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TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 18 février 1994

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE TARIF DES DOUANES

    Projet de loi C-5. Motion portant deuxième lecture 1539
    M. Speaker (Lethbridge) 1543
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projetde loi; avec le consentement unanime; renvoià un comité 1547

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE BUDGET

LES LANGUES OFFICIELLES

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1548

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LE RÉGIME D'ACCESSION À LA PROPRIÉTÉ

LE MULTICULTURALISME

MADAME LISA CAMPEAU

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LA BFC EDMONTON

LA BANQUE ROYALE

LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

LE VILLAGE DE DAVIS INLET

LA SOCIÉTÉ CONSUMERS PAPER

LES BUREAUX DE POSTE RURAUX

LES PÊCHES

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

QUESTIONS ORALES

LA RÉSERVE DE KANESATAKE

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1552
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1552

LE BUDGET

LA CONTREBANDE DE SPIRITUEUX

LES DÉPUTÉS

LA PÊCHE À LA MORUE

LES COMITÉS PERMANENTS

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

L'INDUSTRIE AÉROSPATIALE

LES NORMES DE COLLECTE DE SANG

L'ENVIRONNEMENT

    M. Chrétien (Frontenac) 1557
    M. Chrétien (Frontenac) 1557

LA LIBÉRATION CONDITIONNELLE

L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS

    M. O'Brien (London-Middlesex) 1558

LA PÉDOPHILIE

    Mme Dalphond-Guiral 1558

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

LE BARRAGE OLDMAN

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE MINISTRES

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES

    Retrait des avis nos 7, 8 et 9 1560

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'approbation du septième rapport 1560
    Adoption de la motion 1560

PÉTITIONS

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LES LANGUES OFFICIELLES

QUESTIONS AU FEUILLETON

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Retrait des motions 1, 2 et 3 1561

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

    Projet de loi C-7. Motion portant deuxième lecture 1561

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion portant adoption du sixième rapport 1563
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 1564
    Adoption de la motion 1565

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

    Projet de loi C-7. Reprise de l'étude en deuxièmelecture de la motion 1565

1539


CHAMBRE DES COMMUNES

Le vendredi 18 février 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE TARIF DES DOUANES

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)) (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi C-5, Loi modifiant le Tarif des douanes, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureux de présenter à l'examen de la Chambre le projet de loi C-5, Loi modifiant le Tarif des douanes.

Le projet de loi que je présente aujourd'hui vise à reconduire le tarif de préférence général, communément appelé le TPG, pour une période de dix ans. Le TPG est une préférence tarifaire accordée aux pays en développement à l'égard de certains types de produits originaires de ces pays.

Permettez-moi aujourd'hui de vous faire l'historique de ce tarif préférentiel. Au milieu des années 1960, on admettait en général qu'un régime commercial spécial et différent pour les pays en développement était un moyen de favoriser la croissance et le bien-être des pays plus pauvres. En conséquence, on a convenu en 1968, à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, qu'un régime de préférence tarifaire devrait être mis en oeuvre en faveur des pays en développement.

En juin 1971, cette décision a été acceptée par le Canada et d'autres signataires de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Les membres du GATT ont convenu que les pays développés pourraient accorder un régime plus favorable aux produits originaires des pays en développement qu'à des produits semblables originaires de pays développés. On a aussi convenu que le tarif préférentiel serait généralisé, non discriminatoire et non réciproque.

Le Canada a instauré son régime de tarif de préférence général le 1er juillet 1974 pour une période de dix ans. Le TPG a par la suite été reconduit pour une autre période de dix ans, soit jusqu'au 30 juin 1994.

En conséquence, j'aimerais exposer au profit de la Chambre certaines des caractéristiques essentielles du TPG. Le TPG assure une réduction des tarifs pouvant représenter jusqu'à un tiers des taux de la nation la plus favorisée sur certains types de produits originaires de pays en développement.

(1005)

Dans le cas des pays les moins avancés-les PMA-la réduction tarifaire est encore plus importante-ces pays bénéficient d'un régime de franchise de droits sur toutes leurs exportations au Canada admissibles au TPG.

Dans l'ensemble, plus de 180 pays et territoires bénéficient de réductions des tarifs sur une vaste gamme de produits, principalement des produits manufacturés et semi-manufacturés.

Aussi, pour que des articles en particulier soient admissibles au TPG, ils doivent observer les règles d'origine et d'autres règlements. Plus particulièrement, des produits ne seraient admissibles au TPG que si au moins 60 p. 100 du prix de production des produits exportés au Canada est attribuable à un ou plusieurs pays bénéficiant du TPG. Dans le cas des PMA, l'exigence concernant le contenu est de 40 p. 100.

De manière à assurer que les produits bénéficiant du TPG n'aient pas de répercussions néfastes sur des producteurs canadiens, un régime de sauvegarde autorise le ministre des Finances à refuser le régime du TPG à des produits en particulier.

La question à laquelle il nous faut répondre est simple: le TPG devrait-il être reconduit? Le gouvernement est d'avis que le TPG devrait être reconduit. Le projet de loi que j'ai déposé reconduit le TPG pour une période de dix ans, soit jusqu'en 2004. La décision du gouvernement de reconduire le TPG est prise à un moment où les pays les plus industrialisés ont déjà reconduit leurs régimes de préférence tarifaire. Nous faisons de même.

Les raisons qui ont justifié l'instauration du TPG il y a dix ans sont toujours valables. Même si le TPG a favorisé la croissance des économies d'exportation de nombreux pays en développement, nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir. En effet, de nombreux pays en développement ont encore besoin de bénéficier d'un accès préférentiel aux marchés des pays développés afin d'améliorer leur situation économique. En accordant aux pays en développement un accès préférentiel, nous maintenons la tradition canadienne d'aider les pays en développement. De plus, 50 ans de libéralisation des échanges commerciaux nous ont amplement prouvé le principe selon lequel l'expansion des exportations favorise la croissance de l'économie en général.

Le TPG est un moyen particulièrement attrayant d'aide, parce que ses avantages ne se limitent pas aux pays bénéficiaires. En raison de l'abaissement des tarifs sur des produits originaires de pays en développement, les consommateurs canadiens ont accès à des produits importés à des prix concurrentiels. Aussi, les producteurs canadiens, qui comptent sur des produits originaires


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de pays bénéficiant du TPG, profitent aussi de la réduction des tarifs. En conséquence, le TPG a contribué au développement économique des pays bénéficiaires, tout en permettant aux Canadiens d'en profiter.

Parallèlement, pour assurer que les produits originaires de pays bénéficiant du TPG ne causent pas de préjudice aux producteurs canadiens, il existe des mécanismes législatifs et quasi judiciaires pour refuser l'application du TPG à des produits qui nuisent aux producteurs Canadiens. Que la Chambre sache que lorsque des tarifs réduits causent un préjudice à des producteurs canadiens, le gouvernement peut prendre des mesures pour que ces produits ne bénéficient plus de la baisse des tarifs. Par exemple, les chaussures en caoutchouc et les chambres à air en caoutchouc sont, depuis un certain nombre d'années, exclues du régime du TPG aux termes de mesures de sauvegarde temporaires recommandées par le Tribunal du commerce extérieur. Le gouvernement a maintenant décidé de retirer ces produits de façon permanente du régime.

Enfin, ces dernières années, de grands changements sont survenus sur la scène économique et commerciale internationale. De nombreux pays en développement connaissent actuellement une forte croissance économique tandis que d'autres ont besoin d'une aide accrue parce que leur situation économique s'est détériorée. De plus, nous avons récemment ratifié l'ALENA et l'Uruguay Round, au GATT. Ces accords commerciaux entraîneront la réduction des tarifs sur de nombreux produits. Cela a des répercussions majeures sur le TPG.

Je désire souligner en outre à la Chambre que le gouvernement étudie les ramifications de ces changements en vue de modifier la structure tarifaire du TPG d'ici un an environ. L'objectif que vise le gouvernement est de faire du TPG un outil encore meilleur pour aider les pays en développement. Au cours de l'année, il y aura des consultations auprès des parties intéressées sur l'élargissement possible du champ d'application du TPG et sur la réduction des taux du TPG, particulièrement en faveur des pays les moins avancés. Nous étudierons aussi le maintien du TPG pour les pays qui connaissent déjà un fort taux de croissance économique.

(1010)

En terminant, j'exhorte tous les députés à appuyer le projet de loi. Cela démontrera que le Canada continue de contribuer à la croissance économique des pays en développement.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, dans un premier temps, vous me permettrez de saluer mon collègue, l'honorable secrétaire d'État aux Institutions financières internationales, qui a déposé ce projet de loi, le 31 janvier dernier, au nom de l'honorable ministre des Finances. Mis à part le débat sur la motion présentée par le Parti réformiste la semaine dernière, au cours duquel j'ai eu le plaisir de faire une allocution portant, en partie, sur les institutions financières internationales, et ce, juste avant que l'honorable secrétaire d'État prenne lui-même, la parole, c'est la première fois que nous avons, lui et moi, l'occasion et le plaisir de travailler ensemble.

Il sera certainement heureux d'apprendre que nous serons probablement sur la même longueur d'onde en ce qui concerne les grandes lignes du projet de loi qui fait aujourd'hui l'objet des travaux de cette Chambre. J'ose espérer que ces premiers échanges sauront donner lieu à une collaboration fructueuse dans l'avenir.

J'aimerais maintenant aborder directement le projet de loi C-5 qui fait l'objet du présent débat et le replacer dans le contexte général qui lui donne toute sa signification, à savoir l'aide au développement des exportations des pays en développement.

Nous avons devant nous un projet de loi très court. Il ne comporte en fait qu'un seul article qui vise à prolonger de 10 ans, jusqu'au 30 juin 2004, la date d'expiration du tarif de préférence général que le Canada applique aux pays en développement. Le secrétaire d'État a expliqué abondamment, tout à l'heure, les différentes modalités du tarif préférentiel général, alors je n'insisterai pas sur ce point. Pour ce faire, le projet de loi modifie l'article 45 du Tarif des douanes qui mettait fin au tarif de préférence général au 30 juin de cette année.

Le gouvernement, par voie de décret du gouverneur en conseil, se réserve toutefois la possibilité de modifier ultérieurement l'étendue de la prolongation, le taux de droits de douane inscrit au tarif de préférence général, de même que le traitement accordé à certains produits et à certains pays.

Malgré ses apparences modestes et anodines, le projet de loi C-5 est lourd de conséquences quant à son contenu et ses implications pratiques.

J'aimerais faire remarquer que le Canada, comme l'ensemble des pays industrialisés, a instauré, au début des années 1970, des préférences tarifaires pour les pays en développement. Cette mesure visait à favoriser la croissance économique de ces derniers par une intensification du commerce avec le Canada.

Chaque dix ans, nous avons, nous, parlementaires, à nous pencher sur la reconduction, pour une autre décennie, de cette mesure peu coûteuse qui se veut une forme d'aide indirecte aux pays en développement. À cet égard, le Bloc québécois tient à réitérer son appui aux mesures visant à favoriser le développement international.

Les dispositions contenues dans ce projet de loi font en sorte de fournir un débouché intéressant aux produits des pays en développement, brisant par le fait même l'état de dépendance que l'aide traditionnelle au développement tend quelquefois à reproduire. C'est une mesure d'aide positive qui permet à ces pays de développer des produits destinés à l'exportation, favorisant par le fait même leur intégration et leur participation au commerce international, lequel est d'ailleurs appelé à s'intensifier dans l'avenir. C'est pourquoi l'opposition officielle entend accorder son appui à ce projet de loi.

Le Canada s'est bâti une excellente réputation dans le domaine de l'aide au développement, notamment par l'expertise et l'intervention des organisations non gouvernementales vouées au développement international. Nous nous devons de perpétuer


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cette réputation, et je tiens d'ailleurs à profiter de l'occasion pour affirmer qu'un Québec souverain sera animé des mêmes préoccupations et du même souci d'équité internationale.

Nous avons tous entendu, à un moment ou à un autre, ces quantités affolantes de statistiques démontrant crûment le caractère très inégal non seulement des différents niveaux de développement économique, mais également du niveau des ressources de base assurant une qualité de vie minimale dans plusieurs pays du monde. Plus d'un milliard d'individus, soit le cinquième de la population du globe, gagnent moins d'un dollar américain par jour, soit le niveau salarial qu'on pouvait retrouver en Europe et aux États-Unis à la fin du XVIIIe siècle. La décennie 1980 a vu les revenus per capita des pays en développement d'Amérique latine et d'Afrique subsaharienne décliner en termes réels.

Cependant, tout n'est pas gris en tous points. Certains indices nous permettent de penser que les programmes de développement peuvent donner lieu à des résultats positifs sensibles.

(1015)

Les revenus moyens des pays en développement, par exemple, ont doublé durant les trois dernières décennies, ce qui constitue un rythme de croissance plus rapide que celui qu'a connu la Grande-Bretagne durant la révolution industrielle, plus rapide que celui des États-Unis au XIXe siècle ou même que du Japon de l'entre-deux-guerres. La Turquie, par exemple, a doublé son revenu per capita en 20 ans, de 1957 à 1977; le Brésil, en 18 ans, de 1961 à 1979; la Corée du Sud, en 11 ans, de 1966 à 1977; et la Chine, en 10 ans, de 1977 à 1987.

La mortalité infantile a diminué de moitié; l'espérance de vie s'est accrue en moyenne d'une décennie. Un enfant né aujourd'hui à Shanghai a une chance moins grande de mourir avant la première année, pourra jouir d'une espérance de vie plus longue, et aura plus de chance d'apprendre à lire qu'un enfant né à New York.

En dépit de ces quelques chiffres pleins d'espoir, il demeure que ces différences majeures et ces inégalités inacceptables continuent de se perpétuer et, dans certains cas, de se creuser davantage. Il est donc nécessaire de poursuivre nos efforts en vue de favoriser le développement de ces pays qui ne bénéficient malheureusement pas des conditions favorables qui prévalent ici.

Évidemment, les recettes miracles devant favoriser le développement des pays du tiers monde abondent et sont légion.

On n'a qu'à penser aux mesures draconiennes préconisées par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, notamment en imposant des changements structuraux majeurs aux politiques macro-économiques de ces pays, ce qui entraîne souvent une aggravation des problèmes sociaux déjà très aigus.

Certains experts mettront plutôt l'emphase sur l'accumulation et la croissance de l'épargne locale; d'autres favoriseront l'implication massive de l'État en faveur de certains secteurs de l'économie.

D'autres encore préconiseront la fermeture complète ou partielle du pays pour d'abord assurer une croissance économique de l'intérieur.

Pour d'autres, toutefois, l'ouverture des économies des pays en développement sur le monde constitue, à terme, la meilleure garantie de leur développement économique. L'abolition ou la réduction des barrières tarifaires et non tarifaires, de même que la mise en place de mesures actives destinées à promouvoir les exportations constitueraient donc quelques-unes des clés du développement.

L'adoption de telles mesures ne peut que permettre à ces pays de ne pas assister en spectateurs impuissants à ce formidable phénomène de la globalisation des marchés. De notre côté, il nous faut réaliser que nous avons tout à gagner collectivement de voir ces pays se tirer de leur état de dépendance et de les voir prendre part et contribuer activement au développement de ces échanges commerciaux en croissance.

Je crois donc qu'une des façons d'aider au développement de ces pays est d'ouvrir nos propres marchés à leurs produits et services. C'est pourquoi le projet de loi C-5 me semble constituer une contribution valable en faveur des pays en développement.

Plusieurs de ces pays ont déjà fait le choix stratégique de promouvoir la croissance de leurs exportations en vue de favoriser leur développement économique. Dans la plupart des cas, les résultats ont été spectaculaires.

Ce choix stratégique en faveur des exportations a été fait dans les années 1960 pour la Corée du Sud et Taïwan, et dans les années 1970 pour la Thaïlande. Ces pays peuvent très bien illustrer le succès de cette stratégie.

Ces trois pays partageaient au départ les mêmes caractéristiques socio-économiques qu'on observe généralement chez plusieurs autres pays en développement, à savoir, une population importante et en croissance; un faible niveau d'investissement; une structure économique principalement agricole.

En moins de trois décennies, ils ont connu un taux de croissance économique absolument fulgurant, tout comme plusieurs autres pays de la région.

Une explication évidente pour ce succès phénoménal repose, entre autres, sur deux choix stratégiques: l'un dont je viens de faire état, la mise sur pied de politiques de promotion des exportations et la priorité donnée à la formation de la main-d'oeuvre.

À cet égard, nous sommes particulièrement sensibles, au Québec, à comprendre l'importance que revêt la mise en place d'une politique de la main-d'oeuvre qui soit cohérente, souple, structurée et efficace.

Au début des années 1960 et jusqu'au début des années 1970, la Corée du Sud et Taïwan se sont toutes deux lancées dans une stratégie agressive de croissance économique basée sur la promotion des exportations. Une foule d'incitatifs ont été rendus accessibles aux entreprises dans des secteurs que l'on qualifie aujourd'hui de secteurs mous, à savoir le textile, le vêtement et les souliers, par exemple.

(1020)

Après la période difficile des années 1970, ces deux pays ont émergé comme champions des taux de croissance, avec près de 10 p. 100 par année, de 1985 à 1991. Ils ont su également diversifier leur production vers des produits à plus grande valeur ajoutée.


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On peut également établir un parallèle intéressant avec certains pays de l'Amérique latine. Avant les années 1980 pourtant, les pays d'Amérique latine pouvaient difficilement passer pour des champions du libre-échange, bien au contraire.

La politique commerciale de la plupart de ces pays visait la protection de leur marché face à la compétition étrangère, plutôt que l'élaboration des politiques qui auraient permis aux entreprises de ces pays d'exploiter sur le marché étranger leurs avantages comparatifs.

Mais la crise de la dette de plusieurs pays du tiers monde, dont plusieurs pays de l'Amérique latine, comme le Brésil, le Mexique ou le Pérou, par exemple, au début des années 1970, a contraint ces pays, avec la bénédiction active du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, à élaborer des politiques d'ouverture sur le monde, notamment par des baisses des barrières tarifaires, des permis et des quotas d'importation, et par des mesures de promotion des exportations.

Durant les années 1980, plusieurs pays d'Amérique latine se sont débarrassés des régimes dictatoriaux, qui ont été remplacés par des gouvernements démocratiquement élus. Contre toute attente, ces gouvernements ont tenu et, dans la plupart des cas, tiennent toujours.

Aujourd'hui, plusieurs pays de cette région, le Mexique et le Chili en tête, semblent prédisposés à une croissance économique des plus appréciables. L'intérêt que recueille l'adhésion d'autres pays d'Amérique latine à l'ALENA n'a donc rien de surprenant.

On doit cependant noter que le système commercial international comporte toujours des failles qui nuisent à la croissance économique des pays en développement.

Selon l'OCDE, certains secteurs qui faisaient la force de plusieurs pays en développement après la Deuxième Guerre mondiale, tels l'agriculture et le textile, sont très rapidement devenus la cible de mesures protectionnistes de la part des pays industrialisés.

De cette façon, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, les politiques d'aide au développement mises de l'avant par les pays industrialisés se trouvent souvent annulées en bonne partie par les mesures commerciales protectionnistes qu'ils ont eux-mêmes érigées.

Sous le régime du GATT, l'agriculture était de facto exclue des règles habituelles, notamment en permettant aux pays industrialisés de protéger leur marché en imposant des tarifs et des quotas.

Les pays industrialisés ne se sont pas privés non plus de subventionner leurs surplus agricoles à travers le monde, coupant ainsi l'herbe sous le pied des pays en développement, et rendant souvent non compétitive leur propre production domestique. Vous me permettrez, à cet égard, de citer un rapport de l'OCDE publié l'année dernière: «Les exportations de produits agricoles d'Amérique latine ont également été touchées par les quantités élevées des productions agricoles des pays de l'OCDE, ainsi que leur degré de plus en plus élevé de subventions. Dans certains cas, les exportations agricoles des pays en développement ont été chassées de marchés fructueux par les exportations hautement subventionnées des pays industrialisés.»

Qui plus est, les régimes de tarification des pays industrialisés pénalisent les importations de produits transformés en favorisant les matières premières et autres produits non transformés. Les pays en développement sont ainsi désavantagés s'ils veulent diversifier leur économie et se lancer dans la production de biens à valeur ajoutée.

Le succès des récentes négociations du GATT devrait rendre la vie plus facile aux exportateurs des pays du tiers monde, notamment en ce qui a trait aux produits agricoles, aux vêtements et textiles. L'abolition des barrières tarifaires sur un nombre plus important de produits tropicaux, tout comme le démantèlement en dix ans de l'Accord multifibres qui sera inclus dans les règles du GATT, devraient également donner un bon coup de pouce aux pays du tiers monde.

Depuis plus d'une dizaine d'années, toutefois, nous assistons malheureusement à une recrudescence du protectionnisme commercial sous des formes nouvelles, telles que des ententes de partage ordonné des marchés, des restrictions volontaires des exportations et autres mesures de contingentement. Ces mesures protectionnistes touchent aujourd'hui les automobiles, les semi-conducteurs, l'acier et autres industries ayant réclamé avec succès des mesures de protection.

Ces mesures s'ajoutent ainsi à celles touchant le textile, les vêtements et les produits agricoles. Les mesures anti-dumping, les mesures dites temporaires de sauvegarde et les accusations de pratiques commerciales déloyales fusent aujourd'hui de toutes parts.

(1025)

Le Canada, nous le savons, n'est certainement pas à l'abri de ce retour insidieux et menaçant au protectionnisme, particulièrement de la part de son principal partenaire commercial, les États-Unis, vers qui près de 80 p. 100 de ses exportations sont dirigées. Nos problèmes commerciaux avec les États-Unis, particulièrement dans les dossiers de la bière, de l'acier, du magnésium, du bois d'oeuvre et de l'agriculture nous rappellent continuellement que les bénéfices du libre-échange sont fragiles, et que nous devons faire preuve d'une plus grande vigilance à l'égard des pratiques commerciales de nos partenaires commerciaux.

Les recettes du développement économique peuvent varier selon les pays. Les stratégies de promotion des exportations ne constituent pas à elles seules une panacée. Quoique importantes, il ne fait aucun doute que d'autres mesures doivent également être envisagées.

Le bonheur des peuples ne passe pas nécessairement par l'accroissement du pouvoir d'achat des individus. Il faut permettre aux sociétés de se développer à leur rythme, sans les forcer à entrer dans le moule du développement économique selon les lois du marché. C'est une décision que ces sociétés doivent prendre elles-mêmes. Il est néanmoins important et primordial


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de contribuer à la croissance économique de ces pays en leur assurant un accès privilégié à nos marchés.

La promotion de la croissance des exportations des pays en développement vers les pays industrialisés est donc un objectif des plus louables. Le Bloc québécois n'en disconvient évidemment pas. Vous me permettrez néanmoins de faire état d'un certain nombre de préoccupations que suscite de ce côté-ci de la Chambre l'application concrète du tarif de préférence général.

On doit tout d'abord constater que les pays qui actuellement bénéficient le plus du tarif de préférence général sont des pays nouvellement industrialisés, principalement les nouvelles puissances économiques de l'Asie du Sud-Est. Ce ne sont plus, à proprement parler des «pays du tiers monde» ou des pays en développement.

De plus, la Chine et l'Indonésie, par exemple, qui bénéficient respectivement de 38 p. 100 et de 3 p. 100 des tarifs préférentiels canadiens, sont régulièrement décriés pour les violations répétées des droits de la personne dans chacun de ces pays.

L'objectif du tarif de préférence général étant d'aider à la croisance des véritables pays en développement, sans pour autant nuire à l'économie canadienne, nous serions en droit d'exiger une étude plus approfondie des produits et des pays bénéficiant du tarif de préférence général.

Ce qui nous amène à nous interroger sur la pertinence du maintien du tarif de préférence général à des pays en développement qui seraient maintenant devenus des pays nouvellement industrialisés. Conséquemment, il nous faut déterminer si ces pays répondent toujours aux critères qui nous permettent de définir ce qu'est un pays en développement, ce qui peut s'avérer, on n'en disconvient pas, très complexe.

Dans les cas qui nous préoccupent actuellement, il s'agirait de se demander si des pays nouvellement industrialisés tels Hong Kong, la Corée du Sud, Taïwan et Singapour devraient toujours bénéficier d'un traitement de faveur. Si tous les pays industrialisés décidaient de retirer à ces pays les avantages tarifaires généralement accordés aux pays en développement, cela pourrait avoir une incidence sur le traitement qui leur sont accordés par des institutions financières internationales telles que le Fonds monétaire international, la Banque mondiale ou les banques régionales de développement.

Il faut savoir que les États-Unis n'accordent déjà plus de traitement tarifaire préférentiel à la Corée du Sud et à Hong Kong. Le Japon, le Canada et les pays de la Communauté européenne, quant à eux, n'ont pas encore pris de décision à ce sujet.

Le gouvernement fédéral a déjà annoncé qu'il entendait étudier dans quelle mesure il est souhaitable de continuer à appliquer le tarif de préférence général aux pays qui ont atteint un haut niveau de développement économique. Une telle étude s'avère en effet incontournable en vue de la réunion de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, qui doit avoir lieu en 1995 à propos justement du tarif de préférence général. Les négociations de l'Uruguay Round étant maintenant terminées, le gouvernement a également fait connaître son intention de réviser, probablement à la baisse, la portée du tarif de préférence général.

Par ailleurs, nous savons pertinemment que le gouvernement entend consulter les fabricants et manufacturiers canadiens avant de prendre quelque décision que ce soit au sujet du tarif de préférence général, ce à quoi nous ne pouvons que souscrire avec enthousiasme.

Il va sans dire, toutefois, que toute modification de la portée du tarif de préférence général à l'égard de quelque produit ou de quelque pays que ce soit pourrait avoir des incidences et des conséquences politiques assez considérables.

(1030)

Le retrait du tarif de préférence général à la Corée du Sud ou à tout autre pays nouvellement industrialisé pourrait par exemple conduire à une détérioration de nos relations commerciales avec ces pays, ceux-ci pouvant ne pas apprécier la démarche du Canada.

Le cas de la Chine, qui bénéficie de près de 40 p. 100 des tarifs préférentiels canadiens, pourrait se poser également. À l'instar des États-Unis, qui envisagent de retirer à la Chine le statut de nation la plus favorisée, principalement en raison des violations répétées des droits de la personne dans ce pays, le Canada pourrait éventuellement démontrer l'importance qu'il accorde aux droits de la personne en envisageant lui aussi de retirer le tarif de préférence général à tous les pays qui briment effrontément ces droits.

Dans la mesure où le gouvernement a maintes fois manifesté son intention d'associer le Parlement à la politique étrangère du Canada, et compte tenu du fait que toute modification de la portée du tarif de préférence général risque d'avoir des incidences politiques, le gouvernement accepterait-il de considérer la possibilité que les parlementaires puissent être consultés, au même titre que les fabricants et manufacturiers canadiens, avant de modifier quelque composante que ce soit du tarif de préférence général, quitte à modifier le présent projet de loi en ce sens?

Une telle consultation pourrait se faire sous un forme souple et efficace, par le biais du Comité permanent des finances, ou par le biais du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Quoi qu'il en soit, j'attends avec impatience la réponse que le gouvernement pourrait donner à cette suggestion que je formule plutôt sous la forme d'une requête, compte tenu de l'importance que ce gouvernement prétend accorder à l'opinion et au jugement des parlementaires.

Je termine en réitérant notre appui total aux principes fondamentaux qui sous-tendent la reconduction du tarif de préférence général à l'intention des pays dits en développement. Du même souffle toutefois, je réitère également mes préoccupations et mes interrogations à l'égard de l'application de ce tarif aux pays nouvellement industrialisés, de même qu'aux pays en développement qui transgressent ouvertement les droits de la personne.

J'ose espérer que le gouvernement donnera suite à notre demande d'une consultation préalable des parlementaires avant toute modification de la structure du tarif de préférence général.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer à ce débat. Tout


1544

d'abord, je veux remercier le secrétaire parlementaire d'avoir si bien décrit non seulement les avantages du projet de loi C-5, mais aussi certaines préoccupations qui peuvent subsister à cet égard.

Je veux également remercier le ministre des Finances pour la collaboration de son personnel qui a fourni à notre caucus toute l'information nécessaire concernant ce projet de loi et d'autres projets de loi aussi. Ces gens ont répondu très rapidement à nos questions et nous ont bien renseignés, de façon ouverte, sur le pour et le contre de cette mesure législative afin que nous puissions porter un jugement en tant que caucus.

Comme nous le savons, le projet de loi C-5 vise à proroger du 30 juin 1994 au 30 juin 2004 la date d'expiration du tarif de préférence général pour les pays en développement. C'est un engagement important que nous prenons en tant que Canadiens pour favoriser le développement industriel et social d'autres pays, pour essayer de réduire l'écart qui existe entre leur base économique et la nôtre. Sur le plan de nos responsabilités envers le reste du monde, c'est une initiative fort louable que nous prenons en tant que Canadiens.

Après avoir examiné le projet de loi et écouté les explications qui nous ont été données, le Parti réformiste a décidé d'appuyer cette mesure. Nous croyons que le principe qui sous-tend ce projet de loi est valable et que c'est une obligation dont le Canada doit s'acquitter.

Le tarif de préférence général, ou TPG, présente certaines qualités que nous estimons utile de signaler à la Chambre à ce moment-ci. Premièrement, le TPG réduit les obstacles à l'importation, un principe qu'appuie le Parti réformiste. Deuxièmement, les droits moins élevés stimuleront la croissance économique dans les pays en développement. Troisièmement, les critères d'admissibilité au TPG sont très vastes; plus de 180 pays et territoires peuvent bénéficier de ces droits moins élevés, ce qui est certainement un avantage.

Une autre raison pour laquelle nous appuyons cette mesure, c'est que, même si, dans un sens, les droits moins élevés font perdre quelque 156 millions de dollars au Canada, nous bénéficions aussi du TPG en tant que Canadiens parce qu'il nous permet d'acheter des biens de consommation à prix plus bas dans notre pays. De ce point de vue, il s'agit certainement d'un avantage direct. Nous avons par contre certaines inquiétudes.

(1035)

Premièrement, alors que les entreprises canadiennes peuvent bénéficier de coûts d'intrants moins élevés en vertu de cette mesure, nous nous interrogeons sur les économies qui pourront réellement être transférées aux consommateurs.

Nous serions négligents si nous intervenions sur les marchés et si nous préconisions l'adoption de dispositions législatives à cet égard. Je crois qu'il n'y a certainement pas lieu d'avoir une surveillance accrue de la part du gouvernement et l'affectation d'un plus grand nombre de fonctionnaires à cette tâche. Cela coûterait plus cher aux contribuables.

Nous devons faire confiance aux forces du marché. Elles régleront le problème, peut-être pas dans tous les cas, mais si nous les laissons fonctionner comme il se doit, elles seront certainement efficaces.

Deuxièmement, ce régime aidera les pays en développement, mais nous devrions aussi saisir l'occasion qui nous est ainsi offerte pour encourager ces pays à se donner des gouvernements responsables. Nous voulons certes donner aux pays défavorisés la chance d'améliorer leur situation économique.

Cependant, à titre de parlementaires, nous voulons sûrement tous que, dans ces pays, les droits de la personne soient reconnus comme au Canada. Cela fait partie de nos obligations et du message que nous voudrions lancer indirectement, par l'entremise de ce projet de loi, aux pays qui bénéficient de la compassion des Canadiens.

Troisièmement, nous devons aussi nous assurer que cet accord ne prévoit pas de remboursements aux pays en développement. Le gouvernement devrait s'assurer que les pays ne bénéficient que d'une réduction des droits de douane, et je suis certain qu'il exercera une surveillance à ce chapitre.

Quatrièmement, le gouvernement doit empêcher tout dumping d'importations à bon marché dans d'autres pays, ce qui pourrait nuire à nos relations avec nos partenaires commerciaux. Ainsi, un produit ne devrait pas être importé au Canada en vertu de droits de douane réduits et ensuite faire vraisemblablement l'objet de dumping aux États-Unis, ce qui aurait des répercussions négatives sur le marché américain.

Bref, je le répète, nous appuyons le projet de loi et nous encourageons le gouvernement à le mettre rapidement en application. Comme on nous l'a expliqué lors de séances d'information, nous savons que s'il faut apporter des changements rapidement, il sera possible de modifier les règlements en vigueur de manière à protéger toute industrie susceptible de subir des préjudices du fait de ces droits de douane.

Les industries ou entreprises peuvent en appeler des décisions prises et présenter des observations. Si, après avoir pris connaissance de leurs observations, le gouvernement estime qu'elles subissent effectivement des préjudices, il pourra intervenir rapidement en modifiant les règlements en cause. À mon avis, c'est là un excellent ajout au projet de loi.

Si nous tenons compte de ces considérations, je crois que nous protégerons les intérêts commerciaux du Canada, ce que nous nous efforçons certainement de faire. J'encourage donc le Parlement à appuyer ce projet de loi et à le mettre en application le plus tôt possible.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, mon intervention portera sur cinq éléments et pour aider mes collègues à suivre un peu, je leur donne le plan. En introduction, on verra le mal-développement et l'écart entre les riches et les pauvres. J'introduirai ensuite le projet de loi C-105 dans son contexte. Je parlerai de l'aide publique canadienne au développement. Je rappelerai la position du Bloc qui a été énoncée par


1545

mon collègue et, enfin, j'énoncerai un certain nombre de réserves.

Sur 5 milliards d'habitants sur la planète, 4 milliards vivent dans des pays en développement, dont 1 milliard dans un dénuement complet.

D'après les Nations Unies, le fossé entre pays riches et pays pauvres a doublé depuis les 30 dernières années. Les taux de croissance économique pour les pays en voie de développement n'ont cessé de chuter, plus particulièrement en Afrique et en Amérique latine. Selon le rapport de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement, le rapport Brundtland, et je cite: «La détérioration des termes des échanges, le poids croissant du service de la dette, la stagnation des courants d'aide et un protectionnisme accru dans les pays développés à économie de marché sont à l'origine de graves problèmes en matière de paiements à l'étranger. Le coût accru des emprunts à l'extérieur, coïncidant avec une période d'exportation languissante, a également contribué à plonger de nombreux pays en développement dans une crise d'endettement. La croissance a été fortement réduite et nombre d'objectifs sociaux ont dû être abandonnés, y compris des objectifs ayant trait à l'emploi, à la santé, à l'éducation, à l'environnement et aux établissements humains.»

(1040)

Pour les responsables du Programme des Nations Unies pour le développement, le protectionnisme des pays industrialisés priverait le Sud de 500 milliards de dollars par année en revenus d'exportation, soit dix fois plus que l'aide au développement qu'il reçoit annuellement, alors même que les programmes d'ajustement structurel qui sont imposés aux pays en développement les obligent, eux, à abandonner toute protection douannière, tarifaire ou non.

Aucun développement durable et soutenable ne peut donc être envisagé sans des réformes et restructurations équitables des systèmes financiers, commerciaux et politiques internationaux. L'abaissement du protectionnisme au niveau commercial des pays industrialisés face aux pays en développement constituerait une des premières étapes pour vraiment entreprendre cette réforme économique.

Et dernièrement, on a entendu le président de l'assemblée générale du GATT mettre en garde les pays industrialisés contre une nouvelle introduction du protectionnisme, se basant sur la question des droits humains et le respect de l'environnement.

Dans cet esprit, au cours des années 1970, les pays industrialisés instaurèrent des mesures favorisant l'abaissement des droits de douanes pour les pays en développement en créant le tarif de préférence général. En 1974, le Canada instituait ce tarif de préférence général par la Loi sur le tarif des douanes. Ce tarif est prolongé depuis lors pour des périodes de dix ans.

Cette mesure a pour objet de soutenir la croissance économique des pays en développement en favorisant les exportations de ces pays vers le Canada par l'abaissement des droits de douanes.

Le tarif de préférence général est positif à bien d'autres égards. D'abord, le TPG est un programme à caractère unilatéral, et le Canada reste toujours libre de modifier les préférences liées au tarif sans rompre ses engagements aux termes du GATT.

Le TPG canadien serait l'un des meilleurs au monde, puisqu'il ne serait pas utilisé comme moyen de pression politique ou économique sur les pays en développement, contrairement à la pratique d'autres pays.

Le Canada s'est en outre assuré que les importations bénéficiant du TPG ne causent aucun préjudice aux entreprises canadiennes. C'est pourquoi le TPG ne touche pas l'ensemble des produits importés des pays en développement, mais bien ceux qui ne nuisent pas à la compétitivité des compagnies canadiennes. Il existe pour ce faire des mesures de sauvegarde pour protéger les entreprises canadiennes qui seraient touchées par l'importation de produits bénéficiant du TPG. À l'heure actuelle, à titre d'exemple, deux de ces mesures de sauvegarde sont en place, soit sur les chambres à air en caoutchouc et les semelles de caoutchouc.

Rappelons que les importations bénéficiant du TPG rapportaient, en 1992, près de 90 millions de dollars, soit 5 p. 100 des revenus perçus par les douanes canadiennes.

Le projet de loi C-5 a pour objectif de prolonger pour une autre période de dix ans le tarif général de préférence. Le Bloc québécois donne son appui à ce projet de loi avec certaines réserves dont on parlera plus loin.

L'effort canadien en matière d'aide au développement s'est essoufflé depuis quelques années. La mauvaise conjoncture économique subie par le Canada a très souvent servi d'explication ou d'excuse pour cet état de fait. Les coupures budgétaires dans le domaine de l'aide publique au développement a fait chuter la contribution au programme d'aide à 0,4 p. 100 du PIB canadien.

(1045)

Pour mettre les choses en perspective, rappelons que la Norvège consacre 1,16 p. 100 de son PIB à l'aide internationale; le Danemark et la Suède, 1,03 p. 100; les Pays-Bas, 0,86 p. 100; la France, 0,63 p. 100 et la Finlande, 0,62. C'est donc dire que le Canada, bien que généreux en chiffres absolus, ne se retrouve pas dans le peloton de tête et il est assez loin de la norme de 0,7 p. 100 reconnue à l'échelle internationale.

En réalité, les années 1990 ont marqué le quasi-abandon de toute mesure qui aurait permis d'atteindre ce niveau. Plus récemment, le budget d'avril 1993 a limité l'augmentation de l'enveloppe de l'aide internationale canadienne à 1,5 p. 100 à compter de 1994-1995.

Une grande partie de l'aide canadienne au développement, rappelons-le, prend la forme d'aide bilatérale et couvre plus de 150 pays. Les projets réalisés font l'objet d'ententes entre le Canada et chaque gouvernement bénéficiaire. Cependant, il faut savoir que le Canada recherche aussi ces intérêts, car 80 p. 100 des biens et services destinés à cette aide bilatérale provient du Canada. L'aide liée, car c'est de cela qu'il s'agit, a pour effet de réduire considérablement la valeur de l'assistance offerte aux pays bénéficiaires.

À toutes fins utiles, l'aide bilatérale représente une forme déguisée de subvention aux exportateurs canadiens. Il y a là le danger que des intérêts mercantiles ne viennent fausser les priorités des programmes d'aide en accordant une importance trop grande aux intérêts commerciaux.


1546

Rappelons que l'aide bilatérale en 1993-1994 est répartie ainsi: 45 p. 100 en Afrique et au Moyen-Orient, 37 p. 100 en Asie et 18 p. 100 en Amérique latine, et cette aide bilatérale représente 44 p. 100 du programme total de l'aide canadienne aux pays en développement.

Malgré certaines lacunes, les tarifs préférentiels douaniers constituent un levier important de l'aide canadienne pour le développement. Dans une économie qui se mondialise, le commerce extérieur, et c'est particulièrement vrai pour le Canada, joue un rôle important dans la création et la conservation d'emplois ici.

Précisément parce que le Canada est libre de classer les pays en développement sur une échelle allant des plus pauvres aux plus développés, le TPG pourrait constituer un outil flexible pour diriger l'aide vers les plus démunis de la planète.

L'objectif de promouvoir la croissance des exportations des pays en développement est des plus louables. Le Bloc québécois en convient; par contre, nous nous devons d'émettre des réserves.

D'abord, une grande partie des pays qui bénéficient le plus du TPG sont des pays nouvellement industrialisés, principalement le Brésil, ainsi que les dragons et les tigres de l'Asie du Sud-Est dont mon collègue a parlé. Ils ne pourraient donc plus être considérés comme de véritables pays du tiers monde. Pourtant, ce sont eux qui en sont les principaux bénéficiaires.

De plus, l'importation de certains produits de ces pays, comme des pièces d'automobiles, pourrait nuire à l'implantation de manufacturiers de ces pièces près des producteurs d'automobiles au Canada, si on considère cet exemple de l'automobile.

Dans un autre ordre d'idées, certains pays, comme la Chine et l'Indonésie, qui bénéficient largement des tarifs préférentiels, sont reconnus pour leurs violations répétées des droits humains. Or, si le gouvernement canadien voulait être conséquent avec sa politique étrangère, il devrait avoir des réserves à favoriser des pays qui ne respectent pas les droits de la personne, comme il le fait par sa politique d'aide au développement qui, rappelons-le, est conditionnelle au respect de ces droits fondamentaux.

L'objectif du tarif préférentiel général étant d'aider à la croissance des pays en développement, sans pour autant nuire à l'économie canadienne et à l'économie québécoise, nous serions en droit d'exiger, à ce moment, une étude plus approfondie des produits et des pays bénéficiaires du TPG.

Ceci nous amène à la question de la gradation des pays en développement en pays nouvellement industrialisés. Le gouvernement croit-il que le programme de tarif préférentiel généralisé répond toujours à l'objectif d'aide à la croissance des pays en voie de développement, alors même que certains des principaux bénéficiaires ont déjà atteint des niveaux de croissance importants? Et vu l'utilisation de ce tarif par des pays nouvellement industialisés, croit-il justifié que le trésor public canadien se prive ainsi de millions de dollars en revenus annuels non perçus par les douanes?

(1050)

La question de savoir si des pays ne répondent plus aux critères de pays en développement est assez complexe. Mais il faut tout de même se poser la question si des pays comme la Corée du Sud, Taiwan, et quelques autres, doivent encore bénéficier d'un traitement de faveur en ce qui a trait au droit de douane.

À cet égard, il faut rappeler-mon collègue l'a fait, donc je passe-que les États-Unis se sont déjà retirés d'un certain nombre de tarifs préférentiels.

La tendance du gouvernement canadien sur cette question semble être de ne pas arrêter sa position avant quelque temps. Mais il serait pourtant important que le Canada la définisse en vue des réunions de 1995 de la Conférence des Nations Unies.

En résumé, le Bloc québécois croit qu'une réflexion s'impose sur l'octroi du tarif de préférence général qui pourrait être conditionnel à certains critères, comme le degré d'industrialisation de l'État bénéficiaire, la situation des droits de la personne dans celui-ci, la concordance de sa politique étrangère avec celle du Canada et de son respect pour les règles de droit international public reconnues, comme la non-utilisation de la violence dans ses relations avec les autres États, et le règlement pacifique des conflits auxquels cet État peut être partie.

Bref, le Canada aurait avantage à tenir compte des principes qui devraient guider sa politique étrangère dans le processus d'octroi de traitement douanier préférentiel. Mais il devra aussi prendre en compte les contraintes de sa politique commerciale. À titre d'exemple, le retrait du tarif de préférence général à la Chine pourrait, bien sûr, avoir des conséquences dans ses relations commerciales avec ce pays ou avec d'autres pays. Cependant, dans la perspective où l'aide au développement devrait être dirigée vers les populations qui en ont le plus besoin, une révision des listes des bénéficiaires du TPG devrait être faite.

Aussi, le Bloc québécois est-il d'avis que de telles actions devraient être le résultat de consultations et de débats à travers les canaux du système parlementaire canadien, dont le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Or, rien dans la Loi sur le Tarif des douanes ne force le gouvernement à entreprendre de telles consultations. Au contraire, le gouvernement peut, sur recommandation du ministre des Finances et par décret, modifier la liste des bénéficiaires du tarif de préférence général sans plus de discussions. Le Bloc québécois déplore le fait que la Chambre des communes n'ait aucune prérogative sur ce sujet.

Le Bloc québécois invite le gouvernement à entreprendre des consultations avec ses partenaires parlementaires, à tout le moins, pour l'examen de sa position sur le tarif de préférence général en vue des réunions de 1995 avec la Commission des Nations Unies sur le commerce et le développement, et sur l'orientation générale de sa politique à l'égard de la question de la gradation des pays.

1547

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, j'ai écouté avec attention le discours que vient de prononcer mon collègue de Louis-Hébert. J'aimerais tout d'abord l'en féliciter et le remercier. J'ai trouvé son discours très intéressant dans la mesure où il apportait des arguments complémentaires à ceux que j'ai développés moi-même dans mon propre discours, pour expliquer ou pour définir de façon plus précise à quel point le tarif de préférence général peut être avantageux pour les pays en développement.

Bien entendu, le Canada considère ce tarif de préférence général comme étant une mesure d'aide au développement des pays en développement. Toutefois, la question est de savoir: Est-ce que ce tarif peut avoir des incidences négatives sur le marché canadien? Je disais tout à l'heure, et le ministre en avait fait état, que le gouvernement entend consulter les manufacturiers et les fabricants canadiens pour connaître leur position, de façon à ce qu'ils ne puissent se retrouver en situation défavorisée par rapport aux produits qui pourraient entrer plus facilement sur le marché canadien en vertu du tarif de préférence général.

Bien sûr que le tarif de préférence général représente un plus, un atout de taille pour les pays en développement qui voudraient exporter leur production à l'étranger, notamment au Canada.

(1055)

Voici la question que je voudrais lui poser: Comment voit-il l'avantage pour le Canada ou les désavantages pour le Canada de l'application du tarif de préférence général actuel?

M. Paré: Monsieur le Président, je ne pense pas qu'il y ait véritablement de désavantages. Je vais commencer par les désavantages, parce que la Loi sur les tarifs douaniers a prévu des mesures de sauvegarde pour s'assurer que les produits exportés au Canada, par des pays en développement, pour lesquels l'industrie canadienne serait concurrente, ne soient pas couverts par les tarifs préférentiels généraux.

Quant aux avantages, je pense que la preuve est faite que, compte tenu que le Canada lie souvent son aide au développement à des échanges commerciaux avec les pays en développement, il est un bénéficiaire important de ces importations. Je rappelle que, compte tenu des mesures de sauvegarde, il n'y a pas de réels inconvénients.

M. Louis Plamondon (Richelieu): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon savant confrère pour son brillant exposé. Il a parlé dans son discours d'une révision de la liste de pays bénéficiant des tarifs préférentiels généraux. Il a mentionné aussi les pays en développement, mais il a ajouté qu'il fallait réfléchir à l'aide qu'on apporte à des pays qui ne sont pas nécessairement en développement, et où il y aurait une incidence commerciale importante pour les relations futures avec ces pays.

Pourrait-il me dire à quels pays il faisait allusion dans son discours? Comme le gouvernement semble prêt à faire débat sur débat depuis un mois-il était prêt hier à former un comité spécial sur la défense nationale-ne serait-il pas bon, par le biais d'un comité existant ou par le biais d'un nouveau comité, tous les partis de la Chambre réunis, qu'on revoie cette liste de pays, mais surtout qu'on réfléchisse à l'aide apportée sous forme de tarifs préférentiels et aussi sur une forme d'aide plus large en ce qui concerne les pays en développement?

M. Paré: Monsieur le Président, effectivement, les tarifs préférentiels généraux couvrent au-delà de 150 pays, plus exactement 180 pays. C'est sûr que le développement de ces pays n'est pas équivalent. Il y a des pays qui sont au seuil d'un développement primaire, d'autres sont un peu plus avancés. Les tarifs d'ailleurs s'ajustent selon les trois catégories.

Il est donc nécessaire de réfléchir à cette gradation et aussi, compte tenu que les tarifs sont reportés pour des périodes de dix ans, de s'interroger, pendant cette période, sur la pertinence pour certains pays, qui ont connu, comme c'est le cas de certains pays de l'Asie, un développement fulgurant, d'appartenir encore aux catégories de pays les moins bien nantis.

Il faudra toujours être conscient cependant que pour des pays qui se verraient retirés de la liste la plus avantageuse, il faudra le faire sans doute avec doigté, car il pourrait arriver que cela ait une incidence dans nos relations commerciales avec ces pays ou avec d'autres.

Il sera important, je pense, de le faire en concertation avec la Chambre et il faudrait que la Chambre soit impliquée dans ces données. D'ailleurs, la Chambre s'est dotée d'un mécanisme comme le Comité permanent du commerce extérieur et des affaires étrangères. Je pense que ce serait tout à fait dans l'ordre que des questions aussi importantes cessent d'être décidées par décret du gouvernement sur simple recommandation du ministre, mais que le gouvernement, conformément à l'esprit du livre rouge, mette à contribution les députés de l'opposition et évidemment aussi les députés du gouvernement, pour réétudier ces questions qui sont de nature à avoir un impact sur l'image du Canada.

(1100)

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je pense qu'on serait disposé, à propos de ce projet de loi, à terminer immédiatement l'étape de la deuxième lecture, ensuite à passer à l'étape du comité plénier et, tout de suite après, à commencer la troisième lecture, avec le consentement unanime.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et, avec le consentement unanime, renvoyé au comité plénier.)

Le Président: Comme il est 11 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés en conformité de l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


1547

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE BUDGET

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, j'ai reçu de nombreux appels téléphoniques et de nom-


1548

breuses communications par lettre et par télécopieur de la part des électeurs de York-Simcoe qui sont très inquiets à la pensée qu'on puisse assujettir à l'impôt les prestations sanitaires et les soins dentaires, et réduire le plafond des cotisations au REER.

J'exhorte le ministre des Finances à se montrer sensible à l'opinion de ces électeurs et des Canadiens en général. Nous devons adopter une méthode juste et équilibrée pour nous attaquer aux problèmes financiers très difficiles auxquels notre pays est confronté.

* * *

[Français]

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, depuis mai 1993, les députés de tous les autres partis à la Chambre ont présenté des pétitions contre la politique des langues officielles dans l'administration fédérale.

Je déplore l'attitude des députés libéraux et réformistes qui déposent ces pétitions en Chambre et encouragent ainsi les extrémistes canadiens qui veulent bannir la langue française de l'administration fédérale. En plus, je dénonce les députés qui déposent de telles pétitions tout en prétendant qu'ils n'y souscrivent pas.

Je demande à mes collègues libéraux et réformistes qu'ils cessent cette hypocrisie. S'ils croient que l'anglais doit devenir la seule langue officielle du gouvernement fédéral, qu'ils le disent clairement.

Les députés du Bloc québécois favorisent le maintien de l'usage des deux langues officielles dans l'administration fédérale et dans ses sociétés d'État. Je demande aux autres députés de faire preuve d'une semblable attitude d'ouverture et de tolérance.

* * *

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Bob Ringma (Nanaimo-Cowichan): Monsieur le Président, les députés réformistes aimeraient féliciter, de la part de tous les Canadiens, les jeunes athlètes gagnants des médailles aux XVIIe Jeux olympiques d'hiver, en Norvège.

On félicite Edi Podivinsky, Isabelle Brasseur et Lloyd Eisler, Jean-Luc Brassard, et notre plus récente gagnante d'une médaille d'or, Myriam Bédard.

[Traduction]

Ces athlètes sont un exemple éclatant de travail acharné et de consécration à un sport. Nous sommes très fiers d'eux et leur souhaitons tout le succès possible dans leurs prochaines entreprises.

* * *

LE RÉGIME D'ACCESSION À LA PROPRIÉTÉ

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à la Chambre, littéralement à la onzième heure, pour supplier le ministre des Finances ainsi que le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux d'appuyer la reconduction du Régime d'accession à la propriété grâce au REER.

Je présente une liste de près d'un millier de noms d'habitants de la région métropolitaine de Toronto et de Mississauga, qui ont fait l'effort d'envoyer des lettres pour appuyer la prolongation de ce régime.

Il s'agit d'un programme fédéral qui a aidé des milliers de Canadiens à accéder à la propriété sans avoir recours directement à l'aide financière du gouvernement fédéral.

Le régime a aidé jusqu'à présent plus de 200 000 Canadiens à acquérir une maison et a suscité une activité économique importante d'un bout à l'autre du pays.

La reconduction de ce régime au-delà de la date limite du 1er mars serait d'une aide inestimable pour les nombreux Canadiens qui ne pourraient pas autrement réaliser leur rêve de devenir propriétaires.

* * *

(1105)

LE MULTICULTURALISME

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre): Monsieur le Président, je prends la parole pour souligner la Semaine du multiculturalisme dans ma province, la Colombie-Britannique. Elle a été proclamée par le lieutenant-gouverneur, l'hon. David Lam.

Du 13 au 19 février, mes concitoyens participent à de multiples manifestations et activités mettant à l'honneur le patrimoine culturel divers qui est indissociable de la vie dans leur province.

Je remercie tous les groupes qui prennent part aux festivités de cette semaine. Leur participation active est essentielle à la vitalité de nos collectivités et favorise la compréhension des différentes traditions culturelles qui restent vivaces au Canada.

Je suis fière que le gouvernement fédéral s'associe avec enthousiasme à cet effort. Nous prendrons des mesures propres à promouvoir le patrimoine culturel du Canada.

J'espère que tous les Canadiens et tous les ordres de gouvernement soutiendront ces initiatives pour vivifier nos institutions culturelles et affirmer les valeurs communes à tous les citoyens.

De nos jours, la culture et l'identité des Canadiens sont menacées. Plus que jamais, les Canadiens des quatre coins du pays doivent renouveler leur engagement à l'égard de notre développement culturel et de notre dualité linguistique.

Toute ma gratitude va aux habitants de la Colombie-Britannique qui, cette semaine, ont ouvert la voie.

* * *

MADAME LISA CAMPEAU

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, un article de l'édition du mois de février du magazine Vogue raconte l'histoire d'une jeune électrice de Saint-Henri-Westmount du nom de Lisa Campeau.


1549

Madame Campeau, qui est âgée de 24 ans, risque sa vie depuis deux ans en participant aux opérations de secours des Nations Unies au Soudan. Elle passe pour une des travailleuses les plus tenaces au sein des missions de secours en Afrique.

Quand le chef d'un groupe de 2 000 Soudanais lui a dit qu'on la tuerait durant la nuit si elle ne donnait pas de nourriture à son groupe, elle a répondu que c'était inutile et que, si elle était tuée, les vols de secours cesseraient dans la région.

En dépit des risques élevés que comportent ses activités et du meurtre de plusieurs collègues de travail, Lisa Campeau continue sa mission. Elle veut faire carrière dans le développement et ambitionne même de réformer le programme qu'elle aide maintenant à administrer.

Lisa Campeau n'est qu'un exemple parmi une foule de jeunes Canadiens qui consacrent leur vie pour que le monde soit meilleur. Tous les Canadiens devraient être fiers de ses réalisations et de son idéalisme, et l'appuyer dans ses initiatives.

* * *

[Français]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, au nom de mon collègue de Charlesbourg, en mon nom personnel et au nom de tous les Québécois et Québécoises, je voudrais souligner la performance exceptionnelle de Myriam Bédard aux Jeux olympiques de Lillehammer.

En effet, Mme Bédard s'est illustrée ce matin en se méritant une médaille d'or au biathlon 15 kilomètres. Elle se joint ainsi à nos deux autres athlètes du Québec qui se sont mérités une médaille, soit Jean-Luc Brassard et Isabelle Brasseur.

Soulignons également que Mme Bédard a remporté la médaille de bronze aux Jeux d'Albertville, et l'or et l'argent au championnat mondial de 1993.

Le Bloc québécois salue le courage et la persévérance de cette compatriote et athlète émérite. Mme Bédard, on le sait, a dû surmonter de nombreuses difficultés, tout au long de son ascension, causées notamment par la Fédération canadienne de biathlon. Espérons que le ministre du Patrimoine canadien saura prendre les mesures qui s'imposent pour corriger ces nombreuses difficultés que rencontrent les athlètes du Québec.

* * *

[Traduction]

LA BFC EDMONTON

M. Hugh Hanrahan (Edmonton-Strathcona): Monsieur le Président, je me fais aujourd'hui le porte-parole de nombreux habitants d'Edmonton, surtout de la circonscription d'Edmonton-Strathcona, qui s'inquiètent du sort réservé à la BFC Edmonton.

Je reconnais qu'une certaine restructuration de nos forces armées s'impose, quand on examine la situation sous l'angle de la responsabilité financière. Cependant, j'inviterais le ministre de la Défense nationale à tenir compte de ce qui suit au sujet de la BFC Edmonton.

Cette base est le plus important dépôt d'approvisionnements et de services de l'Ouest du Canada. Dix millions de dollars ont récemment été consacrés à son agrandissement. En outre, elle est dotée de l'une des pistes les plus longues du monde. La quatrième, à vrai dire.

Ce qui m'inquiète le plus, c'est que le ministère songe à fermer des bases avant même d'avoir défini le nouveau rôle de l'armée canadienne. Il me semble logique d'effectuer d'abord un examen et de décider ensuite des bases qui seront fermées.

La BFC Edmonton sert de point d'accès vers le Nord et pourrait très bien répondre aux besoins du Canada au siècle prochain.

* * *

LA BANQUE ROYALE

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, aujourd'hui, la succursale de la Banque Royale de Lynden dans ma circonscription ferme ses portes après 92 ans d'activité ininterrompue. Cette mesure va sérieusement nuire aux petites entreprises de la collectivité. Cette succursale de la Banque Royale attirait chaque semaine des centaines de gens qui venaient des terres voisines.

Les responsables de la banque ont reconnu que cette succursale était rentable. Ils ont décidé de la fermer à cause des piètres perspectives de croissance dans la région.

(1110)

Ils sont restés sourds aux pétitions, aux manifestations, aux nombreux reportages dans les médias locaux et aux lettres adressées au président et au directeur général de la banque. Ils ont insisté auprès des clients de la succursale pour qu'ils transfèrent leurs comptes à une nouvelle autobanque, à Brantford.

C'est paradoxal quand on pense que le gouvernement a déclaré hier un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste ruraux pour protéger les collectivités rurales.

Ce sont les Canadiens qui sont à l'origine du mandat et de la charte de la Banque Royale. Il est dommage qu'elle décide à présent de ne plus les écouter.

* * *

[Français]

LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES

M. Alfonso Gagliano (Saint-Léonard): Monsieur le Président, beaucoup de petites et moyennes entreprises ont du mal à obtenir du financement des grandes banques.

Cependant, sur 1 000 prêts accordés aux PME, seulement 13 ne sont pas remboursés. En d'autres termes, 98,7 p. 100 des


1550

emprunts sont solvables. Dans la conjoncture actuelle, 98,7 p. 100 constitue une moyenne des plus impressionnantes, que nous ne pouvons pas ignorer.

Étant donné qu'il y a plus de 900 000 PME au Canada et qu'elles sont responsables pour plus de 4 millions d'emplois directs, il faut encourager les banques à devenir des partenaires de PME et non des adversaires.

Il faut garantir aux PME, qui sont le moteur de l'économie canadienne, l'accès au capital pour le développement de nouvelles technologies et leur trouver de nouveaux marchés. N'oublions pas que les PME d'aujourd'hui peuvent devenir les multinationales de demain. Aidons-les à prospérer.

* * *

[Traduction]

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, je voudrais annoncer aujourd'hui à la Chambre et aux habitants d'Ottawa qui nous regardent à la télévision le deuxième gala annuel au profit des enfants démunis, qui aura lieu ici, à Ottawa.

Cet événement couronné de succès est parrainé par le Fonds de l'avenir, un groupe de jeunes des secteurs public, privé et universitaire qui sont déterminés à apporter de l'espoir aux enfants pauvres d'Ottawa.

Le 26 février, au Musée canadien de la nature, ce groupe de jeunes espère recueillir pour le Ottawa-Carleton Child Poverty Fund 5 000 $ de plus que l'objectif de l'année dernière, qui était de 10 000 $.

Les recettes contribueront à mettre sur pied des programmes de repas communautaires et des programmes d'éducation de la prime enfance.

C'est la raison pour laquelle je demande votre appui. On peut composer le numéro 769-5012 pour obtenir des billets et de plus amples renseignements.

Je mets les entreprises d'Ottawa au défi de venir en aide à ces jeunes. Je félicite ces derniers de leur initiative et j'espère qu'elle servira d'exemple de ce que nous pouvons faire ensemble pour améliorer le sort de nos enfants.

* * *

[Français]

LE VILLAGE DE DAVIS INLET

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, on vient d'apprendre qu'une déclaration serait imminente, bien que non confirmée pour le moment, de la part du ministre des Affaires indiennes, concernant la relocalisation du village de Davis Inlet, au Labrador, relocalisation demandée depuis trop longtemps par cette communauté tant éprouvée par toutes les misères conséquentes à l'incurie et à la négligence du gouvernement.

Nous tenons à exprimer encore une fois notre inquiétude face à l'inaction ministérielle, mais aussi notre espoir que le ministre soit, en fait, prêt à accéder aux demandes répétées du peuple inuit de Davis Inlet, en leur accordant les terres promises, plus propices à une vie décente, à laquelle ont droit tous les Québécois et tous les Canadiens.

Le ministre répondrait ainsi à la préoccupation constante et répétée du Bloc québécois d'améliorer les conditions de vie des peuples autochtones.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CONSUMERS PAPER

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, je voudrais illustrer aujourd'hui, par un exemple tiré de la circonscription de New Westminster-Burnaby que je représente, ce à quoi peuvent aboutir des dépenses gouvernementales engagées à mauvais escient.

Le ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest avait déjà annoncé son intention de verser cinq millions de dollars à la société Consumers Paper pour financer la construction d'une usine de papier mouchoir à Redcliffe, en Alberta. Cette mesure était censée créer 150 emplois. En réalité, on se trouvait ainsi à subventionner un projet malavisé qui s'attaquait de front au marché de la société Scott Paper de New Westminster.

Il existe déjà une centaine de marques de papier mouchoir sur le marché et, donc, une trop grande surcapacité de production. Cette mesure ne peut qu'aggraver une situation déjà peu reluisante. Si la nouvelle usine voit le jour, des emplois seront perdus ailleurs. Si le projet échoue, c'est le contribuable qui paiera la note et les familles de Redcliffe seront victimes d'une mauvaise décision gouvernementale.

Des ingérences gouvernementales de ce genre créent une forme de dépendance. Pourquoi consacrer les deniers publics à des opérations aussi douteuses, à une époque où le déficit fédéral n'a jamais été aussi élevé?

* * *

LES BUREAUX DE POSTE RURAUX

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, la date du 17 février restera gravée dans la mémoire des habitants des régions rurales du Canada. En effet, c'est un grand jour puisqu'il marque la fin de l'abominable plan des conservateurs qui visait à fermer tous les bureaux de poste ruraux.

Les régions rurales pourront enfin reprendre haleine. Les bureaux de poste ruraux redeviendront le centre vital de nos petites localités.

Il faut féliciter le ministre responsable de la Société canadienne des postes, le premier ministre et tous les membres du Cabinet. Je suis persuadé que tous les Canadiens vivant en région rurale leur sont très reconnaissants.

Passons à la deuxième question touchant la poste. Ensemble faisons pression pour que la Société canadienne des postes cesse de harceler les facteurs ruraux et commence à les traiter avec dignité, comme c'était le cas à l'époque des gouvernements libéraux précédents.

1551

(1115)

LES PÊCHES

M. Wayne Easter (Malpèque): Monsieur le Président, je veux signaler ma satisfaction à la suite de l'annonce de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest, faite hier à Bruxelles. Cette organisation a en effet imposé un moratoire qui entre en vigueur immédiatement sur la pêche à la morue dans les eaux internationales au large de Terre-Neuve.

Notre parti a réclamé un tel moratoire au cours de la dernière campagne électorale et le ministre des Pêches et des Océans a travaillé fort pour l'obtenir.

En tant que député de la région de l'Atlantique, où les stocks de morue ont souffert de la surpêche pratiquée par les étrangers, ainsi qu'une bonne partie des pêcheurs, j'apprends la nouvelle de ce moratoire avec grand plaisir. Pour les pêcheurs de la côte est, c'est un peu de lumière au bout du tunnel.

Je suis également heureux que l'on ait donné suite à la proposition du Canada de prolonger jusqu'à la fin de 1994 le programme de pilotage. En vertu de ce programme, des observateurs à bord des navires sont chargés de s'assurer qu'on respecte le moratoire. Le ministre mérite des félicitations.

Nous devons tout de même rester vigilants dans tout ce que nous faisons à l'intérieur de nos frontières et sur la scène internationale, si nous voulons que la pêche à la morue dans l'Atlantique continue d'exister et devienne un jour une industrie durable.

* * *

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

M. Vic Althouse (Mackenzie): Monsieur le Président, le refus du leader parlementaire du Parti réformiste d'autoriser hier un ministre à faire une déclaration à la Chambre me préoccupe.

Les simples députés ont longtemps contesté l'attitude de Brian Mulroney, qui ne faisait pas grand cas de la Chambre. Il avait rompu avec la tradition établie depuis longtemps d'annoncer à la Chambre les mesures prises par le gouvernement. Ses ministres et lui-même préféraient faire leurs déclarations à la presse, souvent ailleurs que sur la colline, ce qui forçait les députés à en prendre connaissance dans les journaux.

Pour que la Chambre puisse reprendre son rôle historique, qui est de contrôler et de contenir les dépenses du gouvernement, elle doit faire valoir son droit d'entendre à la Chambre toutes les déclarations ministérielles portant sur des questions budgétaires. En forçant les ministres à faire leurs annonces hors de la Chambre, comme le député de Kindersley-Lloydminster. . .

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence apprécierait que les députés évitent les attaques personnelles.

Je crois que la règle tacite à la Chambre permet de s'en prendre jusqu'à un certain point à la politique des partis, mais je demande aux députés d'éviter de s'en prendre personnellement à un député ou de lui prêter des intentions.

J'apprécierais grandement que les députés adoptent cette ligne de conduite.

_____________________________________________


1551

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA RÉSERVE DE KANESATAKE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. Le leader mohawk de Kanesatake, M. Jerry Peltier, a déclaré hier qu'il avait l'assurance du gouvernement qu'il n'y aurait pas d'intervention policière ou militaire sur ce territoire pour mettre fin aux activités criminelles de certains individus qui terrorisent la population. La situation est devenue à ce point grave que l'éditorialiste en chef de La Presse, Alain Dubuc, estime, et je cite: «Que l'intervention musclée des forces policières, et si nécessaire des forces armées, est devenue incontournable.»

Est-il vrai que le gouvernement a donné l'assurance formelle au chef des communautés mohawks qu'il n'y aurait ni interventions de la police, ni de l'armée, pour mettre fin de façon définitive à la contrebande?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, absolument non.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Il est toujours curieux, monsieur le Président, de voir les réactions suite aux rencontres entre des leaders mohawks et le gouvernement. Il y a toujours au moins deux versions. Au moins deux!

Je demande à la vice-première ministre si elle considère comme acceptables les propos d'un porte-parole mohawk d'Akwesasne qui menace de représailles armées toute intervention policière qui mettrait fin aux activités de contrebande?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je considère ces commentaires aussi répugnants que les commentaires du chef de l'opposition, hier, quand il a prétendu que la situation en Bosnie était pareille à celle d'ici au Canada sur le tabagisme.

(1120)

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ce n'est pas ce que le chef de l'opposition a dit et elle le sait très bien. Je sais qu'elle est au courant de propos répugnants, elle connaît bien cela.

Je pose ma question à la vice-première ministre. Peut-elle confirmer les affirmations du porte-parole de la communauté mohawk d'Akwesasne, M. Russell Roundpoint, selon lesquelles plusieurs contrebandiers se sont procurés des mitraillettes AK-47 et AK-15, et dont ils avouent se servir pour protéger leurs cargaisons de marchandises illicites dans le corridor Akwesasne-Cornwall?


1552

Ce gouvernement voulait des noms, M. Russell Roundpoint a fait ces déclarations, il a un nom, qu'en pense la vice-première-ministre?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le député veut faire des citations, mais maintenant, il dit que celle du chef de l'opposition n'est pas vraie.

Je veux donc souligner encore une fois le fait que le gouvernement du Canada n'est pas plus d'accord avec des déclarations comme celle-là qu'avec des déclarations comme celle-ci du chef de l'opposition: «On est assez courageux pour aller maintenir la paix en Bosnie, mais quand on a un problème ici, on ne peut pas le régler. Voyons donc, ça n'a pas de bon sens. Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. L'opinion internationale va devoir se rendre compte qu'on a l'obligation de préserver nos sociétés.»

Oser comparer la situation en Bosnie avec une situation ici où, depuis une semaine, la vente des cigarettes de contrebande baisse de façon extraordinaire. Pourquoi le chef de l'opposition n'est-il pas ici pour nous applaudir?

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, on voit bien que la vice-première ministre ne comprend pas les nuances entre l'intervention et les situations.

Le premier ministre et la vice-première ministre font croire à la population en général que le Bloc québécois tente de salir la réputation du peuple mohawk. Tout le monde et tous les intervenants savent et reconnaissent que les activités illicites de la contrebande sur les réserves mohawks sont attribuables à une poignée d'individus armés qui y font régner la terreur.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre. Reconnaît-elle que les activités de contrebande sur les réserves sont attribuables à un petit nombre d'individus dont les activités mettent en péril la sécurité de la population mohawk et des populations environnantes?

[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, les députés de l'opposition continuent de prétendre qu'ils n'ont pas de programme caché et pourtant, depuis lundi, selon le journal La Presse, ils ont posé 22 questions au gouvernement sur ce sujet.

Le problème de la cocaïne ne date pas de cette semaine. Il n'est pas exclusif aux réserves indiennes du pays. Cela fait très longtemps, notamment durant les années où le chef de l'opposition siégeait au cabinet de Brian Mulroney, qu'on est aux prises avec la toxicomanie.

Si le député veut pointer du doigt les réserves indiennes et prétendre que c'est le seul endroit où il existe un problème de cocaïne, je l'invite à sortir dehors pour faire une déclaration de ce genre. En fait, la contrebande de cigarettes, le trafic de stupéfiants et les autres problèmes sont liés au crime organisé et sont aussi répandus dans les villes de Hamilton, Toronto et Montréal qu'à Kanesatake et Akwesasne.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, on sait fort bien que la GRC a déclaré elle-même que le territoire est une plaque tournante. Or la question supplémentaire que je veux poser à la vice-première ministre est la suivante: Les déclarations alarmistes des leaders mohawks ont alimenté un climat de tension déjà élevé sur les réserves. N'est-il pas du devoir du premier ministre de rencontrer les leaders mohawks afin d'exiger qu'ils s'engagent à coopérer avec le gouvernement pour mettre fin aux activités de contrebande et assurer le respect de la loi sur le territoire, comme partout au Canada, comme le prétend le gouvernement?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, s'il y a un groupe qui est responsable d'alimenter la crise, c'est le groupe de l'opposition.

Imaginez que la semaine dernière, un député du Bloc s'est rendu dans les réserves, soi-disant pour faire des sondages de porte en porte: «Est-ce que vous avez des armes? Est-ce que vous achetez des objets de contrebande?» Imaginez-vous, monsieur le Président, quelle serait la réaction des Québécois et des Canadiens si les députés cognaient à la porte de leurs commettants en vue de leur demander ce qu'ils faisaient d'illégal chez eux? Est-ce le sens de démocratie des bloquistes? Je ne pense pas.

* * *

(1125)

[Traduction]

LE BUDGET

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question, qui s'adresse à la vice-première ministre, porte sur la situation financière à laquelle notre Chambre doit faire face.

Hier, le gouvernement de la Saskatchewan a présenté un budget qui ne renfermait aucune augmentation d'impôts et prévoyait une réduction de 33 p. 100 de son déficit. Le même jour, le premier ministre du Québec a déclaré que son prochain budget prévoirait une réduction du déficit et un allégement possible du fardeau fiscal des contribuables.

La vice-première ministre peut-elle dire à la Chambre jusqu'à quel point les mesures de lutte contre le déficit du gouvernement fédéral sont coordonnées avec celles des provinces et nous préciser si le gouvernement fédéral donne l'exemple ou se contente plutôt de suivre le mouvement?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le chef du Parti réformiste aura sa réponse dans quatre jours et je sais qu'elle lui plaira beaucoup.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai posé une question relativement directe. J'ai demandé si le gouvernement fédéral coordonnait ses activités avec celles des provinces. Cela n'avait rien à voir avec la présentation du budget.

Ma question supplémentaire est donc celle-ci. Les trois ordres de gouvernement viennent prendre de l'argent dans la poche du


1553

même contribuable. Pourtant, jusqu'à maintenant, le budget d'aucun gouvernement au Canada n'a reconnu de façon explicite le fardeau fiscal total que doivent supporter les Canadiens.

Le gouvernement fédéral croit-il qu'on doive tenir compte de ce fardeau lorsqu'on veut modifier le régime fiscal canadien? Va-t-il s'assurer de joindre à son exposé budgétaire de la semaine prochaine toute la documentation pertinente sur cette question?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, en fait, dans de nombreuses provinces, il y a plus de trois ordres de gouvernement, il y en a quatre et manifestement, notre gouvernement est tout à fait conscient qu'il n'y a qu'un seul contribuable.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, on peut voir pourquoi la vice-première ministre n'est pas ministre des Finances.

Des voix: Oh, oh!

M. Manning: Ma troisième question est celle-ci. Comme la vice-première ministre le sait pertinemment, depuis quelques années, au Canada, on assiste au départ d'entreprises, à la fuite de capitaux et à la perte d'emplois et d'après les intéressés eux-mêmes, ce phénomène serait attribuable à notre fardeau fiscal élevé.

Le gouvernement fédéral croit-il pouvoir l'accroître encore davantage sans entraîner le départ d'un plus grand nombre d'entreprises, une fuite encore plus forte de capitaux et une perte encore plus importante d'emplois au Canada?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le premier ministre et le gouvernement croient que toute politique gouvernementale en matière de finances doit avoir deux volets; elle doit porter à la fois sur les impôts et les emplois.

En fait, au cours de la dernière campagne électorale, nous n'avons pas fait le même type de promesses que le chef du troisième parti à la Chambre et c'est peut-être pourquoi il est relégué à ce rôle maintenant.

* * *

[Français]

LA CONTREBANDE DE SPIRITUEUX

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, nous passerons d'un item de contrebande à un autre.

Les pertes reliées à la contrebande de spiritueux seraient plus importantes qu'on ne le croyait. Selon l'Association des distillateurs canadiens, la contrebande de spiritueux fait perdre 1,2 milliards de taxes non perçues au gouvernement. Au Québec, la contrebande d'alcool a augmenté de 35 p. 100 et touche maintenant 1,7 million de caisses de spiritueux, alors que la contrebande représente en Ontario 2,2 millions de caisses par année.

Le ministre du Revenu va-t-il ordonner une enquête interne relativement aux allégations faisant état de l'implication d'officiers haut gradés des douanes dans la contrebande d'alcool?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, nous prenons très au sérieux les allégations selon lesquelles des employés des bureaux de douane auraient accepté des pots-de-vin.

Le solliciteur général et moi-même avons annoncé hier que la GRC ferait enquête. Jusqu'à maintenant, il ne s'agit que d'allégations.

Je ferai remarquer au député que le document cité à l'appui de ces allégations au cours de l'émission date d'avant les dernières élections. Cette émission traite peut-être d'événements très anciens, je ne saurais dire. Nous ne savons pas quand l'émission a été faite, ni qui prenait la parole.

(1130)

Je souligne encore une fois que ces allégations n'émanent pas de la Société Radio-Canada mais d'un individu qui prétend être un contrebandier et un voleur. Tant que l'enquête n'aura pas eu lieu, je crois qu'il serait imprudent de se fier aux déclarations de cet individu au sujet des douaniers.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, étant donné l'ampleur de la contrebande d'alcool, le ministre entend-il mettre en oeuvre une stratégie concertée avec les provinces, pour endiguer la progression de cette contrebande d'alcool?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je tiens à assurer le député que nous demeurons en communication avec nos homologues provinciaux relativement à la campagne de lutte contre la contrebande. Je lui rappelle que les mesures annoncées la semaine dernière par le premier ministre, le solliciteur général et d'autres membres du gouvernement ne visaient pas que la contrebande de cigarettes.

Nous sommes d'avis que la réduction de la taxe sur les cigarettes constitue un élément important de notre stratégie, qui en compte de nombreux autres. Cette campagne vise à lutter contre la contrebande, et porte notamment sur la vente illégale d'alcools et d'armes, la pornographie, l'entrée illégale d'étrangers et les rapts d'enfants.

Nous entendons demeurer en étroite collaboration avec les provinces afin que les mesures prises par les agents de Douanes Canada soient les plus efficaces possible.

* * *

LES DÉPUTÉS

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre en l'absence du premier ministre.

Ces derniers jours, notre premier ministre. . .

Le Président: À l'ordre! Plus tôt dans la période des questions, on a fait allusion à la présence ou à l'absence de députés. Or, selon une pratique acceptée à la Chambre, nous ne mentionnons pas ce fait, tout simplement parce que nous devons tous nous absenter à certains moments pour diverses raisons.


1554

Si les députés voulaient bien s'abstenir de telles remarques, ce serait apprécié.

Mme Grey: Monsieur le Président, je suis contente que vous soyez ici. Ma question à la vice-première ministre se rapporte au fait que dernièrement le premier ministre répète inlassablement que les députés doivent se servir de leur jugement. Pourtant, la dernière fois que la Chambre a dû se prononcer sur la question du suicide assisté par un médecin, en mars 1993, le premier ministre, qui était alors chef de l'opposition, ne s'était pas montré à la Chambre pour voter.

Les Canadiens se demandent quand le premier ministre. . .

Le Président: Je suis certain que la députée acceptera de reformuler quelque peu sa question.

Mme Grey: Monsieur le Président, si, pour une raison ou une autre, un député décidait de ne pas voter sur cette délicate question, qui représenterait-il? Est-ce la position de son parti, son propre jugement ou sa propre conscience, ou bien les souhaits de ses électeurs?

Le Président: La présidence éprouve une certaine réticence à l'égard de la question. En effet, cette question, qui se rapporte à une autre époque, ne met pas en cause la responsabilité administrative du gouvernement.

Cependant, je suppose qu'en général, tous les députés votent comme ils le souhaitent. La vice-première ministre est libre de répondre si elle le veut.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, quand le premier ministre a fait ses observations, je crois qu'il tentait de faire remarquer que, dans toute décision d'intérêt national, chacun de nous doit tenir compte des opinions des électeurs, de la position du parti et des renseignements recueillis en écoutant les diverses observations qui sont formulées; en dernier lieu, chacun prend sa propre décision.

À mon avis, la députée s'avance sur un terrain miné quand elle dit que nous devrions voter comme des robots. Elle se rappellera que lorsque le chef du Parti réformiste s'est opposé très fermement à l'Accord de Charlottetown, il n'avait pas l'appui de ses électeurs. Ces derniers s'étaient même prononcés en faveur de cet accord. Pourtant, il n'a pas cessé de le combattre.

(1135)

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse à la vice-première ministre.

Les libéraux peuvent tenter de justifier leur mandat autant qu'ils le veulent, mais il reste que, si l'on se reporte à leur livre rouge, il n'y a pas le moindre mot qui a été dit au cours de la campagne au sujet du suicide assisté par un médecin.

S'il n'y a pas de référendum national sur la question, quelle garantie la vice-première ministre peut-elle donner aujourd'hui que les ministériels vont effectivement tenir compte des opinions de leurs électeurs à l'égard de cette question?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je pense que le premier ministre a dit très clairement que le Parti libéral et ses députés jugent qu'ils sont envoyés au Parlement pour exercer leur jugement. Ce ne sont pas des machines à voter.

Il me semble que si notre rôle se limitait à voter comme des robots, alors que nous sommes à l'ère de la technologie, nous ferions aussi bien d'abolir la Chambre des communes et d'installer des boutons dans chaque foyer pour que les Canadiens enregistrent leur vote automatiquement.

Si nous avons des parlementaires, c'est justement pour qu'ils viennent au Parlement, qu'ils tiennent des débats vigoureux et éclairés, et exercent finalement leur jugement en votant à titre de députés.

* * *

[Français]

LA PÊCHE À LA MORUE

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. L'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest, l'OPANO, a convenu hier d'un moratoire d'un an sur la pêche à la morue dans la partie sud des Grands Bancs situés au large de Terre-Neuve. Et j'entendais mon collègue tout à l'heure s'en réjouir abondamment.

Comment le gouvernement explique-t-il que les membres de l'OPANO ne se soient entendus que pour un moratoire d'un an alors que le Canada, de son côté, faisait valoir la nécessité d'un moratoire de trois ans pour reconstituer les stocks de morue?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, en l'absence du ministre des Pêches et des Océans qui, jusqu'à très récemment, était à Bruxelles. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Le député me vole la vedette.

M. Anderson: Au nom d'un représentant canadien, qui était récemment à Bruxelles, je peux dire au député que la réussite des négociations de l'OPANO sur la morue représente une très grande réalisation pour le ministre et pour le gouvernement du Canada.

Je souligne que pendant plusieurs années, en dépit de toutes les fanfaronnades des ministres des Pêches successifs, à l'exclusion du ministre actuel, rien n'a été fait auprès des membres de l'OPANO. C'est la voie diplomatique qui a finalement donné les résultats attendus.


1555

Je précise qu'il y a eu un vote et que, même s'il n'était pas unanime, il était éloquent. Il y a eu trois abstentions et, je crois, huit voix favorables. Nous avons maintenant l'esquisse d'un accord.

Il ne serait pas indiqué de trop en demander pour l'instant. Nous avons une esquisse d'accord international. C'est une première. Je crois que les députés des deux côtés de la Chambre conviendront que, si nous en demandons trop à ce stade-ci, nous risquons de tout perdre. Le recours à la diplomatie et la discrétion du ministre des Pêches ont donné d'excellents résultats. Je me réjouis d'une telle réussite.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, je comprends fort bien la réponse qui vient d'être donnée par le ministre. Mais, cependant, la vice-première ministre, la ministre ou Dieu sait qui de ce côté-là de la Chambre reconnaît-il que le moratoire aura une portée limitée en raison de l'abstention de la Norvège et de l'Union européenne, qui ont refusé de participer au moratoire décidé par les autres pays membres de l'OPANO?

[Traduction]

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, c'est vrai, il y a eu trois abstentions. Cependant, dans le passé, les nations qui se sont abstenues au moment du vote n'ont pas nécessairement agi à l'encontre des décisions majoritaires de l'OPANO.

Nous comptons obtenir le même respect de la décision de la majorité et nous sommes persuadés que le moratoire sera un succès. Après tout, c'était la première fois que beaucoup des membres de l'OPANO qui ont accepté le moratoire reconnaissaient ainsi qu'il y allait de la survie même des stocks des Grands Bancs.

C'est un grand pas en avant dans nos négociations sur le sujet avec les Européens.

* * *

LES COMITÉS PERMANENTS

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, ma question s'adresse également à la vice-première ministre.

Le gouvernement a récemment modifié le Règlement pour accroître le rôle des comités parlementaires permanents. Les députés réformistes qui sont membres des comités ont entendu dire que le gouvernement aurait un plan visant à les empêcher d'accéder à la vice-présidence de ces comités.

(1140)

Quel est exactement le plan que les ministériels doivent suivre et est-ce que ce genre de pression est vraiment compatible avec la plus grande liberté qu'on a promis de donner aux membres des comités dans le discours du Trône et dans les récentes modifications au Règlement?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, la question du député repose sur une prémisse qui est totalement fausse. Le gouvernement ne modifie jamais le Règlement; c'est la Chambre des communes qui le fait.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Ma question supplémentaire s'adresse à la même ministre.

Serait-elle disposée à envoyer une note à tous les ministériels d'arrière-ban pour les aviser qu'ils sont libres de voter selon leur jugement en comité, ce que le premier ministre. . .

Le Président: Encore une fois, la formulation de la question me pose un léger problème. Peut-être que, si le député posait sa question en termes plus généraux, il pourrait obtenir l'information qu'il recherche.

M. Hermanson: Monsieur le Président, au sujet des votes, le premier ministre a déclaré qu'il se fiait beaucoup au jugement de ses députés et qu'il ne voulait pas qu'ils soient simplement des machines à voter.

Par conséquent, la ministre peut-elle nous assurer, au nom du gouvernement, que les ministériels d'arrière-ban seront libres d'agir et de voter selon leur jugement en comité?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je crois comprendre que la Chambre elle-même ne peut pas discuter de ce qui se passe dans les comités. Toutefois, afin d'aider le député, je l'invite à soulever cette question à une réunion des leaders parlementaires, et nous verrons si nous pouvons trouver une réponse raisonnable.

Le gouvernement n'a certainement pas l'intention d'empêcher les députés de faire leur travail. Je regrette que le député ait fait une insinuation aussi injustifiée.

* * *

[Français]

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie ne m'en voudra pas de ne pas lui réserver ma question, mais d'interroger la vice-première ministre à propos d'une question très préoccupante pour Montréal.

À plusieurs reprises par le passé, des porte-parole libéraux ont fait des déclarations, ont réclamé des amendements au programme PATA. Ce programme de soutien de revenu pour les travailleurs victimes de licenciements collectifs est discriminatoire pour Montréal en ce sens qu'un de ses critères d'application exige que 100 travailleurs soient licenciés pour que l'entreprise soit admissible à ce programme. À telle enseigne que le député de Saint-Léonard avait lui-même, du temps de son passage à l'opposition, déposé une pétition de plus de 8 000 noms pour condamner ce critère.


1556

La vice-première ministre reconnaît-elle que cette discrimination éhontée doit prendre fin, et est-elle prête à rendre admissibles à ce programme les licenciements de plus de 20 employés?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, j'accueille tout à fait la suggestion du député. S'il veut déposer un projet de loi privé en ce sens, on est bien prêts à en discuter. Mais de là à faire un changement, sur un point seulement relevant du Code du travail, quand on sait par exemple qu'au niveau national, il s'agit du salaire minimum le plus bas de toutes les provinces, je pense qu'il y a beaucoup d'autres choses sur lesquelles on doit se pencher d'abord.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, il y a à ce point un courant d'affection entre moi et la vice-première ministre que j'ai pris les dispositions pour déposer un projet de loi privé. Et justement, j'aimerais lui demander de l'appuyer, pourquoi pas, puisqu'elle vient de m'en faire la suggestion. J'y vois donc une volonté de la part du gouvernement de nous appuyer dans cette démarche.

Aussi, je demanderais à la vice-première ministre de nous assurer, lors du dépôt du prochain Budget de mardi, si les correctifs qui s'imposent seront pris pour mettre fin à cette discrimination?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): C'est évident, monsieur le Président, et je pense que le député du Bloc doit également reconnaître que lorsqu'on parle du Code du travail du Canada, cela touche les employés d'à peu près 10 p. 100 des compagnies à travers le pays.

Pour les députés du Bloc québécois, avant d'y aller d'un tel projet de loi, ce serait une bonne idée qu'il fasse des démarches auprès du gouvernement du Québec pour s'assurer justement que les lois n'entrent pas en conflit. Je présume qu'il a agi en ce sens avant de déposer son projet de loi. À ce moment-là, on va examiner son projet de loi au fur et à mesure.

* * *

[Traduction]

L'INDUSTRIE AÉROSPATIALE

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Il y a dans ma circonscription, celle de Winnipeg St. James, une industrie aérospatiale dynamique. Des entreprises comme Bristol, Standard Aero, Boeing et Paramax ont beaucoup bénéficié des contrats du gouvernement et du secteur privé. L'industrie a toutefois essuyé des revers lorsque la société Bristol n'a pas obtenu le contrat des CF-18, il y a de cela quelques années, et par suite de l'annulation récente du contrat des hélicoptères EH-101.

(1145)

Le ministre peut-il dire à la Chambre ce que son ministère compte faire pour assurer le maintien d'une industrie aérospatiale solide dans la circonscription de Winnipeg St. James et, en fait, dans toute la ville de Winnipeg?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de dire que nous reconnaissons l'importance primordiale d'une industrie aérospatiale forte et en santé. Le Canada réussit fort bien dans ce créneau. Pour ce qui est des ventes, notre industrie aérospatiale se classe en effet cinquième au monde.

Je sais, et le député me l'a signalé, que la région de Winnipeg est le siège d'un grand nombre d'entreprises importantes dans le secteur de l'aérospatiale. La Bristol Aerospace devrait obtenir sous peu un très gros contrat du gouvernement américain. Quant à Boeing, elle s'attend à jouer un rôle de premier plan dans le programme des 737-X.

Le principal moyen dont nous disposons pour aider l'industrie aérospatiale, outre notre cadre d'action général, c'est le Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense. Comme nous l'avons indiqué dans le livre rouge, ce sera la pierre angulaire de notre plan de reconversion des industries militaires. Nous utiliserons ce programme qui demeure à notre avis un instrument très important-la plupart des sommes versées étant récupérables-pour garantir que l'industrie aérospatiale canadienne à Winnipeg et dans le reste du Canada demeure très concurrentielle à l'échelle internationale.

* * *

LES NORMES DE COLLECTE DE SANG

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

À l'heure actuelle, les normes régissant la collecte de sang aux États-Unis sont supérieures à celles du Canada. La Croix-Rouge canadienne a décidé récemment de respecter les normes américaines afin de pouvoir continuer d'envoyer du sang canadien aux usines américaines d'extraction du plasma sanguin.

La ministre s'engagera-t-elle à hausser les normes canadiennes régissant la collecte de sang au niveau des normes américaines?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je tiens à rassurer la députée en lui disant que nos normes en matière de collecte de sang ne sont certainement pas inférieures à celles des États-Unis.

Nos normes sont différentes et sont peut-être même supérieures dans certains cas, car nous avons affaire à des systèmes très différents de collecte de sang. Aux États-Unis, il s'agit d'un système à but lucratif où les donneurs sont payés pour donner de leur sang, alors qu'ici au Canada, nous faisons appel aux donneurs bénévoles.

Nous continuerons de veiller à ce que nos systèmes de collecte de sang soient extrêmement sûrs.

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, des témoins ont déclaré récemment devant la Commission Krever que les centres de la Croix-Rouge canadienne sont censés faire l'objet d'une inspection tous les deux ans, mais n'ont pas subi d'inspection depuis au moins cinq ans.

Pourquoi le ministère de la Santé ne fait-il pas appliquer son propre règlement en matière d'inspection?


1557

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, depuis que je suis devenue ministre de la Santé, j'ai donné ordre à mes fonctionnaires d'effectuer une inspection complète des 17 centres de collecte de sang au Canada avant la fin de mars 1994, c'est-à-dire avant la fin de la présente année financière.

J'ai également donné ordre à mes fonctionnaires d'effectuer dorénavant une inspection annuelle complète de ces 17 centres. Je crois que l'opération d'inspection sera achevée d'ici la fin de mars, comme je l'ai demandé.

* * *

[Français]

L'ENVIRONNEMENT

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, j'aurais une question pour la ministre de l'Environnement. Hier, la commission mixte internationale remettait son rapport biannuel sur la qualité de l'eau des Grands Lacs. On y énumère une série d'effets catastrophiques sur la santé humaine. Notamment, des malformations congénitales chez les nouveau-nés, une réduction des spermatozoïdes, une augmentation des cancers du sein, ainsi qu'une réduction de la capacité d'apprendre chez les enfants d'âge scolaire.

(1150)

À la lumière de ce rapport, le gouvernement a-t-il enfin l'intention, oui ou non, d'interdire le déversement du chlore dans les Grands Lacs par l'industrie canadienne?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je ne sais pas si mon honorable collègue a eu l'occasion de lire le rapport, parce qu'il y est dit qu'on ne doit pas cesser l'usage de chlore avant d'en avoir étudié les effets économiques. C'était, je crois, à la page 7 du rapport, et je peux lui en faire parvenir une copie s'il le désire.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, la même commission, depuis 1978, fait sensiblement les mêmes recommandations.

Pourquoi la ministre refuse-t-elle de s'engager fermement à donner suite aux recommandations de la même commission qui prévoit la participation du Québec à l'accord sur la qualité des eaux des Grands Lacs, alors qu'il est reconnu par son propre ministère que 40 p. 100 de la charge toxique du fleuve Saint-Laurent provient des Grands Lacs?

[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, il importe de souligner que, même si nous ne sommes au pouvoir que depuis cent jours, nous avons déjà pris des mesures pour éliminer un certain nombre de produits toxiques. Il faut rappeler aussi que ce n'est pas le premier rapport de la Commission mixte internationale. Il y a plusieurs années, j'ai moi-même présenté à la CMI un exposé qui portait expressément sur les problèmes prénataux et le cancer du sein.

Il n'est pas sans signification que ce rapport reçoive une attention considérable. C'est la première fois qu'un lien est établi entre les produits toxiques et les problèmes de spermatogénèse. Nous savons depuis des années qu'il existe des problèmes graves.

Le rapport dit aussi qu'il a fallu cinquante ans pour atteindre ce niveau de toxicité et la CMI n'y réclame pas une interdiction immédiate du chlore. Il dit même de façon expresse que l'interdiction éventuelle de ce produit ne devrait être hâtée que si une étude sérieuse en fait ressortir l'effet dans la région économique des Grands Lacs et du Saint-Laurent.

Nous sommes prêts à déposer d'ici quatre à six mois un ensemble de calendriers pour éliminer tous les produits chimiques qui posent des problèmes, ce qui pourrait englober les produits organochlorés.

* * *

LA LIBÉRATION CONDITIONNELLE

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

Les recherches que j'ai faites jusqu'à maintenant m'ont permis de retrouver le nom de 23 personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré qui ont obtenu une libération conditionnelle et en ont profité pour tuer 32 personnes. La liste de ces criminels que j'ai dressée n'est sûrement pas exhaustive, mais c'est un bon échantillon des cinq ou six dernières années.

Le ministre ne convient-il pas que notre régime de libérations conditionnelles laisse à désirer, que la Commission des libérations conditionnelles est incompétente et qu'il faudrait éliminer les libérations automatiques tant que ce problème d'incompétence n'aura pas été réglé.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le député soulève une préoccupation importante. Je ne crois pas qu'il y ait des libérations automatiques, mais, de toute façon, le gouvernement veut que le régime des libérations conditionnelles s'applique de manière que la sécurité du public soit une importante priorité.

Je serais heureux que le député me communique le résultat de ses recherches. Ce serait peut-être utile pour atteindre l'objectif du gouvernement libéral.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Question supplémentaire, monsieur le Président.

Le ministre ne reconnaît-il pas qu'une des grandes causes de cette incompétence est que les commissaires sont nommés par favoritisme politique et non selon des critères rigoureux exigeant une vérification des compétences des candidats?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement veut que les nominations à la Commission nationale des libérations conditionnelles se fondent avant tout sur la valeur des candidats et leur compétence.

J'espère que je pourrai compter sur l'appui du député et de son parti pour appliquer cette politique.


1558

L'ÉTIQUETAGE DES PRODUITS

M. Pat O'Brien (London-Middlesex): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture.

Compte tenu que les normes de qualité du Canada en matière de production alimentaire sont de loin supérieures à celles de la plupart des autres pays, les États-Unis y compris, le ministre peut-il nous dire quand le pays d'origine des produits alimentaires sera indiqué sur les étiquettes afin que les Canadiens soient plus conscients de l'origine des produits qu'ils achètent et consomment?

(1155)

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire): Monsieur le Président, à l'instar du député et de tous les Canadiens, je suis très fier des normes de qualité, de santé et sécurité que nous avons établies au Canada pour nos produits alimentaires.

Quant à l'indication du pays d'origine sur les étiquettes, c'est une suggestion fort intéressante sur laquelle je vais certainement me pencher. Je remercie le député d'avoir posé cette question.

La question intéresse évidement le secteur privé et les provinces. Elle a également des répercussions sur nos obligations découlant des nouvelles règles du GATT. Cela dit, c'est avec plaisir que j'étudierai cette proposition dans l'intérêt des Canadiens.

* * *

[Français]

LA PÉDOPHILIE

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. L'Association du jeune Barreau de Montréal recommande au gouvernement canadien de modifier le Code criminel afin de criminaliser la pédophilie commise à l'étranger par des ressortissants canadiens. Certains pays européens ont d'ailleurs récemment criminalisé la pédophilie à l'étranger.

Ma question est la suivante: Le gouvernement entend-il donner suite à la requête que lui adresse l'Association du jeune Barreau de Montréal visant à criminaliser la pédophilie commise à l'étranger par des Canadiens? Et si oui, la vice-première ministre peut-elle prendre l'engagement de déposer un projet de loi sur cette question avant l'ajournement de juin?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, évidemment, on prend très au sérieux l'avis de l'Association du jeune Barreau de Montréal. On pense que la pédophilie est répugnante, quel que soit l'endroit où elle est pratiquée. S'il y a des touristes canadiens qui se rendent à l'étranger pour organiser ce genre de pédophilie comme on le fait dans certains pays, c'est évident que le ministre de la Justice va revoir la demande de la députée. Je peux aussi lui dire que c'est une question qui a déjà été soulevée au caucus libéral avec le ministre de la Justice, et je suis certaine qu'il fera pour le mieux, le plus tôt possible.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre): Je suis convaincue, monsieur le Président, que la vice-première ministre va faire tout en son pouvoir pour que ce projet de loi soit effectivement déposé.

Je voudrais quand même poser une question supplémentaire. Est-ce que la vice-première ministre peut nous assurer que ce projet de loi comportera aussi des dispositions à l'égard de ceux qui organisent ce que l'on appelle communément le tourisme sexuel?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je pense que le ministre de la Justice est déjà très conscient de cette question très difficile, et même répugnante, et je suis certaine que quand il considérera ce que pourrait faire le gouvernement canadien pour prévenir le développement de ce genre de tourisme-je n'appellerais même pas cela du tourisme, ce sont des choses dégeulasses qui ne peuvent même pas être qualifiées de tourisme-je suis certaine que le ministre de la Justice va faire de son mieux pour faire en sorte que ces choses-là ne se produisent ni ici ni ailleurs dans le monde.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Le 16 février 1994, l'émission d'information BCTV News a diffusé une entrevue avec la famille Hartwick de Surrey, en Colombie-Britannique. Bonnie Hartwick voulait que son fils, Mike, soit accusé de vol de voiture parce qu'il a été pris au volant d'une voiture volée. Il semble que Mike fasse partie d'un gang de jeunes voleurs de voitures qui a volé plus de 100 voitures depuis quatre mois. Les autorités n'ont pu accéder à la demande de la mère de Mike, Bonnie Hartwick, parce que Mike n'a que 10 ans.

Ma question à la vice-première ministre est la suivante. Le gouvernement abaissera-t-il l'âge auquel la Loi sur les jeunes contrevenants prévoit que les jeunes peuvent être traduits en justice pour leurs activités criminelles?

(1200)

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je répondrai à la question de la députée à titre de ministre de la Justice suppléant.

J'ai, moi aussi, entendu cette entrevue à la radio et j'en ai été fort troublé. Je m'empresserai de transmettre sa question au ministre de la Justice parce que je sais que son ministère et lui sont en train d'examiner la Loi sur les jeunes contrevenants.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser.

1559

Pendant l'entrevue, le jeune Mike a dit qu'il continuerait de voler des voitures parce qu'il trouvait cela amusant. Il sait que la police ne peut pas porter d'accusation contre lui. Le ministre peut-il expliquer en quoi ce genre de comportement sert l'intérêt de la société comme celui de l'intéressé?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le comportement auquel la députée fait allusion est certainement troublant. C'est pourquoi j'ai déjà dit que je vais m'assurer que le ministre de la Justice ait connaissance de ce cas pour qu'il puisse en tenir pleinement compte dans l'examen de la Loi sur les jeunes contrevenants, qui est maintenant en cours.

* * *

[Français]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

Mme Monique Guay (Laurentides): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. Le gouvernement a annoncé un moratoire, pour une période indéfinie, à l'effet qu'aucun nouveau bureau de poste ne sera fermé dans les milieux ruraux au Canada.

Dans le cadre de ce moratoire, le gouvernement entend-il reconsidérer les erreurs du passé et réouvrir certains bureaux de poste comme celui de Saint-Clément, dont la fermeture fut dénoncée par le Parti libéral lorsqu'il était dans l'opposition?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, si le ministre des Travaux publics avait pu faire ces commentaires hier, il aurait pu vous dire que la décision s'applique seulement aux bureaux de poste qui ne sont pas encore fermés.

* * *

[Traduction]

LE BARRAGE OLDMAN

M. Bob Mills (Red Deer): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement.

Hier, j'ai fait remettre à la ministre deux lettres, l'une de l'ancien chef de l'opposition, qui est maintenant premier ministre, et l'autre de l'ancien porte-parole pour l'environnement, qui est maintenant ministre des Finances. Ces lettres portent sur le rapport du Comité d'examen des évaluations environnementales concernant la construction d'un barrage sur la rivière Oldman.

La ministre voudrait-elle clarifier la position actuelle du gouvernement au sujet de ces lettres?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de m'avoir prévenu d'avance de ses questions. En fait, j'ai déjà communiqué avec mon collègue, le ministre des Pêches, pour faire en sorte que les exigences du Comité d'examen des évaluations environnementales soient respectées.

Je me réjouis de constater que les députés du Parti réformiste se préoccupent eux aussi des conséquences environnementales de la construction d'un barrage sur la rivière Oldman.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, je voudrais vous signaler la présence à notre tribune de Son Excellence Niels Helveg Peterson, ministre des Affaires étrangères du Royaume du Danemark.

Des voix: Bravo!

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE MINISTRES

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je tiens à vous préciser clairement, ainsi qu'au député de Mackenzie et à tous les autres députés, que si j'ai refusé hier de permettre une déclaration de ministre, c'est uniquement parce que les leaders de la Chambre s'étaient entendus pour qu'un préavis convenable de déclarations soit donné.

Si l'on sous-entend que mon parti ou moi-même n'appuyons pas le ministre dans. . .

Le Président: À l'ordre. Le député a probablement un très bon point de débat, mais il ne s'agit pas ici d'un rappel au Règlement.

_____________________________________________


1559

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le sixième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui porte sur la prière de la Chambre.

(1205)

J'aimerais aviser Votre Honneur et les députés de la Chambre que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre recommande à l'unanimité que la prière suivante soit adoptée par la Chambre des communes en remplacement de la prière qui est dite actuellement. Avec la permission de la présidence et de la Chambre, je propose de lire maintenant cette brève prière, à l'intention des députés.

«Dieu tout-puissant, nous te remercions des nombreuses grâces que tu as accordées au Canada et à ses citoyens quant à la liberté, aux possibilités d'épanouissement et à la paix. Nous te prions pour notre souveraine, la Reine Elizabeth, et le Gouverneur général. Guide-nous dans nos délibérations à titre de députés et aide-nous à bien prendre conscience de nos devoirs et responsabilités. Accorde-nous la sagesse, les connaissances et


1560

la compréhension, qui nous permettront de préserver les faveurs dont jouit notre pays afin que tous puissent en profiter, ainsi que de faire de bonnes lois et prendre de sages décisions. Amen.»

La prière sera suivie d'un moment de silence pendant lequel chaque député pourra réfléchir et méditer, un dernier «amen» en marquera la fin.

[Français]

Monsieur le Président, j'espère pouvoir proposer l'adoption de ce rapport un peu plus tard cet après-midi.

[Traduction]

Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer à la Chambre, dans les deux langues officielles, le septième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Il s'agit d'une liste des changements effectués dans la composition des comités de la Chambre. Je demanderais à la Chambre de bien vouloir me dispenser de la lecture de ce rapport.

S'il y a consentement unanime, je présenterai dans quelques minutes une motion portant adoption de ce septième rapport.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

* * *

LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai donné avis à la Chambre de mon intention de présenter trois projets de loi d'initiative parlementaire portant les numéros 7, 8 et 9.

Je demanderais à la Chambre la permission de retirer ces avis, pour le moment.

Le Président: La Chambre est-elle d'accord?

Des voix: D'accord.

(Les avis nos 7, 8 et 9 sont retirés.)

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, si la Chambre donne son consentement, je propose, appuyé par l'honorable député de Elgin-Norfolk, que le septième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre aujourd'hui, soit adopté.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

PÉTITIONS

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais, au nom des habitants de ma circonscription, présenter une pétition pour demander au gouvernement de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants afin de la rendre plus sévère à l'endroit des jeunes contrevenants dangereux.

Cette pétition est présentée en mémoire de Rosalynn Dupuis. Je l'appuie et j'espère que le gouvernement répondra favorablement.

(1210)

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bob Ringma (Nanaimo-Cowichan): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre une pétition dûment certifiée par le greffier des pétitions, au nom de nombreux habitants de Nanaimo-Cowichan et des environs qui sont mécontents.

Les pétitionnaires demandent humblement qu'il plaise au Parlement d'adopter une mesure législative prévoyant la tenue d'un référendum sur l'utilisation des deux langues officielles dont les résultats seront exécutoires. Étant donné les problèmes financiers que connaît actuellement le Canada, les pétitionnaires estiment que l'actuelle loi sur les langues officielles coûte très cher et divise davantage les Canadiens qu'elle ne les rapproche.

[Français]

Je suggère à nos collègues d'être attentifs aux discours que nous tiendrons la semaine prochaine à ce sujet.

* * *

[Traduction]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, si la Chambre donne son consentement unanime, je propose que soient retirées les motions 1, 2 et 3, inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui à la rubrique des initiatives ministérielles. Ces trois motions ont déjà été examinées à la Chambre et il n'est pas question de les examiner plus longuement. Pour épargner des frais d'impression, nous proposons qu'elles soient retirées du Feuilleton.

1561

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(Les motions nos 1, 2 et 3 sont retirées.)

_____________________________________________


1561

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé) propose que le projet de loi C-7, Loi portant réglementation de certaines drogues et de leurs précurseurs ainsi que d'autres substances, modifiant certaines lois et abrogeant la Loi sur les stupéfiants en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureuse de l'occasion qui m'est offerte de parler aujourd'hui de ce projet de loi. Ce projet de loi-intitulé projet de loi réglementant certaines drogues et autres substances-est consacré à l'une des questions les plus importantes auxquelles notre société est confrontée aujourd'hui: celle de l'abus des drogues.

Les députés à la Chambre se souviendront sans doute que, en 1987, le gouvernement a lancé la Stratégie canadienne antidrogue fondée sur un partenariat d'ensemble visant à réduire les dommages causés par l'alcool et autres drogues aux individus, aux familles et aux collectivités.

Par dommages, on entend les maladies, la mort, la misère sociale, le crime, la violence et les coûts à tous les échelons gouvernementaux.

Mon ministère joue un rôle important dans la Stratégie canadienne antidrogue qui regroupe de nombreux partenaires, c'est-à-dire d'autres ministères du gouvernement fédéral, les provinces, le secteur des affaires, les organismes d'application de la loi, les syndicats et des organismes professionnels et bénévoles.

La Stratégie répond à quatre besoins: la prévention, le traitement et la réadaptation, l'information et la recherche, et la mise en application et le contrôle.

Comme ne le sait que trop chaque député ici présent, l'abus des drogues et l'énorme souffrance qu'il engendre ne connaissent ni frontière géographique, ni classe socio-économique, ni distinction sociale. Je suis à peu près certaine que chacun d'entre nous a eu l'occasion de rencontrer, dans sa circonscription électorale, des personnes qui ont connu l'angoisse de voir un fils ou une fille, un frère ou une soeur, un ami ou un voisin, consumé par les ravages de la toxicomanie.

Le problème est répandu un peu partout. Selon une enquête des Nations Unies, le commerce des drogues illicites n'est surpassé en valeur que par le commerce des armes. C'est à cette puissante industrie mondiale de la drogue que nous nous attaquons dans nos efforts pour contrôler l'abus des drogues au Canada.

Des statistiques récentes révèlent que, au cours d'une seule année, près de 15 p. 100 des jeunes Canadiens âgés de 15 à 19 ans ont consommé du cannabis.

(1215)

En outre, l'incidence de la consommation de drogues augmente considérablement parmi les adolescents et les jeunes adultes qui ont abandonné l'école, sont sans emploi ou n'ont pas de foyer. Dans une autre enquête, 2 p. 100 des Canadiens interrogés ont déclaré avoir pris de la cocaïne au cours de la dernière année.

Il s'agit là de chiffres impressionnants. Mais quelle est leur signification? Quel sens ont-ils exactement? Derrière ces chiffres se cachent de la douleur et des souffrances. Ces chiffres représentent un lourd tribut de misère prélevé sur ceux qui tombent dans le gouffre sans fond de la toxicomanie. Mais l'importance de ces chiffres va bien au-delà de leur signification statistique. Ils se traduisent par des millions de dollars dépensés pour des soins médicaux, des subventions d'assistance familiale, des prestations d'assurance-chômage et des pensions d'invalidité.

Comme preuve de sa détermination à relever ce défi permanent, le gouvernement a annoncé, il y a deux ans, le renouvellement de la Stratégie canadienne antidrogue.

[Français]

Le 31 mars 1992, le gouvernement avait renouvelé son engagement à l'égard de ce partenariat en annonçant qu'une somme supplémentaire de 270 millions de dollars allait être investie au cours des cinq années suivantes dans des initiatives visant à réduire l'abus des drogues. Soixante-dix pour cent de ces fonds servent aux activités de réduction de la demande de drogues par la prévention, l'éducation et les programmes de traitement. Ce projet de loi est une des composantes de l'autre 30 p. 100 des fonds accordés aux mesures.

Le projet de loi dont nous sommes saisis actuellement et les dispositions législatives concernant les produits de la criminalité adoptées par cette Chambre en 1989 vont dans la même direction que les objectifs de la Stratégie relatifs aux mesures d'application de la loi et de réglementation.

Ces textes législatifs visent directement ceux qui cherchent à tirer profit de l'exploitation des jeunes et des personnes vulnérables. Le projet de loi a pour objet de consolider, moderniser, améliorer et rationaliser la politique gouvernementale de réglementation des drogues qui est à la base de deux lois du Parlement actuellement en vigueur et de satisfaire aux obligations auxquelles est tenu le Canada dans le cadre de trois conventions internationales.

En 1961, le gouvernement de l'époque a promulgué la Loi sur les stupéfiants. En 1961 et en 1969, le Parlement a adopté les Parties III et IV, respectivemeant, de la Loi sur les aliments et drogues. C'est donc dire que la plus grande partie de notre cadre législatif actuel en matière de drogues date maintenant de 30 ans.

Par ailleurs, en tant que pays signataire de trois conventions internationales de lutte contre le trafic des drogues, le Canada est tenu de respecter les dispositions de la Convention unique de 1961 sur les stupéfiants, de la Convention de 1971 sur les substances psychotropes et de la Convention des Nations Unies sur le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes en 1988.

C'est pourquoi le projet de loi réglementant certaines drogues et autres substances est conçu pour atteindre trois objectifs fondamentaux: donner au gouvernement la souplesse nécessaire pour mieux contrôler l'importation, la production, l'exportation, la distribution et la consommation des drogues désignées; mettre


1562

en place les mécanismes nécessaires pour nous permettre de respecter nos obligations aux termes des conventions internationales, c'est-à-dire, restreindre la production ou le commerce des substances visées par la réglementation internationale et destinées à des applications médicales, scientifiques ou industrielles; accroître la capacité des forces de police et des tribunaux à mettre nos lois en application. Le projet de loi prévoit actuellement la saisie et la confiscation des biens utilisés pour commettre des infractions liées aux substances désignées.

Les lois actuelles, soit la Loi sur les stupéfiants et la Loi sur les aliments et drogues, ne prévoient pas de mesures efficaces pour répondre aux nouvelles tendances dans la consommation des drogues. Ces tendances se traduisent par l'apparition de nouvelles drogues illicites ou de drogues à formule modifiée qui échappent aux contrôles législatifs actuels.

Sous la bannière de la Stratégie antidrogue, le gouvernement demeure résolu à travailler dans le cadre d'un partenariat efficace dont la raison d'être est la réduction de l'abus des drogues au Canada.

(1220)

[Traduction]

Le projet de loi réglementant certaines drogues et autres substances, en tant que partie intégrante de cette stratégie, consolide, modernise, améliore et rationalise les dispositions des lois actuelles concernant l'abus des drogues. En d'autres termes, il s'appuie sur la politique actuelle du gouvernement concernant l'abus des drogues.

Ceux qui tirent profit de ce fléau sont indéniablement pleins de ressources, déterminés et astucieux. Leurs méthodes, leurs tactiques et leurs produits sont perpétuellement modifiés. Il nous faut une loi souple, qui permette à ceux qui sont aux premières lignes de la répression de s'adapter rapidement à ces modifications, à mesure qu'elles se produisent.

Ainsi, l'une des plus récentes innovations du monde interlope de la drogue est la production et la vente illicites de drogues dites «à formule modifiée» et de «simili-drogues». Les drogues à formule modifiée, encore appelées «drogues designer», sont de puissants psychotropes dont la structure chimique diffère légèrement de celle des substances actuellement réglementées par la Loi sur les aliments et drogues et la Loi sur les stupéfiants, comme les stimulants, les tranquillisants et les analgésiques. Pourtant, ces drogues ont, sur les personnes qui en consomment, des effets comparables à ceux des substances réglementées et elles engendrent les mêmes problèmes de santé et les mêmes difficultés sociales que les drogues conventionnelles.

Quant aux simili-drogues, ce sont des substances fabriquées de manière à ressembler aux drogues illicites. Les fabricants de ces cadeaux empoisonnés peuvent ainsi imiter les effets de drogues plus puissantes. La consommation abusive de ces drogues peut être extrêmement dommageable. Or, les principales cibles de ces marchands de misère sont souvent nos écoliers.

La fabrication et la vente des drogues à formule modifiée et des simili-drogues peuvent être extrêmement lucratives. Malheureusement, c'est un commerce dont les conséquences sont terribles pour des centaines de milliers de clients, dont bon nombre sont des jeunes.

Aux termes des lois actuelles, c'est-à-dire la Loi sur les aliments et drogues et la Loi sur les stupéfiants, les drogues doivent d'abord être inscrites à l'une des annexes de ces lois. Ces annexes réglementent les conditions de vente de ces substances au Canada. Ce n'est que lorsqu'une substance donnée est inscrite à une annexe que sa mise en vente peut devenir une infraction. Afin de corriger cette lacune, le projet de loi réglementant certaines drogues et autres substances propose des dispositions interprétatives pour qu'on puisse y inclure automatiquement les substances en question.

Dans le cadre de cette loi, lorsque l'usage de nouvelles drogues illicites se répandrait, celles-ci seraient automatiquement réglementées si elles tombaient dans les catégories visées par ces dispositions.

Le projet de loi permet également de réglementer les précurseurs. Les précurseurs sont des substances chimiques utilisées pour fabriquer des substances désignées. Ces nouvelles dispositions permettraient aux autorités compétentes de réglementer l'importation et l'exportation des précurseurs.

Les drogues vendues dans la rue peuvent également être des substances qui étaient destinées à l'origine à des applications médicales ou scientifiques. Ces substances peuvent avoir été volées dans des hôpitaux, obtenues au moyen d'ordonnances délivrées illégalement, accumulées par des «pseudo-malades» qui se font délivrer plusieurs ordonnances pour une même maladie en consultant plusieurs médecins ou encore acquises au moyen d'ordonnances falsifiées. Les personnes qui font le commerce de médicaments détournés enregistrent d'importants profits.

Ce projet de loi améliore les méthodes de contrôle actuelles de ce type d'activité. Ce projet de loi prévoit le maintien de la surveillance de la distribution des substances désignées.

[Français]

Afin de garantir le respect de la loi et de prévenir les détournements de médicaments, des inspecteurs, en collaboration étroite avec les corps de police, continueront de visiter les pharmacies, les hôpitaux, les distributeurs autorisés de stupéfiants, les médecins habilités à délivrer des médicaments, les chercheurs scientifiques et les analystes de laboratoire.

Nous savons qu'il existe des éléments criminels qui font appel à des réseaux de plus en plus sophistiqués pour produire, vendre, exporter et importer illégalement des substances désignées au Canada.

Ces éléments se procurent des biens et des objets de consommation afin de faciliter leurs activités criminelles et d'accroître leur fortune personnelle.

À mon avis, ces personnes ne devraient pas avoir le droit de conserver les profits et les biens qu'ils ont acquis illégalement.

Le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, jumelé aux dispositions législatives concernant les produits de la criminalité, frappe au coeur de l'entreprise criminelle.

Ensemble, ces deux textes de loi permettront aux tribunaux de déposséder les criminels des profits et des biens qu'ils ont accumulés illégalement en faisant le trafic de la drogue.

1563

Les tendances dans la production, la distribution et l'utilisation illégales de substances désignées changent rapidement et fréquemment.

Le projet de loi à l'étude est conçu pour tenir compte des problèmes actuels et prévoir les besoins futurs. Il ne fait aucun doute qu'il y a un problème très réel d'abus des drogues au Canada.

(1225)

Ce problème est responsable de décès, de blessures, de maladies et de perte de productivité sur les lieux de travail; il alourdit le fardeau financier de notre système de soins médicaux et, de plus en plus, il met à rude épreuve nos tribunaux et nos forces de police.

En dépit de ces faits plus qu'évidents, d'aucuns doutent encore que l'abus des drogues soit un problème réel pour la plupart des Canadiens. Ils s'imaginent qu'il s'agit d'un problème très localisé, qui n'affecte qu'une minorité de jeunes, des jeunes issus principalement de groupes à faible revenu vivant dans de grands ensembles urbains. Il est vrai que l'on ne peut déterminer de façon précise toute la dimension de l'abus des drogues au Canada.

Ce que les données statistiques ne nous montrent pas, ce sont les coûts personnels et sociaux de l'abus des drogues; en un mot, les coûts réels. Nous ne pouvons que deviner ce que représentent les vrais coûts de l'abus des drogues: possibilité perdue d'épanouissement de nos jeunes; anéantissement de carrière professionnelle prometteuse; destruction douloureuse de foyers et de familles; bouleversement coûteux de collectivités productrices. Ce sont là des réalités affligeantes, observables dans presque tous les coins du pays.

Quinze pour cent des adolescents consomment du cannabis. Le nombre total de Canadiens qui consomment de la cocaïne atteint 500 000. Ces faits, aussi troublants soient-ils, méritent notre attention. Ils méritent notre attention en tant que législateurs.

[Traduction]

Plus important encore, ils méritent notre attention en tant que parents, frères ou soeurs, amis, collègues et voisins de ceux qui sont dans le besoin, car personne n'est à l'abri. Je crois que le présent projet de loi propose un renforcement important de notre cadre législatif actuel.

Trois niveaux de gouvernement dépensent actuellement chaque année des millions de dollars pour faire appliquer la loi. En dépit de cet énorme investissement, le fait est que les forces de police et les tribunaux sont gênés par les dispositions désuètes des lois qu'ils essaient de faire respecter.

Je suis heureuse que nous ayons à débattre ce projet de loi. Même si l'on ne peut manquer d'exprimer des divergences d'opinion, je crois que cette mesure mérite néanmoins l'appui des députés des deux côtés de la Chambre. En présentant ce projet de loi, je demande, au nom de l'État, que nous fassions notre part, en tant que députés, pour aider à doter le gouvernement d'une nouvelle panoplie de moyens qui lui permettront d'accomplir la tâche qui l'attend.

Il est fort probable que de lutter pour une société où il n'y aurait plus de drogues soit un objectif méritoire, mais peu réaliste. Toutefois, étant donné l'importance des enjeux, je suis persuadée que les Canadiens veulent que nous fassions quelque chose.

_____________________________________________


1563

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, les partis se sont consultés et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime au sujet de la motion suivante.

Je propose: Que le sixième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

Je suis très reconnaissant à tous les partis à la Chambre de la collaboration dont ils ont fait preuve au sujet de cette question très délicate. Nous demandons l'adoption du rapport sur la prière.

Je souligne que la députée de Saint John, qui est absente pour cause de maladie, avait soulevé une question l'autre jour; elle a entendu la prière et l'approuve. J'ai consulté de nombreux autres députés de tous les partis de la Chambre, dont le député de Hamilton-Ouest, à ce sujet.

Les députés sont d'accord, je pense, pour adopter le texte de la prière. Je suis heureux de présenter la motion d'adoption cet après-midi et je remercie tous les députés de leur collaboration.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu): J'invoque le Règlement, monsieur le Président.

Est-ce que nous sommes à l'étape du dépôt de la motion nous dictant la nouvelle prière? L'honorable député a demandé le consentement unanime, nous sommes heureux de le donner, cependant nous mettons une condition, c'est que nous puissions dire quelques mots au sujet de cette nouvelle version de la prière à l'intention de ceux qui désirent s'exprimer sur cette version-là.

(1230)

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La présidence aimerait avoir le consentement unanime du secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre et de tous les députés. La Chambre consent-elle à l'unanimité à permettre à des députés d'intervenir, très brièvement j'espère, au sujet de la motion. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Plamondon: Monsieur le Président, je félicite le comité d'avoir réfléchi sur le fait de faire une nouvelle prière. Il me semble que la façon de faire traditionnelle était dépassée et qu'il fallait la moderniser, considérant l'appartenance à différentes religions des membres de la Chambre.

Cependant, je suis surpris et personnellement en désaccord avec une certaine partie de la prière, mais comme membre de


1564

mon caucus, j'accepterai quand même le voeu de la majorité. Je suis en désaccord avec la référence qu'on fait à Sa Très Gracieuse Majesté dans la prière.

Je suis très surpris quand je suis dans cette Chambre de voir l'ensemble des députés des autres partis se lever et crier très fort leur appartenance au Canada, se dire très fiers d'être Canadiens, mais dès qu'un symbole pourrait incarner ce désir d'être canadien, qu'est-ce qu'on fait? On utilise la reine d'Angleterre. On ne dit pas le discours du gouvernement, on dit le discours du Trône; on n'a pas quelqu'un de typiquement canadien qui signe le projet de loi, c'est la sanction royale. Toujours le symbole britannique. Sommes-nous colonisés? Sommes-nous un pays indépendant? C'est là-dessus que j'en ai dans cette prière-là.

C'est drôle que ce soit un député du Bloc québécois qui doive faire penser aux autres partis de la Chambre qu'ils sont canadiens. Ils ne sont pas une colonie de l'Angleterre, ils sont canadiens. D'ailleurs, tous les symboles qu'ils ont comme canadiens originent souvent, et même la plupart du temps, du fait français.

Nous avons chanté le ô Canada cent ans en français, pendant que vous chantiez le God Save the Queen. Et après cent ans, vous avez commencé à le chanter aussi en anglais et à en faire votre hymne national. Nous avons réclamé un drapeau pendant 50 ans, et vous aimiez mieux le «Red ensign». Nous voulions nous donner des symboles canadiens, et c'est le fait français qui réclamait cela.

Souvent, on me dit: Vous avez plus d'attachement à votre drapeau du Québec qu'au drapeau canadien. Bien sûr, parce qu'on s'est identifié, à partir des années 1950, à notre drapeau, parce qu'on n'avait pas d'autre drapeau auquel nous identifier. C'était le drapeau de l'Angleterre qu'on voyait.

Alors, je suis surpris que dans cette Chambre, au moment où vous avez la chance de vous proclamer grands Canadiens, au moment où vous avez la chance de vous donner un symbole canadien par la prière qui débute les travaux de cette honorable Chambre, de ce qu'on lit dans la prière. On y lit une imploration à la reine d'Angleterre. Je ne peux pas comprendre qu'on soit rendu. . .

M. Milliken: C'est la reine du Canada aussi.

M. Plamondon: Ah! Vous trouvez, oui? Alors, c'est aussi la reine du Canada, me dit mon confrère. Eh bien oui, par symbole, par tradition, au niveau de notre histoire. Mais ne serait-il pas temps qu'on ait nos propres symboles, si vous êtes vraiment canadien, si vraiment vous voulez vous identifier?

Chaque fois que des membres du Bloc font une référence, une allusion à un Québec souverain ou à quelque chose, alors, là, je vous vois vous lever et proclamer que vous êtes canadien. Je suis surpris.

Le président suppléant (M. Kilger): Je rappelle simplement à tous les députés de ne pas oublier de passer par l'intermédiaire de la Présidence. Lorsqu'on s'adresse d'une façon personnelle en disant «vous» ou, en anglais, «you», des fois, on peut perdre quelque chose.

Le député de Richelieu veut-il terminer?

M. Plamondon: Je vous remercie, monsieur le Président. C'est une belle tradition canadienne, cela, de passer par la Présidence, et je la respecte avec plaisir.

J'allais terminer sur le fait de cette prière, et je n'ai pas fait ce commentaire de façon agressive.

(1235)

C'est simplement une réflexion. C'est plutôt une constatation quotidienne que je fais ici, depuis neuf ans que je suis à la Chambre des communes, constatation quotidienne car, à chaque fois que vous auriez la chance de vous donner des symboles canadiens, vous passez à côté, et toujours ce symbole britannique, ce symbole qui revient continuellement avec les mots «sanction royale», «la Reine» dans la prière, «le discours du Trône», etc.

Bien sûr, je me rallierai au fait que nous devons moderniser la prière. Mais, encore une fois, je vous laisse sur ces observations et interrogations.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, je n'ai pas rédigé d'allocution, mais j'ai participé aux travaux du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre à ce sujet. Il s'agit d'une question très délicate qui revêt une grande importance non seulement pour l'ensemble des députés mais pour tous les Canadiens.

Je tiens à féliciter tous les députés de tous les partis qui participent à la discussion et aux travaux. Même s'il est impossible de satisfaire tout le monde, je crois que la prière qui est proposée reconnaît un Dieu Tout-Puissant; je crois que cet aspect était très important pour les membres du comité et il devrait recevoir l'assentiment de la population canadienne. La formule proposée reflète également notre système de gouvernement et notamment la nature parlementaire du régime. Le texte indique également que nous désirons servir les Canadiens et que nous voulons que notre pays prospère et progresse.

La formule proposée prévoit un temps de réflexion, ce qui me paraît très important. Elle inclut toutes les confessions et je ne doute pas que les réformistes appuient fermement ce concept et reconnaissent le droit à la liberté de religion. Ainsi, tous les députés de la Chambre pourront prendre un moment de réflexion de la façon qui leur semble appropriée.

Aussi, bien que je ne m'attende pas à ce que tous les députés sans exception reconnaissent un caractère parfait à la formule proposée, je crois que tous reconnaîtront qu'elle leur permet de réfléchir et de prier efficacement au début de chaque séance de la Chambre et qu'elle tient compte de la composition et de la nature du Canada.

Aussi, je crois que la nouvelle formule proposée pour la prière jouit de l'appui généralisé des députés réformistes.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Je voudrais intervenir, pour avoir participé aux travaux de ce comité. Il y a des éléments que je veux rappeler qui ont déjà été énoncés relativement à cet exercice qu'est la prière.

Cette question date depuis plusieurs années, et je pense que le comité a réussi à faire un travail excellent pour essayer de rassembler et unir tout le monde autour d'un exercice fondamental. Il est évident que cet exercice ouvre les travaux de la Chambre, et il y a une amélioration par rapport au texte précédent qui faisait en sorte qu'un certain nombre de députés, sur le plan

1565

confessionnel, ne se sentaient pas nécessairement concernés par l'exercice.

Vous savez que la Présidence doit d'abord s'assurer que le quorum à la Chambre est atteint, avant de commencer la prière. Ce malaise existant parmi l'ensemble des élus, au comité on ne pouvait pas accepter qu'un certain nombre d'élus ne se sentent pas interpellés par ces premiers moments de la Chambre et se sentent obligés de demeurer à l'extérieur s'ils ne se reconnaissaient pas dans l'exercice de la prière. Ceci est le premier élément important.

Cet objectif d'inclure l'ensemble des élus dans les discussions a été reçu, et c'est ce qui nous a amenés à réfléchir sur un texte, texte où les éléments confessionnels étaient largement éliminés pour permettre aux gens de se retrouver. Les élus devaient aussi être concernés par le fait que c'est la place où ils siègent, donc que cet exercice de prière soit orienté pour eux. Bien sûr mon collègue a relevé la présence de la Reine, mais on a voulu d'abord et avant tout que cet exercice se fasse pour les élus de la Chambre.

Cependant cet exercice démocratique qui se fait ici aujourd'hui en voulant reconnaître l'ensemble des orientations religieuses m'apparaît comme très positif et recevable, d'autant plus que la prière n'est pas nécessairement-et c'est un argument que j'ai présenté en comité-synonyme d'un texte.

(1240)

On sait que la prière est quelque chose d'intime, une relation très personnelle avec celui qu'on appelle son propre Dieu, Dieu par rapport à nos propres valeurs. Dans ce sens, nous sommes extrêmement satisfaits du fait que la confessionnalité est reconnue par l'ensemble des orientations que je qualifierais de plurielles.

Deuxièmement, cette intimité de la prière est reconnue par ce moment de silence pour chacun et chacune des élus de cette Chambre, ce qui permettra à tout le monde de se sentir inclus dans les premiers moments d'ouverture de la Chambre.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous avions consenti unanimement à ce que les interventions soient brèves. Autrement, si on n'a pas l'intention d'accorder le consentement unanime à la motion du député de Kingston et les Îles, je pourrais peut-être suggérer qu'il y ait d'autres négociations.

M. Duceppe: Monsieur le Président, nous sommes prêts. C'est bien évident qu'on ne se fait pas prier pour parler de la prière. Je vous dirai qu'on est disposés à donner le consentement unanime, on l'a dit. On peut soit poursuivre ce débat, soit s'entendre, de façon unanime, à ce que la Chambre termine ses travaux aujourd'hui à 14 h 30 et qu'il n'y ait pas de prolongation. Si j'ai l'engagement du leader du gouvernement à la Chambre à cet effet, nous cesserons de prier.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, s'il y a déjà consentement unanime en vue d'adopter la motion présentée par le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, je suis heureux d'annoncer que la Chambre pourra s'ajourner à 14 h 30. À condition, toutefois, que la Chambre donne immédiatement son consentement unanime à l'adoption de la motion et que nous revenions au débat en deuxième lecture du projet de loi C-7.

Le président suppléant (M. Kilger): Les députés ont entendu la motion.

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, dans la mesure où le leader du gouvernement à la Chambre nous donne sa parole que nous terminerons à 14 h 30, nous sommes prêts à donner notre consentement unanime et à voter sur la prière. Nous ne nous ferons pas prier plus que cela.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

_____________________________________________


1565

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI RÉGLEMENTANT CERTAINES DROGUES ET AUTRES SUBSTANCES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, la question du trafic, de la possession et de l'intoxication par des drogues est un sujet auquel les sociétés contemporaines sont lourdement confrontées. Nous savons tous et toutes que des adultes, des adolescents, des enfants même, s'intoxiquent et développent une dépendance aux drogues. Nous savons tous et toutes que des réseaux de distribution criminels, non seulement assurent l'approvisionnement de ces personnes ayant développé une dépendance, mais entraînent tous les jours des jeunes et des moins jeunes dans cet enfer qu'est le monde des drogues.

C'est pourquoi je demande à toutes les personnes qui m'écoutent actuellement de prêter attention à mes propos. Si vous avez, si les personnes qui sont à la maison ont un magnétoscope, je leur recommande d'enregistrer ce qui va suivre.

[Traduction]

Ce dont nous allons parler devrait intéresser tout le monde. Les gens peuvent penser qu'il n'y a rien d'intéressant dans ce nouveau projet de loi; eh bien, il n'en est rien.

[Français]

En effet, aujourd'hui, pendant les 40 prochaines minutes, nous allons parler de choses qui concernent tout le monde, les honnêtes gens, les gens malades, les professionnels de la santé, les professionnels de la loi et de l'ordre et, finalement, les personnes qui fabriquent, distribuent, possèdent ou consomment des drogues. Nous allons parler du projet de loi C-7.

(1245)

Ce projet de loi porte sur les drogues et leurs précurseurs ainsi que sur d'autres substances. Il fut déposé à la Chambre des communes et adopté en première lecture le 2 février dernier. L'adoption de ce projet de loi en troisième lecture aurait pour


1566

conséquence d'abroger la Loi sur les stupéfiants tout comme certains articles des Parties III et IV de la Loi sur les aliments et drogues.

Chose importante à signaler, le projet de loi C-7 est à toutes fins utiles identique au projet de loi C-85 réglementant les psychotropes et présenté par le gouvernement conservateur le 11 juin 1992. Ce projet de loi avait alors franchi les étapes de la première lecture le 11 juin 1992 et de la deuxième lecture le 6 mai 1993. Le rapport du comité avait été déposé le 3 juin 1993. Le projet de loi C-85 est mort au Feuilleton avec la tenue des dernières élections fédérales.

Le projet de loi C-7 s'inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale antidrogue. Ce projet de loi regroupe et complète les dispositions contenues dans la Loi sur les stupéfiants et dans les Parties III et IV de la Loi sur les aliments et drogues. De plus, et surtout, le projet de loi C-7 mettrait en vigueur des dispositions de la Convention unique sur les stupéfiants, celle-ci datant de 1961 et de la Convention sur les substances psychotropes datant de 1971. Ces deux conventions internationales furent ratifiées par le Canada.

Le Bloc québécois considère nécessaire que le Canada et le Québec soient en mesure de contrôler adéquatement et efficacement le domaine des stupéfiants et des drogues sur nos territoires. Le Bloc québécois reconnaît conséquemment l'évidente nécessité de légiférer dans ce domaine.

Examinons rapidement la situation qui prévaut actuellement au Canada dans ce domaine. Actuellement, en vertu de la Loi sur les stupéfiants et de la Loi sur les aliments et drogues, les drogues doivent d'abord figurer dans l'annexe d'une loi avant que leur vente dans la rue ne constitue une infraction. Par conséquent, les nouvelles drogues ne sont pas considérées comme illicites tant et aussi longtemps qu'elles n'ont pas été analysées et ajoutées à l'une des annexes des lois. Ce processus est très long. Entre-temps, les personnes qui consomment ces substances et la société en général peuvent subir et subissent des préjudices importants.

Notons que le projet de loi C-7 reprend des dispositions déjà présentes dans la législation actuelle. On y retrouve à l'article 2 la disposition à l'effet que la définition de vente englobe la distribution non seulement à titre onéreux, mais aussi à titre gracieux, c'est-à-dire gratuitement.

Toutefois, certaines dispositions sont nouvelles. Ainsi, outre la fabrication, la synthèse, la culture, la multiplication et la récolte, la définition de production inclut aussi l'offre de produire, tel que le précise l'article 2.

De plus, à l'article 3, paragraphe (1), est assimilée à une substance inscrite aux annexes non seulement toute substance qui a le pouvoir de produire l'effet d'une substance prévue aux annexes, mais aussi toute substance présentée ou tenue pour telle par l'acquéreur, lequel peut être ou ne pas être de bonne foi.

Ainsi, le trafic de toute substance présentée comme une substance prévue aux annexes ou tenue pour telle par l'acquéreur, qui peut être ou ne pas être de bonne foi, constitue un acte criminel ou une infraction punissable selon les paragraphes (1), (3) et (5) de l'article 6.

La simple possession d'une substance inscrite aux annexes, en vue d'en faire le trafic, même à titre gracieux, est un acte criminel ou une infraction punissable, selon les paragraphes (2) et (3) de l'article 6. Les sanctions prévues sont les plus fortes pour les substances de l'annexe I, et sont moins fortes d'annexe en annexe. Notons que le cannabis apparaît dans l'annexe I. La production du cannabis, à quelque échelle que ce soit, est un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de sept ans, selon l'article 8, paragraphe (2)b).

(1250)

[Traduction]

Cela étant dit, le projet de loi C-7 diffère-t-il beaucoup de la législation actuelle sur la distribution de drogues illicites? Non, pas du tout.

[Français]

Je considère important de faire maintenant cette affirmation pour rectifier toute perception autre qu'auraient pu laisser les récents propos du solliciteur général à cet égard.

En effet, le 15 février dernier, le solliciteur général déclarait à des journalistes que le projet de loi C-7 représentait le meilleur moyen pour contrer le trafic de la cocaïne orchestré par les warriors sur les territoires autochtones. Ces propos tendent à laisser croire que les lois actuelles sont insuffisantes pour agir adéquatement et contrer ce trafic.

Rien n'est plus inexact, monsieur le Président. La présente Loi sur les stupéfiants criminalise le trafic des drogues, leur importation et leur exportation, tout comme le prévoit d'ailleurs le projet de loi C-7. La présente Loi sur les stupéfiants prévoit actuellement qu'avoir en sa possession des biens provenant directement ou indirectement de la perpétration d'une infraction, au Canada ou à l'extérieur du Canada, est en soi une infraction.

Le projet de loi C-7 n'ajoute à la loi actuelle que les concepts de complot et de tentative de commission d'une infraction. Il en est de même avec le recyclage du produit de certaines infractions. Les pouvoirs de perquisitions, de fouilles, de saisies et de rétention sont réels dans la loi actuelle.

Conséquemment, il apparaît que le solliciteur général détient déjà, avec les lois actuelles, tous les outils nécessaires pour intervenir dès maintenant sur les territoires autochtones pour faire cesser le trafic de cocaïne effectué par les warriors.

Quant à sa déclaration à l'effet que le projet de loi C-7 permettrait aux policiers de procéder notamment à des ventes «surveillées», soit la possibilité pour des agents doubles d'infiltrer les réseaux de contrebande et de coincer les criminels en leur proposant des marchés, on peut douter que cela soit nouveau. En effet, le pouvoir d'enquête des policiers permet déjà l'infiltration et la vente surveillée.

Je n'ose croire, monsieur le Président, que le solliciteur général ait tenté de se cacher derrière l'adoption prévue du projet de loi C-7 pour gagner du temps et retarder toute intervention auprès des contrebandiers qui se servent des territoires autochtones. En effet, les lois actuelles ont tout le mordant nécessaire pour que le solliciteur général puisse passer à l'action. Prétendre autrement ne pourrait servir qu'à confirmer qu'il n'y a pas une volonté politique d'agir, ce qui ne peut pas décemment évidemment être le cas.


1567

Ceci dit, il convient de s'interroger sur l'efficacité de la législation proposée dans le projet de loi C-7, lorsqu'elle sera en vigueur.

Ainsi, combien s'attend-on à arrêter et à condamner de personnes de plus grâce à cette loi? Qui s'attend-on à arrêter et à condamner? De combien s'attend-on à réduire le trafic et la consommation? Enfin, le système judiciaire est-il en mesure de répondre à une charge accrue de travail? Et que prévoit cette loi pour les malheureuses personnes devenues dépendantes des drogues? Les réponses à ces questions sont, ou inexistantes, ou insatisfaisantes, comme nous l'exposerons lors de ce débat.

En effet, le projet de loi C-7 comporte à notre avis plusieurs lacunes importantes qui, non seulement ignorent les paramètres essentiels au contrôle efficace des drogues, mais de plus ouvrent la porte à des effets pervers importants. Dans les minutes qui vont suivre, ainsi que dans les discours de mes collègues du Bloc québécois qu'ils prononceront à ma suite sur ce sujet, nous nous efforcerons d'expliciter nos préoccupations de manière à ce que cette Chambre et le grand public puissent engager avec nous une réflexion en fonction des valeurs contemporaines de nos concitoyens et de nos concitoyennes.

Les lacunes que nous avons identifiées dans le projet de loi C-7 peuvent être regroupées sous forme de quatre questions: Premièrement, les activités légitimes des médecins, des pharmaciens, des vétérinaires et des dentistes sont-elles convenablement protégées contre une application abusive de la loi, et surtout contre une réglementation sur la portée de laquelle nous n'avons à ce moment aucune indication?

(1255)

Deuxièmement, les vastes pouvoirs accordés aux inspecteurs, nommés directement par le ministre, ne sont-ils pas de nature à permettre, sinon à favoriser la commission d'erreurs qui pénaliseront indûment les professionnels de la santé et leurs patients? Les citoyens et les citoyennes seront-ils en mesure d'assumer les responsabilités nouvelles que leur imposerait ce projet de loi? Et comment cette loi est-elle en mesure de coexister avec les prérogatives des gouvernements provinciaux et du Québec?

Troisièmement, comment la confidentialité du dossier médical des patients sera-t-elle assurée par une loi qui permet littéralement à n'importe qui, désigné inspecteur par le ministre, de copier les documents d'un cabinet de médecin ou d'une pharmacie et de s'emparer des données informatisées qui s'y trouvent.

Quatrièmement, et surtout, pourquoi cette loi consacre-t-elle comme criminels ces personnes qui en réalité sont intoxiquées et devraient être traitées plutôt qu'emprisonnées?

Je vais maintenant aborder chacun de ces sujets de manière à bien cadrer les zones où ce projet de loi nécessite des bonifications que nous considérons essentielles pour l'atteinte des fins de la loi et pour éviter des conséquences secondaires désastreuses.

Traitons donc, pour débuter, de notre première préoccupation, à savoir: les activités légitimes des médecins, des pharmaciens, des vétérinaires et des dentistes sont-elles convenablement protégées contre une application abusive de la loi et surtout contre une réglementation sur la portée de laquelle nous n'avons à ce moment aucune indication?

À ce sujet, permettez-moi, monsieur le Président, de rappeler que l'Association médicale canadienne, lors des auditions de mai dernier devant le Comité législatif concernant le projet C-85, s'inquiétait du fait que pour un grand nombre d'activités, les médecins ne sauraient pas lesquelles activités seront légales ou illégales tant que le règlement ne serait pas promulgué. Cela les empêche effectivement d'examiner en connaissance de cause le projet de loi. En effet, puisque les règlements peuvent être modifiés par les bureaucrates, comment les médecins et leurs patients seraient-ils informés de tels changements? L'absence de précision dans le projet de loi quant aux médicaments qui seront contrôlés ajoutait également à leur sentiment d'incertitude.

À titre d'exemple, l'Association médicale canadienne s'inquiétait entre autres que la définition de praticien, à l'article 2, soit expressément laissée au soin des règlements, en particulier pour l'application de la définition du terme «fournir», selon l'article 54, au paragraphe z1.

Nous comprenons que l'objectif du projet de loi C-7 n'est pas d'importuner les professionnels de la santé ni leurs patients. Or, nous venons de le constater, l'Association médicale canadienne a clairement indiqué que le projet de loi nécessitait des éclaircissements pour éviter que justement il ne cause des préjudices inutiles à l'exercice même de l'acte médical.

Le docteur Barry Adams, président du comité des soins de la promotion de la santé de l'Association médicale canadienne, témoignait en ces termes devant le Comité législatif en mai dernier, et je cite:

L'Association médicale canadienne est très inquiète de certains des changements proposés dans ce projet de loi, puisque certains d'entre eux semblent viser les activités légitimes des médecins. Nous avons deux préoccupations. Premièrement, la nouvelle définition de certaines infractions aura des conséquences indirectes et indésirables pour les médecins dans leur pratique quotidienne et pour leurs patients. Deuxièmement, le nouveau régime de réglementation aura pour effet de réglementer de façon inconvenante et inefficace les ordonnances médicales et accordera un accès plus facile aux dossiers confidentiels des patients.
[Traduction]

Nous partageons les graves réserves exprimées par l'Association médicale canadienne. En particulier, nous nous inquiétons beaucoup des importantes modifications touchant toutes les personnes traitées par deux médecins ou plus.

(1300)

[Français]

En effet, commet un acte criminel ou une infraction punissable la personne qui, ayant obtenu dans les 30 derniers jours une substance inscrite aux annexes ou une autorisation pour obtenir telle substance, néglige, volontairement ou involontairement, de mentionner ce fait à un praticien duquel elle cherche à obtenir ou obtient n'importe quelle substance inscrite aux annexes ou une autorisation pour l'obtenir.

L'Association médicale canadienne fait remarquer à ce sujet que cette nouvelle disposition ne s'applique pas seulement aux patients qui consultent deux médecins en moins de 30 jours; elle s'applique aussi à toute personne obtenant ou cherchant à obtenir un médicament d'une personne habilitée à le fournir. Cela comprendrait les médecins qui obtiennent ou cherchent à obtenir des


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médicaments pour des raisons médicales légitimes ainsi que tous les patients qui veulent traiter des symptômes réels.

[Traduction]

L'Association médicale canadienne souligne que la loi ne précise pas clairement ce qui est illégal. Ainsi, une personne devra savoir si elle a le droit de demander certains médicaments et si un fournisseur donné a les autorisations voulues.

Cela crée une incertitude inacceptable pour les médecins, ainsi que pour leurs patients.

[Français]

Par exemple, monsieur le Président, est-ce à dire que vous et moi, et toute la population devront mémoriser les annexes de la loi, pour éviter de commettre un crime par ignorance? Et si une telle substance vous était légitimement injectée à l'hôpital alors qu'inconscient, serait-ce commettre un crime d'omettre d'en informer le pharmacien à qui vous demanderiez de remplir une ordonnance pour cette substance ou n'importe qu'elle autre apparaissant aux annexes?

Est-ce à dire que nous devrons tous et toutes, au Québec comme au Canada, demander par écrit à notre médecin et à notre pharmacien la liste de ce qu'ils nous prescrivent, nous remettent et nous administrent, et la liste de ce dont ils ont autorisé des tiers à nous remettre ou à nous administrer et ce, que telle remise ou administration ait ou n'ait pas eu lieu? Si l'on interprète au pied de la lettre l'article 5, paragraphe 2 du projet de loi, le cauchemar que je viens d'esquisser est tout à fait possible.

[Traduction]

Je tiens à dire à ceux qui pensent qu'aucune personne sensée n'appliquera la loi de façon aussi stricte et idiote, qu'ils ne devraient pas se faire d'illusions là-dessus.

[Français]

Il est certain, il est malheureusement certain que quelqu'un appliquera la loi de façon stricte et obtuse s'il a l'occasion de le faire. Les seules questions qui se posent, ce sont quand et où, et surtout qui sera la malheureuse victime. C'est à cette Chambre de faire en sorte que la loi soit claire et limpide. C'est à cette Chambre de faire en sorte que la loi serve ses véritables objectifs et laisse en paix les honnêtes citoyens et leurs médecins ainsi que les pharmarciens. Ne laissons pas à des bureaucrates bien intentionnés le soin de réglementer ce que cette Chambre doit plutôt légiférer.

Il est une autre préoccupation conséquente au fait que les patients figurent dans la définition prévue par la loi. Dans ce contexte, pensons à l'utilisation des narcotiques analgésiques pour épargner au malade des souffrances inutiles et aux personnes qui souffrent de maladies chroniques ou de maladies en phase terminale tel le cancer. Si la nouvelle loi fait en sorte que chaque fois qu'un médecin écrit une prescription dans ce contexte, il doit se demander s'il enfreint ou non la loi, alors, monsieur le Président, je vous le demande, combien de malades n'obtiendront pas les drogues dont ils ont légitimement besoin.

Il faut que la loi soit claire et établisse nettement une distinction entre ce qui représente un comportement illicite de la part d'un médecin et ce qui relève d'une mauvaise façon de prescrire.

L'Association médicale soulignait de plus, qu'en outre elle doute que le gouvernement fédéral puisse légitimement réglementer la prescription et l'administration de médicaments par des médecins aux patients qu'ils soignent. De plus, elle est loin de croire que ce mécanisme de contrôle sera efficace. Elle précisait que le recours à une loi pénale pour réglementer la qualité du système de santé n'aura pas l'effet souhaité et est d'ailleurs contraire aux théories modernes en matière de gestion.

Monsieur le Président, je m'aperçois que mes notes sont nombreuses. De combien de temps est-ce que je dispose encore?

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, vous disposez encore d'environ 15 à 18 minutes, jusqu'à 13 heures 20.

(1305)

M. de Savoye: Monsieur le Président, j'aimerais maintenant vous entretenir de l'Association pharmaceutique canadienne qui a aussi témoigné en mai dernier. M. Leroy Fevang, directeur général de cette association, déclarait: «Nos inquiétudes portent sur quatre volets: l'incertitude concernant le type de substances touchées par le projet de loi; l'envergure des pouvoirs d'administration et d'observation de la loi; l'impossibilité que la loi impose l'obligation aux pharmaciens de fournir des renseignements d'une façon telle qu'ils s'incriminent presque eux-mêmes; et l'incertitude due au manque d'information sur la teneur des règlements et à l'absence de toute mention de médicaments de pharmacie dans le projet de loi. L'Association pharmaceutique canadienne tient à ce que la loi contienne des dispositions claires et précises sur les substances qu'un pharmacien peut légalement manipuler.»

L'Association pharmaceutique s'interrogeait entre autres sur la façon de définir un «effet stimulant». Est-il même une norme selon laquelle le mesurer? Et si une définition unique pouvait s'appliquer à tous, alors, y aurait-il des exemptions pour ce segment de la population qui peut avoir des réactions paradoxales? Qui déciderait des substances dites psychotropes? Comment ces renseignements seraient-ils communiqués aux pharmaciens pour leur permettre de commencer à exercer un certain contrôle de ces substances?

L'association citait, à titre d'exemple, le risque auquel pourrait être exposé un pharmacien lors de la vente ou lors du conditionnement d'un médicament sans ordonnance qui n'est pas inscrit dans la loi et dont les effets mineurs ou imprévus peuvent être associés à des propriétés psychotropes.

J'aimerais maintenant aborder le deuxième volet, à savoir les vastes pouvoirs accordés aux inspecteurs nommés directement par le ministre. Ces pouvoirs ne sont-ils pas de nature à permettre, sinon à favoriser, la commission d'erreurs qui pénaliseraient indûment les professionnels de la santé et leurs patients? Est-ce que les citoyens et les citoyennes seront en mesure d'assumer les responsabilités nouvelles que leur impose ce projet de loi? Et comment cette loi est-elle en mesure de coexister avec les prérogatives du Québec et des provinces dans le cadre de l'application de leur contexte particulier.

Le projet de loi C-7 semble accorder des pouvoirs quasi inquisitoires au ministre par l'intermédiaire d'inspecteurs, d'arbitres et de juges de paix. Le Comité législatif sur le projet de loi C-85 s'interrogeait l'an dernier, à savoir si l'Association canadienne des libertés civiles et la Fédération canadienne des droits et libertés auraient quelque chose à dire au sujet de la compatibi-


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lité des mesures prévues au projet de loi avec la Charte canadienne des droits et libertés, et en particulier, lorsqu'il est question du Code criminel.

À ce sujet, mentionnons l'interrogation du comité au sujet de perquisitions sans mandat. Il appert que la cour a statué, en 1984, dans l'affaire Hunter et Southam, qu'il fallait un mandat, à moins de circonstances très particulières.

Le projet de loi C-7 prévoit donc ces circonstances où un mandat n'est pas requis. Non seulement prévoit-il ces circonstances mais, en outre, le paragraphe 29(1) dit que le ministre peut désigner quiconque, littéralement quiconque, à titre d'inspecteur pour l'application de la présente loi. Ces nouveaux fonctionnaires jouiraient de pouvoirs quasi inquisitoires. Ces pouvoirs sont considérables et suffisants pour excuser n'importe quel abus fortuit, n'importe quel abus volontaire ou même n'importe quel abus ourdi.

Voilà donc que l'inspecteur est nommé par le ministre de la Santé. Ce pouvoir discrétionnaire du ministre soulève quelques interrogations. Tout d'abord, cette nomination politique ne donne pas l'assurance nécessaire que l'inspecteur détient les compétences voulues pour remplir ses fonctions. De plus, comme le ministre peut nommer quiconque à titre d'inspecteur, la nomination pourrait être à saveur partisane.

Les pouvoirs de l'inspecteur sont considérables. Selon le paragraphe 30(1) du présent projet de loi, «l'inspecteur peut, pour assurer l'application des règlements, procéder, à toute heure convenable, à la visite de tout lieu où le titulaire d'une autorisation ou d'une licence réglementaire-l'habilitant à faire le commerce de substances désignées ou de précurseurs-exerce son activité professionnelle.»

(1310)

[Traduction]

Cet article donne à un inspecteur le droit de fouiller de fond en comble le cabinet de votre médecin ou votre pharmacie, et tout cela sans un mandat.

[Français]

Nous comprenons que l'esprit du projet de loi est d'accorder ces pouvoirs à l'inspecteur pour qu'il ait la possibilité de remplir ses fonctions administratives. Mais puisque les preuves accumulées par celui-ci pourraient servir lors d'un procès au criminel et que toute action au criminel exige un mandat de perquisition à moins de criconstances très spéciales prévues par la loi, il nous apparaît que ces circonstances devraient vraiment être exceptionnelles. Or, les pouvoirs d'inspection outrepassent largement le principe que je viens d'exprimer.

Permettez-moi d'expliquer à la Chambre ce dont nous parlons présentement. Il s'agit de l'article 30, concernant le titulaire d'une autorisation ou d'une licence réglementaire, tels le pharmacien, le médecin, l'hôpital.

À leur égard, l'inspecteur dispose de droits inquisitoires, et ne souffrant d'aucune restriction à toutes fins utiles, le mandat n'étant parfois requis que pour un local d'habitation. L'inspecteur peut visiter tout lieu, à toute heure qui lui convient, tout fouiller, tout examiner, y inclus les données informatiques, utiliser tout équipement informatique ou de reprographie sur les lieux, sans dédommagement, emporter tout ce qu'il veut, recourir à la force; de plus, toute personne présente sur les lieux, y inclus le patient, sans aucun doute, est tenue de lui prêter assistance et de lui fournir tout renseignement et de ne pas entraver son action, même par omission. Et je rappelle à cette Chambre que le ministre peut littéralement nommer n'importe qui pour faire ce job, si vous me permettez l'expression.

Mentionnons aussi le fait que ce projet de loi touche aux champs de juridiction des provinces et du Québec. Ainsi, selon l'Association pharmaceutique canadienne, avec le système actuel, les gouvernements provinciaux octroient des licences aux pharmaciens leur permettant de vendre et de conditionner les produits pharmaceutiques. D'après l'Association, il n'est pas nécessaire que le gouvernement fédéral délivre, en plus des autorités provinciales, des licences aux pharmaciens concernant la vente et le conditionnement des psychotropes car cela risquerait de provoquer des doubles emplois et une confusion encore plus grande.

Ainsi donc, le projet de loi entre en contradiction avec la juridiction des provinces. Par exemple, le Québec donne un pouvoir d'inspection à la Corporation des médecins. L'inspecteur de la Corporation peut, avec un préavis, rendre visite aux médecins dans leur cabinet pour s'assurer que tout est conforme à la pratique médicale.

Le gouvernement du Québec, tout comme ceux des provinces canadiennes, accorde également au syndic de la corporation, la possibilité d'inspecter la pratique d'un médecin lorsqu'il est saisi d'une plainte à l'effet qu'un médecin a prescrit des substances nocives pour un patient. Et ceci est vrai pour les médecins et les pharmaciens partout au Québec et au Canada. Cette partie du projet de loi permettrait donc, encore une fois, au gouvernement fédéral de s'ingérer dans les domaines de compétence du Québec et des provinces.

Avec le projet de loi C-7, le ministre de la Santé et le gouverneur en conseil ont des pouvoirs accrus. Ainsi, à l'article 34, le ministre peut, sans en aviser au préalable un contrevenant présumé, prendre une ordonnance provisoire pour interdire à celui-ci toutes activités qui lui sont normalement permises aux termes du permis, de la licence ou de l'autorisation dont il est titulaire. Ainsi, à son propre insu, tel titulaire qui, avant d'être avisé de l'ordonnance émise, continue à exercer en vertu du droit qu'il détenait, devient un contrevenant.

De même, le ministre peut désigner quiconque à titre d'analyste, de par l'article 43. L'analyste a pour fonction d'analyser les échantillons prélevés lors de la visite de l'inspecteur. Comme pour l'inspecteur, cette nomination peut se faire à des fins strictement partisanes et n'assure d'aucune façon la compétence de cet analyste.

Autre exemple, l'article 55 du projet de loi C-7 prévoit que le ministre pourrait toujours soustraire toute personne, catégorie de personnes et toute substance désignée ou précurseur de l'application de la loi ou de ses règlements et ce, pour des raisons


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médicales, scientifiques ou d'intérêt public. Cette discrétion ministérielle pourrait avoir des conséquences importantes.

Ainsi, le ministre pourrait se sentir obligé de soustraire certaines substances désignées à la suite de pressions en provenance des lobbies scientifiques ou médicaux, et ce, malgré un danger potentiel pour l'intrét public.

(1315)

Il ne faut pas oublier que la communauté scientifique peut effectuer des recherches qui vont à l'encontre de l'éthique humaniste et ce, bien sûr, au nom de la science et du sacro-saint bien-être de l'humanité.

Le gouverneur en conseil, c'est-à-dire le Cabinet des ministres, obtient également par ce projet de loi de nombreux pouvoirs concernant la réglementation. Le Bloc québécois et tous les intervenants du milieu de la santé devraient donc porter une attention particulière à la réglementation qui sera déposée.

En effet, l'article 54 (1) donne au gouverneur en conseil le pouvoir de réglementation en prenant les mesures nécessaires à l'application de cette loi, y compris en matière d'exécution et de mesures de contrainte, ainsi qu'en matière d'applications médicales, scientifiques et industrielles et de distribution des substances désignées, et des précurseurs.

À l'alinéa h) de cet article, il est stipulé que le gouverneur en conseil peut, et je cite:

régir les qualités requises de toute personne s'adonnant à toute opération-notamment production, conservation, essai, emballage, stockage, vente ou fourniture-portant sur toute substance désignée ou tout précurseur, ou sur une de leurs catégories;
Par ailleurs, dans ce même article où le gouverneur en conseil a grands pouvoirs, on s'aperçoit que l'alinéa c) entre de plein fouet dans un des domaines de compétence du Québec. Cet article stipule, et je cite:

Le gouverneur en conseil peut régir par réglement, aux conditions précisées, la délivrance, la suspension, la révocation et la durée de toute catégorie de licences d'importation, d'exportation, de production, d'emballage, de fourniture, d'administration ou de vente de substances inscrites à l'une ou l'autre des annexes I à V, ou d'une de leurs catégories;
Il faut se rappeler que les licences de ventes pour les pharmaciens sont octroyées par le gouvernement du Québec et par les gouvernements provinciaux. On constate donc une autre ingérence du fédéral dans des domaines de compétence du Québec et des provinces.

Et pendant que le projet de loi accorde certains pouvoirs dont le besoin n'est pas évident, il ne semble pas se donner les pouvoirs qu'il lui faudrait vraiment. Ainsi, M. Scott Neward, avocat-conseil général auprès de l'Association canadienne des policiers, indiquait au comité législatif, en mai dernier, qu'il peut y avoir un problème potentiel. En effet, opine-t-il, qu'arriverait-il si un tribunal décide objectivement, après coup, que la force à laquelle on a eu recours pour trouver des drogues n'était pas raisonnable? Quoiqu'il soit prêt à admettre que la police puisse être passible de poursuites pour avoir éventré un plancher, il s'inquiète que les dix livres d'héroïne trouvées sous le plancher puissent de ce même fait devenir inadmissibles en preuve. Il conclut en suggérant que soit précisé clairement que toute violation liée à cette partie de la loi ne devrait pas affecter l'admissibilité de la preuve.

[Traduction]

Je suis persuadé que nous voulons tous que la loi soit appliquée dans toute sa rigueur contre les barons de la drogue, mais le projet de loi C-7 permet-il de le faire? Je n'en suis pas certain. Ainsi, pourquoi y a-t-il deux poids deux mesures en ce qui concerne le cannabis? Ayez l'obligeance de m'écouter jusqu'au bout.

[Français]

M. Paul Saint-Denis, conseiller principal à la section de la politique et du droit pénal au ministère de la Justice s'exprimait devant le comité en ces termes:

La création d'infractions mixtes pour trafic de cannabis n'a pas tellement pour objet de s'attaquer aux têtes dirigeantes du trafic comme de résoudre le problème du retard des causes devant les tribunaux. Avec la nouvelle infraction mixte concernant le cannabis, les procureurs pourront procéder par déclaration sommaire de culpabilité et ainsi réduire le nombre de causes devant jury et de procès préliminaires ou en interdire l'accès. La situation en sera grandement améliorée. Le but premier de l'infraction mixte pour trafic de cannabis n'est pas de rendre la vie plus dure aux têtes dirigeantes du trafic de la drogue, mais plutôt d'aider à solutionner le problème complexe du retard des causes devant les tribunaux, dont une partie tient au nombre croissant d'infractions pour trafic qui se retrouvent devant les tribunaux et qui prennent beaucoup de temps.
Manifestement, ce projet de loi n'est pas au point. Il a le potentiel de compromettre la quiétude des honnêtes gens. Et nous sommes en droit de nous interroger quant à son pouvoir de réduire la consommation et le trafic des drogues.

Je m'interromps quelques instants. Tantôt, je manifestais mon inquiétude, j'ai tenté d'accélérer un peu mon débit, mais il me reste encore quelques pages à lire. Est-ce que cette Chambre accepterait de me laisser prolonger mes propos au-delà du temps réglementaire?

(1320)

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Les députés ont entendu la requête du député de Portneuf qui prévoit dépasser la limite de 40 minutes dans le cadre de son intervention sur le projet de loi C-7. Y a-t-il consentement unanime pour lui permettre de poursuivre au-delà de l'heure prévue?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. de Savoye: Monsieur le Président, je vous remercie et je remercie également cette Chambre.

[Traduction]

La Chambre se rappelle sans doute que la troisième question portait sur la confidentialité des dossiers médicaux. Comment ne peut-elle être menacée par une loi qui permet littéralement à un inspecteur de copier le dossier médical d'un patient dans un cabinet de médecin, dans une pharmacie ou même dans un hôpi-


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tal et lui donne, en outre, le pouvoir d'avoir accès à des données informatisées sur quelqu'un.

[Français]

Permettez-moi de citer à nouveau, à ce propos, l'Association médicale canadienne qui se dit très inquiète de certains des changements proposés dans ce projet de loi, puisque certains d'entre eux semblent viser les activités légitimes des médecins. Entre autres, le nouveau régime de réglementation accordera un accès plus facile aux dossiers confidentiels des patients, selon l'Association médicale canadienne.

Par ailleurs, je m'inquiète sérieusement lorsque j'entends l'Association pharmaceutique canadienne déclarer, toujours par la voix de M. Leroy Fevang, qu'elle a travaillé avec le Bureau des drogues dangereuses à la mise au point d'une norme électronique unique pour la transmission électronique d'ordonnances afin de simplifier l'établissement d'une base de données sur les consommateurs de médicaments.

Monsieur le Président, vous êtes conscient qu'une telle base de données permettrait de connaître dans le détail l'histoire pharmaco-thérapeutique de tout individu, et partant, son profil physiologique et mental. Est-ce vraiment l'objectif que poursuit le projet de loi C-7? Bien sûr que non! Alors, il faut réécrire ce projet de loi de manière à ce qu'il permette ce qui est utile et nécessaire, et à ce qu'il interdise ce qui ne l'est pas et représente une ingérence indue et inacceptable dans la vie privée des honnêtes gens.

[Traduction]

Permettez-moi maintenant de m'attaquer à la quatrième question, car même si c'est la dernière, je pense que c'est la plus importante. Je pose la question suivante aux députés: Pourquoi cette loi transforme en criminels des toxicomanes qui ont besoin de recevoir des traitements médicaux, plutôt que d'être emprisonnés?

[Français]

En effet, le projet de loi C-7 consacre la criminalisation non seulement de ceux qui font le trafic de drogues, mais aussi de ceux qui en font l'usage. Plutôt que de soigner les gens souffrant d'une dépendance, la loi les traite en criminels. Le projet de loi C-7 en est donc un de répression du crime plutôt que de promotion de la santé. En effet, force nous est de constater que la prévention tout comme la réhabilitation sont des concepts absolument absents de ce projet de loi.

Nous savons tous et toutes que la consommation illégale de drogues entraîne une variété de méfaits de la part des personnes ayant développé une dépendance. En effet, ces malheureuses personnes doivent voler ou même se prostituer pour se payer à tous les jours une drogue dont leur organisme malade ne sait plus se priver. Quel esclavage!

Mais où volent-ils? Bien souvent, dans nos résidences, où ils s'emparent d'appareils électroniques, de bijoux, qu'ils revendent rapidement à vil prix, à des réseaux de receleurs. Ces malheureuses personnes sont malades et parce qu'elles ne peuvent réclamer un traitement médical sans risquer de s'incriminer, elles sont condamnées à voler pour satisfaire leur dépendance des drogues. Elles sont devenues les esclaves absolus des trafiquants de drogues qui s'enrichissent du butin volé par ces malheureux.

Le vrai problème, il est là. Il nous faut secourir ces prisonniers de la drogue et lorsque, faute de consommateurs, les trafiquants ne pourront plus exercer leur trafic, ils devront fermer boutique. Hélas, ce projet de loi ne démontre aucune préoccupation pour la réhabilitation des personnes qui ont été prises en possession de drogue. On constate surtout que ce projet de loi répond par la répression au commerce des drogues. Les peines encourues pour possession de drogue ne prévoient d'aucune façon l'accès à un programme de réhabilitation.

(1325)

Le projet de loi C-7 se préoccupe du contrôle de l'offre; il en oublie totalement le contrôle de la demande, c'est-à-dire la prévention, la désintoxication et la réhabilitation.

À ce sujet, l'édition du 27 mai 1993 du Globe and Mail proposait un article des professeurs Usprich et Solomon au sujet du projet de loi dont nous parlons, et je cite: «. . .la nouvelle loi n'aborde pas la grande majorité des problèmes qu'entraîne la loi existante et suscite plusieurs autres nouvelles préoccupations. La loi proposée est plus complexe et impénétrable que les lois qui l'ont précédée. Elle maintient le caractère punitif de la loi qui se fonde sur des préjugés que les conclusions de la commission LeDain auraient dû liquider une fois pour toutes il y a 20 ans. Le projet de loi tel qu'il se présente actuellement s'en prend au comportement des toxicomanes, en le criminalisant.»

Permettez-moi de citer aussi le Dr Reginald G. Smart, chef du service d'épidémiologie sociale à la Fondation de recherche sur l'alcoolisme et la toxicomanie, et je cite: «Beaucoup de toxicomanes qui devraient se faire traiter finissent par aller en prison parce qu'ils ont été trouvés en possession de drogue. Au Canada, on met des milliers de personnes en prison. Nous n'avons pas de processus de déjudiciarisation qui permettrait aux juges de donner le choix à l'accusé entre la prison ou une cure de désintoxication. Nos lois ne le permettent pas, alors que c'est chose courante dans beaucoup de pays du monde.»

Un toxicomane incarcéré sera non seulement un malheureux malade en prison, il coûtera en sus 70 000 $ par année à notre société, et ce, pour la majeure partie de sa vie. Une cure de désintoxication et un programme de réhabilitation ne coûteraient que quelques milliers de dollars et enrichiraient la société d'un individu capable d'une qualité de vie et d'une contribution à la vie communautaire.

Qu'on ne me réponde pas que cette préoccupation fera l'objet d'une autre loi. Cette Chambre a par devant elle le projet de loi C-7 par lequel elle peut et elle doit légiférer en matière de réhabilitation et de désintoxication. Les milliers de jeunes et de moins jeunes qui sont prisonniers de ce fléau qu'est la drogue ne peuvent plus attendre.

Avant de conclure cet exposé, je désire souligner que deux substances psychotropes bien connues sont soustraites de l'application du projet de loi, il s'agit-vous l'aurez compris- de la nicotine et de l'éthanol. Quoique nos sociétés québécoise et canadienne aient et font toujours montre d'une certaine tolérance dans l'usage de ces substances, il n'en demeure pas moins que la population est très consciente que la nicotine est nocive et entraî-


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ne des problèmes de santé graves, réduisant la qualité de vie et l'espérance de vie.

En ce qui concerne l'éthanol, il est déjà considéré un crime que de conduire avec un taux de .08 ou plus de cette substance dans le sang. Je me demande donc si le moment ne serait pas venu de considérer ces substances pour ce qu'elles sont vraiment et de les inclure au projet de loi C-7, avec les considérations qui reflètent à la fois et la tolérance et la conscientisation contemporaine.

En conclusion, nous reconnaissons la nécessité de légiférer, par le projet de loi C-7, aux fins d'assurer le contrôle de la possession et du trafic des drogues. Toutefois, nous insistons vivement pour que ce projet de loi cesse d'être silencieux en matière de réhabilitation et de désintoxication.

Enfin, il est de la plus haute importance que le projet de loi C-7 soit explicite quant aux activités légitimes des professionnels de la santé et de leurs patients, qu'il évite de reléguer à la réglementation ce qui se doit d'être précisé dans la loi même, et qu'il encadre de façon adéquate les pouvoirs qu'il accorde aux personnes et aux institutions.

Conséquemment, nous recommandons donc que le projet de loi C-7 soit confié au Comité permanent de la santé pour y être révisé dans son contenu, de manière à répondre aux préoccupations que nous venons d'énoncer.

Monsieur le Président, je vous remercie, et je remercie cette Chambre pour sa bienveillante attention.

[Traduction]

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, lorsque j'ai commencé à me pencher sur ce projet de loi, j'avais l'intention de m'arrêter sur les dispositions constructives qu'il renfermait. Cependant, je dois reconnaître que je me suis trompé en croyant pouvoir trouver quelque chose de constructif dans cette mesure, tout comme le gouvernement s'est fourvoyé en nous présentant un projet de loi comme celui-ci.

(1330)

L'objectif de ce projet de loi était tout à fait noble et ses dispositions s'imposent dans la société d'aujourd'hui. Or, au lieu de prendre le temps et de faire l'effort de bien étudier la question et d'élaborer un projet de loi répondant aux besoins actuels, nos vis-à-vis se sont contentés d'emprunter au gouvernement précédent le projet de loi C-85, d'y apporter des modifications de forme et de le présenter comme s'ils en étaient l'auteur.

Cette paresse de la part des ministériels est tout à fait regrettable. La seule bonne chose dans cette mesure, c'est qu'enfin, un gouvernement s'attaque à l'utilisation d'armes et à la vente de drogue près des écoles. On demande en outre aux juges de donner par écrit les motifs pour lesquels ils ont décidé de ne pas incarcérer des personnes condamnées pour s'être servies d'armes dans le cadre de transactions de drogue ou pour avoir vendu de la drogue près d'écoles.

Je vais vous décrire les lacunes que renferme ce projet de loi, selon moi. Le gouvernement demande à la Chambre d'adopter un projet de loi avant même la publication des règlements décrivant ce qui est permis.

Ces règlements sont nécessaires, de même que les décisions prises en fonction du Code criminel, afin que les Canadiens sachent ce qui est légal ou pas. On ne peut prétendre ignorer la loi pour se défendre devant un tribunal. Ainsi, ce projet de loi niera à tous les Canadiens la possibilité d'assurer leur défense, car ils ne sauront pas à quoi s'en tenir tant que ces règlements n'auront pas été publiés.

Les Canadiens ne devraient jamais être gouvernés par des règlements, mais seulement par des lois. En adoptant ce projet de loi avant que les règlements ne soient établis et connus, on donnera en quelque sorte la priorité à ces derniers. Je ne peux appuyer cela.

En outre, le projet de loi est si mal rédigé que je trouve à chaque page des dispositions qui pourront être contestées en vertu de la Charte. Le gouvernement croit peut-être que les Canadiens n'en ont pas assez d'être toujours devant les tribunaux, de voir des criminels être libérés et de verser des honoraires importants à des avocats parce que le libellé des lois laisse à désirer.

Je peux lui garantir qu'il se trompe. Les Canadiens veulent des lois et des textes législatifs qui ne pourront être contestés aux termes de la Charte. Or, le projet de loi C-7 est loin de tomber dans cette catégorie.

La Cour suprême a jugé que des lois qui renfermaient les mêmes erreurs d'interprétation que l'article 12 du présent projet de loi portant sur les fouilles et les saisies allaient à l'encontre de la Charte. Elle est arrivée à la même conclusion relativement à des dispositions semblables à l'article 13 de cette mesure, portant sur l'utilisation de la force nécessaire.

Aux termes de l'article 34 du projet de loi, le ministre peut retirer à une personne, comme un pharmacien ou un médecin, le droit à son gagne-pain et lui demander ensuite de venir défendre sa cause devant un arbitre.

Le projet de loi autorise le ministre à présumer de la culpabilité de quelqu'un qui devra ensuite prouver son innocence.

Est-ce que la Charte canadienne des droits et libertés dit quelque chose au gouvernement? Il n'est absolument pas question dans ce projet de loi de réinsertion sociale. Le gouvernement semble penser que de ce côté-ci de la Chambre, nous appuierons toute mesure prévoyant des peines d'emprisonnement pour les criminels.

Permettez-moi de dire aux Canadiens que nous croyons en la réinsertion sociale. Nous pensons qu'il est préférable pour la société et les contribuables d'envoyer les toxicomanes pris pour la première fois en possession d'une petite quantité de drogue dans des centres de traitement efficaces leur offrant l'espoir de reprendre une vie normale.

(1335)

Nous déplorons le fait qu'il ne soit pas fait mention de possibilités de réadaptation dans le projet de loi; cela prouve aux Canadiens que le gouvernement actuel ne conçoit une réforme judiciaire que par le biais de mesures coercitives.

Comment un Canadien esclave de la drogue, de revendeurs ou du crime organisé peut-il aspirer à un avenir meilleur si la seule possibilité, c'est qu'il soit isolé de la société?


1573

Ce projet de loi en dit long sur le gouvernement actuel. Il montre que le gouvernement ne comprend ni la réforme judiciaire, ni la notion de justice. La peine devrait être fonction du crime. Selon le gouvernement, ce serait un crime de demander de l'aide pour un problème de toxicomanie.

Je crois plus que quiconque au droit des citoyens de se sentir en sécurité dans leur foyer, leurs écoles, leurs rues et leur collectivité. Je crois aussi que les esclaves de ces drogues destructrices sont au nombre des victimes.

Nulle part dans ce projet de loi le gouvernement n'offre aux toxicomanes un espoir de réadaptation. Je voulais réellement appuyer ce projet de loi. Je voulais vraiment qu'il protège la société contre les drogues de confection. Qu'est-ce que je constate plutôt? Je vois que le projet de loi est mal rédigé et que ses dispositions sont tellement vastes qu'elles seront sûrement contestées en vertu de la Charte.

Le libellé du projet de loi est tel que, en vertu de l'article 3, des accusations pourraient être portées contre quelqu'un qui fait boire trop de café à un autre. À fortes doses, la caféine a des effets stimulants semblables à ceux des amphétamines. En vertu de ce projet de loi, quelqu'un qui fait boire plusieurs tasses de café à un ami pour le garder éveillé pourrait faire face à des accusations.

Je comprends le but du projet de loi et je crois qu'il faut adopter des mesures législatives pour résoudre ces problèmes, mais le projet de loi dont nous sommes saisis n'est pas une solution. Il créera plus de problèmes juridiques et sociaux qu'il n'en résoudra.

Le gouvernement n'a pas traité cette question avec le sérieux qu'elle méritait et c'est une honte. Il a simplement emprunté à son prédécesseur un projet de loi inadéquat pour résoudre un problème que la plupart des Canadiens souhaitent voir réglé.

Le projet de loi ne fait pas de distinction entre les règlements et le droit pénal. Il confère des pouvoirs beaucoup trop vastes aux inspecteurs chargés d'appliquer des règlements, et non pas des lois. Il confère de vastes pouvoirs qui donneront lieu à des contestations aux termes de la Charte; à cause d'elles, des preuves seront invalidées et des criminels échapperont à la justice. Il n'offre aucun espoir de réadaptation. Il complique indûment la tâche des praticiens et des sociétés pharmaceutiques.

Je dois déconseiller à mes collègues d'appuyer cette mesure et encourager le gouvernement à revoir ce projet de loi mal conçu et mal rédigé. Le gouvernement pourra ensuite présenter à la Chambre un projet de loi à la hauteur de la jurisprudence moderne.

Je serai alors très heureux d'appuyer un nouveau projet de loi permettant de réglementer certaines drogues et de traduire devant les tribunaux ceux qui font le commerce de substances désignées.

Le projet de loi C-7 prévoit des peines aussi sévères pour les petites que pour les grandes quantités de drogue, sauf dans le cas d'une disposition spéciale relative au cannabis; il n'en reste pas moins que quelqu'un qui consomme du cannabis avec un ami est passible de 14 ans d'emprisonnement.

(1340)

Cela pourrait causer des problèmes aux médecins qui rédigent des ordonnances. Ils pourraient être accusés de trafic, surtout lorsqu'une substance ne figure pas dans l'une des annexes.

Le projet de loi permettrait aux inspecteurs de consulter des dossiers médicaux confidentiels. Il donnerait au ministre le pouvoir d'imposer des peines de prison pour le trafic de substances qui ne sont pas encore énumérées dans les annexes, ce qui équivaut à l'emprisonnement arbitraire.

L'épaisseur du document me renverse. Le projet de loi, par son contenu et par la façon dont il est rédigé, relève du domaine judiciaire. Pourtant, il est renvoyé au comité de la santé qui doit l'étudier puis faire rapport. Si je faisais partie de ce comité, je me demanderais pourquoi un tel document aboutit à notre comité.

Il faut s'occuper de la question des drogues illicites.

Beaucoup de députés savent que j'ai été directeur d'une école secondaire pendant 23 ans. Un de mes collègues a aussi été directeur d'une école au Québec. Nous pourrions probablement raconter beaucoup d'histoires sur les drogues illégales et sur les conséquences de leur usage chez les jeunes. J'ai assisté à beaucoup de funérailles au cours de ces 23 ans et, dans quelques cas, les décès étaient attribuables à l'usage des drogues.

Ce qui m'ennuie le plus, c'est que depuis une vingtaine d'années, nous demandons aux responsables de l'éducation, aux collectivités, aux parents, aux gouvernements et aux hommes et aux femmes politiques de faire quelque chose. La situation nous échappe complètement, c'est très grave.

Je suis très déçu que rien n'ait été fait en 23 ans. Si, au cours de cette trente-cinquième législature, le gouvernement en avait la volonté politique et s'armait du courage qu'il faut, il pourrait régler le problème des drogues illégales comme il s'est si bravement attaqué au problème de la cigarette. Lorsqu'il a pris les mesures radicales qu'il a prises et qu'il a dit au monde entier qu'il était sérieux, les médecins de tout le Canada ont applaudi.

Les Canadiens se demandent quand nous allons réagir contre les autres drogues qui causent beaucoup de problèmes graves. Cependant, je ne devrais peut-être pas inciter mes vis-à-vis à se lancer dans l'arène tout de suite. Après tout, je devrais peut-être me satisfaire du peu d'intérêt qu'ils manifestent pour la question et qui se reflète dans le projet de loi qu'ils ont rédigé et dans leur obstination à ne pas tenir compte de la volonté des Canadiens. S'ils ne changent pas d'attitude, il ne leur restera pas beaucoup de fauteuils après les prochaines élections, car les Canadiens ne toléreront plus la situation encore longtemps.

Il y a de sérieux problèmes et tout ce que nous faisons, c'est dire que c'est regrettable.


1574

Je me souviens d'avoir appelé la police, qui reconnaissait avec moi qu'un seul individu, un adulte, était responsable de la majeure partie du trafic de drogue dans la petite ville où j'habitais. Toutes les tentatives faites pour amener cet individu devant les tribunaux ont échoué en raison d'arguments de droit ou de contestations en vertu de la Charte. La rage au coeur, tout ce que nous pouvions faire, c'était parler de la façon de régler le problème.

(1345)

Pourtant, ce que je vois aujourd'hui, c'est un document truffé d'éléments susceptibles de donner lieu à des contestations fondées sur la Charte. Pourquoi ne pas laisser tomber? Avons-nous des actions ou des intérêts dans quelque étude d'avocats pour que nous tenions tant à ce que ces avocats continuent de se remplir les poches pendant que nous ne faisons rien pour la société?

Beaucoup de députés pensent que j'exagère. Dommage qu'ils n'aient pu assister à certains des enterrements dont j'ai parlé. Dommage qu'ils n'aient pas été là quand cet adolescent de 14 ans s'est fait sauter la cervelle alors qu'il était sous l'effet de la drogue. Dommage qu'en tant que politiciens, ils n'aient pas été plus près des gens pour chercher vraiment à comprendre ce qu'ils ont à nous dire. Quand les députés voudront bien comprendre, ils comprendront enfin pourquoi je désire tant que nous fassions quelque chose.

Il y a bien une justice quand un homme de 34 ans est arrêté et accusé de trafic de drogue dans une petite localité dans ma circonscription. Tout le monde se réjouit à l'idée qu'il ne pourra plus désormais fournir de drogue aux élèves du coin. Les gens sont contents qu'il soit finalement arrêté. Cependant, quelque chose ne va pas quand trois semaines plus tard, après avoir comparu devant le tribunal et être officiellement reconnu coupable, il est relâché et il continue le même trafic. Et ce n'est là qu'un exemple. Il en existe des milliers. C'est comme si on lui donnait une tape sur les doigts en signe de reproche et qu'on lui disait de ne plus recommencer.

Encore une fois, si ce gouvernement a la volonté politique, le courage et le cran nécessaires, qu'il ne craigne pas de prendre des mesures, les Canadiens l'appuieront! Qu'il fasse quelque chose! J'unirai mes efforts aux siens et je me ferai un plaisir de présenter des documents sensés qui permettront de mettre fin à ce genre de problème. Ce n'est pas un problème propre aux libéraux, aux réformistes ou aux bloquistes. C'est un problème canadien, qui touche directement nos jeunes. Quand il est si facile de se procurer, dans notre société, des drogues aussi puissantes et dévastatrices, il est temps de faire quelque chose.

Pendant des années, une fois par mois, je suis allé visiter des prisonniers. Je me rendais à l'établissement Bowden, une prison fédérale à sécurité maximale située dans ma circonscription. Je trouve absolument ahurissant qu'il soit plus facile de se procurer de la drogue en prison que dans la rue. Au cours de mes visites, il m'était parfois très difficile de m'entretenir avec certains prisonniers parce qu'ils étaient dans un état second provoqué par l'absorption d'une drogue quelconque qu'ils s'étaient procurée en prison. Il est très facile de se procurer de la drogue en prison.

Nous, politiciens, voulons constamment que le système judiciaire réhabilite ces individus. Or, les individus qui sortent de prison sont, pour la plupart, des toxicomanes. Nous leur disons qu'ils sont guéris, qu'ils sont dorénavant capables de bien fonctionner au sein de la société, alors qu'en fait, ils sont des toxicomanes.

Aucun système ne devrait permettre que ce genre de chose puisse continuer. En tout cas, pas un système canadien. Nous devons veiller à ce que notre système empêche ce genre de phénomène de se produire. Mais en avons-nous le courage? Ce gouvernement a-t-il la volonté nécessaire? Jusqu'à présent, il ne l'a pas montré.

(1350)

J'espère qu'un jour, quelqu'un va enfin arriver avec autre chose qu'un document aussi volumineux, aussi rempli d'irrégularités et d'éléments qui ne font que créer d'autres problèmes. Serait-il possible de diviser ce document en deux parties dont l'une porterait sur la justice et l'autre, sur la santé?

J'imagine que le comité responsable des questions de santé doit être passablement embêté quand vient le moment d'examiner l'aspect judiciaire. En tant que membre du comité responsable des questions judiciaires, je ne me sentirais sûrement pas à l'aise si j'avais à examiner la partie de ce document qui porte sur la santé. C'est une façon rapide et facile de se débarrasser de la question, de veiller à ce que quelqu'un d'autre s'en occupe et, pour chacun, d'aller ensuite se vanter dans sa circonscription du merveilleux projet de loi qui a été adopté. Il ne vaut même pas le papier sur lequel il est écrit. Il ne fait rien pour favoriser la désintoxication durable ni pour arrêter la vente ou le trafic illégal qui prospère d'une façon incroyable actuellement.

Quand un pays empoche des milliards de dollars de recettes provenant d'activités telles que le trafic illégal des drogues, est-ce qu'on se réjouit? Quand ils iront à l'étranger, les députés seront-ils fiers de dire qu'ils viennent du Canada où la quatrième industrie en importance est celle des drogues? C'est magnifique, n'est-ce pas? Quel que soit son rang, cette industrie est certes très importante.

Les députés vont-ils assumer le rôle que leurs électeurs leur ont confié en les envoyant au Parlement et vont-ils vraiment s'attaquer aux problèmes au nom de toute la population? Ils ont maintenant l'occasion de commencer. Pour une fois, ils peuvent se pencher sur le sort des victimes actuelles ou de celles qui risquent de l'être parce que le crime prospère.

Je pense à d'autres pays. Prenons Singapour, par exemple. Toutes les statistiques indiquent que les cas de toxicomanie ont été ramenés à 5 p. 100. L'an dernier, j'ai eu la chance de recevoir pendant six semaines dans mon école un jeune de 17 ans qui venait de Singapour dans le cadre d'un programme d'échange. Je lui ai demandé si les drogues causaient des problèmes dans les écoles chez lui. Il m'a répondu: «Pas du tout. Si l'on vous prend en possession de drogues, on vous tue.» J'ai été renversé. La solution semble barbare, mais est-ce que les cas de toxicomanie ne sont pas de 5 p. 100 dans les écoles de ce pays? Les drogues n'y sont certes pas une menace pour la santé. Les trafiquants redoutent ce pays.


1575

Au contraire, je crains que le Canada ne soit propice au trafic des drogues. En fait, lorsque j'ai visité une prison près de chez moi, à Drumheller, j'ai constaté qu'il y avait beaucoup de détenus d'autres pays qui y servaient de courtes peines liées au trafic des drogues. Certains ont déclaré qu'ils étaient venus au Canada justement parce que c'était un paradis pour les trafiquants. Le message était clair. Ils en étaient convaincus. Il est plus facile et plus logique de faire ce trafic au Canada, parce que les règles sont très souples.

Nous pouvons y remédier. Est-ce que les députés le veulent? Ont-ils le courage nécessaire? Que Dieu les aide, parce qu'ils doivent agir et cela ne peut attendre.

On a même laissé entendre que la véritable solution à nos problèmes au Canada consisterait à légaliser simplement certaines drogues. Foutaises! Qui a bien pu avoir une telle idée? Un vrai remue-méninges s'impose pour les députés. Puis ils nous diront que la prohibition n'a jamais fonctionné. Peut-être pas autant qu'ils l'auraient souhaité, mais je peux vous garantir que lorsque la vente des boissons alcoolisés a finalement été légalisée-et je crois qu'il ne serait pas bien difficile de le vérifier-l'alcool a causé plus de divorces au Canada que n'importe quel autre problème.

(1355)

Quelle est la principale cause des faillites personnelles? L'alcoolisme. Quelle est la principale cause des faillites d'entreprise? L'alcoolisme. Pourquoi y a-t-il plus de gens que jamais en prison? Dans 70 à 80 p. 100 des cas, à cause de l'alcoolisme. Et la liste s'allonge. On a légalisé la vente des boissons alcoolisées par un merveilleux projet de loi. Comme on est bon! Et voici qu'on veut décriminaliser aussi ces autres drogues.

Je préviens ceux qui proposent que l'on fasse cela de ne pas m'approcher s'ils ne veulent pas s'embarquer dans une sérieuse querelle. Après avoir vu ce que la toxicomanie a fait à des jeunes de notre pays, je ne croirai jamais que la solution réside dans la décriminalisation des drogues.

Ce qu'il faut au Canada, c'est faire respecter la loi et l'ordre. Ce qu'il faut, c'est qu'un groupe de législateurs décident qu'il est temps de mieux assurer la sécurité des Canadiens. Et nous pouvons le faire. Mais c'est aux députés d'agir. Ils devront trouver le courage de le faire, car autrement, ils regretteront que la trente-cinquième législature n'ait pas bougé plus que les autres avant elle. Peu importe que nous soyons de la droite ou de la gauche, rédigeons un projet de loi qui ait du bon sens, puis examinons-le et réfléchissons-y en songeant à nos enfants.

Je doute beaucoup qu'un seul des 295 députés qui forment cette assemblée puisse dire que cela ne le concerne vraiment pas parce que les drogues n'ont jamais joué aucun rôle dans sa vie. Faisons le tour de nos petits-enfants, de nos neveux et nièces, de nos amis et de nos proches, et nous trouverons quelqu'un qui consomme de la drogue. Je le garantis. La toxicomanie est aussi répandue que cela. Et on rend les choses de plus en plus faciles aux vendeurs, aux trafiquants et aux importateurs de drogues.

J'espère que tout cela ne tombera pas dans l'oreille d'un sourd. D'après ce que j'ai constaté dans la plupart des circonscriptions que j'ai visitées avant les élections et même après cela, oui, c'est vrai que les gens s'inquiètent au sujet de l'économie, du déficit, du manque d'emplois et de bien d'autres choses, mais je peux vous garantir qu'ils s'inquiètent tout autant de la sécurité de leurs enfants, de leurs petits-enfants, de leurs grands-mères et de leurs grands-pères.

La semaine dernière, j'ai participé à une tribune téléphonique à Calgary. On me disait que le problème de la criminalité n'était pas aussi grave qu'auparavant. Pourtant, le premier appel venait d'une dame de 83 ans du nom de Catherine qui habite Calgary, ville où le taux de criminalité n'est vraiment pas élevé et où la violence n'est pas chose courante. Voici ce que cette dame a dit: «J'habite seule avec mon chat. Tout ce que je veux, c'est finir mes jours en paix et en sécurité. Cependant, je ne peux même pas dormir la nuit tellement j'ai peur.» Elle vit dans un secteur où les personnes âgées ont vraiment peur que quelqu'un s'introduise chez elles, les assomme et leur vole tout ce qu'elles ont. La plupart du temps, les gens qui commettent ce genre de crime le font pour acheter la drogue dont ils sont esclaves.

(1400)

Les petites localités rurales comme Wild Rose, qui comptent 200 ou 300 habitants seulement, n'ont pas de service de police parce qu'elles sont trop éloignées. J'invite les députés à venir voir les barreaux dans les portes et les fenêtres des maisons et des commerces. Qu'y a-t-il derrière ces barreaux? Des citoyens respectueux des lois qui n'ont pas d'autres moyens de protéger leurs biens.

Je me demande comment nous en sommes venus au point où ce sont les citoyens respectueux des lois qui sont derrière les barreaux pendant que les autres se promènent librement dans les rues. Je trouve cela absolument insensé et je crois qu'il est grand temps que nous fassions quelque chose à ce sujet.

Pour l'amour de Dieu, ne vantez pas les mérites du projet de loi C-7 avant de l'avoir examiné attentivement. Si vous ne pouvez pas voir ce que je vois venir avec ce projet de loi, je vous suggère d'aller vous faire examiner la vue par un oculiste, car ce document ne permettra pas de résoudre les problèmes dont souffre notre pays et auxquels il faut nous attaquer.

J'incite les députés à voter contre le projet de loi pour qu'on recommence en neuf et qu'on cherche vraiment à s'attaquer à ces problèmes. Préparez-vous à vous adresser au pays et à ces petites localités pour dire à leurs habitants que nous allons élaborer une mesure législative qui va commencer à les protéger, eux, plutôt que les criminels. Nous allons faire en sorte qu'ils cessent d'être des victimes potentielles, car nous allons commencer à nous attaquer au criminel sous un autre angle. Au lieu de voir ce que nous pouvons faire pour assurer sa sécurité et le respect de ses droits, nous allons voir ce que nous pouvons faire pour le faire emprisonner de sorte que le citoyen respectueux des lois puisse jouir d'un peu de paix et de sécurité dans son pays.


1576

Nous pouvons le faire. Faisons-le. Mais ce n'est pas avec le projet de loi C-7 que nous y réussirons.

Monsieur le Président, je vous remercie du temps de parole que vous m'avez donné aujourd'hui. Le problème est sérieux. Certains députés ne veulent peut-être pas le prendre tellement au sérieux. Il est plus amusant de chahuter en face que de parler sérieusement, mais il vaut mieux prendre le problème très au sérieux car il est en train de détruire notre pays.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer la deuxième lecture du projet de loi réglementant certaines drogues et autres substances.

Le gouvernement est conscient de la nécessité d'une réforme législative pour moderniser et améliorer les dispositions sur la toxicomanie contenues dans la Loi sur les stupéfiants et les parties III et IV de la Loi sur les aliments et drogues.

En fait, certaines des dispositions en vigueur remontent à plus de 30 ans et sont mal adaptées aux exigences de l'application de la loi, vu les dangers et la complexité du problème de la drogue au Canada dans les années 1990. Comme la ministre de la Santé l'a déjà rappelé, les drogues ont un effet catastrophique sur notre société et notamment sur les jeunes.

La ministre de la Santé a expliqué à la Chambre pourquoi ce projet était important et comment il va contribuer à protéger la santé des Canadiens.

Il est vrai que la consommation de drogues a légèrement diminué ces dernières années, mais les drogues sont de plus en plus fortes, elles sont injectées différemment, de façon dangereuse, et on combine plusieurs drogues, ce qui peut avoir des conséquences fatales.

Parmi les nouvelles tendances, dans la consommation de drogues, notons la culture hydroponique de variétés de marijuana aux effets puissants, la fabrication clandestine de drogues de confection comme les imitations de PCP et la vente aux enfants et aux adolescents de simili-drogues.

[Français]

Il est évident que cette législation, adoptée il y a 30 ans, ne permet plus aujourd'hui de venir à bout des nouvelles tendances en matière de drogue. Le nouveau projet de loi rendra la législation canadienne de contrôle de la drogue conforme aux besoins du XXIe siècle.

(1405)

[Traduction]

La ministre de la Santé a déjà traité des importants aspects du projet de loi en matière de santé. En ma qualité de solliciteur général, je voudrais parler des aspects tout aussi importants de l'application de la loi proposée.

Parallèlement à la complexité croissante du monde des narcotiques, les trafiquants se perfectionnent de plus en plus pour échapper aux méthodes habituelles des policiers chargés de la lutte contre le trafic de drogues.

Par le passé, les tribunaux ont à maintes reprises reconnu que les méthodes policières habituelles sont souvent inefficaces dans les enquêtes sur le trafic de narcotiques. Ils ont soutenu à maintes reprises qu'une loi devrait être adoptée pour autoriser expressément nos forces de police à effectuer des opérations d'infiltration efficaces contre les trafiquants.

[Français]

La Loi réglementant certaines drogues et autres substances, dont on propose l'adoption, répondra à ce besoin et donnera à la police les instruments statutaires nécessaires pour mener sa lutte contre les trafiquants de drogue, mais d'une manière qui respecte la Charte canadienne des droits et libertés.

[Traduction]

Ce projet de loi nous aidera également à remplir nos obligations internationales liées à la lutte contre le trafic de drogues. En 1990, par exemple, la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de narcotiques et de substances psychotropes est entrée en vigueur au Canada. Cet accord international est actuellement en vigueur dans plus de 70 pays. Il prévoit la coopération entre les pays et vise à supprimer le trafic illicite de diverses substances psychotropes et de produits chimiques utilisés dans leur fabrication clandestine.

Cet accord prévoit aussi le recours à des techniques d'enquête spécialisées qui sont souvent nécessaires pour infiltrer les activités de trafic hautement perfectionnées, identifier et traduire devant les tribunaux les dirigeants et les exécutants.

Les corps de police d'autres pays ont souvent recours, avec succès, à des techniques comme les ventes surveillées pour lutter contre des organisations de trafiquants sophistiquées. Dans ce genre d'opération, la police doit souvent vendre de petites quantités de drogues aux trafiquants pour gagner leur confiance et poursuivre son enquête.

Jusqu'à maintenant, toutefois, ces opérations n'avaient aucun fondement juridique et ont donc été contestées devant les tribunaux. Le nouveau projet de loi confirmera que la police a légalement le droit d'effectuer ce genre d'opération. Le projet de loi permettra également au Canada de remplir ses obligations énoncées dans deux accords internationaux, l'un portant sur les narcotiques et l'autre sur les substances psychotropes. Le projet de loi le fera selon une démarche à quatre volets.

Premièrement, il réglementera l'importation, l'exportation et la distribution de psychotropes, tout en autorisant l'emploi de certaines substances à des fins médicales, scientifiques et industrielles.


1577

Deuxièmement, il réglementera l'importation et l'exportation des «précurseurs», c'est-à-dire des substances chimiques servant à produire des drogues réglementées.

Troisièmement, il renforcera les mesures de répression de façon à permettre à tous les services policiers, soit la Gendarmerie royale et les corps de police provinciaux et municipaux, de lutter efficacement contre l'importation, l'exportation, la fabrication et la distribution illicites de psychotropes.

(1410)

En outre, il autorisera la confiscation de tout bien lié à la perpétration d'une infraction de ce genre. Au pays, ce projet de loi facilitera le travail de la police qui doit lutter contre ceux qui fabriquent des drogues illicites au Canada.

Avant que la législation ne soit modifiée, les nouvelles drogues n'étaient pas considérées comme illicites tant qu'elles n'avaient pas été analysées et identifiées. Bien sûr, il s'agissait d'un long processus. Pour corriger la situation, ce projet de loi va se fonder sur une définition assez large de ce qu'on entend par «drogue psychotrope». C'est ainsi que les nouvelles drogues mises sur le marché et qui cadreront avec cette description générique seront automatiquement visées par cette mesure législative. La police sera donc autorisée à arrêter les personnes faisant le trafic de ces nouvelles drogues illicites.

Dernier point, mais non le moindre, ce projet de loi va nous aider à mieux protéger nos jeunes. Je suis persuadé qu'il ne se trouve personne dans cette enceinte pour contester le fait que nos enfants constituent notre ressource la plus précieuse et que nous devons tout mettre en oeuvre pour les protéger.

Malheureusement, la vie d'aujourd'hui est ainsi faite que nos jeunes sont souvent les êtres qui succombent le plus facilement à la tentation de consommer de la drogue. Le sachant fort bien, les trafiquants de drogues ne ratent pas une occasion d'offrir leurs produits mortels dans les lieux fréquentés par les jeunes. Les écoles et les terrains de jeux ne sont plus aujourd'hui à l'abri des trafiquants de drogues.

Afin de protéger les enfants contre ce fléau, le projet de loi fixera de nouveaux critères dits «circonstances aggravantes» qui serviront à guider le juge au moment où il prononce une sentence contre un trafiquant de drogues. Voici des exemples de circonstances aggravantes: vente de drogues à l'intérieur d'une école ou près de celle-ci, ou à des mineurs, ou bien sollicitation de mineurs pour les impliquer dans des opérations de trafic de drogues.

Parmi les autres circonstances aggravantes, mentionnons des condamnations antérieures pour trafic de drogues, la possession d'une arme et le recours à la violence lié au trafic de drogues. Elles figurent dans le projet de loi.

De façon générale, avec les nouvelles dispositions, un trafiquant reconnu coupable peut s'attendre à recevoir une sentence plus sévère qu'autrefois, y compris en ce qui concerne les peines d'emprisonnement. Le juge qui décide de n'imposer aucune peine d'emprisonnement, malgré ces circonstances aggravantes, est tenu de motiver sa décision.

[Français]

En conclusion, je crois que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances donnera aux Canadiens l'outil dont ils ont besoin pour mieux protéger leur santé menacée par les effets néfastes des drogues.

Du point de vue du solliciteur général, sur le plan de la répression, cette loi donnera aux policiers le pouvoir nécessaire pour organiser des opérations antidrogues plus efficaces, surtout contre les grands trafiquants.

[Traduction]

La mesure législative qui est proposée augmentera l'effet de la loi et des règlements actuels qui autorisent la police et les tribunaux à confisquer aux trafiquants le produit des activités criminelles. Elle permettra aussi à la police de porter un coup plus rigoureux aux trafiquants de drogues afin d'enrayer substantiellement ce commerce dangereux.

[Français]

Voilà le genre d'approche que la population, les tribunaux et les services de police ont à juste titre réclamé pour régler ce type de problème de justice pénale et que notre gouvernement s'est engagé à adopter.

[Traduction]

J'invite les députés de tous les côtés de la Chambre à approuver ce projet de loi dans les meilleurs délais et sans réserve.

J'ai écouté les préoccupations exprimées par les porte-parole de l'opposition. Je pense que nous devrons en tenir compte au moment de l'examen détaillé en comité de ce projet de loi après l'étape de la deuxième lecture. Je suis sûr que nous le ferons. C'est en effet à ce stade que nous devons examiner les préoccupations soulevées au sujet de ce projet de loi, notamment de ses intentions et de sa perspective.

J'implore donc les députés de voir à ce que ce projet de loi franchisse rapidement l'étape de la deuxième lecture, de sorte que nous puissions sérieusement examiner les points soulevés par les porte-parole de l'opposition et par d'autres députés.

(1415)

Si je dis cela, c'est parce que j'estime que ce projet de loi fournira à la police et aux tribunaux des outils additionnels précieux pour combattre le problème de la drogue dans tout le pays.

Encore une fois, je demande à la Chambre d'appuyer ce projet de loi dans les meilleurs délais et sans réserve.

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, il est intéressant de voir comment un député, qui siégeait auparavant dans l'opposition et qui se retrouve maintenant sur les banquettes ministérielles, percevait un projet de loi du temps où il faisait partie de l'opposition. J'invite les députés d'en face à se pencher là-dessus.

J'ai lu les comptes rendus des audiences tenues par le comité et j'ai examiné les commentaires que le député avait faits lorsqu'il siégeait de ce côté-ci.

Estimez-vous approprié, monsieur le Président, que je fasse part à la Chambre d'un commentaire que le député avait exprimé lorsqu'il faisait partie de l'opposition?

Le président suppléant (M. Kilger): J'estime que oui.


1578

M. Hill (Macleod): Du temps où il faisait partie de l'opposition, le député, parlant du projet de loi, avait fait le commentaire suivant: «Comme je l'ai dit, la question n'a reçu aucune attention de la part des médias. Pourtant, le projet de loi a été lu en première lecture il y a près d'un an, en juin 1992. Lui faire franchir toutes les étapes en un ou deux mois ne serait pas bien vu, c'est le moins qu'on puisse dire».

Lorsque ce gouvernement était dans l'opposition, les conservateurs ont introduit très rapidement ce projet de loi, l'ont renvoyé à un comité tout aussi rapidement en exécution d'un engagement semblable que la Chambre a pris sans trop y réfléchir. Comme le révèlent les commentaires du comité, il y avait de graves problèmes. Je demande au gouvernement de faire très attention aux problèmes que soulèvent les députés à la Chambre à propos de ce projet de loi avant de le renvoyer à un comité.

M. Gray: Monsieur le Président, nous ne demandons pas que ce projet de loi soit adopté sans qu'il ait été débattu ou sans que l'on ait examiné les points qui ont été soulevés ou qui restent à soulever. Cependant, les règles sont telles qu'il est prévu de régler ces points pendant les délibérations d'un comité et par la suite, à l'étape de la présentation du rapport.

Beaucoup de points techniques concernant des dispositions particulières du projet de loi ont été soulevés. Je ne veux pas en parler pour le moment. Le débat à l'étape de la deuxième lecture nous permet de discuter de ces questions en général, mais pas d'apporter le genre de changements qui peuvent ou non être requis à la lumière des considérations parlementaires.

Je ne dis pas qu'il ne devrait pas y avoir de débat. Ce que je dis, c'est que le meilleur moyen d'examiner en profondeur des points comme ceux qui ont été soulevés et d'apporter les changements qui pourraient être nécessaires est de confier cette tâche au comité parlementaire, qui examinera ce projet de loi à la prochaine étape du débat.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, il y a près d'un an, j'ai eu le plaisir d'assister à une conférence sur la prévention du crime et la sécurité des collectivités. Elle était présidée par quelqu'un qui n'est plus parmi nous, si je ne m'abuse, M. Horner.

J'ai été très impressionné de voir que ce comité représentant tous les partis avait réussi à présenter un rapport unanime. Le comité est parti du principe que c'était grâce à une meilleure application de la loi ainsi qu'au développement social, qu'on pouvait le mieux prévenir le crime.

Je le mentionne, car durant la dernière campagne électorale, j'ai essayé de ne pas me faire du capital politique sur toute la question du crime, de la justice et de l'application de la loi. Ce qui m'a impressionné dans les travaux de ce comité, c'est que tous les partis ont réussi à s'entendre. Tous les membres du comité ont défendu le même point de vue en définitive.

(1420)

J'espérais certes qu'on continuerait d'aborder cette question de la même façon dans le cas de ce projet de loi. En effet, comme on l'a si bien dit dans le rapport du comité, le problème de la criminalité est complexe.

Si, en tant que pays, et il ne s'agit pas simplement des partis politiques, nous voulons être en mesure de résoudre les problèmes de criminalité, nous ne pouvons adopter des solutions simplistes. Nous devons comprendre toute la complexité de la question. Il nous incombe à tous de l'examiner avec le sérieux qu'elle mérite.

Si on se penche sur des modèles dans diverses collectivités ou différents pays, on s'aperçoit qu'au Canada, comparativement aux États-Unis, nous sommes un très bon modèle à suivre. Nos collectivités sont beaucoup plus sûres. Nous sommes confrontés à une criminalité beaucoup moindre et nous avons beaucoup moins de détenus. De plus, nous avons aboli la peine de mort. Les gens sont beaucoup plus en sécurité qu'aux États-Unis.

Nous devons nous demander le pourquoi de cette situation. Il importe d'écarter le plus possible tout sectarisme politique alors que nous traitons de questions qui ont autant de répercussions sur notre nation et nos collectivités. Il faut essayer de collaborer pour résoudre le problème.

M. Gray: Monsieur le Président, le député de Waterloo a fait des observations très importantes. Ses propos s'inspirent de son expérience professionnelle auprès de jeunes en difficulté et je suis heureux qu'il puisse nous faire bénéficier non seulement de son expérience mais également de sa sagesse.

Je souhaite que la Chambre manifeste à l'égard de ces questions l'esprit constructif et l'absence de parti pris qui ont caractérisé le rapport au sujet duquel mon collègue a pris la parole et qui a été publié durant la dernière législature.

Nous sommes saisis de questions graves qui touchent la fibre même de notre société et qui impliquent des jeunes et leur avenir. Ces questions sont très complexes et aucune mesure législative, que ce soit le projet de loi dont nous sommes saisis ou toute autre mesure, ne saurait régler à elle seule toutes les complexités de la question.

Nous devons fournir un effort sérieux de prévention de la criminalité. C'est dans cette optique que le gouvernement s'efforce d'obtenir la création d'un conseil national de prévention de la criminalité. Nous avons besoin de mesures de réinsertion sociale et c'est pourquoi le gouvernement entend modifier la législation sur les services correctionnels et les mises en liberté sous condition.

La loi n'est malheureusement pas respectée dans son intégralité; nous devons reconnaître le problème et nous y attaquer; c'est la raison pour laquelle le gouvernement propose le présent projet de loi. Il vise à faire échec au trafic de la drogue, qui est l'une des très graves causes de violation de la loi et de l'ordre au Canada.

J'espère que les députés étudieront ce projet de loi et d'autres projets de loi semblables en s'inspirant de l'excellent conseil que nous a donné le député de Waterloo. Je souhaite qu'ils reconnaissent qu'il s'agit d'un projet de loi sérieux qui s'attaque à un aspect très important du très grave problème du trafic de la drogue.

1579

J'invite donc la Chambre à examiner le projet de loi dans cette optique et à l'étudier en deuxième lecture assez rapidement afin que le comité puisse à son tour l'examiner dans l'esprit recommandé par le député de Waterloo et proposer la solution législative la plus efficace possible à un très grave problème.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, c'est justement l'importance de ce projet de loi qui me préoccupe, ainsi que l'accent qu'il place sur les questions juridiques, dont plusieurs ont parlé cet après-midi.

C'est un sujet grave, et cela m'étonne que le projet de loi soit renvoyé au comité de la santé, plutôt qu'au comité de la justice. Comme beaucoup d'autres, je serais plus rassurée si cette mesure était soumise au comité de la justice, qui serait en mesure d'examiner toutes ces questions qui peuvent avoir de graves conséquences à long terme.

Une modification de cet ordre pourrait rassurer un bon nombre d'entre nous.

(1425)

M. Gray: Monsieur le Président, la même idée m'a traversé l'esprit. Après en avoir discuté avec la ministre de la Santé, j'ai l'intention de vérifier si certaines dispositions de la Chambre ne nous permettraient pas de modifier la motion portant deuxième lecture afin que le projet de loi soit renvoyé au comité de la justice.

Franchement, en prenant connaissance du contenu de ce projet de loi, au moment de sa rédaction, j'ai pensé la même chose que la députée. Pour les raisons qu'elle vient de mentionner, j'espère que ma collègue et d'autres députés appuieront la motion, si nous proposons de modifier la motion portant deuxième lecture, en vue de renvoyer ce projet de loi au comité de la justice.

Le président suppléant (M. Kilger): Je me permettrai de faire une suggestion à la Chambre. Le ministre a commencé son intervention à 14 heures et, en vertu de l'article 24 du Règlement qui régit présentement le débat, il devait disposer de 20 minutes pour parler, puis d'une période de 10 minutes réservée aux questions et observations, pour un total de 30 minutes, ce qui nous amènera à l'heure magique de 14 h 30, heure à laquelle nous sommes convenus de terminer la séance d'aujourd'hui.

Comme le ministre a parlé pendant 15 minutes, on me permettra d'être innovateur et de prolonger de cinq minutes la période réservée aux questions et observations, ce qui correspondra quand même aux 30 minutes qui étaient attribuées au ministre sur un sujet d'un tel intérêt. Je vois que de nombreux députés demandent encore la parole. Dans les cinq minutes qui restent, je vais donner la parole au député de Wild Rose et au député de Portneuf, qui sont déjà intervenus tous les deux, en leur recommandant de faire un bref préambule et de poser une question succincte pour que le ministre puisse répondre à chacun d'eux avant 14 h 30.

Je vais commencer par accorder la parole au député de Wild Rose, si la Chambre est d'accord.

Des voix: D'accord.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, mon collègue de la Colombie-Britannique a posé la question que je voulais poser. Je vais donc céder mon tour à quelqu'un d'autre.

Le président suppléant (M. Kilger): En toute justice, y a-t-il un autre député du Parti réformiste qui voudrait poser une question ou faire une observation? Le député de Macleod a la parole.

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, je voudrais dire au ministre qu'une bonne partie de mes inquiétudes seraient apaisées si nous demandions au comité de la justice d'examiner ce projet de loi, comme on l'a proposé. Toutefois, je crois que la collectivité médicale a également besoin d'être représentée. Il pourrait donc être nécessaire, à mon avis, de confier ce projet de loi à un comité mixte.

Le ministre pourrait-il me donner son avis sur cette question?

M. Gray: Monsieur le Président, je devrai voir ce que prévoit le Règlement. Je rappelle toutefois qu'il permet à tout député d'assister aux séances des comités et de participer aux discussions même s'il n'en est pas membre. En fait, un comité comme celui de la justice-si la situation évolue ainsi-pourrait inviter et invitera certainement la ministre de la Santé et ses fonctionnaires à comparaître devant lui.

S'il ressort que le comité de la justice est le plus apte à faire cette étude, cela n'exclura pas la prise en considération de questions liées à la santé, et les députés que ces questions intéressent davantage pourront aussi participer à ses travaux. C'est ainsi que j'interprète le Règlement.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf): Monsieur le Président, pour permettre au solliciteur général de bien comprendre le cadre de mon commentaire, je lui indique immédiatement que ma question porte sur la Charte des droits et libertés. Je remarque que le projet de loi C-7 criminalise le trafic des substances désignées, l'importation et l'exportation de ces substances. La présente loi faisait la même chose et je ne crois pas que de côté-là on ait des difficultés. Le projet de loi C-7 criminalise la possession de biens d'origine criminelle et la présente loi, à l'article 19, fait la même chose et je n'anticipe pas de difficulté non plus. Mais peut-être que vous pourriez tantôt m'indiquer si vous vous en anticipez sur le plan de la Charte des droits et libertés.

On sait aussi qu'en ce qui concerne le recyclage du produit de certaines infractions, l'article 19 de la présente loi et l'article 10 du projet de loi sont relativement semblables. Perquisitions, fouilles, saisies, rétention, l'article 12 est équivalent à l'article 10 et 11 de l'actuelle Loi sur les stupéfiants. Pour ce qui est de pouvoir faire des ventes surveillées et de pouvoir s'infiltrer, l'article 54(2) de la nouvelle loi prévoit des choses qui étaient à toutes fins pratiques déjà couvertes par la Loi sur la Gendarmerie royale à l'article 18.

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Cependant, là où dans tout cela il y a quelque chose qui déroge, ce sont les droits qui sont donnés à l'inspecteur. Et, je conclus ma question ici. Nous savons que, d'un côté, il y a des pouvoirs administratifs assurés par l'inspecteur, de l'autre côté, il y a des pouvoirs judiciaires. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. J'hésite à interrompre le député de Portneuf, mais il reste peu de temps au ministre pour répondre. Le député de Portneuf a eu l'occasion de faire un éloquent discours sur un sujet très important. Alors, étant donné le peu de temps qu'il reste, je demanderais au solliciteur général de répondre.

M. Gray (Windsor-Ouest): Monsieur le Président, j'ai bien l'intention de relire attentivement le discours bien étoffé du porte-parole du Bloc québécois, parce qu'il y a soulevé plusieurs points très complexes et très intéressants.

J'essaierai de répondre assez brièvement à ses derniers commentaires. Selon lui, un article de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada donne suffisamment de pouvoir à la police pour contrôler les ventes, mais, selon les jugements des cours et les avis que nous avons reçus de nos conseillers légaux, ce n'est pas suffisant. C'est pourquoi nous avons présenté l'article 54(2).

Même si je ne suis pas expert dans le domaine, il m'apparaît que la Loi sur la Gendarmerie royale ne peut accorder de pouvoir aux autres forces policières, telles la Sûreté du Québec ou la police provinciale de l'Ontario. C'est pourquoi nous avons besoin de tels amendements dans ce projet de loi.

Je vous assure que j'ai un grand intérêt à garder intactes les libertés accordées aux Canadiens partout dans ce pays par la Charte des droits et libertés. Toutefois, c'est le devoir du ministère de la Justice de nous informer si un projet de loi répond suffisamment aux besoins de la Constitution, y inclus la Charte des droits et libertés. Sans ses conseils, il est impossible qu'un projet de loi soit déposé en cette Chambre.

[Traduction]

Ce que le député vient de dire montre que, même si un débat général serait de mise, nous devrions renvoyer le projet de loi le plus rapidement possible au comité pour pouvoir examiner plus en profondeur les observations très intéressantes qu'il vient de faire et donner toutes les explications et garanties possibles, au sujet de la Charte des droits et libertés et, d'une manière plus générale, des fondements et de la nécessité de pareille loi.

Le président suppléant (M. Kilger): En terminant, je voudrais remercier de leur coopération le ministre et tous les députés présents.

Comme il est 14 h 30, la Chambre s'ajourne à 11 heures lundi prochain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 14 h 30.)