ingérence politique, pourquoi n'en a-t-elle rien dit? Nous savons maintenant qu'elle l'a fait et qu'il est faux d'affirmer le contraire comme le fait le .
Nous disposons d'enregistrements audio dans lesquels a dit ceci au greffier du Conseil privé sur l'ingérence personnelle du : « Nous nous aventurons sur un terrain glissant, ici… »
Elle a dit: « On parle ici du principe constitutionnel de l’indépendance judiciaire. [Cette conversation] est absolument inappropriée, et […] cela constitue de l'ingérence politique. » Elle a ajouté: « […] les décisions prises par la procureure indépendante lui appartiennent. »
Puis: « Je ne peux pas imaginer comment [l'ancienne juge en chef de la Cour suprême] arriverait à justifier, de quelque manière que ce soit, de [porter atteinte à l'indépendance des procureurs]. » Elle a aussi dit: « Il s’agit de l’intégrité du premier ministre et d'interférence […] »
Elle a ajouté: […] ce serait de l'ingérence; et personne ne pourrait interpréter la chose autrement. […] cela aurait tout l’air d’une ingérence politique de la part du premier ministre, de votre part et de la part de tous ceux qui ont fait pression sur moi dans ce dossier. »
Elle a dit: « […] il s’agit de faire ingérence dans les affaires d’une de nos institutions fondamentales... cela revient à violer le principe constitutionnel de l’indépendance judiciaire. » Elle a aussi dit: « […] ce sera perçu comme de l’ingérence politique depuis le premier jour […] »
Enfin, elle a dit: « Mais j’essaie de protéger le premier ministre contre l’ingérence politique […] perçue ou autre. […] [J]e suis convaincue d’avoir donné les meilleurs conseils possible au premier ministre pour le protéger et pour protéger le principe constitutionnel de l’indépendance des fonctions en matière de poursuites. »
Je le répète, l'ancienne procureure générale a dit qu'elle comprenait la volonté de sauver des emplois, mais que « là n'est pas la question. Il s’agit de protéger l’intégrité du premier ministre, car si je devais intervenir, ce serait de l’ingérence; et personne ne pourrait interpréter la chose autrement. »
C'est une liste des huit avertissements ou plus que a donnés au plus haut fonctionnaire du le 19 décembre. Toutefois, deux mois plus tard, le a eu l'audace de dire à 35 millions de Canadiens que l'ancienne ministre n'avait pas formulé une seule plainte. Il a affirmé qu'elle ne lui avait jamais dit qu'il faisait quelque chose de mal. Si cette conversation n'avait pas été enregistrée, personne n'aurait admis qu'elle avait eu lieu. Beaucoup de libéraux en veulent à d'avoir enregistré la conversation. À mon avis, elle l'a fait, car elle savait que le et son équipe mentiraient et nieraient tout en bloc si elle ne pouvait pas prouver que cette conversation avait eu lieu.
Le a dit qu'il n'avait jamais été prévenu. Or, l'enregistrement montre non seulement que a bel et bien averti le greffier du , mais également que le greffier a clairement dit pendant la conversation qu'il allait parler au et que le ne serait pas content de ses multiples refus d'intervenir dans la poursuite criminelle. Il lui a dit que le premier ministre était dans un état d'esprit particulier et qu'il allait parvenir à ses fins d'une façon ou d'une autre.
Après avoir écouté l'enregistrement, on s'attend tous à ce que le greffier sortant du Conseil privé ait communiqué immédiatement les résultats de la conversation au . Depuis, ce dernier a dit ne rien savoir au sujet de cette conversation. C'est ridicule. Non seulement le greffier a dit qu'aider SNC-Lavalin à éviter un procès était une priorité pour le , mais il a également appelé pour lui en parler au nom du . On peut imaginer à juste titre que le aurait été pressé d'entendre les résultats de la conversation.
Au cours des derniers jours, le greffier a affirmé qu'il aurait parlé de la conversation au , mais que tout le monde était parti en vacances tout de suite après l'appel. Pourtant, les médias n'ont eu besoin que de quelques minutes pour consulter les renseignements accessibles au public et découvrir que le n'était pas en vacances le lendemain ni même le surlendemain.
De plus, il suffit de revenir au témoignage du greffier du Conseil privé devant le comité de la justice. Il a affirmé que qui que ce soit au sein du gouvernement peut joindre le en tout temps avec le standard téléphonique. Tous ceux qui ont utilisé le standard téléphonique savent que c'est un outil incroyablement efficace. Il trouve les gens, peu importe leur cachette, même en vacances.
Cependant, on essaie de nous faire croire que deux mois après cette conversation menaçante que le greffier a eue avec l', le pouvait affirmer, le 15 février, devant 37 millions de Canadiens, qu'il n'était pas au courant d'objections de la part de l'. Malgré tout ce temps, le greffier du Conseil privé n'aurait eu aucune occasion de dire à son patron qu'il avait bien parlé à la procureure générale, selon ses instructions, et qu'elle l'avait clairement averti une demi-douzaine de fois que ce qu'ils faisaient était répréhensible. J'ai bien du mal à croire que cette conversation n'a pas eu lieu.
Maintenant, le affirme que tout cela est simplement le résultat d'une dégradation de la communication et de la confiance. Le et moi sommes enfin d'accord sur quelque chose. Quand une personne regarde entre 35 et 37 millions de Canadiens droit dans les yeux et leur raconte des mensonges, c'est un euphémisme que de dire qu'il y a dégradation de la confiance.
J'aimerais signaler un autre cas où le et les hauts placés de son cabinet se sont contredits pendant leurs interventions.
Lors de son témoignage, Gerald Butts a parlé de la réunion qu'il a eue avec Katie Telford et la chef de cabinet de l'ancienne procureure générale. Cette conversation s'avère très importante parce que les notes de confirment que le personnel du Cabinet du premier ministre a employé un langage très agressif pour tenter de convaincre la procureure générale de l'époque de ne pas donner suite aux poursuites criminelles qui pesaient contre SNC-Lavalin. Lorsqu'il parle de cette réunion, Gerald Butts adopte une attitude défensive. Il dit ceci: « La deuxième et dernière réunion que j'ai eue au sujet du dossier a été avec Jessica Prince, la chef de cabinet de la ministre, et Katie Telford. Il n'y avait aucune urgence à assister à cette réunion. »
Ce que je sais de cette réunion est bien différent du compte rendu qui nous en a été donné la semaine dernière. Je le répète, selon M. Butts, « il n'y avait aucune urgence à assister à cette réunion. » C'est curieux, parce qu'un employé du Cabinet du premier ministre a envoyé un courriel à Mme Prince dont l'objet était « Urgent: discussion avec Katie et Gerry ».
Si on ne s'attarde pas aux détails, on pourrait dire que de savoir si une rencontre était urgente ou non n'est pas vraiment important. Cependant, quand les mensonges arrivent comme une bordée de neige et qu'on agit comme si toutes les déclarations qui ont été faites allaient disparaître comme la neige au printemps, on arrive rapidement à la conclusion qu'il est impossible de croire ce que le et son entourage affirment.
Il a pris bien soin de choisir ses mots et il a affirmé qu'il n'était pas urgent qu'elle participe à cette rencontre, alors que l'objet du courriel d'invitation envoyé indiquait: « URGENT: Discussion avec Katie et Gerry ». Dans le message, on peut ensuite lire ceci: « Katie et Gerry aimeraient te parler le plus tôt possible, avant 17 h aujourd'hui. » Ce courriel a été envoyé à 16 h 16. C'est vrai, il n'y a là rien d'urgent: « Je dois te rencontrer avant 17 heures, mais il n'y a pas de problème, il n'est que 16 h 16. » Autrement dit, laisse tout en plan et, en passant, c'est urgent.
On peut se demander ce qui a bien pu pousser M. Butts à faire, devant le comité, des affirmations pouvant aussi facilement être réfutées par la preuve documentaire. C'est comme s'il s'était dit qu'il pouvait raconter n'importe quoi, parce que personne ne pourrait jamais connaître la vérité et que cela finirait par se résumer à une situation où c'est sa parole contre celle de l'autre.
Le problème de Gerald Butts et du , c'est qu'ils avaient affaire à une personne très minutieuse quant à la tenue de ses dossiers et, quand quelqu'un garde des documents, il devient très difficile de mentir sur ce qui s'est passé. Nous le constatons dans cet exemple et dans de nombreux autres.
Je reviens à l'affirmation selon laquelle le ne savait rien des préoccupations de l'ancienne concernant son ingérence politique. En parlant de sa rencontre du 18 septembre avec le premier ministre, l'ex-procureure générale a dit: « [...] en le regardant droit dans les yeux. Je lui ai demandé: “Êtes-vous en train de vous ingérer politiquement dans mon rôle [...] de procureure générale? Je vous conseille fortement de ne pas le faire.” »
C'était en septembre. Pourtant, en février, le premier ministre a déclaré qu'il ne savait rien de ses préoccupations, qu'elle ne les lui avait jamais mentionnées, qu'il était curieux qu'ils se croisent quotidiennement dans le couloir et qu'elle n'ait jamais songé à lui en parler. On nous présente une preuve documentaire après l'autre démontrant que le premier ministre a déclaré des faussetés flagrantes.
Passons maintenant à la prochaine fausseté, que de nombreux ministériels ont répété ad nauseam pour tenter d'obtenir un accord de suspension des poursuites pour SNC-Lavalin, c'est-à-dire le fait que l'entreprise annoncerait illico que son siège social quitterait Montréal si l'ex- ne se montrait pas immédiatement disposée à négocier un tel accord. Le , le greffier du Conseil privé et l'ex-procureure générale se sont rencontrés à la fin septembre. Selon ce que l'ex-procureure générale a révélé, les deux hommes l'auraient prévenu, avant même que les élections québécoises aient lieu, que SNC-Lavalin annoncerait le déménagement de son siège social si elle refusait de suspendre les poursuites. C'était deux semaines avant les élections québécoises. Bref, si elle les avait crus, elle aurait été faussement convaincue qu'elle devait agir sans plus attendre pour éviter le départ d'une société bien en vue.
Nous savons maintenant que c'était faux, comme le prouve d'ailleurs le fait que le siège social de SNC-Lavalin est toujours au même endroit. L'entreprise a même conclu une entente avec le Régime de rentes du Québec dans laquelle elle s'engage, moyennant l'octroi d'un prêt de 1,5 milliard de dollars, à rester à Montréal au moins jusqu'en 2024. Je signale également au passage que SNC-Lavalin a signé un bail d'une durée de 20 ans et qu'elle a annoncé des travaux de plusieurs millions de dollars afin de rénover ses locaux et les adapter aux besoins de ses milliers d'employés. C'est n'est pas ainsi qu'agirait une entreprise sur le point de déménager son siège social. La justification donnée à l'ancienne procureure générale était donc sans fondement aucun.
Le fait de mentir à un procureur ou, dans ce cas-ci, à la responsable du système juridique canadien pour qu'elle abandonne les accusations pesant contre une entreprise contrevient à l'article 139 du Code criminel, qui interdit d'entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice.
Mentir à un représentant de la loi pour faire tomber des accusations est synonyme d'entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice. Pourtant, c'est exactement ce qui s'est produit.
À la Chambre des communes, j'ai interrogé le sur cette fausseté. Il a nié avoir dit cela. Comme je n'étais pas dans la pièce où s'est tenue cette réunion en septembre dernier, je ne sais pas ce qui s'est dit à ce moment-là, mais l'ancienne a pris des notes scrupuleusement et, plusieurs mois plus tard, le premier ministre a répété exactement la même fausseté dans l'Amphithéâtre national de la presse. Il a dit publiquement que l'entreprise pourrait déménager son siège social si elle n'échappait pas à des poursuites judiciaires. Les propos que, selon l'ancienne procureure générale, le premier ministre a tenus lors de cette réunion sont les mêmes que ceux qu'il a tenus publiquement. Autrement dit, il véhicule cette fausseté tant en privé qu'en public.
Je ne suis pas étonné que le prétende ne pas se souvenir d'avoir dit cela, car il est beaucoup plus difficile de se rappeler ses paroles lorsqu'on ne dit pas la vérité. Quand on dit la vérité, il suffit de se souvenir de ce qui s'est passé. Quand on dit des faussetés, il faut se rappeler une multitude de versions différentes des événements. C'est pourquoi le premier ministre a tant de difficulté à s'en tenir à une seule version des faits.
Je souligne que je suis prêt à céder la parole immédiatement à un collègue si les députés d'en face s'engagent à ce que le comité de la justice reprenne son enquête sur le scandale SNC-Lavalin. Le a coupé court à l'enquête du comité de la justice et a empêché le comité de l'éthique d'en mener une. On a affaire à un comité sans justice et à un comité sans éthique, mais il est possible de corriger les choses dès maintenant si le premier ministre prend la parole et promet que...
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Monsieur le Président, les votes portaient sur les prévisions budgétaires, pas sur le budget. Bon, je le concède, le député n'est que le président du comité des finances, alors j'imagine qu'il n'est pas nécessaire qu'il sache faire la différence entre ces deux concepts.
Les députés d'en face viennent de nous pondre un budget farci d'erreurs de calcul qui totalisent plus de 150 millions de dollars. Le a dépêché ses fonctionnaires pour nous dire qu'il s'agissait de coquilles. Nous avons sorti nos calculatrices et nous avons vite compris qu'il ne s'agissait pas de coquilles, il s'agissait bel et bien d'erreurs de calcul. Encore une fois, il n'est que le ministre des Finances, alors j'imagine qu'il n'est pas nécessaire qu'il sache compter. Sous le gouvernement actuel, le président du comité des finances n'a pas à connaître la différence entre le budget et les prévisions budgétaires et le ministre des Finances n'a pas besoin de savoir compter.
Le député a interrompu le fil de ma pensée. Je parlais de la soirée de votes que le gouvernement a imposée à la Chambre des communes. Nous votions sur l'approbation de milliards de dollars de dépenses. Les conservateurs ont dit que nous pourrions regrouper tous les votes restants et rentrer à la maison. La seule condition était de convenir de la tenue d'une enquête par le comité de la justice pour faire toute la lumière sur le scandale de corruption impliquant SNC-Lavalin. Le gouvernement a refusé de permettre une telle enquête. Par conséquent, l'opposition conservatrice n'a eu d'autre choix que de garder le gouvernement ici pour voter sur chaque poste séparément. Elle avait le devoir de le faire.
Pour passer au travers de ces 30 heures, le gouvernement a installé des lits de camp derrière le rideau, là-bas, aux frais des contribuables. Je précise à l'intention du public que les députés pouvaient aller faire la sieste sur ces lits entre les votes. Il y avait bien sûr des couvertures. À quoi servent-elles? Elles aident à se couvrir. Les députés, entêtés et fâchés, venaient à l'occasion à la Chambre pour nous reprocher de les priver d'une nuit de sommeil.
Je vais leur donner un conseil. Le secret d'une bonne nuit de sommeil, c'est d'avoir la conscience tranquille. S'ils veulent bien dormir, ils devraient avoir la conscience en paix. Pour y arriver, ils devraient dire la vérité, jouer cartes sur table et se libérer du fardeau de toutes ces faussetés. C'est un lourd poids à porter. C'est pourquoi le a le pas aussi lourd dernièrement. Il porte le poids de beaucoup de faussetés. Ce sont des boulets qu'il doit traîner partout où il va. Ils le ralentissent. Si seulement il mettait fin aux tactiques de dissimulation et renonçait aux faussetés, il pourrait aller de l'avant.
La vérité qu'il cache est peut-être tellement scandaleuse qu'il pourrait ne pas se faire réélire. Toutefois, j'aimerais lui rappeler que toute stratégie électorale qui repose sur la dissimulation de sombres vérités est vouée à l'échec. Il ne sera pas capable de garder le secret jusqu'à la fin de la campagne électorale. Des gens de son propre camp l'accusent de corruption. L'ancienne présidente du Conseil du Trésor — la personne à qui il a confié la gestion de l'ensemble de la fonction publique et l'approbation de dizaines de milliards de dollars de dépenses — dit qu'il y a beaucoup plus à dire dans cette histoire et qu'il tente de mettre un terme au débat sur la question.
C'est ce que les libéraux ont à dire au sujet du . Il ne peut donc pas simplement rejeter ces allégations en disant qu'elles proviennent d'une opposition motivée par des considérations politiques. Les deux femmes qui ont démissionné de son cabinet n'ont absolument rien gagné en agissant ainsi. Cela leur importe peu, mais je tenais à rappeler cette évidence. Elles ont subi de lourdes réductions salariales et sont passées d'un poste de ministre à celui de non-ministre, une régression majeure dans un système parlementaire où les ministres sont chargés de veiller à la gouvernance du pays. Rien de tout cela n'était à leur avantage.
Nous entendons bien des gens tenter de porter atteinte à la réputation de ces deux femmes, disant qu'elles ont fait preuve d'opportunisme en exposant ce scandale. Or, je ne vois pas ce qu'elles ont gagné en retour. Quel avantage le fait de dire ces vérités leur a-t-il procuré sur le plan politique? Aucun. Elles ont fait d'immenses sacrifices personnels pour dénoncer la situation. Premièrement, elles ne sont plus ministres, même si elles étaient beaucoup plus qualifiées que ceux qui demeurent dans les banquettes ministérielles; deuxièmement, elles subissent des attaques brutales, personnelles, sexistes et racistes de la part du gratin libéral; troisièmement, elles ont fait l'objet de menaces.
Pas plus tard qu'hier, la a dit que l' avait enfreint les règles de l'éthique, et, maintenant, le Parti libéral menace de les expulser complètement du caucus. Soutenir que ces deux anciennes ministres ont fait cela pour en tirer un avantage politique est aux antipodes de ce qui se produit. C'est évident.
Bien que, manifestement, je ne partage pas les idéaux politiques de ces deux femmes, je respecte nettement la conviction et les principes dont elles ont fait preuve ainsi que leur volonté de sacrifier leur propre carrière afin de faire connaître la vérité. Toutes deux ont plus d'intégrité dans leur petit doigt que le en a de la tête aux pieds.
S'il n'est pas d'accord avec moi à cet égard, alors il devrait faire ce que ces femmes sont prêtes à faire. L' a témoigné devant le comité de la justice, a accepté de répondre à un déluge de questions de la part de la délégation libérale et a soumis 40 pages de textos ainsi qu'un enregistrement audio, le tout confirmant qu'elle a dit la vérité.
Il est intéressant de constater que tous ceux qui tentent de discréditer n'ont pas été capables de relever une seule fausseté dans ce qu'elle a dit. Même si elle a rendu publics près de 40 pages de messages textes et un enregistrement audio et que le gouvernement a une armée de doreurs d'images et de chercheurs de ragots à son service pour trouver la moindre chose qui ne va pas, l'équipe du n'a pas été en mesure de trouver une seule contradiction ou fausseté dans tout ce qu'a dit l'ancienne procureure générale jusqu'à présent.
En fait, c'est la seule personne dans toute cette affaire dont l'histoire n'a pas du tout changé. Elle n'a pas cessé de répéter les mêmes choses. Lorsque ses dires ont été contestés la première fois, elle a fourni des messages textes à l'appui. La deuxième fois, elle a fourni un enregistrement audio. Tous les éléments de preuves qu'elle a fournis appuient les déclarations qu'elle a faites depuis le début.
Je ne suis pas avocat plaidant, mais je sais que, quand ils cherchent à établir la vérité, les juges et les jurys portent une attention particulière aux versions des faits qui ont tendance à changer. Si la version d'un témoin change plus souvent qu'il change de chaussettes colorées et que l'autre témoin s'en tient à une seule version, qui est coulée dans le béton, le juge ou le jury, dans sa sagesse, aura tendance à croire davantage ce dernier. C'est pourquoi, après avoir examiné la preuve, les conservateurs ont conclu que l'ancienne avait dit la vérité, contrairement au .
Cela dit, nous sommes tellement convaincus de notre conclusion que nous invitons fortement le à prouver que nous avons tort. Il devrait témoigner sous serment devant le comité, mettre sa main sur la Bible, présenter sa version des faits et répondre aux questions. Jusqu'ici, il a toutefois refusé de faire cela. Il semble être terrifié à l'idée qu'on se rapproche trop de la vérité et qu'on découvre la seule raison pour laquelle il a fait des pieds et des mains pour protéger cette entreprise accusée d'avoir commis des actes criminels.
Nous pourrions découvrir qu'il a fait une déclaration d'une fausseté flagrante aux Canadiens lorsqu'il a affirmé que l' n'avait jamais soulevé de préoccupations relativement à son ingérence dans cette affaire. Nous pourrions découvrir d'autres faussetés ou exposer des contradictions plus graves. Encore et encore, sa réponse a été de mettre fin au processus, que ce soit avec le comité de la justice ou celui de l'éthique. Demain matin, il aura l'occasion de changer de cap.
Le comité de la justice va se réunir de nouveau puisqu'il a maintenant en main de nouvelles informations écrites et des conversations enregistrées qui réduisent à néant les affirmations du et de son équipe de témoins. Les conservateurs vont proposer la reprise de l'enquête et la comparution de tous les témoins, de tous les acteurs au coeur de ce scandale et qui se seraient ingérés dans le travail de l' en la poussant à accorder un accord spécial à SNC-Lavalin pour lui éviter un procès criminel.
Parlons du bien-fondé de la décision initiale de l' de ne pas intervenir. Le a décidé de modifier le Code criminel en utilisant un projet de loi omnibus d'exécution du budget dans lequel il avait prévu la création de ce qu'on appelle un accord de suspension des poursuites. Un tel accord, pour ceux qui ne connaissent pas le concept, permet à une entreprise qui fait face à des accusations au criminel d'éviter un procès si elle avoue, présente des excuses, paie une amende et promet de ne pas recommencer. Pour déterminer l'admissibilité d'une entreprise à un tel accord, le directeur des poursuites pénales doit tenir compte de divers facteurs, dont la gravité de l'infraction et le fait que l'entreprise a ou non déclaré elle-même ses crimes. Regardons ces deux facteurs de plus près.
Commençons par la déclaration des crimes. Dans ce cas-ci, l'entreprise n'a pas déclaré elle-même ses crimes. Elle a plutôt été prise lorsqu'un de ses employés de haut niveau a été accusé, puis reconnu coupable, en Suisse. Je vais lire un passage tiré d'un article du Financial Post:
Selon la police, Ben Aïssa [un ancien haut dirigeant de SNC-Lavalin] a mis au point un stratagème dans le cadre duquel deux entreprises, Duvel Securities et Dinova International, ont facturé environ 127 millions de dollars à SNC-Lavalin pour avoir aidé cette dernière à obtenir des dizaines de contrats d'importance en Libye dans les années 2000. Or, selon les autorités policières suisses et canadiennes, Duvel et Dinova étaient en réalité des sociétés fictives contrôlées par Ben Aïssa. L'argent — y compris le million et demi de dollars américains qui a servi à acheter un yacht à Saadi Kadhafi — a servi à soudoyer des fonctionnaires libyens et à garnir le compte en banque de Ben Aïssa et de M. Bebawi, qui a quitté SNC-Lavalin en 2006.
Je cite maintenant un reportage de Global News:
En Suisse, un ancien cadre de SNC-Lavalin a plaidé coupable à des accusations de fraude, de corruption et de blanchiment d'argent relativement à ses activités en Libye en 2014, soit avant que la GRC ne dépose des accusations. Riadh Ben Aïssa a reconnu en cour avoir soudoyé Saadi Kadhafi, le fils du dictateur Mouammar Kadhafi aujourd'hui décédé, afin que SNC-Lavalin puisse obtenir des contrats.
C'est grâce aux accusations portées en Suisse que la GRC a pu confirmer les agissements de SNC-Lavalin, donc de l'accuser à son tour d'avoir commis des fraudes et versé des pots-de-vin. Ce n'est pas comme si l'entreprise, en constatant qu'un de ses employés avait mal agi, avait appelé la police pour lui expliquer qu'elle avait commis une erreur, mais qu'elle souhaitait s'amender et qu'elle acceptait d'assumer les conséquences de ses actes. C'est parce que les autorités suisses ont poursuivi SNC-Lavalin que la GRC a appris l'existence des pots-de-vin et qu'elle a pu lancer sa propre enquête, qui a mené au dépôt d'accusations.
L'entreprise ne répond pas au premier critère pour obtenir un accord de suspension des poursuites.
Le deuxième critère est la gravité de l'infraction. Cette dernière était-elle grave et avait-elle une grande portée ou s'agissait-il d'une infraction mineure qu'il serait mieux, par conséquent, de soumettre au régime de sanctions administratives plutôt qu'à un procès criminel? Examinons les accusations qui pèsent contre l'entreprise et déterminons si, selon nous, elles sont assez graves pour justifier des poursuites.
Je vais lire à nouveau un extrait de l'article de Global News:
En 2015, la GRC a accusé SNC-Lavalin ainsi que sa division internationale de corruption et de fraude relativement à leurs transactions commerciales en Libye.
La GRC a indiqué que des représentants de l'entreprise avaient tenté de soudoyer plusieurs fonctionnaires de ce pays, notamment le dictateur Mouammar Kadhafi, ainsi que d'autres entreprises en Libye.
Des représentants de la GRC ont déclaré que SNC-Lavalin avait aussi menti à des entreprises libyennes afin de les frauder pour près de 130 millions de dollars.
Je vais maintenant citer le Financial Post:
SNC-Lavalin et ses filiales, SNC-Lavalin Construction inc. et SNC-Lavalin International inc. sont aussi soupçonnées d'avoir fraudé divers organismes publics libyens pour environ 129,8 millions de dollars.
Je vais m'arrêter sur ce point.
On l'a répété à maintes reprises. Certains libéraux marmonnent dans leur barbe que ce qu'a fait SNC-Lavalin en Libye correspond à la façon de faire des affaires là-bas. Bien franchement, je trouve ce genre de propos odieux. C'est odieux de croire qu'il est acceptable que des entreprises occidentales riches se rendent dans des pays en développement, où les gens vivent dans la misère, pour leur voler 130 millions de dollars simplement parce que c'est la façon de faire là-bas ou que c'est ainsi qu'il faut se comporter, dit-on, pour être compétitif dans différentes régions du monde.
S'il y a tant de pauvreté dans ces régions, c'est parce que les entreprises ont décidé de se comporter de la sorte. La corruption parasitaire qui afflige de nombreux pays dans le monde explique pourquoi tant de gens vivent dans la pauvreté la plus abjecte. Lorsque l'on se rend dans ces pays, on est stupéfait de voir combien les gens travaillent dur. Les rues grouillent de gens qui travaillent et l'on se demande: « Comment est-il possible de travailler si dur sans sortir de la pauvreté? » C'est en partie parce que le travail de ces gens qui s'échinent sous nos yeux est gaspillé par une élite corrompue, qui se croit tout permis et qui vampirise toutes les richesses. Pour autant, ce comportement parasitaire ne se limite pas aux gens du pays, mais implique souvent des intérêts étrangers qui tirent avantage de cette possibilité de s'adonner à la fraude.
Nous avons signé des conventions internationales contre la fraude et la corruption précisément parce que les compagnies étrangères ont coutume de se rendre dans ces pays, d'y pratiquer la fraude et d'en sortir, sachant qu'elles ne seront jamais poursuivies dans leur pays d'origine. Elles rentrent chez elles, les poches pleines de leurs pillages, sans aucune intention de retourner dans ces pays. Elles savent par ailleurs qu'elles ne seront jamais poursuivies dans les pays où elles ont commis leurs forfaits. Voilà pourquoi nous avons signé des conventions internationales, afin de poursuivre, de concert avec d'autres pays, les entreprises corrompues qui ont volé ces populations.
En tant que nation, nous comprenons que non seulement c'est une façon méprisable de gagner de l'argent, mais que c'est aussi illégal, puisque c'est fait aux dépens des pauvres. Il nous incombe moralement de poursuivre les auteurs de cette corruption, même si celle-ci survient à l'extérieur de nos frontières et même si nous n'en sommes pas directement les victimes.
Il ne s'agit donc pas d'une petite infraction. Ce n'est pas seulement que les lobbyistes et les initiés de SNC ont soudoyé les Kadhafi avec des prostituées et des yachts, aussi indécent que cela puisse paraître. C'est aussi qu'ils sont accusés d'avoir volé 130 millions de dollars aux Libyens. Il s'agit de beaucoup d'argent, surtout pour un pays qui souffre de la pauvreté. Les Libyens auraient pu accomplir une foule de bonnes choses s'ils avaient pu conserver leur propre argent et n'avaient pas été victimes de ces présumés crimes. Il ne s'agit donc pas d'une infraction frivole dont la peine appropriée est une sanction administrative. La fraude est un crime grave qui devrait être traité comme telle par notre système judiciaire.
Sachant tout cela, il est étonnant que le accorde une telle priorité à aider cette entreprise, liée de près aux libéraux, à éviter des poursuites.
Nous avons parlé des deux premiers critères dont le procureur et, au bout du compte, le procureur général sont censés tenir compte pour suspendre des poursuites. En ce qui concerne ces deux critères, il est clair comme de l'eau de roche que l'entreprise ne répondait pas à ceux-ci.
Enfin, il y a un troisième critère que j'ai oublié de mentionner, à savoir s'il s'agit d'un incident isolé. Nous comprenons tous que, dans le système judiciaire, il existe un principe de la proportionnalité. Si quelqu'un commet une seule erreur, le juge en tiendra compte au moment du verdict. Le procureur, la Couronne, pourrait même en tenir compte au moment de décider s'il y a lieu d'intenter un procès ou d'accepter une négociation de plaidoyer pour une peine modérée. Dans ce cas-ci, s'agissait-il d'un incident isolé? Était-ce seulement quelques pommes pourries en Libye qui avaient commis des erreurs qui ne s'inscrivaient pas dans une culture de corruption plus vaste au sein de l'entreprise? La réponse, bien sûr, est non.
Je vais lire un peu l'histoire de cette entreprise. Je vais relire un extrait de l'article de Global News:
[...] trois hauts dirigeants ont aussi été accusés de corruption dans le dossier du Centre universitaire de santé McGill. L'ancien PDG Pierre Duhaime et des dirigeants du Centre ont plaidé coupables dans cette affaire.
On parle ici du PDG et non pas d'une pomme pourrie qui, dans un pays lointain, aurait fait des choses dont personne n'était au courant. Il s'agissait du PDG, et c'était dans le cadre d'un contrat avec le Centre universitaire de santé McGill.
Il y a aussi l'histoire du pont Jacques-Cartier. Comme l'a rapporté l'article de Global News:
Des documents judiciaires révèlent que des procureurs du Québec travaillent avec la GRC sur la possibilité de porter de nouvelles accusations criminelles contre SNC-Lavalin concernant un contrat pour la réfection du pont Jacques-Cartier de Montréal.
Encore une fois, voici ce qu'en dit Global News:
Dans des documents judiciaires, la GRC décrit un stratagème de corruption impliquant un contrat de 127 millions de dollars pour le pont Jacques-Cartier au début des années 2000. En 2017, l'ancien fonctionnaire fédéral Michel Fournier a plaidé coupable d'avoir accepté plus de 2,3 millions de dollars en paiements de SNC-Lavalin en lien avec ce projet.
C'est un crime renversant. Il s'agissait d'un énorme projet de 127 millions de dollars. Un fonctionnaire fédéral a accepté un pot-de-vin de 2,3 millions de dollars pour l'octroi du contrat. C'est arrivé ici même, au Canada. Cela nous rappelle que, en ce qui a trait à SNC-Lavalin, le coût de la corruption dans le monde des affaires ne se limite pas à l'étranger. C'est arrivé ici même, dans notre pays.
Je cite de nouveau l'article de Global News, qui dit:
En 2011, un employé de SNC-Lavalin qui avait la tâche de faciliter les déplacements des employés de l'entreprise qui se rendaient en Libye et qui en sortaient a été arrêté au Mexique et accusé d'avoir tenté de faire sortir illégalement du pays le fils et la famille de Kadhafi. L'employé a finalement été libéré de prison et il n'a pas été accusé au Canada.
Pourquoi une entreprise canadienne de construction aiderait-elle à faire entrer clandestinement la famille Kadhafi au Mexique? On parle de Montréal, de la Libye et du Mexique. Partout, cette société semble être impliquée dans les formes de corruption les plus consternantes et parfois les plus bizarres.
On a également interdit à l'entreprise de soumissionner pendant 10 ans pour des projets de la Banque mondiale en raison d'allégations d'inconduite pendant un contrat de construction d'un pont au Panama. Le Panama s'ajoute donc à la liste. Pour récapituler, il y a alors la Libye, Montréal, le Mexique et le Panama. SNC-Lavalin a des problèmes judiciaires à tous ces endroits en raison de ses agissements.
On lit ensuite dans un article, toujours dans Global News:
Dans le cadre d'une enquête menée par la CBC et le Globe and Mail, on a laissé entendre qu'il existait un code comptable interne pour les pots-de-vin.
Ce n'est là qu'un exemple de l'enracinement profond de la corruption dans l'entreprise. Elle utilisait un système de codes pour comptabiliser tous les pots-de-vin qu'elle versait.
Le troisième critère visant à déterminer si l'entreprise était admissible à un accord de suspension des poursuites est celui de savoir si l'infraction commise constituait un incident isolé. Il y a eu des incidents à Montréal, en Libye, au Mexique et au Panama. Les plus hauts dirigeants de l'entreprise étaient impliqués, notamment le PDG.
Où que l'on regarde, on dirait que quelqu'un de SNC-Lavalin est accusé ou reconnu coupable — parfois après avoir plaidé coupable — de graves infractions de corruption en haut lieu impliquant des centaines de millions de dollars. Non, il ne s'agit pas d'un simple incident isolé.
Quelques libéraux de l'époque du scandale des commandites font du chahut et parlent d'éthique. Je me réjouis que des libéraux de cette époque soient présents, car je peux leur dire qu'on voit vraiment, avec le scandale qui nous occupe, que le Parti libéral a gardé ses mêmes vieilles habitudes.
Comment avons-nous appris l'existence de ce scandale? Nous l'avons appris grâce à une loi que Stephen Harper a fait adopter en réponse au scandale des commandites, c'est-à-dire la Loi fédérale sur la responsabilité. Selon le juge Gomery, le Parti libéral était impliqué dans un système de pots-de-vin qui a englouti 40 millions de dollars, dont une grande partie n'a jamais été récupérée. Une autre partie est allée dans les coffres du Parti libéral. Paul Martin a admis que le Parti libéral avait volé au moins 1 million de dollars. Il a remboursé l'argent après s'être fait prendre.
Nous avons été choqués de voir que toutes sortes de gens ont fait l'objet de poursuites pour ces fraudes, mais pas le Parti libéral. Une explication possible nous est venue à l'esprit: le procureur général de l'époque, dont le bureau était responsable des poursuites liées aux infractions fédérales, était libéral.
Nous tenions à nous assurer que personne ne puisse plus jamais échapper à une poursuite pénale simplement parce qu'un copain du parti était à la tête du bureau du procureur général. Nous avons donc créé le Service des poursuites pénales, un bureau distinct et indépendant où un éminent procureur peut compter sur son propre bureau et agir en toute indépendance de la branche politique du gouvernement. Nous avons donné une telle indépendance à ce bureau que si le procureur général veut donner des directives au directeur des poursuites pénales, il doit le faire par écrit et publier ses instructions dans la Gazette du Canada, une publication que produit le gouvernement pour informer le public des décisions qui ont été prises. Bref, personne ne peut aller dans un bureau et tordre le bras d'un décideur. Les instructions doivent être données par écrit et rendues publiques. Cette méthode ne convient évidemment pas à ceux qui voudraient s'ingérer dans une poursuite pénale, puisqu'il est plutôt difficile d'agir en catimini.
Voici où les choses se corsent. D'après des messages textes et le témoignage sous serment de l', Gerald Butts aurait dit à deux personnes qu'il ne voulait pas respecter cette loi sous prétexte que c'était une loi de Harper. Il se disait: « Comme elle a été adoptée par Harper, nous n'avons pas à la respecter. » C'est ce qu'il a déclaré à des employés du bureau du procureur général et à l' elle-même.
Les 40 pages de documentation qu'elle a remises au comité de la justice vendredi contiennent des preuves démontrant que Gerald Butts a effectivement fait cette affirmation. S'il nous écoute, j'espère qu'il baissera la tête, honteux d'avoir dit qu'ils n'avaient pas à respecter une loi simplement parce qu'elle avait été adoptée par un autre gouvernement dirigé par un autre parti.
Cette loi visait à protéger l'indépendance de notre système de justice et de poursuites. On ne devrait pas l'enfreindre par simple désir de contourner les règles à des fins partisanes. C'est ce comportement qui nous a amenés ici. Le premier ministre de l'époque, Stephen Harper, était déterminé à éradiquer la corruption et à protéger l'indépendance du système de poursuites. Il a mis en place une loi, la Loi fédérale sur la responsabilité, afin de mettre fin à la corruption dans le processus de poursuites criminelles, et cela a bien fonctionné.
Je constate que mes collègues libéraux d'en face sont restés silencieux depuis que je leur ai rappelé cela. Je pense que c'est probablement judicieux de leur part.
Une voix: Avez-vous expliqué l'affaire impliquant Arthur Porter, ou allez-vous en parler? Qu'est-il advenu d'Arthur Porter?
L'hon. Pierre Poilievre: Malheureusement, le silence n'a pas duré longtemps. Cela dit, c'est souvent ceux qui ont le moins de choses à dire qui parlent le plus fort, monsieur le Président.
En réalité, l'ancienne habitude des libéraux de croire que tout leur est permis n'a pas disparu. Nous sommes en présence d'un parti qui semble incapable de se défaire de ce qui le caractérise, c'est-à-dire sa tendance à croire que tout lui est permis, qu'il peut prendre l'argent des autres, aider ses amis et enfreindre la loi. C'est ce que les libéraux ont fait lors du scandale des commandites, et c'est exactement ce qu'ils font maintenant.
J'ai négligé de dire tout à l'heure — et je remercie les députés d'en face de me le rappeler — que SNC-Lavalin a versé environ 100 000 $ en dons illégaux au Parti libéral en usant de fausses factures, de dépenses fictives et de primes bidon. Les députés peuvent-ils imaginer l'ampleur de la coordination qu'il a fallu lorsque les dirigeants de cette entreprise ont dit à des employés qu'ils voulaient qu'ils présentent de fausses demandes de remboursement de dépenses pour faire don des sommes remboursées au Parti libéral? Pour des raisons que j'ignore, lorsque cette fraude a été découverte, le commissaire aux élections fédérales a décidé de dispenser l'entreprise et le Parti libéral d'un procès ou d'accusations. L'entreprise s'est tout simplement fait taper sur les doigts en se faisant proposer de conclure ce qu'on appelle une transaction. L'argent a été rendu et l'entreprise a promis de ne plus jamais recommencer. Encore une fois, l'entreprise a pu éviter d'être tenue responsable d'une infraction grave à la loi, ce qui est vraiment très regrettable.
Or, cela ne signifie pas qu'elle ne sera jamais tenue responsable. Pour l'instant, l'entreprise est censée subir un procès pour fraude et corruption. Je dis « pour l'instant », parce que nous ne savons pas si le nouveau décidera de s'ingérer dans cette poursuite criminelle, alors que l'ancienne avait, elle, refusé de le faire. Nous savons qu'il est ouvert à cette idée, mais qu'il n'a pas encore pris de décision à ce sujet. C'est intéressant en soi parce que cela révèle que le retrait de l'ancienne de ses fonctions et la nomination d'un nouveau titulaire à ce poste ont eu une réelle incidence sur la possibilité de poursuites contre l'entreprise. En date de septembre 2018, la position officielle de l'ancienne était que l'entreprise ferait l'objet de poursuites. Ce n'est plus le cas. Maintenant, la position officielle de l'actuel est que l'entreprise pourrait faire l'objet de poursuites. Autrement dit, il a laissé planer la possibilité de soit prendre en charge les poursuites lui-même afin de négocier un accord de suspension des poursuites, soit rédiger une directive à l'intention de la directrice des poursuites pénales afin de lui ordonner de le faire au nom du gouvernement.
Ce serait très révélateur si, après toute cette tempête, le finissait par obtenir ce qu'il désire, soit sortir l'entreprise du pétrin. Je soupçonne que c'est exactement ce qu'il a prévu; il espère de tout coeur pouvoir faire oublier ce scandale jusqu'à ce que les élections aient lieu puis, dans les semaines qui suivent, un accord spécial sera accordé à l'entreprise. Les libéraux feront cela en début de mandat, afin que tous l'aient oublié quand arriveront les élections suivantes. Il faut se souvenir du 8 décembre 2015, lorsqu'un des tout premiers gestes posés par le gouvernement actuel fut de lever l'interdiction de soumissionner pour des contrats fédéraux qui frappait SNC-Lavalin en raison des accusations de fraude et de corruption qui pesaient contre elle, les mêmes accusations que l'entreprise conteste aujourd'hui. Le 8 décembre, quelques semaines après l'arrivée au pouvoir du premier ministre, SNC-Lavalin obtenait un accord spécial.
Nous savons que, pour les libéraux, la priorité est de toujours tout faire en leur pouvoir pour aider cette entreprise. Il ne faut pas s'en étonner. Si le conserve le pouvoir, il n'attendra pas deux mois. Il n'y aura pas de procès. Cette entreprise obtiendra un accord spécial. On ne lui imposera qu'une petite amende. Le PDG affichera sa plus belle mine contrite et promettra de ne plus recommencer, et tout reviendra à la normale.
Le message qu'on enverra sera que, si une personne est accusée d'un crime grave au Canada, la meilleure solution pour elle ne sera pas d'aller se défendre avec un avocat devant un jury et un juge, mais d'embaucher une armée de lobbyistes afin qu'ils assaillent le bureau du premier ministre en vue de convaincre ce dernier de lui venir en aide. Si la personne est suffisamment influente et qu'elle a un poids politique assez important, elle pourrait bien s'en sortir. Évidemment, cela va à l'encontre du principe selon lequel tous sont égaux devant la loi.
Voilà pourquoi les Canadiens réagissent aussi vivement à ce scandale. Le a présumé que cela n'intéresserait personne. Les détails et les faits à surveiller sont nombreux. Comment peut-on suivre tous ces différents débats concernant les accords de suspension des poursuites, les directeurs des poursuites pénales, les procureurs généraux, et ainsi de suite? La raison, c'est que, à la base, ce scandale est en réalité bien simple. Il tient à ceci: avons-nous un seul système judiciaire ou deux? Existe-t-il un ensemble de règles pour la population et un autre pour les personnes influentes? Est-ce que le droit prime ou est-ce que les dirigeants font la loi? Les gens comprennent cela, car nous avons un passé fier et durable qui remonte à des centaines d'années qui dit que nul n'est au-dessus de la loi, que pas même le roi ou la reine ne sont au-dessus de la loi dans notre régime. Grâce à ce principe, nous vivons tous dans l'un des endroits les plus prospères au monde.
On le constate partout. À l'échelle de la planète, on remarque les avantages des pays ayant un bon système judiciaire qui fonctionne bien et qui est souverain par rapport à tous ses dirigeants. Il suffit, par exemple, de comparer la qualité de vie à Hong Kong avec celle ailleurs en Asie. Hong Kong compte un système judiciaire britannique qui est respecté partout dans le monde. C'est du moins la situation en ce moment. Espérons que ce sera toujours le cas dans l'avenir. Des gens qui détiennent des intérêts commerciaux partout dans le monde se rendent à Hong Kong pour régler leurs différends parce que le système là-bas suit bien le modèle de common law britannique. Des générations de Britanniques ont établi ce système sur ce territoire avant la réunification. En ce qui concerne la qualité de vie à Hong Kong, les gens là-bas ont un PIB par habitant similaire à celui du Canada, même s'il s'agit de ce que j'appellerais une « cité-État ». On parle d'un territoire représentant le septième de la superficie de la ville d'Ottawa, où vit une population huit fois plus nombreuse. Les habitants doivent importer leur eau; ils n'ont aucune ressource naturelle. C'est tout de même un endroit extrêmement prospère. Pourquoi? C'est en raison de la primauté du droit — et j'ajouterais de la libre entreprise.
Quand ils sont réunis, ces ingrédients essentiels sont une garantie de succès à peu près partout dans le monde, sans égard à la culture, à la race, à l'histoire ou aux origines. Avec la primauté du droit, la libre entreprise et la démocratie, la réussite est quasiment obligée. Or, une fois que la primauté du droit est atteinte, c'est tout le reste qui s'écroule.
Les libéraux se demandent encore pourquoi le scandale SNC-Lavalin choque autant les Canadiens. C'est parce que ces derniers savent que leur avenir dépend de la primauté du droit. Nous ne voulons pas qu'un politicien, à plus forte raison si c'est le chef du gouvernement, puisse prendre le téléphone pour tordre le bras d'une ministre et la menacer de lui enlever son emploi si elle refuse d'abandonner des accusations.
Une voix: La vie des gens riches et célèbres.
L'hon. Pierre Poilievre: La vie des gens riches et célèbres, en effet. C'est exactement ça. Le peu de cas que le fait de la loi a toujours l'argent pour objet. Quand la commissaire à l'éthique l'a reconnu coupable d'avoir manqué de quatre façons différentes à l'éthique, c'était chaque fois pour des questions d'argent. Il s'agissait d'ailleurs de la première fois qu'un premier ministre était ainsi blâmé. Un type est venu le voir pour lui dire qu'il avait besoin d'une subvention de 15 millions de dollars et lui demander s'il aimerait obtenir gratuitement un voyage d'une valeur de 200 000 $ sur son île privée. Le premier ministre a tout de suite répondu: « marché conclu ». Il commençait en avoir assez de la petite politique et il avait besoin de s'aérer un peu les esprits, alors va pour l'île paradisiaque.
Bien des gens ont du mal à évaluer la valeur commerciale d'un tel voyage. Nous avons fait des recherches, et il en coûterait à peu près un quart de million de dollars pour louer l'île en question — ou une autre comparable — durant deux semaines. Le y a séjourné gratuitement, alors on peut en déduire qu'il a reçu un cadeau en nature d'une valeur approximative d'un quart de million de dollars.
J'invite les députés à penser un instant à ceci. Si un agent subalterne d'approvisionnement s'était vu offrir un week-end au chalet de quelqu'un à qui il aurait accordé un contrat, il se serait exposé à un renvoi immédiat et à l'accusation d'avoir accepté un pot-de-vin. Or, lorsque le chef du gouvernement rencontre quelqu'un qui lui demande une subvention de 15 millions de dollars et accepte en échange un cadeau d'un quart de millions de dollars, il s'en sort avec une remontrance du commissaire à l'éthique.
Le s'est cru invincible et a pensé que tout lui était permis. Pourtant, des articles précis du Code criminel qualifient d'infraction le fait de recevoir un avantage d'une personne qui fait affaire avec le gouvernement. Le premier ministre a violé de façon flagrante ces articles et, pour des raisons que nous ignorons, la GRC n'a pas enquêté.
Il croit que parce qu'il est le fils d'un ancien premier ministre, qu'il a un fonds en fiducie de plusieurs millions de dollars, qu'il est riche, qu'il prend des vacances dans l'île d'un milliardaire, qu'il fait du surf à Tofino et qu'il fait ce que bon lui semble, s'il décide qu'une entreprise ne doit pas être poursuivie, eh bien elle ne le sera pas. La poursuite devrait être abandonnée, une entente conclue et tous les obstacles éliminés. Et si la procureure générale fait des difficultés, eh bien on s'en débarrasse aussi. Voilà comment il raisonne et nous en avons tous été témoins.
Nous avons aussi vu le se mettre en colère parce qu'un vote ne se déroulait pas assez rapidement. Il s'est alors élancé pour attraper le bras du whip des conservateurs et a bousculé des gens au passage. Nous l'avons vu exploser lorsqu'il n'obtient pas ce qu'il veut. Il se conduit comme quelqu'un qui personne ne tient tête. C'est le comportement classique du fils de riche gâté qui obtient tout ce qu'il veut, quand il le veut et gare à qui ose le contrecarrer. Après tout, ne savons-nous pas qui était son père?
Lorsque le premier ministre a décidé que ses amis de SNC-Lavalin devaient être soustraits à des accusations, il a tout simplement voulu que cela se fasse. Nous savons que c'était son état d'esprit, puisque c'est ce qu'a déclaré le greffier du Conseil privé dans l'enregistrement audio. Il a dit que le premier ministre était dans cet état d'esprit et qu'« il [allait] vouloir parvenir à ses fins d'une façon ou d'une autre ».
Dans cette fameuse conversation, le greffier a déclaré à l'ancienne qu'il craignait qu'elle soit en conflit avec le premier ministre. Il a utilisé le mot « conflit ». Évidemment, elle savait exactement ce que cela voulait dire. Elle a fait allusion au Massacre du samedi soir, lorsque Richard Nixon a congédié des membres de son personnel pour camoufler le Watergate. Elle a déclaré qu'elle attendait simplement « qu'on [lui] assène le dernier... que le reste suive... ».
Un mois plus tard, elle perdait son poste. C'était simplement une coïncidence, une parfaite coïncidence. Comment a-t-on expliqué le soudain congédiement d'une procureure générale très compétente, accomplie et respectée? Eh bien, c'est la démission de Scott Brison qui a mis en branle un étrange jeu de chaises musicales. Comme le président du Conseil du Trésor a démissionné, il a fallu confier de nouvelles fonctions à la procureure générale, et ce, même si elle n'allait pas remplacer M. Brison.
Puis, des semaines plus tard, la position officielle du change. Selon de l'information publiée dans les médias et provenant de partisans libéraux, on apprend qu'elle a été mutée parce qu'elle voulait nommer un juge en chef qui n'était pas assez libéral. D'après ce qu'on rapportait, le aurait apparemment pensé qu'elle manquait de jugement parce qu'elle voulait nommer un juge en chef du Manitoba respecté à la tête de la Cour suprême du Canada, même si ce n'était pas un fidèle libéral, un idéologue libéral. Voilà la nouvelle raison qu'on donne pour lui avoir retiré son poste de procureure générale.
Sans parler du fait que les fuites sur les discussions touchant les nominations à la Cour suprême vont à l'encontre du principe fondamental de la neutralité politique et de la confidentialité de ce processus, on peut voir que la version du a changé du tout au tout depuis le moment où il affirmait que le départ de Scott Brison était à l'origine du jeu de chaises musicales.
La version des faits qu'on nous présente change constamment sauf dans un cas, celui de l'. Sa version de faits à elle reste la même et est maintenant confirmée par des dizaines de pages de preuves présentées au comité de la justice et rendues publiques. Même s'il était resté des doutes, il a suffi d'entendre l'enregistrement de cette conversation pour qu'ils s'évaporent. Nous savons maintenant que les choses se sont passées exactement comme elle l'a dit.
Les libéraux ont reproché à l'ancienne procureure générale d'avoir enregistré cette conversation. Ils ont déclaré qu'à leurs yeux, cela avait manqué beaucoup de professionnalisme. Ils ne tiennent pas compte du fait que, à ce moment-là, l'ancienne procureure générale était victime de harcèlement, de menaces voilées, de pressions inappropriées et de toutes sortes de comportements inadéquats de la part du et de son équipe pour la forcer à suspendre les poursuites criminelles contre SNC-Lavalin.
Elle savait que, si elle n'avait pas de preuves, les bons vieux amis du ne cesseraient jamais de mentir et de nier ses propos. Quand on a affaire à une personne comme l', le problème lorsqu'on essaie de mentir et de nier les propos de cette dernière, c'est qu'elle est très rigoureuse et pointilleuse dans la tenue de ses dossiers.
Malheureusement pour le , son équipe et lui n'ont aucun élément de preuve pour la contredire.
Les libéraux ont donc plutôt eu recours à des tactiques d'intimidation. Tout ce qu'ils pouvaient faire pour discréditer l' — répandre lâchement des rumeurs anonymes, publier dans la presse des commentaires racistes et sexistes d'anciens ministres libéraux ciblés contre elle —, le leur a demandé de le faire. Malheureusement pour lui, cette tactique n'a pas fonctionné. Les Canadiens ont compris le stratagème. Ils ont parfaitement compris ce que le premier ministre tentait de faire et ils s'y sont farouchement opposés. Ils voient clairement que ces attaques personnelles mesquines sont portées par un homme désespéré qui s'accroche à son poste et qui tient uniquement grâce à son ego.
Une occasion s'offre au , à long terme: il peut choisir de dire enfin la vérité. Il se sentira libéré du poids de toutes ces faussetés et de tous ces secrets. Pour se libérer de ce fardeau, il lui suffit de jouer franc jeu et d'admettre qu'il s'est ingéré de façon inappropriée dans une poursuite pénale afin d'aider une entreprise liée aux libéraux à échapper à un procès, qu'il a harcelé l' et, devant son refus de plier, qu'il l'a écartée de son poste. S'il choisissait cette option, il perdrait certes quelques plumes politiques, mais ce serait probablement moins dévastateur que la situation qu'il traverse actuellement. Son geste lui vaudrait probablement un peu d'empathie de la part de ceux qui se diraient qu'au moins, il dit la vérité. Après nous avoir fait vivre un cauchemar depuis deux mois et avoir tenté de pervertir le système judiciaire à force d'ingérence politique, au moins, il dit enfin la vérité.
Cela lui permettrait de commencer à se remettre de la situation, et la blessure qu'il a infligée au système de justice pourrait également commencer à guérir. Cependant, aussi longtemps qu'il maintient les faussetés et qu'il essaie de cacher la vérité, la situation ne fera que continuer d'empirer. Grâce aux instruments parlementaires, nous lui arracherons la vérité, comme une dent pourrie, chaque jour un peu plus, morceau par morceau. La vérité sera dévoilée. Je ne sais pas si le l'a remarqué, mais ses manoeuvres de dissimulation n'ont pas connu beaucoup de succès jusqu'ici.
Mme Stephanie Kusie: L', l', la députée de .
L'hon. Pierre Poilievre: C'est un bon point. Je reçois quelques commentaires utiles de la sage députée de . Je le dis sincèrement. Elle vient de souligner quelque chose dont j'avais oublié de parler.
La députée de a démissionné, la a démissionné, l' a démissionné, le secrétaire principal a démissionné et le chef de la fonction publique, Michael Wernick, a démissionné. Tout le monde démissionne, mais personne n'a fait quoi que ce soit de mal. Personne n'a jamais rien fait de mal. Ils démissionnent pour rien. Si le croit cette belle histoire, il a besoin de s'assoir et de griffonner la liste de démissions pour apprendre le contraire.
Nous pouvons passer en revue chacun des cas. Commençons par celui de l'. Nous connaissons les motifs de sa démission. Elle dit qu'elle a démissionné parce que le a dit que sa présence au Conseil des ministres parlait d'elle-même. C'était un moyen de tenter de faire croire qu'elle approuvait sa conduite dans l'affaire de SNC-Lavalin. Dans une lettre qu'elle a récemment rendue publique, elle dit qu'après avoir entendu ce commentaire du premier ministre, elle a décidé de démissionner, et que sa démission parlait d'elle-même. Autrement dit, dans cette affaire, elle a trouvé la conduite du premier ministre tellement épouvantable qu'il lui est devenu impossible de faire partie du Conseil des ministres alors qu'il en était le premier ministre.
Il y a aussi le cas de l'. Elle a démissionné parce qu'elle a dit qu'une personne, et je pense qu'elle faisait référence au , essayait de couper court à toute cette affaire et d'empêcher la vérité d'éclater au grand jour. Selon elle, il reste beaucoup à dire dans cette affaire, et le premier ministre interdit à quiconque de parler. C'est pour cela qu'elle a démissionné.
Les gens ne démissionnent pas du Cabinet sans aucune raison. La possibilité d'être ministre fédéral est littéralement de une sur un million. La population du Canada est d'environ 37 millions, et nous avons environ 37 ministres. Donc, littéralement, environ un Canadien sur un million est un ministre fédéral. Voilà à quel point c'est une occasion rare et précieuse d'être membre du Cabinet. Des personnes qui ont travaillé toute leur vie pour acquérir l'expertise dont elles auront besoin pour être suffisamment respectées pour siéger au conseil des ministres ne se précipitent pas pour démissionner à cause d'une petite querelle interpersonnelle ni parce qu'elles sont amies avec quelqu'un qui a décidé de partir.
Ce n'est certainement pas la manière dont une médecin ou une avocate de renommée — deux femmes extrêmement respectées — se comportent. Les deux comprenaient très bien l'immense privilège de s'asseoir à la table du Cabinet, et elles y ont siégé avec distinction. Cependant, elles ont été prêtes à tout abandonner, car la conduite du a été tellement scandaleuse qu'elles ne pouvaient plus supporter l'idée de s'asseoir à la même table où il préside.
Puis, la liste des démissions se poursuit. Gerald Butts a été appelé le marionnettiste du Cabinet du premier ministre. Il était le secrétaire principal du . Sur le plan personnel, il est le meilleur ami du premier ministre. Travailler au Cabinet du premier ministre était l'emploi de ses rêves. Il a consacré toute sa vie à cette entreprise. Il n'aurait pas démissionné si sa conduite n'avait pas été extrêmement grave, mais il l'a fait.
Il y a ensuite le greffier du Conseil privé. C'est le chef de ce qui est probablement le plus gros employeur du pays. Des centaines de milliers de personnes travaillent comme fonctionnaires et relèvent indirectement du greffier du Conseil privé. M. Wernick a consacré sa vie à la fonction publique et ce poste représentait le couronnement de sa carrière. Il n'aurait pas renoncé à cette fonction à moins que cette affaire soit très grave.
Voilà, quatre démissions très médiatisées, et une cinquième si l'on inclut la députée de qui, au début, a aussi fait un lien entre son départ et cette controverse.
Tout cela s'est produit sur une période de deux mois, mais, après cette déconfiture monumentale, le pense nous convaincre que rien ne s'est passé. Il ne s'agit que d'un gros malentendu et d'un échec en matière de communication. S'ils avaient simplement pris un café ensemble de temps en temps, rien de tout cela ne se serait produit. Il est difficile de croire que toute l'affaire soit causée par un problème de communication.
De ce côté-ci de la Chambre, nous avons minutieusement étudié les preuves et avons conclu que les deux ministres respectueuses des principes n'ont pas remis leur démission en raison d'un simple conflit interpersonnel. Il est clair qu'elles avaient beaucoup à perdre et peu à gagner en agissant de la sorte. Elles ont démissionné parce qu'elles ne pouvaient tolérer de voir le tenter de corrompre le système de justice pénale. Par conséquent, la solution consiste à aller au fond des choses, à tenir des audiences et à faire comparaître des témoins. Si le premier ministre n'a rien à cacher, il devrait accepter volontiers et être disposé à témoigner lui-même.
Cependant, si le premier ministre cache d'autres secrets, alors il continuera de faire ce qu'il fait depuis deux mois, c'est-à-dire balayer la question sous le tapis. Il a maintenant mis fin à deux enquêtes: celle du comité de la justice, puis celle du comité de l'éthique. Croit-il vraiment que les Canadiens qui regardent ce spectacle à la télévision sont convaincus qu'il n'a rien à cacher lorsqu'il agit ainsi?
Le comité de la justice se réunira dans un peu plus de 12 heures seulement. Le a donc le temps de réfléchir à la façon dont il a géré ce scandale et de se demander s'il peut continuer de faire taire ceux qui le critiquent et de cacher la vérité. Je lui recommande de rencontrer les membres libéraux du comité avant la réunion de demain pour leur dire que l'opération de dissimulation est terminée, qu'il ne leur demandera plus de s'humilier et de faire honte aux gens de leur circonscription en votant contre la reddition de comptes, et qu'il leur demande seulement de reprendre l'enquête. Il devrait ensuite demander à ses plus proches collaborateurs de l'accompagner dans la salle de réunion de ce comité pour qu'ils avouent, à tour de rôle, ce qui s'est passé et qu'ils se soumettent à une série de questions incisives, puis laisser le comité produire un rapport final.
Même si tout cela devait se produire, les libéraux sont encore majoritaires au comité; ils auront donc le dernier mot sur le rapport écrit par le comité. Nous demandons simplement au premier ministre de se soumettre à l'enquête d'un comité où les libéraux sont majoritaires. Il est donc illogique de soutenir comme il le fait que tout cela pourrait mal tourner. Il s'agit de son propre parti. Nous lui demandons simplement de pouvoir inviter la dizaine de personnes impliquées dans cette affaire à comparaître une par une pour qu'elles donnent leur version des faits, qu'elles avouent la vérité et qu'elles répondent à des questions. S'il n'a rien à cacher, il acceptera certainement.
Je suis ici, devant les députés, pour parler du budget de la dissimulation. Tout comme je l'ai fait l'autre soir, lorsque le a contraint les députés de son parti à rester ici pendant 30 heures pour veiller sur son opération de dissimulation, je l'invite à faire quelque chose qu'il aimerait fort certainement, soit de mettre un terme à mon intervention. Je suis certain qu'il y a bien des jours où le premier ministre aurait aimé que je cesse de parler. Je lui donne donc la chance de me faire taire. S'il entre dans la Chambre, et je sais qu'il est ici parce que je l'ai vu plus tôt, et qu'il dit: « L'opération de dissimulation est terminée. Le comité pourra faire enquête sur le scandale...
:
Monsieur le Président, je m'excuse d'avoir signalé la présence ou l'absence du . Je dirai toutefois ceci: certaines personnes nous accrochent un sourire dès qu'elles entrent quelque part. D'autres nous en accrochent un dès qu'elles partent. Sur ce, poursuivons.
Ce que je souhaite, c'est que le vienne au comité de la justice. Ce que je voulais dire tout à l'heure, c'est que, s'il prenait la parole à l'instant même pour annoncer que tout cet exercice de dissimulation était derrière nous et que le comité de la justice pourra terminer son enquête, je mettrais fin à mon discours. Je sais que le premier ministre donnerait souvent cher pour me faire taire. Je lui offre maintenant cette chance, et gratuitement par-dessus le marché. La vérité est gage de liberté, ne l'oublions pas. C'est la seule façon d'interrompre mon discours plus tôt que prévu. Je peux assurer aux députés d'en face, qui m'endurent depuis ce midi, que je ne suis pas près d'arrêter. Je vois bien qu'ils commencent à fatiguer, mais je promets de ne pas m'en vexer le moindrement.
J'étais simplement sur le point d'aborder l'aspect international de ce scandale et de souligner le fait que l'OCDE s'intéresse maintenant à cette affaire de corruption touchant SNC-Lavalin. Le Canada a adhéré à une convention internationale contre la corruption et la fraude, qui exige que des procureurs indépendants intentent des poursuites dans des cas de corruption internationale. L'OCDE s'est dite inquiète du fait que le s'était peut-être ingéré politiquement dans le rôle de en tentant de bloquer les poursuites intentées contre une entreprise accusée de fraude et de corruption totalisant plus de 100 millions de dollars à l'échelle internationale.
Il ne fait aucun doute qu'une telle infamie internationale nuit au Canada. Notre pays est considéré comme un État de droit. Partout dans le monde, les entreprises ont toujours dit que, compte tenu des forces et des faiblesses du Canada, elles savent que, en cas de différend, elles pourront être traitées de manière équitable par notre appareil judiciaire; que nos gouvernements ne confisquent pas de biens, qu'ils n'abrogent pas les contrats et qu'ils ne s'adonnent pas à des activités illégales; et que le Canada est un pays sûr, où le reste du monde peut faire des affaires.
Cette réputation est précieuse pour notre économie. L'existence d'un scandale public, dans lequel accuse le de s'être ingéré dans une poursuite, met en péril cette précieuse réputation. C'est pourquoi l'OCDE s'intéresse à ce scandale et souhaite même enquêter sur celui-ci. Je dis cela non seulement pour souligner les conséquences internationales de ce scandale, mais aussi pour montrer à quel point la situation est grave.
Il n'arrive pas souvent que d'autres pays remarquent les controverses politiques qui font rage dans les États voisins. D'ailleurs, les grands organismes internationaux et multinationaux ne se mêlent habituellement pas des plus récentes controverses politiques qui sévissent en France, au Royaume-Uni ou au Canada. Il faudrait qu'une affaire soit extrêmement grave pour qu'un organisme international comme l'OCDE envisage de faire une déclaration publique de cette nature. Or, l'OCDE a fait une telle déclaration, qui est désormais publique. Il est de notre devoir de rassurer le milieu des affaires et le milieu juridique à l'échelle mondiale sur le fait que le Canada respecte toujours la primauté du droit, que tout le monde est égal en vertu de ce principe et que les politiciens n'ont pas à jouer avec la loi.
Nous avons la capacité de le faire en convoquant le devant le comité de la justice, de concert avec toutes les autres personnes soupçonnées de s'être ingérées dans le rôle de l'ancienne , en les laissant dire la vérité sous serment et en laissant le comité, qui est dominé par les libéraux, publier un rapport contenant des conclusions claires. C'est tout ce que nous demandons, et la plupart des Canadiens seraient d'avis que c'est assez raisonnable.
Les députés d'en face soutiennent notamment qu'il faut passer à autre chose. Je suis tout à fait d'accord. En toute franchise, je préférerais parler de la taxe sur le carbone des libéraux, de leur promesse brisée quant au déficit ou de nombreuses autres décisions politiques extrêmement impopulaires que le a prises. Si nous passions à ces politiques inefficaces et impopulaires simplement pour des raisons politiques, nous laisserions tomber un problème très important concernant la protection du système de justice au titre de la loi.
Nous n'allons pas nous contenter d'accumuler du capital politique en parlant de sujets qui seraient plus avantageux sur ce plan. Nous allons plutôt rester concentrés sur la nécessité de demander des comptes au gouvernement au sujet de cette ingérence politique dans le système judiciaire. En effet, même s'il n'est peut-être pas dans notre intérêt politique de nous concentrer sur des concepts comme la préservation de l'indépendance du système judiciaire, c'est la chose à faire pour le pays.
Nous aurons le temps de débattre de la taxe sur le carbone, qui est entrée en vigueur aujourd'hui en Ontario, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba. Nous aurons le temps de débattre de la promesse non tenue du d'équilibrer le budget cette année. Il y aura beaucoup de temps pour ces sujets, et nous en débattrons. Qui plus est, nous réglerons ces problèmes avec nos propositions qui réduiront le fardeau fiscal et équilibreront le budget.
Cela dit, le temps est venu pour le gouvernement de rendre des comptes et, pour nous, de corriger la situation créée par le en ce qui concerne le système de justice. Nous lui avons donné un moyen de le faire. C'est très simple: il doit appuyer notre motion en comité pour qu'il y ait une enquête exhaustive. Le devrait venir témoigner et amener tous les membres du personnel qui ont participé à l'opération de dissimulation. Qu'on les laisse s'exprimer librement, sans aucune restriction sur ce qu'ils peuvent dire, et qu'on permette au comité de publier un rapport final que les Canadiens pourront lire avant les prochaines élections. C'est un pas en avant très raisonnable que tout premier ministre qui n'a rien à cacher serait prêt à faire.
Jusqu'ici, il ne s'est pas montré disposé à le faire. Comme nous le savons, il a coupé court à deux enquêtes parlementaires, une du comité de la justice et une autre du comité de l'éthique. Il a refusé qu'on mène une enquête publique indépendante et non partisane. Les comités parlementaires auxquels je viens de faire allusion sont les seuls moyens qui nous restent de parvenir à la vérité. Si le voulait simplement consentir à nous laisser procéder à ces enquêtes, nous pourrions faire la lumière sur cette affaire. Il nous sera ensuite possible de nous consacrer aux débats que nous attendons tous, notamment, encore une fois, sur la taxe sur le carbone des libéraux, dont personne ne veut et qui causera grand tort; la promesse que le premier ministre n'a pas su tenir à propos des déficits; ses échecs sur la scène internationale; son voyage désastreux en Inde; sa guerre sur Twitter avec l'Arabie saoudite; son abandon devant Donald Trump, à qui il a accordé concession après concession dans la négociation de l'ACEUM; et sa décision de stopper trois projets de pipeline. Ce sont tous là des sujets qui méritent d'être débattus et nous, les conservateurs, avons bien l'intention de tenir ces débats et de les remporter.
En attendant, le ne peut pas simplement faire oublier ce scandale de corruption en creusant le déficit avec les dépenses de 41 milliards de dollars qu'il prévoit dans ce budget de la dissimulation.
Voilà pourquoi je prends la parole aujourd'hui et formule ces observations prolongées à l'intention de tous nos collègues à la Chambre des communes.
Où en sommes-nous aujourd'hui avec ce budget de dissimulation? Nous avons un gouvernement qui utilise les deniers publics pour tenter de noyer un scandale. Les libéraux ont ajouté 60 milliards de dollars à notre dette nationale, soit trois fois ce que le avait promis. Plutôt que d'équilibrer le budget cette année, ils nous proposent un autre déficit de 20 milliards de dollars, des dettes qui, inévitablement, mèneront à des hausses d'impôts s'ils sont réélus.
Le budget annonce des milliards de dollars de dépenses supplémentaires sans la moindre solution pour les payer, sinon encore plus de dettes. Or, nous amorçons une période où le risque est élevé, l'économie mondiale étant déjà aux prises avec des déficits et des dettes aux montants excessifs. Comme le déséquilibre budgétaire est considérable, cela ne nous laisse pas la moindre marge de manoeuvre pour nous protéger des coups durs que le monde pourrait bien nous infliger encore une fois.
Il s'agit d'une situation bien différente de celle au début de la dernière récession mondiale. Les gouvernements, tant libéraux que conservateurs, ont pris la décision responsable à la fin des années 1990 et au début des années 2000 de rembourser des centaines de milliards de dollars sur la dette. Je félicite le gouvernement libéral de Jean Chrétien d'avoir contribué à la série de budgets équilibrés. Ceux-ci ont été suivis des budgets équilibrés de Stephen Harper et de Jim Flaherty, qui ont également réussi à rembourser 40 milliards de dollars sur la dette. Quand la grande crise a frappé en 2008, nous étions prêts et avions des assises solides. La réalité, c'est que tous les pays ont enregistré un déficit, mais celui du Canada était le plus petit. Le Canada a été le dernier pays à entrer en récession et le premier à en sortir. Le gouvernement précédent a créé un million d'emplois et a laissé au pays un budget équilibré.
Si une telle crise financière survenait aujourd'hui, nous aurions un déficit de 20 milliards de dollars dès le départ, ce qui signifie que chaque dollar en dommages économiques supplémentaires serait payé à l'aide de fonds empruntés qui s'ajouteraient aux 20 milliards de dollars par année. À mesure qu'un nombre croissant de Canadiens auraient recours à l'assurance-emploi et recevraient des prestations, de moins en moins de gens paieraient de l'impôt sur le revenu et des charges sociales. À mesure que les bénéfices des sociétés diminueraient, les recettes provenant de l'impôt des sociétés diminueraient aussi. Tout cela ne ferait que mettre à mal l'équilibre budgétaire du pays. C'est précisément pour cette raison qu'il est important de rembourser la dette en période de prospérité, afin de se préparer pour les temps difficiles.
Au lieu de cela, le a gaspillé ce qu'il a reçu en héritage. Il a hérité d'une fortune personnelle et d'une fortune à titre de premier ministre, fortune qu'il a gaspillée. Il a fait d'un budget équilibré un énorme déficit. Il a transformé des impôts peu élevés en impôts très élevés et il compromet maintenant l'avenir de nos enfants. C'est un calcul politique de sa part. Il pense que si les Canadiens voient une pluie de dollars leur tomber dessus sous forme d'énormes dépenses gouvernementales précédant les élections, ils oublieront complètement le scandale qui a entaché son gouvernement et diront: « Qu'en est-il de cette histoire de SNC-Lavalin? » « Je ne sais pas, mais attrapons ces dollars avant qu'ils ne disparaissent »
Toutefois, les Canadiens ne sont pas dupes. Dans ma région de Carleton, les sages citoyens de Manotick, Stittsville, Greely et de tant d'autres municipalités merveilleuses sont obnubilés par la volonté de protéger le système juridique de la corruption que le a tenté de leur imposer. Dans tous les porte-à-porte que j'ai faits, je n'ai pas entendu une seule personne dire du bien de ce budget trompeur, car ils savent exactement ce qu'il en est.
Les Canadiens savaient exactement ce que tramait le . Il était en train d'exécuter la manoeuvre en trois étapes à la Kathleen Wynne. Nous connaissons tous cette manoeuvre. Première étape: un énorme scandale; deuxième étape: des dépenses qui entraînent un énorme déficit pour tenter de faire oublier le scandale et troisième étape: énormes hausses d'impôt pour payer le tout après les élections. Voilà la manoeuvre en trois étapes McGuinty-Wynne, dont l'architecte est Gerald Butts. Le budget à l'étude en est un parfait exemple.
La manoeuvre ne fonctionne pas cependant. Les Canadiens ont fait preuve de sagesse en résistant à toutes les manoeuvres du gouvernement visant à les acheter. Lorsqu'ils ont vu le jeter de l'argent par les fenêtres, les Canadiens se sont montrés circonspects. Ils se sont rendu compte qu'il tirait l'argent de leur porte-monnaie et ont refusé de se laisser distraire. « Obtenons des réponses concernant le scandale de corruption de SNC-Lavalin. »
Voilà pourquoi, partout où je vais, les gens me disent: « Allez au fond des choses. Ne laissez pas le camoufler l'affaire. On est allé trop loin. Il dépasse les bornes. »
J'ai une offre pour le gouvernement concernant l'opération de dissimulation. Que les acteurs clés comparaissent devant le comité de la justice, qu'ils répondent à des questions, qu'ils le fassent publiquement et qu'ils laissent les membres du comité rédiger un rapport. Qu'ils permettent aux Canadiens de décider qui croire en octobre. Il ne faut pas s'accrocher à l'idée de tout balayer sur le tapis aujourd'hui pour ensuite se rendre en clopinant jusqu'en octobre sans que personne sache ce que les libéraux ont fait.
Cela n'a pas fonctionné. Cela ne peut pas fonctionner. Il y a trop de gens désireux de connaître la vérité pour que le s'en tire en dissimulant des choses. Plus il essaie de le faire, plus cela devient difficile, et il est de plus en plus difficile d'empêcher que la vérité se sache.
Nous voilà aujourd'hui réunis à la Chambre des communes — la Chambre des gens du peuple — avec l'occasion de faire de ce scandale un moment de reddition de comptes, de prouver que la Chambre est capable de découvrir les faits cachés, de faire connaître les vérités cachées et de tenir responsables les auteurs des gestes posés. Certes, si le n'a rien à cacher, il acceptera que le Parlement fasse cela.
Je constate que je m'adresse directement au , par votre intermédiaire, monsieur le Président, depuis déjà un certain temps. Je me tourne maintenant vers les députés libéraux d'arrière-ban. Certains, démontrant un grand courage, se sont montrés prêts à poser les gestes nécessaires et ont mis de côté leur intérêt politique personnel et leur carrière pour dire la vérité, d'abord aux personnes au pouvoir, puis à la population. Les libéraux qui les regardent se disent peut-être: « Non, non, pas question de suivre leur exemple. Le m'écraserait sous ses talons. »
Les libéraux devraient réfléchir un peu car ils ont quelque chose à protéger: leur intégrité. Ceux qui agissent avec intégrité sont traités, à juste titre, comme des héros quand ils retournent dans leur circonscription. J'ai lu pendant la fin de semaine que l' avait été accueillie par un grand banquet en son honneur dans sa communauté. Les gens admirent l'intégrité dont elle a fait preuve dans son travail. Ils savent qu'elle a accompli une tâche très difficile et hors de l'ordinaire.
Bien des députés libéraux d'arrière-ban diraient peut-être qu'ils n'ont pas le courage d'affronter un premier ministre ou qu'ils pensent qu'il est dans leur intérêt politique de baisser la tête, d'avancer, d'oublier la vérité et de se rendre jusqu'en octobre. Ensuite, ils pourront s'inquiéter de savoir si la vérité sera révélée. Cependant, on se souviendra d'eux, si c'est l'attitude qu'ils adoptent, car la vérité finira par éclater et tout le monde saura que les députés qui ont aidé le à la camoufler étaient à son service plutôt qu'au service de la population.
Nous devons nous rappeler que nous ne travaillons pas pour le gouvernement en cette enceinte; nous travaillons pour les gens du peuple. C'est pourquoi on l'appelle la Chambre des communes. Parfois, les gens lisent l'organigramme à l'envers. C'est la population qui est au sommet. Au-dessous il y a la Chambre des communes et ses députés et, au-dessous, les ministres et le gouvernement qui sont sous leurs ordres. C'est pourquoi le mot « ministre » trouve sa racine dans le mot « serviteur ». C'est parce que les ministres étaient les premiers serviteurs de la Couronne, mais, en fin de compte, ils sont aussi les serviteurs des gens du peuple parce que ceux-ci peuvent renvoyer un gouvernement à tout moment.
Je sais que certains députés sont tout simplement surpris et croient que je recommande la tenue d'un vote de défiance. Nous n'avons pas à aller aussi loin aussi rapidement. Pourquoi ne pas commencer par mener une enquête approfondie? Pourquoi les députés libéraux d'arrière-ban ne voteraient-ils pas pour la tenue d'une telle enquête à la Chambre des communes? Quelle est la pire chose qui puisse leur arriver? Déjà, nombre d'entre eux n'ont pas été considérés pour un poste au Cabinet. À vrai dire, même s'ils pensent le contraire, ils ne pourront pas faire partie du Cabinet de sitôt, de toute façon. Cependant, il leur reste leur intégrité, et ils pourraient la préserver en votant pour que l'on mette fin au secret et en laissant des témoins comparaître pour qu'ils disent la vérité. Ensuite, ils pourraient retourner dans leur circonscription et dire qu'ils ont pris la bonne décision, même si les dirigeants du parti ont été durs avec eux. Ils ne pourraient pas faire partie du Cabinet, mais ils serviraient bien la population. C'est pour cette raison que je demande aux députés d'en face de faire front commun avec les conservateurs et de faire passer le pays avant le parti afin que l'on sache la vérité.
En octobre, tous les députés libéraux devront retourner dans leur collectivité...
M. Kevin Lamoureux: Peut-être plus tôt.
M. Pierre Poilievre: Un instant: je viens d'entendre une rumeur provenant des bancs d'en face, plus précisément du leader adjoint à la Chambre. Lorsque j'ai dit que les élections auraient lieu en octobre prochain, il a crié: « Peut-être plus tôt. » Le chat est peut-être sorti du sac. Le leader adjoint à la Chambre a peut-être révélé que nous assisterons bientôt aux élections de la dissimulation. Après le budget de la dissimulation, ce sera les élections de la dissimulation. La stratégie politique du parti d'en face est peut-être de tenir les élections avant que la vérité éclate.
Si les députés d'en face me demandaient conseil — et il est très rare qu'ils le fassent —, voici ce que je leur dirais: une opération de camouflage ne fonctionnera pas. Les Canadiens sont trop intelligents pour se laisser prendre. Ils ont une très bonne idée de ce qui se passe parce qu'ils ont vu beaucoup de preuves jusqu'à maintenant. Ils ne se laisseront pas berner par des élections surprises, un budget trop coûteux ou une tentative d'utiliser une majorité pour étouffer la vérité et punir les dénonciateurs.
Ne serait-ce que dans leur propre intérêt, ils devraient défendre ce qui est juste, tenir tête au , faire ce qui est le mieux pour les personnes qu'ils représentent, protéger l'intégrité de notre système judiciaire, maintenir tout ce qui est bon de nos institutions, unir leurs efforts à ceux des gens qui partagent les mêmes convictions et mettre leur parti au service du pays. Ils devraient pouvoir dire sans sourciller aux habitants de leur circonscription qu'ils ont fait ce qu'il fallait, non pas pour le chef de leur parti, mais pour les gens qu'ils représentent. C'est seulement ainsi qu'ils pourront se présenter sans gêne devant les électeurs, en sachant qu'ils ont fait ce qu'il fallait.
Je serai heureux de continuer mon discours lorsque la Chambre reprendra le débat sur cette question au moment qu'elle jugera opportun, à moins que d'ici là le informe mon parti, par écrit, qu'il est disposé à mettre fin à cette entreprise de dissimulation et à laisser l'enquête se poursuivre.