[Le député s’exprime en cri ainsi qu'il suit:]
[Les propos du député sont interprétés ainsi:]
Monsieur le Président, je souhaite tout d'abord saluer mes amis, mes proches. C'est bon de voir tout le monde aujourd'hui.
Commençons par dire les choses telles qu'elles sont: on nous a arraché nos langues. Les Canadiens doivent être généreux et ne pas laisser ces langues disparaître.
Nous avons parcouru un long chemin, et ce chemin peut mener à un Canada plein d'espoir et de promesses. Ce projet de loi porte sur l'espoir: l'espoir pour l'avenir, l'espoir pour le présent et l'espoir pour nos enfants.
Au Parlement, nous avons les pouvoirs et les ressources. Au début, on nous a dit que nous travaillions pour tous les Canadiens. Nous devons tous travailler ensemble, car le Canada a mis sur papier des promesses quant à la suite des choses. Nous avons conclu un pacte, un accord, ensemble. Nous sommes liés. Si les choses ne se sont pas bien passées, nous les changerons pour favoriser le respect mutuel.
[Traduction]
Les traités supposent respect et fraternité. Les Autochtones ont toujours eu des traités. Les Cris et les Pieds-Noirs concluaient des traités rationnels. Par exemple, il n'était pas question de livrer des combats en hiver, parce qu'il faisait trop froid et qu'il n'était pas bon de déplacer les enfants, les femmes et les vieillards pendant cette période. Si une tribu faisait la guerre, son chef allait voir l'autre chef pour lui expliquer ses motifs. Bien souvent, la raison était que les jeunes guerriers débordaient d'énergie et dérangeaient tout le camp. Les aînés savaient que la meilleure chose à faire était de les envoyer en guerre contre l'ennemi connu. Les deux chefs discutaient, et l'un d'eux bénéficiait d'un délai pour déplacer les femmes, les enfants et les vieillards, et cela fonctionnait. Plus tard, en temps de paix, ils en parlaient.
Les histoires que nous racontons au sujet de la création, de Wesakechak, concernent des traités. Ces traités universels portent sur l’eau, la terre, l’air, le feu et, bien sûr, le Grand Esprit. Par exemple, lorsqu’un enfant naît, les eaux de la mère se rompent, ce qui indique que l’enfant va naître. Il reçoit ensuite sa première bouffée d’air précieux et sacré, et il est un être humain vivant. Il est ensuite enveloppé dans la peau et la fourrure chaudes d’un animal et bénéficie de la chaleur du feu et du lait vivifiant de sa mère. Bientôt, les autres enfants jouent avec lui, à l’extérieur, dans leur propre territoire, qui est le Canada.
Lorsque le Créateur a fini de créer les créatures de la terre, de la mer et des airs, il les a toutes appelées pour leur demander quels dons elles souhaitaient recevoir. Il a ainsi conclu des traités avec toute la vie sur terre. De nombreuses créatures ont demandé de servir l’humanité, mais le Créateur les a averties que l’humanité serait le meilleur et le pire de toute la création. Elles ont accepté et compris ses avertissements. En remerciement de leur compréhension et de leurs sacrifices, elles ont obtenu une place dans l'au-delà. Les hommes, les femmes et les enfants devaient les honorer lors de cérémonies, ce que les peuples autochtones font encore aujourd’hui.
C’est en raison de ces enseignements que nous respectons l’air, le feu et l’eau de façon spirituelle. Ils sont inclus dans toutes nos prières et nos cérémonies. C’est une bonne façon de vivre.
[Le député s’exprime en cri ainsi qu'il suit:]
[Les propos du député sont interprétés ainsi:]
Nous avons tous nos langues, nos connaissances et nos cérémonies. En tant que peuples autochtones, nous respectons la terre et tous les enfants de ses citoyens à plumes, à fourrure, à écailles, à deux pattes, à quatre pattes et à ailes.
L’humain est la seule créature qui viole continuellement les traités. Les autres n’ont jamais violé leur traité sacré avec nous.
Le bon sens nous commande de prier pour la terre et pour tous ceux qui y habitent. Depuis plus d’un siècle, nous avons signé des traités entre nos différents peuples et pays. À l’origine, l’idée n’était pas l'asservissement, mais le respect.
Les langues doivent être utilisées pour être utiles. Elles doivent être parlées par nos enfants à l’école, à la maison et dans le reste de la société. Nos langues doivent être diffusées à la télévision pour que nous puissions voir et comprendre le pourquoi et le comment, et voir ce qui se passe dans notre Parlement. Il est important d’avoir une langue.
[Traduction]
J’ai vu une affiche à l’entrée d’un cimetière au lac La Ronge, dans le Nord de la Saskatchewan. Elle disait: « Si nous n'avons pas pu vivre comme des frères, reposons ici comme des frères. »
L’homme est représenté par le feu. Fait intéressant, les femmes sont représentées par l’eau. Avec un seul mot ou un seul regard, l'eau peut nous détruire ou nous élever. Personnellement, je préférerais être un bon frère pour mon prochain plutôt que mourir dans un déluge de préjugés, de jalousie, de colère et de peur.
La langue peut transmettre le respect et le sens. Elle représente la culture et elle définit qui nous sommes, notre identité. C’est une question d’apprentissage, d’éducation et de savoir.
L’aîné Winston Wuttunee m’a demandé de parler de l’importance de la langue et de son lien avec nos croyances. Il y a quatre éléments: l’eau, l’air, la terre et le feu. La langue est liée à ces quatre éléments. Si on prend un mot en cri et qu'on le décompose, d'autres significations émergent.
Prenons l’exemple de l’eau. L’eau, c’est la femme, la vie, le lien avec toute la création. C’est la beauté même.
Prenons l'air. Il peut être pur ou pollué. Tout cela a une incidence sur notre santé. C'est le souffle de vie. Des animaux volent dans les airs. Nous avons besoin d’air pur pour être en bonne santé.
Prenons la terre. Nous vivons, puis nous mourrons. À notre mort, nous faisons un avec la terre, qui est notre famille. Elle nourrit l'herbe, le bison et les êtres humains. Elle fait partie de nous.
Réfléchissons au feu. Le feu est aussi source de vie. Il nous garde au chaud. Il nous permet de cuisiner et de survivre. Il nettoie la terre. Il représente également l'homme. Il forme un duo parfait avec l'eau.
Prenons un mot de la langue crie, nikamoun, qui signifie « chanter ». Nika veut dire « devant » et moun veut dire « manger ». Nikamoun signifie donc « être nourri de chants ». Si nous poussons plus loin l'analyse, cela pourrait signifier « être nourri par celui qui est devant nous ». Cela pourrait aussi être le Créateur. En allant encore plus loin, cela veut dire « quiconque est devant nous nourrit ». C'est là que la soif d'argent devient notre moyen de subsistance. C'est rapidement devenu un régime de famine pour nous tous, la nature et l’humanité aussi. Avons-nous la responsabilité et la capacité de réagir, d’apprendre pour nous sauver, sauver nos enfants, l'humanité et le monde entier?
[Le député s’exprime en cri ainsi qu'il suit:]
[Les propos du député sont interprétés ainsi:]
Sans la langue, qui sommes-nous? Nous perdons notre passé, nous devenons incapables de comprendre les pensées d'autrefois et de comprendre nos ancêtres lors des cérémonies. Eux-mêmes sont incapables de nous comprendre quand nous ne pouvons pas communiquer dans notre langue.
Le Parlement moderne a un rôle à jouer pour aider les peuples autochtones. Nous pouvons réparer des injustices passées en veillant à ce que les langues du pays, nos langues autochtones ne deviennent pas des pièces de musée, relégués au fond des tiroirs sur l'anthropologie lingustique, mais qu'elles soient vivantes, dynamiques, à la fois adaptées au monde moderne et rattachées spirituellement au passé.
J'ai longuement rêvé du jour où l'État canadien, après avoir trop longtemps tenté d'ignorer et d'éliminer nos langues communes, participerait à un effort parlementaire en vue de les raviver.
Je remercie mes collègues, la leader du gouvernement à la Chambre et les Canadiens. Je remercie nos ancêtres, qui n'ont jamais cessé de vivre. Je remercie les enfants à naître, qui porteront bientôt l'esprit de la langue vers l'avenir. Je les remercie chaleureusement.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'intervenir aujourd'hui pour appuyer le projet de loi et, dans ce contexte, de faire des commentaires de nature générale sur les rapports du gouvernement fédéral avec les peuples autochtones.
Lors de son discours inaugural de 1981, l'ancien président des États-Unis Ronald Reagan a affirmé: « Dans la crise qui nous frappe aujourd'hui, le gouvernement n'est pas la solution au problème, le gouvernement est le problème ».
Lorsque l'on examine l'histoire des relations entre la Couronne et les Autochtones, et les obstacles que ces derniers doivent surmonter aujourd'hui, il est parfaitement clair que bon nombre des obstacles actuels découlent de l'intervention du gouvernement dans leur vie, intervention qui ne respecte ni leurs droits en tant qu'individus ni, par extension, leur identité et leur culture.
Ces types d'intervention du gouvernement, interventions massives qui nient la primauté de la culture, qui rejettent l'autorité parentale et l'autonomie familiale et qui partent du principe que les gouvernements et les intérêts particuliers, par opposition aux propriétaires et à la population locale, devraient contrôler l'exploitation des ressources, tout cela a posé bien des problèmes à de nombreuses collectivités autochtones.
Si d'aucuns cherchent à susciter un antagonisme qui n'existe pas entre les conservateurs et les collectivités autochtones, nous reconnaissons que c'est le principe fondamentalement conservateur que les familles et les collectivités sont plus importantes que l'État, qui aurait pu — et qui le pourrait encore aujourd'hui — paver la voie à une vraie réconciliation.
En ce qui concerne la tragédie des pensionnats indiens, ces écoles reposaient sur l'idée voulant que le gouvernement doive contrôler le système d’éducation et s’en servir pour imposer des valeurs et des pratiques contraires aux enseignements des parents et des communautés. Cette doctrine est très contestable, et il est fort regrettable que des acteurs non étatiques aient collaboré à sa mise en œuvre, même s’ils ont tous présenté des excuses aux côtés du gouvernement.
Cela dit, il ne faut pas oublier que cette politique délétère s’inspirait du principe selon lequel l’État peut et doit s’immiscer dans la vie familiale des peuples autochtones afin de leur imposer un système d’éducation qui est contraire à leurs croyances et à leurs valeurs. Toutes les initiatives fondées sur la négation du rôle indispensable des parents dans l’éducation de leurs enfants, au motif paternaliste que les fonctionnaires sont mieux placés pour élever les enfants, sont toujours répréhensibles et elles ont toujours des conséquences désastreuses. Nous devons aspirer à ne jamais répéter l'erreur d'écarter les parents de toute décision concernant l’éducation de leurs enfants.
Aujourd’hui, nous discutons plus précisément des langues autochtones. Comme je l’ai dit, mes collègues du caucus conservateur et moi-même sommes on ne peut plus favorables à ce projet de loi. Nous sommes tout à fait pour la préservation et la revitalisation des langues autochtones et nous estimons que les gouvernements ont un rôle constructif à jouer pour réparer les dégâts que leurs prédécesseurs ont souvent causés.
Quiconque connaît une deuxième langue sait parfaitement qu’une langue n’est pas seulement un médium neutre pour échanger de l'information. Les langues sont structurées en fonction de certaines conceptions de ce qui est vrai et de ce qui est important, et c’est pour cette raison qu’il est plus facile d’exprimer certaines idées dans certaines langues plutôt que dans d’autres. Les locuteurs d’une langue donnée saisissent la logique culturelle qui la sous-tend et ils peuvent ainsi avoir accès à différentes informations et traditions.
La préservation et la revitalisation des langues autochtones permettent aux Autochtones et à tous les Canadiens de mieux comprendre et de mieux apprécier les idées, l’histoire, la culture et les valeurs des différentes nations autochtones. La préservation et la revitalisation des langues autochtones contribuent à préserver et à revitaliser les savoirs traditionnels autochtones, des savoirs qui sont utiles aux peuples autochtones comme à tous les Canadiens.
J’aimerais dire quelques mots sur ces savoirs traditionnels, car c’est un concept très important, qu’on évoque souvent, mais qu’on approfondit rarement. On distingue deux types de savoirs: le savoir fondé sur l'observation systématique et le savoir traditionnel.
L'acquisition du savoir par l'observation systématique se fait avec des expériences et des comparaisons. Par exemple, si l'on veut vérifier que l’absorption d’un produit donné réduit le risque de cancer, ils peuvent faire une étude où une comparaison est faite entre un groupe de personnes à qui on fait consommer le produit en question à intervalles réguliers et un groupe comparable de personnes qui ne consomment pas le produit. Puis, en comparant les deux groupes, on peut déterminer si l’un a un taux de cancer plus élevé que l’autre.
Il s’agit là d’une étude systématique, qui donne des informations exactes et claires, à condition que les deux groupes comparés comptent suffisamment de personnes et que les chercheurs aient pris soin de contrôler d’autres facteurs. Les études systématiques sont très efficaces, mais elles peuvent être onéreuses et prendre beaucoup de temps. Si l’on veut évaluer des effets sur plusieurs années, il est évident que ça prend du temps.
Le savoir traditionnel est constitué d'observations, lui aussi, mais ce sont des observations qui constituent l'expérience des générations passées. Une culture donnée peut préconiser certaines pratiques pour rester en bonne santé. Il se peut que ce soit parce que, après des milliers d’années de tradition, cette culture a observé que l’état de santé s’améliore ou se détériore nettement dans certains cas. Le savoir et la sagesse traditionnels découlent généralement de l’observation, au fil des générations, mais sans qu'on ait établi un plan de recherche ou, du moins, sans qu'on puisse en retracer un clairement.
Bien sûr, il arrive que le savoir traditionnel soit erroné si les gens acquièrent ce savoir en tirant de leurs observations des conclusions erronées. Mais cela arrive aussi dans le cas de la recherche systématique, où les gens peuvent tirer des conclusions erronées de leurs observations. Les études systématiques sont parfois contredites par des études systématiques ultérieures, tout comme le savoir traditionnel peut être contredit dans certains cas par les études systématiques ou par un autre savoir traditionnel.
Cela dit, il faut se garder, comme certains pourraient le proposer, d'ignorer le savoir traditionnel ou de l’écarter du revers de la main. Il est tout à fait valable et raisonnable de tirer ne serait-ce que des conclusions provisoires de l’expérience et de l’observation des autres, y compris des générations précédentes.
Les communautés autochtones du Canada possèdent un savoir traditionnel sur le territoire canadien, la culture, la famille, la vie et la dignité, entre autres. La langue est souvent le mécanisme de transmission de ce savoir traditionnel.
N'oublions pas que les communautés autochtones du Canada ne sont pas les seules à posséder un savoir traditionnel. Toutes les autres cultures et traditions en ont un aussi. La culture majoritaire en Occident est malheureusement devenue très sceptique concernant son propre savoir traditionnel.
Edmund Burke, le grand philosophe et politicien britannique, a écrit sur les bienfaits de la civilisation que nous recevons de nos parents et que nous transmettons à nos enfants. Il nous recommande d’être prudents dans nos innovations afin de ne pas saper inconsciemment le substrat qui garantit notre prospérité et notre bonheur. Burke nous dit, en employant d'autres mots, qu’il est important de tenir compte du savoir traditionnel dans les décisions que nous prenons.
Si une personne achète une nouvelle maison et constate qu’un poteau n’est pas à la bonne place, doit-elle s’empresser de le démolir ou bien commencer par s'assurer que le poteau en question n'est pas nécessaire au maintien de la structure de la maison? Je conseillerais à cette personne de ne démolir le poteau qu’à partir du moment où elle est sûre qu’il n’est pas essentiel à la structure. Si elle ne peut pas en être sûre, il vaut mieux laisser le poteau à sa place, car le propriétaire précédent a jugé qu'il valait mieux le laisser là et qu'il connaissait mieux la maison que le nouvel acheteur.
Le savoir issu de l'observation systématique peut finir par justifier des remises en question, mais en l’absence de données claires, il est préférable de s'en tenir au statu quo.
Dans de nombreux secteurs stratégiques différents, on tient compte du savoir tant fondé sur l'observation systématique que traditionnel. Par exemple, c'est le cas pour la réglementation des produits de santé complémentaires ou naturels. De nombreuses personnes craignent que le gouvernement cherche à réglementer ces produits de la même façon qu'il réglemente les produits pharmaceutiques, allant jusqu'à exiger les mêmes types et niveaux de tests. Toutefois, cette approche ne tient pas compte des avantages possibles des connaissances traditionnelles ni du fait que les gens utilisent certains produits depuis des milliers d'années pour traiter efficacement certaines maladies et que, dans ce contexte, ils peuvent être justifiés de choisir les produits qu'ils souhaitent utiliser pour prendre soin d'eux-mêmes.
Les personnes qui rejettent cette approche sont libres de ne consommer que des produits qui, selon des études à double insu, permettent d'améliorer la santé. Toutefois, la plupart des Canadiens seraient prêts à essayer des produits de santé complémentaires en plus des traitements conventionnels si les avantages de ces produits étaient étayés par le savoir traditionnel. L'essai de ces produits est précisément un moyen de recueillir davantage de données sur leurs effets. Parallèlement, on peut acquérir des connaissances traditionnelles et des données scientifiques en poursuivant les travaux d'expérimentation et d'observation qui s'imposent.
J'ai écrit au président du comité de la santé pour lui demander d'entreprendre une étude sur les effets pour la santé que peuvent avoir les produits et services de soins personnels non assurés, car il s'agit à mon avis d'un sujet auquel le Parlement devrait s'intéresser de plus près. Dans ce domaine-là comme dans bien d'autres, il faudrait prendre au sérieux la question du savoir traditionnel et admettre que, loin de contredire les connaissances fondées sur l'observation systématique, il les complète.
Pour en revenir aux relations entre la Couronne et les peuples autochtones, je rappelle que la terrible expérience du Canada dans le dossier des pensionnats indiens illustre à merveille la valeur du savoir traditionnel, car, dans ce cas précis, on a fait fi de la nature vitale du lien entre parents et enfants au profit de méthodes radicales et douteuses pour refaire le monde.
Cela dit, les architectes des pensionnats indiens n'ont pas seulement fait fi du savoir traditionnel autochtone, ils ont aussi passé outre à celui de notre propre société. Or, ce savoir traditionnel nous apprend lui aussi que le lien parents-enfants est absolument fondamental.
J'ai écrit ce qui suit dernièrement dans un billet paru sur le site Post Millenial:
L'idée voulant que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants, que la dignité humaine est universelle et immuable, que les meilleures sociétés reposent sur un principe de liberté ordonnée prenant racine dans une conception commune du bien commun, que l'être humain devrait vivre selon les vertus cardinales — prudence, justice, courage et tempérance —, que le travail productif est essentiel au bien-être personnel, que les droits de la personne sont universels et découlent du droit naturel — tout cela, et plus encore, fait partie du savoir traditionnel de notre civilisation.
Contrairement au savoir traditionnel d'ordre scientifique, celui d'ordre politique et moral ne peut pas être observé au microscope. C'est peut-être justement ce qui fait toute sa valeur et son importance.
Le projet de loi vise à préserver le savoir traditionnel autochtone en protégeant les langues, alors j'espère qu'au cours des débats ultérieurs à la Chambre, nous saurons apprécier le savoir traditionnel en général à sa juste valeur, que nous en comprendrons mieux l'importance et que nous en tiendrons compte comme il se doit dans nos discussions.
De plus, en ce qui concerne les relations Couronne-Autochtones, je tiens à faire quelques observations concernant l'incidence de l'exploitation des ressources naturelles sur les communautés autochtones.
Pour que les communautés autochtones soient capables de préserver et de revitaliser leurs langues et leurs traditions et qu'elles puissent reprendre de la vigueur en général, il leur faut un minimum de moyens. L'exploitation des ressources naturelles n'est pas une fin en soi, mais les communautés autochtones peuvent en tirer un capital utilisable dans des domaines qui comptent davantage, comme la famille, la vie communautaire, la culture et la langue. C'est pourquoi de nombreuses communautés autochtones croient à l'exploitation des ressources. Elles considèrent que c'est une façon d'améliorer leur sort et d'atteindre les objectifs qu'elles se fixent elles-mêmes, sans que leurs membres aient à partir pour s'établir en ville.
Les cadres juridiques sont censés tenir compte de l'importance de donner aux communautés autochtones affectées la possibilité de faire entendre leur point de vue sur l'exploitation des ressources naturelles. Malheureusement, le gouvernement a l'habitude d'imposer à ces communautés des politiques anti-développement, ce qui contrevient clairement à ses obligations juridiques. Cette façon de faire nuit à l'économie des communautés concernées et affaiblit leur capacité de préserver leur culture et leur langue. Voilà un nouvel exemple qui illustre que les interventions inappropriées du gouvernement minent la capacité des Autochtones de préserver leur identité et leur culture.
Je peux clairement montrer à la Chambre que le ne respecte pas ses obligations juridiques à l'égard des peuples autochtones à ce chapitre.
Le comité des ressources naturelles a mené une étude sur les meilleures pratiques de consultation des Premières Nations. Le 31 janvier dernier, j'ai eu l'occasion de poser des questions à des fonctionnaires au sujet des obligations et des décisions du gouvernement en matière de consultations.
Voici la question que j'ai posée:
Il y a l'obligation de consulter les communautés autochtones, quand elles ont consacré du temps, des ressources et de l'argent à un projet qui suit son cours et qui, soudain, est stoppé à cause d'une politique gouvernementale. Y a-t-il une obligation de consulter ces communautés si elles essaient de faire avancer un projet et que le gouvernement instaure des politiques pour le stopper? Y a-t-il obligation de consulter dans ce cas?
Terence Hubbard, directeur général à Ressources naturelles Canada, a répondu ceci:
[...] La Couronne a l'obligation de consulter dès qu'elle prend une décision susceptible de toucher les droits et les intérêts d'une communauté autochtone.
J'ai poursuivi en disant ceci:
D'accord. Il semble donc assez évident que des politiques comme le moratoire sur le forage en mer, dans l'Arctique, comme les projets de loi C-69 et C-48, comme la zone d'exclusion des navires pétroliers auraient des répercussions notables sur les communautés autochtones et leur capacité de pourvoir à leurs propres besoins par le développement économique qu'elles auraient bien pu avoir planifié et, dans de nombreux cas, avoir effectivement planifié avant l'introduction de ces politiques.
Voyons certains de ces exemples de plus près.
Quelles consultations le gouvernement a-t-il faites avant d'imposer la zone d'exclusion des pétroliers? Je parle de la période qui a précédé le dépôt du projet de loi C-48, quand le premier ministre est arrivé au pouvoir et a décrété cette zone d'exclusion.
D'après les réponses qui m'ont été données, je me suis rendu à l'évidence que, parmi tous les ministères représentés dans cette réunion et tous les hauts fonctionnaires responsables de surveiller la façon dont le gouvernement réalise ses consultations auprès des peuples autochtones, personne ne savait si des consultations relativement à la zone d'exclusion des pétroliers avaient été menées auprès des Autochtones. Je suis presque sûr que ces consultations n'ont pas eu lieu.
Pendant que j’étais dans l’Arctique avec le Comité des affaires étrangères, l’automne dernier, nous avons parlé avec différentes collectivités autochtones de questions relatives à la préservation culturelle, au savoir traditionnel et à l’exploitation des ressources naturelles. Elles nous ont fait part à plusieurs reprises de préoccupations relatives aux politiques anti-développement du gouvernement et de leur effet sur la capacité des collectivités autochtones de prospérer et d’utiliser leurs ressources pour protéger leur culture comme bon leur semble. Elles nous ont notamment expliqué que l’approche du gouvernement, pour ce qui est de consulter les collectivités nordiques avant d’imposer une interdiction de forer en mer dans l’Arctique, se résumait à appeler les premiers ministres locaux 45 minutes avant l’annonce. Il n’y a pas eu de véritables consultations sur une interdiction des forages en mer. Au lieu de cela, l’annonce a été faite par le , de concert avec Barrack Obama.
Cela montre un manque de respect flagrant à l'égard des collectivités autochtones et de la façon dont leur capacité de prospérer et de se développer influe sur leur capacité de préserver leur culture.
Il ressort de ces conversations que nous avons eues dans l’Arctique et ailleurs que consulter les collectivités autochtones avant d’imposer des politiques anti-énergétiques qui nuisent à leur droit reconnu de rechercher la croissance et de saisir des possibilités au sein de leurs collectivités n’intéresse nullement le .
Évidemment, certains Autochtones, certains dirigeants autochtones et certaines nations autochtones s’opposent à certains projets d’exploitation des ressources, et ils devraient exprimer leurs points de vue dans de véritables processus de consultation qui n’accordent à aucune collectivité en particulier le droit d’opposer son veto à des projets qui ont une incidence sur plusieurs collectivités.
L’obligation de la Couronne de consulter n’existe pas seulement pour les politiques favorables à l’énergie. Elle existe aussi pour les politiques anti-énergie, les politiques qui nient aux collectivités autochtones la possibilité de réaliser des plans leur permettant de renforcer leur autonomie et de financer des projets de renouveau culturel.
De toute évidence, étant donné son attitude, le gouvernement ne se soucie guère de consulter les collectivités autochtones. Il ne veut utiliser les consultations que comme excuse pour retarder l’exploitation de ressources dans certains cas, tout en ignorant totalement les collectivités autochtones quand il veut appliquer un programme qui va à l’encontre de ce qu’elles souhaitent. Pour le gouvernement, consulter veut dire décider d’abord ce qu’il veut, puis trouver des gens qui sont d’accord avec lui pour légitimer une décision qu’il a déjà prise. Ce n’est pas conforme à l’esprit de réconciliation ou même au droit, en ce qui concerne l’obligation de consulter.
Un gouvernement conservateur dirigé par notre chef respecterait vraiment les Autochtones en veillant à une véritable participation des collectivités, même dans les cas où il existe des différences d’opinions. Nous soutiendrons les collectivités autochtones dans leurs aspirations économiques, ainsi que dans leurs aspirations linguistiques, culturelles et sociales, parce que nous comprenons qu’une culture, c’est plus important que la politique. Nous appliquerons nos valeurs conservatrices à notre approche de ce domaine essentiel, et nous reconnaîtrons que l’ingérence d’un gouvernement omniprésent limite depuis trop longtemps les Autochtones.
Le gouvernement doit bien sûr être un partenaire constructif, mais surtout, il doit toujours veiller à ne pas faire obstacle. Il l’a trop souvent fait dans le passé et il continue de le faire, mais cela doit cesser.
Nous souhaitons tous au Canada voir des communautés dynamiques, des familles fortes et des personnes solides et résilientes. Je suis très heureux d’appuyer le projet de loi et je suis impatient de voir ce qui peut être fait pour le renforcer, dans les années à venir, par exemple en assurant un partenariat entre le gouvernement et les collectivités autochtones, en cessant de mettre des bâtons dans les roues aux collectivités autochtones et en les soutenant dans les efforts qu’elles déploient pour prospérer, pour préserver et faire revivre leur culture, et pour renforcer leur économie et leurs collectivités de tellement de manières.
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Monsieur le Président, je tiens à remercier le gouvernement et la de m’accorder un certain temps pour parler de ce projet de loi, même s’ils savent que ce n'est pas pour l'appuyer. Je leur suis reconnaissant de cette possibilité.
J’estime qu’il est important que ma voix soit entendue. Je suis le seul Inuk à la Chambre qui peut parler librement et voter selon sa conscience. Je ne peux pas, en toute conscience, appuyer cette loi parce qu’elle exclut la langue inuite.
Quand j’ai voté contre le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, j’ai dit que je proposerais un amendement et je l’ai fait. Le ministre a dit à la Chambre qu’il était ouvert aux amendements, et j’espérais en trouver un qui conviendrait. Je lui ai parlé personnellement de l’intention qui sous-tendait mon amendement, et il semblait être bien disposé à son égard.
C’était un amendement plutôt anodin. L’Inuit Tapiriit Kanatami, qui s’est prononcé fortement contre cette mesure législative, n’aurait pas appuyé mon amendement. Ses membres estimaient que le projet de loi n’allait pas assez loin, qu'il n’était pas assez ferme. Ce groupe a collaboré avec mes collègues du NPD pour présenter d’autres propositions d'amendement au comité.
Lorsque j’en ai discuté avec le ministre, celui-ci m’a dit que le problème était que les amendements, d’une part, et les recommandations de l'Inuit Tapiriit Kanatami, d’autre part, débordaient du cadre du projet de loi. J’ai pourtant fait très attention de rédiger mon amendement de façon à ce qu’il ne déborde pas du cadre du projet de loi.
Ayant déjà fait partie d’un gouvernement, je sais que nous sommes limités par notre mandat et que nous ne pouvons pas faire tout ce que nous voulons. J’en étais très conscient lorsque j’ai rédigé mon amendement, qui laisse simplement la porte ouverte au ministre pour qu’il puisse négocier avec les Inuits l’inclusion de notre langue.
Le et les ministres n’hésitent pas à dire dans cette enceinte qu’au sein des comités, les députés sont indépendants. Qu’on ne leur dit pas comment ils doivent voter en comité. Je sais maintenant que ce n’est pas le cas. Dans notre comité, c'est du pareil au même. Tous les députés libéraux ont rejeté mon amendement, comme on leur avait dit de le faire, et ils ont rejeté la totalité des amendements de l’opposition.
Je suis peut-être naïf, mais je suis de ceux qui pensent que les comités de la Chambre des communes sont le lieu où tous les députés, quelle que soit leur allégeance politique, peuvent travailler ensemble pour améliorer un projet de loi. Et croyez-moi, ce projet de loi a besoin d’être amélioré.
Rejeter des amendements sans même les avoir examinés, simplement parce qu’ils ne sont pas libéraux, c’est faire de la politique primaire. Ce n’est pas de la démocratie.
Au Nunavut, nous gouvernons par consensus. Nous n’avons pas de divisions politiques. Tous nos députés travaillent ensemble pour le bien du peuple. On pourrait s’en inspirer ici. Le projet de loi ne s’en porterait que mieux.
La semaine dernière, j’ai demandé au pourquoi, dans le budget, il finançait directement l'Inuit Tapiriit Kanatami, court-circuitant ainsi le gouvernement du Nunavut, pour remédier à la crise du logement et aux problèmes du système de santé que nous avons chez nous. Pourtant, c’est le gouvernement du Nunavut qui est responsable de ces deux dossiers. Le premier ministre s’est énervé en disant qu’il ne présenterait pas d’excuses « pour l’approche [qu'il a] adoptée en matière de réconciliation ».
C’est exactement l’approche que l’ITK pensait qu’il utilisait pour l’élaboration de ce projet de loi. Mais il est maintenant évident que le gouvernement n’a jamais eu l’intention de l’utiliser, et c’est ce que l’ITK reproche notamment au projet de loi.
En disant cela, le a laissé entendre que, pour le budget, il a utilisé l’approche de nation à nation avec les Inuits. Or, il ne peut pas jouer sur les deux tableaux, traiter de nation à nation avec les Inuits dans un projet de loi et les écarter dans un autre.
C’est un projet de loi qui est très important et qu’on attend depuis longtemps. La préservation des langues est importante pour toutes les cultures. Aujourd’hui, pour la première fois, nous reconnaissons le statut des langues autochtones et prenons des mesures pour empêcher leur extinction, mais malheureusement, ce n’est pas le cas de toutes les langues.
Pour cette raison précise que les langues inuites ne sont pas incluses dans le projet de loi, je ne peux pas l'appuyer. Je suis prêt à répondre à toute observation ou question des députés.
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Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue d'. Je vais essayer de rester constructif et positif, mais je dois dire que cela me hérisse au plus haut point de voir ce gouvernement se draper dans une espèce de sainteté divine. Cela m'exaspère. On dirait que les libéraux se croient au-dessus de tout commentaire ou apport constructif. Ils croient tout savoir, et c'est très agaçant. On le sent constamment dans leur ton. Je n'ai jamais senti cela auparavant. Lors de la dernière législature, avec les conservateurs, je n'ai jamais senti une telle arrogance. Les libéraux disent «
we know best ». C'est tellement agaçant.
Je siège au Comité permanent du patrimoine canadien et ce sujet me tient à cœur. J'ai devant moi 17 amendements du NPD, qui n'ont pas été adoptés, évidemment, et je corrobore le fait que l'amendement dont parlait tout à l'heure mon collègue était parmi les plus constructifs et ouvrait des portes. Malheureusement, les libéraux croient avoir la science infuse quand vient le temps de présenter un projet de loi. On l'a vu d'ailleurs dans l'affaire SNC-Lavalin et lorsqu'ils ont ajouté cette petite ligne dans le projet de loi omnibus. C'était divin. Les libéraux doivent s'en mordre les doigts, car tout le Québec s'en plaint.
Pour parler du projet de loi , je dois parler de mon vécu en tant que député à la Chambre. Je représente les gens de Longueuil—Saint-Hubert, alors bien évidemment, je tenais à défendre les intérêts des gens de chez nous, l'aérospatiale et notre tissu communautaire, mais surtout à trouver des solutions au fait que le tiers des enfants dans Longueuil—Saint-Hubert vivent dans une famille sous le seuil de la pauvreté. C'est un chiffre effarant dont on ne parle jamais.
Je vais parler de mon élection de 2011. Quand j'ai été élu, j'étais un citoyen normal de Longueuil qui avait une perception assez floue des questions relatives aux Premières Nations. Je suis arrivé ici avec le souci de défendre la distinction du Québec et de me battre contre le réchauffement climatique, mais franchement, les Premières Nations ne figuraient pas sur ma liste de préoccupations. De plus, je ne m'y connaissais pas en la matière.
On se souviendra qu'il est arrivé trop rapidement une course à la chefferie à la suite du décès de Jack Layton, et mon collègue le député d' faisait partie des candidats. À ce moment, beaucoup de gens de Longueuil—Saint-Hubert ont, comme moi, découvert un ambassadeur de la nation crie, qui fait aujourd'hui partie des gens qui se grattent la tête en se demandant si ce projet de loi sur les langues autochtones répond aux attentes.
Lorsque j'ai découvert mon collègue le député d', j'ai constaté à quel point cet homme avait travaillé fort, notamment dans le cas de la Paix des Braves et de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. J'ai vu à quel point il fallait travailler en profondeur pour régler de telles questions. J'ai aussi réalisé qu'il ne fallait pas une approche théorique, mais sentie.
Cet homme, que je qualifie d'ami, m'a bien fait comprendre que la relation privilégiée dont on parle — on en parle souvent du côté du Parti libéral — a vraiment besoin d'être soignée. Cela m'a frappé, chaque fois que nous traitions des langues autochtones en comité, de constater à quel point les témoignages étaient bouleversants et allaient bien au-delà d'une théorie disant que la langue est importante. On voyait des gens qui souffraient d'avoir vu leur passé et leurs origines effacés et leur personnalité et leur culture blanchies à l'eau de javel par un gouvernement centralisateur.
En tant que représentant des gens de Longueuil—Saint-Hubert, ce fut pour moi un choc de constater l'ampleur des plaies encore ouvertes sur lesquelles la Commission de vérité et réconciliation a tenté de mettre un baume. Celle-ci a tenté de tracer le parcours de cette réconciliation.
Dans cette optique, nous sommes arrivés en comité avec l'approche la plus fraternelle et la plus collaborative possible.
Aujourd'hui, j'ai fait référence au député d', parce que son fameux projet de loi , qui vise à assurer l'harmonie des lois fédérales avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, est figé au Sénat. Cette loi est très importante, puisqu'elle redéfinirait notre relation avec les peuples autochtones, la racine même de ce pays, mais elle est immobilisée pour des raisons partisanes.
Je n'évoquerai pas les équipes en jeu au Sénat, mais c'est manifestement honteux. Il faut que cela bouge. Il faudrait donner un bon coup de bâton de baseball pour remuer un peu les choses, pour les faire aboutir. Le projet de loi ferait qu'on respecterait les droits de nos peuples autochtones et qu'on les enchâsserait dans chacun de nos projets de loi.
Le projet de loi est, de toute évidence, fondamental et extrêmement important sur le plan du processus de réconciliation. Je comprends parfaitement à quel point la langue est précieuse et qu'elle est le véhicule premier d'une culture. Tout passe par là. Quand on regarde la situation, on y voit le danger. Lors de l'une de mes visites à Kahnawake, M. Norton m'a expliqué à quel point la langue mohawk était en péril. Il m'a expliqué que c'était un processus qu'il tenait à soutenir. De plus, il veut encourager les gens à s'y intéresser. Réapprendre toutes ces langues aux gens qui s'y intéressent est un engagement de plusieurs mois, de plusieurs années. Je comprends donc l'importance de la chose.
De plus, j'étais très heureux que mes collègues d' et de me soutiennent lors du travail sur ce projet de loi et de l'étude en comité. C'est un domaine délicat, dans lequel on ne peut pas improviser. Ce ne sont pas des lois courantes, ce sont des lois qui ont des conséquences émotives et qui vont sculpter notre relation et la pérennité de la culture de ces nations.
Évidemment, on a constaté et compris sur place l'importance de ce projet de loi. On comprend que les fonctionnaires ont cherché à élaborer un texte législatif qui allait satisfaire les besoins. Je vais essayer de ne pas utiliser de mots qui provoqueraient des réactions. Je vais essayer de ne pas prétendre que nous sommes des saints et que nous avons la science infuse. Je viens de le faire, mais j'en suis désolé. Je vais essayer de le dire délicatement. Si ce projet de loi est si important pour le gouvernement libéral, comment se fait-il qu'on en parle cinq semaines avant la fin de la session parlementaire? Comment peut-on expliquer cela? Y a-t-il une raison valable expliquant pourquoi on a repoussé cela à la toute fin de la session parlementaire?
Les membres du Comité permanent du patrimoine canadien sont occupés. Au comité, nous traitons constamment d'enjeux liés à la résilience culturelle du Québec, des Premières Nations ou des Innus. Je vais décrire notre processus en utilisant l'image suivante. On s'est demandé où on en était, on s'est dit que la session parlementaire allait bientôt prendre fin et on s'est dit que, vu la pauvreté du programme législatif, on n’était pas trop occupé pour présenter de nouvelles lois. On s'est donc dit que ce serait plaisant de faire quelque chose à ce sujet. On s'est dit qu'on aurait vraiment l'air idiot si on n'avait rien fait à ce sujet en quatre ans. On présente donc n'importe quoi.
Comme mon collègue l'a bien dit, un joueur majeur, l'Inuit Tapiriit Kanatami, dit ne pas être satisfait et ne pas avoir été consulté. Il faut avaler des couleuvres. C'est pitoyable de voir qu'il ne faudrait surtout pas que le prétendu gouvernement sanctifié puisse démontrer qu'il s'est assis sur ses mains. Or c'est malheureusement le cas.
C'est un projet de loi fondamental et très précieux. C'était donc dommage de voir à quel point il a fallu précipiter son étude, puisqu'il est très imparfait et qu'il contient toujours des échardes.
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Monsieur le Président, je tiens d'abord à souligner que nous sommes rassemblés sur les terres ancestrales du peuple algonquin.
En écoutant le débat, j'ai réalisé que la disparition de nos langues n'est pas la seule tragédie qui s'est produite. Lorsque mes ancêtres sont arrivés à Terre-Neuve, vers 1610, ils ont noué des liens amicaux avec les Béothuks. Non seulement la langue des Béothuks est disparue, mais le peuple aussi.
En tant que nation, nous devons prendre la question au sérieux et faire en sorte qu'à l'avenir, dans les lois que nous adopterons, nous donnions suite à la déclaration des Nations unies et aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. Il faut nous assurer d'y arriver, car nous avons directement consulté les peuples autochtones du Canada.
C'est un grand honneur d'intervenir au sujet du projet de loi . Le projet de loi concerne les langues autochtones et, plus précisément, les droits linguistiques des Premières Nations et des peuples métis et inuits, quoique les Inuits ont dit craindre que le projet de loi ne leur convienne pas tout à fait.
Comme l'ont affirmé d'éminents universitaires spécialistes des questions autochtones, on ne devrait même pas parler de « langues autochtones », mais plutôt nommer toutes les langues et tous les peuples, car ils sont eux-mêmes distincts.
Le préambule de ce projet de loi précise que « la reconnaissance et la mise en oeuvre des droits relatifs aux langues autochtones sont des éléments qui sont au coeur de la réconciliation ».
Il fait allusion aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation en ce qui concerne la langue et la culture ainsi qu'à l'adoption et à la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Ces appels à l'action figurent sous le titre « Langue et culture », non pas « Langue », mais « Langue et culture ».
La Commission demande au gouvernement fédéral de « reconnaître que les droits des Autochtones comprennent les droits linguistiques autochtones », puis elle dit ceci au sujet de la mesure législative à venir, le projet de loi dont nous parlons en ce moment même:
i. les langues autochtones représentent une composante fondamentale et valorisée de la culture et de la société canadiennes, et il y a urgence de les préserver;
ii. les droits linguistiques autochtones sont renforcés par les traités;
iii. le gouvernement fédéral a la responsabilité de fournir des fonds suffisants [...]
iv. ce sont les peuples et les collectivités autochtones qui sont les mieux à même de gérer la préservation, la revitalisation et le renforcement des langues et des cultures autochtones;
v. le financement accordé pour les besoins des initiatives liées aux langues autochtones doit refléter la diversité de ces langues.
C'est écrit tel quel, dans les appels à l'action. La Commission demande ensuite au gouvernement fédéral de nommer un commissaire aux langues autochtones, ce qui est prévu dans le projet de loi. Il convient de souligner qu'il est aussi expressément demandé, dans les appels à l'action, que le gouvernement adopte et mette en oeuvre, intégralement, la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et qu'il élabore un « plan d’action et des stratégies de portée nationale de même que d’autres mesures concrètes ».
Lorsqu'on se penche sur l'appel à l'action, il faut reconnaître qu'il porte à la fois sur la langue et la culture. Les deux vont de pair. On doit reconnaître que les appels à l'action en matière de langue et de culture doivent être considérés à la lumière des nombreux droits établis dans le rapport de la Commission de vérité et réconciliation et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. On ne peut pas choisir de privilégier l'un ou l'autre de ces aspects.
J'ajouterais que j'ai tenté à maintes reprises d'amener le gouvernement à inscrire dans les projets de loi l'obligation d'appliquer la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, notamment en ce qui concerne les décisions gouvernementales qui touchent les territoires et les ressources des peuples autochtones. Malheureusement, toutes ces recommandations ont été rejetées.
Pourquoi a-t-on appelé à une revitalisation des langues autochtones? Comme le dit très clairement le rapport de la Commission de vérité et réconciliation, le programme des pensionnats indiens visait expressément « à tuer l'Indien au sein de l'enfant ». Pour ce faire, on arrachait de jeunes enfants à leur famille, à leur communauté et à leur milieu traditionnel, et on leur interdisait de parler leur langue et de pratiquer leur culture. Comme le commissaire Sinclair l'a dit très clairement, cela constituait un « génocide culturel ».
Aujourd'hui, un trop grand nombre de peuples autochtones ont perdu non seulement leur langue, mais aussi tout lien avec la culture et les traditions de leur communauté.
Comme mon collègue le député d' l'a affirmé:
Au Canada, la vaste majorité des langues autochtones sont menacées. Il est crucial de s'attaquer à ce problème. Il faut agir immédiatement, car la situation est urgente. Les langues autochtones sont importantes. Si le projet de loi n'est pas conforme à son objet, cela n'aidera pas du tout nos frères et nos soeurs autochtones.
Je salue l'engagement des peuples autochtones et des autres groupes alliés qui font encore beaucoup d'efforts pour revitaliser les langues et les cultures autochtones. Citons, par exemple, le programme d'immersion en cayuga et en mohawk des Six Nations.
Il y a quelques années, j'ai eu l'honneur de rendre visite à cette communauté et de visiter l'école où est donné le programme en question. J'ai trouvé extrêmement inspirant de voir ce qu'on arrive à faire là-bas sans une aide du gouvernement dont on a cependant désespérément besoin.
Très malheureusement pour cette école, où l’on enseigne aux gens la langue gayogoho:no, les cours ont lieu au-dessus du terrain de curling. Elle n’obtient même pas de soutien du gouvernement pour construire un bâtiment adéquat dans lequel enseigner ces langues aux enfants. Quand je suis sorti de l’édifice, les enfants sont allés se réunir dans une maison ronde pour chanter des chants traditionnels. J’ai vu les larmes couler sur les joues des aînés bouleversés d’entendre à nouveau les membres de leur communauté apprendre à parler leur langue et à comprendre leur culture. C’était renversant.
Plusieurs organismes non autochtones soutiennent le développement, la préservation et la revitalisation de langues autochtones. L’un d’eux est le Canadian Indigenous Languages and Literacy Development Institute, ou CILLDI, qui se trouve dans mon alma mater, l’Université de l’Alberta. Cet institut réunit des Autochtones de tout le Canada pour les aider à apprendre leurs langues, puis à les promouvoir et à les revitaliser. L’université leur remet des crédits pour cela. Le gouvernement injecte des fonds dans l’enseignement postsecondaire. Nous devrions offrir des programmes similaires partout au pays.
Certains de nos collègues ont fait valoir qu'il était paradoxal que pendant que nous menions ici des débats sur les langues autochtones, certains députés autochtones ne pouvaient pas intervenir dans leur langue. L’une de mes collègues, la députée de , n’a pas pu intervenir en déné, parce qu’elle n’avait pas remis un préavis de 48 heures. Je me réjouis d’avance de voir des interprètes ici à la Chambre. Comme le gouvernement ne cesse de modifier le dépôt des projets de loi, il n’est pas toujours possible d’avertir 48 heures à l’avance que l’on compte intervenir dans sa propre langue. J’ai assisté à des réunions dénées dans les Territoires du Nord-Ouest où l’on avait embauché 10 ou 12 interprètes. Ces spécialistes sont disponibles dans notre pays. Nous nous devons d’offrir leurs services ici, au niveau fédéral.
Nous avons entendu plusieurs de nos collègues parler ici à la Chambre. Toutefois, nous devons avant tout inviter les Autochtones à le faire. Il est bien sûr merveilleux d’entendre nos collègues non autochtones s’efforcer de parler ces langues, c’est admirable.
Je tiens à remercier notre collègue du de nous avoir présenté les préoccupations des Inuits en comité. Ce projet de loi les trouble profondément. Il est donc ahurissant que le gouvernement n’ait pas examiné le problème et mené des consultations adéquates à cet égard.
Nous avons proposé plusieurs amendements, et si je ne m’abuse, tout le monde les a rejetés. Certains d’entre eux étaient cruciaux. Nous demandions que le gouvernement nomme un commissaire autochtone, ce qui me semble plutôt évident. Nous demandions également que l’on insère dans le projet de loi la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones sous forme de disposition contraignante. Nous désirions aussi que l’on y mentionne très particulièrement la politique discriminatoire de la rafle des années soixante qui a entraîné l'érosion des langues autochtones. Nous voulions également y ajouter des mesures précises garantissant le respect des droits linguistiques des Inuits.
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Monsieur le Président, je tiens à féliciter tous les députés qui se sont exprimés dans une langue autochtone sur ce projet de loi historique, dans le cadre de ce passionnant débat qui se déroule sur le territoire traditionnel de la nation algonquine anishinabeg.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’aimerais situer le contexte et faire un bref historique du projet de loi, en soulignant que les députés peuvent désormais s’exprimer dans leur propre langue ici. Aujourd’hui, le premier intervenant a parlé en cri, pendant qu’un interprète traduisait ses propos.
Au début de l’année, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, que je préside, a entrepris une étude sur l’utilisation de langues autochtones à la Chambre. Il a présenté des recommandations à la Chambre qui ont été approuvées par l’ensemble des députés, ce qui est fantastique. Pour la première fois de notre histoire, les députés ont le droit de s’exprimer dans une langue autochtone au cours des délibérations de la Chambre et des comités, avec interprétation simultanée.
Imaginez les jeunes jeunes autochtones à la maison, dans une ville, un village ou une réserve, qui apprennent que leur langue peut être utilisée dans la plus noble institution démocratique du pays. Imaginez la force, l’espoir et le soutien que cela doit leur donner à l’égard de leur propre langue.
Il s’agit là d’une initiative extraordinaire de ce Parlement. C’est le député de , le premier à intervenir dans le débat d’aujourd’hui, qui est à l’origine de cette initiative. Il a fait toute son intervention en cri, comme d’autres députés.
J’aimerais raconter une histoire à mes collègues. Nous misons énormément sur les jeunes. Comme les députés le savent, le s’est doté d’un conseil jeunesse, tout comme de nombreux députés. J’ai assisté à une rencontre de jeunes organisée, je pense, à l’invitation de la . Une jeune Autochtone du Yukon — je pense qu’elle a d’ailleurs déjà pris la parole devant les Nations unies — a expliqué que les gens disent toujours qu’une personne qui a un emploi, qui fait des progrès dans la vie et qui devient forte, pourra mettre en valeur sa culture et sa langue, tout en nous faisant profiter de cette diversité créative et passionnante. Elle a avancé que ce n’était pas vrai, que c’était comme mettre la charrue devant les bœufs. Elle affirme que nous devons d’abord avoir confiance dans notre langue et notre culture, parce que c’est ce qui donne aux gens la force de réussir à l’école et dans la vie. Lorsqu’ils ont confiance en eux, les gens savent d’où ils viennent et sont très fiers d’eux, dans leur langue. Il va sans dire que la langue est le fondement même de la culture.
Comme on l’a mentionné précédemment dans ce débat, la langue, c’est bien plus que la traduction de mots. Les langues sont l’expression de nos modes de vie. En inuktut, par exemple, il y a plusieurs mots distincts pour désigner la neige, tandis qu’en anglais ou en français, il n’y en a pas beaucoup. La langue est le reflet d’une culture, d’où sa grande importance dans le mode de vie des gens.
Les statistiques indiquent que les peuples autochtones du monde entier qui sont fiers d’eux-mêmes, qui connaissent leur langue et qui aiment leur culture réussissent mieux dans la vie que les autres.
C’est un grand pas que la Chambre des communes accomplit aujourd’hui et elle peut compter sur un solide appui. C’est très intéressant de voir ce qui se passe à la Chambre des communes aujourd’hui.
C’est un grand pas vers la réconciliation, en partie pour réparer un préjudice que nous avons grandement contribué à créer. Non seulement les étrangers qui sont venus au Canada dépassent en nombre les premiers habitants du territoire, mais, malheureusement, nous avons pris des mesures qui ont affaibli leurs langues, comme les pensionnats, la rafle des années 1960 et le déménagement de villages.
C'est pourquoi le projet de loi , Loi concernant les langues autochtones, est une si bonne chose. D'abord, il garantirait les droits linguistiques compris dans les droits dont il est question à l'article 35 de la Constitution, comme le droit des peuples autochtones de développer et de préserver leurs langues. Ensuite, le projet de loi permettrait d'assurer un financement adéquat et stable pour les langues. Je reviendrai sur ce sujet en détail plus tard puisqu'on l'a déjà abordé. Enfin, il permettrait de revitaliser et de renforcer les langues autochtones. Un bureau du commissaire aux langues autochtones serait mis en place pour veiller à ce que tout cela soit fait.
Comme l'ont indiqué de nombreux députés à différents stades du débat, il faut absolument agir rapidement, car les langues autochtones disparaissent. Heureusement, dans ma région et ailleurs aussi, de nombreux dirigeants et aînés autochtones ont commencé à faire des enregistrements de leurs langues pour pouvoir les préserver et donner aux jeunes la possibilité de les revitaliser. Je pense que le dernier aîné qui parlait encore couramment le tagish dans ma région est décédé. S'il n'était pas le dernier, chose certaine, il n'y a plus beaucoup de locuteurs de cette langue. Il ne faut donc pas perdre de temps.
Quand les Européens sont arrivés en Amérique du Nord, plus de 90 langues autochtones coexistaient. Il en reste encore plus de 70, mais certaines sont parlées par très peu de gens, comme l'a constaté le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre lors de son étude sur le sujet. Ce projet de loi doit être mis en oeuvre le plus rapidement possible si nous voulons freiner le déclin de ces langues, les faire connaître et inciter les jeunes à se les réapproprier. Il permettra en outre de donner suite aux appels à l'action nos 13, 14 et 15 de la Commission de vérité et réconciliation et de paver la voie à la mise en oeuvre des articles 11 à 16 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Cette mesure législative a été élaborée conjointement avec les Premières Nations, et c'est ce qui explique pourquoi un certain nombre d'articles et de principes ont été aussi soigneusement mis au point.
J'aimerais prendre un instant pour parler de financement. Pour préserver, faire connaître et rétablir une langue, il faut de l'argent, et le gouvernement en est conscient. Dans le dernier budget, il a annoncé que 330 millions de dollars sur cinq ans, et 117 millions par la suite, serviraient précisément à cet usage. Le projet de loi n'est même pas encore en vigueur, et divers projets ont déjà vu le jour un peu partout au pays. Les sommes allouées ont grimpé en flèche — elles étaient d'à peine 5 millions de dollars en 2017.
Le gouvernement tenait à ce que le financement nécessaire soit assuré pour les cinq prochaines années. Cela dit, rien n'aurait empêché un futur gouvernement d'y mettre fin. Voilà pourquoi le paragraphe 5d) du projet de loi précise que tous les futurs gouvernements devront financer les activités jugées pertinentes. Ce sera inscrit dans la loi. Je suis persuadé que le commissaire saura y voir. Ce genre de disposition se retrouve rarement dans les textes législatifs, mais nous avons décidé d'en inclure une dans ce cas-ci.
Voici ce que dit le paragraphe 5d):
[La présente loi a pour objet] de mettre en place des mesures visant à faciliter l'octroi d'un financement adéquat, stable et à long terme en ce qui touche la réappropriation, la revitalisation, le maintien et le renforcement des langues autochtones;
Cela préserve le financement. Comme je l’ai dit, nous l’avons fourni maintenant, mais cela le préserve pour l’avenir, quel que soit le parti politique au pouvoir.
C’est une initiative unique. Elle a été très instructive pour les députés, qui ont entendu des députés autochtones et d’autres députés nous fournir de l’information sur leurs régions respectives. Je tiens également à présenter quelques faits intéressants au sujet de ma région.
Ma circonscription couvre l’ensemble du Yukon et les territoires traditionnels de 14 Premières Nations. Certains Européens pensent que tous les Autochtones en Amérique du Nord sont pareils, qu’ils parlent la même langue, ont la même culture, dansent les mêmes danses. Ce n’est évidemment pas le cas.
Ma région représente un millième de la population du Canada, mais elle compte huit groupes linguistiques, soit les Gwich’ins, les Tutchones du Nord, un peu de Upper Tananas, de Tutchones du Sud, de Tagishs et de Tlingits, un tout petit peu de Tahltans et de Kaskas. Chacun de ces groupes a une culture et une histoire différentes. Leurs langues sont différentes. Au nord, il y a aussi quelques Inuvialuit.
Je vais décrire les huit Premières Nations du Yukon pour que les gens disposent des renseignements sur ces groupes linguistiques qu’ils n’auraient pas autrement.
Le savoir traditionnel est très important. Il s’agit d’un type unique de connaissances transmises oralement, d’une génération à l’autre. Selon la tradition orale, les peuples des Premières Nations du Yukon vivent sur ce territoire depuis que Crow, une créature mythologique de l’époque, a créé le monde et l’a mis en ordre. Les archéologues calculent que les premiers humains sont arrivés au Yukon il y a plus de 10 000 ans, après avoir traversé l’isthme de Béring en provenance de l’Asie ou parcouru la distance le long des côtes.
Aujourd’hui, les peuples des Premières Nations appartiennent aux groupes linguistiques athapascans ou tlingits. Je vais parler brièvement des huit groupes particuliers qui les composent.
Parlons d’abord des Gwich’ins. Les Gwich’ins forment le groupe le plus septentrional du Yukon. Ils habitent un vaste territoire où sont parlés quatre dialectes différents. Les Yukonnais connaissent surtout les Gwich’ins Vuntut, qui habitent à Old Crow. Il y a ensuite les Gwich’ins Tetlit dans les Territoires du Nord-Ouest, les Gwich’ins Tukudh dans la région de Blackstone et les Gwich’ins de l’Alaska.
La Première Nation des Gwich’ins Vuntut est l’organisation politique moderne des Gwich’ins du Yukon. En mai 1993, les Gwich’ins Vuntut ont signé un accord définitif à titre de Première nation du Yukon. Leur population vit le long de la rivière Porcupine et elle observe des cycles annuels de subsistance. Au centre de leur vie se trouve la harde de caribous de la Porcupine.
J’ouvre une parenthèse pour parler de la lutte importante qui est menée dans le but de protéger la harde de caribous de la Porcupine. Si cette harde disparaît, ce sera un génocide culturel pour les Gwich’in de l’Alaska, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest, car toute leur vie tourne autour de cette harde. Leurs vêtements — y compris les gilets semblables à ceux que je porte aujourd’hui — et leur nourriture dépendent de la harde de caribous. Quand j’y suis allé, je les ai vus manger du caribou trois fois par jour. Le caribou est vraiment au cœur de leur culture. Il est absolument fondamental de ne pas réduire ce troupeau.
M. Trump et les républicains ont adopté une loi autorisant le forage sur les terrains de mise bas du caribou. Le vêlage, bien sûr, est une partie très sensible du cycle de vie du caribou, et ces activités de forage pourraient mettre en danger la harde, qui compte actuellement environ 130 000 bêtes. Les Gwich’in se battent depuis des décennies pour protéger cette région, avec l'aide de l’ambassade du Canada à Washington. Je participe depuis une vingtaine d’années à la lutte contre tout forage dans la réserve faunique nationale de l’Arctique. Le Canada a la responsabilité de le faire. Nous avons une entente avec les États-Unis pour protéger la harde de caribous de la Porcupine.
Le deuxième groupe dont je vais parler est celui des Häns, qui vivent là où les rivières Yukon et Klondike se rencontrent. Leur peuple a vécu ses plus grands changements lorsque la ruée vers l’or du Klondike a entraîné des bouleversements sociaux et des déplacements de population.
Le chef Isaac, à l’époque, était très prévoyant et il a emporté les chansons et les danses des Häns dans un village de l’Alaska, où il a demandé aux gens de les préserver. Il ne voulait pas les perdre avec l’afflux massif de nouveaux arrivants. Dawson était la plus grande ville à l’ouest de Chicago ou de Winnipeg à l’époque de la ruée vers l’or.
Le chef Isaac a emporté les chansons et un bâton de danse et les a confiés à ses hôtes d'Alaska. Le bâton de danse s’appelait un gänhäk. Plus tard, le bâton a été ramené et maintenant, il y a un effort de revitalisation de la culture.
Le prochain groupe parle le haut tanana. Il s’agit de quelques personnes du côté du Yukon; la plupart sont en Alaska, près de Beaver Creek. Beaucoup de Premières nations se déplaçaient selon la période de l’année et l’endroit où on pouvait trouver le gibier, alors elles n’étaient pas installées là où passe la route de l’Alaska aujourd'hui. L’effet de cette route sur ces Premières Nations pourrait faire l’objet d’un discours en soi, et je ne me lancerai pas dans cette voie pour l’instant.
Je passe ces groupes en revue plus rapidement que je ne le voudrais, et je n'aurais pas le temps de donner plus de détails.
Le prochain grand groupe parle le tutchone du Nord. Ses membres habitent la partie centrale du Yukon, souvent appelée le cœur du Yukon. Le conseil tribal tutchone du Nord compte trois Premières Nations, soit la nation Na-Cho Nyak Dun, la nation de Selkirk et la nation de Little Salmon/Carmacks. Les habitants des petits villages de Fort Selkirk et de Minto vivaient dans cette région avant la construction de la route du Klondike, que nous, les anciens, appelons la route Mayo.
Le groupe suivant, le cinquième, est celui des locuteurs du tutchone du Sud, comme nous avons traité des Gwich'in, des Häns et des locuteurs du haut tanana et du tutchone du Nord.
Les locuteurs du tutchone du Sud occupent des régions se trouvant dans le Sud-Ouest du Yukon. De nombreuses régions traditionnelles et sites de villages étaient autrefois les centres d'activité commerciale de ces peuples nomades. Bien que bon nombre de ces endroits aient été graduellement abandonnés avec la construction de la route de l'Alaska, ils sont toujours perçus avec respect comme les terres d'origine des peuples qui parlent le tutchone du Sud.
L'école qui est située à cet endroit est celle où ma fille de 10 ans suit son cours préféré et où mon fils de 6 ans a eu sa meilleure note. C'est probablement grâce aux exceptionnels enseignants parlant le tutchone du Sud qui y enseignent. C'est aussi une école d'immersion française.
La Première Nation de Kluane, les Premières Nations de Champagne et d'Aishihik, ainsi que le Conseil Ta’an Kwäch’än et la Première Nation de Kwanlin Dun sont également dans cette région. Les Premières Nations de Champagne et d'Aishihik ont peut-être mis sur pied la première garderie d'immersion au Canada. L'immersion se fait dans la langue tutchone du Sud.
C'est aux Jeux olympiques de Calgary qu'un membre des Premières Nations du Yukon a chanté l'hymne national en tutchone.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, les langues du groupe suivant sont pratiquement disparues. Au mieux, il n'en reste que quelques locuteurs à l'heure actuelle. Je parle du tagish. En fait, les Tagish, près de la région de Carcross, ont beaucoup collaboré avec les gens qui participaient à la ruée vers l'or, contrairement à ce qui s'est produit dans d'autres régions d'Amérique du Nord. Ils ont aidé les gens à s'installer et ils leur ont servi de guides. Ils sont venus de l'océan jusqu'à ce qu'on appelait les « sentiers de la graisse » parce que les Autochtones transportaient avec eux de la graisse d'eulakane, un poisson, pour en faire le commerce.
Kate Carmack, soeur du célèbre Skookum Jim, a eu le grand honneur, dernièrement, d'être la première Autochtone intronisée au temple de la renommée du secteur minier du Canada pour avoir participé à la découverte de filons qui sont à l'origine de la plus importante ruée vers l'or que le monde ait connue.
Comme je l'ai dit, il y avait une belle coopération de la part des Tagish, mais aussi des Tinglits, un peuple de l'intérieur des terres, qui empruntaient ces sentiers pour y faire du commerce. Il y a quelques générations, certains d'entre eux ont quitté la côte pour s'installer à l'intérieur des terres, dans les régions de Teslin, de Carcross et d'Atlin.
Les Kaskas habitent dans le Sud-Ouest du Yukon, qu'ils partagent avec le Conseil des Dénés de Ross River, la nation de Liard, quelques peuples du Nord de la Colombie-Britannique et d'autres communautés. Ils ont des liens d'amitié avec les Dénés des Territoires du Nord-Ouest.
[Le député s'exprime en Gwich'in ainsi qu'il suit:]
[Les propos du député sont traduits ainsi:]
Je vous remercie de vos commentaires.
[Traduction]
:
Monsieur le Président, je suis très heureuse de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , Loi concernant les langues autochtones.
Comme tous les députés le savent, les questions autochtones comptent parmi celles qui posent les plus grands défis à notre pays, mais elles représentent également d'importantes occasions à saisir. Nous devons mettre de côté toute partisanerie et unir nos efforts afin de créer un espace qui permettra aux peuples autochtones de devenir entièrement autonomes et de bénéficier d'une meilleure qualité de vie.
C'est dans cet esprit que je tiens à remercier la députée de de m'avoir donné l'occasion d'intervenir au sujet de cet important projet de loi à titre de députée indépendante.
Le préambule du projet de loi , mais pas le texte lui-même, indique ceci:
[...] le gouvernement du Canada s’est engagé à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui prévoit des droits relatifs aux langues autochtones.
J'aimerais rappeler aux députés que l'article 13 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones précise ce qui suit:
Les peuples autochtones ont le droit de revivifier, d’utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales, leur philosophie, leur système d’écriture et leur littérature, ainsi que de choisir et de conserver leurs propres noms pour les communautés, les lieux et les personnes.
L'article 14 ajoute ce qui suit:
Les peuples autochtones ont le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue, d’une manière adaptée à leurs méthodes culturelles d’enseignement et d’apprentissage [...]
Les États, en concertation avec les peuples autochtones, prennent des mesures efficaces pour que les autochtones, en particulier les enfants, vivant à l’extérieur de leur communauté, puissent accéder, lorsque cela est possible, à un enseignement dispensé selon leur propre culture et dans leur propre langue.
Le projet de loi prévoit une mesure très importante, à savoir la création du Bureau du commissaire aux langues autochtones.
Je veux me servir du temps qui m'a été alloué aujourd'hui pour parler de quelques initiatives destinées aux Autochtones qui ont été mises en place par des Autochtones partout au Canada pour promouvoir les langues autochtones.
J'ai eu le privilège de visiter de nombreuses collectivités lorsque j'étais la ministre des Services aux Autochtones et la ministre de la Santé et je tiens à attirer l'attention de la Chambre sur quelques initiatives intéressantes que j'ai vues.
Commençons par la Colombie-Britannique.
On estime qu'il y a environ 30 langues des Premières Nations et près de 60 dialectes dans cette province. Il est impossible de parler des langues des Premières Nations et de ne pas penser au Kukpi7 Ron Ignace. Kukpi7 signifie « chef » dans la langue secwepemc de la Colombie-Britannique. Le Kukpi7 Ron Ignace est sans contredit un des champions des langues autochtones dans sa Première Nation en Colombie-Britannique.
Avec son épouse, Marianne Ignace, qui est professeure à l'Université Simon Fraser, il a écrit un livre extraordinaire. C'est le travail de toute une vie. L'ouvrage s'intitule Secwépemc People, Land, and Laws.
J'ai eu l'occasion de visiter la collectivité de Skeetchestn, où Kukpi7 Ignace est le chef. J'ai entendu les enfants chanter et parler ensemble dans leur langue, c'était inspirant.
Je vais raconter l'histoire de la nation huu-ay-aht de la Colombie-Britannique. Elle fait partie des Premières Nations qui parlent le nuu-chah-nulth. La nation huu-ay-aht a lancé une initiative incroyable alors qu'elle poursuit ses efforts pour être pleinement autonome et elle continue d'être une source d'inspiration pour d'autres. Elle a mis sur pied un projet de services sociaux qui met en oeuvre un certain nombre d'initiatives, en particulier pour les enfants. Elle a décidé d'exercer son droit de prendre en charge les services à l'enfance et à la famille au sein de la nation huu-ay-aht, et elle l'exerce spécifiquement pour ramener les enfants dans leur communauté pour que ces derniers soient élevés dans leur langue et leur culture.
Tournons-nous maintenant un peu plus vers l'est, vers la province de l'Alberta.
Je souhaite faire part aux députés du travail incroyable qui est accompli dans la région de Maskwacis, située tout près d'Edmonton. J'ai eu le privilège d'être dans cette collectivité lorsqu'elle a annoncé la création de la Maskwacis Education Schools Commission.
J'ai assisté à l'annonce en compagnie du grand chef Willie Littlechild qui a déjà siégé dans cette enceinte. J'ai parlé de la formidable initiative des Maskwacis pour mettre en place leur propre système scolaire.
Le grand chef Willie Littlechild a grandi dans les pensionnats indiens. Il a expliqué comment il a été dépossédé de sa langue et de sa culture lorsqu'il a été placé dans l'un des plus grands pensionnats du pays. Néanmoins, aujourd'hui, les Maskwacis — un regroupement de quatre bandes assujetties à la Loi sur les Indiens — se sont concertés pour exercer leur droit à l'autodétermination en mettant sur pied un conseil scolaire. Leur système d'éducation est fondé sur la langue et les enseignements du peuple cri. Les programmes d'enseignement sont axés sur la culture et la langue cries.
Allons un peu plus à l'est, dans la charmante province de la Saskatchewan, où on trouve de nombreux exemples éloquents partout sur le territoire. Néanmoins, j'ai gardé un souvenir marquant de la visite que j'ai eu le privilège de faire à la Première Nation dakota de Whitecap, une communauté extraordinaire établie juste à l'extérieur de Saskatoon.
Lors de mon passage, le chef m'a montré de nombreuses réalisations, mais j'ai été particulièrement impressionnée par l'école primaire Charles Red Hawk. J'ai rencontré la dame qui enseignait la langue dakota aux élèves de cette école. J'ai assisté à un grand moment de fierté quand un petit groupe d'enfants s'est levé spontanément pour me demander s'ils pouvaient me chanter le Ô Canada en langue dakota. Ce moment est resté gravé à tout jamais dans ma mémoire. J'ai vu l'immense fierté, non seulement des enfants, mais aussi des aînés qui leur avaient enseigné la langue.
J'aimerais maintenant parler de la merveilleuse province du Manitoba. J'ai déjà parlé à la Chambre des choses que j'ai apprises des Premières Nations du Manitoba, ainsi que de la nation métisse du Manitoba.
Toutefois, j'aimerais vous parler en particulier d'une conversation que j'ai eue à propos de l'action menée par l'Assemblée des chefs du Manitoba. Ceux-ci ont été de vrais leaders en ce qui concerne l'un des problèmes les plus importants auxquels notre pays fait face, soit la surreprésentation des enfants autochtones dans le système d'aide à l'enfance. Ils ont fait ressortir le lien qui existe entre le retrait de ces enfants de leur communauté et leur placement en famille d'accueil et la perte de la langue qui en découle. Ils sont même allés jusqu'à proposer une loi intitulée « Bringing our children home ».
Par cette loi, les chefs du Manitoba disent: « Nous voulons revendiquer, pratiquer et promouvoir la responsabilité qui est la nôtre de transmettre à nos enfants nos connaissances, notre langue, notre culture, notre identité, nos traditions et nos coutumes ».
J'étais ce matin au comité des affaires autochtones où l'on a entendu un homme originaire du Manitoba qui a vécu le placement en famille d'accueil. Il s'appelle Jeffry Nilles. J'encourage les gens à écouter l'enregistrement de son témoignage d'aujourd'hui au comité. Il parle de ce que cela a signifié pour lui d'être arraché à sa collectivité et à sa famille, d'être couvert de honte s'il parlait sa langue. Lorsqu'il nous a parlé des traitements cruels qu'il a subis parce qu'il voulait naturellement utiliser sa langue maternelle, nous avons eu les larmes aux yeux. Il est aujourd'hui fier de la langue de son peuple, mais il lui a fallu du temps avant d'en arriver là.
Je vais parler d'une communauté encore plus à l'est, dans le Nord de l'Ontario. J'aimerais souligner en particulier la communauté extraordinaire de la Première Nation de Fort Albany. Je tiens à parler d'un homme qui y habite et qui m'a beaucoup inspirée. Il s'appelle Edmund Metatawabin. D'autres députés ont peut-être eu l'occasion de le rencontrer.
Edmund a écrit un livre merveilleux, Up Ghost River, qui a eu une grande influence sur ma vie. Il parle du rôle des pensionnats autochtones. En fait, son livre raconte son expérience en pensionnat. Il parle du traumatisme d'être privé de sa langue et de sa famille. On lui a interdit de parler sa langue. Il parle des conséquences désastreuses de la suppression des langues et des coutumes autochtones par les pensionnats.
Le livre donne une bonne idée de l'importance des langues autochtones. Une des phrases les plus significatives du livre est celle-ci: « Le concept de justice n'existe pas dans la culture crie; le mot “kintohpatatin” est ce qui s'en rapproche le plus. » Selon Edmund, ce mot se traduit approximativement par « on vous a écouté ». Voici ce qu'écrit M. Metatawabin: « Le mot “kintohpatatin” fait référence à un concept plus riche que la justice — il signifie que vous avez été entendu par une personne compatissante et juste, et que vos besoins seront pris au sérieux. »
C'est un mot que je n'oublierai jamais. Il me rappelle la richesse que peuvent avoir les mots, tout ce qu'une culture peut nous apprendre uniquement à l'aide du vocabulaire de sa langue, ainsi que la grande importance que cela peut revêtir pour nous tous.
Restons en Ontario. Je veux vous parler maintenant d'une communauté située aux limites de la frontière entre l'Ontario et le Québec, et dont une partie du territoire se trouve également sur le sol américain. Il s'agit de la communauté d'Akwesasne, qui est dirigée par un extraordinaire leader: le grand chef Abram Benedict. Là encore, j'ai pu constater que la langue représente une grande source de fierté pour cette communauté.
J'ai eu l'occasion de visiter, pour la première fois, l'école d'immersion mohawk qui s'y trouve. Dans cette école, les jeunes enseignants ont appris la langue grâce aux aînés, et ils l'enseignent maintenant aux enfants. En effet, ces jeunes adultes ne connaissaient pas le mohawk. Ce sont les aînés qui le leur ont appris. Maintenant, ils l'enseignent à leur tour aux enfants.
L'une des choses qui m'ont impressionnée, à cette école, est que les enseignants ont créé leur propre matériel pédagogique. Ils se sont servis de livres pour enfants et ils les ont adaptés pour que les mots soient en mohawk, et ils n'ont pas seulement adapté les mots, mais aussi les concepts, les images, les traditions et les histoires. Il s'agit là d'une initiative exceptionnelle qu'il faut saluer.
[Français]
Je veux maintenant visiter la belle province de Québec. Il y a plusieurs Premières Nations, au Québec, mais je ne parlerai que d'une seule, la nation huronne-wendat. Leur leader, le grand chef Konrad H. Sioui, est un homme extraordinaire.
Konrad Sioui m'a beaucoup impressionnée. Il peut parler de plusieurs histoires, des régions et de l'histoire de son peuple. Il m'a expliqué comment ces peuples ont choisi les noms des endroits, des rivières et des montagnes. Dans sa région, chaque endroit a un nom dans sa langue.
Partout au pays, les noms de plusieurs endroits nous viennent de langues autochtones. Le grand chef Sioui parle de l'importance de conserver ces noms dans les langues autochtones.
[Traduction]
Nous savons, par exemple, que le mot « Toronto » vient d'une langue autochtone. On pense que ce serait un dérivé du nom mohawk tkaranto, qui signifie « arbres qui poussent dans l'eau ». Ici même, à Ottawa, nous savons que le nom de la ville vient du mot adaawe en langue anishinabe, qui signifie « acheter ». Peut-être devrions-nous un jour réfléchir au fait que notre ville a un lien avec le fait d'acheter, mais je ne m'attarderai pas trop sur ce point.
Déplaçons-nous maintenant au Québec, puisque je viens d'en parler. Shawinigan est un mot algonquin qui veut dire « portage sur la crête ». Ensuite, dans le Nord du Québec, parce qu'il ne faut pas oublier le Nord, il y a l'incroyable village de Kuujjuaq, qui veut dire « la grande rivière » en inuktitut.
Il faut aussi absolument parler de l'Atlantique, même si je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps. Je tiens à souligner l'incroyable travail accompli par les Micmacs dans l'Atlantique, notamment en ce qui a trait à l'incroyable autorité scolaire. Celle-ci est entièrement dirigée par des Micmacs et se nomme Mi'kmaw Kina'matnewey. Je sais que les Micmacs ne m'en voudront pas de ne pas avoir la prononciation exacte. Nous avons souvent affectueusement appelé ce groupe « MK », parce que c'est plus simple.
Il s'agit d'une autorité scolaire conçue par les Micmacs pour les jeunes Micmacs. Elle connaît un succès incroyable et c'est en grande partie dû à la place faite à la langue micmaque. D'ailleurs, elle a même créé un dictionnaire parlant en ligne afin que les gens puissent trouver des mots en micmac en ligne. Il contient quelque 6 000 mots en micmac. L'autorité offre aussi des cours de langue par Internet et des locaux de vidéoconférence ont été créés afin que les garderies de la région puissent enseigner le micmac aux enfants.
J'étais heureuse d'apprendre que l'Université St. Francis Xavier a offert son premier programme en langue micmaque.
Puisque nous sommes dans la région atlantique, dirigeons-nous vers le nord, au Labrador, et parlons du Nunatsiavut, l'une des quatre régions de l'Inuit Nunangat visées par une revendication territoriale. La volonté des dirigeants inuits du pays de revitaliser, préserver et promouvoir l'inuktitut est extraordinaire. Les Inuits disent fréquemment que l'inuktitut est au coeur de leur identité, de leurs croyances spirituelles, de leur relation avec la terre, de leur vision du monde et de leur culture. Cette langue est fondamentale pour leur autodétermination. J'en ai été témoin lorsque j'ai assisté à des réunions du Comité de partenariat entre les Inuits et la Couronne, lesquelles sont toutes traduites en inuktitut.
Cela dit, je dois signaler que les Inuits n'appuient pas le projet de loi . Il est important que nous en tenions compte. L'Inuit Tapiriit Kanatami espère que le projet de loi sera amendé pour y inclure à la fois une annexe traitant l'inuktitut comme une langue distincte ainsi que des dispositions permettant aux personnes qui parlent inuktitut d'accéder aux services publics fédéraux dans leur langue.
Le fait que ces services ne sont pas offerts en inuktitut a une incidence. Je l'ai moi-même constaté dans le domaine de la santé. Par exemple, dans certains cas, la tuberculose n'a pas été décelée assez rapidement parce que les fournisseurs de soins de santé ne parlaient pas inuktitut et n'ont donc pas pu vérifier les antécédents médicaux adéquatement. C'est une réalité importante.
Le temps me manque pour dire aux députés ce que j'ai observé dans des endroits merveilleux comme les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon. Les exemples abondent de gens travaillant à raviver les langues autochtones.
J'ai l'intention d'appuyer ce projet de loi, mais il reste beaucoup de travail à faire dans ce dossier. Il faudrait que ceux qui auront le privilège de revenir siéger ici poursuivent le travail lors de la prochaine législature.
J'ai eu la chance d'apprendre une langue autochtone quand je vivais au Niger, en Afrique de l'Ouest. Je suis parvenue à parler la langue haoussa plus ou moins couramment. Le peuple haoussa a un dicton:
[La députée s'exprime en haoussa.]
[Traduction]
Cela signifie que « le silence aussi est parole ». Aucun d'entre nous ne devrait garder le silence sur cette question, sur la nécessité de revitaliser, de maintenir et de promouvoir les langues autochtones. Rappelons-nous que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones énonce des normes minimales pour la survie, le bien-être et la dignité des peuples autochtones.
Le droit d'utiliser, de développer et de transmettre les langues autochtones aux générations futures n'est rien de moins qu'une question de survie. Le devoir de reconnaître et d'affirmer ce droit nous incombe à tous.
[Le député s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
[Les propos du député sont traduits ainsi:]
Ce projet de loi est important. Il nous aide avec nos électeurs. Il compte beaucoup pour eux.
[Traduction]
Monsieur le Président, ce projet de loi donne de l'espoir à beaucoup de mes concitoyens. Pour moi, il vise la réconciliation.
Je représente une circonscription du Nord de Winnipeg, qui compte bien au-delà de 15 000 personnes de descendance autochtone. Les langues qu'on y entend souvent sont notamment l'ojibwé et l'anishinabe. On les parlerait mieux si elles étaient davantage intégrées à la vie sociale et employées dans les familles, alors j'ai essayé de mettre mon grain de sel en prononçant quelques mots en cri.
Ce fut un grand privilège de siéger sur les banquettes ministérielles, et ce, pour de nombreuses raisons. L'une d'elles, qui a eu une incidence positive et dont le parle souvent, c'est le rétablissement de la relation avec les Autochtones du Canada et la recherche de ce que nous pouvons faire pour que la réconciliation progresse. C'est en grande partie l'essence du projet de loi .
La mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui porte sur les langues. Il y a une mesure législative qui porte sur le placement familial, qui est un énorme problème. Seulement dans la circonscription de Winnipeg-Nord, de 2 000 à 3 000 enfants se trouvent en foyer d'accueil, dont 90 % sont autochtones.
Ce projet de loi est effectivement historique. J'ai eu l'occasion de prendre la parole à la Chambre au sujet de la Commission de vérité et réconciliation du Canada et de ses nombreux appels à l'action. Le projet de loi donne suite à 3 de ces 94 appels à l'action, soit les appels à l'action 13, 14 et 15. Voilà notamment pourquoi je suis un peu surpris. Je croyais que les députés de tous les partis et les députés indépendants appuieraient le projet de loi, qui donne expressément suite à ces appels à l'action. Personne au sein du gouvernement ne dit qu'il s'agit de la mesure législative parfaite. Il existe toujours des façons d'apporter des changements plus tard. Des changements importants ont été apportés par le comité. Des amendements proposés par les partis de l'opposition ont été acceptés au comité.
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui répond à trois appels à l'action. Si nous voulons vraiment tourner la page et favoriser la réconciliation, nous devons réfléchir à la façon dont nous voterons. Les députés néo-démocrates qui ont pris la parole aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture ont exprimé leur opposition au projet de loi, certains d'entre eux déclarant même qu'ils voteront contre. S'il y a un député néo-démocrate qui n'est pas d'accord avec moi sur ce que je viens de dire, qu'il intervienne pour expliquer pourquoi il n'appuiera pas le projet de loi ou pourquoi il est prêt à voter pour.
Des députés de l'opposition laissent entendre qu'il n'y a pas de financement prévu. C'est tout simplement faux. Les articles 8 et 9 ainsi que d'autres éléments du projet de loi prévoient justement un financement. Il y a la création du poste de commissaire aux langues, qui aura pour mission de prendre des mesures de sensibilisation et de facilitation ainsi que de favoriser une évolution positive dans ce dossier absolument crucial. Je crois dans mon for intérieur que tous les députés appuient ce dossier. Les commentaires qui ont été faits tendaient à faire valoir la nécessité de reconnaître la valeur intrinsèque des langues autochtones et le fait que le renforcement de ces langues ne peut qu'être bénéfique pour les communautés autochtones, bien sûr, mais pour l'ensemble de la société canadienne.
Pour cette raison, j'invite tous les députés à considérer que la Chambre vit un moment historique. La réaction du grand public est largement et même très largement positive. Aux yeux des particuliers et des groupes autochtones ainsi que des non-Autochtones avec qui j'ai eu l'occasion d'en parler, il y a longtemps qu'un tel projet de loi aurait dû être adopté.
Grâce au projet de loi, de nombreuses langues importantes ne disparaîtront pas. J'ai mis en lumière trois langues qui prédominent largement dans la circonscription que je représente: l'ojibwé, l'anishinabe et le cri. Dans Winnipeg-Nord, il y en a bien d'autres qu'on ne parle peut-être pas aussi communément, mais dont il importe tout autant de reconnaître le potentiel.
Aux termes du projet de loi, des accords pourront être conclus au sujet des cibles du financement. Les députés du NPD, qui ne semblent pas souhaiter l'adoption du projet de loi, ont aussi parlé de la rafle des années 1960. Quand on lit le projet de loi, on s'aperçoit qu'il tient compte de la rafle des années 1960. La société doit reconnaître les torts causés par les colons qui se sont établis sur un territoire qui forme aujourd'hui le Canada. De nombreuses erreurs ont été commises à l'époque.
Je pense que, en général, la population souhaite que nous favorisions la réconciliation. Le sénateur Murray Sinclair est l'auteur du rapport de la Commission de vérité et réconciliation du Canada et des appels à l'action. Il a fait preuve d'un leadership exceptionnel, qui incite le gouvernement national, les provinces, les administrations municipales et les divers intervenants à reconnaître l'importance des Autochtones et à déterminer ce que l'on peut faire collectivement pour continuer d'améliorer les choses. En appuyant le projet de loi , nous prenons l'engagement concret de faire progresser le dossier.
C'est pourquoi j'encourage les députés de tous les partis, en particulier mes amis du Nouveau Parti démocratique, à reconsidérer leurs observations cet après-midi et à signifier très clairement qu'ils appuient le projet de loi , car en se fiant sur ce qu'ils ont dit cet après-midi, il est évident qu'ils ne l'appuient pas, ce que j'estime être une erreur. Je pense que, comme l'intervenante précédente l'a indiqué, ce projet de loi devrait être apolitique. Il n'est pas nécessaire qu'il soit partisan. Les députés de tous les partis politiques et les députés indépendants peuvent l'appuyer.
Lorsque le ministre a présenté le projet de loi et que celui-ci a franchi l'étape de la deuxième lecture et de l'étude en comité, beaucoup ont démontré de l'intérêt, et le gouvernement a constamment indiqué qu'il était ouvert aux idées et à d'éventuelles modifications. Comme je l'ai dit, un certain nombre de changements proposés, non seulement par des députés ministériels, mais aussi par des députés de l'opposition, ont été acceptés.
L'intervenante précédente a mentionné le mot kintohpatatin, qui reflète l'importance de l'écoute. En représentant Winnipeg-Nord, je crois que j'ai écouté mes électeurs au sujet des questions entourant le projet de loi . Je crois que le a écouté, qu'il a compris et qu'il a travaillé avec diligence avec le Cabinet, le caucus, et même tous les parlementaires sur ce dossier de haute importance.
Dans une large mesure, c'est une question de réconciliation. Voilà pourquoi il est si important de transmettre un message fort, en parlant du projet de loi en termes favorables et en l'appuyant. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas exprimer d'idées ou réfléchir à des manières de l'améliorer dans le futur. Il va de soi qu'il y a toujours lieu d'améliorer les projets de loi présentés à la Chambre des communes. Plus de 90 projets de loi sont à l'étude à la Chambre. Certains, comme celui dont nous sommes saisis, sont très bons et devraient jouir de l'appui de tous les partis. Le projet de loi à l'étude n'est pas peut-être pas parfait aux yeux de chacun des députés, mais cela ne veut pas dire pour autant qu'il ne mérite pas notre vote. Nous devons considérer les principes en cause et ce qui sous-tend le projet de loi.
Il ne s'agit pas que de beaux discours ou de propagande. C'est quelque chose de concret. Le projet de loi sera assorti d'un financement de centaines de millions de dollars. Grâce au projet de loi, les langues autochtones du Canada seront mieux protégées et même préservées dans certains cas. Le projet de loi répond à au moins trois appels à l'action. À ma connaissance, la très grande majorité des Autochtones sont favorables au projet de loi .
Il y aura toujours des gens pour soutenir qu'on pourrait en faire plus, qu'on devrait faire ceci ou cela. Je n'en doute pas, mais à l'étape où nous en sommes aujourd'hui, nous avons entre les mains un projet de loi judicieux et solide qui aura une incidence positive dans toutes les régions du pays. Il est bénéfique à la réconciliation et à bien d'autres égards.
Je mets les députés d'en face au défi de reconnaître la valeur profonde et le sens véritable du projet de loi, de s'y rallier et de voter pour.
:
Monsieur le Président, j’aimerais partager mon temps avec ma collègue de .
J’ai passé une très intéressante matinée à écouter les interventions et je suis ravi de prendre la parole au sujet du projet de loi , Loi concernant les langues autochtones. J’ai eu l’occasion d’étudier ce projet de loi en tant que membre du comité du patrimoine. J’ai consacré de nombreuses heures à cette étude du comité. J’ai beaucoup appris des témoins et nous avons entendu des commentaires très éclairés et judicieux sur les points forts du projet de loi. Nous avons également entendu des commentaires sur les lacunes possibles. Je me réjouis que mon collègue d’en face ait mentionné que nous aurons l’occasion d’en parler.
Mais auparavant, je dois parler d’une pièce de théâtre présentée par les Siksikas à l’école secondaire Strathmore, intitulée New Blood Dance Show, une histoire de réconciliation. Cette production phénoménale porte justement sur ce thème.
C’est en 2014, lorsqu’elle est allée camper avec sa soeur au parc provincial Writing-on-Stone, que la metteuse en scène de cette pièce a trouvé son inspiration. Elle a alors pu consulter les écrits sacrés où les Pieds-Noirs racontent leur histoire. Elle a été attristée d’apprendre que les Pieds-Noirs n’avaient plus le droit de consulter leurs écrits ni de transmettre leur patrimoine lorsqu’on les a placés dans une réserve à la fin du XIXe siècle. Pendant 70 ans, trois générations n’ont pu apprendre leur histoire, et les traductions se sont perdues. La pièce porte sur ces récits.
La metteuse en scène a rencontré le chef des Siksika de l’époque, le chef Vincent Old Woman, et il lui a raconté de nombreuses histoires sur les pensionnats, la disparition de sa langue et de son patrimoine. En relisant ces écrits, elle a créé une pièce de théâtre intitulée New Blood. Il s’agit d’une pièce de théâtre phénoménale présentée par des élèves du secondaire, la majorité d’entre eux étant des Siksika. Elle a été jouée à de nombreuses reprises dans le Sud de l’Alberta et en Colombie-Britannique.
Ce qu’ils aimeraient vraiment faire, cependant, c’est se produire ici, à Ottawa. Il faut que les gens voient cette pièce et, à force de demander des subventions, espérons qu’ils pourront atteindre leur objectif. J’espère que mes collègues pourront y assister.
Je crois qu’on a déjà parlé du caractère précipité de cette mesure législative. Les libéraux l’ont présentée au bout de trois ans et demi, même s’ils ont dit des années plus tôt qu’il s’agissait d’une mesure d’importance capitale. Non seulement ils ont précipité les choses au point d’entamer le processus de justesse à la Chambre, mais on nous a demandé de faire une étude préalable avant de renvoyer le projet de loi au comité.
Nous nous sommes rencontrés tous les jours, parfois pendant de nombreuses heures. Le caractère précipité de ce projet de loi est probablement à l’origine des amendements et des défis actuels. Divers membres du comité ont en effet prévenu que certains mots risquaient de poser problème. Lorsque j’ai dit pour la première fois que ces mots étaient problématiques, les députés d’en face ont ricané.
La réaction est devenue beaucoup plus intéressante quand des constitutionnalistes sont venus dire que c'était vrai et que cette mesure pourrait se retrouver devant les tribunaux. Puis, quelques minutes à peine avant le début de l’étude article par article, les libéraux ont déposé une série amendements qui portaient précisément sur les inquiétudes que j’avais exprimées. On ricanait lorsque j’ai soulevé ces questions, mais lorsqu’un constitutionnaliste en a parlé, les libéraux ont tendu l'oreille, car ils ont enfin compris que ces mots pourraient causer des problèmes et que cette mesure pourrait se retrouver devant les tribunaux.
Les libéraux ont dit que plusieurs des amendements proposés par l’opposition avaient été acceptés. Il ne s’agissait pas de nos amendements. Je ne me souviens pas qu’on ait accepté un seul des amendements de l’opposition, et j'ai passé des heures à étudier le texte article par article. Les ministériels ont dit à maintes reprises qu’ils avaient été proposés par l’opposition. Ce n'est pas le souvenir que j'en garde.
Les libéraux présentent une mesure législative que nous appuyons et à laquelle nous souscrivons, mais nous regrettons qu'elle ait été présentée avec autant de précipitation. Ils ont parlé des vastes consultations qu’ils ont menées. Lorsque nous avons posé des questions au sujet des consultations, ils ont d’abord dit qu’elles dureraient six mois. Puis, ils ont dit qu’il y aurait une consultation de trois mois. Au bout du compte, elles n’ont duré que quelques semaines. Ils ont dit qu’elles n'avaient duré que quelques semaines.
Comme il existe 600 groupes et sous-groupes autochtones, comme les Métis et tous les autres peuples, il est évident que les consultations ont été insuffisantes. Lorsque nous avons commencé à entendre des témoins nous dire que le comité n’avait pas entendu certains groupes essentiels, nous avons commencé à comprendre pourquoi le projet de loi comportait des lacunes. Nous avons compris pourquoi le projet de loi posait problème et pourquoi les témoins disaient que les libéraux avaient raté la cible.
Nous sommes d’accord pour appuyer le projet de loi. Le gouvernement a dit il y a deux ou trois ans qu’il allait le présenter, mais il aurait dû commencer plus tôt et élaborer une mesure législative qui aurait permis d’éviter certaines de ces lacunes. Des témoins sont venus dire que le projet de loi ne serait d'aucune utilité pour les Inuits, qui ont été laissés de côté et n’ont pas été consultés. Certains constitutionnalistes craignent toujours que le libellé, même modifié, ne soit contesté devant les tribunaux. Ce n’est pas là que les projets de loi devraient se retrouver. Si le gouvernement veut accomplir quelque chose, il doit améliorer le projet de loi avant que celui-ci ne soit adopté. Même si nous souscrivons à ce projet de loi, nous pensons que la démarche d'élaboration a laissé beaucoup à désirer.
Je pense aux gens que j’ai rencontrés de la nation de Siksika, des gens qui travaillent dans le milieu de l’éducation. Je vois que des programmes d’immersion commencent à Siksika. Lorsque je visite des écoles ou que je m’adresse à des élèves à l’occasion de la remise des diplômes, j’entends les gens dire à quel point leur langue est importante, mais j’entends aussi dire que l’on craint que ceux qui sont plus jeunes que les aînés, mais plus âgés que les jeunes, ne soient laissés pour compte. Les programmes d’immersion commencent dans les écoles, mais quand les élèves rentrent à la maison, à qui vont-ils parler, si leurs parents ne connaissent pas la langue? Les enseignants y voient un énorme problème. Ils n’ont jamais été consultés sur la façon de régler ce problème.
Les intervenants des réseaux scolaire qui travaillent dans ce domaine sont dévoués. Ils veulent de bons résultats. Ceux des écoles de langue mitchif trouvent que l’argent est consacré à la bureaucratie. Ils croient que ce ne sont pas les populations concernées qui en profiteront en fin de compte. Ils estiment avoir été négligés dans cette mesure législative, et je suis bien d’accord avec eux. Suivant mon expérience du milieu de l’éducation, de nombreuses mesures législatives prévoient l’octroi de fonds, mais il arrive souvent que les écoles n’en voient pas la couleur. L’argent est englouti par la bureaucratie.
Les témoins pensent que l’argent ira à des organismes nationaux. Ils ne croient pas qu’il aboutira dans les écoles, comme il devrait, car elles n’ont pas été consultées. Il y a bien des cas où l’on parle des langues en voie de disparition ou à risque de disparaître. Si l’argent se perd dans la bureaucratie, il ne sauvera pas les langues. C’était une préoccupation des témoins.
Nous appuierons le projet. Mais nous croyons qu’on est allé trop vite. Cela pose des problèmes et nous nous demandons si les fonds arriveront là où ils sont nécessaires.
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Monsieur le Président, le 11 juin 2008, le premier ministre Stephen Harper a présenté des excuses historiques au sujet des pensionnats indiens. Il a reconnu que les deux principaux objectifs du système des pensionnats indiens étaient d'isoler les enfants et de les soustraire à l'influence de leur foyer, de leur famille, de leurs traditions et de leur culture afin de les assimiler à la culture dominante.
Il a dit:
« Les langues et les pratiques culturelles des Premières Nations, des Inuits et des Métis étaient interdites dans ces écoles [... ] Le gouvernement reconnaît aujourd'hui que les conséquences de la politique sur les pensionnats indiens ont été très néfastes et que cette politique a causé des dommages durables à la culture, au patrimoine et à la langue autochtones. »
Ces excuses ont marqué le début d'un effort soutenu qui visait à entamer la guérison des torts et des traumatismes intergénérationnels causés par plus d'un siècle de politiques imposées par le gouvernement fédéral aux peuples autochtones. Les excuses de Stephen Harper, qui étaient les premières à être présentées par un premier ministre dans l'histoire du Canada, ont permis un règlement final dans le contexte des pensionnats indiens et la création de la Commission de vérité et réconciliation, pour faire en sorte que l'histoire complète des pensionnats et l'expérience des survivants et des familles soient rendues publiques et pour fournir des recommandations aux fins de la réconciliation. Le rapport final comprenait 94 appels à l'action. Ce projet de loi répond aux appels 13, 14 et 15.
Il est essentiel de bien comprendre l'histoire commune complexe des peuples fondateurs du Canada, notamment l'époque où le pouvoir de l'État a servi à séparer des familles et à infliger des mauvais traitements indescriptibles aux enfants pour tenter de manière systémique de détruire traditions, croyances et langues. Il a fallu beaucoup de temps aux survivants et à leurs familles avant qu'ils ne parlent de leur vécu et de ses répercussions concrètes sur leur vie aujourd'hui, cela leur a été difficile, mais cette étape va contribuer à la réconciliation de façon constructive.
Plus de 150 000 enfants autochtones ont été arrachés à leur foyer dans le cadre du programme des pensionnats indiens, un programme amorcé avant la Confédération qui s'est poursuivi jusque dans les années 1990. Plus de 20 000 enfants autochtones ont été retirés de leur foyer et placés dans des familles non autochtones, une vague de retraits qu'on a appelée la « rafle des années 1960 ». Des générations d'enfants ont grandi sans modèle parental, sans grands-parents ni aînés, sans l'amour et la présence des membres de leur famille pour leur transmettre les valeurs familiales et culturelles de base. Ils ont grandi loin de leur famille et de leur communauté, ce qui a eu des conséquences évidentes.
En 2016, selon Statistique Canada, sur le nombre d'enfants de moins de 15 ans placés en foyer d'accueil au Canada, 14 970 étaient autochtones, soit plus de la moitié. On en voit les conséquences dans les problèmes socioéconomiques disproportionnés chez les Canadiens autochtones, comme la violence, le suicide et une vulnérabilité qui pose un risque élevé. Les énormes traumatismes systémiques subis par les Autochtones parce que le gouvernement a tenté de détruire leurs pratiques culturelles vont nécessiter une démarche de guérison qui sera longue et multidimensionnelle.
Les conservateurs sont particulièrement convaincus que les familles sont le fondement de la société; que les parents sont les premiers enseignants; que l'intervention de l'État dans la vie familiale et personnelle doit être limitée; que la langue est la pierre angulaire de la préservation des traditions, des valeurs et des pratiques culturelles au fil des générations; que chaque être humain a droit à la base à la même dignité, au même respect et à la même liberté de décision. Il n'est donc pas étonnant que ce soient les conservateurs qui aient entamé ce processus et que nous soyons favorables au principe et à l'objet du projet de loi .
Le dernier gouvernement conservateur a investi comme jamais et il a agi dans les dossiers de la culture autochtone, de l'éducation, du logement et de l'approvisionnement en eau potable. Il faut savoir, toutefois, que ce n'est pas en instaurant des rapports de complète dépendance envers le financement du gouvernement fédéral que les Premières Nations réussiront à bâtir l'avenir qu'ils souhaitent pour leurs enfants. Pour les conservateurs, l'autonomisation et la réconciliation économiques sont tout aussi importantes. Lorsque les communautés autochtones ont accès à des revenus sans l'intervention du gouvernement, ils peuvent les investir en fonction de leurs propres priorités, sans avoir à obtenir l'approbation d'un fonctionnaire d'Ottawa ou à faire entrer leur projet dans les catégories prévues par un programme fédéral. L'autonomisation économique des Premières Nations permet aux communautés autochtones d'investir dans leur culture et de préserver leur patrimoine pour pouvoir les chérir encore longtemps.
Joe Dion, de la Frog Lake Energy Resources, dans Lakeland, est un ardent défenseur de l'autonomisation des peuples autochtones, car elle permet de générer une prospérité durable dont profitent les communautés, les aînés et les futures générations. Ma région regorge de ressources naturelles, et de nombreux membres des communautés autochtones — partenaires, propriétaires, employeurs, entrepreneurs et travailleurs — y exploitent ces ressources de façon responsable. Je suis fière d'être la députée de tous les habitants et de toutes les communautés de Lakeland, dont l'établissement métis de Buffalo Lake, l'établissement métis de Fishing Lake, l'établissement métis de Kikino, la nation de Frog Lake, la nation de Goodfish, la nation crie de Kehewin, la nation crie de Saddle Lake, la nation d'Onion Lake et l'établissement métis d'Elizabeth.
Dans le cas de ces communautés et, hélas, d'autres communautés autochtones partout au Canada, le rêve d'autosuffisance économique est bridé par le gouvernement libéral actuel. Le programme anti-ressources des libéraux torpille le meilleur espoir de ces communautés pour vraiment mettre fin à leur dépendance au gouvernement fédéral.
Le chef Isaac Laboucan-Avirom de la Première Nation crie de Woodland a dit ceci: « Cela me frustre, en tant que membre d'une Première Nation, de devoir presque mendier, alors que nous vivons dans l'un des pays où les ressources sont les plus abondantes au monde. »
Lorsque le libéral a opposé son veto au projet d'oléoduc Northern Gateway, Equity Partners a déclaré que ses membres étaient « profondément déçus de voir que le premier ministre — qui, pendant la campagne électorale, avait promis la réconciliation avec les communautés autochtones — nie délibérément aujourd'hui le droit au développement économique qu'ont les 31 communautés des Premières Nations et de Métis et qui est protégé par la Constitution. »
En ce qui concerne la mesure anti-pipelines des libéraux, le projet de loi , Stephen Buffalo, PDG du Conseil des ressources indiennes, a fait la déclaration suivante au nom de centaines d'entreprises autochtones:
Les communautés autochtones sont sur le point de faire une percée économique majeure qui leur permettra enfin de participer à la prospérité économique du Canada [mais] le projet de loi C-69 va les arrêter dans leur élan.
À propos de l'interdiction des libéraux d'exporter du pétrole, le projet de loi , qui a été annoncé, sans que les Autochtones aient été consultés, 30 jours après que les libéraux ont formé le gouvernement, Gary Alexcee, vice-président du Eagle Spirit Chiefs Council, dit: « Si elles ne sont pas consultées, les Premières Nations de la Colombie-Britannique ne pourront pas améliorer leur situation économique car elles n'ont même pas la possibilité de négocier le projet de loi C-48 avec le gouvernement. »
Il a dit:
Si le projet de loi devait être adopté, aussi bien laisser le gouvernement nous donner des couvertures contaminées par la variole pour que nous disparaissions. C'est ce que le projet de loi signifie pour nous.
Il a ajouté:
À l'heure actuelle, ce qu'on nous donne ne suffit même pas à assurer la croissance future des Premières Nations en Colombie-Britannique.
Ce sont des mots extrêmement durs à lire, mais ils reflètent le profond sentiment de trahison que de nombreuses Premières Nations éprouvent maintenant en ce qui concerne le gouvernement libéral actuel.
Comme ministre du cabinet fantôme conservateur en matière de ressources naturelles, je parle presque toujours des nombreuses communautés et organisations autochtones qui veulent réaliser des projets miniers et énergétiques sur leur territoire parce que la majorité des communautés autochtones veulent exploiter les ressources et s'associer à des entreprises pour créer des possibilités pour leur membres et pour les futures générations.
Il existe également de nombreux exemples d'initiatives que les communautés autochtones veulent financer et qu'elles ont commencé à mettre en oeuvre partout au Canada pour préserver leur langue et leur culture. Le collège Blue Quills est un exemple remarquable. Anciennement, l'établissement avait pour vocation d'anéantir les familles et les cultures autochtones. Aujourd'hui, il fait figure de chef de file en matière de protection des langues, des religions et des pratiques culturelles autochtones, pour aujourd'hui et pour l'avenir.
Le collège Blue Quills, situé à St. Paul, dans le comté de Lakeland, était un pensionnat indien. Aujourd'hui, c'est le plus grand centre de la région pour la formation liée aux langues et aux cultures autochtones ainsi que pour la sensibilisation aux réalités culturelles.
L'histoire du collège remonte à 1865; le campus actuel a été construit au début des années 1930 et était, à l'origine, un pensionnat indien. Blue Quills est l'un des premiers établissements d'enseignement postsecondaire dirigé par des Autochtones et qui accueille des étudiants des Premières Nations et d'autres communautés de partout au Canada. Le collège offre plusieurs cours d'enseignement du cri, ainsi que des cours d'anthropologie et des cours interdisciplinaires sur la communication des Autochtones au moyen l'art, de la danse et de la langue.
Le collège Lakeland, établi à Vermilion — qui a aussi un campus à Lloydminster —, offre un programme spécialisé pour les enseignants qui travailleront auprès d'élèves autochtones. Il offre également un programme axé sur la participation d'aînés autochtones sur le campus.
Ces programmes sont financés en partie grâce au soutien financier des Premières Nations de la région signataires de traités. Ces mêmes Premières Nations qui participent à l'exploitation responsable des ressources naturelles sont préoccupées par le fait que leur avenir et leur prospérité financière future sont menacés par les décisions des libéraux qui nuisent à l'industrie pétrolière et gazière dans ma région.
Il incombe à tous les députés de poursuivre les efforts pour parvenir à une véritable réconciliation. J'aimerais citer Taleah Jackson, une jeune femme de Saddle Lake, guide culturelle de l'Université Blue Quills et des services à l'enfance et à la famille du Centre-Nord de l'Alberta. C'est une jeune femme qui m'inspire beaucoup. Voici ce qu'elle a dit:
Ma langue me tient à coeur. Même si je ne la parle pas couramment, je reconnais la valeur et la beauté de la langue de mes ancêtres. Surtout, la langue est la clé de nos cérémonies, de nos histoires, de nos protocoles, de notre identité et de notre mode de vie. On m'a dit un jour que lorsque nous parlons notre langue, nous parlons avec le coeur, et que le Créateur entend nos prières. Nous devons respecter les locuteurs de notre langue, ainsi que nos aînés, qui ont joué un rôle essentiel dans la préservation des langues autochtones et qui ont protégé nos langues sacrées.
Je suis tout à fait d'accord avec Taleah parce que, en protégeant les langues autochtones du Canada, nous protégeons notre patrimoine canadien commun.
C'est le 6 décembre 2016 que le libéral actuel a promis de présenter ce projet de loi sur les langues autochtones et, depuis, deux ans se sont écoulés. J'espère que les libéraux fourniront aussi un plan concret pour l'atteinte des objectifs du projet de loi .
:
Monsieur le Président, j'aimerais vous demander la permission de partager mon temps de parole avec le député de . Je suis certaine qu'il aimerait parler de ce projet de loi.
Le projet de loi , est très important pour notre gouvernement. C'est d'ailleurs un projet de loi que nous avons étudié au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, auquel je siège.
J'aimerais tout d'abord reconnaître que nous nous trouvons actuellement sur les terres ancestrales des Algonquins anishinabes. Je n'ai pas tellement l'accent qu'il faut, il faut m'en excuser. Je suis francophone et cela s'entend.
Je suis heureuse de m'exprimer pour donner mon soutien au projet de loi C-91, Loi concernant les langues autochtones. Aussi importante que soit cette initiative, il y a également urgence d'agir, particulièrement en ce qui concerne le rôle des aînés dans la revitalisation des langues autochtones. Il va de soi que le caractère urgent de la situation réside dans le fait que le nombre d'aînés autochtones, qui sont les locuteurs de leur langue maternelle, a diminué et continue de le faire.
Détenteurs d'une grande expérience de la vie, les aînés font figure de gardiens de la connaissance et sont tenus en haute estime en raison de leur connaissance de la langue, de leur savoir traditionnel et de leur sagesse. Les participants et les gardiens de la langue autochtone qui se sont exprimés durant les séances de mobilisation sur la législation sur les langues autochtones, l'été dernier, ont souligné la nécessité d'agir. Dans de nombreuses collectivités, la situation est critique, puisque le nombre de gens qui parlent couramment la langue diminue avec le décès des aînés, faisant ainsi disparaître l'espoir d'une transmission de la langue par la tradition orale.
Déjà, en 2005, dans le cadre des séances de consultations menées par le Groupe de travail sur les langues et les cultures autochtones, on affirmait l'importance de prendre des mesures immédiates pour freiner la perte des langues. C'était il y a 14 ans, et l'urgence n'a fait que grandir depuis. Il a été souligné que les langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis subissaient des assauts depuis au moins un siècle. Il va sans dire que la revitalisation de ces langues pourrait prendre du temps. Néanmoins, des objectifs à court terme devraient être fixés, et des projets, mis en œuvre immédiatement. S'il y a urgence d'agir, le processus risque d'être long.
De toute évidence, les collectivités et les gouvernements autochtones doivent bénéficier d'un soutien pour les aider à agir immédiatement. À titre d'exemple, chez les Premières Nations, un aîné sur trois a déclaré, en 2016, avoir une langue maternelle autochtone. Par comparaison, chez les enfants âgés de 10 à 14 ans, le ratio était de un sur dix seulement. On peut constater une différence très importante.
Dans le cas de certaines langues, il ne reste que quelques locuteurs de la génération des grands-parents et des arrière-grands-parents. Bien qu'aucune langue autochtone au Canada ne soit considérée comme hors de danger, il est important de faire remarquer que la vitalité des langues chez les Premières Nations, les Inuits et les Métis varie beaucoup. Par exemple, parmi les Inuits, un plus grand pourcentage d'aînés ont indiqué que l'inuktitut était leur langue maternelle comparativement aux jeunes générations. Néanmoins, c'est chez les Inuits que l'on trouve le taux le plus élevé de locuteurs dont c'est la langue maternelle de tous les âges comparativement aux Premières Nations et aux Métis.
Moins de 2 % des Métis ont déclaré pouvoir parler une langue autochtone. Comparativement à leurs homologues plus jeunes, un pourcentage plus élevé d'aînés métis ont déclaré avoir une langue maternelle autochtone et pouvoir parler une langue autochtone. On se basera sur la vitalité d'une langue donnée pour déterminer les solutions adéquates pour se réapproprier les langues autochtones, les revitaliser, les maintenir et les renforcer, conformément à la stratégie linguistique des collectivités.
Du fait de leurs connaissances, il est absolument essentiel que les aînés autochtones jouent un rôle actif. Dans son rapport final, la Commission de vérité et réconciliation soulignait que les collectivités et les établissements d'enseignement devaient être prêts à puiser dans les ressources précieuses des collectivités autochtones pour favoriser l'enseignement et la transmission des langues autochtones.
L'absence de locuteurs d'une langue autochtone ne signifie pas nécessairement sa disparition. Il est en effet possible de faire revivre une langue par les efforts de documentation et d'archivage. Dans de tels cas, les aînés représentent les ressources les plus précieuses pour aider à mettre en place des ressources linguistiques destinées aux générations à venir.
Prenons, à titre d'exemple, l'aîné Peter White de Naotkamegwanning, qui a utilisé son expertise et ses ressources pour enregistrer les histoires et les chansons de ses aînés afin de les préserver pour les années à venir. Ce sont des personnes comme lui qui apportent une contribution précieuse à la revitalisation des langues.
Il y a aussi Bert Crowfoot de l'Aboriginal Multimedia Society, qui a compris toute l'importance de préserver les langues, il y a de cela 36 ans, lorsqu'il a pris la décision de protéger les contenus audio et cinématographique enregistrés sur de bonnes vieilles bobines, des magnétoscopes traditionnels, de vieux films 16 mm et des disques souples qui contenaient des récits, des entrevues et de la musique en langue crie. Aujourd'hui, il participe à la réalisation d'un projet intitulé « Numériser les ancêtres », afin de créer une archive numérisée interrogeable. Ce sera une ressource pour les générations futures qui apprendront le cri en entendant les voix du passé.
Les aînés, porteurs de la langue autochtone, sont détenteurs de savoirs traditionnels inscrits dans la langue elle-même. Il est largement reconnu que la sagesse des aînés est indispensable pour aider à transmettre l'interprétation authentique des langues. Les aînés sont perçus comme les véritables experts de la langue.
La Confédération des Centres éducatifs et culturels des Premières Nations a réitéré l'importance des aînés dans son rapport sur les séances de mobilisation à l'égard du projet de loi. Selon elle, nos aînés orientent notre travail et agissent comme défenseurs et experts de la langue à l'échelle des collectivités et à l'échelle nationale.
Durant les séances de mobilisation qui ont mené à ce projet de loi, les participants ont fréquemment réitéré l'importance de mobiliser les aînés dans les efforts de revitalisation linguistique.
Ce projet de loi prévoit la souplesse nécessaire pour appuyer différents degrés de vitalité linguistique. Dans certaines situations, cela peut signifier promouvoir la participation des aînés lors de la planification, des activités et des programmes. Dans d'autres situations, il sera tout aussi important de donner l'occasion à un aîné d'apprendre sa langue au sein de son groupe.
Cette approche est fondée sur le principe voulant que la revitalisation d'une langue doive comporter plusieurs facettes. Plusieurs approches peuvent être nécessaires pour répondre aux besoins des divers segments de la collectivité, allant de l'apprentissage précoce à des programmes d'immersion destinés aux adultes.
En terminant, je dirai simplement que, malheureusement, chaque année, les collectivités autochtones perdent des aînés. Nous devons agir. Je demande à tous les honorables députés de travailler en collaboration en vue d'adopter ce projet de loi.