propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Madame la Présidente, je suis heureux de commencer le débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi , qui propose de criminaliser certains comportements liés à la thérapie de conversion, un exercice cruel qui stigmatise les communautés lesbienne, gaie, bisexuelle, transgenre, queer et bispirituelle et qui est discriminatoire à leur égard.
Le projet de loi est identique à l'ancien projet de loi , que j'ai présenté le 9 mars 2020. Les deux marquent l'engagement soutenu du gouvernement à éradiquer une pratique discriminatoire qui va à l'encontre des valeurs canadiennes.
[Français]
Notre gouvernement s'est engagé à protéger la dignité et l'égalité des membres de la communauté LGBTQ2 en mettant fin aux thérapies de conversion au Canada.
Le projet de loi respecte cet engagement et s'ajoute à d'autres mesures, notamment à l'ancien projet de loi , qui offre une protection accrue pour les personnes transgenres dans le Code criminel et dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.
[Traduction]
Je suis heureux de présenter une autre initiative qui protégera davantage les personnes LGBTQ2 contre les pratiques discriminatoires.
La soi-disant thérapie de conversion s'entend des efforts malavisés qui visent soit à transformer une personne bisexuelle, gaie ou lesbienne en une personne hétérosexuelle ou cisgenre, soit à réprimer ou à réduire toute attirance ou tout comportement sexuel non hétérosexuels. La thérapie de conversion peut prendre de nombreuses formes, dont le counseling, la modification du comportement et la thérapie par la parole, et peut être offerte par des professionnels, des responsables religieux ou des laïcs.
[Français]
Cette pratique est une manifestation des mythes et des stéréotypes concernant les personnes LGBTQ2. Plus particulièrement, elle véhicule l'idée que les orientations sexuelles autres qu'hétérosexuelles et que les identités de genre autres que ces genres peuvent et doivent être corrigées. Ce genre de message discriminatoire stigmatise les personnes LGBTQ2 et porte atteinte à leur dignité et à leur droit à l'égalité.
[Traduction]
La thérapie de conversion a également été discréditée et dénoncée par de nombreuses associations professionnelles comme étant dangereuse, en particulier pour les enfants. Par exemple, en 2014, dans son énoncé de principes sur les soins de santé mentale à l'intention de la communauté LGBTQ2, l'Association des psychiatres du Canada indiquait s'opposer à la thérapie de conversion, car cette pratique repose sur le postulat voulant que les personnes LGBTQ2 souffrent d'un trouble mental et qu'elles devraient ou pourraient changer d'orientation sexuelle ou d'identité de genre. Selon la Société canadienne de pédiatrie, cette pratique est manifestement « contraire à l'éthique ». Quant à la Société canadienne de psychologie, elle s'oppose à cette pratique dans son énoncé de politique sur la thérapie de conversion, en précisant que « [l]a recherche scientifique [en] nie l'efficacité ».
[Français]
La position de ces associations professionnelles, ainsi que de nombreuses autres associations canadiennes ou internationales, reflète les nombreuses preuves scientifiques voulant que les personnes soumises à cette pratique doivent composer avec des séquelles comme la détresse, l'anxiété, la haine de soi, la dépression, les idées suicidaires et les tentatives de suicide.
[Traduction]
Certaines études tendent à démontrer que les enfants sont plus susceptibles de souffrir des effets négatifs de ce type de thérapie. Par exemple, outre les résultats négatifs sur le plan de la santé mentale dont j'ai déjà parlé, les recherches démontrent que l'exposition à la conversion de thérapie chez les jeunes adultes entraîne notamment des taux élevés de dépression, un plus faible degré de satisfaction dans la vie, une baisse du soutien social et un statut socioéconomique inférieur.
Que savons-nous au juste au sujet de la conversion de thérapie au Canada?
L'enquête Sexe au présent nous permet d'avoir une meilleure idée des personnes les plus affectées par la thérapie de conversion. Selon les plus récents résultats de cette enquête, en 2019-2020, presque 20 % des répondants, soit une personne sur cinq, avaient été exposés à cette pratique. Nous savons donc qu'il s'agit d'une pratique nuisible qui a cours en ce moment au Canada. Par ailleurs, selon un article récent publié dans la Revue canadienne de psychiatrie et dans lequel on interprétait les résultats de l'enquête Sexe au présent des années précédentes, les personnes transgenres, autochtones, issues d'une minorité raciale ou ayant un faible revenu sont représentées de façon disproportionnée parmi les personnes exposées à la thérapie de conversion. On peut aussi y lire que cette surreprésentation des transgenres peut s'expliquer par le double préjugé dont sont victimes les personnes qui appartiennent à la fois à une minorité sexuelle et de genre.
Ces données à elles seules sont préoccupantes. Donc, en plus d'avoir un effet négatif sur les personnes marginalisées, la thérapie de conversion nuit encore davantage aux personnes les plus marginalisées au sein de ce groupe.
[Français]
Compte tenu de la cruauté inhérente à la thérapie de conversion et des preuves de ses effets non seulement néfastes, mais discriminatoires sur les plus marginalisés d'entre nous, le projet de loi C-6 propose des amendements afin de mettre fin à cette pratique.
D'abord, le projet de loi définirait la thérapie de conversion, aux fins du Code criminel, comme une pratique, un traitement ou un service qui vise à rendre une personne hétérosexuelle ou cisgenre, ou à réprimer ou à réduire toute attirance ou tout comportement sexuel non hétérosexuels.
[Traduction]
Soulignons que la définition de « thérapie de conversion » proposée dans le projet de loi s'entend seulement d'une pratique, d'un traitement ou d'un service qui a un objectif particulier, soit celui de changer un élément fondamental de l'identité d'une personne. Par conséquent, les pratiques, les traitements et les services conçus pour atteindre d'autres buts ne seraient pas couverts par cette définition; c'est le cas, par exemple, des traitements qui visent à aider une personne à concrétiser son choix de faire correspondre son apparence et ses caractéristiques physiques à son identité de genre, et des thérapies qui aident une personne à explorer son identité, qu'on appelle parfois des traitements d'affirmation du genre.
Afin que ce soit très clair, le projet de loi précise que la définition ne vise pas certaines pratiques, certains traitements ou certains services, plus précisément ceux qui se rapportent:
a) à la transition de genre d’une personne;
b) à l’exploration ou à la construction de son identité.
Cet article répond aux préoccupations selon lesquelles la définition risquerait d'être interprétée comme comprenant des pratiques légitimes liées à l'affirmation du genre, qui aident des personnes à explorer leur identité ou à concrétiser leur désir de changer de genre. Il concorde aussi avec le rapport produit en 2009 par le groupe de travail de l'American Psychological Association sur les réponses thérapeutiques appropriées dans le domaine de l'orientation sexuelle, qui décrit des interventions thérapeutiques positives à l'intention des personnes qui sont en détresse, par exemple parce qu'elles ressentent une attirance sexuelle pour les personnes de leur sexe. Le rapport montre, plus précisément, que les interventions légitimes visent à explorer les préjugés et les stéréotypes qui peuvent nuire au moi psychologique d'une personne, à les désamorcer, et à considérer une vaste gamme de choix comme acceptables. Bref, les interventions légitimes axées sur l'affirmation du genre n'ont pas le même but que les traitements conçus pour changer ou supprimer un pan de l'identité d'une personne.
[Français]
Par conséquent, les infractions proposées par le projet de loi C-6 ne visent pas les thérapies reconnues puisque, premièrement, les traitements d'affirmation de genre n'ont pas pour but premier de changer l'orientation sexuelle pour l'hétérosexualité ni de confiner l'identité de genre à uniquement cisgenre, ni de réprimer ou de réduire l'attraction ou le comportement sexuel. Juste au cas où cela n'est toujours pas clair, les mesures législatives proposées, spécifiques à ces types de pratique, ne sont pas incluses dans la définition de « thérapie de conversion ».
Puisque cela semble très important pour le chef de l'opposition, je veux le rassurer explicitement: ce projet de loi n'interdit pas les conversations entre une personne et ses parents, un membre de la famille, un chef spirituel ou n'importe qui au sujet de sa sexualité. La mesure législative dont il est question aujourd'hui n'interdit pas les conversations, mais elle criminalise une pratique odieuse qui n'a pas sa place dans notre pays.
[Traduction]
En s’appuyant sur une définition claire de ce qui constitue une thérapie de conversion, le projet de loi crée également cinq nouvelles infractions au Code criminel: faire suivre une thérapie de conversion à un enfant; agir en vue de faire passer un enfant à l’étranger pour qu’il y suive une thérapie de conversion; faire suivre une thérapie de conversion à une personne contre son gré; bénéficier d’un avantage matériel, notamment pécuniaire, provenant de la prestation de thérapies de conversion; et faire de la publicité en vue d’offrir de la thérapie de conversion.
[Français]
Cette approche protégera tous les mineurs qui sont touchés de façon disproportionnée par les thérapies de conversion, qu'elles soient fournies au Canada ou ailleurs. Personne ne pourrait offrir une thérapie de conversion aux mineurs et personne ne serait autorisé à amener des enfants résidant habituellement au Canada à l'étranger pour suivre une thérapie de conversion.
[Traduction]
Le projet de loi permet également de protéger les personnes susceptibles d’être forcées de suivre une thérapie de conversion. En vertu de celui-ci, personne ne pourra obliger quelqu’un à suivre une telle thérapie.
De plus, le projet de loi protège tous les Canadiens contre la commercialisation des thérapies de conversion. Nul n’aura le droit de tirer profit de cette pratique, qu’elle soit administrée à un enfant ou à un adulte.
Enfin, le projet de loi protège tous les Canadiens contre des messages publics laissant entendre que l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne devrait être modifiée. Nul n’aura le droit de faire de la publicité sur des thérapies de conversion, qu’elles soient gratuites ou non. Les tribunaux auront le droit d’ordonner la saisie ou la confiscation des publicités sur les thérapies de conversion ou leur retrait de l’Internet, comme c’est déjà le cas avec la propagande haineuse.
Je ne saurais trop insister sur le fait que nul n’a le droit de dire à une personne qu’elle ne peut pas vivre comme elle l’entend. Le faire est un acte on ne peut plus répréhensible. L’approche équilibrée qui a été adoptée dans le projet de loi permet de tenir compte des intérêts de toutes les personnes en cause.
Soyons clairs: l’objectif principal du projet de loi est de protéger les droits à l’égalité des personnes marginalisées dans la société canadienne, car nous savons que les thérapies de conversion font du tort non seulement aux individus qui y sont soumis, mais aussi à l’ensemble de la société en laissant entendre qu’un élément fondamental d’une personne, c’est-à-dire son orientation sexuelle ou son identité de genre, est un état temporaire qui peut et qui doit être modifié. Un tel message va à l’encontre des valeurs canadiennes, telles qu’elles sont énoncées dans la Charte, laquelle protège les droits à l’égalité de tous les Canadiens, y compris ceux qui appartiennent aux communautés LGBTQ2. Respecter l’égalité, cela signifie promouvoir une société dans laquelle tous les individus sont reconnus par la loi comme ayant droit au même respect et à la même considération. Il faut commencer par promouvoir une société dans laquelle chacun doit pouvoir assumer son identité en toute sécurité. La loi doit accorder la même protection à tous, y compris à la population LGBTQ2.
[Français]
Promouvoir ces valeurs signifie que la loi doit décourager et dénoncer une pratique qui cause du tort aux personnes LGBTQ2 et propage des mythes et des stéréotypes à leur sujet.
Comme le préambule du projet de loi le stipule, c'est notre devoir de décourager et de dénoncer les thérapies de conversion, compte tenu des préjudices sociaux et individuels causés. C'est notre devoir de protéger la dignité humaine et l'égalité de tous les Canadiens. C'est exactement ce que nous faisons avec le projet de loi C-6.
[Traduction]
Nous reconnaissons que les amendements proposés limitent certains choix, notamment en ce qui concerne les mineurs matures. Nous avons pris cette décision parce que les études montrent que tous les mineurs, quel que soit leur âge, sont particulièrement vulnérables aux dangers des thérapies de conversion. De plus, si les mineurs matures étaient autorisés à donner leur consentement pour suivre une thérapie de conversion, il incomberait alors aux thérapeutes de déterminer si l’enfant a la maturité nécessaire pour donner son consentement. Or, la plupart de ces prétendus thérapeutes ne sont pas des professionnels de la médecine et, par conséquent, ils ne sont pas en mesure de déterminer si un mineur est vraiment capable de prendre des décisions sur son propre traitement. C’est la raison pour laquelle nous avons fixé la borne à 18 ans. C’est la meilleure façon de protéger les plus vulnérables parmi ceux qui sont susceptibles d’être soumis à cette pratique odieuse.
Nous reconnaissons également qu’en criminalisant le fait de tirer profit d’une thérapie de conversion, nous faisons en sorte que les adultes consentants ne pourront avoir accès qu’à des thérapies de conversion gratuites. Il faut comprendre que, pour empêcher cette pratique odieuse, il est nécessaire d’en limiter l’offre, ce qui permet aussi d’éviter les dommages psychologiques que risquent de subir les individus qui sont soumis à ce genre de thérapie, sans parler des torts causés à la dignité et aux droits à l’égalité d’un groupe marginalisé.
En criminalisant la publicité sur les thérapies de conversion, on renforce cet important objectif et on réduit la circulation de messages publics discriminatoires.
J’insiste sur le fait que rien dans le projet de loi ne limite le droit d’une personne d’exprimer son point de vue sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, dans le cadre, par exemple, de conversations privées entre un individu qui a des hésitations sur son orientation sexuelle ou son identité de genre et des conseillers, des membres de la famille, des amis ou des représentants religieux qui veulent l’aider. Dans une société libre et démocratique, il est fondamental de permettre à quiconque d’exprimer son point de vue, qu’il soit partagé ou non par les autres.
[Français]
Maintenant que j'ai décrit les amendements proposés, ce qu'ils empêcheront et ce qu'ils n'empêcheront pas, je voudrais saluer le leadership de l'ancien sénateur Joyal sur cette question. Il a déposé l'ancien projet de loi d'intérêt du public , anciennement le projet de loi , parrainé par le sénateur Cormier lorsque le sénateur Joyal a pris sa retraite.
[Traduction]
Les infractions proposées dans le projet de loi comblent une lacune du droit pénal car, à l’heure actuelle, aucune infraction ne porte directement sur la pratique odieuse des thérapies de conversion. Avec les infractions qui existent déjà, celles que nous créons dans ce projet de loi permettront de muscler la législation face aux torts causés par les thérapies de conversion.
N’oublions pas que ces dispositions pénales s’ajoutent aux dispositifs qui existent déjà au niveau des provinces et des municipalités. Trois provinces, l’Ontario en 2015, la Nouvelle-Écosse en 2018, et l’Île-du-Prince-Édouard en 2019, ont adopté une loi, dans leur sphère de compétence, sur des questions liées à la santé. Cette loi précise que les thérapies de conversion ne sont pas remboursées par l’assurance médicale, et elle interdit aux thérapeutes d’administrer des thérapies de conversion à des mineurs.
D’autres provinces et territoires sont en train de leur emboîter le pas. Cette année, le Yukon et le Québec ont présenté des projets de loi qui visent à mettre en place des réformes similaires. Même si le projet de loi concerne précisément le droit pénal, puisqu’il modifie le Code criminel, il est compatible avec les réglementations provinciales en matière de santé.
[Français]
Certaines municipalités canadiennes, notamment Vancouver, Calgary et Edmonton, ont également interdit aux entreprises de fournir une thérapie de conversion sur le territoire de leur ville. Au Canada, il est clair que tous les ordres de gouvernement ont un rôle à jouer pour mettre fin à cette pratique néfaste. J'ai eu le plaisir de recevoir l'appui de mes collègues provinciaux et territoriaux lorsque nous nous sommes entretenus en janvier relativement à des réformes au droit pénal concernant les thérapies de conversion.
Il n'y a aucune raison que quelqu'un à la Chambre s'oppose à ce projet de loi.
[Traduction]
Nous nous réjouissons que les choses avancent vite au Canada pour lutter contre cette pratique délétère. Sur cette question, le Canada est à l’avant-garde de la communauté internationale. Par exemple, Malte est le seul pays à avoir criminalisé certains aspects de la thérapie de conversion. Il criminalise la thérapie de conversion pour les personnes vulnérables, lesquelles sont définies comme étant les personnes de moins de 16 ans, les personnes souffrant de troubles mentaux ou les personnes considérées par le tribunal comme étant vulnérables. Malte criminalise aussi la publicité sur les thérapies de conversion ainsi que les thérapies de conversion forcées.
[Français]
L'approche que nous proposons va plus loin. Nous proposons de protéger tous les enfants de moins de 18 ans de la thérapie de conversion offerte au Canada ou à l'étranger. Nous proposons également de protéger tous les Canadiens et les Canadiennes des messages négatifs associés à la publicité de cette pratique néfaste et de ceux qui en profitent.
[Traduction]
J’espère que d’autres pays nous emboîteront bientôt le pas. Par exemple, en mars 2018, le Parlement européen a adopté une résolution condamnant les thérapies de conversion et invitant les membres de l’Union européenne à interdire la pratique. Peu de temps après, en juillet 2018, le gouvernement du Royaume-Uni a annoncé qu’il avait l’intention de présenter des propositions visant à interdire les thérapies de conversion. Je crois comprendre que le travail à cet égard se poursuit.
Bref, on reconnaît de plus en plus, à l’échelle internationale, que cette pratique est délétère, et que l’adoption de dispositions pénales est une façon appropriée de la circonscrire.
:
Madame la Présidente, je suis heureux d'être le premier député de notre caucus à intervenir à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi , Loi modifiant les dispositions du Code criminel relatives à la thérapie de conversion. Ce projet de loi était anciennement le projet de loi , avant que la COVID-19 ne vienne bouleverser notre façon de fonctionner à la Chambre et fasse retarder de quelques mois les travaux sur cette mesure législative.
J'ai l'honneur de prendre la parole à la Chambre des communes aujourd'hui pour formuler des commentaires au sujet du projet de loi, parfois en ajoutant une touche personnelle, car nous partageons tous l'objectif d'éliminer la pratique nuisible qu'est la thérapie de conversion dans l'ensemble du Canada.
J'aimerais commencer sur une note personnelle en formulant une observation au sujet des débats qui se sont déroulés à la Chambre. Au cours des dernières semaines, de nombreux députés ont pris la parole pour poser des questions et émettre des commentaires au sujet du projet de loi , Loi sur l'aide médicale à mourir. J'ai surtout suivi le débat à la télévision, à partir de mon bureau, et je voudrais féliciter les députés du ton qu'ils ont adopté et de la courtoisie dont ils ont fait preuve dans leurs interventions. La période des questions et le débat dans son ensemble se sont déroulés dans une grande civilité et ont été très constructifs. Ce sont les types d'échanges qui sont dignes de la Chambre, et c'est le genre d'attitude que nous devrions adopter pour le projet de loi dont nous sommes saisis.
Je tiens à faire écho au ministre et à saluer moi aussi le travail de nos partenaires provinciaux qui se sont attaqués à ce dossier avant même qu'il soit inscrit au menu législatif ici, à Ottawa. Trois provinces ont d'ailleurs adopté une loi sur le sujet: l'Ontario et le Manitoba en 2015 et la Nouvelle-Écosse en 2018.
Je ne suis sans doute pas complètement impartial, mais comme je viens moi-même de l'Ontario, je suis particulièrement fier de ce qui a été fait à Queen's Park, qui est l'assemblée législative de la province. Je crois comprendre que l'Ontario a été la première province du Canada à interdire les thérapies de conversion et qu'en plus, le texte a été adopté à l'unanimité.
Voilà qui montre que les assemblées législatives et les parlementaires sont capables de mettre la partisanerie de côté quand il s'agit d'un sujet d'intérêt commun. Je crois que nous pouvons en faire autant ici, à Ottawa. Nous souscrivons déjà tous à l'objectif avoué du projet de loi, soit de dénoncer les thérapies de conversion pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire une agression terrible, inhumaine et dangereuse contre les membres de la communauté LGBTQ qui doit être éradiquée du Canada.
Avant d'aller plus loin, je tiens à saluer les nombreux organismes qui s'emploient depuis des années à conscientiser la population à ce problème. Tout au long du débat et des discussions, gardons à l'esprit les histoires de ceux qui ont subi une forme ou une autre de thérapie de conversion ainsi que les cicatrices qu'ils en gardent.
Nombreux sont ceux qui ont eu le courage de raconter leur histoire pour contribuer à éduquer la population et à attirer l'attention sur cette problématique. Malheureusement, certains n'ont pas pu le faire, n'étant plus parmi nous aujourd'hui. La torture, la souffrance et la douleur qu'ils ont endurées étaient trop profondes. Beaucoup de gens ont souffert en silence. Beaucoup trop se sont enlevé la vie en raison des séquelles des thérapies de conversion.
Ici, à la Chambre des communes, il est régulièrement question de rendre notre Parlement plus diversifié, à l'image du Canada, en misant sur l'inclusion des divers genres, ethnicités, professions, orientations sexuelles et parcours de vie. Dans le cadre des débats sur ce projet de loi, c'est justement la raison pour laquelle nous visons cet objectif: élargir nos horizons sur la diversité de la population canadienne et faire connaître les histoires qui nous feront avancer sur la bonne voie. Aujourd'hui, j'aimerais prendre un bref instant pour ajouter ma contribution.
Comme je l'ai dit plusieurs fois au cours de la dernière année, je n'ai jamais autant parlé de mon orientation sexuelle ces 12 derniers mois que durant les 33 dernières années. Je suis homosexuel, je suis fier de l'être, j'habite une région rurale de l'Est ontarien, et je sais que mon parcours de vie a une grande valeur. J'aimerais, si vous me le permettez, vous parler un peu de moi et de ma sortie du placard.
C'était en 2017, dans ma ville natale de Winchester, en Ontario, soit une petite ville avec beaucoup d'églises et dont la population est un mélange de gens qui y ont vécu toute leur vie et d'autres qui travaillent à Ottawa et qui ne sont que de passage. Il n'était pas aussi courant que dans le centre-ville d'Ottawa, de Toronto ou d'ailleurs que des personnes révèlent leur homosexualité. J'étais maire à l'époque. Ma famille et mes amis savaient que j'étais homosexuel, et j'avais décidé qu'il était important que mes concitoyens sachent qui j'étais, un homme fier d'être gai, afin que je puisse vivre ma vie ouvertement, heureusement et librement.
J'ai écrit une lettre un dimanche matin vers neuf heures. Je l'ai publiée sur Facebook et la nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre. Je ne m'attendais pas à cette réaction. Le lendemain, elle a fait la une de la chaîne d'information.
J'espérais plutôt que les gens y soient indifférents, qu'ils passent à autre chose sans prêter attention à ce que je venais d'annoncer, mais dans le bon sens, en démontrant tout le chemin parcouru. C'est tout le contraire qui est arrivé. J'ai reçu beaucoup d'amour, de compassion et de soutien de la part de personnes de tous les milieux. Plus les gens racontent leur histoire, plus je constate que la situation est différente pour chacun de nous.
Quand je suis allé me coucher ce soir-là, j'étais très heureux et dans un état d'euphorie. Malheureusement, cela n'a pas duré longtemps. En effet, quelques jours plus tard, dans une localité juste au sud de ma ville, un jeune homosexuel, qui avait à peine quelques années de moins que moi, s'est suicidé. Le sentiment d'euphorie que j'avais ressenti quelques jours auparavant avait été remplacé par un sentiment de douleur intense quand j'ai appris les diverses difficultés qu'avait éprouvées ce jeune homme. Comme si ce n'était pas suffisant, j'ai entendu une autre histoire qui m'a brisé le cœur.
L'un de mes amis m'avait informé qu'il avait un ami qui avait épousé une femme, mais qui était en réalité homosexuel et avait du mal à accepter son orientation sexuelle. Il avait peur de révéler son homosexualité à sa famille, à ses amis et aux membres de sa communauté, et il a donc caché son secret. Il a continué de souffrir en silence jusqu'à ce qu'il n'en puisse plus.
Je ne raconte pas l'histoire de ces hommes parce qu'ils ont été soumis à des thérapies de conversion, mais bien pour montrer les défis que les membres de minorités sexuelles doivent encore relever. Même si ma nouvelle a été accueillie positivement par ma famille, mes amis et les membres de ma communauté, force est de reconnaître que tous n'ont pas la même chance que moi. Nous devons faire preuve de compassion, de sollicitude et de compréhension envers les personnes qui arrivent enfin à accepter leur orientation ou identité sexuelle.
Soumettre un enfant à une thérapie de conversion, ou à toute forme de thérapie visant à le changer, serait désastreux pour lui. Ce qu'il aurait à subir serait fondamentalement inacceptable et dangereux. Il est inacceptable de soumettre un enfant à ce type de thérapie pour le transformer en quelqu'un qu'il n'est pas. Il s'agit d'une pratique dangereuse à laquelle on doit mettre fin.
Je veux parler du premier discours prononcé par notre nouveau à la Chambre, quand il a eu l'occasion de prendre la parole sur ce projet de loi, qui venait d'être présenté par le . Je dois dire que je suis vraiment fier de son intervention, qui témoigne de sa compassion et de sa compréhension de la question. Il a parlé de son service militaire. Il a dit qu'une partie fondamentale de sa tâche de militaire a été de défendre les droits de tous les Canadiens, partout où il a été déployé. Il s'est acquitté de cette tâche avec fierté comme militaire et comme député, quand le projet de loi a été présenté. Le projet de loi du Nouveau Parti démocratique sur l'identité du genre en a été un excellent exemple.
Je voudrais revenir sur une chose que notre a dite ce jour-là et le citer pour que ses propos soient de nouveau consignés. Voici ce qu'il a dit:
Ce jour-là, je me suis levé pour qu'on enregistre mon vote en faveur des droits de la personne. En tant que parlementaire, je suis ici pour protéger les droits de tous les Canadiens, dont ceux des membres de la communauté LGBTQ, et pour bâtir un pays inclusif et prospère pour tous. En tant que chef du Parti conservateur, je m'engage à poursuivre ce travail.
Les conservateurs sont d'avis que les thérapies de conversion sont inacceptables et qu'elles devraient être interdites. Aucun Canadien ne devrait être contraint de changer qui il est, qu'on parle d'orientation sexuelle ou d'identité de genre. Nous savons que trop de Canadiens ont été blessés par cette pratique et, en tant que parlementaires, nous avons le devoir de protéger les plus vulnérables de la société. Cela comprend les membres de la communauté LGBTQ, qui ont été la cible de pratiques dégradantes et déshumanisantes visant à changer leur orientation sexuelle contre leur gré. Tout le monde a le droit d'être traité avec dignité et respect.
Le projet de loi est libellé comme suit:
Le [projet de loi] modifie le Code criminel, notamment pour créer les infractions suivantes:
a) faire suivre une thérapie de conversion à une personne contre son gré;
b) faire suivre une thérapie de conversion à un enfant;
c) agir en vue de faire passer un enfant à l’étranger pour qu’il y suive une thérapie de conversion;
d) faire de la publicité en vue d’offrir de la thérapie de conversion;
e) bénéficier d’un avantage matériel, notamment pécuniaire, provenant de la prestation de thérapies de conversion.
J'aimerais parler brièvement des détails du projet de loi et d'un aspect dont j'ai eu l'occasion de parler avec nombre de députés de tous les partis, ainsi qu'avec les gens de ma circonscription, Stormont—Dundas—South Glengarry, puisqu'ils ont des questions et des observations au sujet du projet de loi. Je vais citer un passage précis du projet de loi. Il définit la thérapie de conversion comme une pratique qui vise « à réprimer ou à réduire toute attirance ou tout comportement sexuel non hétérosexuels ».
En me fondant sur ma propre vie et ma propre expérience, j'aimerais parler de la difficulté qu'on a parfois à établir une définition de la thérapie de conversion qui puisse prendre en considération la façon dont cette pratique a évolué au fil des années. Bien des gens voient cela de la même manière que la thérapie aux électrochocs, une méthode horrible qui, je le crois et je l'espère, a été pratiquement éliminée au pays. Je ne suis pas en train de dire que cette pratique a complètement disparu, mais la thérapie de conversion a évolué au fil des années, passant d'une méthode frappante comme la thérapie aux électrochocs à une autre qui s'apparente davantage à une forme de répression. C'est une sorte de séance de thérapie visant à réprimer des sentiments. Ainsi, on laisse entendre qu'il est acceptable d'être gai ou d'avoir une identité sexuelle différente, mais qu'il ne faut pas agir en conséquence. Or, le fait de réprimer ces pensées est tout aussi préjudiciable que toute autre pratique.
Puisqu'on aborde cette question, force est de reconnaître que d'après les dernières tendances, la promotion et l'offre entourant la thérapie de conversion ne correspondent pas vraiment à ce qu'on voyait il y a des décennies. Aujourd'hui, on la présente davantage comme une véritable thérapie alors qu'en fait ce n'est absolument pas le cas.
Le débat sur cette mesure législative avance et lorsque nous arriverons, espérons-le, à l'étape de la deuxième lecture et du renvoi au comité pour un examen plus approfondi, l'équipe des conservateurs, dont je fais partie, proposera un amendement raisonnable qui renforcera encore davantage l'appui qu'elle suscite. J'estime qu'il s'agit d'un amendement juste, raisonnable et bipartisan. Le gouvernement devrait y souscrire. À mon avis, on peut simplement ajouter les mots qui figurent dans le communiqué que le gouvernement a publié plus tôt cette année pour confirmer ce que le a dit précédemment.
Je ne suis pas juriste, mais j'estime que la déclaration du pourrait figurer dans le projet de loi pour dissiper toute ambiguïté. Il a déclaré que les conversations privées ne peuvent faire l'objet de poursuites criminelles. Je vais citer le ministre parce que je le crois. Ces propos s'inscrivent dans le droit fil de l'esprit du projet de loi. Par conséquent, j'estime qu'il serait avantageux d'inscrire dans le projet de loi ce que le ministre a dit dans le communiqué. Il a déclaré:
Ces nouvelles infractions ne criminaliseraient pas les conversations privées dans lesquelles des opinions personnelles sur l’orientation sexuelle ou les sentiments sexuels ou l’identité de genre sont exprimées, comme lorsque des enseignants, des conseillers scolaires, des conseillers pastoraux, des chefs religieux, des médecins, des professionnels de la santé mentale, des amis ou des membres de la famille fournissent du soutien aux personnes qui se posent des questions.
À mon avis, c'est ce que vise le projet de loi. Il serait raisonnable et approprié, comme le ministre l'a affirmé, de collaborer de bonne foi, ce qu'il a fait avec moi et les membres de mon parti, pour aller de l'avant et inclure cette modification.
Je suis heureux de constater que le Parlement s'attaque à la question de l'interdiction des thérapies de conversion. Plus nous pourrons mettre un terme tôt à cette pratique, plus nous pourrons sauver de vies et plus de jeunes membres de la communauté LGBTQ pourront retrouver une meilleure qualité de vie et aspirer à un avenir prometteur.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, je parle davantage de mon orientation sexuelle et de la fierté que j'éprouve en tant qu'homosexuel, mais je parle beaucoup moins de ma foi. Plusieurs Canadiens partout au pays laissent leur foi guider leurs décisions et leurs valeurs.
Sur la question de mes croyances, je dirais ceci: ma foi et les valeurs que mon Église m'a inculquées ne m'ont pas conduit à me détourner de cette mesure législative, bien au contraire. Elles m'ont appris à l'appuyer, à défendre mes voisins et amis vulnérables, à faire preuve d'empathie et de compassion, à lutter pour ceux qui ne peuvent le faire seuls. Voilà ce que ma foi m'a enseigné et voilà où elle m'a guidé. Elle m'amène à appuyer cette mesure législative, que j'espère voir adoptée grâce à nos efforts de collaboration aux étapes de l'étude en comité, de la troisième lecture et, finalement, de l'étude au Sénat.
Je ne conclurai pas mes observations d'aujourd'hui en parlant de la mesure législative comme telle. Je tiens plutôt à m'adresser aux enfants gais et trans. C'est correct d'être gai. C'est correct d'être trans. Ils ont le droit de vivre leur vie comme ils l'entendent, en étant eux-mêmes. Les Canadiens savent qu'il est inacceptable de forcer quiconque à subir une thérapie de conversion et que nous devons protéger les personnes vulnérables.
Je suis heureux d'avoir pu prendre la parole aujourd'hui afin d'appuyer l'élimination des thérapies de conversion. Je suis heureux que nous puissions travailler tous ensemble aux étapes de la deuxième lecture, de l'étude en comité et de l'étude au Sénat pour faire aboutir ce dossier. Nous devons agir pour les enfants dont j'ai parlé plus tôt, mais aussi pour ceux qui ne sont hélas plus des nôtres. Nous devons nous inspirer de leurs histoires et de leurs difficultés pour améliorer les choses. Poursuivons nos efforts et prenons des mesures concrètes en leur nom.
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Madame la Présidente, je suis heureuse de me retrouver ici aujourd'hui afin de parler d'un important projet de loi, soit . Ce projet de loi devrait, selon moi, être adopté rapidement pour obtenir tout le respect que les LGBTQ2 méritent.
Le projet de loi C-6 propose d'amender une série d'articles du Code criminel dans le but de créer des infractions, toutes relatives à la pratique des thérapies de conversion. Il est identique au projet de loi qui avait été déposé en mars 2020, avant la fermeture du Parlement. J'ose espérer qu'il sera adopté par tous les parlementaires de la Chambre en cette 43e législature.
Historiquement, le Québec a été un chef de file en matière de protection des droits, attendu que la Charte des droits et libertés de la personne du Québec reconnaît, depuis 1977, l'orientation sexuelle comme un motif prohibé de discrimination et que l'Assemblée nationale du Québec a institué l'union civile, en 2002, sous le gouvernement péquiste de M. Landry, permettant, de ce fait, l'union des couples du même sexe. L'égalité entre les citoyennes et les citoyens est une valeur québécoise fondamentale et un droit inaliénable. Les pratiques qui nient l'existence dans le respect de son identité profonde doivent être dénoncées.
Or qu'est-ce qu'une thérapie de conversion? C'est une pratique, un traitement ou un service qui vise à rendre une personne hétérosexuelle ou cisgenre ou, encore, à réprimer ou à réduire toute attirance ou tout comportement sexuel non hétérosexuel. C'est épouvantable.
Je nous invite à nous mettre à la place d'une personne vulnérable pour mesurer toute l'ampleur de la violence que cela peut porter à son identité et à la détresse que cela peut amener. Il m'est inconcevable qu'il existe, encore aujourd'hui, ce type de traitement dans le but de plaire à une non-acceptation parentale ou d'une quelconque organisation.
Au Québec, le respect de l'identité de genre et de l'orientation sexuelle est un tout et constitue une valeur à laquelle la pratique des thérapies de conversion fait violence.
Qui sommes-nous pour juger de ce qui est bon pour une personne, jusqu'à la convaincre qu'elle devrait être différente dans notre société si inclusive et respectueuse des droits de la personne? Les spécialistes le disent: les thérapies de conversion relèvent de la pseudoscience. Non seulement elles sont dangereuses et dégradantes, mais de nombreuses études ont démontré qu'elles étaient inefficaces, évidemment.
Selon l'Organisation mondiale de la santé, ces pratiques constituent une grave menace pour la santé et les droits des personnes touchées. Aussi, selon la Société canadienne de psychologie, la conversion ou la thérapie réparatrice peut avoir des conséquences négatives comme la détresse, l'anxiété, la dépression, une image négative de soi, un sentiment d'échec personnel, et même de la difficulté à maintenir des relations et un dysfonctionnement sexuel. C'est très grave. Malheureusement, cela se fait ici, dans le silence. J'ai été moi-même estomaquée d'apprendre que ces pratiques existent encore en 2020. J'ai honte.
Rapportons-nous au courageux Gabriel Nadeau, ancien membre d'une communauté protestante pentecôtiste, qui s'est ouvert publiquement sur ses trois thérapies de conversion qu'il a tristement vécues. Je vais me permettre, en tout respect, de décrire ce qu'il a vécu. Gabriel décrivait le déroulement de ses séances ainsi:
Quatre personnes me tenaient physiquement pendant que le « prophète » me criait dans les oreilles pendant une demi-heure en demandant au démon de sortir, et qu'on me faisait boire de « l'huile d'olive sainte ».
Il ajoute:
Dans le groupe [avec qui] j'étais, il y avait la croyance que l'homosexualité était un esprit maléfique, un démon. Moi, j'étais au courant de ça, j'y croyais moi-même. Il y avait cette pratique-là de faire des exorcismes.
Voici ce qu'il a dit au sujet des conséquences de ce type de thérapie sur lui:
Je pense que ça a été la phase la plus difficile pour moi, même au-delà de l'exorcisme. C'est, en fait, le rejet de moi-même qui s'en est suivi, de complètement être dégoûté par moi-même et vouloir changer absolument et être désespéré chaque jour [...]. C'était vraiment épouvantable.
J'en ai des frissons. C'est terrifiant. En tant que mère, cela me brise le cœur. Il faut que cela change, et cela doit changer le plus rapidement possible. Heureusement, les sociétés québécoises et canadiennes, aussi distinctes soient-elles, ont beaucoup en commun, notamment sur le plan des valeurs. Sur un certain nombre de sujets, elles s'accordent et adoptent des politiques concordantes qui vont dans le sens du progrès sur le plan des droits.
À titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de vivre-ensemble, je veux souligner l'initiative du gouvernement du Québec en matière de protection des droits de la personne. Nous accueillons favorablement le projet de loi no 70, présenté par le ministre québécois de la Justice. Ce projet de loi vise à mettre fin aux thérapies de conversion.
En terminant, voici ce que Gabriel disait lors d'une entrevue donnée en juillet 2019:
J'ai commencé à m'accepter et j'ai découvert que ce n'était pas tout le temps nécessaire de se conformer à ce que les autres veulent ou pensent, que ce soit pour ma sexualité ou pour le reste. C'est extraordinaire, je ne retournerais jamais à cette prison religieuse.
Je veux dire à Gabriel et à tous les gens qui nous regardent actuellement que, peu importe leur identité de genre ou leur orientation sexuelle, ils sont vus, ils sont aimés et ils sont beaux.
Je suis heureuse de dire que, depuis toujours, le Bloc québécois est résolument engagé dans la protection et la promotion des droits et des libertés des citoyennes et des citoyens du Québec. Je suis très fière d'appartenir à une formation politique qui partage mes valeurs et qui a toujours été une alliée dans le combat contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou le genre.
Pour toutes ces raisons, le Bloc québécois juge appropriées les différentes modifications prévues au Code criminel par le projet de loi . Le Bloc québécois appuiera le projet de loi.
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Madame la Présidente, j'ai l'honneur de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi au nom du Bloc québécois ainsi que des électeurs et des électrices de Berthier—Maskinongé.
J'annonce sans grande surprise que les membres du Bloc québécois sont favorables au projet de loi, ne serait-ce que par respect pour les membres de la communauté LGBTQ+.
D'entrée de jeu, j'ai des sentiments mitigés. Je devrais me réjouir de voir le Parlement adopter un tel projet de loi et enfin se consacrer à cette question. Mes sentiments mitigés découlent du fait que nous sommes en 2020 et qu'il est insensé que cela n'ait pas déjà été fait. En début de discours, je lance donc un appel à mes 337 collègues pour que nous adoptions rapidement ce projet de loi, comme l'a si bien mentionné ma collègue de .
Nous avons le devoir de protéger et de promouvoir les droits et les libertés. Nous avons le devoir de protéger l'égalité de tous les citoyens et de toutes les citoyennes. Nous devons les protéger de toute forme de discrimination, particulièrement de discrimination fondée sur leur orientation sexuelle.
Nous devons dénoncer ces pratiques qui nient l'existence même de la personne et qui ne respectent pas son identité profonde. Le Québec a sa Charte des droits et libertés de la personne, laquelle interdit toute discrimination relative à l'orientation sexuelle depuis 1977. Le Québec permet l'union civile de deux conjoints de même sexe depuis 2002. Nous sommes fiers de cela, mais il nous reste un pas à franchir: il faut respecter l'identité et l'orientation sexuelle des gens.
Si mes collègues à la Chambre prennent la peine de se documenter sur la question et de lire des témoignages, dont quelques-uns ont été cités ce matin, ils se rendront compte que toutes ces thérapies sont une forme épouvantable de violence. Mes collègues savent déjà que le Bloc québécois dénonce toutes les formes de violence, sans exception.
Les thérapies de conversion en sont une. Elles reposent sur une pseudoscience dangereuse, dégradante et inefficace, promue par des groupes — je dirais même des groupuscules — minoritaires sur la foi de croyances quelconques.
Je suis convaincu que mes collègues accepteront le principe de base selon lequel nous devons respecter les croyances, mais que le respect de ces croyances doit aller de pair avec le respect et la liberté des individus. Il y a donc des limites à ne pas franchir.
Je salue le geste que la Chambre des communes s'apprête à poser. Je salue également le geste du gouvernement du Québec, qui s'apprête à légiférer dans le même sens. Je me réjouis que le gouvernement canadien reconnaisse par l'entremise de son projet de loi qu'en démocratie, il est justifié d'affirmer des valeurs collectives et d'encadrer de façon juridique les pratiques issues de croyances contraires à ces valeurs.
Ce projet de loi vise à empêcher de faire subir des thérapies à quelqu'un contre son gré. Nous voulons empêcher de faire subir ce genre de thérapie à des enfants et de prendre des mesures pour faire sortir les enfants du pays pour leur faire subir ce genre de thérapie ailleurs. Nous voulons interdire la publicité reliée à ces pratiques et interdire à quiconque d'en tirer un avantage financier ou autre.
Mes collègues auront remarqué que deux des points qui précèdent font référence aux enfants. Nous voulons protéger les enfants et éviter qu'ils ne subissent cette torture. C'est le devoir de toute société qui se dit civilisée.
Avant d'être député à la Chambre des communes, j'étais professeur au secondaire. À ce titre, je suis très sensibilisé à la nécessité d'un climat d'acceptation, d'écoute et d'entraide qui permet le développement des personnes. Pendant 25 ans, j'ai été un témoin privilégié d'une période de grands chamboulements, l'adolescence, dont nous savons qu'elle n'est pas toujours facile. Certains pensent que c'est un défi impossible à relever, mais, pour ma part, j'ai toujours été stimulé par cette difficulté.
J'ai une pensée particulière pour tous les adolescents qui se questionnent aujourd'hui sur leur identité profonde et leur orientation sexuelle. Nous aussi — chacun de nous — nous sommes questionnés à ce sujet quand nous avions leur âge. Ces adolescents se questionnent dans la peur, le doute et le désir d'être « normaux ». Ils veulent être acceptés des autres et être populaires. Pour ce qui est d'être accepté des autres, il faut aussi s'imaginer le traumatisme de ne pas être accepté par ses propres parents et d'en subir des sévices épouvantables.
L'adolescence est une période extrêmement importante en ce qui a trait à l'estime de soi. Il s'agit d'une période propice à la dépression pendant laquelle les gens subissent des pressions sociales énormes et ont beaucoup de frustrations. Au cours de cette période, la plupart des individus auront, à un moment donné, le sentiment d'être seuls au monde et incompris de tous.
Tout le monde va se remettre en question et avoir, à un moment donné, le goût de contester. Les parents qui pensent que leurs adolescents ont parfois mauvais caractère devraient se dire qu'il s'agit en fait d'un signe positif en matière de santé mentale. Ces jeunes sont normaux et remettent les choses en question. Cela est positif.
Comme on le sait, il s'agit d'une période difficile; on n'a qu'à imaginer le traumatisme qu'entraîne une thérapie de conversion. Cette dernière laisse assurément des traces: jugement des parents, risque de dépression ou de suicide, entre autres. Si cette pseudo-science de transformation a un simili succès ou une apparence de succès, imaginons la vie amorphe de la personne qui ne vit pas sa vraie identité et qui n'exploite pas son plein potentiel.
Je l'affirme devant la Chambre: à ce compte-là, ce n'est pas seulement l'individu qui y perd, c'est toute la société. Il faut vivre et laisser vivre.
Je terminerai en parlant de mon expérience en tant qu'enseignant. Au cours des 25 dernières années, j'ai eu le bonheur de voir l'évolution des mentalités et l'évolution des jugements. J'ai eu la chance de voir des couples homosexuels se former, sans jugement massif de la part des autres. C'était magnifique à voir. Aujourd'hui, je nous demande de faire un pas de plus. Assurons la liberté des individus.
Plus tôt, on a cité le jeune Gabriel Nadeau. Il a raconté que quatre personnes le tenaient pendant qu'un prophète lui criait dans les oreilles et qu'on lui faisait boire de l'huile d'olive sainte. D'autres témoignages font état de personnages qui se disent habités par l'Esprit Saint et qui, au nom de Jésus, vont libérer la personne du méchant démon. Cela n'a pas de bon sens.
Notre société civile doit protéger la jeunesse, tout en respectant les croyances religieuses générales. C'est notre devoir. Comment ne pas être choqués et outrés par de tels témoignages? C'est un non-sens total. Nous avons le devoir de ne pas laisser nos enfants en pâturage à de tels charlatans. C'est notre responsabilité. Aujourd'hui, j'en appelle à la dignité des élus.
Notre responsabilité est de protéger les jeunes, peu importe leur orientation. Soyons dignes et adoptons massivement ce projet de loi. Je rappelle que, selon les statistiques, plus de 47 000 hommes auraient été soumis à ce genre de thérapie. Plusieurs organismes proposent ce genre de thérapie en échange d'une somme pouvant aller jusqu'à 12 000 $.
L'Organisation mondiale de la Santé reconnaît ces pratiques comme étant une menace pour la santé. La Société canadienne de psychologie a identifié les conséquences négatives très graves qui en découlent. Je les ai nommées plus tôt: détresse, anxiété, dépression et j'en passe. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a décrit ces pratiques comme étant abusives. À peu près toutes les organisations mondiales s'entendent pour dire que ces pratiques sont inacceptables. Le rapport de l'Alliance Arc-en-ciel de Québec est éloquent à ce sujet et fait le décompte de plusieurs témoignages dans lesquels il est question de séquestration, de voies de fait, d'abus physique et émotionnel, de parents qui ont échoué à protéger leur enfant contre tout sévice corporel et mental en laissant l'enfant à des tierces personnes qui allaient le torturer. En fait, c'est de cela que nous parlons. N'ayons pas peur de nommer les choses: il s'agit de torture.
Bien sûr, la société québécoise et la société canadienne sont des sociétés distinctes. Cela fait, la plupart du temps, partie de notre discours. Toutefois, elles ont aussi le privilège de partager plusieurs valeurs communes: la protection des droits individuels, la protection de l'intégrité des individus et la protection de la diversité.
Aujourd'hui, je suis heureux de voir que le Parlement québécois et le Parlement canadien vont dans le même sens, pour une fois. Cela fait du bien.
Disons au monde entier qu'être ce qu'on est, qu'on soit gai, lesbienne, transgenre ou toute autre dénomination, c'est correct et c'est normal. Ce n'est pas un enjeu dont on devrait débattre dans un Parlement. Toute personne...
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Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi . Je suis toujours aussi impatient de m'adresser aux députés à la Chambre plutôt qu'au moyen d'une caméra de la grosseur d'un trou d'épingle. Je suis conscient toutefois que les inconvénients ou défis auxquels nous faisons face sont bien peu de chose si on les compare à l'impact que la COVID a sur les Canadiens ordinaires qui ont perdu un être cher ou leur moyen de subsistance, ou qui doivent travailler aux premières lignes de la pandémie. Ces répercussions ont frappé plus durement les plus marginalisés d'entre nous, notamment dans ma communauté.
J'interviens aujourd'hui en tant que porte-parole du NPD en matière d'orientation sexuelle et d'identité ou expression de genre, mais aussi en tant qu'homme gai qui vit ouvertement son homosexualité depuis près de trois décennies. Lorsqu'il est question de sujets qui touchent ma communauté, comme la thérapie de conversion, je me prends à souhaiter que la Chambre soit plus représentative. Malheureusement, plusieurs des personnes qui devraient se faire entendre sont absentes. À la Chambre, il y a seulement quatre députés ouvertement gais, aucune députée ouvertement lesbienne, aucun député transgenre et aucun député non binaire. Pour être représentative, la Chambre devrait compter environ 30 députés de ma communauté.
Certains pays font mieux que le Canada. D'ailleurs, la Nouvelle-Zélande vient tout juste d'élire le Parlement considéré comme étant le plus gai au monde, la communauté homosexuelle y comptant pour 10 % de l'assemblée législative. Même s'il est merveilleux de considérer qu'il s'agit d'une étape importante, je suggérerais un titre de manchette plus juste, du genre: « La Nouvelle-Zélande élit enfin un Parlement où la communauté des personnes ayant diverses orientations ou identités sexuelles ainsi que diverses manières de les exprimer jouit presque d'une représentation juste ». Ensuite, il faudrait préciser dans l'article que ces 10 % ne comprennent aucun député transgenre ou non binaire, en dépit du fait que la Nouvelle-Zélande est le premier pays au monde à avoir élu un député transgenre, soit la députée Georgina Beyer, qui a été en fonction de 1999 à 2007.
Je tiens également à saluer aujourd'hui la Colombie-Britannique, qui vient de réélire six députés provinciaux de la communauté des personnes ayant diverses orientations ou identités sexuelles ainsi que diverses manières de les exprimer. Tout porte à croire que le nombre demeurera six lorsque les choses se tasseront, ce qui représente encore environ 7 % de l'assemblée législative, une représentation égale à celle que l'on observe au Royaume-Uni. En revanche, cette communauté ne représente qu'un maigre 1 % à la Chambre des communes du Canada. C'est un message à retenir pour la communauté des personnes ayant diverses orientations ou identités sexuelles ainsi que diverses manières de les exprimer de même que pour les partis en ce qui concerne la nomination de candidats aux prochaines élections. En tant que personne constamment en mode de recrutement, comme le veut le stéréotype gai, je sais que cela demeure un défi.
Pourquoi y a-t-il un long préambule sur la représentation? Je suis fermement convaincu que les parlements où la diversité est grande adoptent les meilleures lois. Non seulement ils sont plus susceptibles de compter dans leurs rangs plus de députés qui ont une expérience concrète des sujets à l’étude, ce qui est vrai, mais surtout, ils ont dans les collectivités qu’ils représentent et dans tout le Canada les réseaux nécessaires pour tirer parti de ces expériences et mettre à contribution ces voix diverses dans les questions dont nous sommes saisis. Par ailleurs, il est important aussi de se rappeler que, comme l’a dit un jour un plaisantin, « Si on n’est pas à la table, on a bien plus de chances de se retrouver au menu ». De toute évidence, nous avons encore à faire à la Chambre pour que des voix diverses soient entendues en ce qui concerne la thérapie de conversion.
Pour ce qui est du projet de loi , qui vise à mettre fin aux thérapies de conversion au Canada, je tiens à dire tout d’abord trois choses, dont deux au moins devraient être évidentes pour tous, mais ne le sont manifestement pas.
La première est que nul dans la communauté des personnes ayant diverses orientations ou identités sexuelles ainsi que diverses manières de les exprimer n’a besoin de se faire soigner en raison de son orientation sexuelle, de son identité ou de son expression de genre. Il est déjà difficile à nombre d’entre nous de vivre une vie authentique, fidèle à ce que nous sommes, à la maison, au travail et partout ailleurs dans notre vie quotidienne, à cause de la prévalence de l’homophobie et de la transphobie. L’idée même que nous puissions ou que nous devrions nous faire soigner, ce qui est le concept fondamental de la thérapie de conversion, renforce encore l’homophobie et la transphobie. L’idée qu’il serait possible de changer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne est particulièrement problématique pour ceux et celles qui, à l’aube de leur vie, s’interrogent encore sur leur identité véritable. Pour les jeunes allosexuels, l’idée qu’ils doivent se faire soigner peut certainement contribuer à une haine de soi et à une peur de rejet par la famille et les amis, toutes deux très préjudiciables pour la santé mentale.
La deuxième chose qui devrait être évidente, et qui l’est selon moi pour la plupart des gens, c’est que certaines orientations sexuelles et certaines identités et expressions de genre ne sont pas meilleures que d’autres. Il n’est assurément pas approprié que des gouvernements préfèrent des orientations sexuelles et des identités de genre à d’autres. Il n’est pas approprié non plus de désavantager ou de ne pas protéger certains de nos citoyens à cause de leur identité de genre, de leur expression de genre ou de leur identité sexuelle. Nous méritons tous tout autant la même protection en vertu de la loi, et tel est le fond des questions soulevées par le projet de loi .
Enfin, la troisième chose que je tiens à souligner au début de ce débat semble moins bien comprise, même s’il s’agit de toute évidence d’un fait établi. Il est impossible de changer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne et, par conséquent, la thérapie de conversion est dangereuse pour les personnes qui y sont soumises.
Quant aux résultats de ces pratiques, qu’on parle de thérapie de conversion, de thérapie réparatrice, de thérapie par aversion ou de thérapie d’affirmation du genre, ces noms importent peu: les résultats sont toujours les mêmes. Il n’y a aucun changement et celles et ceux qui subissent ces thérapies en subissent aussi les conséquences, notamment un sentiment de honte et de culpabilité, de la dépression, un isolement social et souvent l’automutilation, voire une mort par suicide.
Heureusement, je n’ai jamais subi de thérapie de conversion, même si certains membres de ma famille étaient loin de m’accepter comme je suis. Je reconnais à présent que, paradoxalement, me faire tabasser pour m’obliger à renoncer à être gai aura sans doute été moins préjudiciable, au fond, à long terme que subir une thérapie de conversion. Parce que la violence patente m’a permis de me concentrer sur la colère et l’hostilité qu’elle provoquait pour la diriger sur l’extérieur et pas contre moi-même.
À vrai dire, il est difficile d’imaginer que les formes de torture infligées dans le passé, au nom de la thérapie, l’aient vraiment été. Bien trop de Canadiens ont été soumis à des pratiques barbares, comme les électrochocs, la castration chimique et même l’exorcisme, comme nous l’avons entendu aujourd’hui. Il m’est tout aussi difficile d’accepter l’idée que l’on pratique encore aujourd’hui au Canada la thérapie de conversion, qui n’est pas moins préjudiciable dans ses résultats, même si on y recourt à des moyens parfois moins brutaux.
Si au Canada comme à l’étranger, les professionnels de la santé condamnent la thérapie de conversion, c’est parce que cette pratique pernicieuse est dangereuse pour les personnes qui y sont soumises. Il y a plus de huit ans, le 17 mai 2012, le jour du 22e anniversaire du retrait de l’homosexualité de la liste des troubles mentaux reconnus, l’Organisation mondiale de la santé a publié une déclaration où elle qualifiait la thérapie de conversion de « menace dangereuse pour la santé et le bien-être, voire la vie, des personnes concernées ».
Il y a huit ans, l’Organisation mondiale de la santé demandait aux États d’interdire la thérapie de conversion et de prévoir des sanctions à l’échelle nationale pour les contrevenants. Aucun organisme de professionnels de la santé au Canada n’approuve ou n’autorise actuellement la pratique de la thérapie de conversion. Aucun régime de santé provincial ne l’autorise non plus dans le cadre du système de santé publique.
La thérapie de conversion n’est plus censée avoir lieu dans le système de santé officiel de ce pays, mais nous savons qu’elle se pratique encore dans l’ombre. Non seulement elle se pratique au Canada, mais des Canadiens sont encore envoyés aux États-Unis pour subir une thérapie de conversion. Un rapport sur la thérapie de conversion au Canada a été publié en février dernier. Les auteurs ont interrogé plus de 7 200 hommes homosexuels, bisexuels et bispirituels. Plus de 20 % déclaraient avoir subi une forme ou une autre de thérapie de conversion. Dans le cas des Canadiens transgenres et non binaires, on approche des 50 %.
C’est une chose de savoir par des études officielles que la thérapie de conversion existe toujours, c’en est une tout autre d’entendre de courageux survivants raconter les souffrances qu’ils ont endurées à cause de cette pratique. J’encourage tous les députés à écouter attentivement ces histoires.
Permettez-moi de dire encore une fois, en ce qui concerne le projet de loi représenté récemment, que nous le soutiendrons à l'étape de la deuxième lecture, comme nous l'avions appuyé en mars dernier. L'objectif du projet de loi peut se résumer comme suit: il criminalise le fait de soumettre des mineurs à des thérapies de conversion et d'emmener des mineurs à l'étranger pour les y soumettre à des thérapies de conversion. Il criminalise le fait de soumettre des adultes à des thérapies de conversion contre leur volonté et il criminalise ce que nous appelons le commerce des thérapies de conversion.
Le principal point fort du projet de loi , c'est qu'il met l'accent sur les jeunes, car ce sont les jeunes qui sont presque toujours visés par les thérapies de conversion et ce sont eux qui souffrent le plus des tentatives qui sont faites contre eux pour les forcer à devenir ce qu'ils ne sont pas.
Son deuxième point fort, c'est son ensemble de mesures détaillées qui visent à interdire la pratique et la promotion des thérapies de conversion pour des avantages pécuniaires. Elles contribueraient à mettre effectivement un terme à ladite pratique en rendant illégal le fait de faire payer les thérapies de conversion ou d'en tirer profit ou d'en faire de la publicité, dans le cas des mineurs et des adultes. Le projet de loi contient des mesures fortes qui pourraient déboucher sur des injonctions dans le but de faire retirer des plateformes le matériel incriminé.
Arrêtons-nous un moment pour tordre le cou à l'argument le plus fallacieux qui soit concernant ce projet de loi. C'est l'argument du « Qu'en est-il de » et, en particulier, du « Qu'en est-il des droits des autres dont les libertés religieuses pourraient être violées par ce projet de loi? » En ce qui me concerne, c'est toujours un signal d'alarme lorsque j'entends une argumentation qui commence par « Qu'en est-il de ». On a rarement recours à l'argument du « Qu'en est-il de » pour promouvoir le dialogue; on y a plutôt recours, quand on est adepte du « Qu'en est-il de », pour faire diversion et sortir plus facilement gagnant de la discussion. Ce que je veux dire, c'est que les arguments qui commencent par « Qu'en est-il de » sont le plus souvent des manœuvres de diversion plutôt que des tentatives pour aborder les vrais problèmes qui se posent à nous.
On dit clairement dans l'article 5 du projet de loi que la définition de « thérapie de conversion » du projet de loi ne se rapporte pas « à l'exploration ou à la construction de son identité ». Cela veut dire qu'il n'y a rien dans ce projet de loi qui empêche des parents d'avoir une conversation avec leurs enfants à propos de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui empêche les chefs spirituels d'aborder ces sujets avec leurs fidèles. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui interdit à qui que ce soit d'entretenir des points de vue intolérants et dépassés au sujet de l'orientation sexuelle ou de l'identité ou expression de genre. Ce qu'il empêche, par contre, c'est de transformer ces croyances et ces idées en pratiques haineuses et néfastes déguisées en « thérapie ». La question de savoir en quoi ce projet de loi convient à un vote libre est une question que je pose encore à mes collègues conservateurs.
Pour revenir à la position du NPD sur ce projet de loi, comme je l'ai déjà dit, nous allons l'appuyer à la deuxième lecture. Cela dit, nous estimons qu'il pourrait et devrait être amélioré. Quelles sont les améliorations qui devraient être apportées à notre avis?
D'abord, nous aimerions que le gouvernement accède à la demande de la communauté des personnes ayant diverses orientations ou identités sexuelles ainsi que diverses manières de les exprimer, qui veut que les thérapies de conversion soient complètement interdites, et pour les adultes et pour les enfants.
Le a déjà fait valoir que son objectif est de faire adopter un projet de loi qui soit à l'épreuve d'une contestation fondée sur la Charte. Sa solution a donc été de présenter le projet de loi , qui porte principalement sur les adultes non consentants, les personnes mineures, ainsi que le « commerce » de la thérapie de conversion. Toutefois, le projet de loi met de côté la question de ceux que l'on désigne comme des « adultes consentants ».
Il s'agit d'un argument valable, dans la mesure où je pense que le projet de loi survivrait à une contestation en vertu de la Charte, car les dispositions relatives à la thérapie de conversion qui y sont incluses mèneront à une interdiction effective de cette pratique pour les adultes consentants, du moins en ce qui concerne les services payants. Cependant, l'implantation d'une interdiction totale survivrait également à une contestation fondée sur la Charte. J'aimerais beaucoup consulter les avis juridiques que le gouvernement a obtenus et qui affirment qu'il n'y survivrait pas.
Bref, il existe un argument tout aussi convaincant fondé sur la Charte selon lequel il s'agit d'une limite raisonnable aux droits fondamentaux que d'interdire à quiconque de donner son consentement à une pratique qui porte manifestement préjudice aux personnes qui y sont soumises. Sans trop s'enfoncer dans les méandres du système de justice, il existe une jurisprudence parallèle qui a maintenu les restrictions sur des phénomènes comme les clubs de combat, ce qui m'amène à conclure qu'une interdiction totale serait également conforme à la Charte.
L'autre élément du projet de loi qui pourrait être amélioré, et c'est peut-être l'élément le plus important, est le langage utilisé pour décrire la thérapie de conversion. En fait, le texte du projet de loi est tout à fait acceptable en qui concerne la pratique traditionnelle de la thérapie de conversion axée sur l'orientation sexuelle. De plus, je suis heureux que le projet de loi emploie du vocabulaire visant à garantir qu'il soit interdit de faire suivre une thérapie de conversion aux Canadiens transgenres et non binaires.
On embellit souvent ce type de traitement en lui donnant des noms comme la thérapie en vue de l'affirmation du genre ou le traitement de transition, ou d'autres noms positifs du genre. Toutefois, c'est là où le langage dans le projet de loi pose problème. Le comité devra examiner cette disposition attentivement pour veiller à ce qu'elle soit aussi complète que possible et qu'elle respecte les pratiques actuelles, et que ces soi-disant thérapies dont le but est de convertir les Canadiens transgenres et non binaires soient interdites.
Je voudrais maintenant parler brièvement du révisionnisme historique qui s'est glissé dans la discussion sur le projet de loi. Je prends un instant pour rappeler à la Chambre comment nous en sommes arrivés à l'étape de la deuxième lecture d'un projet de loi qui cherche à interdire la thérapie de conversion. Bien sûr, les représentants élus y sont pour quelque chose, mais nous n'avons pas toujours joui de l'appui de toutes les personnes qui sont maintenant en faveur d'un projet de loi de la sorte.
Pendant la dernière législature, l'ancienne députée néo-démocrate de Saskatoon-Ouest, Sheri Benson, était la seule députée qui se présentait ouvertement comme lesbienne. Elle a parrainé la pétition e-1833, qui demandait au gouvernement d'interdire les thérapies de conversion. Près de 20 000 personnes ont signé cette pétition. Quand elle a été présentée au gouvernement libéral, en mars 2019, celui-ci a refusé d'agir parce que ces thérapies étaient de compétence provinciale.
Toujours en 2019, dans son message soulignant la célébration de la Fierté, le chef du NPD et député de a demandé que ces thérapies soient interdites, conformément à la plateforme du NPD. Les libéraux ont encore refusé d'agir. Puis, le 29 septembre 2019, il y a un peu plus d'un an, au milieu de la campagne électorale, le a soudainement changé d'idée et promis une loi fédérale qui interdirait les thérapies de conversion. La lettre de mandat qu'il a adressée au en décembre 2019 lui donnait notamment comme directive de présenter une mesure législative afin d'interdire ces thérapies. Je remercie le ministre de donner suite à ces instructions et je me réjouis que le gouvernement ait changé d'idée. Je crois qu'il désire sincèrement faire adopter par le Parlement un projet de loi qui mettra fin à cette pratique.
Je tiens toutefois à souligner qu'aucune avancée relative aux droits des personnes ayant diverses orientations sexuelles et identités de genre n'aurait été possible sans les braves membres de notre communauté qui se battent pour faire avancer les choses. On peut penser par exemple au rôle crucial qu'ont joué les survivants de thérapies de conversion qui ont eu le courage de faire connaître leur histoire. Sans eux, nous aurions peut-être continué de croire que la condamnation officielle des thérapies de conversion par les professionnels avait suffi et que ces pratiques étaient chose du passé.
Je ne peux pas nommer tous ceux qui ont pris la parole, mais permettez-moi de citer rapidement deux personnes qui m’ont aidé à mieux comprendre que le caractère néfaste de cette pratique et les mécanismes par lesquels elle se perpétue. Je remercie Erika Muse et Matt Ashcroft de s’être exprimés avec audace et en public.
Il y a des jours où je me revois lorsque j'étais plus jeune et où j'ai peine à croire que je prends la parole à la Chambre des communes en tant qu’homme ouvertement homosexuel. Je m'étonne encore plus de pouvoir le faire à titre de porte-parole officiel de mon parti sur la question de l’orientation sexuelle, de l’identité sexuelle et de l’expression de cette identité. Cependant, il y a aussi des jours où je suis découragé par le long chemin qu’il nous reste à parcourir pour parvenir à une égalité et une acceptation totales, surtout pour les Canadiens transsexuels et non binaires. Il y a aussi des jours où j’espère que nous verrons bientôt plus de députés de ma communauté, y compris des représentants transsexuels et non binaires. Nous avons besoin de ces voix diverses à la Chambre, et les jeunes Canadiens ont besoin de voir ces modèles.
Il est temps d’agir et, en fait, il est plus que temps de mettre fin à cette pratique néfaste. Aussi bienvenues que soient les nouvelles lois interdisant cette pratique, elles ne suffiront pas à elles seules à réparer les dommages causés par la thérapie de conversion et à combattre la haine qui sous-tend ces pratiques. Le gouvernement devra financer le renforcement des capacités au sein de la communauté des personnes de diverses orientations sexuelles, identités sexuelles ou expressions de cette identité afin qu'elle puisse résoudre les difficultés auxquelles elle se heurte. Malheureusement, pour certains membres de notre communauté, il est beaucoup trop tard et ils ne pourront jamais revenir à la vie.
J’attends avec impatience l’adoption rapide du projet de loi afin que nous puissions poursuivre l’important travail de guérison. J’attends avec impatience le jour où nous pourrons dire que toutes les formes de thérapie de conversion ont été interdites au Canada et ne sont plus pratiquées. J’attends avec impatience le jour où nous pourrons célébrer pleinement toute la diversité sexuelle dans notre pays.