OGGO Rapport du Comité
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Passage du Régime de soins de santé de la fonction publique de la Sun Life à la Canada Vie
Introduction
Le 1er juillet 2023, la Compagnie d’Assurance du Canada sur la Vie (la Canada Vie) est devenue le nouvel administrateur du Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP). La Canada Vie a remplacé la Compagnie d’assurance-vie Sun Life du Canada (la Sun Life), qui administrait le RSSFP depuis 1996. Depuis le changement d’administrateur, plusieurs problèmes ont été signalés par les participants et leurs personnes à charge, notamment l’impossibilité de parler à un agent lorsqu’on appelle la Canada Vie ainsi que des retards et des refus dans le traitement des demandes de règlement et les paiements.
Informé de ces problèmes, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes (le Comité) a adopté la motion suivante le 17 octobre 2023 :
Que, conformément à l’article 108(3)c) du Règlement, le Comité entreprenne une étude du passage du Régime de soins de santé de la fonction publique (RSSFP) de la Sun Life à la compagnie d’assurance Canada Vie et que pour ce faire, le Comité s’intéresse notamment :
- à la qualité de la couverture d’assurance en tenant compte de la réalité et des besoins des employés de la fonction publique fédérale;
- à l’efficience et à l’efficacité du nouveau régime d’assurance particulièrement en ce qui concerne le service de réclamation en ligne et le service téléphonique offert aux participants et aux professionnels de la santé;
- aux mécanismes utilisés par Services publics et Approvisionnement Canada [SPAC] dans le cadre de l’octroi du contrat du RSSFP pour s’assurer de la capacité du contractant à desservir l’ensemble de la fonction publique fédérale et à offrir les services attendus;
- ainsi qu’aux mesures qui seront mises en place afin de rétablir la situation[1].
La motion demandait aussi au Comité de présenter ses constatations et recommandations à la Chambre des communes et au gouvernement de déposer une réponse complète.
Au cours des deux réunions tenues aux fins de cette étude, le Comité a entendu les témoignages de la Canada Vie, de SPAC, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) et de l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC). Le Comité a aussi reçu trois mémoires, dont un de l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP)[2]. Le Comité a également reçu des courriels de participants du régime. Pour des raisons de confidentialité, les renseignements contenus dans ces courriels ne seront pas mentionnés dans ce rapport, bien qu’ils aient été utiles aux travaux du Comité. Le présent rapport donne d’abord un aperçu contextuel du RSSFP, avant de formuler des observations et des recommandations issues de l’étude du Comité.
Contexte
Le Régime de soins de santé de la fonction publique
Le RSSFP est un régime d’assurance-maladie négocié, facultatif, offert par l’employeur aux employés actifs et retraités de la fonction publique fédérale, y compris aux membres de la Gendarmerie royale du Canada et aux membres des Forces armées canadiennes, ainsi qu’à des groupes désignés, tels que les parlementaires. Le régime offre une protection supplémentaire (complémentaire au régime de soins de santé provincial ou territorial) aux participants qui résident au Canada. Il offre une protection complète aux personnes déployées ou affectées à l’étranger par l’employeur ou qui vivent à l’étranger en tant que retraitées. Avec plus de 1,7 million de participants (participants et personnes à charge), le RSSFP est le plus important régime de soins de santé offert par l’employeur au pays. On a également dit au Comité qu’il s’agit d’un « régime extrêmement complexe » dont les participants sont « réparti[s] démographiquement sur l’ensemble du territoire canadien ». De plus, le régime couvre une vaste gamme de services et de médicaments.
La gestion du régime par la Canada Vie est supervisée par l’Administration du Régime de soins de santé de la fonction publique (l’Administration), une société sans but lucratif relevant du président du Conseil du Trésor et du Comité des partenaires (représentant l’employeur, les employés et les retraités). L’Administration est, entre autres, chargée de gérer le processus d’appels liés aux demandes de règlement. Selon Marie-Chantal Girard, sous-ministre adjointe principale au SCT, son organisation reçoit aussi « en permanence des informations sur l’état du régime » de l’Administration et du Comité des partenaires, ce qui aide l’employeur à suivre la mise en œuvre du régime et à savoir où se situerait les problèmes.
Actualisation de la couverture et nouvel administrateur
Selon Mollie Royds, sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale de l’Approvisionnement, SPAC, le gouvernement « a entamé le processus d’appel d’offres pour [l’administration du régime] en 2018 ». David Prest, directeur exécutif, Politiques et programmes d’avantages sociaux, Relations avec les employés et rémunération globale, SCT, a expliqué que le « nouvel appel d’offres visait notamment à améliorer le contrat dans le domaine de la détection des fraudes, de la vérification, de la reddition de comptes, de l’écologisation du gouvernement et de l’offre de perspectives aux [Autochtones] dans le cadre du nouveau contrat administratif du [RSSFP] ».
Mme Royds a déclaré que « trois offres ont été soumises par des acteurs majeurs de l’administration des régimes de soins de santé[3] ».
[Les soumissions] ont été évaluées en fonction des critères techniques et financiers du gouvernement. Il est significatif que les trois offres aient été jugées conformes, celle de Canada Vie arrivant finalement en tête. Le contrat a été attribué à Canada Vie le 30 novembre 2021. Le contrat actuel est évalué à 514 millions de dollars pour une période de 8,5 ans, et des options sont disponibles pour prolonger le contrat.
Cependant, en octobre 2023, CBC News avait rapporté [en anglais seulement] que la Canada Vie était le seul soumissionnaire, citant la présidente du Conseil du Trésor. Mme Royds a abordé ce sujet lors de son témoignage :
Je ne connais pas le contexte dans lequel la ministre a fait l’observation, mais je peux confirmer que nous avons eu un processus d’appel d’offres distinct pour le régime de soins dentaires des fonctionnaires et des retraités, pour lequel il n’y a eu qu’un seul soumissionnaire conforme, et c’est Canada Vie qui a remporté l’appel d’offres dans ce cas.
Il y a peut-être un malentendu entre les deux régimes, mais je peux confirmer que pour celui-ci, il y avait trois soumissionnaires conformes.
Mme Royds a ajouté qu’à la suite du processus concurrentiel, « [l]e contrat a été attribué à Canada Vie le 30 novembre 2021[4]. » Il s’agit d’un « contrat de services de gestion seulement », c’est‑à‑dire que le régime est conçu et financé par l’employeur et que l’administrateur est engagé en vertu d’un contrat pour offrir des services précis, tels que le traitement des demandes de règlement et les remboursements. Le contrat est d’une valeur de 514 millions de dollars, sa durée est de huit ans et demi et il prévoit des options de prolongation.
Seth Sazant, agent des pensions et des avantages sociaux à l’AFPC, a précisé que le changement d’administrateur de régime était entièrement la responsabilité de l’employeur et que les membres du régime et leurs représentants n’étaient pas au courant de la décision. Dans son mémoire, l’ACEP a recommandé que les syndicats soient invités à jouer « un rôle plus grand lors du renouvellement du RSSFP, de l’appel d’offres et de la transition ».
Mme Royds a précisé qu’avant la transition officielle de la Sun Life à la Canada Vie, il y a eu « une phase de démarrage d’environ 18 mois, au cours de laquelle Canada Vie s’est préparée à prendre en charge l’administration des réclamations ». Pascale Archambault, directrice générale par intérim, Secteur des solutions commerciales et technologiques, SPAC, a expliqué que « [l]a phase de démarrage a servi à préparer l’administration du régime et à tout mettre en place, par exemple le site Web, le processus de réclamation, l’embauche des employés et la recherche de locaux ». Mme Girard a ajouté que « [l]a Sun Life et la Canada Vie sont restées en contact […] pour assurer une transition en douceur ». De même, M. Sazant a déclaré :
Le [RSSFP] est doté d’une autorité administrative chargée de la surveillance du contrat. Celle‑ci a travaillé avec beaucoup de sérieux pendant 18 mois avant le transfert de la Sun Life à la Canada Vie. Elle a consacré ces 18 mois à faire en sorte que les choses se déroulent sans heurts. Évidemment, tout ne s’est pas passé comme prévu, mais il y a eu beaucoup de travail préalable. Je tiens à préciser qu’il ne s’agissait pas simplement d’appuyer sur l’interrupteur et de voir ce qui se passerait. Il y a eu un énorme travail en coulisse.
Le début des opérations, le 1er juillet 2023, a aussi été le commencement d’une période de transition de six mois, que Mme Girard a qualifié de « pratique normale de l’industrie ». Thi Vu, vice-présidente régionale, division des clients collectifs, Région du Québec, Canada Vie, a décrit la transition de l’administration du régime de la Sun Life à la Canada Vie de « la plus importante transition d’un régime de garanties dans l’histoire du Canada ».
Le 1er juillet 2023, la couverture offerte par le régime a également été mise à jour (voir l’annexe A). La couverture du régime n’avait pas été actualisée depuis 2006, malgré, selon Mme Girard, « les progrès considérables réalisés dans le secteur des soins de santé ». D’après elle, « tout ce qui était couvert [avant le 1er juillet 2023] reste couvert ». Elle a précisé que le régime actualisé offre maintenant « un soutien accru en matière de santé mentale et de bien-être ainsi qu’un soutien qui profitera aux personnes âgées, aux familles, aux jeunes adultes, aux personnes en situation de handicap et aux membres de la communauté 2ELGBTQIA+[5] ». Elle a également mentionné que « les mesures de gestion […] testées sur le marché, notamment en ce qui concerne les médicaments génériques obligatoires et l’autorisation préalable, sont conformes aux normes de l’industrie et visent à assurer la viabilité à long terme du régime[6] ». Dans l’ensemble, Mme Girard a qualifié la mise à jour de la couverture d’« amélioration » et de « modernisation [globale] du régime ».
Selon M. Sazant, les négociations relatives à la mise à jour de la couverture ont pris fin en août 2022, « [d]ix mois complets […] avant le passage de la Sun Life à la Canada Vie ». Toujours selon lui, la Canada Vie « a eu amplement le temps de s’y préparer. Lorsque le 1er juillet 2023 est arrivé, il n’y avait pas de surprise pour la Canada Vie à ce moment‑là. Pourtant, l’administration de ce régime — [incluant la possibilité pour les membres d’obtenir par téléphone] des réponses à leurs questions de base et que leurs demandes soient traitées — a été complètement désorganisée pendant des mois. »
En outre, dans un mémoire présenté au Comité, un groupe appelé Employés en situation de handicap de la fonction publique du Canada, a écrit :
Bien que le régime ait été amélioré très légèrement, dans quelques catégories, les changements globaux sont extrêmement préjudiciables aux fonctionnaires en situation de handicap et souffrant de maladies chroniques. Le régime et la façon dont il a été administré par la Canada Vie présentent des lacunes importantes […] La réduction pour les soins de physiothérapie et des médicaments, les justifications détaillées et les preuves exigées pour prouver que la couverture n’existe nulle part ailleurs, créent des difficultés financières, de longs temps d’attente pour le remboursement et de lourdes charges administratives.
Le groupe a également critiqué le fait que « [c]es changements ont été effectués sans consultation des personnes en situation de handicap » et que « les syndicats du secteur public n’ont pas consulté les participants en situation de handicap », ni même répondu aux courriels et aux appels téléphoniques. Dès lors, le groupe estime que « [l]es changements apportés au RSSFP auront très probablement pour conséquence que davantage de fonctionnaires en situation de handicap seront incapables de continuer à travailler ou seront en [congé d’]invalidité de longue durée ».
Dans un mémoire présenté au Comité, l’ACEP a également formulé l’avertissement suivant :
Il faut […] souligner que certains de ces cas pourraient [semer] la confusion [parmi les] prestataires. Il est plausible que les membres ne soient pas informés des nouvelles dispositions de l’assureur, telles que la politique de substitution obligatoire en faveur de médicaments génériques, si un équivalent générique est disponible. Plusieurs membres ont exprimé leur surprise en constatant que leurs médicaments n’étaient plus couverts, car ils n’avaient pas été clairement informés, lors de leurs interactions avec Canada Vie, que leur nouvel assureur ne rembourserait que le coût du médicament générique correspondant. Cette confusion soulève néanmoins la question de savoir si les fonctionnaires fédéraux ont bénéficié d’un accompagnement adéquat pendant la transition, notamment s’ils ont reçu le soutien nécessaire de Canada Vie pour s’y retrouver pendant cette période de changement.
Cette situation pourrait expliquer en partie la confusion qui a fait suite à la transition de juillet 2023 et le nombre élevé d’appels à la Canada Vie. Ryan Weiss, vice-président principal, avantages sociaux collectifs, Canada Vie, a mis l’accent sur le fait que « [la Canada Vie travaille] en collaboration avec le gouvernement non seulement pour améliorer le niveau de compréhension de ces changements au niveau de la communication, mais aussi pour offrir aux gens des solutions et un soutien accru lorsqu’ils ont d’autres questions, afin de les aider à comprendre les nouvelles dispositions prévues et la manière dont les choses fonctionnent ».
Mise à jour de la couverture pour les soins de physiothérapie et les honoraires professionnels des pharmaciens
Les Employés en situation de handicap de la fonction publique du Canada ont particulièrement fait mention du problème que représentent les modifications de la couverture pour les soins de physiothérapie : « La réduction de la couverture pour les soins de physiothérapie, qui passe d’une couverture illimitée (à 80 %) à un plafond de 1 500 $ par an, cause un préjudice disproportionné aux personnes souffrant de problèmes chroniques ou complexes et d’incapacités permanentes […] De plus, la physiothérapie est [la seule protection] qui a été réduit[e]. »
En décembre 2023, répondant aux questions des membres du Comité sur la physiothérapie, Mme Girard a expliqué que ce changement « constitue une amélioration pour la grande majorité des utilisateurs du régime [...] Pour les soins de physiothérapie, nous couvrions déjà 500 $. Ensuite, il fallait débourser de sa poche […] 500 $, ce qui a permis de passer à un montant plus élevé. Pour de nombreuses personnes, 500 $ pour la physiothérapie étaient insuffisants. » Le Comité note que, d’après des documents présentés par le SCT (voir l’annexe A), la protection était illimitée au-delà des frais compris dans la tranche 500 $-1 000 $, lesquels étaient assumés par les participants du régime. La tranche de frais qui était payée par les participants a effectivement été supprimée, mais les soins de physiothérapie ne sont maintenant couverts que jusqu’à concurrence de 1 500 $ par année civile.
Le plafonnement de la protection pour les honoraires professionnels des pharmaciens constitue un autre changement ayant été abordé lors de l’étude du Comité. Depuis le 1er juillet 2023, le RSSFP rembourse les honoraires professionnels des pharmaciens jusqu’à concurrence de 8 $, à un taux de 80 % (sous réserve de certaines exceptions). La protection pour les honoraires professionnels des pharmaciens n’était pas plafonnée auparavant. M. Sazant a précisé que « [c]’est [l’employeur] qui a proposé de réduire les honoraires professionnels des pharmaciens ». Les honoraires professionnels des pharmaciens pour les médicaments d’entretien sont maintenant couverts jusqu’à concurrence de cinq ordonnances par année (voir l’annexe A).
Problèmes concernant le Régime de soins de santé de la fonction publique depuis le 1er juillet 2023
Le 7 décembre 2023, M. Weiss a reconnu que « la transition n’a pas été facile pour tous les membres du [RSSFP] » et s’en est excusé au nom de l’administrateur. Sa collègue, Mme Vu, a convenu que « le service qu’ont reçu certains participants du régime et les membres de leur famille n’a pas été à la hauteur de leurs attentes ou des nôtres. L’expérience qu’ils ont vécue est inacceptable. » Elle a également reconnu que certains des défis « n’avaient pas été anticipés ».
Le 29 janvier 2024, l’ACEP a présenté au Comité un mémoire dans lequel elle écrit que « de nombreux bénéficiaires du Régime de soins de santé de la fonction publique font face à des demandes de remboursement non traitées, à des refus de demandes admissibles et à des retards sérieux dans leurs démarches auprès de leur régime d’assurance ». Après consultation de ses membres par voie électronique, l’ACEP a relevé plusieurs problèmes :
Les problèmes rencontrés comprennent d’importants retards dans le traitement des demandes de remboursement de frais médicaux, le rejet de certains traitements anciennement couverts par la Sun Life, de grandes difficultés à communiquer avec Canada Vie, des lacunes dans le service à la clientèle, et un fardeau administratif accru pour la présentation des demandes de remboursement, tous ces éléments combinés générant des conséquences financières et de santé importantes pour les prestataires du régime.
Le 26 février 2024, M. Sazant a informé le Comité que plusieurs problèmes se faisaient encore sentir plus de deux mois après que la Canada Vie eût témoigné :
La capacité de nos membres de communiquer avec la Canada Vie pour des problèmes courants, des questions et le remboursement des services réguliers semble s’être améliorée. Cependant, il reste beaucoup de problèmes. Nous croyons qu’il doit y avoir des discussions sur les façons de corriger la situation et de régler les problèmes existants.
Il y avait déjà assez de problèmes avec Phénix […] Depuis des années, nos membres ne sont pas payés avec exactitude ou à temps. L’accès à leurs prestations est devenu incroyablement difficile. À maintes reprises, l’employeur a failli à son devoir de fournir les éléments de base de la rémunération de nos membres.
Retards dans le traitement des demandes de règlement
Selon l’ACEP, les longs délais de traitement des demandes étaient parmi les problèmes les plus fréquemment soulevés par ses membres :
Les retards dans le traitement des demandes de remboursement des frais médicaux exercent une pression financière considérable sur les prestataires du régime, d’autant plus que [ces] frais atteignent parfois des montants de plusieurs milliers de dollars. Durant ces périodes d’attente prolongée, nos membres se trouvent contraints d’assumer personnellement ces coûts, engendrant ainsi une pression importante sur leur budget. Cette situation est particulièrement préoccupante dans le contexte économique actuel, marqué par des taux d’intérêt élevés et une inflation au-dessus de la normale. Plusieurs de nos membres ont admis avoir recouru à des cartes de crédit pour couvrir les montants en suspens, [ce qui les expose] à des intérêts élevés pour lesquels ils ne seront jamais remboursés.
Ces retards ont également des conséquences sur la qualité de vie et la santé de nos membres. Tout d’abord, une période d’incertitude s’installe pendant le traitement de la demande. Les prestataires doivent vivre avec le stress d’un rejet possible de leur demande, les obligeant ainsi à assumer les coûts par eux-mêmes. Ensuite, il y a ceux qui repoussent des traitements médicaux ou l’achat de médicaments en attendant d’avoir la confirmation qu’ils seront remboursés. À titre d’exemple, l’un de nos membres nous a fait part du dilemme de sa conjointe qui envisage de retarder une intervention chirurgicale dentaire, étant donné que la première intervention n’a toujours pas été remboursée par Canada Vie.
En décembre 2023, Mme Royds, Mme Girard et M. Weiss ont dit au Comité que le délai moyen de traitement des demandes avait diminué, se situant à 2,2 jours. Mme Girard a déclaré que « l’arriéré avait beaucoup diminué ». En date du 5 mars 2024, le tableau de bord de la Canada Vie indiquait que le délai de traitement était d’un jour pour les demandes de règlement numériques et de cinq jours pour les demandes de règlement papier. Les données que l’AFPC a fournies au Comité indiquent que, en date du 26 février 2024, l’arriéré de plus de 16 jours dans le traitement des demandes de règlement de la Canada Vie était de 3 867, 226 de ces demandes de règlement datant de plus de 60 jours.
Rejet de demandes
L’ACEP a également écrit que certains de ses membres ont signalé que des demandes de remboursement leur avaient été refusées à l’égard de protections qui étaient offertes lorsque la Sun Life administrait le RSSFP :
[L]es bénéficiaires du régime avaient été assurés que toute ordonnance déjà approuvée par la Sun Life serait également acceptée par Canada Vie, ce qui s’est révélé faux pour bien des gens.
Vu le rejet de leurs demandes de remboursement, les membres se retrouvent souvent à faire face à deux choix difficiles. Ils peuvent entamer un processus laborieux pour contester la décision ou décider de débourser le montant de leur propre poche, espérant trouver un autre traitement couvert par l’assureur […]
Une telle situation pourrait entraîner des conséquences graves pour nos membres qui ont un handicap ou un trouble médical nécessitant des soins réguliers qui ne seraient plus couverts par le nouvel assureur. Parfois, même si le traitement est encore couvert, le nouveau régime ne rembourse qu’une petite partie de ce qui était remboursé auparavant.
Dans un mémoire, Pamela M. White, une retraitée de la fonction publique fédérale qui occupait le poste de directrice de l’analyse des données sur la santé à Statistique Canada, a également écrit que « [l]a “surveillance du rendement du niveau de service” du SCT n’entrera en vigueur que le 1er janvier 2024 soit environ six mois après la transition de la [Sun Life] à la [Canada Vie] le 1er juillet 2023 ». À son avis, « le contrat n’obligeait pas la [Canada Vie] à offrir le RSSFP à 100 % des 1,7 million de participants et personnes à charge au 1er juillet 2023. Il semble que l’on ne s’attendait pas à ce que le service soit pleinement fourni avant le 1er janvier 2024, date à laquelle la surveillance du SCT commencerait. » Mme White a demandé au Comité de recommander que le Bureau du vérificateur général examine le contrat entre le SCT et la Canada Vie, parce qu’il « n’offre pas un bon rapport qualité-prix », selon elle. Elle a en partie attribué les rejets partiels et complets des demandes à l’intervalle de six mois au cours duquel la surveillance n’était pas en place.
Selon M. Sazant, « la responsabilité incombe principalement au gouvernement, qui a négocié ce contrat. Nous nous attendons, par exemple, à ce que le gouvernement fasse observer les normes de niveau de service inscrites dans ce contrat. » Il a également déclaré que, « [s]i la Canada Vie ne peut pas respecter les normes de service de son contrat, elle doit remettre des crédits de frais au gouvernement du Canada. On leur a accordé une période de grâce de six mois pendant laquelle ces crédits ne s’appliquaient pas. Nous ne comprenons toujours pas pourquoi cette période a été accordée. »
Communication avec le Centre d’appels de la Canada Vie
L’ACEP a déclaré que l’attente est longue pour simplement communiquer avec la Canada Vie. Son mémoire fait aussi ressortir des problèmes dans le traitement des appels : « Aucun système de file d’attente ni de rappel n’était en place. » M. Prest a reconnu que l’un des principaux problèmes a été le volume imprévu d’appels auquel la Canada Vie a été confrontée, comparativement au volume d’appels que recevait la Sun Life avant la transition du 1er juillet 2023. Mme Vu a expliqué que « [a]u mois de juillet, c’était le volume d’appels que nous avons reçus qui était d’une ampleur inattendue. En date du 1er juillet, nous recevions huit fois plus d’appels que n’en recevait l’ancien fournisseur. Je dirais donc que c’est le volume d’appels qui nous a pris par surprise. »
L’ACEP a aussi critiqué la piètre qualité du service à la clientèle lorsque l’on répondait enfin aux appels des participants : « Les interactions avec [la Canada Vie] s’avèrent souvent laborieuses. » Aux dires des membres du syndicat, parfois le personnel du centre d’appels de la Canada Vie « était totalement incapable de répondre [aux] questions les plus fondamentales ». Les explications données pour justifier le rejet des demandes de règlement ont été qualifiées de confuses. L’ACEP ajoute : « Il semble aussi y avoir une difficulté pour les bénéficiaires francophones à obtenir des services en français. Un grand nombre de nos membres se sont plaints concernant le manque de représentants du service à la clientèle francophone lors de leurs contacts avec Canada Vie. »
Selon Mme Royds, en date du 7 décembre 2023, la « Canada Vie a informé notre ministère que le temps d’attente au centre d’appels [était] de 1 à 3 minutes », ce qu’a confirmé M. Weiss. Mme Girard a mentionné que cette amélioration était attribuable au « plan d’action [de la Canada Vie], qui prévoyait notamment l’embauche de personnel supplémentaire pour le centre d’appels et le traitement des demandes ». Elle a subséquemment ajouté que la Canada Vie « a plus que doublé le personnel » affecté aux centres d’appels et au traitement des demandes et que l’entreprise a accru l’offre de formation afin que les employés soient « mieux en mesure de répondre aux questions des participants ». M. Sazant a confirmé qu’« il y a eu des améliorations importantes » en ce qui concerne les temps d’attente au centre d’appels de la Canada Vie.
Mme Girard a précisé que la Canada Vie avait prolongé ses heures d’ouverture pour répondre aux questions des participants. M. Weiss a assuré le Comité que la Canada Vie prévoit d’être en mesure de « respecter les normes de service cibles » une fois que les derniers changements à la couverture du régime seront entrés en vigueur, en janvier 2024 : « Nous nous attendons toujours à recevoir une charge de travail très importante [après ces derniers changements]. Toutefois, je peux vous assurer que notre personnel sera en mesure d’y faire face, et que cette charge de travail continuera à diminuer progressivement. Nous prévoyons revenir aux normes historiques vers la fin de l’année 2024. »
M. Weiss a déclaré que la Canada Vie était déterminée à « bien faire les choses », ajoutant :
Dans le cadre de cet engagement, la Canada Vie a mis en œuvre un plan d’action pour le service à la clientèle. Ce plan a permis de réduire les temps d’attente dans les centres d’appels. Il a aussi permis d’accélérer les remboursements et de faire passer les cas urgents à un échelon supérieur. Comme nous l’avons déjà mentionné, nous avons élargi les heures d’ouverture du centre d’appels afin qu’il soit ouvert sept jours par semaine, nous avons doublé le nombre d’agents au centre d’appels, et nous avons augmenté le nombre d’examinateurs des demandes de remboursement. Nous avons également mis en place des voies permettant de repérer les cas urgents et de les faire passer à l’échelon supérieur, afin de résoudre ces cas particuliers.
Nous nous sommes également efforcés de faire preuve de transparence à l’égard des membres du régime tout au long de cette période, en publiant nos progrès en matière d’amélioration des normes de service et en mettant régulièrement à jour la foire aux questions.
Fardeau administratif
Enfin, l’ACEP s’est plainte que :
[L]a transition vers Canada Vie a également entraîné un fardeau administratif supplémentaire pour les bénéficiaires [du] RSSFP. Selon nos membres, le processus administratif pour soumettre une demande de remboursement des frais médicaux semble être devenu plus complexe depuis la transition vers Canada Vie. Ce fardeau est particulièrement manifeste dans le cas des demandes de remboursement de frais médicaux récurrents. Contrairement à l’assureur précédent, Canada Vie [oblige] désormais le demandeur à soumettre chaque fois un code de procédure ainsi que les frais sur un formulaire distinct de demande. En plus d’alourdir le fardeau administratif, cette façon de procéder accroît également le risque d’erreurs.
De plus, à la suite du changement d’administrateur, la Canada Vie a exigé que les participants se réinscrivent manuellement. On a dit au Comité que la décision de procéder de cette façon a été prise pour des raisons de confidentialité et de logistique :
[N]ous savions que des problèmes de protection de la vie privée et des renseignements personnels se posaient et que ces renseignements ne pouvaient pas être transférés d’une personne à l’autre. Il y avait 1,7 million de [participants]... Certaines personnes avaient pris leur retraite. D’autres étaient des personnes à charge qui avaient terminé leurs études et qui n’étaient plus couvertes par le régime. D’autres encore étaient malheureusement décédés. À partir de tout cela, nous devions nous assurer que nous repartions à zéro et que nous disposions d’une base de données épurée pour mettre en œuvre le nouveau régime. C’est en partie pour cette raison que nous avons procédé à une préinscription.
De même, M. Weiss a déclaré :
L’un des objectifs de ce processus d’inscription était également de recueillir des données de qualité et d’actualiser toutes les données relatives à l’existence d’une autre couverture. L’un des principaux objectifs de ce processus était non seulement de confirmer les coordonnées, les renseignements sur les membres et les personnes à charge susceptibles d’être couverts, mais aussi de s’assurer qu’ils indiquaient s’ils bénéficiaient d’une autre couverture, afin que nous puissions assurer cette coordination de manière transparente et automatique.
Nous avons atteint de bons résultats en mettant de l’ordre dans ces renseignements, et il était assurément dans l’intérêt des membres de disposer de renseignements exacts sur la coordination des prestations.
Concernant les problèmes relatifs à la réinscription, M. Sazant a déclaré :
Je crois qu’il y a eu des discussions au sujet de l’adhésion préalable pour s’assurer que les participants [soient] des membres en bonne et due forme. De façon générale, je dirais que, tout comme le syndicat, nous ne nous y opposons pas. Nous pensons que c’est équitable.
Cela dit, il est évident que la méthode a été absolument lamentable. Le téléchargement de toutes ces données en même temps a provoqué un énorme goulot d’étranglement. Il semblerait également qu’un certain nombre de nos membres et retraités ont eu beaucoup de difficulté à s’y retrouver. Nous n’avions rien demandé de tel. Et cela a évidemment entraîné des problèmes importants en cours de route.
M. Sazant a souligné que l’AFPC a appris d’un « certain nombre de membres qui ont transmis à l’ancien régime de l’information provenant de leurs médecins […] que cette information n’avait pas été communiquée, ce qui nous inquiète profondément. Cette difficulté occasionne une charge financière aussi bien à nos membres qu’au système de santé canadien en général. » Selon Mme White, l’exigence de réinscription a créé des obstacles supplémentaires pour certains participants et constitue une forme de discrimination pour les personnes qui ne sont pas particulièrement douées technologiquement ou qui habitent des régions mal desservies par les réseaux de TI :
Une lecture attentive du contrat de 480 pages montre qu’alors que des procédures en ligne et sur papier devaient être mises en place pour les participants, il n’existe aucune clause de mesures d’adaptation établissant expressément les obligations de la [Canada Vie] pour répondre aux besoins des personnes qui n’ont pas de connexion Internet ou la capacité d’accéder aux services en ligne. L’avis d’adhésion et l’achèvement de l’adhésion devaient être effectués en ligne. La procédure d’adhésion en ligne était complexe, sujette à des erreurs et impossible à suivre pour les personnes ne disposant pas d’un ordinateur et d’un accès à Internet. À partir du 1er juillet 2023, les participants pouvaient s’adresser directement à la [Canada Vie]. Mais la capacité de la ligne téléphonique était insuffisante, et les opérateurs de la [Canada Vie] n’étaient pas en mesure de traiter les volumes d’appels et les questions des participants.
…
Le SCT a placé les participants dans une situation paradoxale. S’ils n’avaient pas d’accès en ligne, ils ne pouvaient pas être contactés. Une fois informés, ils n’ont pas pu s’inscrire parce qu’ils n’avaient pas accès à Internet. En fait, la plupart de ces participants ont découvert qu’ils n’étaient pas couverts lorsqu’ils ont essayé, après le 1er juillet 2023, d’obtenir des prestations du RSSFP, [tel que] le renouvellement d’ordonnances. Depuis le 1er juillet 2023, les participants âgés et les personnes à charge ont eu du mal à s’inscrire, à déposer des demandes de remboursement et à obtenir leur remboursement dans les délais impartis.
Le fait que le contrat du SCT ne reconnaisse pas les besoins spéciaux est un exemple de la facilité avec laquelle nous permettons aux médias sociaux et à la technologie moderne de priver les groupes de leurs droits, de les stigmatiser et de les exclure.
…
Nous devons faire face à la réalité des désavantages causés par le manque de connectivité à Internet et de compétences en matière de TI. Le discours qui consiste à « blâmer la victime » parce qu’elle est âgée et incapable d’utiliser des systèmes de TI complexes stigmatise, discrimine et prive les Canadiens de leurs droits.
M. Sazant a également parlé de la numérisation du RSSFP :
[Le régime] couvre également les retraités, dont les niveaux d’aisance avec les méthodes numériques varient. Je pense que cela s’explique aussi par un certain nombre d’échecs en ce qui a trait à la capacité des gens de présenter leurs demandes de façon adéquate par voie électronique. Il y a eu toutes sortes de problèmes liés à la capacité des gens de soumettre leurs demandes.
M. Sazant a aussi apporté des informations supplémentaires concernant l’autorisation préalable requise pour certains médicaments : « Il s’agit d’un nouveau processus dans le cadre duquel les gens qui prennent certains médicaments — habituellement en raison de leur coût élevé — doivent s’y retrouver dans les approbations du système avant la confirmation de toute couverture. Ce système est défavorable à nos membres et cause de graves problèmes de santé à bon nombre d’entre eux. » Il a subséquemment précisé que le système d’autorisation préalable « est quelque chose que l’employeur était très désireux d’introduire dans le régime. Au cours des négociations, nous avons eu l’impression de ne pas avoir vraiment le choix quant à une entente sur une forme quelconque d’autorisation préalable. » À ce sujet, Mme White a écrit :
L’autorisation préalable (AP) est une arme à double tranchant. Les assureurs et les organismes de financement d’assurances justifient l’application de l’AP comme un outil permettant de protéger le système de santé, de réduire les coûts d’assurance et d’assurer la surveillance des médecins. Des recherches menées aux États-Unis montrent que les AP ont réduit la prescription abusive d’antipsychotiques et d’opioïdes par les médecins dans les années 2010.
Toutefois, cette histoire a un autre aspect. Pour que les AP améliorent l’efficacité du système de soins de santé dans son ensemble, il faudrait que les économies réalisées par les assureurs soient supérieures aux dépenses engagées par les médecins pour répondre aux demandes d’AP et aux dépenses liées à la dégradation de l’état de santé ou au mieux-être des patients. Les recherches montrent que l’utilisation des AP aux États-Unis a entraîné une charge administrative considérable, des retards inutiles dans les soins aux patients et des inégalités dans la prestation des soins, les refus étant plus fréquents chez les femmes, les minorités raciales, les personnes avec un faible niveau de scolarité et les groupes à faible revenu.
Cyber incident touchant MSH International
En février 2024, le SCT a confirmé que MSH International, engagée à titre de sous-traitant par la Canada Vie pour offrir des services de voyage d’urgence et une couverture d’assurance à l’étranger en vertu du RSSFP, avait été touchée par un cyber incident dont la nature n’a pas été divulguée. En conséquence, MSH International n’a pas été en mesure de traiter les demandes. M. Sazant a mentionné que la situation a posé un problème majeur :
Dans le cas des membres qui sont affectés à l’étranger et qui travaillent dans des ambassades, des consulats ou des bases militaires du Canada ou qui voyagent, le système en entier est paralysé depuis deux semaines, en raison d’un incident de cybersécurité. Cependant, même avant cette fermeture complète, le service pour les membres à l’extérieur du Canada était un problème majeur et comportait un énorme arriéré de demandes non traitées. À l’heure actuelle, plus de 3 500 demandes datent de plus de 60 jours et sont en attente de règlement et de paiement.
M. Sazant a aussi dit ne pas savoir si les participants avaient été informés directement de l’incident ou s’ils l’avaient appris par les médias.
Dans son mémoire, présenté au Comité des semaines avant l’incident, Mme White avait soutenu que « [l]e système des TI de MSH est déficient, les appels téléphoniques ne sont pas traités rapidement, les demandes de remboursement sont retardées et la gestion des prestations du RSSFP par MSH semble chaotique ». Elle avait demandé au Comité de recommander au SCT de procéder à une vérification immédiate de MSH et d’« exiger les changements nécessaires ».
En date du 27 février 2024, les systèmes de MSH International sont de nouveau opérationnels et les services sont rétablis. Cependant, l’entreprise étudiait toujours les répercussions du cyberincident et des retards sont prévus en raison des demandes accumulées depuis le début du mois.
Observations générales et recommandations
Mme Girard a reconnu que le changement d’administrateur du régime et la modernisation de la couverture, tous les deux entrées en vigueur le 1er juillet 2023, ont entraîné des difficultés : « Bien sûr, [cela] nécessite une certaine formation, et nous comprenons que l’administrateur précédent avait mis en œuvre le même régime pendant 27 ans. » Selon Mme Vu, « [l]e nombre important de changements a collectivement entraîné des milliers d’appels à notre centre d’appels, ce qui a engendré de longues attentes et des interruptions de service ». M. Weiss a en outre déclaré que les difficultés ont été exacerbées par « la complexité du changement et la quantité des changements apportés » ainsi que « par la combinaison de tous ces changements ». Selon Mme Vu, les retards s’expliquent par les « nombreuses modifications qui ont été apportées au régime en même temps qu’avait lieu la transition vers la Canada Vie ».
M. Weiss a fait remarquer que la Canada Vie n’a « pas encore retrouvé le niveau prévu ni le niveau historique du fournisseur de services précédent. Cela dit, nous atteignons désormais nos niveaux de service cible grâce aux ressources accrues que nous avons mises en place au cours des derniers mois. »
M. Sazant a déclaré : « Nous n’interagissons pas directement avec [la Canada Vie]. C’est une obligation de l’employeur. Ils ont le contrat. Nous n’avons même pas de copie du contrat entre l’employeur et la Canada Vie. Nous ne pouvons pas intervenir auprès de la Canada Vie. Nous ne sommes pas tout à fait certains de ce que fait l’employeur. Je suis certain que des mesures ont été prises, mais nous ne pensons pas qu’elles soient suffisantes. » Il a ultérieurement ajouté :
[L]’application effective de l’une ou l’autre de ces normes [était] précédée d’un délai de grâce de six mois. Nous estimons évidemment que c’est tout simplement inacceptable. Il semble qu’on ait tiré grand avantage du fait qu’il n’y avait pas de garanties. Nous ne voyons pas du tout l’intérêt de normes de service essentiellement non définies au cours des six premiers mois.
Selon lui,
[r]écemment, l’AFPC a déposé un grief de principe contre le Conseil du Trésor pour faire valoir qu’en ce qui concerne la mauvaise transition de l’administration du régime d’un assureur à l’autre, il n’a pas protégé les droits des membres à un régime de soins de santé fonctionnel, ce qui a eu des répercussions négatives sur les membres en situation de handicap et d’autres personnes ayant des identités qui se recoupent. Dans le cadre de ce grief, nous demandons des dommages-intérêts généraux pour la douleur, la souffrance et le stress que cette transition a causés. Nous demandons une indemnisation en argent pour ceux qui ont subi des pertes financières en raison de la mauvaise transition, ainsi qu’une déclaration selon laquelle la mauvaise gestion de ce dossier a été contraire aux dispositions de la convention collective.
Dans son mémoire, l’ACEP a aussi recommandé que les participants « qui ont subi un préjudice financier en raison de délais encourus ou de refus injustifiés de leurs demandes soient dédommagés, et ce jusqu’à ce que Canada Vie soit capable d’honorer ses obligations contractuelles ». Mme White a ajouté :
Pendant la période de démarrage de six mois, le gouvernement fédéral et les retraités ont payé pour un régime de soins de santé qui ne pouvait pas être et ne serait pas sciemment livré dans son intégralité avant le 1er janvier 2024. Je suis d’avis que l’inclusion de la clause de transition de six mois dans le contrat du RSSFP de la [Canada Vie] viole les conditions des accords négociés entre le syndicat et la direction pour fournir des prestations de santé aux employés et l’accord que les retraités ont signé lorsqu’ils ont choisi de continuer à bénéficier de leur régime de prestations de santé fondé sur un paiement à parts égales.
Mme Girard a déclaré que « toutes les personnes à qui l’on doit de l’argent en fonction des paramètres du plan et de l’admissibilité ont été ou seront indemnisées. Elles sont remboursées de tout ce qui leur est dû selon le plan. Cela peut prendre plus de temps, mais ils seront remboursés. »
En se fondant sur les témoignages, le Comité recommande :
Recommandation 1
Que le gouvernement du Canada fasse participer les représentants des employés et des retraités au nouveau processus d’appel d’offres lorsque viendra le moment de remettre en adjudication le contrat de « services de gestion seulement » pour le Régime de soins de santé de la fonction publique, et que des efforts soient faits pour faire participer au processus les personnes en situation de handicap et leurs proches aidants afin de s’assurer de comprendre leurs besoins.
Recommandation 2
Que le gouvernement du Canada travaille de concert avec l’administrateur du Régime de soins de santé de la fonction publique pour améliorer la communication avec les participants du régime lorsque des changements sont apportés à la couverture, et que, à cet égard, le gouvernement tienne compte de l’accès des participants à Internet et/ou aux nouvelles technologies en matière d’information et de communication.
Recommandation 3
Que le gouvernement du Canada commence à surveiller le rendement de l’administrateur du régime au premier jour de l’entrée en vigueur du contrat; que la période de transition préalable à la mise en service prévoie des jalons de vérification afin de s’assurer de la capacité de l’entreprise choisie à fournir un site Web fonctionnel et des services bilingues, entre autres choses; et que les futurs contrats conclus avec les administrateurs de régimes ne prévoient pas de période de grâce pendant laquelle aucune conséquence ou conséquence sérieuse ne s’applique à un entrepreneur dont le rendement est très insatisfaisant.
Recommandation 4
Que le gouvernement du Canada explique la décision d’effectuer le changement d’administrateur du régime et de procéder à la modernisation des garanties le même jour, étant donné que, selon la Canada Vie, cette décision a contribué aux problèmes que connaît le Régime de soins de santé de la fonction publique depuis le 1er juillet 2023.
Recommandation 5
Que le gouvernement du Canada veille à ce que les employés ayant subi des pertes financières en raison de retards de traitement injustifiés ou des rejets injustifiés de demandes de règlement de la Canada Vie soient entièrement indemnisés pour leurs pertes.
Recommandation 6
Que le gouvernement du Canada fasse connaître aux employés les normes de service prévues dans le contrat signé avec la Canada Vie et qu’il fasse régulièrement le point auprès des parties intéressées sur le respect de ces normes par la Canada Vie et sur les pénalités imposées à la Canada Vie pour non-respect de ces normes.
Recommandation 7
Que le gouvernement du Canada revoie les plafonds de couverture qui s’appliquent aux services de physiothérapie afin de les harmoniser aux précédentes dispositions et de faire la distinction entre les besoins à court terme et à long terme.
Recommandation 8
Que le gouvernement du Canada crée des processus distincts de vérification et de suivi a) des décisions relatives aux autorisations préalables et des mesures d’appel; b) des demandes de remboursement pour des médicaments, des traitements ou des appareils ne nécessitant pas d’autorisation préalable, et ce, afin de faire respecter les normes de service prévues au contrat.
Recommandation 9
Que le gouvernement du Canada s’assure de la capacité de l’entreprise retenue à offrir des services en français, et ce, en tout temps et dans les mêmes délais que les services rendus en anglais.
[1] Chambre des communes, Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires [OGGO], Procès-verbal, 17 octobre 2023.
[2] L’Association canadienne des employés professionnels et l’Alliance de la fonction publique du Canada sont deux des plus importants syndicats de la fonction publique fédérale au Canada, représentant des dizaines de milliers de participants du Régime de soins de santé de la fonction publique.
[3] Les témoins du gouvernement n’étaient pas autorisés à divulguer l’identité des deux autres soumissionnaires en raison des exigences de confidentialité prévues dans l’appel d’offres.
[4] Le Comité a appris au cours de l’étude que les renseignements relatifs au contrat n’ont pas été communiqués aux syndicats représentant les employés de la fonction publique. Seth Sazant, agent des pensions et des avantages sociaux, Alliance de la Fonction publique du Canada, a déclaré que son organisation avait été informée qu’elle n’avait « pas droit à cette information ».
[5] 2ELGBTQIA+ désigne les personnes deux-esprits, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, intersexes ou asexuelles ainsi que les membres d’autres communautés diversifiées sur le plan du sexe et du genre.
[6] Il a plus tard été précisé que la substitution obligatoire par un médicament générique est entrée en vigueur le 1er janvier 2024 pour que les participants au régime aient le temps « de consulter un médecin ou une infirmière praticienne afin de discuter de la possibilité d’utiliser un médicament générique. Dans la mesure où cette option est impossible, il existe un formulaire [que doit remplir le médecin ou l’infirmière]. Dès que le médecin traitant fournit une raison médicale, les personnes concernées peuvent bénéficier d’une exemption. »