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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois (réponse à la COVID‑19 et autres mesures).
J'aimerais d'abord souligner que nous sommes réunis ici sur les terres ancestrales non cédées du peuple algonquin.
Depuis le début de la pandémie, le système de justice pénale, comme tant d'autres institutions dans notre pays, a dû relever des obstacles importants et sans précédent pour poursuivre ses activités tout en respectant les directives essentielles en matière de santé et de sécurité publiques, tous pouvoirs confondus. Les tribunaux criminels et les utilisateurs de ces derniers se sont adaptés rapidement et admirablement aux réalités de la pandémie. Ils ont trouvé des solutions novatrices pour assurer la prestation de services essentiels au public de manière sûre et efficace.
Le projet de loi a pour but de réformer le Code criminel et d'autres dispositions législatives pour résoudre certains problèmes concrets cernés pendant la pandémie et exacerbés par celle-ci. Ces réformes moderniseront et amélioreront le système de justice pénale en augmentant la souplesse et l'efficacité des activités pour l'avenir.
Les députés se demandent peut-être pourquoi les changements proposés dans le projet de loi sont toujours nécessaires, puisque nous sommes maintenant habitués de vivre dans un monde où la COVID-19 est présente, et que les tribunaux ont adapté leurs façons de faire depuis le début de la pandémie. Les changements proposés demeurent tout à fait cruciaux; ils contribueront à réduire les pressions que subissent encore les tribunaux pénaux en raison de la pandémie de COVID-19, y compris l'arriéré de cas qui s'est accumulé.
Je tiens à souligner que ce projet de loi est le résultat de consultations considérables auprès des provinces et qu'il a l'appui de premiers ministres provinciaux de tous les horizons politiques. J'ai appris que le mois dernier, lors de la rencontre fédérale-provinciale-territoriale des ministres de la Justice et de la Sécurité publique, tous les ministres de la Justice ont confirmé souhaiter que le processus d'adoption de ce projet de loi continue, puisqu'il permettra d'améliorer l'administration des tribunaux dans leur propre province ou territoire.
La pandémie a grandement bouleversé l'administration des tribunaux. Des avocats et des juges nous ont aussi dit qu'il fallait apporter des changements pour éviter que le système judiciaire prenne encore plus de retard. Le système de justice doit inspirer confiance aux Canadiens, et un système qui ne suit pas l'évolution de la société n'inspire pas confiance. À titre d'exemple, c'est notamment grâce aux audiences virtuelles et aux services offerts à distance que les utilisateurs des tribunaux ont pu avoir accès à la justice malgré les difficultés liées à la pandémie. Le projet de loi à l'étude viendrait améliorer et préciser les règles concernant l'utilisation de moyens technologiques dans le système de justice pénale.
Avant d'entrer dans les détails du projet de loi , je tiens à remercier le sénateur Pierre Dalphond d'avoir parrainé le projet de loi et d'avoir fait preuve de leadership pendant qu'il travaillait avec tous les sénateurs à l'autre endroit pour nous présenter ce projet de loi.
J'aimerais également souligner le travail diligent du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles dans le cadre de l'étude du projet de loi et remercier les témoins qui ont exprimé leurs points de vue sur cette mesure législative. L'étude du comité et l'examen des témoignages ont donné lieu à deux amendements au projet de loi, les nouveaux articles 78.1 et 78.2, qui rendraient obligatoire l'examen de l’utilisation de procédures à distance dans des affaires de justice pénale.
Passons maintenant aux modifications proposées dans le projet de loi et j'expliquerai comment elles s'attaqueront aux problèmes identifiés au cours de la pandémie et permettront aux accusés, aux victimes et aux autres personnes associées au système de justice pénale de réaliser des gains d'efficacité et d'avoir un meilleur accès à la justice.
Premièrement, le projet de loi améliorera et précisera les règles relatives aux comparutions à distance dans les procédures pénales; deuxièmement, il révisera le processus lié aux télémandats afin qu'une plus grande variété de mandats de perquisition et d'autres ordonnances d'enquête puissent être délivrés par des moyens de télécommunication; troisièmement, il permettra de prendre les empreintes digitales des accusés et des délinquants à une étape ultérieure à celle qui est actuellement autorisée; et quatrièmement, il améliorera les règles sur la gestion des instances par les juges.
En ce qui concerne les comparutions à distance, le projet de loi s'appuie sur un projet de loi antérieur, le projet de loi , qui a introduit une nouvelle partie générale sur les comparutions à distance dans le Code criminel, soit la partie XXII.01, qui a élargi la disponibilité des comparutions à distance pour les accusés, les participants et les juges. Il faut noter que ces modifications ont été élaborées avant la pandémie et qu'elles ne tiennent pas compte du recours exponentiel aux solutions technologiques qui en a découlé.
Le projet de loi dont nous sommes saisis élargirait et clarifierait le processus permettant aux accusés de comparaître par vidéoconférence pendant les enquêtes préliminaires et les procès, tant pour les déclarations sommaires que pour les actes criminels, même lorsque des témoins sont entendus, sauf dans les cas où la preuve est présentée devant un jury. Le projet de loi permettrait aussi expressément à une personne accusée de comparaître à distance lorsqu'elle prononce un plaidoyer, soit par vidéoconférence ou par audioconférence, selon les circonstances. En outre, le projet de loi permettrait à un délinquant de comparaître à distance aux fins de la détermination de la peine.
Les nouvelles mesures concernant les comparutions à distance comprennent une exigence de consentement, de sorte que l'accusé ou le contrevenant et le procureur de la Couronne devront donner leur consentement pour comparaître de cette façon. En outre, toutes les décisions visant à procéder à distance seraient laissées à la discrétion du tribunal en fonction d'un certain nombre de facteurs qu'il serait tenu d'examiner. Par exemple, les tribunaux devront tenir compte du droit des accusés ou des délinquants à un procès public et équitable, et de la pertinence du lieu d'où ils comparaîtront avant de l'autoriser.
Je tiens également à souligner que le projet de loi ne rend pas les audiences à distance obligatoires et qu'il ne change rien au principe général selon lequel tous ceux qui participent à des procédures criminelles doivent se présenter en personne au tribunal, sauf autorisation contraire. Le projet de loi ne cherche pas à remplacer les procédures réalisées en personne, dont l'importance demeure, mais plutôt à offrir d'autres façons de procéder lorsque des moyens technologiques existent et qu'on les juge appropriés.
Le projet de loi promulguerait également des mesures de protection claires relatives aux comparutions par vidéoconférence. J'en ai mentionné quelques-unes, notamment le fait de s'assurer de l'approbation judiciaire, ainsi que du consentement de toutes les parties. En outre, le projet de loi exigerait que les accusés ou les contrevenants qui sont représentés par un avocat et qui comparaissent à distance aient la possibilité de consulter leur avocat en privé. De plus, les tribunaux doivent être convaincus qu'un accusé ou un contrevenant qui n'a pas accès à des conseils juridiques serait en mesure de comprendre la nature de la procédure et que toute décision qu'il pourrait prendre au cours de l'instance serait volontaire.
Étant donné que des centaines de personnes peuvent être convoquées au même endroit dans le cadre du processus de sélection des jurés, de nombreuses sélections de jurés pour des procès criminels ont été reportées ou retardées pendant la pandémie. Certaines provinces s'inquiètent des retards dans la tenue des procès par jury. Le projet de loi donnerait aux tribunaux la possibilité de tenir un processus de sélection de jurés par vidéo lorsque les deux parties y consentent et que des mesures de protection appropriées sont en place, comme veiller à ce que les tribunaux approuvent l'utilisation d'un lieu où l'infrastructure technologique serait disponible pour que les juristes potentiels puissent participer au processus.
[Français]
Depuis mai 2020, le copréside le Comité d'action sur l'administration des tribunaux en réponse à la COVID‑19 avec le juge en chef de la Cour suprême du Canada, le très honorable Richard Wagner.
[Traduction]
Le ministre m'a fait savoir que, à ce titre, il a continué d'apprendre comment la pandémie avait affecté les activités des tribunaux et aggravé des problèmes qui existaient déjà, notamment l'arriéré croissant de cas et les enjeux liés à l'accès à la justice. Nous avons bon espoir que le projet de loi contribue aux efforts pour régler ces problèmes en facilitant un recours accru à la technologie dans le système de justice pénale.
Je sais que, pendant l'étude du comité sénatorial sur le projet de loi , certains témoins ont exprimé des préoccupations au sujet du manque de ressources technologiques dans les tribunaux et les établissements correctionnels et de l'incapacité de personnes vulnérables ou désavantagées d'avoir accès à la technologie. Je reconnais que ces préoccupations sont fondées, et le gouvernement est déterminé à s'attaquer à ces problèmes.
Le gouvernement s'est engagé à faire entrer le système judiciaire canadien dans le XXIe siècle et à collaborer avec les provinces et les territoires pour ce faire. Dans l'énoncé économique de 2020-2021, le gouvernement a annoncé des investissements technologiques d'approximativement 40 millions de dollars pour les tribunaux d'un bout à l'autre du Canada. Le gouvernement s'est également engagé à brancher 98 % des Canadiens à Internet d'ici 2026, et tous les Canadiens, d'ici 2030.
Je sais aussi que de nombreux témoins qui ont comparu devant le comité sénatorial au sujet du projet de loi ont appuyé les réformes proposées et estiment que le recours accru à la technologie par les tribunaux et les participants est avantageux et facilite grandement l'accès à la justice.
Bref, le projet de loi établit un juste équilibre en ne rendant pas obligatoire la comparution à distance, mais en offrant plutôt aux tribunaux une certaine souplesse pour la tenue des audiences, en prévoyant le consentement des deux parties et en accordant aux juges un pouvoir discrétionnaire. Cette mesure assure également la prise en compte des ressources technologiques dont disposent les tribunaux et les utilisateurs. Le projet de loi contribuerait également à ce que les audiences à distance se déroulent dans le respect des droits garantis par la Charte, pour les accusés et les contrevenants.
J'aimerais maintenant parler des modifications apportées au processus d'utilisation des télémandats qui se trouve actuellement dans le Code criminel et qui permet à un agent de la paix de demander certains mandats par des moyens technologiques à condition de respecter certains critères.
Le projet de loi simplifie le processus d'utilisation des télémandats et en élargit l'application à une plus grande variété de mandats d'enquête, comme des mandats visant à saisir des armes, des mandats de perquisition, ainsi que des ordonnances de communication de documents et de données financières.
Selon les termes de ce processus simplifié, un policier pourra demander un mandat de perquisition par un moyen de télécommunication sous forme écrite, un courriel, par exemple, sans qu'il soit obligatoire de répondre à l’exigence actuelle selon laquelle l'agent de la paix doit démontrer qu'il est peu commode de se présenter en personne pour demander un mandat.
Les policiers pourront continuer de demander un mandat par un moyen de télécommunication qui ne rend pas la communication sous forme écrite, par téléphone, par exemple. Dans ce cas, toutefois, le juge qui reçoit la demande de mandat devra être convaincu que la demande démontre l’existence de motifs raisonnables pour exempter le demandeur de la présenter par un moyen de télécommunication qui rend la communication sous forme écrite, comme un courriel.
Le processus modifié d'utilisation des télémandats serait aussi étendu pour s'appliquer de façon plus large de deux façons.
Premièrement, le processus s'appliquerait maintenant aux enquêtes concernant tous les types d'infractions et non uniquement aux infractions punissables par mise en accusation.
Deuxièmement, le processus serait accessible aux responsables de l'application de la loi autres que les agents de la paix, notamment les fonctionnaires publics.
Par exemple, il s'appliquerait aux fonctionnaires de l'Agence du revenu du Canada chargés d'enquêter sur les infractions fiscales, qui peuvent à l'heure actuelle demander un mandat de perquisition et d'autres ordonnances judiciaires en se présentant en personne.
De même, le processus serait désormais accessible à tout juge ou magistrat qui émet un mandat, une ordonnance ou une autorisation, ce qui supprimerait l'exigence actuelle selon laquelle seuls des juges spécifiquement désignés peuvent émettre des télémandats.
[Français]
Le projet de loi harmonise aussi les règles qui s'appliquent aux télémandats et celles des mandats obtenus en personne relativement à l'exécution des mandats et au rapport exigé suivant la saisie des biens.
[Traduction]
Plus précisément, le projet de loi ajoute une obligation pour la police exécutant un mandat de perquisition de fournir à l'occupant du lieu perquisitionné une copie du mandat, ainsi qu'un nouvel avis. Cet avis contiendrait des renseignements essentiels sur l'endroit où la personne peut obtenir une copie du rapport sur les biens saisis et sur le lieu où ces biens sont détenus.
Soulignons toutefois que ces exigences ne s'appliqueraient pas aux mandats de perquisition demandés relativement à des biens saisis que la police détient déjà légalement. Ainsi, il ne serait pas nécessaire de fournir une copie du mandat et de l’avis à la personne responsable d’un casier à pièces à conviction de la police.
Le projet de loi apporte également des modifications au processus de prise d'empreintes digitales. La pandémie a perturbé la capacité de la police à obtenir les empreintes digitales des accusés et des délinquants en raison des exigences de distanciation physique, ce qui a entraîné d'importants défis opérationnels pour les tribunaux pénaux.
À l'heure actuelle, les personnes accusées d'une infraction peuvent se voir ordonner par la police ou un juge de se présenter à une heure et à un endroit précis aux fins d'identification.
Cependant, dans la plupart des cas, si quelque chose empêche un policier de procéder à la prise des empreintes digitales au moment prévu, aucun mécanisme ne permet à l'agent de demander à quelqu'un de revenir à un autre moment. Le projet de loi corrige cette situation en permettant la prise des empreintes digitales à un autre moment s'il est impossible de le faire plus tôt à cause de circonstances exceptionnelles comme celles auxquelles nous avons dû faire face pendant la pandémie de COVID‑19.
Le projet de loi ne changerait pas les règles concernant les personnes dont on peut prendre les empreintes digitales.
Par ailleurs, le projet de loi élargit le pouvoir des tribunaux d'établir des règles sur la gestion des instances afin de permettre à leurs fonctionnaires de régler des questions de nature administrative qui touchent les procédures extrajudiciaires, notamment en ce qui concerne les accusés non représentés par un avocat.
À l'heure actuelle, le Code criminel permet aux tribunaux d'établir des règles seulement lorsque l'accusé est représenté par un avocat. La gestion des instances améliore l'efficacité du système de justice pénale. En élargissant le pouvoir des tribunaux d'établir ce genre de règles, le projet de loi contribuera à réduire les comparutions en cour inutiles lorsque l'accusé n'est pas représenté par un avocat.
[Français]
Je sais que le reste déterminé à moderniser le système de justice pénale et à soutenir les réalisations technologiques des tribunaux au cours de la pandémie. Je soutiens ces objectifs et nous devons continuer à adopter des solutions technologiques lorsqu'elles sont disponibles et appropriées.
[Traduction]
Bon nombre d'intervenants et de nos partenaires, en particulier nos partenaires provinciaux, insistent constamment sur l'urgence d'apporter ces modifications. Il me tarde de travailler avec mes collègues de tous les partis afin que nous puissions adopter cet important projet de loi et mettre en place ces mesures.
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Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de prendre la parole au nom des habitants de Kamloops—Thompson—Cariboo. Je suis conscient du fait que je ne peux pas signaler la présence de visiteurs à la tribune, même si trois d'entre eux, qui sont âgés de 11 ans et moins, me ressemblent beaucoup.
Aujourd'hui, nous discutons du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur l’identification des criminels et apportant des modifications connexes à d’autres lois relativement à la réponse à la COVID‑19 et à d'autres mesures.
Avant de commencer, je tiens à souligner quelque chose qui est un peu lié à ce dont nous avons discuté: je viens d'avoir le plaisir de voter en faveur du projet de loi et, si je comprends bien, la Chambre a voté à l'unanimité pour renvoyer le projet de loi C‑291 au comité. J'ai bon espoir que le projet de loi remplacera l'expression « pornographie juvénile » par « matériel d’abus pédosexuels » afin de tenir compte du fait que l'agression sexuelle d'un enfant ne tient pas de la pornographie, mais bien de l'abus, et qu'il faut donc appeler un chat un chat. Les mots sont importants. Lorsque j'ai fait du porte-à-porte avant d'être élu, j'ai dit aux gens que je voulais venir au Parlement pour apporter ce changement.
Je suis très heureux de m'être associé à mon collègue et ami de pour traiter de ce problème à l'étape de la deuxième lecture. J'ai hâte que le comité déploie des efforts bipartites soutenus dans l'espoir que ce projet de loi soit adopté d'ici Noël.
Le projet de loi porte sur l'efficacité du système de justice pénale. Lorsque nous parlons de l'efficacité du système de justice, il est souvent question de son inefficacité. En fait, avant d'être élu, j'ai songé à produire des travaux universitaires en droit sur les inefficacités du système de justice et la façon de les éliminer. Je vais aujourd'hui parler de certaines d'entre elles, qui sont même parfois des lacunes.
Il ne faut pas oublier que certaines des personnes qui permettent à l'appareil judiciaire de fonctionner ne sont pas reconnues comme elles le méritent. Par exemple, en Colombie‑Britannique, les shérifs sont chargés de la sécurité des salles d'audience. Bien franchement, ils sont sous-payés vu ce qu'ils font. Ils escortent les gens en détention. Ils interviennent en première ligne auprès de gens qui, souvent, viennent d'être arrêtés et commencent à être en sevrage de drogue, et ils mettent en jeu leur santé, leur bien-être et leur sécurité pour protéger d'autres intervenants du système de justice pénale. Je les en remercie.
Je remercie les greffiers et les responsables de la gestion de l'instance, qui assurent le fonctionnement des tribunaux. Je remercie les juges, qui quittent souvent une carrière lucrative pour servir le bien public dans l'intérêt de la primauté du droit.
Lorsqu'il s'agit du système de justice, il faut se souvenir d'une chose: les temps changent, et la loi doit changer elle aussi. Cela s'avère tout particulièrement lorsqu'il est question d'un article dont nous ne débattons pas en ce moment, c'est-à-dire l'article 525 du Code criminel, qui traite des révisions d'ordonnance de détention.
Je ne sais pas exactement quand l'article 525 du Code criminel a été adopté, mais en le vérifiant, je suis convaincu que nous verrions qu'il a été adopté à une époque où les gens comparaissaient devant les tribunaux beaucoup plus rapidement qu'aujourd'hui. Pour paraphraser l'article 525, si une personne est détenue sous caution, elle a droit à une révision de sa caution après 90 jours. Or, à quelle fréquence une date de procès est-elle déjà fixée dans ce délai? C'est un problème en soi, mais il arrive que la date ne soit même pas fixée dans ce délai.
C'était une autre époque. Je me souviens d'avoir ouvert un dossier d'homicide datant de 1984, lorsque je pratiquais le droit en tant que procureur. À cette époque, on fixait la date du procès en deux ou peut-être trois mois, et l'accusé subissait souvent son procès dans les six, sept ou huit mois. Les temps ont changé. Le système est engorgé. La preuve est différente.
J'ai consulté ce dossier, qui remontait à 1984, je crois. J'ai l'impression qu'aujourd'hui, il ressemblerait à un dossier de vol d'une valeur inférieure à un certain montant, comme pour un vol à l'étalage. Je parle ici de son épaisseur. Il y avait quelques photos du présumé homicide et quelques déclarations, qui tenaient sur quelques pages. C'était tout.
Les temps ont changé. Le système doit maintenant composer avec l'article 525, qui dit qu'une personne ne doit pas rester indéfiniment en détention sous garde. La réalité actuelle, c'est que les gens ne subissent plus leur procès aussi rapidement. C'est le genre de problème que j'aurais aimé voir traité dans le projet de loi .
Je rappelle, comme d'autres l'ont fait avant moi, que le projet de loi est pratiquement identique au projet de loi . Un changement concerne le moment de l'entrée en vigueur. Je crois qu'on prévoit une période d'attente de 30 jours pour laisser aux tribunaux le temps de se préparer. Ajoutons que le projet de loi à l'étude mentionne la Loi sur l'identification des criminels.
J'ouvre une petite parenthèse. Un avocat de Kamloops—Thompson—Cariboo, Jay Michi, m'a parlé souvent, ou du moins une ou deux fois, de la Loi sur l'identification des criminels. Il soutient toujours que cette loi ne devrait pas porter le titre de « Loi pour l'identification des criminels », puisque les personnes en question n'ont pas encore été reconnues coupables. Le nom de Me Michi figure maintenant dans le hansard, et son point de vue a été présenté à la Chambre des communes.
Croyons-le ou non, la Loi sur l’identification des criminels pourrait en fait, à mon souvenir, justifier le défaut de comparaître devant un tribunal, ce qui pourrait également s'appliquer à la détention si l'on invoque, comme motif principal, la libération sous caution. Cela pourrait également causer divers problèmes.
En ce qui a trait à l'importance de prélever les empreintes digitales, beaucoup de gens l'ignorent, mais c'est généralement ainsi que l'on tient les casiers judiciaires au Canada, au moyen des empreintes digitales. Un numéro SED est le numéro de série que l'on attribue aux empreintes digitales lorsqu'elles sont prélevées. Ainsi, le registre du CIPC, comme on l'appelle, permet d'identifier le casier judiciaire d'une personne ayant fait l'objet d'une condamnation en Nouvelle‑Écosse, d'où viennent la plupart des bons Présidents, ou en Colombie‑Britannique, d'où viennent la plupart des bons avocats. Je suppose que quelques bons avocats ont fréquenté l'Université de l'Alberta, mais nous allons faire fi de ce détail pour le moment.
Qu'en est-il du Québec?
Monsieur le Président, le Québec compte également quelques bons avocats. Il y a de bons avocats partout. Mettons cela de côté pour l'instant.
L'importance de prélever les empreintes digitales n'est en fait pas très bien connue. Or, c'est très important. C'est une chose qu'il faut absolument moderniser.
Pour en venir à la teneur du projet de loi, les systèmes judiciaires ont des arriérés massifs. Je crois qu'il y a quelques années, le délai maximum pour déposer une accusation devant faire l'objet d'une procédure de déclaration de culpabilité par procédure sommaire est passé de six mois à un an. J'étais heureux de voir ça, mais nous avons encore un énorme arriéré. Les procès n'avancent tout simplement pas.
Les députés ont peut-être entendu le dicton « justice différée est justice refusée ». Cette affirmation est problématique. La Charte garantit évidemment le droit à un procès équitable. Nous avons souvent pensé au droit d'un accusé à un procès équitable qui comporte un élément de rapidité, évidemment sur le plan constitutionnel, mais qu'en est-il du droit d'une victime à un procès équitable? Avec le temps, les souvenirs s'estompent. C'est prouvé. Je ne connais personne qui dise mieux se souvenir des faits un an et demi après l'incident que deux semaines, voire six mois après l'incident. Un arriéré dans le système judiciaire contribue à le rendre moins efficace.
Au bout du compte, les tribunaux devraient servir à trouver la vérité de façon juste. Si faire connaître la vérité devant un tribunal ne relève pas nécessairement d'un exercice de mémoire, cela devient toutefois un sérieux problème quand l'arriéré est colossal. Au début de ma carrière, je me souviens d'une victime qui m'en a fait part. Je lui ai annoncé que le procès avait été ajourné et cette personne m'a demandé sur le champ si elle avait des droits dans ces circonstances. J'ai dû lui dire qu'en tant que victime, elle n'avait aucun droit sur ce point.
De nombreuses victimes se présentent au tribunal et disent qu'elles croyaient que leur procès allait probablement être remis à plus tard. J'ai même été témoin de situations où les tribunaux siègent durant environ cinq heures par jour, mais ils essaient de condenser l'équivalent de 12 à 15 heures de séances dans ce court laps de temps. Cela montre à quel point l'arriéré est considérable. Cela pourrait se traduire par la libération de certains individus dans la société alors qu'ils ne devraient pas s'y retrouver.
Une chose dont on ne parle pas en général à la Chambre est le délai. Ce délai, la Cour suprême du Canada en a parlé dans une affaire appelée Jordan. L'arrêt Jordan a reconnu le droit constitutionnel d'être jugé dans un délai raisonnable, soit dans un délai de 18 mois, ou un an et demi, pour les infractions moins graves qui sont traitées par procédure sommaire, ou dans un délai de 30 mois, ou deux ans et demi, pour les affaires qui sont traitées par voie de mise en accusation.
Plus il y a de pressions sur les ressources, plus cela prend du temps avant que le procès ait lieu. Plus il y a d'affaires, plus l'arriéré des cas sera important, et un plus grand arriéré implique un délai plus long, ce qui aura des incidences sur la libération sous caution. Le problème que nous avons, c'est qu'avec le principe de Jordan, le décompte du délai de deux ans et demi commence aussitôt que l'accusation est portée.
Il y a eu de nombreuses exigences en matière de divulgation depuis l'arrêt Stinchcombe en 1988, je crois. Il y a eu d'énormes changements en matière de divulgation, à un point tel que la divulgation est probablement devenue la cause principale des retards. C'en est une, en tout cas. Le Parlement ne s'est pas penché sur cette question. On pourrait se demander pourquoi la divulgation compte. Elle compte parce qu'il faut des mois, parfois des années pour que toute l'information soit divulguée dans des affaires importantes. Si une personne — un policier ou un procureur — est saisie d'une affaire, cette affaire peut littéralement représenter 30 000 pages de documents.
En raison de l'arrêt Jordan, on hésite à porter des accusations, car il faut parfois entre un an et un an et demi pour rassembler tous les documents. Il pourrait s'agir d'individus dangereux qui ne devraient pas être libres d'aller où bon leur semble et qui devraient au moins avoir été libérés sous caution ou être détenus en attente de leur procès.
Toutefois, en raison de l'arrêt Jordan, ces gens sont souvent libres jusqu'à leur procès, ce qui peut vouloir dire entre un an et demi et deux ans, sans devoir respecter la moindre condition et sans détention. Souvent, il s'agit des cas les plus graves, car ce sont les cas les plus graves qui nécessitent la production de la plus grande quantité de documents, et plus de documents, cela signifie plus de divulgation. Il s'agit souvent d'homicides, et donc d'affaires graves. Il s'agit en fait des affaires les plus graves.
Je vais fournir un autre exemple. Les députés m'ont souvent entendu parler des infractions de nature sexuelle à la Chambre. J'aimerais donc indiquer comment l'arrêt Jordan pourrait avoir une incidence sur ces infractions et pourquoi nous devons alléger les procédures, notamment en ce qui a trait aux infractions de nature sexuelle.
Supposons qu'une personne possède du matériel d'abus pédosexuels, ce qui est visé par le projet de loi , qui a été mis aux voix aujourd'hui, et qu'on trouve ce matériel sur l'ordinateur de cette personne. Pour établir la preuve au-delà de tout doute raisonnable, le procureur doit établir à qui appartient cet ordinateur, qui a eu cet ordinateur en sa possession et qui a eu accès à ce matériel. Normalement, on fait appel à un expert pour cela. Actuellement, ces experts sont peu nombreux, et analyser un disque dur prend du temps. On fait souvent appel à ces experts pour analyser des disques durs dans le cadre de procès pour des infractions liées au terrorisme ou des homicides, ou pour analyser des messages textes ou d'autres messages envoyés par voie numérique.
Il y a donc des contraintes en matière de ressources. Par conséquent, les auteurs présumés d'une infraction sexuelle contre un enfant, comme la possession, la production ou la distribution de matériel d'abus pédosexuels, ou encore le leurre par Internet, certaines des infractions contre les enfants les plus graves, se feront saisir leur ordinateur, puis il faudra attendre au moins 12 mois pour que celui‑ci puisse être analysé. Pendant 12 mois, ces personnes seront en liberté dans nos collectivités, sans condition. Il ne s'agit même pas d'une libération conditionnelle, mais d'une libération sans condition, à cause de l'arrêt Jordan.
La question est la suivante: quelle devrait être la réponse du Parlement? Nous ne cherchons pas à remettre en question la primauté du droit, mais à déterminer comment réagir aux problèmes indéniablement importants que le projet de loi a portés à l'attention de la Chambre. Comment devons‑nous y répondre? Même si le projet de loi S‑4 apporterait des changements, nous avons encore beaucoup de chemin à faire.
J'ai 14 pages de notes et j'en suis à la page 3. Je devrai peut-être sauter des bouts.
Une voix: Discours illimité.
M. Frank Caputo: Monsieur le Président, on dirait que le député de et le député de aimeraient vraiment m'entendre parler plus longuement de ce sujet.
Une voix: Encore.
M. Frank Caputo: Je ne sais pas si l'exhortation à parler « encore » sera notée dans le hansard, mais je suis heureux qu'on m'encourage à parler encore de ce sujet.
Du côté des conservateurs, nous lutterons toujours pour que le Canada ait un système juste et approprié qui soit non pas un système judiciaire, mais un système de justice. J'espère que chacun des députés de la Chambre souhaite un système juste et approprié. Je sais que nous avons parfois des points de vue différents, mais nous devrions réussir à nous entendre sur certains points, par exemple sur la question des infractions d'ordre sexuel à l'égard d'enfants et la réforme de la mise en liberté sous caution.
Le projet de loi modifie le processus que doivent suivre les agents de la paix pour demander et obtenir un mandat par un moyen de télécommunication au lieu de se rendre sur place. Le processus d'obtention d'un mandat est plutôt lourd. Il faut un affidavit avec assermentation, ce qui prend du temps. L'affidavit doit être rédigé, et les faits qu'il contient doivent généralement être vérifiés, ce qui prend du temps. L'affidavit avec assermentation doit ensuite être soumis ou présenté à un juge ou un juge de paix. Les temps changent: le projet de loi autorise une soumission par voie électronique.
La prise d'empreintes digitales, comme je l'ai évoqué, pourra désormais être effectuée à une date ultérieure ou non si le juge l'estime nécessaire en fonction des circonstances.
Le fait que l'accusé ou le contrevenant puisse comparaître à distance par audioconférence ou vidéoconférence est un point intéressant. Jusqu'à aujourd'hui, il me semble que seule une disposition dans le Code criminel permet de dispenser un accusé de comparaître. Le projet de loi apportera une certaine efficacité, mais pas nécessairement celle que nous recherchons.
Je voudrais parler des enquêtes préliminaires. La principale difficulté des enquêtes préliminaires vient du fait que la divulgation est exhaustive. La divulgation est fondée sur différentes décisions qui ont progressivement étendu le champ de la divulgation depuis l'affaire Stinchcombe. La divulgation concerne de très nombreux éléments.
Même si certains avocats ont pu recourir aux enquêtes préliminaires dans le passé pour déterminer la solidité des arguments de la Couronne, ces enquêtes sont souvent devenues, dans les affaires moins graves, un exercice de routine pour simplement creuser un peu plus le dossier. C'est ainsi que je vois les choses. Les enquêtes préliminaires ont été supprimées par la Chambre, me semble-t-il, pour les infractions assorties de peines de 10 ans et moins, il y a quelques années.
Là où le bât blesse, c'est que pour une agression sexuelle, par exemple, la peine maximale est de 10 ans, alors il n'y a pas d'enquête préliminaire. Or, dans le cas de contacts sexuels avec un enfant, il y a une enquête préliminaire. Dans le cas de contacts sexuels avec un enfant ou de leurre d'enfant en ligne, l'enfant en question pourrait être appelé à témoigner deux fois.
Il y a quelques façons d'y échapper dans le Code criminel, mais je crois que nous pouvons discuter de la victimisation et de la victimisation secondaire à la Chambre et je crois qu'il est temps de parler des traumatismes entraînés. Les enfants victimes de ce genre de crimes se retrouvent souvent avec une peine d'emprisonnement psychologique à perpétuité.
Il serait temps que le système règle ce problème. J'exhorte les députés à supprimer les enquêtes préliminaires pour les crimes sexuels ou, du moins, à simplifier le processus pour toutes les victimes afin qu'elles n'aient à témoigner qu'une seule fois, en reconnaissance des traumatismes que peut causer ce processus.
Une personne très proche de moi a beaucoup travaillé et poursuit avec la même ardeur ses travaux universitaires sur la question de l'accès à Internet pour les procédures à distance. Le gouvernement libéral a promis à maintes reprises d'améliorer l'accès à Internet dans les régions rurales. Les gens de Kamloops—Thompson—Cariboo et des autres régions rurales du Canada ne peuvent pas profiter de ces dispositions parce qu'ils n'ont pas accès à un réseau Internet adéquat. Certaines personnes auraient besoin de comparaître à distance parce qu'elles se trouvent à trois heures de route du palais de justice, mais ce n'est pas possible parce qu'elles n'ont pas accès à Internet.
Je demande au gouvernement de corriger cette situation. Ce n'est pas seulement une question de qualité de vie pour toutes les personnes touchées, mais également de justice.
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Monsieur le Président, cela me fait plaisir d'être ici aujourd'hui pour signifier l'appui du Bloc québécois au projet de loi , qui était anciennement le projet de loi . Le projet de loi S‑4 était demandé par bon nombre de provinces et d'acteurs du système judiciaire afin de tirer profit des leçons apprises au cours de la pandémie.
Le projet de loi S‑4 vise à modifier le Code criminel pour y introduire des dispositions permettant une meilleure efficacité du système. La pandémie aurait été une situation désastreuse à plusieurs égards. Nous en convenons tous. Nous souhaitons sûrement ne pas la voir se répéter; cela va de soi.
Toutefois, nous avons aussi appris de cette crise et nous pouvons certainement aujourd'hui tenter de tirer profit des leçons apprises. Ainsi, nous avons travaillé en mode virtuel au cours des deux dernières années comme jamais auparavant. Ce mode de fonctionnement a des désavantages certains; j'y reviendrai. Il comporte toutefois des avantages que nous ne pouvons ignorer. Notre système judiciaire pourrait très certainement être amélioré par l'utilisation de cet outil trop mal connu ou souvent mal utilisé. Le projet de loi S‑4 propose donc un mode d'emploi pour que les procédures qui peuvent être faites en mode virtuel soient encadrées et utilisées de manière efficace.
Notamment, ce projet de loi propose de permettre le recours à des moyens électroniques ou à d'autres moyens automatisés dans le processus de constitution du jury. Cela permet aussi d'élargir les possibilités de comparution à distance, par audioconférence ou vidéoconférence dans certaines circonstances pour les accusés et les contrevenants. Cela permet également de prévoir en certaines circonstances la participation de candidats-jurés dans le processus de constitution du jury par vidéoconférence.
Le projet de loi permet également d'élargir les pouvoirs des tribunaux en matière des règles sur la gestion des instances afin de permettre à leurs fonctionnaires de régler des questions de nature administrative pour les accusés non représentés par avocat. Il permet également aux tribunaux d'ordonner la prise des empreintes à l'étape de l'enquête sur la remise en liberté provisoire ou à toute autre étape du processus de justice pénale lorsqu'elles n'ont pas pu être prises antérieurement pour des motifs exceptionnels.
Finalement, il permet de remplacer les dispositions existantes sur les télémandats par un processus de demande et de délivrance d'une grande variété de mandats de perquisition, d'autorisations et d'ordonnances par des moyens de télécommunication.
Le projet de loi S‑4 apporte également des modifications au Code criminel et à la Loi sur l'identification des criminels afin de corriger des erreurs mineures de nature technique et comporte des dispositions transitoires, notamment sur l'application des modifications.
Enfin, le projet de loi S‑4 apporte des modifications connexes à d'autres lois et prévoit également des examens indépendants sur l'utilisation de la procédure à distance dans les affaires de justice pénale.
Il prévoit également un examen parlementaire des dispositions édictées ou modifiées par la présente loi, ainsi que de l'utilisation des procédures à distance dans les affaires de justice pénale, lequel commence au début de la cinquième année qui suit sa sanction. C'est donc une révision de l'ensemble du processus au bout de cinq ans. Cela me semble très sage, compte tenu de la nouveauté de bon nombre de dispositions que nous propose le projet de loi S‑4.
Le projet de loi S‑4 est un outil. Le mode virtuel, on l'a vu ici à la Chambre et ailleurs, a des avantages, c'est certain, mais il a aussi des inconvénients importants. Comme tout outil, on doit l'utiliser avec discernement. Il comporte des limites dont on doit tenir compte. Quand vient le temps notamment d'évaluer la crédibilité d'un témoin, le langage non verbal est un élément important dont le juge veut tenir compte. En mode virtuel, le langage verbal est pour ainsi dire caviardé. N’y a-t-il pas là un élément important qui pourrait dans certains cas changer radicalement l'issue d'un procès, surtout quand la preuve présentée est constituée de témoignages contradictoires? Je le crois.
Encore une fois, comme tout outil, on doit l'utiliser avec discernement. Un tournevis, c'est très utile; un marteau aussi. Toutefois, si on utilise le marteau pour essayer de planter des vis, on a un problème. Si on utilise le tournevis pour planter des clous, on a un autre problème. Il faut déterminer dans chaque cas si c'est adéquat ou pas. Ce n'est pas une panacée. À cet égard, le Barreau du Québec nous invite à la prudence sur certaines dispositions. J'y reviendrai.
Par contre, procéder de façon virtuelle dans certains cas va permettre d'accélérer le processus judiciaire. Cela va éviter des pertes de temps et des remises. On voit souvent des salles de cours bondées d'individus qui sont là le matin aux comparutions alors que la moitié de ces cas peuvent être reportés pour différentes raisons. Si on est en mode virtuel, on va diminuer ces déplacements, on va diminuer le délai pour les remises et c'est la même chose pour les questions administratives qui n'ont pas besoin d'une présence en personne des avocats. C'est déjà en place et on le fait déjà pour les questions de gestion d'instance quand les parties sont représentées par des avocats. Le projet de loi prévoit qu'on pourrait aussi procéder ainsi lorsque les parties ne sont pas représentées. Il va falloir voir comment procéder parce que cela apporte certains défis.
Je pense que c'est intéressant pour limiter les déplacements, les inconvénients et souvent la frustration des gens qui sont confrontés à un système judiciaire qu'on trouve trop lent, hermétique et qui impose des déboursés et des déplacements qu'on pourrait s'éviter. Donc, c'est une bonne chose, encore une fois, si on l'utilise avec discernement.
Je parlais des inconvénients, notamment la question de la crédibilité des témoins ou des jurés. Quand on sélectionne un jury dans un procès avec jurés, les avocats ont à évaluer les différents candidats jurés sur une base qui n'est pas toujours technique. L'avocat va les écouter, il va leur poser des questions, il va apprécier les réponses qu'il reçoit, mais aussi le langage non verbal, la façon dont les réponses sont données. Cela peut souvent faire la différence entre le rejet d'un candidat juré ou son acceptation.
C'est la même chose pour les témoins. On a vu fréquemment des procès où la preuve déterminante est constituée de témoignages contradictoires. Comment fera-t-on pour décider que M. X dit la vérité et que Mme Y ment? Le juge va se baser évidemment sur les réponses objectives, mais aussi sur le non verbal. Il va tenir compte de la manière dont les gens ont réagi. On va se faire une idée de la crédibilité des gens en fonction de bon nombre de critères qui ne sont pas nécessairement objectivés dans des procédures écrites. C'est important que le juge et les avocats qui travaillent sur un procès puissent avoir accès en personne à ces différents témoins et candidats jurés.
Est-ce que dans certains cas on ne pourrait pas quand même les entendre en virtuel? Je pense que oui. Est-ce que les jurés ne pourraient pas, dans certains cas, comparaître en mode virtuel? Je pense que oui, mais cela doit être déterminé du consentement des parties et non pas imposé de façon systématique dans tous les procès.
On parle également du problème du piratage informatique. On sait qu'on est constamment appelé à faire face à des actes de piratage informatique. On reçoit tous des courriels non sollicités, des propositions. J'en reçois souvent, où on me dit que j'ai été cité dans un procès à tel endroit et que je dois cliquer sur un lien sinon la fin du monde va arriver. Il y a toutes sortes de choses comme cela qui arrivent et qui font que nos systèmes informatiques ne sont pas toujours aussi sécuritaires que ce qu'on voudrait croire. Même les banques se font pirater. On l'a vu il y a environ deux ans, Desjardins s'est fait voler des données informatiques. Alors quand on parle de tenir des procès en mode virtuel, c'est une chose, il va falloir être prudent, mais on parle également dans le projet de loi S‑4 des télémandats, soit l'obtention d'un mandat qui permet par exemple de perquisitionner chez quelqu'un.
Si on informatise tous les télémandats, les mandats obtenus par mode virtuel, et si on procède par mode virtuel, est-ce qu'on ne s'expose pas à du piratage et, éventuellement, à des perquisitions ou des gestes de nature juridique qui seraient contraires à l'intérêt des justiciables, contraire à ce qu'on souhaite faire de l'administration de la justice? Je pense qu'il faut se poser la question. Je ne veux pas être alarmiste. Encore une fois, je pense que le projet de loi S‑4 est une bonne chose, mais je dis juste qu'il va falloir se poser des questions. Ce n'est pas une panacée, on ne peut pas appliquer cela sans réfléchir.
Il y a la question des disparités régionales. On le sait, on l'a vu pendant la pandémie, tout le monde au Québec, comme ailleurs au Canada, n'a pas accès à des systèmes informatiques égaux. Dans certaines régions, c'est plutôt déficient.
Certaines personnes sont capables de travailler à la maison toute la journée, à deux sur des ordinateurs, et faire des réunions à plusieurs sans problème. D'autres ont de la difficulté à passer un coup de fil sans se faire interrompre. Il va aussi falloir tenir compte de cela.
C'est aussi le mandat de notre gouvernement fédéral que de s'assurer d'offrir une couverture Web efficace partout au Québec et au Canada. Or, on n'en est pas encore là. On y travaille, j'en conviens, mais on en est encore loin. Si on veut informatiser le système judiciaire, il faut en tenir compte. Comment va-t-on en tenir compte?
Encore une fois, je pense que, avant d'imposer des procédures en mode virtuel, il va falloir s'assurer du consentement des parties. Si quelqu'un nous dit « un instant, chez nous, la couverture n'est pas efficace, et je ne pourrai pas suivre », on va peut-être alors devoir le faire en personne.
Il y a des modalités et des ajustements qui vont devoir être faits, et il faut en tenir compte, même si je suis d'avis que le projet de loi constitue un progrès certain pour l'administration de la justice.
Parlant de compromis, il y a le Barreau du Québec qui avait soumis un mémoire en avril dernier et qui recommandait quatre choses. Je vais me permettre de les lire, parce qu'elles m'apparaissent judicieuses.
La première recommandation du Barreau du Québec est celle-ci:
Exclure la preuve testimoniale du nouveau régime relatif à l'utilisation de la visiocomparution. La preuve testimoniale doit être entendue en présence des parties.
Comme je le disais tantôt, ne serait-ce qu'en ce qui concerne la question de l'évaluation du langage non verbal, je pense qu'il est important de voir les gens.
La deuxième recommandation est la suivante:
Procéder à une étude approfondie au soutien de la pérennisation dans le Code criminel (des mesures développées en contexte pandémique, en lien avec l'usage des moyens technologiques et l'automatisation des procédures). Procéder à une étude en profondeur relativement à l'impact de la visiocomparution sur:
La relation entre l'avocat et son client [...]
C'est une question de responsabilité professionnelle pour l'avocat que de bien représenter son client, et de s'assurer qu'il comprend bien son mandat et qu'il explique bien à son client ce qui, à son avis, est dans son intérêt.
[...] et sur la confidentialité de leurs échanges;
Encore une fois, on le sait, le Web et l'informatique n'ont rien de complètement étanche, et cela pourrait apporter des défis et des inconvénients qu'on ne souhaite pas.
La publicité des procès (Charte canadienne des droits et libertés);
La Charte canadienne des droits et libertés le prévoit, et il faut en tenir compte. J'y reviendrai d'ailleurs.
Le droit à un procès juste et équitable (Charte canadienne des droits et libertés);
La qualité et l'uniformité de la justice (disparités régionales des ressources, réalités autochtones, personnes qui se représentent seules).
En ce qui concerne le droit à un procès juste et équitable, de même que la qualité et l'uniformité de la justice, encore une fois, il y a les disparités régionales des ressources. Pour ce qui est des réalités autochtones, est-ce que les communautés autochtones sont équipées pour procéder en mode virtuel lors des procès? Sont-elles en mesure de le faire? Ce n'est pas certain; en tout cas, probablement pas tout le monde. Concernant les personnes qui se représentent seules, c'est une chose qu'un avocat soit chez lui ou à son bureau en mode virtuel pour faire de la gestion administrative d'instance, mais, qu'une personne se représente seule et qu'elle doive composer avec un, deux ou trois avocats, en plus d'un juge et d'un greffier, tout cela en virtuel, cela peut être assez problématique. Cela ferait-il l'objet de motifs pour faire appel? Peut-être que non, mais peut-être que oui. À tout le moins, cela pourrait alourdir le système plutôt que de l'alléger. Il va falloir y penser sérieusement.
La troisième recommandation du Barreau du Québec est la suivante:
Supprimer l'article 715.241 du Code criminel proposé qui permet au tribunal « d'exiger la comparution par vidéoconférence de l'accusé qui est sous garde et qui a accès à des conseils juridiques lors de toute procédure visée à ces articles, sauf durant la présentation de la preuve testimoniale ».
Je le disais tantôt. Je pense que, dans la mesure où tout le monde y consent, c'est parfait: l'outil approprié va être le virtuel. Si on est tous d'accord et que le juge est d'accord, allons-y. Toutefois, si on n'est pas tous d'accord, cela pose un problème. Ici, l'article 715.241 permet au tribunal d'exiger cette comparution de l'accusé en visioconférence. Cela m'apparaît possiblement problématique, et je suis d'avis que le Barreau du Québec a raison de nous mettre en garde sur cet aspect.
La quatrième recommandation du Barreau du Québec est la suivante:
Clarifier dans le projet de loi la distinction entre l'accusé qui a « accès à des conseils juridiques » et celui qui est « représenté par avocat » dans un contexte où seul l'accusé représenté peut communiquer avec son avocat.
Avoir accès à des conseils juridiques, c'est effectivement assez vague comme concept. Accès à quel moment et sur quel sujet; de quoi parle-t-on? Le fait d'avoir eu accès à son avocat hier concernant un certain nombre de questions fait-il en sorte qu'on est prêt à répondre à toutes les situations qui peuvent survenir lors d'un procès? Ce n'est pas certain. Il va falloir clarifier cela, le projet de loi n'étant pas très clair à cet égard.
On semble accorder le même crédit ou le même traitement à l'accusé qui est représenté par un avocat et à celui qui a accès à des conseils d'un avocat. Je pense qu'il va falloir regarder cela de près.
Comme je l'ai dit, le Bloc québécois appuiera le projet de loi et proposera probablement des amendements en comité. Nous verrons, mais je pense que ce projet de loi doit être renvoyé en comité.
Cela dit, durant les cinq dernières minutes qui me sont imparties, je m'en voudrais de ne pas porter à l'attention de la Chambre d'autres problèmes majeurs qu'il faut surmonter pour en arriver à une saine et efficace administration de la justice. Il ne faut pas les oublier. Effectivement, le projet de loi n'est pas une panacée. J'ai parlé longuement de la question de la connectivité dans toutes les régions et je n'y reviendrai pas, mais c'est un aspect important et cela fait partie des choses qu'on doit faire si on veut se doter d'un système juridique virtuel efficace.
Il y a aussi la question des postes de juges vacants. Plusieurs postes sont encore vacants. Je parlais à un juge de la Cour supérieure du Québec il y a deux ou trois semaines. Il me disait qu'une quinzaine de postes étaient à pourvoir au Québec. Je ne sais pas ce que notre gouvernement attend pour pourvoir les postes de juges vacants, c'est quelque chose qui m'apparaît absurde. Ce n'est même pas le fédéral qui paie ces juges, c'est Québec. C'est-à-dire que le fédéral les paie, mais il ne paie pas les infrastructures, les greffiers et les salles d'audience. Tous les coûts que cela comporte sont assumés par Québec. Il y a des postes vacants et notre gouvernement néglige de les pourvoir. C'est un problème majeur. Une saine administration de la justice requiert des ressources suffisantes sur le terrain et les juges sont la première des ressources dont nous avons besoin.
Nous avons parlé longuement de la question de la nomination des juges par la « libéraliste » et nous allons y revenir encore. Cela n'a pas de bon sens que, encore aujourd'hui, le et le tentent de me rassurer en me disant qu'on utilise la « libéraliste » seulement après avoir reçu des candidatures qui sont jugées adéquates. Pour ma part, j'estime que cela ne devrait jamais être utilisé, car les nominations partisanes ou qui tiennent compte de la partisanerie sont inacceptables dans notre société.
Enfin, on a parlé récemment encore de la question des procès secrets et c'était dans l'actualité hier encore. Le ministre de la Justice nous dit qu'il n'est pas en mesure de nous dire combien il y a de procès secrets. Il n'est même pas en mesure de nous dire s'il y en a. Je peux comprendre qu'on doive procéder de façon différente de ce que la Charte prévoit dans certains cas pour protéger la sécurité des témoins, mais il n'est certainement pas admissible qu'on procède de façon opaque et secrète comme on le fait présentement. Ces procès doivent être encadrés conformément aux dispositions de la Charte. Comme on le sait, on peut déroger à la Charte dans des circonstances exceptionnelles qui le justifient dans une société libre et démocratique. Je veux bien qu'on y déroge, mais pas n'importe comment. Quand le ministre de la Justice nous dit qu'il ne peut pas dire combien il y en a, qu'il ne peut même pas dire s’il y en a ni nous dire comment on procède, cela ne fonctionne pas. On n'est plus à l'époque du Far West et il faut être mieux structuré. C'est inacceptable que notre gouvernement fonctionne de cette façon.
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Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , bien que je doive le placer dans la catégorie « mieux vaut tard que jamais ». Ce projet de loi répond principalement à ce que nous avons appris à la suite des retards des tribunaux pendant la pandémie. Nous oublions vite que le système judiciaire canadien a été complètement paralysé, parfois pendant des semaines, parfois pendant des mois dans diverses régions du pays, en raison de la propagation de la maladie et de la peur qu'elle a engendrée. Essentiellement, l'effondrement du système judiciaire était imminent.
Par conséquent, au cours de la présente législature, grâce à un accord entre tous les partis, nous avons rapidement adopté certaines mesures qui ont permis aux tribunaux de continuer à fonctionner pendant la pandémie. On propose maintenant de rendre permanentes la plupart de ces mesures, qui avaient été adoptées temporairement. Le projet de loi propose donc de les pérenniser.
Nous avons également tendance à oublier que le projet de loi figurait au Feuilleton avant la tenue des élections inutiles. La plupart des gens de ma circonscription ont complètement oublié qu'il y a eu des élections en 2021. Les gens me parlent de la dernière élection comme si elles avaient eu lieu en 2019. Or, le projet de loi a été l'une des victimes du déclenchement de ces élections par les libéraux pendant la pandémie, et il est mort au Feuilleton.
Par conséquent, je suis heureux d'être de retour ici aujourd'hui pour parler du projet de loi et de la façon de remédier aux retards dans le système judiciaire.
De toute évidence, il y avait déjà des retards avant la pandémie. Entre la décision de la Cour suprême dans l'affaire Askov en 1990 et ce que l'on a appelé l'arrêt Jordan en 2016, plus de 50 000 affaires criminelles ont été rejetées dans la seule province de l'Ontario en raison des retards du système judiciaire. Cela inclut des centaines d'affaires d'agression sexuelle qui ont été rejetées à cause des retards des tribunaux.
Il est donc important que nous nous attaquions à ce problème à long terme, afin de ne pas nous retrouver dans une situation où les retards empêchent de rendre justice aux victimes de ce qui est souvent un crime grave et horrible.
Dans l'arrêt Jordan, la Cour suprême a précisé qu'en fonction de la gravité de l'affaire en cause, un délai raisonnable pour accéder au tribunal se situe entre 18 et 30 mois. Voilà le délai auquel nous sommes confrontés dans le système judiciaire. Si le système n'est pas conçu en conséquence, d'autres affaires seront rejetées. La pandémie a entraîné d'importants arriérés dans le système, et nous risquons à nouveau que des affaires soient rejetées à l'avenir si nous n'agissons pas. D'où la grande importance du projet de loi , qui améliorerait l'efficacité du système judiciaire.
Les retards nuisent aussi à la confiance du public dans le système de justice, tant du côté des accusés, qui voudraient que leur dossier soit traité dans un délai raisonnable et qui y ont droit en vertu de la Constitution, que du côté des victimes, qui ne souhaitent pas que l'affaire traîne pendant des mois et des années. Les victimes d'actes criminels ne veulent pas être obligées de revivre le traumatisme et de replonger, encore et encore, dans ce qu'elles ont vécu pendant de longues périodes. Nous avons donc l'importante tâche de tenter de réduire ces retards.
Certains obstacles qui entraînent des retards dans les procès sont évidents. Je félicite le gouvernement d'avoir essayé de s'attaquer à l'un d'entre eux: les postes vacants de juges. Ce faisant, le gouvernement a accordé beaucoup d'attention à rendre la magistrature beaucoup plus représentative de l'ensemble des Canadiens, et c'est une bonne chose.
Il y a cependant une autre façon de réduire les retards, mais le gouvernement n'a pas retenu la proposition du NPD à cet égard, et je parle de réduire le nombre de choses qui sont considérées comme des infractions criminelles. Nous avons notamment proposé de décriminaliser la possession de drogue pour usage personnel. Cela aurait permis d'éliminer carrément des centaines de dossiers judiciaires où le crime n'a fait aucune victime. Par ailleurs, avec cette approche, les personnes qui consomment des drogues dures pourraient être prises en charge par le système de santé plutôt que par le système de justice pénale. C'est donc dire que le gouvernement n'a pas toujours suivi nos conseils lorsqu'il s'agit de trouver la façon la plus efficace de réduire les retards, mais nous sommes heureux de voir les changements qui sont proposés dans ce cas-ci.
J'aimerais parler brièvement de deux changements majeurs, puis de deux autres changements qui se trouvent dans ce projet de loi.
Pour ce qui est d'éliminer les retards, le changement le plus important est probablement celui qui a trait à la comparution à distance. Auparavant, il n'y avait pas de dispositions dans notre système pour que l'accusé puisse comparaître par vidéoconférence aux fins de l'enquête préliminaire, du procès, de l'enregistrement du plaidoyer ou de la détermination de la peine. On passait donc beaucoup de temps à amener l'accusé d'un endroit à l'autre pour qu'il puisse comparaître en personne.
Les changements proposés supprimeraient la nécessité de s'assurer que quelqu'un soit toujours présent en personne pour une procédure de routine qui dure parfois deux minutes, par exemple pour enregistrer un plaidoyer. Ces modifications permettraient également aux personnes qui ont été sélectionnées et qui pourraient faire partie d'un jury de comparaître par vidéoconférence ou à distance et de réduire les inconvénients pour les citoyens susceptibles d'être jurés.
Il s'agit d'une disposition importante de ce projet de loi, qui permet de recourir plus largement à la technologie et aux comparutions à distance.
La deuxième partie — qui est sans doute moins visible pour le public, mais qui concerne l'efficacité du système judiciaire et policier — est la disposition relative à la mise à jour des télémandats. Avant la pandémie, la loi permettait de communiquer avec un juge par téléphone seulement pour un nombre très restreint d'affaires criminelles. Ce que nous avons découvert pendant la pandémie, c'est que nous pouvions utiliser les technologies pour élargir le champ des affaires dans lesquelles un mandat pouvait être obtenu à distance.
Comme nous l'avons déjà dit, le projet de loi prévoit qu'une plus grande variété de technologies pourront être utilisées dans un plus grand nombre de situations afin d'obtenir des mandats. Cela permettra d'économiser le temps des juges et des policiers dans notre système.
Il y a quelques éléments que je voudrais mentionner rapidement. D'abord, la modification des règles de gestion des instances pour les accusés qui ne sont pas représentés. Un des problèmes du système judiciaire canadien est que, même s'il accorde aux gens le droit de se représenter eux-mêmes, bien souvent, ceux qui le font ne choisissent pas cette option parce qu'ils veulent exercer ce droit, mais parce qu'ils n'ont pas les moyens de payer un avocat et qu'ils ne sont pas admissibles à l'aide juridique. Ils gagnent un peu trop d'argent pour avoir droit aux programmes d'aide juridique.
Je crois qu'il s'agit d'une amélioration importante, autant pour la réduction des délais que pour l'accès à la justice pour le Canadien moyen, qui ne peut pas nécessairement s'offrir les services d'un avocat. Cette modification permettra aux administrateurs de tribunaux d'offrir beaucoup plus d'aide aux personnes qui ne sont pas représentées.
La raison qui revient souvent est celle des délais judiciaires, mais je crois qu'il y a une autre raison importante ici, et c'est l'amélioration de l'accès à la justice pour les personnes qui ne sont pas représentées.
Il y aurait évidemment une meilleure solution, soit d'élargir l'accès à l'aide juridique afin que personne ne se retrouve devant le tribunal pour une affaire grave sans être représenté. Encore une fois, cela nécessiterait beaucoup de coopération entre le fédéral et les provinces mais ce type de coopération fait parfois défaut dans le système judiciaire canadien.
Le quatrième élément dont je veux parler, et j'en ai brièvement fait mention tout à l'heure, porte sur les dispositions qui facilitent la participation à distance pour les personnes appelées à remplir la fonction de juré. Selon moi, il reste beaucoup de travail à faire dans ce dossier. Nous devons faire en sorte que les jurés ne soient pas pénalisés parce qu'ils font partie d'un jury. Dans le système fédéral, la plupart des règles qui régissent l'indemnisation des jurés relèvent des provinces, même si ces derniers se prononcent sur des cas qui, eux, relèvent du Code criminel fédéral.
Il faut des normes nationales sur la façon d'indemniser les jurés et sur les éléments pour lesquels ils peuvent être indemnisés. Lorsqu'on examine la façon dont les gens sont indemnisés pour assumer la fonction de juré à l'heure actuelle, on constate qu'ils reçoivent entre 40 et 100 dollars par jour. Très peu de gens obtiennent un congé payé de leur employeur pour agir comme juré, ce qui accroît leur réticence. Dans diverses provinces, beaucoup d'autres dépenses sont couvertes de différentes façons. Les repas sont-ils payés? Le stationnement est-il payé? Les frais qui sont les plus importants à mes yeux, mais qui sont rarement couverts, sont les frais de services de garde.
Le Québec accorde déjà, au cas par cas, une indemnisation pour des services de garde. Je pense qu'il suffit de faire une demande. Cela vaut aussi pour le Nunavut. Je crois savoir que c'est le seul autre endroit où l'on offre une indemnisation pour des services de garde. Si nous voulons vraiment faire en sorte que les jurys reflètent l'image du Canada dans son ensemble, il faut tenir compte du fait que les parents seront souvent très réticents à être jurés s'ils ne sont pas indemnisés pour les services de garde dont ils auront alors besoin.
Certains diront qu'ils amènent déjà leurs enfants à la garderie pour aller travailler, sauf que beaucoup de parents choisissent de rester à la maison pour s'occuper des enfants. Si un de ces parents est convoqué pour faire partie d'un jury, les services de garde représenteront une dépense importante.
Cela n'est pas mentionné dans le projet de loi, mais j'espère que nous pourrons nous appuyer sur l'esprit de collaboration dont nous avons fait preuve pour ce projet de loi afin possiblement d'avancer vers ce que j'appellerais une norme nationale sur la rémunération des jurés au Canada.
Je le répète, il y a un large consensus au sujet du projet de loi. C'est une bonne chose. Il a fallu beaucoup de temps pour y arriver, mais maintenant que nous avons notre erre d'aller, peut-être qu'il faudra moins de temps pour renvoyer le projet de loi au comité et pour qu'il revienne à la Chambre. Je suis aussi optimiste que mon collègue conservateur qui disait vouloir que le projet de loi soit adopté d'ici Noël. Je crois que ce serait une bonne chose et je crois que nous pouvons travailler pour y arriver.
La collaboration n'est pas toujours facile à la Chambre. Il arrive que nos différends nous empêchent de régler rapidement des problèmes réels. Je crois que les délais judiciaires sont un véritable problème et je suis très content que les partis aient réussi à s'entendre pour essayer de le régler au moyen du projet de loi .
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Madame la Présidente, c'est un plaisir d'intervenir à la Chambre pour parler de cette mesure législative importante. J'ai eu l'occasion de poser des questions à quelques députés à propos du projet de loi . La Chambre en a déjà étudié la version précédente, qui avait une forme différente: elle provenait de la Chambre des communes, où elle avait fait l'objet de vastes discussions. Bien que la nouvelle version soit un projet de loi du Sénat, elle diffère très peu de la version précédente.
Cela dit, je considère la mesure proposée comme une sorte de modernisation. Je ne le dis pas à la légère. À l'époque où j'étais porte-parole en matière de justice à l'Assemblée législative du Manitoba, il y a plusieurs années, je me souviens que nous avons abondamment discuté, à quelques reprises, des façons d'utiliser la technologie pour accroître l'efficacité du système judiciaire.
Lorsque je prenais ma voiture pour me rendre à l'Assemblée législative du Manitoba, je passais devant les tribunaux, et cela m'irritait au plus haut point de voir toutes les voitures de police stationnées là parce que les policiers attendaient de comparaître à un procès. Il arrivait bien souvent qu'ils ne puissent même pas témoigner cette journée‑là et qu'ils soient invités à revenir une autre journée. Parfois, je me rendais à un autre endroit, et je constatais qu'il y avait une forte présence policière à cause d'affaires judiciaires. Je me rappelle avoir parlé à des agents de la paix qui m'ont dit qu'il serait bien préférable de tirer profit de certaines technologies, telles que les vidéoconférences, et qui m'ont parlé des répercussions positives que cela aurait. Je crois que ce serait une solution très efficace.
Quand j'ai entendu parler du projet de loi venant de l'autre endroit, qui avait été initialement présenté à la Chambre des communes avant d'être présenté à nouveau par l'entremise du Sénat, j'ai pensé que, au bout du compte, les Canadiens veulent un système indépendant, notamment du pouvoir politique. Nous croyons fermement à la primauté du droit et à l'indépendance judiciaire, mais les législateurs et les parlementaires doivent quand même chercher des moyens d'améliorer le système. C'est ce dont il est question ici. La mesure législative présentée par le gouvernement favoriserait l'accessibilité. Elle rendrait le système plus efficient et, en fin de compte, plus efficace.
Comme il a été mentionné plus tôt, on entend beaucoup parler de l'importance que les citoyens obtiennent justice le plus rapidement possible. Nous avons tiré certaines leçons de la pandémie. Nous avons souvent entendu dire, lorsque la pandémie était à son apogée, que nous devrions trouver des moyens d'en tirer des leçons afin d'améliorer nos systèmes. On peut facilement introduire la technologie dans notre système judiciaire. Nous devrions au moins offrir la possibilité d'en faire usage. J'aime à penser qu'offrir cette possibilité améliorerait les choses.
Le projet de loi propose toute une gamme de réformes qui serviraient à assouplir les procédures judiciaires, tout en protégeant les droits de tous les participants. Les réformes seraient le résultat d'un travail important mené et dirigé par le Comité d'action sur l'administration des tribunaux en réponse à la COVID‑19, qui était coprésidé par le et le juge en chef Richard Wagner.
Lorsqu'on examine les mesures concrètes prévues dans le projet de loi, on constate que l'une d'entre elles est de permettre à un accusé de comparaître par vidéoconférence durant l’enquête préliminaire avec le consentement des parties et quand le tribunal le juge approprié, notamment lors de la présentation de la preuve. De plus, le projet de loi permettrait à un accusé de comparaître par vidéoconférence à son procès pour une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, sur consentement et lorsque le tribunal le juge approprié, notamment lors de la présentation de la preuve.
Un autre élément important à souligner est que le projet de loi permettrait à un accusé de comparaître par vidéoconférence à son procès pour un acte criminel avec le consentement des parties et quand le tribunal le juge approprié, notamment lors de la présentation de la preuve, sauf lorsque la preuve est présentée à un jury.
J'ai deux autres points à souligner. Le projet de loi permettrait à un accusé de comparaître par vidéoconférence ou audioconférence pour enregistrer son plaidoyer avec le consentement des parties et quand le tribunal le juge approprié. Le tribunal ne peut permettre à l'accusé de comparaître par audioconférence que s'il est convaincu que la vidéoconférence n'est pas facilement accessible et qu'il est toujours capable de vérifier si les conditions pour accepter un plaidoyer de culpabilité qui sont prévues au paragraphe 606(1.1) sont remplies, même s’il ne peut voir l’accusé, ce qui a été proposé à l'article 715.234.
La dernière remarque que j'aimerais faire au sujet du projet de loi est qu'il permettrait au délinquant de comparaître par vidéoconférence ou audioconférence aux fins de la détermination de la peine, sur consentement des parties et lorsque le tribunal le juge approprié. La détermination de la peine par audioconférence n'aurait lieu que lorsque le tribunal est convaincu que la vidéoconférence n'est pas facilement disponible, comme le propose l'article 715.235.
Je comprends l'importance de la vidéoconférence. Mon ami néo-démocrate de Baie James...