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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de me lever à la Chambre pour parler, peut-être pour la dernière fois, du projet de loi . Il y a très peu d'autres mesures, car il s'agit d'un petit projet de loi.
Je tiens à indiquer que je partagerai mon temps de parole avec la députée de . Je suis persuadé que son discours sera très bon, et qu'elle aura beaucoup de choses à dire à propos du projet de loi .
Au cours des dernières semaines, nous avons souvent eu l'occasion de parler du projet de loi . Nous avons eu l'occasion d'entendre le gouvernement dire toutes sortes de choses sur l'importance et l'urgence d'agir par rapport au projet de loi . Toutefois, quand nous avons demandé quels étaient les vrais motifs qui se cachaient derrière l'urgence d'agir, qui a mené le gouvernement à adopter une motion d'attribution de temps pour le projet de loi , nous n'avons eu aucune réponse. Le gouvernement dit une chose et il fait le contraire ou, comme c'est le cas dans plusieurs dossiers, il ne fait rien.
Depuis le début, nous n'avons eu aucune réponse à la seule question que nous avons posée. Nous voulions vraiment avoir une réponse qui justifiait la motion d'attribution de temps. Pourquoi vouloir faire adopter le projet de loi maintenant alors que, au début de la législature, rien ne semblait presser?
Nous avons posé la question à la Chambre, lors de la période des questions, et en comité. Toutes les fois, nous n'avons jamais obtenu une seule réponse sensée qui expliquerait pourquoi le projet de loi devait être adopté aussi rapidement.
J'ai cherché partout, dans les livres et dans l'histoire, afin de comprendre comment on pouvait justifier l'adoption d'une motion d'attribution de temps pour un projet de loi comme . Finalement, j'ai trouvé la réponse. C'est dans l'ADN du Parti libéral du Canada que j'ai trouvé la réponse concernant l'urgence d'agir relativement au projet de loi .
Le gouvernement dit être ouvert et transparent. D'ailleurs, cela figurait au discours du Trône. Dans le discours du Trône, on disait:
[...] le gouvernement s’engage à être ouvert et transparent. [...] il favorisera la tenue de débats ouverts [...] il n’aura pas recours à des mécanismes tels que la prorogation et les projets de loi omnibus pour éviter les examens minutieux.
Un mécanisme et une motion d'attribution de temps, ça se ressemble, c'est équivalent. On a eu l'occasion de voir le projet de loi sur le budget, qui est aussi un projet de loi omnibus. Le gouvernement dit une chose et fait le contraire, ou ne fait rien. C'est ce que j'ai découvert lors de mon analyse du processus du projet de loi , qui nous amène ici aujourd'hui.
Le gouvernement a adopté plusieurs motions de bâillon: je pense au projet loi , au projet de loi , à la motion no 6 et à la réforme électorale qu'il veut faire de façon unilatérale en utilisant sa majorité. Bref, pour ce qui est de l'ouverture et de la transparence, on repassera.
Au sujet du projet de loi , en quelques mois, on a vu que le gouvernement, pour une raison complètement inutile, a décidé de perdre un peu de sa crédibilité par rapport à ses relations avec les provinces. Comment? À plusieurs reprises, le gouvernement a annoncé qu'il voulait entreprendre une nouvelle ère de relations avec les provinces.
Dans le discours du Trône, le gouvernement a aussi dit, à trois reprises, concernant trois dossiers:
Afin de donner aux Canadiens et aux Canadiennes une retraite plus sûre, le gouvernement travaillera avec les provinces et les territoires [...] Afin d’améliorer les perspectives d’avenir des jeunes Canadiens et Canadiennes [...] le gouvernement travaillera avec les provinces et les territoires [...] Et pour contribuer à la santé et au bien-être de l’ensemble des citoyens, le gouvernement amorcera le travail avec les provinces et les territoires [...]
Il s'agit là de trois extraits qui démontrent la bonne volonté et l'intérêt de travailler avec les provinces et les territoires. Pourtant, le gouvernement dit une chose et fait le contraire, ou ne fait rien. On le voit encore. On l'a vu hier. On écoute les provinces, et on veut travailler en collaboration avec elles. Cela a été dit à plusieurs reprises.
Hier, le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec a parlé d'un autre projet de loi, soit le projet de loi . Qu'avait à dire M. Barrette sur le projet de loi ? Il disait que c'était quelque chose d'inapplicable et que s'il devait aller vers le projet de loi , dans le contexte actuel, il serait très prudent sur le plan législatif. Il a ajouté que, personnellement, il n'est pas enclin, pour des raisons gouvernementales et professionnelles, à prendre le chemin du projet de loi . M. Barrette est un ministre d'une province avec qui le gouvernement veut nouer des belles relations. Pourtant, il y a eu une motion d'attribution de temps au sujet du projet de loi . On ne laisse pas les députés du Parlement en parler.
J'ai d'autres exemples, mais en quatre minutes, je n'aurai pas le temps de tous les mentionner. Au début de l'étude du projet de loi en comité, dans son discours, le ministre Garneau parlait des belles relations avec les provinces:
À la suite de cette nouvelle [où Air Canada s'engageait à créer des centres d'excellence], le gouvernement du Québec et Air Canada ont annoncé une entente afin de mettre un terme [...] au litige [...]
Si nous regroupons toutes ces nouvelles positives, cela nous porte à croire que c'est une occasion idéale de moderniser la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada [...]
Le ministre Garneau disait que c'était ce que les provinces voulaient, mais ce n'est pas vrai. Je ne veux pas dire que ce n'est pas vrai, mais cela nous induit en erreur. Cela peut sembler ainsi, mais c'est une interprétation de ma part.
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Monsieur le Président, voyez-vous, je me reprenais pour une erreur qui n'en était pas une. Je vous remercie de me laisser me reprendre.
Bref ce n'est pas vrai, ce que le ministre nous a dit. La vice-première ministre du Manitoba nous disait:
L'adoption éventuelle du projet de loi C-10 aura des conséquences importantes. Il ne convient pas de le faire à la hâte sans tenir un dialogue important et mener une étude.
La vice-première ministre du Manitoba est venue ici pour nous dire de ne pas adopter le projet de loi à la hâte.
Ce n'est pas tout. Le gouvernement du Québec a envoyé un mémoire au comité pour nous dire:
Sous réserve de la conclusion des ententes définitives, le gouvernement du Québec a convenu d'abandonner le litige relatif aux obligations d'Air Canada quant au maintien d'un centre d'entretien et de révision.
On dit bien « sous réserve de la conclusion des ententes ». Je poursuis:
[...] afin de procurer tous les effets aux ententes intervenues, le gouvernement du Québec demande à ce que l’entrée en vigueur suite à la sanction du projet de loi C-10 survienne après la conclusion des ententes finales décrites plus haut.
Elle est où, la belle ère des relations fédérales-provinciales? Voilà trois demandes de gouvernements qui ne veulent pas que l'on intervienne rapidement et sans aucune raison concernant un projet de loi. Toutefois, le gouvernement continue, et aujourd'hui, nous en sommes à la troisième lecture du projet de loi . Ce projet de loi est complètement injustifié, dans la mesure où il n'est pas nécessaire d'agir aussi rapidement.
De plus, on dit que les provinces nous ont demandé de faire cela, alors que c'est totalement faux. Les deux provinces qui sont directement impliquées dans le dossier ont dit explicitement au gouvernement, en comité, de ne pas agir trop vite. C'est incroyable.
Toutefois, nous comprenons, car c'est dans l'ADN du Parti libéral. Je rappelle ce que le disait ici même sur la Colline, quand on a décidé d'aller en appel et qu'on s'est joint aux travailleurs d'Aveos ici. Le a fait un beau grand discours.
Il disait que notre meilleure ressource n'était pas dans la terre quelque part, et qu'il s'agissait plutôt des ressources humaines, des travailleurs qualifiés, comme eux, qui bâtissent le pays tous les jours, avec leurs mains, leurs bras, leur intelligence et leur créativité. Or, après avoir tenu ce beau discours pour dire qu'il soutenait les travailleurs, le les laisse tomber aujourd'hui. Ainsi, 3 000 emplois sont en péril.
C'est incroyable de dire une chose et de faire le contraire peu après, comme les libéraux le font depuis le début. J'implore le gouvernement d'acquiescer aux demandes du Québec et du Manitoba et de retarder l'adoption du projet de loi .
C'est important, parce que ces gens-là ont des ententes à conclure. Ils se servent présentement de la procédure devant la Cour suprême comme moyen de pression pour s'assurer que les emplois qu'on prétend préserver seront véritablement préservés. Pourquoi le gouvernement intervient-il et met-il en péril les ententes des provinces avec Air Canada?
C'est de cela dont on doit se souvenir. Il n'y avait aucune urgence d'agir par rapport au projet de loi . Personne, à part le , n'a demandé d'agir rapidement par rapport à ce projet de loi. J'ose espérer que ce message sera enfin entendu et que le projet de loi C-10 ne sera pas adopté.
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Madame la Présidente, je suis ravie d'intervenir aujourd'hui à l'étape du rapport du projet de loi .
Les gouvernements, tout particulièrement les nouveaux gouvernements, doivent établir des priorités et déterminer ce qu'ils souhaitent accomplir au cours de leur mandat.
Chaque parti doit faire campagne en présentant un programme qui servira de feuille de route pour ses premiers moments en tant que gouvernement. Au cours d'une campagne électorale, les partis prennent des dizaines d'engagements. À son arrivée au pouvoir, un gouvernement doit décider quels engagements constitueront des priorités. Il doit décider ce qu'il veut faire tout de suite, dans six mois, puis dans deux ans, et il doit décider ce qu'il ne fera jamais. À l'occasion, la Cour suprême contraint le gouvernement d'adopter une mesure législative, comme dans le cas du projet de loi et du projet de loi .
D’autres mesures législatives comme le budget sont présentées chaque année. Comme les nouveaux gouvernements aiment, au cours de leur première année en fonction, tenir les promesses faites pendant la campagne électorale, leur programme législatif reflète souvent ces engagements de campagne. Toutefois, les engagements pris par les libéraux pendant la campagne, comme le rétablissement de la livraison du courrier, ont été reportés en attendant des consultations. Il en va de même du financement supplémentaire promis pour CBC/Radio-Canada, qui est descendu dans la liste des priorités en raison d’un long processus de consultation. La réponse à la proposition de VIA Rail de construire une ligne de chemin de fer séparée reliant Toronto et Montréal ne sera pas donnée avant trois ans en raison de consultations.
Il a fallu aux libéraux sept mois pour créer un comité qui donnera suite aux consultations sur la réforme électorale. En fait, ce comité est identique à tous les autres comités de la Chambre des communes. Ses recommandations ne seront pas contraignantes et feront l’objet d’un scrutin préférentiel — ce qui est d'ailleurs l’option privilégiée par le .
Le a décidé de consacrer une année entière à des consultations sur les recommandations du rapport Emerson, qui découle lui-même de 18 mois de consultations avec l’ensemble du secteur.
Dans de nombreux dossiers, le gouvernement libéral a reporté les décisions à prendre.
Rien de tel en revanche pour le projet de loi . Ce projet de loi, qui sort de nulle part, n’est l’aboutissement d’aucune consultation. Pourquoi cette incohérence de la part du gouvernement?
Comme l'a confirmé la durant le débat à l'étape de la deuxième lecture, elle cherchait à faire franchir cette étape au projet de loi à toute vapeur afin que les intervenants puissent comparaître devant le comité. Elle se déchargeait des responsabilités de son gouvernement en matière de consultation sur le comité. Un comité parlementaire chargé d'étudier un projet de loi n'est pas un organisme consultatif. Il a pour but de cerner les faiblesses de la mesure législative et d'y remédier en présentant des amendements qu'une majorité de membres doit adopter.
Les témoins qui ont comparu devant le comité, dont des représentants des gouvernements du Québec et du Manitoba, ont cerné un certain nombre de faiblesses évidentes dans la mesure législative. L'opposition a proposé des amendements en conséquence, mais la majorité libérale a rejeté tous les amendements proposés au projet de loi .
Si le comité a été saisi si rapidement du projet de loi pour que les intervenants puissent présenter leur point de vue, pourquoi les membres libéraux ont-ils écarté les recommandations formulées? Voilà qui illustre à nouveau l'incohérence du gouvernement.
Bien que nous soyons tous favorables à un cadre réglementaire qui rendrait abordable le prix du transport aérien tout en maintenant la viabilité d'un transporteur traditionnel, je ne pense pas qu'un seul candidat libéral ait promis, durant la campagne électorale, de réduire les obligations d'Air Canada en matière de maintenance prévues aux termes de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada.
Étant donné que le gouvernement ne semble pas pressé de faire autre chose, son grand empressement à faire adopter avant l'été cette mesure législative surgie de nulle part a donné lieu à une multitude de questions. La plupart des députés savent maintenant que, en 2013, le gouvernement du Québec, avec le gouvernement du Manitoba comme intervenant, a cité Air Canada devant les tribunaux pour contester l'affirmation selon laquelle elle honorait ses obligations d'entretien aux termes de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. La Cour supérieure du Québec, présidée par le juge Castonguay, a tranché en faveur du procureur général du Québec. Air Canada a interjeté appel de cette décision à la Cour d'appel du Québec, mais celle-ci a maintenu la décision du tribunal inférieur en novembre 2015. Puis, le 5 janvier 2016, Air Canada a annoncé qu'elle porterait sa cause devant la Cour suprême. Moins de deux mois plus tard, elle a entamé des négociations avec le Québec et le Manitoba pour mettre fin aux litiges. Elle a tout d'abord signé une lettre d'intention pour l'achat de 45 avions C Series. On ne sait pas si Air Canada croyait qu'elle perdrait en appel devant la Cour suprême ou si le gouvernement du Canada l'a poussée à acheter les appareils qui, à l'époque, ne se vendaient pas très bien, mais elle a commencé à proposer de véritables engagements pour conserver une partie de ses activités d'entretien et de révision au Québec et au Manitoba.
Puisque le gouvernement du Québec a récemment investi plus de 1 milliard de dollars américains dans le programme C Series, il était évidemment heureux de voir Air Canada devenir le premier grand acheteur de ces appareils.
Les choses ne peuvent pas être plus claires. Air Canada a été forcée de négocier une entente avec le Québec et le Manitoba parce qu'elle a perdu devant les tribunaux.
Pour régler la poursuite intentée contre elle par le Québec, Air Canada a proposé d'acheter des avions C Series et s'est engagée à faire l'entretien de ces appareils dans la province pendant 20 ans. Elle a aussi proposé de créer, au Québec, un centre d'excellence dans l'entretien d'aéronefs. Dans le cas du Manitoba, Air Canada s'est dite prête à transférer environ 150 emplois d'ailleurs au Canada à Winnipeg. Il convient de souligner qu'il ne s'agit pas de nouveaux emplois, mais simplement d'emplois transférés d'une région du Canada à une autre.
Les engagements pris par Air Canada pour l’entretien au Canada des appareils à fuselage étroit sont une bonne chose, mais ils ne figurent pas dans le projet de loi dont nous discutons aujourd’hui. Air Canada a pris ces engagements parce qu’elle a perdu sa cause devant les tribunaux au sujet de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada.
Les provinces du Québec et du Manitoba comprennent bien que si la loi est abrogée, comme le proposent les libéraux, elles n’auront plus rien à négocier face à Air Canada. C’est la raison pour laquelle les deux provinces ont demandé au Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités de ne permettre l’adoption de ce projet de loi qu’une fois leur litige réglé contre Air Canada. Mais ces demandes sont restées lettre morte.
Aucun membre libéral du comité n’a remis en question les déclarations du vice-premier ministre du Manitoba ou du ministre québécois de l’Économie qui réclamaient plus de temps, ou n’a essayé de justifier l’adoption rapide de ce projet de loi. Les fonctionnaires du ont eux-mêmes déclaré en comité qu’aucune raison juridique ou technique ne justifiait l’adoption rapide du projet de loi.
Voilà où nous en sommes. Nous sommes saisis d’un projet de loi dont deux gouvernements provinciaux souhaitent faire retarder l'entrée en vigueur, et nous nous posons beaucoup de questions sur les raisons qui poussent les libéraux à vouloir faire adopter ce projet de loi aussi rapidement et avant les autres volets de leur programme législatif.
Nous estimons également que les libéraux ratent une occasion en or de rendre Air Canada et l’ensemble de l’industrie aérospatiale plus compétitifs. Le rapport Emerson, dont j’ai parlé tout à l’heure, a proposé un certain nombre de recommandations pour stimuler l’industrie aérospatiale tout en conservant les emplois au Canada. Par exemple, le gouvernement pourrait lier tous les frais d’amélioration aéroportuaire à des projets précis assortis de dispositions de caducité explicites, ce qui garantirait que ces frais contribueraient au financement d’un projet précis et non au fonctionnement général de l’aéroport. Il pourrait également remanier le modèle de financement des services de sécurité, et s’inspirer de ceux qui sont utilisés dans les grands aéroports internationaux, comme Heathrow à Londres ou Schiphol à Amsterdam, qui ont des normes de service à la clientèle bien définies et des coûts de livraison bien inférieurs.
Mais le projet de loi ne propose rien de tel, et le ne nous a pas annoncé l’adoption prochaine de mesures visant à améliorer la compétitivité de l’ensemble de l’industrie aérienne.
J’attends avec impatience les questions du gouvernement et des députés de l’opposition.
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Madame la Présidente, je vous remercie de me donner l’occasion de prendre part au débat sur le projet de loi , qui propose des modifications à la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada.
J’aimerais prendre quelques minutes pour expliquer pourquoi le gouvernement du Canada croit que le moment est tout indiqué pour modifier une loi qui date de 30 ans.
Rappelons-nous d’abord que le principal objectif de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada était de convertir une société d’État en une entreprise privée prospère et concurrentielle, dans une industrie caractérisée par une concurrence robuste, un solide rendement cyclique et une capacité d’adaptation aux chocs extérieurs.
La Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada est entrée en vigueur en 1989 dans le but de fournir au gouvernement fédéral le cadre juridique nécessaire pour privatiser Air Canada. Elle exigeait également que la compagnie aérienne adopte des dispositions sur l’endroit où s’effectueraient les travaux d’entretien, sur l’utilisation des langues officielles et sur l’emplacement de son siège social. Les autres transporteurs aériens – les concurrents d’Air Canada au pays et à l’étranger – ne sont pas assujettis à de telles conditions. Le marché dans lequel évolue Air Canada actuellement est très différent de ce qu’il était en 1989.
Les années 1980 furent caractérisées par la déréglementation. Depuis lors, on a assisté à une prolifération de nouveaux transporteurs aériens et à l’avènement de nouveaux modèles de transport aérien. En juin 1980, celui qui était alors président de l’Association du transport aérien international a indiqué que son association comptait 100 compagnies aériennes établies dans 85 pays. Aujourd'hui, elle en compte 260.
Bref, le marché des transporteurs aériens est beaucoup plus concurrentiel aujourd’hui, ce qui est une bonne chose. Cela profite aux voyageurs et force les compagnies aériennes à être aussi efficaces que possible. Nous devons cependant veiller à ce que les transporteurs aériens soient eux-mêmes en mesure de livrer concurrence, sinon nous risquons de limiter les possibilités de déplacement des Canadiens et nous menaçons la viabilité économique de ces transporteurs au Canada.
Le marché canadien a également évolué. À la fin des années 1990, les lignes aériennes Canadien International ont cessé leurs activités, ce qui a réduit la concurrence. D’autres compagnies aériennes comme Canada 3000 ont également vu le jour puis ont disparu. Toutefois, on a depuis observé une croissance florissante chez les compagnies aériennes canadiennes. WestJet, Porter, Transat, Sunwing et d’autres offrent d’importantes options de voyage aux Canadiens. Je devrais également souligner l’important rôle que jouent les transporteurs étrangers qui offrent d’autres options de voyage à destination et en provenance du Canada. Le choix est une bonne chose pour les consommateurs.
Air Canada continue d’assurer une connectivité indispensable, tant à l’intérieur de notre vaste pays qu’avec le monde extérieur. La compagnie est une excellente source d’emplois et de possibilités. Notre secteur aérien a traversé des périodes difficiles, y compris les événements tragiques du 11 septembre, une pandémie mondiale et la récente crise économique. Pourtant, il continue d’offrir un important éventail de services aux Canadiens. Bref, nous avons fait beaucoup de chemin depuis les années 1980 quand le gouvernement de l’époque a élaboré cette loi.
Il est évident que la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada a atteint son objectif principal, qui était de privatiser avec succès le transporteur aérien. De plus, de nombreux autres aspects de la loi conservent toujours leur pertinence. Toutefois, les temps ont changé et le secteur du transport aérien a évolué; il importe donc de veiller aussi à ce que la loi reste à jour.
Mentionnons en particulier que les dispositions de la loi qui portent sur l'entretien des aéronefs risquent de nuire à la compétitivité d’Air Canada en limitant sa capacité d’organiser ses activités en fonction de l’évolution du secteur aérien. En outre, Air Canada a aussi pour rôle d’assurer la connectivité des Canadiens, et cette situation pourrait fort bien se répercuter sur la compétitivité globale et les coûts du transport aérien dans l’ensemble du pays.
Cela me mène à mon deuxième point, qui a trait aux perspectives économiques du secteur aérospatial du Canada. Air Canada et le Québec ont signifié leur intention de mettre un terme au litige les opposant concernant la conformité du transporteur à la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada. Cette annonce a été faite juste après qu’Air Canada a déclaré son intention d’acheter jusqu’à concurrence de 75 appareils C Series de Bombardier, de faire en sorte que ces appareils soient entretenus au Canada pendant au moins 20 ans et de collaborer à l’établissement d’un centre d’excellence de calibre mondial à Montréal.
Air Canada facilitera également la création d’un centre d’excellence en entretien d’aéronefs au Manitoba, et il semble que cet engagement a convaincu le gouvernement de cette province d’abandonner lui aussi les poursuites.
L’entente Air Canada-Québec permettra au transporteur de tirer parti de la technologie aéronautique de pointe qui est produite ici, au Canada. Elle donnera également lieu à d’importantes retombées pour l’industrie aérospatiale, y compris dans le secteur de l'entretien des aéronefs dans tout le pays. C’est le genre d’investissement dont le secteur aérospatial a besoin.
Le Québec et le Manitoba reconnaissent que ces conditions créent un contexte dans lequel il paraît inutile de continuer les poursuites contre Air Canada. Cette nouvelle situation nous offre une occasion rêvée pour repenser notre approche et chercher à apporter des améliorations.
Les responsables fédéraux ont déterminé que les dispositions sur l'entretien dans la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada soulevaient des préoccupations précises parce qu’elles minent la capacité d’Air Canada de soutenir la concurrence. Essentiellement, elles empêchent Air Canada de se comporter comme d’autres transporteurs et d’organiser sa chaîne d’approvisionnement de façon optimale.
L’intention d’Air Canada, du Québec et du Manitoba d’abandonner les poursuites crée un contexte favorable à la modernisation de la loi et indique que les parties collaborent en vue d’atteindre un objectif similaire, soit une prospérité accrue pour le Canada. Il ne faut toutefois pas s’y tromper, nous sommes encore convaincus qu’Air Canada devrait s’engager à mener des activités d'entretien de ses aéronefs au Manitoba, en Ontario et au Québec, et nous avons l’intention de le stipuler dans la loi. Nous devons toutefois donner à Air Canada la latitude nécessaire pour que la société puisse soutenir la concurrence sur un marché mondial en évolution.
Nous ne pouvons pas prévoir quelle sera l'évolution future de l'industrie du transport aérien. Quelle qu'elle soit, nos transporteurs devront faire des ajustements pour relever les défis et demeurer concurrentiels. Air Canada a besoin de souplesse pour être en mesure de s'adapter aux conditions changeantes du marché. Le projet de loi nous permet de tendre vers un juste équilibre entre la souplesse qui s'impose et le devoir, pour le transporteur, de maintenir des activités d'entretien de ses aéronefs au Canada.
Le temps est venu de mettre à jour la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada et d'atteindre cet équilibre. En présentant le projet de loi C-10, le gouvernement fait ce qu'il doit pour modifier la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada afin d'en assurer la pertinence future au fur et à mesure que le secteur évoluera.
Je souhaite prendre une minute pour passer en revue l'évolution du secteur du transport aérien depuis la privatisation d'Air Canada en 1989.
Il y a eu des mutations fondamentales au cours des 30 dernières années. On observe, par exemple, une augmentation importante de la part du marché de nouveaux transporteurs mondiaux, comme ceux des États du golfe Persique, qui font désormais figure de concurrents majeurs sur le marché mondial.
Aux États-Unis, l'industrie du transport aérien a été profondément restructurée, la plupart des grandes lignes aériennes ayant dû se mettre sous la protection du chapitre 11 de la loi sur la faillite, ce qui s'est traduit par une réduction considérable de leurs coûts.
L'Europe a aussi été le théâtre d'une série d'alliances entre de grands transporteurs aériens. La formule du transport à faible coût est devenue le paradigme dominant pour certains types de déplacements à l'intérieur de certains marchés, tels que ceux de l'Europe, de l'Asie du Sud-Est et des États-Unis.
Tous ces changements reflètent un marché hautement concurrentiel qui impose aux transporteurs aériens l'obligation de chercher sans cesse à réduire leurs coûts afin de pouvoir répondre aux attentes des voyageurs et des expéditeurs.
Le Canada n'y échappe pas. Notre secteur du transport aérien est foncièrement différent de ce qu'il était en 1989. Après des années de difficultés financières, les Lignes aériennes Canadien International ont cessé leurs activités dans les années 1990 et, en bout de ligne, ont été fusionnées à Air Canada. Depuis, WestJet est devenue une force majeure sur le marché, avec pour résultat qu'il y a maintenant une concurrence robuste et viable entre deux transporteurs canadiens. D'autres transporteurs plus jeunes, comme Porter Airlines et Sunwing, ont aussi fait leur entrée sur le marché canadien. Le marché canadien des vols nolisés est particulièrement actif, comptant de nombreux transporteurs, comme Air Transat, qui offrent des services aux Canadiens. Air Canada, elle-même, a fait l'objet d'une restructuration majeure en 2003-2004 sous le régime de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, communément appelée la LACC, ce qui lui a permis de devenir un concurrent solide et viable sur le marché mondial.
En ce qui concerne l'entretien des aéronefs, la restructuration d'Air Canada sous le régime de la LACC comprenait la création d'une entité indépendante, devenue en fin de compte Aveos, à qui le transporteur confierait certaines de ses activités précédemment réalisées à l'interne, notamment l'entretien, la réparation et la révision de ses appareils. La décision prise par Air Canada à cette époque s'alignait sur les pratiques de beaucoup de transporteurs mondiaux.
L'Examen de l'aérospatiale, réalisé en 2012, signalait l'importance croissante des services d'entretien, de réparation et de révision à faible coût offerts dans des pays en développement, dont bon nombre sont plus près des marchés en expansion de l'Asie, de l'Amérique latine et du Moyen-Orient. Bien qu'Air Canada ne confie pas l'entretien de ses appareils à des fournisseurs dans des pays en développement, beaucoup de ses concurrents le font.
Ces exemples démontrent clairement qu’à l’heure actuelle, pour maintenir leur exploitation, les transporteurs doivent être en mesure d'adapter les éléments de leur chaîne d’approvisionnement de manière à en contrôler les coûts et à pouvoir soutenir la concurrence. Ces éléments comprennent tous les aspects de l’exploitation, y compris la façon d'assurer l’entretien des aéronefs et l'endroit où effectuer cet entretien.
À l’heure actuelle, Air Canada n’a pas la même capacité de composer avec les forces du marché que les autres transporteurs. Je parle bien sûr des dispositions de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada, et plus particulièrement de l’alinéa 6(1)d), qui exige que la société inclue dans ses clauses de prorogation des dispositions l’obligeant à maintenir les centres d’entretien et de révision dans les villes de Winnipeg et de Mississauga et dans la communauté urbaine de Montréal.
N’oublions pas que l’intention initiale de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada était de servir de cadre à la privatisation d’Air Canada, il y a près de 30 ans. Cette loi contenait plusieurs dispositions, dont celles énonçant les exigences relatives à l’entretien des aéronefs, dont nous parlons aujourd’hui. Les auteurs du texte visaient à transformer une société d’État en une entreprise privée viable et concurrentielle qui s’engagerait à effectuer l’entretien de ses aéronefs dans ces trois villes. À notre avis, les modifications proposées respectent l’esprit de la loi initiale en exigeant qu'Air Canada effectue l’entretien de ses aéronefs au Manitoba, en Ontario et au Québec, tout en lui permettant de déterminer le type de travail qu’elle effectuera à chacun de ces endroits afin de demeurer concurrentielle.
Comme nous le savons, ces dispositions ont fait l’objet d'un litige opposant le Québec — avec le soutien du Manitoba — et Air Canada. Toutefois, le 17 février dernier, le Québec et Air Canada ont décidé, d’un commun accord, de mettre fin à ce litige. La décision de ces deux parties de conclure un accord a fourni au gouvernement l’occasion de moderniser la loi et de soustraire le transporteur à ses obligations relatives à l'emplacement de ses centres d’entretien et de révision tout en reconnaissant l’intention à l'origine de ces obligations.
Nous ne proposons pas d’abroger l’alinéa 6(1)d). Nous proposons plutôt d’y apporter des modifications qui permettraient à Air Canada d’effectuer l’entretien de ses aéronefs au Manitoba, en Ontario et au Québec tout en déterminant le type de travail effectué à chaque endroit de manière à lui permettre de soutenir la concurrence. Ces modifications, que j’exhorte mes collègues à appuyer aujourd’hui, correspondent à l’intention du gouvernement de faire en sorte que le transport aérien soit un secteur déréglementé capable de réagir aux forces du marché. Nous sommes convaincus que ces principes directeurs incitent les entreprises à innover, à améliorer leurs façons de travailler et à offrir des prix concurrentiels dans un marché en pleine évolution et extrêmement compétitif.
Les modifications que propose le gouvernement donneraient à Air Canada la même capacité qu'ont les autres transporteurs de chercher à obtenir les meilleurs services d'entretien possible pour leurs aéronefs et de contrôler activement leurs coûts. La décision de moderniser cette loi est bonne. Nous savons que le Québec, le Manitoba et Air Canada ont convenu de collaborer à l’établissement de deux centres d’excellence chargés de l’entretien des aéronefs, un à Montréal et l’autre à Winnipeg.
Uniquement à Winnipeg, le nouveau centre d’excellence dans l’Ouest devrait permettre la création de 150 emplois dans la région, d’ici 2017. Au Québec, Air Canada s’est engagée à continuer de faire entretenir ses nouveaux appareils CS300 dans la province pendant au moins 20 ans et d’établir un centre d’excellence en entretien des aéronefs qui réaffirmera la place de Montréal en tant que plaque tournante de calibre mondial en matière d'aéronautique.
Cette évolution montre bien que les parties sont vraiment désireuses d’améliorer leurs relations ce qui, je l’espère, devrait se traduire par des avantages économiques pour le Canada et par la création d’emplois pour les Canadiens, à très long terme.
J’exhorte les députés à appuyer ce projet de loi.
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Madame la Présidente, je signale d'entrée de jeu que je partagerai mon temps de parole avec le député de .
Je tiens à remercier le député de d’avoir fait la démonstration de l’incohérence fondamentale de l’argumentation libérale à propos de ce projet de loi.
Nous venons d’entendre un discours qui voudrait nous faire croire que le projet de loi vise essentiellement à accroître la compétitivité de l’industrie aéronautique et de l’industrie aérienne, et qu’il est tout à fait injuste que les concurrents d’Air Canada puissent déplacer leurs activités d’entretien à l’extérieur du Canada. Pourtant, dans un même temps, le député prétend que le projet de loi concerne essentiellement l'emploi au Canada.
Très franchement, si le projet de loi vise vraiment à garder des emplois au Canada et que les libéraux prétendent qu’Air Canada ne peut pas soutenir la concurrence en maintenant ses emplois au Canada, alors j'avoue que c’est un argument auquel le NPD ne peut pas souscrire. C’est pourtant l’argument que les libéraux avancent lorsqu’ils parlent de compétitivité.
Comment peut-on affirmer que le projet de loi ne vise pas en fait à permettre à Air Canada de délocaliser ces emplois à l’étranger? C’est incohérent. Si Air Canada veut avoir la liberté de délocaliser ces emplois à l’extérieur du pays, c'est pour les délocaliser. C'est ce que dit essentiellement l'argumentation des libéraux lorsqu'ils affirment qu’Air Canada a apparemment du mal à faire face à la concurrence. Pourtant, que je sache, Air Canada n’est pas au bord de la faillite. Je remercie donc le député de son intervention.
J’espère que les Canadiens sont à l’écoute et qu’ils voient bien que les arguments des libéraux sont contradictoires. Ils sont incompatibles. Il y a quelque chose qui ne va pas. C’est toute l'histoire du projet de loi dont nous sommes saisis.
L’autre contradiction du projet de loi concerne l’échéancier. Le ministre ne cesse de nous dire qu’il n’y a pas le moindre lien entre le projet de loi et l’achat d’avions de Bombardier par Air Canada. Pourtant, le gouvernement continue de précipiter l’adoption du projet de loi à la Chambre. Or, s’il n’y a pas de lien entre les deux, pourquoi fixer une échéance pour adopter le projet de loi? Nous n’avons aucune preuve qu’Air Canada a besoin de ce projet de loi dans l’immédiat. La seule raison pour laquelle elle pourrait en avoir besoin dans l’immédiat, c’est si elle avait déjà planifié de délocaliser des emplois à l’extérieur du pays — je parle bien entendu des emplois qu’elle n’a pas encore délocalisés à l’extérieur du pays.
Soit dit en passant, le député de avait tort de dire qu’Air Canada n’a jamais délocalisé d'emplois d’entretien à l’extérieur du pays. Elle l’a fait en 2012. Le député de le savait fort bien lorsqu’il était dans l’opposition. Le le savait fort bien lorsqu’il était dans l’opposition. Les gens qui ont traîné Air Canada devant les tribunaux pour rapatrier ces emplois le savaient eux aussi fort bien.
Le malheur, c’est que ce projet de loi élimine tout fondement juridique pour contester les actions d’Air Canada, aujourd’hui et à l’avenir. Il se peut fort bien que le gouvernement du Québec renonce à sa poursuite, mais il y en a d’autres qui sont prêts à traîner Air Canada devant les tribunaux pour ramener ces emplois au Canada. Après l’adoption du projet de loi , toutefois, ils ne seront plus en mesure de le faire. Ils ne pourront plus faire précisément ce que le député de et le réclamaient du gouvernement précédent, c’est-à-dire appliquer la loi.
Aujourd’hui, les libéraux sont au pouvoir. Non seulement ils n’appliquent pas la loi, mais en outre ils la modifient. C'est impardonnable, parce que cela signifie que les citoyens du Canada qui veulent intenter des poursuites contre Air Canada pour l’obliger à respecter cette loi ne pourront plus le faire, parce que la loi aura été modifiée. Le projet de loi est une honte.
Tout ce processus nous a révélé le caractère véritable du gouvernement. J’ai diverses raisons de croire que le projet de loi est particulièrement révélateur du caractère du gouvernement. En effet, il s’agit du premier projet de loi présenté par le gouvernement qui ne soit ni une motion de régie interne ni la conséquence directe d’un engagement électoral. Le projet de loi nous donne un aperçu de la mentalité du gouvernement libéral actuel et de ce que font les libéraux quand ils n’ont pas les mains liées par des promesses électorales.
Le premier geste que les libéraux ont posé est totalement contraire à ce qu’ils réclamaient quand ils étaient dans l’opposition, soit le respect de la loi. Ils ont décidé de modifier la loi pour en retirer les dispositions mêmes qu’ils voulaient voir respectées. Je n’arrive pas à trouver la moindre trace de cohérence entre ces deux positions. Tout cela me semble parfaitement hypocrite, et c’est quelque chose qu’il est bon de savoir au sujet du gouvernement.
Il est intéressant de constater que l’Ouest du Canada, dans tout cela, est une préoccupation bien secondaire, parce que quoi qu’en dise le ministre il est difficile de ne pas penser qu’une partie de toute cette activité visait à trouver un débouché pour Bombardier. Plutôt que de dire qu’il faut prendre cette mesure de façon responsable, sans mettre en opposition le secteur de la maintenance et le secteur de la production, plutôt que d’essayer d’agir sans dresser les régions les unes contre les autres, nous pouvons simplement conclure un marché avec nos amis de la grande entreprise et régler les détails plus tard.
Si, par le plus grand des hasards, nous n’arrivons pas à remettre sur pied un important segment de l’industrie aérospatiale de Winnipeg parce que la loi a été modifiée, c’est tant pis, parce que nous ne nous soucions pas vraiment de Winnipeg ni de l’Ouest du Canada. Tout cela me paraît fort intéressant.
Je pense que cela nous montre qu’il ne s’agit pas seulement de régions, de l'absence de stratégie en ce qui concerne l’industrie aérospatiale ou du fait que le gouvernement est prêt à faire preuve d’hypocrisie, mais aussi du fait qu'il y a un ensemble de règles pour les grandes sociétés amies du gouvernement et un autre pour le reste des gens. Par conséquent, si des personnes travaillaient pour Air Canada, qu’elles comptaient obtenir gain de cause avec cette poursuite et qu’elles espéraient que quelqu’un d’autre prenne le relais après l'abandon de la poursuite par le gouvernement du Québec, tant pis pour elles. Les libéraux se débarrassent en fait de ces règles. Les règles qui protègent ces personnes, ils s’en débarrassent pour en instaurer d’autres qui seront bonnes pour la direction et pour les actionnaires d’Air Canada. Si cela signifie que les libéraux trahissent les travailleurs canadiens maintenant qu’ils sont au gouvernement, tant pis. Ils se préoccupaient de leur sort quand ils étaient dans l’opposition parce qu’ils voulaient leurs voix, mais maintenant qu’ils sont au gouvernement, ils ont de meilleurs amis. Tel est le message du projet de loi . Honte à eux. Les Canadiens devraient s’en souvenir aux prochaines élections, aussi loin soient-elles.
Je pense que nous en avons beaucoup appris sur le gouvernement dans tout ce processus, et il est important de le dire clairement.
D’ailleurs, juste pour donner une petite idée, peut-être prémonitoire, l’habitude est maintenant prise par le gouvernement libéral de ne pas manifester beaucoup de respect envers le Parlement. Nous l’avons d’abord vu avec le projet de loi . Le premier recours à l’attribution de temps concernait le projet de loi . Sur le moment, je n’ai pas vraiment compris pourquoi parce que j’écoutais le gouvernement libéral dire combien il respectait le Parlement, que le Parlement est un lieu extraordinaire et qu’il voulait entendre ce que les parlementaires ont à dire. Il tient encore ce genre de propos, mais il est plus difficile de le croire parce que nous aussi, comme disent les libéraux, nous nous intéressons aux faits et nous souhaitons prendre des décisions fondées sur des données probantes. Si nous devons décider quoi penser au sujet des libéraux et que nous regardons les faits par rapport à leur attitude, il est très difficile de les croire quand ils affirment respecter le Parlement. Cela a commencé avec le projet de loi . C’était un mystère alors, parce que je voulais les croire sur parole. Vraiment. De plus, il n’y avait pas de marché conclu pour l’achat d'avions de Bombardier, aucune entente par rapport à ce projet de loi. Rien n’obligeait véritablement à en accélérer l'adoption. Il y avait donc de quoi être perplexe.
Au fil du temps, nous avons pu constater le manque de respect du gouvernement pour le Parlement, et nous avons entendu les témoins au sujet du projet de loi tourner autour du pot pour éviter de dire s’il y a eu ou non un marché, peut-être, conclu entre le gouvernement, Air Canada et Bombardier. Nous n’en sommes pas sûrs parce que personne au gouvernement ne veut nous donner des éclaircissements sur ce point. Il est difficile de croire qu’il n’y a aucune entente. On commence à comprendre un peu mieux pourquoi une motion d’attribution de temps sur le projet de loi a été proposée à chaque étape.
À la période des questions d’aujourd’hui, et ce n'est pas la première fois, nous avons entendu la déclarer qu’un des grands avantages du processus des Libéraux relatif au nouveau mode de scrutin est que chaque député aurait son mot à dire et que chaque député aurait une voix. Nous allons tous nous lever et, lorsqu’un comité à majorité libérale aura formulé une recommandation à l’intention du Cabinet libéral, qui proposera ensuite un projet de loi qui sera étudié par une majorité libérale, tout le monde pourra s’exprimer sur un nouveau mode de scrutin, comme si le fait que les libéraux sont majoritaires n’avait aucun effet ou comme s’ils étaient à l’aise avec l’idée que, si leur majorité n’avait aucun effet, ce serait bien.
Là encore, le projet de loi nous révèle bien des choses, parce que c’est seulement le dernier lundi où nous nous sommes réunis avant le congé que le projet de loi a été mis aux voix à l’étape du rapport. Comme le député de a changé son vote, nous avons eu une égalité des voix. Le député a voté contre à la deuxième lecture, puis a voté pour à l’étape du rapport, ce qui a mené à une égalité des voix. Et c’est ce qui nous a permis de réellement voir comment le gouvernement se comporte lorsqu’il s’agit d’autoriser chaque député à se prononcer comme il l’entend. Tous ses députés ne se sont pas présentés parce qu’ils ne pensaient pas que c’était important. Je ne me permettrais pas de présumer des raisons de leur absence. Toutefois, le résultat du vote à égalité des voix est clair. Le gouvernement n’a pas dit que c’était formidable, que le Parlement s’était prononcé et que, s’il avait eu un vote de moins, cela aurait été parfait. Au lieu de cela, il a perdu son calme et a brandi la menace d'une motion totalement draconienne qui aurait lié les mains au Parlement et, ce faisant, il a créé un climat dans lequel tous étaient enclins à perdre leur sang-froid. C’est pourquoi je pense que le projet de loi nous a révélé le véritable état d’esprit du gouvernement libéral.
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Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole dans ce dossier, de parler de l'emploi et des emplois à valeur ajoutée qui sont tellement importants pour notre pays. Je regrette beaucoup que le gouvernement libéral procède avec autant de précipitation, avec un résultat aussi décevant.
Il est regrettable, alors que nous essayons de protéger les emplois à valeur ajoutée dans notre économie, que nous rations, très franchement, une occasion aussi intéressante et que nous récompensions de mauvais comportements. Il n’y a que quelques députés libéraux qui défendent le projet de loi, que ce soit pendant la période des questions ou au cours des débats à la Chambre des communes; les autres ne semblent pas vouloir être de la partie. En fait, on est en train d’opérer un retour vers le futur, car ce projet de loi nous fait revenir après coup sur ce que les Canadiens avaient déjà acquis par la négociation collective.
C’est comme si quelqu'un gagnait à la loterie et qu'il encaissait son prix, mais que, 10 ans plus tard, il décidait qu'il n'a pas vraiment besoin de cet argent et le rendait à la régie des loteries.
C’est ce qui est en train de se passer. Il s’agit d’une entente négociée. Un peu comme si des personnes disaient à l’assureur auprès de qui elles ont une police d’assurance automobile ou d’assurance habitation qu’elles n’ont pas vraiment de protection contre des sinistres ou des dommages. Elles savent que l'assureur connaît des difficultés, pour une raison ou une autre, et elles le libèrent de ses obligations à leur égard.
Ce qui est intéressant dans ce dossier, c’est que nous parlons d’une entreprise privée qui a été fondée par les contribuables de ce pays. Cette entreprise bénéficie de nombreuses subventions et mesures législatives. Elle doit contribuer à rendre le marché concurrentiel par souci d’équité pour les Canadiens. Elle a été privatisée, rachetée et renflouée; elle a aussi bénéficié de nombreuses injections de fonds publics, y compris, récemment, de réductions de l’impôt sur les sociétés. Elle a bénéficié de tous ces investissements et tout ce qu’on lui demandait, c’était de conserver quelques emplois au Canada. Conserver quelques emplois canadiens, voilà ce que demandait l'entente transparente négociée que le public et le Parlement peuvent consulter. Ses directeurs généraux, nouveaux, actuels et futurs, devaient, dans le cadre de leur responsabilité de diligence raisonnable, diriger une entreprise et mettre le drapeau canadien sur leur produit. Or, cela se perd à cause de l’externalisation constante.
L'aspect pour le moins intéressant dans le cadre du projet de loi touche aux autres subventions versées au pays et à l’investissement dans l'éducation de la classe ouvrière que nous balançons maintenant par la fenêtre avec tous les emplois à valeur ajoutée du secteur. On a promis à des jeunes qu'en allant à l’école, en acquérant un métier et en apportant une contribution, ils seraient récompensés. Cela fait partie de cette disparition que les libéraux ne font qu’accélérer.
Ce que les libéraux veulent faire au public, c’est, à l’image d'un avion d'épandage, pulvériser en rase-mottes. Ils veulent placer un voile devant les Canadiens; ils disent avoir négocié une entente, mais qu'après l'avoir enfin conclue — ils ont plutôt l’habitude des échecs —, ils préféreraient y renoncer.
Cette entente portait sur un investissement public. Nous devrions penser aux femmes et aux hommes et aux jeunes de ce pays qui suivent des formations en ce moment même. Ils dépensent de l’argent qu’ils ont durement gagné, empruntent à des taux nettement supérieurs à ceux appliqués pour beaucoup d’autres types d’emprunts, ce qui est absurde en soi. Ils vont devoir rembourser ces emprunts, ils vont devenir des consommateurs dans notre société, fonder une famille et planifier leur avenir. Ils perdent de bons emplois ouvrant droit à pension, la possibilité de travailler dans un milieu sécuritaire, le mieux réglementé du monde, de percevoir le fruit de leur investissement de manière à pouvoir élever une famille et continuer d’apporter leur contribution à l’économie pour tous les Canadiens.
Nous avons maintenant renoncé à ce rêve, malgré l’investissement des étudiants et des personnes formées dans notre système d’éducation, malgré le fait qu'ils devront payer non seulement pendant leurs études, mais aussi pendant plusieurs années après les avoir complétées. Ils devront reporter la décision de fonder une famille, d’acheter une maison, de participer à l’activité économique et d’acheter une voiture, de préférence une voiture fabriquée à Windsor. Toutes ces décisions devront être reportées parce que les étudiants croulent sous les dettes.
En outre — et c’est tout aussi horrible —, songeons à tout l’argent des contribuables qui a été investi au titre du prêt étudiant canadien. Les provinces le font pour préparer les gens, et pendant ce temps nous assistons à une manœuvre classique au football. Quand un demi-offensif est menacé, il tend le bras pour se protéger et prendre appui sur la tête d’un joueur qui vient à sa rencontre. C’est un peu ce que fait la politique libérale dans le cas qui nous occupe.
Après tous ces investissements et tout ce travail de développement de la technologie, je m’en voudrais de ne pas souligner que l’industrie aérospatiale en particulier a bénéficié des crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental. Ce sont des initiatives de subventionnement des sociétés qui visent à encourager la fabrication et le développement de produits dans l’industrie aérospatiale. C’est l’une des plus importantes organisations à avoir profité de ce type d’allégements fiscaux, des allégements fiscaux payés par des personnes qui habitent rue Parent, rue Ottawa, Première rue ou rue Principale, sur différentes rues partout au pays. Nous avons investi collectivement pour, en fin de compte, créer des emplois à valeur ajoutée, afin de continuer à améliorer le sort des travailleurs. C’est ici que nous perdons le fil de ce débat. La progression des travailleurs est interrompue et nous allons maintenant récolter le prétendu fruit de nos efforts. Nous verrons bien ce qui nous attend.
Ce n’est pas ainsi que l’on négocie. Ce n’est pas ainsi que l’on joue au poker. Ce n’est pas ainsi que l’on agit dans la vie, parce que lorsqu’on obtient quelque chose après avoir renoncé à autre chose, cela s’appelle de la négociation. C’est grâce à des négociations équitables qu’Air Canada est arrivée au point où elle en est aujourd’hui. Dans la réalité, ces travailleurs ont perdu des débouchés et des emplois, et cela se répercute sur les collectivités.
Nous avons la chance, à Windsor, d’avoir de nouveaux emplois dans le secteur automobile, malgré l’absence de tout appui gouvernemental en raison des politiques ineptes du passé qui n’ont jamais rien donné. Plus de 1 000 travailleurs ont été embauchés sur la chaîne de montage malgré l’absence d’une stratégie nationale pour le secteur automobile. Essentiellement, Fiat, Chrysler et Unifor en ont eu marre et ils sont allés de l’avant. L'injection de fonds a fait baisser un taux de chômage qui était le plus élevé au pays depuis 10 ans pour le ramener à 6 % ou 7 %. Nous nous en réjouissons. Nous sommes heureux que cela ait fonctionné, mais c’était à la onzième heure.
Par le passé, le secteur public investissait dans ces projets. Le gouvernement en venait à récupérer cet argent. Or, si nous avons aujourd’hui une augmentation des emplois à valeur ajoutée à Windsor, c’est grâce aux organisations et aux travailleurs. La perte de ce type d’emplois peut faire toute la différence entre la renaissance d’une collectivité et la distance à parcourir.
Je terminerai en disant que nous devons être bien conscients du précédent que nous créons ici, et c’est de dire que nous pouvons reculer dans le temps et transformer en défaite ce qui était une victoire pour les contribuables canadiens. C’est vraiment malheureux pour la jeunesse de notre pays.
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Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir une deuxième fois au sujet du projet de loi . Je vais faire part aux députés de mes réflexions au sujet du projet de loi, réflexions qui découlent essentiellement de mon inquiétude face à la désinvolture dont le gouvernement fait preuve à l’égard de l’industrie aérienne et de l’industrie aéronautique canadiennes, en particulier dans le dossier et le contexte qui ont mené à l'élaboration du projet de loi.
En cette ère d’ouverture, de transparence et de voies ensoleillées, le projet de loi C-10 est arrivé au Parlement en suivant les voies les plus obscures, pour ne pas dire les plus vaseuses qui soient. Le gouvernement et, en particulier, le , qui est un député et un Canadien éminent, devraient nous dire clairement ce qu’il en est. Certaines des réserves exprimées par mes collègues du Nouveau Parti démocratique tiennent en bonne partie des conditions nébuleuses dans lesquelles le projet de loi a été présenté.
Si j'évoque des réserves relativement à la procédure, c'est parce que la Chambre devrait fonctionner avec transparence et que nous devrions savoir comment les projets de loi sont déposés. Sur le fond, je suis d’accord avec certains aspects précis du projet de loi C-10 et je vais expliquer pourquoi. Cependant, je préférerais que le gouvernement fasse preuve de transparence et d’ouverture envers la Chambre et qu’il gère l'industrie, les compagnies aériennes et les transports d’une manière qui correspond aux réalités actuelles d'un secteur mondialisé dans lequel le Canada fait excellente figure et où il est même un chef de file. Hélas, l’industrie risque fort de subir les conséquences de l’inaction et du manque de clairvoyance dont nous sommes témoins depuis déjà six mois.
Le projet de loi est en fait l'aboutissement de la démarche entreprise dans les années 1980, sous le gouvernement Mulroney, lorsque Air Canada, qui était auparavant une société de la Couronne, a été privatisée. Les premiers vols que j’ai faits sur les ailes d’Air Canada remontent à l'époque où elle était une société d'État, le transporteur national. Aux débuts de l’aviation, pour que la société et les entreprises suivent le progrès et restent concurrentielles, le Canada a fait comme beaucoup d’autres pays: il s’est doté d’un transporteur national. Cependant, entre les années 1960 et les années 1980, la plupart des États développés ont opté pour la privatisation de ces actifs.
Ni les députés ni le gouvernement à Ottawa n’ont pour mandat de diriger des entreprises pour le compte de la population canadienne. Cependant, dans un secteur donné, notamment celui de l'aéronautique, le gouvernement peut soutenir le fer de lance d’une industrie, comme le transport de fret et de passagers.
À l'époque où le gouvernement Mulroney est arrivé au pouvoir, le Canada a permis au secteur privé et au marché d’exploiter des compagnies aériennes dans le cadre de règlements appropriés, imitant en cela la plupart des États modernes. Il s’agit d’une industrie strictement réglementée par le fédéral. Toutes les compagnies aériennes font de leur mieux pour fonctionner avec la plus grande rigueur dans le cadre de cette réglementation.
À l’époque du gouvernement Mulroney, quand on a privatisé Air Canada, d'aucuns se sont inquiétés du sort qui serait réservé aux nombreux employés des grands services de maintenance exploités par la société d'État dans certains gros marchés. Je parle ici de Winnipeg, de Montréal et de Mississauga. Il est très facile de comprendre pourquoi ces marchés étaient si importants à l’époque. Le service chargé de la maintenance et des réclamations était au Manitoba. Il y avait la plaque tournante que constitue l’aéroport Pearson, à Mississauga. Enfin, le siège social d’Air Canada était à Montréal. C’est aussi à Montréal que se trouve le siège social de l’OACI, la prestigieuse Organisation de l’aviation civile internationale, qui régit le transport aérien à l’échelle mondiale. Sa présence faisait de Montréal une base avantageuse pour Air Canada, et c'est toujours le cas.
Donc, des dispositions précises sur l’emploi ont alors été prévues en raison des inquiétudes que suscitait le changement. C’était il y a presque 30 ans. À ce que je sache, aucun de mes amis du NPD n’a cherché de statistiques à ce sujet, mais je parie que 90 % des Canadiens conviendraient que nous ne sommes plus à l’époque où un État devait être propriétaire d’une compagnie aérienne. Cependant, ils comprennent probablement pourquoi, il y a 40 ou 50 ans, le gouvernement a initialement choisi d'aider les Canadiens à accéder au transport aérien. Nous ne suggérons pas de retourner en arrière et de revenir à l’époque où le Canada gérait une compagnie aérienne pour le compte des Canadiens.
Les emplois rattachés aux trois provinces étaient un élément crucial de la transition. À ce moment-là, le premier ministre Mulroney et son gouvernement tenaient à garantir à la Chambre et, bien entendu, à tous les Canadiens que le changement ne perturberait pas gravement les grands centres de Winnipeg, de Mississauga et de Montréal; c’est la raison pour laquelle la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada a été adoptée.
Que fait le gouvernement dans le cas présent? Il ne détruit pas ce principe, mais il lui permet d’évoluer, comme il se doit. Au lieu de donner une coordonnée géographique en particulier, les modifications à l’alinéa 6(1)d) de la loi permettent un équilibrage plus géographique entre le Manitoba, le Sud de l’Ontario et le Grand Montréal; il y aura toujours de grands centres, mais la société pourra procéder à une certaine modernisation et disposer de services de maintenance et de soutien opérationnel concurrentiels.
Étant partisan du libre marché et venant du secteur privé, je ne crois pas que nous devrions enchaîner une entreprise commerciale à une méthode d’exploitation qui était en pratique il y a 30 ans. La dernière chaîne, sur bien des plans, de la privatisation d’Air Canada, c'est la modernisation de la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada.
Comme mes observations le montrent, en principe, c’est logique. De façon générale, on reconnaît aussi ce que les gouvernements provinciaux ont déjà compris. Les poursuites intentées au Manitoba et au Québec par les gouvernements provinciaux, de même que par les mouvements syndicaux de ces provinces, se sont réglées dans deux des provinces par des ententes. On s’est mis d’accord pour protéger des emplois et permettre un certain degré de sous-traitance avec des fournisseurs de services d’envergure mondiale au Manitoba, et des ententes commerciales analogues ont été conclues avec le Québec; les poursuites ont été abandonnées.
Ce qui s’est réellement passé, en l'occurrence, et le ministre n’a pas pleinement expliqué à la Chambre les circonstances en cause, c’est que le projet de loi a surgi de nulle part. Était-ce une tentative du gouvernement fédéral de résoudre tous les litiges relatifs à la loi? Probablement. Le projet de loi C-10 découle-t-il de discussions entre le gouvernement fédéral, Bombardier et Air Canada? Probablement. Cependant, le ministre ne nous a rien dit à ce sujet. Par contre, nous savons que des cadres supérieurs d’Air Canada l’ont rencontré quelques jours avant le dépôt du projet de loi C-10.
Pure coïncidence, Air Canada s’est engagée à acheter le C Series, l’aéronef de Bombardier. Elle devrait bien sûr acheter cet appareil parce que c’est l’un des meilleurs du monde, et nous sommes très fiers de Bombardier. Je parlerai de cette société dans un instant.
Quoi qu’il en soit, si nous regardons cet enchaînement, les litiges avec les provinces, les difficultés qu’a éprouvées Bombardier, les contraintes réglementaires et les limites imposées à Air Canada par une loi qui remonte à 1988, tout cela nous mène au projet de loi . Le caractère pressant de cette situation et de l’aide financière que le gouvernement du Québec a déjà accordée à Bombardier, tout cela nous mène au projet de loi C-10.
Je préférerais que le ministre nous expose franchement la situation. Je pense que mes collègues du NPD le préféreraient aussi. Tous les analystes de l’industrie savent bien pourquoi nous examinons aujourd’hui le projet de loi .
Comme les députés peuvent le constater d'après mes observations, en principe, la privatisation complète et l'assouplissement de certaines des règles établies en 1988 sont souhaitables. Ce qui me préoccupe au sujet du projet de loi , ce sont les ententes secrètes et le fait que nous nous demandons ici, à la Chambre, si le gouvernement fédéral a l’intention d’accorder une aide à Bombardier comme l’a fait le gouvernement du Québec. A-t-on donné des assurances relativement à la structure à deux catégories d’actions de cette société?
Est-ce que des assurances ont été fournies au sujet d’un prêt, d’une éventuelle intervention d’Exportation et développement Canada pour offrir une garantie aux autres pays qui feraient l’achat d’appareils C Series? De fait, le gouvernement a-t-il négocié avec Air Canada pour régler certaines des questions liées à l'emploi, en contrepartie d’un achat? Je ne pense pas qu’il faille être grand clerc pour comprendre que beaucoup de choses se cachent derrière le projet de loi .
Le gouvernement est arrivé à Ottawa avec des promesses d’ouverture, de transparence, de consultations tous azimuts. Or, dans le dossier dont nous sommes saisis, nous n’avons pas reçu toute l’information pertinente, et le ministre ne nous a pas expliqué ce qui a mené à l'élaboration du projet de loi ni parlé des ententes conclues en coulisses. C’est pourquoi j’ai de sérieuses réserves et j’interviens à nouveau dans le débat sur ce projet de loi.
Je presse le ministre, un député qui jouit du respect de toute l’industrie aérospatiale à titre de premier astronaute canadien, de nous dire toute la vérité. C’est ce dont nous avons besoin, si nous voulons moderniser cette industrie. Les préoccupations des syndicats et de certains de mes amis du NPD devraient être traitées avec plus de transparence et dans le cadre de discussions plus directes au sujet des modifications qui seront apportées à la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada. Le ministre peut encore s’expliquer ouvertement.
J’ai un attachement profond envers la société Bombardier. Je pense que tous les députés, en particulier ceux du solide caucus québécois des conservateurs, s’intéressent de près à Bombardier. J’ai reçu mon brevet de pilote dans l’Aviation royale canadienne après avoir suivi l’entraînement à la navigation aérienne sur le CT-142, une version militaire du Dash-8, à Winnipeg, au Manitoba.
Je connais bien le secteur aérospatial à Winnipeg, parce que la base aérienne est adjacente à l’aéroport international. L’Aviation royale canadienne, dont j’étais fier de faire partie, a son quartier général à Winnipeg. Winnipeg, qui est le centre géographique de l’Amérique du Nord et du Canada, demeurera une importante plaque tournante de l’industrie aérospatiale, et je pense que nous pouvons être très fiers des emplois que crée cette industrie.
Les conservateurs et la famille conservatrice ont passé de nombreuses années loin du pouvoir en partie à cause d’une décision malheureuse du gouvernement Mulroney d'imposer un contrat de maintenance des CF-18 qui pénalisait la société Bristol Aerospace, au Manitoba. Par conséquent, il est probable que personne ne connaît mieux l’industrie aérospatiale que les conservateurs, parce que cette affaire a contribué à donner naissance au Parti réformiste et produit un schisme entre les conservateurs qui a duré de nombreuses années. Ce passé me revient à l’esprit à l’occasion du débat actuel.
Les conservateurs veulent que Bombardier réussisse. Nous voulons une structure d’entreprise modernisée, une gouvernance efficace et un leadership compétent au sein de l’organisation. Nous voulons le C Series, qui est le meilleur appareil de sa catégorie. Son entrée en service produira une véritable révolution sur les plans de l’efficacité énergétique et de la réduction du bruit. Il marquera l’aube d’une ère nouvelle pour le secteur et pour Bombardier. Il devrait être en demande dans tous les coins du globe, et les commandes commencent à arriver. Toutefois, si les commandes sont rattachées à des projets de loi présentés à la Chambre des communes, à une aide que les gouvernements pourraient offrir à la société et au transporteur national du Canada, nous devrions en être informés et en discuter.
Je dois souligner que mes préoccupations s’expliquent par le fait que l’opacité entourant le projet de loi s’étend à des décisions concernant l’aéroport Billy Bishop. Je viens d’entendre mon collègue de s’esclaffer. Dans ce cas-là non plus, le ministre ne nous a pas communiqué toute l’information nécessaire au sujet des décisions relatives à l’exploitation à long terme de cette importante plaque tournante. De fait, nous avons été fort déçus d’apprendre, par un message publié sur Twitter par le ministre, que le projet d’expansion de cet aéroport avait été annulé. C’est un aéroport qui est devenu essentiel pour combler les besoins de transport, non seulement des quelques centaines de riverains du lac, mais aussi des cinq millions de personnes qui vivent dans la région la plus peuplée de notre pays.
Le député de déplore, je le sais, que nombre de ses collègues utilisent Porter pour venir à Ottawa chaque semaine, mais il doit bien admettre que la situation de l’aéroport, à proximité du centre financier de notre pays, en fait un atout de première classe et qu’il conviendrait de mener au moins un examen en bonne et due forme de la réglementation, plutôt que de conclure des ententes secrètes.
Il y a des ententes qui se mijotent dans le bureau du quand il rencontre de hauts dirigeants de l’entreprise. Il y a aussi des ententes que les libéraux mijotent en caucus et au Cabinet du premier ministre et qui touchent bien plus qu’une seule circonscription. Elles touchent tout le Sud de l’Ontario et ont un effet sur la circulation des biens, des services et des gens. Que l’on décide d’agrandir ou non cet aéroport, ces décisions doivent faire l’objet d’une discussion approfondie en toute transparence, d’autant plus que nous vivons à l’ère des voies ensoleillées.
Quel rapport ont ces ententes avec le débat que nous tenons? C’est que la société Porter envisageait d’acheter jusqu’à 30 avions C Series. Je sais que mon collègue qui apprécie mes observations de l’autre côté de la Chambre sera probablement hors de la ville quand le gouvernement annoncera son intention de fournir une aide financière à Bombardier, ce qu’il fera certainement. Nous, les députés de l’opposition, examinerons cette aide de très près. Mais le plus intéressant est le fait que les transactions privilégiées qu’effectuent les libéraux ont empêché la société Bombardier de vendre au secteur privé ces avions qui lui auraient justement permis de prospérer.
Cette semaine sur la Colline, j’ai discuté avec les représentants d’un tout nouveau transporteur à faible coût qui est en démarrage, la ligne aérienne Jetlines. Cette nouvelle société envisage aussi d’acheter 20 à 40 avions C Series de Bombardier, à condition que le gouvernement commence à établir des conditions équitables au Canada pour notre industrie aéronautique et aérospatiale.
Mon collègue de Prince George, grâce à son immense expérience de l’aviation et de l’industrie aéronautique et aéroportuaire, sait qu’un grand nombre de nos marchés secondaires ne sont pas suffisamment desservis à cause des règles restrictives sur la propriété des lignes aériennes et sur la capitalisation de notre industrie aérospatiale.
Pourquoi est-ce important? Le gouvernement précédent s’efforçait de modifier cela. Le rapport Emerson affirmait que, comme nos marchés des capitaux ont très peu d’envergure et que l’aéronautique est une industrie mondiale, nous devrions autoriser jusqu’à 49 % de propriété étrangère ou d’apport de capitaux étrangers. L’industrie des ressources se heurte constamment à cette même difficulté. Des possibilités extraordinaires s'offrent à nous, mais nos marchés des capitaux sont trop limités pour que nous puissions les saisir. Nous sommes donc obligés d’attirer des capitaux de partout ailleurs dans le monde.
Nous devons aussi reconnaître que cette industrie est mondiale. Beaucoup d'anciens combattants et d’amis avec qui j’ai servi dans l’Aviation royale canadienne travaillent comme pilotes à Air Canada. J’ai un ami, Kevin McNaughton, un ancien pilote de CF-18, qui est pilote chez WestJet à l’heure actuelle. Il y a aussi des pilotes canadiens à la Cathay Pacific et chez Qantas. Il s’agit d’une industrie mondiale. En fait, mon ami de la Colombie-Britannique a été consultant dans le monde entier. Les compétences canadiennes en ce qui concerne l’aérospatiale, les compagnies aériennes et NAV CANADA, qui est un chef de file mondial, sont recherchées. Il s’agit d’un marché mondial et pour que nos compagnies aériennes prospèrent, nous devons avoir des règles du jeu équitables.
Je suis donc fier que le gouvernement précédent ait commencé à rendre les règles du jeu un peu plus équitables. Nous avons permis d’établir des durées de service et des niveaux de dotation plus uniformes pour les équipages, et pour le personnel de service à bord, comme les agents de bord, de sorte que les exigences soient les mêmes au Canada que pour les compagnies aériennes effectuant des vols vers le Canada.
Nous devons en faire de même pour l’accès aux capitaux. Nous devons permettre aux petites compagnies aériennes qui démarrent, comme Jetlines et d’autres, d’accéder à des capitaux étrangers pour pouvoir acheter des aéronefs construits au Canada. Je demande donc instamment au ministre d’examiner le rapport Emerson et de trouver des moyens de libérer cette industrie pour que les Canadiens puissent rivaliser avec leurs concurrents.
L’industrie aérospatiale canadienne représente à elle seule 76 000 emplois au Canada et une part du PIB de près de 30 milliards de dollars. Les appareils que construit actuellement Viking Air qui sont des de Havilland classiques, comme le Beaver et le Twin Otter, sont célèbres dans le monde entier. Les avions C Series auront aussi cette renommée dans le monde qui fait que nous figurons toujours au troisième ou quatrième rang des pays réputés pour leurs compétences en aérospatiale.
Concluons moins d’ententes secrètes, faisons preuve de plus de transparence, et faisons en sorte qu’aucun autre projet de loi ne soit présenté à la Chambre comme le projet de loi , dans l’opacité et l’indécision manifestées par le gouvernement.