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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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44e LÉGISLATURE, 1re SESSION

HANSARD RÉVISÉ • No 281

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 13 février 2024




Emblème de la Chambre des communes

Débats de la Chambre des communes

Volume 151
No 281
1re SESSION
44e LÉGISLATURE

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mardi 13 février 2024

Présidence de l'honorable Greg Fergus


    La séance est ouverte à 10 heures.

Prière



Affaires courantes

[Affaires courantes]

(1000)

[Traduction]

Pétitions

La fiscalité

    Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole afin de présenter une pétition qui indique que nous vivons à la fois une crise climatique et une crise du coût de la vie. Les pétitionnaires soulignent que partout au pays, des gens peinent à payer leur loyer et leur nourriture tout en étant confrontés à des catastrophes climatiques sans précédent qui ne vont que s'aggraver si on ne prend pas des mesures urgentes.
    Ils font valoir que pendant ce temps, les sociétés qui produisent des combustibles fossiles ont enregistré des profits record l'an dernier, les cinq plus grandes d'entre elles établies au Canada ayant réalisé des profits annuels de plus de 38 milliards de dollars. Ils ajoutent qu'une part importante de ces profits est due à des prix abusifs à la pompe. En 2022, les Canadiens ont dû payer 18 ¢ de plus le litre, soit plus que les marges bénéficiaires précédentes sur le carburant et beaucoup plus que les 2 ¢ le litre associés à la hausse de la tarification du carbone pendant la même période l'an dernier. Ils font aussi remarquer qu'on a déjà imposé les profits excessifs d'autres secteurs au Canada, et que le Royaume-Uni et l'Europe ont fait de même avec les sociétés pétrolières et gazières.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'instaurer immédiatement un impôt de 15 % sur les profits excessifs des sociétés pétrolières et gazières en activité au cours des trois dernières années et de réaffecter les revenus ainsi créés à la mise en œuvre de solutions climatiques éprouvées, ainsi qu'à des mesures visant à rendre la vie des Canadiens plus abordable, notamment en investissant dans le transport en commun, la rénovation des bâtiments et l'écologisation du réseau électrique.

Les armes à feu

    Monsieur le Président, je prends la parole pour déposer quelques pétitions aujourd’hui.
    La première concerne le programme de rachat d’armes à feu du gouvernement libéral. Le plan du gouvernement libéral visant à confisquer les armes à feu acquises légalement par les propriétaires d’armes à feu respectueux de la loi et par les détaillants ne permettra aucunement de réduire la criminalité au Canada.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement libéral de renoncer à mettre en œuvre son programme de rachat d’armes à feu coûteux et inefficace et de se concentrer plutôt sur des politiques sensées qui empêcheront les armes à feu de tomber entre les mains de dangereux criminels.
(1005)

L’aumônerie militaire

    Monsieur le Président, la pétition suivante porte sur les prières en public dans les Forces armées canadiennes. La récente directive émise à l’intention des aumôniers militaires, qui interdit les symboles religieux et les prières en public lors de cérémonies comme le jour du Souvenir, porte atteinte à nos libertés religieuses et, paradoxalement, à l’une des valeurs mêmes que nos soldats ont défendues sur les champs de bataille.
    Les pétitionnaires demandent à la Chambre des communes de reconnaître le droit à la prière en public dans les Forces armées canadiennes.

Les enfants et les familles

    Monsieur le Président, je dépose une dernière pétition concernant le projet de loi C‑318. Nous savons que les parents adoptifs et les parents d’intention de notre pays sont désavantagés par le régime d’assurance-emploi actuel. Pourtant, tous les parents méritent un accès égal aux prestations de congé parental. Le projet de loi C‑318 assure un accès équitable au congé parental pour les parents adoptifs et les parents d’intention.
    Les signataires de cette pétition, des résidants du Canada, demandent au gouvernement du Canada de soutenir les parents adoptifs et les parents d’intention en accordant la recommandation royale au projet de loi C‑318.

L'environnement

    Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole pour présenter une pétition au nom des habitants de Saanich—Gulf Islands qui sont préoccupés par le lien entre la crise climatique et la santé de l'humanité. Les pétitionnaires font remarquer que l'Organisation mondiale de la santé a établi que les changements climatiques représentent la plus grande menace pour la santé dans le monde au XXIe siècle.
    Parmi les effets des changements climatiques sur la santé, mentionnons les maladies pulmonaires, les maladies et les décès liés à la chaleur, la propagation des maladies infectieuses, la propagation de la maladie de Lyme au Canada, les déplacements, la famine, les sécheresses et les effets sur la santé mentale, qui se font déjà sentir au Canada et à l'étranger et qui devraient s'accélérer.
    Je tiens à souligner que les pétitionnaires, des membres de Physician Mothers of Canada, sont des personnes bien informées. Ce sont des mères médecins qui s'inquiètent pour leurs enfants, comme beaucoup d'entre nous, mais qui considèrent aussi les choses à la lumière de leurs connaissances.
    Les pétitionnaires demandent au gouvernement et à la Chambre des communes de donner suite aux appels à l'action de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement en matière de changements climatiques et de santé, de donner la priorité à la réduction des émissions le plus rapidement possible, de mettre en œuvre une stratégie nationale de tarification du carbone et de s'engager à éliminer rapidement les combustibles fossiles de notre économie.

Questions au Feuilleton

     Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
    D'accord?
     Des voix: D'accord.

Ordres émanant du gouvernement

[Article 57 du Règlement]

[Français]

L'affaire émanant du gouvernement no 34 — Les délibérations sur le projet de loi C‑62

Motion portant que le débat ne soit plus ajourné

    Monsieur le Président, relativement à l'affaire émanant du gouvernement no 34, je propose:
    Que le débat ne soit plus ajourné.

[Traduction]

     Conformément à l'article 67(1) du Règlement, il y aura maintenant une période de questions de 30 minutes. J'invite les députés qui souhaitent poser des questions à se lever ou à activer la fonction « main levée » pour que la présidence ait une idée du nombre de députés qui désirent participer à cette période de questions.
    La députée de Battlefords—Lloydminster a la parole.
    Monsieur le Président, les libéraux imposent encore une fois l'attribution de temps. Je me demande, par votre entremise, pourquoi les libéraux ont tant de mal à gérer le programme législatif de la Chambre. Au bout du compte, ce sont eux qui déterminent le programme et qui établissent les priorités, et il semble qu'ils repoussent toujours tout à la dernière minute. Encore une fois, ils essaient d'imposer la clôture.
(1010)
    Monsieur le Président, je remercie la députée de ses interventions, mais je rejette sa description de la situation.
    Nous avons dit très ouvertement et publiquement que nous ne permettrions pas l'aide médicale à mourir dans les cas où la maladie mentale est le seul problème médical invoqué avant d'avoir reçu l'étude du comité mixte composé de députés et de sénateurs.
    L'étude du comité mixte a été déposée à la Chambre le 29 janvier. Peu de temps après, nous avons examiné le document, préparé un projet de loi et déposé ce dernier rapidement. La Chambre est maintenant saisie dudit projet de loi, mais elle doit respecter l'échéance de la disposition de caducité fixée au 17 mars. C'est pourquoi il est nécessaire de faire adopter le projet de loi rapidement par les deux chambres.
    Monsieur le Président, la date a été fixée au 17 mars. Comme l'a dit le ministre de la Justice, nous n'avons, à ce stade, que 14 jours de séance pour faire adopter ce projet de loi non seulement à la Chambre des communes, mais aussi au Sénat.
    Ce qui me préoccupe, c'est qu'il pourrait y avoir de la confusion. Si ce projet de loi n'est pas adopté par les deux chambres, la confusion la plus totale régnera au sujet de l'aide médicale à mourir, un enjeu fondamental. Je ne pense pas que les Canadiens approuvent cette confusion.
    Il faut bien faire les choses. Il est important que nous respections ce délai. Ce qui me surprend, c'est qu'il n'y ait pas de consensus. C'est le genre de situation où tous les partis devraient agir de concert et faciliter l'adoption du texte par la Chambre. Il est en effet important de ne pas augmenter ou semer la confusion, car cela nous empêchera certainement de respecter le délai établi.
    J'ai une question très simple à poser à mon collègue. Pourquoi ne pouvons-nous pas parvenir à un consensus sur cette question et faire adopter ce texte à la Chambre cette semaine sans avoir recours à l'attribution de temps?
    Monsieur le Président, en toute franchise, je suis d'accord avec l'idée du député. Il est important que les parlementaires travaillent à l'unisson lorsqu'il est question d'un enjeu aussi important et lourd de conséquences que l'aide médicale à mourir, qui est une question de vie ou de mort. Il y a eu des divergences d'opinions sur cette question par le passé, et il y en a encore à la Chambre.
    Ce que nous disons, c'est que nous examinons expressément les cas où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée. À cet égard, nous croyons qu'il est prudent de prolonger le délai de trois ans. Nous espérons que tous les parlementaires appuieront cette prolongation et conviendront de l'urgence de faire adopter ce projet de loi par les deux Chambres afin qu'il reçoive la sanction royale avant le 17 mars afin d'éviter la confusion dont le député a parlé.
    Monsieur le Président, quand je pense à ce dossier, je constate que, au cours des dernières années, nous avons eu des discussions et des débats assez approfondis.
    Parlons du temps consacré par les comités et la Chambre des communes à l'arrêt Carter de la Cour suprême du Canada en 2015. Il y a eu beaucoup de discussions, à juste titre. Il est important de reconnaître que l'aide médicale à mourir n'est pas nécessairement un nouvel enjeu. On en a discuté longuement et de différentes façons, de même que de la question de la santé mentale et du bien-être.
    Je me demande si le ministre peut nous dire ce qu'il pense du parcours qui nous a menés là où nous en sommes aujourd'hui et pourquoi il est si important que le projet de loi soit adopté d'ici la fin de la semaine.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour son intervention d'aujourd'hui et pour sa participation quotidienne aux travaux de la Chambre.
    Nous avons agi de manière responsable, avec minutie et prudence. À titre de députés et de ministres, nous sommes conscients que les problèmes de santé mentale représentent une source de grande souffrance, au même titre que les problèmes de souffrance physique. Nous comprenons également que les personnes aux prises avec un trouble mental sont aptes à prendre des décisions.
    Par ailleurs, nous sommes conscients qu'au sein de la fédération canadienne, la prestation des soins de santé relève principalement de la compétence des provinces. Or, les provinces et les territoires ont affirmé à l'unisson qu'ils ne sont pas prêts à dispenser l'aide médicale à mourir aux personnes dont la seule condition médicale sous-jacente est un trouble mental. Dans ce contexte, le gouvernement fédéral doit écouter ses partenaires provinciaux et territoriaux, et collaborer avec eux.
    Nos homologues provinciaux nous ont fait part, au ministre de la Santé et à moi-même, de leur manque de préparation et du fait qu'il leur serait utile de disposer de plus de temps pour mieux préparer le programme d'aide médicale à mourir, fournir de l'aide aux personnes responsables d'évaluer et de dispenser l'aide médicale à mourir et mettre en place des mesures de sauvegarde pour les patients dont la seule condition médicale sous-jacente est un trouble mental. Voilà pourquoi nous demandons à la Chambre et au Sénat une prolongation de trois ans. Nous devons agir de manière prudente, car l'enjeu est de taille et les conséquences irréversibles.
(1015)
    Monsieur le Président, j’invoque le Règlement et je m’excuse. Je me suis trompé. J’ai dit 14, mais il ne reste en fait que 9 jours de séance, y compris aujourd’hui, avant la date limite.
    Je remercie le député pour cette précision.
    Monsieur le Président, je remercie le ministre de la Justice de nous faire part des échanges qu'il a eu avec d'autres membres du Cabinet, en particulier le ministre de la Santé.
    Sans doute s’agit-il de la question la plus délicate que nous aurons à traiter en tant que députés. Curieusement, si elle avait été en vie au moment où j’étais députée, Sue Rodriguez, qui est allée jusqu’à la Cour suprême du Canada pour obtenir le droit de mourir dans la dignité, aurait été ma concitoyenne. Elle vivait à North Saanich.
    Dans ma région, l’opinion publique est très favorable à l'idée que les Canadiens puissent bénéficier d’une aide médicale à mourir. Cependant, je dois dire que dans le cas du projet de loi C-14 et de la disposition qui visait à inclure la maladie mentale dans les motifs pouvant justifier le recours à l’aide médicale à mourir, j’ai voté pour ce projet de loi uniquement parce qu’il y avait une disposition de caducité, car il fallait nous préparer avant son entrée en vigueur.
    Je suis en accord avec le ministre de la Justice sur ce qu'il vient de dire. Nous savons que les provinces ont parlé d’une seule voix. Je suis très préoccupée par le fait que l’accès aux traitements pour la santé mentale ne soit toujours pas disponible et que cela puisse pousser les gens à demander l’aide médicale à mourir parce qu’ils ne peuvent pas avoir accès à un traitement comme la psilocybine qui pourrait remédier aux causes sous-jacentes de leur maladie.
    Je suis tout à fait contre le recours à l'attribution de temps. Je ne crois pas avoir déjà voté en faveur de l'attribution de temps à la Chambre, mais je dois le faire maintenant parce que la date limite fixée par la cour approche à grands pas; le 17 mars, c'est bientôt. Nous devons nous assurer de ne pas laisser les Canadiens dans cette terrible situation où nous n’avons rien mis en place, à titre de parlementaires, pour régler la crise actuelle.
    Je fais donc ces observations simplement pour dire que je voterai différemment de ce que j'ai l'habitude de faire, mais je m’oppose toujours vigoureusement à l'utilisation récurrente de l’attribution de temps.
    Monsieur le Président, je remercie la députée de Saanich—Gulf Islands de ses interventions à la Chambre aujourd'hui, comme d'ailleurs tous les autres jours.
    La députée décrit avec exactitude l'équilibre que nous cherchons à établir depuis 2016, en réponse à l'arrêt Carter. Il s'agit essentiellement de deux idées différentes: promouvoir la dignité et l'autonomie des Canadiens et veiller à protéger les personnes vulnérables au moyen de mesures de sauvegarde adéquates afin qu'elles ne soient pas victimisées. Dans ce contexte, les mesures de sauvegarde et de protection sont essentielles pour les personnes atteintes de maladie mentale. C'est ce qui nous a guidés dans nos démarches.
    En plus des provinces et des territoires qui ont dénoncé le manque de préparation du système, les représentants de l'Association canadienne pour la santé mentale et du Centre de toxicomanie et de santé mentale nous ont également dit qu'ils ne sont pas prêts non plus et qu'ils souscrivent aux arguments des provinces et des territoires.
    En ce qui concerne le dernier point soulevé par la députée de Saanich—Gulf Islands, elle a parlé de soutien en santé mentale. Ce type de soutien est essentiel maintenant plus que jamais, surtout au sortir de la pandémie de COVID. Je dirais à la députée que, lorsque nous avons conclu une entente il y a environ un an pour fournir un montant record à l'appui du système de santé canadien, nous avons fixé certains paramètres pour ce soutien. Appuyer la santé mentale et répondre aux besoins des Canadiens à cet égard sont deux des piliers de ce soutien. Il s'agit d'une priorité fondamentale pour nous, et elle le restera.

[Français]

    Monsieur le Président, je pense que la question qui nous occupe est importante et je reconnais le travail de mon collègue le ministre de la Justice sur ce dossier.
    Cela dit, en tout respect, je dois dire que nous avons déjà délibéré sur cette question il y a plusieurs années et que nous avions déterminé que le 17 mars serait la date à laquelle cela entrerait en vigueur. Québec a travaillé là-dessus et est prêt à administrer les traitements d'aide médicale à mourir dont nous parlons. Il serait facile pour le gouvernement de simplement adopter l'amendement proposé par mon collègue de Montcalm, sur lequel nous allons voter plus tard aujourd'hui, je crois. Cet amendement permettrait aux provinces qui sont prêtes à administrer le traitement de le faire.
     Prenons l'exemple de l'article 720 du Code criminel, qui prévoit un processus semblable pour le traitement de la toxicomanie. On dit que lorsqu'il y a un traitement agréé dans une province, on peut permettre de l'administrer même si ce n'est pas autrement autorisé par le Code criminel. On pourrait donc aménager un régime du même type. Il est vrai que certaines provinces ne sont pas prêtes aujourd'hui. Il y en aura probablement toujours. Je suis à peu près convaincu que dans trois ans, comme dans cinq ans ou dans dix ans, il y aura des provinces qui ne seront toujours pas prêtes. Cela ne peut pas paralyser le Parlement. Certaines provinces sont prêtes et on peut aménager un processus pour permettre aux provinces qui sont prêtes à travailler de le faire.
    J'invite mon collègue et l'ensemble de son gouvernement à appuyer l'amendement de mon collègue de Montcalm afin de permettre aux provinces qui sont prêtes, comme le Québec, de procéder à l'administration des traitements d'aide médicale à mourir.
(1020)
    Monsieur le Président, j'aimerais répondre à cette question en abordant deux volets.
    D'abord, la province de Québec a dit elle-même qu'elle n'était pas prête à prodiguer l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème médical est une maladie mentale.
    Ensuite, mon collègue a soulevé l'aspect des demandes anticipées. C'est une autre question. J'ai un profond respect pour le travail crucial qui a déjà été fait au Québec sur les demandes anticipées. Toutefois, le Canada dispose d'un seul Code criminel, et ce, pour une très bonne raison. Les Canadiens méritent des normes cohérentes et de la clarté sur ce qui est criminel ou non criminel partout au pays. Il n'y a pas de solution rapide pour permettre en toute sécurité une exception pour le Québec sur cette question en ce moment.
    Cependant, la conversation ne s'arrête pas ici. Nous nous engageons à travailler avec le Québec pour envisager la prochaine étape. Nous avons adopté une approche prudente dès le début, en 2016, relativement à l'aide médicale à mourir. Nous allons continuer d'agir à l'échelle nationale et de façon prudente sur cette question.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je m’inquiète moi aussi beaucoup du recours à la clôture dans un dossier aussi important. À mon avis, en autorisant l’aide à mourir pour les personnes dont le seul problème médical est une maladie mentale, nous risquons sans le vouloir de fermer la porte à de possibles rétablissements et à l'éventuelle reprise d’une vie qui a du sens, dans la dignité.
    De plus, permettre l’aide médicale à mourir pour des problèmes de santé mentale pourrait sous-entendre que certaines vies valent moins que d'autres la peine d’être vécues et que certaines formes de souffrance méritent moins que d'autres la pleine mesure de nos ressources médicales et sociales. On risquerait de s'engager sur une pente glissante où le droit de mourir pourrait devenir, avec des pressions sociales subtiles, un devoir de mourir, particulièrement pour les membres marginalisés ou moins privilégiés de notre société. Pour ces raisons et bien d’autres, il faut faire preuve d’une extrême prudence.
    À mon avis, imposer la clôture sur une question d’une telle importance, c’est dévaloriser les personnes qui pourraient envisager le recours à l’aide à mourir. Rien n’est moins vrai. Il faudrait pouvoir débattre de cette mesure. Je ne sais pas pourquoi le gouvernement a tant tardé à lancer le débat. Comme l’a dit mon collègue du NPD, il reste neuf jours. Pourquoi le gouvernement a-t-il tant tardé à présenter cette mesure pour qu’elle fasse l’objet d’un débat en bonne et due forme?
    Monsieur le Président, avec tout le respect que je dois au député d’en face, je suis en désaccord avec certaines de ses affirmations. C’est précisément en raison de l’absence de consensus sur le sujet que nous voulons nous assurer, en faisant appel à tous les outils à notre disposition, que le projet de loi entrera en vigueur avant le 17 mars, faute de quoi nous nous retrouverons dans la situation confuse qu’a décrite le député de New Westminster—Burnaby, à savoir qu’une personne souffrant de maladie mentale pourra présenter une demande d’aide médicale à mourir pour ce seul motif.
     Nous estimons que le système n’est pas prêt. C’est ce que nous ont dit tous les ministres de la Santé des provinces et des territoires. C’est aussi ce que nous ont dit les professionnels de la santé, les infirmières, ainsi que les évaluateurs et les prestataires de l’aide médicale à mourir. Une formation a été élaborée, mais elle n’a pas encore été dispensée à un nombre suffisant de personnes. De plus, les mécanismes de protection et de surveillance ne sont pas encore en place.
     C’est précisément en raison du caractère imprévisible de certaines maladies mentales que nous devons faire preuve de circonspection avant de proposer un élargissement du régime aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale.

[Français]

    Monsieur le Président, la réponse du ministre à mon collègue de Rivière‑du‑Nord est insuffisante. Oui, le Québec, en 2021, avant le rapport des experts sur les troubles mentaux, a statué sur la question.
    Par contre, le ministre avait un an pour mettre en place la recommandation la plus majoritaire du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir au sujet des demandes anticipées. Même une députée conservatrice du Québec a voté pour cela.
    Pourquoi n’a-t-il pas présenté aujourd’hui un projet de loi visant à rencontrer cette disposition, sachant très bien, à moins qu’il ne soit pas au courant, que le Québec allait aller vers sa loi? En ce qui a trait au report, nous parlons d'un an et lui veut trois ans, mais c’est une autre question. Qu’il ne nous dise pas qu’il n’avait pas le temps de pouvoir s’appuyer sur la recommandation phare du Comité mixte spécial.
    Maintenant, c’est deux poids, deux mesures. Pour les troubles mentaux, on prend la recommandation du Comité mixte spécial et on en fait un projet de loi. Pour les demandes anticipées, alors qu’il y a un consensus d’un océan à l’autre, on ne fout rien.
    Le ministre s’engage-t-il, s’il retire son appui à mon amendement, à déposer un projet de loi sur les demandes anticipées dans les plus brefs délais?
(1025)
    Monsieur le Président, j’apprécie l’intervention de mon collègue et son travail acharné au sein du Comité mixte spécial où il siège.
    Il y a plusieurs choses qu’il faut souligner. La première chose, c’est que ce projet de loi vise et cible la maladie mentale comme seule condition, point final. Dans la Loi, il y a une date d'échéance qui exige de traiter la question avant le 17 mars 2024.
    J’ai beaucoup de respect pour mon collègue d’en face. Ce dernier a mentionné qu’il y a un consensus d’un océan à l’autre pour les demandes anticipées. Même s’il y a une volonté qui a été exprimée par le peuple du Québec, je crois qu’il n’y a pas le même consensus partout au pays; c'est la deuxième chose à souligner.
     C’est sûr que si nous voulons élargir l'aide médicale à mourir aux demandes anticipées, il faut le faire de façon prudente et responsable, comme nous l'avons fait avec tous les autres enjeux, c’est-à-dire avec tous les experts du domaine de la santé: ministres de la Santé, psychiatres, médecins et infirmières. Il faut procéder de façon prudente, avec précaution, en préservant toujours les droits individuels. Il faut aussi avoir un équilibre entre les droits individuels et la protection des personnes vulnérables. C’est la façon dont nous avons agi depuis 2016 et dont nous allons continuer d’agir.
    Encore une fois, il faut souligner que le Code criminel est un document qui régit tout le pays. C’est important d’avoir une information claire pour tous les Canadiens, pour qu’ils puissent connaître leurs droits et les règles criminelles qui existent partout au Canada. Le droit criminel ne doit pas exister de façon différente d'une province à l'autre.
    Cela dit, les discussions politiques avec le Québec continuent parce que c’est une conversation qu’il faut avoir. Toutefois, il faut procéder avec prudence, patience et précaution.

[Traduction]

    Monsieur le Président, pendant la législature précédente, c’est moi qui étais le porte-parole du NPD dans le comité de l’aide médicale à mourir. Je suis en faveur de l’aide médicale à mourir, mais je dois dire que c’est la question la plus difficile que j’ai jamais eu à examiner dans cette Chambre, et, comme l’a dit la députée de Saanich—Gulf Islands, c’est sans doute aussi le cas de tous ceux qui participent ici à ce débat. Pour cette raison, je suis d’accord avec le ministre pour dire que nous devons faire preuve de circonspection avant d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir.
     Aujourd’hui, j’aurais préféré parler de l’exclusion des troubles mentaux lorsqu’ils sont le seul problème de santé sous-jacent, mais le Parlement a déjà disposé de cette question avec le projet de loi d’initiative parlementaire du député d’Abbotsford, le projet de loi C-314, et je ne peux donc pas le faire. Nous sommes aujourd’hui dans une position très embarrassante puisque le Sénat a ajouté une disposition à la mesure législative initiale sur l’aide médicale à mourir, ce que je trouve tout à fait malavisé.
     Pour autant, nous n’avons pas le choix, et nous sommes, je crois, obligés d’appuyer cette motion de clôture afin d’empêcher la disposition d’entrer en vigueur, puisque nous savons pertinemment que nous ne sommes pas prêts et que certains d’entre nous sont moralement très réticents face à un élargissement éventuel de la portée de la loi.
(1030)
    Monsieur le Président, je tiens à remercier le député d'Esquimalt—Saanich—Sooke de contribuer ainsi aux débats aujourd'hui et tous les jours, en particulier au comité de la justice et au comité mixte conjoint. Comme lui, j’estime qu'il s'agit probablement de la question la plus difficile et la plus personnelle que chacun d'entre nous ait traitée, surtout dans le cas des députés élus en 2015, qui débattent de cette question depuis huit ans. Puisque ce qui est en jeu est si important, puisque les conséquences sont forcément permanentes, il est essentiel de bien faire les choses et de procéder avec prudence.
     Certains de ces éléments sont décrits dans l’énoncé concernant la Charte que nous avons présenté à la Chambre. Il y est mentionné qu’il est tout particulièrement difficile de juger de la capacité d’une personne de prendre cette décision parce que les symptômes de son état ou ses expériences de vie peuvent influer sur sa capacité à comprendre et à évaluer la décision qu'elle s’apprête à prendre. En outre, le désespoir et le désir de mourir sont des symptômes courants de certaines maladies mentales; il peut donc être difficile, même pour un praticien expérimenté, de déterminer si le désir de mourir de quelqu’un est pleinement assumé et réfléchi ou s’il s'agit plutôt d'un symptôme de sa maladie.
    L'évolution d'une maladie mentale est aussi beaucoup moins prévisible que celle d'une maladie physique. Enfin, et c'est important, nous ne disposons pas de données probantes sur la manière dont la pratique se déroulerait dans ce pays. Il est donc de la toute première importance d’obtenir ces données probantes, d’élaborer un programme de mise en œuvre de la mesure et de veiller à la formation connexe des personnes appelées à évaluer l’état des demandeurs et de celles qui devraient fournir le service.
     Pour ces raisons et bien d'autres encore, nous estimons qu’il faudra procéder de manière responsable et prudente au cours des trois années que durera le projet, et convoquer également à nouveau le comité mixte où le député a siégé afin qu'il puisse évaluer l'état de préparation du réseau dans deux ans environ, avant que le délai de trois ans ne ramène le sujet sur le devant de la scène.
    Monsieur le Président, on dit que rien ne révèle mieux l'âme d’une nation que la façon dont elle traite ses citoyens les plus vulnérables. Selon moi, il n’existe aucune obligation plus noble pour la Chambre, siège des représentants du peuple, que d'avoir cette discussion. La question ne doit pas être débattue à la sauvette. Ce débat ne doit pas être bâillonné ni se dérouler de manière expéditive. Nous devrions tous prendre le temps qu’il faut pour bien faire les choses, car il s’agit littéralement d’une question de vie et de mort. On ne saurait trop insister sur la nature délicate de cette question. On ne saurait trop insister non plus sur les répercussions que ce projet de loi aura sur les familles qui sont touchées et qui le seront.
     Je demande au ministre de revoir la direction qu’il a prise dans ce dossier et d’inviter les Canadiens à faire entendre leurs voix, afin que leurs préoccupations et leurs souhaits au sujet des mesures de sauvegarde adéquates soient pleinement exprimés à la Chambre dans le cadre de ce débat qui devrait durer aussi longtemps qu’il le faudra pour que nous fassions bien les choses. Le ministre peut-il nous dire ce qu’il en pense?
    Monsieur le Président, je remercie le député d’en face, mais je crois que ses commentaires font écho à ceux du député de Medicine Hat—Cardston—Warner.
     Je tiens à dire clairement aux Canadiens que si nous ne procédons pas rapidement à la Chambre et au Sénat, la loi sera modifiée le 17 mars afin de permettre aux personnes dont la maladie mentale est le seul problème de santé sous-jacent de recourir à l’aide médicale à mourir.
     Si le député de Tobique—Mactaquac se soucie vraiment des mesures de soutien offertes aux personnes atteintes de maladie mentale, et je pense que c’est le cas, il devrait collaborer avec nous pour faire adopter ce projet de loi afin d’éviter que ce cas de figure ne devienne réalité. Sa question s’appuie sur une fausse prémisse.
     En tant que gouvernement responsable, nous voulons agir avec célérité après avoir entendu la recommandation du comité mixte de députés et de sénateurs de faire une pause dans ce dossier. Il s’agirait seulement d’une pause. Nous avons présenté le projet de loi rapidement et nous voulons qu’il soit adopté rapidement.
     Comme l’a dit la députée de Saanich—Gulf Islands, dans ce contexte, elle est elle-même prête à faire une exception à son approche raisonnée concernant la clôture afin que nous puissions adopter le projet de loi et protéger les Canadiens. En tant que ministre de la Justice, c’est mon travail de faire cela, et personne ne me dissuadera de m’acquitter de cette tâche.
(1035)

[Français]

    Monsieur le Président, le ministre n'a pas répondu à un aspect de ma question.
    Pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures?
    Le ministre avait un an pour appliquer la recommandation du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir à propos des demandes anticipées. Un sondage Ipsos réalisé auprès de 3 500 personnes montre un appui de 85 % partout au Canada. S'il ne sait pas cela, c'est qu'il ne se tient pas au courant de son dossier.
    Quant à la question du report, le ministre a appliqué à la lettre la recommandation. Les trois ans sont de trop. Il le sait. Cependant, il aurait pu présenter une autre dimension au projet de loi C‑62. Il avait un an pour le faire. Va-t-il déposer un projet de loi sur les demandes anticipées, oui ou non?
    La loi issue du projet de loi C‑14 est une mauvaise loi.
    Le ministre dit qu'il a travaillé avec précaution. Des gens ont été obligés de faire une grève de la faim pour se rapprocher du critère de mort naturelle raisonnablement prévisible. Est-ce que c'est cela, protéger les personnes vulnérables?
    Monsieur le Président, ce que je peux ajouter à la conversation que je viens d'avoir avec mon collègue d'en face, c'est qu'on a créé des comités d'experts pour étudier plusieurs aspects de l'élargissement de l'aide médicale à mourir. Des experts ont mené une étude sur les demandes anticipées. Leur conclusion, c'est qu'il s'agit d'une question extrêmement complexe lorsqu'on parle au présent de l'expression d'une volonté de recourir à l'aide médicale à mourir, et que s'ajoute à cela le fait qu'une personne peut présenter une demande 30 ans ou 40 ans d'avance. Dans le contexte, sa situation, sa condition et ses volontés peuvent changer.
    Cela dit, le Québec a déjà abordé le sujet et un projet de loi a été présenté dans cette province. Nous sommes tout à fait au courant de cela et nous sommes en train d'entamer une discussion avec le Québec dans ce contexte. Les discussions sont à suivre.
    Nous avons un Code criminel qui s'applique à tout le pays. Cela veut dire qu'il faut traiter cette question de la même façon que nous avons traité les autres aspects, c'est-à-dire d'une façon nationale. C'est ce que nous avons fait lorsque nous avons mené des consultations de façon prudente tout en observant les précautions nécessaires.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis très préoccupé par les propos que viennent de tenir les conservateurs, c'est-à-dire que le débat devrait continuer aussi longtemps qu’ils le souhaitent. Il pourrait durer des mois. Notre date d’échéance est le 17 mars. Il nous reste neuf jours de séance, y compris aujourd’hui, avant cette date.
     Je voulais m’en assurer parce que certains de mes collègues conservateurs ont dit craindre que le seul problème de santé sous-jacent soit un trouble mental. Ils ne veulent pas d'une telle chose. Les provinces et les territoires sont absolument d’accord. Dix provinces et territoires ont écrit pour dire que leur système de santé n’était tout simplement pas prêt à mettre en œuvre les mesures nécessaires. Selon le ministre, que se passerait-il si nous manquions cette échéance et si nous devions attendre plusieurs mois? Quelle confusion en résulterait? Dans quelle situation nous retrouverions-nous, au Canada, si nous suivions la volonté des conservateurs de se contenter de discuter pendant des mois?
    Monsieur le Président, je remercie le député d’en face pour sa deuxième intervention ce matin, car elle est très pertinente et va droit au but. J’exhorte mes collègues conservateurs à reconsidérer leur position présumée à l’égard du projet de loi et de la nécessité de l’adopter de manière efficace, dès que possible.
     Pour répondre franchement à la question, et pour que les choses soient on ne peut plus claires, si nous n’adoptons pas le projet de loi d’ici le 17 mars, il serait possible, dans ce pays, qu’une personne dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale se prévale de l’aide médicale à mourir. Ce serait le cas dans la circonscription de Medicine Hat—Cardston—Warner, en Alberta, et au Nouveau-Brunswick, que représente entre autres le député de Tobique-Mactaquac. Tant le ministre de la Santé du Nouveau-Brunswick et que celle de l’Alberta nous ont dit sans équivoque que leur système de soins de santé, leurs évaluateurs et leurs fournisseurs de services d’aide médicale à mourir n’étaient pas prêts.
     Je ne veux pas d’une situation donnant lieu à un tel contexte en matière de droit criminel canadien. Nous avons le pouvoir d’empêcher cela en votant en faveur du projet de loi.
(1040)

[Français]

    Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens à remercier le ministre et à le féliciter pour la qualité de son français. Je l'ai connu à son arrivée en 2015 et je l'ai vu faire des progrès étape par étape. Je tiens à le féliciter sincèrement pour la qualité de son français.
    Voilà où s'arrêtent mes félicitations. Ce n'est jamais une victoire lorsqu'on présente une motion d'attribution de temps dans le cadre d'un débat aussi sensible que celui de l'aide médicale à mourir. C'est un sujet qui n'appelle aucune partisanerie parce qu'il n'y a pas de bonne ou de mauvaise position. Il n'y a que les positions avec lesquelles nous sommes à l'aise comme législateurs. Cela doit toujours se faire dans le respect de l'opinion contraire. Parmi nos amis, les membres de notre famille et nos proches, des gens peuvent penser exactement le contraire, et ils ont raison. Voilà ce qu'est un débat non partisan. Voilà ce qu'est un débat qui repose sur la qualité de vie des individus.
    Depuis un an, comme l'a si bien illustré mon collègue de Montcalm, le ministre aurait pu agir et il ne l'a pas fait. On comprend que le premier ministre a décidé de changer de ministre de la Justice. C'est son droit, c'est son privilège. On comprend aussi que le prédécesseur de l'actuel ministre de la Justice avait une approche différente.
    Or, relativement à un enjeu aussi délicat, pourquoi agir si rapidement alors qu'il faut faire place à toutes les opinions possibles? Il ne faut surtout pas faire de ce sujet qui n'appelle aucune partisanerie un enclos partisan.
    Monsieur le Président, j'apprécie les commentaires du député de Louis‑Saint‑Laurent.
    Je veux souligner deux choses.
    Tout d'abord, mon collègue a tout à fait raison lorsqu'il dit qu'il faut éviter la partisanerie lorsqu'on traite d'un sujet qui est si délicat et où les conséquences sont si graves pour les Canadiens.
     Ce que je peux ajouter, c'est que lui et ses collègues ont été membres du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir la première et la deuxième fois. Nous avons donc déjà entendu à plusieurs reprises l'expression des sentiments des conservateurs. Nous avons bien réfléchi sur ces commentaires et, effectivement, nous avons présenté un projet de loi qui reflète leur volonté en tant que caucus.
    Je crois qu'il faut mettre de l'avant cette volonté afin de promouvoir l'adoption de ce projet de loi aujourd'hui, à la Chambre.

[Traduction]

    Je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ la motion dont la Chambre est saisie.

[Français]

    Le vote porte sur la motion.

[Traduction]

    Si un député participant en personne désire que la motion soit adoptée ou adoptée avec dissidence ou si un député d'un parti reconnu participant en personne désire demander un vote par appel nominal, je l'invite à se lever et à l'indiquer à la présidence.
    Monsieur le Président, je demande un vote par appel nominal.
    Convoquez les députés.
(1125)
    (La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)

(Vote no 637)

POUR

Députés

Aldag
Ali
Anand
Anandasangaree
Angus
Arseneault
Arya
Ashton
Atwin
Bachrach
Badawey
Bains
Baker
Barron
Beech
Bibeau
Bittle
Blaikie
Blaney
Blois
Boissonnault
Boulerice
Bradford
Brière
Cannings
Carr
Casey
Chagger
Chahal
Champagne
Chatel
Chen
Chiang
Collins (Victoria)
Cormier
Coteau
Dabrusin
Damoff
Davies
Desjarlais
Dhaliwal
Dhillon
Diab
Drouin
Dubourg
Duclos
Duguid
Dzerowicz
Ehsassi
El-Khoury
Erskine-Smith
Fillmore
Fisher
Fonseca
Fortier
Fragiskatos
Fraser
Freeland
Fry
Gaheer
Gainey
Garrison
Gazan
Gerretsen
Gould
Green
Guilbeault
Hajdu
Hanley
Hardie
Hepfner
Holland
Housefather
Hughes
Hussen
Hutchings
Iacono
Idlout
Ien
Jaczek
Johns
Jowhari
Julian
Kayabaga
Kelloway
Khalid
Khera
Koutrakis
Kusmierczyk
Kwan
Lalonde
Lambropoulos
Lamoureux
Lapointe
Lattanzio
Lauzon
LeBlanc
Lebouthillier
Long
Longfield
Louis (Kitchener—Conestoga)
MacAulay (Cardigan)
MacDonald (Malpeque)
MacGregor
MacKinnon (Gatineau)
Maloney
Martinez Ferrada
Masse
Mathyssen
May (Cambridge)
May (Saanich—Gulf Islands)
McDonald (Avalon)
McGuinty
McKay
McKinnon (Coquitlam—Port Coquitlam)
McPherson
Mendès
Miao
Miller
Morrice
Morrissey
Murray
Naqvi
Ng
Noormohamed
O'Connell
Oliphant
O'Regan
Petitpas Taylor
Powlowski
Qualtrough
Robillard
Rodriguez
Rogers
Romanado
Rota
Sahota
Sajjan
Saks
Samson
Sarai
Scarpaleggia
Schiefke
Serré
Sgro
Shanahan
Sheehan
Sidhu (Brampton East)
Sidhu (Brampton South)
Singh
Sorbara
Sousa
St-Onge
Sudds
Tassi
Taylor Roy
Thompson
Trudeau
Turnbull
Valdez
Van Bynen
van Koeverden
Vandal
Vandenbeld
Virani
Weiler
Yip
Zahid
Zarrillo
Zuberi

Total: -- 170


CONTRE

Députés

Aboultaif
Aitchison
Albas
Allison
Arnold
Baldinelli
Barlow
Barrett
Barsalou-Duval
Beaulieu
Bergeron
Berthold
Bérubé
Bezan
Blanchette-Joncas
Block
Bragdon
Brassard
Brock
Brunelle-Duceppe
Calkins
Caputo
Carrie
Chabot
Chambers
Champoux
Chong
Cooper
Dalton
Dancho
Davidson
DeBellefeuille
Deltell
Desbiens
Desilets
Doherty
Dowdall
Dreeshen
Duncan (Stormont—Dundas—South Glengarry)
Ellis
Epp
Falk (Battlefords—Lloydminster)
Falk (Provencher)
Fast
Ferreri
Findlay
Fortin
Gallant
Garon
Gaudreau
Généreux
Genuis
Gill
Gladu
Goodridge
Gourde
Gray
Hallan
Hoback
Jeneroux
Kelly
Khanna
Kitchen
Kmiec
Kram
Kramp-Neuman
Kurek
Kusie
Lantsman
Larouche
Lawrence
Lehoux
Lemire
Leslie
Lewis (Essex)
Lewis (Haldimand—Norfolk)
Lloyd
Lobb
Maguire
Majumdar
Martel
Mazier
McCauley (Edmonton West)
McLean
Melillo
Michaud
Moore
Morantz
Morrison
Motz
Muys
Nater
Normandin
Patzer
Paul-Hus
Pauzé
Perkins
Perron
Plamondon
Poilievre
Rayes
Redekopp
Reid
Rempel Garner
Richards
Roberts
Rood
Ruff
Savard-Tremblay
Scheer
Schmale
Seeback
Shields
Shipley
Simard
Sinclair-Desgagné
Small
Soroka
Steinley
Ste-Marie
Stewart
Strahl
Stubbs
Thériault
Therrien
Thomas
Tochor
Tolmie
Trudel
Uppal
Van Popta
Vecchio
Vidal
Vien
Viersen
Vignola
Villemure
Vis
Vuong
Wagantall
Warkentin
Waugh
Webber
Williams
Williamson
Zimmer

Total: -- 146


PAIRÉS

Aucun

    Je déclare la motion adoptée.

L'affaire du gouvernement no 34 — Les délibérations sur le projet de loi C‑62

[Ordres émanant du gouvernement]

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 février, de la motion, ainsi que de l'amendement.
    Monsieur le Président, je suis honoré de prendre la parole aujourd'hui, sur les terres non cédées des Tseshaht et des Hupacasathm, dans l'île de Vancouver, dans le territoire des Nuu-chah-nulth, au sujet du projet de loi C‑62, qui vise à prolonger de trois ans, soit jusqu'au 17 mars 2027, l'exclusion temporaire de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant uniquement d'une maladie mentale.
    Évidemment, si le Parlement n'intervient pas, le régime s'étendra à ces personnes dès le 17 mars 2024, c'est-à-dire dans un mois à peine. Les néo-démocrates approuvent la conclusion majoritaire du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir selon laquelle le Canada n'est pas adéquatement préparé pour assurer la prestation de l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est un trouble mental.
     Le projet de loi accorderait plus de temps pour mettre en œuvre les mesures de sauvegarde nécessaires et répondre aux préoccupations en matière de capacité qui devraient découler de l’élargissement de l’aide médicale à mourir pour les personnes dont le seul problème médical invoqué est une maladie mentale. Cela donnerait aux médecins plus de temps pour se familiariser avec la formation et les mesures de soutien disponibles, tout en donnant à la population le temps de mieux connaître les solides mesures de protection et processus qui sont en place. Je sais que c’est une question très délicate et très personnelle pour beaucoup de gens au pays. Dans ma circonscription, Courtenay—Alberni, en particulier, de nombreuses personnes m’en ont parlé.
     Nous devons également nous assurer d’avoir la compréhension et la compassion nécessaires pour respecter le droit d’une personne à la dignité lorsqu’elle souffre profondément, de façon prolongée et continue. J’aimerais parler de cet aspect. La souffrance attribuable à la maladie mentale est extrêmement grave, et elle est aussi réelle que celle qui est associée à une maladie physique. Dans notre système de soins de santé, il est clair que la santé mentale et la santé physique ne sont pas sur un pied d'égalité, et j’en parlerai également.
     Nous devons également reconnaître et protéger les personnes les plus vulnérables lorsque nous prenons des décisions sur une mesure législative aussi importante que l’élargissement de l’aide médicale à mourir. Ce délai supplémentaire est nécessaire dès maintenant pour que notre système de soins de santé puisse fournir en toute sécurité l’aide médicale à mourir à ceux dont le seul problème médical invoqué est une maladie mentale.
     Nous savons comment nous en sommes arrivés là. Le gouvernement libéral a fait volte-face et pris une décision mal avisée quand il a accepté l’amendement du Sénat au projet de loi C‑7 pendant la 43e législature. C’est ce qui nous a amenés ici. Le gouvernement a modifié la loi avant qu’un examen exhaustif n’ait été effectué, et nous sommes en mode rattrapage depuis ce moment. Je vais parler du travail important qui doit être fait, et je veux que nous fassions preuve de réflexion dans notre approche visant à élargir l’aide médicale à mourir.
     Au NPD, nous prenons très au sérieux les préoccupations et les commentaires des gens. Nous sommes déterminés à trouver la meilleure solution possible pour les Canadiens en ce qui concerne la politique d’aide médicale à mourir afin que celle-ci permette d’atteindre l’objectif qui a toujours été visé. L’une des plus grandes préoccupations des néo-démocrates à l’égard de l’élargissement de l’aide médicale à mourir concerne les obstacles auxquels de nombreux Canadiens font face lorsqu’ils réclament des soins de santé mentale. À cause des libéraux, et des conservateurs avant eux, le sous-financement chronique du système de santé devient de plus en plus évident. C’est le cas maintenant plus que jamais, car on constate la disparité entre la santé mentale et la santé physique et la façon dont les gens sont soignés.
     Le premier ministre a promis de mettre en œuvre un nouveau transfert en santé mentale de 4,5 milliards de dollars sur cinq ans, mais il ne l’a toujours pas fait. Même avec les accords bilatéraux, les libéraux sont loin du compte, et ce ne serait pas encore suffisant. Tout le monde devrait avoir accès à des services de soutien en santé mentale lorsqu’il en a besoin, mais sous le gouvernement libéral, et sous les conservateurs avant lui, ce n'est pas ce qui se passe. C’est la même chose dans toutes les provinces et tous les territoires.
(1130)
     Les néo-démocrates soutiennent sans réserve le report de l'élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est un trouble mental, mais le gouvernement libéral doit mener des consultations adéquates d’ici la date cible, faute de quoi il faudrait reporter encore cette mesure. Le gouvernement doit s’assurer que les personnes seront protégées tout en respectant leur choix personnel.
     Les libéraux ne peuvent pas non plus se contenter de reporter l’élargissement. Ils doivent financer des mesures de soutien et des options de traitement adéquates pour les personnes souffrant de maladie mentale. Les députés m’ont entendu dire à maintes reprises qu'il nous faut une voie à suivre, une feuille de route, pour parvenir à mettre la santé mentale et la santé physique sur un pied d'égalité et offrir aux gens l’aide dont ils ont besoin quand ils en ont besoin.
     Sept provinces et les trois territoires ont déclaré qu’ils n’étaient pas prêts et ont signé une lettre commune dans ce sens, dont ma province, la Colombie‑Britannique. Cette lettre a été signée par les ministres de la Santé de ces provinces et territoires. Ils demandent une pause indéfinie de l’élargissement aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est un trouble mental. C’est ce que ces ministres ont précisé.
     Au NPD, nous voulons que le régime d’aide médicale à mourir soit doté de mesures de sauvegarde qui protègent les personnes vulnérables tout en permettant l’autonomie corporelle et les choix de fin de vie. Nous devons nous assurer que les gens ne demandent pas l'aide médicale à mourir parce qu’ils n’ont pas accès à des traitements, à des mesures de soutien et à des services. Cela doit être une règle absolue. Les libéraux doivent veiller à ce que tout le monde ait accès à des services de santé mentale. Cependant, après avoir maintenu pendant neuf ans les coupes budgétaires faites par les conservateurs dans le secteur de la santé, nous en sommes là aujourd’hui dans tout le pays. L’aide est hors de portée pour bien des gens. Il faut que cela change avant qu'on puisse élargir l’aide médicale à mourir.
     On ne fait rien pour résoudre les crises du logement, des drogues toxiques et de la santé mentale. Je vois qu’il ne me reste pas beaucoup de temps, mais je veux m’assurer de souligner que le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir a entendu de nombreux témoins qui ont mis le Comité en garde contre l’élargissement de l’aide médicale à mourir à des personnes dont le seul problème médical est une maladie mentale. J’aimerais partager les propos de certains de ces experts.
     Le professeur Brian Mishara, qui travaille au Centre de recherche et d’intervention sur le suicide, enjeux éthiques et pratiques de fin de vie à l’Université du Québec à Montréal, a déclaré: « Dans son rapport, le Groupe d'experts sur l'aide médicale à mourir et la maladie mentale indique qu'il n'existe pas de critères pour savoir si une maladie mentale est irrémédiable », et qu’il n’y a absolument aucune « preuve que quelqu'un peut déterminer de manière fiable que la situation d'une personne atteinte d'une maladie mentale ne s'améliorera pas. ». Il nous a mis en garde en disant: « quiconque essaierait de déterminer quelles personnes devraient avoir accès à l'aide médicale à mourir ferait un grand nombre d'erreurs, et des personnes qui verraient une amélioration de leurs symptômes et ne souhaiteraient plus mourir mourraient en ayant recours à l'aide médicale à mourir ».
     Nous avons entendu de nombreux experts. Le Centre de toxicomanie et de santé mentale a exprimé des préoccupations similaires.
     Comme je vois qu’il ne me reste que quelques minutes, j’aimerais parler un peu du système et du manque d’accès. Nous parlons d’une crise qui sévit dans tout le pays, selon un sondage effectué il y a tout juste un an. La Commission de la santé mentale du Canada et le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances ont publié un rapport faisant état de résultats postpandémiques. Selon ce rapport, 35 % des personnes interrogées ont fait état de problèmes de santé mentale modérés ou graves.
     Ce constat est alarmant. Tous les parlementaires devraient également s’inquiéter du fait que moins d’une personne sur trois souffrant de problèmes de santé mentale accède à des services. Dans ce rapport, on précise que les principaux obstacles à l’accès aux services sont les contraintes financières et le fait que l’aide n’est pas facilement disponible. Nous savons que nous traversons actuellement une crise financière et je suis sûr que ces chiffres n’ont fait qu’augmenter. Selon le rapport, les revenus et le chômage accompagné de problèmes de santé mentale font partie des principaux facteurs de stress.
     Nous devons créer un système de parité entre la santé mentale et la santé physique. Le gouvernement n’a pas présenté de plan, de feuille de route, sur la manière de parvenir à la parité entre la santé physique et la santé mentale. J’espère qu’en plus des accords bilatéraux, ce budget débloquera des fonds directement pour les organismes communautaires dans le cadre des efforts de rétablissement d’urgence post-COVID, parce que nous savons qu’après la pandémie, certaines personnes éprouvent des difficultés financières, mais la plus grande préoccupation à l’heure actuelle et la plus grande épidémie post-COVID, c’est la santé mentale. J’espère que le gouvernement l’entend.
     Je vois que j’ai épuisé mon temps de parole. J’ai beaucoup à dire sur ce sujet. C’est avec plaisir que je répondrai aux questions de mes collègues.
(1135)
    Monsieur le Président, le débat sur cette motion m'amène à attirer l'attention sur l'affaire d'une Albertaine, identifiée par les initiales E. F., qui remonte à 2016. Les médias ont couvert cette histoire qui mérite d'être lue. J'en parle aujourd'hui, car E. F. s'est prévalue de l'aide médicale à mourir. Elle ne souffrait justement que d'une maladie mentale, mais c'était épouvantable.
    Si la prochaine évolution de l'aide médicale à mourir est mise en suspens, le député voudrait-il envisager un mécanisme qui permettrait à une personne comme E. F. d'être soulagée d'une vie qui est tout simplement atroce et qui ne vaut pas la peine d'être vécue?
    Monsieur le Président, d’abord et avant tout, si E. F. souffre, nous tenons à ce que le régime de soins en place lui permette d'accéder à des mesures de soutien. Cependant, il n'y a nulle part au pays où un tel régime est en place, ni dans les 10 provinces ni dans les 3 territoires. Nous le savons. Le Canada est loin derrière ses partenaires de l’OCDE. Les provinces et les territoires consacrent entre 5 et 7 % de leur budget santé à la santé mentale, contre 12 et 14 % respectivement pour la France et la Grande‑Bretagne.
     En tant que néo-démocrates, nous voulons que le régime d’aide médicale à mourir comporte des mesures de sauvegarde pour protéger les personnes les plus vulnérables. Nous voulons que l’aide médicale à mourir soit offerte de manière sûre et appropriée, dans le respect de l’autonomie corporelle et du choix de fin de vie. Il faut mettre en place un régime qui jouit de l'appui des experts, qui est réellement adapté à l’aide médicale à mourir, qui prévoit la formation nécessaire et qui tient compte de toutes les recommandations du comité sur l'aide médicale à mourir. On ne l'a pas fait. Je sais que le gouvernement y travaille, mais nous en sommes très loin.
    Monsieur le Président, la position du gouvernement sur l’euthanasie n'a aucun rapport avec la réalité et les réserves de nombreux Canadiens. Les libéraux veulent constamment parler de l’expansion du régime. Cependant, des concitoyens de ma circonscription et d'ailleurs au pays me disent craindre que le régime actuel ouvre la porte aux abus. On me signale que des personnes handicapées ont subi des pressions en se faisant traiter d'égoïstes parce qu’elles ne veulent pas s’engager sur cette voie et qu'en l’absence de soutien adéquat, de soutien qui va dans le sens de la vie et de la dignité, il y a des gens qui risquent de baisser les bras. Au lieu d’être soutenus dans leur quête de sens et dans leur raison d'être, ils se font dire: « Pourquoi pas? Vas-y: lâche prise. » Voilà la réalité au Canada.
     Lorsque je parle à des législateurs étrangers, y compris des représentants de la gauche dite progressiste, ils sont horrifiés par ce qui se passe au Canada. Le Canada fait figure de contre-exemple. Il illustre ce qui peut mal tourner lorsque l’on s’engage sur cette voie.
     Au lieu de laisser le gouvernement poursuivre sa quête incessante de la prochaine expansion, pourquoi ne pas débattre davantage des moyens de contrecarrer les abus actuels du régime? Pourquoi ne pas prendre le temps d'examiner comment nous en sommes arrivés là ce que nous pouvons faire pour résoudre les graves problèmes qui ressortent du régime actuel?
(1140)
    Monsieur le Président, le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir doit tenir de nombreuses discussions pour étudier les dispositions législatives actuelles.
     Cependant, le temps presse actuellement, et je vais en parler. Il en est ainsi à cause de la décision malavisée du gouvernement libéral d'accepter l'amendement du Sénat au projet de loi C‑7, au cours de la 43e législature. C'est ce qui nous a amenés ici aujourd'hui. C'est pour cette raison que nous devons adopter un projet de loi en quatrième vitesse: parce que les personnes dont la seule condition médicale sous-jacente est un trouble mental n’ont pas accès à l’aide dont elles ont besoin.
     Les libéraux ont modifié la loi sans examen approfondi quel qu'il soit, et nous essayons depuis de faire du rattrapage. Les libéraux ont décidé de soutenir un amendement que le Sénat, la Chambre non élue, avait renvoyé à la Chambre des communes. C'est pour cette raison que nous avons voté contre cet amendement. Nous estimions qu’il fallait mettre en place les soutiens nécessaires pour permettre aux gens de prendre une décision en tout état de cause.
     Nous cherchons à amener la parité entre les régimes de soins de santé mentale et de santé physique, en étant à l'écoute des experts et en procédant à une évaluation complète. C'est incontournable. Toutefois, j'accueille favorablement les commentaires de mon collègue lorsqu'il dit qu'il faut élargir le débat sur les dispositions législatives existantes.

[Français]

    Monsieur le Président, je voudrais savoir si mon collègue considère qu'il sera un jour possible de soulager la souffrance des gens aux prises avec un trouble mental irrémédiable.
    Je voudrais aussi savoir s'il est d'accord avec moi qu'il aurait été plus avisé pour le gouvernement d'appliquer la recommandation phare du Comité mixte en ce qui a trait aux demandes anticipées et de profiter du dépôt de ce projet de loi pour ajouter ce volet.

[Traduction]

    Monsieur le Président, mon collègue fait un travail extraordinaire au comité de la santé et au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir. Je lui en suis très reconnaissant.
     J'espère qu'un jour nous pourrons permettre aux gens dont la seule affection sous-jacente est un trouble mental de prendre une décision. Cependant, nous sommes très loin de la parité, étant donné que les gouvernements fédéraux libéraux et conservateurs successifs n'ont pas fait de la santé mentale une priorité. Nous sommes également loin derrière d'autres pays, notamment le Royaume‑Uni et la France, pour la parité entre nos régimes de soins de santé mentale et de santé physique, et il faut y remédier.
     En ce qui concerne l'autre question du député, j'y suis tout à fait favorable. Le comité mixte spécial doit axer ses prochains travaux sur les directives préalables.
    Monsieur le Président, c’est par sens du devoir que je me suis joint à la dernière mouture du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir, qui a été expressément chargé d’étudier la question de savoir si le système de santé est prêt à étendre l’aide médicale à mourir aux cas de maladie mentale grave. Il s’agit d’une question d'une grande importance pour la société canadienne. Un grand nombre d’électeurs préoccupés m'ont écrit pour m'en parler.
     Au début, j’ai humblement remis en question mes compétences pour siéger au comité. Je ne suis pas psychiatre. Je ne suis pas médecin. Je n’ai pas d’expertise ni d’expérience dans ce domaine. Cependant, dans une démocratie, tout n’est pas laissé aux experts. Le peuple, par l’intermédiaire de ses représentants élus, fixe des paramètres juridiques dans des domaines d’intérêt public en adoptant des mesures législatives et réglementaires. C’est d’ailleurs ce qui se passe depuis 2016 avec la question de l’aide médicale à mourir.
     Cela dit, il est important d’écouter et de consulter attentivement les experts, car il est important de tenir compte des connaissances et des expériences faisant autorité. C’est d'ailleurs tout le contraire de ce que prône le populisme nouveau genre.
     Je suis d’accord avec le comité lorsqu'il recommande de reporter indéfiniment l'accès à l’aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème médical invoqué. L'enjeu central ici est la question du caractère irrémédiable de la maladie, c’est-à-dire la question de savoir s’il est possible de guérir une personne atteinte d’une maladie mentale grave afin d'alléger ses terribles souffrances, qui s'apparentent d'ailleurs à des souffrances physiques.
     Selon la loi, pour qu’une personne soit considérée comme admissible à l’aide médicale à mourir, la maladie doit être à la fois grave et irrémédiable. Le problème est qu'il est plus difficile d'établir le caractère irrémédiable d'un trouble psychiatrique que celui d'un trouble somatique, c'est-à-dire un trouble de santé physique. Dans le cas des troubles psychiatriques, il est infiniment plus difficile d'établir un pronostic précis et exact.
    Compte tenu de la difficulté d’établir un pronostic raisonnablement certain à propos d'une maladie mentale, le caractère irrémédiable de la maladie devra nécessairement être établi sur la base d'un examen rétrospectif, c’est-à-dire une évaluation de l’étendue des traitements auxquels le patient a déjà participé et de l'absence d'autres options de traitement ayant le potentiel d'alléger ses souffrances. Le problème est que les évaluateurs de l’aide médicale à mourir n’auront probablement pas été impliqués dans les traitements passés, ce qui rend difficile l’évaluation de la qualité de ces traitements. Lorsqu’il s’agit d’établir le caractère irrémédiable d’une maladie mentale, il a été démontré que le taux d'exactitude était de moins de 50 %, c’est-à-dire qu'il vaudrait mieux tirer à pile ou face.
     Pour citer le Dr Sonu Gaind, l’un des experts ayant comparu devant le comité, « les données produites un peu partout dans le monde démontrent que le caractère irrémédiable ne peut pas être prédit dans le cas des maladies mentales. Autrement dit, la première mesure de sauvegarde de l’[aide médicale à mourir] serait déjà court-circuitée selon les données qui révèlent que les prédictions sont erronées dans plus de la moitié des cas. »
     Il convient de souligner qu’aux termes de la loi sur l’aide médicale à mourir, une certitude clinique du caractère irrémédiable n’est pas réellement requise. Il est important ici de souligner que la définition du caractère irrémédiable diffère selon qu'on l'aborde d'un point de vue juridique ou clinique.
     En effet, dans la loi sur l’aide médicale à mourir, l’expression « grave et irrémédiable » n’a pas le même sens qu’en médecine. Elle est définie comme le caractère incurable d’une maladie, le fait de se trouver dans une situation médicale qui « se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses capacités » et qui « cause des souffrances physiques ou psychologiques » intolérables qui ne peuvent être apaisées « dans des conditions [que la personne] juge acceptables ».
     En droit, il n’est donc pas nécessaire d’établir le caractère irrémédiable avec un degré de certitude clinique. Le patient et l’évaluateur doivent plutôt parvenir à une compréhension commune fondée notamment sur une analyse de l’historique des traitements par l’évaluateur. Il y a une part de subjectivité, aussi bien du côté du patient que de l’évaluateur. Naturellement, les biais philosophiques, les valeurs et les principes éthiques de l’évaluateur auront aussi une certaine influence dans cet exercice subjectif.
     Comme le Dr Gaind l’a suggéré aux membres du comité: « Faites ces contorsions mentales avec vos électeurs. Dites-leur que leur proche atteint de maladie mentale a obtenu l’[aide médicale à mourir], non pas à la suite d’une évaluation clinique fondée sur la médecine ou la science, mais plutôt à la suite d’une décision éthique de l’évaluateur, et essayez ensuite de les convaincre que c’est tout à fait correct. »
     Pour déterminer l’admissibilité à l’aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème médical invoqué, il est important de pouvoir distinguer des idées suicidaires d’une demande réfléchie d’aide médicale à mourir. Il faut garder à l’esprit que les tentatives de suicide ne sont pas toujours des actes irréfléchis et impulsifs découlant d’un état de panique. Cela relève plutôt du stéréotype. Les psychiatres disent que certains suicides ne sont pas commis dans un moment de frénésie, mais qu'ils sont plutôt soigneusement planifiés à l’avance.
     Le Dr Tarek Rajji, médecin-chef du Comité médical consultatif au Centre de toxicomanie et de santé mentale, a déclaré au comité: « Il n'y a pas de moyen évident de cerner les idées suicidaires ou une intention suicidaire dans les demandes d'aide médicale à mourir. »
(1145)
    Je cite encore le Dr Gaind:
    Les données scientifiques démontrent l'impossibilité de distinguer entre les idéations suicidaires causées par la maladie mentale et les conditions qui conduisent à faire une demande d'AMM pour des motifs psychiatriques. Les caractéristiques en commun dans les deux situations laissent entendre qu'il n'y a peut-être aucune distinction à établir.
    Aux Pays‑Bas, l'aide médicale à mourir est conditionnelle à une évaluation faite par un médecin indépendant, et, dans les cas de souffrances psychiatriques, à une troisième évaluation par un psychiatre indépendant, préférablement un spécialiste du trouble qui affecte le patient.
    Le problème de la loi canadienne actuelle, c'est qu'elle ne contient aucune obligation qu'un des évaluateurs soit un psychiatre, même si les enjeux de psychiatrie sont extrêmement complexes. Souvent, les patients ont plus d'une maladie. On dit qu'entre 71 et 79 % des patients en psychiatrie qui ont reçu l'aide médicale à mourir aux Pays‑Bas souffraient de plus d'un trouble psychiatrique.
    Les êtres humains ne sont pas des atomes rationnels indépendants qui exercent leur autonomie avec une vision parfaitement claire et sans aucune influence. Nous ne sommes pas aussi libres que nous le croyons. Nous naissons et grandissons dans une famille et une communauté et nous sommes influencés par les possibilités qui nous sont offertes et par les contraintes qui nous sont imposées.
    Je me demande parfois si nous ne sommes pas en train de transformer l'autonomie personnelle en une sorte d'idéologie. Je dis « je me demande » parce que, en tant que libéral, je n'ai pas reçu le don de l'absolutisme que les idéologues ont reçu.
    Les demandes d'aide médicale à mourir peuvent être influencées, et même motivées, par des facteurs externes comme la pauvreté et l'isolement, c'est-à-dire par des facteurs psychosociaux. Selon le Dr Gaind, « les personnes aux prises avec une maladie mentale ont une incidence plus élevée de souffrance psychosociale ».
    Cela signifie que les évaluateurs des demandes d'aide médicale à mourir se tromperont plus de la moitié du temps lorsqu'ils prédiront l'irrémédiabilité, qu'ils croiront à tort qu'ils filtrent la tendance suicidaire et qu'au lieu de cela, ils permettront la mort de Canadiens suicidaires marginalisés dont la situation aurait pu s'améliorer.
    Archibald Kaiser, professeur à l'École de droit Schulich et au département de psychiatrie de la faculté de médecine de l'Université Dalhousie, a ajouté: « En 1991, la Cour suprême a conclu que les personnes atteintes de maladie mentale ont toujours été victimes de mauvais traitements, de négligence et de discrimination. »
    Le Dr Gaind a également souligné que la souffrance est cumulative, et que les épreuves de la vie alimentent malheureusement une grande partie de la souffrance des personnes atteintes de troubles mentaux, et que cette réalité est encore plus marquée chez les populations marginalisées.
     Il est en fait possible que la marginalisation fondée sur le sexe puisse influencer les demandes d'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est la seule condition médicale sous-jacente. Nous savons que dans les pays qui autorisent l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant uniquement de troubles mentaux graves, le ratio entre les femmes et les hommes qui demandent l'aide médicale à mourir est de deux pour un.
    Pour leur part, les représentants autochtones ont exprimé de sérieuses réserves quant à l'élargissement de l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant de troubles mentaux. Selon le professeur Kaiser:
     En février 2021 [...] de nombreux signataires autochtones distingués ont écrit au Parlement pour dire que la consultation [...] n'a pas été suffisante et qu'elle n'a pas tenu compte des disparités existantes en matière de santé [...] que rencontrent les Autochtones par rapport aux personnes non autochtones. Ils affirment que leur peuple est vulnérable à la discrimination et à la contrainte et devrait être protégé des conseils non sollicités.
    Nous savons que le racisme systémique existe dans le système de santé. Parlons-en à la famille de Joyce Echaquan. Quelle incidence aurait le racisme systémique sur le taux d'acceptation des demandes d'aide médicale à mourir présentées par des personnes autochtones ou racisées? La question est pertinente.
    Voici ce que la Dre Lisa Richardson, chef de file stratégique au Centre for Wise Practices in Indigenous Health du Women’s College Hospital, a déclaré à un comité sénatorial le 3 février 2021:
    Dans un environnement où il existe à la fois du racisme systémique et du racisme interpersonnel, je ne crois pas que les Autochtones seront en sécurité. Je ne crois pas que les préjugés et les partis pris contre les Autochtones seront sans effet sur la prise de décisions et sur les conseils relatifs à l’aide médicale à mourir pour les Autochtones, peu importe toute l’éducation qu’on leur offrira sur la question.
    Les communautés autochtones, dont bon nombre connaissent des taux de suicides élevés, en particulier chez les jeunes, pourraient craindre que l'aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème médical invoqué n'ait un effet de contagion sur la tendance suicidaire.
    Il y a aussi la question élémentaire de la capacité du système de santé du Canada de répondre à l'élargissement de l'aide médicale à mourir. En effet, ses ressources sont déjà utilisées au maximum.
    Selon Eleanor Gittens de la Société canadienne de psychologie, notre pays n'a pas encore établi la parité entre les soins physiques et mentaux disponibles. Je la cite: « Les soins et les traitements en santé mentale ne sont pas couverts par l'assurance-maladie et ne sont pas aisément accessibles. »
    Comme nous ne savons pas au juste combien de personnes demanderaient l'aide médicale à mourir en cas de trouble mental, nous ignorons s'il y a suffisamment d'évaluateurs qualifiés. Certains estiment que bien au-delà de 2 000 patients par année recevraient l'aide médicale à mourir en cas de trouble mental, et que le nombre de demandes d'admissibilité serait encore plus élevé. Je sais que ce chiffre est contesté.
(1150)
    Le fait que Santé Canada a publié une norme et un module de formation au sujet de l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué ne signifie pas que le système est prêt. Un édifice construit sur des fondations fragiles n'est pas prêt à être occupé, peu importe le niveau d'achèvement de sa structure. Il n'y a aucune mesure de sauvegarde pour empêcher que des facteurs psychosociaux comme la pauvreté, la précarité du logement ou la solitude, entre autres, mènent à une augmentation du nombre de demandes d'aide médicale à mourir chez les personnes atteintes de maladies mentales.
    Voici ce qu'a indiqué le Dr Rajji: « Le document sur les normes, celui préparé par le groupe d'experts, dit que ce ne sont pas des lignes directrices cliniques, et c'est ce qui manque pour assurer la qualité des soins. » En outre, le Dr Gaind a également affirmé ceci: « [C]'est une fiction juridique que l'admissibilité à l'AMM soit déterminée en fonction d'un jugement clinique objectif. En fait, je constate régulièrement que les valeurs des praticiens influencent l'interprétation des critères d'admissibilité à l'AMM et des protections. »
    Selon un article paru dans Impact Ethics, « les rares pays qui autorisent l'AMM dans les cas où la maladie mentale [est le seul problème médical invoqué] se sont dotés de mesures de sauvegarde que n'a pas le Canada, comme l'assurance que tous les soins possibles ont été prodigués et qu'il n'y a plus de solution de rechange raisonnable ou la futilité du traitement avant de déterminer si le patient est admissible à l'AMM. »
     Au Canada, un patient pourrait être admissible à l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème invoqué même s’il refuse un traitement. Il arrive souvent qu’un patient ayant des problèmes psychiatriques refuse un traitement supplémentaire en raison de la lassitude qu’il éprouve à l’égard des traitements. Alors que la fatigue thérapeutique a été étudiée dans le contexte du VIH et du diabète de type 1, dans le but d'élaborer des stratégies pour aider à la surmonter, la fatigue thérapeutique n’a pas encore fait l’objet d’une attention particulière dans le domaine de la psychiatrie. Une meilleure compréhension de la fatigue thérapeutique pourrait déboucher sur d’autres possibilités que l’aide médicale à mourir, comme des traitements palliatifs ou axés sur le rétablissement.
     Je respecte le Sénat. Je reconnais sa valeur. Les sénateurs apportent plus qu’un simple second examen objectif; ils apportent leur expertise dans des domaines essentiels à l’élaboration de bonnes politiques publiques, mais les sénateurs ne sont pas élus. Ils ne sont pas la voix du peuple. Le gouvernement n’a jamais eu l’intention d’étendre l’aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale.
     Le gouvernement était à court de pistes pour respecter le délai imposé par la cour dans l’arrêt Truchon afin de modifier la loi et de supprimer l'exigence d'une mort raisonnablement prévisible pour l’admissibilité à l’aide médicale à mourir. Il ne pouvait pas se permettre un jeu de ping-pong procédural avec le Sénat au sujet de son amendement de dernière minute visant à supprimer l’exclusion relative aux maladies mentales du projet de loi C‑7. Il a dû accepter l’amendement du Sénat pour que le projet de loi soit adopté.
     À mon avis, nous ne sommes pas prêts pour l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué. Nous ne pouvons pas déterminer l’irrémédiabilité avec un degré acceptable de certitude et d’objectivité. Nous ne pouvons pas faire la distinction entre une demande d’aide médicale à mourir pour cause de maladie mentale et des idées suicidaires. Nous ne sommes pas en mesure d’isoler les facteurs psychosociaux qui pourraient être à l’origine de la demande. Nous n’avons pas consulté comme il se doit les collectivités racisées pour tenir compte de leurs points de vue, de leurs préoccupations et de leurs craintes, notamment les communautés autochtones, et nous n’avons pas prévu de mesures de sauvegarde dans la loi.
     Nous n’exigeons pas la participation d’un psychiatre à l’évaluation ni qu’une personne dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale ait raisonnablement épuisé les traitements disponibles avant de faire une demande d'aide médicale à mourir. Les quelques autres pays qui autorisent l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué ont cette exigence.
     Nous n’avons pas étudié et compris la fatigue thérapeutique de manière à pouvoir élaborer des stratégies susceptibles de conduire un patient vers d’autres options thérapeutiques non létales et, enfin, nous avons permis à un organe non élu, le Sénat, de diriger ce dossier.
(1155)
    Monsieur le Président, j’ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue, qui part de la prémisse qu'on n'est pas prêt. Nous sommes pour un délai supplémentaire afin qu’un gouvernement conservateur puisse protéger les Canadiens pour toujours en veillant à ce que cet élargissement ne se produise jamais. Cependant, je ne comprends pas que le député lorsqu'il mentionne des problèmes évidents, et pas seulement des problèmes actuels ou à court terme, mais des problèmes structurels, qui découlent de l'idée de permettre l'aide médicale pour tuer des personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Je ne comprends pas que, selon lui, ces problèmes signifient simplement que nous ne sommes pas prêts.
     Il est tout à fait évident à mon avis que, après des années passées à essayer de faire entrer un chameau par le trou d’une aiguille et à dire que, d’une manière ou d’une autre, nous pouvons fournir de l'aide médicale pour tuer des personnes souffrant de troubles mentaux tout en n’augmentant pas d’autres types de risques et de problèmes, le gouvernement a essayé de comprendre comment faire cela pendant des années pour manifestement conclure que ce n’était pas quelque chose de souhaitable.
     Pourquoi ne pas simplement admettre que c’était une mauvaise idée dès le départ, plutôt que d’en parler en disant que nous ne sommes pas prêts, mais que nous le serons peut-être bientôt?
    Monsieur le Président, je n’ai pas de boule de cristal. Je n’ai pas le monopole de la vérité. Comme je l’ai dit dans mon discours, je n’ai pas le don de l'absolutisme. Je suis déchiré par cette question comme, je pense, n’importe quel membre de cette Chambre. Même si nous nous cachons derrière les certitudes que nous affichons en tant que partis politiques, nous nous interrogeons toujours et nous sommes toujours déchirés par cette question.
     Je ne sais pas si nous serons un jour prêts. Ce que j’ai essayé de faire dans mon discours, c’est de souligner certaines des choses que nous n’avons pas faites pour être prêts. Peut-être que nous ne serons jamais prêts. Je ne suis pas psychiatre. Je comprends que la souffrance psychique peut être aussi grave que la souffrance physique, et je compatis avec les gens, en particulier John Scully, dont j’ai entendu le témoignage au sein d’un petit groupe de travail. Je compatis avec lui et à la douleur qu'il vit. Pour être honnête, je ne connais pas la réponse.

[Français]

    Monsieur le Président, mon collègue a participé aux trois séances sur la question. Quand le Québec a déposé son rapport et quand on a voté le projet de loi C‑7 en 2021, j’avais beaucoup de résistance à l’égard de l’ouverture de l’aide médicale à mourir aux troubles mentaux. Cependant, j’ai beaucoup travaillé sur le rapport des experts et j’invite mon collègue à le relire.
    Mon collègue dit qu’il n’y a rien dans la loi. Pourtant, ce n’est pas obligé d'être dans la loi. Ce peut être dans le règlement qui applique le « comment faire ». Les recommandations 10 et 16 sont des balises importantes.
    Imaginons que je tienne pour acquis tout le discours de mon collègue. Il reste que, aujourd’hui, au moment où je parle, il y a des gens qui souffrent de façon irréversible et intolérable.
    Quelle est la solution de mon collègue concernant ces gens?
(1200)
    Monsieur le Président, premièrement, j’aimerais féliciter mon collègue du sérieux de ses propos. Ses discours, ses interventions apportent de nouvelles perspectives. J’ai beaucoup appris en l’écoutant lors de réunions du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir ou même à la Chambre.
    C’est complexe. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je suis déchiré. Le problème, c’est que cela devient très subjectif, à un moment donné. On donne beaucoup de pouvoir à un médecin ou à une infirmière praticienne qui n’ont peut-être pas la connaissance nécessaire des troubles mentaux.
    Comme je l’ai dit dans mon discours, on pense qu’une personne se présente avec un trouble mental, mais à peu près 80 % se présentent avec plusieurs. C’est déjà assez compliqué lorsqu’on traite de troubles psychiatriques; quand on en ajoute deux ou trois, cela devient encore plus compliqué.
    Je suis très reconnaissant des interventions de mon collègue. Comme tout le monde, nous faisons notre possible dans ce dossier.

[Traduction]

    Madame la Présidente, il semble que nous soyons d’accord pour dire qu’il est important que nous ne permettions pas l'entrée en vigueur des dispositions autorisant l’aide médicale à mourir dans le cas des personnes dont le seul problème médical invoqué est une maladie mentale.
     J’ai travaillé dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie avant de devenir députée. En tant que membre du parti au pouvoir, qu’est-ce que le député peut dire à ceux qui vivent au jour le jour et qui n’ont pas accès aux services de soutien en santé mentale dont ils ont besoin, alors qu’on avait promis, lors de la dernière campagne électorale, de transférer 4,5 milliards de dollars pour ceux qui en ont le plus besoin, ceux qui n’ont pas accès au logement dont ils ont besoin et ceux qui ne reçoivent aucune prestation d’invalidité au moment où ils en auraient le plus besoin?
     Le député pourrait-il nous dire ce qu’il répondrait à ceux qui ont besoin de soutien aujourd’hui en matière de maladie mentale?
    Madame la Présidente, je leur dirais que je voterai toujours pour ce genre de mesures de soutien. Je suis très heureux que nous ayons adopté le projet de loi C‑22, qui vise à créer un cadre pour la prestation d’invalidité éventuelle. Il s’agit d’une excellente politique publique et, franchement, j’espère que le prochain budget contiendra quelque chose de plus concret à ce sujet, un montant qui indiquerait le genre de soutien financier auquel les personnes en situation de handicap peuvent s’attendre.
     Oui, il y a beaucoup de problèmes sociaux, et c’est une des raisons pour lesquelles je ne pense pas qu’on soit vraiment prêts. Nous ne savons pas comment tenir compte de ces facteurs, comme l’incapacité de trouver un logement, la solitude, la toxicomanie, et ainsi de suite. Nous n’avons pas la capacité d'exclure les demandes susceptibles d'être motivées par ces facteurs, si je puis dire, pour ne considérer que les demandes plus mûrement réfléchies d’aide médicale à mourir. C’est un grave problème. Notre société a beaucoup de problèmes à régler, et c’est pourquoi je suis ici. Comme la députée, j’essaie de faire de mon mieux pour résoudre ces problèmes.
    Madame la Présidente, c'est devenu un problème parce que la disposition en question a été ajoutée au projet de loi C‑14 par le Sénat. Le député sait-il quelle attitude le Sénat adoptera?
    Nous sommes pressés par le temps. Nous devons agir avant le 17 mars. Savons-nous si le Sénat se penchera rapidement sur le projet de loi une fois que la Chambre le lui aura renvoyé?
    Madame la Présidente, je ne le sais pas, car je ne siège pas au Sénat. Maintenant que le Sénat est de l'autre côté de la rue, il est un peu plus difficile de discuter avec les sénateurs.
    Je comprends leur position. Ils sont généralement favorables à ce report. J'ose croire qu'ils sont aussi responsables que nous et qu'ils ne voudraient pas qu'un vide se crée après mars 2024. Par conséquent, je m'attends à ce qu'ils agissent de façon responsable et j'espère qu'ils le feront.
(1205)
    Monsieur le Président, je remercie le député de son excellent discours et de son travail acharné au sein du comité sur l’aide médicale à mourir. Il a parlé du problème du caractère irrémédiable. Je considère que ce serait une véritable tragédie si le projet de loi que nous adoptons entraînait une situation où un praticien de l’aide médicale à mourir enlèverait la vie à une personne dont l’état se serait éventuellement amélioré si nous lui avions donné plus de temps. Comment pourrions-nous le savoir? La personne serait morte.
    Certains témoignages entendus par le comité m'ont troublé. Certains psychiatres ne semblaient pas très préoccupés par le problème de la détermination du caractère irrémédiable. Ces psychiatres ont dit qu’ils seraient prêts à autoriser l’aide médicale à mourir même sans avoir la certitude absolue que le trouble de santé mentale est irrémédiable.
    Le député pourrait-il nous parler de ce qu’il a entendu lors des travaux du comité et de ce qu’il en a pensé?
    Madame la Présidente, en fait, je ne sais pas comment répondre à cette question. Nous constatons qu’il y a un élément subjectif. Certains psychiatres croient qu’ils prendraient la bonne décision dans ces circonstances. Je suppose que la perspective qu’ils apportent au débat repose sur cette confiance.
    Je ne suis pas médecin, encore moins psychiatre, alors, comme je l’ai dit précédemment, je n’ai pas de réponse plus précise à donner au député.

[Français]

    Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue de Kelowna—Lake Country.
    Encore une fois, je me lève à la Chambre pour parler d'un sujet qui est très délicat, mais essentiel dans nos vies: l'aide médicale à mourir. Je suis personnellement en faveur de l'aide médicale à mourir. Je ne suis pas ici pour défendre mes opinions personnelles. Je suis ici plutôt comme un législateur qui doit prendre en compte toutes les données qui viennent soutenir le feu vert qui peut être donné dans certaines conditions pour l'aide médicale à mourir ou encore le feu rouge nous invitant à ne pas aller de l'avant.
    Selon moi, c'est un sujet qui n'appelle à aucune partisanerie. On peut être à gauche, on peut être à droite, on peut être souverainiste, on peut être fédéraliste; ce n'est pas là le point. Il s'agit de savoir comment nous, comme êtres humains, nous sentons par rapport à cette question. Peu importe d'où nous venons, du spectre politique d'où nous sommes, nous sommes d'abord et avant tout des humains. À partir de là, nous devons faire un choix pour les gens qui ont besoin de l'aide médicale à mourir et nous assurer de la façon dont cela est fait dans des balises correctes.
    Nous sommes confrontés à cette situation puisque le débat a été ouvert ici, au fédéral, en 2015. Or, il a été ouvert au Québec bien avant. Les circonstances ont fait que j'ai eu à participer tant au plan provincial qu'au plan fédéral aux premiers pas de cette mesure législative qui est au cœur de notre débat d'aujourd'hui.
    Je me permets de rappeler que la première province à avoir légiféré là-dessus ne l'a pas fait du jour au lendemain, bien au contraire. C'est après six ans de débats sérieux, studieux, scientifiques et médicaux et d'auditions que le gouvernement du Québec et l'Assemblée nationale ont voté en faveur d'une loi qui allait être les premiers pas de l'aide médicale à mourir. Je tiens à mettre l'importance là-dessus. Cela s'est fait pendant six ans, sous trois gouvernements différents, sous trois premiers ministres différents. C'est bien là la preuve que c'est un sujet qui n'est pas partisan. Dans la mesure du possible, nous devons toujours avoir cette approche.
    Je me souviendrai toujours, lors du débat final sur l'adoption des premiers pas de l'aide médicale à mourir au Québec, d'un député qui était très engagé contre ce projet de loi. Je le revois se lever à l'Assemblée nationale en disant de ne pas voter en faveur de cela. Il était rouge comme une tomate tellement il était convaincu et tellement il était contre ce projet de loi. Une fois qu'il s'est assis et que le discours a été terminé, je l'ai applaudi. Je ne l'ai pas applaudi parce que j'étais d'accord avec lui; je l'ai applaudi parce qu'on vivait dans une démocratie qui permettait l'expression d'un point de vue qui était contraire au mien. Cela faisait ressortir la beauté de la démocratie. Même si son parti et son gouvernement allaient voter majoritairement en faveur du projet de loi, il était contre et il avait l'occasion de le dire et de l'exprimer avec toute la passion qui l'animait. Voilà comment nous devons mener le débat concernant l'aide médicale à mourir.
    Souvenons-nous que ce débat est arrivé sur la scène fédérale en raison de l'arrêt Carter. Sans vouloir refaire l'histoire, rappelons que c'est arrivé en 2015 et que c'était une année électorale. Dans son bon jugement, le chef du gouvernement canadien de l'époque n'est pas allé de l'avant immédiatement, puisqu'on était à la porte d'une campagne électorale. Au risque de le répéter une cinquantième fois aujourd'hui, c'est un sujet qui n'est pas partisan. À sa face même, une campagne électorale est l'épicentre de la partisanerie politique. C'est correct, c'est cela, une campagne électorale. C'est pourquoi, dans son bon jugement, le premier ministre et chef de l'État canadien, le très honorable Stephen Harper, avait décidé de tenir le débat une fois que la campagne électorale serait terminée.
    La population s'est prononcée. Un nouveau gouvernement a été élu. Il y a donc eu le débat à ce sujet. C'est à ce moment-là que les premiers pas sur ce projet de loi portant sur l'aide médicale à mourir ont été faits. D'aucuns auront remarqué que ce projet de loi n'était pas parfait, comme tous les projets de loi. Or, cela a quand même mené à des situations particulières.
    Personnellement, j'étais pour l'aide médicale à mourir, mais je n'ai pas voté en faveur, parce que je trouvais que le projet de loi était très mal ficelé. Je me souviens très bien de l'honorable David Lametti qui, à l'époque, n'était pas ministre de la Justice. On sait qu'il l'a été plus tard. À la suite de la décision du premier ministre, il n'est plus ministre de la Justice, aujourd'hui, et il a décidé de servir ailleurs qu'à la Chambre des communes. Je me souviens très bien que M. Lametti avait dit qu'il allait voter contre parce qu'il estimait que cela n'allait pas assez loin. La Loi a ainsi été adoptée, mais d'autres choses sont arrivées et ont fait qu'aujourd'hui on se retrouve devant le débat concernant la santé mentale.
(1210)
     Je rappelle que, de mon côté, je suis pour l'aide médicale à mourir dans la mesure où c'est bien balisé. Je vais donner l'exemple du Québec. En fait, je vais plutôt parler de l'expérience du Québec, car un exemple est quelque chose qu'on doit suivre. Inspirons-nous plutôt de l'expérience du Québec, qui, pendant six ans, a tenu un débat politique sur la question de l'aide médicale à mourir avant de faire ses premiers pas et d'adopter une première loi.
    Concernant l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant d'un trouble de santé mentale, après avoir tenu des audiences, mené des consultations et analysé à fond cette question, l'Assemblée nationale et le gouvernement du Québec ont décidé de ne pas aller de l'avant en ce qui a trait à l'aide médicale à mourir pour les personnes dont le seul problème médical est un trouble de santé mentale. En effet, on estimait qu'il n'y avait pas de consensus sur cette question et que cela ne faisait pas consensus dans le domaine de la science. Il y avait des voix pour et des voix contre.
    C'est là que nous sommes actuellement. C'est pour cela que, à mon point de vue, tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas de consensus scientifique fort, il faudra être prudent. Cela n'enlève absolument rien au fait que je suis personnellement en faveur de l'aide médicale à mourir. Je considère que cela doit être prodigué à ceux qui le désirent dans un cadre bien enchâssé dans les lois. Dans le cas présent, cela ne va pas assez loin.
    J'ai un collègue de la Nouvelle‑Écosse, soit le député de Cumberland—Colchester, qui est médecin. Hier, j'ai écouté avec attention son propos, parce qu'il sait de quoi il parle lorsqu'il s'exprime au sujet de sa pratique professionnelle. Pendant plus d'un quart de siècle, il a exercé la médecine, qu'il exerce d'ailleurs toujours. Il a soigné des milliers des personnes autour de lui dans sa communauté.
    Il a parlé de ce qu'il trouvait le plus dur dans sa pratique et il a donné l'exemple d'une personne qui arrive un samedi soir en proie à une crise suicidaire et qu'il faut traiter. Ce n'est pas un bras cassé, ce n'est pas un cancer qui se développe, ce n'est pas un caillou qu'on a reçu dans l'œil et qu'il faut essayer d'enlever. C'est beaucoup plus compliqué que cela, parce qu'il est impossible de régler cela de façon immédiate.
    C'est pourquoi son témoignage avait toute une valeur.
(1215)

[Traduction]

    Il a mis au défi quiconque ne s’est jamais trouvé dans une telle situation de nous dire que c'est facile à vivre.

[Français]

    Il a dit que, dans sa pratique, il avait toujours trouvé ces situations très difficiles, et que cela lui prenait du temps pour se remettre d'une telle rencontre. Quiconque a eu à parler à des médecins qui sont confrontés à des patients qui ont des instincts suicidaires va le dire. La santé mentale est difficile à cerner, elle est difficile à traiter. De nouveau, je rappelle l'expérience du Québec, qui, après avoir sérieusement étudié cette question, a décidé de ne pas aller de l'avant concernant l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant de problèmes psychiatriques.
    La question de l'aide médicale à mourir ne pourra jamais être dissociée de la question des soins palliatifs. Les soins palliatifs sont essentiels dans notre système de santé, et nous devons toujours penser à en faire plus, parce que, malheureusement, nous n'en ferons jamais assez dans ce domaine.
    Sans raconter ma vie, je peux dire que, il y a deux ans, j'ai vécu une année particulièrement éprouvante puisque mon père et ma mère sont décédés. Je me souviendrai de mai 2022, lorsque ma mère a passé les derniers jours de sa vie à l'hôpital. Elle était dans une aile où il y avait des chambres, les unes après les autres, de gens qui, comme ma mère, recevaient des soins palliatifs. Puis, il y avait des chambres où il y avait des gens qui avaient demandé l'aide médicale à mourir. Alors, pendant les 15 derniers jours de la riche vie de ma mère, je l'accompagnais à l'hôpital et j'ai rencontré des gens qui avaient demandé l'aide médicale à mourir. Ils l'ont fait dans toute leur conscience avec l'appui, le concours, l'encadrement et, surtout, la présence de leur famille, de la même manière que nous avons accompagné ma mère dans les derniers jours de sa vie.
    C'est comme cela qu'il faut voir la chose. C'est le respect des individus dans leur choix, dans la mesure où les balises sont bien établies. C'est vrai pour les personnes qui souhaitent recevoir l'aide médicale à mourir et pour les personnes qui souhaitent recevoir des soins palliatifs.

[Traduction]

    Madame la Présidente, j’apprécie les nombreux commentaires du député. Une chose qui me frappe, c’est qu’il a parlé du nombre d'années que la province de Québec a pris pour élaborer son projet de loi.
     Il est important de montrer que le gouvernement fédéral a vécu une situation différente en 2015, vu la décision de la Cour suprême, dont le député a parlé. Nous disposions d’une très courte période pour faire adopter le projet de loi. Personnellement, je ne crois pas — et je suppose que personne ne le croit vraiment — que le projet de loi de l’époque était parfait. Cependant, nous devions l'adopter.
    Le député pourrait-il nous parler des nombreuses discussions et des nombreux débats qui ont eu lieu à l’intérieur et à l’extérieur de la Chambre avec l’ensemble des Canadiens, ainsi que de la grande importance de présenter et d’adopter le projet de loi de l'époque, afin de répondre aux exigences de la cour?
    Madame la Présidente, la question est intéressante. J'étais là en 2015, lorsque j'ai été élu pour la première fois. Comme je l'ai dit plus tôt, le premier ministre de l'époque avait pris la bonne décision et n'avait pas présenté le projet de loi juste avant les élections, car il ne s'agit certes pas d'une question politique. C'est une question personnelle. Une campagne électorale est tout sauf l'occasion de débattre franchement.

[Français]

    Une campagne électorale, c'est le pinacle de la partisanerie politique.

[Traduction]

     C'est une bonne chose qu'il n'y ait pas eu de débat pendant la campagne. Après, oui, évidemment. Un échéancier avait été établi par la Cour suprême, et nous devions agir le plus rapidement possible. Ce n'était pas vraiment le meilleur moment pour le faire.
     Si l'on se fie à l'expérience québécoise, il faut prendre le temps d'étudier la question. Le projet de loi qui a été adopté n'était pas parfait. J'avais voté contre parce que j'y voyais bien des failles. Je me souviens de David Lametti. Selon lui, nous avons voté contre parce que le projet de loi n'allait pas assez loin. Cela fait partie du débat, qui n'est pas mû par un programme politique partisan, mais bien par le souci de l'être humain que nous devons tous avoir.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue fait état de l'histoire.
    Il a dit que son parti n'était pas allé de l'avant parce qu'il y avait eu une élection. Je lui ferais remarquer que, durant ces six ans, il y a eu deux élections au Québec. Cela a effectivement retardé les travaux, il va en convenir. Par contre, je suis d'accord avec lui que la démarche du Québec est une démarche beaucoup plus transpartisane et beaucoup plus approfondie.
    Quand on se plaint du délai en lien avec l'arrêt Carter, c'est parce que ce Parlement n'a jamais saisi l'occasion d'essayer de changer le Code criminel avant qu'il y ait une ordonnance de la cour. Il n'a jamais eu le courage de faire cela. Après, on est pris avec une ordonnance de la cour. Or, M. Lametti ne s'est pas levé seulement parce que ça n'allait pas assez loin, il s'est levé parce que cela portait atteinte aux droits constitutionnels des patients. D'ailleurs, le projet de loi C‑7 a remédié à ça.
    Donc, j'aimerais que mon collègue me dise ce qu'il préconise en matière d'aide médicale à mourir en ce qui a trait aux demandes anticipées. Est-ce qu'il considère que le gouvernement, qui avait un an pour déposer le projet de loi, aurait pu insérer ce volet dans le projet de loi actuel?
(1220)
    Madame la Présidente, je tiens d'abord à préciser que, en effet, les travaux se sont déroulés pendant six ans, sous trois gouvernements différents, qu'il y a eu deux élections. C'est exactement ce que j'ai dit tout à l'heure. Justement, c'est un enjeu qui ne se voulait pas partisan.
    Le débat n'a pas été amené à la Chambre pendant des années. Nous le constatons, mais nous constatons aussi que ce n'aurait pas été une bonne idée de déclencher un débat sur cet enjeu qui se veut non partisan à l'aube d'une campagne électorale. Je pense que mon collègue sera d'accord sur cela, d'autant plus qu'à l'époque, on le sait, il y avait beaucoup d'opposition de part et d'autre sur bien des enjeux, et que la population s'est prononcée.
    Sur la question du consentement préalable, personnellement, je suis d'accord, comme l'avait d'ailleurs exprimé ma collègue.
    Madame la Présidente, en termes d'accès à l'aide médicale à mourir, on sait que plusieurs personnes ont exprimé publiquement, notamment par l'entremise des médias, qu'elles se sentaient désespérées et qu'elles n'avaient pas le soutien du système social sur le plan de la santé, du logement et des thérapies pour les problèmes de santé mentale. On sait qu'il faut reconnaître cette réalité.
    Est-ce que mon collègue pense que c'est une avancée pour notre pays de reconnaître le besoin de soutenir le système social pour donner le soutien qu'il faut aux personnes qui en ont besoin, pour qu'elles ne demandent pas l'aide médicale à mourir dont elles n'ont vraiment pas besoin?
    Madame la Présidente, je remercie ma collègue de sa question et de la qualité de son français.
    C'est un peu ce que je disais à la fin de ma réponse. Les soins palliatifs doivent aller de pair lorsqu'on travaille sur la question de l'aide médicale à mourir. L'un n'empêche pas l'autre. Il faut toujours penser aux soins palliatifs avant de penser à l'aide médicale à mourir.

[Traduction]

    Madame la Présidente, c’est toujours un honneur pour moi de prendre la parole au nom des habitants de Kelowna—Lake Country.
     Nous devons prendre une décision ayant une signification profonde: reporter l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes qui la demanderaient uniquement à cause d'une maladie mentale. Il faut appuyer ce report, mais, en ma qualité de ministre du cabinet fantôme chargée du dossier de l’emploi, du développement de la main-d’œuvre et de l’inclusion des personnes en situation de handicap, je me dois d’exprimer mon opposition catégorique à cet élargissement.
     J’aimerais attirer l'attention de la Chambre sur les conclusions du dernier rapport du comité sur l’aide médicale à mourir, qui a été déposé le 30 janvier 2024. Ce rapport exprime des préoccupations qui sont celles des conservateurs depuis longtemps. Il préconise un moratoire sur tout élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant d'une maladie mentale. L’aide médicale à mourir est irrémédiable. Son élargissement incontrôlé pourrait malheureusement entraîner des décès qu'un traitement et un soutien adéquats auraient évités. C’est la raison pour laquelle nous devrions discuter non pas du report, mais de l’abandon définitif de cette disposition législative.
     Les libéraux continuent de faire fi des avis des spécialistes de la santé, des défenseurs des droits et des partis de l’opposition, et ils n’ont pas complètement renoncé à l’idée d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes qui la demanderaient uniquement à cause d'une maladie mentale. En 2023, le gouvernement a déposé, à la 11e heure, un projet de loi visant à imposer un moratoire sur l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant d’une maladie mentale. Il ne l’a fait qu’après avoir reçu de nombreux avis de spécialistes qui lui recommandaient de reporter l’élargissement de l’aide médicale à mourir. Le gouvernement n’écoute pas ceux qui réclament l’abandon définitif d'une telle disposition législative.
     Si le gouvernement fédéral décide malgré tout d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes qui la demanderaient uniquement à cause d'une maladie mentale, cela pourrait avoir des conséquences irréversibles. En 2023, les directeurs de la faculté de psychiatrie de 17 écoles de médecine lui ont tous demandé de reporter le projet de loi visant à élargir l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes qui la demanderaient uniquement à cause d'une maladie mentale. Beaucoup d’entre eux ont dit qu’il était impossible d’affirmer que la maladie mentale d’une personne ne répondrait jamais à aucun traitement.
     En qualité de ministre du cabinet fantôme, chargée des personnes en situation de handicap, j’ai constaté que ceux qui défendent ces personnes sont majoritairement contre l’élargissement de l’aide médicale à mourir. En décembre 2022, plus de 50 groupes de défense des droits de la personne en général et des droits des personnes handicapées, dont un certain nombre de ma province, la Colombie-Britannique, ont adressé une lettre conjointe au ministre de la Justice d’alors et aux chefs des partis fédéraux pour exprimer leur opposition catégorique à un élargissement de l’accès à l’aide médicale à mourir. Ils y invoquaient la discrimination, le manque de soutien et la nécessité de protéger les personnes vulnérables.
     Beaucoup d’autres personnes ont exprimé leur opposition à la loi du gouvernement libéral et ont dénoncé le manque d’empathie de ce dernier, renforçant ainsi les arguments contre l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant d’une maladie mentale. Il est clair, pour ces groupes de défense des droits de la personne en général et des droits des personnes handicapées, que le report de ce projet de loi n’est pas suffisant et qu’il faut renoncer définitivement à l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant d’une maladie mentale.
     Mon argument contre l’élargissement de l’aide médicale à mourir à ceux dont le seul problème de santé est une maladie mentale ne repose pas seulement sur l’opinion d’experts, comme je l’ai souligné. En m’adressant à la Chambre aujourd’hui, je me fais le porte-parole des résidants de Kelowna—Lake Country qui vivent avec un handicap ou une maladie mentale et qui m’ont fait part de leurs graves préoccupations à ce sujet. Un exemple frappant de ces préoccupations se trouve dans une lettre que j’ai reçue d’une jeune femme de ma collectivité qui craint les répercussions humaines de ce genre de mesures législatives. Son témoignage est un rappel important de ce qui est en jeu: accablée par les pensées suicidaires, elle s'est battue contre la maladie mentale. Selon elle, si elle avait eu accès à l’aide médicale à mourir, elle aurait emprunté une voie irréversible. Voilà qui donne à réfléchir sur les dangers potentiels de ce genre de mesures législatives. Son histoire n’est pas seulement un témoignage de lutte, mais aussi un cri du cœur à notre société pour qu’elle devienne source de soutien et d’espoir.
     Tout récemment, un résidant de Kelowna m'a fait part d’une expérience pénible qui fait écho à la gravité de notre dilemme actuel. Il m’a dit qu’il s’était assis avec un ami qui a récemment opté pour l’aide médicale à mourir. Il a dit que si nous permettons l’élargissement à des personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale, ces personnes ne seront peut-être pas toujours en mesure de prendre des décisions aussi graves, et nous risquons d’ouvrir la porte à des conséquences irréversibles. Cette histoire nous rappelle cruellement la lourde responsabilité qui nous incombe. Il s’agit d’un appel à l’action qui nous exhorte à repenser et à réévaluer nos politiques en matière de soins de santé et de santé mentale et à accorder la priorité au bien-être et à la dignité des Canadiens.
(1225)
     Après des années passées à se battre contre des problèmes de santé mentale, beaucoup de gens sont souvent sur le point d’abandonner. Le coût de la vie est si élevé que les gens ne peuvent même plus joindre les deux bouts; ce dont ils ont besoin, c’est de soutien et de compréhension, pas d'une solution facile comme celle offerte par le gouvernement. Une politique visant à étendre l’aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale constitue une trahison.
     L’engagement à aider les gens était manifeste dans le projet de loi d’initiative parlementaire des conservateurs, le projet de loi C‑314, qui visait à modifier le Code criminel afin qu’une maladie mentale ne soit pas considérée comme un problème de santé grave et irrémédiable à l'égard duquel une personne pourrait recevoir l’aide médicale à mourir. Malheureusement, le projet de loi a été rejeté en octobre 2023, 150 députés ayant voté pour et 167 contre. Voilà qui démontre que le gouvernement libéral veut simplement qu'on traite de la question après les prochaines élections.
     Après huit années de gouvernement libéral, de nombreuses personnes ont de plus en plus de mal à gérer la détérioration rapide de leur qualité de vie. De nombreux habitants de Kelowna—Lake Country et des Canadiens de partout ailleurs au pays vivent un stress immense tous les mois parce qu'ils ne savent pas comment ils pourront se loger ou mettre de la nourriture sur la table. Cette situation est aggravée par les tensions économiques et l’intensification des problèmes de santé mentale. Dans un tel contexte, élargir l'admissibilité à l’aide médicale à mourir à la maladie mentale comme seul problème de santé sous-jacent est certes malavisé, mais cela pourrait littéralement mettre des vies en danger.
     Nous avons déjà vu des exemples inquiétants de non-assistance aux personnes souffrant d’angoisse mentale quand elles demandent de l'aide. Par exemple, Anciens Combattants Canada a confirmé qu’un de ses gestionnaires de cas a suggéré de son propre chef l’aide médicale à mourir à plusieurs vétérans comme solution à des problèmes tels que le stress post-traumatique. En outre, le comité des ressources humaines a entendu le témoignage de personnes handicapées qui envisageaient de recourir à l’aide médicale à mourir parce qu’elles n’avaient pas les moyens de vivre, et il a été rapporté que des clients des banques alimentaires ont demandé comment faire une demande d’aide médicale à mourir. Ces exemples mettent en évidence le risque que l’aide médicale à mourir devienne une solution malavisée pour des personnes qui ont désespérément besoin de compassion et de soutien.
     Dans un tel climat d’anxiété, de problèmes de santé mentale et d’augmentation des taux de toxicomanie dans tout le pays, élargir l'admissibilité à l’aide médicale à mourir à la maladie mentale comme seul problème de santé sous-jacent pourrait être une voie tragique. Je pense que nous devrions concentrer nos efforts sur l’amélioration de l’abordabilité et de la qualité de vie, ainsi que sur l’aide apportée avec compassion. Il ne devrait pas être plus facile d’obtenir l’aide médicale à mourir que d’accéder aux services de santé mentale et d’aide aux toxicomanes.
     Avec mes collègues conservateurs, je continuerai à soutenir les nombreux experts, médecins et personnes handicapées qui s’opposent à l'admissibilité à l’aide médicale à mourir quand une maladie mentale est le seul problème de santé sous-jacent. Ils expriment les risques inhérents et les préoccupations liées à la protection des personnes en difficulté et à la protection des plus vulnérables. La proposition d'élargir l’admissibilité à l’aide médicale à mourir aux personnes dont une maladie mentale est le seul problème de santé sous-jacent envoie un message troublant, à savoir que le gouvernement est prêt à abandonner certains des citoyens les plus vulnérables. Il s’agit d’un aveu de défaite, signifiant que nous, en tant que société, reculons devant notre obligation morale de fournir des soins complets et compatissants à ceux qui luttent contre des problèmes de santé mentale.
     Au lieu d’adopter des lois comme mon projet de loi d’initiative parlementaire plein de bon sens, le projet de loi C‑283, la loi pour mettre fin à la justice prorécidive, qui vise à fournir des évaluations de la santé mentale ainsi que le traitement de la toxicomanie dans les pénitenciers fédéraux, des politiques comme l’élargissement de l'admissibilité à l’aide médicale à mourir aux personnes atteintes d’une maladie mentale constituent vraiment une voie irréversible. Nous devons nous assurer que nous soutenons les soins de santé mentale et les solutions à long terme.
     En tant que députés, nous ne devrions pas choisir la voie facile au détriment de la bonne voie. Ce n’est pas le Canada auquel nous aspirons: une nation qui s’enorgueillit de sa compassion et de son soutien. Notre devoir n’est pas seulement de légiférer, mais aussi de protéger, de soutenir et de donner de l’espoir aux Canadiens, en particulier aux plus vulnérables d’entre nous. C’est un devoir que nous devons assumer avec le plus grand sérieux et le plus grand engagement.
(1230)
    Madame la Présidente, la députée a parlé de la communauté des personnes handicapées. Celle-ci m'a également exprimé son opposition à l'aide médicale à mourir pour les personnes handicapées. J'aimerais que la députée raconte ce qu'elle a entendu de la part de personnes handicapées concernant l'aide médicale à mourir et nous dise si, selon elle, nous devrions mettre en place plus de mesures de sauvegarde en matière d'aide médicale à mourir pour les personnes ayant d'autres formes de handicaps physiques.
    Madame la Présidente, les personnes handicapées s'expriment haut et fort au sujet de l'élément de la loi dont nous discutons ici aujourd'hui, soit l'expansion du régime pour y inclure les personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale. Les personnes handicapées ont également des préoccupations générales concernant d'autres mesures de sauvegarde destinées à protéger les personnes les plus vulnérables, qui ne peuvent pas forcément exprimer leur volonté. Il s'agit d'une préoccupation générale que j'entends de la part des personnes handicapées.
    Madame la Présidente, bien que la députée et moi ayons des opinions divergentes à bien des égards, dans ce dossier, nous partageons les mêmes préoccupations à l'idée d'autoriser les personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est un trouble mental à recourir à l'aide médicale à mourir.
    Ma question est la suivante: puisque la plupart des conservateurs sont de cet avis, du moins je le crois, pourquoi n'aident-ils pas ce projet de loi à franchir les étapes du processus législatif le plus rapidement possible? Nous disposons de peu de temps pour intervenir, et le régime s'étendra à ces personnes si nous n'intervenons pas à temps. Pourquoi les conservateurs retardent-ils l'adoption de ce projet de loi aujourd'hui?
    Madame la Présidente, c'est le gouvernement qui fixe l'ordre du jour. C'est lui qui décide des sujets dont nous discutons chaque jour. C'est un honneur pour moi d'être ici pour parler au nom de mes concitoyens d'une mesure législative très importante.
    Madame la Présidente, mon amie, la députée de Kelowna—Lake Country, et moi-même partageons bon nombre des préoccupations exprimées aujourd'hui. C'est une question pour laquelle je supplie tous les députés de ne pas chercher à obtenir un avantage partisan.
    Le désaccord que nous observons ici est vraiment tout sauf partisan: il découle de la structure de notre Parlement et du système de Westminster, en vertu duquel il existe encore l'équivalent de la Chambre des Lords, c'est-à-dire le Sénat. Le Sénat a introduit dans le projet de loi C‑14 le principe voulant que l'aide médicale à mourir puisse être accordée à des personnes dont une maladie mentale est la seule condition médicale invoquée. Tout le monde ici, indépendamment de la partisanerie, s'efforce de faire en sorte que les Canadiens ne demandent pas l'aide médicale à mourir s'il existe une autre option qui leur permettrait de continuer à vivre. Ce n'est pas une question partisane.
    J'aimerais entendre les observations de ma collègue.
(1235)
    Madame la Présidente, pour ceux qui suivent le débat, lorsque le Sénat renvoie un projet de loi à la Chambre, s'il y a des amendements, le gouvernement en place peut choisir ce sur quoi il est d'accord et ce qu'il veut présenter. Or, le gouvernement a choisi de permettre cela, ce qui a créé de nouvelles échéances.
    Le gouvernement aurait pu s'y opposer à de nombreuses étapes du processus, mais nous voilà en train de discuter d'un simple report. Le gouvernement a déjà retardé le processus une fois et il envisage maintenant de le reporter de nouveau, jusqu'après les prochaines élections. Le gouvernement aurait pu décider de ne pas appuyer cette mesure dès le début.
    Madame la Présidente, je m'interroge sur une chose que la députée a abordée dans sa réponse précédente. Quelle serait la solution à ce problème? Je pense que le Parlement a entendu les préoccupations de nombreux Canadiens. Nous les avons entendues au comité, et on les a exprimées ici.
    Selon elle, comment pourrait-on régler cette situation?
    Madame la Présidente, nous ne devrions pas discuter d'un report. Nous devrions plutôt parler de ne pas élargir du tout l'aide médicale à mourir aux personnes dont la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée.
    Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Saanich—Gulf Islands.
    Je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C‑62. Le projet de loi propose de prolonger l'exclusion temporaire de la maladie mentale, de sorte que la prestation de l'aide médicale à mourir, ou AMM...
    On dirait qu'il y a un téléphone qui sonne. Je ne sais pas si c'est celui du député, mais je demanderais aux députés, lorsqu'ils prennent la parole, de s'assurer que leur téléphone et leurs écouteurs ne sont pas sur leur bureau, car ils peuvent causer des problèmes aux interprètes.
    Le secrétaire parlementaire a la parole.
    Madame la Présidente, c’est, semble-t-il, mon assistante qui m'appelle pour me dire qu'il est temps de parler. Elle est très efficace.
     Comme je le disais, il est proposé dans le projet de loi de prolonger l'exclusion temporaire des personnes atteintes de maladies mentales, de sorte que l’administration de l’aide médicale à mourir sur la seule base d'une maladie mentale resterait interdite jusqu'au 17 mars 2027. Dans mes observations d'aujourd'hui, je parlerai de certaines des préoccupations qui ont été exprimées au sujet de l'autorisation de l'aide médicale à mourir pour cause de maladie mentale et du fait qu’il est important de préparer notre système de soins de santé à cet effet avant de légaliser cette pratique.
     Comme les députés le savent, le projet de loi C‑7 a temporairement exclu l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant uniquement d'une maladie mentale jusqu'en mars 2023. Le Parlement a prolongé l'exclusion d'une année supplémentaire après que des organisations comme l'Association of Chairs of Psychiatry in Canada et le Centre de toxicomanie et de santé mentale, se sont dites d’avis qu’il fallait attendre une année de plus. Le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir était également en faveur de la prolongation.
    D'entrée de jeu, je tiens à souligner que le gouvernement reconnaît que la souffrance mentale peut être aussi grave que la souffrance physique. Nous savons que les personnes atteintes d'une maladie mentale ne sont pas toutes incapables de prendre une décision. La prolongation de l'exclusion temporaire de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir n'est pas fondée sur ces stéréotypes stigmatisants.
     Je compatis également avec toute personne au Canada qui souffre de manière intolérable en raison d'un problème de santé. Je suis de tout cœur avec eux.
     Bien que le gouvernement fédéral estime que l'admissibilité à l’aide médicale à mourir devrait être élargie aux personnes dont le seul problème de santé est une maladie mentale, ce processus ne peut pas être précipité. Au cours de la dernière année, d'importants progrès ont été réalisés pour préparer l'élargissement de cette pratique, mais les provinces et les territoires sont à des stades différents de préparation. Le gouvernement fédéral a donc écouté ses partenaires et présenté ce projet de loi en réaction directe à leurs préoccupations.
     Un cadre prudent, mûrement réfléchi et rigoureux est essentiel pour garantir la prestation sûre de l’aide médicale à mourir demandée pour cause de maladie mentale. Le débat sur les paramètres du régime d'aide médicale à mourir a eu lieu avant la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2015 dans l'affaire Carter, dans laquelle la cour a statué que l'interdiction absolue de l'aide médicale à mourir était inconstitutionnelle. C'est le signe d'une démocratie saine.
     Plus récemment, le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir a pris acte de la diversité des points de vue et des avis d’experts. Certains témoins, comme le Dr Trudo Lemmens, titulaire de la chaire de droit et de politique de la santé à l'Université de Toronto, se sont dits inquiets que l’aide médicale à mourir soit accordée à quelqu’un dont le seul problème médical invoqué est une maladie mentale. D'autres, notamment les membres de l'Association canadienne des évaluateurs et prestataires de l’aide médicale à mourir, ont estimé que le pays était prêt pour l'échéance actuelle du 17 mars 2024.
     D’autres experts ont donné leur appui à l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale, ou ont accepté que cette pratique devienne légale, mais ils ont recommandé un sursis. Cette recommandation a été formulée par le Dr Jitender Sareen, de l’Université du Manitoba, au nom de huit directeurs de départements de psychiatrie au Canada. Ceux-ci ont exposé plusieurs raisons, notamment des préoccupations au sujet de la nécessité d’établir des mesures de sauvegarde supplémentaires et de bien définir le caractère irrémédiable d'une maladie mentale avant d’aller de l’avant.
     Je tiens à souligner les précieuses contributions qui ont été faites à ce sujet. Même si tout le monde n’est pas d’accord, il est clair que nous nous soucions tous profondément du bien-être des personnes qui demandent l’aide médicale à mourir et de la protection des personnes vulnérables.
     J'aimerais maintenant revenir sur quelques-unes des préoccupations qui ont été soulevées. Les députés se souviendront que certains critères d’admissibilité doivent être respectés pour qu’une personne soit admissible à l’aide médicale à mourir, par exemple avoir un problème de santé grave et irrémédiable qui fait que la personne se trouve dans un stade avancé de déclin irréversible.
     Certains médecins, comme le Dr Sonu Gaind, chef de psychiatrie au Centre des sciences de la santé Sunnybrook, ont expliqué qu’il était impossible de prédire quels patients atteints d’une maladie mentale verront leur état s'améliorer; autrement dit, nous ne pouvons pas déterminer si leur maladie est irrémédiable. D’autres experts, notamment des membres du groupe d’experts sur l’aide médicale à mourir et la maladie mentale, laissent toutefois entendre que l’évolution de la maladie et la réponse aux interventions antérieures peuvent être utilisées pour évaluer le caractère irrémédiable, comme c’est le cas pour certaines affections physiques, notamment pour la douleur chronique.
     Le Dr Sareen et d’autres experts ont également dit qu’il est extrêmement difficile de faire la distinction entre les tendances suicidaires et une demande rationnelle d’aide médicale à mourir lorsque la demande est fondée uniquement sur une maladie mentale, car les tendances suicidaires peuvent être un symptôme de la maladie mentale elle-même. Tout en reconnaissant que cela peut être complexe, la Dre Stefanie Green a ajouté devant le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir que les cliniciens ont le devoir d’évaluer chaque patient pour déterminer s’il est suicidaire. C’est quelque chose que les médecins font couramment en pratique clinique. De plus, les évaluations des demandes d’aide médicale à mourir peuvent recommander des mesures de prévention du suicide, le cas échéant.
(1240)
     Le Dr Tarek Rajji, président du comité consultatif médical du Centre de toxicomanie et de santé mentale, a également fait remarquer qu’il n’y avait pas de consensus au sein de la communauté médicale sur la question de savoir si l’aide médicale à mourir devrait être offerte aux personnes dont le seul problème médical invoqué est un trouble mental. Selon d’autres experts, dont la Dre Green, l’absence de consensus dans le milieu médical n’est pas propre à l’aide médicale à mourir.
     Un dernier point préoccupant que je tiens à soulever, c’est celui des personnes qui demandent l’aide médicale à mourir en raison d’une vulnérabilité structurelle et systémique, comme le manque de revenu et de soutien social. Je tiens à préciser que la loi exige que la souffrance soit attribuable à une maladie ou à un handicap, et non à la pauvreté ou à des besoins non satisfaits.
     Notre gouvernement est convaincu que les mesures de sauvegarde actuelles feront en sorte que seules les personnes qui répondent aux critères d’admissibilité pourront recevoir l’aide médicale à mourir. Nous sommes également déterminés à investir dans des programmes sociaux qui peuvent atténuer la souffrance non médicale et renforcer le soutien social. Notre cadre d’aide médicale à mourir contient deux séries de mesures de sauvegarde, l’une pour les cas où la mort naturelle est raisonnablement prévisible et l’autre pour les cas où la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible.
     La deuxième série de mesures de sauvegarde s’appliquerait aux cas où une maladie mentale est à l’origine d’une demande d’aide médicale à mourir. Il s’agit notamment de l’obligation de faire participer à l’évaluation un médecin ou une infirmière praticienne spécialisée dans la maladie, d’une période d’évaluation plus longue, soit de 90 jours, de l’obligation d’informer le patient des moyens qui existent de soulager ses souffrances et de lui proposer des consultations avec des professionnels compétents, et de l’obligation pour les évaluateurs et le patient de convenir que le patient a sérieusement examiné les moyens raisonnables et accessibles de soulager ses souffrances.
     Outre ces strictes mesures de sauvegarde, il y a d’autres orientations destinées aux médecins, aux infirmières praticiennes et aux autorités de réglementation, notamment un modèle de norme de pratique. La mise en œuvre de directives réglementaires solides et de ressources supplémentaires est en cours, tout comme l’adoption du programme d’étude bilingue sur l’aide médicale à mourir, agréé au niveau national.
     Nous sommes convaincus qu’avec plus de temps, nous pouvons être prêts à garantir la sécurité de l’administration de l’aide médicale à mourir dans les cas où une maladie mentale en justifie la demande. Nous avons fait des avancées importantes, mais il reste du travail à faire pour préparer les systèmes de soins de santé et pour qu’un plus grand nombre de médecins et d’infirmières praticiennes bénéficient de la formation et du soutien offerts.
     Notre gouvernement estime que trois ans suffisent pour achever ce travail, afin que notre système de soins de santé soit prêt lorsque l’aide médicale à mourir en cas de maladie mentale sera autorisée. En outre, nous proposons d’ajouter une exigence d’examen parlementaire par un comité mixte des deux chambres du Parlement, qui doit débuter dans les deux ans après que le projet de loi aura obtenu la sanction royale.
     Le comité aura six mois pour soumettre un rapport, y compris une déclaration sur toute modification recommandée au Code criminel. L’examen en question éclairera l’action du gouvernement et assurera qu’elle n’ira de l’avant que lorsque les systèmes de soins de santé canadiens seront prêts.
     La date d’échéance du 17 mars 2024 approchant à grands pas, j’exhorte tout le monde à collaborer pour que le projet de loi soit adopté avant cette date.
(1245)

[Français]

    Madame la Présidente, c'est un résumé assez exact de ce qui s'est passé au comité. Le gouvernement a décidé de mettre dans une loi la recommandation principale du comité sur les troubles mentaux. Mon collègue a siégé au comité qui a produit le rapport déposé en février 2023, dans lequel il était recommandé de permettre les demandes anticipées.
    Pourquoi son gouvernement n'a-t-il pas introduit un volet sur les demandes anticipées après un an d'attente? Il me semble que cela aurait été intéressant pour les gens qui souffrent actuellement et qui ne peuvent faire de demande anticipée. Pourquoi ne retrouve-t-on pas cela dans le projet de loi C‑62?

[Traduction]

    Madame la Présidente, je commencerai par dire à quel point j’ai aimé travailler avec le député au sein du comité mixte spécial, non seulement à cette occasion, mais également l’an dernier. Il est très conscient que le temps presse. Nous devons nous concentrer sur la question qui nous occupe et faire en sorte que le projet de loi soit adopté. Tout niveau de discussion supplémentaire que nous ajouterions pourrait nuire à notre capacité à faire passer le projet de loi à la Chambre et au Sénat. Nous devons faire avancer les choses avant la date d’échéance du mois de mars, et je pense que nous sommes d’accord sur ce point. Je pense qu’il sera d’accord avec moi, et en fait je sais que c’est le cas, pour dire que le processus au comité a été très positif et constructif.
    Uqaqtittiji, je me demande si le député peut nous parler de ce qui arriverait si nous ne respections pas l'échéance. Quels types de difficultés les Canadiens et le système éprouveraient-ils si le projet de loi n'était pas adopté avant le 17 mars?
    Madame la Présidente, je suis très heureux de répondre à cette question parce qu'elle touche à la raison principale derrière la présentation du projet de loi.
    Si le projet de loi n'est pas adopté à la Chambre et à l'autre endroit, la mesure législative entrera en vigueur le 17 mars. Dans ce contexte, même si de multiples gouvernements ont dit très clairement qu'ils ne sont pas prêts à procéder à l'élargissement, c'est ce que prévoirait la loi au pays.
    On peut s'imaginer un scénario où la situation deviendrait — je ne vais pas utiliser le mot « chaotique » — instable et incohérente à l'échelle du pays. C'est inadmissible. Comme il s'agit d'une question cruciale et sérieuse qui a des implications permanentes, nous devons nous assurer d'être prêts et de bien faire les choses. Voilà pourquoi nous devons adopter le projet de loi.

[Français]

    Madame la Présidente, il y a de la sagesse dans la vie, dans nos décisions, mais la peur ne doit pas nous gouverner. Sans dire que ce serait le chaos, je pense qu’il faut reconnaître tout ce qui a été fait dans ce dossier.
    Ce que nous amène le projet de loi aujourd'hui, c'est retarder de trois ans l'inévitable question qui se pose pour ce qui est de la santé mentale. Il me semble que, à la fois, le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir et un exercice qui aurait été plus probant, d’un an, auraient pu être souhaitables.
    On va reporter des souffrances alors que, la souffrance psychologique, cela existe. Certaines personnes qui en souffrent parlent du cancer de l’esprit. C’est aussi une réalité.
    Cela dit, nous sommes en 2024. Il y a bien des progrès qui ont été avancés, comme celui de pouvoir demander, de façon préalable, l’aide médicale à mourir pour certaines maladies.
    Pourquoi ne pas avoir fait avancer ce progrès qui avait été réalisé au Comité mixte? Mon collègue peut-il nous informer sur la raison…
(1250)
    L'honorable secrétaire parlementaire a la parole.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la députée a raison sur le premier point: la peur ne doit pas nous gouverner, c'est la raison qui doit le faire, surtout lorsqu'il s'agit de questions aussi importantes.
    Le projet de loi ne vise pas à retarder les choses: il vise à bien faire les choses. Cette question est cruciale. Si nous ne disposons ni d'un système ni de l'intégrité structurelle pour que la mesure soit prête à être mise en œuvre, nous ne faisons pas notre travail de parlementaires. C'est aussi simple que cela.
    J'ai siégé au comité spécial les deux fois. Le travail qu'il a accompli nous a permis de nous attaquer à cette question de façon raisonnable, rationnelle et rapide. C'est le comité spécial qui a recommandé, l'année dernière, qu'il se forme de nouveau cette année, ce qui est encore une fois recommandé. Nous ne voulons pas nous retrouver dans 12 mois à avoir la même discussion et à être encore une fois bousculés.
    Il est rationnel et raisonnable de reporter cette mesure de trois ans, mais cela ne signifie pas que la discussion ne se poursuivra pas dans l’intervalle.
    Madame la Présidente, je suis heureuse de pouvoir prendre la parole à ce sujet. Ayant été présente à la Chambre pendant tous les débats sur la question, j’ai essayé de trouver la meilleure façon d’expliquer aux Canadiens, s’il y a matière à discussion, pourquoi ce n’est pas un débat entre les libéraux et les conservateurs, ou entre les verts et les néo-démocrates ou entre les conservateurs et le Bloc. En fait, depuis le tout début, le Parlement peine à régler une question que nous laissons traîner depuis trop longtemps.
     J’ai parlé plus tôt, en tant que députée de Saanich—Gulf Islands, du courage tranquille et extraordinaire d’une femme, Sue Rodriguez, qui a porté la souffrance de sa maladie irrémédiable jusqu’à la Cour suprême du Canada et s’est vu refuser ce qu’on appelle généralement la mort dans la dignité. Elle l’a tout de même obtenue, mais illégalement. Ceux qui étaient avec elle à l’époque auraient été passibles de sanctions pénales également, y compris mon ami Svend Robinson qui, à l’époque, était député d’un autre parti et d’un autre endroit.
     C’était une période très difficile, et la question de l’aide médicale à mourir ne cessait de me revenir par l'intermédiaire d’électeurs qui avaient le cœur brisé de voir leurs parents ou leurs proches souffrir. Bien souvent, les gens me demandaient pourquoi, si on ne laissait pas un animal de compagnie vivre ce genre de souffrance, permettait-on à nos mères et à nos pères de souffrir alors qu’il n’y a aucune chance qu’ils se rétablissent?
     La Cour suprême du Canada a finalement rendu une décision différente à la suite de l’affaire Carter, en 2015. Dans cette affaire, la Cour suprême a jugé que le fait de refuser à une personne l’option légale de demander l’aide médicale de son médecin dans une situation où sa maladie est en phase terminale constitue une violation des droits garantis par l’article 7 de la Charte. Si j’en parle, c’est uniquement parce qu’il y avait aussi une date limite dans ce cas. Nous devons agir. Nous ne pouvons pas simplement laisser la question de côté. La Cour suprême du Canada a déclaré que cette disposition du Code criminel contrevient à la Charte. Cela veut dire qu’on ne peut plus laisser les choses traîner.
     Ce serait beaucoup trop long, et mes collègues seront soulagés d’apprendre que je ne passerai pas cette disposition en revue dans ses moindres détails, mais l’enjeu est difficile, très difficile pour les parlementaires. À l’époque, lorsque nous avons commencé à débattre de la première mesure législative autorisant à mourir dans la dignité, soit le projet de loi C-14, la ministre de la Justice qui a été la première à s’occuper de ce dossier était l'honorable Jody Wilson-Raybould. Ce dossier lui a donné du fil à retordre. La ministre de la Santé de l’époque, l'honorable Jane Philpott, a dû elle aussi s'occuper de ce dossier délicat.
     Au fil du débat, il m’est apparu que dans ce dossier nous avions au Canada un conflit essentiellement professionnel. Les avocats voulaient s’assurer du respect de la Charte. Les médecins ont déclaré qu’ils ne voulaient pas avoir à déterminer le sens du terme « irrémédiable » et qu’ils n’étaient pas tout à fait prêts pour cela. Par ailleurs, les révisions du projet de loi se sont succédé, étant donné que dans la première mesure législative pour accorder le droit à l’aide médicale à mourir, nous n’avions pas autorisé les directives anticipées. Par conséquent, il y a eu des poursuites judiciaires parce que des personnes atteintes d’un cancer en phase terminale n’ont pas pu obtenir l'aide médicale à mourir étant donné qu'elles souhaitaient en faire la demande à l'avance, peut-être des mois avant que la mort ne survienne naturellement et des mois avant qu’un médecin ne puisse dire: « D’accord, vous êtes prêt maintenant. Consentez. » Le demandeur devait être capable de signer physiquement le jour même de la procédure; il devait confirmer sa volonté.
     Encore une fois, je ne devrais pas refaire l'historique, mais essentiellement, le point de vue professionnel des médecins présenté aux parlementaires l’a emporté sur celui des avocats qui affirmaient qu'il y aurait probablement encore des violations de la Charte. Néanmoins, nous avons estimé qu'il valait mieux écouter les médecins et s’assurer qu’ils soient prêts. Cette situation nous a forcés à revenir sur la question de l’aide médicale à mourir pour la rendre plus humaine, et à tenir compte des préoccupations des Canadiens d’un océan à l’autre qui souhaitaient avoir le droit de donner une directive anticipée dans l’éventualité d’une situation conforme aux critères de l'aide médicale à mourir. Voilà ce qui nous a amenés au projet de loi C-7.
    En réponse à certains commentaires formulés dans cette enceinte plus tôt aujourd’hui, je rappelle que le gouvernement et le Parlement étaient soumis au délai imposé par le tribunal, et non par le pouvoir politique. Bref, la Cour suprême du Canada avait statué que, en tant que parlementaires, nous étions tenus de respecter ce que la Charte exigeait. Nous étions confrontés à un délai très serré, puis le Sénat a fait une chose à laquelle personne à la Chambre ne s’attendait, je crois.
(1255)
     Encore une fois, nous avons eu un conflit entre professionnels. Les médecins ont dit qu’ils n’étaient pas prêts à élargir la loi aux personnes dont la maladie mentale serait la seule condition irrémédiable invoquée. Les professionnels de la santé qui s’occupent de toxicomanes et de personnes souffrant de troubles mentaux ont dit qu’ils n’étaient pas prêts. Malgré cela, sur la recommandation pressante de la communauté psychiatrique, le Sénat a décidé que nous devrions élargir l’aide médicale à mourir uniquement aux personnes souffrant — et je ne dis surtout pas cela de façon méprisante — d’une maladie mentale particulièrement douloureuse et débilitante.
     C’est une question très délicate, et elle l’est encore plus lorsqu’on se rend compte que ceux qui sont les moins susceptibles de bénéficier de soutiens psychiatriques sont les pauvres et les marginalisés. Qui est le plus susceptible de ne pas vouloir continuer de vivre avec une maladie mentale effroyable? Ce sont encore les marginalisés. La communauté des personnes en situation de handicap a dit clairement qu’il ne fallait pas élargir l’accès à l’aide médicale à mourir, car on était déjà sur un terrain très glissant avec le projet de loi C-14, et maintenant voilà le projet de loi C-7.
     Encore une fois, nous sommes confrontés à une date butoir imposée par le tribunal. Il faut que les Canadiens qui nous regardent sachent que les provinces et un grand nombre de médecins et de psychiatres sont tous du même avis. Si nous n’adoptons pas rapidement ce projet de loi et si le Sénat n’en fait pas autant dans les plus brefs délais, pour qu’il reçoive la sanction royale avant le 17 mars, alors l’aide médicale à mourir sera accessible aux personnes dont la maladie mentale sera la seule condition médicale invoquée.
     Une maladie mentale est-elle irrémédiable? Les experts nous disent que personne ne peut vraiment répondre à cette question. La communauté psychiatrique estime que les mesures de sauvegarde sont suffisantes et que, si trois psychiatres déterminent que la maladie est irrémédiable, c’est suffisant. Par ailleurs, nous nous posons tous des questions au sujet des mesures de soutien psychiatrique: sont-elles suffisantes, notamment pour les personnes marginalisées?
     C’est une question qui m’inquiète tout particulièrement. Beaucoup de gens qui sont venus me voir prennent avec succès de la psilocybine, ce qu’on appelle communément des champignons magiques, pour soulager des troubles mentaux qui, autrement, pourraient être considérés comme irrémédiables. Nous savons que Santé Canada est en train d’accélérer les essais sur la psilocybine. C’est un peu un cercle vicieux parce que d’un côté, le ministère dit qu'il serait dangereux de laisser ces gens-là prendre de la psilocybine alors que leurs médecins pensent que cela pourrait les aider, sinon ils risqueraient de se suicider, et de l’autre, il y a cette date butoir du 17 mars qui leur donnera d’office accès à l’aide médicale à mourir. Il me semble que les risques médicaux liés à la psilocybine ne sont rien en comparaison avec la réalité irréversible de la mort. Comment pouvons-nous laisser cela se produire? Nous ne pouvons pas.
    Je crois que la Chambre doit aussi se pencher sur un autre dossier, celui de l'aide sociétale à vivre. On sait à quoi ressemble l'aide médicale à mourir, mais à quoi ressemble l'aide sociétale à vivre? Elle comprend l'élimination de la pauvreté et l'assurance d'un revenu minimum garanti pour tous. Elle comprend un accès à des services de santé mentale partout au pays. Elle comprend une approche compatissante et bienveillante en vertu de laquelle on tend la main à tous les Canadiens, qu'ils s'agisse d'handicapés, d'Autochtones ou de jeunes toxicomanes, afin de ne pas les laisser tomber. Et, peu importe ce que des députés en pensent, cela signifie que nous devons adopter cette mesure législative rapidement.
(1300)

[Français]

    Madame la Présidente, aujourd'hui, nous débattons de cette mesure alors qu'un énorme scandale est en train de se dérouler.
    Hier, on a appris de la vérificatrice générale qu'il y a des preuves de corruption et de gaspillage d'argent. C'est la raison pour laquelle nous annonçons que nous voulons que la Gendarmerie royale du Canada prolonge son enquête pour trouver la vérité et faire la lumière sur la possibilité de criminalité dans le scandale « ArnaqueCAN ». J'ai des lettres à ce propos.

[Traduction]

    Je demande à la GRC d'élargir son enquête dans l'affaire ArnaqueCAN, et je dépose cette lettre...
    Je pensais que le député souhaitait intervenir dans le cadre de la période de questions et observations, mais son intervention n'a aucun lien avec le débat.
    Madame la Présidente, j'invoque le Règlement.
    Le scandale ArnaqueCAN a frappé l'imaginaire collectif après que la vérificatrice générale a révélé des preuves selon lesquelles de hauts fonctionnaires ont obtenu des cadeaux, comme du whisky hors de prix, afin d'accorder des contrats. J'aimerais déposer à la Chambre des communes une lettre au commissaire de la GRC lui demandant d'élargir son enquête dans l'affaire ArnaqueCAN.
    Y a-t-il consentement?
    Des voix: Non.
    La vice-présidente adjointe (Mme Carol Hughes): Nous passons aux questions et observations. La députée de Châteauguay—Lacolle a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, je me lève pour poser une question à l'honorable députée de Saanich—Gulf Islands...

[Traduction]

    À l'ordre. Je n'arrive pas à entendre ce que dit la députée. Si les députés souhaitent tenir des conversations, je leur demanderais de bien vouloir le faire à l'extérieur de la Chambre.
    La députée de Châteauguay—Lacolle a la parole.
    Madame la Présidente, j'ai beaucoup apprécié les observations tout comme l'ensemble des discussions entourant le débat d'aujourd'hui.
    En 2015, j'ai siégé au premier comité mixte spécial chargé d'étudier l'aide médicale à mourir. Ce fut une période difficile pour moi, car j'étais une nouvelle élue. Par surcroît, en tant que catholique pratiquante, j'étais profondément interpellée par la question. Néanmoins, j'ai pu comprendre, grâce aux témoignages d'experts, qu'il est important que nos concitoyens aient des choix.
    Comme je sais que ma collègue est elle aussi croyante, j'aimerais lui demander d'aborder cet aspect de la question. Même si nous avons des valeurs personnelles très solides, pouvons-nous admettre que les Canadiens méritent d'avoir la possibilité de recourir à l'aide médicale à mourir?
    Madame la Présidente, je dois dire que j’ai été très déçue que le chef de l’Opposition officielle ne soit pas intervenu pour me poser une question. Cela aurait été une première, alors j’attendais avec impatience de lui répondre.
    La députée de Châteauguay—Lacolle m’a posé une question très pertinente. Personnellement, je suis croyante. Ma conscience a pesé longtemps sur ma réflexion, mais mes concitoyens m’ont convaincue. J’ai passé beaucoup de temps à parler aux résidants de Saanich—Gulf Islands, qui m’ont suppliée de soutenir la légalisation de l’aide médicale à mourir pour supprimer les sanctions pénales à cet égard. Mon point de vue est très personnel et il relève de ma conscience. Je n’attends pas des autres qu’ils soient d’accord avec moi alors qu’ils croient fermement le contraire, envers et contre tous. Je crois que toute vie est sacrée, bien sûr. Je crois que prendre une vie, y compris la sienne propre, est également une question qui soulève un profond conflit moral. Cependant, je n’ai aucun doute sur le fait que l’élan chrétien pour la compassion consiste justement à ne pas laisser les gens souffrir indûment.
    La médecine nous permet aujourd’hui de prolonger l'espérence de vie au-delà de ce celle de mes grands-parents et de leurs semblables. Au fur et à mesure que nous prolongeons notre…
(1305)
    Je dois laisser aux députés le temps de formuler d’autres questions et observations. Je suis certaine que la députée pourra continuer à développer son point de vue.
    Le député de Montcalm a la parole.

[Français]

    Madame la Présidente, je suis certain que ma collègue n'a pas pour idée d'instrumentaliser la souffrance des personnes qui souffrent de façon irrémédiable et dont on n'a jamais été capable d'alléger les souffrances pendant des décennies, sauf qu'elle reprend un argument que nous entendons souvent dans le débat et qui, à mon avis, est quelque chose de complètement à part.
    La question de l'accessibilité aux soins de première ligne en santé mentale n'a rien à voir avec la décision que nous aurons à prendre d'élargir ou non l'aide médicale à mourir, puisque, en lien avec la question de l'accessibilité aux soins, ces gens ne seraient pas admissibles, selon les critères et les balises du rapport des experts.
    Je veux bien que l'on revendique de meilleurs soins, je suis absolument d'accord, mais il s'agit d'un autre débat. Par contre, il y a des gens qui sont pris en charge depuis des décennies et qui souffrent, et à qui on dit de continuer à souffrir pendant trois ans.
    Madame la Présidente, je pense que l'accessibilité aux soins est vraiment une question clé. Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas acceptable d'avoir un continuum de souffrances.
    Je ne suis pas contre l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes qui sont affectées par la souffrance d'une maladie et qui démontrent que leur souffrance est réelle. Nous devons agir. Cependant, nous n'avons pas à agir immédiatement, le 17 mars.

[Traduction]

    Madame la Présidente, la députée peut-elle nous en dire un peu plus sur la décision de recourir à l'attribution de temps? Pourquoi est-il important que nous adoptions ce projet de loi? Quelles seront les répercussions sur nos concitoyens si nous ne le faisons pas?
    Madame la Présidente, ce n'est pas un choix facile. J'étais à la Chambre lorsque le gouvernement Harper a commencé à utiliser l'attribution de temps pour tous les projets de loi. À l'époque, les libéraux étaient contre cette pratique, tout comme moi. Les choses changent. Quiconque a critiqué les moyens employés par un gouvernement trouve, une fois qu'il lui succède au pouvoir, que ce sont des leviers efficaces pour faire avancer les choses; c'est la loi du plus fort. Cependant, ce moyen est inacceptable et il le sera toujours, qu'il soit employé par les conservateurs ou par les libéraux.
    Nous sommes actuellement acculés au mur. Nous n'avons pas le choix. Nous sommes des adultes responsables. Nous devons adopter ce projet de loi afin d'éviter que des circonstances qu'aucun d'entre nous n'appuierait ne deviennent une réalité par défaut.
    Madame la Présidente, les décisions prises ici ont une incidence directe sur la vie des Canadiens, d'autant plus lorsqu’il s’agit d’une question de vie ou de mort, et c’est exactement le cas avec ce projet de loi. En tant que députés, nous avons le devoir de servir au mieux les intérêts des Canadiens, y compris en protégeant les membres les plus vulnérables de la société.
    Je précise que je partagerai mon temps de parole avec le député de Portage—Lisgar.
    Le fait d’inclure la maladie mentale dans les motifs pouvant justifier le recours à l’aide médicale à mourir est un acte dangereux et, pour tout dire, irresponsable. En effet, en autorisant cela, nous entraînerons inévitablement la mort de Canadiens qui auraient pu se rétablir. Je ne veux pas dire qu'il faut abandonner les personnes souffrant de maladie mentale à leur triste sort. Le rétablissement est possible, alors nous ne devons pas abandonner ces personnes et leurs proches. Les Canadiens souffrant d’une maladie mentale ont besoin d’être soutenus et traités; ils le méritent. Ils peuvent avoir l’impression que leur situation est désespérée, mais l’antidote, c'est l’espoir, pas la mort. Ils méritent un gouvernement et un système de santé empreints de compassion qui répondent à leurs besoins. Pour remédier aux lacunes ou aux insuffisances éventuelles du système de santé, nous devons en priorité travailler avec nos partenaires provinciaux. Voilà quelle devrait être la priorité, et non l'élargissement du régime d’aide médicale à mourir.
     Les experts et les intervenants en santé mentale l'ont dit haut et fort au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir: l’élargissement prévu de l'aide médical à mourir est dangereux. Le gouvernement libéral actuel a déjà dû présenter un projet de loi à la dernière minute pour retarder d’un an cet élargissement par rapport à la date qu’il avait arbitrairement fixée. Pourtant, nous nous retrouvons aujourd’hui étrangement dans la même situation que l’an dernier. Dans cette redite, le projet de loi C‑62 ne retarderait que temporairement l’élargissement de l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale. Les risques et les dangers qui existent aujourd’hui seront toujours présents dans trois ans. Cependant, le gouvernement libéral a l’élargissement dans sa mire.
     C'est vraiment effrayant de constater que, malgré le manque évident de mesures de sauvegarde pour protéger les personnes vulnérables, le gouvernement libéral entend élargir encore l’accès l'aide médicale à mourir. L’approche insouciante des libéraux était déjà évidente lorsque le gouvernement libéral a décidé de ne pas interjeter appel de l’arrêt Truchon pour plutôt présenter un projet de loi qui allait beaucoup plus loin que ce que le tribunal y avait exigé.
    Le gouvernement libéral actuel a montré à de multiples reprises sa volonté d’offrir l'aide médicale à mourir à des Canadiens de plus en plus nombreux, sans donner la priorité au soutien ou aux traitements. C'est toujours le cas pour les personnes en fin de vie. Pourtant, grâce à la gestion de la douleur et au soutien psychologique, émotionnel et pratique, les soins palliatifs soulagent la douleur, le stress et les symptômes d’une maladie grave. C'est prouvé: les soins palliatifs améliorent la qualité de vie non seulement du patient, mais aussi de sa famille. Or, l’accès à tout cela n’est pas universel au Canada.
     Le propre rapport du gouvernement sur l’état des soins palliatifs au Canada, publié en décembre dernier, le confirme d'ailleurs. Lorsque l'aide médicale à mourir est plus accessible que les soins palliatifs, les mesures de sauvegarde ne suffisent pas à protéger les Canadiens vulnérables. Lorsque les Canadiens souffrant d’une maladie grave n’ont pas accès à des soins appropriés, ils peuvent être accablés par le désespoir. Laisser à quelqu'un l'impression de n'avoir qu'une seule option ne cadre pas avec la notion d'autonomie personnelle.
     Lorsque le gouvernement libéral actuel a supprimé la disposition relative à la « mort raisonnablement prévisible » du cadre de l’aide médicale à mourir, il a ouvert la porte aux personnes handicapées qui ne sont pas en fin de vie. Les défenseurs des personnes handicapées ont tiré la sonnette d'alarme à la suite de cette décision, et les articles de presse parus ces dernières années ont souligné les risques et le danger de cette décision. Les reportages montrant que c'est la pauvreté, et non la douleur, qui pousse des Canadiens handicapés à envisager l'aide médicale à mourir sont vraiment déchirants.
     Pour les personnes handicapées, les pressions liées à la crise du coût de la vie sont encore plus fortes. Leurs frais de subsistance de base sont généralement beaucoup plus élevés. Avec l'augmentation générale des prix, il leur coûte encore plus cher de vivre. Il est donc inacceptable que des personnes handicapées se tournent vers l’aide médicale à mourir à cause de leur situation financière.
(1310)
     Les dépenses et les taxes inflationnistes de ce gouvernement néo-démocrate—libéral aggravent la crise de l'abordabilité dans ce pays, et ce qui est encore plus honteux, c'est que, malgré les souffrances qu'elle cause aux Canadiens, cette coalition coûteuse n'a pas corrigé le tir. Elle a continué à mal gérer l'argent des contribuables. Elle a l'intention de quadrupler la taxe sur le carbone, ce qui augmente le coût de presque tout.
     N'oublions pas que pas une seule prestation d'invalidité n'a été versée à ceux qui en ont besoin et qui la réclament. Le projet de loi C‑22 a été adopté assez rapidement au Parlement, mais les personnes qui ont désespérément besoin d'une aide financière attendent toujours.
     La crise de l'abordabilité continue de s'aggraver dans tout le pays, ce qui place les personnes handicapées dans une position encore plus vulnérable. L'aide médicale à mourir ne devrait pas être plus facilement accessible aux personnes handicapées que le soutien ou les aménagements dont elles ont besoin pour mener une vie pleine, saine et digne.
    Il a souvent été rapporté que des Canadiens se voient proposer l'aide médicale à mourir sans l'avoir demandée au préalable, ce qui est très inquiétant. Cela laisse entendre que des mesures de sauvegarde n'ont pas été mises en place pour éviter que les personnes vulnérables subissent des pressions pour demander l'aide médicale à mourir ou soient forcées de le faire. Personne ne devrait avoir l'impression que le système de santé, l'infrastructure censée fournir des soins et un soutien, n'accorde aucune valeur à sa vie.
     Le cadre actuel de l’aide médicale à mourir et sa capacité de protéger les personnes les plus vulnérables de nos collectivités suscitent de graves préoccupations. Le gouvernement libéral ne répond pas à ces préoccupations qui devraient, en fait, être en tête de ses priorités dans un dossier comme celui de l’aide médicale à mourir. Puisque les risques et les préoccupations liés au cadre actuel sont amplement justifiés, il est impératif que nous prêtions une oreille attentive aux mises en garde claires contre l’élargissement de cette pratique.
     Des experts ont dit qu’il était impossible de prédire de façon légitime le caractère irrémédiable de la maladie mentale. Cela veut dire qu’il est possible que des personnes souffrant uniquement d’une maladie mentale se rétablissent et voient leur état s’améliorer. Leur état de santé mentale n’est pas irrémédiable ou sans espoir. Si l’aide médicale à mourir est offerte à des personnes souffrant uniquement de maladie mentale, il est inévitable que des Canadiens vulnérables mourront alors que leur état aurait pu s’améliorer.
     De plus, des experts ont clairement indiqué combien il était difficile pour des cliniciens de faire la distinction entre une demande d’aide médicale à mourir rationnelle et une demande motivée par des pensées suicidaires. La prévalence des idées suicidaires et des tentatives de suicide est déjà très forte chez les personnes atteintes de maladie mentale. Le fait d’étendre l’accès à l’aide médicale à mourir à ce groupe de personnes va à l’encontre des efforts de prévention du suicide. La vie de chaque personne a une valeur et une finalité. Il est inacceptable que le gouvernement adopte des politiques qui dévalorisent la vie d’une personne, et l’intention du gouvernement libéral d’élargir l’accès à l’aide médicale à mourir ne respecte pas les personnes atteintes de maladie mentale au Canada.
     Qu’il ait lieu en mars de cette année ou dans trois ans, l’élargissement de l’aide médicale à mourir continuera d’être une option dangereuse et imprudente. L’élargissement reporté de l’aide médicale à mourir finira par desservir les Canadiens vulnérables. Le projet de loi C‑62 ne va pas assez loin pour protéger les personnes atteintes d’une maladie mentale. Le premier ministre doit immédiatement et de façon permanente renoncer à l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale. Nous ne pouvons pas abandonner les personnes qui souffrent. Nous devons les soutenir et les traiter, pas leur donner la mort.
     Les conservateurs pleins de gros bon sens savent que des personnes atteintes de maladie mentale peuvent se rétablir. Nous n’appuyons pas les politiques qui abandonnent les gens dans leur état le plus vulnérable. La mort n’est pas un traitement contre la souffrance. Nous serons à leurs côtés et aux côtés de leurs proches. Lorsqu’il s’agit d’aide médicale à mourir, nous devons, d’abord et avant tout, nous battre pour protéger les plus vulnérables parce que, quand il est question de vie ou de mort, on ne peut pas se permettre la moindre erreur.
(1315)
    Madame la Présidente, j'ai écouté le discours de ma collègue et je me rends compte qu'il était fondé sur ses opinions personnelles et empreint d'égard à l'endroit des personnes vulnérables.
    Personnellement, j'ai fini par accepter que, indépendamment de mes sentiments, de mes croyances, de mes valeurs ou des choix que je ferais pour moi-même, compte tenu des mesures de sauvegarde mises en place au moyen de mesures législatives successives, les Canadiens ont le droit d'avoir ce choix. La députée ne pense-t-elle pas qu'ils y ont droit?
    Madame la Présidente, mon expérience de travailleuse sociale dans les hôpitaux auprès des patients qui sont en fin de vie et qui reçoivent des soins palliatifs m'a appris que ces moments difficiles représentent une occasion unique de réconciliation familiale. Retirer aux familles canadiennes l'occasion de se réconcilier serait honteux.
    On entend des histoires où des Canadiens se sont fait offrir l'aide médicale à mourir et ont été poussés à y recourir alors qu'ils n'avaient pas accès au soutien nécessaire, par exemple à des psychologues ou à des psychiatres, pour les aider. C'est tout à fait inacceptable.
(1320)

[Français]

    Madame la Présidente, cela fait plusieurs journées que nous débattons du projet de loi, plusieurs années même. Parfois, j'ai l'impression qu'on ne fait pas de mise à jour des informations dont on dispose pour être en mesure de mener un débat éclairé.
    Plus tôt, j'ai entendu des stéréotypes, des perceptions, des impressions qui n'ont pas leur place dans ce débat. J'aimerais savoir si mon honorable collègue sait qu'il n'est pas question de donner ou d'offrir l'aide médicale à mourir à quelqu'un qui est dans un état de détresse et qui aurait des idéations suicidaires. Elle en a beaucoup parlé dans son discours, mais cela n'arrivera pas.
    Je me demande si elle est au courant de cela et si elle a lu le rapport. A-t-elle vraiment effectué des recherches adéquates pour être en mesure de débattre de cette question de façon cohérente et rigoureuse intellectuellement?

[Traduction]

    Madame la Présidente, je veux simplement parler du cas de Kathrin Mentler, qui est âgée de 37 ans. Comme le décrit un article, elle:
souffre de dépression chronique et a des idées suicidaires, deux problèmes qui, selon elle, ont été exacerbés par un événement traumatisant survenu au début de l'année [...]
     Mme Mentler dit qu'une clinicienne lui a dit qu'il y aurait de longs délais d'attente pour voir un psychiatre et que le système de santé est « défaillant ». Ensuite, elle lui a posé une question choquante: « Avez-vous envisagé l'aide médicale à mourir? »
    Je vais écouter les Canadiens qui ont fait l'objet de coercition, dont on a dévalorisé la vie, à qui on a laissé entendre que personne ne voulait d'eux, et à qui on a proposé l'aide médicale à mourir. Cela arrive, et je suggère à tous les députés de faire des recherches sur tous les aspects de la question.
    Madame la Présidente, avant d'entendre le discours de la députée aujourd'hui, je ne savais pas qu'elle avait été travailleuse sociale avant de devenir députée. J'ai également travaillé dans le domaine de la santé mentale et de la toxicomanie avant de devenir députée.
    La députée peut-elle nous faire part de ses réflexions sur ce qui est au cœur de cette discussion, à savoir l’importance pour les membres les plus vulnérables de notre société d’avoir accès aux mesures de soutien dont ils ont besoin et qu’ils méritent? Peut-elle nous parler de l'importance des transferts en matière de santé mentale qui ont été promis lors de la dernière campagne électorale, ainsi que des mesures de soutien au logement et des mesures de soutien global? Que pense-t-elle de tout cela, maintenant qu'elle est députée?
    Madame la Présidente, je pense que la société est en train de dévaloriser les gens. Il est plus facile de suggérer l’aide médicale à mourir à quelqu'un que de prendre le temps de l’aider. Bien sûr, nous pouvons discuter des rôles des municipalités et des provinces dans ce domaine, ainsi que des mesures de soutien global. Cependant, l'essentiel est de traiter les êtres humains avec dignité, de les valoriser et de leur donner un coup de pouce, et non de leur dire que leur vie ne vaut pas la peine d'être vécue, que rien ne va plus et qu'il suffit de les faire venir à 14 heures le vendredi pour mettre fin à tout cela. C'est dégoûtant, et la société doit faire mieux.
    Madame la Présidente, avant d’aborder la question très importante dont nous sommes saisis, j’aimerais dire quelques mots sur la tragédie qui s’est produite dans le sud du Manitoba pendant le week-end et qui a causé la mort de deux jeunes femmes et de trois enfants. En tant que père, je ne saurais imaginer combien la perte d’un enfant doit être lourde à supporter pour les proches et les amis de ce dernier. C’est une tragédie qui aura un impact sur leur vie et sur l’ensemble de la communauté.
     Je pense à Carman et à la région environnante, aux amis, aux familles et aux proches des victimes de cette tragédie qui a des conséquences dévastatrices pour une petite collectivité comme celle-là, où tout le monde connaît son voisin et s'entraide. Je prie pour que chaque membre de cette collectivité puisse traverser avec courage cette période sombre et particulièrement difficile.
    Pour revenir à la question dont nous sommes saisis, nous sommes à un peu plus d’un mois de l’élargissement, par le gouvernement libéral, de l’accès à l’aide médicale à mourir aux personnes souffrant de maladie mentale. J’estime que c’est une décision inhumaine, irresponsable et immorale. Chaque vie est importante, et personnellement, je ne laisserai jamais tomber ceux qui ont besoin d’aide.
     Je n’ai jamais vu un gouvernement gérer aussi mal un dossier de cette importance, et, que cela plaise ou non à mes collègues libéraux, j’estime qu’ils vont avoir des comptes à rendre. Étant donné la gravité de la question, il y a beaucoup de questions qui n’ont toujours pas de réponse. Comment le premier ministre a-t-il pu laisser les choses en arriver là? Comment le gouvernement a-t-il pu être aussi irresponsable et aussi négligent?
     Dès le premier jour, les députés conservateurs ont lancé le signal d’alarme, mais personne ne les a écoutés, et aujourd’hui, nous devons agir dans l’urgence. C’est aberrant qu’il ait fallu une levée de boucliers de la part des professionnels de la santé pour que les libéraux reviennent sur leur décision. Tous les témoins qui ont comparu devant le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir nous ont mis en garde contre les dangers d’un tel plan.
     Pourquoi le premier ministre a-t-il accepté les amendements de dernière minute des sénateurs, qui modifiaient radicalement le cadre législatif de l’aide médicale à mourir? Il n’y a pas eu d’étude parlementaire. Il n’y a pas eu de consultations avec des experts ou des groupes concernés, et rien ne permettait d’affirmer que l’accès des personnes souffrant de maladie mentale à l’aide médicale à mourir pouvait se faire en toute sécurité et de façon appropriée. Lorsque le premier texte des libéraux, le projet de loi C-7, a été présenté aux députés, absolument aucune passerelle n’était prévue pour permettre aux personnes souffrant de maladies mentales d’avoir accès à l’aide médicale à mourir. En fait, le projet de loi excluait catégoriquement cette possibilité.
     Dans la proposition initiale d’amendement du Code criminel, il était précisé que « l'aide médicale à mourir n’est pas permise lorsque la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée ». Le ministre de la Justice de l’époque a déclaré que « les experts ne s’entendent pas sur la question de savoir si une personne dont la seule affection est une maladie mentale devrait être admissible à l'aide médicale à mourir, et si oui, comment la demande doit être traitée ». Le ministre a ensuite fait un virage à 180° et s’est fait le défenseur de cette orientation désastreuse. C’est à cause de ses actions et de l’approbation par le premier ministre des amendements du Sénat que nous en sommes là aujourd’hui.
     C’est la deuxième fois que les libéraux doivent retarder la mise en œuvre de leur mesure législative irresponsable. Il n’y aura jamais de consensus parmi les experts en santé mentale sur le fait que le gouvernement devrait élargir l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant d’une maladie mentale. Si les libéraux ne veulent pas m’écouter, je les implore d’écouter leur propre groupe d’experts sur l'aide médicale à mourir et la maladie mentale, qui a déclaré qu’il était improbable qu’on puisse déterminer si un trouble mental est incurable.
     Selon le rapport du groupe d’experts, « les connaissances sur le pronostic à long terme de nombreuses maladies sont limitées et il est difficile, voire impossible, pour les cliniciens de faire des prévisions précises sur l’avenir d’un patient donné ». Les chefs des départements de psychiatrie des 17 facultés de médecine ont repris ces propos et ont demandé aux libéraux d’empêcher la mise en œuvre du plan le 17 mars.
    Je suis tout à fait d'accord avec ces experts. Cela dit, il faudrait non seulement suspendre la mise en œuvre de cette disposition législative, il faudrait aussi l'abolir une fois pour toutes. Je tiens à être parfaitement clair. Au lieu de repousser la mise en œuvre, le gouvernement doit présenter un projet de loi pour que la disposition n'entre jamais en vigueur.
    Lorsque je me suis présenté pour devenir député, c'était un élément clé de mon programme électoral. Je me suis engagé à faire tout ce que je pouvais pour empêcher les libéraux de mettre en œuvre cette idée dangereuse, et la triste réalité, c'est que le premier ministre ...
(1325)
     Puis-je interrompre le député? Il y a beaucoup de bruit, et je ne sais pas s'il provient de personnes dans le couloir à l'extérieur. Je vais demander au sergent d'armes d'aller vérifier cela.
     Je sais que les gens sont en train d'arriver, mais il y a de plus en plus de bruit, et nous voulons nous assurer que tout le monde entend ce que le député a à dire.
     Le député de Portage—Lisgar a la parole.
    Madame la Présidente, comme je l’ai dit, la triste réalité, c’est que le premier ministre ne cherche qu’à retarder la mise en œuvre de la loi. Même la ministre libérale chargée de la santé mentale a déclaré la semaine dernière que, pour le gouvernement, la question n’était pas de savoir si la loi devait être mise en œuvre, mais quand. Ma réponse est: jamais. La loi ne doit en aucun cas être appliquée.
     Au lieu des libéraux, qui ne cessent de présenter des mesures législatives pour retarder cette terrible politique, il faudra un nouveau gouvernement conservateur pour résoudre la question une fois pour toutes.
     Je tiens à rappeler à tous les députés de la Chambre que nous aurions pu régler la question il n’y a pas si longtemps. Mon collègue conservateur, le député d’Abbotsford, a présenté un projet de loi d’initiative parlementaire qui aurait mis fin à cela une fois pour toutes. Ce projet de loi aurait permis de régler presque tous les aspects dont nous discutons aujourd’hui. Bien sûr, le premier ministre et presque tous les députés libéraux ont voté contre.
     Quant à mes collègues, qui ne semblent pas préoccupés par l’élargissement de l’aide médicale à mourir, je vais tenter de les faire changer d'avis. Il n’existe aucun moyen raisonnable d’établir un cadre juridique permettant de déterminer quelles maladies mentales sont incurables. Chaque personne est différente et chaque circonstance est unique. Des variables telles que la situation économique des personnes, leur réseau de soutien et leur lieu de résidence ont une incidence.
     Malheureusement, dans le Canada rural, l’accès aux services de santé mentale et de traitement de la toxicomanie est souvent très problématique. Si les gens ont la chance de vivre dans une collectivité qui offre l’accès à des services de santé mentale, ils risquent fort d’être confrontés à une longue attente. Si les gens prennent la décision très difficile de chercher de l’aide, je suis gêné de dire que cela peut prendre des jours, voire des semaines, avant qu’ils n’obtiennent cette aide.
     Il est compréhensible que des personnes atteintes d’une maladie mentale, qui ont perdu tout espoir, puissent penser ainsi parce qu’elles n’ont pas accès aux soins et au soutien dont elles ont besoin. Nous connaissons tous quelqu’un de notre entourage qui a éprouvé des difficultés. Nous savons également que cela ne définit pas la personne. Grâce au recul progressif de la stigmatisation, de plus en plus de personnes cherchent enfin l’aide dont elles ont besoin.
     L’autre bonne nouvelle, c’est que la recherche et les avancées dans le domaine de la santé mentale ont permis d’améliorer beaucoup le traitement des personnes atteintes d’une maladie mentale. Il faut parfois des années de traitement, voire toute une vie, mais avec le soutien et l’aide appropriés, les gens peuvent reprendre leur vie en main. Je le souligne parce que, conformément à la loi, une personne doit souffrir d’une affection grave et incurable pour être admissible à l’AMM.
     En ce qui concerne la première partie, il ne fait aucun doute que les personnes atteintes d’une maladie mentale sont parfois dans un état grave. Si elles ne reçoivent pas l’aide dont elles ont besoin, la situation peut rapidement devenir incontrôlable. Pour ce qui est de la deuxième partie, il n’est pas étonnant que des gens pensent que leur maladie mentale est incurable. S'ils n’ont pas accès à du soutien, à des services et à des traitements en santé mentale, ils doivent avoir l’impression que leur état ne s’améliorera jamais.
     Les libéraux adorent parler de compassion. Je vais donc en profiter, en conclusion, pour dire à la Chambre ce que la compassion nous commande de faire.
     Premièrement, nous devons suspendre de façon permanente, et non pas retarder, l’aide médicale à mourir pour ceux dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale.
     Deuxièmement, nous devons améliorer les services pour les personnes les plus vulnérables de la société. Malheureusement, le gouvernement libéral n'a pas encore tenu sa promesse électorale de mettre en œuvre un transfert aux provinces pour la santé mentale. Au lieu d'améliorer l'accès aux services de santé mentale, tout ce que les gens entendent, c'est que le gouvernement leur facilite l'accès à la mort.
     Enfin, les libéraux doivent comprendre qu'il y a une crise du coût de la vie. Bien trop souvent, nous les avons vus faire fi des besoins des Canadiens en difficulté. Il y a même eu des cas où des personnes se sont manifestées pour dire que l’aide médicale à mourir était la seule option qui leur restait parce qu'elles n'avaient plus les moyens de vivre.
     À St. Catharines, un homme a déclaré qu'il voulait entamer le processus de demande d’aide médicale à mourir, non pas parce qu'il veut mourir, mais parce qu'il ne peut pas compter sur les mesures d’aide sociale et qu'il craint de ne pas avoir d'autre choix. La directrice générale de la banque alimentaire de Mississauga a déclaré que des personnes viennent dans son établissement pour demander non pas de la nourriture, mais de l'aide pour mettre fin à leurs jours, non pas parce qu'elles sont malades, mais parce qu'elles n'ont pas les moyens de se nourrir.
     Je continuerai fièrement à me battre pour les plus vulnérables de notre société et pour faire triompher le bon sens. Aujourd'hui, cela signifie que nous demandons la suspension de l’aide médicale à mourir pour les personnes atteintes d'une maladie mentale.
(1330)
    Madame la Présidente, j’ai écouté le discours de mon collègue, comme je l’ai fait avec l’intervenante précédente. Je suis intriguée, parce qu’on semble introduire une idéologie partisane dans cette discussion, ce qui n’a pas lieu d'être. En fait, cela a été complètement réfuté par un intervenant conservateur précédent, le député de Louis‑Saint‑Laurent, que j’aime beaucoup.
     Je vais poser à mon collègue la même question que j’ai posée aux autres. Quelles que soient nos croyances et nos valeurs personnelles et à quel point nous n’aimons pas l’idée de l’aide médicale à mourir, ne pouvons-nous pas accorder aux autres Canadiens les mêmes droits, les mêmes choix? Ne pouvons-nous pas, en fait, leur accorder la même aide pour se prendre en main grâce à ces choix? Ne pouvons-nous pas leur donner le même choix?
    Madame la Présidente, je crois les histoires de gens qui ont tellement de mal à joindre les deux bouts que cela les incite même à envisager cette possibilité. Le fait que nous envisagions de leur offrir cette option au lieu d’un traitement, au lieu de leur fournir les services dont ils ont besoin, est fort décevant.
     Pour répondre à la deuxième partie de votre question, cela a commencé par l’aide médicale à mourir. Une décision de la Cour suprême a forcé le Parlement à établir un cadre. Nous semblons être passés à l’aide médicale au suicide. Personnellement, je veux me battre pour ceux qui font face à de véritables difficultés et leur donner l’espoir dont ils ont besoin pour continuer à vivre et à améliorer leur qualité de vie, et non pour mettre fin à leurs jours.
(1335)
    Je tiens à rappeler au député qu’il doit adresser toutes ses questions et observations à la présidence, et non pas directement à ses collègues.

[Français]

    L'honorable député de Lac‑Saint‑Jean a la parole.
    Madame la Présidente, j’invite mes collègues du Parti conservateur, ainsi que ceux qui viennent du caucus québécois du Parti conservateur, à s’inspirer de ce qui s’est fait au Québec lorsqu’il y a eu le débat sur l’aide médicale à mourir. On l’a fait de façon transpartisane et calme. On a regardé les informations et on a fait parler la science.
    Dans son discours, mon collègue insinue que des gens, au Québec et au Canada, pourraient obtenir l’aide médicale à mourir parce qu’ils ont faim ou plutôt parce qu’ils n’arrivent pas à payer leurs factures du mois. Malheureusement, c’est de la démagogie. C’est utiliser de fausses informations, c’est-à-dire des informations erronées, pour induire les Canadiens et les Québécois en erreur, peut-être sous l’égide d’une droite religieuse qui contrôle, j’en ai bien l’impression, le caucus conservateur.
    Je demande tout simplement à mon collègue s’il a parlé à ses collègues du Québec, à l’intérieur même de son caucus, pour savoir exactement quel est le consensus du Québec concernant l’aide médicale à mourir.

[Traduction]

    Madame la Présidente, ce qu’il faut retenir ici, c’est que nous sommes préoccupés, depuis un certain temps d'ailleurs, par le cadre, les restrictions et les conséquences possibles de cette pente glissante. Il s’agit d'établir un cadre solide pour veiller à ce qu’on ne puisse pas abuser de la vulnérabilité de ces personnes et à ce qu'on évite que le système soit utilisé de façon malheureuse.
     Nous sommes au Parlement du Canada. Nous parlons du Code criminel fédéral qui touche toutes les provinces. Quand les provinces disent qu’elles ne sont pas prêtes à mettre en œuvre un tel système ou encore quand un si grand nombre d’intervenants disent s'opposer à cette mesure, je vais écouter les gens de partout au pays, peu importe la province d’où ils viennent.
    Madame la Présidente, là encore, bien que je sois cette fois-ci d’accord avec les conservateurs pour dire que l'inclusion des troubles mentaux comme seul problème de santé sous-jacent rendant admissible à l’aide médicale à mourir pose un grave problème et ne devrait pas se concrétiser, je ne comprends pas que les conservateurs n’appuient pas l’adoption rapide du projet de loi que nous avons devant nous, car nous sommes confrontés à une disposition de caducité qui entrera en vigueur si nous n’agissons pas.
    Madame la Présidente, je suis d’accord avec cet argument. Je ne peux pas croire que nous en soyons arrivés là. Nous avons entendu pendant des mois et des années des témoignages sur les problèmes que poserait cet amendement du Sénat que le gouvernement a jugé bon d'accepter. Pour une raison ou une autre, le gouvernement libéral a décidé de tergiverser jusqu’à ce que nous devions adopter une mesure législative d’urgence, à quelques jours de l’entrée en vigueur de cette disposition. La responsabilité en incombe entièrement au gouvernement libéral.
    Madame la Présidente, je ne suis pas certain que le député a vraiment compris la question qui vient de lui être posée. Elle met en évidence un problème majeur au sein du Parti conservateur. Les conservateurs ont dit qu’ils ne l’appuyaient pas, mais ils n’ont pas voté en faveur de la motion qui, en fin de compte, garantira l’adoption du projet de loi C‑62.
     Quelle est l’essence du projet de loi C‑62? Il prévoit un délai de trois ans, de sorte que les préoccupations du député n’entrent pas en vigueur le 17 mars de cette année. Si ce projet de loi n’est pas adopté, ce dont les conservateurs se plaignent deviendra réalité. On pourrait penser qu’ils le savent. Je peux comprendre qu’en écoutant la discussion, une majorité de députés soit du même avis que le député d’en face. S’ils soutiennent ce qu’ils disent, ils devraient soutenir le projet de loi C‑62. S’ils ne votent pas en faveur du projet de loi C‑62 et que celui-ci n’est pas adopté, il n’y aura pas de report de trois ans.
     Je suis très déçu de la manière dont cet enjeu est débattu. L’enjeu est très sérieux. Je rappelle aux députés que nous avons ce débat aujourd’hui en raison d'un arrêt de 2015 de la Cour suprême du Canada, arrêt auquel le premier ministre de l’époque, Stephen Harper, n’a pas donné suite. C’était au début de l’année 2015.
     Après les élections générales de 2015, quand nous avons pris le pouvoir en novembre 2015, l’une des premières choses que nous avons faites a été d’examiner le programme législatif. Nous avons fait des choses positives, mais nous avons notamment dû composer avec l’arrêt de la Cour suprême du Canada, dont les conservateurs ont sciemment fait fi. Nous devions donc présenter un projet de loi sur l'aide médicale à mourir. Ce n’était pas une option.
     Est-ce qu’un député du Parti conservateur se lèverait aujourd’hui pour dire qu’il y avait une véritable option, que nous n’étions pas obligés de respecter la Charte des droits, de respecter les droits qui sont garantis aux Canadiens partout au pays?
     Si l’on réfléchit aux débats qui ont eu lieu à l’époque, c’est tout le contraire de ce dont nous sommes témoins aujourd’hui. À l’époque...
(1340)
    Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Comme la clôture a été imposée, le député a parlé pendant 70 minutes. Il accapare du temps. Il empêche d'autres députés de s'exprimer et se livre plutôt à des manœuvres politiques sur une question qui est littéralement une question de vie ou de mort. Il devrait avoir honte.
     Ce n'est pas un rappel au Règlement. Je demande aux députés de s'assurer qu'il s'agit bel et bien d'un recours au Règlement avant d'invoquer le Règlement.
     Le député ne parle que depuis quatre minutes. Il lui reste 16 minutes et les députés auront 10 minutes pour les questions et observations. Je demande aux députés d'attendre pour poser leurs questions et faire leurs observations.
     Le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre a la parole.
    Madame la Présidente, les députés conservateurs n’aiment peut-être pas mes propos, mais c’est la vérité, et parfois, la vérité fait mal. Si nous nous reportions aux premiers débats en mai, nous constaterions que beaucoup plus de compassion était exprimée sur le parquet de la Chambre des communes, de tous les côtés. Les députés libéraux, conservateurs, néo-démocrates et autres ont montré très clairement à quel point ce que devait faire le Parlement était difficile afin de respecter la décision de la Cour suprême du Canada concernant l'aide médicale à mourir. Aujourd’hui, dans ce débat, nous avons vu le chef du Parti conservateur faire un rappel au Règlement sur un sujet qui n’a rien à voir avec le débat, pour tenter de déposer un document. Pourquoi a-t-il agi ainsi? Il ne pouvait tout simplement pas attendre la période des questions, je suppose, qui commence après les déclarations de députés, qui elles, débutent dans 15 ou 20 minutes.
     Nous devrions être attentifs aux thèmes que les conservateurs ont abordés dans leurs interventions. Certains conservateurs, les deux ou trois derniers en particulier, se sont levés et ont donné la fausse impression que le projet de loi équivaudrait à un suicide sur demande. La députée de Battlefords—Lloydminster a déclaré qu’aujourd’hui, une personne déprimée en raison de problèmes de santé mentale pourrait se rendre chez un médecin et prendre rendez-vous pour se suicider vendredi, avec l’aide du gouvernement. Les députés conservateurs propagent de la mésinformation sur un sujet aussi délicat. Ce sont des situations très difficiles avec lesquelles des Canadiens doivent composer tous les jours.
     Hier, le député de Cumberland-Colchester a parlé de 12 000 ou 13 000 personnes tuées avec beaucoup de désinvolture, laissant entendre que la loi permet simplement de tuer des gens. De mon point de vue, la décision d’obtenir l’AMM n’est pas facile; elle est très difficile à prendre. Les membres de la famille et les personnes concernées vivent des moments très difficiles dans une situation bien concrète. Hier et aujourd’hui, les conservateurs se moquent pratiquement de tout cela et propagent de la mésinformation sur un enjeu aussi important. Qu’est-il advenu de la compassion de 2015, 2016 et même 2017? À l’époque, il semblait y avoir un sentiment dans cette enceinte que, oui, il y aura parfois des désaccords si les députés sont profondément touchés par un enjeu, comme il se doit, mais il y avait aussi un esprit beaucoup plus fort de coopération lorsque les députés racontaient ce que leurs concitoyens avaient vécu.
    Le député de Portage—Lisgar a dit que les gens recourent aux banques alimentaires et songent au suicide à cause du coût de la vie. Un certain nombre de qualificatifs me viennent à l'esprit au sujet de la façon dont les députés d'en face font ce genre de déclarations stupides. Franchement, je pense que ces déclarations sont stupides et qu'elles ne contribuent pas de façon positive au débat sur une question très importante que la Chambre doit aborder, ce que ferait une discussion sur les mesures d'aide et les services.
(1345)
     Lors des débats de 2015-2016, nous avons beaucoup entendu parler d’enjeux tels que les soins palliatifs. Nous voulions nous assurer que les dispositions législatives relatives à l’aide médicale à mourir ne seraient en aucun cas invoquées comme résultat direct de l’absence de services et de systèmes appropriés pour fournir des garanties à ces personnes qui se sentaient contraintes de demander l’aide médicale à mourir. C’est le genre d’éléments qui, à mon avis, ont pris une grande importance à l’époque.
     Aujourd’hui en revanche, les conservateurs diront: « Qu’en est-il des 4,5 milliards de dollars que le Parti libéral s’est engagé à verser? » Les députés ont raison de dire que le gouvernement avait pris un engagement appréciable à l'égard de la santé mentale, soit celui de verser plusieurs milliards de dollars sur cinq ans. C’est l’une des raisons pour lesquelles les accords sur les soins de santé que nous avons mis en place, dont on a fait grand cas l’an dernier, et qui s’élèvent à un peu moins de 200 milliards de dollars sur 10 ans, visent à financer des soins de santé non seulement aujourd’hui, mais pour les générations futures qui bénéficieront de ce type d’investissement. De plus, le ministre de la Santé collabore avec les provinces pour conclure des accords dans des domaines comme les services en matière de santé mentale. Nous reconnaissons à quel point il est important de veiller à ce que ces services soient financés.
     Contrairement à un certain nombre de députés du Parti conservateur, et je ne veux pas les étiqueter tous, du moins pas à ce stade, le gouvernement a continué à travailler avec les provinces, en particulier, et avec d’autres parties prenantes dans différents forums pour garantir que les personnes qui obtiennent l’aide médicale à mourir sont, en fait, informées de manière très concrète des catégories de services disponibles. Il ne s’agit en aucun cas de dire simplement: « Voici ce que je veux et je l’obtiendrai », puis de l'obtenir deux jours plus tard. Nous pouvons observer l’attention et le débat publics accordés à des enjeux tels que les soins palliatifs depuis l’instauration de l’aide médicale à mourir, soins qui ont été grandement améliorés, à mon avis.
     J’aimerais croire que les provinces, qui sont responsables en dernière analyse de l’administration publique des services de soins de santé, ont pris des notes et compris qu’elles ont aussi une responsabilité, car ce sont elles qui offrent les services que les Canadiens attendent. Le gouvernement fédéral l’a reconnu en soutenant des mesures telles que l’encouragement des normes en matière de soins de longue durée et en fournissant des fonds substantiels pour veiller à ce que les provinces soient mieux à même de répondre à la demande de soins de santé. En ce qui concerne ce que j’ai dit plus tôt à propos de la santé mentale, nous continuons à honorer les engagements sérieux que nous avons pris et nous travaillons à les réaliser avec les provinces et les territoires.
(1350)
    Comme je l'ai dit hier, je fais confiance aux professionnels de la santé, aux travailleurs sociaux et aux autres personnes qui possèdent l'expertise nécessaire et je fais confiance aux gens qui pensent que l'aide médicale à mourir pourrait être la voie à suivre pour eux. Des efforts considérables sont déployés dans chaque situation, et j'ai confiance dans le système.
     Les députés pourront me corriger si je me trompe, mais je ne me souviens pas d’une province ou d’un premier ministre au Canada qui ait clairement déclaré que l’aide médicale à mourir ne fonctionnait pas. Les provinces demandent un report de trois ans pour un aspect de l’aide médicale à mourir, soit lorsque la santé mentale est la seule raison de la demande. La question d'autoriser la maladie mentale comme unique condition médicale sous-jacente a été ajoutée à la mesure législative initiale sur l’aide médicale à mourir, puis introduite sous forme de projet de loi, ce qui a permis aux provinces et aux autres administrations de disposer d’un délai pour prendre les dispositions nécessaires afin d'offrir des services aux Canadiens.
     Nous avons ensuite constaté que les provinces avaient besoin de plus de temps. Un certain nombre de gouvernements provinciaux n’ont pas dit qu’il fallait se débarrasser de l’aide médicale à mourir, mais plutôt qu’ils avaient besoin de plus de temps pour mettre en œuvre cet aspect de la loi. C’est essentiellement la raison pour laquelle nous sommes saisis de ce projet de loi aujourd’hui.
     Cependant, si on écoute les députés du Parti conservateur, on constate qu’ils ne laissent nullement entendre qu'ils appuieront le projet de loi C-62. Il sera intéressant de voir comment ils voteront. Logiquement, je croirais qu’ils voteraient en faveur du projet de loi. S’ils votent contre le projet de loi C-62 et que, pour une quelconque raison, le projet de loi n’est pas adopté, le critère selon lequel la maladie mentale peut être l’unique condition médicale sous-jacente entrera en vigueur le 17 mars prochain. Par conséquent, il est important que les députés, quel que soit leur position, votent pour le projet de loi parce qu’il répond directement à ce que demandent au gouvernement du Canada nos partenaires, qui sont, en dernière analyse, responsables de l'application de la loi.
     Les députés d’en face essaient souvent de dire qu’il revient au gouvernement de décider. Il est important de souligner ce que j’ai mentionné au tout début: la raison pour laquelle nous avons aujourd’hui un projet de loi sur l’aide médicale à mourir est que, en 2015, dans l’arrêt Carter, la Cour suprême a essentiellement déclaré que nous devions l'instaurer. Nous n’avions pas le choix, si, bien sûr, nous respectons la Charte des droits et libertés. Je vais répéter ce que j’ai dit hier: il y a eu beaucoup de consultations, littéralement des centaines d’heures de réunions de toutes sortes, y compris des comités permanents, des débats à la Chambre, des réunions dans les circonscriptions, des sondages et des pétitions. Bien qu’il y ait eu toutes sortes de mécanismes pour apporter une contribution, en fin de compte, je pense que le projet de loi a atteint un seuil permettant de répondre en grande partie aux préoccupations de la Cour suprême du Canada et de respecter la Charte des droits.
(1355)
    Cela a été suivi d'une décision de la Cour d'appel du Québec qui nous a donné une nouvelle obligation d'améliorer la loi, et c'est exactement ce que nous avons fait.
    Nous continuons aujourd'hui à chercher des moyens d'améliorer la loi. Je pense qu'elle tient compte de la Charte canadienne des droits et libertés. Si les membres du caucus conservateur maintiennent qu'ils n'appuient pas la loi sur l'aide médicale à mourir, je me demande s'ils appuient réellement la Charte canadienne des droits et libertés.
    J'ajouterai que l'attitude générale du chef du Parti conservateur...
    Nous avons le temps pour une question de 15 secondes.
    Le député de Louis‑Saint‑Laurent a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, au cours du discours, on a entendu certaines choses qui méritent d'être corrigées.
    Tout à l'heure, le député mentionné que certains députés de ce côté-ci de la Chambre faisaient, semble-t-il, de la désinformation, ce qui est complètement faux. Je vais le prouver...
(1400)
    Nous n'avons plus de temps.
    Le député pourra reprendre sa question après la période prévue pour les questions orales.

Déclarations de députés

[Déclarations de députés]

[Traduction]

Les soins de santé

    Monsieur le Président, il y a deux semaines, la seule clinique offrant des avortements chirurgicaux au Nouveau-Brunswick a fermé ses portes. La Clinique 554 était le seul endroit de la région de la capitale offrant l’accès à l’intervention, ainsi que le seul endroit offrant des soins d’affirmation de genre.
     Les patientes qui cherchent à se faire avorter sont maintenant obligées de se rendre aux hôpitaux de Moncton ou de Bathurst. Ce n’est pas tout le monde qui a le temps ou les moyens de transport requis pour se déplacer d’un bout à l’autre de la province. Cette situation crée des obstacles disproportionnés qui empêchent les personnes les plus vulnérables de nos collectivités d’accéder aux soins essentiels dont elles ont besoin.
     Le droit au choix en matière de procréation est légalement protégé pour tous les Canadiens, mais le gouvernement du Nouveau-Brunswick refuse que les avortements en clinique soient couverts par l’assurance-maladie. La Clinique 554 était également l’un des rares endroits où les Néo-Brunswickois transgenres et de diverses identités de genre pouvaient avoir accès à l’information et aux soins de santé dont ils ont besoin. Ils n’ont plus nulle part où aller.
     C’est inacceptable, d’autant plus que Fredericton est l’une des collectivités où il y a la plus grande diversité de genres au Canada. Le premier ministre Higgs a fait preuve d’un mépris flagrant à l’égard des personnes transgenres et de diverses identités de genre du Nouveau-Brunswick, et il a maintenant réussi à éliminer leur lien vital avec les soins d’affirmation de genre. C’est inacceptable.
     Je demande au gouvernement provincial de prendre les mesures nécessaires pour protéger le choix en matière de procréation et pour veiller à ce que tous les Néo-Brunswickois aient accès aux soins de santé dont ils ont besoin.

Le Parti libéral du Canada

    Monsieur le Président, le gouvernement néo-démocrate—libéral a abandonné les Canadiens des régions rurales et du Nord de l'Ontario. Les gens travaillants de Thunder Bay à Kapuskasing en passant par North Bay, Sudbury et Sault Ste. Marie souhaitent devenir propriétaires. Ils souhaitent jouir de la dignité qu'apportent des emplois bien rémunérés et des aliments et de l'essence abordables, mais après huit ans sous la direction du premier ministre, ils comprennent que celui-ci n'en vaut pas le coût et que les résultats sont pires que jamais.
    Le coût du logement a doublé, et la coalition NPD-Parti libéral a l'intention de quadrupler la taxe sur le carbone, qui s'applique à l'essence, aux aliments et au chauffage domestique. Le gouvernement s'en prend sans relâche aux chasseurs et aux tireurs sportifs de Timmins au lieu de cibler les trafiquants d'armes et les gangsters de Toronto.
    Il y a de bonnes nouvelles, par contre. Les conservateurs pleins de gros bon sens vont abolir la taxe. Les conservateurs vont construire des logements et combattre la bureaucratie. Les conservateurs vont mettre fin aux déficits inflationnistes, faire baisser les taux d'intérêt et redresser le budget. Les conservateurs vont faire échec au crime en s'assurant que c'est l'incarcération, et non la libération sous caution, qui attend les criminels violents.
    Nettoyer le gâchis des libéraux et du NPD exigera beaucoup de travail, mais le nouveau gouvernement conservateur travaillera aussi fort que les bonnes gens du Nord de l'Ontario. Nous ramènerons le gros bon sens chez nous.

[Français]

Les femmes et l'égalité des genres

    Monsieur le Président, avec notre gouvernement, les femmes ont des choix, même plus de choix, et ça, c'est primordial. Grâce aux stratégies des libéraux, les femmes comme celles de ma circonscription, Hamilton Mountain, peuvent choisir d'agrandir leur famille parce qu'elles savent qu'elles ont droit à nos mesures de soutien comme le congé de maternité. Également, elles peuvent choisir de retourner au travail grâce à notre politique de prestation de garde d'enfant abordable.
    Avec les conservateurs, ces choix n'existeront plus. Ils veulent couper l'Allocation canadienne pour enfants; une aide qui a permis de sortir des centaines de milliers d'enfants de la pauvreté. Les conservateurs veulent aussi ouvrir le débat sur l'avortement et s'attaquer aux droits des personnes de genres divers. Dans chaque coin, ils veulent priver les femmes de leurs droits. De ce côté-ci, nous offrons aux femmes des choix.

L'agriculture et l'agroalimentaire

    Monsieur le Président, en cette journée de l'agriculture et de l'agroalimentaire, remercions chaleureusement leurs artisans. Nos producteurs se lèvent sept jours sur sept pour prendre soin des animaux ou travailler aux cultures. Les périodes de vacances sont rares et soigneusement choisies afin d'avoir le moins d'impact possible sur l'entreprise et afin de s'assurer que quelqu'un prend la relève à la ferme.
    Devant composer avec un manque de main-d'œuvre chronique, nos transformateurs gardent le fort. Malgré les normes exigeantes et la paperasse démesurée, ils continuent de fournir un produit de grande qualité. Alors que le fédéral refuse le délai pour le remboursement du compte d'urgence, nos producteurs sont forcés d'utiliser le soutien de Québec pour rembourser, ne se retrouvant finalement avec aucune aide. Au moment où nos transformateurs auraient besoin d'un coup de main pour moderniser leur entreprise, Ottawa est absent.
    Célébrons l'agriculture et l'agroalimentaire, mais donnons à ces gens des conditions leur permettant de vivre dignement de la fonction noble qu'ils remplissent chaque jour, nourrir notre monde.

[Traduction]

La santé mentale

    Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour parler de la santé mentale périnatale. La période périnatale commence à la conception et se termine un an après l'accouchement. Vingt pour cent des femmes souffriront de dépression au cours de cette période. Les enfants de mères souffrant de dépression périnatale présentent un risque accru d'anxiété, de dépression, de trouble d'hyperactivité avec déficit d'attention et d'autisme.

[Français]

    Plusieurs études longitudinales ont démontré qu'il y a une augmentation de 70 % des risques de dépression chez les adolescents et les adultes qui sont la progéniture de mères qui ont souffert de dépression périnatale. En 2022, plus de 5  millions de Canadiens âgés de 15 ans et plus répondaient au critère diagnostique d'un trouble de l'humeur, de l'anxiété ou de l'utilisation de substances. Imaginons à quel point ce nombre pourrait être diminué si nous assurions un accès rapide aux services de santé mentale périnatale.
(1405)

[Traduction]

    Je suis fière de faire partie d'un gouvernement qui s'est attaqué à la question en consacrant, l'année dernière, 857 000 $ pour l'élaboration de lignes directrices nationales relatives aux troubles de l'humeur périnataux. Je suis impatiente de voir ce que nous pouvons faire de plus.

Le Jour de l'agriculture canadienne

    Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui le Jour de l'agriculture canadienne. C'est l'occasion de saluer nos agriculteurs, éleveurs et producteurs. Le secteur agricole et agroalimentaire canadien joue un rôle crucial pour la prospérité économique du Canada, car il produit des aliments de qualité pour les familles du Canada et de partout dans le monde.
    Il importe également de noter que les agriculteurs canadiens établissent la norme mondiale en matière de durabilité et d'intendance environnementale. En fait, une tonne de blé canadien peut faire trois fois et demie le tour du monde avant d'avoir la même empreinte carbone que le blé cultivé en Europe. Voilà une réalisation formidable qui mérite d'être applaudie, et les agriculteurs canadiens devraient être récompensés pour leur sens de l'innovation. Au lieu de cela, le gouvernement les pénalise en leur imposant une augmentation de la taxe sur le carbone et une réglementation fondée sur le militantisme idéologique plutôt que sur des données scientifiques.
    Les conservateurs savent qu'il est plus important que jamais de défendre les familles agricoles canadiennes et de célébrer leurs réalisations. J'invite tout le monde à en apprendre davantage sur l'origine des aliments qu'ils consomment et à remercier les agriculteurs qui cultivent les aliments locaux de qualité que nous mangeons tous les jours. Je souhaite à tous un heureux Jour de l'agriculture canadienne.

[Français]

La Semaine de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive

    Monsieur le Président, à l'occasion de la Semaine de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive, il est important de se rappeler que dans les dernières années, dans de nombreux pays, les choix et le droit des femmes d'exercer leurs droits ont été menacés, de plus en plus réduits ou même anéantis.
    Se sentir en sécurité, libre de ses choix et donc épanouie devrait être une évidence. Or, en 2024, des femmes et des filles continuent de subir de la violence sexuelle ou autre, et elles sont jugées et découragées à dénoncer cette violence.
    Notre gouvernement continue de travailler d'arrache-pied tant au Canada que dans plusieurs autres pays pour l'égalité des genres, qui passe par le respect et la promotion des droits de la personne en matière de sexualité et de procréation.

[Traduction]

La Semaine de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive

    Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre pour souligner la Semaine de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive. Sous la direction du gouvernement libéral, les femmes ont maintenant plus de possibilités de tracer leur propre voie dans la vie.
    Nous avons amélioré l'accès aux services de planification familiale et à la contraception. Nous avons fait passer à 18 mois le congé parental, ce qui procure aux familles un soutien au revenu et une plus grande latitude. Nous avons mis en place un programme de garderies à 10 $ par jour, ce qui permet aux femmes de ne pas avoir à faire le choix difficile entre la carrière et la famille.
    Nous avons également augmenté le montant que les familles reçoivent au titre de l’Allocation canadienne pour enfants et nous l’avons indexé à l’inflation afin que les familles puissent être bien soutenues à l’avenir. Nous avons été à l’avant-garde de la défense de l’égalité des genres et des droits génésiques dans le monde entier, tandis que le Parti conservateur du Canada, lui, a passé les dernières années à présenter des projets de loi qui limiteraient les choix des femmes.
    Alors que nous soulignons cette semaine de sensibilisation, célébrons les progrès que nous avons réalisés, mais soyons vigilants et rappelons-nous qu'il ne faut pas baisser la garde, car ce qui se passe aux États‑Unis pourrait se produire ici aussi. Je promets à tous les Canadiens que nous ne laisserons pas cela se produire sur...
     Le député de Souris—Moose Mountain a la parole.

La taxe sur le carbone

    Monsieur le Président, les Canadiens en ont assez du gouvernement néo-démocrate—libéral qui, jour après jour, mène le pays à la faillite. Après huit années d’exercice irresponsable du pouvoir, le premier ministre, qui a gaspillé plus de 60 milliards de dollars sur son application ArnaqueCAN, demande maintenant aux Canadiens de lui donner encore plus de leur argent durement gagné en payant la taxe sur le carbone, qui devrait bondir de 23 % en avril prochain.
     Ce quadruplement de la taxe sur le carbone entraînera une augmentation du prix de tous les produits, des aliments au carburant en passant par le chauffage domestique, et les Canadiens en ont assez qu’on les abandonne à leur sort. En raison de la crise actuelle du coût de la vie, de nombreux Canadiens se demandent comment ils vont pouvoir mettre de la nourriture sur la table, d’autant plus qu’une famille moyenne de 4 personnes paiera 700 $ de plus pour l’épicerie en 2024 par rapport à l’an dernier. C’est simple: lorsque nous taxons l’agriculteur qui produit les aliments et le camionneur qui les transporte, nous taxons le Canadien qui les achète.
     Les libéraux doivent adopter le projet de loi C‑234 dans sa version originale et soutenir les agriculteurs et les familles qui méritent mieux qu’un premier ministre qui n’en vaut tout simplement pas le coût.
(1410)

Les services de garde

    Monsieur le Président, partout au pays, des femmes nous inspirent. Elles savent ce qui est le mieux pour elles et leur famille. C’est pourquoi, grâce à la politique libérale, les femmes de Brampton et de tout le Canada ont le choix d’élever une famille, de retourner au travail ou de lancer une entreprise en sachant qu’elles ont accès aux services de garde d'enfants abordables dont elles ont besoin.
     Il est essentiel que les parents aient accès à des garderies bien financées et accessibles. Cependant, des députés de l’autre côté de la Chambre ont qualifié le plan national de services de garde d’enfants de « caisse occulte », et ils sabreraient les investissements dans ces services, privant ainsi les femmes de ce choix et imposant un fardeau financier à l'ensemble des familles canadiennes.
     Les Canadiennes ne devraient pas avoir à choisir entre leur famille et leur carrière. Je suis fière des investissements réalisés par le gouvernement pour donner des options aux femmes. Continuons à faire tomber les barrières pour les femmes au Canada et dans le monde entier. Donner plus de pouvoir aux femmes, c'est donner plus de pouvoir à tout le monde.

Le Parti libéral du Canada

    Monsieur le Président, après huit années de gouvernement néo-démocrate—libéral, les Canadiens ont du mal à joindre les deux bouts. Pourtant, le premier ministre a trouvé plus de 60 millions de dollars pour son application ArnaqueCAN. Alors que l'inflation gruge les revenus et que les familles doivent réduire leurs dépenses en essence, en chauffage et en épicerie, le premier ministre veut augmenter la taxe sur le carbone de 23 % le 1er avril. Tout cela fait partie du plan libéral—néo-démocrate visant à quadrupler la taxe sur le dos des travailleurs canadiens.
    Dans ma circonscription, la légion de Lacombe a payé l'an dernier 2 000 $ de plus uniquement pour la taxe sur le carbone. Cet argent, qui aurait dû servir à améliorer la vie des anciens combattants et à honorer la mémoire des soldats tombés au combat, a plutôt été versé au gouvernement pour qu'il puisse payer ses amis pour l'application ArnaqueCAN. Il est temps d'admettre que le premier ministre n'en vaut tout simplement pas le coût. Les conservateurs aboliraient la taxe, construiraient des logements, redresseraient le budget et feraient échec au crime.

Le Parti libéral du Canada

    Monsieur le Président, hier, la vérificatrice générale a présenté son rapport sur le scandale ArnaqueCAN. Ce rapport accablant révèle que le premier ministre n'en vaut ni le coût ni la corruption. Cette application aurait dû coûter 80 000 $ aux contribuables, mais elle a fini par leur coûter 60 millions de dollars. Pire, 12 millions de dollars sont allés dans les poches de consultants libéraux qui n'ont même pas travaillé sur l'application. De plus, cette application a, sans justification, envoyé en quarantaine plus de 10 000 Canadiens. ArnaqueCAN sent la corruption à plein nez, une corruption qui remonte au sommet. Aujourd'hui, au comité de l'éthique, il a été confirmé qu'avec une autorisation, on peut même avoir accès à des courriels qui ont été supprimés afin de couvrir cette corruption.
    Il est temps d'obtenir des réponses. C'est pourquoi les conservateurs demandent à la GRC d'élargir son enquête dans l'affaire ArnaqueCAN afin que les personnes impliquées en subissent les conséquences. La question est maintenant la suivante: le premier ministre va-t-il obtempérer, ou est-il impliqué?

[Français]

La Semaine de sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive

     Monsieur le Président, en cette semaine de la sensibilisation à la santé sexuelle et reproductive, je tiens à sensibiliser les Canadiennes et les Canadiens à l'importance de considérer la santé sexuelle au même titre que les autres aspects de leur santé.
    Nous devons également continuer de défendre le droit des femmes à la planification familiale et reproductive. Comme mère, je peux confirmer que l'arrivée d'un enfant reste le plus beau miracle du monde. Chaque famille devrait toutefois pouvoir choisir le bon moment pour accueillir ce qu'elles auront de plus précieux, et nous souhaitons que chaque enfant puisse être accueilli dans une famille qui est prête à le chérir.
    Une santé sexuelle et reproductive saine passe aussi par une bonne éducation auprès de nos jeunes. La sensibilisation concernant les maladies transmises sexuellement, les grossesses non désirées et la notion de consentement est nécessaire pour que nous leur permettions d'être responsables et prudents.
    Je remercie les organismes qui travaillent à lutter contre la stigmatisation et la discrimination, qui entourent parfois la santé sexuelle et reproductive, et qui accompagnent celles et ceux qui en ont besoin.

[Traduction]

Le Jour de l'agriculture canadienne

    Monsieur le Président, les agriculteurs canadiens rencontrent des défis de taille: les marchés en constante évolution, la fluctuation du prix des produits de base, la hausse du taux d'endettement et les phénomènes météorologiques extrêmes causés par les changements climatiques. Malgré ces défis, les agriculteurs canadiens continuent de surmonter l'adversité et de faire preuve d'innovation en matière de production alimentaire, nous faisant entrer dans le XXIe siècle.
    Chose certaine, les agriculteurs n'aiment pas trop l'approche « Ottawa a toujours raison ». Nous, les néo-démocrates, voulons plutôt collaborer avec les agriculteurs pour renforcer leur résilience face aux changements climatiques et combattre la cupidité des entreprises qui fait grimper le coût des intrants à des niveaux insoutenables. Pour aider les agriculteurs, nous avons besoin d'un gouvernement qui est prêt à passer à l'action en établissant une stratégie pour une agriculture durable, une stratégie sur les intrants essentiels et un code de conduite obligatoire pour les épiceries.
    Nous célébrons aujourd'hui le Jour de l'agriculture canadienne. Au nom du caucus néo-démocrate, j'espère que nous prendrons tous un moment pour saluer les vaillants agriculteurs canadiens qui cultivent les aliments dont nous nous régalons et la contribution essentielle de l'agriculture à la prospérité et au bien-être de notre pays.
(1415)

[Français]

Le Tournoi international de hockey pee-wee de Québec

    Monsieur le Président, dans le monde du hockey, il existe un événement qui brille de mille feux, un tournoi où les jeunes talents s'élancent sur la glace avec des rêves plein les yeux: le Tournoi international de hockey pee-wee de Québec.
    Chaque année, cette compétition emblématique réunit des équipes venues des quatre coins du globe, offrant aux jeunes joueurs une occasion unique de se mesurer à l'élite mondiale de leur âge.
    Derrière chaque passe et chaque tir se cachent des héros discrets: les bénévoles, les parents, et les organisateurs. Leur dévouement inestimable est le moteur qui permet à ce tournoi de briller, année après année. Remercions-les de leur contribution inestimable.
    Je remercie également le comité organisateur et son directeur général, Patrick Dom, et je souhaite aux jeunes de s'amuser et de créer des liens d'amitié et des souvenirs intarissables.

[Traduction]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, l'application ArnaqueCAN du gouvernement néo-démocrate—libéral n'en vaut pas le coût ni la corruption. La vérificatrice générale a confirmé que ce qui aurait dû coûter 80 000 $ aux contribuables leur a coûté au moins 60 millions de dollars, dont 12 millions de dollars versés à des consultants bien branchés qui n'ont pas travaillé sur l'application.
     Le véritable coût final ne sera peut-être jamais connu, car la conservation des documents par le gouvernement était tellement mauvaise que la vérificatrice a affirmé qu'il était impossible de faire le total des coûts liés à ce projet futile. Qu'est-ce que ce gaspillage pharaonique de fonds publics a donné? Au moins 10 000 Canadiens ont été mis en quarantaine par erreur. L'application ArnaqueCAN du premier ministre n'en vaut pas le coût ni la corruption.
     Les conservateurs demandent à la GRC d'élargir son enquête à la lumière des révélations faites par la vérificatrice générale dans son rapport. Le premier ministre joindra-t-il sa voix à la nôtre pour le demander, ou est-ce que la coûteuse coalition continuera son camouflage dans cette affaire de corruption?

Le Jour de l'agriculture canadienne

    Monsieur le Président, en ce Jour de l'agriculture canadienne, nous sommes conscients, comme nous le sommes tous les jours, des précieuses contributions des agriculteurs et des familles agricoles ainsi que de la résilience du secteur agricole canadien, d'un océan à l'autre.
    Le gouvernement libéral est déterminé à soutenir les Canadiens travaillants qui nourrissent notre pays, qui renforcent nos collectivités rurales et qui sont le moteur de nos économies locales. Depuis 2015, nous effectuons des investissements essentiels pour aider les agriculteurs à s'adapter aux changements climatiques et à adopter des pratiques durables. Alors que les conservateurs avaient réduit l'enveloppe budgétaire de l'agriculture, nous l'avons augmentée de 25 %. Les programmes de gestion des risques sont plus attrayants et favorisent la résilience et l'innovation face aux problèmes environnementaux. En même temps, les exportations agricoles sont passées de 56 milliards de dollars à 92 milliards de dollars, ce qui met en évidence la réputation du Canada à titre de fournisseur mondial de confiance.

[Français]

    Aujourd’hui, j’invite mes collègues à célébrer les contributions de nos agriculteurs et de nos agricultrices et leur dévouement pour nourrir notre pays. Du producteur de patates à l’Île‑du‑Prince‑Édouard au producteur de bleuets en Colombie‑Britannique, nous leur disons merci.

Questions orales

[Questions orales]

[Français]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, le premier ministre et son application « ArnaqueCAN » n'en valent pas le coût ni la corruption. Après les révélations de la vérificatrice générale, hier, concernant la corruption et le gaspillage, j'ai écrit à la GRC pour demander d'élargir l'enquête criminelle sur le scandale « ArnaqueCAN »
    Le premier ministre a un historique de blocage d'enquêtes criminelles. Va-t-il permettre à la GRC d'enquêter sur lui et sur son scandale « ArnaqueCAN »?
    Monsieur le Président, la pandémie de la COVID‑19 est un événement qui se produit seulement une fois par génération, même une fois par siècle. Tout ce que nous avons fait et toutes les décisions que nous avons prises avaient pour but de protéger les Canadiens. Bien sûr, nous nous attendons tous à ce que les règles soient suivies par la fonction publique et par les autres. Nous nous attendons à ce que la GRC et les autorités fassent leur travail.
    Cependant, nous allons nous rappeler que c'est notre gouvernement qui se préoccupe de la sécurité à nos frontières. Le Parti conservateur continue de voter contre de l'aide pour l'Agence des services frontaliers du Canada, contre de l'aide pour assurer nos frontières.
(1420)
    Monsieur le Président, on ne protège pas la frontière avec de la corruption.
    Les révélations d'hier sont les suivantes: d'abord, l'entreprise qui en a profité a rédigé le contrat; ensuite, deux personnes dans le sous-sol d'une maison ont reçu 20 millions de dollars en contrat pour une application qui allait coûter 80 000 $. Enfin, on a aussi donné du whisky à des cadres du gouvernement libéral pour l'octroi de ces contrats.
    Est-ce que le premier ministre va respecter l'indépendance de l'enquête criminelle?
    Monsieur le Président, bien sûr, nous allons toujours encourager les autorités et leur permettre de faire leur travail, et elles vont le faire. Nous savons aussi que la fonction publique doit suivre certaines règles, et, si elles n'ont pas été suivies, il y aura des conséquences.
     Nous accueillons à bras ouverts le rapport de la vérificatrice générale. C'est important de nous assurer que nous sommes en train de gérer les investissements comme il le faut, même pendant un moment où nous investissions pour protéger les Canadiens de la pandémie du siècle. Nous devons nous assurer que toutes les règles ont été suivies.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le premier ministre et son ArnaqueCAN n’en valent ni le coût ni la corruption. Après les révélations de corruption, de gaspillage et de mauvaise gestion faites hier par la vérificatrice générale, j’ai demandé par écrit à la GRC d’élargir son enquête criminelle sur l’application ArnaqueCAN du premier ministre. Le premier ministre a déjà fait obstacle à des enquêtes criminelles. Il a essayé de protéger SNC‑Lavalin contre des poursuites. Il a empêché la GRC d’enquêter sur ses vacances illégales dans l’île d’un milliardaire. Évitera-t-il de se mêler de cette affaire ou essaiera-t-il encore une fois de contrecarrer l’enquête criminelle de la GRC sur ArnaqueCAN?
    Monsieur le Président, la pandémie de COVID‑19 était un événement tel qu’il ne s’en produit qu’un par génération, voire par siècle. Chacune des décisions que le gouvernement a prises alors visait à protéger la vie des Canadiens. Or, même dans une situation comme celle-là, il y a des règles à suivre et, comme tous les Canadiens, le gouvernement s’attend à ce que les fonctionnaires les suivent. Le gouvernement va, bien sûr, encourager la GRC à faire son travail. Cela dit, il n’est pas nécessaire que des personnalités politiques, pas même des chefs de l’opposition, disent à la GRC de faire son travail. Elle le fait déjà et elle le fait bien.
    Monsieur le Président, la GRC fait son travail sauf quand le premier ministre l'en empêche, comme il l'a fait dans le cas de l'infraction pénale qu'il a commise en acceptant un cadeau de la part d'une personne qui cherchait à obtenir de lui un contrat du gouvernement. Il a empêché la GRC de mener cette enquête.
    La COVID‑19 est un événement dans lequel le premier ministre a vu une occasion unique de remplir les poches de ses amis, qu'il s'agisse du scandale UNIS, dans lequel sa famille a reçu un demi-million de dollars, de Frank Baylis ou, aujourd'hui, de l'affaire ArnaqueCan. Va‑t‑il se tenir à l'écart et laisser la police enquêter sur le rôle que lui et son gouvernement corrompu ont joué dans l'affaire ArnaqueCan?
    Monsieur le Président, même quelques années après la pandémie, le chef conservateur revient à ses habitudes. Alors que nous nous efforçons de protéger les Canadiens par tous les moyens possibles, ils colportent des théories du complot sur les vaccins et autres.
    Alors qu'il continue de se livrer à des attaques personnelles, nous allons continuer d'obtenir de répondre aux besoins des Canadiens. Oui, nous veillerons à ce que toutes les règles soient respectées et à ce que les personnes qui ont enfreint des lois ou des règles subissent les conséquences qu'elles méritent. Nous continuerons d'être là pour les Canadiens pendant qu'il s'adonne à des jeux partisans.
    Monsieur le Président, voilà qui prouve encore que le premier ministre n'en vaut pas le coût ni la corruption.
    Il traite la vérificatrice générale de conspirationniste, maintenant qu'elle a révélé que le prix de l'application ArnaqueCAN est passé de 80 000 $ à au moins 60 millions de dollars, que deux amis du parti travaillant dans leur sous-sol ont obtenu 20 millions de dollars du premier ministre et que de hauts représentants du gouvernement libéral ont accepté des bouteilles de whisky et des repas dispendieux en échange de contrats qu'ils ont laissé les entrepreneurs rédiger eux-mêmes.
    Encore une fois, le premier ministre va-t-il se tenir à l'écart et laisser la police mener son enquête sur le gouvernement, ou va-t-il tenter encore une fois de la bloquer?
(1425)
    Monsieur le Président, je ne crois pas que le chef de l'opposition ait besoin de travailler son français; il a juste besoin d'améliorer sa capacité d'écoute. En effet, tout à l'heure, en français, j'ai complimenté et remercié la vérificatrice générale, dont le travail consiste à veiller à ce que les règles sont suivies et ce qu'il y ait des conséquences lorsque ce n'est pas le cas. C'est un fait. Nous savons que nous devons agir afin de protéger les gens dans le respect des règles, et ce, même au cours d'une pandémie. C'est pourquoi il y aura des conséquences pour quiconque a enfreint les règles ou les lois. Entretemps, nous continuerons à faire ce qu'il faut pour servir les gens, les soutenir dans leur vie de tous les jours et construire un avenir meilleur pour tous les Canadiens.

[Français]

La justice

    Monsieur le Président, mon collègue de Montcalm a fait une proposition dans le cadre de l'aide médicale à mourir qui permet le report de la décision finale sur l'enjeu de la santé mentale en général, tout en permettant d'accommoder les patients, ou futurs patients, dans le cadre de la demande anticipée, et en respectant la volonté du Québec.
    Dans ce contexte, une adoption accélérée de la motion, qui ferait compléter le processus avant le 17 mars, est possible. Est-ce que le premier ministre va voter en faveur de l'amendement du député de Montcalm?
    Monsieur le Président, nous savons tous que l'aide médicale à mourir est un choix difficile, profondément personnel, auquel les familles, les individus sont confrontés à des moments extrêmement difficiles dans leur vie.
    Nous savons comme gouvernement et comme Parlement que nous avons la responsabilité de nous assurer que les gens vulnérables sont protégés, mais aussi que nous respectons les choix et les droits des gens qui veulent utiliser l'aide médicale à mourir.
    Nous allons continuer nos conversations, y compris avec le gouvernement du Québec, pour trouver la bonne piste à suivre pour tout le monde.
    Monsieur le Président, ce vote va se faire au Parlement, ici. Il devrait peut-être parler un peu avec nous.
    C'est une occasion de lui éviter des problèmes avec la droite religieuse conservatrice, peut-être même des petits morceaux qui sont dans son propre caucus. C'est une occasion de montrer que dans ce Parlement on est capable de s'entendre sur des enjeux importants et de respecter des choix, comme il l'a dit, difficiles et personnels, sans une entente qui dure ce que durent les roses.
    Est-ce qu'il ne voit pas une occasion de se donner de la hauteur en votant pour la solution humaine avec compassion?
    Monsieur le Président, je veux remercier le Bloc québécois qui contribue à ce débat avec compassion et de façon réfléchie. C'est le genre de conversations que nous devons continuer d'avoir dans ce Parlement. Comment va-t-on bien protéger les Canadiens? Comment va-t-on assurer les choix et les droits de tous?
    Nous allons continuer de regarder leurs propositions. Nous allons continuer de travailler avec les provinces impliquées. Nous allons continuer de nous assurer que le bien-être de tous les Canadiens est au centre de tout ce que nous sommes en train de faire sur cet enjeu extrêmement complexe, difficile.

[Traduction]

Le logement

    Monsieur le Président, aujourd'hui, la défenseure fédérale du logement n'a pas accordé la note de passage au gouvernement libéral. Elle nous explique que les campements de sans-abri sont la manifestation physique de l'échec de notre système national de logement et de lutte à l'itinérance. Elle décrit la situation comme « une question de vie ou de mort ».
    Pendant que le premier ministre dit qu'il aurait pu en faire plus pour construire des logements et qu'il le pourrait encore, le rapport de la défenseure fédérale du logement nous montre combien il est déconnecté. Le premier ministre prendra-t-il cette crise au sérieux, suivra-t-il les recommandations contenues dans le rapport et fera-t-il en sorte que les gens aient un logement sûr?
    Monsieur le Président, je suis très reconnaissant au NPD de l'intérêt qu'il manifeste et des efforts qu'il consent pour nous aider à construire des logements.
    Nous avons récemment conclu des accords sur l'accélération de la construction de logements avec le Québec, le Nunavut et des villes de toutes les régions du pays afin de faire construire plus de 500 000 maisons. Nous avons pris un train de mesures pour faire construire plus de 600 000 appartements. Nous avons sévi contre la location à court terme, ce qui a libéré quelque 30 000 appartements. Nous avons présenté une charte hypothécaire.
    Nous continuons de travailler sur des mesures pour contrer l'itinérance, que vivent beaucoup trop de Canadiens en cette période difficile. Nous continuerons d'être là pour les Canadiens.
    Monsieur le Président, c'est comme si le premier ministre ne venait pas tout juste d'entendre la défenseure du logement refuser la note de passage au gouvernement.

[Français]

     La défenseure fédérale du logement a déclaré: les campements de sans-abris sont une manifestation de l'échec de notre système de logement.
    Elle parle d'une crise « de vie ou de mort ». Pendant ce temps, le premier ministre se contente de dire qu'il aurait pu et aurait dû en faire plus.
    Le premier ministre va-t-il arrêter d'écouter seulement des conseils des géants de l'immobilier et aider les gens dans cette crise sérieuse?
(1430)
    Monsieur le Président, au contraire, nous allons continuer d'écouter les organismes communautaires, les partenaires au niveau municipal et au niveau provincial. Nous allons continuer de travailler main dans la main.
    Nous avons signé des ententes sur la construction accélérée des logements avec le Québec, avec le Nunavut, avec des villes partout au pays pour débloquer la construction de plus de 500 000 maisons. Nous avons pris une série de mesures pour la construction de plus de 600 000 appartements. Nous avons pris des mesures pour nous attaquer à la location à court terme.
    Nous sommes en train d'investir pour lutter contre l'itinérance et pour aider les gens en situation de vulnérabilité. Nous avons encore du travail à faire.

[Traduction]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, après huit ans sous la direction de l'actuel premier ministre néo-démocrate—libéral, nous savons que la corruption est devenue une fonctionnalité, et non un bogue. L'affaire SNC-Lavalin, le scandale lié à l'organisme UNIS et maintenant l'application ArnaqueCAN du premier ministre ont coûté des millions de dollars aux Canadiens, de l'argent qu'ils ne récupèreront pas. L'escroquerie et la mauvaise gestion sont si profondément enracinées que les vérificateurs n'ont même pas pu déterminer combien d'argent a été versé aux proches du Parti libéral.
    Après ce que nous avons appris hier, le premier ministre se joindra-t-il à nous pour demander à la GRC de faire toute la lumière sur cette affaire et de suivre la trace de chaque dollar?

[Français]

    Monsieur le Président, comme nous l'avons fait hier, nous remercions à nouveau la vérificatrice générale et accueillons favorablement toutes ses recommandations dans le cadre de l'examen de l'application ArriveCAN.
    Comme le disait notre collègue le ministre de la Sécurité publique aussi hier, certaines des recommandations formulées dans le rapport ont déjà été mises en œuvre, notamment la mise en place de nouvelles mesures visant à garantir que les tâches et les produits livrables soient clairement définis dans les contrats de services professionnels.

[Traduction]

    Monsieur le Président, la demande vient de la Chambre. Les libéraux veulent faire croire aux Canadiens qu'ils se sont fait plumer à leur insu par des proches de leur parti et qu'ils feront toute la lumière sur l'application ArnaqueCAN du premier ministre, application qui, en passant, ne fonctionnait pas. Nous n'en avions pas besoin, et 75 % des sous-traitants n'ont fait aucun travail sur l'application, mais ils ont eu le temps de payer la tournée de whisky au gouvernement.
    Le premier ministre n'en vaut pas le coût, sans parler de la corruption. Les Canadiens veulent récupérer les 60 millions de dollars de fonds publics.
    Personne ne fait confiance aux libéraux pour mener l'enquête sur eux-mêmes. Le premier ministre prendra-t-il donc la parole, ici et maintenant, pour faire appel à la GRC?
    Monsieur le Président, comme nous l'avons dit hier, nous remercions la vérificatrice générale de ses recommandations dans le cadre de l'examen de l'application ArriveCAN. Certaines recommandations du rapport ont déjà été mises en œuvre, notamment l'adoption de nouvelles mesures visant à nous assurer que les tâches et les produits livrables sont clairement définis dans les contrats de services professionnels. Nos ministères prennent très au sérieux leur devoir d'optimiser les ressources.
    Monsieur le Président, l'application ArnaqueCAN est comme le premier ministre: elle n'en vaut pas le coût ni la corruption. Même la vérificatrice générale n'en revenait pas des résultats de son enquête et de son rapport accablant au sujet d'ArriveCAN. Franchement, après huit ans de ce gouvernement néo‑démocrate—libéral, personne ne devrait être choqué par le degré d’incompétence et de dépenses inutiles dont les Canadiens sont témoins de la part de ce premier ministre.
    Une personne raisonnable pourrait conclure, à la lumière du rapport, que le problème lié à l'application ArnaqueCAN relève de la criminalité.
    Le premier ministre se joindra‑t‑il aux conservateurs pour demander à la GRC de lancer une enquête plus poussée sur l'application ArnaqueCAN, compte tenu des révélations du rapport de la vérificatrice générale?
    Monsieur le Président, comme nous l'avons dit à la Chambre à maintes reprises, toute inconduite dans le processus d'approvisionnement est inacceptable. Nous reconnaissons que la présidente de l'Agence des services frontaliers du Canada a lancé des vérifications internes et publié des rapports initiaux.
    Elle a également transmis certains des rapports préoccupants à la GRC, mais les députés d'en face devraient savoir que ce ne sont pas les politiciens qui dirigent la GRC; c'est la GRC qui effectue ce travail. C'est la GRC qui en établira le mandat, peu importe l'issue de l'affaire, et nous accepterons ce travail.
    Monsieur le Président, en réalité, la question était simple. Cependant, après huit ans de gouvernement néo-démocrate—libéral, qui, à la Chambre ou ailleurs au Canada, s'attend à obtenir une réponse satisfaisante de la part d'un premier ministre qui n'en vaut ni le coût ni la corruption?
    Le rapport de la vérificatrice générale amène toute personne raisonnable à conclure que les événements entourant l'application ArnaqueCAN représentent des actes criminels qui doivent faire l'objet d'une enquête; je vais donc poser ma question à nouveau.
     Le premier ministre se joindra‑t‑il aux conservateurs pour demander à la GRC de lancer une enquête plus poussée sur l'application ArnaqueCAN, compte tenu des révélations du rapport de la vérificatrice générale?
(1435)
    Monsieur le Président, nous acceptons évidemment le rapport de la vérificatrice générale. Nous la remercions de son travail. Il y a manifestement des allégations préoccupantes qui ont été formulées. C'est précisément la raison pour laquelle l'Agence des services frontaliers du Canada a effectué la vérification. C'est précisément la raison pour laquelle elle a ensuite transmis les documents à la GRC.
    Les conservateurs ont beau le répéter, les politiciens ne dirigent pas les enquêtes policières. C'est la GRC qui fera ce travail, et nous sommes convaincus qu'elle s'en tiendra aux preuves. Comme je l'ai dit, toute inconduite en matière d'approvisionnement aura des conséquences.

[Français]

    Monsieur le Président, hier, la vérificatrice générale du Canada a confirmé ce qu’on attendait, et c’est le pire. L’application ArriveCAN, au lieu de coûter 80 000 $, a coûté 60 millions de dollars. Elle n’est même pas sûre que ça a coûté 60 millions de dollars. C’est peut-être pire, parce que les dossiers sont tellement tout croches et qu’il manque tellement d’informations qu’elle n’est même pas en mesure de confirmer le montant.
    Maintenant, les Canadiens ont besoin de savoir. Est-ce qu’on a eu un problème d’incompétence crasse ou de corruption? Le gouvernement va-t-il demander à la GRC de faire enquête davantage tel que le demande le chef de l’opposition ?
    Monsieur le Président, il y a plusieurs choses que nous savons. Premièrement, la GRC fait son travail de manière indépendante. Comme le premier ministre l’a dit il y a quelques instants, nous avons confiance dans ses capacités de faire ce travail.
    Deuxièmement, la vérificatrice générale a effectivement décrit des comportements choquants de la part de la fonction publique qui n’étaient pas souhaitables et souhaités, malgré l’urgence d’agir dans un contexte de pandémie qui faisait mal à des millions de Canadiens.
    Les recommandations ont été bien entendues. Plusieurs sont déjà en place. D’autres vont l’être dans les prochaines semaines.
    Monsieur le Président, il me semble que quand on veut faire la lumière, c’est facile de répondre oui ou non à une question simple.
    On a même appris hier que des 60 millions de dollars, GC Strategies a reçu 20 millions de dollars. De cette commande, il n’y a même pas de papier qui confirme vraiment une demande ou une commande. En plus, GC Strategies a mis elle-même des clauses dans son entente. Il faut le faire.
    Si le gouvernement n’a rien à cacher, il devrait dire que, oui, ça prend une enquête de la GRC et que, oui, il recommande que la GRC enquête davantage. Va-t-il le faire, oui ou non?
    Monsieur le Président, de nouveau, dans une démocratie libre, ce n’est pas le gouvernement ou ce ne sont pas les gouvernements qui dictent le devoir et les travaux des opérations policières. Ce n’est pas comme cela que cela fonctionne dans une démocratie comme celle dans laquelle nous avons la chance de vivre.
    Toutefois, dans une démocratie comme au Canada, les fonctionnaires ont des responsabilités à assumer. La vérificatrice générale a effectivement noté des manquements importants en termes de collecte, de partage et d’entreposage d’informations importantes pour faire le travail.

La justice

    Monsieur le Président, l’aide médicale à mourir, c’est une question de libre choix.
    Le rôle de l’État, ce n’est pas de décider à la place de la personne qui souffre, c’est de garantir les conditions d’exercice d’un choix libre et éclairé. Ceux qui ne veulent pas d’aide médicale à mourir n’ont qu’à ne pas la demander.
    L’Assemblée nationale est unanime: le Québec est prêt. Il a sa propre loi.
    Est-ce que le fédéral va modifier le Code criminel pour permettre les demandes anticipées pour les personnes qui souffrent?
    Monsieur le Président, j’ai un profond respect pour le travail crucial que le Québec a accompli en matière de demandes anticipées.
    Le Canada dispose d’un seul Code criminel, et ce, pour une bonne raison. Les Canadiens méritent des normes cohérentes et une clarté sur ce qui est criminel. Il n’y a pas de solution rapide pour permettre en toute sécurité une exception pour le Québec sur cette question.
    Or, la conversation ne s’arrête pas ici. Nous nous engageons à travailler avec le Québec pour envisager les prochaines étapes.
    Monsieur le Président, le Québec n’aurait pas à demander une exception si Ottawa avait appliqué les recommandations majoritaires sur les demandes anticipées déposées il y a un an par le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir.
    Aujourd’hui, le Québec est prêt et les malades n’ont pas à souffrir du laxisme du gouvernement. S’il ne veut pas condamner les personnes à souffrir pour rien, le fédéral a deux choix: offrir cette exception au Code criminel dès maintenant ou déposer un projet de loi sur les demandes anticipées.
    Va-t-il faire le choix humain et faire preuve de compassion?
(1440)
    Monsieur le Président, l’aide médicale à mourir est un choix profondément personnel et complexe. Il y a un équilibre qu’on cherche toujours à avoir entre l’autonomie et la dignité d’une personne et la protection des personnes vulnérables.
    Dès le début, nous avons adopté une approche qui est prudente. Nous avons le devoir envers les Canadiens et les Québécois de traiter ces questions de manière réfléchie et de procéder avec précaution.

La petite entreprise

    Monsieur le Président, récapitulons la situation du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes.
     Selon les chiffres d'aujourd'hui de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, près de 150 000 entreprises n'ont pas pu rembourser leur prêt et près de 200 000 autres ont dû s'endetter pour le rembourser. À toutes celles-ci s'ajoutent environ 50 000 entrepreneurs qui sont toujours en quête de refinancement.
    Le gouvernement fédéral aurait un moyen de connaître l'état précis de la situation et d'assurer le moins de faillites possible. Ce serait d'étudier les dossiers des PME au cas par cas et d'assurer de la flexibilité. C'est ce que nous lui demandons depuis le début.
    Pourquoi refuse-t-il toujours?
    Monsieur le Président, près de 80 % des petites entreprises ont remboursé leur prêt du Compte d'urgence pour les entreprises canadiennes et ont profité de la partie remboursable du prêt.
    Comme c'est le Mois de l'histoire des Noirs, j'aimerais souligner le Programme pour l'entrepreneuriat des communautés noires. Il s'agit d'un investissement historique de 266 millions de dollars qui, jusqu'à présent, a aidé à soutenir plus de 9 000 entrepreneurs noirs partout au Canada. C'est près de 50 millions de dollars en prêts qui ont été approuvés.

[Traduction]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, l'application ArnaqueCAN, qui a coûté au moins 60 millions de dollars aux contribuables, est à l'image même du premier ministre après huit ans au pouvoir. Les deux n'en valent pas le coût, sans parler de la corruption.
     À quoi a servi l'argent durement gagné des contribuables canadiens? Cet argent a servi à créer une application qui a coûté 750 fois plus cher que prévu, qui a nécessité 177 mises à jour, et qui a forcé par erreur 10 000 personnes à se mettre en quarantaine. Enfin, cette application a semé le chaos à nos frontières, ce qui a ruiné nos chances de redresser le secteur du tourisme.
    Le premier ministre a-t-il l'intention de se joindre à nous pour demander à la GRC d'élargir la portée de son enquête, à la lumière du rapport accablant que la vérificatrice générale a présenté hier.
    Monsieur le Président, toute inconduite commise au cours d'un processus d'acquisition est totalement inacceptable. C'est précisément la raison pour laquelle l'Agence des services frontaliers du Canada a immédiatement lancé un processus de vérification interne dès qu'elle a pris connaissance de certaines irrégularités. L'Agence a ensuite transmis certains de ces éléments à la GRC.
    Il est regrettable que des situations comme celle-ci se produisent, mais le fait est que l'Agence des services frontaliers du Canada a suivi la procédure pour s'assurer que cela ne se reproduise plus jamais, et que tout acte répréhensible soit puni.
    Monsieur le Président, le fait est que le titre du rapport de la vérificatrice générale sur la désastreuse application libérale ArnaqueCan est très éloquent: « Un non-respect flagrant pour les pratiques élémentaires de gestion et de passation de marchés ».
    Ce rapport incarne les huit années de mauvaise gestion, d'incompétence et de mépris de la part des libéraux à l'égard des travailleurs canadiens. L'application est exactement comme le premier ministre après huit ans: elle n'en vaut pas le coût, elle n'en vaut pas la corruption.
    Encore une fois, je pose la question: le premier ministre se joindra-t-il à nous et demandera-t-il à la GRC d'élargir son enquête à la lumière des révélations du rapport choquant publié hier par la vérificatrice générale?
    Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, ce ne sont pas les politiciens qui dirigent les enquêtes de la GRC. C'est la GRC qui déterminera la portée de l'enquête selon les preuves disponibles.
    Il est important de savoir que tout acte répréhensible et toute inconduite en matière d'approvisionnement auront des conséquences. Nous faisons confiance à l'Agence des services frontaliers du Canada, qui est en train de terminer les vérifications initiales. La GRC se saisira de l'affaire au besoin.

[Français]

    Monsieur le Président, on va essayer de faire ça simple.
    Imaginons un instant qu'on accorde un contrat d'urgence pour faire réparer la toiture de sa résidence officielle à la ferme parce que ça coule à l'intérieur. On engage un entrepreneur qui dit que la réparation va coûter 20 000 $. L'entrepreneur commence les travaux et envoie une première facture de 500 000 $ sans justifications.
    Est-ce qu'on va payer la facture sans poser de questions, même si ça coule encore?
    C'est pourtant ce qui est arrivé avec l'application ArriveCAN du premier ministre. La vérificatrice générale l'a vu, l'ombudsman l'a vu, et personne dans le gouvernement ne l'aurait vu? C'est un impossible à croire.
    Est-ce que le gouvernement va accepter notre demande de faire une enquête et laisser la Gendarmerie royale du Canada faire son travail?
(1445)
    Monsieur le Président, comme nous l'avons déjà dit plusieurs fois encore aujourd'hui, et à nouveau hier, nous remercions la vérificatrice générale de son rapport.
    Nous prenons note des constats choquants qu'elle a clairement indiqués. Nous reconnaissons que tout cela a été fait dans des conditions d'urgence, mais ce n'est pas une excuse pour que les modalités de collecte d'informations nécessaires n'aient pas été suivies.
    Monsieur le Président, le premier ministre a dit tout à l'heure qu'il accueillait à bras ouverts les recommandations de la vérificatrice générale, mais les entrepreneurs, eux, ont eu droit à un bar ouvert. L'application ArriveCAN du premier ministre a forcé la mise en quarantaine de 10 000 Canadiens à cause d'une erreur. Elle devait coûter 80 000 $. La facture est aujourd'hui de 60 millions de dollars. Les familles qui font la file d'attente dans les banques alimentaires méritent de meilleures réponses.
    Est-ce que le premier ministre, qui n'en vaut pas le coût, s'engage à rendre aux familles qui ont payé des travaux qui n'ont jamais été faits l'argent qu'il a gaspillé pour son application ArriveCAN?
    Monsieur le Président, mon collègue a sûrement compris, maintenant que nous l'avons répété plusieurs fois, que nous remercions la vérificatrice générale de son rapport et que nous reconnaissons les manquements importants qu'elle a notés dans son rapport. Plusieurs des recommandations qu'elle a fournies sont déjà mises en place. D'autres vont l'être dans les prochaines semaines. Tout cela a été mis en place dans un contexte d'urgence où il fallait protéger la vie et les emplois de millions de Canadiens partout au pays. Malheureusement, cela n'a pas été fait dans le respect des normes auquel on s'attend de la part des fonctionnaires de la fonction publique.

[Traduction]

Les affaires autochtones

    Monsieur le Président, la décision de la Cour suprême confirme ce que nous savions déjà: les peuples autochtones ont le droit de prendre des décisions concernant leurs enfants, leurs jeunes et leurs familles. Le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les enfants autochtones reçoivent sans tarder les soins dont ils ont besoin. Services aux Autochtones Canada prévoit mettre fin à des programmes d’une valeur de plus de 7 milliards de dollars, comme le principe de Jordan et l’initiative Les enfants inuits d’abord.
    La ministre s’engagera-t-elle à revenir sur sa décision d’effectuer ces compressions et à investir dans les programmes dont les enfants et les jeunes autochtones ont besoin?
    Monsieur le Président, je remercie la députée d’en face d'avoir bien énoncé le principe découlant de la loi. La décision rendue par la Cour suprême vendredi dernier est une grande victoire, non seulement pour les peuples autochtones, mais aussi pour le Canada. Cette décision indique que le principe de l’autodétermination s’applique aux jeunes Autochtones. Elle fait aussi le lien entre trois axes juridiques qui s'imbriquent l'un dans l'autre comme les mèches d'une tresse: les lois autochtones, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et la notion de concordance législative devant être appliquée à la Chambre des communes. Je pense que tous les députés gagneraient à prendre connaissance de cette décision et à y réfléchir.

La violence familiale

    Monsieur le Président, dimanche dernier, la collectivité de Carman, au Manitoba, a été témoin d'une tragédie lorsqu'une mère, ses trois enfants et sa nièce ont été assassinés, et que son conjoint est le principal suspect dans cette affaire. Cette tragédie nous rappelle que nous avons désespérément besoin de refuges et de logements sûrs pour les femmes et les familles, ainsi que des mesures d'aide en santé mentale pour prévenir les féminicides. Pourtant, le gouvernement a supprimé le financement de certains refuges pour femmes, alors que les besoins en santé mentale ne sont toujours pas comblés.
    Le ministre augmentera-t-il l'aide fournie aux refuges et aux services de santé mentale pour mettre fin à la violence faite aux femmes et aux enfants?
    Monsieur le Président, l'ampleur de la tragédie qui a eu lieu ne nous échappe pas, et nous nous efforçons de continuer à faire en sorte que justice soit rendue. Il est néanmoins important que nous continuions à investir dans les projets qui permettront aux Canadiens de vivre en sécurité dans un logement qui permet de prévenir ce genre d'incident.
    Les programmes que nous avons mis en place soutiennent les refuges et les logements de transition, en particulier pour les femmes qui fuient la violence. Nous veillerons à chercher d'autres possibilités et à faire les investissements nécessaires pour continuer à bâtir le réseau de logements qui aidera à prévenir ce genre de tragédies à l'avenir.

Les services de garde

    Monsieur le Président, il est très important de disposer de services de garde d'enfants abordables. Il est essentiel de donner aux femmes la liberté de choisir entre rester à la maison pour élever leurs enfants ou réaliser leurs ambitions professionnelles, ou, dans la plupart des cas, de concilier les deux.
    Les femmes de ma circonscription me disent qu'elles ont du mal à trouver des places en garderie. La ministre de la Famille peut-elle informer la Chambre des discussions qu'elle a eues avec les provinces pour garantir la réussite des garderies à 10 $ par jour?
(1450)
    Monsieur le Président, le système pancanadien rend la vie plus abordable pour les familles canadiennes en offrant maintenant des services de garde d'enfants à 10 $ par jour dans sept provinces ou territoires, et une réduction de 50 % dans l'ensemble du pays. Avec la réduction des frais, la demande pour ces places a bien sûr augmenté. Nous avons constaté une augmentation du nombre de places disponibles, avec 82 000 nouvelles places annoncées par les provinces et les territoires. Les provinces et les territoires se sont engagés à contribuer à la mise en place de ce système, et nous travaillerons avec eux pour qu'ils rendent des comptes à ce sujet.

La tarification du carbone

    Monsieur le Président, le premier ministre est parvenu à débloquer 60 millions de dollars pour créer l'application ArnaqueCAN, mais il continue de vouloir augmenter la taxe sur le carbone de 23 % dès le 1er avril prochain. Même la candidate d'extrême gauche à la direction du NPD en Alberta s'oppose à cette augmentation de la taxe sur le carbone. Elle a indiqué que personne n'est d'accord avec le premier ministre sur ce sujet et qu'il a brisé la confiance des gens.
    Après huit ans d'échecs, comment le premier ministre peut-il continuer d'augmenter la taxe sur le carbone sur le dos des Canadiens?
    Monsieur le Président, le directeur parlementaire du budget a répété plusieurs fois que huit Canadiens sur dix reçoivent plus d'argent en remboursement de la taxe sur le carbone que ce qu'ils paient. La tarification du carbone fonctionne. Elle contribue à réduire la pollution au Canada, et même le Parti conservateur a fait campagne en ce sens, en 2021. La différence entre les conservateurs et nous, c'est que nous prenons au sérieux la lutte contre les changements climatiques et que nous travaillons avec la population canadienne pour l'aider à surmonter les difficultés liées à l'abordabilité.
    Monsieur le Président, ce n'est pas tout. Une des candidates à la direction du NPD en Alberta a dit: « Comment voulez-vous que les gens adhèrent au plan du fédéral alors que même le premier ministre n'y adhère pas? Il s'en sert pour faire de la petite politique. » Elle a ajouté que la redevance sur le carbone est « finie ». Une autre candidate a affirmé que nous devions cesser d'imposer une taxe sur le carbone aux consommateurs.
    S'il a perdu l'appui du NPD de l'Alberta, qui est à l'extrême gauche du spectre politique, le ministre sait sûrement qu'il a un problème. Va-t-il, d'ici le 1er avril, éliminer la taxe sur le carbone une fois pour toutes?
    Monsieur le Président, tant qu'à parler de l'Alberta, je me demande si le Parti conservateur du Canada et son chef appuient le gel imposé par le gouvernement de la province concernant des investissements de 30 milliards de dollars. Des milliers d'emplois sont menacés en Alberta à cause de la décision irresponsable de la première ministre de geler le développement des énergies renouvelables, alors qu'il s'agit du secteur qui connaît la plus forte croissance au pays en matière de développement énergétique.
    Qu'en pense le Parti conservateur? Les conservateurs n'en parlent pas, parce qu'ils ne se soucient pas du développement économique. Ils ne se soucient pas de la lutte contre les changements climatiques et ils ne se soucient pas du sort des Canadiens.
    Monsieur le Président, le premier ministre a gaspillé plus de 60 millions de dollars pour son arnaque, l'application ArriveCAN, et il compte faire payer les Canadiens davantage en quadruplant la taxe sur le carbone. Celle-ci augmentera de 23 % le 1er avril. Après huit ans de gouvernement libéral—néo-démocrate, ce n'est pas une surprise, mais le premier ministre n'en vaut pas le coût.
    Pourquoi les Canadiens doivent-ils payer l'addition pour les dépenses frauduleuses du gouvernement?
    Monsieur le Président, à l'heure actuelle, au Canada, une province, l'Alberta, doit envisager de rationner l'eau l'été prochain en raison des effets des changements climatiques. En Colombie‑Britannique, des rivières atmosphériques perturbent des milliers de personnes et des stations de ski doivent fermer leurs portes. Nous constatons que les coûts liés aux changements climatiques n'ont pas doublé ou triplé, mais qu'ils ont été multipliés par dix au cours de la dernière décennie.
    Quelle est la réponse du Parti conservateur du Canada? C'est de rendre la pollution gratuite à nouveau et de laisser les pays les plus grands, les plus prospères et les plus pollueurs s'en tirer à bon compte.
    Pas de ce côté-ci de la Chambre: nous nous battrons...
    Des voix: Oh, oh!
    Chers collègues, il est important, une fois de plus, de nous rappeler que lorsqu'un député a la parole, nous sommes censés écouter les questions et les réponses. Je demande à tous les députés de bien vouloir faire preuve de retenue, de suivre les directives de leurs whips et de respecter les députés qui ont la parole.
    La députée de Sarnia—Lambton a la parole.
    Monsieur le Président, après huit ans de gouvernement libéral—néo-démocrate, les Canadiens sont obligés de payer le prix fort pour tout. Non seulement le gouvernement a accordé 20 millions de dollars à des sous-traitants qui n'ont pas travaillé sur l'application ArnaqueCAN, mais la vérificatrice générale a aussi révélé que l'application de 80 000 $ a coûté plus de 60 millions de dollars aux contribuables. Maintenant, le gouvernement prévoit augmenter la taxe sur le carbone le 1er avril.
    Pourquoi les Canadiens devraient-ils payer la facture des dépenses excessives et frauduleuses du gouvernement?
(1455)
    Monsieur le Président, lors de la dernière campagne électorale, tous les collègues de l'autre côté de la Chambre ont parcouru leur circonscription, que ce soit dans Sarnia—Lambton ou ailleurs. Ils avaient en main de belles brochures avec M. O'Toole sur la couverture. Il portait un joli t-shirt noir. Que pouvait-on lire dans cette brochure? Il y était question d'une tarification de la pollution. Tous les députés d'en face ont parcouru leur coin de pays en s'engageant à mettre un prix sur la pollution dans le cadre d'un plan de lutte contre les changements climatiques. Pourquoi avons-nous cru les conservateurs à l'époque et pourquoi devrions-nous les croire aujourd'hui?

[Français]

Les services publics et l'approvisionnement

    Monsieur le Président, les libéraux ne se sauveront pas si vite du scandale ArriveCAN. Pour une simple application qui aurait dû coûter 80 000 $, les libéraux ont dépensé 60 millions de dollars, dont 20 millions ont été versés à GC Strategies, une compagnie qui n'a offert aucun service en fin de compte.
    Le pire, c'est que la vérificatrice générale révèle que cette manigance a été faite avec la complicité d'employés de l'État. Hier, les trois ministres impliqués se sont renvoyé la balle, mais les Québécois méritent de savoir qui est responsable. L'imputabilité d'ArriveCAN, elle arrive quand?
    Monsieur le Président, je remercie notre collègue de soulever cet enjeu. Elle a déjà entendu à plusieurs reprises la réponse. Nous remercions la vérificatrice générale de son travail et nous reconnaissons les manquements importants qu'elle a notés. Nous savons que tout cela a été fait dans un processus de temps de crise. Ce n'est pas une excuse pour les problèmes de manque d'informations ou de manque d'enregistrement et de partage de ces informations. Heureusement, beaucoup des recommandations qu'elle propose ont déjà été mises en place.
    Monsieur le Président, les Québécois ne comprennent pas comment il est possible d'arriver à 75 000 % de dépassement de coûts sans qu'un ministre allume. Toutes les règles ont été bafouées alors qu'une poignée de gens ont empoché 60 millions de dollars de l'argent des contribuables.
    La pandémie a le dos large. Elle ne peut pas expliquer un tel manque total de compétence quant aux règles de base de gestion de projet. S'il a été possible que 60 millions dollars soient gaspillés comme cela, sur combien d'autres contrats le gouvernement ferme-t-il les yeux?
    Monsieur le Président, en plein cœur de la pandémie, des centaines de gens mourraient de la COVID‑19, des milliards de dollars par semaine étaient mis en jeu en pertes économiques. Il y avait des milliards de dollars dont il fallait assurer le transport d'un côté et de l'autre de la frontière. Il y avait le transport des médicaments essentiels, de la nourriture et de l'équipement fondamental pour les entreprises du Québec et du Canada. Il fallait agir rapidement.
    Malgré cela, le manque d'information, le manque de collecte d'informations et le manque de rigueur de la part de certains employés de la fonction publique sont totalement inacceptables.

[Traduction]

La tarification du carbone

    Monsieur le Président, je me demande pourquoi la priorité du premier ministre est d'augmenter des impôts et non l'accessibilité des denrées alimentaires. Il peut trouver 60 millions de dollars pour son application ArriveCAN, mais il doit quadrupler la taxe sur le carbone appliquée aux agriculteurs et à l'alimentation. Nous entendons l'appel des familles canadiennes qui veulent supprimer la taxe pour rendre la nourriture abordable. J'étais à Sudbury cette semaine pour rencontrer des organisateurs de banques alimentaires qui sont à la limite de leurs capacités, car la demande a doublé et continue d'augmenter. Les conservateurs ont un projet de loi reposant sur le gros bon sens, le projet de loi C‑234, qui permettrait d'exonérer les agriculteurs de la taxe sur le carbone et de réduire le prix des denrées alimentaires. Ce premier ministre n'en vaut pas le coût. Va‑t‑il annuler son projet d'augmenter la taxe sur le carbone le 1er avril pour que les Canadiens puissent se nourrir?
(1500)
    Monsieur le Président, je suis heureux que les conservateurs posent enfin une question sur l'économie, car cela me donne l'occasion de vous communiquer quelques bonnes nouvelles. En janvier, grâce au travail acharné des Canadiens, le Canada a créé 37 000 emplois; au Canada, au cours des 12 derniers mois, la hausse des salaires a dépassé l'inflation; et le taux de chômage est tombé à 5,7 %, soit un niveau plus bas qu'à n'importe quel moment du mandat de l'ancien premier ministre, Stephen Harper. Tout ce que savent faire les conservateurs, c'est supprimer des emplois.
    Voici un chiffre qui intéresse la plupart des Canadiens, monsieur le Président: 2 millions de Canadiens ont recours à une banque alimentaire chaque mois. Aujourd'hui, c'est le Jour de l'agriculture canadienne. Comment les libéraux le célèbrent-ils? En prévoyant augmenter la taxe sur le carbone de 23 % le 1er avril. Pire encore, nous savons que les amendements au projet de loi C‑234, réclamés par des sénateurs nommés par les libéraux, feraient augmenter les coûts de 200 millions de dollars pour les agriculteurs. Le projet de loi sensé des conservateurs, dans sa version initiale, ferait économiser 1 milliard de dollars aux agriculteurs d'ici 2030.
    Pour le Jour de l'agriculture canadienne, le premier ministre va-t-il célébrer avec moi et abolir cette taxe pour les agriculteurs, afin de rendre plus abordables les denrées alimentaires?
    Monsieur le Président, je suis très fier d'être un agriculteur en ce Jour de l'agriculture canadienne et de faire partie d'un gouvernement qui s'est doté d'un plan environnemental. C'est tellement important. Les agriculteurs comprennent qu'il faut prendre soin des terres et que nous devons avoir un plan pour l'environnement. Pour ce qui est du prix des denrées alimentaires, Tyler McCann de l'Institut canadien des politiques alimentaires a indiqué aux membres du comité de l'agriculture qu'il n'y avait aucune donnée pour étayer l'idée que la tarification du carbone est à l'origine de la hausse des prix des aliments.

[Français]

    Monsieur le Président, le premier ministre a gaspillé 60 millions de dollars sur son application corrompue ArriveCAN. Maintenant, il demande encore plus d'argent aux Canadiens au moyen de la taxe sur le carbone, que le Bloc veut d'ailleurs radicalement augmenter.
    Après huit ans sous ce gouvernement, tout coûte plus cher. Pire encore, les bloquistes appuient les politiques libérales.
    Est-ce que le premier ministre peut nous confirmer qu'il abolira la taxe sur le carbone pour que les Canadiens puissent recommencer à respirer un peu plus?
    Monsieur le Président, j'aimerais rappeler à mon honorable collègue que, la dernière fois que j'ai vérifié, le fjord du Saint‑Laurent faisait encore partie du Québec. Au Québec, c'est le système québécois qui s'applique, ce n'est pas le système fédéral.
    Il s'agit du système de plafonnement et d'échange qui a été mis en place bien avant le système fédéral de tarification du carbone. C'est un système qui fonctionne très bien pour aider à réduire les émissions. Ce n'est pas le Bloc québécois ni le gouvernement fédéral qui ont mis cela en place, c'est le gouvernement du Québec. Plusieurs des députés du Parti conservateur ont d'ailleurs voté en faveur du système québécois.
    S'il veut poser des questions, il n'a qu'à aller les voir. Ils sont assis du même côté de la Chambre que lui.

[Traduction]

La santé

    Monsieur le Président, nous savons que les soins de santé sexuelle et reproductive englobent les soins de santé mentale, qui sont toujours importants, mais surtout pour les femmes pendant leur vie reproductive. Comme nous savons à quel point une naissance peut être un moment excitant, mais aussi stressant pour une nouvelle mère et à quel point le bien-être d'une mère a une incidence non seulement sur elle, mais aussi sur son nouveau-né et les autres membres de sa famille, la ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée de la Santé peut-elle nous expliquer comment le gouvernement appuie les femmes qui choisissent la maternité en s'attaquant à la question de la santé mentale périnatale?
    Monsieur le Président, nous savons tous que la députée d'Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill est une ardente défenseure de la santé des femmes. Mon message aux nouveaux parents qui en arrachent peut-être est le suivant: ils n'ont pas à porter seuls ce fardeau. Je tiens à remercier le Collectif canadien pour la santé mentale périnatale et tous nos partenaires qui travaillent à l'élaboration de normes nationales pour une stratégie en matière de santé mentale périnatale. Nous soutenons les familles en produisant des documents d'orientation et en fournissant des conseils destinés aux professionnels de la santé et aux gens qui pourraient avoir des problèmes de santé mentale pendant la période périnatale. Nous sommes avec eux et nous ferons tout en notre pouvoir pour que les familles aient accès à des soins de santé mentale de qualité quand et où elles en ont besoin.
(1505)

La tarification du carbone

    Monsieur le Président, le premier ministre ne vaut pas le coût des souffrances qu'il cause. La famille Payne exploite l'Asphodel Sheep Company. Elle a été désignée famille agricole de l'année dans le comté de Peterborough. La taxe sur le carbone va augmenter de 23 % le 1er avril, ce qui nuit vraiment à cette famille. Les enfants ne savent pas ce qu'il adviendra de leur ferme familiale.
     Katie, Jolene et Lucy, qui ont 15, 13 et 9 ans, respectivement, m'ont demandé de poser la question suivante au premier ministre: pourquoi le gouvernement du Canada rend-il le travail de l'industrie agricole, qui consiste à nourrir le pays, si difficile?
    Monsieur le Président, j'aimerais lire une citation de Glenn Wright, l'ancien vice-président de l'Union nationale des fermiers:
     Les agriculteurs seront parmi les plus durement touchés si nous n'agissons pas rapidement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et stabiliser le climat. C'est pourquoi, afin de protéger les agriculteurs, l’UNF soutient la tarification de la pollution; il s'agit d'un outil politique important pour réduire les émissions nocives qui alimentent la crise climatique et menacent les exploitations agricoles et l'approvisionnement en denrées alimentaires.

Les priorités du gouvernement

     Monsieur le Président, nous avons appris aujourd'hui une nouvelle dévastatrice pour Baie de Quinte. Cascades, une entreprise qui exploite une usine à Quinte West depuis 100 ans, ferme ses portes et supprime 230 emplois en raison de l'inflation et des taux d'intérêt élevés après huit ans du gouvernement libéral—néo-démocrate.
    Aujourd'hui, des Canadiens qui doivent déjà payer cher pour se nourrir et se chauffer doivent s'inquiéter pour leur paie. Les habitants de Belleville, qui sont encore sous le choc d'une grave épidémie de surdoses, doivent maintenant craindre le chômage.
    Quand le gouvernement redressera-t-il le budget, réduira-t-il l'inflation et abaissera-t-il les taux d'intérêt, afin que les entreprises ne soient pas obligées de fermer et que les employés ne perdent pas leur emploi?
    Monsieur le Président, pour chaque famille canadienne, la chose la plus importante est d'avoir un emploi, et chaque fois que quelqu'un perd son emploi, c'est un désastre pour sa famille. Voilà pourquoi nous sommes si heureux de constater la forte reprise de l'emploi au Canada, avec 1,1 million d'emplois de plus qu'avant la pandémie. C'est également la raison pour laquelle nous avons mis en place des mesures de soutien, telles que le programme de services d'éducation préscolaire et de garde d'enfants, et un filet de sécurité sociale, que les conservateurs entendent éliminer.
    Monsieur le Président, cette réponse insensible réconfortera peu les habitants de Quinte West qui viennent de perdre leur emploi.
    Voyons ce qui se passe réellement au Canada en ce moment. Au cours des quatre derniers mois, la Banque TD a éliminé 3 000 emplois, Canadian Tire a réduit ses effectifs de 3 %, Enbridge a éliminé 650 emplois, Rona, 300 emplois, et Manuvie, 250 emplois. Après huit ans sous le gouvernement libéral—néo-démocrate très prodigue, le seul emploi que les Canadiens veulent voir disparaître, c'est celui du premier ministre.
    Quand le gouvernement va-t-il redresser le budget et réduire l'inflation et les taux d'intérêt pour que les Canadiens puissent garder leur emploi?
    Monsieur le Président, nous n'avons aucune leçon à recevoir des conservateurs lorsqu'il s'agit de soutenir les plus vulnérables d'entre nous. Depuis notre arrivée au pouvoir, 2,3 millions de Canadiens sont sortis de la pauvreté. Quand les conservateurs ont quitté le pouvoir, le taux de pauvreté au Canada était de 14,5 %. Aujourd'hui, il n'est plus que de 7,4 %.
    Nous savons qu'il reste encore beaucoup de travail à faire. C'est pourquoi nous signalons aux Canadiens que, tout ce que les conservateurs veulent, c'est éliminer les programmes dont les plus vulnérables ont le plus besoin.

Les femmes et l'égalité des genres

    Monsieur le Président, étant donné que le coût de la vie est élevé, beaucoup de femmes ont de la difficulté à acheter les produits menstruels dont elles ont besoin. Reconnaissant ce problème, le gouvernement a récemment lancé le projet pilote du Fonds d’équité menstruelle, afin de distribuer des produits menstruels gratuits à celles qui en ont le plus besoin, par l'intermédiaire de Banques alimentaires Canada.
    En cette Semaine de la santé sexuelle et reproductive, la ministre peut-elle nous dire où en est ce projet pilote dans ma province et dans l'ensemble du Canada?
    Monsieur le Président, je remercie la députée de son bon travail, notamment à la défense de cette cause, et de me donner l'occasion de faire le point sur cette question. Les produits menstruels sont un besoin essentiel. Or, ce ne sont pas toutes les femmes qui y ont accès. Depuis le lancement du projet pilote du Fonds d'équité menstruelle en septembre dernier, près de 400 emplacements, dont 14 dans la province de la députée, la Nouvelle‑Écosse, sont venus en aide à 1 million de Canadiennes en situation de précarité menstruelle. En six mois, 35 millions de produits ont ainsi été distribués.
    Nous apportons de véritables solutions à de véritables problèmes: des produits menstruels pour celles qui en ont besoin, au moment où elles en ont besoin.
(1510)

[Français]

Le logement

     Monsieur le Président, dans un cinq et demi près du métro Verdun, il y a une fuite dans la salle de bain, des balcons sont sur le point de tomber, des plafonds sont plein de trous et il y a des moisissures partout. C'est le logement qu'habitent Isabelle Gagnon et Maxime Pilon avec leur nouveau bébé. Ce sont les résultats de décennies de compressions conservatrices et libérales dans le logement social. Au lieu de proposer des solutions, le chef des conservateurs préfère insulter les maires du Québec et les libéraux se traînent les pieds relativement à la crise du logement.
    Pourquoi les libéraux laissent-ils tomber les gens comme Mme Gagnon et M. Pilon?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie le député de se soucier de la qualité des logements dans lesquels vivent les familles au Canada. Il a raison de souligner que, pendant plusieurs décennies, les gouvernements, tant libéraux que conservateurs, n'ont pas investi dans le logement abordable, mais cela a changé avec la mise en place de la Stratégie nationale sur le logement en 2017.
    Nous investissons dans la construction ou la rénovation de plusieurs centaines de milliers de logements dans lesquels les gens vivent aujourd'hui. Dans l'énoncé économique de l'automne, nous avons refinancé le Fonds pour le logement abordable en y versant 1 milliard de dollars et 300 millions de dollars supplémentaires pour le logement coopératif. Nous continuerons de faire les investissements nécessaires pour que chaque Canadien ait un toit sur la tête.

Les affaires étrangères

    Monsieur le Président, les bombardements ordonnées par Nétanyahou sur Rafah, la zone prétendument sécurisée, ont tué plus de 75 Palestiniens pendant la nuit. Chaque jour, nous assistons à un crime horrible et disproportionné dans la bande de Gaza. Les frappes d'Israël tuent des familles entières et laissent des enfants orphelins. Pendant ce temps, les libéraux continuent d'armer Nétanyahou et ont exporté en Israël plus de 28 millions de dollars en matériel militaire depuis octobre.
    Combien d'autres enfants palestiniens devront être tués avant que le gouvernement mette fin aux exportations d'armes vers Israël?
    Monsieur le Président, c'est une question importante.
    Ce qui se passe dans la bande de Gaza est une véritable tragédie. L'opération militaire de Nétanyahou à Rafah est dévastatrice pour les Palestiniens et pour les autres personnes qui cherchent refuge. Les Gazaouis n'ont nulle part où aller et, comme l'a dit la ministre, il est totalement inacceptable de leur demander de se déplacer à nouveau.
    Cette violence doit cesser. Il faut instaurer une paix durable. Les otages doivent être libérés, et il faut trouver un moyen d'acheminer l'aide humanitaire aux personnes qui en ont le plus besoin.
    Monsieur le Président, je demande le consentement unanime. Je propose que la Chambre exprime sa solidarité envers les paroissiens de...
    Des voix: Non.
    J'ai bien peur que le député, avant même d'avoir posé sa question, déclenche des non de la part des députés.
    Encore une fois, pour optimiser le temps dont nous disposons, j'encourage tous les députés à négocier leurs demandes de consentement unanime.
    Monsieur le Président, vous constaterez, j'en suis convaincu, qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante. Je propose que la Chambre condamne la guerre illégitime de la Russie...
     Des voix: Non.
    Le député n'a pas le consentement unanime.
    Monsieur le Président, il y a eu des discussions entre les partis...
     Des voix: Non.
    Il n'y a pas consentement.
    Manifestement, nous allons de nouveau jouer à ce jeu aujourd'hui.
    Monsieur le Président, pendant la période des questions, j'ai réfléchi à une motion de consentement unanime que j'aimerais présenter...
     Des voix: Non.
    Le député n'a pas le consentement unanime.
    Monsieur le Président, je propose que, dans la mesure où, après huit années d'un gouvernement dirigé par le premier ministre, le coût du logement a doublé, où la SCHL elle-même admet que les mises en chantier...
     Des voix: Non.
    Le député déclenche également des non quand il demande le consentement unanime.
(1515)
    Monsieur le Président, à titre de membre du groupe d'amitié parlementaire Canada-Ukraine, dont le président a dit hier aux membres que nous appuyons totalement nos alliés ukrainiens, je propose que la Chambre demande au gouvernement d'appuyer…
     Des voix: Non.
    Malheureusement, la députée n'a pas le consentement de la Chambre.
    Monsieur le Président, étant donné que la vérificatrice générale a révélé que GC Strategies…
     Des voix: Non.
     Malheureusement, le député de Regina—Lewvan n'a pas le consentement unanime.
     Il est très important de rappeler aux députés, ainsi qu'aux Canadiens qui nous regardent à la maison, qu'exiger le consentement unanime est un moyen très important pour les députés et le Parlement d'examiner des questions qui sont opportunes et qui ne peuvent pas être étudiées dans le cadre du processus normal.
     Normalement, les députés consultent les équipes des leaders de tous les partis officiellement reconnus, ainsi que les députés indépendants, afin de négocier à l'avance et que les députés aient le temps de présenter leurs rappels au Règlement. Il me fait plaisir de donner la parole aux députés qui invoquent le Règlement, mais il serait plus respectueux envers les autres députés de s'efforcer sérieusement d'obtenir le consentement de la Chambre.
     Je donne la parole au député de Regina—Qu'Appelle, un ancien Président de la Chambre et un agent actuel de la Chambre, qui invoque le Règlement.
    Monsieur le Président, l'église Blessed Sacrament de Regina a été la cible d'incendies criminels et de vandalisme, et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que la Chambre reconnaisse le droit des Canadiens de se réunir pour prier ou célébrer leur foi...
     Des voix: Non.
    Je regrette d'interrompre le député de Regina—Qu'Appelle, mais il n'y a manifestement pas de consentement unanime.
    Le député de South Shore—St. Margarets invoque le Règlement. J'espère que le député a fait ce qui s'imposait et qu'il a consulté les autres députés avant de demander le consentement unanime.
    Monsieur le Président, aujourd'hui, la ministre des Pêches a mis au chômage 300 pêcheurs de civelle. Je suis certain que vous constaterez qu'il y a consentement unanime de la Chambre pour condamner le gouvernement à cet égard.
     Des voix: Non.
    Malheureusement, il n'y a pas de consentement unanime.
    Des députés gaspillent vraiment le temps qui est précieux pour ceux qui souhaitent discuter d'autres affaires à la Chambre.

Ordres émanant du gouvernement

[Ordres émanant du gouvernement]

[Traduction]

L'affaire émanant du gouvernement no 34 — Les délibérations sur le projet de loi C‑62

     La Chambre reprend l’étude de la motion, ainsi que de l’amendement.
    Nous allons reprendre là où nous nous sommes arrêtés. Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes venait de terminer son intervention, et nous commencions les questions et les observations.

[Français]

    Je m’excuse de m’exprimer en anglais. J'invite mon honorable collègue le député de Louis‑Saint‑Laurent, qui est bien connu pour sa maîtrise de la langue de Molière, à revenir sur la question qu'il avait commencé à poser avant d'être interrompu un peu plus tôt.

[Traduction]

    Monsieur le Président, c’est un réel plaisir pour moi de répondre à votre invitation à poser une question.
    Pendant de son discours, le député a dit avoir un problème avec le fait que, selon lui, de ce côté-ci de la Chambre, nous dirions parfois des choses qui ne sont pas vraies. Or, ce fait ne correspond pas à la réalité.

[Français]

    Un reportage de Global News, le 8 octobre 2022, mentionnait ceci:

[Traduction]

     La pauvreté, et non la souffrance, incite les Canadiens qui vivent avec un handicap à envisager l’aide médicale à mourir.

[Français]

    Dans le National Post, le 9 mai 2023, un article s'intitulait:

[Traduction]

     Selon des bioéthiciens, le Canada ne devrait pas refuser le suicide assisté si les conditions sociales rendent la vie intolérable.
    Il y a aussi un article de CBC News du 22 juin 2023 intitulé « En raison des longs délais d’attente du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, une Ontarienne quadriplégique envisage l’aide médicale à mourir ».
    Voilà qui prouve, sans l’ombre d’un doute, que oui, malheureusement, dans notre pays, des gens qui ont eu des difficultés dans leur vie sociale ont décidé de se tourner vers l’aide médicale à mourir. Je suis tout à fait convaincu que, dans l’esprit de tous les députés, l’aide médicale à mourir n’a pas été prévue pour cela. C’est exactement ce que nos collègues ont dit pendant leurs interventions. Le député reconnaît-il que, oui, malheureusement, l’aide médicale à mourir pourrait parfois être utilisée à des fins autres que celles qui ont été prévues?
(1520)
    Monsieur le Président, il est vraiment important de ne pas tenter de banaliser la question cruciale de l'aide médicale à mourir.
    J'ai vu de nombreux conservateurs parler de l'aide médicale à mourir comme si une personne pouvait simplement aller voir un médecin aujourd'hui et lui dire: « Bon sang, j'aimerais pouvoir me suicider. Puis‑je avoir un rendez-vous vendredi? » Ce n'est peut-être pas exactement ce que les conservateurs ont dit, mais c'est essentiellement ce qu'ils ont laissé entendre à la Chambre aujourd'hui et par le passé.
    Lorsque les conservateurs suggèrent que l'aide médicale à mourir est une forme de suicide sur demande, cela ne favorise pas le débat et cela ne fait rien pour aider à régler la question. Je demande aux députés conservateurs, en particulier, de prendre le débat plus au sérieux et de ne pas tomber dans les extrêmes. Je fais davantage confiance aux professionnels de la santé, aux travailleurs sociaux, aux membres de la famille ou aux personnes qui sont dûment consultées bien avant qu'une décision soit prise.

Recours au Règlement

L'irrecevabilité alléguée de la proposition d'amendement à la motion du gouvernement no 34

[Recours au Règlement]

    Monsieur le Président, je vous remercie d'autoriser ce recours. Je m'excuse auprès des députés qui participent au débat, mais comme la Chambre est présentement saisie de la motion, je crois qu'il serait approprié d'accorder à la présidence le plus de temps possible pour se pencher sur la question.
    Je prends la parole pour vous demander de déclarer irrecevable la proposition d'amendement à la motion du gouvernement no 34, car, selon ce qu'on peut lire à la page 541 du Bosc et Gagnon, elle introduit une nouvelle proposition qui devrait plutôt faire l'objet d'une motion de fond distincte.
    La motion principale propose deux choses au sujet du projet de loi C‑62. La partie a) prévoit qu'un comité étudie l'objet du projet de loi C‑62. Il propose de consacrer une heure à la comparution d'un ministre et deux heures à la comparution d'autres témoins.
    La partie b) porte expressément sur la durée et la gestion de chaque étape du projet de loi. La partie b)(i) prévoit l'étude par la Chambre à l'étape de la deuxième lecture et détermine le nombre d'intervenants, la durée des discours, la longueur du débat et le report du vote à l'étape de la deuxième lecture. Elle limiterait aussi la présentation de motions dilatoires à un ministre de la Couronne. Selon la partie b(ii), le projet de loi C‑62 serait réputé avoir été renvoyé à un comité plénier et réputé avoir fait l'objet d'un rapport sans amendement. Elle prévoit aussi que l’étude à l’étape de la troisième lecture du projet de loi soit entamée le jeudi 15 février 2024.
    La motion ne porte ni sur le fond ni sur le libellé du projet de loi C‑62. Il s’agit d’une motion de programmation qui porte sur le processus et non sur le fond. Bien que l'on puisse procéder par consentement unanime, et on l'a déjà fait d'ailleurs, on ne peut pas le faire au moyen d’un amendement. En effet, un amendement visant à élargir la portée du projet de loi C‑62 et, parallèlement, à en modifier le libellé aurait pour conséquence, s’il était accepté, d’élargir la portée de la motion.
    Pour élargir la portée du projet de loi sans procéder par consentement unanime, il faut adopter une motion distincte après avoir présenté un avis en respectant la procédure, comme il se doit. À la page 756 de l’ouvrage de Bosc et Gagnon, cette procédure est décrite comme suit:
     Une fois qu’un projet de loi a été renvoyé à un comité, la Chambre peut adopter une motion d’instruction autorisant ce dernier à faire une chose qu’il n’aurait autrement pas le pouvoir de faire, par exemple [...] élargir ou resserrer la portée ou l’application d’un projet de loi. Un comité peut aussi solliciter des instructions de la Chambre.
    En revanche, il suffirait d'un projet de loi distinct et autonome pour introduire le principe qui fait l'objet de la proposition d'amendement relative à l'aide médicale à mourir. Il est contraire aux règles de le faire au moyen d'une simple proposition d'amendement à une motion de programmation traitant de la gestion du temps de la Chambre à l'égard d'un projet de loi d'initiative ministérielle.
    En examinant les types d'amendements aux motions de programmation, et je ne parle pas des motions adoptées du consentement unanime de la Chambre, vous constaterez qu'ils portent tous sur la gestion du temps de la Chambre et des comités. Il s'agit de modifier le nombre de jours ou d'heures de réunion, le nombre de témoins, et cetera. Pas plus tard que le 4 décembre 2023, la Chambre s'est prononcée sur un amendement qui portait sur la comparution du ministre en tant que témoin et sur la suppression de parties d'un projet de loi relatives à l'attribution de temps. Ce fut également le cas pour les motions de programmation relatives aux projet de loi C‑56, C‑31 et C‑12.
    À moins que la motion principale ne porte pas strictement sur la gestion du temps et d'autres questions procédurales courantes et qu'elle concerne le texte même du projet de loi, tout amendement qui vise à modifier le projet de loi est irrecevable. Par exemple, le 9 mai 2023, la Chambre a adopté une motion de programmation relative au projet de loi C‑21, sur les armes à feu. La partie a) de la motion principale était alors libellée ainsi:
[...] que le Comité permanent de la sécurité publique et nationale reçoive instruction, au cours de son étude du projet de loi, d'élargir sa portée, notamment pour qu'il s'applique à toutes les procédures qui ont eu lieu avant l'adoption du présent ordre [...]
    La motion contenait bon nombre de détails supplémentaires et donnait instruction au Comité d'examiner un certain nombre d'amendements à la loi. Le Parti conservateur a ainsi pu proposer un amendement à la motion de programmation et soumettre ses propres propositions d'amendement au projet de loi pour sévir à l'égard des armes à feu illégales utilisées par des criminels et des gangs de rue ainsi que pour mettre en place des mesures pour lutter contre la contrebande transfrontalière et mettre fin à l'approvisionnement en armes à feu illégales des criminels et des gangs au Canada, pour ne citer que quelques exemples.
    Ce qu'il faut retenir, c'est que lorsque la motion principale ne porte pas sur le libellé du projet de loi, elle ne peut pas faire l'objet d'une proposition d'amendement destinée à le modifier. Il convient plutôt de procéder au moyen d'une motion de fond distincte.
(1525)
    Je remercie le député de son intervention. Nous examinerons la question avec le Bureau et nous fournirons une réponse dès que possible.

L'affaire du gouvernement no 34 — Les délibérations sur le projet de loi C‑62

[Ordres émanant du gouvernement]

    La Chambre reprend l'étude de la motion, ainsi que de l'amendement.
    Monsieur le Président, j'aimerais demander au député s'il peut parler précisément du travail du comité spécial et de l'importance d'avoir adopté une approche non partisane. L'aide médicale à mourir est une question tellement importante qui touche beaucoup les gens sur le plan personnel. Ce sont d'ailleurs les travaux du comité qui nous a aidés à en arriver à cette décision.
    Monsieur le Président, je suis heureux que ma collègue ait souligné qu'il s'agit d'une question qui touche beaucoup les gens sur le plan personnel, pour reprendre ses mots. Voilà pourquoi, au début de mon intervention précédant la période des questions, j'ai tenté d'expliquer pourquoi il est si important que la Chambre se penche sur ce qui nous a menés jusqu'ici aujourd'hui.
    Je repense aux délibérations qui ont eu lieu au début de 2016 et à la manière dont les députés de tous les partis avaient abordé sans partisanerie cet enjeu très important. Rien n'a changé en ce qui concerne l'importance de l'enjeu, car il s'agit après tout d'une question de vie ou de mort. Je remarque toutefois que les conservateurs ont maintenant tendance à vouloir politiser la question, au point de se permettre des sous-entendus ridicules.
    Je suis porté à croire que toute personne qui ne fait même qu'envisager l'idée de recourir à l'aide médicale à mourir prend cette question très au sérieux. Voilà notamment pourquoi je crois que chaque député devrait laisser de côté la partisanerie et réfléchir aux déclarations formulées par la Cour suprême du Canada en 2015, ainsi qu'au contenu de la Charte canadienne des droits, selon lesquelles il nous incombe, en tant que législateurs, de proposer des politiques publiques judicieuses. Je pense que nous avons traité d'un enjeu particulièrement important au cours des dernières années, et c'est ce que nous faisons encore aujourd'hui avec le projet de loi C‑62. Or, nous devons prolonger le délai de trois années supplémentaires en raison de ce que nous disent les parties prenantes, notamment les provinces.
    Monsieur le Président, pour faire suite à la question de la députée de Fredericton, j'étais membre du comité mixte spécial, et je suis d'accord avec elle pour dire que le travail de ce comité était très important. Je pense que tous les députés et sénateurs qui y siégeaient se sont acquittés de leur responsabilité en abordant la question avec le sérieux qui s'imposait. Je tiens toutefois à préciser que, dans le cadre de son dernier mandat, le comité n’a eu droit qu’à trois réunions de trois heures chacune avec des témoins. Malheureusement, il y a beaucoup de témoins que nous n'avons pas pu entendre. Nous n'avons même pas eu le temps d'examiner les mémoires qui avaient été présentés, parce qu'il y en avait tellement et que nous n'avions tout simplement pas le temps de les faire traduire dans les deux langues officielles.
    J'aimerais surtout formuler une observation à l'intention du secrétaire parlementaire afin de savoir ce qu'il en pense. Je suis heureux de constater que le projet de loi C‑62 prévoit que le comité mixte spécial se réunira à nouveau. J'espère qu'il disposera de suffisamment de temps pour accorder à ce sujet l'attention qu'il mérite, et j'ajouterais même que c'est ce à quoi la plupart des Canadiens s'attendent.
(1530)
     Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur le fait que nous avons une infrastructure au Parlement, et les comités spéciaux en font partie.
     Je suis optimiste dans la mesure où j'espère qu'un jour, le comité spécial poursuivra l'excellent travail qu'il a accompli jusqu'à présent. Dans un monde idéal, il serait dépolitisé, de sorte que les parlementaires, peu importe qu'ils viennent du Sénat ou de la Chambre et peu importe leur allégeance politique, seraient en mesure d'avoir une discussion très saine. À long terme, je crois que, compte tenu de la nature et de l'importance du projet de loi, c'est de loin la meilleure façon de procéder. C'est en raison de l’échéance du 17 mars que nous devons le faire adopter aussi rapidement.

[Français]

    Monsieur le Président, j'écoute attentivement le député de Winnipeg‑Nord et je me mets à sa place. Depuis des mois, il y a plusieurs retards de procédure. J'imagine le député de Winnipeg‑Nord, il y a quelques mois, en train de faire preuve de leadership et de déchirer sa chemise dans l'antichambre des libéraux. Je l'imagine faire tout en son pouvoir pour qu'on n'arrive pas à la dernière minute comme cela imposant encore une fois un bâillon qui empêche les gens d'avoir la chance d'être pleinement entendus.
    Ma question est la suivante. Que fait-il depuis les six derniers mois? Pourquoi son gouvernement est-il encore à la dernière minute pour présenter cet autre projet de loi? Où est le leadership libéral sur cette question?

[Traduction]

    Monsieur le Président, c'est une combinaison de nombreux facteurs qui nous a finalement menés là où nous en sommes. L’un d'eux date tout juste de la semaine dernière, quand je suis intervenu pour suggérer que nous siégions jusqu’à minuit. J’avais toutefois besoin d’un consentement unanime, et certains députés dans cette enceinte n’étaient pas favorables à l’idée de siéger tard dans la soirée, pendant de longues heures, afin que nous puissions avoir un débat plus approfondi sur la question. Ce n’est pas parce que nous ne voulons pas d’un débat supplémentaire.
     Historiquement, au cours des six dernières années, nous avons eu de nombreux débats dans cette enceinte et à l’extérieur, dans des collectivités de tout le pays. Je pense que nous allons continuer à en avoir, comme on l’a souligné dans la question précédente concernant le comité spécial et la nécessité de le réunir de nouveau. Je crois vraiment que ce débat va se poursuivre, en gardant à l’esprit que le projet de loi a été présenté pour la première fois il n’y a pas si longtemps, c'est-à-dire en 2016. Il a fallu plusieurs années avant que le gouvernement du Québec ne soit en mesure de présenter un projet de loi, alors que nous devions composer avec un échéancier fixé dans un arrêt de la Cour suprême. Je pense que c’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons dû apporter certains des amendements que nous avons apportés aujourd’hui.
    Monsieur le Président, c’est un privilège d’ajouter ma voix à cette importante conversation et un privilège encore plus grand de partager mon temps de parole avec mon ami et collègue, le député de Tobique—Mactaquac.
     En tant que parlementaires, les enjeux dont nous débattons ici s’inscrivent souvent dans un contexte de vie ou de mort, mais aucun enjeu dont nous avons discuté n’a jamais frôlé d'aussi près la vie et la mort que celui qui nous occupe aujourd’hui, à savoir l’aide médicale à mourir, et plus précisément l’aide médicale à mourir de convenance pour la seule raison d’une maladie mentale.
     Ce n’est pas la première fois que nous discutons à la Chambre de l’aide médicale à mourir, ou de l’aide médicale à mourir en cas de maladie mentale, et j’ai le sentiment que ce ne sera probablement pas la dernière, car le gouvernement libéral gère l’aide médicale à mourir non pas dans le cadre d'une conversation rationnelle et mesurée, comme elle mérite de l'être, ou dans le cadre d'une discussion axée sur une compréhension collégiale, mais plutôt comme une patate chaude, comme un travail de démolition qui met en évidence son profond engagement à briser le consensus dans le pays sur un enjeu qu’il a si cruellement mal évalué.
    À cause de cette négligence, ou peu importe la raison, nous nous retrouvons de nouveau à débattre d’une proposition qui aurait dû être abandonnée il y a longtemps. Au lieu d’essayer de discuter d’un projet de loi nuancé et bienveillant, nous avons ce texte dont nous sommes saisis aujourd’hui. Nous savons que nous ne pouvons pas simplifier un enjeu aussi fondamental que la capacité de l’État à autoriser qu'on mette fin à une vie. Nous savons que nous devons prendre en compte beaucoup plus d’éléments.
     Ce faisant, le gouvernement a remplacé les médecins par des propagandistes, les recommandations d’experts par une idéologie partisane et la raison par le dogmatisme. Nous avons entendu ceux qui sont en première ligne, notamment 80 % des psychiatres de l’Ontario, qui s’opposent à cet élargissement. Sept des dix ministres provinciaux de la Santé, ainsi que les trois ministres territoriaux de la Santé, sont favorables au report indéfini de l’élargissement de l’aide médicale à mourir. Nous avons entendu des défenseurs des droits, des personnes directement touchées par l’aide médicale à mourir en cas de maladie mentale, qui conviennent que cette proposition minimise la valeur de leur vie et la dignité inhérente à chaque être humain.
     L’admissibilité à l'aide médicale à mourir pour le seul motif de la maladie mentale témoigne du manque de respect du gouvernement pour cette dignité et de son manque de confiance dans la capacité des personnes aux prises avec des difficultés ainsi que dans leur capacité à prendre du mieux. Pire encore, cela témoigne d’une idéologie perverse dépourvue de garde-fous éthiques, qui est très éloignée d’un consensus resté longtemps inébranlable sur le fait que le gouvernement a pour rôle d’épuiser toutes les options possibles pour aider les gens.
     Plutôt que de proposer des traitements et des thérapies pour aider les personnes qui traversent une période difficile, il est désormais courant de proposer la mort sanctionnée par l’État. En tant que dirigeants, que parlementaires, nous avons le devoir de protéger la vie des Canadiens, de leur tendre la main, de les aider à se rétablir et à aller mieux.
     Nous croyons qu’il est possible de surmonter l’adversité et de demander de l’aide. Nous croyons que le système doit fonctionner pour ceux qui en ont cruellement besoin. Nous croyons que c’est possible, et nous le croyons parce que c’est en effet possible. Une intervention, des traitements et du soutien rapides ont aidé d’innombrables Canadiens à vivre une vie épanouie, productive et pleine de sens. Ce n’est pas seulement ma philosophie en tant que parlementaire; c’est le fondement même de ce que je crois être notre identité nationale. L’autre option est ce que je décris comme un État entièrement nihiliste, qui ne s’intéresse pas à la préservation de son propre peuple.
     Notre pays a été bâti par des personnes venues du monde entier en quête d’une vie meilleure à force d’espoir, de travail et de sacrifices. Nos vies ont été révolutionnées par les braves Canadiens qui n’ont jamais abandonné et qui ont tenu bon pour un pays qui ne les a jamais abandonnés. Notre histoire se définit par le courage d’affronter les obstacles difficiles qui nous attendent, et par la capacité de les surmonter plutôt que de nous laisser intimider par eux. Il ne s’agit pas seulement d’un débat sur ce projet de loi; il s’agit d’un débat fondamental sur ce que nous sommes en tant que Canadiens, sur ce que nous voulons être et sur les pouvoirs dont nous disposons en tant que Parlement.
     Je tiens à préciser que je ne veux pas minimiser ou nier les expériences personnelles intenses de nombreux Canadiens en matière de santé mentale, dont beaucoup sont à la Chambre, et dont beaucoup sont proches de personnes à la Chambre. Je sais que c’est un sujet profondément personnel pour quiconque a été confronté à cet enjeu.
(1535)
     Toutefois, je tiens à souligner publiquement que la vie de ceux qui souffrent n’est pas moins digne d’aide, de soutien ou d’amour. Je pense que c’est ce que dit ce plan éventuel, même avec une pause. Les militants de l’expansion ont tenté de rassurer les Canadiens en leur disant que l’aide médicale à mourir n’est pas un suicide, qu’il serait possible de la distinguer du suicide, mais lorsqu’on l’étend à ceux qui cherchent la mort pour la seule raison d'une maladie mentale, il est évident que l’aide médicale à mourir devient indiscernable du suicide.
     Par conséquent, malgré la poursuite idéologique de ce que j’appelle le nihilisme du gouvernement et l’incapacité de ce dernier à gérer ses propres mesures législatives, il ne pourra pas échapper à l’héritage très réel qu’il a laissé, un héritage qui deviendra encore plus apparent au fur et à mesure que les Canadiens verront un nombre croissant de manchettes sur le suicide assisté proposé aux membres des Forces canadiennes ou aux Canadiens marginalisés qui cherchent à échapper à la souffrance ou à la pauvreté.
     En d’autres termes, les gens peuvent aller mieux. Le rétablissement est possible. Si l’on peut abandonner tout espoir de guérison sur le plan de la santé physique, rien ne prouve que l’on ne peut pas surmonter des problèmes de santé mentale, et cela devrait suffire. Je ne saurais trop insister sur le fait que nous n’avons aucun moyen de savoir qu’il est impossible d’aller mieux.
     Nos méthodes ne sont pas assez avancées. C’est ce que disent les études. Seulement 47 % des prévisions concernant les résultats finaux sont correctes. Par conséquent, quand un médecin diagnostique une maladie mentale permanente, la probabilité qu'il ait raison est de 47 %. C’est comme jouer à pile ou face, mais avec de moins bonnes probabilités. Sommes-nous vraiment prêts à nous en remettre à la chance pour une chose aussi grave?
    Il est impossible pour les médecins d'aborder la maladie mentale de la même manière qu'un cancer en phase terminale, par exemple, ce qui vient accentuer la difficulté. La maladie mentale n'est pas visible quand on passe une IRM ou un test. Bien que ce ne soit pas le sujet ici, je me dois de poser la question suivante: à quel point est-il juste de demander aux médecins de prendre une décision sans pouvoir s'appuyer sur 100 % des preuves ou de prendre une décision d'après les preuves dont ils disposent, les récits du patient ou de sa famille, quand les apparences peuvent être trompeuses? Comment peut-on avoir l’esprit tranquille en sachant que le meilleur résultat a déjà été décidé?
     Nous ne pouvons pas laisser l’idéologie nous faire oublier les signaux d’alarme à chaque étape de ce processus. En l’absence de certitude, il est fondamentalement illégitime pour l’État de faire ce qui, selon moi, revient à jouer avec des vies humaines. Je soutiens certes la pause, mais pas parce qu’elle est bien argumentée, bien planifiée ou même bien réfléchie, mais parce qu’elle est nécessaire, et je ne pense pas qu’elle soit suffisante.
     Une pause, davantage de consultations et d’études ne signifient pas grand-chose si nous refusons d’écouter les faits et les idées qu’elles apportent. Aucun témoignage supplémentaire ne changera le fait que des doutes importants ont été soulevés quant à la moralité et à l’éthique de la mise en œuvre de l’aide médicale à mourir en cas de maladie mentale.
     Nous ne pouvons pas désentendre les mots prononcés devant le comité. Nous ne pouvons pas faire comme si nous n'avions pas lu les mots plaqués dans les journaux. Nous ne pouvons pas faire fi du témoignage de ceux qui, à juste titre, sont plus que sceptiques.
     Je veux que ceux qui se rangent du côté du gouvernement réfléchissent à ce que la proposition, et non la pause, signifie réellement pour les plus vulnérables. Pour moi, c’est inadmissible. Je ne peux pas comprendre la différence de point de vue quand la maladie mentale est le seul problème de santé qui permettrait à quelqu’un de demander qu'on mette fin à ses jours, un geste sanctionné par le gouvernement.
    Il n'y a qu'une pause qui se justifie. Il n'y a qu'une pause qui soit sûre. Il n'y a qu'une pause qui protège les innocents, les vrais malades et les plus vulnérables, et c'est une pause pour toujours. Toute autre pause est un échec de la Chambre.
(1540)
    Monsieur le Président, la manière dont les conservateurs abordent le débat m'étonne un peu. Ils ont clairement indiqué qu'ils sont contre l'élargissement de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant de maladies mentales. Toutefois, cet élargissement entrera automatiquement en vigueur le 17 mars si le projet de loi n'est pas adopté. Ils semblent vouloir empêcher l'adoption du projet de loi, surtout si l'on considère le vote.
    Les conservateurs souhaitent-ils que le projet de loi soit adopté? Si oui, l'appuieront-ils?
    Monsieur le Président, nous ne raterons pas une seule occasion de dire officiellement devant la Chambre que les libéraux ont rompu un consensus qui règne depuis longtemps au pays, à savoir que l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué n'est pas une option. Nous allons continuer d'en parler pour que les Canadiens sachent à quoi s'en tenir.
    Je sais qu'ils ont présenté un projet de loi, mais ce n'est pas à nous qu'il incombe de réparer le gâchis qui nous oblige à en débattre à la dernière minute parce qu'ils se sont mis les pieds dans les plats avec leur calendrier et leur projet de loi.
(1545)

[Français]

    Monsieur le Président, certes, l'aide médicale à mourir et la santé mentale sont des choses qui ne sont pas évidentes. Ce qui est surprenant, c'est qu'il y a une souffrance qui est intolérable pour certaines personnes. Un rapport d'experts a déterminé que ces personnes ne sont pas admissibles. Par exemple, les personnes qui sont en crise suicidaire, qui sont nouvellement prises en charge et diagnostiquées, qui refusent des traitements et dont la demande repose sur des vulnérabilités structurelles ne sont pas admissibles. Il y a des gens qui peuvent aider ces personnes et les soutenir. Ce n'est pas parce qu'on fait une demande d'aide médicale à mourir qu'on va la recevoir.
    Donc, les pensées des conservateurs par rapport à l'aide médicale à mourir sont inadéquates. Actuellement, il y a des gens qui souffrent et qui ont besoin de leur soutien.

[Traduction]

    Monsieur le Président, d'après les points soulevés par ceux qui se disent préoccupés par cette question, je pense qu'il est évident qu'il n'y a pas assez de données pour nous permettre d'affirmer qu'une personne ne pourra pas se rétablir. Ce n'est pas le travail des parlementaires d'encourager cette pratique, d'en faire une priorité pour le pays ou même de la permettre.
    Nous devons nous assurer d'améliorer le système pour que les gens puissent obtenir de l'aide. Nous ne devons pas avoir comme objectif de mettre en œuvre une vision utilitariste du monde où l'on cherche surtout à désengorger le système et où les gens peuvent faire tout ce qu'ils veulent. Nous ne pouvons pas simplement laisser tomber les gens. Nous devons essayer de les aider à se rétablir et à se sentir mieux. En leur offrant cette solution, je pense que nous renonçons à notre devoir fondamental de leaders et de parlementaires.
    Monsieur le Président, je suis d'accord avec ma collègue sur un bon nombre de points qu'elle a soulevés dans son discours. Voilà pourquoi j'ai voté contre l'amendement du Sénat au projet de loi C‑7 au cours de la législature précédente. Voilà pourquoi j'ai voté pour le projet de loi du député d'Abbotsford, à savoir le projet de loi C‑314. Voilà pourquoi j'appuie la recommandation formulée par le comité mixte spécial.
    Il y a amplement de reproches à faire aux libéraux, mais nous avons une échéance à respecter: le 17 mars. J'invite donc tous les députés à appuyer ce projet de loi, sachant qu'il doit aussi être étudié au Sénat par la suite.
    Pourquoi, dans ce contexte, les conservateurs ont-ils voté de la sorte ce matin, alors qu'il est impératif d'adopter ce projet de loi avant le 17 mars?
    Nous ne savons pas encore ce qui va se passer au Sénat, mais nous pouvons dire avec certitude ce qui va se passer à la Chambre. Le projet de loi dont nous sommes saisis est extrêmement important et il faut l'adopter avant le 17 mars.
    Monsieur le Président, nous n’allons pas limiter le débat à la Chambre parce que les libéraux ont mal géré leur programme législatif ou parce qu'ils ont mal fait leur travail. Nous allons continuer à avoir des discussions productives à ce sujet et nous assurer que les Canadiens savent qu’il y a des députés à la Chambre qui veulent que ce projet de loi soit adopté rapidement.
    Monsieur le Président, c'est toujours un honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre des communes sur des questions d’une grande importance pour le Canada. Je prends la parole aujourd’hui avec des sentiments partagés, car, de toute évidence, de nombreux Canadiens se penchent sur cette question, y réfléchissent et en discutent depuis des mois, voire des années. Plus récemment encore, avec l’élargissement de l'aide médicale à mourir, qui s’est fait à un rythme incroyablement rapide, les Canadiens sont de plus en plus nombreux à s’inquiéter. C’est pourquoi, aujourd’hui, j’espère joindre ma voix à celles qui demandent d’intensifier et de mettre en place les mesures de sauvegarde nécessaires pour empêcher qu'un grand plus nombre de Canadiens vulnérables aient accès à l'aide médicale à mourir.
     Le Canada a toujours été reconnu comme un pays d'espoir, où les gens pouvaient réaliser leurs rêves et leurs aspirations pour eux et pour leur famille. Pendant de nombreuses années, nous avons eu une excellente réputation sur la scène internationale en tant que peuple pacifique et plein d’espoir, mais il est inquiétant de constater que de plus en plus de voix s’élèvent, non seulement dans notre propre pays, mais aussi à l’échelle internationale, pour tirer la sonnette d’alarme quant à la direction prise par notre pays, en particulier en ce qui concerne l’accès à l’aide médicale à mourir pour un plus grand nombre de Canadiens et la prise d’une décision aussi définitive dans des moments de grande vulnérabilité.
     Il a été dit, et je l’ai déjà dit à la Chambre à propos de ce débat, que la valeur d’une nation se révèle dans la façon dont elle traite ses membres les plus vulnérables. Les personnes souffrant de maladie mentale, d’anxiété, de dépression, de peur et de désespoir font incontestablement partie des personnes les plus vulnérables de notre société. Il incomberait à la Chambre et au gouvernement actuel de veiller à ce que toutes les mesures de sauvegarde possibles soient mises en place pour offrir une voie d’espoir qui favoriserait et encouragerait la vie, même en pleine incertitude, face à des probabilités écrasantes et d’énormes obstacles qui se dressent sur le chemin d’une personne. La dernière chose que nous devrions faire à la Chambre est d’accélérer et de faciliter l’accès à l’AMM par un plus grand nombre de Canadiens.
     C’est troublant, et pas seulement pour de nombreux députés de ce côté-ci de la Chambre; nous avons entendu en comité le témoignage de nombreuses organisations de renom dont les représentants expriment de graves inquiétudes quant à l’orientation que prend notre pays. Je voudrais ajouter quelques citations à ce sujet.
     Il y en a deux de la Société canadienne de psychiatrie. Il est dit qu’il est impossible de prédire de façon légitime dans certains cas qu’une maladie mentale est irrémédiable, et qu’un nombre important de personnes recevant l’AMM lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué auraient vu leur état s’améliorer et se seraient rétablies.
     La Société canadienne de psychiatrie est aussi d'avis que, d'après les données, il est impossible de différencier et de distinguer les personnes ayant des idées suicidaires symptomatiques d’une maladie mentale de celles qui cherchent à recevoir l'aide médicale à mourir uniquement pour cause de maladie mentale. Les personnes suicidaires qui auraient pu bénéficier de la prévention du suicide recevraient alors l'AMM pour des motifs psychiatriques. Je le répète, cela ne vient pas d’un point de vue partisan. Cela vient de la Société canadienne de psychiatrie.
     Nous favorisons une culture qui encourage l’abandon face à une grande adversité, alors que les Canadiens ont toujours été du genre à relever de grands défis, à surmonter d’énormes obstacles, à surmonter l’adversité, à s’en sortir et à devenir de brillants exemples de ce que c’est que de surmonter de grands défis dans la vie. Je tiens à ce que notre réputation soit maintenue, et non à ce qu’il soit facile d’accéder à une décision aussi définitive et dont les conséquences sont aussi désastreuses.
     Encore une fois, selon la Société canadienne de psychiatrie, le processus politique menant à l’élargissement prévu de l’AMM pour les personnes atteintes de maladie mentale n’a pas été solide et complet, n’a pas reflété l’éventail des opinions et des préoccupations fondées sur des données probantes, et a été guidé de manière sélective par des gens qui militent en faveur de l'élargissement de l'aide médicale à mourir.
(1550)
    Il s'agit de faits d'une immense importance. Si on en tient compte, ils devraient donner une orientation claire à la Chambre sur la marche à suivre.
    La prochaine citation ne vient pas de ce qu'on pourrait appeler une tribune d'extrême droite. Il s'agit d'un extrait d'un article du Washington Post dans lequel on peut lire que « permettre à une personne atteinte de troubles mentaux de demander l'aide d'un médecin pour mettre fin à ses souffrances — en mettant carrément fin à sa vie — est l'inverse de la raison d'être de la psychiatrie, qui est de prévenir le suicide, pas de le faciliter ».
    La Dre Madeline Li, professeure du Département de psychiatrie de l'University Health Network, a dit à la BBC que « [f]aire de la mort une solution facile d'accès désavantage les personnes les plus vulnérables et laisse la société se débarrasser de ces dernières », en ajoutant qu'elle « ne pense pas que la mort devrait être une solution aux problèmes de la société ». Ce sont des professionnels au sommet de leur art qui parlent de la direction très grave que prend le Canada dans le dossier de l'aide médicale à mourir.
    La vice-présidente à la direction d'Inclusion Canada, un organisme qui se porte à la défense des personnes les plus vulnérables au Canada, a dit ceci: « L’[aide médicale à mourir] pour personnes en situation de handicap dont la mort n’est pas raisonnablement prévisible est un désastre discriminatoire ».
     Je le répète, on parle de grands défenseurs des plus vulnérables d'entre nous. Nous devons écouter ce qu'ils disent alors que nous étudions cette question. Nous devons tenir compte de l'avis des nombreux Canadiens qui sont inquiets et qui ont pris la parole, qui ont écrit à mon bureau, qui ont appelé mes collègues et communiqué avec eux à maintes reprises, j'en suis certain, pour dire qu'ils n'auraient jamais pensé que le Canada irait dans cette direction et qu'il nous faut changer de cap.
    Pour conclure, j'aimerais évoquer l'histoire d'un homme que je connais, un ami très cher. Je partage cette histoire avec sa permission. Robert McCoy est un homme de ma circonscription, Tobique—Mactaquac, qui a dû surmonter d'énormes difficultés au cours de sa vie. Il s'agit d'un jeune père de famille qui a commencé à devenir aveugle d'un œil. La maladie s'est rapidement propagée à l'autre œil et il a complètement perdu la vue. Il ne savait pas comment il allait subvenir aux besoins de sa famille, puisqu'il travaillait en forêt en tant que conducteur de débusqueuse. La situation lui paraissait insurmontable. Il a raconté publiquement son histoire. Il m'a dit qu'il était tellement désespéré à cette époque qu'il a sérieusement envisagé de mettre fin à ses jours. Il l'avait même planifié. Il pensait que si, par inadvertance, il passait devant un camion ou un véhicule, étant donné qu'il était aveugle, ses proches et d'autres personnes penseraient qu'il s'agissait d'un accident. Sa famille pourrait au moins profiter de l'argent de l'assurance pour joindre les deux bouts. Ayant atteint le fond du baril, il a lancé un appel de désespoir. Oui, la foi était importante pour lui, mais il a eu l'impression d'entendre à ce moment‑là une voix intérieure lui dire très clairement: « Tu vas survivre ».
    Ce moment lui a suffi, avec les encouragements de son épouse et de sa famille, pour repartir à zéro. Cet ouvrier forestier s'est mis à apprendre à vivre avec la cécité, est allé à l'université et a obtenu un diplôme. Il est aujourd'hui titulaire d'une maîtrise en sociologie et enseigne à l'Université St. Thomas, à Fredericton.
    J'ai parlé à Robert McCoy aujourd'hui, et j'ai été ravi de constater qu'il se porte bien. Je suis également heureux que pendant cette période de détresse, M. McCoy n'ait pas eu accès à des gens qui lui auraient proposé d'en finir avec sa vie, comme s'il s'agissait d'une solution potentielle à ses problèmes. Je suis heureux qu'il ait choisi la voie de l'espoir, de la guérison et de la résilience. En tant que parlementaires, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour promouvoir une culture centrée sur la vie et l'espoir, au lieu d'encourager une culture de la mort et du désespoir. J'espère que nous prendrons la bonne décision.
(1555)
    Monsieur le Président, je dois dire que mon collègue est un excellent orateur et j'ai bien aimé qu'il raconte l'histoire d'un de mes concitoyens. Je suis d'accord avec l'avis du député, et je travaille à améliorer l'accès aux services de santé mentale. En fait, j'ai moi aussi voté contre le précédent projet de loi au cours de la dernière législature.
     Je tiens à rappeler qu'il est très important d'établir une distinction claire entre l'aide médicale à mourir et les idées suicidaires pouvant survenir chez certaines personnes souffrant de dépression. Il est essentiel de bien faire cette distinction.
    Je me demande si le député pourrait nous dire ce qu'il en pense.
    Monsieur le Président, ma collègue représente une circonscription voisine, Fredericton, et c'est toujours un plaisir d'avoir de bonnes discussions avec elle.
    Je peux lui assurer que les préoccupations que nous entendons portent sur l'ouverture de cette voie. Les gens craignent qu'une personne qui traverse une période difficile de sa vie se prévale de cet élargissement de l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué.
    Nous devons fermer cette porte. Bien sûr, je me réjouis que la position du Parti conservateur soit de veiller à ce que cette porte demeure fermée indéfiniment, que ce point d'accès n'existe pas. Sans ces mesures de sauvegarde, je crains qu'un plus grand nombre de Canadiens choisissent cette option comme une façon de composer avec des circonstances dévastatrices dans leur vie.
    Je conclurai sur le point suivant. Je veux saluer un collègue de la Chambre, le député de Cariboo—Prince George, qui s'est battu vigoureusement pour la mise en place d'une ligne nationale de prévention du suicide, le 988. Pour donner une idée du besoin pour ce type d'espoir chez les Canadiens, les données révèlent que, chaque jour, plus de 1 500 personnes appellent ou envoient un message texte au 988. Voilà qui montre à quel point les gens ont soif d'espoir au Canada. Les gens veulent avoir des choix, mais la dernière option qu'on devrait leur offrir est l'accès à l'aide médicale à mourir.
(1600)

[Français]

    Monsieur le Président, je sympathise avec l'histoire racontée par mon collègue au sujet d'un de ses concitoyens. Cela dit, ce n'est pas de cette façon qu'on avance dans un débat, c'est-à-dire en prenant des cas particuliers pour essayer de faire progresser nos visions idéologiques. Depuis le début de la journée, j'entends les conservateurs présenter l'aide médicale à mourir comme si c'était un procédé qu'on fait de la même façon qu'on se loue un film sur Netflix. Ce n'est pas de cette façon que cela fonctionne.
    Ce qu'on demande à un législateur, c'est d'avoir un peu de hauteur et de faire passer ses considérations idéologiques après le bien collectif. Je connais des gens qui ont fait appel à l'aide médicale à mourir. Il s'agit d'un procédé médical comme les autres sur lequel on doit réfléchir. Ce que je conseille à mon collègue, c'est de faire passer ses intérêts idéologiques après le bien commun. Peut-être qu'on grandirait tous en fonctionnant de cette façon.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je remercie le député de nous avoir fait part de ses réflexions. Cependant, je m'inscris en faux contre ses propos.
    Lors des débats à la Chambre, on ne peut pas s'attendre à ce qu'un député traite séparément les éléments qui guident ses décisions et les valeurs qui lui sont chères. Si la Chambre des communes est bel et bien la Chambre du peuple, c'est-à-dire la Chambre qui représente la voix des gens ordinaires, alors aucune voix, aucune vision du monde, aucun ensemble de valeurs ni aucun concept ne devrait être rejeté du revers de la main. Il faut les accueillir à bras ouverts. Nous devrions avoir des discussions approfondies sur ces enjeux, surtout lorsqu'il s'agit d'une question de vie ou de mort. Non, je ne séparerai pas mes valeurs ni ma vision du monde de cette discussion. Elles contribuent à enrichir le débat.
    Monsieur le Président, dans son discours, le député de Tobique—Mactaquac a évoqué la communauté des personnes handicapées en exprimant des inquiétudes quant à leur bien-être en raison de l'élargissement de l'aide médicale à mourir pour les problèmes de santé mentale.
    La Chambre pourrait presser le gouvernement libéral de s'attaquer à la pauvreté engendrée par les lois, pauvreté à laquelle font face les personnes handicapées. Nous pourrions tous insister pour que le gouvernement finance la prestation canadienne pour les personnes handicapées. Si le député se dit préoccupé par le sort des personnes handicapées — et je ne doute pas de sa sincérité —, continuera‑t‑il d'exhorter le gouvernement à financer la prestation canadienne pour les personnes handicapées et à mettre fin à la pauvreté que les lois imposent aux personnes handicapées et, le cas échéant, comment le député compte-t-il s'y prendre?
    Monsieur le Président, j'ai cité Krista Carr, vice-présidente à la direction d’Inclusion Canada. L'organisme sonne l'alarme sur cette question. Si nous ne faisons pas bien les choses, les gens ne se rendront jamais aux autres points d'accès.
    Il est tout à fait essentiel que ce que nous faisons à la Chambre soit la chose la plus fondamentale qui soit, c'est-à-dire faire en sorte que ces gens aient accès à la guérison et à l'espoir. Si nous ne commençons pas par cela, nous ne pourrons jamais aborder les autres questions très importantes qui doivent être discutées et débattues. Commençons par le fait que nous devons, en tant que représentants du peuple, veiller à faire tout en notre pouvoir pour garantir à ces gens un accès à l'espoir et à la vie.
    Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole au sujet d'une question très délicate et chargée d'émotion.

[Français]

    Aujourd'hui, je suis heureux de parler du projet de loi C‑62. Ce projet de loi propose de prolonger l'exclusion temporaire de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes dont le seul problème médical invoqué est une maladie mentale.
    Nous proposons de prolonger l'exclusion de trois ans. Pour comprendre pourquoi une prolongation de cette exclusion est si importante à l'heure actuelle, nous devons examiner comment nous sommes arrivés à ce point du processus législatif.
(1605)

[Traduction]

    Comme les députés le savent, l'ancien projet de loi C‑7 a été adopté en réponse à l'arrêt Truchon de la Cour supérieure du Québec. Cet arrêt a établi que la loi initiale sur l'aide médicale à mourir, qui exigeait que la mort naturelle d'une personne soit raisonnablement prévisible, contrevenait à la Charte des droits et libertés.
    L'ancien projet de loi C‑7 a reçu la sanction royale et est entré en vigueur le 17 mars 2021. Cette loi comprenait une exclusion temporaire de deux ans de l'admissibilité pour les personnes souffrant uniquement de maladie mentale, ce qui signifiait que ces personnes deviendraient admissibles à recevoir l'aide médicale à mourir à compter du 17 mars 2023, si elles répondaient à tous les autres critères d'admissibilité. Ce délai de deux ans avait pour but de permettre à un groupe d'experts de mener un examen indépendant et de formuler des recommandations concernant les protocoles, les directives et les mesures de sauvegarde qui devraient s'appliquer aux demandes d'aide médicale à mourir présentées par des personnes atteintes d'une maladie mentale.
    Je partagerai mon temps de parole avec le député de Richmond Hill.
    Le 13 mai 2022, le « Rapport final du Groupe d'experts sur l'AMM et la maladie mentale » a été déposé au Parlement et publié. Le groupe d'experts a souligné que les cliniciens qui évaluent les demandes d'aide médicale à mourir évaluent déjà des cas très complexes et a conclu que certaines difficultés liées aux évaluations, comme déterminer l'incurabilité et évaluer la capacité décisionnelle, ne sont pas uniques aux demandes d'aide médicale à mourir faites par des personnes qui souffrent de troubles mentaux et ne s'appliquent pas non plus à tous les demandeurs qui ont un trouble mental. Le groupe d'experts a également conclu que les critères existants d'admissibilité à l'aide médicale à mourir et les mesures de sauvegarde prévues dans la loi constituent une structure adéquate pour encadrer l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué, tant qu'ils sont interprétés et appliqués correctement.
    Les recommandations du groupe d'experts servent de guide pour aider les cliniciens à mener à bien les évaluations complexes liées à l'aide médicale à mourir. Dans son rapport final, le groupe d'experts a formulé 19 recommandations. Celles-ci établissent des principes généraux pour encadrer l'aide médicale à mourir non seulement pour les personnes atteintes d'un trouble mental, mais aussi pour celles qui ont d'autres problèmes de santé qui suscitent des préoccupations liées à l'incurabilité, l'irréversibilité, la capacité décisionnelle, les tendances suicidaires ou la vulnérabilité structurelle, indépendamment du diagnostic de la personne.

[Français]

    Le gouvernement soutient les perspectives et les conseils généraux découlant des travaux du groupe d'experts. Je me permets de prendre quelques minutes pour mettre en évidence certaines des principales réalisations.

[Traduction]

    Le rapport du groupe d'experts recommande l'établissement de normes nationales de pratique en matière d'aide médicale à mourir pour les cas de maladie mentale et les autres cas complexes. Les normes de pratique aident les organismes de réglementation à évaluer la validité des décisions cliniques prises par les professionnels de la santé qui évaluent et prodiguent l'aide médicale à mourir. Elles clarifient également les obligations professionnelles des cliniciens en ce qui concerne l'aide médicale à mourir. En mars 2023, un modèle de norme de pratique pour l'aide médicale à mourir a été publié, accompagné d'un document de référence à l'intention des professionnels. Ce document comprenait une série de questions et réponses qui abordaient certains enjeux cliniques soulevés par le modèle de norme.

[Français]

    Ce n'est pas tout ce que nous avons fait pour aider à préparer une approche sûre de la prestation de l'aide médicale à mourir d'un bout à l'autre du Canada.
    Nous versons 4,9 millions de dollars à l'Association canadienne des évaluateurs et des prestataires de l'aide médicale à mourir pour qu'elle élabore et mette en œuvre un programme accrédité et adapté au Canada de soutien des praticiens. Ce programme comprend sept modules de formation qui traitent de divers sujets liés à l’évaluation et à la prestation de l’aide médicale à mourir, y compris des conseils sur la façon d’évaluer la capacité et la vulnérabilité, de traiter les cas plus complexes et d’évaluer les demandes d’aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème médical invoqué. Le programme d'aide médicale à mourir a été lancé en août 2023. Plus de 1 100 cliniciens s'y sont inscrits.
    Entre le moment où la loi sur l'aide médicale à mourir a été adoptée, en 2016, et la fin de 2022, plus de 44 000 Canadiens ont reçu l'aide médicale à mourir. La grande majorité de ces personnes étaient en fin de vie. En fait, les chiffres de 2022 montrent que 96,5 % des personnes ayant eu recours à l'aide médicale à mourir étaient en phase terminale et que les deux tiers avaient reçu un diagnostic de cancer. De nombreuses autres personnes ont demandé l'aide médicale à mourir, mais ont été jugées inadmissibles en raison des critères d'admissibilité stricts et des mesures de sauvegarde. D'autres encore ont retiré leur demande ou sont mortes avant de recevoir l'aide médicale à mourir. Ce n'est rien d'inattendu.
    Le gouvernement sait que la production de rapports publics est essentielle pour assurer la transparence et la confiance du public dans la loi. La loi initiale sur l'aide médicale à mourir de 2016 et la loi modifiée adoptée en 2021 prévoyaient toutes deux des obligations de collecte de données et de production de rapports publics sur les aspects importants de l'aide médicale à mourir. Depuis le 1er janvier 2023, nous avons élargi notre collecte de renseignements sur l'aide médicale à mourir.
(1610)
    J'aimerais profiter de cette occasion pour souligner les réalisations des provinces et des territoires ainsi que des principaux partenaires du système de santé, comme les professionnels de la santé, qui travaillent pour mettre en œuvre de façon sécuritaire l'aide médicale à mourir au sein de leurs systèmes de soins de santé.

[Traduction]

    Nous avons beaucoup avancé, mais on nous a clairement dit qu'il y avait encore du travail à faire. Les systèmes de santé provinciaux et territoriaux doivent se préparer davantage à soutenir les activités complémentaires qui peuvent être nécessaires à la gestion et à l'évaluation des demandes d'aide médicale à mourir lorsque la maladie mentale en est le motif.

[Français]

    Nous savons également que certains Canadiens et membres de la communauté médicale sont concernés par l'idée d'élargir l'admissibilité de l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant uniquement de maladies mentales.

[Traduction]

    Nous continuerons de travailler avec les provinces, les territoires et les principaux partenaires du système de santé pour favoriser la mise en œuvre et l'application sûres du cadre canadien de l'aide médicale à mourir, tout en protégeant les personnes susceptibles d'être vulnérables. Le groupe d'experts a également recommandé de consulter les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Nous sommes conscients de l'importance d'une bonne adhésion des peuples autochtones et d'un dialogue continu avec eux pour mettre en œuvre l'aide médicale à mourir d'une manière adaptée à leur culture.
    En partenariat avec les communautés autochtones, nous avons élaboré un vaste plan visant à recueillir l'adhésion des populations autochtones. Notre approche comprend la recherche du consensus social par les communautés autochtones elles-mêmes ainsi des activités organisées par le gouvernement fédéral, dont un outil en ligne, qui a déjà été lancé, et des tables rondes d'échange de connaissances, qui se tiendront de février à avril. Nous collaborons étroitement avec nos partenaires autochtones afin de concevoir un processus avec eux et à leur rythme.
    J'admets qu'il y a beaucoup de travail à faire pour démontrer que l'aide médicale à mourir est accessible aux personnes qui en ont besoin, et que des mesures de sauvegarde adéquates ont été mises en place. Toutefois, nous devons veiller à ne pas prendre cette décision dans la précipitation. C'est pourquoi il est très important de repousser d'au moins trois ans l'application de ce projet de loi aux personnes atteintes de troubles mentaux. Ainsi, l'ensemble des provinces et des territoires pourront disposer des outils de formation et d'évaluation nécessaires.
    Il y a un an, nous avons prolongé l'exclusion d'un an, soit jusqu'en mars de cette année. À l'approche de l'échéance, les provinces et les territoires nous disent tous que leurs systèmes de santé en sont à divers stades de préparation, et qu'il reste encore du travail à faire.

[Français]

    Les décisions que nous prenons concernant l'aide médicale à mourir ne sont pas faciles à prendre et elles ne devraient pas l'être.

[Traduction]

    Il s'agit de décisions de vie ou de mort, et nous devons bien faire les choses.

[Français]

    Ce que le gouvernement propose dans le projet de loi C‑62 est une prolongation de trois ans de l'exclusion de l'admissibilité de l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant uniquement d'une maladie mentale.

[Traduction]

    J'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi C‑62.
    Monsieur le Président, je commencerai par rappeler à mon collègue d’en face que les provinces et les territoires ont envoyé une lettre au ministre de la Justice de l’époque pour lui demander de suspendre indéfiniment l'élargissement de l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant de troubles mentaux, et pas seulement de le reporter de trois ans. Je lui rappelle également que la grande majorité des Canadiens s'opposent à l'élargissement de l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale. De même, un grand nombre de professionnels de la santé mentale d'un bout à l'autre du pays s'y opposent, eux aussi.
    Compte tenu de toutes ces circonstances, pourquoi le député appuie-t-il un report de trois ans plutôt qu'une suspension indéfinie de cette politique?
    Monsieur le Président, je remercie le député d’en face pour ses observations et pour sa question. Je lui rappelle que, en 2016, à l'adoption de la première loi sur l’aide médicale à mourir, j’étais député provincial. J’étais même procureur général de l’Ontario. J’ai eu l’occasion de travailler en étroite collaboration avec le gouvernement fédéral et le ministre provincial de la Santé de l’époque pour bien mettre en œuvre la loi sur l’aide médicale à mourir que la Chambre avait adoptée. Le travail a été difficile, et il a fallu mettre au point des programmes de formation et des cours appropriés, maximiser l'état de préparation et prévoir des mesures de sauvegarde pour que la prestation de l'aide médicale à mourir dans la province soit conforme à la loi.
    C’est la voie à suivre pour les personnes qui vivent avec de troubles mentaux. Il faut s’assurer que les provinces et les territoires sont prêts. Or, ils demandent du temps. Le gouvernement est convaincu que, après un report de trois ans, ils disposeront des outils, des programmes de formation et des cours nécessaires pour offrir le service de la façon la plus appropriée.
(1615)

[Français]

    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de son intervention, et particulièrement des bouts en français.
    Je suis quand même étonné d'apprendre que, dans l'évolution de ce débat, qui n'a pas 10 000 ans, le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir s'est entendu sur des recommandations. Ces recommandations se retrouvent dans l'amendement du Bloc québécois dont nous débattons aujourd'hui. À mon sens, cet amendement est très simple. On parle de « prendre en considération les régimes provinciaux d’aide médicale à mourir applicable aux demandes anticipées formulées par des personnes atteintes d’une maladie menant à l’inaptitude à consentir aux soins ». Selon moi, cela relève du gros bon sens.
    Ne pourrions-nous pas voter sur cet amendement d'abord et ensuite faire un bout de chemin pour nous assurer que les gens qui en ont besoin peuvent avoir accès à l'aide médicale à mourir de façon libre et éclairée?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question.

[Traduction]

    Les partenariats avec les provinces, y compris le Québec, sont extrêmement importants pour que les dispositions législatives sur l'aide médicale à mourir soient appliquées correctement. Comme nous le savons, la prestation des services de santé relève des provinces. Il est vraiment important que les provinces disposent de tous les outils et du temps nécessaires pour administrer l'aide médicale à mourir de façon adéquate.
    C'est pourquoi des efforts importants sont déployés pour mettre en place le programme, la formation et les outils dont les organismes de réglementation ont besoin pour s'assurer que la formation et le programme sont respectés, et que les mesures de sauvegarde sont prises correctement. C'est également pour cela que le report de trois ans prévu dans le projet de loi C‑62 est absolument nécessaire.
    Monsieur le Président, comme le secrétaire parlementaire le sait très bien, il ne reste en fait que deux semaines de séance pour que ce projet de loi se rende jusqu'au bureau de la gouverneure générale. Nous sommes déjà à peu près au milieu de la première de ces deux semaines. Je pense que la Chambre des communes fera son devoir et adoptera le projet de loi cette semaine, mais selon des reportages dans les médias, des sénateurs s'opposent ouvertement à l'objet de ce projet de loi et menacent d'en bloquer l'étude.
    Quelles mesures le gouvernement prend-il pour veiller à ce que le Sénat n'aille pas à l'encontre de la volonté de la Chambre démocratiquement élue afin que le projet de loi se rende à temps au bureau de la gouverneure générale?
    Monsieur le Président, je remercie le député d'en face de sa question. Je remercie également les députés de l'excellent travail qu'ils ont accompli pour faire adopter le projet de loi à la Chambre le plus rapidement possible afin qu'il puisse être renvoyé au Sénat et devenir loi d'ici le 17 mars.
    Je suis convaincu que le Sénat s'acquittera adéquatement de sa responsabilité et adoptera le projet de loi. Je sais que le ministre et le procureur général s'adresseront aux sénateurs et répondront à leurs questions. J'espère que cela les convaincra de la validité du projet de loi et de la nécessité de l'adopter d'ici le 17 mars.
    Monsieur le Président, c’est avec fierté et en ayant pleinement conscience de notre grave responsabilité que je m’adresse à la Chambre aujourd’hui au sujet du projet de loi proposé par le gouvernement, le projet de loi C‑62, qui vise à prolonger de trois ans la suspension temporaire de l’admissibilité à l’aide médicale à mourir pour les personnes souffrant exclusivement d'une maladie mentale. Notre débat ne porte pas seulement sur les politiques, mais sur l’essence même de la compassion, de la dignité et de la complexité de la souffrance humaine.
    Le concept de l’aide médicale à mourir touche une corde sensible au sein de la population canadienne, car il touche aux valeurs fondamentales de l’autonomie et du droit de mettre fin à des souffrances intolérables. Dans Richmond Hill, comme partout ailleurs au pays, je me suis entretenu avec des Canadiens ordinaires, des professionnels de la santé et des groupes de défense des droits. Ces conversations m’ont permis de prendre connaissance d’un vaste ensemble de croyances, confirmant ainsi l’importance cruciale d’examiner cette question avec sensibilité, avec respect et avec un engagement indéfectible à l’égard du bien-être de tous les Canadiens.
    Depuis l’instauration de l’aide médicale à mourir, mon bureau a organisé trois réunions du conseil communautaire pour discuter en profondeur de ce sujet. Nous avons aussi sollicité la collaboration de l’Association canadienne pour la santé mentale et de nombreuses autres associations professionnelles pour approfondir la discussion avec les populations locales. À la suite du rapport du comité mixte spécial, nous avons convoqué notre dernière réunion du conseil communautaire pour recueillir les points de vue et les commentaires des citoyens. Leur réponse a été claire et unanime: ils sont favorables au report de l’échéance. Cette participation active au sein de notre collectivité souligne l’importance d’une réflexion approfondie et d'un examen rigoureux concernant cette question.
    Le report proposé dans le projet de loi C‑62 n'est pas une simple mesure dilatoire. Il s'agit d'un sursis essentiel qui nous permettrait d'examiner de plus près l'interaction entre la maladie mentale et le choix définitif de mettre fin à sa vie. Les problèmes de santé mentale sont complexes et diffèrent d'une personne à l'autre, ce qui rend difficile la tâche de les intégrer à nos idées habituelles concernant les maladies qui conduisent à la mort. Il faut examiner chaque situation individuellement, en prenant au sérieux la douleur de la personne, tout en veillant à ce que des mesures de protection solides soient prises pour éviter les choix précipités.
    Le gouvernement est conscient de l'importance des données et des rapports relatifs à l'aide médicale à mourir, à un point tel que la loi initiale de 2016 obligeait le ministre de la Santé à recueillir des données et à présenter un rapport annuel sur l'évaluation et la prestation de l'aide médicale à mourir. Ce système de surveillance officiel est important pour nous aider à mieux comprendre qui demande l'aide médicale à mourir au Canada, quels problèmes de santé sont invoqués et quelles sont les tendances relatives à l'aide médicale à mourir depuis sa légalisation en 2016. À ce titre, nous travaillons en collaboration avec les provinces et les territoires ainsi qu'avec les professionnels de la santé pour établir un système de surveillance robuste. Il est important de souligner qu'il s'agit d'un effort de collaboration considérable.
    Comme le savent les députés, le 17 mars 2021, un projet de loi modificatif fédéral a été adopté pour étendre l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes dont la mort naturelle n'est pas raisonnablement prévisible, à condition qu'elles satisfassent aux autres critères d'admissibilité.
    Depuis l'adoption de la nouvelle loi, la grande majorité — 96,5 % — des décès liés à l'aide médicale à mourir concernait des personnes dont la mort était raisonnablement prévisible. Bien entendu, les deux tiers avaient reçu un diagnostic de cancer. En 2022, à peine 3,5 % des décès liés à l'aide médicale à mourir, soit 463 décès, concernaient des personnes dont la mort n'était pas raisonnablement prévisible, ce qui représente moins de 0,2 % de la totalité des décès au Canada. Parmi ces 463 décès, près de la moitié des personnes avaient un trouble neurologique comme la sclérose latérale amyotrophique ou la maladie de Parkinson comme principal problème de santé sous-jacent. Les autres personnes souffraient de divers autres problèmes complexes, dont des comorbidités, des maladies cardiovasculaires, des défaillances d'organes et des maladies respiratoires.
    Même si l'échantillon actuel est petit, les données de 2022 indiquent que dans les cas où la mort n'était pas raisonnablement prévisible, 64 % des personnes ont été autorisées à recevoir l'aide médicale à mourir, par rapport à 83 % des personnes dans les cas où la mort était prévisible. Chaque demande d'aide médicale à mourir concernant une personne dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible est complexe et unique, et tout indique pour l'instant que le taux d'approbation pour l'aide médicale à mourir dans ce genre de cas est beaucoup plus faible que lorsque la mort de la personne est raisonnablement prévisible.
(1620)
    Le processus décisionnel relatif à l'aide médicale à mourir, en particulier dans le contexte de la maladie mentale, est d'une grande complexité. Il exige une évaluation méticuleuse de l'état de la personne, un examen de toutes les options de traitement viables et une compréhension approfondie de l'expérience de vie de la personne concernée. Ce processus n'est pas entrepris à la légère. Il est fondé sur l'empathie, l'expertise clinique et le respect rigoureux des normes d'éthique.
    J'ai également participé à des discussions à ce sujet en 2016 et de nouveau en février 2023. C'est aujourd'hui mon troisième discours à la Chambre sur ce sujet, qui revêt une importance personnelle pour moi et qui, sans aucun doute, touche de nombreux ménages de Richmond Hill et d'ailleurs.
    Je tiens à souligner l’engagement inébranlable du gouvernement à mener des enquêtes approfondies et collaboratives, de concert avec les intervenants provinciaux, territoriaux et sociétaux, pour veiller à ce que l’aide médicale à mourir soit administrée avec des mesures de sauvegarde rigoureuses afin de protéger les personnes vulnérables tout en respectant les droits et la dignité des demandeurs.
    Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement a adopté l'an dernier le projet de loi C‑39, qui prolonge jusqu'en mars de cette année le moratoire sur l'aide médicale à mourir pour les personnes dont le seul trouble de santé invoqué est d'ordre mental. Cette prolongation s'est avérée essentielle pour faciliter la prestation sécuritaire de l'aide médicale à mourir, pour permettre la diffusion et l'adoption plus larges des ressources essentielles parmi les professionnels de la santé et des soins infirmiers et pour assurer la préparation des infrastructures de santé.
    De plus, cette période a donné au gouvernement un délai précieux afin d'examiner le rapport concluant du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. Le report d'un an s'est révélé inestimable. Il a permis au comité mixte spécial de mener un examen en octobre 2023 sur l'état de préparation du Canada à recevoir les demandes d'aide médicale à mourir pour des troubles mentaux.
    Le 29 janvier 2024, le comité a déposé son troisième rapport, qui comprenait des recommandations concernant l'état de préparation du Canada à fournir sans risque l'aide médicale à mourir dans ces circonstances. Compte tenu des recommandations du comité, le gouvernement a présenté le projet de loi C‑62 afin de prolonger jusqu'au 17 mars 2027 la période d'inadmissibilité à l'aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème de santé invoqué. Ce report vise à donner à notre système de santé suffisamment de temps pour se préparer à recevoir les demandes d'aide médicale à mourir dans de pareils cas.
    Nous avons eu des discussions approfondies avec des experts en santé et avec la population et il en est ressorti qu'il était nécessaire de prévoir plus de temps afin de maintenir l'intégrité de ce processus. Ce report nous aiderait également à créer et à offrir des programmes de formation spécialisée pour les travailleurs de la santé, à élaborer des politiques détaillées et à encourager les discussions sur cette question importante. L'objectif est de créer un système qui tient compte de la complexité de la maladie mentale, qui protège les personnes à risque, qui respecte les droits et la dignité de chaque personne, qui est conforme à la Constitution, et qui garantit les mesures de sauvegarde appropriées.
    En conclusion, nous savons que le régime d’aide médicale à mourir a permis de soulager la souffrance de milliers de Canadiens jusqu’à présent, dont la grande majorité était déjà en fin de vie, et que les personnes qui vivent avec des souffrances intolérables continueront d'envisager la possibilité de recourir à l’aide médicale à mourir à l’avenir.
    Nous nous sommes engagés à assurer la transparence et la reddition de comptes de tous les ordres de gouvernement pour renforcer la confiance du public à l'égard du régime d'aide médicale à mourir. Je suis également convaincu que nous allons respecter cet engagement en fournissant aux Canadiens des renseignements exacts et fiables sur l'aide médicale à mourir à mesure que celle-ci évolue au pays.
    Monsieur le Président, je reconnais les effets profonds de cette question sur moi-même, sur les électeurs de Richmond Hill et sur d'innombrables autres Canadiens, et je suis persuadé que ce projet de loi facilitera l'adoption de l'approche prudente et réfléchie nécessaire pour traiter adéquatement cette question délicate.
(1625)
    Monsieur le Président, la situation actuelle est semblable à celle dans laquelle nous nous trouvions l'an dernier au sujet du projet de loi C‑39. On peut établir un lien direct avec l'amendement du Sénat visant le projet de loi C‑7. Le gouvernement avait alors fait volte-face. Il avait d'abord invoqué la Charte en expliquant pourquoi il excluait les troubles mentaux, puis il avait accepté l'amendement du Sénat.
    L'an dernier, le projet de loi C‑39 visait à reporter l'échéance d'un an. Nous sommes maintenant saisis du projet de loi C‑62, qui vise à reporter cette même échéance de trois ans. On dirait que tout ce que nous essayons de faire, c'est du rattrapage au sujet de cette modification à la loi. La loi a été changée avant que le travail nécessaire ne soit effectué.
    Est-ce que mon collègue regrette d'avoir voté pour cet amendement du Sénat compte tenu de tout ce qu'il sait maintenant et de tout le rattrapage que nous avons tenté de faire dans ce dossier très important et délicat?
    Monsieur le Président, par votre entremise, j'aimerais remercier le député d'en face, non seulement pour le travail qu'il a accompli au sein du comité spécial, mais aussi pour le point qu'il soulève.
    Il ne faut pas oublier que, à ce moment-là, nous examinions également le projet de loi sous l'angle constitutionnel. Cela nous a permis d'aborder de nombreuses questions. Nous avons pris en considération les politiques, les procédures, le concept constitutionnel et les droits des Canadiens. Je crois que c'était la bonne décision à prendre.
    Cependant, nous avons depuis eu l'occasion de nous pencher sur l'étape suivante, c'est-à-dire la mise en œuvre et les détails qui y sont liés. Lorsque nous avons commencé à travailler avec les provinces et les professionnels, nous nous sommes rendu compte qu'il y a beaucoup de possibilités de collaboration en ce qui concerne l'état de préparation et les mesures de sauvegarde, et que nous avions besoin de plus de temps. Nous espérions qu'une année serait suffisante pour y arriver, mais, encore une fois, il est devenu évident que nous avions besoin de plus de temps. Par conséquent, la prolongation dont nous parlons vise à trouver un juste équilibre entre la nécessité de veiller à ce que tous les Canadiens puissent exercer leur droit constitutionnel et la nécessité de mettre en place des mesures de sauvegarde pour éviter les faux pas.
(1630)
     Monsieur le Président, je ne suis pas certain de savoir à quel droit constitutionnel à l'aide médicale à mourir le député d'en face fait référence.
     Il veut avoir davantage de temps pour découvrir cette mesure législative. La difficulté, bien sûr, c'est le concept d'irrémédiabilité. Le gouvernement libéral peut prendre les mille prochaines années pour étudier ce projet de loi, mais il est évident, d’après les experts de tout le pays, que la question du caractère irrémédiable de la maladie mentale ne sera pas résolue. Comment va-t-il régler cela avec les électeurs qui l'enverront faire sa valise aux prochaines élections?
     Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de répondre à la dernière partie de la question. J'ai eu l'honneur et le privilège de représenter Richmond Hill au cours des trois derniers mandats et je compte sur mes concitoyens et sur le bon travail que j'ai accompli pour être réélu afin de pouvoir revenir ici et les représenter à nouveau. Restons-en là.
     Ce qui est important, c'est que la question de l'irrémédiabilité est très complexe et qu'il faut du temps pour comprendre chaque cas. Nous devons nous assurer que toutes les mesures de sauvegarde sont mises en place pour éviter d'entraîner des risques et des préjudices indus.

[Français]

    Monsieur le Président, nous discutons d'un projet de loi qui est très sensible pour différentes raisons; et chaque personne a sa raison d'être touchée par ce projet de loi. Il y une motion qui demande de faire la distinction entre la dégénérescence neurocognitive et la maladie mentale.
    Concernant les maladies dégénératives neurocognitives, j'aimerais connaître l'opinion de mon collègue sur la possibilité de légiférer plus rapidement afin que les personnes atteintes d'Alzheimer, par exemple, puissent décider, alors qu'elles sont encore conscientes, quand et si elles veulent que ça cesse, parce que cela demeure un choix.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ai eu le plaisir de travailler avec ma collègue au sein de plusieurs comités, et je la remercie de son point de vue.
    Ce sont les complexités auxquelles elle fait allusion qui nous ont forcés, maintenant que nous sommes sur le point d'adopter cette mesure législative, à prendre du recul pour examiner la gamme des maladies existantes et les défis à relever pour pouvoir nous assurer que les bonnes mesures de sauvegarde sont en place. Oui, il faut tenir compte de tous ces facteurs.
    J'espère qu'au cours des trois prochaines années, en collaboration avec les provinces, les professionnels et les personnes ayant une expérience vécue, nous serons en mesure de répondre à certaines de ces questions clés.

[Français]

    Monsieur le Président, je voudrais vous informer que je vais partager mon temps de parole avec la députée de Shefford.
    Je prends la parole aujourd’hui sur un sujet qui me passionne. Je suis travailleuse sociale. J’ai passé ma carrière au service des aînés qui veulent vivre à domicile, mais aussi de ceux qui sont hébergés dans des centres hospitaliers de soins de longue durée, ou CHSLD. Je pourrais dire que je vais faire un discours, mais il s'agit surtout d'un témoignage parce que ce matin, bien sincèrement, mes oreilles ont saigné; j’ai entendu des énormités sur toute la question de l’aide médicale à mourir.
    Je rappelle qu’au Bloc québécois, nous défendons une conception humaniste de l’aide médicale à mourir: l’importance du droit à la dignité, au consentement libre et éclairé et, surtout, le droit à l’autodétermination de la personne. Cela veut dire que je suis la meilleure personne pour choisir ce qui va m’arriver, parce que je le fais en étant libre et éclairée.
    J’ai envie de raconter une anecdote, mais j'ajouterai que ce n’est pas vraiment agréable à raconter. Comme je l'ai dit, je suis travailleuse sociale et je garde mon adhésion à mon ordre professionnel, parce que je trouve cela important. Aujourd’hui, la Chambre a une députée, mais aussi une travailleuse sociale qui s’adresse à ses collègues.
     J’ai accompagné une dame âgée dans un CHSLD. Elle avait la sclérose en plaques. Ça faisait des années qu’elle était hébergée. Tranquillement, peu à peu, elle a perdu son autonomie, jusqu’à ce qu’il lui reste un mouvement de tête, la capacité d’avaler et deux doigts qui fonctionnaient. C’était juste assez pour faire fonctionner son fauteuil roulant. Elle a demandé l’aide médicale à mourir.
    Comme travailleuse sociale, j’avais la tâche d’aller évaluer professionnellement si sa demande était libre et éclairée et si elle consentait demander un soin de manière libre et éclairée. J’ai fait mon travail. Je suis allée à l’université et j’ai des connaissances cliniques qui me permettaient d’être témoin, de juger professionnellement et d’avoir un jugement clinique quant à la demande de cette dame qui souffrait depuis des années, confinée dans son lit.
     Imaginons ce que c'est d'être dans son lit à longueur de journée, que des gens doivent nous retourner pour qu’on ne fasse pas de plaies, qu’on n’a plus la possibilité d’aller à la salle de bains, qu’on est incontinent, qu’on n’a plus la possibilité de se gratter le front et qu’il faille sonner pour qu’une préposée vienne nous gratter parce que ça nous démange.
    La dame dont je parle a fait une demande d’aide médicale à mourir. Or, sa demande a été refusée parce que l’ensemble des membres de l’équipe multidisciplinaire jugeait que cette personne n’était pas en état de prendre une décision vraiment libre, qu’elle était en dépression et que ce n’était donc pas encore le moment pour elle de passer à cette étape.
    Quand j’entends les amis conservateurs nous dire qu'il s'agit de faire la demande et que, le lendemain matin, on reçoit la piqure et on meurt, je vais le dire: comme professionnelle de la santé et travailleuse sociale, j’ai mal d’entendre ça. Comme députée, j’ai honte, parce que c’est mal informer les gens. Ce n’est pas parce qu’on demande l’aide médicale à mourir qu’on l’obtient. Il y a un paquet de monde autour de ces gens qui évaluent leurs capacités, leur maladie et qui jugent ensemble si cette personne peut demander l’aide médicale à mourir et l’obtenir. On est dans un pays démocratique. On peut faire des demandes. Ça ne veut pas dire que tout est permis et qu’on peut automatiquement l’obtenir. Ce matin, j’ai préféré écouter les discours à partir de mon bureau, parce que j’aurais eu de la misère à affronter les députés qui ont dit des énormités à ce sujet.
    C’est la même chose pour les personnes handicapées. On dirait que, pour certains députés, les personnes handicapées ne sont pas intelligentes, qu’elles ne peuvent pas prendre de décisions et que ce sont des gens qui ont besoin d’être dirigés. Je regrette, je suis peut-être émotive, mais j’ai un profond respect de l’être humain. Les êtres humains sont capables de prendre les décisions qui les concernent.
    Dans l’aide médicale à mourir, je le répète, ce n’est pas parce qu’on fait sa demande qu’on l’obtient. Les professionnels qui entourent ces gens ne sont pas des innocents. C’est du monde qui a étudié: des médecins, des infirmières, des travailleurs sociaux et des ergothérapeutes. Le personnel soignant, ce sont des professionnels.
    Le processus de l’aide médicale à mourir au Québec est long. Des fois, des gens la demandent trop tard. Ils perdent la capacité de consentir à nouveau dans le processus et manquent leur coup. Ils souffrent, parce qu'ils ont perdu toute la capacité cognitive de consentir une fois de plus à l'aide médicale à mourir.
(1635)
    Nous sommes d'accord pour dire que nous discutons aujourd'hui d'une question très délicate et très complexe. Il y a des députés à la Chambre qui font grandement baisser le niveau de discussion et de débat. Franchement, j'en ai mal au cœur, et je répète que j'ai honte de ce que j'ai entendu ce matin.
    La proposition du Bloc québécois est assez nuancée. On sait que le Québec a créé une loi et veut permettre aux personnes de faire une demande anticipée. Qu'est-ce que cela veut dire? Si le député de Rosemont—La Petite-Patrie recevait un diagnostic de démence précoce ou d'Alzheimer vers l'âge de 45 ans, il pourrait décider qu'il n'est pas question qu'il meure dans un lit de CHSLD, recroquevillé comme une crevette et dépendant de tout le monde. Il déciderait donc de rédiger ses demandes anticipées et de faire confiance à son entourage afin de recevoir l'aide médicale à mourir quand tous les critères qu'il aurait décrits seraient respectés. Au Québec, on est prêt à faire cela.
    D'ailleurs, le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, qui a réfléchi pendant un an, est arrivé à la même conclusion: cela a du bon sens. Une personne qui est bien dans sa tête, qui a été évaluée et qui veut faire ses demandes anticipées devrait être en mesure de le faire, et surtout de l'obtenir.
    Ce qui arrive, c'est que le projet de loi est peureux, qu'il manque d'ambition et de courage politique. On abandonne des gens qui, aujourd'hui même, voudraient se prévaloir des demandes anticipées parce qu'ils sont atteints d'une forme de démence, d'une sorte de maladie neurocognitive incurable. Ils connaissent la fin. C'est une fin atroce qui comprend de la souffrance et de la dépendance envers leur environnement.
    Si je reçois un diagnostic de démence précoce et que je ne reconnais plus mes enfants et mes petits-enfants, si je suis agressive, si je fais mes excréments dans ma culotte et si je n'arrête pas de marcher à longueur de journée parce que je suis errante et que je n'ai plus de vie, je veux que mes enfants disent que je remplis toutes les conditions et qu'ils demandent qu'on me laisse partir parce que je suis prête et que ce sont mes volontés. Au Québec, on a reconnu cela. Malheureusement, parce que le gouvernement ne veut rien entendre du Québec, il ne permet pas aux praticiens, aux médecins, aux infirmières, aux travailleurs sociaux de faire leur travail. Ils pourraient être soumis à des poursuites judiciaires qui seraient entamées par la famille ou par un tiers. Que va-t-il se passer? Des personnes au Québec vont vraiment souffrir parce qu'ici, à la Chambre, on manque de courage et on ne veut pas accompagner la province qui est prête à passer à un autre niveau. Pour ce qui est des demandes anticipées, nous sommes prêts.
    Au Bloc québécois, nous étions toutefois d'accord pour dire que, concernant les troubles mentaux, on n'avait pas nécessairement fait le tour de la question et on avait encore besoin d'une petite année pour réfléchir et pour voir que le terrain se prépare. Or, trois ans à attendre, c'est trop. La société avance plus vite que les législateurs. Il faut que les gens à la Chambre prennent conscience du fait qu'ils abandonnent des personnes qui vont souffrir.
    Ma grand-mère était croyante. À 91 ans, elle souffrait le martyre, elle était sur le point de mourir. Elle refusait les traitements de morphine, parce que, selon sa religion, ceux qui souffrent iront au paradis. Elle refusait et elle souffrait. C'était un choix. Nous avons respecté son choix de souffrir pour aller directement au paradis même si nous savions bien qu'elle irait directement au paradis. Or, selon elle, elle devait souffrir. Nous l'avons respectée. Elle a refusé toutes les injections de morphine. Aujourd'hui, on a avancé. Les gens ont le droit de choisir comment ils vont quitter la Terre. Je répète que ce n'est pas parce que les gens demandent l'aide médicale à mourir qu'ils l'obtiennent.
    C'est un cri du cœur aujourd'hui que je lance. Pour toutes les personnes qui en auront besoin, entendons le consensus de la société québécoise, entendons les Québécois et les Québécoises qui disent que le Canada peut prendre le temps de réfléchir, mais que, au Québec, on est prêt et on veut la permission de le faire correctement et légalement.
(1640)
    Monsieur le Président, je remercie ma collègue de son cri du cœur, de son discours. Je me suis senti interpellé à un moment donné. J'espère que je n'aurai pas ce diagnostic bientôt. Je suis pas mal d'accord avec elle sur le fond de la question.
     Je n'ai pas suivi le dossier dans toutes ses formalités et ses procédures. Cela dit, je suis assez d'accord qu'il y a un consensus au Québec concernant les demandes anticipées avec des critères définis, des proches qui peuvent pendre soin du malade et des professionnels de la santé en appui.
    Je suis assez d'accord avec ma collègue sur le fait que le gouvernement fédéral devrait se montrer ouvert, s'asseoir et discuter avec le Québec pour trouver une solution, peut-être même un accommodement raisonnable, pour être capable de respecter le consensus de la société québécoise, qui, à ce chapitre, semble aller dans la même direction.
(1645)
    Monsieur le Président, je suis contente d'entendre mon collègue qui comprend le consensus du Québec. Maintenant, je vais lui demander de convaincre sa formation politique de soutenir l'amendement du Bloc québécois, qui propose la modification du Code criminel pour que les prestataires de services ne puissent pas être poursuivis en justice pour leurs actions auprès des personnes qui font des demandes anticipées et qui obtiennent le service. Je l'encourage à parler et à être un leader de sa formation politique pour convaincre ses collègues.
    Ce n'est pas parce que les autres ministres de la Santé des autres provinces et territoires ne sont pas prêts que le Québec est obligé de supporter cette lenteur. Le Québec est prêt à aider les personnes souffrantes qui le veulent et qui le demandent.
    Je le dis encore une fois. Je ne sais pas s'il y a ici des députés anglophones qui ont leurs oreillettes, mais ce n'est pas parce qu'on demande l'aide médicale à mourir qu'on l'obtient.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je trouve certains aspects du débat d'aujourd'hui très troublants, car les exemples se multiplient — j'en entends parler dans mon bureau de circonscription et dans les médias —, mais la députée insinue que le débat est tranché. Par conséquent, quiconque aurait des questions valables n'aurait pas vraiment le droit de les poser. Ce n'est tout simplement pas ainsi que fonctionne notre démocratie. Il est troublant de constater que certains députés du Bloc québécois, et même certains libéraux, adoptent une telle approche aujourd'hui, alors que nous avons entendu une foule de choses très préoccupantes.
    Même au comité spécial, dont il a été question, le Collège des médecins du Québec a laissé entendre que les nourrissons nés avec un handicap pourraient être euthanasiés. De plus, certains militaires et anciens combattants se sont fait offrir l'aide médicale à mourir plutôt que des traitements, ce qui est inquiétant. Il y a un tas de questions auxquelles il faut répondre. Il est temps de donner de l'espoir aux Canadiens, au lieu de se contenter de donner à quelqu'un la possibilité de mettre fin à ses jours ainsi.

[Français]

    Monsieur le Président, je garde mon calme, parce que ce que j'ai envie de dire, je ne peux pas le dire. Ce serait non parlementaire.
    Je vais dire quelque chose concernant le Comité mixte sur l'aide médicale à mourir. Il y a eu un consensus unanime sur la recommandation no 21 que je vais lire: « Que le gouvernement du Canada modifie le Code criminel pour permettre les demandes anticipées à la suite d'un diagnostic de problème de santé, de maladie ou de trouble grave et incurable menant à l'incapacité. » Ce n'est pas moi qui le dis. C'est un comité mixte où siégeaient des députés de tous les partis à la Chambre et des sénateurs. Cela s'est dit en février 2023.
    Moi, au Québec, j'ai été travailleuse sociale. Jamais au grand jamais n'y a-t-il eu des enfants qui se sont fait euthanasier au Québec. Ce n'est pas de cela qu'il est question.
    Je pense que le député n'a pas écouté mon discours. Ce que j'ai dit, c'est que tous ceux qui demandent l'aide médicale à mourir ne l'obtiennent pas; quant à ceux qui l'obtiennent, c'est à la suite d'un processus clinique rigoureux et professionnel.
     Monsieur le Président, ce n'est pas facile de parler après la députée de Salaberry—Suroît. Ce n'est pas évident non plus parce que nous avons tous en tête des gens à qui nous pensons lorsque nous parlons de cela. Nous avons tous perdu des proches au cours des derniers mois et des dernières années. Nous avons tous vécu des expériences différentes. Certaines personnes demandent l'aide médicale à mourir, d'autres non, mais une chose est certaine: cela reste un dossier très délicat. C'est donc avec beaucoup d'humilité et de sensibilité que je prends la parole aujourd'hui à propos du projet de loi C‑62, Loi no 2 modifiant la Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), un sujet dont nous parlons depuis tellement longtemps.
    Nous devons agir en tenant compte du fait qu'actuellement, le projet de loi no 11 du gouvernement du Québec n'inclut pas dans sa définition les troubles mentaux autres que neurocognitifs comme étant admissibles à l'aide médicale à mourir et que le Québec veut combler le vide administratif entourant la position du gouvernement fédéral sur le sujet des troubles mentaux par rapport aux maladies neurocognitives. Ce n'est donc pas le témoignage de ma whip que je vais faire. Je vais plutôt faire un rappel historique et parler des spécificités québécoises. Je terminerai en expliquant davantage la position du Bloc.
    Premièrement, en 2014, le Québec adopte la Loi concernant les soins de fin de vie, après cinq ans de consultations et de travail transpartisan. Je tiens à dire que c'était non partisan. En 2015, la Cour suprême déclare dans l'arrêt Carter que certaines dispositions du Code criminel interdisant le recours à l'aide médicale à mourir sont contraires à la Charte canadienne des droits et libertés. En 2016, en réponse à l'arrêt Carter, le gouvernement libéral répond en adoptant le projet de loi C‑14. En 2019, une décision de la Cour supérieure du Québec donne raison à Nicole Gladu et Jean Truchon, qui affirmaient que l'exclusion de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes dont la mort n'était pas raisonnablement prévisible était discriminatoire. Dans la foulée, elle ordonne que les lois fédérales et provinciales soient modifiées avant le 18 décembre 2020.
    En 2021, retardé par la pandémie de la COVID‑19, le Parlement adopte le projet de loi C‑7 qui crée deux voies d'accès à l'aide médicale à mourir: une pour les personnes dont la mort est raisonnablement prévisible et l'autre pour les personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible. Le Québec choisit simplement de laisser tomber le critère de fin de vie. Le projet de loi C‑7 exige la formation d'un groupe d'experts pour qu'il se penche sur l'aide médicale à mourir et la maladie mentale. Le comité, créé en août 2021, produit le Rapport final du Groupe d'experts sur l'AMM et la maladie mentale, qui contient 19 recommandations. Parce qu'on est conscient que la loi est imparfaite et que des questions relatives à l'aide médicale à mourir demeurent, le projet de loi C‑7 crée le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir, composé de membres du Sénat et de députés à la Chambre des communes. Son mandat s'est décliné en cinq points.
    Le Comité mixte dépose un rapport provisoire le 22 juin 2022. En mars 2023, le manque de temps entre le rapport du Comité mixte prévu initialement pour 2022 et l'échéance de l'exclusion des personnes de l'aide médicale à mourir pour trouble mental au 17 mars 2023 conduit les députés à reporter d'un an l'admissibilité afin de permettre au Comité de terminer son travail. L'objectif était de laisser davantage de temps aux professions concernées afin de développer des normes de pratiques. En février 2024, le Comité mixte produit finalement son rapport final. Le rapport ne contient qu'une seule recommandation. Le projet de loi C‑62 met donc en œuvre la recommandation du rapport en reportant de trois ans l'admissibilité pour l'aide médicale à mourir TM‑SPMI, donc pour les troubles mentaux, et en forçant la création d'un comité mixte un an avant le rapport.
    Rappelons que ce sont les articles 241.1 à 241.4 du Code criminel qui régissent l'aide médicale à mourir du Canada. De plus, comme l'y oblige la Loi, le gouvernement veille à l'utilisation de l'aide médicale à mourir via le Règlement sur la surveillance de l'aide médicale à mourir. Bref, si je fais tout ce rappel historique, c'est pour démontrer que cela fait longtemps que le gouvernement aurait pu et aurait dû agir.
    Deuxièmement, au Québec, l'aide médicale à mourir est régie par la Loi concernant les soins de fin de vie. Les activités entourant l'aide médicale à mourir sont supervisées par la Commission sur les soins de fin de vie. En juin 2023, l'Assemblée nationale du Québec a adopté le projet de loi no 11, qui vient élargir l'accessibilité à l'aide médicale à mourir au Québec et harmoniser la Loi québécoise avec le Code criminel. Il y a des modifications notables à la Loi québécoise. La ministre Sonia Bélanger ainsi que ses collègues Roberge et Jolin‑Barette ont tenu un point de presse le 7 février pour demander au gouvernement fédéral d'inclure une disposition dans le Code criminel qui permettrait au Québec d'avancer avec les demandes anticipées, car, même si la Loi québécoise le permet, le Code criminel ne le permet pas.
(1650)
    Même si en pratique les médecins qui choisissent d’avancer avec les demandes anticipées ne seront vraisemblablement pas poursuivis par le procureur du Québec, le risque de poursuite civile est présent, ce qui fera hésiter de nombreux médecins à pratiquer les demandes anticipées. L’Assemblée nationale du Québec a adopté une motion unanime pour exiger du fédéral qu’il légifère sur la question.
    Troisièmement, le Bloc québécois votera pour le projet de loi à condition que le report soit d’un an et non de trois. Le Bloc québécois est d’avis que l’admissibilité des personnes atteintes de troubles mentaux doit être reportée pour que le Québec, les provinces et les corps professionnels puissent encadrer leurs pratiques concernant l’aide médicale à mourir, mais pas indéfiniment. Le Bloc québécois croit que de repousser de trois ans l’admissibilité fait prolonger la souffrance des individus qui pourraient être admissibles à l’aide médicale à mourir et est contraire à leurs droits garantis par les chartes. Le Bloc québécois tient à rappeler que le rapport du Groupe d’experts sur l’aide médicale à mourir et la maladie mentale, ainsi que le Collège des médecins du Québec, soulignait que les mesures de sauvegarde, c'est-à-dire le caractère irrémédiable, les graves souffrances physiques ou mentales et le consentement libre et éclairé, actuellement prévues par le Code criminel sont suffisantes pour permettre l’accès à l’aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème médical invoqué.
    Dans son opinion complémentaire annexée au rapport du Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir, le Bloc québécois rappelle que même si, actuellement, la préparation sur le terrain pour l'aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué n’est pas au point sur l’ensemble du territoire canadien, cela ne change rien au fait que plusieurs ordres professionnels, comme le Collège des médecins du Québec ou l'Association des médecins psychiatres du Québec, souhaitent tout de même que celle-ci soit disponible éventuellement.
    Aussi, le Bloc québécois prend acte de la demande de plusieurs provinces de reporter l'admissibilité. Notons que de nombreux pays ont adopté des politiques en matière d’aide médicale à mourir dans le cas précis de troubles mentaux.
    Le Bloc québécois déplore le manque de proactivité du gouvernement et l’obstruction des conservateurs sur la question de l’aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué ainsi que sur la question des demandes anticipées. Nous craignons pour les patients qui devront se tourner vers les tribunaux pour faire valoir leurs droits en plus de porter le fardeau de leur maladie.
    Finalement, le Bloc québécois déplore l’absence de distinction entre les troubles mentaux et les maladies neurodégénératives, comme les maladies d'Alzheimer et de Parkinson, dans le projet de loi, comme le fait la loi québécoise. Cette distinction aurait permis aux personnes atteintes d’une maladie appartenant à la seconde catégorie d’accéder à l’aide médicale à mourir, comme le préconise le gouvernement du Québec. Le Bloc québécois croit que le consensus social sur ces maladies est plus fort et aurait aimé que le Code criminel s’arrime à la loi québécoise sur les soins de fin de vie en permettant les demandes anticipées.
    Dans son opinion complémentaire sur l’aide médicale à mourir, le député de Montcalm, que je tiens à féliciter pour l’ensemble de son travail dans ce dossier, a bien détaillé les raisons qui justifient l’aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué. La position du Collège des médecins du Québec résume bien l’importance d’autoriser les demandes anticipées de l'aide médicale à mourir de même que l’aide médicale à mourir lorsqu'un trouble mental est le seul problème médical invoqué. Le Collège des médecins du Québec, bien qu’il admette avoir besoin de plus de temps pour s’assurer du niveau de préparation de ses membres, a déterminé cinq balises pour encadrer l’admissibilité des personnes à l’aide médicale à mourir.
    En conclusion, le Bloc québécois défend une conception humaniste de l’aide médicale à mourir qui repose sur plusieurs assises philosophiques et arguments éthiques qui traduisent l’évolution de la société québécoise. L’aide médicale à mourir consacre le droit des individus de choisir pour eux-mêmes, de déterminer les conditions d’une vie saine et digne. Les avancées techniques de la médecine nous permettent de maintenir la vie, mais cela n’élude pas la nécessité et le droit pour tout un chacun de définir ce qu’est une vie acceptable. L’article 1 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne confère à tout être humain le « droit à la vie, ainsi qu’à la sûreté, à l’intégrité et à la liberté de sa personne. »
    La société québécoise considère que le droit à la vie implique le droit de mourir. Dans ce contexte, l’aide médicale à mourir doit s’ériger en un droit qui confère à la personne la possibilité d’éviter l’agonie terminale et le paternalisme médical pour assurer sa dignité. Permettre l’aide médicale à mourir, c’est permettre aux gens de choisir comment, quand et où ils pourront choisir de partir.
    L’aide médicale à mourir n’a de sens que si le consentement libre et éclairé des personnes est respecté. Le mot « libre » signifie: consenti de plein gré et absent de contraintes. Quant au mot « éclairé », il signifie: avec toute l’information nécessaire pour prendre une telle décision. Le respect de cette condition est d’ailleurs une condition nécessaire à l’accès à l’aide médicale à mourir.
    Les principes que nous défendons concernant l’aide médicale à mourir sont valables même dans les cas de maladies mentales. Rappelons que la possibilité d’accès à l’aide médicale à mourir ne signifie pas une admission automatique à celle-ci. Cependant, dans ses travaux, la commission québécoise a choisi de distinguer les troubles mentaux des maladies neurodégénératives. La commission est arrivée à la conclusion que même s’il n’existait pas de consensus sur les troubles mentaux, il y en avait un concernant les maladies neurodégénératives. Dans cette perspective, le gouvernement de Québec a ouvert la porte aux demandes anticipées. Les demandes anticipées permettent à un individu de déterminer les conditions selon lesquelles l’aide médicale à mourir devrait lui être administrée lorsqu’il aura perdu les facultés de consentir à cause de sa maladie.
    Dans son deuxième rapport, le Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir s’est prononcé en faveur des demandes anticipées. Tous les partis, sauf les conservateurs qui sont contre toute forme d’aide médicale à mourir, ont voté en faveur des recommandations.
    Une dernière chose: le gouvernement fédéral n’a donc aucune raison de se traîner les pieds et de ne pas répondre favorablement à la demande du Québec.
(1655)

[Traduction]

    Monsieur le Président, je suis d'accord avec bon nombre des propos de la députée. J'ose croire que chacun de nous est interpellé personnellement par certaines questions, et celle-ci en est une pour moi. Cela dit, je comprends l'importance de la décision de la Cour suprême du Canada et de la Charte des droits et libertés. Je crois qu'il est louable de vouloir une politique publique responsable sur l'aide médicale à mourir.
    La députée est-elle aussi préoccupée que moi par la propagande des conservateurs, qui font des exagérations incroyables, comme prétendre que des gens qui vont à une banque alimentaire et qui se sentent pauvres peuvent faire une demande d'aide médicale à mourir? Ils essaient de faire croire aux gens qu'on peut faire une demande aujourd'hui et obtenir un suicide assisté par le gouvernement vendredi. Je crois que cette attitude nuit au débat.
(1700)

[Français]

    Monsieur le Président, je salue l'arrivée de mon collègue de Montcalm, qui pourrait répondre tout aussi bien que moi à cette question et qui a dû entendre des choses de la part des conservateurs au Comité spécial mixte sur l'aide médicale à mourir. Je sympathise sincèrement avec lui. Ma whip l'a elle-même dit tout à l'heure: nos oreilles saignent depuis le début de ce débat.
    Si je prends la parole aujourd'hui, c'est parce que des groupes d'aînés me parlent de ce projet de loi depuis que je suis élue en tant que porte-parole des aînés. Évidemment, on me sensibilise à cette question. Au Québec, les groupes d'aînés veulent avoir ce libre choix.
    Je vais être obligée de le répéter parce que, pour moi, c'est une horreur: dire que les aînés vont dans les banques alimentaires pour demander l'aide médicale à mourir, c'est un exemple frappant de grave désinformation.
    Ce débat me ramène à mes convictions sur les raisons pour lesquelles un État doit être laïc. Voilà un exemple qui montre pourquoi c'est dangereux de laisser le religieux entrer et payer la course à la chefferie d'un parti politique au Canada.

[Traduction]

    Monsieur le Président, je pense qu'il est absolument répugnant que le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre des communes fasse l'autruche et nie des cas bien documentés d'abus et de non‑respect des soi‑disant mesures de sauvegarde qui sont censées être en place et qui doivent être mises en œuvre. C'est tout simplement répugnant, lorsqu'il s'agit de certaines des personnes les plus vulnérables de la société canadienne.
    En ce qui concerne la députée, elle a parlé de l'obstruction des conservateurs dans son discours. Je lui rappelle que tous les députés de tous les partis reconnus qui ont siégé au comité, dont je faisais également partie, ont demandé que l'on suspende cet élargissement, tout comme les directeurs des départements de psychiatrie et la province de Québec à l'Assemblée nationale, lorsque le comité a déterminé que les personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale n'étaient pas admissibles à l'aide médicale à mourir.
    Je dirai aux députés que lorsque j'entends dire que les cliniciens pourraient se tromper dans 50 % des cas, et que l'on joue donc à pile ou face, je vais continuer de faire obstruction à cet élargissement.

[Français]

    Monsieur le Président, j'ai parlé de l'obstruction des conservateurs. Je pourrais aussi parler, malheureusement, du laxisme des libéraux qui fait qu'on est encore ici aujourd'hui, que ce dossier a tardé. Qui plus est, on nous propose encore trois ans d'attente. C'est assez.
    En ce qui concerne la remarque de mon collègue, les conservateurs parlent de cas qui pourraient être davantage des questions d'énoncés au système judiciaire. Avant d'être élue, j'ai travaillé sur la question de la maltraitance envers les personnes aînées. Ce sont des cas isolés et cela relève davantage du système de justice.
    Dans le cas qui nous préoccupe, ce sont des ordres professionnels. J'en ai parlé dans mon discours. C'est aussi un comité mixte composé de membres du Sénat et de députés qui ont fait un travail rigoureux, qui ont démontré que des balises sont là et que, non, ce n'est pas vrai qu'on peut demander l'aide médicale comme on peut se commander à manger dans un restaurant.
    Ce n'est pas vrai. Il y a des balises et, au Québec, on l'a très bien compris. Ce dont nous avons besoin, c'est de nous baser sur des témoignages de scientifiques et sur ce dont des ordres professionnels témoignent, et non pas sur des cas isolés et sur une espèce d'obscurantisme religieux.
    L'honorable députée de Beauport—Limoilou invoque le Règlement.
    Monsieur le Président, puis-je rappeler à mes chers collègues que lorsqu'ils posent une question, c'est pour entendre la réponse? En ce moment, il s'avère qu'on se parle d'un bord à l'autre de la Chambre et qu'on n'écoute pas la personne à qui on a posé la question.
    Le respect, ce n'est pas juste à l'école qu'il faut l'appliquer, c'est dans la vie de tous les jours.
    Je remercie l'honorable députée de souligner qu'on a besoin de s'écouter les uns les autres à la Chambre. Ceux qui ont le droit de parole sont ceux qui devraient prendre part à la discussion.
(1705)

[Traduction]

    Nous reprenons le débat. Le député de Vaughan—Woodbridge a la parole.
    Monsieur le Président, c'est toujours un honneur de prendre la parole à la Chambre au nom des formidables habitants de Vaughan—Woodbridge et de tous les habitants de la ville de Vaughan.
    Je partagerai mon temps de parole avec mon ami et collègue de la magnifique circonscription de Kitchener-Centre.
    Avant d'entamer mon discours proprement dit, j'aimerais souligner que, manifestement, le débat au sujet du projet de loi C‑62 sur l'aide médicale à mourir nous tient tous à cœur. Les observations sont formulées avec beaucoup de passion, de profondeur et de considération. J'aimerais ajouter quelques mots là-dessus. J'ai exprimé mes convictions personnelles sur l'aide médicale à mourir, à laquelle je suis évidemment favorable. Je connais de nombreuses personnes dans de nombreuses familles qui ont pris des décisions difficiles qui ne concernaient pas la maladie mentale. Cela me consterne et me fait réfléchir.
    Je me réjouis du fait que l'on suspende l'élargissement, car la maladie mentale est un sujet complexe. Je ne suis pas un spécialiste et je ne prétends pas l'être, mais nous connaissons tous quelqu'un qui a souffert d'une maladie mentale. Nous avons tous un parent ou un ami pour qui la maladie mentale est toujours un problème. Malheureusement, beaucoup de gens se sont enlevé la vie. Nous devons assurer l'existence d'un système solide qui permet aux gens d'obtenir l'aide dont ils ont besoin pour vivre pleinement la vie dont Dieu les a gratifiés.

[Français]

    Je suis persuadé que notre système actuel d'aide médicale à mourir fonctionne bien. Je voudrais prendre les dix prochaines minutes pour expliquer pourquoi les Canadiens devraient avoir confiance dans la loi sur l'aide médicale à mourir et son application au cours des sept dernières années. Je veux aussi décrire certaines des activités qui maintiendront cette confiance lorsque l'admissibilité sera élargie en mars 2027 comme le propose le projet de loi C‑62.
    Lorsque la loi autorisant l'aide médicale à mourir a été initialement adoptée en 2016, elle comprenait un certain nombre de critères d'admissibilité que toute personne demandant l'aide médicale à mourir est tenue de remplir. La personne doit être un adulte âgé d'au moins 18 ans et être capable de prendre des décisions en matière de santé. Sa demande doit être volontaire. Sa demande doit être pleinement éclairée, y compris par la connaissance des moyens disponibles pour soulager ses souffrances. Elle doit être atteinte d'un problème de santé grave et irrémédiable, c'est-à-dire incurable, ce qui est défini comme suit: la personne est « atteinte d'une maladie, d'une affection ou d'un handicap grave et incurable; sa situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses capacités; » et la personne éprouve « des souffrances physiques ou psychologiques persistantes » qui ne peuvent être soulagées par des moyens acceptables pour elle.
    En 2016, la loi exigeait également que la mort naturelle de la personne soit raisonnablement prévisible. En 2019, la Cour supérieure du Québec a jugé que ce dernier critère violait la Charte des droits et libertés. En mars 2021, une loi fédérale révisée a été adoptée, étendant l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes dont la mort naturelle n'est pas raisonnablement prévisible, à condition qu'elles répondent aux autres critères d'admissibilité.
    En plus de ces critères d'admissibilité, la loi prévoit également un nombre important de mesures de sauvegarde procédurales qu'un clinicien est obligé de respecter avant d'administrer l'aide médicale à mourir. J'en soulignerai quelques-unes: Deux praticiens indépendants doivent fournir une confirmation écrite de l'admissibilité de la personne. La personne qui demande l'aide médicale à mourir doit être informée qu'elle peut changer d'avis à tout moment, de n'importe quelle manière, et que ses souhaits doivent être respectés. En outre, la personne doit reconfirmer son souhait de recevoir l'aide médicale à mourir immédiatement avant de la recevoir.
(1710)
    Lorsque la mort naturelle d'une personne n'est pas raisonnablement prévisible, il existe une série de mesures de sauvegarde renforcées qui doivent être respectées. Je vais parler de certaines de ces mesures de sauvegarde essentielles.
    Premièrement, au moins un des deux évaluateurs de l'aide médicale à mourir, ou AMM, doit avoir une expertise concernant le problème de santé de la personne. S'il n'a pas cette expertise, il doit consulter un autre praticien qui la possède. Deuxièmement, la personne doit être informée des moyens disponibles pour soulager ses souffrances et elle doit se voir proposer des consultations pertinentes. Troisièmement, ces moyens doivent avoir été abordés et les deux évaluateurs de l'AMM doivent convenir que la personne a sérieusement envisagé ces moyens. Quatrièmement, au moins 90 jours doivent s'écouler entre le début de l'évaluation de l'admissibilité et le jour de l'administration de l'AMM. Il s'agit de mesures de sauvegarde prévues par la loi et que tous les praticiens doivent respecter.
    Nous savons que les praticiens de l'AMM de partout au pays exercent un jugement professionnel considérable dans la prestation de ce service en gardant les intérêts et les souhaits des patients au premier plan.
    Les praticiens travaillent sans relâche pour que l'AMM soit une option de dernier recours. Ils compilent des renseignements essentiels concernant l'état de santé de la personne, ses antécédents de traitement et son utilisation des services de soutien. Ils ont les conversations nécessaires pour que leurs patients soient au courant des services disponibles qui pourraient soulager leurs souffrances. Il s'agit notamment d'explorer les options de traitement, de faciliter les orientations et de suivre les résultats.
    Si la personne qui souhaite obtenir l'AMM consent à l'implication des membres de sa famille et de ses proches, les praticiens encourageront leur participation et les incluront dans les discussions qui font partie du processus d'évaluation globale.
    Les praticiens sont également conscients qu'ils n'ont pas toujours l'expertise nécessaire sur l'état du patient pour effectuer une évaluation complète. Dans ces situations, ils doivent consulter les spécialistes pertinents et d'autres professionnels de la santé qui ont l'expertise nécessaire afin de pouvoir prendre une décision éclairée. Certaines provinces ou autorités sanitaires régionales ont mis en place des services de coordination de l'AMM ou des mécanismes de consultation de cas, qui s'appuient sur une équipe ou un réseau de médecins, d'infirmiers et d'autres professionnels tels que des travailleurs sociaux et des chefs spirituels pour soutenir le processus d'évaluation.
    Qu'est-ce que cela signifie pour l'avenir, lorsque les demandes d'AMM fondées sur la base de souffrances persistantes et intolérables résultant uniquement d'une maladie mentale seront autorisées? Les mesures de sauvegarde législatives existantes sont-elles suffisantes? Comment pouvons-nous être certains que le même niveau de prudence, de diligence et de cohérence dans la prestation de l'AMM sera la norme?
    En 2021, comme prescrit par l'ancien projet de loi C‑7, un groupe d'experts a examiné la question et a conclu que le cadre juridique existant relativement aux critères d'admissibilité et aux mesures de sauvegarde est suffisant, à condition que les évaluateurs de l'AMM appliquent de manière appropriée le cadre existant, avec les orientations données par l'élaboration des normes de pratique en matière d'AMM et une formation spécialisée.

[Traduction]

    Avec le temps qu'il me reste, je souhaite simplement dire ceci: dans cette auguste enceinte, nous prenons tous la parole sur de nombreux sujets. L'un de ces sujets, l'aide médicale à mourir, est probablement l'un des plus personnels que nous ayons abordé depuis que j'ai été élu. J'attends avec impatience les questions des députés, qui ont été envoyés à la Chambre par leurs concitoyens. Il s'agit d'un débat important et d'un sujet majeur à aborder.
(1715)
    Monsieur le Président, je reconnais qu'il s'agit d'une décision extrêmement personnelle pour chacun d'entre nous. J'ai écouté attentivement le discours du député.
    Au début, il a semblé insinuer que la raison pour laquelle le gouvernement avait été contraint d'élargir l'accès à l'aide médicale à mourir pour inclure la maladie mentale était que les tribunaux de basse instance avaient forcé sa main, mais les tribunaux n'ont pas réellement ordonné au gouvernement canadien de mettre en œuvre l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes de troubles mentaux. La Cour suprême du Canada ne s'est jamais prononcée sur la question. En fait, chaque fois que le gouvernement libéral a eu la possibilité de faire appel d'une décision devant la Cour suprême, il a refusé de le faire, probablement pour des raisons idéologiques.
    J'aimerais connaître l'opinion du député. Pense-t-il que la Cour suprême du Canada a ordonné à la Chambre, au Parlement, de mettre en œuvre l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes de troubles mentaux, oui ou non?
    Monsieur le Président, dans toutes nos conversations, j'ai eu beaucoup de respect et de temps pour le député. Je ne suis pas avocat. Pour ce qui est du renvoi à la Cour suprême, il faudrait que je m'informe avant de répondre à l'éminent député d'Abbotsford.
    Je dirais qu'il est important que tous les députés examinent les besoins changeants des Canadiens, qu'ils discutent avec les experts et qu'ils collaborent avec les provinces et les territoires.
    J'ai toujours cru que nous devions légiférer et ne pas nous en remettre aux tribunaux. Voilà mon opinion. C'est ma conviction. Je pense que c'est la meilleure façon de gouverner. Nous devons le faire en prenant des décisions à la Chambre, tout en nous assurant qu’elles sont évidemment conformes à la Charte canadienne des droits et libertés, qui, je le sais, est chère à tous les députés.

[Français]

    Monsieur le Président, mon collègue d'en face se questionnait sur l'arrêt Carter. À mon avis, l'arrêt Carter démontre très bien qu'une exclusion absolue de gens serait effectivement discriminatoire et stigmatisante.
    Cela dit, j'aimerais lui poser la question suivante.
     Mon collègue appuie évidemment le projet de loi de son gouvernement, qui reporte de trois ans l'application de la loi. Cela veut-il dire qu'il va militer à l'intérieur de son gouvernement pour que, après-demain, lorsqu'on aura voté, que ce sera sorti du Sénat et que la loi entrera en vigueur, le comité se remette au travail pour finir par aboutir à un projet de loi sur la question notamment des troubles mentaux, mais aussi des demandes anticipées?
    Monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue du Québec de sa question et lui dire que c'est très important pour nous.

[Traduction]

    Ma réponse est oui, bien sûr. En tant que député, je travaille toujours dans l'intérêt de mes concitoyens, et il s'agit d'une question et d'une mesure législative dont on a discuté au cours des dernières années et qui passionnent les Canadiens. Personnellement, j'ai toujours buté sur les subtilités de la loi et sur les dispositions initiales. On a utilisé l'expression « mort prévisible ». Il faut donc aborder cette question avec beaucoup de diligence et de discernement.
    Je continue de militer de ce côté-ci de la Chambre et au sein de notre caucus en faveur d'une loi solide, qui tient compte des intérêts individuels des Canadiens et qui, de toute évidence, est conforme à la Charte canadienne des droits et libertés.
    Monsieur le Président, j'ai l'impression que nous nous sommes mis dans le pétrin en établissant des échéanciers arbitraires. L'amendement du Sénat au projet de loi C‑7 a retardé le processus de deux ans. L'année dernière, le projet de loi C‑39 a prolongé le délai d'un an, et maintenant, le projet de loi C‑62 le prolongerait de trois ans.
    J'aimerais simplement que le député tienne compte du contexte, étant donné que les ministres de la Santé de sept des dix provinces et des trois territoires ont demandé une pause pour une période indéfinie. Le comité mixte spécial a également pris bien soin de ne pas inclure d'échéancier dans sa recommandation de faire une pause.
    Comment le député peut-il justifier cette pause de trois ans, alors que ces institutions et ces gouvernements provinciaux préféreraient qu'on fixe des normes qualitatives plutôt qu'un échéancier dans ce dossier?
(1720)
    Monsieur le Président, pour ce qui est de prévoir un échéancier de trois, cinq ou six ans, il est évident qu'une décision a été prise. Comme le député l'a dit, nous devons collaborer avec les provinces et les territoires pour mettre en œuvre cette politique. Nous devons nous assurer que l'ensemble des provinces, des territoires, des ministres de la Santé et des personnes qui travaillent dans les différents domaines concernés y sont préparés. Nous devons nous y préparer et procéder de manière prudente et adéquate.
    Monsieur le Président, je prends la parole ce soir pour appuyer résolument le projet de loi C‑62, qui retarderait de trois ans l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes dont la maladie mentale est la seule condition médicale sous-jacente. Mes raisons sont les mêmes que celles que j’ai données dans mon intervention au sujet du projet de loi C‑39, il y a un an, jour pour jour, au moment où le gouvernement n’était prêt à repousser l’échéance que d’un an. Premièrement, ce délai correspond à celui que j’ai entendu de nombreuses personnes mentionner dans ma circonscription; deuxièmement, c’est ce que les experts réclament depuis un certain temps; troisièmement, les verts estiment qu’il faudrait passer plus de temps à remailler le filet de sécurité sociale avant d’élargir l’aide médicale à mourir.
    Aujourd’hui, les verts estiment également qu’il faut précipiter l’adoption de ce projet de loi avant la date butoir du 17 mars pour que l’aide médicale à mourir ne soit pas élargie aux personnes dont la maladie mentale est la seule condition médicale sous-jacente, car c’est ce qui se rapproche le plus de l’intention du projet de loi C‑314. Le projet de loi C‑314 que le député d’Abbotsford avait présenté aurait empêché une fois pour toutes cet élargissement.
    Dans le contexte parlementaire actuel, le projet de loi C‑62 a franchi les étapes du processus législatif assez rapidement jusqu'à présent. Je m'attends à ce que lors des périodes de vote des prochains jours, nous puissions poursuivre ce processus selon les termes de la motion qui a été approuvée plus tôt aujourd'hui. Cela montre que la Chambre est en mesure d'agir rapidement lorsqu'il est question de traiter un projet de loi prioritaire, comme c'est le cas avec le projet de loi C‑62, qui doit être adopté d'ici le 17 mars. En réalité, ce n'est pas le manque d'outils législatifs qui nous empêcherait d'agir rapidement, mais bien le manque de volonté politique.
    Jusqu'à présent, j'ai expliqué les raisons qui ont poussé mon parti et moi-même à appuyer sans relâche le projet de loi dont nous sommes saisis. J'aimerais maintenant poser la question suivante: pourquoi ralentir l'adoption d'un projet de loi visant à améliorer considérablement la qualité de vie des Canadiens? Certains de mes collègues ont réfléchi à la question et ont relayé des commentaires qui, je l'espère, leur ont été directement formulés par des personnes handicapées d'un peu partout au pays. Pourquoi ne pas mettre fin le plus rapidement possible à la pauvreté infligée aux personnes handicapées par le cadre juridique actuel?
    Le fait est que, encore aujourd'hui, 40 % des personnes qui vivent dans la pauvreté au pays sont des personnes handicapées. Certains parleront d'une mesure législative qui a été adoptée en juin dernier, mais il reste que les personnes handicapées ne sont pas en meilleure posture aujourd'hui qu'elles ne l'étaient avant l'adoption de cette mesure législative. La prestation n'est pas encore financée, et nous n'avons pas entamé de négociations avec les provinces et les territoires. C'est honteux. Il est embarrassant de voir que, dans un pays aussi riche que le nôtre, les personnes handicapées continuent de vivre dans la pauvreté engendrée par les lois. La Chambre des communes pourrait choisir d'agir de toute urgence pour mettre fin à la pauvreté infligée aux personnes handicapées par le cadre juridique actuel, et ce, avec autant d'empressement qu'elle le fait en ce moment pour respecter l'échéance du 17 mars.
    La Chambre des communes pourrait également exercer des pressions pour qu'on s’attaque vraiment à l’un des principaux problèmes sous-jacents, à savoir le manque de soutien en matière de santé mentale. En fait, lors de la dernière campagne électorale, le Parti libéral a promis de mettre en place une prestation canadienne pour la santé mentale. Elle devait s'appeler « Transfert canadien en matière de santé mentale ». Il s'agissait d'un engagement de 4,5 milliards de dollars, et il ne devait pas faire partie d'une entente générale de financement en santé, comme c'est le cas actuellement. L'un des défis est que, même si nous voulons tous que nos soins de santé soient fournis de manière globale, il est plus utile de conclure des accords de financement ciblés, de manière à pouvoir demander des comptes. Or, ce n'est pas le cas en santé mentale. Celle-ci n'est qu'un des quatre volets des ententes entre les provinces et le fédéral. Par conséquent, c’est aux provinces de décider, mais on ne sait pas trop si elles sont tenues de rendre des comptes sur la proportion des fonds prévus dans ces ententes qui sera consacrée directement à la santé mentale.
(1725)
    Dans le budget de cette année, nous constatons que le gouvernement intensifie ses efforts, est plus clair et indique qu’il va s’assurer de financer directement ce qui était censé être le Transfert canadien en matière de santé mentale. Si le gouvernement passait de la parole aux actes, cela améliorerait considérablement la qualité de vie des Canadiens, celle des gens de ma collectivité qui sont sur des listes d’attente déraisonnables pour voir un professionnel de la santé mentale.
    Si l’on voulait vraiment faire des progrès pour régler une autre crise majeure au pays, il faudrait agir beaucoup plus rapidement pour régler la crise du logement. Encore une fois, ce qui me donne un peu d’espoir, compte tenu des circonstances actuelles, c’est que nous savons qu’il existe des outils parlementaires pour réaliser cet objectif. Le fait est que, dans ma collectivité, un rapport a été publié aujourd’hui afin de continuer à exhorter les instances gouvernementales à faire ce qu’il faut pour aider les gens qui vivent dans des campements et dans des conditions difficiles. Dans ma collectivité, le nombre de sans-abri a triplé seulement au cours des trois dernières années.
    Voilà qui ne devrait pas se produire dans notre pays, mais nous savons pourquoi c’est le cas. À l’heure actuelle, pour chaque nouvelle unité de logement abordable, le marché perd 15 unités parce qu'elles ne sont plus abordables à cause de la financiarisation du logement. Le logement devient de plus en plus une marchandise que les grands investisseurs institutionnels commercialisent plutôt que de permettre à une personne d'avoir un chez-soi.
    Nous continuons donc de voir de grands investisseurs institutionnels acheter des logements abordables, procéder à des rénovictions et augmenter les loyers. Après cela, on se demande pourquoi cette crise s'aggrave elle aussi. Je ne pense pas que nous en serions là si le Parlement, et le gouvernement en particulier, s'attaquait plus sérieusement à la crise du logement.
    Après 30 ans de sous-investissement, où en sommes-nous? Le fait est que notre parc de logements sociaux est le pire du G7; 3,5 % de nos logements sont des logements sociaux. Ainsi, même si on doublait le nombre de logements sociaux, on ne serait qu'à peu près en milieu du peloton.
    Ces 30 ans de sous-investissement ont des conséquences importantes dans les collectivités de l'ensemble du pays. Je pense notamment à une infirmière avec qui j'ai parlé la fin de semaine dernière. Elle m'a dit qu'elle n'avait pas les moyens de vivre dans notre collectivité en raison du coût des logements. Par conséquent, que l'on soit enseignant, infirmier ou ouvrier spécialisé, les gens de cette génération doivent composer avec un marché du logement qui diffère fondamentalement de celui qu'ont connu les générations précédentes. Pourquoi? Dans ma collectivité, depuis 2005, le coût du logement a augmenté de 275 %, mais les salaires n'ont augmenté que de 42 %.
    Une fois de plus, si nous parvenions à compléter le filet social et à agir aussi rapidement que le gouvernement l'a fait aujourd'hui pour respecter l'échéance du 17 mars, nous pourrions largement garantir l'obtention des fonds nécessaires pour faire face à la crise du logement abordable. Nous pourrions également nous attaquer à la financiarisation, c'est‑à‑dire au fait que les investisseurs institutionnels se sont engouffrés dans la brèche pour gagner le plus d'argent possible, le plus rapidement possible, sur le dos de certaines des personnes aux revenus les plus faibles dans ma collectivité.
    Oui, je soutiendrai le projet de loi C‑62. Je pense qu'il s'agit d'une occasion très importante pour nous tous de montrer que ce Parlement peut agir rapidement lorsque c'est nécessaire pour résoudre les crises réelles qu'il observe. Nous connaissons une crise du logement, une pauvreté infligée aux personnes handicapées par le cadre juridique actuel et une crise en santé mentale, et le Parlement de même que le gouvernement devraient s'y attaquer beaucoup plus rapidement.
(1730)
    Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des affaires émanant des députés inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

Affaires émanant des députés

[Affaires émanant des députés]

[Traduction]

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 novembre 2023, de la motion portant que le projet de loi C‑273, Loi modifiant le Code criminel (la quête de Corinne et la protection des enfants), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Monsieur le Président, je suis heureux de prendre de nouveau la parole à la Chambre au sujet du projet de loi C‑273, Loi modifiant le Code criminel. Présenté par mon collègue le député de New Westminster—Burnaby, le projet de loi propose d'abroger l'article 43 du Code criminel.
    C'est un fait indéniable: tous les enfants ont le droit d'être protégés contre la violence et les mauvais traitements. À l'instar des adultes, les enfants sont protégés contre toute une gamme d'infractions criminelles générales, y compris les voies de fait.
    Je siège au Comité permanent de la santé, où nous étudions la meilleure façon de favoriser le bien-être physique, mental et affectif des enfants partout au Canada. Cet objectif consiste, en grande partie, à créer pour les enfants des milieux sains et sûrs où apprendre, évoluer et grandir.
    Des parents de ma circonscription, Richmond Hill, m'ont également fait part de leurs préoccupations quant à la sécurité de leurs enfants, non seulement à l'école, mais aussi entre la maison et l'école. Un parent a d'ailleurs communiqué personnellement avec mon bureau pour demander de l'aide afin d'assurer la sécurité de sa fille, victime depuis un certain temps de harcèlement à l'école. De tels cas nous rappellent — et c'est crucial — que nous devons faire le nécessaire pour mieux protéger les enfants dans notre entourage, en milieu scolaire et partout au Canada. Pour ce faire, il faut d'abord apporter les modifications requises aux dispositions juridiques actuelles en la matière.
    Le projet de loi C‑273 porte sur des questions très délicates, notamment l'autorité parentale, les droits des enfants, la participation appropriée du gouvernement et la ligne de démarcation entre la discipline parentale acceptable et les cas de violence faite aux enfants. Je tiens d'abord à parler de l'article 43 du Code criminel, dont il est question dans le projet de loi, et de quelques-uns des points de vue importants que nous avons entendus à ce sujet.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis porte expressément sur l'article 43 du Code criminel, qui procure une défense en cas d'accusation au pénal pour agression dans les cas où un parent, un tuteur ou un enseignant a recours aux châtiments corporels dans le but d'éduquer ou de corriger un enfant. Les parents peuvent donc utiliser une force physique légère, comme la fessée ou de légers coups, pour discipliner un enfant dont ils ont la charge. L'article 43 permet également aux parents d'exercer un contrôle physique afin de retenir un enfant ou de l'expulser lorsque cela est indiqué. La même disposition s'applique aussi quand un parent ou un enseignant utilise une force physique raisonnable pour retenir un enfant ou l'expulser d'une salle de classe, au besoin.
    Nous savons que les Canadiens ont des opinions très variées sur ce qui devrait être considéré comme un degré approprié de discipline physique lorsque l'on éduque un enfant ou qu'on lui enseigne. Ces points de vue différents ont déclenché des discussions sur les comportements qui atteignent un degré de préjudice justifiant leur interdiction, tout en reconnaissant que les choix parentaux sont profondément personnels. Je suis heureux que le projet de loi C‑273 nous donne l'occasion de réfléchir à ces questions importantes.
    Le gouvernement appuie le projet de loi C‑273 et son objectif capital de protéger les enfants contre la violence et les abus. Néanmoins, nous avons reçu des commentaires d'éducateurs et de parents, en particulier ceux des communautés qui font l'objet d'une surveillance policière disproportionnée. Ils nous ont fait part de leur crainte d'être poursuivis au criminel pour des actions raisonnables, telles que des interventions physiques mineures qui n'entraînent pas de préjudice.
    Il convient de noter que l'article 43 fait partie du Code criminel depuis 1892 et qu'il est demeuré pratiquement inchangé. Il trouve son origine dans l'obligation parentale de protéger et d'éduquer les enfants. Cet argument est généralement utilisé à titre de défense en cas d'accusation d'agression, car le Code criminel définit l'agression de manière générale comme l'application non consensuelle de la force. Cette définition englobe les attouchements non consensuels ou même les menaces à l'encontre d'une autre personne, indépendamment de son âge ou de l'existence d'un préjudice physique ou d'une blessure.
    L'article 43 a été adopté par le Parlement pour éviter la criminalisation de comportements particuliers de la part d'enseignants, de parents ou d'aidants familiaux. Son application actuelle ne vise pas à protéger ces personnes en cas de mauvais traitements ou de comportements préjudiciables.
(1735)
    Dans l'arrêt Canadian Foundation for Children, Youth and the Law c. Canada, en 2004, la Cour suprême du Canada concluait que l'article 43 est compatible avec les articles 7, 12 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, en précisant que la défense aux termes de cet article ne s'applique qu'aux parents qui infligent un châtiment corporel léger ayant un effet transitoire et insignifiant. La Cour a également fixé certains paramètres pour invoquer ce moyen de défense. Par exemple, on ne peut le faire que lorsque l'enfant est âgé de 2 à 12 ans et qu'il est capable de tirer des leçons de la situation. Aucun objet ne peut être utilisé pour appliquer la correction. Aucun coup ne peut être porté à la tête de l'enfant. Il ne doit pas y avoir de préjudice physique ni de risque raisonnable de préjudice, et l'adulte ne doit pas agir sous l'effet de l'exaspération ou de la colère.
     La Cour a limité la portée de ce moyen de défense, en particulier dans le cas des éducateurs, qui sont contraints de recourir judicieusement l'intervention physique, dans le seul but d'assurer la discipline ou de faire respecter le règlement de l'école, notamment pour expulser l'élève de la salle de classe ou veiller au respect des consignes. La Cour a souligné que l'administration de châtiments corporels par les enseignants est catégoriquement interdite. À la suite de cette décision de la Cour suprême du Canada, il y a près de 20 ans, les progrès de la recherche et les connaissances sur les effets néfastes de la discipline physique appliquée aux enfants ont conduit à une multiplication des appels en faveur d'une réforme ou de l'abrogation de l'article 43.
    Le gouvernement est déterminé à mettre en œuvre toutes les recommandations formulées dans le rapport final de 2015 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. L'abrogation de l'article 43 constituerait un autre pas en avant vers la réalisation de cet objectif, puisqu'elle répondrait à l'appel à l'action no 6. Cet appel particulier est étayé par des cas documentés de châtiments corporels généralisés et de mauvais traitements infligés à des enfants par le personnel du réseau des pensionnats. Comme le souligne le rapport final de la Commission: « Cette incapacité à instaurer une discipline adéquate et à contrôler la façon dont elle est appliquée, envoie un message tacite, à savoir qu’il n’y a pas vraiment de limites à ce qu’on peut faire subir aux enfants autochtones dans les pensionnats ».
    Les intervenants qui militent pour l'abrogation complète de l'article 43, y compris de nombreux organismes de la société civile et le Comité des droits de l'enfant des Nations unies, soutiennent que le droit pénal dans sa forme actuelle n'offre pas aux enfants une protection égale à dont jouissent les adultes. Par ailleurs, de plus en plus d'études en médecine et en sciences humaines indiquent que les châtiments corporels sont préjudiciables aux enfants. Ce genre de mesures disciplinaires expose en effet les enfants à différents dangers: violence physique, sévices, détérioration de la santé mentale, relation tendue entre les parents et l'enfant, augmentation de l'agressivité pendant l'enfance et comportements antisociaux. On observe également une augmentation des comportements violents ou criminels chez ces enfants à l'âge adulte, ce qui alimente ainsi les cycles de violence. Plus de 650 organismes à travers le pays s'entendent pour dire que le recours aux châtiments corporels à l'égard des enfants et des jeunes n'a aucun effet bénéfique; ils exigent par conséquent que les enfants puissent bénéficier de la même protection légale contre les voies de fait que celle accordée aux adultes.
    Néanmoins, l'abrogation complète de l'article 43 suscite des inquiétudes dans certains secteurs. Par exemple, divers groupes religieux, des juristes et des syndicats d'enseignants, y compris la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, ont exprimé des réserves. Ils soutiennent que l'abrogation complète de l'article 43 pourrait exposer le personnel enseignant et les parents à des accusations criminelles pour des interactions physiques mineures et sans conséquence avec les enfants, comme une dispute entre frère et sœur ou l'expulsion d'un élève d'une salle de classe pour assurer la sécurité de ses pairs. À défaut d'assurer une protection juridique aux parents, aux éducateurs et aux gardiens qui recourent à une force physique raisonnable à l'endroit des enfants dont ils ont la charge, les dispositions relatives aux voies de fait pourraient entrer en jeu. Cela s'explique par le vaste champ d'application de ces dispositions, qui englobent le recours à une force légère qui n'aboutit pas à une atteinte à l'intégrité physique. Par exemple, il peut s'agir d'un parent qui retient un enfant pour s'assurer qu'il est correctement installé dans son siège de voiture.
    Comme je l'ai déjà mentionné, l'abrogation de l'article 43 pourrait également entraîner des répercussions négatives imprévues sur des groupes dont il est déjà prouvé qu'ils sont démesurément surveillés par les services de police et surreprésentées dans les systèmes de justice pénale et de protection de la jeunesse. Je pense ici notamment aux communautés autochtone et noire, ainsi qu'aux membres d'autres groupes racisés.
    Pour conclure...
(1740)
    Nous reprenons le débat. La députée d'Elgin—Middlesex—London a la parole.
    Madame la Présidente, c'est véritablement un honneur de pouvoir prendre la parole à la Chambre aujourd'hui afin de débattre de cet important projet de loi. Je viens ici pour travailler sur des dossiers comme la violence familiale, la violence conjugale et la protection des enfants, mais je porte aussi le chapeau de mère de cinq enfants et de grand-mère de deux enfants. Je le sais, seules quelques rides laissent deviner que je suis grand-mère.
    Oh, oh!
     Je remercie Leah, qui me tire toujours la pipe.
    Le projet de loi d'aujourd'hui est présenté…
    On ne doit pas mentionner le nom d'une députée à la Chambre.
    Madame la Présidente, vous avez tout à fait raison, je ne dois pas le faire. Je suis heureuse que nous puissions débattre d'une question aussi cruciale en faisant les concessions qui s'imposent.
    Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui vise à modifier le Code criminel pour abroger son article 43. D'entrée de jeu, je tiens à dire clairement qu'aucune disposition du Code criminel ne permet d'user de violence envers les enfants. Les personnes qui infligent de mauvais traitements aux enfants doivent être sanctionnées avec toute la rigueur de la loi. À l’heure actuelle, au Canada, des paramètres clairs encadrent le recours à aux châtiments corporels selon l’article 43.
    Je tiens à en parler parce que, dans le cadre de notre discussion, il faut absolument faire la distinction entre la force corrective et les mauvais traitements. La distinction est très difficile à faire. On le sait: il arrive que les châtiments corporels soient des cas isolés, mais, dans certains foyers, ils peuvent être une pratique courante. Une discussion beaucoup plus vaste s'impose, et il peut être très difficile d'adopter une position intransigeante à ce sujet.
    Bref, je tiens à préciser ce que dit la loi à l'heure actuelle, ce que les parents sont autorisés à faire et quelles sont les restrictions. Je vais lire un dépliant tout simple que le Service public d'éducation et d'information juridiques du Nouveau‑Brunswick a fait circuler à l'intention des parents. Il définit les paramètres, alors j'aimerais que cela soit versé au compte rendu. Le dépliant dit:
     Comment la Cour suprême a-t-elle limité l’emploi de la force comme mesure de correction?
    La Cour suprême du Canada a déclaré que la force doit:
servir à des fins d’éducation ou de discipline;
se limiter à la restriction, au contrôle ou à l’expression verbale de la désapprobation de la conduite;
être utilisée seulement envers un enfant capable de comprendre la correction. Autrement dit, des facteurs comme l’âge de l’enfant et une incapacité influenceront sa capacité à tirer un enseignement de l’usage de la force;
être « raisonnable dans les circonstances » et toujours tenir compte de la dignité humaine.
    J'ajoute ces éléments à la discussion parce que nous parlons beaucoup de mauvais traitements. Nous parlons de contrôle coercitif, une forme de mauvais traitement qui n'est même pas physique, mais dont nous reconnaissons l'existence. Par contre, il faut faire la distinction entre les pratiques parentales et les mauvais traitements. C'est une discussion très complexe. Je suis mère de cinq enfants et je sais que mon fils à la maison se demande également: « Qu'est-ce que cela veut dire? Comment me suis-je comporté en tant que parent? Quelles sont les erreurs que j'ai commises? »
    Je ne me souviens pas qu'on m'ait donné la fessée lorsque j'étais enfant. Peut-être aurait-il fallu qu'on me la donne; je ne sais pas, mais il y a des situations qui justifient une intervention physique pour protéger l'enfant et assurer sa sécurité. Le député de Richmond Hill a parlé d'une intervention physique pour installer un enfant dans son siège d'auto. Il n'est absolument pas question de gifler un enfant au visage en lui disant de faire ce qu'on lui dit de faire, mais d'une situation visant à assurer la protection de l'enfant. Je pense à des situations où il faudrait éloigner un enfant d'un feu, parce que, comme de petits insectes, les enfants sont fascinés par le feu et il faut intervenir physiquement pour les éloigner du danger. Quand il est question de cet enjeu, il faut prendre en compte la situation, parce que chaque situation est différente.
    Je ne dis pas que je suis en faveur de la fessée; je plaide pour que l’on tienne compte de la situation et que l’on soit sensible aux mesures de contrôle ou aux limites que les parents peuvent avoir définies. Dans certains cas, malheureusement, la force peut être la seule solution. Je dis cela, mais pour moi, il ne faut l'appliquer qu'en dernier recours. Ce devrait être le dernier recours pour protéger l’enfant. Je voudrais renvoyer à la Bibliothèque du Parlement, qui a réalisé une excellente étude sur cette question en février 2023. Il s’agit d’une des Études de la Colline, et si quelqu’un veut l’imprimer, elle est accessible au public. Il est évident, à la lumière des renseignements contenus dans ce document, qu’il est question de choses très différentes, et il faut en être conscient.
    Il est évident qu'ici, à la Chambre, nous entendons une multitude de points de vue sur les cas où des parents ou des enseignants peuvent intervenir physiquement. Certains défenseurs des droits estiment que les mauvais traitements ne sont jamais justifiables, mais reconnaissent l'optique de la discipline. En lisant un rapport dissident émanant des discussions sur le sujet, j'ai appris qu'en 2004, six juges sur neuf, je crois, avaient appuyé la décision de la Cour suprême visant à maintenir le Code criminel dans sa forme actuelle, sans changer l'article 43 qui permet aux enseignants et aux parents d'employer la force pour corriger un enfant. La raison pour laquelle je veux en parler, c'est qu'il faut comprendre qu'il peut y avoir des circonstances qui s'y prêtent. Six des neuf juges ont convenu qu'il fallait faire quelque chose et poursuivre l'étude du projet de loi. Dans le rapport dissident, plusieurs d'entre eux ont émis des réserves en disant qu'ils comprenaient le bien-fondé, mais qu'il fallait utiliser cette mesure en dernier recours.
(1745)
    Je vais lire l'article 43 du Code criminel, qui indique ceci:
    Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances.
    Je pense que c'est vraiment important parce que j'ai parlé des enseignants, et, comme le député qui est intervenu avant moi l'a mentionné, nous avons reçu une lettre de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, que j'ai entre les mains et que je veux lire dans le cadre du débat. Je vais citer les préoccupations de la fédération:
     La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants [...] a une politique de longue date qui s'oppose aux châtiments corporels et elle appuie l'engagement du gouvernement du Canada à mettre en œuvre tous les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada. Parallèlement, la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants [...] veut s'assurer que le processus ne causera aucun préjudice non intentionnel, ce qui serait le cas si l'article 43 était abrogé. Si l'article 43 est abrogé sans que d'autres modifications soient apportées au Code criminel pour garantir que les enseignants peuvent intervenir physiquement au besoin pour protéger les élèves et, dans certains cas, eux-mêmes, les enseignants ne seront pas capables d'assurer la sécurité dans les salles de classe.
    Je tenais à lire la lettre, parce qu'elle ressemble beaucoup au rapport dissident de la Cour suprême que j’ai lu précédemment, où on expliquait pourquoi les gens n'étaient peut-être pas en faveur de l'abrogation. C'est parce que nous reconnaissons qu'il peut y avoir des situations où les choses échappent à tout contrôle. Je pense à un directeur d'école secondaire que je connais personnellement et qui a essayé d'arrêter une bagarre dans une école secondaire. C'est un peu différent, mais il faut comprendre que parfois, dans les écoles, les enseignants doivent malheureusement intervenir. Dans ce cas-ci, c'est un directeur d'école qui s'est interposé entre deux jeunes femmes qui se battaient. À la fin, les deux jeunes femmes étaient correctes, mais l'enseignant ne pourra plus jamais enseigner à cause de cet incident. En effet, il s'est fait pousser et est tombé par terre, et il devra vivre le reste de ses jours avec des séquelles au cerveau. Voilà pourquoi il faut comprendre que, parfois, il peut être nécessaire d'exercer un contrôle dans ces milieux de travail.
    À la lumière de cette situation très étrange qu'un enseignant du secondaire a vécue, je réfléchis à ce qui pourrait arriver dans les écoles primaires. Comment pouvons-nous faire en sorte que les enseignants soient en contrôle et qu'ils soient respectés dans les salles de classe? Si j'ai raconté l'histoire du directeur d'école, c'est surtout pour parler du respect envers les enseignants et du fait qu'il doit y avoir un certain degré de contrôle. Je ne parle pas d'un contrôle imposé par la force. Toutefois, dans des situations complètement hors de contrôle, l'enseignant peut devoir réprimander un enfant ou l'envoyer dans le bureau du directeur. Lorsque la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants s'adressera à nous, je pense que c'est le genre de situations où elle voudra avoir l'assurance que la sécurité de ses membres et des élèves primera avant tout. Je pense que l'abrogation de l'article 43 pourrait avoir des conséquences désastreuses en raison du climat non sécuritaire dans les écoles en ce moment. Nous essayons de faire un bon travail, mais, malheureusement, les problèmes de santé mentale compromettent grandement nos efforts.
    Je passe à mon dernier point: les propositions de réforme. Comme nous le savons, nous avons vu plus d'une vingtaine de projets de loi d'initiative parlementaire sur ce sujet en particulier. Aucun d'entre eux n'a été adopté au comité. Dans les 20 dernières années, dans un rapport sur les droits des enfants au Canada, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a recommandé d'abroger l'article 43 et a souligné la nécessité de lancer des campagnes de sensibilisation auprès du public. Je suis tout à fait d'accord sur ce point. Chaque fois que nous parlons d'abus et de mauvais comportement, je pense qu'il est important de privilégier la sensibilisation.
    Bref, l'article 43 est un outil qui ne devrait servir qu'en dernier recours, mais je crois qu'on ne peut priver les enseignants et les parents de cet outil.
    Je suis reconnaissante que l'on m'ait accordé du temps pour m'exprimer sur cet important sujet.
(1750)

[Français]

    Madame la Présidente, si vous me le permettez, j'aimerais souhaiter un joyeux anniversaire à ma fille Naomie, qui a deux ans aujourd’hui, et lui dire que maman l’aime beaucoup. C'est un peu dans la thématique du projet de loi à l'étude, puisque nous parlons d’enfants, et je sais qu’elle me regarde avec beaucoup d’attention en ce moment.
    Il y a des projets de loi qui sont délicats à expliquer, surtout quand il est question d’enfants, d'autant plus que, au Québec, nous sommes fous de nos enfants. Malgré tout, d’entrée de jeu, j’annonce que le Bloc québécois votera contre le projet de loi C‑273 pour empêcher que celui-ci soit étudié en comité. J’expliquerai d’abord pourquoi nous avons pris cette décision. Je décrirai ensuite le contexte dans lequel se situe ce projet de loi et j'expliquerai finalement pourquoi il est plutôt une fausse bonne idée.
    Premièrement, le Bloc québécois prône, encore une fois, une position équilibrée relativement à cette question délicate. Nous allons être les adultes dans la pièce. Ainsi, nous croyons que la loi doit comporter des mécanismes de défense raisonnables pour permettre de maintenir la confiance de la population dans notre État de droit.
    Le projet de loi vise essentiellement à abroger l’article 43 du Code criminel, qui offre un moyen de défense aux parents ainsi qu’aux enseignants s’ils utilisent une force raisonnable pour corriger un enfant. On pourrait donc parler ici de discipline des enfants et de discipline parentale.
    L'article 43 stipule ce qui suit: « Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. » C'est clairement énoncé.
    Deuxièmement, on a vu dans les médias que, dans les dernières années, un mouvement a pris son essor. Ce mouvement réclame qu'on mette fin à toute forme de châtiment corporel à l’égard des enfants et des jeunes, notamment par l’abrogation de l’article 43 du Code criminel. Plusieurs intervenants et groupes comme la quête de Corinne ont manifesté leur soutien à l'idée que les parlementaires retirent une fois pour toutes cette disposition du cadre légal. Des initiatives en ce sens ont été présentées à la Chambre des communes et au Sénat pas plus tard qu’en 2022.
    Il est bon de rappeler qu’en 2004, la Cour suprême s’est penchée sur la question et a maintenu la constitutionnalité de l’article 43. Ce dernier peut servir de moyen de défense devant des accusations de voies de fait à l’égard d’un enfant. Pour éviter des dérapages judiciaires, nous considérons qu’il conserve sa pertinence dans l’exercice d’une autorité parentale ou celle d’un enseignant, et ce, bien entendu, dans la mesure du raisonnable.
    Dans l'affaire Canadian Foundation for Children, Youth and the Law c Canada, le plus haut tribunal a interprété l’article 43 du Code criminel. Contesté sur la base des articles 7 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantissent respectivement le droit à la sécurité et le droit à l’égalité, l’article 43 n’a pas été invalidé au motif que la protection qu’il procure est limitée. Ainsi, elle n’exclut pas la possibilité que des accusations, de même que d’éventuelles sanctions criminelles, puissent être portées lorsqu’une force excessive est employée à l’égard d’un enfant.
    Dès que cette force dépasse un degré qui est passager ou négligeable pour contrôler le comportement d’un enfant et qu’elle devient préjudiciable ou dégradante pour celui-ci, la protection offerte par l’article 43 peut être écartée et les gestes en cause pourraient être qualifiés de criminels. Cette protection s’exerce raisonnablement, et on tient compte des circonstances. La Cour suprême a considéré la possibilité que la force ne puisse pas être appliquée au moyen d’objets comme une règle ou une ceinture et que la tête de l’enfant doive être hors de portée.
    Le retrait de l’article 43 du Code criminel signifierait qu’on criminaliserait une conduite normale de parents qui cherchent à mettre leur enfant au lit ou celle d’un enseignant qui maîtrise physiquement un élève pour le sortir de la classe ou d’une situation dangereuse, telle une bagarre.
    En l’absence d’un mécanisme de protection, les procureurs peuvent tout de même exercer leur discrétion pour déterminer s’ils intentent ou non une poursuite. Cependant, une fois accusés, les parents ou enseignants n’auraient plus la reconnaissance légale du rôle éducatif qu’ils exercent et qui pourrait justifier ces comportements. En psychologie, on peut démontrer que le fait de retirer cette reconnaissance légale peut avoir des conséquences.
    Troisièmement, avec la proposition du NPD, le projet de loi C‑273 propose du tout ou rien: abolir ou non l’article 43. Le fait que le NPD ne pas propose de compromis permettant de justifier des comportements visant à maîtriser physiquement un enfant ou un jeune découle de son idéologie.
(1755)
     Un exemple de compromis aurait été d’accompagner l’abrogation de l’article 43 de l'ajout d’un nouvel article qui prévoit qu’un comportement ne peut être criminalisé s’il vise à protéger l’enfant d’une menace ou d’un danger, à empêcher que celui-ci ne commette une infraction criminelle ou à s’inscrire dans le rôle d’un parent qui exerce ses tâches habituelles et quotidiennes.
    La proposition du NPD est donc une fausse bonne idée. Avec la montée de la violence dans nos écoles, on ne peut se permettre d’anéantir les quelques mesures de protection qui s’offrent aux enseignants qui se trouvent à gérer des élèves de moins en moins respectueux de l’autorité. Le fait de criminaliser par défaut des comportements qui cherchent à maîtriser raisonnablement un élève délinquant n’a rien d’encourageant pour la poursuite des efforts de recrutement du personnel scolaire.
    C’est un véritable problème en ce moment. Par exemple, un article de Radio-Canada écrit par Alexandre Duval l'année dernière nous apprenait qu’en 2021, « des centres de services scolaires du Québec ont déclaré deux fois plus de gestes violents qu’en 2018-2019, soit avant la pandémie ». On ne peut pas nier cette hausse et on ne peut pas ajouter à la charge mentale des enseignants le risque de poursuites et de ne pas pouvoir intervenir si des situations dégénèrent. Dans l'article, l'auteur mentionne:
    Au Centre de services scolaire des Affluents, dans Lanaudière, les cas rapportés de violence physique et verbale ont plus que doublé au cours de cette même période, passant de 757 à plus de 2 000. Il s’agit d’une hausse de 164 %. Une augmentation comparable de 141 % s’est produite dans les cas rapportés au Centre de services scolaire de la Beauce-Etchemin. À peine plus de 400 gestes de violence ont été enregistrés en 2021 comparativement à 979 l’an dernier.
    Je vais ici faire un témoignage personnel. Avant d'être élue, par amour des enfants, j'ai eu la chance d'être surveillante dans une école primaire et j’ai fait face à différentes situations. Je me suis fait lancer un ballon au visage, cassant ainsi mes lunettes. J’ai vu des enfants en crise se lancer en classe sur des collègues. Il y avait manifestement un enjeu de sécurité pour l’élève et pour les autres. C'est sans compter toutes les fois où je suis arrivée dans une classe et où le professeur essayait de contrôler certains élèves plus turbulents. J'ai assisté à des scènes assez troublantes.
    Or, avec ce projet de loi, les interventions du personnel seraient complexes. En fait, j’aurais moi-même eu des inquiétudes à intervenir pour ramener un sentiment de sécurité dans de telles situations. Il faut déjà faire extrêmement attention, car la loi existe déjà et on ne peut pas user d’une force démesurée sur un enfant. Nous ne voulons pas de mal à un enfant, c'est évident. J’en parlais plus tôt avec le jugement de 2004 concernant l'article 43.
    Les recherches que j’ai faites en prévision de ce discours m’ont également menée vers un rapport de l’Institut national de santé publique du Québec qui s’est penché sur la violence et la santé et qui abordait cette question de l’intimidation et de la violence dans les écoles. Entre élèves, il peut aussi y avoir de la violence. Comme personnel, on se doit de pouvoir agir raisonnablement si un risque se présente pour les autres élèves.
     En conclusion, au Bloc Québécois, nous croyons que nos écoles peuvent être des milieux sécuritaires pour tous et que nos enseignants jouent un rôle central dans le maintien de cet environnement harmonieux et propice aux apprentissages. On se doit d’avoir un cadre juridique qui est respectueux de l’autorité parentale et de celle du personnel scolaire, pourvu qu’elle soit exercée raisonnablement. C'est toute une question de pédagogie, mais aussi de sécurité. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est aussi toute la question de savoir comment on veut intervenir auprès des enfants, mais il faut le faire raisonnablement. C’est pourquoi nous allons voter contre le projet de loi C‑273. Encore une fois, les députés néo-démocrates proposent une fausse bonne idée qui pourrait avoir pour effet de criminaliser le comportement de parents et d'enseignants qui agissent plutôt de bonne foi.
    J'aimerais souligner une dernière chose. Nous voulons tous le mieux pour l’éducation de nos enfants, mais il faut nous garder des outils pour agir et pour les protéger. Personne ne souhaite user d'une force démesurée contre un enfant. En cas de problème, nous voulons que le système de justice puisse suivre son cours. En ce moment, ce qu'on nous démontre, c'est qu'il y a des risques à retirer l'article 43. Il y a un risque de pression supplémentaire sur le personnel et un risque de dérapage pour certains parents. Pour toutes ces raisons, encore une fois, le Bloc québécois votera contre ce projet de loi qui aborde cette question extrêmement délicate. Rappelons que ce que nous voulons d'abord et avant tout, c'est placer le bien-être des enfants au cœur des priorités des élus à la Chambre.
(1800)

[Traduction]

    Madame la Présidente, c'est un honneur pour moi de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C‑273, qui a été présenté par mon merveilleux collègue de New Westminster—Burnaby et appuyé par ma collègue du Nunavut.
    Comme nous l’avons entendu, le projet de loi vise à abroger l’article 43 du Code criminel, intitulé « Discipline des enfants ». En voici le libellé: « Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. »
    Nous sommes maintenant en 2024. J'ai longtemps été éducatrice de la petite enfance. J'ai enseigné à la faculté d'éducation de l'Université de Winnipeg, tout en préparant les futurs enseignants à leur stage d'études pratiques dans les écoles. Nous savons qu'il n'y a aucun avantage à utiliser la force physique contre un élève. Lorsque j'étais enseignante, je travaillais souvent avec des élèves à risque, mais je n'ai jamais eu à lever la main sur l'un d'entre eux pour maîtriser la situation.
    Il n'est pas étonnant que dans ma circonscription, au Manitoba, l'Aurora Family Therapy Centre appuie l'abrogation de l'article 43, tout comme la Manitoba Association of School Superintendents. Même les dirigeants des écoles du Manitoba appuient l'abrogation, tout comme les associations de garderies du Manitoba, les experts dans le domaine, qui comprennent pertinemment que le recours à la force physique contre un enfant n'a pas sa place.
    D'ailleurs, l'un des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation consiste à abroger l'article 43. Nous sommes conscients des préjudices causés aux enfants dans les pensionnats. Nous connaissons les dommages permanents et les séquelles affectives que le recours à la force physique contre les enfants a causés. Voilà pourquoi je ne suis pas étonnée que plus de 700 organismes, dont l'association des directrices et directeurs de division scolaire, appuient l'abrogation de l'article 43 du Code criminel.
    Je me souviens que c'est en 2e année que j'ai commencé à détester l'école. Je crois qu'à un certain moment, au cours de mon parcours scolaire, aucun enseignant n'aurait cru que j'obtiendrais un jour mon diplôme d'études secondaires. Je me souviens encore du nom de mon professeur de 2e année. C'était M. Camilo. Il avait l'habitude de donner des coups de pied aux enfants turbulents afin de les rappeler à l'ordre. Je me souviens d'un garçon qui avait manifestement des problèmes. En rétrospective, il devait avoir toutes sortes de problèmes dans sa vie. Il était peut-être même victime de violence familiale. M. Camilo le frappait tous les jours pour le rappeler à l'ordre.
    Je n'ai jamais constaté d'amélioration dans le comportement de ce garçon. En fait, la situation n'a fait qu'empirer entre M. Camilo et lui. Je me souviens que je détestais M. Camilo lorsque j'étais enfant. Mon père était psychologue au ministère de l'Éducation et travaillait auprès des enfants ayant le plus de difficultés en classe, et nous en discutions, lui et moi.
(1805)
    Je me souviens que mon père plaidait pour que l'on mette fin aux violences faites aux enfants et aux châtiments corporels à l'école. Il avait lui‑même subi des châtiments corporels de la part d'adultes qui tentaient de le faire rentrer dans le rang alors qu'il se cachait pendant l'Holocauste. Je ne suis donc pas surpris que près de 700 organismes et universitaires aient souscrit à une déclaration commune sur les châtiments corporels infligés aux enfants et aux adolescents, affirmant que les châtiments corporels infligés aux enfants ne peuvent plus être justifiés par le Code criminel du Canada. Sept cents experts, universitaires et personnes comme moi, qui forme de futurs enseignants, affirment que les châtiments corporels infligés aux enfants n'ont pas leur place dans les établissements. Ce chiffre est loin d'être négligeable.
    La Convention de l’ONU relative aux droits de l'enfant stipule en effet que les gouvernements doivent protéger les enfants contre la violence. En tant que députés, nous sommes tenus de respecter les dispositions des conventions des Nations unies, y compris l'obligation des gouvernements de protéger les enfants contre la violence et, je dirais même, les protéger contre la violence, les abus et les mauvais traitements infligés par les personnes qui s'occupent d'eux. J'estime que ce projet de loi est une occasion de plus de faire respecter les lois sur les droits de la personne qui ont une incidence sur les enfants. Plus de 65 pays dans le monde ont déjà interdit la pratique des châtiments corporels infligés aux enfants. Si le Canada veut être un véritable grand défenseur des droits de la personne, il doit abroger l'article 43 du Code criminel.
    Je dois dire que je suis déçue, surtout après la publication du rapport de la Commission de vérité et réconciliation en 2015, que nous vivions encore à une époque où nous pouvons justifier n'importe quelle forme de châtiment corporel infligé à des enfants, en particulier dans les garderies et les écoles. J'ai travaillé plus de 30 ans dans le domaine de l'éducation — comme éducatrice de la petite enfance, enseignante et formatrice des futurs enseignants pendant leurs études universitaires —, et je peux dire que je n'ai jamais eu à maîtriser physiquement des enfants, même ceux qui avaient énormément de difficultés en classe. J'ai donc bien du mal à comprendre une telle chose.
     Le châtiment corporel est souvent appliqué aux enfants qui ont des besoins particuliers, y compris, par exemple, les enfants atteints de TDAH, comme mon fils, qui a dû suivre un programme d'enseignement individualisé parce qu'il avait du mal à rester à sa place. L'enseignant de mon fils Jacob, mon garçon merveilleux, courageux et brillant, a réussi à l'intégrer dans sa classe en plaçant du ruban adhésif sur le sol pour lui rappeler qu'il devait rester dans le carré. Cet enseignant a permis à mon fils de se tenir debout à son pupitre et de se balancer d'avant en arrière, parce qu'il n'arrivait pas à rester assis. Il a écrit plein de beaux poèmes et il a obtenu la mention « excellent » en sciences. Tout ce qu'il fallait, c'était lui permettre de se tenir debout. Nous devons trouver des moyens plus efficaces et plus créatifs de gérer le comportement en classe et dans les écoles que restreindre physiquement leurs mouvements pour les obliger à suivre les règles à la lettre même si nous savons que certains enfants sont différents.
    Par conséquent, je suis très fière de me joindre à mon collègue de New Westminster—Burnaby pour attirer l'attention de la Chambre sur cette question et pour oser suggérer que nous fassions un peu mieux les choses, que nous soyons un peu plus gentils, un peu plus doux et un peu plus sensibles, et que nous élevions une nouvelle génération d'enfants qui ne sont pas violents parce qu'aucune violence n'a été pratiquée contre eux.
(1810)
    Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre la parole au sujet du projet de loi C‑273, Loi modifiant le Code criminel.
    Je veux remercier mon collègue le député de New Westminster—Burnaby d'avoir présenté cet important projet de loi, ainsi que la députée de Nunavut, qui a récemment pris la parole au sujet du projet de loi, et la députée de Winnipeg‑Centre. Ce sont deux ardentes défenseures des enfants à la Chambre.
    Nous le savons, les punitions corporelles données aux enfants sont toujours légales au Canada. Je suis mère de deux enfants. Ma fille, Makayla, est aujourd'hui âgée de 21 ans et mon fils, de 16 ans, alors il s'agit d'une question qui m'atteint droit au cœur et je crois que c'est la même chose pour de nombreux parents et pour les personnes qui s'occupent des enfants et des jeunes dans l'ensemble du pays. Les enfants ne devraient pas vivre dans la peur des punitions corporelles ou subir de telles punitions à la maison, à l'école ou ailleurs dans la société canadienne, car nous connaissons les effets néfastes qu'a cette pratique sur les enfants.
    Les conclusions d’une déclaration conjointe présentée par des Canadiens — il me semble que ma collègue a parlé de 700 organismes, dont Services à la famille — Canada, l’Institut canadien de la santé infantile et l’Association canadienne de santé publique — montrent qu’il n’y a aucune preuve manifeste que le recours aux châtiments corporels présente un quelconque avantage pour les enfants et les jeunes. En fait, les conclusions montrent le contraire: les châtiments corporels infligés exposent les enfants à un risque accru non seulement de préjudice corporel, mais aussi d'atteinte à la santé mentale, sans compter les répercussions négatives exacerbées sur les plans, entre autres, des valeurs morales et de la faculté d’adaptation à l’âge adulte. Je pense que les enfants et les jeunes sont très sollicités dans le monde d’aujourd’hui, et devoir faire face à de la violence physique est un fardeau de plus pour un grand nombre d'entre eux. Pire encore, les châtiments corporels, quel que soit leur degré de gravité, s’accompagnent d’un risque accru d’escalade de la violence.
    Dans le monde, 60 pays ont interdit les châtiments corporels à l'endroit des enfants et des jeunes, et ce nombre ne cesse d’augmenter. Pour ce qui est des mesures législatives essentielles pour protéger les enfants, le Canada est donc à la traîne.
    Ce n'est pas nouveau. Nous savons que Corinne Robertshaw, une avocate du gouvernement fédéral, a été témoin des effets de châtiments corporels infligés à des enfants, ainsi que de décès et de blessures dus à de tels châtiments pendant les années 1970 et 1980. Sa quête se poursuit aujourd'hui par l'entremise du groupe de bénévoles Corinne's Quest, qui multiplie les efforts pour protéger les enfants et promouvoir l'abrogation de l'article 43 du Code criminel du Canada.
    L'article 43 du Code criminel dit ceci: « Tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. »
    Je ne doute pas que beaucoup de députés aujourd'hui ont la même réaction que moi devant cet article du Code criminel. Encore une fois, le passage « la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances » est très loin d'être clair. De plus, la notion de « la force pour corriger » laisse beaucoup de place à l'interprétation, ce qui expose les enfants et les jeunes à un risque.
    Nous constatons les effets dévastateurs de cet article dépassé du Code criminel partout au pays. Par exemple, nous voyons des reportages et des preuves qui révèlent le traitement horrible qui est infligé à des enfants et à des jeunes dans des écoles par des personnes à qui on confie la garde de nos enfants. Nous avons appris que des enfants ont été isolés et retenus de façon inappropriée, ce qui leur a causé des préjudices physiques et psychologiques, et que les personnes qui ont commis ces actes n'ont subi à peu près aucune conséquence. Nous savons que cet article du Code criminel ne protège en rien les enfants.
    Je tiens à préciser que nous ne parlons pas des mesures nécessaires pour protéger les enfants contre eux-mêmes ou pour protéger les autres à l'école, par exemple. Nous parlons plutôt des châtiments corporels qui, comme nous le savons, ne sont aucunement bénéfiques pour les enfants.
    J'ai travaillé dans des écoles pendant de nombreuses années. Malheureusement, on hésite souvent à parler des circonstances où un adulte ou un éducateur doit prendre des mesures pour éviter qu'un enfant se fasse du mal.
(1815)
    Par exemple, je travaillais avec un jeune qui éprouvait des difficultés et se montrait incapable d'éviter de courir dans la rue. J'ai dû lui prendre le bras avec prudence pour qu'il ne se fasse pas de mal et qu'il ne se retrouve pas au milieu de la circulation. Bien entendu, il y a des exemples où des soins mûrement réfléchis doivent être fournis aux enfants, mais ce n’est pas ce dont nous parlons en ce moment.
    Ce dont il est question aujourd'hui, c'est de châtiments corporels. Je tiens à ce que ce soit bien clair. Il y a tellement de professionnels de l'éducation au pays qui ne ménagent aucun effort pour assurer la sécurité et le bonheur des enfants, pour garder leur cerveau et leur corps actifs. Les éducateurs doivent être en mesure d'assurer la sécurité des enfants. Je peux en témoigner. En même temps, cet article cause plus de problèmes qu'il n'en résout.
     Dans le rapport de la Commission de vérité et réconciliation, l’appel à l’action n o 6 énonce exactement cette recommandation. Nous savons que seulement 13 des 94 appels à l’action ont été mis en œuvre à ce jour. Ces appels à l’action découlent de la bravoure des survivants des pensionnats et de leurs familles qui ont raconté leurs histoires et leurs expériences. Il est temps que le gouvernement donne suite à ces recommandations. Le rythme auquel le gouvernement libéral donne suite à ces recommandations est une insulte aux Autochtones et à tous les Canadiens. Elles doivent être mises en œuvre dès aujourd’hui. Cette motion est un moyen d’aller de l’avant en donnant suite à une autre recommandation.
    Ma collègue, la députée de Nunavut, a récemment attiré l’attention de la Chambre sur l’histoire et la justification invoquée pour infliger de mauvais traitements aux enfants autochtones. Ce pan de notre histoire demeure une partie honteuse du passé du Canada, mais il perdure encore aujourd’hui en raison de l’inaction du gouvernement à l’égard des changements nécessaires au Code criminel, notamment à l’article 43, dont nous débattons aujourd’hui. Je tiens à souligner les propos qu’elle a tenus dans son récent discours sur ce projet de loi, car j’estime qu’ils sont importants.
     La réconciliation du Canada avec les peuples autochtones nécessite toujours un engagement constant, bien financé et réel. Les peuples autochtones n’ont pas encore vécu de réconciliation active. Interdire les châtiments corporels infligés aux enfants serait une mesure positive. On peut cesser de justifier les préjudices causés aux enfants. La 44e législature pourrait être celle qui corrigera la situation.
    J'espère que tous les députés appuieront ce projet de loi et feront ce qu'il faut pour protéger les enfants et les jeunes. Nous savons qu'il ne s'agit pas d'une question partisane. Il s'agit d'une modification nécessaire et très attendue d'un article obsolète du Code criminel. Malgré nos divergences dans cette enceinte, j'espère que nous mettrons tous la partisanerie de côté et que nous ferons ce qui est dans l'intérêt des enfants et des jeunes.
    Je tiens à souligner qu'il s'agit d'un travail important pour faire avancer des mesures majeures et nécessaires; cela dit, les familles ont besoin du soutien et des ressources nécessaires pour prévenir et rompre le cycle de la violence. Je ne saurais trop insister sur la nécessité vitale pour le gouvernement d'investir réellement dans les gens, car trop de gens peinent à joindre les deux bouts, et trop de gens n'obtiennent pas l'aide dont ils ont besoin. Ces facteurs contribuent à l'augmentation de la violence, et il faut s'y attaquer et y investir de façon appropriée.
     Au lieu de justifier les châtiments corporels infligés à nos enfants, nous devons tous nous unir pour garantir le respect des droits des enfants et des jeunes en abrogeant l'article 43 du Code criminel et en appuyant le projet de loi de mon collègue, à savoir le projet de loi C‑273.
(1820)
    Madame la Présidente, je dirai d'abord que, ce soir et lors du débat précédent, nous avons entendu des discours très clairs sur l'importance du projet de loi, en particulier de la part de notre collègue la députée de Nunavut aujourd'hui. La députée de Winnipeg-Centre a rendu ce point encore plus limpide.
    Avec le temps limité dont je dispose, je voudrais contribuer à ce débat en concentrant mes remarques sur l'importance d'écouter les dirigeants autochtones, en particulier pour ce qui est des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
    À mon avis, le projet de loi C‑273 offre une occasion à tous les parlementaires de faire avancer les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. En ce qui me concerne, je me suis engagé à les mettre pleinement en œuvre, comme l'a fait le Parti vert du Canada.
    Je vais lire, encore une fois, l'appel à l'action no 6: « Nous demandons au gouvernement du Canada d’abroger l’article 43 du Code criminel du Canada. »
    C'est exactement ce que le projet de loi C‑273 vise à faire.
    À titre d'information, la Commission de vérité et réconciliation a lancé 94 appels à l'action en 2015, et les progrès sont d'une lenteur absurde. Au rythme actuel, la mise en œuvre de tous les appels ne sera pas terminée avant 2081. Or, tous les partis à la Chambre se sont engagés à mettre en œuvre l'ensemble des appels à l'action.
    Je vais maintenant les résumer. En 2015, celui qui était alors le chef du Parti libéral du Canada et qui est maintenant premier ministre disait: « Au nom du Parti libéral du Canada et de notre caucus parlementaire, j’affirme notre appui indéfectible aux recommandations de la [Commission de vérité et réconciliation] et enjoins le gouvernement du Canada à prendre immédiatement des mesures pour les mettre en œuvre. »
    Quelqu’un applaudit sur les bancs du parti au pouvoir. Je lui rappelle que l’appel à l’action no 6 correspond exactement à l'objet du projet de loi. J’espère sincèrement que le gouvernement appuiera le projet de loi C‑273.
    En ce qui concerne le Parti conservateur, en 2021, Erin O’Toole, alors chef du Parti conservateur, s’est engagé à mettre en œuvre tous les appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Je suppose que l’appel à l’action no 6 en faisait partie.
    J’en viens au Bloc québécois. En 2021, selon leur plateforme, les députés bloquistes allaient faire pression sur le gouvernement fédéral pour qu’il mette en œuvre toutes les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation.
    Au cours de la même campagne, en 2021, le chef du NPD s’est engagé à mettre pleinement en œuvre toutes les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation qui ne l’avaient pas été. D’ailleurs, une députée néo-démocrate présente un projet de loi à la Chambre qui va dans ce sens.
    La cheffe du Parti vert du Canada, la députée de Saanich—Gulf Islands, a fait la même promesse.
    En résumé, j’espère que mes collègues tiendront les engagements de leur parti et ceux que, je n’en doute pas, ils ont également pris personnellement.
    J'espère, à tout le moins, que ce projet de loi sera renvoyé en comité. Depuis que je suis député, c'est la deuxième fois que je constate que les promesses des députés de mettre en œuvre les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation ne sont pas suivies de mesures concrètes.
    La dernière fois, il était question du projet de loi C‑5. Alors que l'appel à l'action no 32 vise à supprimer les peines minimales obligatoires, le projet de loi C‑5 n'a fait qu'éliminer une partie de ces peines.
    Lors du vote sur le projet de loi C‑273, les députés auront à nouveau l'occasion de respecter leurs promesses. Pour ceux et celles qui se sont engagés à faire pression sur le gouvernement en ce sens, voilà l'occasion parfaite. Un député a présenté un projet de loi qui vise à abroger l'article 43 du Code criminel. Il s'agit de l'appel à l'action no 6.
    J'ose espérer que mes collègues seront favorables à ce projet de loi, ce qui nous permettra de nous rapprocher peu à peu de la réalisation des 94 appels à l'action lancés par la Commission de vérité et réconciliation en 2015. Nous voilà déjà en 2024. Nous devons agir plus rapidement, et nous avons maintenant la possibilité de le faire.
    Le député de New Westminster-Burnaby dispose de cinq minutes pour exercer son droit de réplique.

[Français]

    Madame la Présidente, demain, nous avons une tâche importante. Nous allons tenir un vote sur le principe du projet de loi C‑273 qui vise à abolir le châtiment corporel des enfants au Canada et d'abolir l'article du Code criminel, qui existe depuis 1892, qui fait que les châtiments corporels des enfants sont permis. Un de mes collègues vient de dire qu'il faut un amendement à ce projet de loi. Demain, nous voterons sur le principe, mais des amendements pourraient certainement être présentés en comité.
    Par ailleurs, il est important de mentionner que les organisations partout au pays, au nombre de 700 comme ma collègue de Winnipeg-Centre vient de le mentionner, dont des dizaines d'organisations au Québec, y compris l'Association des centres jeunesse du Québec, l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec, l'Association des médecins en protection de l'enfance du Québec, l'Association québécoise des centres de la petite enfance au Québec, et j'en passe puisqu'il y en a plusieurs autres, toutes ces organisations veulent justement que les députés du Québec et de partout au Canada votent en faveur du projet de loi demain. C'est parce qu'on connaît les répercussions de ces punitions. Les châtiments corporels sont liés à des méfaits personnels et sociétaux vastes et durables. Il faut dire que, comme les organisations le décrivent, 75 % des cas corroborés de mauvais traitements physiques au Canada sont liés à des incidents de châtiment corporel. Ces organisations disent très clairement qu'il faut enlever l'article 43 du Code criminel.
    D'autres pays sont aussi en train de procéder de la même façon. C'est important de le souligner. Des pays comme la Corée, la Colombie, le Japon, l'Afrique du Sud, la France, l'Irlande, l'Argentine, le Brésil, la Pologne et l'Espagne ont aboli les châtiments corporels des enfants. Le vote de principe de demain nous permettra de rejoindre 65 pays dans le monde qui ont déjà tenu ces débats et qui ont décidé qu'il fallait abolir l'article 43 du Code criminel.
(1825)

[Traduction]

     Je tiens à saluer la quête de Corinne, Kathy et John Lynn, de New Westminster, en Colombie‑Britannique, ainsi que tous les organismes qui ont demandé l'abolition de l'article 43 du Code criminel. C'est ce qu'ils ont fait, comme nous le demandait la Commission de vérité et réconciliation dans son appel à l'action no 6. Après le terrible génocide qui a eu lieu dans les pensionnats autochtones, ils disent qu'il est maintenant temps de faire progresser l'appel à l'action no 6. Comme mes collègues l'ont mentionné, cela fait huit ans que ces appels à l'action ont été lancés.
    Depuis 2022, aucun appel à l'action n'a progressé. Cela signifie que demain, les députés seront en mesure de voter par principe afin de mettre en œuvre l'appel à l'action no 6, de supprimer l'article 43 du Code criminel, qui date de 1892, et d'enfin instaurer le genre de climat dont les enfants ont besoin dans ce pays.
    J'ai dit tout à l'heure que de nombreuses organisations nationales demandent aux parlementaires d'abroger l'article 43. Mentionnons notamment l'Église anglicane du Canada, l'association Grands Frères Grandes Sœurs, l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, les ergothérapeutes, les centres de santé pédiatriques, le personnel infirmier pédiatrique, les travailleurs sociaux, l'Association canadienne pour la santé mentale, la Croix-Rouge canadienne, le YMCA, le YWCA et plus de 65 pays qui ont réclamé la même chose, car ils savent que 75 % des cas avérés de violence physique au Canada découlent d'incidents de châtiments corporels.
    Ils disent très clairement qu'il est temps que le Canada supprime une disposition du Code criminel qui date de 1892. Il est temps de donner suite aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. Il est temps de mettre en œuvre l'appel à l'action n o 6. Il est temps de tirer des leçons du passé.
    Demain, les députés se prononceront sur une question importante, à savoir le vote de principe pour l'élimination de cette disposition du Code criminel qui justifie les châtiments corporels infligés aux enfants.
    J'espère que toutes ces voix seront entendues et que les députés voteront en faveur du projet de loi C‑273.
    Comme il est 18 h 30, la période réservée au débat est terminée.
    Par conséquent, le vote porte sur la motion.
(1830)

[Français]

    Si un député participant en personne désire que la motion soit adoptée ou adoptée avec dissidence ou si un député d'un parti reconnu participant en personne désire demander un vote par appel nominal, je l'invite à se lever et à l'indiquer à la présidence.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je demande un vote par appel nominal.

[Français]

    Conformément à l'article 93 du Règlement, le vote par appel nominal est différé jusqu'au mercredi 14 février à la fin de la période prévue pour les questions orales.

[Traduction]

Recours au Règlement

L'irrecevabilité alléguée de la proposition d'amendement à la motion du gouvernement no 34 — Décision de la présidence

[Décision de la présidence]

     Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur le rappel au Règlement soulevé plus tôt aujourd'hui par le leader à la Chambre de l'opposition officielle. Il concerne la recevabilité d'un amendement à la motion du gouvernement no 34, soit l'inclusion d'un amendement de fond au projet de loi C‑62, Loi no 2 modifiant la Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir).
    Le député a soutenu que l’amendement était irrecevable dans la mesure où il visait à introduire une nouvelle proposition à la motion. Il a indiqué que la motion porte sur la programmation et le calendrier de l'étude du projet de loi par la Chambre, alors que l'amendement à la motion vise à modifier le projet de loi lui-même. Le député a fait valoir que dans ce cas, il faut adopter une motion distincte après avoir présenté un avis.

[Français]

    Normalement, le leader à la Chambre aurait raison. Les motions de fond visant à amender un projet de loi seraient proposées à des étapes précises du processus législatif. Il serait ainsi possible de proposer une motion d'instruction distincte au comité ou de proposer des amendements particuliers pendant l'étude article par article ou à l'étape du rapport. Cependant, la motion émanant du gouvernement no 34 porte sur l'adoption du projet de loi simultanément à plusieurs de ses étapes, dont l'étape de l'étude en comité et celle du rapport.

[Traduction]

    Les dispositions de cette motion, si elles étaient adoptées, ne donneraient aux députés aucune autre occasion d'amender le projet de loi lui-même. Le député de Montcalm, qui entendait proposer un amendement au projet de loi, a eu recours au seul moyen dont il disposait: modifier le texte de la motion du gouvernement pour y inclure le texte législatif qu’il souhaite faire ajouter au projet de loi. En raison des effets contraignants de la motion et en l'absence de toute autre possibilité pour le député d'amender le projet de loi, la présidence a accepté la proposition d’amendement à la motion sur l’affaire du gouvernement no 34.
    En ce qui concerne l’argument selon lequel l’amendement dépasse la portée de la motion parce qu’il ne se rapporte pas strictement à la programmation ou à la définition de l’échéancier pour l’étude du projet de loi par la Chambre, puisqu’il apporterait des modifications de fond au projet de loi lui-même, la présidence estime qu’il n’y a pas lieu d'interpréter la notion de portée de façon aussi étroite. En l’espèce, on peut établir que la motion vise à organiser le déroulement des délibérations sur le projet de loi C‑62, y compris l’étude du projet de loi en comité et à l'étape du rapport, ce qui peut comprendre ou non des modifications législatives.
    Si la Chambre souhaite adopter une démarche différente, mais néanmoins compatible, c’est-à-dire renvoyer le projet de loi au comité avec des instructions et inclure des dispositions précises pour modifier le libellé du projet de loi C‑62, la présidence juge que cela s’inscrit dans la portée de la motion.

[Français]

    Pour renforcer cette conclusion, je renvoie la Chambre à une motion de programmation similaire qui a été adoptée à la suite d'un vote par appel nominal le 28 avril 2021. Elle se trouve à la page 853 des Journaux. Un amendement à cette motion de programmation avait été accepté. Il proposait notamment des amendements à un projet de loi. À mon avis, l'amendement visant la motion du gouvernement no 34 n'est pas très différent de l'exemple que je viens de donner.

[Traduction]

    Pour les raisons susmentionnées, la présidence juge que l’amendement à la motion sur l’affaire du gouvernement no 34 est recevable. Je remercie les députés de leur attention.

Ordres émanant du gouvernement

[Ordres émanant du gouvernement]

(1835)

[Traduction]

L'affaire du gouvernement no 34 — Les délibérations sur le projet de loi C‑62

    La Chambre reprend l’étude de la motion, ainsi que de l’amendement.
    Monsieur le Président, je crois que le député du Parti vert venait de terminer son discours. Je suis heureux qu'il ait mis l'accent sur les priorités. Il a parlé de quelques questions, et je tiens à dire que je suis sensible aux questions de santé mentale, aux questions liées au logement et ainsi de suite.
    Il est important d'adopter la motion d'aujourd'hui sur le projet de loi C‑62 pour que nous puissions passer à l'étape suivante. Peu importe notre position sur la question, nous devons aborder la question, que ce soit à cause de la décision de la Cour suprême du Canada ou de celle de la Cour d'appel du Québec.
    Je me demande si le député pourrait reprendre là où il en était avant l'interruption du débat et donner son opinion sur les raisons pour lesquelles il est important de s'en tenir aux faits autant que possible lorsque nous parlons du projet de loi à des gens à l'extérieur de la bulle d'Ottawa.
    Madame la Présidente, je suis tout à fait d’accord avec le député de Winnipeg-Nord pour dire qu’il est important d’être clair et que nous devons agir rapidement avant l’échéance du 17 mars. Je suis heureux de voir que le parti au pouvoir fait avancer ce dossier afin que nous puissions y arriver. Comme nous l'avons dit ce matin, c'est l'une des raisons pour lesquelles les verts ont appuyé la présentation d'une motion d'attribution de temps dans ce cas-ci. Cela montre qu'il existe des outils parlementaires permettant d'agir de toute urgence à l'égard des questions qui le justifient.
    Comme je l'ai dit dans mon discours, en matière de logement, les belles paroles ne suffisent pas. Nous avons besoin de financement et d'outils parlementaires afin d'agir plus rapidement. Il en va de même pour l'élimination de la pauvreté engendrée par les lois parmi les personnes handicapées.
    Madame la Présidente, ce qui me frappe dans ce débat, c’est qu’aucun défenseur de la légalisation ou de l'élargissement de l’euthanasie ne dit que tout le monde devrait pouvoir y avoir accès simplement par envie. Ces défenseurs disent plutôt que les personnes se trouvant dans certaines situations devraient pouvoir y avoir accès. Par exemple, ils estiment que si une personne en bonne santé va voir un médecin et lui dit: « J'ai besoin d'aide pour mettre fin à mes jours », on lui proposera une forme d'aide à la prévention du suicide. En revanche, si une personne handicapée dit: « Vu ma situation, je veux mettre fin à mes jours », on pourrait lui offrir de l'aide pour faciliter son suicide.
    On ne parle pas ici d'une politique générale de choix ou de liberté, mais plutôt du fait que certaines personnes qui présentent un désir apparent de mort sont traitées différemment des autres. Voilà qui pose un gros problème quant à la manière dont nous valorisons la vie des personnes handicapées. Je suis curieux d'entendre la réponse de mon collègue.
    Madame la Présidente, je suis préoccupé de voir qu'il a fallu attendre jusqu'à aujourd'hui pour aborder la question de la pauvreté que les lois engendrent parmi les personnes handicapées. Il est important que les députés réfléchissent à la manière dont ils occupent leur temps au quotidien. J'invite mes collègues à utiliser tous les outils législatifs dont ils disposent pour améliorer la vie des personnes handicapées et mettre fin au cadre juridique actuel qui les contraint trop souvent à la pauvreté.
     J'encourage notamment le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan à examiner les options qui s'offrent à lui pour inciter le gouvernement libéral à financer la Prestation canadienne pour les personnes handicapées. Il s'agit d'une mesure importante qui pourrait améliorer de façon concrète la vie des personnes handicapées, mais que le gouvernement n'a malheureusement pas encore mise en œuvre.

[Français]

    Madame la Présidente, j’ai du mal à comprendre les propos de mon collègue. Il sait très bien que les vulnérabilités structurelles comme la pauvreté ont effectivement une influence sur la santé globale.
    Est-il en train de nous dire qu’il va falloir régler cela avant de permettre que les gens qui souffrent de troubles mentaux puissent être soulagés de leurs souffrances irrémédiables? C’est un peu ce qui ressort de son discours présentement, alors que, dans les recommandations 5 et 6 du rapport des experts, on dit que, s’il y a le moindre doute sur les vulnérabilités structurelles, il n’est pas question de donner l’aide médicale à mourir.

[Traduction]

    Madame la Présidente, je tiens tout d'abord à m'excuser. Je vais répondre à mon collègue en anglais pour m'assurer de bien formuler ma pensée. À l'avenir, j'espère pouvoir m'exprimer en français.
    La réponse courte est oui. Je crois fermement que les députés devraient travailler encore plus assidûment à corriger les lacunes de notre filet de sécurité sociale. Au lieu de nous dépêcher à élargir l'accès à l'aide médicale à mourir, nous devrions commencer par renforcer notre filet de sécurité sociale.
(1840)
    Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue, la députée de Lethbridge.
    Au cours de ma carrière parlementaire, encore relativement courte à ce jour, j'ai dû aborder plus d'une dizaine de fois la question du meurtre légalement assisté par un médecin, un sujet sinistre. Lorsque j'ai été élu il y a huit ans, il n'existait aucune circonstance légale autorisant un médecin à tuer un patient, ou à participer au meurtre d'un patient. Auparavant, lorsque cet enjeu avait été présenté à la Chambre des communes, les mesures législatives visant à légaliser ce type d'homicide avaient été rejetées par une majorité de députés tant conservateurs que libéraux et néo-démocrates. C'était il y a tout juste huit ans.
    À l'époque où j'étais un jeune membre du personnel conservateur en 2009, je me souviens d'avoir entendu l'ancien député néo-démocrate Joe Comartin prononcer de sages paroles qui m'ont fait réfléchir. Le 2 octobre 2009, M. Comartin a déclaré à la Chambre ce qui suit:
     J'ai parlé à Carol Derbyshire, qui dirige le centre de soins palliatifs. Elle affirme que le centre n'obtient pas de demandes d'aide au suicide. Il fournit des soins aux patients et à leurs familles. Elle a été très claire à ce sujet. Elle a vu un grand nombre de sondages qui précisent que l'une des principales raisons, à part la douleur, pour laquelle les gens sont en faveur de l'aide au suicide est qu'ils ne veulent pas être un fardeau pour leur famille, la société et leur collectivité. Si nous pouvons créer un système qui permettrait d'éliminer ces inquiétudes, nous supprimerions le désir de ces personnes de mettre fin à leur vie de manière arbitraire et plus tôt que prévu.
     Nous devons examiner notre système maintenant [...] Actuellement, approximativement 20 p. 100 de notre population a accès à des soins palliatifs, à des centres de soins palliatifs et à un système de soins à domicile. C'est tout ce que nous avons dans ce pays. Puis, il y a un autre 15 p. 100 ou peut-être 17 p. 100 des personnes qui obtiennent une aide partielle à la fin de leur vie.
    Cet ancien député néo‑démocrate avait prévu que les demandes de mort prématurée n'émergeraient pas principalement d'un souhait fixe et profond de mourir, mais d'un contexte social, culturel et politique dans lequel les personnes qui souffrent sont soit invitées à rester, soit invitées à partir, et dans lequel les personnes se voient offrir le soutien nécessaire pour rester ou non. Nous sommes tous des êtres sociaux et l'exercice de notre autonomie s'inscrit dans un contexte social. Le contexte actuel se caractérise par une atomisation et une division croissantes, des échecs économiques entraînant d'immenses problèmes d'accessibilité financière et une sorte de chaos moral résultant de l'absence courante de cadres constructifs permettant de trouver un sens et un but à la vie.
    Les pierres angulaires que sont le sentiment d'appartenance, la recherche du bonheur et la quête de sens sont en train de s'éroder. Il en résulte une demande croissante en services publics qui, espérons‑le, combleront le vide laissé par le déclin de la communauté et de la famille, et qui favoriseront le sentiment d'appartenance, la recherche du bonheur et la quête de sens. Étant donné que ce soutien n'est jamais fourni par l'État d'une manière qui réponde réellement au souhait que nous avons tous d'appartenir à une communauté, la douleur croît et conduit de plus en plus de personnes à vouloir abandonner.
     C’est la trajectoire que suit la société récemment, sans oublier que les restrictions dues à la COVID et la polarisation ont accéléré la rupture des relations et du sens de la communauté chez bien des gens. Comme ils sont de plus en plus nombreux à vouloir baisser les bras, la légalisation de l'aide médicale à mourir est, en fin de compte, présentée comme une solution ultime. Au cours des huit dernières années, à mesure que de plus en plus de gens sont arrivés au bout du rouleau, le nombre de cas a continué d'augmenter de façon exponentielle. C’est le contexte social qui alimente la crise de santé mentale que l'on connaît et à laquelle on offre désormais l’euthanasie comme solution.
     Dans le discours du député Comartin que j'ai mentionné, il faisait également remarquer que, en raison du manque de formation adéquate et du peu d'importance accordée à la gestion efficace de la douleur, les outils et les technologies en place ne sont pas déployés pour soulager la douleur, même dans les nombreux cas où un tel soulagement était possible. Il avait prédit, encore une fois à juste titre, que la légalisation de l’euthanasie ferait en sorte que l'on porterait encore moins attention au soulagement de la douleur et que l'on verrait donc les règles du jeu changer en faveur du choix de la mort plutôt que celui de la vie. C'est exactement ce qui se passe.
     Dans les années 1990, Jean-Paul II a fait la déclaration suivante:
    [N]ous sommes face à une réalité [...] caractérisée par la prépondérance d'une culture contraire à la solidarité, qui se présente dans de nombreux cas comme une réelle « culture de mort ». Celle-ci est activement encouragée par de forts courants culturels, économiques et politiques, porteurs d'une certaine conception utilitariste de la société. En envisageant les choses de ce point de vue, on peut, d'une certaine manière, parler d'une guerre des puissants contre les faibles: la vie qui nécessiterait le plus d'accueil, d'amour et de soin est jugée inutile, ou considérée comme un poids insupportable, et elle est donc refusée de multiples façons. Par sa maladie, par son handicap ou, beaucoup plus simplement, par sa présence même, celui qui met en cause le bien-être ou les habitudes de vie de ceux qui sont plus favorisés tend à être considéré comme un ennemi dont il faut se défendre ou qu'il faut éliminer. Il se déchaîne ainsi une sorte de « conspiration contre la vie ». Elle ne concerne pas uniquement les personnes dans leurs rapports individuels, familiaux ou de groupe, mais elle va bien au-delà, jusqu'à ébranler et déformer, au niveau mondial, les relations entre les peuples et entre les États.
    Huit ans plus tard, nous voyons malheureusement cette culture de mort s'épanouir. On propose de tuer des enfants, même des bébés, et de tuer des personnes souffrant de dépression et d'autres problèmes de santé mentale. On a entendu de nombreux témoignages de personnes qui ont été qualifiées d'égoïstes parce qu'elles voulaient rester en vie alors qu'elles avaient besoin des soins et du soutien d'autrui.
(1845)
    On constate que la vie des personnes handicapées, de celles qui font face à l'itinérance ou à la douleur et à la souffrance, est dévalorisée dans les milieux sociaux, institutionnels et politiques. On voit se manifester cette guerre des puissants contre les faibles, où la prévention du suicide est possible pour certains, tandis que la facilitation du suicide est offerte à d’autres, selon le pouvoir et les privilèges établis.
    Les partisans de l'euthanasie n'ont jamais dit que toutes les personnes qui veulent mourir devraient pouvoir choisir de mourir. Ils ont plutôt dit que certaines personnes devraient être aidées à mourir et que d'autres devraient être aidées à vivre. Ce traitement différentiel des diverses personnes influe forcément sur le contexte social dans lequel les gens se sentent aimés, inclus et heureux, ou non.
    Huit ans plus tard, l’expérience canadienne de l’assassinat facilité par la médecine a échoué. Il conviendrait de se demander si elle aurait pu réussir, mais ce sera pour une autre fois. Certains diront qu’il aurait été possible de légaliser l’euthanasie sans déclencher le genre de culture de mort toujours plus vorace qu'on nous propose. Cependant, ce qui est clair, du moins en ce qui concerne notre expérience, c'est que l'assassinat facilité par la médecine a adopté une forme de logique d'autorenforcement qui conduit à une expansion constante, à une dévalorisation de la vie des personnes les plus vulnérables et à l'érosion de l'appui du public et de la collectivité à l'égard des éléments qui amélioreraient réellement la qualité de vie de ceux qui souffrent.
    L'un des effets de cette culture de la mort, c'est que les personnes en situation de vulnérabilité craignent les interactions avec le système médical parce qu'elles ne veulent pas subir de pressions qui les inciteraient à se suicider dans un moment de faiblesse ou de vulnérabilité. Même dernièrement, des personnes qui vivent avec une grande souffrance psychologique m'ont fait part de ce genre de préoccupations et m'ont dit ne pas vouloir demander de l'aide dans de nombreuses circonstances parce qu'elles veulent qu'on les aide d'une façon qui respecte leur vie et leur dignité, et parce qu'elles craignent que ce qu'on appelle des soins consiste à les pousser à quitter ce monde trop tôt.
    C'est notamment pour cette raison que les conservateurs défendent la liberté de conscience pour les médecins et les établissements de santé. Nous le faisons non seulement pour le fournisseur de soins, mais aussi pour le patient, qui devrait au moins avoir la liberté de choisir des soins fournis dans un milieu où on respecte sa vie et sa dignité, et où il peut avoir l'assurance qu'on n'exercera pas de pression sur lui ou qu'on ne lui offrira pas une mort prématurée. On peut comprendre que beaucoup de personnes en situation de vulnérabilité ne souhaitent même pas se voir offrir ce genre de choses, car donner de l'importance et un sens à la vie est un aspect essentiel de tout bon traitement offert aux personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale.
    Après huit ans, il est important de s'arrêter et de faire le point sur ce qui a changé, afin de se rappeler que les choix politiques ont des conséquences profondes et aussi qu'une fois faits, ils peuvent être défaits, du moins en partie. Cela me revient à l'esprit chaque fois que je parle du régime canadien d'euthanasie à un législateur étranger. Les législateurs d'autres pays démocratiques occidentaux, dont beaucoup sont de gauche, sont pour la plupart horrifiés par la réalité actuelle de l'euthanasie au Canada.
    Une législatrice britannique a dit ce qui suit à sa Chambre des communes:
[...] en se penchant sur l'exemple du Canada, de l'autre côté de l'Atlantique, l'organisme Living and Dying Well a également constaté que les cliniciens rapportent cinq problèmes précis liés à la légalisation, notamment le fait qu'elle complique la gestion des symptômes préexistants, qu'elle a un impact négatif sur l'importante relation médecin-patient, qu'elle crée des tensions pour les familles au cours de ce qui est souvent une période déjà très difficile, qu'elle détourne les ressources des services cruciaux de soins palliatifs et qu'elle crée une confusion chez les patients quant à la nature et à l'objectif des soins palliatifs. Considérés dans leur ensemble, ces problèmes signalés par les cliniciens praticiens du Canada ne sont pas quelque chose que nous, législateurs, pouvons ou devons négliger, et je pense que les effets mentionnés sur la prestation de soins palliatifs sont particulièrement préoccupants.
    Pourquoi les préoccupations au sujet de la nouvelle culture de la mort au Canada ne sont-elles pas aussi bien connues ou ne font-elles pas l'objet d'autant de discussions à la Chambre des communes du Canada ou dans la société canadienne qu’à la Chambre des communes britannique ou dans d’autres pays? Je tiens ici à pointer du doigt notre média financé par l'État, CBC/Radio-Canada.
    Je me réjouis tout particulièrement de l’engagement des conservateurs à cesser de financer CBC/Radio-Canada à cause de la façon éhontée dont cet organisme utilise son financement et sa position privilégiée pour promouvoir des histoires qui glorifient l’euthanasie, tout en passant sous silence la douleur et la souffrance des personnes dont CBC/Radio-Canada ne veut pas parler. Les bonnes idées ressortent gagnantes lors de débats équitables, et mes concitoyens ne devraient pas être forcés de donner plus de 1 milliard de dollars chaque année à un organisme qui cherche désespérément des histoires visant à masquer les sombres réalités des meurtres et des suicides facilités par la médecine.
    Les choses ne se passaient pas ainsi au Canada il y a huit ans, et heureusement, le Canada ne restera pas toujours ainsi. La fin de ce gouvernement fanatiquement favorable à l'euthanasie et à la mort est maintenant plus que raisonnablement prévisible. Un gouvernement conservateur se débarrasserait à jamais de cette proposition persistante de légalisation de l'aide médicale au suicide pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale. Nous transformerions la souffrance en espoir. Nous défendrions les plus vulnérables et nous travaillerions à rétablir les structures familiales et communautaires qui favorisent l'établissement de liens, le bonheur et le sens de la vie. Nous ne célébrerions pas la mort, mais la vie pour tous, et pas seulement pour les privilégiés.
    Je dis aux nations et aux peuples qu'il y a toujours de l'espoir. « La lumière est dans le cœur des hommes, mais s'épuise de brûler pour personne. Aimez-vous pour vaincre les ténèbres, tant qu'il y aura partout orgueil, ignorance et misère. »
(1850)
    Madame la Présidente, pour ma part, je crois en la Charte canadienne des droits et libertés. Quand la Cour suprême a rendu sa décision dans l'affaire Carter, soit qu'il fallait adopter une loi sur l'aide médicale à mourir au Canada, il y a eu beaucoup de consultations. Nous avons tous des points de vue personnels sur des questions complexes, moi y compris, mais je respecte la Charte canadienne des droits et libertés et les décisions des tribunaux, que ce soit de la Cour suprême du Canada ou de la Cour supérieure du Québec.
    Le député pourrait-il nous dire s'il appuie la Charte canadienne des droits et libertés et les décisions rendues par les tribunaux?
    Madame la Présidente, je crois avoir plus de respect pour la Charte que ce député du gouvernement. À titre d’exemple, dans la foulée de la décision relative à la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement a choisi d’interjeter appel. Dans le cas de la décision Truchon, rendue par une seule juge, il a choisi de ne pas interjeter appel. Je pense que cela est clairement dû au fait que le ministre idéologique de la Justice de l’époque cherchait désespérément à justifier l’élargissement d’un régime déjà imparfait. Par conséquent, le gouvernement a arbitrairement choisi de ne pas porter en appel certaines décisions quand elles lui conviennent et de le faire dans d’autres cas.
    Il ne s’agit pas de ce que les tribunaux ont statué. Le gouvernement fait constamment la promotion d’un programme idéologique qui va bien au-delà de ce que les tribunaux décident, et la disposition sur la santé mentale n’a absolument rien à voir avec la décision de la cour.
    Les députés d’en face aimeraient parfois se passer d’un véritable débat de fond sur le sujet et se contenter de dire qu’ils vont laisser d’autres personnes prendre la décision. Cependant, cela ne tient pas la route, surtout dans le cas où ils choisissent de ne pas interjeter appel.

[Français]

    Madame la Présidente, je vais essayer de rester poli parce que le discours de mon collègue était assez caricatural, à mon avis. Ce n’est pas étonnant, parce que j’ai déjà entendu son chef dire que des gens demandaient l’aide médicale à mourir parce qu’ils n’avaient pas à manger. Quand le chef fait preuve d’une pareille désinvolture, on peut comprendre qu’un député présente l’aide médicale à mourir comme un complot contre la vie, comme une culture de la mort, comme une guerre des plus puissants contre les plus faibles.
    Je reprends ce que mon collègue disait. J’ai l’impression que, si on avait continué un peu, il allait nous dire que la contraception était aussi un de ces complots contre la vie. Je veux juste être clair avec mon collègue. Il a commencé son discours en nous disant que les gens demandaient peut-être l’aide médicale à mourir parce qu’ils avaient peur d’être un fardeau. Je veux simplement lui indiquer, pour être passé par là avec des membres de ma famille, que c’est parce que les gens ont peur de souffrir.
    Face à la souffrance, quand on aime une personne et qu’on sait que la fin est proche, on essaie de faire tout pour la rendre confortable. J’ai l’impression qu’il n’est pas en mesure de comprendre cela.

[Traduction]

    Madame la Présidente, avec tout le respect que je dois à mon collègue, j'ai accompagné des membres de ma famille immédiate qui ont beaucoup souffert au moment de leur décès. Selon moi, un des plus grands défis auxquels nous faisons face au pays — et les députés néo-démocrates l'ont souligné au cours des législatures précédentes —, c'est le manque important de formation adéquate en matière de gestion de la douleur et le manque d'accès à des soins palliatifs, ainsi que la présence d'un système qui pousse activement des gens vers la mort.
    Je ne crains pas que l'aide médicale à mourir soit offerte à tout le monde. L'euthanasie n'est pas offerte à tout le monde. Elle est offerte à certaines personnes dans certaines situations, ce qui reflète une vision sociale et politique de la valeur de leur vie. C'est ce que la communauté des personnes handicapées a exhorté le Parlement à entendre. Lorsque nous offrons des services de facilitation du suicide aux personnes handicapées et des services de prévention du suicide aux personnes non handicapées, cela envoie clairement le mauvais message quant à la valeur universelle et à la dignité de toute vie humaine.
    Madame la Présidente, mon collègue a un problème de mémoire. Il ne cesse de parler de huit ans, mais l'essence du projet de loi date d'il y a trois ans.
    Si le député tient à parler d'une personne souffrant d'un cancer de stade 4 qui ne prend que des analgésiques, je vais le laisser se défendre seul. Toutefois, en ce qui concerne le projet de loi C‑62, la date butoir est le 17 mars. Ce matin, les conservateurs ont voté contre la gestion du temps prévu pour ce projet de loi. Il doit toutefois comprendre qu'il ne nous reste que deux semaines de séance pour envoyer ce projet de loi sur le bureau de la gouverneure générale.
    Pourquoi les conservateurs ont-ils voté contre cette mesure alors qu'il s'agit d'un échéancier fixe et que la loi va changer si nous n'adoptons pas ce projet de loi?
(1855)
    Madame la Présidente, en ce qui concerne le calendrier législatif, le gouvernement a raté une occasion de résoudre ce problème lorsqu'il a voté contre le projet de loi d'initiative parlementaire de mon collègue, le député d'Abbotsford. À l'automne, les conservateurs avaient présenté un projet de loi visant à régler ce problème et à jeter aux oubliettes cette horrible notion d'euthanasie pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale.
    Dans le cas présent, nous souhaitons l'adoption de ce projet de loi visant à prolonger la date limite, car lorsque le gouvernement sera conservateur, nous pourrons régler ce problème de manière permanente. Le gouvernement actuel doit toutefois accorder plus de journées pour débattre de la question. Je lui suggère de le faire afin que plus de députés puissent se prononcer et adopter le projet de loi avant la date butoir.
    Madame la Présidente, le nombre de personnes au pays qui mettent fin à leurs jours en recourant à l'aide médicale à mourir augmente plus vite que partout ailleurs dans le monde. Le dernier rapport annuel du Canada sur l'aide médicale à mourir montre que les décès résultant de cette pratique ont augmenté de 30 % par rapport à l'année dernière. Il ne s'agit pas d'une circonstance exceptionnelle ou d'un événement ponctuel. Il s'agit plutôt d'une tendance. D'une année à l'autre, on observe une augmentation rapide.
    La question qui nous occupe aujourd'hui est, au sens le plus littéral du terme, une question de vie ou de mort. Le monde entier a les yeux rivés sur le Canada et sur le débat qui se déroule à la Chambre. Les gens sont tout à fait convaincus que les propositions du gouvernement actuel sont irresponsables. Il est question d'élargir l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes d'une maladie mentale. Ce sujet mérite toute notre attention ici aujourd'hui et, je l'espère, ailleurs.
    Au printemps dernier, les libéraux ont rédigé une mesure législative qui accorderait l’aide médicale à mourir aux personnes aux prises avec une maladie mentale, et ce, à partir du 17 mars, soit dans quelques semaines à peine. Grâce aux experts du milieu médical, aux personnes aux prises avec une maladie mentale et aux Canadiens inquiets des quatre coins du pays qui, ainsi que des députés conservateurs, ont crié haro sur cette éventualité, le gouvernement a été contraint de marquer un temps d’arrêt. Ce n’est pas permanent; l’arrêt n’est que temporaire, il ne durera que dure trois ans. Le projet de loi reviendra ensuite à la Chambre, puisque le gouvernement actuel souhaite offrir l’aide médicale à mourir aux personnes aux prises avec une maladie mentale.
    Pour ce qui est d'établir si un trouble mental est irrémédiable, le Parlement a entendu des cliniciens selon lesquels les troubles mentaux sont seulement prévisibles dans 50 % des cas. Autrement dit, dans 50 % des cas, les cliniciens sont en mesure de dire que la personne ne se remettra pas de sa maladie mentale. Dans 50 % des cas, ils se trompent. La situation est différente de celle d'une personne qui, par exemple, a une tumeur cérébrale que l'on peut voir grâce à une IRM et où il y a des preuves que l'on peut évaluer et des circonstances physiques que l'on peut cerner. La maladie mentale ne fonctionne pas de cette manière. Bien que les médecins aient raison la moitié du temps, cela signifie aussi que leur pronostic est erroné la moitié du temps. Pour être bien franche, il semble plutôt attristant et déplorable de prendre une décision de vie ou de mort en tirant à pile ou face. C'est bien de cela qu'il s'agit: un tirage à pile ou face, où la pièce de monnaie tombe du côté pile dans 50 % des cas et du côté face dans 50 % des cas. C'est ainsi que cette décision sera prise si nous accordons l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes d'une maladie mentale. C'est totalement inacceptable. Le fait que le Parlement envisage même de le faire est profondément troublant.
    Bien sûr, nous savons que cela n'a rien à voir avec la qualité du travail de nos médecins et de nos psychiatres. Cela a tout à voir avec le fait que les maladies mentales sont incroyablement complexes et difficiles à comprendre.
    Dans le cadre de ce débat, il est important de tenir compte de ce que disent les experts médicaux. Nous avons entendu le témoignage de représentantes du groupe Physicians Together with Vulnerable Canadians, qui ont déclaré: « Étant donné qu’il n’existe aucune preuve médicale permettant de prédire de manière fiable quels patients atteints d’une maladie mentale n’iront pas mieux, l’aide médicale à mourir pour les maladies mentales mettra fin à la vie de patients qui se seraient rétablis. »
    Le Centre de prévention du suicide a fait écho à cela en déclarant qu'il n'y avait pas de consensus sur la signification du caractère irrémédiable de tout trouble mental. Le Dr Gaind, chef du Département de psychiatrie de l'Hôpital Sunnybrook, a sonné l'alarme lorsqu'il a dit que « le caractère irrémédiable ne peut pas être prédit dans le cas des maladies mentales. »
    Le Dr Zivot a abondé dans le même sens en affirmant que les maladies mentales ne sont pas définies de façon stricte et qu'elles ne peuvent donc jamais être graves et irrémédiables. Il a ajouté que si l'aide médicale à mourir devient une option de traitement dans le cadre des soins de santé mentale, le lien de confiance et l'engagement entre le médecin et le patient seront détruits.
    Les personnes qui vivent avec une maladie mentale ont besoin d'espoir, pas de la mort. Elles ont besoin que nous croyions en elles quand elles sont incapables de croire en elles-mêmes.
(1900)
    Il nous incombe, en tant que société, d'offrir de l'espoir, du soutien et des traitements, pas la mort. Lorsque nous envisageons d'élargir l'aide médicale à mourir aux personnes qui souffrent de maladie mentale, cela rend de nombreux Canadiens extrêmement vulnérables. Lorsqu'on offre la mort à des personnes en difficulté, nous leur envoyons le message qu'il n'y a vraiment aucun espoir et aucune possibilité de guérison; nous leur disons que la meilleure façon de soulager leur douleur serait de quitter ce monde. Un tel manque de compassion est profondément troublant.
    Laurel Walker a révélé publiquement ses problèmes de santé mentale. Elle parle de ses moments les plus sombres et du fait qu'elle a des idées suicidaires tous les jours. Elle parle aussi du fait qu'une lueur d'espoir l'a en quelque sorte gardée en vie. Elle a averti le Parlement que, si nous décidions de légaliser l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes d'une maladie mentale, nous leur enlèverions cet espoir et nous enverrions le terrible message que la mort est vraiment leur seule option.
    Le Dr Sareen a émis le même avertissement en disant que rendre l'aide médicale à mourir accessible aux personnes atteintes de troubles mentaux minerait les efforts de prévention du suicide et entraînerait des décès inutiles. Il a affirmé ceci:
     Quand une société offre l'AMM, la population croit que c'est un moyen de mettre fin à la souffrance. Dans d'autres pays où l'AMM est possible pour les troubles mentaux, il y a non seulement des décès attribuables à cette procédure, mais il y a aussi des décès attribuables à des suicides non liés à l'AMM.
    Autrement dit, on constate une augmentation du taux de décès attribuables à l'aide médicale à mourir, mais aussi de ceux attribuables au suicide en général. L'espoir disparaît et la société envoie un message indiquant qu'il n'y a pas d'avenir.
    En tant que Canadiens, nous pouvons faire mieux. J'irais même jusqu'à dire que nous devons faire mieux. Nous ne pouvons pas laisser tomber des gens comme Laurel, qui se battent pour survivre. Ces personnes ont désespérément besoin d'aide et d'espoir. Elles veulent des traitements, pas la mort.
    Ceux qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale ont le droit à ce soutien. Au lieu de chercher des moyens de faciliter la mort de nos compatriotes qui souffrent, nous devons chercher des façons de mieux offrir les traitements dont ils ont besoin. Dans un article, on cite John Maher, un psychiatre, qui dit que « la maladie mentale peut être traitée, mais la mort n'est pas un traitement ».
    Nous savons que la maladie mentale n'est que rarement le seul problème. Elle s'inscrit souvent dans un contexte plus large de problèmes sociaux, qu'il s'agisse de l'absence de choses essentielles comme le logement, ou de l'absence de soutien social. Nous avons donc la responsabilité, en tant que société, de veiller à ce que ces personnes aient accès à ces choses essentielles. La mort n'est pas la solution.
    À mes collègues ici présents, je voudrais adresser le plaidoyer suivant: ne nous contentons pas d'appuyer sur le bouton « pause », comme pour envoyer le message aux personnes atteintes de maladie mentale que si leur vie vaut quelque chose aujourd'hui, elle ne vaudra peut-être plus rien dans quelques années. C'est comme si on leur disait que tirer à pile ou face n'est sans doute pas acceptable aujourd'hui, mais que cela pourrait le devenir dans trois ans. Au contraire, engageons-nous à valoriser en permanence les personnes qui vivent avec une maladie mentale, et assurons-nous qu'elles pourront toujours avoir accès aux soins de santé adéquats dont elles ont besoin. La mort, ce n'est pas cela.
    Christie Pollock a témoigné pour appeler à la plus grande prudence. Il s'agit d'une jeune femme de 30 ans qui a vécu son propre combat. Elle parle de l'espoir qu'elle peut maintenant offrir au groupe de soutien qu'elle dirige. Elle évoque ensuite le fait que, si l'aide médicale à mourir lui avait été proposée, elle ne serait peut-être plus là. Elle poursuit en disant que, bien entendu, elle a toujours des problèmes et qu'elle n'est pas guérie, mais qu'elle a trouvé une combinaison de thérapie et de médicaments qui lui permet de s'en tirer. Ses journées sont remplies d'espoir. Il ne s'agit pas seulement d'espoir pour elle-même; elle est aussi capable d'offrir de l'espoir aux autres.
    Madame la Présidente, voilà ce que je propose aux députés. Notre objectif devrait être de trouver le moyen d'offrir aux Canadiens de l'espoir, et non la mort.
(1905)
    Madame la Présidente, je suis d'accord avec la députée sur beaucoup d'éléments de son discours.
    En tant que médecin de longue date, je sais qu'il faut être prudent, et je pense que le gouvernement l'a été. Nous avons d'abord accordé une pause d'un an, et nous proposons maintenant une pause de trois ans. Je déteste jouer les politiciens dans cette assemblée politique, mais la réalité est que l'une des raisons qui devraient nous faire hésiter à mettre en œuvre l'aide médicale à mourir dans les cas de maladie mentale, c'est le manque de services en matière de santé mentale. Le gouvernement se bat pour faire augmenter l'offre de services dans ce domaine.
    Le Parti conservateur s'engagera-t-il lui aussi à fournir aux Canadiens des services adéquats en matière de santé mentale?
     Madame la Présidente, je demanderais au député de nous indiquer les mesures de soutien que son gouvernement a offertes aux personnes atteintes de maladie mentale. Ce que nous avons entendu ici, au Parlement, de la part de nombreux témoins, c'est que les mesures de soutien ne sont pas adéquates. Les gens ont désespérément besoin de plus d'aide.
     De ce côté-ci de la Chambre — je pense à mon collègue dont je n'ai pas le droit de dire le nom et aux efforts considérables qu'il a déployés pour réclamer du soutien pour les personnes qui vivent avec une maladie mentale et mettre en place une ligne à trois chiffres pour la prévention du suicide —, nous savons très bien que les appels sont majoritairement en lien avec une maladie mentale.
    Non seulement nous ferons des efforts extraordinaires lorsque nous formerons le gouvernement, mais en fait, nous n'attendons pas. Nous apportons déjà des changements concrets pour les Canadiens.

[Français]

    Madame la Présidente, je profite de l'occasion pour vous remercier d'avoir jugé l'amendement recevable.
    Dans son libellé, le Bloc québécois souhaite reconnaître l'avant-garde du Québec, qui est promu par une motion unanime de l'Assemblée nationale adoptée récemment. Avec son amendement, le Bloc québécois veut pouvoir accélérer les choses au Québec.
    Est-ce que ma collègue a une sensibilité envers la volonté du Québec, qui a des valeurs somme toute différentes de celles qui sont défendues par les conservateurs?
    Conséquemment, si le Parti conservateur prend le pouvoir d'ici trois ans, ce qui, selon les sondages, n'est pas impossible, est-ce qu'ils comptent, au bout de ces trois ans, abolir le projet de loi?

[Traduction]

    Madame la Présidente, en tant que conservateurs, nous voulons nous ranger du côté des Canadiens vulnérables et être leur plus grand défenseur. Nous voulons écouter les exhortations des personnes qui ont comparu devant la Chambre. C'est notre travail. Nous avons été élus pour représenter nos concitoyens au mieux de nos capacités; par conséquent, lorsque le temps est venu d'entendre des témoignages sur la possibilité d'étendre l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes d'une maladie mentale, nous avons focalisé notre attention sur les témoins, nous les avons écoutés et nous avons travaillé d'arrache-pied.
    De plus, nous avons quitté ces murs et avons écouté les Canadiens que nous avons rencontrés dans nos bureaux de circonscription et dans les assemblées générales. Notre chef a également effectué une tournée pancanadienne, où il a focalisé son attention sur les préoccupations des Canadiens et les a écouté en parler, et il en est ressorti que les Canadiens ne veulent pas de cette mesure. Ils ne veulent pas que l'aide médicale à mourir soit étendue aux personnes atteintes d'une maladie mentale. Ils souhaitent plutôt que de meilleures mesures de soutien soient offertes aux personnes en difficulté. Ils veulent qu'un meilleur système médical soit mis en place. Ils veulent que de meilleures dispositions soient prises en matière de soins de santé. Ils veulent que la société dans son ensemble offre davantage de soutien.
(1910)
    Uqaqtittiji, j'apprécie beaucoup la détermination affichée par ma collègue lors de son intervention.
    Je me demande si la députée pourrait nous dire ce qu'elle pense qu'il adviendra si nous ne respectons pas la date butoir très importante du 17 mars. Pourra-t-on conserver les mesures de protection qui lui sont chères? Qu'arrivera-t-il si nous dépassons cette date butoir sans être en mesure d'apporter les amendements dont il est question aujourd'hui?
    Madame la Présidente, je ne peux m'empêcher de souligner une évidence. Elle est députée du NPD, qui forme actuellement une coalition avec le gouvernement libéral. C'est donc en partie à cause d'elle que nous sommes ici, à la Chambre, en train d'avoir cette discussion à la dernière minute.
    Je l'encouragerais à inciter son parti à agir différemment, au nom des Canadiens. Cela dit, elle va devoir entamer une discussion avec son gouvernement de coalition pour lui demander ce qui va se passer le 17 mars.
    Madame la Présidente, je tiens tout d'abord à dire que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue de Calgary Rocky Ridge.
    C'est une question grave. Au cours de ce débat, j'ai écouté attentivement tous nos collègues. Cela me ramène en 2016, l'année où nous débattions de cette question à titre de nouveaux députés. À l'époque, j'avais dit qu'il s'agissait peut-être de l'une des mesures législatives les plus importantes dont notre génération débattrait et discuterait. J'avais aussi affirmé que rien ne prépare quelqu'un, en tant que nouveau député, à débattre d'une telle mesure législative et à se prononcer sur elle.
    J'ai consulté un grand nombre de mes concitoyens, ainsi que certains de mes amis qui partagent ma foi. J'ai également consulté mon pasteur. J'étais tiraillé quant à la façon dont j'allais voter. J'avais exprimé mon inquiétude quant au fait que nous débattions d'un projet de loi aussi crucial à la toute dernière minute, et nous nous retrouvons maintenant dans la même situation: en train de débattre à la dernière minute d'un projet de loi qui porte littéralement sur la vie ou la mort.
    Je tiens à mettre quelque chose au clair. Depuis que la loi sur l'aide médicale à mourir est entrée en vigueur, j'ai rencontré des familles dont un proche a choisi d'y recourir. Tout récemment, un proche de ma famille a choisi l'aide médicale à mourir, et nous composons actuellement avec toutes les émotions qui accompagnent cette décision. Les derniers mois ont été difficiles pour ma famille, mais je crois que je comprends maintenant mieux la complexité de cette question. Je comprends les arguments des deux camps mieux que je ne les comprenais en 2016.
    Néanmoins, je crois fermement qu'étendre l'aide médicale à mourir aux personnes atteintes de maladie mentale revient à abandonner des gens qui pourraient être sauvés. Depuis que j'ai été élu, il y a huit ans et demi, je me bats pour ceux qui n'ont pas de voix, pour sensibiliser les gens à la santé mentale, pour faire adopter des projets de loi sur l'état de stress post-traumatique et pour que le Canada mette en place une simple ligne téléphonique à trois chiffres pour la prévention du suicide, le 988. Je dois me demander pourquoi je l'ai fait.
    Pourquoi me suis-je battu avec autant d'acharnement si nous allons nous contenter d'adopter un projet de loi pour permettre à une personne souffrant d'un trouble mental ou d'une maladie mentale de choisir l'aide médicale à mourir ou le suicide? Je suis profondément troublé de voir jusqu'où nous sommes descendus, à savoir que nous pouvons perpétuer la dépendance d'une personne, mais que nous ne pouvons pas l'amener à se rétablir. Nous sommes tombés si bas que nous ne voyons aucun mal à ce qu'une personne soit en difficulté, puisque nous lui offrirons une aide à mourir si elle est atteinte d'une maladie mentale. Nous laissons tomber les gens.
    Je suis déçu de voir que nous, parlementaires, choisissons la solution facile. L'élargissement de l'aide médicale à mourir pour inclure les cas où le seul problème médical invoqué est un trouble mental se soldera par la mort de Canadiens qui auraient pu éventuellement aller mieux. Douze Canadiens se suicident chaque jour. Deux cents autres font une tentative de suicide. Chaque année, 73 000 Canadiens tentent de se suicider, et ces chiffres ne reflètent que les cas connus.
(1915)
    Que cherchons-nous à dire? Mes collègues ont parlé avec beaucoup d'émotion des statistiques et des observations des experts sur la maladie mentale et son caractère irrémédiable. C'est comme tirer à pile ou face pour savoir si quelqu'un peut s'en remettre ou non.
    En me préparant pour ce débat, je me suis souvenu d'un jeune homme qui, il y a longtemps, en avait assez du milieu violent et dysfonctionnel dans lequel il avait grandi. Il avait perdu un frère dans un horrible accident de voiture. Il voulait mourir et il a tenté de se suicider, mais un proche l'a retrouvé et lui a sauvé la vie. Ce même jeune homme a fait une nouvelle tentative, mais, sans la sensation d'amertume que lui procurait le métal de l'arme qu'il avait choisi d'utiliser, j'ose à peine imaginer ce qui aurait pu se produire.
    Je pense à ce qui serait arrivé si ce jeune homme, il y a de nombreuses années, avait réussi à se suicider. Ce jeune homme n'aurait pas épousé sa petite amie du secondaire, il n'aurait pas eu quatre enfants formidables et une magnifique petite-fille, et il n'aurait pas pu faire autant de voyages dans le monde pour voir et vivre des choses que certains ne pourront connaître que grâce aux merveilles d'Internet. Je pense à ce jeune homme qui a pris le risque de se présenter aux élections de 2014. Je pense à ce jeune homme qui a été élu en 2015 pour représenter sa circonscription, Cariboo—Prince George, et à toutes les occasions qu'il aurait pu manquer.
    Je pense à cela chaque fois que nous parlons du suicide et que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour faire passer le message que nous devrions toujours choisir la vie, que l'espoir est toujours possible. Peu importe ce qu'une personne traverse, même lorsque la vie peut sembler si sombre, la lumière est à portée de main. Je suis ce jeune homme et je raconte cette histoire pour la première fois. J'y pense tout le temps lorsque nous faisons notre travail à la Chambre, lorsque nous nous battons pour ceux qui n'ont pas de voix. Si quelqu'un ne m'avait pas dit que la vie valait la peine d'être vécue et ne m'avait pas demandé de le laisser m'aider à ce moment-là, j'aurais raté tellement de choses.
    J’apprécie le débat que nous avons eu à la Chambre, mais je dis qu’aujourd’hui, nous devrions nous battre chaque minute pour ceux qui vivent une situation difficile, afin de leur dire qu’il est toujours possible d’espérer et que la vie vaut la peine d’être vécue. Je continuerai à me battre pour cela tant et aussi longtemps que je serai élu.
(1920)
    Madame la Présidente, le député est un collègue avec qui j'ai toujours aimé travailler. Je me souviens qu'un des premiers dossiers sur lequel j'ai été appelé à travailler en tant que secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé, en 2017, était son projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C‑211 sur l'état de stress post-traumatique. Par conséquent, je sais que ce dossier a beaucoup d'importance à ses yeux et je le remercie de son discours.
    J'ai voté comme notre collègue d'en face afin d'abandonner totalement l'idée d'offrir l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul trouble de santé invoqué est une maladie mentale. Mes discussions avec des psychiatres de partout au pays m'ont convaincu que nous ne sommes pas prêts et que cette voie n'est pas souhaitable pour diverses raisons. Par exemple, il est difficile d'affirmer avec certitude qu'une maladie mentale est irrémédiable. Un autre point qui m'a touché, toutefois, c'est le fait que si une personne souhaitait avoir accès à l'aide médicale à mourir, il faudrait en théorie épuiser toutes les options de traitement possibles. Comme on le sait, au Canada, selon la région où l'on vit, il est parfois difficile d'avoir accès à certaines options de traitement. J'aimerais que le député nous donne son avis à ce sujet.
    Madame la Présidente, le député a tout à fait raison. La maladie mentale n’est pas sur un pied d’égalité avec la maladie physique. Prenons l’exemple d’un bras cassé, c’est une blessure visible et le patient reçoit toute l’aide nécessaire. Par contre, dans le cas d’une maladie mentale ou de problèmes de santé mentale, c’est une maladie ou une blessure invisible, et les efforts sont insuffisants dans notre pays pour soutenir les personnes affectées. C’est pourquoi j’ai dit que nous abandonnons les Canadiens quand nous optons pour la solution de facilité. Nous devons consacrer plus de ressources à aider les gens qui en ont besoin, au moment où ils en ont besoin, à l’endroit où ils en ont besoin, et aussi longtemps qu’ils en ont besoin.

[Français]

    Madame la Présidente, j'éprouve beaucoup de compassion pour mon collègue et je le remercie de la générosité dont il a fait preuve en partageant son expérience de vie. Il dit parler pour ceux qui n'ont pas de voix alors qu'il est la preuve vivante aujourd'hui que l'état suicidaire est réversible.
    Peut-il aller plus loin dans sa réflexion et concevoir qu'il y a des gens qui sont sans voix, pour qui la psychiatrie n'a jamais réussi à altérer leurs souffrances et qui sont atteints de troubles mentaux? Quelles solutions a-t-il pour eux après 30 ans de traitement?

[Traduction]

    Madame la Présidente, j'ai rencontré beaucoup de personnes qui ont été aux prises avec des problèmes de santé mentale toute leur vie. La plus grande difficulté pour beaucoup d'entre elles, c'est qu'elles n'ont pas un accès adéquat à de l'aide et qu'elles sont constamment en attente. À mon avis, nous devons d'abord faire tout notre possible pour éliminer les obstacles empêchant les personnes qui se sentent impuissantes d'obtenir les soins nécessaires et de reprendre espoir lorsqu'elles broient du noir. Je pense qu'il vaut toujours la peine de se battre pour rester en vie. Lorsqu'une personne est en difficulté, je lui dirai toujours qu'il vaut la peine de se battre pour rester en vie. Nous ne devons ménager aucun effort pour aider ces personnes.
(1925)
    Madame la Présidente, je tiens à remercier mon collègue de Cariboo—Prince George de l’excellent travail qu’il a réalisé pour la création de la ligne 988, qui est enfin pleinement opérationnelle et qui est très utilisée. Je le remercie de toujours défendre avec conviction les intérêts des gens, et pas seulement ceux de sa circonscription, et de toujours faire ce qui est juste. Je peux dire que je dormirai mieux ce soir en sachant qu’il y a quelqu’un qui ne me laissera jamais tomber. J'en suis sincèrement reconnaissant à mon collègue et je tiens à le remercier de s’être joint à moi. Nous ne laisserons jamais tomber les personnes qui ont envie d’abandonner.
    Madame la Présidente, c'est ma devise: ne jamais abandonner. Dans nos jours et nos moments les plus sombres, il est facile de trouver une solution définitive à un problème passager, et cette solution, c'est le suicide. Je crois dur comme fer que la vie vaut la peine qu'on se batte pour elle. Il faut juste réussir à avoir des moments de lucidité, ce qui peut être difficile. Parfois, il n'est pas facile de voir la lumière au bout du tunnel, mais elle est là. J'en suis la preuve vivante.
    Madame la Présidente, il n'est pas facile de prendre la parole après le discours incroyable que nous venons d'entendre de la part du député de Cariboo—Prince George, mais je vais essayer.
    Je suis évidemment ici ce soir pour parler du projet de loi C‑62 et de la catastrophe que le Parlement a lui-même causée en adoptant l'élargissement radical de l'aide médicale à mourir légale pour inclure les personnes dont le seul problème de santé invoqué est une maladie mentale.
    Je rappelle aux députés et aux gens de ma circonscription que j'ai appuyé et que j'appuie toujours les principes du projet de loi de 2016, qui était une réponse nécessaire à une décision de 2015 de la Cour suprême, qui invalidait l'interdiction touchant l'aide médicale à mourir. Ce projet de loi n'était pas parfait, mais il constituait une réponse raisonnable à la décision de la Cour suprême, et il était certainement préférable au chaos total qui aurait régné s'il n'y avait pas eu de loi du tout.
    Je crois que les gens qui vivent des souffrances intolérables en raison d'une maladie incurable sans espoir de guérison ou d'amélioration de leur condition et qui se dirigent inexorablement vers une mort certaine devraient pouvoir accéder à l'aide médicale à mourir dans la mesure où ils n'y sont pas forcés, où ils se font proposer des soins palliatifs appropriés, où ils ne se font pas offrir l'aide médicale à mourir à la place de traitements et, surtout, où le patient est un adulte mentalement capable.
    L'un des critères énoncés dans la loi originale de 2016 était la mort raisonnablement prévisible du demandeur. Cette disposition posait problème dès le départ. Elle a été contestée devant les tribunaux, puis invalidée par la Cour supérieure du Québec. L'affaire Truchon a amené les libéraux à prendre une décision. Depuis lors, le gouvernement n'a pris que de mauvaises décisions.
    La première chose que les libéraux auraient pu faire, mais qu'ils n'ont pas faite, c'est de défendre la loi actuelle en faisant appel de la décision Truchon devant la Cour suprême. S'ils croyaient que leur loi de 2016 était conforme à la Charte, comme ils l'ont prétendu lors du débat de 2016, ils auraient dû intervenir pour la défendre. Leur première erreur a été de ne pas le faire.
    La deuxième erreur, c'est que le ministre de la Justice de l'époque était si pressé d'élargir la portée de la loi que les libéraux ont profité de l'affaire Truchon pour élargir l'accès à l'aide médicale à mourir en présentant le projet de loi C‑7 à l'automne 2020. C'est la deuxième erreur qu'ils ont faite.
    Comme je l'ai déjà dit, je suis favorable à l'aide médicale à mourir pour les adultes compétents qui sont gravement et irrémédiablement malades et qui souffrent cruellement de douleurs et d'angoisse intolérables aux derniers stades d'une maladie en phase terminale. J'ai toujours dit que j'appuierai l'accès légal à l'aide médicale à mourir si les conditions importantes suivantes étaient respectées: l'accès à des soins palliatifs de qualité à titre d'option; des mesures de sauvegarde solides pour les personnes vulnérables, en particulier les mineurs, les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladie mentale; la liberté de conscience des praticiens qui s'opposent à l'aide médicale à mourir; et la décision d'étendre l'admissibilité à l'aide médicale à mourir doit être mûrement réfléchie et soigneusement étudiée, sans être précipitée.
    Pour ces raisons, j'ai voté en faveur du renvoi du projet de loi C‑7 au comité, mais j'ai voté contre le projet de loi à l'étape de la troisième lecture parce qu'il ne remplissait pas au moins deux, voire trois, des quatre conditions requises pour que je l'appuie. J'ai conclu que l'accès aux soins palliatifs n'était pas suffisant au Canada. J'ai également été alarmée par les lacunes présentes dans ce qui devrait être les mesures de protection des Canadiens vulnérables, comme ma propre famille l'a vécu. J'étais d'avis, même avant l'amendement du Sénat, que le projet de loi C‑7 était boiteux et ne méritait pas d'être appuyé.
    Puis, la Chambre a pris une terrible décision en adoptant l'amendement présenté par le Sénat. Tous mes collègues conservateurs s'y sont opposés à juste titre, car ils savaient alors que les professionnels de la santé sont incapables de déterminer le caractère irrémédiable de la maladie mentale d'une personne alors qu'il s'agit littéralement d'une question de vie ou de mort. Les conservateurs se sont opposés à cet amendement, mais il a néanmoins été adopté et cette prolongation, qui n'était pas nécessaire pour se conformer à la moindre décision d'un tribunal, est entrée en vigueur l'an dernier. Le gouvernement devait présenter une mesure législative d'urgence l'an dernier afin de laisser au système médical plus de temps pour se préparer à cet énorme changement. Voilà une autre erreur qu'il a commise.
(1930)
    Les libéraux auraient pu profiter de l’occasion pour régler cette question une fois pour toutes en supprimant simplement cette partie de ce qui était alors le projet de loi C‑7. Cependant, ils ne l’ont pas fait et nous voici, une autre année plus tard, et le pays n’est pas plus prêt pour cet élargissement qu’il ne l’était à la même époque l’an dernier. Nous voici encore une fois pris de panique à la dernière minute pour remettre cette question à plus tard, après les prochaines élections; voilà pour la deuxième erreur.
    Les libéraux auraient pu déposer un projet de loi pour retirer cette partie du projet de loi adopté en 2021, mais ils ont choisi de ne pas le faire, se réfugiant derrière le fait que le prochain gouvernement devra s’en occuper. Cependant, la bonne nouvelle, c’est qu’un gouvernement conservateur — qui sera sûrement formé après les prochaines élections — n’élargira pas de façon irresponsable l’admissibilité à l’aide médicale à mourir aux Canadiens vulnérables dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale.
    L’aide médicale à mourir a été prévue pour les personnes qui ne peuvent pas guérir, qui n’ont aucune raison de se rétablir parce qu’elles sont dans un état irréversible et terminal. L’aide médicale à mourir s’adresse aux personnes capables de prendre une décision rationnelle, et non à celles qui seraient portées à y recourir en raison de pensées suicidaires.
     Le fait qu'il soit impossible de créer un régime qui pourrait établir quelle aide médicale à mourir est appropriée pour les personnes qui sont atteintes d'une maladie mentale, mais qui sont autrement en bonne santé et non pas en phase terminale, m’a semblé logique, mais je ne suis évidemment pas un professionnel de la santé. Cependant, je peux également souligner le message clair envoyé par le comité mixte qui a étudié la question. Sa recommandation au Parlement était très simple: ne le faites pas. C'est la plus courte liste de recommandations que j'ai jamais lue dans un rapport parlementaire. On disait simplement: ne le faites pas. C'était une recommandation fondée sur des mois et des mois de témoignages d'experts.
     Je recommande au gouvernement d'écouter le comité et de rayer cette disposition du projet de loi qui a été adopté. Il y a exactement un an, les libéraux auraient pu le faire, mais ils ont attendu jusqu'à cette année, et rien n'a changé. Nous nous retrouvons dans une situation où 80 % des membres de l’Association des Psychiatres de l'Ontario ne croient pas que le Canada est en mesure d'instaurer l’aide médicale à mourir en toute sécurité pour les personnes atteintes d'une maladie mentale. On ne fait que repousser tout cela de quelques années.
     J'aimerais citer à la Chambre une résidante de ma circonscription que j'ai rencontrée en novembre. Dans une lettre qu'elle m'a adressée et que j'ai reçue avant de la rencontrer, elle disait ceci: « Il y a vingt-trois ans, à l'âge de dix-neuf ans […] j'ai pris la décision désespérée d'essayer d'échapper à ce qui me semblait être un monde sinistre […] Alors que je suivais un cours en pharmacologie, j'ai calculé la quantité de poison nécessaire pour arrêter le cœur d'un homme adulte, je l'ai multipliée par trois et j'ai décidé de l'ingérer […] Je ressentais de la compassion pour la souffrance des autres ainsi que le poids des nouvelles incessantes et terribles […] même si j’avais auparavant la capacité de faire face à cela, l’ingestion d’un seul comprimé qui m’avait été imposé par un médecin bien intentionné m’a involontairement fait sombrer dans le désespoir. »
    Ce qu'elle m'a dit plus tard, c'est que, en raison de l'effet secondaire du médicament qu'on lui avait prescrit, elle était immédiatement devenue suicidaire et que les professionnels qui l'ont soignée ont décrit sa survie comme miraculeuse.
    Elle est maintenant une épouse et une mère et mène une vie productive et enrichissante. Elle est convaincue que si elle avait eu accès à l'aide médicale à mourir plus tôt dans sa vie, elle l'aurait demandée et elle l'aurait peut-être obtenue. Elle m'a dit que les souffrances qu'elle a endurées auraient bien pu avoir été considérées comme irrémédiables et que, par conséquent, elle aurait été admissible.
    Le gouvernement n'a donc pas réussi à défendre sa loi originale. Il n'a pas axé la nouvelle loi sur les contraintes étroites de la décision Truchon. Il s'est servi de la décision Truchon au Québec pour justifier un élargissement irresponsable de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir. Lorsqu'il est devenu évident que le gouvernement avait commis une erreur, ses députés ont tergiversé au lieu d'agir de façon décisive, et ils tergiversent maintenant en repoussant la décision de deux ans. Ce n'est pas du leadership. Il s'agit d'un enthousiasme bizarre à l'égard de l'élargissement le plus radical possible de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir, qui est maintenant devenu incontrôlable.
    Je suis donc en faveur de l'adoption rapide du projet de loi. Étant donné le débat approfondi qui a déjà eu lieu, j'étais prêt à laisser le projet de loi être adopté à l'unanimité, mais voilà où nous en sommes. J'ai eu l'occasion de faire part de certaines de mes réflexions, et je serai heureux de répondre aux questions.
(1935)
    Madame la Présidente, j'ai trouvé encourageant d'entendre le député dire qu'il est favorable à l'adoption rapide du projet de loi ainsi que de la motion. Je suppose que c'est parce qu'il se rend compte de ce qui arriverait si la Chambre n'adoptait pas le projet de loi avant la date limite. Je me demande s'il pourrait nous dire s'il s'agit de son opinion ou de la position du Parti conservateur.
    Madame la Présidente, les conservateurs savent que nous ne pouvons pas laisser ce projet de loi échouer et nous retrouver ainsi dans une situation inconnue et imprévisible où on pourrait offrir l'aide médicale à mourir à des personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale, alors qu'il est si évident que le pays n'est pas prêt à cela.

[Français]

    Madame la Présidente, mon collègue prétend que le projet de loi C‑14 avait donné lieu à une bonne loi avec son critère de mort naturelle raisonnablement prévisible. Or, cela ne répondait même pas à l'arrêt Carter, puisque Mme Carter n'avait pas une maladie qui la rendait en phase terminale de vie. La Cour suprême a dit que le Parlement devait encadrer les situations comme celles de Mmes Carter et Taylor. Dire qu'on va limiter l'aide médicale à mourir seulement aux personnes en phase terminale de vie, c'est oublier complètement les gens qui ont dû, comme Mme Gladu et M. Truchon, aller à la cour pour faire valoir leur droit constitutionnel. Des gens ont dû faire une grève de la faim pour pouvoir se rapprocher du critère de mort naturelle raisonnablement prévisible.
    Est-ce le seul indice de compassion que mon collègue a?

[Traduction]

    Madame la Présidente, mon collègue m'a peut‑être mal compris. J'ai dit que j'avais voté en faveur du projet de loi C‑14 parce qu'il était une réponse raisonnable à l'arrêt Carter, auquel il fallait donner suite. Je croyais, à l'époque, que la disposition relative au critère de mort raisonnablement prévisible était problématique. J'estimais que ce n'était peut-être pas le critère le plus indiqué et qu'il était exprimé de façon maladroite. Je n'ai donc pas été surpris quand la disposition a été contestée devant les tribunaux. Je pense que mon collègue surestime peut-être mon enthousiasme pour le projet de loi C‑14. Il est vrai que je l'ai appuyé, mais c'est parce qu'il fallait faire quelque chose.
    Cependant, l'élargissement irresponsable qui découle des amendements du Sénat au projet de loi C‑7 va bien au-delà de cela. Aucun tribunal ne demandait ou n'exigeait que le Parlement élargisse l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est une maladie mentale.
    Madame la Présidente, en fait, les néo-démocrates ont également voté contre ce qui, selon moi, était un amendement malavisé du Sénat au projet de loi C‑7. Il y a beaucoup de reproches à faire. J'en suis conscient. J'ai fait plus que ma part de reproches aux libéraux cette semaine. Quoi qu'il en soit, le temps presse. Il ne nous reste environ qu'une semaine et demie de travaux parlementaires d'ici le 17 mars. Il est impératif que la Chambre adopte ce projet de loi cette semaine pour qu'il puisse être renvoyé au Sénat.
    Je suis content d'entendre que le député appuie la mesure, mais je suis curieux de savoir pourquoi, lorsque nous avons voté sur la motion visant à gérer le temps consacré aux délibérations sur le projet de loi, les conservateurs s'y sont opposés, sachant que son rejet aurait compromis nos chances d'adopter le projet de loi C‑62 cette semaine.
(1940)
    Madame la Présidente, il n'y a pas de danger que la Chambre rejette le projet de loi C‑62. Je crois que les négociations entre les leaders des partis n'ont pas réussi à produire une entente pour accélérer le processus.
    Je ne m'inquiète pas, le projet de loi sera adopté. La motion d'organisation des délibérations est là. Je n'ai certainement jamais eu l'intention de retarder délibérément l'adoption du projet de loi. Aucun conservateur ne tente de faire cela.
    Madame la Présidente, tout d'abord, je veux dire que je partagerai mon temps de parole avec la députée de Sarnia—Lambton, ce qui, je dois l'avouer, me semble un peu étrange.
    J'appuie le projet de loi, qui suspend pendant trois ans de plus l'élargissement de l'aide médicale à mourir aux cas de trouble mental, en plus d'exiger qu'un comité sur l'aide médicale à mourir soit reformé dans deux ans afin de réexaminer la question.
    Je sais que l'aide médicale à mourir en cas de trouble mental préoccupe beaucoup de gens. Ils s'inquiètent au sujet de leurs parents, au sujet de leurs frères et sœurs et, ce qui me touche tout particulièrement, au sujet de leurs enfants. J'ai six enfants et, franchement, j'aurais des craintes si on mettait en œuvre le projet de loi dans sa version actuelle, parce que je suis d'avis que les mesures de sauvegarde sont inadéquates. N'importe quel parent est conscient que son enfant traversera, inévitablement, des périodes difficiles à un moment donné.
    Je sais aussi que le projet de loi inquiète de nombreux psychiatres et que la majorité des psychiatres sont contre. Ils craignent que leurs patients, dont l'état pourrait probablement s'améliorer, aient recours à l'aide médicale à mourir. À toutes ces personnes, je dis que leurs préoccupations sont pleinement justifiées. Je suis d'avis que les mesures de sauvegarde ne sont pas adéquates à l'heure actuelle.
    Laissez-moi prendre un peu de recul et examiner l'approche de ceux qui plaident pour l'accès immédiat à l'aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème de santé invoqué. Pour eux, il s'agit avant tout d'autonomie personnelle: « C'est mon corps, c'est mon choix. Qui êtes-vous pour juger si je veux vivre ou non? » Il ne s'agit pas pour l'État de dicter aux gens ce qu'ils doivent faire de leur propre corps. Il ne s'agit pas de criminaliser le suicide ni la tentative de suicide. Il s'agit de savoir quel rôle, le cas échéant, l'État doit jouer dans le suicide assisté.
    Je vais revenir à la question: l'aide médicale à mourir lorsqu’un trouble mental est le seul problème de santé invoqué est-elle vraiment la même chose que le suicide? La question de savoir si l'État doit aider les gens à se suicider est étroitement liée à celle de savoir si l'État doit s'efforcer d'empêcher les gens de se suicider. J'ai une certaine expérience en la matière, car, pendant de nombreuses années, en tant qu'urgentologue, j'ai vu des personnes suicidaires, et mon rôle — si je pensais qu'elles étaient suicidaires — était de les garder à l'hôpital, même si elles ne le voulaient pas. Les gens me demandaient pourquoi j'avais ce pouvoir. Ils me disaient: « N'est-ce pas mon droit de décider ce que je fais de mon propre corps? »
    En y réfléchissant, je me suis dit que l'État avait deux raisons légitimes à essayer d'empêcher les gens de se suicider. La première, c'est de protéger les gens contre eux-mêmes, car, lorsqu'ils sont au plus fort de la dépression, ils ne se rendent pas compte que les choses vont s'améliorer. C'est en partie la raison pour laquelle ils sont si déprimés et veulent se suicider. Cependant, la grande majorité des gens finissent par aller mieux.
    L'autre raison légitime pour laquelle l'État doit intervenir, c'est de protéger les proches. La personne qui meurt ne souffre plus. Ce sont les personnes qui ont perdu un être cher qui continuent de souffrir. Ces personnes passent souvent le reste de leur vie à se demander si c'est lié à quelque chose qu'elles auraient pu ou n'auraient pas pu faire.
    Je sais que certains diront que c'est différent: l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes d'une maladie mentale est différente de l'aide au suicide, et les personnes dont ils parlent sont atteintes d'une grave maladie chronique et elles ont essayé toutes les formes de traitement possible sans que rien n'ait été efficace. Ils disent que c'est vraiment cruel et inconstitutionnel de ne pas aider ces personnes. Je ne suis pas d'accord.
    D'abord, la loi canadienne, contrairement à la loi néerlandaise, est très permissive en ce qui concerne l'admissibilité des patients. Il n'est absolument pas nécessaire que la personne ait essayé toutes les formes de thérapie, sans succès. En fait, elle n'a même pas besoin d'en avoir essayé une seule parce que la loi exigerait seulement qu'il n'y ait pas d'autres traitements acceptables pour le patient. En ma qualité de médecin, je sais que des gens refuseront tous les traitements. Ils refuseront les médicaments. Je sais que les défenseurs de l'aide médicale à mourir en cas de troubles mentaux feront valoir l'argument suivant: « Ce n'est pas dans la mesure législative, mais il revient au corps médical, aux médecins, d'imposer ces exigences, comme la nécessité d'essayer toutes les formes de traitement, même si la loi ne le fait pas. »
    Je regrette de devoir le dire, mais, en tant que médecin, je ne partage pas la même foi envers les membres de ma propre profession, et ce, à cause de ce qui s'est passé dans le cas de l'aide médicale à mourir fournie à des personnes souffrant de troubles physiques. Nous aurions dû en tirer des enseignements. Il existe de nombreux praticiens zélés de l'aide médicale à mourir qui sont convaincus que l'autonomie personnelle est primordiale et que nous ne devrions pas nous interroger sur les raisons qui poussent une personne à décider de s'enlever la vie.
(1945)
    Je vais donner quelques exemples glanés dans les médias. À l’excellente émission The Fifth Estate, il a été question d’une personne diabétique de 23 ans qui perdait la vue d’un œil, qui avait demandé l’aide médicale à mourir et à qui on l'avait accordée. Il y avait aussi l’histoire d’un homme de 54 ans qui avait des problèmes de dos, sauf que son vrai problème semblait plutôt être qu'il redoutait de perdre son appartement et de se retrouver à la rue. Lui aussi avait demandé l’aide médicale à mourir, on la lui avait accordée.
    CTV a présenté l’histoire d’une femme de 51 ans qui avait demandé et reçu l’aide médicale à mourir pour des polytoxicosensibilités. Une autre histoire: une femme de 31 ans a vu sa demande d’aide médicale à mourir approuvée parce qu’elle avait besoin d’un fauteuil roulant. Je ne pense pas qu’elle en avait vraiment besoin, mais elle utilisait habituellement un fauteuil roulant et elle souffrait de multiples allergies environnementales. Ici encore, son problème était surtout qu’elle ne trouvait pas de logement adéquat. Ici encore, sa demande d’aide médicale à mourir a été approuvée.
    Les personnes qui ont tellement confiance dans le corps médical qu’elles disent que nous allons définir les mesures de sauvegarde sont peut-être un peu naïves. Si nous mettions en œuvre ce projet de loi avec les mesures de sauvegarde qu’il contient actuellement, je serais sincèrement inquiet. J’ai six enfants et, la vie étant ce qu’elle est, je sais qu’ils traverseront des moments pénibles, comme une rupture ou des difficultés financières. C'est presque inévitable. Je redouterais qu’ils consultent l’un de ces praticiens zélés qui croient en l’autonomie personnelle et qui leur dirait: « Qui suis-je pour remettre en question votre souffrance? »
    Une partie du problème vient du fait que, à l'heure actuelle, le projet de loi n'exigerait pas des professionnels de la santé habilités à administrer l'aide médicale à mourir qu'ils discutent avec la famille ou avec le médecin traitant, ce qui fait qu'ils ne pourront pas savoir si la dépression découle d'une rupture amoureuse ou du fait que la personne a cessé de prendre ses médicaments.
    Je veux également parler brièvement du problème qu'est le caractère irrémédiable de la maladie en lien avec l'élargissement de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir aux personnes souffrant d'une maladie mentale. Une partie du problème de cet élargissement est que les personnes qui font une dépression n'arrivent pas à voir que les choses finiront par aller mieux. Assurément, certains soutiendront qu'il y a des gens qui ne finiront jamais par aller mieux, ce qui correspond aux critères de la loi: il faut être atteint d'une maladie irrémédiable.
    Or, le problème, c'est que les médecins ne sont pas vraiment en mesure de prédire qui ne finira pas par aller mieux, en particulier lorsqu'il est question de maladie mentale. Quand on parle de cancer, ce n'est pas la même chose.
    Une étude publiée récemment au sujet de la capacité pour les médecins de déterminer le caractère irrémédiable d'une dépression résistante au traitement est arrivée à la conclusion suivante: « Nous constatons que, d'après les données disponibles, les cliniciens ne peuvent pas prédire avec précision les chances de guérison à long terme d'un patient donné souffrant de dépression résistante au traitement. Cela signifie que le critère objectif du caractère irrémédiable ne peut être respecté. »
    En outre, il n'existe à l'heure actuelle aucune norme de soins établie ou fondée sur les données pour décider du caractère irrémédiable d'une maladie mentale au moment d'établir l'admissibilité à l'aide médicale à mourir.
    Pour moi qui pratique la médecine depuis longtemps, il est presque impossible de croire qu'il existe des médecins, des psychiatres qui ne s'en font pas trop avec le fait qu'ils ne peuvent pas être certains que le problème de santé d'un patient est irrémédiable. Il serait horrible d'enlever la vie à une personne dont la situation pourrait s'améliorer.
    En terminant, je voudrais aborder l'idée véhiculée par certains partisans de l'aide médicale à mourir selon laquelle, si cette question était renvoyée à la Cour suprême, elle jugerait inévitablement que le régime actuel est inconstitutionnel puisqu'il est discriminatoire envers les personnes atteintes d'une maladie mentale et non physique. Je ne crois pas du tout que cette conclusion est inévitable. Il est vrai qu'un tribunal pourrait dire que le régime actuel contrevient à l'article 15 ou à l'article 7 de la Charte, mais la véritable analyse, comme dans le cas de bon nombre de questions constitutionnelles, concerne la justification en vertu de l'article 1. Est-ce que le droit en question ici est restreint « par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique »?
    Je crois que c'est hautement discutable, mais peu importe mon opinion. Dans une lettre envoyée aux ministres concernés il y a un an, 32 professeurs de droit ont déclaré la même chose, soit qu'il n'est pas évident que ce serait déclaré inconstitutionnel.
    Je ne dirai pas que, selon moi, nous ne devrions jamais autoriser l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes de maladie mentale. En réalité, je connais quelqu'un à qui la seule chose humaine à faire aurait été de le lui offrir. Toutefois, nous sommes encore très loin d'être dans une position où je serais disposé à défendre l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes de maladie mentale.
    Votons pour le projet de loi. Réexaminons-le dans deux ans.
(1950)
    Madame la Présidente, je suis encouragé par la position de mon collègue d'en face sur cette question particulière et par ses connaissances en tant que médecin; toutefois, pour l'amour du ciel, nous avons traité de cette question il y a à peine un an. Le gouvernement contrôle l'ordre du jour; le député est membre du caucus ministériel.
    Au lieu de reporter la question et de remettre les choses à plus tard, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas mis le holà à cette situation en adoptant une mesure législative qui nous éviterait d'avoir à nous pencher sur cette question dans un avenir prévisible? A-t-il préconisé cette approche au sein de son caucus? Pourquoi le Parlement devra-t-il à nouveau se pencher sur cette question dans quelques années?
    Madame la Présidente, comme le député le sait, je ne suis pas libre de discuter de ce que j'ai dit ou non en caucus. Cependant, nous avons retardé le processus d'un an et, ensuite, de trois années de plus. Évidemment, il faut tenir compte de ce que le Sénat et les tribunaux vont faire. La question va revenir. Oui, j'aurais aimé que le moratoire soit indéfini, mais les choses sont ainsi. Allons-y une étape à la fois. Je pense qu'au bout du compte, nous arriverons à la bonne décision.

[Français]

    Madame la Présidente, j'ai beaucoup d'estime pour mon collègue, avec lequel je siège au Comité permanent de la santé.
    Cependant, je suis un peu abasourdi ce soir. Je le dis en toute franchise et sans prendre personne de haut, mais, si je devais revenir à l'enseignement et présenter un discours pour énumérer le nombre de sophismes qu'il peut y avoir dans un discours, je prendrais le sien. C'est un exemple par excellence.
    D'un côté, il dit qu'il sait de quoi il parle, car il est médecin, et il faudrait le croire. D'un autre côté, parce qu'il est médecin, il vient nous dire qu'il ne fait pas confiance aux médecins. Alors, en qui va-t-on avoir confiance? Il nous dit qu'il est médecin, qu'il sait de quoi il parle, mais qu'il est inquiet pour ses enfants. Ensuite, il donne des exemples d'états suicidaires alors qu'on sait très bien, et c'est établi sans l'ombre d'un doute, que l'état suicidaire est réversible.
    De quoi a-t-il peur?
    Madame la Présidente, je remercie mon cher collègue de Montcalm, qui siège au Comité permanent de la santé avec moi.

[Traduction]

    Quelque chose me préoccupe. J'étais médecin et j'exerce toujours la médecine, mais je siège aujourd'hui parmi les législateurs. Nous établissons les règles, et il me semble que l'une de nos responsabilités en la matière est la même que celle d'un médecin, à savoir de ne pas nuire. Même si je sais que mon collègue de Montcalm est une personne formidable et que je lui fais confiance, il y a beaucoup de praticiens zélés de l'aide médicale à mourir qui sont très désinvoltes quand il s'agit d'autoriser cette pratique pour diverses formes de maladies, et cela m'inquiète sincèrement au moment de mettre en œuvre cette mesure législative. Je crains qu'un jour, mes enfants et ceux de mes concitoyens traversent des moments difficiles et aillent consulter l'un de ces praticiens zélés, qui leur dira: « La décision vous revient. »
    Il est de notre devoir de protéger ces gens. C'est pourquoi je suis ici.
    Madame la Présidente, les médias ont rapporté que certains sénateurs songent ouvertement à bloquer le projet de loi C‑62. Étant donné que nous disposons de très peu de temps, je me demande simplement si mon collègue a une opinion sur le fait que le Sénat non élu s'oppose ouvertement à la volonté démocratique de la Chambre des communes sur une question aussi importante. Selon lui, que devrait faire le gouvernement pour empêcher que cela se produise lorsque le projet de loi sera renvoyé à la Chambre rouge?
(1955)
    Madame la Présidente, j'ai certainement des observations à faire à ce sujet. Parfois, les décisions des tribunaux portent sur des problèmes éthiques difficiles qui nécessitent un équilibre entre des intérêts divergents. Ils disent que ce genre de décisions difficiles devraient être laissées aux représentants élus qui doivent rendre des comptes à la population, et non aux tribunaux non élus. C'est tout à fait exact, et en ce qui concerne cette question, ce devrait être nous, les élus à la Chambre, qui prenons les décisions, et non le Sénat.
    Madame la Présidente, encore une fois, il est minuit moins une. Le gouvernement a attendu pour mettre en place quelque chose qu'il devait mettre en place. Autrement, le 17 mars prochain, les gens dont la seule condition médicale est une maladie mentale pourront présenter une demande d'aide médicale à mourir.
    Les libéraux ne sont pas ignorants du processus parlementaire. Ils savent très bien que, habituellement, pour qu'un projet de loi franchisse les trois lectures à la Chambre et l'examen au comité et qu'il franchisse les mêmes étapes à la Chambre rouge, il faut environ 18 mois. Si tous les partis font preuve de bonne volonté et qu'ils sont d'accord, le processus peut prendre six mois. Je trouve ridicule que le gouvernement présente ce projet de loi moins de deux mois avant la date limite. C'est vraiment comme mettre un pistolet sur la tempe des députés de l'opposition parce que, si nous décidons de ne pas adopter le projet de loi, le 17 mars prochain, des gens qui souffrent uniquement d'une maladie mentale pourront recourir à l'aide médicale à mourir.
    J'ai beaucoup de compassion pour les gens qui souffrent de maladie mentale. Dans bien des cas, ils ont des pensées suicidaires et n'ont pas beaucoup d'espoir pour l'avenir. Il est donc facile pour eux de dire, en désespoir de cause, qu'il n'y a pas d'issue. Cependant, beaucoup de gens se rétablissent, puis mènent une vie bien remplie. Ces gens ne sont pas vraiment en mesure de prendre cette décision.
    Ce n’est pas la première fois que le gouvernement attend à la dernière minute. Je me souviens que, lorsque le projet de loi C‑14 sur l’aide médicale à mourir a été présenté, nous ressentions une forte pression pour trouver un terrain d’entente et adopter le projet de loi. Je serais plus confiante si le gouvernement ne présentait pas continuellement des projets de loi inconstitutionnels. Ces projets de loi se retrouvent devant les tribunaux, jusqu’à la Cour suprême et sont déclarés inconstitutionnels, comme le projet de loi C‑69. Le projet de loi sur le bien-être des enfants autochtones a aussi été déclaré inconstitutionnel. Il nous incombe de faire en sorte que les projets de loi suivent la procédure établie et qu’ils soient judicieux, au lieu de leur faire franchir toutes les étapes à la hâte en les approuvant les yeux fermés.
    Je ne veux pas que des personnes atteintes de maladie mentale reçoivent l’aide médicale à mourir si nous n’adoptons pas ce projet de loi à temps. Malheureusement, nous n’avons aucune garantie que le Sénat ne retardera pas l’adoption du projet de loi. Le député qui a prononcé le discours précédent a dû répondre à une question à propos de la façon dont le Sénat pourrait choisir de bloquer le projet de loi. En pareil cas, cela retarderait encore plus les choses et nous ne respecterions pas l’échéancier. Il n’est pas certain que le projet de loi sera adopté.
    Nous devons nous reporter à l'arrêt Carter. Nous avons longuement discuté de la réponse à apporter. C'est le tribunal qui a ordonné que le critère soit un problème de santé irrémédiable avec une mort imminente. C'est sur cette voie que nous nous sommes engagés. J'étais très inquiète à l'époque, parce que le comité spécial qui avait étudié la question avait indiqué dans toutes ses recommandations que sans soins palliatifs de qualité, on n'a pas vraiment de choix.
    À l'époque, j'ai découvert que seulement 30 % des Canadiens avaient accès à des soins palliatifs. C'est ce qui m'a incitée à proposer mon projet de loi d'initiative parlementaire, pour que tous les Canadiens aient accès à des soins palliatifs. La Chambre a adopté le projet de loi à l'unanimité. Depuis, l'accès aux soins palliatifs a doublé et est passé de 30 % à 60 %. C'est bien, mais il reste encore du chemin à parcourir. Sans accès à des soins palliatifs de qualité, les gens n'ont pas véritablement de choix.
    Le gouvernement doit se recentrer. J'ai vu dans le rapport qu'après cinq ans de progrès en matière de soins palliatifs, il y a encore des lacunes. Le gouvernement doit poursuivre ses efforts avec passion et dynamisme parce que c'est la bonne solution. Si les gens reçoivent des soins palliatifs de bonne qualité, ils ne choisissent pas l'aide médicale à mourir, et cela s'applique partout. J'ai rencontré aujourd'hui des représentants du milieu des soins palliatifs, et ils m'ont dit que lorsque les gens sont admis dans un centre de soins palliatifs, neuf sur dix demandent l'aide médicale à mourir, mais que très peu d'entre eux s'en prévalent une fois qu'ils reçoivent des soins palliatifs.
(2000)
    Pourquoi 9 personnes sur 10 demandent-elles l'aide médicale à mourir? C'est parce que les médecins la recommandent, et je ne suis pas du tout convaincue que les mesures de sauvegarde qui étaient censées être en place sont bel et bien respectées. Un médecin du Parti libéral qui a pris la parole avant moi a cité cinq cas qu'il connaît où la personne ne répondait manifestement pas aux critères, mais a quand même obtenu l'aide médicale à mourir.
    Le Canada s'engage sur une pente très glissante. Quand on se penche sur les pays qui ont mis en place l'aide médicale à mourir, on constate que les Pays‑Bas ont été en quelque sorte à l'avant-garde, et il a fallu un certain temps pour qu'il observe une hausse du pourcentage de personnes ayant reçu l'aide médicale à mourir. Or, l'année dernière, au Canada, 4 % des personnes décédées ont reçu l'aide médicale à mourir. Nous avons établi un record mondial. Nous sommes au premier rang lorsqu'il s'agit de tuer des gens en leur offrant l'aide médicale à mourir.
    Je pense que nous faisons complètement fausse route. Élargir l'accès à l'aide médicale à mourir pour inclure les personnes atteintes d'une maladie mentale est pour le moins malavisé. Sans vouloir être insensible, je dirais que les personnes atteintes d'une maladie mentale sont capables de se suicider. Malheureusement, tous les jours, le désespoir pousse déjà bon nombre de ces personnes à s'enlever la vie. Ces gens n'ont pas besoin que le gouvernement leur en donne les moyens.
    Les conservateurs avaient averti le gouvernement, quand cet amendement mal avisé est arrivé du Sénat, que cela se produirait. Au lieu de réaliser qu'il s'était trompé et de revenir en arrière, le gouvernement libéral repousse l'inévitable de trois années supplémentaires. Au lieu de reconnaître qu'il s'agissait d'une mauvaise idée, il laisse le prochain gouvernement régler le problème.
    Les médecins disent que, dans 50 % des cas, ils ne sont même pas en mesure de faire un diagnostic quant au caractère irrémédiable de la maladie mentale. Si c'est exact, cela signifie que, dans la moitié des cas, on tuera une personne qui aurait pu se rétablir. C'est une très mauvaise idée. Le gouvernement devrait intervenir et dire qu'il a compris qu'il avait fait une erreur et qu'il aurait dû présenter un projet de loi pour corriger cette erreur. Or, ce n'est pas du tout ce qui se passe maintenant. Voilà où nous en sommes aujourd'hui: si nous ne prenons pas de décision et que nous n'adoptons pas le projet de loi à la hâte d'ici le 17 mars, des gens atteints de maladie mentale commenceront à mettre fin à leur vie au moyen de l'aide médicale à mourir.
    Je dirais qu'on a de cesse de suggérer un glissement de portée. Où arrêterons-nous? Il a été suggéré que si nous autorisons l'aide médicale à mourir pour les personnes atteintes d'une maladie mentale, nous devrions peut-être également l'autoriser pour les mineurs, ou autoriser les directives anticipées. On dirait que la solution à toutes ces choses est la mort. On nous dit que des itinérants demandent l'aide médicale à mourir. On nous dit que des anciens combattants se font conseiller de recourir à l'aide médicale à mourir. C'est un glissement de portée et l'élargissement des groupes de personnes admissibles à mourir ainsi, sans avoir de contrôles adéquats en place. C'est inacceptable.
    L'une des choses dont on ne tient pas compte est le droit des médecins à la liberté de conscience. Le gouvernement fédéral dira toujours que son projet de loi ne porte pas atteinte à ce droit, mais le fait est que certaines provinces forcent les médecins et les infirmiers à participer à l'aide médicale à mourir, même si cela va à l'encontre de leur religion ou de leur conscience, et le gouvernement fédéral ne fait rien pour corriger la situation. C'est un problème.
    Je veux aussi parler du fait que le glissement qui se produit a créé une voie d'accès rapide à l'aide médicale à mourir pour les personnes handicapées. Je trouve qu'il est dégoûtant que les personnes handicapées se fassent dire qu'ils devraient avoir un accès prioritaire. Nous devons protéger les personnes vulnérables, atteintes de maladie mentale et handicapées. Nous devons défendre leurs droits et savoir que nous pouvons leur donner de l'espoir.
    Je n'aime pas la façon dont cette mesure a été présentée. Je pense que le gouvernement aurait dû interjeter appel de la décision Truchon. Quand le Québec a décidé qu'il fallait y donner suite, le gouvernement fédéral aurait dû dire non. Il aurait dû lui dire qu'il s'était penché sur la question et que, après une longue réflexion, il avait décidé d'interjeter appel de la décision parce que sa mesure initiale était au moins meilleure que le glissement de portée qu'on observe maintenant.
    J'ai donné de nombreux exemples de ce qui ne va pas dans le projet de loi. Je ne veux évidemment pas voir d'autres personnes mourir. Je vais certainement travailler avec le gouvernement pour que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible, et je l'encourage à utiliser les mêmes moyens qu'il a utilisés pour aider les sénateurs nommés par les libéraux à disposer du projet de loi C‑234 comme il l'entendait. J'espère qu'il agira de même pour ce projet de loi, que ce dernier sera adopté rapidement et que le gouvernement ne tuera pas des personnes atteintes de maladie mentale.
(2005)
     Comme il est 20 h 06, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire pour disposer de la motion no 34 sous la rubrique des affaires du gouvernement dont la Chambre est maintenant saisie.
    Le vote porte sur l'amendement.
    Puis-je me dispenser d'en faire la lecture?
    Des voix: Non.
    [La présidence donne lecture de l'amendement.]
     Si un député participant en personne désire que la motion soit adoptée ou adoptée avec dissidence ou si un député d'un parti reconnu participant en personne désire demander un vote par appel nominal, je l'invite à se lever et à l'indiquer à la présidence.
    Monsieur le Président, nous demandons un vote par appel nominal.
    Convoquez les députés.
(2050)

[Français]

    (L'amendement, mis aux voix, est rejeté par le vote suivant:)

(Vote no 638)

POUR

Députés

Barsalou-Duval
Beaulieu
Bergeron
Berthold
Bérubé
Blanchet
Blanchette-Joncas
Brunelle-Duceppe
Chabot
Champoux
DeBellefeuille
Deltell
Desbiens
Desilets
Fortin
Garon
Gaudreau
Généreux
Gill
Godin
Gourde
Larouche
Lemire
Martel
McLean
Michaud
Normandin
Paul-Hus
Pauzé
Perron
Plamondon
Rayes
Savard-Tremblay
Simard
Sinclair-Desgagné
Ste-Marie
Thériault
Therrien
Trudel
Vecchio
Vien
Vignola
Villemure

Total: -- 43


CONTRE

Députés

Aboultaif
Aitchison
Albas
Aldag
Alghabra
Ali
Allison
Anand
Anandasangaree
Angus
Arnold
Arseneault
Arya
Ashton
Atwin
Bachrach
Badawey
Bains
Baker
Baldinelli
Barlow
Barrett
Barron
Battiste
Beech
Bezan
Bibeau
Bittle
Blaikie
Blaney
Block
Blois
Boissonnault
Bradford
Bragdon
Brassard
Brière
Brock
Calkins
Cannings
Caputo
Carrie
Casey
Chagger
Chahal
Chambers
Champagne
Chatel
Chen
Chiang
Chong
Collins (Hamilton East—Stoney Creek)
Collins (Victoria)
Cooper
Cormier
Coteau
Dabrusin
Damoff
Dancho
Davidson
Desjarlais
Dhaliwal
Dhillon
Diab
Doherty
Dong
Dowdall
Dreeshen
Drouin
Dubourg
Duclos
Duguid
Duncan (Stormont—Dundas—South Glengarry)
Dzerowicz
Ehsassi
El-Khoury
Ellis
Epp
Erskine-Smith
Falk (Battlefords—Lloydminster)
Falk (Provencher)
Fast
Ferreri
Fillmore
Fisher
Fonseca
Fortier
Fragiskatos
Fraser
Freeland
Fry
Gaheer
Gainey
Gallant
Garrison
Gazan
Genuis
Gerretsen
Gladu
Goodridge
Gould
Gray
Green
Guilbeault
Hallan
Hanley
Hardie
Hepfner
Hoback
Holland
Housefather
Hughes
Hussen
Hutchings
Iacono
Idlout
Ien
Jaczek
Jeneroux
Johns
Jones
Jowhari
Julian
Kayabaga
Kelloway
Kelly
Khalid
Khanna
Khera
Kitchen
Koutrakis
Kram
Kurek
Kusie
Kusmierczyk
Kwan
Lake
Lalonde
Lambropoulos
Lamoureux
Lantsman
Lapointe
Lattanzio
Lauzon
Lawrence
LeBlanc
Lebouthillier
Lehoux
Leslie
Lewis (Essex)
Lewis (Haldimand—Norfolk)
Lightbound
Lloyd
Lobb
Long
Louis (Kitchener—Conestoga)
MacAulay (Cardigan)
MacDonald (Malpeque)
MacGregor
MacKinnon (Gatineau)
Maguire
Majumdar
Maloney
Martinez Ferrada
Masse
Mathyssen
May (Cambridge)
May (Saanich—Gulf Islands)
Mazier
McCauley (Edmonton West)
McDonald (Avalon)
McGuinty
McKay
McKinnon (Coquitlam—Port Coquitlam)
McLeod
McPherson
Melillo
Mendès
Mendicino
Miao
Miller
Moore
Morantz
Morrice
Morrison
Morrissey
Motz
Murray
Muys
Naqvi
Nater
Ng
Noormohamed
O'Connell
Oliphant
O'Regan
Patzer
Petitpas Taylor
Poilievre
Powlowski
Qualtrough
Redekopp
Reid
Rempel Garner
Richards
Roberts
Robillard
Rodriguez
Rogers
Romanado
Rood
Ruff
Sahota
Sajjan
Saks
Samson
Sarai
Scarpaleggia
Scheer
Schiefke
Schmale
Seeback
Serré
Sgro
Shanahan
Sheehan
Shields
Shipley
Sidhu (Brampton East)
Sidhu (Brampton South)
Singh
Small
Sorbara
Soroka
Sousa
Steinley
Stewart
St-Onge
Strahl
Stubbs
Sudds
Tassi
Taylor Roy
Thomas
Thompson
Tolmie
Trudeau
Turnbull
Uppal
Valdez
Van Bynen
van Koeverden
Van Popta
Vandal
Vandenbeld
Vidal
Virani
Vis
Vuong
Wagantall
Warkentin
Waugh
Webber
Weiler
Williams
Williamson
Zahid
Zarrillo
Zimmer
Zuberi

Total: -- 270


PAIRÉS

Députés

Blair
Liepert

Total: -- 2


    Je déclare l'amendement rejeté.

[Traduction]

    Le vote suivant porte sur la motion principale.
    Si un député participant en personne désire que la motion soit adoptée ou adoptée avec dissidence ou si un député d'un parti reconnu participant en personne désire demander un vote par appel nominal, je l'invite à se lever et à l'indiquer à la présidence.

[Français]

    Monsieur le Président, je demande un vote par appel nominal.
(2100)
    (La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)

(Vote no 639)

POUR

Députés

Aboultaif
Aitchison
Albas
Aldag
Alghabra
Ali
Allison
Anand
Anandasangaree
Angus
Arnold
Arseneault
Arya
Ashton
Atwin
Bachrach
Badawey
Bains
Baker
Baldinelli
Barlow
Barrett
Barron
Battiste
Beech
Berthold
Bezan
Bibeau
Bittle
Blaikie
Blaney
Block
Blois
Boissonnault
Boulerice
Bradford
Bragdon
Brassard
Brière
Brock
Calkins
Cannings
Caputo
Carrie
Casey
Chagger
Chahal
Chambers
Champagne
Chatel
Chen
Chiang
Chong
Collins (Hamilton East—Stoney Creek)
Collins (Victoria)
Cooper
Cormier
Coteau
Dabrusin
Dalton
Damoff
Dancho
Davidson
Deltell
Desjarlais
Dhaliwal
Dhillon
Diab
Doherty
Dong
Dowdall
Dreeshen
Drouin
Dubourg
Duclos
Duguid
Duncan (Stormont—Dundas—South Glengarry)
Dzerowicz
Ehsassi
El-Khoury
Ellis
Epp
Erskine-Smith
Falk (Battlefords—Lloydminster)
Falk (Provencher)
Fast
Ferreri
Fillmore
Findlay
Fisher
Fonseca
Fortier
Fragiskatos
Fraser
Freeland
Fry
Gaheer
Gainey
Gallant
Garrison
Gazan
Généreux
Genuis
Gerretsen
Gladu
Godin
Goodridge
Gould
Gourde
Gray
Green
Guilbeault
Hallan
Hanley
Hardie
Hepfner
Hoback
Housefather
Hughes
Hussen
Hutchings
Iacono
Idlout
Ien
Jaczek
Jeneroux
Johns
Jones
Jowhari
Julian
Kayabaga
Kelloway
Kelly
Khalid
Khanna
Khera
Kitchen
Kmiec
Koutrakis
Kram
Kurek
Kusie
Kusmierczyk
Kwan
Lake
Lalonde
Lambropoulos
Lamoureux
Lantsman
Lapointe
Lattanzio
Lauzon
Lawrence
LeBlanc
Lebouthillier
Lehoux
Leslie
Lewis (Essex)
Lewis (Haldimand—Norfolk)
Lightbound
Lloyd
Lobb
Long
Louis (Kitchener—Conestoga)
MacAulay (Cardigan)
MacDonald (Malpeque)
MacGregor
MacKinnon (Gatineau)
Maguire
Majumdar
Maloney
Martel
Martinez Ferrada
Masse
Mathyssen
May (Cambridge)
May (Saanich—Gulf Islands)
Mazier
McCauley (Edmonton West)
McDonald (Avalon)
McGuinty
McKay
McKinnon (Coquitlam—Port Coquitlam)
McLean
McLeod
McPherson
Melillo
Mendès
Mendicino
Miao
Miller
Moore
Morantz
Morrice
Morrison
Morrissey
Motz
Murray
Muys
Naqvi
Nater
Ng
Noormohamed
O'Connell
Oliphant
O'Regan
Patzer
Paul-Hus
Perkins
Petitpas Taylor
Poilievre
Powlowski
Qualtrough
Rayes
Redekopp
Reid
Rempel Garner
Richards
Roberts
Robillard
Rodriguez
Rogers
Romanado
Rood
Ruff
Sahota
Sajjan
Saks
Samson
Sarai
Scarpaleggia
Scheer
Schiefke
Schmale
Seeback
Serré
Sgro
Shanahan
Sheehan
Shields
Shipley
Sidhu (Brampton East)
Sidhu (Brampton South)
Singh
Small
Sorbara
Soroka
Sousa
Steinley
Stewart
St-Onge
Strahl
Stubbs
Sudds
Tassi
Taylor Roy
Thomas
Thompson
Tochor
Tolmie
Trudeau
Turnbull
Uppal
Valdez
Van Bynen
van Koeverden
Van Popta
Vandal
Vandenbeld
Vecchio
Vidal
Vien
Virani
Vis
Vuong
Wagantall
Warkentin
Waugh
Webber
Weiler
Williams
Williamson
Yip
Zahid
Zarrillo
Zimmer
Zuberi

Total: -- 287


CONTRE

Députés

Barsalou-Duval
Beaulieu
Bergeron
Bérubé
Blanchet
Blanchette-Joncas
Brunelle-Duceppe
Chabot
Champoux
DeBellefeuille
Desbiens
Desilets
Fortin
Garon
Gaudreau
Gill
Larouche
Lemire
Michaud
Normandin
Pauzé
Perron
Plamondon
Savard-Tremblay
Simard
Sinclair-Desgagné
Ste-Marie
Thériault
Therrien
Trudel
Vignola
Villemure

Total: -- 32


PAIRÉS

Députés

Blair
Liepert

Total: -- 2


    Je déclare la motion adoptée.

Le Code criminel

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 7 février, de la motion portant que le projet de loi C‑62, Loi no 2 modifiant la Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
    Je soulignerai en particulier l'engagement du gouvernement à respecter l'autonomie et les choix personnels tout en soutenant et en protégeant les Canadiens atteints d'une maladie mentale qui peuvent être vulnérables. Je soulignerai également les investissements importants que notre gouvernement a faits pour améliorer l'accès aux services de santé mentale pour tous les Canadiens.
(2105)

[Traduction]

    Nous sommes conscients que la maladie mentale peut causer des souffrances comparables à des souffrances résultant d'une maladie physique. Là n'est pas l'objet du débat. Nous savons également que les personnes aux prises avec une maladie mentale sont capables de prendre des décisions concernant leur propre santé, à moins qu'une évaluation personnalisée ne suggère le contraire.

[Français]

    Toutefois, si nous respectons l'autonomie des personnes qui choisissent l'aide médicale à mourir en réponse à des souffrances graves et irrémédiables, nous avons la responsabilité tout aussi importante de protéger les Canadiens qui peuvent être vulnérables, y compris ceux qui souffrent de maladies mentales ou qui sont en situation de crise. C'est pourquoi la législation fédérale prévoit des garanties et des critères rigoureux au regard desquels toutes les demandes d'aide médicale à mourir doivent être évaluées.
    Les experts qui composaient le groupe d'expertise sur l'aide médicale à mourir et la maladie mentale étaient d'avis que les garanties juridiques existantes fournissent une structure adéquate pour l'évaluation des cas où les troubles mentaux sont la seule condition médicale sous-jacente, à condition qu'elles soient interprétées et appliquées de manière appropriée. Dans son rapport final, le groupe a formulé 19 recommandations, dont l'élaboration d'un modèle de normes de pratique pour l'aide médicale à mourir et la formation pour les cliniciens.

[Traduction]

    Notre gouvernement a réalisé d'importants progrès en collaboration avec les provinces, les territoires et d'autres intervenants du secteur de la santé afin de mettre en œuvre les recommandations du groupe d'experts et de se préparer à l'élargissement de l'aide médicale à mourir. Toutefois, les provinces et les territoires ont exprimé certaines réserves concernant la date butoir actuelle de mars 2024 et demandent plus de temps.

[Français]

    Le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir reconnaît également les progrès réalisés dans la préparation de l'élargissement de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir. Toutefois, comme l'indique le récent rapport du Comité, il est recommandé de prévoir un délai supplémentaire pour s'assurer que l'admissibilité à l'aide médicale à mourir pourra être évaluée en toute sécurité pour les personnes dont la seule condition médicale est une maladie mentale.
    La prolongation de trois ans que nous proposons dans ce projet de loi donnera plus de temps pour l'adoption et l'intégration des ressources nécessaires telles que le modèle de normes de pratique de l'aide médicale à mourir et le programme de formation recommandé par le groupe d'experts. Cela va permettre de s'assurer que les évaluations de l'aide médicale à mourir des personnes souffrant de conditions complexes, telles que les personnes souffrant uniquement de maladie mentale, seront effectuées avec le niveau de rigueur approprié.
    Je pense que tout Canadien qui souffre cruellement et qui souhaite envisager l'aide médicale à mourir comme une option de fin de vie devrait être libre de le faire. Je pense également que, parallèlement à la mise en œuvre sur l'aide médicale à mourir pour les personnes évaluées et jugées aptes à la recevoir, nous devons également nous engager à améliorer notre système de soins de santé mentale.

[Traduction]

    Par conséquent, il est important que tous les Canadiens qui sont aux prises avec une maladie mentale ou qui ont des pensées suicidaires aient accès en temps opportun à des ressources essentielles en santé mentale. À titre de secrétaire parlementaire, je suis heureuse de parler de nos investissements actuels et à venir, ainsi que des progrès réalisés dans le cadre d'interventions clés visant à répondre aux besoins des Canadiens en matière de soins de santé mentale et de traitement de la toxicomanie.

[Français]

    Le budget de 2023 a confirmé l'engagement du gouvernement à investir plus de 200 milliards de dollars sur 10 ans à partir de 2023‑2024 pour améliorer les soins de santé des Canadiens. De ce montant, 25 milliards de dollars seront versés aux provinces et aux territoires par le truchement d'accords bilatéraux adaptés qui se concentreront sur quatre piliers clés comprenant entre autres l'amélioration de l'accès aux services de santé mentale et aux services liés à la consommation de substances. D'autres investissements clés comprennent 598 millions de dollars pour une stratégie de santé mentale et de bien-être fondée sur les distinctions pour les peuples autochtones ainsi que 350 millions de dollars pour le Programme sur l'usage et les dépendances aux substances depuis 2020.
    En outre, grâce au Fonds d'innovation pour la promotion de la santé mentale, l'Agence de la santé publique du Canada investit 4,9 millions de dollars par année dans des projets communautaires de promotion de la santé mentale axée sur la réduction des obstacles systémiques.
(2110)

[Traduction]

    Je suis également très fière de rappeler que nous avons récemment adopté une importante mesure visant à fournir des services de prévention du suicide à ceux qui en ont besoin lorsqu'ils en ont le plus besoin. La nouvelle ligne de prévention du suicide, le 988, a été inaugurée le 30 novembre 2023. On peut composer ce numéro partout au Canada pour parler ou texter, en français ou en anglais, 24 heures sur 24, sept jours par semaine. Un réseau de partenaires expérimentés et d'intervenants formés est prêt à répondre aux appels et aux textos faits au 988. Les intervenants sont là pour offrir soutien et compassion sans jugement. Ils sont là pour aider les gens à explorer des moyens d'assurer leur propre sécurité lorsqu'ils se sentent dépassés par les événements.

[Français]

    Nous comprenons que les dernières années ont été difficiles et que de nombreuses personnes ont dû lutter pour s'en sortir. Il en reste encore beaucoup à faire et nous nous engageons à continuer de travailler avec nos partenaires pour progresser dans la prise en charge des besoins des Canadiens en matière de santé mentale et de consommation de substances. Pour l'avenir, nous restons déterminés à améliorer l'accès aux services de santé mentale et à aider ceux qui consomment des substances.
    À cette fin, la ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée à la Santé et moi-même avons rencontré un large éventail de partenaires et de parties prenantes, y compris les ministres provinciaux et territoriaux responsables de la santé mentale et des dépendances, pour discuter de leurs priorités et de leurs besoins. Cet engagement permettra de s'assurer que les programmes de soutien aux services de santé mentale et d'aide liée à la consommation de substances s'appuient sur une expertise de base.

[Traduction]

    Nous sommes à l'écoute des Canadiens qui ont vécu et qui vivent des problèmes de santé mentale, des professionnels de la santé sur le terrain et des experts pour faire des investissements et des interventions qui sont fondés sur les données probantes afin de soutenir l'accès rapide à des soins de santé mentale. Nous sommes toutefois conscients que, parfois, peu importe les traitements et les services offerts, rien ne permet d'alléger les souffrances intolérables d'une manière qui est acceptable pour la personne. C'est dans ces cas que l'aide médicale à mourir pourrait être une option pour les personnes qui en font la demande et qui sont considérées comme admissibles par deux médecins indépendants.

[Français]

    En fin de compte, nous nous engageons à respecter l'autonomie personnelle de tous les Canadiens tout en protégeant les intérêts de ceux qui peuvent avoir besoin de plus de soins. La prolongation de trois ans que nous proposons nous permettra de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour former et soutenir les cliniciens dans leur évaluation des cas complexes, y compris pour les personnes dont la maladie mentale est la seule condition médicale. Dans l'intervalle, nous continuerons à investir dans les ressources et les aides en matière de santé mentale et l'aide aux problèmes de consommation de substances.

[Traduction]

    Monsieur le Président, le fait que le gouvernement ait dû présenter ce projet de loi démontre ses graves échecs répétés dans ce dossier. Les conservateurs ont présenté un projet de loi d'initiative parlementaire, sur lequel nous avons voté à l'automne, qui aurait tué pour toujours la très mauvaise idée de permettre l'aide médicale au suicide pour les personnes souffrant de problèmes de santé mentale.
    Dans l'ensemble, les députés ministériels ont voté contre ce projet de loi. Ils reviennent maintenant à la Chambre pour discuter de ce sujet. Ils n'ont pas appris de leurs erreurs. Ils n'admettent pas que l'aide au suicide offerte par le système médical à ceux qui souffrent de dépression ou d'autres problèmes de santé mentale est fondamentalement inadmissible. Ils ne le comprennent pas. Plutôt, ils disent qu'ils veulent seulement un peu plus de temps pour tout mettre en place.
    C'est une très mauvaise idée. Ce ne sera jamais une bonne idée, et ils auraient dû voter pour le projet de loi d'initiative parlementaire conservateur qui l'aurait écartée pour de bon lorsqu'ils en ont eu l'occasion. Néanmoins, nous sommes prêts, après les prochaines élections, à adopter le projet de loi requis pour faire en sorte que cette idée horrible ne se concrétise jamais au Canada.

[Français]

    Monsieur le Président, en tout respect, cette question démontre que les conservateurs ne sont justement pas là pour écouter les Canadiens et les Canadiennes.
    Je pense que c'est normal que nos lois s'adaptent aux besoins des Canadiens et des Canadiens. On le voit particulièrement au Québec, où on est même prêt à ouvrir le droit aux directives anticipées. L'aide médicale à mourir, depuis l'entrée en vigueur de la première mouture de la loi en 2016, a fait beaucoup de chemin, autant sur le plan législatif que dans l'opinion de toute la population.
    Alors, au contraire, nous démontrons que nous sommes capables de nous adapter, que nous écoutons les opinions et les commentaires de tout un chacun et que nous nous assurons d'en tenir compte tout en protégeant ceux qui ont plus de besoins.
(2115)
    Monsieur le Président, j'ai deux questions pour la députée de Sherbrooke.
    Premièrement, sa ministre a reconnu que le plan d'action interministériel du Québec pour 2022-2026 était excellent. On a vu que plusieurs personnes ici disaient qu'il fallait améliorer les services. Qu'est-ce qu'elle attend pour transférer l'argent au Québec?
    Deuxièmement, avec les interventions des collègues conservateurs, se rend-elle compte qu'en reportant la décision jusqu'en 2027, les libéraux renvoient la balle à un éventuel gouvernement conservateur qui va mettre fin à tout espoir des gens qui souffrent de troubles mentaux de pouvoir être soulagés?
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses deux questions. Je soulignerai aussi son travail exemplaire et toujours très professionnel sur ce sujet. Pour avoir siégé à plusieurs rencontres du Comité spécial mixte sur l'aide médicale à mourir, j'ai moi-même été témoin de la passion qu'il a pour ce sujet.
    En ce qui concerne les transferts en santé mentale, nos investissements sont toujours très présents, avec des montants très intéressants. Nous travaillons toujours avec le Québec pour nous assurer que les sommes arrivent et qu'elles sont utilisées à bon escient.
    En ce qui concerne la deuxième question, je répondrais que je souhaite du plus profond de mon cœur que le prochain gouvernement soit un gouvernement libéral et que nous puissions continuer de faire avancer la mise en œvre du projet de loi C‑62 et de l'aide médicale à mourir, tant pour les directives médicales anticipées que pour les personnes ayant comme seule condition médicale un problème de santé mentale.
    Tout comme lui, je crois qu'au Québec, nous sommes vraiment un pas en avance.
    Monsieur le Président, c'est un sujet qui est passionnant. Je pense que des personnes très raisonnables peuvent avoir des avis différents.
    Ma collègue vient de parler du Québec qui, en effet, a un pas d'avance. Cependant, il faut rappeler qu'en juin 2023, l'Assemblée nationale a voté une loi qui exclut complètement l'aide médicale à mourir pour les personnes qui souffrent uniquement de troubles mentaux, à la suite de témoignages de psychiatres d'un peu partout au Québec. Des psychiatres de l'Université Laval dans ma circonscription m'ont fait part de leur grande réserve à aller de l'avant sur cette question. À mon sens, ce que le gouvernement propose aujourd'hui, c'est d'atermoyer parce que, manifestement, nous ne sommes pas prêts. Il reste à répondre à encore tant de questions par rapport à cette ouverture particulière.
    Sans être contre l'aide médicale à mourir dans son ensemble, j'aimerais savoir ce qu'elle pense de cette concordance entre ce que fait le gouvernement et ce qu'a décidé l'Assemblée nationale du Québec.
    Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour la grande et belle discussion que nous avons eue ensemble, récemment, à ce sujet.
    Je suis d'accord avec lui. D'ailleurs, c'est pour cela que le projet de loi C‑62 est là. C'est un sujet qui a suscité énormément de controverse. Tout comme mes autres collègues, je reçois des lettres de différentes institutions et de regroupements qui démontrent qu'il y a des opinions différentes dans notre société envers les gens qui sont atteints de maladie mentale comme seule condition médicale. Il faut nous assurer que tout est en place, à savoir les normes, les outils et la formation des praticiens, pour que l'admissibilité soit bien évaluée et que les praticiens soient aussi à l'aise quant à l'application de cette mesure.

[Traduction]

    Monsieur le Président, pour beaucoup d'entre nous à la Chambre, il s'agit d'un cas de déjà vu. Il y a à peu près un an, nous étions confrontés exactement à la même question, et le gouvernement fait la même chose et se contente de remettre à plus tard. Bien sûr, il parle de la question d'étendre le suicide assisté afin de le rendre accessible aux personnes atteintes de maladie mentale. Cependant, après avoir décidé que cet élargissement était possible, les libéraux ont légèrement fait marche arrière et ont dit: « Nous devons attendre un an avant de pouvoir vraiment commencer. »
    À l'époque, nous, les conservateurs, avons déclaré au cours du débat qu'une année ne suffirait jamais. Tout d'abord, les libéraux se sont empressés d'accroître l'admissibilité à l'aide médicale à mourir sans examiner soigneusement et minutieusement les craintes qui existaient déjà dans le cadre du programme initial. Il s'est avéré qu'il s'agissait d'une autre promesse creuse et ils ont continué à accroître l'admissibilité au suicide assisté sans se soucier des conséquences. Il est devenu plus évident que jamais qu'ils n'allaient faire aucun effort sérieux pour protéger les Canadiens vulnérables contre tous les préjudices que cette nouvelle décision du gouvernement infligera.
    Un an, c'est vite passé, surtout quand on prend en considération la lenteur de la bureaucratie. Au moins, les libéraux semblent comprendre qu'il était insensé d'agir comme si tout cela pouvait être retardé d'un an et que tout irait bien ensuite. Cette année a passé très vite, et nous sommes de retour au point de départ. Cette fois-ci, ils veulent repousser la date butoir de trois ans au lieu d'un.
    À entendre les libéraux parler de ce nouveau projet de loi, il est évident qu'ils n'ont pas appris la plus importante leçon de leur terrible erreur. Après que le projet de loi dont nous sommes saisis sera adopté, la triste réalité est que la porte que les libéraux ont ouverte il y a quelques années ne sera pas refermée. Ils n'auraient jamais dû l'ouvrir. En fait, ils choisissent de la laisser ouverte malgré tous les signaux d'alarme et le tollé que l'on entend. Ils jouent au même jeu que l'an dernier, avec une grande différence: le plan des libéraux pour offrir l'aide médicale à mourir aux gens dont le seul problème de santé invoqué est un trouble mental entrera en vigueur après les prochaines élections. Ils ont déjà dit que c'est ce qu'ils veulent au bout du compte. Par contre, ils savent aussi qu'ils sont allés beaucoup trop loin et qu'ils ne peuvent plus s'en tirer impunément. Assez, c'est assez.
    Les Canadiens ne sont pas favorables au programme déconnecté de la réalité des libéraux. À cause de cette décision et de tant d’autres, les libéraux auront plus de mal que jamais à remporter une autre élection. Un sondage d’Angus Reid a révélé que trois Canadiens sur dix, soit une proportion inférieure à celle des personnes qui ont voté pour le gouvernement actuel, appuient l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux personnes qui souffrent exclusivement d’une maladie mentale. Donc, une fois de plus, le gouvernement essaiera de camoufler son échec. Pendant qu’il s’y appliquera, les conservateurs se rangeront fièrement du côté du bon sens, au bénéfice des gens ordinaires. Nous annulerons l’épouvantable décision du gouvernement d’élargir l’accès au suicide assisté. En tant qu'opposition officielle, nous avons déjà commencé à y travailler.
    Les conservateurs ont présenté le projet de loi C‑314 afin d'annuler une fois pour toutes la décision des libéraux d'offrir le suicide assisté dans les cas de maladie mentale. Cependant, comme prévu, l'automne dernier, le gouvernement libéral s'est dissocié de son partenaire de coalition en votant contre. Même s'il n'a pas été adopté, le projet de loi a obligé le gouvernement à mettre cartes sur table. Ce jour-là, les libéraux ont montré leur vrai visage et ont exprimé très clairement leur position. Ils ne sont pas prêts à faire ce qu'il faut pour protéger la vie des Canadiens qui ont des problèmes de santé mentale. La véritable raison pour laquelle ils tardent à agir, c'est qu'il s'agit d'une tactique dilatoire pour un gouvernement qui est manifestement en déclin. Malgré cela, nous sommes heureux de voir que le projet de loi préviendra des morts tragiques d'ici à ce qu'un gouvernement conservateur puisse mettre en place des mesures de protection permanentes pour les Canadiens. Nous savons que c'est ce qu'il faut faire. Il y a eu beaucoup de situations troublantes, mais le gouvernement semble avoir choisi de ne pas en tenir compte.
    L'été dernier, une femme de Vancouver s'est rendue à l'hôpital pour obtenir de l'aide. Elle avait des pensées suicidaires et ne se sentait pas en sécurité chez elle. Lors de l'évaluation, un clinicien lui a dit qu'il n'y avait pas assez de lits d'hôpitaux et que le système était débordé. On lui a ensuite demandé si elle avait envisagé l'aide médicale à mourir. Elle s'est sentie choquée et a raconté son histoire. Je lis ses paroles, telles que les a rapportées le Global News: « Peu importe la gravité de votre état, si vous êtes aux prises avec une maladie mentale, un handicap ou une maladie chronique, personne ne devrait porter de jugement sur la valeur de votre vie ni déterminer si elle vaut la peine d’être vécue. » Cette phrase ne devrait pas susciter la controverse, mais le premier ministre et son gouvernement nous ont menés dans un endroit obscur.
    Il y a quelques mois à peine, un grand-père de 52 ans atteint du cancer attendait des traitements de chimiothérapie. On lui a dit qu'il y avait un arriéré et que l'attente était plus longue qu'elle n'aurait dû l'être. Il y a eu des complications, et son état s'est aggravé, puis il a demandé l'aide médicale à mourir, et sa demande a été acceptée. Comme les députés peuvent l'imaginer, la famille a été dévastée par ce qu'elle a vécu.
    Je pense aussi au cas de la caporale Christine Gauthier, une ancienne combattante et athlète paralympique, qui a téléphoné à Anciens Combattants Canada pour faire installer une rampe d'accès chez elle. On lui a aussi conseillé de demander l'aide médicale à mourir. Comment en sommes-nous arrivés au point où une ancienne combattante qui a servi notre pays se fait dire d'envisager de mettre fin à sa vie au lieu de recevoir l'aide qu'elle demande, une mesure aussi simple que l'ajout d'une rampe, pour faciliter sa mobilité? Ce n'est pas la seule fois où une telle chose s'est produite.
(2120)
    Quand une telle chose se produit, il devient plus difficile pour les gens de faire confiance aux services gouvernementaux. Quand une personne vit de telles expériences ou qu'elle en entend parler, cela a pour effet de miner sa confiance, voire de la détruire. Pendant une crise personnelle ou d'un moment de faiblesse, les gens ne peuvent pas s'empêcher de craindre la mort simplement parce qu'ils ont parlé à la mauvaise personne au mauvais moment. C'est un grave problème, et nous devrions nous employer à le régler au lieu d'aggraver la situation.
    Nous nous engageons sur la mauvaise voie, car l'approche du gouvernement dans ce dossier envoie aux gens un message de désespoir: ils devraient abandonner parce que leur vie ne vaut pas la peine d'être vécue. À cet égard, j'espère que tout le monde ici se réjouira de l'histoire de Tyler Dunlop, d'Orillia, en Ontario. À 37 ans, il était sans abri depuis des années. Il avait des pensées suicidaires et il avait planifié de faire une demande d'aide médicale à mourir quand il a reçu de l'aide. Au fil du temps, sa façon de penser a beaucoup changé et il a vécu une transformation spirituelle. Après avoir décidé de ne plus demander l'aide au suicide, il a publié un livre intitulé Therefore Choose Life: My Journey from Hopelessness to Hope. Nous devrions tous être heureux qu'il soit encore parmi nous et qu'il puisse raconter son histoire.
    J'aimerais faire part à la Chambre de certains des propos qu'il tient dans son livre. Il écrit: « Même si je m'étais résigné au fait que je serais mort bientôt, ma conscience — ce qu'on a appelé la voix de Dieu — a commencé à me tourmenter à mesure que je réfléchissais à l'aide médicale à mourir. » Il poursuit ainsi: « À ce moment-là, à mon grand regret, j’ai appris que le Parti libéral avait décidé de reporter d’un an l’élargissement de l’aide médicale à mourir aux Canadiens atteints de maladie mentale, de sorte que mon rendez-vous avec la mort allait devoir attendre, que cela me plaise ou non. »
    Sans le report précédent, il est fort probable que Tyler ne serait plus parmi nous aujourd'hui. Que serait-il arrivé s'il était mort si jeune au lieu de simplement recevoir l'aide dont il avait besoin et la compassion qu'il cherchait? Sa foi chrétienne lui a offert un nouveau but et une nouvelle vie, lui évitant heureusement ainsi de devenir une victime de plus de cette culture de la mort selon laquelle certaines personnes sont jugées plus dignes de vivre que d'autres. Aujourd'hui, il est en mesure de parler de son expérience et de sa conviction que le gouvernement ne pourra jamais remplacer Dieu en tant qu'autorité morale pour déterminer ce qui est bien et ce qui est mal.
    Voilà un récit de survie encourageant, mais d'autres gens ont besoin de notre soutien. Selon Statistique Canada, 4 500 Canadiens se suicident chaque année. Cela fait 12 personnes par jour. Cela signifie que 4 000 personnes ont des problèmes de santé mentale. Quel message allons-nous envoyer à ces personnes à risque?
     Puis, il y a l’épidémie actuelle de dépendance et de toxicomanie, qui peut officiellement être considérée comme un trouble mental. Allons-nous permettre que le suicide assisté prenne de l'ampleur au point qu'une personne toxicomane y serait admissible? Jusqu'où cela va-t-il aller? La vie est précieuse et il faut la défendre, surtout lorsque des Canadiens vulnérables pensent que la mort est la seule issue à la situation dans laquelle ils se trouvent.
     Cependant, nous sommes en train de perdre cela de vue. Les libéraux et leurs alliés idéologiques ont complètement ignoré tous les cris d'alarme lancés par des témoins et des membres de la collectivité devant le Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir. C'est pour cette raison que les conservateurs qui siégeaient au Comité avaient dû publier des rapports dissidents. Malgré les tentatives du groupe d’experts, que le gouvernement avait sélectionné, d’ignorer des témoignages ou d'empêcher des intervenants clés de comparaître, nous travaillons aussi fort que possible pour représenter ces personnes. Les experts et les témoignages ont tiré la sonnette d'alarme les uns après les autres, mais les libéraux sont demeurés fidèles à leur programme, coûte que coûte.
     Les Canadiens ne peuvent pas leur faire confiance pour réparer les pots qu'ils ont cassés, mais ils peuvent compter sur les conservateurs pour continuer à apporter de l'espoir et de l'aide concrète à ceux qui souffrent. C'est ce dont le pays a besoin en ce moment. Le pays a besoin d'espoir.
(2125)
    Monsieur le Président, j’ai écouté le député et je me demande s’il appliquerait à l’aide médicale à mourir, de manière générale, les mêmes principes que ceux qu'il vient d'énoncer au sujet du projet de loi C‑62. J’aimerais savoir s’il serait enclin à appuyer le projet de loi avec cet amendement, même s’il était retiré. Appliquerait-il les mêmes principes dont il a parlé à l’ensemble du projet de loi sur l’aide médicale à mourir?
    Monsieur le Président, il y a quelques points importants qu’il faut d’abord souligner.
    Premièrement, les libéraux n’ont pas effectué l’examen obligatoire prévu dans la mesure législative d’origine. Si cet examen avait eu lieu comme il se doit, je serais prêt à parier que nous n’en serions pas là où nous en sommes aujourd’hui.
    Deuxièmement, je tiens à attirer votre attention sur le fait que le gouvernement, il y a quelques années, avait promis d’investir 4,5 ou peut-être 6 milliards de dollars dans la santé mentale. Je ne me souviens pas du montant exact. Qu’on me corrige si je me trompe, mais à ce que je sache, jusqu’à présent, la somme investie est de zéro dollar. Le gouvernement parle de mesures d’aide pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale, mais la seule mesure d’aide qui existe à ma connaissance en ce moment est la ligne d’assistance 988, instaurée grâce à l’initiative de mon collègue conservateur.
(2130)
    Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire refuse de reconnaître que les politiques du gouvernement en matière d'euthanasie ont été un échec lamentable à bien des égards.
    En fait, non seulement les personnes qui s'inquiètent des répercussions sur les personnes souffrant d'un trouble mental, mais aussi les membres de la communauté des personnes handicapées sont presque unanimes dans leur condamnation de l'approche du gouvernement. Les personnes handicapées ont affirmé que l'approche du gouvernement compromet les services auxquels elles souhaitent avoir accès et, qu'en fait, cette approche a pour effet de dévaloriser la vie et la contribution des personnes en situation de handicap. Le gouvernement libéral et le secrétaire parlementaire doivent le reconnaître.
    Je veux poser une question au député. La plus récente plateforme électorale des conservateurs contient des propositions très précises et constructives sur la question, comme le fait qu'un médecin ne devrait pas soulever le sujet de l'aide médicale à mourir et la proposer à une personne qui ne l'a pas demandée. Si une conversation sur l'euthanasie doit avoir lieu, elle devrait être engagée par le patient. Il ne s'agit pas d'une option que devrait suggérer un médecin, un travailleur de la santé ou un employé d'un ministère, comme celui des Anciens Combattants.
    Le député convient-il qu'une réforme raisonnable consisterait à proposer que ce soit le patient qui entame la conversation, si c'est une conversation qu'il souhaite avoir, et non quelqu'un d'autre qui lui propose la mort?
    Monsieur le Président, je suis entièrement d'accord. Si nous devons avoir un cadre relatif à l'euthanasie, je pense que c'est la seule manière de procéder. Le patient doit être celui qui amorce la conversation.
    Il est tout à fait absurde que plusieurs ministères aient proposé ou offert l'aide médicale à mourir à des gens. Cela témoigne des échecs du gouvernement libéral à tous les niveaux. Il y a des gens qui n'arrivent pas à se loger et qui demandent l'aide médicale à mourir. Des anciens combattants se sont vu offrir l'aide médicale à mourir. Une personne qui n'avait pas accès à des soins de santé pour traiter son cancer — et ce n'est pas comme si le cancer était une maladie rare dans ce pays — a choisi l'aide médicale à mourir, même si elle ne le souhaitait pas nécessairement, parce qu'elle n'était pas en mesure d'obtenir un traitement qui devrait normalement être facilement accessible.
    C'est ridicule. Le nombre d'échecs du gouvernement libéral est absolument ridicule.

[Français]

    Monsieur le Président, certains conservateurs semblent penser que le Code criminel n'existe plus. Nous avons déjà eu ces débats. Lorsque quelqu'un travaille dans le système de la santé et qu'il est malveillant, on n'a qu'à le foutre à la porte et à le dénoncer à la police. Ça existe. Les dispositions sont là.
    J'invite donc mes collègues qui connaissent des cas comme cela, qui sont toujours des cas de figure très particuliers, à dénoncer ces gens à la police. Est-ce qu'on va faire des généralités à ce point où on va empêcher toute personne souffrante dans son droit à l'autodétermination de décider ce qui est son bien dans un aspect aussi intime que celui de sa propre mort?
     Il est bizarre que les conservateurs soient libertariens sur le plan économique, mais que, quand il s'agit de questions morales, il faudrait l'État gère notre vie.

[Traduction]

    Monsieur le Président, j'ose espérer que toute personne qui en pousse une autre vers l'aide médicale à mourir alors qu'elle ne le souhaite pas sera inculpée. Elle devrait l'être parce que c'est absolument ridicule.
    Or, je ne crois pas du tout que cela se produira. Je pense qu'il y a tellement de façons dont les gens peuvent s'en sortir. Ils pourraient simplement prétendre qu'ils amorçaient une conversation, que ce n'était qu'une simple observation ou qu'ils pensaient avoir le consentement de leur interlocuteur pour aborder un tel sujet. Les gens qui proposent l'aide médicale à mourir pourraient se prévaloir d'un si grand nombre de circonstances atténuantes.
    Au bout du compte, cela se résume essentiellement à un point: le gouvernement existe, en partie, pour protéger les Canadiens. Il devrait offrir de l'espoir, et non la mort.

[Français]

    Monsieur le Président, je vais essayer de me remettre. Une chance que j'ai écrit quelques mots, car j’ai un témoignage à faire ce soir. Mon objectif, c’est que ceux qui ne veulent pas m’écouter quittent la Chambre. Ils pourront réécouter mon discours demain matin quand ils seront bien et prêts à entendre ce qu’est la beauté de la vie et ce qui fait partie de la vie.
    Je vais commencer comme suit. Au Québec, on l’a dit à plusieurs reprises ce soir, on est en avance relativement aux questionnements. Cela fait 10 ans que l’Assemblée nationale du Québec a mis en place l’aide médicale à mourir, à la suite du comité Mourir dans la dignité.
    La dignité, c’est le respect de la personne. La dignité, c'est la base de la question dont nous parlons. Ce n’est pas la partisanerie ni une création qui nous dicte qui nous sommes. Nous parlons de la dignité humaine.
    J’espère que mon collègue qui vient de partir et qui avait une autre vision de la question aura l’occasion d’écouter l’interprétation de mon témoignage. C’est une question très sensible. C’est une question sociale lourde de conséquences. C’est pour cela que c’est important. C'est pour cela que le travail que mon collègue a fait et que l’ensemble du comité mixte spécial a fait est important. On s’est rendu compte qu’il manquait un petit bout pour s'assurer qu'il n'y a aucune faille dans le processus qui concerne le choix de notre vie. On parle de mourir, mais c’est notre vie. Qui peut décider de notre vie?
    Il faut comprendre que la société telle qu’elle est aujourd’hui avance beaucoup plus vite que les législateurs. C’est un fait, donc il faut avoir le courage d’agir. On a pris un an de plus. Ce qui m’inquiète, c’est que nous ne pouvons pas savoir où nous serons dans trois ans. Pouvons-nous avoir la garantie d’une promesse? Quand mes citoyens me parlent des promesses, ils me disent qu'ils vont le croire quand ils vont le voir. Maintenant, les gens souffrent. Il faut agir maintenant.
    Je m’adresse à tous mes collègues. On va mettre les choses au clair.
    Je suis désolée de déranger mes collègues, mais ce que je dis est très important. Il est tard et nous allons nous coucher bientôt. Je suis désolée, mais cette question me touche tellement.
    Une voix: C'est une question de respect.
    Mme Marie‑Hélène Gaudreau: Oui, monsieur le Président, c'est une question de dignité et de respect.
    Le rôle de l’État n’est pas de prétendre savoir mieux qu'un individu ce qui est bon pour lui concernant un sujet aussi intime que sa propre mort. On parle de personnes aux prises avec des souffrances intolérables qui durent parfois depuis des décennies. Je ne parle pas d'un mal de tête. Qui sommes-nous pour savoir ce qui est bon pour eux? Si nous pouvions nous entendre au moins là-dessus, nous pourrions probablement faire un bout de chemin. Peut-être que la partisanerie ne prendrait pas le dessus pour une fois.
    Mourir, cela fait partie de la vie. La seule chose qu’un être humain sait quand il naît, c’est qu’il va mourir. Est-ce que je l’apprends à mes collègues? La réponse est non.
    Avoir le droit de choisir pour soi-même, avec ses valeurs et en fonction de ses souffrances, est-ce possible dans un pays ou en tout cas dans un Québec très libre? C’est fondamental. Au Québec, on a un consensus. La société du Québec est prête. Les Québécois ont fait le point sur le sujet depuis des décennies.
(2135)
    Ce n'est pas parce que d'autres provinces veulent intervenir sur cette question qu'il faut brimer les droits des gens qui nous crient sans cesse de les aider.
    Mon père avait dit: « Je ne suis plus capable d'être vivant dans mon cercueil ». Il était atteint de la sclérose latérale amyotrophique. Je pense que les députés connaissent cette maladie, puisqu'un de leur collègue a souffert de cette maladie, il y a quelques années. « Mon corps n'en peut plus. Je veux vivre, mais je ne suis plus capable de tolérer ma souffrance. » C'est ça, la question fondamentale. Il manque encore certains éléments d'expertise. Il manque encore un bout pour s'assurer qu'il n'y aura pas de biais quand on aura fait le choix.
    En 2015, quand mon père a fait la demande d'aide à mourir, il n'était pas admissible. Pourtant, lorsqu'on est atteint de la sclérose latérale amyotrophique, on est condamné à mourir, mais on ne savait pas quand la maladie évoluerait jusqu'au stade terminal. Son processus de mourir était d'une longueur interminable.
    Mon père a toujours dit qu'il faut respecter l'humain tout au long de son parcours. Comment se sent-on quand on voit quelqu'un souffrir? On veut l'aider et l'accompagner, mais quand on sait qu'il n'y a aucune issue, aucun traitement, aucun espoir, que fait-on? Certains diront qu'il faut continuer à souffrir et qu'il faut attendre que la mort arrive. Mon père disait qu'il était vivant dans son cercueil. La maladie de mon père a changé ma vie, parce que j'en ai été témoin pendant 20 ans.
    Je suis d'accord qu'il faut s'occuper du processus. Qu'est-ce qu'il nous reste à faire? Il faudrait encore quelques rencontres. On ne cesse d'entendre cela depuis les derniers jours. J'invite les députés à la Chambre à communiquer avec quelqu'un qui a vécu ce processus de l'intérieur avec un proche. C'est ce que j'ai vécu avec mon père. Il faut surtout éviter de parler à tort et à travers. J'entends souvent des terminologies que je ne répéterai pas. Qui sont-ils pour tenir des propos aussi incroyables?
    Je vais terminer mon discours en disant la chose suivante. Quand on est dans la souffrance insoutenable, que la science ne nous permet pas d'avoir de l'espérance, on doit avoir le choix. C'est une question de solidarité, d'humanité, d'altruisme et de sollicitude. C'est pourquoi, ce soir, compte tenu de tout ce que je viens de dire, je propose l'amendement suivant:
    Que la motion soit modifiée par substitution au mot « que » de ce qui suit: « la Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C‑62, Loi no 2 modifiant la Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir), car aucun article ne tient compte de la demande au gouvernement du Canada, adoptée unanimement par l'Assemblée nationale du Québec, d'apporter une modification au Code criminel pour l'arrimer à la loi québécoise sur les soins de fin de vie en permettant les demandes de consentement anticipées. »
(2140)
    L'amendement est recevable.
    Nous passons aux questions et aux observations.
    Le député de Louis-Hébert a la parole.
(2145)
    Monsieur le Président, je tiens à remercier sincèrement ma collègue de son discours. Je crois que c'est un sujet sur lequel les débats sont particulièrement instructifs pour les députés. Cela fait depuis 2016 que nous traitons de ces questions à la Chambre des communes et ma position a évolué au fil du temps, entre autres sur les demandes anticipées.
    Je pense avoir encore besoin d'étudier la question, mais je conçois que cela puisse être utile dans certains cas. J'ai rencontré des gens pour qui cela aurait été utile. J'ai entendu des histoires très touchantes, même de personnes assez proches, des gens pour qui ce serait utile. Toutefois, en ce qui concerne les troubles mentaux, ma position s'est aussi un peu cristallisée. Beaucoup de psychiatres m'ont dit que cette voie n'était pas nécessairement souhaitable, que c'était trop difficile de juger du caractère irrémédiable d'une maladie mentale.
    Ma collègue a fait mention du consensus au Québec. Oui, il s'en dégage un à l'égard des demandes anticipées. Toutefois, en ce qui concerne les troubles mentaux comme raison unique qui ouvrirait la porte à l'aide médicale à mourir, l'Assemblée nationale du Québec a quand même voté, en juin 2023, le projet de loi no 11 auquel ma collègue faisait référence. Celui-ci vient exclure les troubles mentaux parce qu'il n'y a précisément pas de consensus, entre autres au sein de la communauté médicale. Certains membres de cette communauté m'ont fait part de leurs profondes inquiétudes à l'égard de cette ouverture.
    J'aimerais entendre ma collègue se prononcer à ce sujet.
    Monsieur le Président, en ce qui concerne le fameux vote, je répondrai à mon collègue que c'était 57 %. De plus, il faut faire attention quand on parle de mention visant à exclure les troubles de santé mentale. Nous allons nous éduquer. Demain matin, je vais parler des demandes anticipées.
    Imaginons que je reçoive un diagnostic de la maladie d'Alzheimer et que je choisisse de ne pas faire vivre cela à mes proches. Le jour où je ne serai pas capable de reconnaître mes enfants ou que j'aurai certains comportements parce que je ne me reconnais pas moi-même et que je ne peux pas être consciente de ce que je vis, il y aura une panoplie de spécialistes. Je l'ai vécu avec mon père qui, en outre, n'était aucunement atteint de démence: passer à travers tous les filets de sécurité fait en sorte qu'il y a énormément d'exclusions plutôt que d'acceptations.
    Alors, pour ce qui est de la santé mentale, ce qui nous manque, c'est encore une fois peut-être d'aller gratter un peu plus loin pour s'assurer qu'on aura tous les outils pour rassurer les gens sur le fait que ce ne sera pas une voie de passage pour dire qu'on va faire le ménage de la planète. C'est ce que nous entendons de la part de certains.

[Traduction]

    Monsieur le Président, il y a eu beaucoup de commentaires fondés sur des présomptions à la Chambre au sujet de ce que les gens pensent ou veulent. Je crois qu’il faut dire d’emblée que, selon tous les sondages réalisés que j’ai vus, une grande majorité de nos concitoyens ne sont pas favorables à l’élargissement de l’euthanasie aux personnes dont la santé mentale est la seule condition médicale sous-jacente.
    J’aimerais poser une question à la députée au sujet des directives anticipées. Je pense qu’il y a beaucoup de mésinformation et de confusion autour de la question. La notion de directives anticipées implique que je puisse savoir comment je me sentirai dans l’avenir si j'étais aux prises avec une maladie ou un problème donnés. Garnett Genuis, aujourd’hui, à 37 ans, pourrait savoir avec certitude ce que la version future de lui-même souhaiterait, face à une question de vie ou de mort, s’il était atteint de démence, de la maladie d’Alzheimer ou de quelque chose du genre.
    En réalité, je n’ai aucune idée de ce que cette personne future souhaiterait dans une telle situation. L’idée que quelqu'un aujourd'hui puisse contraindre la personne qu'il sera ultérieurement, dans des circonstances différentes, à mourir dans une situation donnée relève du déni radical d’autonomie. Cela fait de moi-même aujourd’hui le dictateur qui exerce le pouvoir sur moi-même demain. Une position d’autonomie met l’accent sur la légitimité du consentement au moment même, mais pas le déni d’autonomie, par lequel une version antérieure du soi lie le soi futur.
(2150)

[Français]

    Monsieur le Président, quand nous discutons, il faut au moins avoir une base de connaissances sur le plan médical, sur ce qui se passe présentement sur le terrain. Malheureusement, je constate que nous n'avons pas tous la même base. Je ne peux donc pas répondre à mon collègue. Sait-il même ce qu'est une demande anticipée?
    Je les entends parler d'euthanasie. Nous ne parlons pas de la même affaire. Nous devons être sur la même planète pour avoir un dialogue. Je pense qu'il faut que le Comité se penche sur la question. En même temps, considérant que Québec est prêt, il faut qu'on nous laisse faire.
    Les conservateurs n'ont qu'à s'occuper de leurs affaires. Quand ils formeront le gouvernement dans 10 ans, ils diront non. De notre côté, nous serons libres.

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous sommes ici aujourd'hui parce que si le Parlement n'intervient pas immédiatement, l'élargissement de l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème de santé sous-jacent est un trouble mental entrera en vigueur le 17 mars. C'est dans quelques semaines à peine, alors que le Canada est aux prises avec une crise de santé mentale, sans parler de l'isolement des aînés, des drogues empoisonnées qui tuent des gens partout au Canada, des hausses inadéquates de la Sécurité de la vieillesse, et, malheureusement — et c'est à peine croyable —, aucune prestation canadienne pour les personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté. Les filets de sécurité sociale font défaut, mais pourtant, nous parlons d'élargir l'accès à l'aide médicale à mourir.
    Pourquoi l'absence de filets de sécurité sociale est-elle si importante? Les Canadiens méritent de vivre en santé, dans la dignité et hors de la pauvreté.
    Je veux parler de la prestation canadienne pour les personnes handicapées parce que le budget s'en vient. Le prochain budget s'en vient très bientôt, et le NPD et les Canadiens s'attendent à ce que le gouvernement libéral tienne sa promesse faite en 2015 d'instaurer une prestation canadienne pour les personnes handicapées. Trop de personnes handicapées ont besoin de cette prestation pour se sortir de la pauvreté. Je dis « trop de personnes », mais une seule personne est déjà trop.
    J'invite le gouvernement libéral, dont les députés écoutent attentivement le débat, à faire quelque chose et à commencer à envoyer la prestation canadienne pour les personnes handicapées à ceux qui en ont besoin au pays afin que nous puissions discuter sérieusement de l'élargissement de l'aide médicale à mourir. Ce n'est certainement pas le moment d'en parler alors que nous sommes en pleine crise de santé mentale, alors que des drogues empoisonnées tuent des gens et que les personnes handicapées qui vivent dans la pauvreté n'ont aucun filet social ni aucun revenu fiable.
    Je crois également qu'il est honteux que le gouvernement libéral ne tienne pas compte des répercussions de la récupération des prestations pour les personnes handicapées et pour toutes les personnes qui vivent près du seuil de la pauvreté et qui comptent sur les prestations sociales du fédéral auxquelles elles ont droit et qui sont réduites. Je pense en particulier à la Prestation canadienne d'urgence, ou PCU. Nous savons que de nombreux Canadiens ont demandé la Prestation canadienne d'urgence de bonne foi et qu'on la leur a versée. Le gouvernement fédéral a décidé que c'était une bonne idée de cibler les gens qui vivent déjà dans la pauvreté et d'exiger qu'ils remboursent la PCU.
    Il sait que ces gens vivent dans la pauvreté. Il connaît leurs revenus et il continue de s'en prendre à eux. Pendant ce temps, il accorde des passe-droits aux PDG d'entreprises qui empochent des millions de dollars par an en salaires et en primes sans tenir compte du fait qu'ils ont touché des subventions salariales qu'ils ont ensuite distribuées à leurs actionnaires et ajoutées à leurs primes.
    Je pense à Air Canada en particulier. Le gouvernement a décidé de renflouer l'entreprise pendant la pandémie. Air Canada a dit que le gouvernement pouvait reprendre cet argent parce qu'il ne lui permettait pas de le verser à ses dirigeants sous forme de primes. Voilà les choix que fait le gouvernement fédéral. Il donne aux PDG et aux grandes entreprises les passe-droits habituels tout en s'attaquant aux personnes qui vivent dans la pauvreté.
    Aujourd'hui, j'ai lu le rapport de la défenseure fédérale du logement. Les droits de la personne sont violés. Nous parlons d'étendre l'aide médicale à mourir aux personnes dont la maladie mentale est le seul problème de santé invoqué et je blâme fortement les conservateurs dans ce cas-ci, car j'ai participé à un certain nombre d'études sur le logement au comité des ressources humaines. Nous savons que les conservateurs se sont retirés du secteur du logement et que les Canadiens ont été privés de 800 000 logements abordables.
(2155)
    Ce sont les conservateurs qui ont causé le problème qui se manifeste actuellement sur le terrain et que les libéraux n'ont pas réglé lorsqu'ils sont arrivés au pouvoir. La défenseure du logement a déclaré que les droits de la personne des Canadiens sont violés parce qu'ils n'ont pas accès à un logement. C'est odieux. Il est absolument inacceptable que notre pays ne puisse pas utiliser ses ressources naturelles pour veiller à ce que les gens ne vivent pas dans des tentes à côté de l'aéroport de Vancouver. Je blâme à la fois les conservateurs et les libéraux, car ils connaissent la situation et ils savent qu'elle dure depuis des décennies, mais ils n’ont rien fait pour y remédier.
    La défenseure du logement a dit au gouvernement qu'il faut mettre en place un plan national d’intervention dans les campements d'ici le 31 août. Je suis désolée de dire que, compte tenu de la vitesse à laquelle le gouvernement libéral agit, il est très peu probable que cela se produise. J'espère que le gouvernement relèvera le défi lancé par la défenseure fédérale du logement, car personne ne devrait avoir à vivre dans un campement sans avoir accès à de l'eau potable, à l'enlèvement des déchets et à la collecte des ordures. On s'attendrait à ce que le gouvernement fédéral puisse au moins aider les villes avec la collecte des ordures afin que les gens aient accès à des espaces propres lorsqu'ils sont forcés de vivre dans un campement. Je demanderais au premier ministre et à tous les députés libéraux de se promener sur la rue Wellington, dans le marché By ou sur la rue Sparks. Ils croisent ces gens tous les jours, mais ils ne font rien.
    Nous savons que les ministres de la Santé de partout au pays sont préoccupés par le projet de loi à l'étude. Nous savons aussi que le gouvernement libéral se traîne les pieds au sujet de l'assurance-médicaments, qui pourrait aider les gens ayant des problèmes de santé mentale afin qu'ils puissent prendre leurs médicaments comme il se doit et rester en santé. Le gouvernement libéral a décidé de ne pas se presser dans ce dossier. La date limite à ce sujet arrive très bientôt elle aussi.
    Le gouvernement libéral avance à pas de tortue au sujet de ces éléments du filet de sécurité sociale, et les conservateurs sont à blâmer pour l'état actuel du marché immobilier et du logement au Canada. Je tiens à souligner que les conservateurs ont aussi voté contre l'ensemble des initiatives et des programmes sociaux contenus dans le budget et l'énoncé économique de l'automne. Ils prétendent se soucier des gens, mais ils votent contre tout ce qui pourrait les aider, y compris la nourriture. Ils ont décidé qu'ils étaient contre un programme national d'alimentation en milieu scolaire. Comment peut-on s'attendre à tenir des débats sur des sujets qui comptent pour les Canadiens alors qu'on est incapables de faire en sorte que les enfants mangent à leur faim et que les gens aient un endroit où vivre? Voilà ce que les libéraux et les conservateurs ont fait.
    J'aimerais lire ce que m'a écrit une travailleuse de la santé mentale de ma circonscription qui a communiqué avec moi. Elle dit: « J'implore le gouvernement de reconsidérer cet élargissement du régime et de participer à un véritable dialogue avec les professionnels de la santé mentale afin de préserver le bien-être des Canadiens, en particulier des plus vulnérables. »
     J'implore le gouvernement libéral et les conservateurs qui tentent constamment de faire échec aux initiatives et aux programmes sociaux que le NPD s'efforce de faire progresser à la Chambre de prendre cette question au sérieux. Alors que nous tenons ce débat à la Chambre aujourd'hui, nous savons que des drogues toxiques circulent au pays et que des gens se rabattent sur les drogues parce qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter les médicaments dont ils ont besoin, étant donné qu'il n'y a pas de régime national d'assurance-médicaments au Canada.
(2200)
    Monsieur le Président, je suis d'accord avec la députée pour dire que de nombreux Canadiens vivent une période difficile. Je la mets au défi de reconsidérer sa participation à l'entente de soutien sans participation avec le gouvernement. Peut-être devrons-nous convenir de ne pas être d'accord sur la question de savoir si l'augmentation des dépenses fédérales pour la bureaucratie fédérale, qui empiète sur les champs de compétence provinciale, va réellement améliorer la vie, par exemple, des enfants qui vont à l'école le ventre vide.
    J'aimerais poser à la députée une question au sujet du projet de loi à l'étude, le projet de loi C‑62, de l'euthanasie et du suicide facilité au Canada. Étant donné les problèmes dont nous sommes témoins, les pressions que subissent les gens et les propositions d'euthanasie qui leur sont faites, les conservateurs ont proposé, dans leur dernière plateforme électorale, de protéger le droit des patients de choisir de recevoir des soins dans un environnement où l'on n'offre pas l'aide médicale à mourir. Ainsi, en protégeant le droit à la liberté de conscience des médecins et des établissements de soins, nous préserverions le droit des patients de choisir d'aller dans un centre de soins palliatifs ou un établissement de soins de santé où ils savent qu'ils recevront des soins qui valorisent la vie.
    Je pense que de nombreux Canadiens souhaitent une telle chose. Ils ne veulent pas se retrouver dans une situation où des fonctionnaires de la santé ou d'autres ministères les poussent ou les encouragent à choisir une voie qu'ils ne veulent pas emprunter.
    Le NPD appuie-t-il notre proposition qui consiste à protéger le droit des patients de choisir d'être soignés dans un environnement n'offrant pas l'euthanasie ou l'aide médicale à mourir?
    Monsieur le Président, en tant que députée de Port Moody—Coquitlam, d'Anmore et de Belcarra, je peux dire à mes collègues que, chaque jour, quand je me présente à la Chambre, je travaille pour les résidants de ma collectivité. Pas plus tard que la semaine dernière, on a annoncé que ma circonscription toucherait 25 millions de dollars du Fonds pour accélérer la construction de logements. J'ai travaillé conjointement à ce dossier avec le comité des ressources humaines dans le cadre de l'entente de soutien sans participation. Voilà qui ne se serait jamais concrétisé si le NPD n'était pas intervenu et n'avait pas forcé le gouvernement à agir en ce sens.
    Qu'ont fait les conservateurs pour ma circonscription? Lorsque le chef de l’opposition, le chef du Parti conservateur, est venu dans ma circonscription, les conservateurs ont ordonné l'agression physique et le traitement brutal d'un manifestant pacifique. C'était totalement inacceptable que leur chef se présente dans ma circonscription et ordonne à ses gens de malmener cette personne.
    Je n'ai pas aimé cela et...
    Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. C'est une accusation scandaleuse. Je vous exhorte, monsieur le Président, de veiller à ce que l'on maintienne le niveau de respect et de décorum qui devrait régner à la Chambre. Le fait que la députée porte des accusations comme elle vient de le faire rabaisse non seulement le chef de l'opposition, mais n'encourage pas les députés à réussir à…
     J'apprécie le coup de pouce, mais cela relève davantage du débat. Je suggère également à ceux qui sont présents ce soir de s'en tenir au projet de loi à l'étude, le projet de loi C‑62, que nous passerons aux voix très bientôt.
     Nous reprenons les questions et observations. Le député de Louis-Hébert a la parole.

[Français]

    Monsieur le Président, je m'excuse auprès du secrétaire parlementaire. Il a l'habitude, mais je pense qu'il peut en laisser un peu aux autres.
    Je suis entièrement d'accord avec ma collègue à bien des égards. Nous avons besoin de plus de ressources en santé mentale et de plus d'accès aux soins. Il y a plusieurs aspects socioéconomiques qui peuvent exacerber des troubles mentaux.
    En ce qui concerne le projet de loi que nous sommes appelés à étudier aujourd'hui, j'aimerais que nous regardions les choses sous un autre angle. Examinons la genèse de ce qui nous a amenés à inclure les troubles mentaux comme motif d'ouverture à l'aide médicale à mourir. C'est venu d'un amendement du Sénat qui, à mon avis, n'aurait pas dû être accepté par le gouvernement. Je ne veux présumer de rien, mais on entend des murmures qui laissent croire que les sénateurs pourraient être tentés de bloquer ce qui pourrait être la volonté de la Chambre de reporter cela de trois ans, tel que le veut le projet de loi C‑62.
    Quelle est l'opinion de ma collègue quant au rôle que devrait jouer le Sénat face à la Chambre qui est dûment élue pour prendre ses décisions?
(2205)

[Traduction]

    Monsieur le Président, nous devons commencer à penser à l'avenir et à ce qui doit être fait maintenant. Nous disposons de très peu de temps pour sauver les gens de cet élargissement.
    Nous devons mettre en place des programmes sociaux avant d'élargir ce type de programme.

[Français]

    Monsieur le Président, il faut se presser pour sauver des gens. Je veux bien qu'on mette en place des programmes sociaux pour sauver des gens, mais est-ce que la députée tient un discours différent de celui des conservateurs actuellement? Est-ce que, si on investit dans les programmes sociaux, des gens seront tout à coup soulagés après 30 ans de souffrances et de traitements inadéquats?
    L'accessibilité aux services de première ligne est un autre débat. Comment peut-on aujourd'hui clore un débat en prétendant que, si jamais on permettait l'aide médicale à mourir pour les personnes souffrant de troubles mentaux, des gens seraient attaqués dans leur intégrité, alors que c'est volontaire? De plus, il y a des gens qui vont étudier la question et, lorsqu'on est en crise suicidaire ou qu'on est pris en charge pour la première fois, on n'a pas accès à l'aide médicale à mourir.
    Je me suis efforcé à faire comprendre aux gens que ce n'est pas parce qu'on fait une demande qu'on est admissible. En quoi la députée se distingue-t-elle, quand elle tient des propos comme ceux-là, de ce qu'on a entendu des conservateurs aujourd'hui?

[Traduction]

    Monsieur le Président, je vais simplement revenir au commentaire de l'une de mes concitoyennes, qui a dit qu'elle implore le gouvernement de reconsidérer cet élargissement et de participer à un véritable dialogue avec les professionnels de la santé mentale afin de sauvegarder le bien-être des Canadiens, en particulier celui des plus vulnérables.
    Comme aucun autre député ne souhaite prendre la parole, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, je dois interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ toutes les motions nécessaires pour terminer l'étude à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi dont la Chambre est saisie.

[Français]

    Le vote porte sur l'amendement.

[Traduction]

    Si un député présent à la Chambre désire que l'amendement soit adopté ou adopté avec dissidence ou si un député d'un parti reconnu présent à la Chambre désire demander un vote par appel nominal, je l'invite à se lever et à l'indiquer à la présidence.
    Monsieur le Président, nous demandons un vote par appel nominal.
    Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, le vote est reporté au mercredi 14 février, à la fin de la période des questions orales.
    Comme il est 10 h 9, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre s'ajourne à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
    (La séance est levée à 22 h 9.)
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