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NDDN Rapport du Comité

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Services de santé et de transition des Forces armées canadiennes

Introduction

La santé et le bien-être des membres des Forces armées canadiennes (FAC) sont essentiels à l’état de préparation générale de la force, c’est-à-dire à la réalisation de ses missions tout en menant des opérations simultanées, comme le prévoit la politique de défense du Canada, Protection, Sécurité, Engagement. Le Groupe des Services de santé des Forces canadiennes (SSFC), qui est chargé de fournir des services de santé aux membres des FAC, est confronté à des défis similaires à ceux que connaissent les systèmes de santé provinciaux et territoriaux (ci-après, les systèmes de santé civils) dans l’ensemble du Canada. Bon nombre de ces défis, y compris les problèmes de ressources humaines et de financement, ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19 à un moment où, grâce à l’opération Laser, les FAC ont fait preuve d’un engagement inébranlable à l’égard de la santé et de la sécurité des Canadiens. Les membres des FAC et les familles des militaires méritent le même niveau de dévouement et de soutien pour assurer leur bien-être tout au long de leur service, de leur transition vers la vie civile et de leur vie en tant que vétéran.

Le 6 octobre 2022, le Comité permanent de la défense de la Chambre des communes (le Comité) a adopté une motion visant à examiner les services de santé et de transition au sein des FAC. La motion disait notamment ceci :

Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur le système de santé militaire et la prestation de services de santé dans le cadre du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes, ainsi que sur les défis associés à la libération médicale et à la transition à la vie civile, en mettant particulièrement l’accent sur la santé mentale, les traumatismes liés au stress opérationnel et la disponibilité des soins de santé pour les membres des familles des Forces armées canadiennes […]

Le Comité a tenu quatre réunions dans le cadre de cette étude entre le 28 avril et le 2 juin 2023, au cours desquelles 21 témoins ont comparu et cinq mémoires ont été reçus. Il a également adopté une motion visant à examiner les témoignages reçus par le Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes au cours de son étude sur les expériences vécues par les vétéranes[1]. Le présent rapport résume les commentaires formulés par les témoins au sujet de l’état actuel des services de soins de santé et des services de transition offerts aux membres des FAC. La première partie porte sur les services de soins de santé et de bien-être offerts par les FAC, donne un aperçu de ces services et examine les défis en matière de ressources, les soins spécialisés et les services d’aumônerie. La deuxième partie contient des observations relatives aux services de santé mentale dans les FAC, et la troisième partie décrit les services de soins de santé offerts aux femmes par les FAC pendant leur service et au moment de leur transition vers la vie civile. La quatrième partie met en évidence les problèmes liés à l’accès des familles de militaires aux services de santé, et la cinquième partie examine les services offerts lorsque les membres des FAC passent à la vie civile. La dernière partie du rapport contient les réflexions et les recommandations du Comité.

Services de soins de santé et de bien-être offerts par les Forces armées canadiennes

En offrant des mesures de soutien et des services variés aux membres des FAC tout au long de leur carrière militaire, qu’ils soient en bonne santé, malades ou blessés, déployés dans le cadre d’une opération ou en transition vers la vie civile, les SSFC jouent un rôle essentiel en contribuant à faire en sorte que les FAC soient en mesure de remplir leurs missions. Des témoins ont fait part au Comité de leurs observations sur les services de soins de santé offerts par les FAC. Ils ont notamment présenté une vue d’ensemble de ces services, identifié les défis en matière de ressources, discuté des difficultés liées à la prestation de soins spécialisés et abordé le rôle joué par les services d’aumônerie dans la prestation d’un soutien spirituel aux membres des FAC.

Aperçu

Caractérisant les SSFC d’« élément clé de nos missions militaires dans le monde entier » grâce à la prestation de soins préhospitaliers, primaires, chirurgicaux et spécialisés, la lieutenante-générale Lise Bourgon, commandante par intérim du Commandement du personnel militaire et chef par intérim du personnel militaire, Forces armées canadiennes, a affirmé qu’assurer la santé et le bien-être à long terme des militaires et leur fournir des soins de santé de qualité et de haut niveau était la priorité des FAC. Elle a précisé que « [p]our ce faire, le Groupe des Services de santé des Forces canadiennes, le SSFC, est responsable des soins et du bien-être d’environ 64 000 membres de la Force régulière ainsi que des membres qui servent à temps plein dans la Force de réserve ou qui participent à des opérations ». Selon elle, les SSFC fournissent des services de santé dans 37 cliniques de soins primaires réparties à travers le pays qui sont généralement dirigées par un médecin de famille, et qui peuvent aussi être dotées d’équipes multidisciplinaires composées de travailleurs sociaux, d’infirmières en santé mentale, de psychologues, de psychiatres, de conseillers en toxicomanie et d’aumôniers en santé mentale. Le major-général Marc Bilodeau, médecin général des FAC, a déclaré que les soins offerts en « physiothérapie et en santé mentale » sont les « deux principaux domaines d’intérêt du point de vue des soins de santé ».

La sénatrice Rebecca Patterson, ancienne commandante des SSFC qui a comparu à titre personnel, a établi une distinction entre le système de soins de santé des FAC et les systèmes de soins de santé civils auxquels ont accès la plupart des Canadiens. La sénatrice a expliqué que les membres des FAC ne reçoivent pas de carte de santé provinciale et qu’ils reçoivent plutôt « des services de santé par l’entremise des établissements de santé militaires et non d’un prestataire local dans leur collectivité ». Elle a ajouté que « le système militaire fournit un éventail de services de santé professionnelle au Canada. Cela comprend les soins médicaux, dentaires, pharmaceutiques, mentaux et physiques au Canada et dans le monde entier. » Elle a également précisé que le système est « responsable de l’achat de matériels et d’équipements médicaux et dentaires, de la recherche et du développement, de la logistique et du recrutement, de la rétention et de la formation des ressources humaines en santé militaire ». Elle a de plus souligné la nécessité d’investir dans l’infrastructure des soins de santé des FAC.

Défis liés aux ressources

Des témoins ont attiré l’attention sur certains problèmes structurels liés au système de soins de santé des FAC qui ont mis à rude épreuve les ressources financières et humaines. Selon la sénatrice Patterson, lorsqu’un membre des FAC a besoin de soins de santé qui ne sont pas fournis par les FAC, comme l’imagerie par résonance magnétique (IRM), il est dirigé vers un fournisseur du système de soins de santé civil ou une clinique privée. Le major-général Bilodeau a déclaré que certaines cliniques de soins primaires des FAC disposent de « technologies diagnostiques, comme la radiographie et les analyses de laboratoires, mais pas systématiquement. Nous devons aller à l’externe pour tout ce qui va au-delà de cela, donc pour les soins spécialisés et les soins hospitaliers, parce que nous n’en avons pas dans [le système de soins de santé de] l’armée. »

Des accords de sous-traitance pour les besoins qui ne peuvent être satisfaits par le système de soins de santé des FAC sont généralement négociés avec les provinces et les territoires. Selon la sénatrice Patterson, l’achat de services de soins de santé par les FAC se fait souvent « à des tarifs exagérés, tout comme[pour] les non-Canadiens », et ces taux affectent les dépenses de défense, car le financement du système de soins de santé des FAC provient « d’un budget fixe » au sein du ministère de la Défense nationale (MDN). Elle a ajouté que, si le financement de base alloué à ce système est insuffisant, les fonds nécessaires doivent être obtenus par le biais d’une réaffectation de fonds provenant d’autres secteurs du MDN.

En outre, la sénatrice Patterson a fait référence à une évaluation interne du système de soins de santé des FAC réalisée en 2018, qui a révélé que les dépenses liées à ce système ont augmenté à un taux de 0,7 % entre 2010–2011 et 2016–2017, ce qui est inférieur au taux national de 3,3 % par an. Selon elle, il y a une « diminution du pouvoir d’achat au sein des FAC par rapport aux soins de santé qu’elles sont censées fournir ». Pour résoudre le problème des FAC qui achètent des services pour leurs membres à des « taux exagérés », elle a encouragé le ministre de la Défense nationale, ainsi que les responsables de la santé et des affaires intergouvernementales concernés, à « [travailler] avec les gouvernements provinciaux pour négocier des tarifs plus avantageux, plus proches de ceux pratiqués dans les systèmes de soins de santé provinciaux, voire les mêmes ».

La sénatrice Patterson a également souligné les difficultés rencontrées dans deux domaines : assurer la capacité d’intensification et garantir le maintien des exigences en matière de compétences cliniques. En ce qui concerne la capacité d’intensification, elle a fait remarquer que « le personnel des services de santé des FAC est composé de marins, de soldats et d’aviateurs parfaitement entraînés » et que « l’une des façons dont la composante des ressources humaines des services de santé des Forces armées canadiennes est structurée est d’avoir une combinaison d’équipes militaires et civiles, ce qui signifie qu’il a toujours été prévu que l’équipe dorsale soit constituée de prestataires de soins civils, permettant ainsi au personnel en uniforme de maintenir ses compétences cliniques ». En outre, la sénatrice Patterson a fait remarquer que le personnel des services de santé des FAC est « régulièrement affect[é] dans le monde entier et [qu’]il est extrêmement difficile de maintenir les compétences cliniques requises ».

En ce qui concerne les services de soins de santé offerts aux membres des FAC déployés à l’étranger, la lieutenante-générale Bourgon a affirmé que les types de services offerts dépendent de « l’emplacement de nos troupes […] Dans certaines régions, nous avons nos propres cliniques, mais dans d’autres, nous n’avons que notre appui médical intégral. » Elle a ajouté que, dans certaines situations, les FAC peuvent avoir accès à la fois au soutien médical de leurs alliés et aux services médicaux nationaux du pays étranger. Le brigadier-général Scott Malcolm, commandant de la Division des services de santé des FAC, a précisé qu’au Koweït, en Pologne et dans la région indo-pacifique, les FAC s’appuient sur un soutien médical intégral, mais qu’un renvoi vers un autre fournisseur peut avoir lieu si un service requis n’est pas immédiatement disponible. Il a mentionné que, pour le personnel des FAC qui a vécu un événement traumatisant ou stressant, « la première évaluation se fait toujours auprès de notre technicien médical ou du prochain fournisseur disponible […] S’il n’y a personne dans la région immédiate pour le soutenir, on peut l’aiguiller vers des soins civils locaux ou, au besoin, le rapatrier au Canada. Si le militaire se trouve sur le théâtre des opérations, on le transfère vers l’un de nos emplacements, comme Geilenkirchen, où nous avons une clinique. »

La sénatrice Patterson a mentionné les obstacles réglementaires que certains membres du personnel des services de santé des FAC rencontrent lorsque leur poste est transféré d’une province ou d’un territoire à un autre. Elle a évoqué le système de santé fédéral des États-Unis, où il y a « des permis d’exercer et des fournisseurs de soins réglementés par le gouvernement fédéral à l’échelle nationale » et a avancé que les FAC « ont la possibilité de prendre l’initiative d’un régime d’approbation réglementaire fédéral ou d’une plus grande reconnaissance interprovinciale de l’autorisation d’exercer ».

Des témoins ont abordé les défis permanents des FAC en matière de recrutement et de maintien de l’effectif en ce qui concerne les services de santé. La lieutenante-générale Bourgon a mentionné que les FAC manquent d’environ 8 000 membres de la Force régulière et a expliqué que « de [son] point de vue de cheffe du personnel militaire, le recrutement, le maintien en poste et la modernisation de la formation sont mes principales priorités. Tout cela est important, et le volet médical a autant souffert […] ».

La sénatrice Patterson a déclaré que la pénurie de ressources humaines dans le secteur de la santé est un « problème pancanadien » et a souligné que les FAC sont en concurrence directe « avec d’autres secteurs et avec le public canadien, non seulement pour trouver des personnes qui souhaitent porter l’uniforme, mais pour trouver des fonctionnaires ou même des sous-traitants [pour fournir des soins de santé] ». En ce qui concerne l’embauche par les FAC de prestataires de soins de santé sous contrat, elle a reconnu qu’il y avait eu des « plaintes » au sujet de cette pratique, mais a maintenu que « si vous ne pouvez pas employer un prestataire de soins de santé en passant par la fonction publique parce que les salaires sont trop bas, il n’y a pas d’autre choix, car se priver de soins signifie que vous n’avez pas le personnel prêt à être déployé ». La sénatrice Patterson a ajouté que « [l]e salaire et la qualité de vie sont souvent plus élevés à l’extérieur de l’armée pour les prestataires de soins de santé » et a vivement recommandé de revoir « toutes les professions de la fonction publique qui fournissent des soins cliniques directs, pour faire en sorte que les salaires et les avantages sociaux soient compétitifs ».

Le major-général Bilodeau a expliqué que les FAC utilisent une série d’outils de recrutement pour embaucher du personnel dans 19 professions de la santé, et a noté qu’ « [i]l y a des gens qui travaillent à temps plein pour nous dans différentes régions du pays où l’objectif principal est de recruter des professionnels de la santé en notre nom ». Se référant à la stratégie globale en matière de santé et de bien-être des FAC, qui prévoit notamment l’embauche de 30 ergothérapeutes et de 48 infirmières gestionnaires de cas supplémentaires, il a précisé que les FAC avaient « procédé à une première vague d’embauche » pour ces postes, et a ajouté que « [c]ette année, nous recevons une deuxième vague de financement qui nous permettra de terminer le processus d’embauche ».

Selon le major-général Bilodeau, l’embauche du personnel des services de santé des FAC, y compris des ergothérapeutes et des infirmières gestionnaires de cas, est en cours. Il a mentionné que beaucoup de gens « quittent [les FAC] après leur service obligatoire parce qu’ils ont décidé de faire autre chose de leur vie » et a soutenu que « [n]ous devons faire mieux sur ce plan-là et nous efforcer d’entretenir leur enthousiasme pendant qu’ils sont en service ».

Soins spécialisés

Des témoins ont abordé la question de l’accès des membres des FAC à des spécialistes du domaine de la santé. Le major-général Bilodeau a reconnu qu’un recours accru à la télémédecine présentait certains avantages, notamment en permettant un meilleur accès à ces spécialistes. Selon lui, la télémédecine permet aux FAC de fournir des services de santé aux membres déployés à l’étranger ou dans des endroits où il n’y a pas de clinique à proximité, et elle facilite les rendez-vous de suivi virtuels si les membres sont déployés à d’autres endroits. Cependant, il a également noté ceci :

Le défi repose sur le fait que notre système de télémédecine actuel n’est pas pleinement intégré à notre système électronique de gestion des dossiers médicaux. En effet, cette situation entraîne des problèmes, notamment en matière de coordination et de logistique. Ces problèmes vont être résolus au cours des prochaines années, quand nos différents systèmes vont être modernisés.

Dre Ayla Azad, chef de la direction de l’Association chiropratique canadienne, a souligné que les lésions musculo-squelettiques constituent un risque professionnel important pour les membres des FAC et sont « à l’origine de 42 % des [libérations] pour raisons médicales ». Elle a affirmé que « [l]es militaires actifs sont physiquement très sollicités et souffrent de troubles musculosquelettiques, tels que des douleurs dorsales et cervicales, deux fois plus souvent que la population générale […] Ces affections constituent un problème majeur pour les services de transition, car 59 % des anciens combattants des Forces armées canadiennes qui déclarent avoir eu du mal à s’adapter à la vie civile souffraient de douleurs chroniques. »

Exprimant son inquiétude quant au fait que les membres des FAC doivent être référés pour recevoir des soins chiropratiques pour lesquels une demande de remboursement peut être faite, ce qui peut entraîner des retards dans la prestation des soins nécessaires, Dre Azad a souligné qu’aucune réglementation provinciale ou nationale en matière de santé n’exige une ordonnance « avant d’avoir accès à des soins chiropratiques », et a soutenu qu’une telle approche ne constitue pas « une pratique exemplaire dans le secteur de l’assurance-maladie ». Dre Azad a qualifié cette exigence d’obtenir une ordonnance d’« obstacle » à l’accès aux soins. Elle a ajouté ceci :

Des recherches bien documentées montrent que les soins centrés sur le patient incluent le choix du fournisseur de soins. Cela donne de meilleurs résultats. Certaines personnes réagissent bien à la physiothérapie. Certaines personnes réagissent bien à la chiropratique. Certaines personnes peuvent avoir besoin des deux. Il semble irrespectueux de ne pas laisser le même choix à nos braves membres des [FAC] et de les obliger à se faire référer.

Dans un mémoire présenté au Comité, l’Association chiropratique canadienne a expliqué que, pour que les membres des FAC aient accès à des soins chiropratiques pouvant faire l’objet d’une demande de remboursement, ils doivent d’abord être orientés par un médecin vers des soins dispensés à l’extérieur de la base militaire. Pour recevoir ces soins, ils doivent donc :

[…] prendre rendez-vous avec un médecin qui examinera leurs antécédents et procédera à une évaluation et à un diagnostic et, en général, offrira en premier lieu un programme de soins à la base. Si le problème perdure, les patients peuvent être aiguillés vers un médecin chiropraticien qui répètera le processus d’évaluation. Ce processus prend beaucoup de temps et retarde l’accès aux soins, ce qui a pour résultat que les affections aiguës se complexifient. Les membres [de l’Association chiropratique canadienne] entendent de nombreuses histoires [de membres des FAC] qui préfèrent payer de leur poche plutôt que de se lancer dans le long processus d’obtention d’une recommandation[2].

Dans ce contexte, l’Association chiropratique canadienne a encouragé le gouvernement du Canada à adopter deux mesures : réduire la probabilité de développer des troubles chroniques de la musculature en veillant à ce que les membres des FAC aient un accès rapide aux soins chiropratiques et supprimer l’obligation d’obtenir une ordonnance pour que les soins chiropratiques soient couverts par l’assurance[3].

Dre Azad a décrit les 10 visites chiropratiques offertes par Croix Bleue Medavie comme étant « insuffisantes » pour les membres des FAC. Selon elle, ce nombre de visites « peut suffire pour une blessure aiguë, mais nous savons que les troubles musculosquelettiques, comme la lombalgie, peuvent réapparaître et qu’elles ont tendance à devenir chroniques. Les anciens combattants, par exemple, ont droit à 20 visites. » Dans le même ordre d’idées, le mémoire de l’Association chiropratique canadienne propose d’augmenter le nombre de visites chiropratiques offertes aux membres des FAC[4].

Soutenant que « [l]a douleur chronique et les problèmes de santé mentale sont directement liés », Dre Azad a indiqué que « [s]oixante-cinq pour cent des personnes qui souffrent de douleurs chroniques auront aussi un problème de santé mentale ». Elle a souligné qu’en raison de la prévalence des affections musculosquelettiques parmi les membres des FAC, « [les soins chiropratiques peuvent] contribuer à améliorer les résultats en matière de santé et la qualité de vie ». Dre Azad a mentionné qu’aux États-Unis, les services chiropratiques sont disponibles sur les bases militaires américaines dans le cadre de « modèles de soins interdisciplinaires intégrés » qui fournissent des traitements et des soins de santé mentale et physique aux membres de l’armée américaine. Le mémoire de l’Association chiropratique canadienne proposait que de tels modèles intégrés soient développés pour les membres des FAC, et invitait les FAC à « [o]ptimiser les soins en équipe et la collaboration interprofessionnelle pour traiter les affections musculosquelettiques[5] ».

Dre Azad a également soulevé l’importance des soins préventifs, suggérant qu’« il serait logique » que la massothérapie, en plus des soins chiropratiques, soit couverte par les assurances.

Services d’aumônerie

Des témoins ont reconnu que le bien-être spirituel est un élément important de la santé et du bien-être général, et ont discuté du rôle du Service de l’aumônerie royale canadienne dans le soutien aux membres des FAC. Selon Andrew P.W. Bennett, directeur du Cardus, l’environnement de travail unique des FAC peut exposer les membres des FAC à des maladies et à des blessures physiques et mentales, et ils doivent avoir « accès à des soins de grande qualité pour leur santé spirituelle ». Il a ajouté que « [l]es services pastoraux sont également indispensables pour arriver à une guérison spirituelle dont les effets sont bénéfiques sur la personne dans son ensemble ».

La Lieutenante-générale Bourgon a souligné que les FAC doivent respecter toutes les religions et que, sous la direction de l’aumônier général, chaque aumônier doit « d’abord respecter les valeurs des Forces armées canadiennes en servant chaque membre sans distinction et en étant inclusif. Si un aumônier ne peut pas respecter les valeurs des Forces armées canadiennes parce que sa foi l’en empêche, c’est que nous ne sommes pas une organisation faite pour [lui]. »

Selon M. Bennett, les aumôniers doivent « exercer leur liberté de religion » et « [c]ette liberté ne doit pas être entravée par l’obligation d’adhérer à une mouvance laïque dominante ou de se conformer à une idéologie politique de n’importe quelle allégeance ». Dans ce contexte, il a déclaré que la ministre de la Défense nationale devrait « rejeter fermement et publiquement les articles discriminatoires de la recommandation 6 “ Redéfinir le rôle de l’aumônerie ” du rapport final présenté le 25 avril 2022 par le Groupe consultatif de la ministre de la Défense nationale sur le racisme systémique et la discrimination[6] ». En outre, M. Bennett a préconisé la création d’un comité permanent de chefs religieux qui relèverait à la fois du ministre de la Défense nationale et de l’aumônier général.

Les FAC veulent « un groupe d’aumôniers beaucoup plus inclusif », et la lieutenante-générale Bourgon a observé à cet égard que le nombre d’aumôniers et la foi non traditionnelle des aumôniers ont augmenté, et a fait remarquer que les FAC ont maintenant « un aumônier musulman, un aumônier autochtone et un aumônier humaniste ». Elle a souligné que les aumôniers ont une formation spécialisée et, dans de nombreux cas, une formation en travail social qui leur permet d’apporter un soutien « dans l’ensemble du spectre [des besoins spirituels] ».

Services de santé mentale

Les troubles mentaux existent chez les militaires du monde entier. Au Canada, les membres des FAC et les vétérans ont tendance à présenter une prévalence plus élevée de troubles mentaux que la population générale, ce qui comprend les cas de suicide[7]. Plusieurs études publiées entre 2014 et 2021 indiquent que les membres des FAC et les vétérans courent un risque plus élevé de décès par suicide que la population générale au Canada[8]. Des témoins ont informé le Comité des effets des conditions de santé mentale sur les membres des FAC et les vétérans, des défis liés à l’accès aux soutiens et aux services de santé mentale et de certaines mesures existantes et souhaitées pour traiter les conditions de santé mentale parmi les membres des FAC et les vétérans.

Matthew McDaniel, directeur clinique national du Réseau de transition des vétérans, a attiré l’attention sur les récents progrès réalisés dans la reconnaissance des problèmes de santé mentale rencontrés par certains segments de la population canadienne, y compris les membres des FAC. Il a exprimé l’espoir que, dans le cadre d’un changement culturel au sein des FAC et de la société dans son ensemble, des discussions aient lieu sur la nécessité de s’attaquer aux problèmes de santé mentale qui touchent les membres des FAC. En outre, Linna Tam-Seto, professeure adjointe à l’Université McMaster et chercheuse à l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, a affirmé que la sensibilisation accrue aux problèmes de santé mentale rencontrés par les membres des FAC et la diminution de la stigmatisation à cet égard ont contribué à l’augmentation du nombre de signalements de ces conditions.

Selon Duane Schippers, ombud adjoint des vétérans, les vétéranes sont plus susceptibles d’être diagnostiquées avec un trouble de stress post-traumatique (TSPT) que les femmes de la population générale du Canada. Il a également noté que les femmes des FAC qui quittent le service militaire en tant que militaires du rang « sont trois fois plus susceptibles de mourir par suicide » que celles qui quittent le service militaire en tant qu’officiers. En outre, M. Schipers a estimé que les hommes vétérans courent un risque de suicide de 40 % plus élevé que les hommes de la population générale du Canada.

Bien que la stigmatisation associée à l’accès aux services de santé mentale ait diminué au cours des 20 dernières années, le major-général Bilodeau a soutenu que certains membres des FAC continuent de s’inquiéter des répercussions sur leur carrière s’ils ont recours à de tels services. Il a proposé d’aborder cette question en s’assurant que le leadership des FAC continue de jouer un rôle important dans les efforts visant à réduire les préjugés concernant les services de santé mentale offerts par les FAC et à normaliser l’accès à ces services.

La Dre Catherine Phillips, psychiatre et professeure adjointe en clinique au Département de psychiatrie de la Faculté de médecine et de dentisterie de l’Université de l’Alberta, a présenté au Comité un mémoire sur les liens entre le changement de culture et la prestation de services de santé mentale. Le mémoire décrit les conditions de travail de la Dre Phillips en tant que psychiatre consultante pour les services de santé mentale de la Garnison d’Edmonton, où elle a été témoin d’une « culture omniprésente d’intimidation, de harcèlement et de la persécution collective — des patients dans leur unité, parfois par les prestataires de soins de santé eux-mêmes », qui a conduit à des résultats défavorables concernant les soins aux patients. Le mémoire de la Dre Phillips fait également état de l’existence de « pressions non verbales pour ne pas diagnostiquer de trouble de stress post-traumatique (TSPT) » et d’une indifférence quant aux recommandations des spécialistes en matière de traitement[9].

Au sujet des initiatives et des programmes des FAC conçus pour relever les défis en matière de santé mentale, la lieutenante-générale Bourgon a évoqué trois programmes : le programme de santé mentale des Forces armées canadiennes, le programme En route vers la préparation mentale pour les membres des FAC et les familles des militaires et le programme Résilience Plus pour les étudiants des collèges militaires du Canada. Laurie Ogilvie, vice-présidente supérieure, Services de bien-être et moral des Forces canadiennes, a comparé le programme « En route vers la préparation mentale » au cours de « Premiers soins en santé mentale », en précisant que ce programme enseigne aux membres des FAC les signes et les symptômes des troubles de la santé mentale et les « stratégies pour obtenir de l’aide » pour les traiter.

Nick Booth, chef de la direction, Fondation La patrie gravée sur le cœur, a précisé que certains programmes de santé mentale offerts aux membres et aux vétérans des FAC ont été annulés ou offerts en ligne en raison de la pandémie de COVID-19. Il a fait valoir que certains de ces programmes, notamment ceux destinés aux « personnes souffrant de troubles de santé mentale liés au service », devraient être rétablis ou proposés en personne, en particulier pour les personnes qui ont des difficultés à accéder aux services de santé mentale virtuels.

Des témoins ont insisté sur la nécessité de combler les lacunes dans les services de santé mentale offerts aux membres et aux vétérans des FAC. Le colonel (à la retraite) Richard Pucci, qui a comparu à titre personnel, a affirmé que « [b]on nombre des militaires qui prennent leur retraite aujourd’hui ne peuvent pas se faire traiter aussi facilement » par des psychologues ou d’autres fournisseurs de soins de santé mentale qu’au cours des années précédentes. En ce qui concerne le soutien adéquat pour les conditions de santé mentale, M. McDaniel a avancé que certains segments de la population canadienne, y compris les vétérans, « passent entre les mailles du système ». Cela dit, le colonel (à la retraite) Pucci a reconnu les efforts récents déployés par les FAC, d’Anciens Combattants Canada (ACC), des entreprises et des réseaux de soutien aux vétérans pour accroître le soutien offert aux membres des FAC et aux vétérans qui souffrent de troubles de santé mentale.

En ce qui concerne la Force de réserve des FAC, Gregory Lick, Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, a attiré l’attention sur une « enquête systémique » que le Bureau de l’Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes a menée récemment au sujet de la santé mentale de ces membres déployés dans le cadre d’opérations nationales. Il a déclaré que ces membres « peuvent ne pas être au courant de tous les services, prestations et soutiens qu’ils peuvent recevoir à la suite d’un traumatisme — qu’il s’agisse de santé mentale ou physique — subi pendant une opération nationale ». Il a également demandé que ces membres fassent l’objet d’examens de santé périodiques afin d’évaluer leur état mental et physique et de leur fournir des informations sur les avantages sociaux, les services et les mesures de soutien.

Selon le major-général Bilodeau, les FAC effectuent périodiquement des évaluations de la santé mentale de leurs recrues et de leurs membres, y compris avant et après le déploiement, afin de déterminer les moments de leur carrière où les membres « souffre[nt] de problèmes de santé mentale » et de leur fournir un soutien adéquat à cet égard. Il a également affirmé que les membres des FAC ont accès à des services de santé mentale par la télémédecine. De plus, le brigadier-général Malcolm a estimé qu’au 28 avril 2023, les FAC comptaient environ 500 fournisseurs de services de santé mentale à l’échelle du Canada, y compris des infirmières en santé mentale, des psychiatres, des psychologues et des travailleurs sociaux.

Au sujet du processus de traitement des membres des FAC déployés à l’étranger qui souffrent d’une blessure de stress opérationnel, le brigadier-général Malcolm a indiqué que les techniciens médicaux des FAC pourraient procéder à des évaluations et fournir des traitements aux membres des FAC ou les diriger vers des « soins civils locaux », le cas échéant. Il a également souligné que les membres des FAC pourraient être rapatriés pour recevoir un traitement dans une clinique de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel.

Tout en mettant l’accent sur les troubles de santé mentale chez les vétérans, Steven Harris, sous-ministre adjoint du Secteur de la prestation des services d’ACC, et la colonelle (à la retraite) Nishika Jardine, ombud des vétérans, ont déclaré qu’en avril 2022, ACC a créé un programme de santé mentale qui permet aux vétérans de présenter des demandes d’invalidité pour certains troubles de santé mentale afin d’obtenir un accès « immédiat » à un traitement. La colonelle (à la retraite) Jardine a suggéré qu’un accès rapide devrait être disponible pour tous les vétérans qui présentent des demandes d’invalidité, y compris ceux qui souffrent de conditions non liées à la santé mentale. M. Harris a également parlé du centre d’excellence d’ACC sur les troubles de santé mentale, l’Institut Atlas pour les vétérans et leur famille, qui mène des recherches sur le SSPT et d’autres troubles de santé mentale dans le but d’aider les médecins de famille et d’autres fournisseurs de soins de santé à soigner les vétérans.

Le commodore Daniel Bouchard, commandant du Groupe de transition des Forces armées canadiennes, a parlé du Programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel des FAC et d’ACC, qui comprend un soutien par les pairs pour les membres des FAC, les vétérans et les familles des militaires. M. Harris a indiqué qu’ACC dispose de cliniques et d’autres établissements où les vétérans peuvent se faire traiter pour des traumatismes liés au stress professionnel, et il a ajouté que les membres des cliniques travaillent avec leurs homologues des systèmes de soins de santé civils pour fournir des soins.

En mettant l’accent sur les « traumatismes sexuels en milieu militaire » (TSM), M. McDaniel a souligné que, par rapport à leurs homologues masculins, « la transition des vétéranes est souvent plus difficile » en raison du taux élevé de traumatismes sexuels vécus par les femmes dans l’armée. Mme Tam-Seto a expliqué que les vétérans qui ont subi un TSM ont accès à un traitement dans les cliniques de soutien social pour les traumatismes liés au stress opérationnel et a souligné la nécessité pour les prestataires de services de « comprendre les contextes nuancés des personnes souffrant de traumatismes sexuels militaires, car ils sont très différents des traumatismes subis en tant que civil ».

M. Harris a affirmé que le MDN, les FAC et ACC se sont engagés à « aider les vétéranes et les vétérans qui ont malheureusement été victimes d’inconduite sexuelle » et qui souffrent de TSM. La lieutenante-générale Bourgon a noté que le programme Soutien social; blessures de stress opérationnel et le Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle ont tous deux déployé des efforts pour créer un réseau et fournir des services aux membres des FAC victimes d’inconduite sexuelle ou souffrant d’un TSM.

Enfin, en ce qui concerne les services de crise et de prévention du suicide offerts aux membres des FAC, Myriam Lafond, directrice générale du Centre de crise et de prévention du suicide du Haut-Richelieu Rouville, a soutenu qu’il était « beaucoup plus pertinent » pour les FAC de référer les membres aux centres de crise et de prévention du suicide plutôt qu’aux hôpitaux. Selon elle, les centres sont plus à même « de leur offrir un vrai soutien psychologique, des interventions précises pour désamorcer la crise suicidaire et leur permettre de retrouver une certaine maîtrise de la situation et de la souffrance qu’ils endurent ».

Services de soins de santé offerts aux femmes des Forces armées canadiennes

Historiquement, les systèmes militaires et d’aide aux vétérans ont été conçus par des hommes pour des hommes, même si le service militaire affecte les hommes et les femmes de manière différente. Des témoins ont souligné que, même si ces systèmes deviennent plus inclusifs, ils ne prennent pas suffisamment en compte les besoins physiques ou mentaux spécifiques des femmes. Dans ce contexte, ils ont souligné qu’un certain nombre de questions relatives aux services de soins de santé pendant le service militaire et lors de la transition vers la vie civile doivent être abordées.

Pendant le service militaire

Des témoins ont relevé plusieurs domaines dans lesquels les services de soins de santé des FAC pourraient être améliorés pour leurs membres qui sont des femmes ou des personnes de diverses identités de genres. Maya Eichler, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’innovation sociale et l’engagement communautaire à l’Université Mount Saint Vincent, a affirmé qu’« [a]u Canada, il existe actuellement peu ou pas du tout de soutien ou de recherche sur les besoins sexospécifiques des femmes. Les femmes sont par ailleurs obligées de travailler dans un système conçu pour les hommes, ce qui peut leur causer d’autres maladies, blessures ou préjudices[10]. » Selon la lieutenante-générale Bourgon, « [l]es femmes et les personnes de diverses identités de genre méritent que leur santé et leur bien-être soient considérés comme une priorité nationale, depuis le moment où ils revêtent l’uniforme jusqu’au retour à la vie civile et à la retraite[11] ».

Le major-général Bilodeau a précisé qu’au sein des FAC, les données et le dépistage du cancer du sein et du cancer du col de l’utérus sont « à la hauteur de ce qui se fait dans la société civile ». Cependant, il a également reconnu que « nous pourrions encore améliorer bien des choses ». En ce qui concerne le financement récent accordé aux FAC pour mettre en place un programme de santé pour les femmes, Sayward Montague, directrice de la défense des intérêts de l’Association nationale des retraités fédéraux, a expliqué que « [l]e budget de 2022 indiquait un engagement en faveur de résultats plus équitables en consacrant plus de 144 millions de dollars sur cinq ans, ainsi que 31,6 millions de dollars, actuellement, pour élargir les services de santé et les programmes de conditionnement physique afin de mieux répondre aux besoins des femmes et du personnel militaire ayant diverses identités de genre[12] ».

De plus, des témoins ont suggéré de répartir le financement du gouvernement du Canada de manière à combler l’écart entre les hommes et les femmes des FAC en matière de données et de recherche sur la santé. Le major-général Bilodeau a affirmé qu’il faut « mener plus d’études de recherche pour mieux éclairer les soins que nous dispensons aux femmes [des FAC] » et a affirmé vouloir « collaborer avec nos partenaires en recherche pour combler ces lacunes [afin de disposer] de meilleures données pour surveiller la santé des femmes ainsi que l’efficacité de nos mesures de prévention et de nos traitements ». Il a ajouté que « [n]ous avons besoin de meilleures mesures de la qualité et du rendement de notre prestation de soins aux femmes ». Dans un mémoire soumis au Comité, la Dre Karen Breeck, une ancienne médecin militaire des FAC qui a comparu à titre personnel, a souligné l’importance de l’analyse fondée sur le sexe et le genre et des résultats de la recherche sur la santé intersectionnelle pour orienter les systèmes de soins de santé militaires[13]. Dans son mémoire, la Dre Breeck a exhorté les FAC à mettre « à jour de ce vieux système » électronique archaïque afin de mieux recueillir les données sur la santé des femmes des FAC, et à s’appuyer davantage sur les commentaires des patients ou sur la « recherche participative[14] ».

La lieutenante-colonelle (à la retraite) Karen McCrimmon a attiré l’attention sur la question de l’équipement militaire inapproprié pour les femmes, affirmant que « des blessures physiques, comme des lésions musculosquelettiques, sont causées par de l’équipement et des uniformes qui n’ont pas été conçus pour le corps d’une femme. Les uniformes et l’équipement sont remplacés périodiquement. Ils devraient donc être régulièrement évalués pour déterminer s’ils conviennent aux femmes[15]. » La Dre Breeck est favorable à une analyse sexospécifique des nouveaux projets d’acquisition, qu’il s’agisse d’équipements ou d’aménagements de navires, et reconnaît que « [c]es éléments sont déjà pris en compte en ce qui concerne les navires plus récents, mais nous avons encore beaucoup d’équipements vétustes ».

En ce qui concerne l’utilisation par des femmes d’équipement conçu pour des hommes, Christine Wood, qui défend les intérêts des vétérans, a affirmé ce qui suit :

Même si j’étais la plus petite membre de mon peloton, j’ai porté le même sac à dos contenant le même équipement qu’un homme de grande taille. Après 15 semaines éreintantes, je suis partie de Saint-Jean avec ma commission d’officière, ainsi qu’avec des fractures de fatigue et une fasciite plantaire aux deux pieds. J’ai eu besoin de cinq mois de physiothérapie pour m’en remettre[16].

Elle a également souligné que, dans son cas, un équipement mal adapté a contribué à affaiblir son plancher pelvien et a entraîné des complications en matière de reproduction.

Des témoins ont également formulé des observations sur la santé reproductive des femmes des FAC. Selon la Dre Breeck, « [d]e nombreuses femmes militaires et vétéran[e]s doivent relever le défi de tomber enceintes, de le rester, de rester en bonne santé pendant et après leur grossesse et d’avoir une progéniture en bonne santé ». Elle a laissé entendre que les membres qui ont connu ces difficultés ne sont pas certaines du rôle qu’a pu jouer le lieu de travail militaire. La Dre Breeck a indiqué que « [l]es effets potentiels sur la santé génésique d’une exposition à des produits chimiques, à des températures extrêmes, à des pressions, à des vibrations, à des sons, à des radiations et à des traumatismes sur le lieu de travail ne sont tout simplement pas les mêmes pour les hommes et les femmes. Il est essentiel de mieux comprendre les risques et les effets des expositions non conventionnelles sur le lieu de travail chez les femmes [des FAC]. »

La lieutenante-générale Bourgon a affirmé que les FAC examinent « le soutien prénatal et postnatal, et [effectuent] des évaluations professionnelles associées à la fertilité et à la reproduction[17] ». Soulignant que « la collaboration de plusieurs ministères » est nécessaire pour assurer la santé génésique des femmes dans les secteurs non traditionnels, la Dre Breeck a exhorté le ministre de la Défense nationale à élaborer « un plan stratégique pour les besoins en matière de santé au travail de toutes les femmes employées par le gouvernement fédéral » et a proposé que les FAC offrent aux militaires, dans leurs avantages sociaux, la possibilité de « congeler leurs ovules ou spermatozoïdes[18] ».

Des témoins se sont dits préoccupés par l’externalisation des soins périnataux pour les femmes des FAC. La sénatrice Patterson a fait valoir que les FAC ont « besoin de soutien pour continuer à perfectionner [ce programme de santé des femmes], qui inclut la participation de gynécologues-obstétriciens ». Le major-général Bilodeau a indiqué que les FAC sont « en train d’embaucher des spécialistes — des obstétriciens-gynécologues — qui nous conseilleront en vue de bâtir un meilleur programme » pour fournir des soins aux membres des FAC pendant la période périnatale. Il a mentionné qu’en février 2023, le Canada a accueilli les partenaires du Groupe des cinq pour discuter des problèmes de santé des femmes qui servent dans l’armée, et que les partenaires ont convenu de « continuer à travailler ensemble pour élaborer des lignes directrices de pratique clinique qui nous permettront d’agir ensemble afin d’améliorer la santé des femmes dans les forces armées ». Reconnaissant les avantages de la thérapie pelvienne, la lieutenante-générale Bourgon a évoqué des initiatives qui permettent à « deux parents avec leur nouveau-né [de] se rendre au gymnase et [d’]améliorer leur forme physique. C’est à la fois de la prévention et du rétablissement ».

La Dre Breeck a également abordé la question des services de soins de santé offerts aux femmes et aux membres du personnel de diverses identités de genre des FAC pendant leur déploiement. Elle a expliqué que « [l]orsque nous sommes déployés […], nous sommes souvent isolés et nous devons savoir comment agir ». Elle a donné l’exemple d’une mission de l’Organisation des Nations unies (ONU), où des ressources ou des moyens sanitaires équivalents à ceux du Canada peuvent ne pas être disponibles. Elle a ajouté ceci :

À ma connaissance, nous n’avons pas de normes médicales minimales pour ce qui est de la formation en matière de santé des femmes pour les services de santé de l’ONU […] Souvent, nous ne disposons pas encore des produits de base dans certains kits de l’ONU, comme les pilules contraceptives ou les types de médicaments nécessaires après une agression sexuelle, les renseignements sur les infections vaginales ou même simplement un spéculum vaginal, des instruments permettant d’examiner comme il faut le vagin d’une femme […] À un moment donné, je me trouvais en Allemagne, et il y avait des femmes qui devaient venir d’Afghanistan en Allemagne pour obtenir des soins médicaux primaires qui auraient pu être idéalement dispensés sur place si nous étions tous mieux informés des bons produits, des bons traitements et de la manière de traiter les problèmes courants des femmes.

La Dre Breeck a souligné l’importance de normaliser les questions relatives à la santé des femmes et de les intégrer pleinement dans le système de soins de santé des FAC, y compris pour le personnel déployé. Selon elle, « [t]ous les fournisseurs de soins de santé militaires aptes au déploiement devraient être en mesure de répondre aux besoins en matière de soins de santé autant des hommes que des femmes ». Elle estime que l’uniformisation des soins médicaux dans un environnement opérationnel allié serait également bénéfique[19].

En ce qui concerne la divulgation d’une agression sexuelle, la majore (à la retraite) Donna Riguidel a déclaré que « la formation obligatoire sur les techniques très importantes de premiers soins pour traumatisme sexuel — les premiers soins en santé mentale — […] n’a toujours pas été instaurée[20] ». La Dre Breeck a proposé que les FAC suivent « le précédent créé par l’armée américaine et [offrent] un accès sans obstacles à des soins médicaux/formes de soutien connexes (pour la santé mentale et physique) aux personnes qui se disent victimes d’un TSM[21] ». Elle a également encouragé le gouvernement du Canada à définir si les traumatismes liés au stress opérationnel comprennent le TSM, afin que les prestations et les services connexes puissent être fournis, le cas échéant[22].

Pendant la transition vers la vie civile

Des témoins ont souligné que, comme pour leur service militaire, les hommes et les femmes des FAC ont des expériences différentes lors de leur transition vers la vie civile. Mme Tam-Seto a observé qu’il y a « beaucoup de personnes qui s’identifient comme femmes et qui peinent à accepter l’identité d’ancienne combattante en raison des stéréotypes de la société à l’égard des anciens combattants ». Laura Kelly, directrice de l’examen et de l’analyse stratégiques pour le Bureau de l’ombudsman des vétérans, a déclaré que « les femmes vétéranes sont deux à trois plus susceptibles d’être libérées pour des raisons médicales » que les hommes vétérans, et a soutenu que « [le] risque de mourir par suicide [chez les femmes vétéranes] est plus élevé, dans une proportion de 80 à 90 % [, que chez les femmes de la population canadienne générale] »[23]. Elle a ajouté ceci :

Les femmes vétéranes sont plus susceptibles d’être atteintes de maladies chroniques, de maladies respiratoires et de troubles gastro-intestinaux que les hommes vétérans. Elles sont deux fois plus à risque de subir une blessure grave durant un exercice d’entraînement. Elles sont aussi deux fois plus à risque de souffrir de maladies du système nerveux central. Leur taux de dépression est plus élevé, et elles sont plus susceptibles d’être atteintes de trouble panique, de phobie sociale, de trouble d’anxiété généralisée et de TSPT […][24].

Selon certains témoins, pour les membres des FAC qui ont vécu un TSM, les effets peuvent durer au-delà de leur transition à la vie civile[25]. Au sujet des membres qui ont vécu un « traumatisme du sanctuaire », qui est un état qui survient lorsque la croyance que les FAC assureraient leur sécurité est détruite, M. McDaniel a suggéré de leur offrir des services et des mesures de soutiens spécialisés pendant le processus de transition.

Des témoins ont mis en garde contre le fait que les mesures de soutien, les avantages et les services offerts aux personnes en transition vers la vie civile ne sont pas adaptés aux besoins des femmes des FAC ou des membres de diverses identités de genre. M. Harris a soutenu qu’ACC a modifié la structure de ses avantages sociaux, y compris la « Table des invalidités[26] » pour « veiller à ce que nos décisions soient équitables et justes ». Cela dit, exprimant sa frustration que la Table ne reconnaisse pas les « [manifestations] physiques » du SSPT, Mme Wood a fait référence à sa condition primaire en disant qu’ACC reconnaît le SSPT, mais « pas les maladies physiques qui découlent de ce trouble, en particulier chez les femmes », car on lui a « refusé les services d’un physiothérapeute ou d’un chiropraticien […][27] ». Dans ce contexte, la majore (à la retraite) Riguidel a fait valoir ceci :

Nous avons besoin de plus de programmes axés sur les femmes. Le programme Soutien social pour les blessures de stress opérationnel, le programme Sans limites et le programme Wounded Warriors ne sont pas conçus pour nous[28].

En faisait allusion au rapport d’enquête de 2021 du Bureau de l’ombudsman des vétérans intitulé Soutien par les pairs pour les vétérans ayant subi un traumatisme sexuel militaire, la colonelle (à la retraite) Jardine a noté que le gouvernement du Canada a accepté les recommandations du rapport et a indiqué qu’un programme fournissant un soutien par les pairs aux vétérans ayant subi un TSM est en cours de mise en œuvre. Cependant, elle a ajouté que le Bureau n’a « pas encore vu » la publication d’une analyse et d’une évaluation comparative entre les sexes plus concernant l’élaboration et la mise en œuvre du programme.

M. Harris a souligné les initiatives d’ACC visant à soutenir les vétéranes, notamment la création du Bureau des vétéranes et des vétérans 2ELGBTQI+. Il a également affirmé qu’ACC menait « régulièrement » des consultations auprès de ces vétéranes au sujet des difficultés qu’elles rencontrent lors de leur transition à la vie civile.

En ce qui concerne l’écart entre les délais de traitement des demandes de prestations d’invalidité soumises par les vétérans et les vétéranes, M. Harris a indiqué qu’en septembre 2021, ACC avait dédié une équipe au traitement des demandes de ces dernières. Il a expliqué que cet écart a été « presque éliminé » grâce à cette approche[29]. Selon Trudie MacKinnon, directrice générale intérimaire de la Direction générale des opérations centralisées d’ACC, une unité de TSM a été créée pour « traiter les dossiers de traumatismes sexuels, de harcèlement sexuel et de discrimination fondée sur le sexe dans les Forces armées canadiennes. Depuis la mise sur pied de l’unité en 2020, nous avons reçu environ 3 580 demandes[30]. »

Cependant, la caporale-chef Jacqueline Wojcichowsky a affirmé qu’en raison de la sous-représentation des femmes à ACC, « l’accès aux services et aux prestations dont elles ont besoin [est] particulièrement difficile pour les anciennes combattantes, parce que les agents masculins qui traitent leur dossier ne comprennent pas et sous-estiment donc le traumatisme que les soldates ont subi[31] ».

Services aux familles des militaires

Les familles des militaires jouent un rôle essentiel en soutenant les membres des FAC avant, pendant et après leur déploiement. Cela dit, elles apportent ce soutien tout en étant elles-mêmes confrontées à des défis, tels que les difficultés d’accès aux soins de santé et à d’autres services, la recherche d’un emploi, la séparation d’avec leurs parents ou leur conjoint, et les déménagements répétés[32]. Par conséquent, des témoins ont fait part au Comité de leurs observations sur la nécessité de fournir aux familles des militaires des soins de santé, ainsi que d’autres avantages sociaux, mesures de soutien et services.

Selon Gregory Lick, les familles des militaires sont « l’épine dorsale du militaire ». Il a mentionné que certains membres des familles des militaires « s’occupe[nt] des personnes à charge », comme les enfants, pendant que les membres des FAC sont déployés au Canada ou à l’étranger. En outre, M. Booth estime qu’environ 10 000 familles de militaires déménagent chaque année, dont environ 8 000 dans une autre province ou un autre territoire. Il a également précisé qu’en raison des exigences opérationnelles, environ deux tiers des familles de militaires « connaissent des périodes d’absence de leurs proches [qui servent dans les FAC] ».

La lieutenante-générale Bourgon a déclaré que « [l]’une des principales raisons pour lesquelles les gens quittent l’armée, c’est l’impact [de leur] service sur leur famille ». Elle a ajouté que les familles de militaires rencontrent des difficultés dans des domaines tels que l’accès à des services de santé adéquats, la recherche d’un emploi pour le conjoint et l’obtention de services de garde d’enfants à un prix abordable. Par ailleurs, M. Lick a fait valoir que le « traitement […] des familles [des militaires] » affecte la capacité des FAC à recruter et à conserver ses membres, car les questions liées à la famille « peuvent largement contribuer à la libération de militaires ». Il a également décrit le traitement des familles de militaires comme « un enjeu de sécurité nationale ».

En ce qui concerne la santé mentale, Mme Tam-Seto a affirmé que « les mesures de soutien [offertes au Canada] ne sont pas suffisantes » pour les enfants et les autres membres des familles de militaires. Elle a soutenu que « [m]ême dans les meilleures conditions, les soins en santé mentale offerts à l’ensemble des enfants […] laissent à désirer », tandis que M. Booth a affirmé que « [c]ette situation n’est ni nouvelle ni propre au Canada ».

La colonelle (à la retraite) Jardine a signalé que, récemment, des familles de militaires, y compris des conjoints de vétérans, se sont adressées au Bureau de l’ombudsman des vétérans parce qu’elles devaient « se débrouiller seul[e]s » pour traiter leurs problèmes de santé mentale. Elle a également affirmé que « nous ne pourrons continuer à compter » sur les familles de militaires pour soutenir les membres des FAC et les vétérans sans répondre aux besoins de ces familles « en matière de santé mentale qui résulte du soutien qu’ils ont apporté à un vétéran pendant son service ». De plus, elle a souligné qu’en 2021, le Bureau de l’ombudsman des vétérans a recommandé à ACC d’offrir « du soutien en santé mentale aux membres de la famille de plein droit pour les problèmes liés au service de leur vétéran ».

Selon Mme Ogilvie, la plupart des programmes et services destinés aux familles des militaires sont fournis par les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes ou par des organisations à but non lucratif, telles que les Centres de ressources pour les familles des militaires. Ces services comprennent notamment le counseling en santé mentale pour les enfants, les jeunes et les adultes, l’aide aux soins familiaux d’urgence, le soutien aux partenaires intimes et aux victimes de violence familiale, une ligne d’écoute et d’orientation « 24 heures sur 24, sept jours sur sept », l’orientation scolaire et les soutiens psychosociaux non cliniques. Elle a également mentionné que les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes collaborent avec divers intervenants afin « d’accroître [leur] capacité à offrir certains services [et mesures de soutien] », dont — par exemple — un réseau d’emploi des conjoints et des salons de l’emploi virtuels, la télémédecine pour les familles qui déménagent, un réseau de médecins pour les familles des militaires et un service de messagerie textuelle en cas de crise du service Jeunesse, j’écoute.

Des témoins ont mis l’accent sur les difficultés que rencontrent les familles des militaires pour accéder aux soins de santé et à d’autres services, notamment lorsqu’elles déménagent dans une autre province ou un autre territoire, et ont énuméré des programmes et d’autres initiatives conçus pour relever ces défis. La lieutenante-générale Bourgon a souligné l’initiative Canada Sans Faille, que le MDN et les FAC ont créée en 2018 pour améliorer l’accès aux mesures de soutien et aux services lorsque les membres des FAC et les familles des militaires sont relocalisés à l’intérieur du Canada. Elle a décrit les trois principaux domaines d’intervention de Canada Sans Faille : la garde d’enfants, les soins de santé et l’emploi des conjoints. En outre, Mme Ogilvie et M. Harris ont attiré l’attention sur la réunion annuelle de 2023 du comité directeur de Canada Sans Faille, au cours de laquelle les membres du comité directeur et les représentants provinciaux et territoriaux ont discuté de questions telles que les cartes de santé provinciales ou territoriales pour les membres des familles des militaires et l’amélioration de l’accès aux médecins de famille.

En ce qui concerne les possibilités d’emploi pour les membres des familles des militaires, Mme Ogilvie a fait remarquer que les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes emploient un grand nombre de ces personnes et que le réseau d’emploi des conjoints aide à trouver un emploi dans un certain nombre de professions, « qu’il s’agisse de sauveteurs de piscines ou de cadres supérieurs ».

La lieutenante-générale Bourgon a soutenu que les services de garde pour les enfants des membres des FAC, en particulier ceux qui sont subventionnés, sont essentiels parce qu’ils leur permettent de « faire leur travail et [d’]être efficaces sur le plan opérationnel » sans avoir à « s’inquiéter de ce qui va arriver à leurs enfants ». Cependant, la sénatrice Patterson a affirmé que, comme la garde d’enfants est une compétence provinciale, il n’est généralement pas possible de trouver et de « conserver des places » pour les enfants des membres des FAC au sein du régime de garde d’enfants d’une province.

En ce qui concerne l’accès des familles des militaires aux services de santé, Mme Ogilvie a fait remarquer que l’un des « plus grand[s] défi[s] en matière de soins de santé à l’heure actuelle » est la pénurie de médecins de famille et d’autres prestataires de soins de santé dans les communautés où résident les familles des militaires. Elle a ajouté que cette pénurie « complique l’accès aux soins de santé » pour ces familles. De même, M. Booth a mentionné que les familles de militaires ont de la difficulté à accéder aux soins de santé et à d’autres services, et a précisé qu’elles « peuvent ne pas connaître les organisations civiles et n’ont que peu de temps pour s’y retrouver avant de déménager de nouveau ».

Mme Ogilvie a souligné que les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes offrent des services de télémédecine aux familles de militaires, y compris à celles qui déménagent à travers le Canada, afin de les aider à consulter un médecin de famille ou un autre prestataire de soins de santé. Elle a également déclaré que les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes ont « réussi à négocier avec l’ensemble des provinces et territoires l’élimination de la période d’attente de 90 jours avant que les familles aient accès à des soins médicaux lorsqu’elles déménagent dans une nouvelle province ». En outre, M. Harris a mentionné le Service de télémédecine pour les familles des vétérans d’ACC, qui établit un lien entre les membres des FAC libérés pour des raisons médicales et leurs familles avec des fournisseurs de soins de santé, comme des médecins de famille et des infirmières, « accessibles par messagerie audio ou vidéo ».

En plus du soutien et des services aux familles et à l’emploi fournis par les Centres de ressources pour les familles des militaires, M. Lick a noté que ces centres offrent des services de santé mentale, y compris des conseillers pour les adolescents, aux familles des militaires. Cependant, il a également reconnu qu’« il faut [en] faire plus » pour fournir des mesures de soutien et des services de santé mentale à ces familles, et que les centres « ont besoin de plus de fonds pour mieux soutenir les familles de militaires ».

Enfin, M. Booth a souligné le rôle important des organisations caritatives basées au Canada, telles que la Fondation La patrie gravée sur le cœur, dans le financement des programmes qui offrent des services de santé et autres aux membres des FAC, aux vétérans et aux familles des militaires. À titre d’exemple, il a indiqué que la Fondation La patrie gravée sur le cœur soutient ces familles par l’intermédiaire « des centres de ressources pour les familles des militaires et d’autres partenaires locaux » dans le but d’aider les enfants et les autres membres des familles des militaires « lorsqu’ils sont confrontés à des déploiements multiples ou à l’éloignement de leur collectivité d’origine ».

Services de transition

Chaque année, environ 10 000 membres sont libérés des FAC[33]. Des témoins ont fait part au Comité des défis auxquels sont confrontés les membres des FAC pendant leur transition vers la vie civile. Plus particulièrement, ils ont souligné que la libération des militaires implique plusieurs changements de vie, ont évoqué le besoin de réduire les complexités associées au processus de transition et ont décrit les défis particuliers liés à l’accès aux services de transition et à la garantie d’une continuité des services de soins de santé tout au long du processus de transition.

Libération du service militaire et ajustement à la vie civile

M. Lick a souligné l’importance de veiller à ce que les membres des FAC bénéficient d’une transition harmonieuse de la vie militaire à la vie civile. M. Harris a rappelé que les FAC et ACC « se sont engagés à appuyer une transition sans heurts et à améliorer les résultats pour les membres qui procèdent à la transition ». Il a également affirmé que les efforts continus des FAC et d’ACC pour réduire « la complexité du processus de transition » sont axés sur l’amélioration du bien-être des membres des FAC, des vétérans et des familles des militaires.

M. Harris a fait remarquer que le processus de transition est vécu différemment par chaque membre des FAC. M. McDaniel et lui-même ont décrit un certain nombre de facteurs susceptibles d’affecter la transition vers la vie civile, notamment l’accès au logement, l’intégration dans la communauté, l’emploi, la sécurité financière, les conditions de santé mentale et physique, les antécédents de service et le grade militaire.

Des témoins ont suggéré qu’après leur service militaire, les membres des FAC peuvent éprouver un certain nombre de difficultés à s’adapter à la vie civile, y compris en ce qui concerne leur identité. M. McDaniel a expliqué que, outre le changement d’emploi pour certains membres des FAC ou la retraite pour d’autres, la transition peut également entraîner des changements psychologiques et sociaux. En outre, M. Lick a fait valoir que les FAC « représentent une part essentielle » de l’identité de nombreux membres, et a indiqué que certains de ceux qui passent à la vie civile ont tendance à perdre leur lien avec une identité militaire commune, « tout en devant faire face à des problèmes physiques, mentaux ou moraux ».

De même, la colonelle (à la retraite) Jardine a souligné que la transition vers la vie civile peut « être tout autant » importante pour les membres des FAC que l’entraînement de base et la transition de la vie civile à la vie militaire. Elle a également souligné qu’une fois l’entraînement de base terminé, le membre des FAC n’est « plus jamais vraiment un civil », mais plutôt un vétéran après sa libération des FAC.

En s’appuyant sur l’étude de 2017 du Bureau de l’Ombudsman des vétérans sur la transition vers la vie civile, la colonelle (à la retraite) Jardine a souligné plusieurs défis que les membres des FAC rencontrent au cours du processus de transition, comme « la recherche d’un nouveau sens à leur vie, le maintien de la sécurité financière, le fait de déterminer comment l’expérience militaire peut s’appliquer à l’expérience de travail dans le civil et dans la lutte contre la stigmatisation entourant la santé mentale ». De plus, selon M. McDaniel, il existe « deux grandes catégories de préoccupations liées à la transition » : un changement de culture lors du passage du service militaire à un emploi auprès de « la société civile »; et des problèmes de santé mentale, de santé physique et de lésions dues au stress professionnel qui nécessitent un soutien et parfois des interventions ciblées.

Accès à des services de transition

Selon le commodore Bouchard, la durée de la transition vers la vie civile varie d’un membre des FAC à l’autre. En mettant l’accent sur les membres libérés pour des raisons médicales, il a soutenu que certains effectuent la transition sur une période de trois ans et que d’autres passent jusqu’à six ans dans le processus de transition. En outre, le commodore Bouchard a estimé qu’au 28 avril 2023, 1 502 membres des FAC malades ou blessés étaient affectés au Groupe de transition des Forces armées canadiennes.

Robyn Hynes, directrice générale des opérations, Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, a déclaré que le processus de libération médicale des membres des FAC en transition vers la vie civile comporte trois phases principales. Elle a précisé que la première phase comprend la période qui s’écoule entre le moment où une blessure survient ou un diagnostic est posé et la décision du directeur de l’administration des carrières militaires de libérer ou non le membre pour des raisons médicales. Selon Mme Hynes, s’il y a libération pour raisons médicales, la deuxième phase est la période qui s’écoule entre le moment où le militaire est informé de la libération pour raisons médicales et le moment où elle a lieu. Enfin, elle a indiqué que la troisième phase est la période qui s’écoule entre le moment où le membre est libéré et celui où il devient admissible à « un certain nombre de prestations et de services par l’intermédiaire des FAC, du régime d’assurance-revenu militaire des Forces canadiennes, le RARM, et d’ACC », ce qui peut se prolonger jusqu’à deux ans après la date de la libération.

Des témoins ont souligné que ce ne sont pas tous les membres des FAC qui ont un accès adéquat aux services de transition. M. Harris a affirmé que, bien qu’« [u]n grand nombre de membres sont en mesure de naviguer [le processus de] transition par eux-mêmes ou avec une aide minimale et ciblée liée à des services et des soutiens [offerts par les FAC et ACC] », d’autres peuvent avoir besoin de « soutiens plus intensifs ou continus ». M. McDaniel, qui demande que les services de transition soient « spécialisés » et « proactifs » pour répondre aux besoins individuels, a observé que « la transition de la plupart des vétérans vers la vie civile se passe relativement bien » mais qu’entre 25 et 38 % d’entre eux disent « avoir de la difficulté à faire la transition ».

Le commodore Bouchard a mentionné un certain nombre de services de transition offerts par les FAC, notamment des conseillers en transition et des coordonnateurs de services, pour aider les membres des FAC et leurs familles à élaborer un plan de transition. Il a particulièrement souligné le rôle des coordonnateurs de services qui veillent à ce que « les services [offerts aux membres des FAC malades ou blessés] soient transférés avec eux s’ils sont libérés des Forces armées canadiennes ».

La lieutenante-générale Bourgon a affirmé que les membres des FAC qui sont libérés pour des raisons médicales « ne sont pas laissés à eux même dans la jungle », les FAC leur fournissant le soutien et les services nécessaires pour s’assurer « qu’ils sont prêts à être libérés ». Dans une perspective différente, M. Lick a indiqué que le Bureau de l’Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes a identifié plusieurs situations dans lesquelles les vétérans n’ont pas eu accès à tous les avantages et services au moment de leur libération pour raisons médicales, et a ajouté qu’il pourrait également y avoir des vétérans qui « ne font pas savoir d’eux-mêmes qu’ils ne sont pas préparés à leur libération [et] que les prestations et services auxquels ils ont droit ne sont pas en place ».

La lieutenante-générale Bourgon a déclaré que la politique de défense du Canada de 2017, Protection, Sécurité, Engagement, prévoyait la création du Groupe de transition des Forces armées canadiennes pour préparer les membres des FAC « à une transition harmonieuse et réussie vers la vie civile ». Le commodore Bouchard a expliqué que ce groupe remplaçait l’Unité interarmées de soutien du personnel, qui avait été créée en 2009 pour soutenir les membres malades et blessés pendant leur transition vers la vie civile.

La lieutenante-générale Bourgon, le commodore Bouchard et M. Harris ont indiqué qu’il existe actuellement 32 centres de transition situés dans les bases et escadres des FAC à travers le Canada. Le commodore Bouchard a précisé que le Groupe de transition des Forces armées canadiennes supervisait le travail de ces centres. Selon Mark Roy, directeur de secteur d’ACC du centre de l’Ontario, ces centres sont dotés d’employés des FAC, d’ACC et des services aux familles des militaires. M. Harris a déclaré que les centres offrent des cours de formation à la transition en ligne ou en personne qui abordent un large éventail de sujets et qui sont obligatoires pour ceux qui sont libérés de l’armée.

En outre, soulignant que les FAC et ACC disposent d’un « nouveau processus de transition entre militaires et civils afin d’assurer un processus homogène, personnalisé et normalisé dans tous les centres de transition », la colonelle Helen Wright, directrice de la protection de la santé des forces au Groupe de santé des Forces canadiennes des FAC, a énuméré les sept domaines de bien-être dans ce processus : la famille, les finances, la santé, le logement, les aptitudes à la vie quotidienne, le « sentiment d’utilité » et l’environnement social. De même, la colonelle Wright a indiqué que les centres disposent d’équipes de soutien intégrées qui aident à élaborer un plan de transition fondé sur ces sept domaines et « adapté » à chaque membre des Forces armées canadiennes en transition vers la vie civile[34].

La colonelle (à la retraite) Jardine a évoqué le soutien que les centres de transition apportent aux membres et aux vétérans des FAC malades et blessés, et a indiqué que le fait de fournir de tels services aux vétérans libérés pour des raisons non médicales « de la même façon qu’on l’a fait pour les vétérans libérés pour des raisons médicales contribuera grandement à faciliter la transition de la vie militaire à la vie civile ».

M. Harris a souligné que les gestionnaires de cas d’ACC travaillent avec les membres des FAC en voie de libération et les vétérans qui ont besoin de soutien et de services supplémentaires pendant et après leur transition à la vie civile pour « cibler leurs besoins, établir leurs buts et leur créer un plan visant à atteindre l’autonomie, la santé et le bien-être ». De plus, Jane Hicks, directrice générale intérimaire de la gestion des programmes et de la prestation des services du ministère des Anciens Combattants, a fait remarquer qu’ACC investit « des efforts considérables dans le processus de transition ». Elle a souligné que ces efforts comprennent informer les membres des FAC et les vétérans des avantages et des services qui sont disponibles à leur libération des FAC.

D’autre part, la colonelle (à la retraite) Jardine a fait remarquer que, bien que les FAC et ACC offrent un « grand soutien » aux membres des FAC libérés pour raisons médicales, ce n’est pas nécessairement le cas pour les membres des FAC libérés pour des raisons non médicales. Elle s’est dite préoccupée par le fait que les membres des FAC libérés pour des raisons non médicales et qui n’ont pas suffisamment d’années de service pour être admissibles à une pension des FAC pourraient ne pas avoir accès à un régime de soins de santé de la fonction publique ou au « Régime de services dentaires pour les pensionnés ». Elle a également expliqué que les membres des FAC qui ont moins de 20 ou 25 ans de service militaire et qui souffrent peut-être de maladies ou de blessures liées au service militaire risquent de subir des retards dans le traitement de leurs demandes de pension d’invalidité par ACC.

M. Lick a attiré l’attention sur sept recommandations concernant la transition vers la vie civile et les traumatismes liés au stress opérationnel que le Bureau de l’Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes a incluses dans plusieurs rapports en 2016. S’il convient que ces recommandations ont été acceptées par le ministre de la Défense nationale, il a souligné qu’en date du 12 juin 2023, aucune de ces recommandations n’avait été « pleinement mise en œuvre ». Selon lui, l’une des recommandations proposait qu’« aucun membre des Forces armées canadiennes ne soit libéré pour des raisons médicales avant que l’ensemble des prestations et des services provenant de toutes les sources, y compris Anciens Combattants Canada, ne soient en place ».

M. McDaniel a déclaré que le gouvernement devrait mettre en œuvre toutes les recommandations contenues dans les rapports de 2016 du Bureau de la défense nationale et de l’Ombudsman des Forces armées canadiennes concernant le processus de transition et les traumatismes liés au stress opérationnel. Il a toutefois reconnu que la mise en œuvre de ces recommandations « pren[d] du temps ». En outre, il a demandé que les membres des FAC, les vétérans et les familles des militaires bénéficient d’un soutien et de services sociaux accrus, car « lorsque les membres des forces quittent la vie militaire, ils laissent souvent derrière leur principal réseau de soutien social, ce qui nuit à leur capacité de surmonter les difficultés liées à la transition ».

Le commodore Bouchard a qualifié l’approche des FAC à l’égard de la transition à la vie civile d’« holistique » et a déclaré qu’« Anciens Combattants Canada nous aide à mieux soutenir nos membres pendant leur transition ». M. Harris a souligné que, depuis 2015, les FAC et ACC ont fourni aux membres des FAC libérés pour des raisons médicales « des services de transition améliorés » qui impliquent un engagement plus précoce « afin de leur offrir un soutien coordonné et intégré ».

Reconnaissant que, malgré les efforts des FAC et d’ACC « pour offrir des services de transition depuis longtemps, il y a toujours eu un écart relatif aux membres en voie d’être libérés pour des raisons non médicales », M. Harris a mentionné une initiative conçue pour combler cette lacune. Il s’agit de la création en 2019 d’un processus de transition de la vie militaire à la vie civile pour les membres en voie d’être libérés pour des raisons non médicales et leurs familles. Selon lui, ce processus est « mi[s] en œuvre à l’échelle nationale et sera pleinement opérationne[l] en mars 2024 ». De plus, le commodore Bouchard a affirmé qu’une fois mis en œuvre, le processus sera offert à tous les membres de la Force régulière des FAC, et qu’il sera par la suite étendu aux membres de la Force de réserve.

En mettant l’accent sur les services d’emploi, la colonelle (à la retraite) Jardine a mentionné le service de transition de carrière d’ACC, qui aide les membres des FAC et les vétérans « dans leur cheminement vers un emploi civil ». M. Harris a parlé de l’Allocation pour études et formation d’ACC, qui fournit des fonds pour l’éducation et la formation « afin de réussir leur transition et de se positionner de manière à être mieux préparés pour faire face à la concurrence sur le marché du travail civil ».

Cependant, la colonelle (à la retraite) Jardine a souligné qu’un certain nombre de membres et de vétérans des FAC, en particulier les officiers, ont des difficultés à appliquer les « compétences militaires aux compétences civiles » et à trouver un emploi en rapport avec leur service militaire. Selon elle, pour des raisons financières et « pour donner un nouveau sens à leur vie », une grande partie des membres des FAC et des vétérans cherchent un emploi dans le cadre de leur transition vers la vie civile. En outre, pour faciliter l’accès aux possibilités d’emploi civil, M. McDaniel a avancé qu’il fallait aider les membres des FAC en voie de libération à transférer leurs compétences militaires, y compris en matière de travail d’équipe, du contexte militaire vers « le contexte civil ».

Enfin, la colonelle Lisa Noonan, directrice des services et politiques de transition au sein du Groupe de transition des Forces armées canadiennes, a déclaré qu’en 2020, les FAC ont créé la direction Engagement et partenariats avec la transition militaire afin d’offrir des services aux membres des FAC en voie de libération[35]. Selon elle, ces services comprennent l’accès à des « organismes tiers » qui fournissent des services de transition, de sensibilisation et d’autres types de programmes et de services à « à tous les membres uniques des FAC », y compris les femmes, les peuples autochtones et les personnes « originaires de différentes cultures[36] ».

Prestation de services de soins de santé continus

Des témoins ont attiré l’attention sur les difficultés que rencontrent les membres des FAC et les vétérans pour accéder aux services de soins de santé dans les systèmes de soins de santé civils pendant et après leur transition vers la vie civile. Le major-général Bilodeau a affirmé que la transition du système de soins de santé des FAC à un système de soins de santé civil « pose un problème » et a souligné que les systèmes civils ne sont pas en mesure de répondre aux besoins des membres des FAC en voie de libération. Selon Mme Tam-Seto, les systèmes de santé civils souffrent « d’un manque de sensibilisation à la réalité militaire » requise pour fournir aux membres des FAC, aux vétérans et aux familles des militaires « des soins de qualité répondant aux besoins particuliers en matière de santé qui découlent de leur service militaire ».

En comparant les services fournis aux membres des FAC libérés pour raisons médicales et à ceux qui ne le sont pas, le colonel (à la retraite) Pucci a noté qu’ACC fournit aux premiers des gestionnaires de cas pour les aider à accéder au système de soins de santé civil et à « manœuvrer dans » ce système. Cependant, il a fait valoir que les membres des FAC qui sont libérés et qui n’ont pas de problèmes de santé physique ou mentale sont « simplement livré[s] complètement à [eux]-même[s] » pour accéder aux services de soins de santé civils.

Mme Tam-Seto a déclaré qu’avant d’effectuer une transition vers la vie civile, certains membres des FAC utilisent leurs relations personnelles, qu’elles soient obtenues par l’intermédiaire d’amis ou de membres de leur famille, pour obtenir l’accès à des prestataires de soins de santé primaires dans un système de soins de santé civil. Elle a soutenu que, pour les vétérans en général et en particulier pour ceux qui souffrent de maladies chroniques ou complexes, l’« arrêt brusque des services [à la suite de leur transition vers la vie civile] risque toutefois d’en priver plusieurs de soins pendant une certaine période ». Elle a également affirmé que certains vétérans ont dû se tourner vers les urgences des hôpitaux et les cliniques sans rendez-vous pour recevoir des soins de santé de base. En outre, selon elle, « [i]l est injuste que les anciens combattants soient obligés d’aller chercher eux-mêmes des soins de santé, notamment en raison de problèmes de santé qu’ils ont contractés dans le cadre de leur travail », et les membres des FAC et les vétérans devraient bénéficier d’un système de soutien qui facilite leur transition vers la vie civile.

Selon le colonel (à la retraite) Pucci, les vétérans rencontrent un certain nombre de difficultés pour bénéficier de services de santé adéquats après leur retour à la vie civile. Il a précisé que certains vétérans doivent « parcourir de longues distances pour se rendre dans les établissements de santé, ce qui peut être fatigant, dispendieux et, bien sûr, chronophage », et a souligné le risque accru de complications de santé et de retards dans le traitement résultant des longs délais d’attente pour les rendez-vous médicaux. Il a donc proposé de créer un « organisme indépendant » pour faciliter la transition des membres des FAC du système de santé militaire vers le système de santé civil, soulignant que les vétérans veulent « avoir accès [à des soins de santé] dès leur retraite. C’est tout ce qu’ils demandent ». Selon lui, un tel organisme, qui ne serait pas affilié aux FAC ou à ACC, superviserait les travaux d’un groupe de travail composé de représentants du secteur des soins de santé et de vétérans et demanderait au groupe de travail de procéder à une évaluation des modèles de soins primaires pour les vétérans au sein des systèmes de soins de santé civils et dans d’autres pays.

Des témoins ont également abordé l’expression d’état « attribuable au service[37] » en ce qui concerne les membres des FAC libérés pour des raisons médicales. M. Lick a notamment souligné que « des procédures moins laborieuses et plus rapides relativement aux décisions concernant un état attribuable au service et le règlement des prestations amélioreraient considérablement le processus de transition » pour les membres concernés. Il a également déclaré que les FAC « seraient les mieux placées » pour prendre les décisions relatives à un état attribuable au service, avant d’ajouter ce qui suit :

[P]lus tôt avant la libération des [membres par les] FAC il est déterminé que la blessure est liée au service, et meilleure sera la décision à ACC. Elle sera aussi plus rapide. Ce que nous avons déjà recommandé et que nous continuons de recommander, c’est de déterminer si un état est attribuable au service avant la libération [d’un membre], afin que les prestations [et les soins de santé que le membre] devrait recevoir lui soient accordé[s] beaucoup plus rapidement.

La colonelle (à la retraite) Jardine a signalé la nécessité de connaître le nombre « de demandes [de prestations d’invalidité présentées par des vétérans à ACC qui] sont refusées en raison de l’attribution au service ». Elle a également mentionné que « les officiers d’entraide de la Légion [royale canadienne] » pourraient aider les vétérans à présenter des demandes d’invalidité liées à l’attribution au service.

Mme Tam-Seto a proposé que le gouvernement fédéral collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour faciliter l’accès des membres des FAC et des vétérans aux systèmes de soins de santé civils. Elle a également souligné la nécessité pour le gouvernement de « continuer de fournir des soins de santé bien au‑delà de la date de libération du militaire jusqu’à ce que celui‑ci trouve un médecin dans le système provincial ».

Le major-général Bilodeau a abordé un certain nombre de mesures prises par les FAC, en collaboration avec ACC et divers autres intervenants, pour faciliter la transition des membres des FAC vers les systèmes de soins de santé civils. Il a mentionné un processus qui permet de « garder nos membres en uniforme plus longtemps afin de leur assurer une transition sécuritaire » et a déclaré que ce processus « nous permet de faire le pont, en quelque sorte, compte tenu du problème de disponibilité des ressources » dans les systèmes de soins de santé civils.

Même si certains fournisseurs de services aux membres des FAC, aux vétérans et aux familles des militaires dans les systèmes de soins de santé civils en font « davantage » pour améliorer leurs connaissances relatives à la « réalité militaire », Mme Tam-Seto a affirmé qu’il « y a encore toutefois beaucoup à faire pour la formation et l’accréditation des professionnels de la santé ». Le major-général Bilodeau a parlé de la coopération entre les FAC, ACC et le Collège des médecins de famille du Canada pour élaborer un document visant à « encourager » les médecins de famille qui travaillent dans les systèmes de soins de santé civils à fournir des soins aux membres des FAC et aux vétérans et à aider les médecins de famille à « comprendre ce que vit un vétéran ».

En ce qui concerne les dossiers médicaux des membres des FAC, M. Roy a affirmé que ces dossiers sont « totalement accessible[s] sous forme électronique », et M. Harris a déclaré que les dossiers pouvaient suivre « un peu les militaires » qui passent de la vie militaire à la vie civile. De plus, M. Harris a souligné que les dossiers médicaux des membres ne seraient pas transférés des FAC à ACC si l’accès aux programmes et aux services de santé d’ACC n’était pas nécessaire. Cependant, il a noté qu’ACC pourrait demander ces dossiers si l’accès à ces programmes et services était demandé.

Mme Tam Seto a soutenu qu’il n’existe pas de « mécanisme cohérent » permettant de transférer les dossiers médicaux d’un membre des FAC du système de soins de santé militaire à un système de soins de santé civil. Le major-général Bilodeau a laissé entendre qu’un tel transfert n’est pas « facile à gérer » et a soutenu que les FAC ont dû élaborer « 13 solutions différentes, le pays comptant 10 provinces et 3 territoires ». Il a également souligné que l’un des défis liés à ces transferts consiste à convertir les fichiers électroniques en copies papier, puis à numériser ces copies pour les transférer dans un système d’archivage médical provincial ou territorial.

La sénatrice Patterson a réclamé la mise en œuvre d’une « politique de carnet de santé fluide » qui faciliterait le transfert des dossiers médicaux d’un membre des FAC du système de soins de santé militaire vers un système de soins de santé civil. En outre, M. Booth a encouragé la création d’un dépôt numérique, c’est-à-dire un « coffre-fort numérique pour les dossiers médicaux des vétérans », qui faciliterait le transfert électronique des dossiers médicaux afin que les vétérans puissent donner accès à leurs dossiers médicaux aux prestataires de soins de santé civils. Il a également plaidé en faveur d’une étude de faisabilité concernant le transfert des dossiers médicaux des vétérans à l’usage des « professionnels de la santé », estimant qu’une telle étude pourrait permettre aux chercheurs de mieux comprendre les questions liées au transfert des dossiers médicaux.

Le major-général Bilodeau a fait remarquer qu’une mauvaise gestion du transfert des dossiers médicaux des membres des FAC pourrait avoir des répercussions négatives sur leur transition à la vie civile. Il a fait référence à une initiative récemment lancée par les FAC qui facilite l’accès des représentants d’ACC à ces dossiers « afin de faciliter le transfert d’information ». De plus, M. Harris a souligné que les FAC et ACC devaient travailler ensemble pour s’assurer qu’ACC puisse avoir accès aux dossiers médicaux requis.

Mme Ogilvie et M. Harris ont évoqué un projet pilote de télémédecine, introduit en 2022, qui permet aux membres des FAC en transition vers la vie civile, ainsi qu’aux vétérans et aux familles de militaires, d’accéder à un réseau de prestataires de soins de santé, comme un médecin ou une infirmière praticienne. M. Harris a souligné que le projet pilote fournit des services de santé temporaires aux membres des FAC libérés et à leurs familles en attendant un accès permanent aux services dans un système de soins de santé civil.

Réflexions et recommandations du Comité

La ressource la plus précieuse des FAC est ses membres. Le Comité est d’avis que le gouvernement du Canada doit démontrer son engagement à protéger cette ressource irremplaçable en accordant la priorité à la santé et au bien-être des membres des FAC et en répondant aux besoins de leurs familles. Il est également impératif que, lorsque le service militaire d’un membre des FAC prend fin, la transition vers la vie civile se fasse aisément, avec un accès complet, opportun et harmonieux aux services, aux mesures de soutiens et avantages sociaux dont ils ont besoin et qu’ils méritent.

Les contraintes financières et en matière de ressources humaines ont affecté les services de soins de santé fournis aux membres des FAC. Dans ses rapports précédents, le Comité a formulé des recommandations concernant les problèmes de recrutement et de rétention au sein des FAC; la mise en œuvre de ces recommandations pourrait contribuer à remédier à certaines de ces contraintes. Cependant, en fin de compte, un financement supplémentaire pour ces services sera probablement nécessaire, notamment pour concevoir et mettre en œuvre des programmes et d’autres mesures relatives à la santé mentale et aux besoins en matière de santé des femmes des FAC et des familles des militaires.

La transition de la vie militaire à la vie civile peut être difficile pour certains membres des FAC. Le Comité estime que les efforts visant à rendre le processus de transition aussi harmonieux que possible doivent comporter une série de mesures. Celles-ci devraient notamment consister à préparer adéquatement les membres des FAC à leur libération du service militaire, à renforcer la collaboration entre les FAC et ACC, à veiller à ce que les membres des FAC en voie de libération aient accès aux systèmes de soins de santé civils avant la fin de leur service militaire, à accroître les services de soutien social pour les membres des FAC, les vétérans et les familles des militaires et à fournir des services adaptés aux besoins des femmes des FAC et du personnel de diverses identités de genre.

Le Comité reconnaît que le gouvernement du Canada a pris certaines mesures pour résoudre quelques problèmes liés aux soins de santé et aux services de transition des FAC, mais que d’autres sont nécessaires, et il recommande donc ce qui suit :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada s’engage à faire du Canada un chef de file international dans la recherche, le diagnostic et le traitement continu des blessures mentales ou physiques causées par le service militaire, de sorte que les membres des Forces armées canadiennes (FAC) et les vétérans soient pleinement soutenus, à la fois pendant et après leur service.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada étudie les possibilités de réformer le modèle actuel de financement des soins de santé des FAC dans le cadre duquel les organismes de santé provinciaux facturent souvent aux membres des FAC des frais de service plus élevés que la normale pour obtenir le traitement médical dont ils ont besoin.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada collabore avec l’industrie pour accélérer l’approbation de nouvelles technologies et modalités de traitement pour les Forces armées canadiennes.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada établisse une définition cohérente et globale des traumatismes liés au stress opérationnel, du traumatisme sexuel militaire et de la blessure morale qui puisse être utilisée par les professionnels de la santé et les décideurs, particulièrement comme définition partagée aux fins de l’admissibilité aux programmes des Forces armées canadiennes et d’Anciens Combattants Canada.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada investisse davantage de ressources et de fonds dans la recherche en matière de santé, y compris en santé mentale, et l’impact du service dans les FAC sur les femmes afin de fournir les ressources médicales nécessaires, y compris en santé mentale, en particulier en ce qui concerne la fertilité, la ménopause, les défis périnataux et la suppression des menstruations.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada collabore avec les Forces armées canadiennes pour réviser le processus de prise de rendez-vous afin de réduire les temps d’attente pour les traitements de santé mentale et les traitements nécessitant un spécialiste.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada envisage d’étendre tous les services de santé offerts sur les bases aux familles des militaires.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada augmente le financement des centres de ressources pour les familles des militaires.

Recommandation 9

Que le gouvernement du Canada prenne des mesures concrètes pour veiller à ce que les militaires qui en ont besoin soient mis en contact avec un médecin de famille et les spécialistes compétents lors de leur libération afin d’assurer la continuité des soins.

Recommandation 10

Que le gouvernement du Canada crée un processus plus efficace de transfert des dossiers de santé entre les administrations fédérale et provinciales en collaborant avec Canada sans faille pour moderniser son utilisation de la technologie et le stockage hautement sécurisé des données.

Recommandation 11

Que le gouvernement du Canada veille à ce qu’une détermination de blessure attribuable au service par un médecin ou un spécialiste des FAC soit considérée comme suffisante pour les besoins d’Anciens Combattants Canada (ACC) et que le vétéran n’ait pas besoin d’un examen supplémentaire pour avoir accès au traitement, aux avantages sociaux ou aux mesures de soutien.

Recommandation 12

Que le gouvernement du Canada veille à ce que toutes les ressources pertinentes en matière de santé soient disponibles pour les membres des FAC dont le dossier est transféré à ACC au moment où ils sont libérés de l’armée.

Recommandation 13

Que le gouvernement donne aux Forces armées canadiennes la capacité de maintenir en poste les membres libérés pour des raisons médicales jusqu’à ce que tous les avantages sociaux et services des Forces armées canadiennes, d’Anciens Combattants Canada et du Régime d’assurance-revenu militaire aient été confirmés et mis en place.

Recommandation 14

Que le gouvernement du Canada collabore avec les organismes des provinces et des territoires chargés d’autoriser l’exercice de la médecine pour permettre que les permis soient accordés en priorité aux médecins des pays alliés de l’OTAN qui souhaitent s’engager dans les Forces armées canadiennes.

Recommandation 15

Que le gouvernement du Canada collabore avec les Forces armées canadiennes pour assurer des soins de santé, des salaires et des emplois concurrentiels aux membres des FAC, aux entrepreneurs et aux employés du secteur public.

Recommandation 16

Que le gouvernement du Canada réintègre les militaires qui ont été blessés, chaque fois qu’il est possible, plutôt que de les libérer parce qu’ils ne respectent pas la doctrine de l’universalité du service.

Recommandation 17

Que le gouvernement du Canada effectue un examen exhaustif et comparatif des services de santé et de transition offerts par les pays alliés afin d’apprendre et éventuellement d’adopter des pratiques susceptibles d’améliorer la qualité des soins dont bénéficient les membres actifs et retraités des Forces armées canadiennes.

Recommandation 18

Que le gouvernement du Canada, en particulier le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes, entame un processus de consultation avec des experts en médecine militaire, des travailleurs sociaux, des psychologues et d’anciens membres des Forces armées canadiennes, afin d’établir une base de données nationale de ces professionnels essentiels pour assurer aux membres sortants une transition harmonieuse vers les services de santé lorsqu’ils quittent les FAC.

Recommandation 19

Que le gouvernement du Canada donne la priorité aux efforts visant à réduire les délais d’attente pour les membres des FAC libérés pour des raisons médicales avant que leur blessure soit attribuée à leur service.

Recommandation 20

Que le gouvernement du Canada intensifie ses efforts pour remplacer l’infrastructure médicale vieillissante des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale.

Recommandation 21

Que le gouvernement du Canada remplace le système actuel et désuet de tenue des dossiers de santé utilisé par les Forces armées canadiennes et le ministère de la Défense nationale par un système de dossiers médicaux numériques, dans lequel les informations médicales des membres des Forces armées canadiennes (FAC) soient facilement accessibles aux employés d’Anciens Combattants Canada (ACC), au personnel médical militaire et aux médecins civils, afin de faciliter l’accès aux dossiers médicaux dans toutes les entités, de déterminer les soins médicaux auxquels les membres ont droit et d’assurer une transition harmonieuse lors de leur libération des FAC.

Recommandation 22

Que le gouvernement du Canada mette immédiatement en œuvre les recommandations suivantes, formulées par le Bureau de l’Ombudsman et déjà acceptées par le gouvernement du Canada, dans les rapports Rangers canadiens — Une enquête systémique des facteurs qui ont une incidence sur les droits aux soins de santé et aux prestations connexes des Rangers et Examen systématique des options d’indemnisation pour les réservistes malades et blessés :

  • « Nous recommandons au ministère de la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes d’éliminer l’ambiguïté et l’incohérence dans l’application des termes du cadre stratégique pour les réservistes, en mettant l’accent sur les droits aux soins de santé dès que possible ».
  • « Nous recommandons au ministère de la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes de se conformer au processus actuel de déclaration des maladies et des blessures afin que les Rangers canadiens ne soient pas empêchés involontairement d’avoir accès aux soins de santé et aux prestations connexes ».
  • « Nous recommandons au ministère de la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes d’assurer la prestation de soins de santé aux Rangers canadiens auxquels ils ont droit, soit : en discutant avec les Rangers canadiens en vue de cerner quels sont les obstacles qui les empêchent d’avoir accès aux soins de santé des Forces armées canadiennes, ainsi que leurs besoins en matière de soins de santé au sein de leurs contextes sociaux et culturels et en déterminant et en mettant en œuvre un modèle de prestation de services pour les soins de santé des Forces armées canadiennes qui répond aux besoins cernés par les Rangers canadiens ».
  • « Nous recommandons que le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes prennent des mesures concrètes pour s’assurer que les Rangers canadiens ont une compréhension claire de l’importance de signaler les blessures et pour améliorer leur connaissance au sujet de leurs droits en matière de soins de santé et prestations connexes, soit :
    • ... Amalgamer l’information sur les droits aux soins de santé et les prestations connexes des Rangers canadiens;
    • ... distribuer cette information aux Rangers canadiens dans diverses langues et formats, au besoin, d’ici l’automne 2018;
    • ... s’assurer que cette information est intégrée dans la formation officielle et toute autre formation pertinente offerte aux Rangers canadiens, d’ici l’automne 2018. »
  • « Il est recommandé que le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes améliorent la gouvernance et l’administration du processus d’indemnisation de la Force de réserve en : a) créant une autorité fonctionnelle responsable du processus d’indemnisation de la Force de réserve qui peut renforcer les politiques et les directives applicables qui sont en place; b) modifiant l’Instruction du personnel militaire des Forces canadiennes 20/04 pour assurer la clarté et l’uniformité quant à la cessation de service en raison de blessures et de maladies attribuables au service; c) harmonisant le processus d’indemnisation de la Force de réserve en : i) uniformisant et simplifiant les formulaires; ii) s’assurant que les unités transmettent les demandes directement au Directeur — Gestion du soutien aux blessés aux fins de décision, dans les 30 jours suivant la présentation de la demande; d) établissant une directive et ordonnance administrative de la défense afin de codifier le processus d’indemnisation de la Force de réserve comprenant des normes de service ou une stratégie de mesure du rendement pour confirmer l’efficacité du processus en entier. »
  • « Il est recommandé que le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes prennent des mesures concrètes pour mieux faire connaître les options d’indemnisation offertes aux réservistes malades et blessés en : a) rendant les documents, politiques, procédures et formulaires pertinents facilement accessibles sur Internet et sur le réseau d’information de la Défense; b) affectant les ressources nécessaires à l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan de communications. Ceci inclurait des activités, produits de communication, calendriers et mesures pour sensibiliser les réservistes et les informer des options d’indemnisation à leur disposition; c) officialisant la formation sur les indemnités de la Force de réserve et la Loi sur l’indemnisation des agents de l’État et en définissant les rôles et responsabilités pour tous les réservistes, y compris la direction au sein de ces processus. ».

Recommandation 23

Que le gouvernement du Canada mette immédiatement en œuvre les recommandations suivantes, formulées par le Bureau de l’ombudsman et déjà acceptées par le gouvernement du Canada, dans le rapport Soldats à temps partiel, blessures à temps plein : Une étude systémique de la Première réserve du Canada et des traumatismes liés au stress opérationnel :

  • « Nous recommandons que le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes expliquent et administrent mieux le droit et l’admissibilité des réservistes aux soins de santé, aux évaluations de santé périodiques et au futur emploi dans la Réserve par les moyens suivants : a) Terminer la révision des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, chapitre 34 — « Services de santé », en cours depuis 2009, afin de préciser clairement tous les droits aux soins pour tous les réservistes; b) Intégrer l’exigence pour les réservistes de subir des évaluations de santé périodiques de routine (ou pour déterminer le maintien de leur préparation médicale) aux Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes chapitre 34 — « Services de santé » révisés (ainsi qu’aux politiques et aux directives connexes). Une fois cette exigence codifiée, s’assurer de disposer des ressources suffisantes pour garantir le maintien de leur préparation médicale; c) Confirmer dans l’Instruction du personnel militaire des Forces canadiennes 20/04 que les réservistes dont les contraintes à l’emploi pour raisons médicales le permettent puissent obtenir un nouvel emploi, malgré l’existence d’une catégorie médicale temporaire. »
  • « Nous recommandons au ministère de la Défense nationale et aux Forces armées canadiennes d’adopter des étapes mesurables pour mieux faire connaître leurs droits à tous les réservistes, en particulier ceux qui pourraient être malades et blessés de la façon suivante : Rendre facilement accessibles les documents, les politiques, les procédures et les formulaires pertinents sur Internet et sur le réseau d’information de la Défense et s’assurer que cette information demeure à jour; b) Engager les ressources requises pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan de communication qui inclurait des activités, des produits, des échéances et des mesures pour le rejoindre et informer les réservistes; c) Assurer que la formation sur les droits aux soins de santé (actuellement donnée par les équipes de liaison médicale de l’ambulance de campagne) est efficace et donnée obligatoirement à toutes les unités de réserve; d) Assurer que les unités de réserve ont reçu le nombre approprié de jours de formation pour donner la formation obligatoire à leurs membres, et que ces derniers complètent la formation. » 

Recommandation 24

Que le gouvernement du Canada, conformément aux pratiques exemplaires de l’industrie de l’assurance-maladie et pour la prévention des maladies chroniques, supprime l’exigence selon laquelle les membres des Forces armées canadiennes doivent obtenir une ordonnance d’un médecin pour avoir accès aux traitements chiropratiques qui peuvent être remboursés par l’assurance. De plus, le gouvernement devrait augmenter le montant annuel qui peut être réclamé pour de tels traitements.

Recommandation 25

Que le gouvernement du Canada évalue et teste, de façon continue, la pertinence des uniformes, de l’équipement et des autres pièces d’équipement pour les femmes des Forces armées canadiennes. En outre, lors de ces évaluations, le gouvernement devrait appliquer une optique d’analyse comparative entre les sexes plus afin de s’assurer que les femmes des Forces armées canadiennes peuvent s’acquitter de leurs tâches en toute sécurité et confortablement.

Recommandation 26

Que le gouvernement du Canada offre aux membres des Forces armées canadiennes le plein accès aux soins de santé reproductive, y compris la préservation de la fertilité et les prestations relatives traitements.

Recommandation 27

Que le gouvernement du Canada établisse des normes visant à garantir que les ressources médicales disponibles pour les femmes des Forces armées canadiennes pendant leur déploiement répondent à leurs besoins, quel que soit l’endroit où elles servent. En outre, le gouvernement devrait intégrer l’éducation à la santé des femmes dans la formation préalable au déploiement.

Recommandation 28

Que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les parties prenantes concernées, prenne des mesures immédiates pour éliminer la stigmatisation concernant les services de santé mentale pour les membres des Forces armées canadiennes et les familles des militaires, y compris par la suppression du crime d’automutilation prévu pour les membres des Forces armées canadiennes à l’article 98 de la Loi sur la défense nationale.

Recommandation 29

Que le gouvernement du Canada sensibilise davantage les membres des Forces armées canadiennes aux avantages sociaux, aux services et aux mesures de soutien en matière de santé physique et mentale dont ils peuvent bénéficier pendant leur service et après leur libération des Forces armées canadiennes.

Recommandation 30

Que le gouvernement du Canada, dans le respect des compétences provinciales et territoriales et en collaboration avec les intervenants concernés, veille à ce que les fournisseurs de soins de santé mentale et autres des cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel aient reçu une formation adéquate pour offrir des traitements et des programmes adaptés aux situations impliquant un traumatisme sexuel militaire. Par ailleurs, le gouvernement devrait concevoir et mettre en œuvre un programme de formation en santé mentale pour les membres des Forces armées canadiennes axé sur la façon de réagir à la divulgation d’une agression sexuelle.

Recommandation 31

Que le gouvernement du Canada collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi qu’avec les autres intervenants concernés, pour veiller à ce que tous les membres des familles des militaires canadiens aient accès à des services de santé mentale et à un soutien qui soient à la fois adéquats et adaptés à leurs besoins.

Recommandation 32

Que le gouvernement du Canada, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, intensifie ses efforts pour accroître la disponibilité de services de garde d’enfants abordables et de médecins de famille pour les familles des militaires, et pour en assurer l’accès.

Recommandation 33

Que le gouvernement du Canada réaffirme l'importance des soins spirituels et religieux pour les membres des FAC et leurs familles et adopte une politique d'inclusion dans les services d'aumônerie qui garantit que tous les membres des FAC peuvent recevoir des soins pastoraux dans toutes les religions, confessions et spiritualités. En outre, le gouvernement doit réaffirmer que les aumôniers de toutes religions et confessions sont les bienvenus dans les services d'aumônerie et sont protégés par la Charte des droits et libertés.


[1]              Le 6 juin 2023, le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes a adopté la motion suivante : « Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement et aux fins de la motion adoptée le 6 octobre 2022, le Comité de la défense nationale entreprenne une étude sur le système de santé militaire et la prestation de services de santé dans le cadre du Groupe des [S]ervices de santé des Forces canadiennes, et que les témoignages que le Comité permanent des anciens combattants a recueillis dans le cadre de son étude sur les expériences vécues par les vétéranes soient aussi pris en considération. » Le rapport tient compte des témoignages entendus entre le 30 mars et le 15 juin 2023.

[2]              Mémoire au Comité par l’Association chiropratique canadienne. Association chiropratique canadienne, « Système de santé militaire et prestation de services de santé et de transition au sein du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes », mai 2023.

[3]              Ibid.

[4]              Ibid.

[5]              Ibid.

[6]              Rapport final du Groupe consultatif de la ministre de la Défense nationale sur le racisme systémique et la discrimination — Janvier 2022 contient les recommandations suivantes à la section 6 « Redéfinir le rôle de l’aumônerie » :

·    6.1 Ne pas envisager d’embaucher en tant que guides spirituels ou représentants et représentantes multiconfessionnels des candidats et des candidates à l’aumônerie affiliés à des groupes religieux dont les valeurs ne sont pas conformes à celles de l’Équipe de la Défense. Sinon, l’Équipe de la Défense envoie un message incohérent.

·    6.2 Sélectionner des aumôniers et des aumônières qui représentent de nombreuses croyances, y compris des formes de spiritualité au-delà des croyances abrahamiques.

·    6.3 Revoir le processus de sélection pour s’assurer que, en plus des capacités d’écoute, de l’empathie et de l’intelligence émotionnelle, les aumôniers et aumônières possèdent une appréciation intrinsèque de la diversité et une volonté de remettre en question leurs propres croyances.

·    6.4 Trouver des moyens d’accorder des équivalences scolaires, par exemple aux gardiens et aux gardiennes du savoir, plutôt que de s’en tenir strictement à la condition préalable selon laquelle tous les aumôniers et aumônières doivent être titulaires d’une maîtrise.

[7]              Par exemple, voir S. Trautmann et coll., « Prevalence and severity of mental disorders in military personnel: a standardised comparison with civilians », Epidemiology and Psychiatric Sciences, 26 (2) : avril 2017 [disponible en anglais seulement]; et Rachel A. Plouffe et coll., « Validation du continuum de santé mentale : Questionnaire abrégé au sein du personnel des Forces armées canadiennes », Statistique Canada, 18 mai 2022.

[8]              Par exemple, voir Alain Brunet et Eva Monson, « Suicide Risk Among Active and Retired Canadian Soldiers: The Role of Posttraumatic Stress Disorder, Canadian Journal of Psychiatry », 59 (9) : septembre 2014; Kristen Simkus et coll., « Étude de 2019 sur la mortalité par suicide chez les vétérans : Période de suivi de 1976 à 2014 », Anciens Combattants Canada (dernière mise à jour le 18 juin 2020); et Alexandra Heber, Amanda Kopp et Linda VanTil, « Étude de 2021 sur la mortalité par suicide chez les vétérans : Période de suivi de 1975 à 2016 », Anciens Combattants Canada, 31 décembre 2021.

[9]              Mémoire au Comité par la Dre Catherine Phillips.

[10]            Chambre des communes, Comité permanent des anciens combattants (ACVA), Témoignages, 20 avril 2023, 1835 (Maya Eichler, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’innovation sociale et l’engagement communautaire, Université Mount Saint Vincent).

[11]            ACVA, Témoignages, 1er juin 2023, 1840 (lieutenante-générale Lise Bourgon, chef du personnel militaire par intérim, Forces armées canadiennes).

[12]            ACVA, Témoignages, 20 avril 2023, 1840 (Sayward Montague, directrice de la défense des intérêts, Association nationale des retraités fédéraux).

[13]            Mémoire au Comité par la Dre Karen Breeck. Major à la retraite M.Sc.S, M.D., « Mémoire complémentaire pour l’étude du comité NDDN sur le “système de santé militaire et la prestation de services de santé dans le cadre du Groupe des Services de santé des Forces canadiennes, ainsi que sur les défis associés à la libération médicale et à la transition à la vie civile, en mettant particulièrement l’accent sur la santé mentale, les traumatismes liés au stress opérationnel et la disponibilité des soins de santé pour les membres des familles des Forces armées canadiennes” », 12 mai 2023.

[14]            Ibid.

[15]            ACVA, Témoignages, 27 avril 2023, 1840 (lieutenante-colonelle [à la retraite] Karen McCrimmon).

[16]            ACVA, Témoignages, 17 avril 2023, 1605 (Christine Wood, porte-parole des vétérans).

[17]            ACVA, Témoignages, 1er juin 2023, 1840 (lieutenante-générale Lise Bourgon).

[18]            Mémoire au Comité par la Dre Karen Breeck.

[19]            Ibid.

[20]            ACVA, Témoignages, 17 avril 2023, 1710 (majore [à la retraite] Donna Riguidel).

[21]            Mémoire au Comité par la Dre Karen Breeck.

[22]            Ibid.

[23]            ACVA, Témoignages, 30 mars 2023, 1900 (Laura Kelly, directrice, Examen et analyse stratégiques, Bureau de l’ombudsman des vétérans).

[24]            Ibid., 1915.

[25]            Mémoire au Comité par Duane Schippers. Megan Nichole Poole, « Les femmes vétérans des Forces armées canadiennes et de la Gendarmerie royale du Canada : une analyse documentaire exploratoire » [disponible en anglais seulement], Journal of Military, Veteran and Family Health, 2021.

[26]            Le gouvernement du Canada définit la « Table des invalidités » comme « un instrument législatif dont on se sert pour évaluer la gravité d’une invalidité et déterminer le montant des prestations ». Voir gouvernement du Canada, « Table des invalidités », 20 septembre 2022.

[27]            ACVA, Témoignages, 17 avril 2023, 1630 (Christine Wood).

[28]            ACVA, Témoignages, 17 avril 2023, 1545 (majore [à la retraite] Donna Riguidel).

[29]            ACVA, Témoignages, 12 juin 2023, 1645 (Steven Harris, sous-ministre adjoint, Secteur de la prestation des services, ministère des Anciens Combattants).

[30]            ACVA, Témoignages, 12 juin 2023, 1700 (Trudie MacKinnon, directrice générale intérimaire, Direction générale des opérations centralisées, ministère des Anciens Combattants).

[31]            ACVA, Témoignages, 5 juin 2023, 1605 (caporale-chef Jacqueline Wojcichowsky).

[32]            Bureau de l’Ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Sur le front intérieur : Évaluation du bien-être des familles des militaires canadiens en ce nouveau millénaire, novembre 2013.

[33]            Paige LeClair, « Canadian Government announces new Canadian Armed Forces Transition Group », Canadian Military Family Magazine, 11 décembre 2018 [disponible en anglais seulement].

[34]            ACVA, Témoignages, 1er mai 2023, 1535 (Colonelle Helen Wright, directrice de la protection de la santé des forces, Groupe de santé des Forces canadiennes, Forces armées canadiennes, ministère de la Défense nationale).

[35]            ACVA, Témoignages, 1er mai 2023, 1540 (colonelle Lisa Noonan, directrice des services et politiques de transition, Groupe de transition des forces armées canadiennes, Forces armées canadiennes).

[36]            Ibid.

[37]            Selon le Bureau de l’ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, l’expression « attribuable au service » sert à indiquer qu’une maladie ou une blessure « a été causée directement ou a été aggravée par le service militaire ». Voir Bureau de l’ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, Déterminer si un état est attribuable au service pour les militaires en voie d’être libérés pour raisons médicales.