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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 160

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 26 novembre 1998

. 1005

VQUESTION DE PRIVILÈGE
VAffaires étrangères et commerce international—Décision de
VLe Président

. 1010

VM. Randy White
VAFFAIRES COURANTES
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VPêches et océans
VM. Charles Hubbard
VIndustrie
VM. Walt Lastewka

. 1015

VPÉTITIONS
VLa cruauté envers les animaux
VM. Nelson Riis
VLe commerce international
VM. Nelson Riis
VL'assurance-emploi
VM. Gérard Asselin
VLe projet de loi C-68
VM. Gérard Asselin
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LE TABAC
VProjet de loi C-42. Troisième lecture

. 1020

VReport du vote sur la motion
VLOI SUR LES AIRES MARINES DE CONSERVATION
VProjet de loi C-48. Deuxième lecture
VMme Suzanne Tremblay

. 1025

. 1030

VM. Mauril Bélanger

. 1035

VMotion
VM. Nelson Riis

. 1040

. 1045

VM. Antoine Dubé

. 1050

. 1055

. 1100

. 1105

VL'hon. Andy Mitchell

. 1110

. 1115

VM. Yvan Bernier

. 1120

. 1125

VMme Pauline Picard

. 1130

. 1135

VMme Francine Lalonde

. 1140

. 1145

VM. George S. Baker

. 1150

. 1155

VMme Monique Guay

. 1200

. 1205

VM. Peter Stoffer

. 1210

. 1215

VMme Jocelyne Girard-Bujold

. 1220

. 1225

VM. Ghislain Lebel

. 1230

. 1235

VReport du vote sur la motion
VLOI SUR LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS
VProjet de loi C-49. Deuxième lecture
VM. David Iftody

. 1240

VMotion
VM. Mike Scott

. 1245

. 1250

. 1255

. 1300

VM. David Iftody

. 1305

VM. Peter Stoffer

. 1310

VM. Myron Thompson
VM. Charlie Power

. 1315

VM. Chris Axworthy

. 1320

VM. Jim Hart

. 1325

. 1330

VM. Nelson Riis

. 1335

. 1340

VM. Myron Thompson

. 1345

. 1350

VM. Roy Bailey

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VM. Ted McWhinney
VL'HÉPATITE C
VM. Grant Hill
VL'INITIATIVE SOLIDAIRES DANS LA PAIX
VM. John Richardson

. 1400

VL'OURAGAN MITCH
VM. Peter Adams
VLES SANS-ABRI
VMme Aileen Carroll
VLES AGRICULTEURS CANADIENS
VM. Roy Bailey
VLES AGRICULTEURS CANADIENS
VM. Wayne Easter
VM. JACQUES PARIZEAU
VM. Robert Bertrand

. 1405

VL'AN 2000
VM. Philip Mayfield
VLES ANCIENS COMBATTANTS DE LA MARINE MARCHANDE
VM. René Laurin
VLA CAMPAGNE ÉLECTORALE AU QUÉBEC
VM. Denis Coderre
VL'APPROVISIONNEMENT EN SANG DU CANADA
VMme Judy Wasylycia-Leis
VLA CAMPAGNE ÉLECTORALE AU QUÉBEC
VM. Claude Drouin

. 1410

VLA CRÉATION D'EMPLOIS À MONTRÉAL
VMme Francine Lalonde
VLE RAPPORT DE LA COMMISSION KREVER
VMme Diane St-Jacques
VLA SEMAINE NATIONALE DE SENSIBILISATION AU SIDA
VM. Lynn Myers
VL'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC
VM. John Reynolds

. 1415

VLA ST. ANDREW'S SOCIETY
VMme Elsie Wayne
VQUESTIONS ORALES
VL'AGRICULTURE
VMme Deborah Grey
VL'hon. Lyle Vanclief
VMme Deborah Grey
VL'hon. Lyle Vanclief
VMme Deborah Grey
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1420

VL'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC
VM. John Reynolds
VL'hon. Herb Gray
VM. John Reynolds
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray

. 1425

VM. Michel Gauthier
VL'hon. Herb Gray
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Herb Gray
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Herb Gray
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Herb Gray
VL'AGRICULTURE
VM. Bill Matthews

. 1430

VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Bill Matthews
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Monte Solberg
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Monte Solberg
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1435

VL'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Herb Gray
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Herb Gray
VL'AGRICULTURE
VM. Charlie Penson
VL'hon. Sergio Marchi
VM. Charlie Penson
VL'hon. Sergio Marchi

. 1440

VL'UNION SOCIALE
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VL'AGRICULTURE
VM. Jake E. Hoeppner
VL'hon. Sergio Marchi
VM. Jake E. Hoeppner

. 1445

VL'hon. Lyle Vanclief
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Charles Hubbard
VL'hon. Lyle Vanclief
VLA SANTÉ
VM. Grant Hill
VMme Elinor Caplan
VM. Grant Hill

. 1450

VMme Elinor Caplan
VL'AGRICULTURE
VM. Dick Proctor
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Rick Laliberte
VL'hon. Lyle Vanclief
VL'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
VM. Peter MacKay
VL'hon. Herb Gray
VM. Peter MacKay
VL'hon. Marcel Massé

. 1455

VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VMme Sarmite Bulte
VL'hon. Lloyd Axworthy
VLA GOLDEN WEST DOCUMENT SHREDDING
VM. Werner Schmidt
VL'hon. Alfonso Gagliano
VLA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE
VM. Yves Rocheleau
VL'hon. David Anderson
VLA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE
VM. Pat Martin
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VL'ONTARIO
VM. Scott Brison

. 1500

VL'hon. Paul Martin
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VM. Randy White
VL'hon. Don Boudria

. 1505

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS
VProjet de loi C-49. Deuxième lecture
VM. Roy Bailey

. 1510

VMme Jean Augustine

. 1515

VM. Gerald Keddy

. 1520

. 1525

VM. Jack Ramsay

. 1530

. 1535

VReport du vote
VLOI SUR LA MISE EN OEUVRE DE MESURES CONCERNANT LE RÈGLEMENT
VProjet de loi C-56. Deuxième lecture
VMme Bev Desjarlais

. 1540

. 1545

VM. Derrek Konrad

. 1550

. 1555

. 1600

VM. Werner Schmidt
VM. Gerald Keddy
VM. Gerald Keddy

. 1605

VM. Mike Scott

. 1610

. 1615

. 1620

. 1625

VM. David Iftody
VM. Peter Stoffer

. 1630

VMme Elinor Caplan
VM. Charlie Penson

. 1635

VLA LOI SUR LES MESURES SPÉCIALES D'IMPORTATION
VProjet de loi C-35. Étape du rapport
VDécision de la présidence
VLe président suppléant (M. McClelland)

. 1640

VMotions d'amendement
VM. Stéphane Bergeron
VMotion no 1
VM. Charlie Penson

. 1645

VM. Peter Stoffer

. 1650

VM. André Bachand
VM. Tony Valeri

. 1655

VReport du vote sur la motion no 1
VM. Stéphane Bergeron
VMotion no 2

. 1700

VM. Charlie Penson
VM. Tony Valeri

. 1705

VReport du vote sur la motion no 2
VL'hon. Lloyd Axworthy
VMotion no 3
VM. Stéphane Bergeron
VMotions nos 4, 5 et 6

. 1710

VM. Charlie Penson
VM. André Bachand
VM. Tony Valeri

. 1715

VReport du vote sur la motion no 3
VReport du vote sur la motion no 4
VM. Stéphane Bergeron
VMotion no 7

. 1720

VM. Charlie Penson

. 1725

VM. André Bachand
VM. Peter Stoffer
VM. Tony Valeri
VReport du vote sur la motion no 7
VReport du vote sur les motions
VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLOI SUR LE CHOIX DES SÉNATEURS
VProjet de loi C-382. Deuxième lecture
VM. Bill Gilmour

. 1730

. 1735

. 1740

. 1745

VM. Reg Alcock

. 1750

VM. Pierre Brien

. 1755

. 1800

VM. Pat Martin

. 1805

. 1810

VM. André Bachand

. 1815

. 1820

VM. Ken Epp

. 1825

VM. Bill Gilmour
VMOTION D'AJOURNEMENT
VLes affaires autochtones
VMme Bev Desjarlais

. 1830

VM. David Iftody

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 160


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 26 novembre 1998

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


 

. 1005 +

QUESTION DE PRIVILÈGE

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COMMERCE INTERNATIONAL—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la question de privilège soulevée par le député de Toronto-Centre—Rosedale le jeudi 19 novembre 1998 concernant la publication d'un projet de rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international sur la politique étrangère du Canada relativement aux armes nucléaires.

[Français]

Je veux d'abord remercier l'honorable député de sa présentation succincte et énergique, ainsi que les honorables députés de Fraser Valley, de Beauharnois—Salaberry, de Richmond—Arthabaska, de Scarborough—Rouge River et de Crowfoot, de leur précieuse contribution à la discussion de cette question.

[Traduction]

Le député de Toronto-Centre—Rosedale et plusieurs autres députés ont expliqué que ce n'était pas la première fois qu'une question de ce genre était soulevée à la Chambre.

De fait, nous avons été saisis d'une affaire presque identique à celle-ci l'année dernière, à la même époque de l'année. Le 9 décembre 1997, j'ai fait l'observation qui suit, à la page 2945 des Débats:

    Nulle intervention pour atteinte éventuelle au privilège lors de délibérations à huis clos n'est recevable à moins d'une allégation précise d'inconduite dirigée contre des personnes en particulier [...] une plainte relative à la publication prématurée du rapport d'un comité est incomplète si elle ne comporte pas de mention de la source précise responsable de la divulgation du rapport.

[Français]

La présente affaire est semblable à celle de l'année dernière ainsi qu'à un certain nombre d'affaires récentes où des rapports ou des projets de rapport de comités ont été divulgués avant que les comités n'aient eu l'occasion de présenter leur conclusion à la Chambre.

[Traduction]

Les décisions de la présidence sont constantes dans ces affaires. Par exemple, le 23 juin 1977, le Président Jerome s'est penché sur la publication prématurée d'un document d'un sous-comité à l'égard de laquelle la question de privilège citait une source dans la presse mais ne tentait pas d'identifier la source de la divulgation.

Le Président a refusé de conclure qu'il y avait, à première vue, matière à question de privilège, parce que la plainte ne portait pas sur la responsabilité de la Chambre et de ses députés à l'égard de la divulgation prématurée. Le Président Jerome dit ceci à la page 1209 des Journaux: «Comme elle n'en parle pas, je crois qu'elle omet une chose très importante concernant les privilèges de la Chambre.»

Dans l'affaire qui nous occupe, je dois donc conclure, comme je l'ai toujours fait dans le passé, que la question soulevée par le député de Toronto-Centre—Rosedale ne donne pas lieu, à première vue, à la question de privilège. Cela ne signifie pas toutefois qu'il ne s'agit pas d'une question importante ou qu'aucune mesure ne doit être prise.

J'aimerais rappeler encore une fois à la Chambre la mise en garde que j'avais faite dans une autre affaire de ce genre, le 9 octobre 1997, à la page 689 des Débats:

    Les membres de comités et les ministres travaillant avec les comités ont l'obligation de veiller à respecter eux-mêmes et à faire respecter par ceux auxquels ils font appel—que ce soit leurs adjoints personnels ou des fonctionnaires du ministère—le caractère confidentiel des documents et l'intégrité de leurs délibérations.

    Les comités doivent veiller à leur fonctionnement et être très clairs sur la manière dont ils espèrent voir traités les projets de rapports et les autres documents ayant trait à leurs délibérations tenues à huis clos. Tous ceux qui sont présents à ces réunions—ce qui vise notamment les fonctionnaires de ministères et d'organismes—doivent être conscients de leurs obligations de respecter le caractère confidentiel des délibérations dont ils ont connaissance et des documents auxquels ils ont accès.

 

. 1010 + -

[Français]

En ce qui concerne la présente affaire, il est sûrement du ressort du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international d'élucider la question de savoir quelles mesures ont été prises concernant son projet de rapport. En ce qui concerne la question plus générale soulevée par l'honorable député de Toronto Centre—Rosedale, il se peut que la Chambre ou les personnes à qui la Chambre a confié le mandat de surveiller les pratiques et procédures de celle-ci décideront qu'il est opportun d'examiner intégralement cette question.

[Traduction]

Je remercie le député de Toronto-Centre—Rosedale, de même que tous les autres intervenants d'ailleurs, d'avoir soulevé la question que, j'en suis convaincu, la présidence et la Chambre prennent très au sérieux.

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je tiens à vous remercier de la décision rendue, je la respecte. Je me demande s'il ne serait pas plus efficace et pratique si, dès ce matin, la Chambre soumettait l'affaire à l'étude du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, qui pourrait ensuite décider de la suite à donner, puisque de toute évidence nous sommes dans l'impasse.

Le Président: La Chambre peut agir à sa guise. Mais il n'appartient pas au Président en l'occurrence de renvoyer le dossier au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Je suis le serviteur de la Chambre.

M. Randy White: Monsieur le Président, je propose donc que nous renvoyions la question de la confidentialité des rapports de comités au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

Le Président: Le député a-t-il la permission de proposer cette motion à la Chambre?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.



AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 15 pétitions.

*  *  *

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PÊCHES ET OCÉANS

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le sixième rapport du Comité permanent des pêches et des océans, conformément à son ordre de renvoi du jeudi 29 octobre 1998, concernant l'étude des crédits 1b, 5b et 10b, sous la rubrique Ministère des Pêches et des Océans dans le Budget supplémentaire des dépenses B pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1999.

INDUSTRIE

M. Walt Lastewka (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir et l'honneur de présenter le onzième rapport du Comité permanent de l'industrie, conformément à son ordre de renvoi de la Chambre des communes du 29 octobre 1998. Le comité a étudié les crédits 1b, 5b, 20b, 25b, 30b, 35b, 50b, 55b, 70b, 75b, 85b, 90b, 95b, 100b, 110, 115 et 120b, sous la rubrique Ministère de l'Industrie, dans le Budget supplémentaire des dépenses pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1999 et en fait rapport.

 

. 1015 + -

Un exemplaire de chaque procès-verbal pertinent de la séance no 74 est déposé et respectueusement soumis par la présidente, la députée d'Essex.

*  *  *

PÉTITIONS

LA CRUAUTÉ ENVERS LES ANIMAUX

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter de nombreuses pétitions comptant probablement les signatures de plusieurs dizaines de milliers de personnes de Kamloops et d'autres régions de la Colombie-Britannique, qui sont préoccupées par le traitement injuste réservé à des personnes ayant fait preuve de cruauté à l'égard d'animaux.

Les pétitionnaires citent une longue liste d'affaires judiciaires où des individus ayant fait preuve de cruauté envers des animaux ne se sont vu infliger aucune peine, si ce n'est quelques remontrances. Les pétitionnaires jugent cette situation injuste et demandent deux choses. D'abord, que le gouvernement songe à ordonner aux juges de prendre cette question plus au sérieux et qu'il envisage des peines plus sévères pour les personnes qui font preuve de cruauté envers les animaux.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, j'ai une autre pétition concernant le commerce international. Les pétitionnaires sont tous des habitants de Kamloops, en Colombie-Britannique. Ils font remarquer que tout accord de commerce que le Canada pourrait conclure à l'avenir devrait renfermer des dispositions prévoyant des mesures pour empêcher l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine, ainsi que des normes environnementales et des normes de travail en général.

[Français]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente aujourd'hui à la Chambre deux pétitions signées par plusieurs centaines de commettants du comté de Charlevoix.

Dans la première, les pétitionnaires demandent au gouvernement de redonner aux chômeurs et aux chômeuses le surplus budgétaire de la caisse de l'assurance-emploi, en abolissant les règles actuelles d'éligibilité pour les nouveaux arrivants et en utilisant les surplus pour la formation des chômeurs et des chômeuses en vue de la création d'emplois directs.

Bref, il s'agit d'abolir les critères actuels d'admissibilité à l'assurance-emploi pour permettre à un plus grand nombre de chômeurs et de chômeuses d'avoir accès au programme.

LE PROJET DE LOI C-68

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, dans la deuxième pétition, les propriétaires d'armes à feu demandent au gouvernement d'abroger le projet de loi C-68 et de réorienter les sommes d'argent consacrées inutilement à la délivrance de permis à des propriétaires d'armes à feu responsables et à l'enregistrement d'armes dont la possession est légale, et de les consacrer plutôt à des mesures plus efficaces pour réduire le nombre de victimes de crimes violents.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LE TABAC

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 25 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur le tabac soit maintenant lu une troisième fois et adopté.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

 

. 1020 + -

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

[Français]

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, il y a eu des discussions avec les représentants de tous les partis. Je crois qu'il y a consentement unanime pour reporter le vote par appel nominal demandé sur la motion portant troisième lecture du projet de C-42 à la fin de la période prévue pour les affaires émanant du gouvernement, mardi, le 1er décembre 1998.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.  

Le vice-président: Le vote par appel nominal est donc reporté.

*  *  *

LOI SUR LES AIRES MARINES DE CONSERVATION

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 16 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, au moment où le débat sur le projet de loi C-48 intitulé Loi concernant les aires marines de conservation a été amorcé à l'étape de la deuxième lecture, le Parti réformiste a déposé un amendement visant le retrait de ce projet de loi dans sa facture actuelle, amendement qui a été rejeté par la majorité des députés de cette Chambre.

Il ne faut pas se méprendre sur le sens de ce rejet. En effet, au cours du débat sur l'amendement, plusieurs députés de cette Chambre ont alors dénoncé très clairement, entre autres, les grandes faiblesses que l'on retrouve dans ce projet de loi et la consultation bidon dont il a fait l'objet.

Aussi, le fait de rejeter l'amendement ne signifie pas pour autant que nous soyons prêtes et prêts à voter en faveur de ce projet de loi puisqu'il est, à sa face même, tout aussi inacceptable.

Résumons donc ce qui constitue l'essentiel de ce projet de loi.

L'objet du projet de loi C-48 vise à donner un cadre juridique à la création de 28 nouvelles aires marines de conservation, dont huit au Québec, représentatives de chacun des écosystèmes identifiés à ce jour au Québec et au Canada, aires marines qui devront éventuellement être aménagées. Le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent est la 29e aire marine de conservation. Toutefois, ce parc n'est pas inclus dans ce projet de loi, puisqu'il a fait l'objet d'une législation ad hoc, tant au Québec qu'au Canada.

Dans le préambule de la loi, le ministère du Patrimoine canadien précise les motifs qui l'amène à créer ces aires marines de conservation.

Ainsi, le gouvernement vise, premièrement, à préserver les écosystèmes marins naturels et leur équilibre, afin de maintenir la diversité biologique; deuxièmement, à établir un réseau représentatif d'aires marines de conservation; troisièmement, à faire en sorte que le Canada contribue aux efforts internationaux de création d'un réseau mondial d'aires marines représentatives; quatrièmement, à permettre à la population canadienne et mondiale d'apprécier le patrimoine naturel et culturel marin du Canada; et, cinquièmement, à permettre l'utilisation durable de ces aires, des ressources marines au profit des communautés côtières.

De toute évidence, pour mettre ce projet de loi en application lorsqu'il aura obtenu la sanction royale, le gouvernement fédéral devrait se porter acquéreur de propriétés qui appartiennent au Québec ou aux autres provinces visées par ce projet de réalisation d'aires marines de conservation.

En effet, le paragraphe (2) de l'article 5 du projet de loi stipule que le ministre ne pourra établir une aire marine de conservation «que s'il est convaincu que Sa Majesté du chef du Canada a un titre incontestable sur les terres visées, sauf pour la partie située dans la zone économique exclusive du Canada». À sa face même, ce projet de loi ne respecte pas l'intégrité du territoire du Québec.

Alors, comment le gouvernement du Canada peut-il songer un seul instant qu'un gouvernement du Québec lui cédera ses titres de propriété sur les fonds marins des aires marines de conservation qu'il songe à développer sur le territoire de l'État du Québec?

Comment le gouvernement du Canada peut-il ignorer, ou feindre d'ignorer, le paragraphe (5) de l'article 92 de l'Acte constitutionnel de 1867 qui reconnaît clairement que la gestion et la vente des terres du domaine public sont de la compétence exclusive des provinces?

Comment le gouvernement du Canada peut-il être assez incompétent, ou assez arrogant, au point d'ignorer que la Loi sur les terres du domaine public, adoptée par l'Assemblée nationale du Québec, s'applique à toutes les terres qui font partie du domaine public du Québec, y compris le lit des cours d'eau et des lacs, de même que les parties du lit du fleuve et du golfe Saint-Laurent appartenant au Québec par droit de souveraineté?

 

. 1025 + -

Comment le gouvernement du Canada peut-il être aussi ignorant et ne pas savoir que cette loi québécoise prévoit que le Québec ne peut céder ses terres au gouvernement fédéral? Le gouvernement du Canada sait très bien qu'à l'intérieur de ce cadre juridique, la seule initiative qui est permise à l'État du Québec est d'autoriser, par décret, le gouvernement fédéral à utiliser les terres du domaine public québécois, y compris les fonds marins, uniquement dans le cas où le gouvernement fédéral se limite à agir à l'intérieur de ses propres compétences.

Selon les notes qui nous ont été remises par le ministère du Patrimoine canadien concernant le projet de loi C-48, des zones marines de conservation sont prévues dans le fleuve, dans l'estuaire et dans le golfe Saint-Laurent, soit à trois endroits au moins où le lit marin relève de la compétence du Québec.

Alors, pourquoi le gouvernement du Canada tente-t-il, encore une fois, par un projet de loi, d'envahir le domaine des compétences du Québec? Pourquoi ce gouvernement, qui dit agir pour le bien de la population, refuse-t-il d'utiliser à nouveau le processus législatif qui a si bien fonctionné dans la mise sur pied et la cogestion du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent?

Pourquoi ce gouvernement refuse-t-il d'utiliser à nouveau le processus d'entente bilatérale qui fonctionne si bien dans le cas du fleuve Saint-Laurent? Pourquoi ne pas signer une entente comme celle intitulée Plan d'action Saint-Laurent, phase III, signée par tous les ministères fédéraux et québécois concernés par ce projet, et qui prévoit l'investissement de 250 millions de dollars sur cinq ans pour différentes activités liées au fleuve Saint-Laurent?

Pourquoi le ministère du Patrimoine canadien agit-il cette fois avec autant d'arrogance en réclamant d'être propriétaire du fond marin où il voudrait établir des aires marines de conservation plutôt que de permettre la mise en place d'ententes bilatérales entre les gouvernements du Québec et du Canada, notamment pour éviter au Canada de fouler aux pieds, encore une fois, les champs de compétence du Québec?

En refusant de prendre comme exemple la Loi sur le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, en imposant comme condition essentielle à la création des aires marines de conservation la propriété du territoire, le gouvernement fédéral agit, comme le disait Robert Bourassa, en gouvernement centralisateur qui veut tout contrôler, indépendamment des champs de compétence reconnus à l'un ou à l'autre des gouvernements.

Si le ridicule tuait, ce gouvernement serait déjà six pieds sous terre. Écoutez bien ceci: non satisfait d'envahir la compétence de l'État voisin qu'est le Québec par son projet de loi C-48, le gouvernement fédéral s'envahit lui-même sur son propre territoire et crée des chevauchements à l'intérieur de sa propre administration. Examinons un peu ce que cela donne comme situation ridicule.

Par l'entremise du ministère du Patrimoine canadien, le gouvernement entend créer les aires marines de conservation.

Par le biais du ministère de Pêches et Océans Canada, le gouvernement fédéral a déjà créé des zones de protection marine.

Par l'entremise du ministère de l'Environnement du Canada, le gouvernement fédéral veut créer des réserves marines de la faune.

Il faut être attentifs et bien noter qu'un même site protégé pourrait se retrouver avec plusieurs protections superposées.

Bref, le gouvernement fédéral, qui crie sur tous les toits qu'il a répondu à toutes les exigences du Québec, qui écrit dans son discours du Trône qu'il met fin aux chevauchements et aux intrusions dans les champs de compétence des provinces, trouve cette fois-ci le moyen de se diviser en trois et de se chevaucher lui-même pour être absolument certain de nous agresser et d'envahir, d'une façon ou de l'autre, les compétences du Québec.

Après avoir pris connaissance de la démarche et des résultats de la consultation menée par Patrimoine Canada son avant-projet de loi, le Bloc québécois conclut que la consultation a été un échec lamentable et qu'il est vraiment regrettable qu'avec tous les moyens mis à la disposition de la ministre, celle-ci n'ait pas jugé important de procéder à une véritable consultation qui lui aurait permis de prendre conscience de toutes les faiblesses de ce projet de loi. Malgré cet échec désastreux, Patrimoine Canada s'en réclame pour affirmer qu'il a l'appui de la population pour aller de l'avant avec son projet de loi. Quelle triste farce!

Pour qu'il y ait une protection efficace des écosystèmes, le gouvernement du Canada doit s'assurer de la collaboration des populations côtières. Le Bloc québécois invite instamment le gouvernement à trouver des solutions viables aux problèmes économiques des populations côtières s'il espère, un jour, en venir à une entente avec elles sur la protection de l'environnement.

L'expérience de partenariat du gouvernement fédéral avec l'État du Québec aurait dû lui servir de modèle à suivre pour la création des autres aires marines de conservation. Plutôt que d'utiliser une politique d'ouverture, de collaboration, le gouvernement fédéral verse encore dans l'arrogance, l'agression, l'envahissement et le chevauchement. Tout ce qu'il faut pour entretenir notre désir de partir à la prochaine occasion.

On aura compris que le Bloc québécois est contre ce projet de loi, principalement pour les raisons suivantes.

Au lieu de miser sur la concertation, comme dans le cas du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, le gouvernement fédéral veut implanter des aires marines de conservation sans égard aux compétences du Québec en matière de protection de son territoire et en environnement.

 

. 1030 + -

Deuxièmement, la ministre du Patrimoine canadien propose la mise en place d'une nouvelle structure, les aires marines de conservation, qui viendront dédoubler les zones de protection marines de Pêches et Océans Canada et les zones marines protégées d'Environnement Canada.

Quand quelque chose fonctionne, le gouvernement du Canada cherche le moyen de mettre des bâtons dans les roues, quand ce ne sont pas des bâtons de baseball ou du poivre de Cayenne. Ce gouvernement préfère entretenir la chicane, la rancoeur, voire l'écoeurement de la population. Il ne comprend pas que les Québécois et les Québécoises en ont ras-le-bol de ces politiques arrogantes qui nous coûtent une fortune. J'ai bien confiance que la population saura le dire haut et fort, le 30 novembre prochain.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais répondre aux affirmations faites par certains de mes distingués collègues, à savoir que le projet de loi C-48 empiète sur les compétences du Québec et des autres provinces en ce qui a trait aux fonds marins. Rien ne pourrait être plus loin de la vérité.

En ce qui concerne les régions marines entourant la province de Québec, le fond marin est clairement de compétence provinciale dans une région, celle de l'estuaire du Saint-Laurent. Une entente spéciale et des lois complémentaires ont été élaborées pour le parc marin Saguenay—Saint-Laurent qui représente cette région. J'oserais affirmer que ce fut un bel exemple de coopération, tant dans cette Chambre qu'entre nos gouvernements respectifs.

Le fond marin dans les autres régions marines adjacentes au Québec est, soit clairement de compétence fédérale, soit de juridiction contestée entre ces deux gouvernements, c'est-à-dire le gouvernement canadien et celui de la province de Québec.

Dans le projet de loi C-48, nous proposons la création d'aires marines de conservation là où le fond marin est de compétence fédérale, qu'elle soit fondée sur la possession présente ou sur une entente fédérale-provinciale.

Il se peut que la juridiction du fond marin, dans une région particulière, soit contestée. Cela est une autre paire de manches. Le but de ce projet de loi n'est pas de résoudre de telles disputes.

Nous n'avons aucunement l'intention de procéder unilatéralement dans une région contestée. Il faut le comprendre. Le fait d'affirmer le contraire, c'est d'induire la Chambre en erreur.

Idéalement, une dispute quant à la juridiction du fond marin devrait être résolue avant qu'une aire marine de conservation ne soit créée. Nous aurions des consultations afin de trouver une approche qui soit mutuellement acceptable. Dans certains cas, il est possible que la région marine puisse être représentée par une autre aire où la juridiction du fond marin n'est pas en question.

Je le répète, nous n'avons aucunement l'intention, contrairement à ce qui a été affirmé à maintes reprises à la Chambre par les collègues du Bloc québécois, de procéder unilatéralement dans une région où le fond marin est contesté. Qu'on se le tienne pour dit.

Nous utilisons déjà le modèle proposé dans ce projet de loi. Suite au protocole d'entente fédéral-provincial signé en mars 1997 avec le gouvernement ontarien, nous examinons conjointement la possibilité d'une aire marine de conservation pour l'ouest du lac Supérieur.

Pareillement, nous travaillons avec la province de Terre-Neuve et du Labrador sur une étude de faisabilité pour une aire marine de conservation dans les baies de Bonavista et Notre-Dame. Cette étude a été amorcée suite à la signature d'un protocole d'entente fédéral-provincial, en février 1997. De plus, le protocole d'entente sur l'héritage patrimonial marin du Pacifique, signé avec la Colombie-Britannique en 1995, engage les deux gouvernements à entreprendre une étude de faisabilité conjointe pour une aire marine de conservation dans le détroit de Georgia Sud.

Suite à de telles études, si les gouvernements arrivent à la conclusion qu'une aire marine de conservation est possible, l'étape suivante est la négociation d'une entente entre le gouvernement canadien et la province concernée. Cette entente énoncerait les modalités et les conditions en vertu desquelles serait établie l'aire marine de conservation en question, y compris, s'il y a lieu, les dispositions pour la cession au gouvernement canadien de toutes les terres immergées provinciales.

 

. 1035 + -

De telles ententes fédérales-provinciales sont déjà en place pour la création des aires marines de conservation de Fathom Five, dans la baie georgienne, en Ontario, et de Gwaii Haanas dans les îles de la Reine-Charlotte, en Colombie-Britannique.

Ceci démontre que bon nombre de provinces collaborent au concept d'une aire marine de conservation compatible avec les dispositions élaborées dans ce projet de loi.

Le modèle qui est le fondement du projet de loi C-48, soit la propriété des terres par le gouvernement du Canada, est clairement nécessaire là où le gouvernement canadien possède déjà les terres. C'est l'intention de ce projet de loi.

Notre expérience avec les ententes et les études de faisabilité d'aires marines de conservation, telles que déjà décrites, démontre que le modèle avancé à même ce projet de loi est entièrement raisonnable et pertinent, n'en déplaise à ceux qui oseraient et qui ont affirmé le contraire.

Sur ce, je propose:  

    Que la motion soit maintenant mise aux voix.

[Traduction]

M. Nelson Riis: Monsieur le Président, j'aimerais des éclaircissements. Est-ce que nous sommes en train de débattre la teneur du projet de loi C-48 ou la motion qui vient d'être proposée?

Le vice-président: Nous débattons la teneur du projet de loi C-48. La question préalable a été posée et quand le débat sera terminée, le vote portera sur la motion: Que cette question soit maintenant mise aux voix. La motion sur le projet de loi sera alors immédiatement mise aux voix sans possibilité d'amendement.

J'espère que cela répond aux interrogations du député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de vous avoir demandé des éclaircissements. Une certaine confusion régnait dans mon esprit, mais plus maintenant.

Je suis heureux de pouvoir commenter le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation. Je précise que cette mesure législative prévoit la création et la gestion d'un réseau d'aires marines nationales de conservation, ou AMNC, représentatives des 29 aires marines du Canada. Ces 29 aires de conservation ont des caractéristiques biologiques et océanographiques qui les rendent uniques.

Elles renferment des étendues d'eau douce et d'eau salée. Une étude systémique de Parcs Canada a permis de déterminer 29 aires dans les Grands Lacs du Canada, les eaux intérieures soumises à l'action des marées, et la mer territoriale dans la zone économique exclusive connue sous l'appellation de zone de 200 milles.

 

. 1040 + -

Le débat à l'étape de la deuxième lecture a révélé que, sous sa forme actuelle, la mesure législative contenait de nombreux défauts. Nous, du Nouveau Parti démocratique, convenons que ce projet de loi présente certains problèmes. En tant que parlementaires, nous avons le devoir de corriger les erreurs que nous voyons et de nous employer à l'améliorer au nom des Canadiens. C'est dans cet esprit que je vais faire plusieurs commentaires ayant pour objet de bonifier le projet de loi. Loin de nous y opposer, nous l'approuvons en principe avec le plus grand enthousiasme. C'est dans ce contexte que j'interviens ce matin.

C'est une bonne année pour amorcer la protection des 29 aires marines représentatives du Canada, puisque 1998 est l'année des océans. En tant que Canadiens, nous savons qu'il y a des problèmes reliés à nos océans, notamment l'impact de la pollution sous toutes ses formes, la surpêche, la disparition de stocks de poisson et la mauvaise gestion de la pêche en général. Nous avons été témoins de la dévastation des localités côtières sur les côtes est et ouest. La côte nord a un problème, ainsi que le réseau des cours d'eau intérieurs.

J'affirme à regret que les faits semblent montrer que le ministère des Pêches et des Océans s'est rendu coupable de mauvaise gestion face à cette ressource. C'est vraiment malheureux. Je ne suis pas assez au courant de la situation pour commenter comment cette mauvaise gestion a pu se produire, mais le rapport du Comité permanent des pêches et des océans est bien documenté et montre qu'elle a causé des problèmes très graves sur toutes nos côtes et dans nos eaux intérieures.

Nous savons aussi qu'il y a des problèmes causés par la pollution et la mauvaise gestion relativement aux Grands Lacs et aux autres cours d'eau intérieurs. Le Comité permanent des pêches et des océans en a fait état récemment, en particulier dans son rapport sur les pêches en eau douce.

Le projet de loi C-48 est un pas en avant pour assurer la survie des eaux côtières et intérieures et faire en sorte qu'elles soient plus ou moins dans leur état originel pour les générations à venir. Nous sommes d'accord pour dire que, même s'il y a des lacunes dans ce projet de loi, et j'en soulignerai quelques-unes dans un moment, cette étape vers la préservation des aires marines est trop importante pour qu'on puisse la rejeter pour des raisons purement partisanes ou avec des arguments creux, comme nous en avons entendu dans le précédent débat.

Le projet de loi C-48 doit être considéré comme une étape importante pour nous préparer au siècle prochain. Les erreurs graves et la mauvaise gestion dont notre pays s'est rendu coupable ont été reconnues. Nous pouvons en tirer des leçons et, comme le projet de loi en est la preuve, prendre les moyens de corriger la situation. En tant que parlementaires, nous devons agir au nom de tous les Canadiens pour assurer que cette loi habilitante donne les meilleurs choix possibles aux générations futures et à l'ensemble des collectivités du Canada.

Nous maintiendrons notre appui de principe au projet de loi C-48. Cependant, je veux faire valoir certains points qui, à notre avis, devraient être abordés durant le débat en cours, et surtout au comité, pour que nous puissions continuer à l'appuyer jusqu'à la fin.

Il faut examiner en profondeur, durant les audiences du comité, les résultats de la consultation effectuée jusqu'à maintenant. On a fait 3 000 envois postaux et Parcs Canada a reçu environ 300 réponses. En examinant ces réponses, on doit reconnaître que les questions de recouvrement des coûts prévus dans la loi suscitent des préoccupations. Il faut absolument mieux définir les mesures de recouvrement des coûts proposées.

Nous reconnaissons que l'accès aux aires marines de conservation doit être préservé pour les collectivités locales et les pêcheurs. C'est de première importance. Nous devons reconnaître que des mesures efficaces et l'étude de possibilités en matière d'écotourisme doivent figurer dans le projet de loi définitif. Il est juste de dire que l'écotourisme est l'un des secteurs d'avenir de l'industrie touristique du Canada. Nous croyons fermement qu'il faut reconnaître l'attrait de nos aires marines nationales pour les écotouristes. Il nous tarde de voir l'inclusion d'un accès approprié dans la loi.

Il importe d'avoir une meilleure description et une meilleure délimitation des aires marines de conservation en ce qui concerne la préservation, la protection et la réglementation. Il importe aussi de fixer la période d'examen à deux ans plutôt que les cinq ans proposés maintenant. Étant donné que nous entrerons dans un domaine nouveau, nous estimons qu'un examen tous les deux ans est préférable.

 

. 1045 + -

Nous croyons aussi fermement que la question des droits des premières nations ainsi qu'une meilleure explication et une meilleure délimitation des «réserves» nécessitent la participation à part entière de toutes les premières nations. Cela pourrait se faire selon le mode de consultation et de conception de la gestion utilisé pour l'établissement du parc marin du Saguenay-Saint-Laurent. Ce pourrait être, à notre avis, un bon modèle à suivre pour des initiatives semblables à l'avenir.

La question du groupe de gestion fédérale-provinciale mixte et des autres intéressés requerra des mesures de coopération entre les parties et les gouvernements pour veiller à ce que les droits provinciaux relatifs aux terres et aux ressources ne soient pas compromis.

L'effet des aires marines de conservation proposées sur les terres du Nunavut devrait être étudié sérieusement. Nous devons étudier la question de l'utilisation des aires marines de conservation en songeant à inclure une allusion aux méthodes de conservation et aux principes écologiques. Ces deux éléments sont fondamentaux pour notre appui et je suppose qu'ils se reflètent dans la portée générale du projet de loi.

Les pêcheurs commerciaux doivent participer pleinement au choix et à la conception de la gestion des parcs pour garantir le maintien d'une relation efficace. Sur nos deux côtes, c'est évidemment une question à laquelle on est très sensibles, mais nous estimons que cela pourrait être facilement géré et inclus dans la loi ou sous forme de droits subséquents.

L'impact des réseaux fluviaux sur les aires marines de conservation requerra des ressources suffisantes pour les sciences marines et la modélisation d'écosystèmes. Il y a aussi la coopération provinciale et l'ampleur de l'impact des terres publiques et des droits d'exploitation du sous-sol sur le succès du programme. Nous voulons faire particulièrement attention à cela.

Comme l'ont signalé mes collègues, les zones d'exclusion doivent être définies clairement et laisser place à des ajustements futurs. Cela doit être prévu dans une loi habilitante qui serait acceptable en regard des besoins futurs. Je sais, monsieur le Président, que la question des zones d'exclusion vous tient à coeur.

Parmi les préoccupations régionales exprimées aussi dans les diverses réponses, celles de la côte ouest exigeront des approches différentes et beaucoup de souplesse par rapport à celles de la côte est. Nous comprenons bien, et je sais que le secrétaire d'État comprend bien, les différences qui existent entre les préoccupations de la côte est et celles de la côte ouest et les différences évidentes entre les deux côtes par rapport aux problèmes des pêches dans les régions centrales et aux questions de conservation.

La coordination des côtes entre les divers ministères intéressés doit être définie. Avant que le projet de loi ne revienne à la Chambre, il faudra distinguer clairement, et j'insiste sur ce mot, les responsabilités d'Environnement Canada à l'égard de la faune et des écosystèmes adjacents aux aires marines de conservation, le pouvoir de Parcs Canada de mettre en doute et, si nécessaire, de bloquer les décisions du ministère des Pêches et des Océans pour la gestion des ressources de ces aires, ainsi que les responsabilités du ministère des Pêches et Océans.

Cela peut paraître plutôt négatif à l'endroit du ministère des Pêches et des Océans mais, si l'on en juge par le bilan de ce ministère, sa participation n'est pas toujours productive ni constructive. C'est ce qui explique les nuances et les points que je fais valoir.

Il est inutile de s'étendre plus longtemps là-dessus. Nous appuyons le projet de loi. Nous en appuyons certes le principe avec enthousiasme et nous espérons que, après examen des points que j'ai soulevés au cours de mon allocution, ce projet de loi sera adopté rapidement par la Chambre aussi bien que par l'autre endroit.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur le Président, à titre d'ancien intervenant en loisirs au Québec pendant plusieurs années, je me suis toujours intéressé à tout projet de conservation de la nature.

J'ai aussi passé près de sept ans comme attaché politique auprès de l'ancien ministre des Pêches du Québec, M. Garon, et je me rappelle très bien, à l'époque, des batailles que le ministre québécois des Pêches livrait à ses homologues, dont M. De Bané qui est aujourd'hui sénateur. À la même époque, la personne qui est maintenant Gouverneur général a fait des luttes épiques lors de discussions, justement, sur la propriété ou la juridiction des fonds marins, le lit du fleuve et les cours d'eau.

 

. 1050 + -

Le député d'Ottawa—Vanier avait l'air de ne pas comprendre l'opposition manifestée par la députée de Rimouski—Mitis face au projet de loi C-48. Je vais lui répondre par une expression bien québécoise qui dit qu'un chat échaudé craint l'eau froide.—Ce n'est peut-être même pas un jeu de mots dans le cas du Saint-Laurent et de l'Atlantique parce que l'eau a toujours été froide et elle continue à être froide.—Le gouvernement fédéral nous rendus de plus en plus méfiants dans ces domaines.

Prenons simplement l'exemple de l'intervention de trois ministères différents au niveau des aires marines. La ministre du Patrimoine canadien, par ce projet de loi, parle d'aires marines de conservation. Il existe aussi, en vertu d'une loi qui relève du ministère des Pêches et des Océans, des zones de protection marine. Pour ce qui est du ministère de l'Environnement, il y a des réserves marines qui relève de sa responsabilité.

Les aires marines, les zones de protection marine et les réserves marines relèvent de trois ministères fédéraux différents. Ceux-ci visent des buts nobles, mais tout dépend de l'attitude et de l'intention. Le député d'Ottawa—Vanier disait tout à l'heure: «On présente ce projet de loi pour donner au fédéral les moyens d'intervenir dans des aires marines. Toutefois, on n'a pas l'intention de faire, comme par le passé, des interventions du style de Mirabel ou du Parc Forillon». On sait ce que cela a donné dans certains cas, au Québec et ailleurs. On l'a vu à d'autres endroits, notamment dans les Maritimes.

Lorsque le gouvernement fédéral arrive dans un domaine, il y arrive avec ses gros sabots et intervient comme s'il était le gouvernement supérieur au Canada alors que, dans l'esprit initial de la confédération, on se rappellera que c'était une véritable confédération et que le gouvernement fédéral devait harmoniser ses politiques avec celles des provinces. À cette époque, il n'était pas perçu comme un gouvernement supérieur qui donnait des ordres aux autres gouvernements mais cherchait plutôt à s'entendre avec eux.

Je parlais tantôt avec le député de Chicoutimi du fait que, récemment, il y a eu une belle expérience de partenariat. Deux niveaux de gouvernement sont intervenus pour atteindre les mêmes fins, c'est-à-dire la conservation et la protection de la flore et de la faune marines ainsi que des berges, parce que pour se rendre dans une aire marine, il faut bien y aller par la voie terrestre. Ce projet est le parc marin du Saguenay—Saint-Laurent qui a été officiellement inauguré en 1997.

La méfiance que l'on a de ce côté-ci est fondée sur des expériences antérieures en raison de l'attitude du gouvernement fédéral. Lorsqu'on lui donne un pied, il veut prendre une verge. C'est un peu ça le problème.

Le député d'Ottawa—Vanier disait tout à l'heure: «Normalement on va aller seulement là où le fédéral est propriétaire et où les territoires visés sont solidement de sa juridiction». Il serait difficile de l'en empêcher dans ce cas. Il y a aussi de multiples espaces qui sont contestés, le plus souvent par le gouvernement fédéral, mais aussi par les provinces qui veulent se défendre contre une invasion de leur territoire. Or, l'article 92 de la Constitution prévoit justement que le lit du fleuve et des cours d'eau est de juridiction provinciale.

 

. 1055 + -

Tous les gouvernements du Québec, peu importe qu'ils soient dirigés par des fédéralistes ou des souverainistes, l'un après l'autre, ils ont toujours défendu le même genre de position en disant: «Ne laissez pas, sans contestation, envahir nos espaces.» Bien que l'objectif soit noble, et c'est le cas ici, nous sommes en faveur de la conservation de la nature, c'est trop souvent l'occasion, pour le fédéral, de s'immiscer dans les affaires des provinces, plus particulièrement dans celles du Québec.

Cela ne justifie pas l'énoncé de bonnes intentions d'un député qui n'est pas encore ministre, qui représente un ministre à un comité, et qui vient nous dire à la Chambre: «Vous savez, on n'a pas l'intention de...» Voyons donc! C'est trop facile d'affirmer des choses semblables, pour ensuite nous passer des sapins. Au Québec, nous sommes très sceptiques sur la question.

Je pense que le gouvernement devrait refaire ses consultations. Je n'ai pas personnellement participé aux travaux du comité. La députée de Rimouski—Mitis est plus proche que moi de ce dossier, car elle en est responsable pour le Bloc québécois. Elle nous a parlé du genre de consultations qui ont été tenues. Lorsque seulement 5 p. 100 des personnes invitées participent à une consultation, lorsque, sur 300 pages de rapport, on ne lui en remet qu'une soixantaine, cela laisse place à beaucoup d'interrogations. D'après ce qu'on peut voir, il y a eu très peu d'intervenants du Québec; presque rien n'a été écrit en français, de la part des personnes consultées.

C'est prématuré, improvisé, et c'est un projet de loi qui n'est pas suffisamment bien ficelé. Cela laisse beaucoup de place à l'interprétation et à des contestations juridiques.

Dans ce projet de loi, il n'y a rien qui indique que le gouvernement fédéral va réaliser les belles intentions que nous a énoncées le député d'Ottawa—Vanier. Ce n'est pas suffisant pour nous, ici, à la Chambre. Les paroles s'envolent, les écrits restent. Les lois restent et on sait qu'après les lois, il y a toujours les règlements qui viennent préciser la loi. C'est souvent là qu'on risque de se faire avoir.

À cette étape de la deuxième lecture, je veux, à mon tour, souligner qu'on est en désaccord avec le projet de loi. Pour le Québec, cela représente une menace de plus du fédéral. Il vise à envahir le territoire québécois, et étant du Québec, on ne peut pas le laisser faire.

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand plaisir d'intervenir sur ce projet de loi, d'autant plus qu'à titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de transport, le sujet me préoccupe plus particulièrement.

En effet, nous savons tous et toutes, les députés de cette Chambre et ceux et celles qui nous écoutent, que lorsqu'on parle de transport maritime et de protection de l'environnement, ce sont des sujets très liés, pour ne pas dire très embriqués. On sait qu'aujourd'hui, il se bâtit, en Corée, d'immenses porte-conteneurs, des bateaux qui peuvent contenir jusqu'à 5 000 ou 5 500 conteneurs, je crois.

Au Canada, il y a deux ports importants pour le transport par conteneurs. Il s'agit du port de Montréal et de celui d'Halifax. Halifax est le deuxième. Il est bien malheureux de cela, mais la position stratégique du port de Montréal fait en sorte qu'il est devenu, au fil des ans, une plate-forme au niveau du transport par conteneur.

On verra où je veux en venir avec ce projet de loi. Le Bloc québécois, depuis le début, depuis notre arrivée à la Chambre, ici, en plus grande force—il y a eu neuf pionniers à la formation du Bloc—mais depuis 1993, alors que nous étions 54, nous avons appuyé le maintien du pilotage obligatoire au Canada.

 

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Bien entendu, je parle ici du pilotage sur le réseau du Saint-Laurent—Grands Lacs, mais aussi à la grandeur du Canada, parce qu'il y a également des zones de pilotage obligatoire dans la région du Pacifique et d'autres dans la région des Maritimes.

Pourquoi? Ce n'est pas parce que nous voulions être «flyés» ou pour le plaisir de la chose, mais la question que nous posions, à ce moment-là, était la suivante: «Le Canada a-t-il les moyens de se payer un deuxième Exxon Valdez?», sachant bien ce qui c'était produit dans la région de l'Alaska.

Aujourd'hui, avec les contraintes reliées au transport maritime, on sait que les navires sont de plus en plus gros et transportent des matières de plus en plus dangereuses. Si ces navires étrangers et canadiens ne peuvent être pilotés par des gens expérimentés, les risques à l'environnement sont considérables. Le lobby des armateurs au Canada est très puissant, financièrement j'entends, parce que si on regarde qui contribue à la caisse électorale des libéraux et des conservateurs, ce sont les principales compagnies de transport maritime.

Une voix: Avec les banques.

M. Michel Guimond: Oui. Mon collègue vient de dire «avec les banques». Eh bien là, je n'aurais pas assez de dix minutes si je voulais épiloguer là-dessus.

Une voix: La liste est trop longue.

M. Michel Guimond: Oui, c'est ça.

M. Bob Kilger: Ne perds pas de temps, tu n'as que dix minutes.

M. Michel Guimond: Le whip du gouvernement me signale que je ne dispose que de dix minutes et que je ne dois pas perdre de temps. En effet.

Donc, les députés du Bloc québécois réaffirment que même si nous sommes contre le projet de loi—et nous avons nos raisons de nous y opposer, notre collègue, la députée de Rimouski—Mitis, a clairement exprimé la position de notre parti—on ne voudrait pas qu'il y ait un malentendu et que certaines personnes, de façon démagogique—on sait que nos voisins d'en face en font régulièrement, de la démagogie—disent: «Ah oui, le Bloc québécois est contre la protection de l'environnement.» Absolument pas.

Le Bloc québécois réaffirme sa position et elle est claire, nous sommes en faveur de mesures visant à la protection de l'environnement.

Par contre, pourquoi sommes-nous contre ce projet de loi? Nous considérons que ce projet de loi ne mise pas sur la concertation, comme cela s'est fait pour le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent. Mon collègue de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière a souligné avec justesse qu'il y avait eu de la concertation.

On me permettra un petit aparté sur cette concertation. Il est plaisant de voir que c'est un gouvernement dirigé par le Parti québécois et par Lucien Bouchard qui a signé, avec la ministre du Patrimoine, malgré son intransigeance et malgré son arrogance proverbiale, les documents créant le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent.

Des voix: Bravo!

M. Michel Guimond: Je vous remercie.

Une voix: Et il sera réélu.

M. Michel Guimond: Oui, et il sera réélu le 30 novembre prochain.

Alors, cela démontre que lorsqu'on a un gouvernement du Québec qui se tient et qui a appris à se faire respecter par le reste du Canada, il y a moyen d'en arriver à des ententes qui conviennent aux deux parties. Donc, ce n'est pas de la confrontation.

Rappelons ce que M. Charest disait au début de sa campagne, alors qu'il tenait des propos très durs à l'endroit du premier ministre du Canada, le député de Saint-Maurice; cela démontrait une non-volonté de s'entendre.

Alors, on voit que lorsque c'est rentable pour une population, le gouvernement du Parti québécois s'assoit et signe des ententes.

Ainsi, au lieu de miser sur la concertation, comme dans le cas du Parc marin, le gouvernement fédéral veut implanter des aires marines de conservation sans égard aux juridictions québécoises sur son territoire et en environnement.

Encore une fois, on me permettra d'y revenir, même si cela me chagrine un peu, mais c'est la trame de la ministre du Patrimoine canadien, députée de Hamilton-Est, c'est son pattern—permettez-moi l'anglicisme—c'est sa façon de procéder.

 

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C'est une personne qui devrait se comporter comme une lady mais qui, au lieu de cela, injurie les députés et crie des bêtises à qui veut l'entendre dans cette Chambre. C'est malheureux. Comment peut-on avoir de la concertation et s'entendre avec une personne qui ne favorise pas les ententes? Les Anglais ont une belle expression: «It takes two to tango». Il faut être deux pour danser le tango. Comment peut-on danser le tango avec quelqu'un qui reste assis sur son «steak» et qui ne veut absolument rien savoir?

Au lieu de favoriser la concertation, elle favorise l'affrontement. Le projet de loi C-48 le démontre clairement. C'est encore la trame, c'est la continuité, c'est le nerf de la guerre avec la ministre du Patrimoine. Donc, on ne peut faire autrement qu'être contre le projet de loi.

La deuxième raison pour laquelle le Bloc québécois est contre ce projet de loi, c'est parce que Patrimoine Canada propose la mise sur pied d'une nouvelle structure, soit les aires marines de conservation, qui viendra dédoubler les zones de protection marine de Pêches et Océans Canada et les zones marines protégées d'Environnement Canada. Bref, le gouvernement fédéral se fend en trois pour fouler les juridictions québécoises.

J'aimerais entendre les députés québécois des autres partis. Il y a 45 députés du Bloc québécois, mais il y en a une trentaine qui représentent d'autres partis. J'aimerais entendre parler les quatre députés conservateurs du Québec pour savoir ce qu'ils pensent de ce projet de loi qui vient fouler les juridictions québécoises.

En conclusion, je dois dire qu'il est clair que Patrimoine Canada agit de manière arrogante en réclamant d'être propriétaire du fond marin là où il voudrait établir des aires marines de conservation. Nous avions proposé l'établissement d'ententes bilatérales entre Québec et Ottawa, notamment pour permettre au Québec de garder ses champs de juridiction. Pourquoi le gouvernement fédéral ne s'assoit-il pas à la table et ne discute-t-il pas? Il y a possibilité de s'entendre. Le parc marin du Saguenay—Saint-Laurent en est un exemple.

Mais non, on aime mieux fouler aux pieds les juridictions québécoises. C'est pour ces raisons que le Bloc québécois n'acceptera jamais un projet de loi qui ne respecte pas les juridictions du Québec. C'est la raison pour laquelle les Québécois et les Québécoises ont élu 54 députés du Bloc québécois, en 1993.

Lors de la dernière campagne électorale fédérale, l'actuel chef du Parti libéral du Québec, ancien chef du Parti progressiste-conservateur, s'était solennellement engagé, quelques jours avant les élections du 2 juin 1997, la main sur le coeur, à faire élire 40 députés conservateurs au Québec. Il va avoir de la difficulté à faire élire 40 députés libéraux lors de l'élection du 30 novembre prochain. C'est pour ces raisons que je suis persuadé que, le 30 novembre prochain, les Québécois rééliront un gouvernement du Parti québécois.

[Traduction]

L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Parcs), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer au débat qui traite de certaines des questions que le Bloc a soulevées, tout particulièrement par la voix de la porte-parole de ce parti, la députée de Rimouski—Mitis, qui a fait la première intervention. La députée a grandement collaboré avec notre ministère à bon nombre de dossiers en vue d'améliorer les mesures qui visent à protéger certains endroits spéciaux au pays.

Je suis très déçu d'apprendre que le Bloc s'oppose à ce projet de loi. Le député du Bloc qui a parlé avant moi a tenté de faire croire aux Canadiens et aux Québécois que son parti ne s'opposait pas à un projet de loi sur l'environnement, à une mesure qui vise à accroître la protection de nos écosystèmes marins.

 

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Les Canadiens devraient pourtant se rendre compte que c'est exactement ce qu'ils font. C'est exactement à ce genre de mesure qu'ils s'opposent. Ils s'opposent à la protection de l'environnement marin dans cette partie du pays. Pourquoi s'y opposent-ils? Ils s'y opposent parce qu'ils se représentent une situation qui ne correspond pas à ce que ce projet de loi se propose de faire ou à ce qui existe actuellement.

Selon la députée de Rimouski—Mitis, il y a huit aires marines de conservation possibles dans la province de Québec. Si je ne m'abuse, six de ces aires relèvent de la compétence exclusive du fédéral et le Québec accepte cette réalité. Il n'est pas question ici de violation des droits ou des prérogatives de la province. Il est accepté par toutes les parties, c'est-à-dire la province et le gouvernement fédéral, que ces aires relèvent exclusivement du fédéral.

Lorsque des parcs seront établis dans ces aires, nous consulterons les localités et la province hôtes, comme nous l'avons toujours fait, même s'il s'agit clairement d'un secteur de compétence fédérale.

Il y a des situations où c'est la province qui a compétence, et je crois que nous devrions examiner ce qui s'est fait dans le passé dans ce genre de situation. Lorsque nous sommes allés en Ontario pour établir le parc Fathom Five, la première aire marine de conservation au Canada, nous avons travaillé avec le gouvernement provincial et en sommes venus à une entente avec lui. Nous travaillons actuellement avec le gouvernement de la Colombie-Britannique au sujet du parc Gwaii Haanas et en sommes venus à une entente avec lui.

Nous faisons aussi des études de faisabilité, dont une dans la circonscription de mon collègue, celle de Gander—Grand Falls. C'est la même chose lorsque nous travaillons dans les détroits en Colombie-Britannique.

Lorsque nous avons travaillé dans une région de la province de Québec qui relevait clairement du gouvernement provincial, nous avons développé un modèle adapté à cette région, comme nous l'avons fait avec les autres provinces. C'est ce modèle qui a servi de fondement au projet de loi sur le parc marin Saguenay—Saint-Laurent.

Le Bloc québécois prétend que cette mesure législative constitue une intrusion massive dans un secteur de compétence provinciale, mais cela ne colle tout simplement pas à la réalité. Si on regarde les pratiques employées par Parcs Canada, on se rend compte que les arguments du Bloc québécois ne correspondent pas à ce qui se passe réellement. Les bloquistes créent une controverse. Ils essaient de trouver une raison de s'opposer à ce projet de loi, mais cette raison n'a rien à voir avec la réalité d'aujourd'hui.

Il est décevant de voir ces députés exploiter une mesure législative qui aide à protéger l'environnement, ces endroits particuliers que sont les écosystèmes marins de leur province comme du reste du Canada. Par un esprit de clocher qui n'a rien à voir avec la réalité, ils vont s'opposer à cette importante mesure de protection de l'environnement.

Il est vraiment déconcertant de les voir faire cela. Il est déconcertant de les voir faire la campagne électorale de leur province à la Chambre des communes et de les voir chercher des excuses pour s'opposer à cette importante mesure. Ils savent très bien que cette mesure n'empiète en rien sur les compétences provinciales.

Ils savent très bien que nous avons eu pour pratique, par le passé, de travailler à la création d'aires marines de conservation en collaboration avec les gouvernements provinciaux. Le député de Vanier a dit très clairement que cela continuerait d'être la politique de Parcs Canada et de Patrimoine Canada. Ils créent de l'opposition sur quelque chose qui n'a aucune base factuelle, quelque chose qui n'est pas vrai.

 

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Il est important que tous les Canadiens comprennent cela. Il est particulièrement important que les Canadiens qui vivent dans la province de Québec comprennent clairement que les députés du Bloc s'opposent à une mesure législative qui aiderait à protéger l'environnement de cette partie du pays. Ils sont contre pour des raisons qui ne sont pas celles qu'ils exposent. Il ne s'agit pas d'une atteinte aux compétences de la province. Je pense qu'il fallait le dire.

[Français]

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Monsieur le Président, d'habitude, j'aime dire que c'est avec plaisir que j'interviens sur un projet de loi, mais aujourd'hui, je dois dire que c'est avec la rage au coeur que je vais prendre part au débat. J'espère que les députés d'en face vont bien ouvrir leurs oreilles.

Le précédent intervenant allègue qu'on veut faire des chicanes de territoire, des chicanes de ci et des chicanes de ça. Il été incapable de prouver légalement que ce que la députée de Rimouski—Mitis a dit est faux.

Eh bien moi, je vais lui donner deux autres bonnes raisons pour comprendre le bon sens et je vais essayer de ne pas parler d'élection provinciale, car cela leur donne de l'urticaire. Mais il va bien comprendre, par les raisons que je vais lui donner, pourquoi les Québécois vont choisir un gouvernement du Parti québécois.

La première raison, et c'est indécent: on vient se vanter ici qu'on veut créer des aires marines de conservation par l'entremise de Patrimoine Canada. On vient de vivre—et même, on est encore en plein dedans—une crise relativement aux pêches. Pensez-vous que le Parti libéral du Canada serait capable d'aller se faire réélire en se promenant à Terre-Neuve ou en Nouvelle-Écosse et en disant: «Well, gentlemen, on va protéger vos zones marines.» Mais qui prend soin des pêcheurs qui ont perdu leur gagne-pain? Qui prend soin des travailleurs d'usines qui ont tout perdu? Qui?

C'est une vraie honte. Moi, si j'étais libéral, j'aurais honte de retourner me promener dans les Maritimes en fin de semaine. J'aurais peur pour ma sécurité. Je peux comprendre que les gens veuillent protéger depuis le fond marin jusque sur le dessus. Mais, entre les deux, il n'y a pas de pêcheur, il n'y a pas de travailleur d'usines. Tout cela pour sauvegarder une espèce ou pour promener des touristes. C'est bien beau, mais ce que les touristes verront d'abord en arrivant sur les côtes, ce seront des gens qui n'auront plus rien à manger, qui seront affamés, et surtout, des gens qui ont perdu la dignité de leur travail. Ça, c'est inconcevable, ou plutôt c'est con tout court ce qui se passe de l'autre bord.

La deuxième chose: j'essaie de collaborer avec le gouvernement lorsqu'il présente des choses intelligentes. On l'a déjà fait par le passé. Une des dernières lois adoptées par Pêches et Océans, c'est justement la Loi sur les océans. Une des grandes lignes directrices de ce projet de loi disait justement qu'il fallait arrêter le cafouillage dans la gestion des pêches, qu'on donnait et on ordonnait au ministre des Pêches d'assumer le leadership de gérer tous les écosystèmes. Dans ce projet de loi, qui est maintenant une loi, on ordonnait aux différents ministères de se parler. Mais on disait toujours que le leadership revient au ministre des Pêches et des Océans pour tout ce qui touche les eaux.

Je ne comprends pas que le Parti libéral, le gouvernement actuel, se contredise lui-même en permettant à la ministre du Patrimoine de créer d'autres aires marines de conservation. Je le rappelle, il y a déjà trois appellations là-dedans. Avec Patrimoine Canada, on aura les aires marines de conservation; avec Environnement Canada, les réserves marines de faune; et avec Pêches et Océans Canada, on a les zones de protection marine. Ce sont trois appellations de protection.

Chaque fois, et là, on comprendra le désespoir ressenti par les pêcheurs et les travailleurs d'usines, chaque fois que le gouvernement canadien essaie de protéger quelque chose, qu'il essaie de le gérer, c'est justement là que ça foire. Il n'y a qu'à se rappeler l'effondrement des stocks de poisson de fond.

Je les en conjure: si on veut justement sauver la ressource marine, il ne faut surtout pas que la ministre du Patrimoine touche à cela!

 

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Les biologistes de Pêches et Océans ont manqué leur coup avec la morue. Imaginez ce que les «gratte-papier» de la ministre du Patrimoine vont faire. J'ai peur.

J'aurais honte d'être à la place des libéraux ce matin. Comment les libéraux des Maritimes vont-ils faire? En passant, j'ai bien du respect pour les collègues qui osent intervenir à la Chambre, mais je n'ai pas vu de députés des régions maritimes se lever et défendre ce projet de loi. Je les en conjure: sortez par la porte arrière. Cela n'a pas de bon sens, ce n'est pas défendable.

Comment vont-ils faire pour retourner chez eux? Je rappelle qu'on est à la veille de Noël. Il nous reste deux semaines de travail. Ces gens-là vont retourner chez eux et dire: «Well gentlemen, on a protégé votre écosystème et, grâce à nous, tout va bien aller.» Mais quelle sera leur réponse quand on leur tirera la manche et qu'on leur demandera: «Est-ce que je pourrais avoir un cadeau de Noël, moi aussi? Est-ce que je vais avoir quelque chose à manger ce Noël?» C'est une honte.

Il y avait 40 000 personnes sur le programme de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, le programme TAGS en anglais. On en a éliminé 20 000. On a donné un paiement forfaitaire aux 20 000 qui restent et on leur a dit: «Allez-vous-en chez vous et taisez-vous.»

Et là, on vient dire, ce matin, dans un projet de loi en bonne et due forme: «Nous, on veut protéger la ressource marine.» Mais plus personne ne protège ces travailleurs, plus personne ne protège les pêcheurs. C'est une vraie honte.

[Traduction]

J'aimerais dire quelques mots en anglais, car j'ai des amis à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse. Je voudrais donc m'adresser brièvement à eux.

Je voudrais que les pêcheurs appellent aujourd'hui et demain leurs députés afin de leur rappeler que personne ne protège maintenant les pêcheurs et les travailleurs d'usine. Ils doivent les appeler. C'est incroyable. Nous ne pouvons pas laisser le ministre faire cela dans les secteurs de pêche.

[Français]

Plus ça va, plus c'est pareil. Jamais n'a-t-on vu pareil assaut dans nos champs de juridiction. Le secrétaire parlementaire a beau dire ce qu'il dit, il y a conflit. Lorsqu'on veut régler des problèmes, on fait de la concertation.

J'ai aimé l'expression de mon collègue de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans tout à l'heure, quand il a dit qu'il faut être deux pour danser le tango, parce qu'il avait l'impression d'être tout seul. J'ai l'impression que la ministre du Patrimoine veut danser le tango, mais elle nous marche sur les pieds. C'est encore bien pire que quelqu'un qui ne veut pas danser avec toi. À ce moment-là, elle est mieux de rester assise.

Qu'est-ce que le gouvernement aurait dû faire? On a assisté à des querelles cet été. Pourquoi, si elle veut tellement protéger la ressource, n'a-t-elle pas insisté au Cabinet pour que le gouvernement, via le ministre des Pêches, établisse une fois pour toutes quels seront les partages entre les provinces? Parce qu'on a gueulé tout l'été.

Je tiens à rappeler à cette Chambre que le Canada fait partie d'un système de gestion internationale qu'on appelle l'OPANO. C'est une organisation qui, une fois que les données scientifiques sont entrées, la méthode de calcul du total des prises admissibles étant déjà connue, chacun fournit ses données biologiques et, en bout de ligne, les quotas sortent, parce que les quotas sont déjà pré-établis en pourcentage en vertu de l'historique de chacun des pays membres et en vertu de la proximité de la ressource.

Ce sont de telles discussions qui permettraient de faire avancer les choses parmi les Canadiens et les Québécois, et on arrêterait de se quereller. Mais plutôt que de faire cela, on présente un projet de loi qui vient foutre le bordel à nouveau. Il n'y a personne maintenant à la Chambre qui prend la défense des travailleurs, et ça, c'est inadmissible. Peut-être que j'aurai l'occasion de le répéter plusieurs fois, car je ne me rappelle pas à quelle étape du projet de loi on en est rendus.

Une voix: La deuxième lecture.

M. Yvan Bernier: Ah bon, alors, cela va revenir encore.

Il faut que quelqu'un arrête cette comédie. Jamais cela ne va amener la paix.

 

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Mais qu'on imagine un seul instant que la ministre du Patrimoine canadien se retrouve, demain matin, à Shelburne, en Nouvelle-Écosse, ou à Cap-aux-Meules, aux Îles-de-la-Madeleine, et qu'elle dise: «Dans cette région, nous allons probablement établir une zone de protection marine.» Je souhaite de tout mon coeur que tous les Madelinots seront couchés cette journée-là, sinon, je ne peux répondre de la sécurité personnelle et physique de la ministre. Cela n'a aucun sens. Lorsque toute l'industrie a foiré et qu'on vienne dire: «On veut protéger le poisson; vous autres, taisez-vous», cela n'a pas de bon sens.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir, en deuxième lecture, sur le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation, et sur l'amendement présenté par le Parti réformiste. Nous n'appuierons pas ce projet de loi et je vais expliquer pourquoi.

Premièrement, au lieu de miser sur la concertation, comme dans le cas du parc marin du Saguenay—Saint-Laurent, le gouvernement fédéral veut implanter des aires marines de conservation sans égard aux compétences du Québec en matière de protection de son territoire et en matière d'environnement.

Deuxièmement, le ministère du Patrimoine canadien propose la mise sur pied d'une nouvelle structure, les aires marines de conservation, qui viendra dédoubler les zones de protection marine de Pêche et Océans Canada et les zones marines protégées d'Environnement Canada.

Le gouvernement fédéral, qui crie sur tous les toits qu'il a répondu à toutes les exigences du Québec, qui écrit, dans son discours du Trône, qu'il met fin aux chevauchements ou aux intrusions dans les champs de compétence des provinces, trouve le moyen, cette fois-ci, de se diviser en trois et de se chevaucher lui-même pour être absolument certain de nous agresser et d'envahir, d'une façon ou de l'autre, les champs de compétence du Québec et des autres provinces.

Une des conditions essentielles pour l'établissement d'une aire marine de conservation est que le gouvernement fédéral devienne propriétaire du territoire où elle sera établie. Le projet de loi C-48 ne respecte donc pas l'intégrité du territoire du Québec et des autres provinces.

Cela nous amène à parler, encore une fois, d'ingérence et de dédoublement. Comme le disait mon collègue de Berthier—Montcalm, la situation est particulièrement complexe au Canada, particulièrement ce qui touche les étendues d'eau.

Je vais d'ailleurs, à ce sujet, raconter une histoire. Un pêcheur veut aller pêcher sur le fleuve Saint-Laurent. Jusque-là, tout est normal. Le pêcheur doit demander, comme il se doit, un permis de pêche au gouvernement provincial. Il va pêcher dans une chaloupe qu'il a achetée au Québec, mais pour laquelle il a évidemment payé une taxe fédérale et une taxe provinciale. Pour mettre son embarcation à l'eau, il lui faut un enregistrement fédéral.

Avant de mettre sa chaloupe à l'eau, il se prépare sur le bord du fleuve. Il est en territoire de juridiction québécoise, car le bord de l'eau est de juridiction provinciale. Mais, au moment où il met sa chaloupe à l'eau, il change de juridiction, car son embarcation se trouve maintenant sur de l'eau de juridiction fédérale.

Cependant, pour être clair, le fond de l'eau est toujours de juridiction provinciale. Le poisson qui nage dans l'eau, et que notre pêcheur tentera de prendre, est de juridiction fédérale. Mais son ami, le crabe, qui est au fond de l'eau, relève d'une juridiction partagée, même si le fond de l'eau est toujours de juridiction provinciale.

Le poisson qui nage dans l'eau est de juridiction fédérale. Lorsqu'il aura été pêché et qu'il se trouvera dans le fond de la chaloupe, il deviendra donc de juridiction provinciale. Il faudra alors faire bien attention à la réglementation, car il existe des quotas fédéraux pour ces poissons.

Si, de plus, c'est une pêche commerciale, il y a des législations et des réglementations fédérales et provinciales relatives à l'alimentation, l'environnement, la salubrité, l'équipement et ainsi de suite.

Comme si ce n'était pas assez compliqué, le projet de loi C-48 crée des chevauchements au sein même de l'administration fédérale. On admettra avec moi que cela n'a pas de bon sens.

 

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Il y aura trois ministères fédéraux, qui vont arriver avec leurs normes, pour envahir un champ de juridiction provinciale, avec des empiétements et des chevauchements, comme si ce n'était pas assez compliqué comme ça. Des histoires comme celles-là tiennent de l'absurde.

Par le biais du ministère du Patrimoine canadien, le gouvernement fédéral entend créer des aires marines de conservation. Via Pêches et Océans Canada, le gouvernement fédéral a déjà créé des zones de protection marine. Via Environnement Canada, le gouvernement fédéral veut créer des réserves marines de la faune. Mais qui va se retrouver là-dedans?

Pour sa part—ce n'est pas terminé—Pêches et Océans Canada propose la mise sur pied de zones de protection marine. À la suite de rencontres de consultations tenues au Québec, en juin 1998 par Pêches et Océans Canada, au sujet des zones de protection marine, on retrouve le passage suivant dans le compte rendu rédigé par les fonctionnaires, et je cite:

    Il existe encore beaucoup de confusion chez les intervenants en ce qui a trait aux différents programmes fédéraux sur les aires marines protégées (zones de protection marines; aires marines nationales de conservation, réserves marines de faune, etc.). Les ministères concernés devraient s'harmoniser et collaborer pour la mise en place des aires marines protégées.

Ce n'est pas le Bloc québécois qui le dit, ce sont les fonctionnaires des ministères fédéraux.

Enfin, Environnement Canada propose à son tour l'établissement de zones marines protégées qui pourraient, vraisemblablement, être appelées réserves naturelles marines, étendant le concept des réserves nationales de faune au-delà de la mer territoriale, jusqu'à la limite des 200 milles marins.

Ces empiétements et ces dédoublements sont ridicules. Qui va savoir à qui cela appartient? Mais on sait ce que ce gouvernement veut. On sait qu'il veut s'emparer du fleuve Saint-Laurent. C'est un moyen pour lui de venir envahir nos champs de compétence. C'est un moyen pour lui de nous mettre sous sa tutelle, mais on ne se laissera pas faire.

Pourtant, il aurait pu y avoir un moyen de s'entendre, comme dans le cas du parc marin du Saguenay—Saint-Laurent. Cette initiative aurait pu représenter un exemple à suivre. En 1997, les gouvernements du Québec et du Canada s'entendaient pour adopter une loi miroir créant le parc marin du Saguenay—Saint-Laurent. Cette loi a permis la création de la première aire marine de conservation au Canada.

Cette première initiative de partenariat aurait dû servir au gouvernement fédéral de modèle à suivre pour la création des autres aires marines de conservation. Plutôt que d'utiliser une politique d'ouverture et de collaboration, le gouvernement fédéral verse encore dans l'arrogance, l'agression, l'envahissement et les chevauchements, tout ce qu'il faut pour entretenir notre désir de partir à la prochaine occasion.

La phase III du Plan d'action Saint-Laurent aurait pu être un autre exemple à suivre. Toutefois, rien n'inspire le gouvernement du Canada quand ça fonctionne. Il préfère entretenir la chicane. Il ne comprend pas que les Québécois et les Québécoises en ont ras-le-bol de ces politiques arrogantes qui nous coûtent une fortune. La population saura le dire haut et fort et ce, très bientôt.

Ce projet de loi envahit les compétences du Québec, et celles des autres provinces, quand elles sont concernées. Le Québec ne peut pas et ne veut pas fonctionner dans ce système. Nous avons montré au gouvernement canadien beaucoup d'ouverture quand il s'agissait de gérer l'aire marine du parc marin du Saguenay—Saint-Laurent. Nous regrettons que le gouvernement n'ait pas retenu la leçon.

 

. 1135 + -

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, c'est un devoir de participer à ce débat. C'est un devoir, parce que trop, c'est trop.

J'enchaîne en disant: «Heureusement que le Bloc québécois est là, au moins pour voir ce qui se passe et dire le plus fort qu'on peut que ce fédéralisme n'a rien à voir avec ce qu'on apprend de ce type de gouvernement dans les livres de politique.»

Ce fédéralisme est en train de devenir une lutte persistante entre deux paliers de gouvernement, deux paliers de ministère, en utilisant, au fédéral, ces surplus si durement arrachés aux chômeurs et aux personnes qui ont pâti des coupures en santé, en éducation et en aide sociale.

Ça prend une grande dose d'arrogance, d'ignorance ou d'inconscience, probablement des trois, pour proposer un tel projet de loi dans la période que nous vivons. Ma collègue de Drummond a bien fait ressortir ce qu'il y avait d'incohérent, ce qu'il y avait, à la limite, de drôle, si ce n'était pas à pleurer, dans cette volonté du fédéral d'être, à tout prix, celui qui voit à s'occuper de l'environnement. Comme si le Québec, comme si les provinces, comme si les personnes qui habitent le Québec, les Québécoises et les Québécois, à leur niveau de gouvernement, n'étaient pas capables de s'en occuper convenablement, ou encore, n'allaient pas être assez raisonnables pour convenir, en consultation, d'un programme conjoint.

Il s'est développé, au fédéral, ce qui est complètement contradictoire avec l'esprit du fédéralisme, la conviction, qu'il s'agisse de la santé ou de n'importe quel droit des Canadiens, des Québécoises et des gens de toutes les autres provinces, que cela ne pouvait être convenablement défendu ou protégé, ou qu'on ne pouvait s'en occuper, que quand c'était fait par le fédéral, avec l'argent qui vient de la poche des citoyens.

En fait, ces attaques à répétition n'ont tellement pas de bon sens que, lorsqu'on les raconte, on a l'air d'exagérer. On a l'air de dire: Ça n'a pas de bon sens, ce que vous nous racontez. Le problème, c'est qu'on dit la stricte vérité. C'est ça, le problème.

On est encore obligés de se battre. J'ai dénoncé, à répétition, les ingérences du projet de loi C-54 qui a été proposé au Parlement, qui empiète dans les champs de juridiction des provinces, à un point tel que tous les ministres de la Justice des provinces et des territoires en ont demandé le retrait. Mais le gouvernement fédéral a l'air de continuer là-dedans, comme si ce n'était pas important. Ils n'ont qu'à faire des lois. Ils se fichent de l'interprétation de la Constitution. Ils n'ont qu'à faire des lois ou utiliser leur pouvoir de dépenser.

Dans le cas qui nous occupe, le Bloc a essayé, là aussi, de faire retirer la loi. On se trouve devant une loi dont le titre a l'air innocent. Il se lit ainsi: «Loi concernant les aires marines de conservation.»

L'objectif, qui semble très louable, est de s'assurer—cela a été une promesse, un engagement du premier ministre au plan international—de préserver les écosystèmes marins, naturels et leur équilibre, afin de maintenir la diversité biologique. Le problème, c'est que le premier ministre ne s'est pas tourné vers les provinces en leur demandant comment elles pourraient collaborer pour assurer cet engagement international. Non, ce n'est pas ce qu'il a fait.

 

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Son gouvernement a proposé une loi dans laquelle il dit: «Nous, on va s'en occuper; on va faire une loi. On va constituer des aires marines de conservation et pour que ces aires marines correspondent à ce qu'on veut faire, il faudra que Sa Majesté du chef du Canada ait un titre incontestable sur les terres visées.» C'est ce qu'on retrouve au paragraphe 5(2).

«Un titre incontestable sur les terres visées», cela veut dire, dans le grand fleuve Saint-Laurent, trois aires particulières, larges et importantes. L'actuel gouvernement du Québec qui, semble-t-il—et je ne dévoilerai pas de secret à quiconque a lu les journaux ce matin—formera le prochain gouvernement, avait déjà entrepris une consultation sur cette question.

Il est outrancier d'avoir pris un engagement international et de se retourner en disant: «Maintenant, je choisis dans ce territoire, là où je vais faire des aires. Pour que j'investisse de l'argent là-dedans, il faut que ce soit ma propriété.»

Il y a un hic. L'Assemblée nationale a adopté une loi, qui s'intitule Loi sur les terres du domaine public, qui s'applique «à toutes les terres qui font partie du domaine public du Québec, y compris le lit des cours d'eau et des lacs, de même que les parties du lit du fleuve, de l'estuaire et du golfe Saint-Laurent appartenant au Québec par droit de souveraineté.»

Heureusement que l'Assemblée nationale a adopté cette loi. Elle prévoit que le Québec ne peut céder ses terres au fédéral. La seule initiative qui lui est permise à l'intérieur de ce cadre, c'est d'autoriser le gouvernement fédéral, par décret, à les utiliser, et ce, eu égard uniquement aux compétences fédérales.

Toutefois, la protection des habitats et de la faune est une compétence partagée. Le gouvernement du Québec prévoit se doter prochainement d'un cadre de protection des aires marines, comme le rappelait la députée de Rimouski—Mitis.

Les aires identifiées sont de la compétence du Québec et le Québec n'a pas l'intention de les lâcher. Le Québec a d'autant moins l'intention de les lâcher que, comme le rappelait le porte-parole du Bloc québécois en matière de pêches, le secteur des pêches vit une situation dramatique. La seule perspective des pêcheurs qui crèvent de faim, des jeunes qui ne voient pas d'avenir et des personnes âgées qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts, c'est qu'ils se verraient envahis par des fonctionnaires qui viendraient dans cette aire s'occuper de la préservation des poissons, sans collaboration et sans préparation.

Patrimoine Canada et sa ministre peuvent vouloir donner une suite à l'engagement du premier ministre, ils ne peuvent le faire sans tenir compte du Québec, des Québécoises et des Québécois. La seule façon d'atteindre cet engagement international, aux objectifs duquel le Bloc souscrit, c'est de faire comme on a fait quand on a constitué le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, c'est-à-dire en procédant avec une même loi, adoptée au même moment au niveau fédéral et au niveau provincial, en décidant d'une gestion conjointe.

 

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Je le répète, une chance que le Bloc québécois est là. Une chance que le Québec a adopté une loi portant sur les terres du domaine public pour préserver la souveraineté du territoire, par ailleurs garantie par la Constitution. Les Québécoises et les Québécois ne se laisseront pas faire.

[Traduction]

M. George S. Baker (Gander—Grand Falls, Lib.): Monsieur le Président, après avoir écouté plusieurs interventions des députés du Bloc, je dois dire quelques mots à propos de l'interprétation erronée que certains députés d'opposition ont faite de l'étape de la deuxième lecture.

La deuxième lecture est l'étape de l'étude d'un projet de loi où l'on discute de son principe. Quel est le principe de la mesure à l'étude? Il concerne un type particulier de conservation, la conservation des ressources marines.

Si j'allais demander aux pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine quel est le facteur qui a l'incidence la plus importante sur leur gagne-pain, ils répondraient que c'est la conservation des ressources marines. Dans quel domaine le gouvernement fédéral a-t-il commis les plus graves erreurs dans le passé? C'est dans celui de la conservation des ressources marines.

Si j'allais parler avec les gens de Gaspésie, ils me diraient la même chose. Si j'allais parler avec les gens de Blanc-Sablon, ils me diraient eux aussi la même chose.

Je suis en mesure de l'affirmer parce que j'ai fait partie d'un comité qui a parcouru le pays depuis un an et qui a tenu des audiences publiques. Des groupes sont venus nous dire les uns après les autres que le plus grand désastre dans leur existence a été causé par les politiques que le gouvernement fédéral a mises en oeuvre dans le passé et qui ont détruit leur gagne-pain. Ils ont été très précis.

La députée de Drummond est intervenue il y a un instant et a parlé en termes sarcastiques du fait que le premier ministre se préoccupait des ressources marines du pays jusqu'à la limite de la zone de 200 milles. Je me permets de corriger. Le premier ministre se préoccupe des ressources marines jusqu'à la limite du plateau continental, non pas jusqu'à 200 milles mais jusqu'à 350 milles de nos côtes.

Je vais dire pourquoi à la Chambre. On n'a qu'à aller demander aux pêcheurs de la côte nord du Québec ce qu'il est advenu de leur maquereau. C'est là que se trouve la plus grande zone de frai du maquereau au monde, comme le sait le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans et comme le sait aussi le député qui représente les Îles-de-la-Madeleine, eux qui s'y connaissent tant dans le domaine des pêches. La plus grande zone de frai du maquereau se trouve le long de la côte du Québec.

Qu'est-il advenu à ce stock? Dans les années 1980, des permis ont été délivrés. À qui? À la Norvège, à la Suède et à d'autres pays européens. Pour bloquer la montaison du maquereau qui se dirigeait vers la côte du Québec pour s'y reproduire à la fin du mois de mai. C'est au gouvernement conservateur de l'époque qu'il faut attribuer la faute pour cette si mauvaise gestion des pêches. Cette décision scandaleuse a détruit la zone de frai du maquereau. En un an, on a vu sept navires norvégiens entre Sydney Bight et Port-aux-Basques. L'année suivante, on en a aperçu neuf et l'année d'après, onze. Pourquoi? À cause d'une mauvaise politique de gestion de nos pêches, qui n'était nullement axée sur la conservation des ressources halieutiques.

Si on demandait aux pêcheurs quelle a été la deuxième pire politique du gouvernement du Canada à l'époque, ils feront mention, comme le secrétaire parlementaire s'en doute bien, à la politique des gouvernements précédents concernant le calmar. Malheureusement, le calmar ne peut pas se rendre sur la côte du Québec quand son trajet est bloqué par des navires étrangers au large de la Nouvelle-Écosse. Pourquoi? À cause de la piètre gestion de nos ressources marines. Si on demandait à un pêcheur de la côte du Québec de nommer la troisième mesure de conservation des ressources marines la plus inefficace que le gouvernement du Canada a prise par le passé, il répondrait que c'était la politique concernant le capelan. Pourquoi? Parce que c'est peut-être l'élément essentiel de la diète du saumon qui remonte les rivières du Québec et des autres provinces. Se nourrissent également de capelan la morue du Nord et le turbot dont ont besoin les pêcheurs du Québec.

 

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[Français]

M. Yvan Bernier: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Je connais l'honorable député de Gander—Grand Falls, et parce que je le connais, je voudrais lui donner la possibilité de revenir sur le sujet des zones de protection marine.

Il est en train de nous parler des espèces migratoires...

Le vice-président: L'honorable député de Gander—Grand Falls sait bien que ce projet de loi concerne la gestion des aires marines de conservation. Je suis certain qu'au cours de son intervention au sujet des poissons, nous aurons bientôt quelque chose concernant la gestion des aires marines.

[Traduction]

M. George S. Baker: Monsieur le Président, je vous remercie de nous rappeler si judicieusement que «marin» se rapporte à quelque chose qui se trouve dans l'eau. Évidemment, «gestion d'aires marines» désigne la gestion de quelque chose qui se trouve dans l'eau.

Après ces choses qui, comme je l'ai dit, faisaient défaut avant notre arrivée au pouvoir, si nous demandions aux pêcheurs du Québec quelle a été pour eux le pire élément de la gestion des mers et de la conservation, quelle a été la pire erreur commise par un ancien gouvernement fédéral, ils diraient que c'est de ne pas avoir protégé les fonds marins. Ils diraient cela pour une bonne raison. Nous avons permis au cours des ans la destruction massive de notre écosystème et le dragage des fonds marins dans nos zones de pêche commerciale.

Je vous donne un exemple de l'importance de la conservation des ressources marines. L'an dernier, 123 dragueurs ont participé à la pêche à la crevette sur le plateau continental. Il y avait six navires canadiens et 117 navires étrangers. Il y avait des navires de 350 pieds qui traînaient à chaque extrémité d'un chalut d'immenses lames de fer et d'acier de 10 pieds de longueur, huit pieds de hauteur et quatre pieds d'épaisseur. Ces lames draguent le fond des océans et créent entre elles un vortex où s'engouffrent les sédiments, ce qui produit une sorte de tempête de sable qui détruit tout sur son passage. C'est pourquoi—et je réponds ici à ce qu'a dit la députée de Drummond—le gouvernement du Canada ne s'intéresse pas uniquement à la zone économique de 200 milles, mais tient à étendre son pouvoir au-delà. Dès avant les prochaines élections fédérales, le gouvernement a l'intention d'étendre sa responsabilité au-delà de la zone de 200 milles pour mettre fin à cette destruction massive des fonds marins.

Le secrétaire parlementaire a assisté aux réunions publiques que nous avons tenues sur les côtes du Québec, de Blanc-Sablon à Gaspé. Il a entendu les pêcheurs et les travailleurs d'usines dire qu'ils voulaient que le gouvernement du Canada mette fin à la destruction des sources d'alimentation de notre morue, de notre saumon et de notre turbot.

 

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Le gouvernement adoptera des positions fermes pour que cessent les méthodes de pêche destructives que les anciens gouvernements, particulièrement le gouvernement progressiste conservateur, sont coupables d'avoir permises.

Il est très malheureux que le Bloc soit contre le principe de la conservation des ressources marines. Le gouvernement du Canada est déterminé à protéger nos milieux marins.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, nous en sommes aujourd'hui à la deuxième lecture du projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.

Ce projet de loi vise à donner un cadre juridique à la création de 28 aires marines de conservation et ainsi protéger et conserver des aires marines naturelles représentatives des milieux océaniques et des Grands Lacs, et de favoriser, chez le public, la connaissance, l'appréciation et la jouissance de ce patrimoine marin, de manière à le transmettre intact aux générations à venir. Exception faite du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, qui est la 29e aire de conservation marine et qui fut créée officiellement le 12 juin dernier. Fait à noter, cette aire marine n'est pas couverte par la présente loi, puisque le Québec a sa propre législation.

Au Bloc québécois, il nous apparaît tout à fait normal et légitime que le Québec applique sa propre législation au milieu marin, puisque le Québec assume, depuis déjà 15 ans, ses responsabilités législatives au milieu terrestre bordant le fjord du Saguenay et à une grande partie de l'estuaire du Saint-Laurent.

À cet égard, le Bloc québécois a toujours été très soucieux des mesures de protection de l'environnement. Je suis très bien placée pour le faire remarquer, ayant moi-même été critique du Bloc québécois en matière d'environnement de 1995 à 1997. Or, en ce qui regarde la création du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, le Bloc a appuyé le gouvernement.

Cela étant dit, je veux, d'ores et déjà, indiquer que le Bloc québécois votera contre ce projet de loi. En effet, nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi C-48, contrairement au projet de création du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent où l'aspect concertation était présent. Avec le projet de loi C-48, c'est tout le contraire.

Dorénavant, avec ce projet de loi, le gouvernement fédéral veut unilatéralement se donner le pouvoir d'implanter des aires marines de conservation, sans se soucier des juridictions québécoises, et plus particulièrement, en ce qui nous concerne ici, en matière environnementale. C'est principalement pour cette raison que le Bloc québécois m'appuiera pas ce projet de loi.

Nous considérons que cette loi constitue un assaut inacceptable du gouvernement fédéral dans des champs de compétence déjà occupés avec force et efficacité par le Québec.

Le gouvernement du Québec a fait ses preuves et ce dernier mène également des initiatives ayant pour objectifs la protection de l'environnement et la protection des fonds marins tout particulièrement. Alors pourquoi, une fois de plus, le fédéral sent-il le besoin de venir avec ses gros sabots s'ingérer dans un champ de juridiction québécoise? C'est toujours la même histoire qui se répète.

J'aimerais bien que la ministre de Patrimoine Canada m'explique pourquoi elle ne veut pas prendre comme exemple la Loi sur le parc marin Saguenay—Saint-Laurent.

Il est très clair qu'en voulant imposer comme condition essentielle à la création des aires marines de conservation la propriété du territoire, le gouvernement d'en face agit de façon cavalière et centralisatrice, sans aucun respect des compétences du Québec. Comme c'est l'habitude de ce gouvernement.

Ce n'est pas nouveau, ces empiétements. Paradoxalement, le gouvernement fédéral a maintes fois invoqué l'exemple de l'environnement comme illustration par excellence d'un fédéralisme évolué, ouvert et décentralisé.

 

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En d'autres occasions, ce même gouvernement invoquait la soi-disant notion de l'intérêt national, de même que les engagements internationaux inhérents à la mondialisation de la question environnementale, comme si le Québec n'était pas en mesure de faire face, par lui-même, à cette nouvelle réalité. Soyons sérieux.

Pour prouver la mauvaise foi de ce gouvernement en ce qui concerne son appétit insatiable de s'ingérer dans les affaires du Québec, j'aimerais faire état de quelques exemples flagrants en matière environnementale.

Le premier exemple est la mise en oeuvre de la politique d'éco-gouvernement par laquelle Ottawa a totalement ignoré les pouvoirs provinciaux en privilégiant le partenariat avec les représentants des secteurs industriels, municipaux et agricoles, et a ainsi oublié de façon délibérée l'implication du Québec.

Le deuxième exemple est la mise en oeuvre de la Loi sur l'évaluation environnementale, qui empiète de façon sans précédent dans les responsabilités provinciales et qui crée, en cette matière, de nombreux chevauchements avec la loi québécoise. Maintenant, il y a le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation. Il y a d'autres exemples, mais j'en passe.

Parlant de chevauchements, ce projet de loi est vraiment le comble. C'est un fouillis administratif inimaginable.

En effet, le projet de loi C-48, mis de l'avant par le ministère du Patrimoine canadien, mettra sur pied une nouvelle structure, c'est-à-dire les aires marines de conservation, qui viendra dédoubler les zones de protection marine établies par le ministère des Pêches et des Océans, qui elles viendront encore dédoubler les zones marines protégées du ministère de l'Environnement. Cela, sans compter le dédoublement avec le ministère de l'Environnement et de la Faune du Québec. Voici une belle démonstration de l'inefficacité de la bureaucratie fédérale. Il y a de quoi en perdre son latin.

De plus, le projet de loi C-48 fait fi de l'intégrité territoriale du Québec. On n'a qu'à lire le texte dudit projet de loi. À l'article 5(2), il est explicitement stipulé que le ministre ne pourra établir une aire marine de conservation, et je cite:

      [...] que s'il est convaincu que Sa Majesté du chef du Canada a un titre incontestable sur les terres visées, sauf pour la partie située dans la zone économique exclusive du Canada.

Le Québec n'est pas à vendre. À cet effet, l'article 92(5) de l'Acte constitutionnel de 1867 reconnaît que la gestion et la vente des terres du domaine public sont de la juridiction exclusive des provinces.

Au Québec, nous avons la Loi québécoise sur les terres du domaine public, qui s'applique à toutes les terres qui font partie du domaine public au Québec, incluant le lit des cours d'eau et des lacs, de même que les parties du lit du fleuve Saint-Laurent et du golfe du Saint-Laurent appartenant au Québec par droit de souveraineté.

De surcroît, cette même loi prévoit que le Québec ne peut céder ses terres au fédéral. Dans les faits, il ne peut qu'autoriser, par décret, à les utiliser en vertu de ses juridictions fédérales. Or, la protection des habitats et de la faune est une juridiction partagée. Le gouvernement du Québec prévoit prochainement se doter d'un cadre de protection des aires marines.

Comble de cette suffisance dont ce gouvernement fédéral aime mettre faire état, Patrimoine Canada a l'intention de mettre sur pied, unilatéralement, trois projets de zones marines de conservation dans le fleuve Saint-Laurent, dans l'estuaire et dans le golfe Saint-Laurent, trois endroits qui relèvent de la juridiction du Québec.

Comment peut-on expliquer l'arrogance de ce gouvernement, qui se réclame être le propriétaire du fond marin, là où il le voudrait, et ainsi établir des aires marines de conservation? Pourquoi ce gouvernement fédéral ne favorise-t-il pas la mise en place d'ententes bilatérales entre le gouvernement québécois et celui d'Ottawa, et ce, pour permettre de garder ses champs de juridiction?

Ce gouvernement aime beaucoup mieux faire cavalier seul et prouver au reste du Canada que c'est lui qui dicte les règles du jeu, et cela, sans se préoccuper de ses propres lois et de celles des provinces. Voilà une autre preuve des iniquités du système fédéral à l'endroit du Québec.

Quelle bêtise et quelle ironie à la fois. Le fédéral dédouble les provinces mais, en plus, s'ouvre lui-même la porte à du double emploi.

 

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Comment veut-on que la population les croit et leur fasse confiance, quand ils démontrent si peu de volonté et si peu de vigueur dans leur législation? Les Québécois et Québécoises vont alors saisir et comprendre davantage, et ils seront encore plus convaincus de la nécessité de se retirer du régime fédéral.

Le projet de loi C-48 sur les aires marines de conservation constitue une attaque inacceptable dans un domaine relevant, d'une manière prépondérante, de la compétence des provinces. Il provoquera dédoublement, contestation et subordination des processus provinciaux, entraînant ainsi des dépenses inutiles et coûteuses et de nombreux litiges. Situations de plus en plus courantes dans le régime fédéral, qui deviennent intolérables.

C'est le contribuable qui paiera, encore une fois, le prix de cette mauvaise décision du gouvernement fédéral.

Comme je l'ai dit au tout début, le Bloc québécois votera contre ce projet de loi. Et le 30 novembre prochain, les Québécois et Québécoises feront le choix qui est le meilleur pour le Québec, ils voteront pour le Parti québécois.

[Traduction]

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, un des problèmes que nous avons probablement dans notre pays, c'est qu'on mêle la politique à des idées qui seraient considérées comme excellentes.

Notre parti appuie le projet de loi sur les aires marines de conservation, mais nous avons quelques réserves à son égard. Permettez-moi de m'écarter du sujet un instant. Comme je suis porte-parole de mon parti en ce qui concerne les pêches et les océans, je voudrais intégrer ces questions à mon propos. Au large du plateau de la Nouvelle-Écosse, on trouve le Banc Georges. Soit dit en passant, je signale que son nom n'a pas été emprunté à celui du député de Gander—Grand Falls. Je tiens à le répéter, car je sais qu'il boit chacune de mes paroles. Les Américains ont imposé un moratoire sur l'exploitation pétrolière et gazière, du côté du Banc Georges qui leur appartient, jusqu'à l'an 2012.

Il s'agit d'un important secteur de pêche pour toute la côte est. Bien que cela n'ait pas été accepté et qu'il y aura des audiences et des examens à cet égard, le Canada songe à la possibilité de discuter du forage pétrolier et gazier dans le Banc Georges, un des principaux secteurs de pêche du monde, au large de la côte est du Canada.

À notre avis, le seul fait qu'on songe à effectuer un examen, à s'entretenir avec des sociétés comme Shell, Mobil, PetroCan ou que sais-je encore, est incroyable. Nous de devrions pas tenter, par un moyen ou un autre, de détruire une ressource pour en exploiter d'autres. Incidemment, la ressource du secteur de la pêche dont il est question est renouvelable. Si on l'exploite de façon durable en insistant sur la protection de l'environnement, elle peut se renouveler et apporter richesse économique, non seulement aux générations à venir, mais également à bien d'autres qui suivront.

Si nous détruisons ces ressources et que nous permettons le forage pétrolier et gazier sur le Banc Georges, il s'ensuivra une prospérité économique pour notre génération, mais rien pour l'avenir, absolument rien.

Le problème qui se pose lorsque les bloquistes, les libéraux, les réformistes, les conservateurs et même nous-mêmes discutons de la question en laissant des considérations politiques intervenir dans le débat, c'est que nous ne pouvons voir qu'en fonction de mandats de quatre ans. Je suis en politique depuis peu. Je sais que les politiciens sont des gens qui réagissent. Ils n'adoptent pas une attitude proactive.

Le député de Churchill River, dans le nord de la Saskatchewan, est aussi un Métis. Les gens de sa culture voient beaucoup plus loin que la génération actuelle. Lorsque leurs activités ont des répercussions sur les terres et les ressources, ils s'assurent que les futures générations, pas seulement celles de leurs enfants et de leurs petits-enfants, mais celles des enfants qui vivront dans des centaines d'années, pourront avoir accès aux espèces et aux ressources actuellement à notre disposition et qu'ils pourront vivre en harmonie avec elles.

Nous avons certaines réserves au sujet du projet de loi. Nous souhaiterions certaines améliorations, mais ce n'est pas une mauvaise mesure législative par rapport à ce que nous avons fait en ce qui concerne nos terres. L'actuel premier ministre du Canada est très fier de dire qu'il a permis la création de plus de parcs dans notre pays que tout autre ministre avant lui. Malheureusement, si l'on prend l'exemple du parc national Banff, on clame cette réussite, puis on permet juste en bordure du parc l'exploitation à ciel ouvert du charbon pour des gains économiques immédiats, mais on ne tient absolument pas compte du futur à long terme de notre pays.

Je rappelle à tous les parlementaires et aux gens qui suivent aujourd'hui nos travaux que nous ne sommes pas les maîtres de la planète. Nous partageons cette dernière avec de nombreuses autres espèces. Si nous exploitons une espèce particulière jusqu'à son extinction, nous portons préjudice à l'ensemble du genre humain. Il est honteux que nous ayons une si longue liste d'espèces qui vivaient autrefois sur cette planète et qui sont maintenant disparues à cause de notre réflexion à court terme.

 

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Les aires marines viennent simplement s'ajouter à la liste des parcs du Canada. Quand les provinces participent, elles se mettent à légiférer pour permettre la tenue de discussions sur l'exploration ou l'exploitation minière dans les parcs, ou même pour intervenir dans ces discussions. Je suis peut-être vieux jeu, mais je considère qu'un parc est un endroit destiné à un usage commun, où l'on se promène, où l'on fait du canoë ou du camping. Ce n'est pas nécessairement un endroit où l'on va jouer au golf, prendre un sauna, exploiter les ressources minières, aller à la pêche ou couper tous les arbres. J'aimerais pouvoir voyager dans le temps 500 ans et, à mon retour, retrouver le parc dans l'état où je l'ai laissé.

Ce ne serait pas possible parce que nous considérons les parcs et les aires marines du Canada et du monde entier comme des endroits à exploiter. Ces endroits sont riches en ressources que nous allons exploiter au maximum sans même songer à partager. Malheureusement, nous n'avons pas assez de parcs ou de réserves naturelles qui sont protégés. La loi sur les parcs marins ne fera que définir ce que nous possédons le long des côtes maritimes.

Je voudrais maintenant parler d'une région appelée le «Gully», au large de l'île de Sable. Il existe d'ailleurs plusieurs goulets du genre, mais pour ceux qui ne sont pas au courant, le «Gully» est une réserve marine d'espèces sauvages. La vie aquatique y est d'une richesse absolument incroyable. Or, je pense que nous manquons de jugement en autorisant des activités de forage minier et gazier à proximité de cet endroit. On prétend avoir fait des évaluations environnementales et tout le nécessaire, mais je ne pense pas que l'on ait assez évalué les répercussions environnementales à long terme non seulement sur cette partie du plancher océanique, le «Gully», mais aussi ailleurs.

Il y a aussi le Bonnet Flamand qui est réputé. Comme tout le monde le sait, en particulier les députés de Gander—Grand Falls et de Malpèque, le Bonnet Flamand est une importante région vierge poissonneuse. À l'heure actuelle, avec l'accord du gouvernement canadien et ceux d'autres pays, on est en train de piller ces ressources. Pour ce faire, on utilise de gros chalutiers.

Ce qui est étonnant, c'est qu'un haut fonctionnaire du MPO aurait déclaré au comité, le compte rendu en fait état, que le chalutage est parfois avantageux, parce qu'il permet d'ouvrir et de retourner le fond de l'océan. Je n'avais jamais entendu dire que le chalutage qui exploite à fond la ressource, viole et pille tout le fond de l'océan pouvait être bon. Ce qui est bon, c'est surtout le gain financier qu'on en tire rapidement. La méthode est très rapide et très efficace, mais son utilisation suppose une absence totale de vision à long terme.

Si nous voulons préserver le gagne-pain des pêcheurs des localités côtières, il nous faut des parcs marins sur les côtes de nos trois océans et dans les Grands Lacs, pour que les poissons et les autres espèces aquatiques aient des endroits où prospérer et croître. Si nous ne le faisons pas, il ne restera plus rien aux générations futures.

Il est honteux que nous, parlementaires, laissions jouer la politique dans un dossier comme celui-là. Il faut sortir de ce contexte. Nous devons oublier la politique partisane et commencer à nous préoccuper de nos enfants et de nos petits-enfants, pour qu'ils puissent profiter d'un environnement aussi beau que le nôtre.

Je suis persuadé, monsieur le Président, bien que vous soyez vous-même un tout jeune homme, qu'il y a des choses que vous voyiez dans votre enfance et que vos enfants, vos neveux et nièces et leurs enfants à eux ne pourront pas voir, parce que nous les avons fait disparaître par une exploitation excessive. Nous avons altéré l'environnement. Nous l'avons changé au nom de nos intérêts à court terme, mais nous ne nous sommes pas préoccupés du long terme.

Mon parti et moi appuyons le projet de loi avec certaines réserves. Des amendements s'imposent, et nous espérons qu'ils seront apportés. Nous souhaitons que les provinces, et plus particulièrement le Québec, y prendront un vif intérêt.

Regardons les choses en face: si nous écartons les provinces et les particuliers, que nous restera-t-il? Nous savons les ressources naturelles qui étaient là bien avant nous. J'ignore qui nous a donné le droit de les exploiter et même des les épuiser, mais, si nous ne nous soucions pas du long terme, les générations futures, s'il y en a, diront de notre génération que nous étions une bande de garnements gâtés qui ont tout pris et ne leur ont rien laissé.

Je vais conclure là-dessus. Nous appuyons le projet de loi avec certaines réserves, et nous espérons que tous les parlementaires se préoccuperont de l'avenir et pas uniquement d'eux-mêmes.

 

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[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-48, ayant pour titre Loi concernant les aires marines de conservation, vise la création de 28 aires marines au Canada.

Cela nous amène à nous poser de nombreuses et sérieuses questions sur plusieurs points, tant au niveau du partage des compétences en matière d'environnement—harmonisation avec les provinces—que de l'intégrité du territoire, du chevauchement de différents ministères fédéraux et de la pseudo-consultation qu'a réalisée ce gouvernement. J'aborderai chacun de ces points pour expliquer pourquoi le Bloc québécois s'oppose à ce projet de loi.

À titre de porte-parole du Bloc québécois en matière d'environnement, je signale que mon parti est en faveur de toute mesure efficace de protection de l'environnement. Cependant, le Bloc québécois est contre ce projet de loi. Au lieu de miser sur la concertation, comme dans le cas du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, le gouvernement fédéral veut implanter des aires marines de conservation sans égard aux juridictions québécoises sur son territoire et en environnement.

De plus, Patrimoine Canada propose la mise en place d'une nouvelle structure, les aires marines de conservation, qui viendront dédoubler les zones de protection marine de Pêches et Océans, et les zones marines protégées d'Environnement Canada. Bref, le fédéral se fend en trois pour fouler les juridictions québécoises.

Dans un autre ordre d'idées, il faut savoir que le projet de loi C-48 ne respecte pas l'intégrité du territoire du Québec. L'une des conditions essentielles pour qu'il y ait établissement d'une aire marine de conservation est que le gouvernement fédéral devienne propriétaire du territoire où sera établie l'aire marine de conservation.

Le paragraphe 5(2) du projet de loi mentionne que le ministre ne pourra établir une aire marine de conservation:

      [...] que s'il est convaincu que Sa Majesté du chef du Canada a un titre incontestable sur les terres visées, sauf pour la partie située dans la zone économique exclusive du Canada.

Or, je rappelle que le paragraphe 92(5) de l'Acte constitutionnel de 1867 reconnaît que la gestion et la vente des terres du domaine public sont de la juridiction exclusive des provinces.

Par ailleurs, au Québec, la Loi québécoise sur les terres du domaine public s'applique «à toutes les terres qui font partie du domaine public du Québec, y compris le lit des cours d'eau et des lacs, de même que les parties du lit du fleuve Saint-Laurent et du golfe Saint-Laurent appartenant au Québec par droit de souveraineté».

De plus, cette même loi prévoit que le Québec ne peut céder ces terres au fédéral. Il ne peut qu'autoriser le fédéral, par décret, à les utiliser en vertu de ses juridictions fédérales. Or, la protection des habitats et de la faune sont une juridiction partagée et le gouvernement du Québec prévoit se doter d'un cadre de protection des aires marines prochainement.

Selon les notes fournies par Patrimoine Canada concernant le projet de loi, des zones marines de conservation sont prévues dans le fleuve, l'estuaire et le golfe Saint-Laurent, soit trois endroits où le lit marin relève de la juridiction du Québec.

Par ailleurs, des mécanismes de collaboration existent déjà pour protéger les écosystèmes au Parc marin Saguenay—Saint-Laurent et pour le fleuve, en vertu de l'entente intitulée Plan d'action Saint-Laurent, phase III, signée par tous les ministères fédéraux et québécois concernés, et qui prévoit l'investissement de 250 millions de dollars sur cinq ans pour différentes activités reliées au fleuve Saint-Laurent.

À ce titre, le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent est un bon exemple à suivre. En 1997, les gouvernements fédéral et québécois adoptaient une loi miroir créant le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent. Cette loi a permis la création de la première aire marine de conservation au Canada.

Les principaux éléments de la loi sont: le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent est le premier parc marin créé à la fois par le gouvernement fédéral et par le Québec, sans transfert de territoire. Les deux gouvernements continueront d'y exercer leurs compétences respectives.

C'est un parc qui n'est constitué que de milieu marin. Ses limites couvrent 1 138 kilomètres carrés. Elles peuvent être modifiées s'il y a accord entre les deux gouvernements et si ceux-ci ont consulté conjointement le public à cet effet.

Pour favoriser la participation du milieu, les lois adoptées par le Québec et le fédéral confirment la création du Comité de coordination, dont la composition est déterminée par les ministres fédéral et provincial.

 

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Ce Comité a pour mandat de recommander aux ministres responsables des mesures pour atteindre les objectifs du plan directeur. Ce plan sera révisé conjointement par les deux gouvernements au moins tous les sept ans.

Toute forme de prospection, d'utilisation et d'exploitation des ressources à des fins de production minière ou énergétique, de même que le passage d'oléoduc, de gazoduc et de ligne de transport d'énergie sont interdits à l'intérieur du parc.

En vertu des lois du Québec et du Canada, les gouvernements pourront déterminer par règlement les mesures de protection des écosystèmes et des ressources du parc et celles visant la sécurité du public. Plus spécifiquement, ils pourront définir les modalités d'utilisation de chacune des catégories de zones, ainsi que la durée d'application de ces modalités.

Cette première aurait dû servir de modèle à suivre au gouvernement fédéral pour la création des autres aires marines de conservation.

En refusant de prendre comme exemple la Loi sur le Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, le gouvernement fédéral agit en gouvernement centralisateur qui veut tout contrôler, indépendamment des champs de compétence reconnus.

Le Bloc québécois rappelle au gouvernement qu'il a appuyé cette loi, alors qu'il proposait sa législation pour la création du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent. De plus, le Bloc québécois sait que le gouvernement du Québec mène également des initiatives qui ont pour objectifs la protection de l'environnement et la protection des fonds marins en particulier. Le gouvernement du Québec est également ouvert à oeuvrer en ce sens avec le gouvernement fédéral, comme le démontre la phase III du Plan d'action du Saint-Laurent.

L'implication de plusieurs ministères fédéraux dans des dossiers environnementaux, voici une nouvelle tendance qui nous amène à croire que l'on veut affaiblir le ministère de l'Environnement.

Par ce projet de loi, le gouvernement fédéral entend créer des aires marines de conservation par l'entremise de Patrimoine Canada, des zones de protection marine par le biais de Pêches et Océans Canada et des réserves marines de la faune par l'entremise d'Environnement Canada. Un site pourrait se retrouver avec plusieurs zonages superposés.

Le Bloc québécois est d'avis que cette multitude d'appellations constitue un chevauchement de juridiction qui pourrait être résolu si le gouvernement fédéral se donnait un maître d'oeuvre qui régirait les objectifs visés par les différents ministères.

En créant trois initiatives distinctes, dont les objectifs sont très similaires, à quelques nuances près, le gouvernement fédéral crée de toutes pièces des chevauchements de juridiction qui entraîneront, non seulement de la confusion parmi les populations côtières concernées au premier chef, des tiraillements avec le gouvernement du Québec, mais également des tiraillements à l'intérieur du gouvernement fédéral lui-même.

Pour mieux illustrer l'ampleur du problème, le gouvernement du Québec a refusé de participer à la mise en place de ces zones de protection marine dans le cadre de la Loi sur les océans, parce qu'il estime que le gouvernement fédéral ne respecte pas les juridictions québécoises.

Dans une consultation populaire, il est essentiel d'inviter les populations côtières, les organismes environnementaux, en fait, les gens du milieu concerné, à s'exprimer et à participer. Dans les faits, il n'en est rien. Nous savons que la pseudo-consultation menée par Patrimoine Canada sur son projet de création d'aires marines de conservation a été un échec, comme celle d'ailleurs menée par Pêches et Océans pour créer des zones de protection marine.

Un document d'information a été envoyé par Patrimoine Canada à 3 000 groupes à travers le Canada. De ce nombre, moins d'une dizaine ont répondu par des lettres et une cinquantaine ont simplement retourné le coupon-réponse que contenait le document. Parmi ces réponses, une seule est écrite en français.

Dans un tel contexte, il est impossible de parler d'une vraie consultation. Comment peut-on penser arriver avec un projet de loi apparemment concerté avec les gens du milieu sans connaître leurs préoccupations? Ces constats nous amènent à croire qu'il s'agit d'une pseudo-consultation vide et sans fondement.

De plus, nous suspectons que les organismes consultés ont été présélectionnés. À titre d'exemple, si les ZIP, zones d'intervention prioritaire, et les CRE, conseils régionaux de l'environnement, avaient été consultés, nous aurions pu profiter de toutes leurs expertises. En réalité, environ 30 p. 100 de ces organismes ont été consultés, ce qui est tout à fait inacceptable.

En conclusion, le Bloc québécois est contre ce projet de loi pour les raisons suivantes.

Au lieu de miser sur la concertation, comme dans le cas du Parc marin Saguenay—Saint-Laurent, le gouvernement fédéral ne reconnaît pas les juridictions québécoises, autant sur son territoire qu'en matière d'environnement. Il y a donc empiétement dans la juridiction québécoise.

Patrimoine Canada propose la mise en place d'une nouvelle structure, les aires marines de conservation, qui viendra dédoubler les zones de protection marine de Pêches et Océans Canada et les zones marines protégées d'Environnement Canada.

 

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Pour toutes ces raisons, et pour plusieurs autres, le Bloc québécois s'opposent à ce projet de loi.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-48 qui, je l'avoue, à la suite d'une lecture rapide, ne m'avait pas accroché plus que cela. Je me disais: «Tout le monde est pour la vertu, et les Québécois, probablement plus que quiconque, parce qu'ils sont très sensibles à ce genre d'intervention.»

J'ai examiné un peu plus profondément tout le travail qui a été accompli par une ministre hystérique, si j'ose dire, du Patrimoine, qui a proposé ce genre de législation. Derrière des intentions louables, on voit que la ministre n'a pas changé d'un iota son comportement à l'endroit du Québec et qu'elle est toujours aussi hystérique, comme elle l'a été, tout récemment d'ailleurs, en demandant au Comité olympique canadien de surseoir à sa décision en ce qui concerne le choix de la ville pour présenter les Jeux olympiques de 2010.

Conformément à sa tradition, la ministre actuelle du Patrimoine n'a jamais, au grand jamais, péché par excès de consultation. Au contraire, dans tout ce qu'elle a entrepris, aussi loin que je puisse me rappeler, elle agissait toujours d'une façon manu magister; elle impose, d'une main de maître, sa vision des choses, son idée. Et vraiment, la consultation n'est pas son fort, encore moins sa tasse thé.

Ce projet de loi créera jusqu'à huit aires marines qui seront établies quelque part dans l'estuaire du Saint-Laurent, mais on ne précise pas si ce sera en amont, et jusque où. On ne le sait pas. Soyons bons joueurs, disons au moins jusqu'au partage des eaux salées et des eaux douces, ce qui veut dire quelque part entre Rivière-du-Loup et Montmagny. C'est là qu'on ferait des aires marines de conservation. Mais est-ce qu'on a consulté le milieu?

J'entendais le député de Gander—Grand Falls dire plus tôt que l'espace de reproduction, d'accouplement, de frai du maquereau se situe sur la côte nord du Saint-Laurent, de même que d'autres espèces de poisson que l'on retrouve fréquemment dans ces régions. Est-ce qu'on peut entrevoir que les gens de la côte nord du Saint-Laurent, notamment ceux des comtés de mes collègues, les députés de Charlevoix et de Manicouagan, feront les frais, sans aucune compensation, de la conservation qu'on établira dans ce secteur pour les aires marines de conservation?

Est-ce que ces gens ont été consultés? Est-ce qu'on parle d'ouverture pour certaines périodes? Est-ce qu'on parle d'une pêche plus contrôlée? Est-ce qu'on va leur donner la chance, non pas de vivre, mais de survivre, lorsque ce projet de loi sera en vigueur?

La ministre devrait bien se rendre compte que cette politique d'intransigeance d'application envers et contre tous ne conduira nulle part.

Je vais faire un bref aparté. Je déjeunais, ce matin, en compagnie d'une personne que je considère comme un ami, un ministre de l'autre côté.

Il ne comprenait pas et il s'interrogeait en me demandant: «Qu'est-ce que les libéraux ont fait de mal, au Québec, pour en être rendus où, à l'élection du 30 novembre prochain, on se fera balayer dans les comtés francophones du Québec? On va garder nos châteaux forts, c'est sûr, mais qu'est-ce qu'on a fait de pas correct? Où avons-nous manqué? On vous a envoyé Dieu le Fils en personne, comme sauveur de la nation canadienne.» Je me réfère, bien sûr, à M. Jean Charest. «Qu'est-ce qui n'a pas fonctionné? Où a-t-il manqué?»

 

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Devant l'attitude arrogante affichée par la ministre du Patrimoine canadien, les Québécois ont appris avec les années. Cette attitude, cautionnée par le premier ministre actuel qui a été l'artisan numéro un du rapatriement unilatéral de la Constitution de 1982, laisse des traces dans l'esprit collectif. Les Québécois sont devenus craintifs. Les Québécois ne sont pas prêts à faire confiance à un gouvernement qui serait téléguidé par la ministre du Patrimoine canadien, qui nous impose le projet de loi C-48 sans avoir consulté personne si ce n'est quelques-uns de ses amis qui bénéficient de subventions difficilement retraçables en vertu de tel ou tel programme. De toute façon, elle a bien sûr des amis dans ce milieu. Elle a donc consulté ses amis et ce sont eux qui lui ont probablement inspiré les effets néfastes qu'on attend de l'application du projet de loi C-48.

Si la ministre avait été soucieuse de l'image du gouvernement fédéral au Québec, elle aurait d'abord entrepris des consultations avec le gouvernement du Québec. Elle nage actuellement—et c'est le cas de le dire—dans le pur empiétement des compétences législatives.

Pourtant, les Pères de la Confédération n'étaient pas une bande de tarés. C'étaient des gens qui avaient établi des priorités. C'étaient des gens qui avaient cru, de bonne foi, qu'on devait faire un partage des compétences législatives et attribuer à l'un ce qu'on pensait qui devait lui être attribué et, à l'autre, lui attribuer les compétences dans des domaines où, traditionnellement, il avait démontré la meilleure aptitude à les gérer.

Le gouvernement agit en vertu d'un pouvoir de taxation immense qui va bien au-delà de ses besoins réels. Il agit aussi à partir de son pouvoir de dépenser et aussi de son pouvoir de détourner des fonds, notamment dans le cas récent de la caisse de l'assurance-emploi.

Le gouvernement se retrouve avec une dette incommensurable. Toutefois, les apports économiques additionnels lui permettront, d'une part, d'éponger le déficit accumulé. D'autre part, il puise dans la caisse de l'assurance-emploi et a accumulé, durant les six premiers mois de l'année en cours, 10,4 milliards de dollars de surplus. Il s'agit purement et simplement de détournement de fonds.

C'est pour toutes ces raisons que les Québécois sont craintifs et que la caution morale dont jouissaient les gouvernements fédéraux, il y a 50, 60 et 70 ans, ne passe plus la rampe. Leurs moindres gestes sont scrutés à la loupe par la population ainsi que par les députés qui représentent le Québec et les autres provinces. À cet égard, je pense que mes amis du Parti réformiste défendent également les intérêts des gens de l'Ouest canadien. Ils sont plus agressifs lorsqu'on parle de la Commission canadienne du blé ou de choses plus spécifiques au développement de leur territoire.

Il appartient à l'opposition d'intervenir et de dire à la ministre hystérique, qui nous lance toutes sortes de bêtises lorsqu'il n'y a pas de caméra, qu'il est grand temps qu'elle se mette les yeux vis-à-vis des trous et qu'elle regarde ce qui se passe et ce qui ne va pas au Québec, où la simple évocation du nom du premier ministre actuel engendre des crises d'urticaire chez environ 35 p. 100 de la population. Il y a quelque chose qui ne va pas et il est temps que la ministre s'en rende compte.

Je lui demande de surseoir à ce projet de loi qui a des dehors tout à fait honorables, soit la protection de certaines espèces marines en voie de disparition. Qui serait contre la vertu, qui serait contre la pureté? Je n'en connais pas et surtout pas dans mon parti de ce côté-ci. Sauf que, encore une fois, les effets pervers de ce projet de loi ont trait au pouvoir de dépenser, d'aller fourrer son nez dans ce qui ne les regarde pas.

Il s'agit d'imposer de façon manu magister des choses qui ne relèvent pas de leur compétence. S'ils veulent dépenser à tout prix, qu'ils le fassent à même le surplus de 10 milliards de dollars accumulé dans la caisse de l'assurance-emploi et qu'ils en dépensent un peu pour soulager les chômeurs qui ne sont maintenant plus que 43 p. 100 à recevoir des prestations.

 

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Donc, si les propos de la ministre partent d'un bon naturel, elle devrait reculer, dire qu'elle s'est vraiment fourvoyée avec ce projet de loi et qu'elle est en train de se mettre les pieds dans l'eau jusqu'aux genoux.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il y a eu des pourparlers entre les représentants de tous les partis et je crois que vous obtiendrez le consentement unanime pour reporter le vote par appel nominal sur la motion du secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, concernant la deuxième lecture du projet de loi C-48 au mardi 1er décembre 1998, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.  

*  *  *

LOI SUR LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 16 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations et visant sa prise d'effet, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui concernant le projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres des premières nations. Cette mesure ratifie l'accord-cadre qui permettra à 14 premières nations de se soustraire à l'application des dispositions sur la gestion des terres prévues dans la Loi sur les Indiens.

Les députés dont les circonscriptions incluent au moins une de ces premières nations attesteront que, depuis nombre d'années, elles jouent un rôle de premier plan en ce qui a trait à la gestion des terres. C'est d'ailleurs à leur demande que ce projet de loi historique a été élaboré. Il fait suite à des négociations entre les gouvernements qui permettront à ces premières nations d'adopter leur propre régime de gestion des terres.

Ceux qui ont suivi les négociations de l'accord-cadre sur la gestion des terres des premières nations savent également que le processus a réuni les 14 signataires dans un esprit de collaboration. Ces derniers continueront de coordonner les activités par l'intermédiaire d'un conseil consultatif sur les terres qu'ils devront mettre sur pied pour les aider à élaborer un code foncier, à négocier des accords spécifiques, à préparer des textes législatifs types et à surveiller tout le processus.

Par l'intermédiaire du conseil, les premières nations pourront également établir un centre de ressources, mettre au point des programmes de formation et conserver des registres sur les codes fonciers des premières nations et les modifications qui y sont apportées.

Le conseil consultatif sur les terres est un outil que les premières nations ont mis sur pied pour accroître la collaboration entre elles et la productivité dans leurs collectivités. C'est la voie qui mène à l'autonomie gouvernementale. C'est la voie qui mène à l'auto-suffisance.

Lorsqu'elles seront en mesure de prendre des décisions au niveau local sans avoir à obtenir d'approbations ministérielles, les premières nations pourront saisir plus rapidement les chances de développement économiques. Elles auront la capacité juridique de traiter directement avec les banques pour faire des emprunts, signer des contrats, dépenser ou placer de l'argent.

Les recettes, les profits et les redevances provenant des terres de réserve gérées par ces premières nations pourront servir de garanties pour des emprunts auprès d'institutions financières. Ces premières nations seront autorisées à conclure des ententes de cogestion avec d'autres territoires dans le but de mettre au point des méthodes d'utilisation intégrées des terres et des ressources, des systèmes de cogestion qui peuvent servir de garantie.

 

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À partir de la date d'entrée en vigueur des codes fonciers, l'argent tiré des activités autres que celles des secteurs pétrolier et gazier, sera perçu et géré par les premières nations. Des mécanismes de comptabilité précis sont intégrés dans ces codes fonciers pour veiller à ce que les responsables rendent des comptes aux membres. L'argent tiré des activités pétrolières et gazières continuera d'être détenu conformément à la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes.

Un autre avantage de cette mesure législative pour les premières nations réside dans les restrictions imposées en matière d'aliénation et d'expropriation. Il s'agit de dispositions importantes. Elles reflètent le lien sacré entre les premières nations et leur terre.

La Loi sur les Indiens permet la cession et la vente de terres de réserve, mais n'exige pas le remplacement des terres vendues. Le projet de loi dont nous sommes saisis supprime ces dispositions pour les premières nations visées par le code foncier. Elles seront en mesure de céder des terres de réserve, mais seulement si elles reçoivent en retour d'autres terres qui deviendront des terres de réserve.

Le projet de loi ne supprime pas les pouvoirs du gouvernement fédéral en matière d'expropriation. La Loi sur les Indiens donne au gouverneur en conseil le pouvoir de permettre l'expropriation de terres de réserve par des autorités provinciales ou locales dans l'intérêt public.

Le projet de loi continue de permettre au gouverneur en conseil d'exproprier des terres pour le gouvernement du Canada pourvu que cette expropriation soit justifiable et nécessaire dans un but public de ressort fédéral, qui vise l'intérêt national. On devra respecter certains critères minimums. Il faudra verser un dédommagement. Cela comprendra des terres d'une superficie égale ou supérieure et d'une valeur comparable aux terres expropriées.

En conclusion, je tiens à souligner que les 14 premières nations visées par l'accord-cadre sont impatientes de voir ce projet de loi adopté pour qu'elles puissent commencer à gérer leurs terres conformément à ce nouveau régime. Tout ce processus revêt beaucoup d'importance pour les gens de ces collectivités. Il est question d'emplois, de croissance économique et d'un gagne-pain assuré pour beaucoup de gens dans ces collectivités.

Le projet de loi est bien loin de se limiter à la gestion des terres. Il touche l'autosuffisance et les débouchés économiques. Il reflète les nouveaux liens que nous établissons avec les autochtones, qui sont basés sur les principes de respect mutuel, de reconnaissance mutuelle, de responsabilité et de partage.

En janvier, le gouvernement a lancé un nouveau plan d'action pour les autochtones appelé Rassembler nos forces. Ce plan établit une nouvelle voie à suivre qui permettra de parvenir à de véritables améliorations dans la vie des autochtones. L'esprit et la vision de ce plan se reflètent dans le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.

Les signataires de cette entente et moi-même exhortons tous les députés à l'appuyer. Je propose donc:  

    Que la question soit maintenant mise aux voix.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté le secrétaire parlementaire avec beaucoup d'intérêt. Je suis sûr que les mots bien choisis qu'il a employés convaincront certaines personnes.

Je reconnais au départ que certains aspects du projet de loi vont dans la bonne direction et nous sommes disposés à les appuyer, surtout en ce qui concerne la cession de la gestion des terres du gouvernement fédéral aux réserves. Néanmoins, le pouvoir de gestion de ces terres se retrouvera aux mains des chefs et conseils de bande et non pas sous l'autorité du ministère des Affaires indiennes.

 

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Est-ce forcément une mauvaise chose? Ce pourrait être une excellente chose si les réserves étaient assujetties à des règles d'obligation redditionnelle rigoureuses. Il devient de plus en plus évident, bien que la ministre des Affaires indiennes n'ait cessé de minimiser, dissimuler et nier la chose depuis plusieurs années, que de sérieux problèmes de reddition de comptes se posent dans de nombreuses réserves. On ne sait pas précisément combien de réserves sont aux prises avec ce problème, mais le pourcentage est certainement élevé.

Je tiens à préciser que ce manque de responsabilité n'est pas nécessairement imputable aux chefs et conseils de bande. C'est plutôt le fait du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. En dépit des dénégations de la ministre, la responsabilité au plan de la gestion financière et démocratique dans les réserves soulève de très sérieux problèmes.

Si le secrétaire parlementaire, ses collègues ministériels ou même des députés de ce côté-ci en doutent, je leur signale un article publié aujourd'hui dans le Citizen d'Ottawa, qui traite précisément de cette question. Je cite:

    Après avoir mal géré les mini-scandales avec lesquels il est aux prises depuis un certain temps, le gouvernement Chrétien risque maintenant de se retrouver avec un véritable scandale sur le dos.

    Il y a des allégations de corruption impliquant des millions de dollars dans des réserves indiennes. Des enquêtes policières sont actuellement en cours en Alberta, les médias commencent à s'intéresser à cette histoire et, dans les plus hautes sphères du gouvernement à Ottawa, on admet qu'on ne voit encore que la pointe de l'iceberg.

    Les subventions versées aux autochtones coûtent chaque année 4,4 milliards de dollars aux contribuables canadiens. C'est le seul budget gouvernemental qui ne fait jamais l'objet de compressions. D'après les allégations, la majeure partie de cet argent ne parvient pas aux autochtones démunis qui vivent dans les réserves, mais se retrouve plutôt dans les poches des intermédiaires autochtones vêtus de complets Armani. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, auquel incombe le contrôle de la situation, ne semble pas savoir où est allé l'argent.

    La ministre, Mme Jane Stewart, a déclaré récemment que bien que ce soit une chose terrible que de mettre tous les autochtones dans le même panier, un sérieux problème de gestion de fonds se pose effectivement.

La chose est importante car c'est la première fois que la ministre reconnaît qu'il s'agit d'une question grave. Jusqu'à maintenant, elle a tenté d'en nier l'existence même.

L'article poursuit:

    Est-ce que l'expression «question grave» est l'équivalent, dans le jargon bureaucratique, de grave scandale de corruption? Les grands décideurs du gouvernement donnent cette impression. Ils citent des exemples d'escroqueries incroyables.

    Si telle est bien la réalité, pourquoi le gouvernement n'intervient-il pas? Pourquoi ne devance-t-il pas la controverse, au lieu d'attendre d'être coincé à cause des faits révélés par les médias et les partis d'opposition?

    «Impossible», a dit un membre important de l'entourage du premier ministre Jean Chrétien. «On nous accuserait de racisme.» Le seul fait de laisser entendre que des autochtones n'ont pas la compétence nécessaire pour gérer leurs finances provoquerait une terrible réaction. À preuve, il pouvait citer le cas du Parti réformiste, qui a soulevé le problème et a été vilipendé en conséquence.

La rectitude politique fait encore des ravages. On gaspille des tas d'argent, mais, à cause des susceptibilités des minorités, on préfère attendre et ne rien faire.

L'article poursuit:

    Un comité sénatorial chargé des affaires autochtones a commencé des audiences, au cours desquelles le problème a parfois été abordé. La sénatrice Janis Johnson, présidente adjointe, qui vient du Manitoba et connaît bien le sujet, dit que, même si des peuples autochtones font des progrès phénoménaux grâce aux programmes gouvernementaux, il ne faut pas sous-estimer l'ampleur du problème. «Si le grand public savait quel chaos règne au ministère et tout l'argent qui circule en tous sens, il n'arriverait pas à le croire. La situation échappe à tout contrôle.»

Voilà ce que nous, de l'opposition, disons depuis deux ans.

L'artticle poursuit:

    Même si Ottawa injecte sans cesse plus d'argent, jusqu'à 25 p. 100 des bandes indiennes ont des dettes qui totalisent des centaines de millions de dollars.

Cela cadre bien avec le type de réaction que nous recevons des gens de la base, dans les réserves, et c'est le problème que nous soulevons aux Communes depuis l'été de 1997, même si la ministre des Affaires indiennes et d'autres députés d'en face nous ridiculisent ou nous critiquent parce que nous le faisons.

La ministre nous a dit que seulement 3 p. 100 des bandes manquaient à leurs obligations, mais le ministère avoue pourtant que 25 p. 100 des bandes ont des déficits de plus de 8 p. 100, ce qui a obligé le ministère à intervenir pour faire de la cogestion.

Permettez-moi de donner quelques exemples des conséquences terre-à-terre, si je peux dire, pour les habitants des réserves.

 

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Dans ma circonscription, il y a quelques années, des membres de la bande gitksan sont venus me voir et m'ont dit que la ministre de la Santé, qui est responsable de la santé des autochtones au Canada, envisageait de signer un accord de transfert des pouvoirs au chapitre de la santé, accord qui conférerait à la bande gitksan la responsabilité première de dispenser des soins de santé à ses membres.

Des membres sont venus me voir parce qu'ils étaient extrêmement préoccupés. Ils ne souhaitaient pas ce changement. Ils ont dit que leur bande, telle qu'elle était alors constituée, ne pouvait administrer ses propres soins de santé et qu'ils ne voulaient pas qu'on leur en transfère la responsabilité.

J'ai écrit plusieurs lettres à la ministre de la Santé de l'époque, je lui ai expliqué le point de vue de ces gens et je lui ai demandé de reconsidérer sa décision et de ne pas leur transférer les pouvoirs en matière de santé. Elle m'a assuré, avec enthousiasme, et j'ai toute la correspondance à cet égard dans mes dossiers, qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter, que l'idée ralliait une grande partie de la bande gitksan et que cette dernière ferait du très bon travail.

Deux ans et demi plus tard, tout cela nous retombe dessus. Ainsi, au printemps dernier, nous avons découvert, et j'ai saisi le ministre de la question, que les responsables de la santé au sein de la bande gitksan avaient investi à la bourse plus de 300 000 $ dans des actions très risquées et qu'ils avaient perdu 40 000 $. C'est de notoriété publique.

La semaine dernière, nous avons appris, en lisant la une du Smithers Interior News, une publication locale du nord-ouest de la Colombie-Britannique, que 695 000 $ ont été versés en honoraires à des membres d'un conseil sur une période de deux ans et demi. Ces gens-là ne travaillent pour les services de santé, ils font simplement partie du conseil de santé.

En quoi cela fait-il progresser les soins de santé au sein de la collectivité gitksan? Quels effets cela a-t-il sur les gens de la collectivité gitksan qui me disent qu'ils doivent dormir dans leur camionnette parce que, lorsqu'ils vont à Vancouver pour consulter un spécialiste, ils n'ont pas d'argent pour se payer une chambre.

Un homme s'est rendu à Prince George pour subir une intervention chirurgicale à la vésicule biliaire, mais il n'avait pas d'argent pour payer son transport jusque là-bas. Il s'est rendu à l'hôpital en faisant de l'auto-stop et il a subi son intervention chirurgicale. Il a reçu son congé de l'hôpital très rapidement, comme cela se fait de nos jours, et il est rentré chez lui de la même manière. Il a été obligé de s'arrêter à Burns Lake parce qu'il était trop malade. Il a dû faire de l'auto-stop à sa sortie de l'hôpital pour rentrer chez lui. Il n'y avait pas d'argent pour lui, mais il y avait 695 000 $ à verser en honoraires aux membres du conseil et 300 000 $ à investir à la bourse. C'est là le problème.

Est-ce que je blâme la bande gitksan? Je blâme le ministère des Affaires indiennes et le ministère de la Santé qui ne se sont pas assurés que les personnes qui allaient être en charge de ces activités savaient ce qui était acceptable sur le plan de la procédure et qu'il y avait en place une procédure en ce qui concerne la gestion et l'obligation de rendre compte. Apparemment, aucune procédure n'était en place. C'est pourquoi nous sommes dans cette terrible situation aujourd'hui. C'est pourquoi les soins de santé ont été tellement compromis dans le cas du peuple gitksan.

Je peux donner un autre exemple. Le peuple nisga'a a signé récemment une entente en matière de revendication territoriale, en tout cas en principe, puisque cette entente n'a pas été ratifiée par la Chambre. On rapporte que dans une communauté nisga'a plus d'un million de dollars destinés aux prestations d'aide sociale ont été détournés et utilisés à des fins abusives. Ce sont de petites communautés et une somme qui dépasse le million de dollars représente énormément d'argent pour ces bandes.

Nous avons des témoignages d'autochtones de la base d'un peu partout au Canada. Mon collègue de Wild Rose a les dossiers dans son bureau et je crois bien plus de 125 bandes sont venues nous exprimer leur inquiétude et nous demander d'enquêter là-dessus.

Il y a des exemples en Ontario. Une bande est venue nous trouver pour nous dire que le conseil de bande avait reçu de l'argent pour un projet d'aménagement d'égouts et de distribution d'eau. Le conseil a fait appel à un entrepreneur. Celui-ci savait qu'il y avait de l'argent. Il a procédé aux travaux. La bande a reçu l'argent. Lorsqu'il a demandé à être payé, l'entrepreneur s'est aperçu qu'il n'y avait pas d'argent parce que la bande l'avait dépensé ailleurs.

Selon certaines allégations, un chef en Saskatchewan se servirait des fonds de sa bande pour acheter des voitures d'occasion, les revendre à des personnes de la communauté et empocher l'argent. La liste continue. Je pourrais donner des tas d'exemples.

 

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Ce n'est pas réellement une question propre aux autochtones. Il s'agit plutôt de l'échec d'un système. Il s'agit de l'échec d'Affaires indiennes et du Nord Canada qui n'a pas réussi à prévenir cela. Ce ministère a créé un milieu où l'obligation de rendre compte est pratiquement inexistante. C'est un terrain fertile pour des pratiques que l'on pourrait décrire comme, au mieux, contraires à l'éthique et, au pire, corrompues.

Par exemple, tous les élus du Canada, depuis le premier ministre jusqu'au plus humble des conseillers municipaux, reçoivent des salaires et des indemnités dont les montants sont régulièrement rendus publics. Tout le monde au Canada a le droit de savoir combien je gagne en tant que parlementaire. C'est une information publique. Dans les réserves, impossible de savoir. Tout ce que l'on peut obtenir c'est un rapport financier, un simple diagramme circulaire indiquant quel pourcentage des recettes totales de la bande a été consacré à l'administration, à la santé, etc. Nous n'avons pas de ventilation des dépenses, et nous ne savons pas combien gagnent les représentants élus. C'est la réalité dans laquelle ces gens vivent.

Ce projet de loi propose de transférer beaucoup plus de pouvoirs de gestion des terres aux chefs et aux conseils avant d'avoir corrigé les graves carences qui existent au niveau de la transparence, tant démocratique que financière, dans les réserves.

Je sais que le secrétaire parlementaire en est conscient, même s'il n'est pas prêt à en parler. Je dirais que ce n'est pas par hasard que l'association des femmes autochtones du Canada et celle de Colombie-Britannique sont opposées à ce projet de loi. Le plus souvent, ce sont elles qui paient le plus cher cette absence de responsabilité financière. Elles savent très bien que ce projet de loi ne change rien. Elles savent très bien que, en tant que personnes, leur situation sera pire après l'adoption de ce projet de loi.

Elles ne vont pas jusqu'à dire que le régime actuel est parfait, loin de là. Elles disent qu'elles ne veulent pas que la responsabilité de la gestion des terres soit transférée tant qu'un système approprié de reddition de comptes ne sera pas en place afin que leurs vues soient respectées au sein de leurs communautés.

Des gens nous ont dit de ne pas s'inquiéter, car les lois provinciales continueront de s'appliquer pour les questions touchant la famille—et tout cela va se résumer à des questions familiales—comme la répartition des biens de la famille en cas de séparation ou de divorce. Autrement dit, il y a des lois provinciales qui régissent les cas de mariages rompus et la répartition des biens. Même si le chef et le conseil possèdent des droits de gestion des terres, en cas de conflit les lois provinciales auront préséance.

À ce propos, je voudrais faire part à la Chambre d'une anecdote. Ce n'est peut-être pas la première fois que je la raconte, mais je pense qu'il convient de la citer de nouveau.

Lors de la dernière campagne électorale, j'ai rencontré une jeune amérindienne à Prince Rupert. Je pensais qu'elle s'intéressait à ma campagne, mais c'était plutôt le député qu'elle voulait voir. Elle était très troublée. Elle était en larmes. Elle m'a dit: «M. Scott, j'ai besoin de votre aide». Je lui ai demandé de m'exposer le problème.

Elle a expliqué qu'elle était âgée de 35 ans, qu'elle était mère de trois enfants. Deux d'entre eux étaient encore des bébés. L'aîné n'avait que sept ans. Ses enfants lui prenaient beaucoup de son temps. Sa mari l'avait quitté et elle était sans le sou. Elle n'avait pour tout recours que le bien-être social.

Elle possédait bien quelques compétences mais elle ne pouvait pas travailler au dehors puisqu'elle devait s'occuper de ses enfants. Avec les prestations du bien-être social qu'elle touchait, elle ne pouvait pas procurer à ses enfants la nourriture et les vêtements qu'elle jugeait nécessaires pour eux. Je comprenais la situation.

Je lui ai demandé où était le père. Elle a répondu qu'il était parti avec une nouvelle petite amie, qu'il n'avait plus donné de ses nouvelles. Je lui ai dit qu'elle possédait des droits. Elle pouvait demander à un tribunal d'exiger que le père verse une pension alimentaire pour les enfants. Le problème qu'elle avait essentiellement, c'est qu'elle devait obtenir suffisamment d'argent pour subvenir convenablement aux besoins de ses enfants.

Elle a dit qu'elle avait essayé cette option, mais, dès qu'elle a obtenu un jugement exigeant que son mari verse une pension alimentaire pour les enfants, il est retourné habiter dans la réserve. Devinez quoi? L'ordonnance du tribunal exigeant que son mari verse une pension alimentaire pour les enfants n'était pas applicable dans une réserve. Qu'advient-il des droits de cette femme?

 

. 1300 + -

Comment le gouvernement, la ministre et le secrétaire parlementaire peuvent-ils proposer que nous mettions des gens encore plus en péril, que nous mettions des gens comme cette femme en danger, devant une telle absence de reddition de comptes?

À l'heure actuelle, en cas de rupture d'un mariage dans une réserve, devinez qui, la plupart du temps, finit par garder la maison familiale? Dans la société non autochtone, le plus souvent, c'est la femme, car c'est surtout elle qui finit par s'occuper des enfants après l'échec définitif du mariage. Dans les réserves, c'est le contraire, car ce ne sont pas les tribunaux qui décident de la personne qui gardera la maison familiale. Cette décision revient au chef et au conseil. Ils dirigent effectivement la collectivité.

Il faudra examiner ces graves problèmes, et d'une manière acceptable pour les gens qui vivent dans les réserves, avant que nous puissions appuyer un projet de loi de la sorte.

Bien qu'on puisse appuyer le principe du projet de loi, et nous voudrions pouvoir le faire, j'estime que ce projet de loi équivaut à mettre la charrue devant les boeufs. Il faut d'abord qu'il y ait reddition de comptes, avant que nous passions à la prochaine étape et que nous déléguions des pouvoirs plus nombreux et plus larges aux conseils de bande.

Les problèmes graves et persistants qui existent dans les réserves autochtones doivent être examinés d'abord d'une manière satisfaisante et acceptable pour les membres de la bande, avant que le gouvernement n'examine ce projet de loi et une mesure législative de la sorte. Autrement, encore une fois, on laissera tomber quelques-unes des personnes les plus vulnérables de notre pays.

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux que le Parti réformiste ait fait autant de chemin au cours des cinq dernières années et qu'il en arrive maintenant à appuyer les femmes autochtones et les droits des autochtones du Canada. C'est merveilleux et je félicite le député du bon travail accompli dans ce domaine, un travail utile et nécessaire.

Je veux faire valoir quelques points. Je parlerai ensuite de l'obligation de rendre des comptes dans le contexte de ce projet de loi, et je parlerai des préoccupations du député. Il s'inquiète, et avec raison je crois, du partage des biens matrimoniaux en cas de divorce ou de séparation. Je crois qu'il est complètement à côté de la question. Si les députés lisent et examinent soigneusement le projet de loi, ils constateront que certaines des préoccupations et objections du député sont très clairement résolues.

Il y a seulement deux jours, au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, nous discutions de questions comme la pauvreté dans les réserves, pour beaucoup de collectivités des premières nations, et plus particulièrement cette fois en ce qui concerne les collectivités inuit. Les députés du Parti réformiste ont demandé que la ministre vienne en discuter au comité. Nous en étions arrivés là parce que le Parti réformiste avait conclu, selon la logique qui lui est propre, et j'ai suivi le raisonnement de près, que, dans ce cas particulier, ce n'était pas le leadership inuit qui était en cause. Quand les représentants du ministère sont venus nous rencontrer, ils ont admis à la fin de ce débat qui avait duré trois ou quatre heures que ce n'était pas la responsabilité des représentants du ministère, mais peut-être celle de la ministre.

Peut-être que l'une des raisons des difficultés qui nous préoccupent tous ou qui devraient tous nous préoccuper, c'est qu'il n'y a pas assez de fonds investis dans ces collectivités. Les chefs qui ont comparu devant le comité ont, à mon sens, fait valoir de façon convaincante qu'ils font ce qu'ils peuvent avec des ressources limitées.

S'ils réduisaient de moitié leur salaire et celui de tous les membres des conseils d'un bout à l'autre du Canada et si on leur enlevait les allocations de voyages qui leur permettent de se rendre à des réunions ou à des événements semblables, pense-t-on vraiment que cela réglerait le problème au Canada? Notre analyse est-elle superficielle au point où nous pourrions honnêtement croire et débattre ce genre de chose à la Chambre des communes et penser que c'est la réponse à tous ces problèmes difficiles? Je ne le pense vraiment pas. Je ne pense pas qu'on puisse affirmer une telle chose à la Chambre sans sourciller.

En ce qui concerne la représentation, un des partisans du projet de loi C-49 est en fait une bande de la région du député de Prince George. Le chef et le conseil ont rencontré le député et ont dit que si les députés du Parti réformiste croyaient à l'importance de la base dont ils parlent toujours, alors un vote auquel ont participé les femmes de la bande devrait avoir un certain poids. Si c'était vrai, et s'ils étaient fidèles à leurs propres valeurs et principes, ce vote devrait suffire à convaincre ce député d'appuyer ce projet de loi.

 

. 1305 + -

À Prince Albert, le vote en faveur du projet de loi C-49 a été de 381 contre 51. Le député de Prince Albert n'a pas tenu compte de la base et a affirmé à la Chambre que cela était inconstitutionnel et toutes sortes de stupidités qui ne sont pas vraies. Où est le respect pour la base dans tout cela?

Il y a seulement deux semaines de cela, un autre député réformiste a trouvé seulement trois autochtones au sein d'une collectivité de 30 000 personnes; trois dans toute sa circonscription. Il s'est équipé d'une enregistreuse et d'une caméra et il est allé fureter partout pour trouver un autochtone insatisfait du travail de ses dirigeants afin de pouvoir revenir à la Chambre et dire qu'il avait découvert une horreur au Canada, et qu'il avait l'intention d'exposer cela devant la population du pays tout entier.

Je le demande au député; la base n'est-elle pas favorable au projet de loi puisque la bande de la région de Prince George a voté, à 380 contre 50, en faveur de ce projet de loi?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire a sauté de Prince George à Prince Albert, mais je pense qu'il voulait parler de Prince Albert.

Je dirais que la tenue d'un vote dans une réserve, ce n'est pas suffisant. Il y a des réserves, et nous en sommes conscients, qui ne souffrent pas de problèmes de responsabilité parce qu'elles ont des leaders progressistes qui exercent leurs responsabilités de façon convenable. Elles ont en grande partie le soutien de leurs membres. Ce n'est pas le cas dans beaucoup de bandes.

Si nous voulons parler de référendum, je suggérerais d'en tenir un dans toutes les réserves indiennes partout au Canada. Si le gouvernement peut nous montrer à l'issue du référendum que cette mesure reçoit un appui généralisé, je serai tout de suite d'accord pour l'appuyer. Je ne crois cependant pas qu'elle suscite un pareil appui.

Si le député pense que nous faisons les difficiles et que nous tentons de créer toute une histoire à partir de rien en matière de responsabilité, comme il semble le laisser entendre, je signale que nous n'avons pas suggéré qu'on réduise de moitié le salaire de qui que ce soit, ou que les gens cessent de se déplacer. Nous avons cependant soutenu que les membres des bandes devraient savoir à combien se chiffrent ces salaires et en quoi consistent les dépenses. C'est tout ce que nous avons dit. Nous n'avons pas suggéré de réduire le salaire de qui que ce soit. Nous savons cependant que certains des chefs gagnent jusqu'à 150 000 $ par année non imposables. Je pense que les membres de leur bande y trouveraient un peu à redire.

Voici la réponse finale à la question du député: il se tiendra, samedi à Edmonton, une autre assemblée animée par mon ami, le député de Wild Rose. Si le député s'intéresse vraiment à cette question, je l'inviterais à venir écouter ce que ces gens ont à dire. Le député de Wild Rose ne dira pas grand-chose. Il écoutera, et j'exhorte le député d'en face à venir en faire autant.

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'ai vécu dans le territoire du Yukon et j'ai beaucoup collaboré avec le conseil Kaska-Dena de cette région. Je collabore maintenant avec des groupes de pêcheurs du Nord, soit surtout des autochtones, Indiens et Métis, du nord de la Saskatchewan et du Manitoba, pour qu'ils obtiennent un meilleur contrôle de leurs propres ressources halieutiques ou un meilleur accès à ces ressources.

Je sais que la question est longue et qu'elle mérite une longue réponse, mais le député et son parti ne conviendraient-ils pas que le gouvernement et les parlementaires devraient aider les Indiens et les Métis à avoir un meilleur accès à leurs ressources et un meilleur contrôle de celles-ci?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, nous devrions certes faire tout notre possible, en tant que parlementaires et représentants, pour améliorer la situation économique des autochtones. Nous savons que leur situation est parmi les plus désespérées au Canada. Nous savons que ce n'est pas acceptable. Le premier ministre dit que le Canada est parmi les pays où il fait le mieux vivre alors qu'il y a ici des gens qui vivent dans les conditions du tiers monde. Ce n'est franchement pas correct. Je suis d'accord avec le député. Nous avons un devoir et nous devrions le prendre au sérieux.

 

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Dès le départ, avant même de passer à autre chose, nous devons nous attaquer à la question de l'obligation de rendre comptes, qui doit absolument être réglée.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire a semblé dire qu'il n'y a vraiment pas de problème de reddition de comptes dans ces réserves. Selon le rapport même du ministère, dont il a été question il y a deux ou trois jours dans le Citizen d'Ottawa, 25 p. 100 au moins des autochtones sont dans une situation terrible pour ce qui est de la responsabilité financière et de l'endettement.

Je suis allé dans les réserves et j'ai vu les conditions sordides dans lesquelles vivent leurs habitants. Selon un rapport publié par le ministère des Affaires indiennes, le Canada, qui est considéré comme le pays du monde où il fait le mieux vivre, ce qui est excellent, se classerait au 65e rang si l'on tenait compte des conditions de vie dans les réserves.

Le député est-il au courant des rapports qui sont publiés par le ministère des Affaires indiennes? Pourrait-il dire ce qu'il en pense?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je remercie mon ami de Wild Rose pour sa question. Je connais ces rapports. En fait, nous soulevons la question avec toute l'énergie que nous pouvons y mettre depuis maintenant un an et demi.

Nous commençons finalement à retenir l'attention du gouvernement parce que les médias ont beaucoup parlé du dossier dernièrement. Il y a eu des articles en première page du Globe and Mail ainsi que des reportages à CTV et à Radio-Canada. Le gouvernement ne peut donc plus éluder la question. Il lui faut admettre que sa politique de dissimulation a échoué et qu'il doit maintenant faire face à la musique.

Je crois que nous constaterons que, d'ici 12 à 18 mois, la question occupera beaucoup plus le gouvernement, en tout cas certainement plus la ministre et le secrétaire parlementaire des Affaires indiennes, qu'au cours des 10 ou 12 dernières années.

Le président suppléant (M. McClelland): Avant de reprendre le débat, je précise que les interventions de 20 minutes et les périodes de question et observations de 10 minutes sont maintenant terminées. Nous passons aux interventions de 10 minutes, sans questions ni observations.

M. Charlie Power (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres des premières nations, au nom de notre caucus et de notre porte-parole sur ces questions, le député de South Shore, en Nouvelle-Écosse.

Nous savons que le projet de loi n'englobe pas tout. Nous savons qu'il ne réglera pas tous les problèmes des premières nations, cependant, notre caucus l'appuiera parce qu'il constitue un pas dans la bonne direction.

Il a fallu près de 10 ans pour produire ce projet de loi. Le processus a débuté en 1989, avec l'examen du Secteur des terres, des revenus et de la fiducie. L'accord qui a suivi portait sur plusieurs secteurs dont la gestion des terres. L'accord n'a pas survécu, mais quelques premières nations ont persévéré dans les négociations sur la gestion des terres.

Un accord cadre sur la gestion des terres a été signé par 13 premières nations le 22 février 1996 et une quatorzième, celle de St. Mary's, au Nouveau-Brunswick, est venue s'y ajouter le 12 mai 1998. Je voudrais féliciter les 14 premières nations d'avoir pris l'initiative d'élaborer cet accord-cadre et d'avoir persévéré dans ce dossier.

Comme nous pouvons le voir, le processus législatif suit son cours. Il est suivi de près non seulement par les 14 signataires de l'accord qui sont impatients d'en amorcer la mise en oeuvre, mais aussi par de nombreuses autres premières nations.

L'accord-cadre pourrait devenir un modèle pour d'autres accords de ce genre sur la gestion des terres, une fois que cette mesure législative aura été adoptée et que les premières nations auront eu la chance de la mettre en oeuvre. Trente ou quarante premières nations ont déjà exprimé un intérêt dans cet accord-cadre. Je m'attends à ce que beaucoup d'autres fassent de même lorsqu'elles verront les avantages qu'on peut tirer de cette mesure législative.

Nous sommes tous conscients des lacunes de la Loi sur les Indiens. La mesure législative dont nous sommes saisis permettra aux premières nations de ne plus être visées par les restrictions prévues dans la Loi sur les Indiens et elle leur donnera la chance de gérer leurs propres terres et leurs propres ressources. Elles le feront par l'intermédiaire de codes fonciers qu'elles élaboreront pour répondre à leurs propres besoins.

Non seulement cette mesure permet-elle de transférer certains pouvoirs du gouvernement fédéral aux premières nations, mais elle encourage également une plus grande participation communautaire grâce à l'adoption de codes de gestion des terres. Ces codes doivent être ratifiés par les communautés et mis aux voix parmi les membres des premières nations qui vivent dans les réserves comme à l'extérieur. C'est une lourde tâche, mais les premières nations étaient d'avis que c'était important de le faire et que cela valait bien la peine.

En permettant aux gens qui vivent dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci de se prononcer, on élargit le processus en mettant à profit l'expérience et les observations de tous ces gens.

 

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Ce projet de loi est nécessaire pour permettre la mise en oeuvre de l'accord-cadre qui traite expressément de la gestion des terres. Il ne constitue pas un traité et il n'a pas modifié les droits que la Constitution reconnaît aux autochtones ni les pouvoirs prévus aux articles 91 et 24, qui stipulent que les terres des réserves relèvent de la compétence fédérale. En pouvant gérer leurs terres, les premières nations auront plus de pouvoir et d'autonomie par rapport à ces terres, lesquelles demeureront des terres de réserve conformément à la définition de la Loi sur les Indiens. C'est un pas de plus vers l'autonomie gouvernementale, une notion que le caucus progressiste conservateur appuie. Nous continuerons d'appuyer les premières nations dans cet accord de gestion des terres.

M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, je me réjouis de participer, au nom du Nouveau Parti démocratique, au débat sur le projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations et visant sa prise d'effet, et d'offrir l'appui de mon parti à ce projet de loi important.

Je suis fier d'être membre d'un parti qui a tellement fait pour veiller à ce que la question de l'autonomie gouvernementale des autochtones reçoive au Canada l'attention qu'elle mérite. Je suis fier d'être membre d'un parti dont les pendants provinciaux ont formé des gouvernements qui ont tellement fait pour assurer la mise en oeuvre d'obligations prévues dans des traités qui ont été conclus il y a longtemps. Ces traités ont apporté d'énormes avantages au reste du Canada. C'est un honneur d'appuyer le projet de loi C-49. Je suis heureux de voir que le gouvernement a jugé bon de s'entendre avec 14 premières nations dans ce contexte et que deux premières nations de la Saskatchewan, les Muskoday et les Cowessess, sont partie à cet accord historique.

Dans l'esprit de la commission royale, ce projet de loi honore un engagement fédéral à l'égard des autochtones et concrétise de nouvelles idées visant à établir de nouvelles relations entre le gouvernement fédéral et les premières nations. Le projet de loi C-49 porte ratification d'un accord conclu entre le gouvernement fédéral et 14 premières nations. Il concerne l'établissement d'un nouveau régime conformément auquel les premières nations auront enfin le pouvoir et le droit reconnu par le gouvernement fédéral de gérer elles-mêmes les terres de leurs réserves et leurs ressources.

Ces 14 premières nations ne seront plus visées par les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à la gestion des terres, mais la loi prévoit que les terres des premières nations seront préservées pour les générations futures en interdisant toute cession, vente ou expropriation provinciale ou municipale. Il s'agit d'un nouveau partenariat qui accroît l'autonomie des peuples autochtones dans la gestion de leurs ressources et de leur avenir. Cela a de quoi nous réjouir tous.

Ce projet de loi doit être considéré comme un engagement du Canada envers les peuples autochtones, un engagement en faveur de l'évolution politique des premières nations et du concept d'autonomie gouvernementale et d'autodétermination, des notions auxquelles nous souscrivons tous pleinement sans doute. Le processus doit être lié à une transition facile vers l'établissement d'une nouvelle relation entre le Canada et les premières nations.

Les premières nations ont clairement hâte d'obtenir la responsabilité de gérer leurs propres terres et ressources dont il est fait état dans le projet de loi C-49. C'est une bonne entente qui contribuera à créer de l'emploi et des possibilités économiques pour les autochtones. Le projet de loi permettra également aux autochtones de gérer davantage leur propre environnement. En renouvelant le partenariat avec les premières nations, le gouvernement fédéral doit mettre en oeuvre des politiques et des relations intergouvernementales à un rythme convenant aux premières nations et à l'ensemble des Canadiens.

Nous appuyons l'idée que l'accord cadre sera ouvert à d'autres premières nations. Celles-ci pourront se prévaloir du programme si elles le souhaitent et si c'est dans leur intérêt de le faire. Nous espérons que bien d'autres premières nations les imiteront. Nous invitons le gouvernement à garantir le droit des premières nations à disposer d'elles-mêmes et à maintenir l'intégrité territoriale de chaque première nation.

Le projet de loi appuie les initiatives de renforcement des capacités inhérentes à la mise en oeuvre de l'autonomie gouvernementale. Nous devons veiller à ce que les ressources requises soient fournies pour faciliter la participation des femmes des premières nations au processus gouvernemental.

 

. 1320 + -

Il est malheureux que des députés de l'opposition officielle aient choisi de semer la zizanie entre les Canadiens et les peuples autochtones dans leurs discussions non seulement sur ce projet de loi, mais encore presque tous les projets de loi, les politiques ou toute autre question intéressant les peuples autochtones.

Il est malheureux que, de cette façon, des députés réformistes, y compris ceux de Prince Albert et d'Athabasca, aient vraiment tenté d'accentuer les mésententes qui existent au Canada au sujet des Canadiens d'origines autochtone et non autochtone.

Il n'est pas utile, au moment où nous tissons des relations et où nous faisons des progrès, d'aggraver les difficultés et de diviser les Canadiens raisonnables qui veulent trouver une solution à ce problème pour les peuples autochtones. C'est un mauvais service que nous rendent à tous cette incitation au désaccord, cette incitation au mépris et cette incitation au manque de respect que répandent les députés du Parti réformiste.

Il est bon de voir les premières nations établies à l'intérieur des circonscriptions de députés réformistes signaler ce fait à leur député de sorte que ce dernier dise la vérité avec plus d'exactitude et représente mieux ses électeurs autochtones. La première nation Muskoday en particulier a été explicite, claire et ferme à l'égard des propos trompeurs qu'avait tenus le député de Prince Albert, en l'invitant à dissiper les malentendus et à rectifier les affirmations qu'il avait faites et qui donnaient l'impression que cet accord-cadre n'est pas accepté par les premières nations.

À l'occasion d'un référendum, les membres de la première nation Muskoday se sont prononcés à 309 contre 40 en faveur de l'accord, soit un taux d'approbation de 89 p. 100, presque aussi fort que le résultat obtenu par le NPD lors de la dernière élection partielle dans la circonscription d'Athabasca, où le candidat néo-démocrate a reçu 94 p. 100 des suffrages. Non seulement ces taux d'approbation sont importants, mais encore nous n'en voyons pas très souvent de comparables.

Nous voyons en l'occurrence les hommes et les femmes d'une première nation accueillir par une majorité écrasante l'occasion de prendre enfin le contrôle de leurs propres ressources.

Il est temps que le Parti réformiste cesse de tourmenter les Canadiens et d'éveiller leur hostilité. Il doit cesser d'insister sur les aspects négatifs et commencer à bâtir des partenariats avec les peuples autochtones. Le projet de loi C-49 est un bon exemple de partenariat entre le gouvernement fédéral et 14 premières nations, un partenariat qui permettra de renforcer la gestion des premières nations et soutiendra le développement de collectivités fortes et d'économies locales solides.

Le NPD appuie entièrement le projet de loi C-49. Nous avons hâte de le voir mis en application et d'en voir l'application s'étendre aux autres premières nations. Nous avons hâte également de le voir faire en sorte que les autochtones soient finalement capables de s'exprimer de façon appropriée au Canada avec le soutien entier du gouvernement fédéral et des Canadiens.

M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, c'est au nom des électeurs d'Okanagan—Coquihalla que je prends part au débat sur le projet de loi C-49, Loi sur la gestion des terres des premières nations.

Le projet de loi revêt une importance particulière pour les habitants d'Okanaga—Coquihalla, car c'est dans cette circonscription que se trouve la bande indienne de Westbank, l'une des 14 premières nations visées par le projet de loi à l'étude.

Cette mesure aura des conséquences importantes pour les habitants autochtones et non autochtones qui habitent dans la région de Westbank. Les gouvernements fédéral et provincial et la première nation de Westbank ont conclu un accord de principe qui dépasse même la portée du projet de loi.

Après avoir étudié la Loi sur la gestion des terres des premières nations et cet accord de principe, je retiens deux très graves préoccupations dont je voudrais aujourd'hui faire part à mes collègues et au gouvernement.

Pour commencer, les autorités fédérales et provinciales et les autochtones ont négocié le traité de la première nation de Westbank sans que le public soit consulté.

 

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On peut même dire que les négociations ont été entourées de secret.

Deuxièmement, les droits préférentiels accordés à certains Canadiens à l'égard de terres et de ressources sont garantis tout au long de ce projet d'accord, mais toujours fondés uniquement sur la race.

Ce sont là deux faits troublants, dans un pays comme le Canada. Le secret et un traitement préférentiel fondé sur le caractère ethnique cadrent mal avec l'esprit démocratique et le principe de l'égalité devant la loi.

Permettez-moi d'examiner ces deux questions de plus près. La majorité des Canadiens et des simples députés libéraux conviendront que ces problèmes justifient une révision de la manière dont le gouvernement aborde les questions de gestion des terres.

Le premier paragraphe de l'accord de principe dit ceci:

    Sauf si les parties en conviennent autrement, le présent accord et les documents qui l'accompagnent doivent être considérés comme confidentiels par le gouvernement du Canada et la première nation de Westbank et ne pourront être divulgués qu'aux membres de la première nation de Westbank pour qu'ils les étudient.

C'est la démocratie à la façon des libéraux que nous voyons ici à l'oeuvre. Si la première nation de Westbank doit être consultée au moyen d'un référendum, le reste de la population de Westbank ne le sera aucunement.

Selon les statistiques des Affaires indiennes, la première nation de Westbank compte 517 membres. Mais il y a 7 000 non-autochtones sur les terres de Westbank. Ils ne peuvent rien dire sur ce projet de loi ni sur ce problème.

Il y a pire. L'accord final de Westbank deviendra valide une fois approuvé par le Cabinet et une fois le projet de loi adopté. Une fois le projet de loi nécessaire adopté, le Cabinet fédéral peut simplement proposer une modification à l'accord, sans aucun contrôle démocratique.

En ne consultant pas les habitants non autochtones de la région, ni l'industrie extractive, ni les autres parties intéressées, le gouvernement libéral montre sa tendance, digne de l'accord du lac Meech, à refuser la démocratisation de son approche des revendications foncières, dont les ramifications sont très étendues.

Ma deuxième préoccupation tient au fait que l'accord, conjugué au projet de loi C-49, crée une inégalité en accordant des droits et privilèges spéciaux qui se fondent uniquement sur la race. La première nation de Westbank regroupe 517 personnes et sera autorisée à formuler sa propre constitution, comportant de vastes pouvoirs. Les 7 000 habitants non autochtones de la région seront écartés, pour l'essentiel.

Est-ce que le pouvoir de légiférer conféré par l'accord et le projet de loi C-49 vont saper la Constitution? Nos dirigeants politiques ont-ils si peu d'égard pour la primauté du droit? D'après ce que je comprends de l'accord et du projet de loi C-49, je dois répondre à ces deux questions par l'affirmative.

Prenez l'article 37 par exemple. On peut y lire:

    Outre ce qui est prévu à l'article 33, les dispositions de la présente loi l'emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit fédérale.

Il me semble qu'ont fait fi de la primauté du droit et de la suprématie de la Constitution. Le projet de loi C-49 minera la primauté du droit et de la Constitution en accordant aux autochtones le droit de créer des lois qui l'emporteront sur celles du gouvernement fédéral.

Sont pris en étau les 7 000 habitants de Westbank qui ne sont pas autochtones. Ils perdront leur droit d'être gouvernés par les lois du Canada et devront plutôt se plier aux lois adoptées par une minorité fondée sur la race. C'est tout à fait inadmissible.

Lorsque j'ai été élu pour la première fois au Parlement en 1993, je n'ai jamais imaginé que le jour viendrait où j'aurais à débattre d'une loi accordant des droits et des privilèges spéciaux à un groupe particulier.

Les pouvoirs accordés à l'administration de Westbank en matière de gestion des terres sont exhaustifs. Cette administration aura le pouvoir de gérer, d'administrer, de régir, de contrôler, de réglementer, d'utiliser et de protéger les terres de Westbank et d'en tirer profit. Elle pourra également délivrer des permis et gérer le zonage tout en contrôlant l'accès aux terres de Westbank et les intrusions. Voilà les pouvoirs extraordinaires que pourra exercer une minorité sur les terres de Westbank.

Le processus législatif prévu dans le projet de loi C-49 et l'accord conclu avec la première nation de Westbank excluent également la majorité non autochtone de Westbank.

 

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Seules les personnes considérées comme des habitants de Westbank pourront voter aux élections du Conseil de bande de Westbank, c'est-à-dire les habitants de Westbank âgés de 18 ans et plus dont le nom figure sur la liste de la bande de Westbank. Dans la plupart des cas, la majorité est formée de membres des peuples fondateurs non autochtones qui ne pourront pas se prononcer sur les lois de la bande de Westbank, même s'ils seront régis par ces lois. Cela ressemble à de la taxation sans représentation.

Tout ce que ces non-autochtones peuvent faire, ce sont des démarches auprès de l'administration. Permettez-moi de vous citer un extrait de l'accord de principe:

      ...des démarches auprès de l'administration de Westbank au sujet des projets de loi de Westbank et des projets de modification aux lois de Westbank qui touchent directement et grandement les gens qui ne sont pas considérés comme des habitants de Westbank et qui désirent faire valoir leur point de vue.

Cela est tout à fait contraire aux principes de la démocratie. Comment le gouvernement peut-il appuyer la démocratie et l'égalité à l'étranger tout en promouvant des institutions non démocratiques à l'intérieur même de nos frontières?

Le projet de loi C-49 et tout le processus d'autonomie gouvernementale doivent être révisés en profondeur. Le Canada est fier de la réputation qu'il s'est taillée au niveau international par son respect des principes de la démocratie, de l'égalité et de la primauté du droit. En tant que député représentant une circonscription où vivent un certain nombre de bandes indiennes, je n'ai pas ménagé mes efforts pour appuyer les projets de développement économique et de développement de l'éducation dans les localités autochtones. Toutefois, bafouer les droits de la majorité n'est pas une solution appropriée et c'est pourtant l'option qu'a retenue le gouvernement du Canada.

La négociation occulte d'accords fragmentaires en matière de gestion des terres suscitera ultérieurement du mécontentement chez toutes les parties concernées. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien contribue au problème et non à la recherche d'une solution. Nous devons bâtir un avenir meilleur et promouvoir de meilleures relations entre les autochtones et les non-autochtones. Les autochtones doivent devenir des citoyens égaux, des citoyens à part entière, possédant le pouvoir de gérer leur propre vie sans être marginalisés. Le projet de loi C-49 n'est pas la solution au problème.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer aux discussions sur le projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations et visant sa prise d'effet.

J'ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue qui représente une circonscription adjacente à la mienne. Comme toujours, je respecte certainement ses opinions et apprécie tout le travail qu'il a fait. J'ai d'ailleurs appuyé un certain nombre de ses initiatives. Je crains que mes observations ne soient quelque peu contraires aux siennes. Par contre, je reconnais que beaucoup des points qu'il a soulevés inquiètent les gens, notamment ceux des régions que lui et moi représentons.

Comme mon collègue, je pense que la question des relations entre les autochtones et les non-autochtones sera probablement la plus cruciale au début du XXIe siècle. Nous commençons le long processus qui permettra aux membres des premières nations de prendre leur juste place dans la société canadienne. Le plus tôt on abolira la Loi sur les Indiens, le mieux ce sera.

J'ai toujours trouvé ironique que le titre au long de la Loi sur les Indiens disait, en anglais, «An Act respecting Indians». S'il y a une mesure qui ne montre guère de «respect» à l'égard des Indiens, c'est bien celle-là. Nous sommes tous d'accord pour dire que nous voudrions voir la nature paternaliste de la Loi sur les Indiens remplacée dès que possible. De quelle manière, c'est ce que révéleront les discussions et les débats.

 

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Pour moi, pour mon parti et pour la députée de Yukon, notre porte-parole en la matière, le projet de loi C-49 est un pas de plus vers l'autonomie gouvernementale de quelques premières nations.

Beaucoup d'incompréhension entoure la question de l'autonomie gouvernementale. Beaucoup de désinformation est répandue sur le sujet. Je n'irais pas jusqu'à affirmer que les gens qui font cela sont mal intentionnés, mais j'ai parfois des doutes. Quoi qu'il en soit, il est assez difficile de discuter de ce sujet en raison des diverses interprétations données à l'autonomie gouvernementale.

Parmi les premières nations elles-mêmes, on entend de nombreuses interprétations de ce que signifie l'autonomie gouvernementale. Je ne m'attends pas à ce que nous nous entendions tous un jour sur une définition unique de l'autonomie gouvernementale.

Cependant, nous allons franchir un premier pas important sur la voie de l'autonomie gouvernementale et de la possibilité de la définir différemment d'un endroit à l'autre au Canada. Le projet de loi remplacerait la Loi sur les Indiens et mettrait fin aux pouvoirs discrétionnaires qu'elle donne au ministre à l'égard des 14 premières nations visées.

Il y a quelque chose d'assez insidieux dans le fait que la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien soit continuellement appelée à prendre des décisions au sujet de la vie des membres des premières nations. Je viens juste d'avoir une conversation téléphonique avec un homme qui fait des affaires dans une réserve indienne de Kamloops, Thompson et Highlands Valleys. Il m'a demandé d'intervenir auprès de la ministre des Affaires indiennes pour qu'elle approuve un certain élément d'un plan de développement économique.

Il m'a paru très étrange qu'une ministre ou un bureaucrate, à Ottawa, doive autoriser un élément mineur d'un plan de développement économique dans une réserve indienne située en Colombie-Britannique. Quel genre de système tordu est-ce là?

Le projet de loi est une tentative visant à remettre les choses en ordre. On y comprend que, aussi intelligente qu'elle puisse être, la ministre des Affaires indiennes n'en sait probablement pas beaucoup sur la mise en oeuvre d'un petit projet de développement économique sur les berges du lac Shuswap, en Colombie-Britannique. Le fait que sa signature soit requise avant la mise en marche de ce projet témoigne de l'étrange mode de fonctionnement du système.

Cette mesure est un pas dans la bonne direction. D'autres ne sont peut-être pas de cet avis. Elle confère aux premières nations le pouvoir de légiférer au sujet de leurs terres et de leurs ressources, y compris en ce qui concerne la mise en valeur, la conservation, la protection, la gestion, l'utilisation et la possession de celles-ci. Toutefois, les premières nations ne seront pas autorisées à vendre leurs terres; elles pourront les mettre en valeur ou les louer. Les premières nations peuvent acquérir des terres à des fins communautaires. C'est l'évidence même dans un pays libre. Par ailleurs, le projet de loi établit les conditions en ce qui concerne l'obligation de la première nation de rendre des comptes à ses membres.

Le gouvernement reste fiduciairement responsable. Je me rends compte que la responsabilité fiduciaire est une chose qui incombe au gouvernement fédéral en vertu de la Constitution du Canada, mais à mon avis, il y a là un problème que ce projet de loi ne réglera probablement pas. C'est une refonte du projet de loi C-75 de 1996 qui est mort au Feuilleton sous la dernière législature.

Ce projet de loi concerne les premières nations de plusieurs provinces: la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick. Si je devais souligner deux ou trois points essentiels, le premier serait que c'est un pas important dans l'édification de l'autonomie gouvernementale pour les peuples autochtones à travers le pays.

Le statut de la femme et du foyer conjugal sur les terres de réserves en cas de divorce pose un problème particulier. Je sais que la Société des femmes autochtones de la Colombie-Britannique et d'autres personnes contestent actuellement l'accord-cadre devant les tribunaux. Espérons que nous pourrons trouver des moyens de nous pencher sur leurs préoccupations lorsque le projet de loi sera présenté au comité. Sinon, nous devrons peut-être revoir toute la question.

Il y a aussi la question des non-autochtones qui louent des maisons sur des terres de réserve, mais qui ne sont pas autorisés à voter pour ceux qui auront le pouvoir d'adopter des lois qui auront des répercussions sur eux. C'est là un point qui a été soulevé par certains orateurs précédents, qui ont parlé des droits de ces personnes qui vivent actuellement sur des réserves indiennes et qui ne pourront donc pas participer au processus de prise de décision de la bande. Il est évident que cela constitue un problème. C'est une question sur laquelle il faudra se pencher sérieusement, une fois le dossier soumis au comité.

 

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Mon collègue de Saskatoon a déjà exprimé de façon très claire et précise les raisons pour lesquelles nous appuyons le projet de loi ainsi que certaines de nos préoccupations. Cependant, je veux ajouter une ou deux courtes observations. Contrairement à ce qui a été dit par certains de mes collègues, l'article 15 de la Charte qui garantit l'égalité s'applique aux terres de réserves et aux lois des premières nations. Les premières nations ne sont pas au-dessus de la Constitution du Canada.

Le projet de loi C-49 protège les droits des femmes au moment de la rupture de leur mariage. Le paragraphe 5(4) de l'entente-cadre et l'article 17 du projet de loi forcent les 14 premières nations signataires à établir des règles et des pratiques à l'égard de deux droits fondamentaux dans le cas de la rupture d'un mariage, soit le droit de possession du foyer conjugal et le droit au partage des biens.

Toute cette question a fait l'objet d'un litige pendant bon nombre d'années, surtout en ce qui concerne les femmes. Le projet de loi tente de régler le problème. Reste à voir si il sera efficace. Nous verrons ce qui se passera lorsque le comité entendra des témoignages.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.); Monsieur le Président, je suis heureux d'aborder ce sujet pendant quelques minutes. Je voudrais revenir sur certains propos qui ont été tenus dans cette enceinte. L'objectif poursuivi par le projet de loi C-49 est honorable. En effet, derrière ce projet de loi se profile un objectif dont beaucoup souhaitent la réalisation, j'en suis sûr.

Je voudrais insister notamment sur ce que disent depuis quelque temps les autochtones de la base. Un ancien chef de la nation Siksika, en Alberta, a tenu des propos qui me sont allés droit au coeur. Il a dit qu'avant qu'ils puissent conclure ce genre d'accord, avant qu'ils puissent commencer à instaurer une quelconque formule d'autonomie gouvernementale pour régler les questions autochtones, il faut mettre en place des règles qui obligeront toutes les parties à rendre des comptes sur ce qui se passe dans ce domaine.

Ces propos lui ont été dictés par l'expérience qu'il a acquise sur sa propre réserve et sur une réserve voisine où vivent des membres de sa famille et ses petits-enfants, la réserve Stoney. On entend toutes sortes de bruits sur la réserve Stoney qui fait actuellement l'objet d'une vérification, et il en sera ainsi tant qu'on ne connaîtra pas le fin fond de l'histoire. Nous devrions recevoir un rapport sous peu.

Les paroles de Roy Littlechief ont trouvé un écho dans tout le pays. De nombreux autochtones de la base avec lesquels je me suis entretenu sont d'avis qu'il faut instaurer une quelconque forme de responsabilité avant de remettre l'autonomie gouvernementale entre les mains des dirigeants des réserves. Je trouve cela tout à fait raisonnable, après avoir visité de nombreuses réserves et y avoir constaté les conditions sordides dans lesquelles vivent tant de leurs membres.

Des gens vivent dans des réserves où il n'y a ni eau courante ni électricité. Ils n'ont pas d'installations sanitaires et ne peuvent pas compter sur toutes les commodités auxquelles nous sommes habitués dans le merveilleux pays qui est le nôtre. Il semble qu'on n'ait pas l'argent nécessaire. Lorsqu'on essaie de savoir où l'argent est passé et ce qui s'est produit, on n'obtient aucune réponse. Lorsqu'on essaie de demander une enquête sur les accusations portées par des gens de la base dans beaucoup de ces réserves, la requête est rejetée.

Sur une réserve que j'ai visitée, j'ai examiné attentivement certains documents que les gens de la base avaient réussi à obtenir. Ils portaient sur les paiements d'aide sociale sur la réserve. J'ai examiné la liste des personnes qui étaient censées toucher ces prestations. On prévoyait un versement de 320 $ pour un membre de la bande et un autre versement de 450 $, disons, pour un autre membre de la bande. Tout à coup, nous sommes tombés sur un nom auquel était rattaché un paiement de 9 500 $. Le mois suivant, ce même nom est réapparu et il était question, cette fois-ci, de 8 000 $. Cette personne touchait plusieurs milliers de dollars de plus que toutes les autres personnes dépendant de l'aide sociale. J'ai demandé aux gens qui étaient en possession de ces documents pourquoi cette personne touchait tant d'argent en assistance sociale et les autres si peu. Ils ont fouillé dans leurs dossiers et ont sorti un certificat de décès. La personne qui recevait 9 500 $ et 8 000 $ par mois était morte depuis 13 ans.

 

. 1345 + -

Il ne faut pas être un génie pour penser que c'est plutôt étrange et que c'est une situation qu'on devrait examiner. Pourtant, lorsqu'on soumet la question au ministère des Affaires indiennes et au-dessus, à la GRC, qui reconnaît que cela devrait probablement faire l'objet d'une enquête, le ministère des Affaires indiennes refuse sans cesse d'intervenir sous prétexte qu'il s'agit d'un problème interne. En d'autres termes, il faut laisser les Indiens le résoudre eux-mêmes.

C'est plus qu'un problème interne lorsque des choses de ce genre se produisent. Nous, à la Chambre, devons rendre des comptes aux contribuables du pays, que nous le voulions ou non. Lorsque nous versons des milliards de dollars au ministère des Affaires indiennes, nous devrions pouvoir expliquer aux contribuables où va tout cet argent, à quoi il sert et dans quelle mesure il est efficace.

Je n'ai pas encore trouvé un seul contribuable qui ne soit pas heureux de contribuer à un programme comme celui des Affaires indiennes pourvu qu'on s'occupe bien des gens qui en ont besoin. Puis il y a des réserves où le taux de chômage atteint 90 p. 100, et ce n'est pas l'exception, où le taux de toxicomanie est de 40 p. 100—et je ne parle pas des drogues illégales, mais bien de médicaments—, où l'alcoolisme sévit et où les écoles ne reçoivent que 16 p. 100 de ceux qui pourraient les fréquenter. Il y a quelque chose qui cloche dans tout ça.

On ne peut s'attendre à ce qu'une mesure comme ce projet de loi suscite un enthousiasme débordant, quand Roy Littlechief et d'autres gens de la base redoutent par-dessus tout qu'elle confère encore plus de pouvoirs à leurs dirigeants et que la situation de chacun empire. Il veut simplement transmettre un message au Parlement. Il faut veiller à ce que les mesures en place obligent les chefs, les conseils et tous les leaders, peu importe leur place dans la hiérarchie, à rendre compte de chaque dollar affecté à ce ministère.

C'est une chose très sage à dire. Selon un rapport publié par le ministère des Affaires indiennes: «Cette année, jusqu'au quart des 500 bandes indiennes au Canada sont tellement mal prises que, cette année, le gouvernement fédéral devra participer à leur gestion financière ou l'assumer complètement.» Voici ce que disent les gestionnaires des Affaires indiennes: «Ces dernières années, les bandes ont fait peu de progrès pour alléger leur endettement qui cause aux fonctionnaires fédéraux de graves inquiétudes, au moment même où les autochtones déploient des efforts en vue de parvenir à l'autonomie gouvernementale. Une mauvaise gestion, tant de la part des fonctionnaires fédéraux que des chefs indiens, a marqué les cinq dernières années. C'est comme une porte tournante. Pendant qu'on règle la situation d'une douzaine de bandes endettées, il y en a douze autres qui s'enfoncent dans les dettes.»

C'est la réalité. Ma femme et moi avons fait des visites dans les réserves. Nous nous sommes assis dans des cabanes de papier goudronné. Nous étions reçus par des personnes âgées assises sur des caisses de pommes, faisant ce qu'elles pouvaient pour nous recevoir convenablement, tout heureuses qu'elles étaient qu'un député ose, pour la première fois de leur histoire, pénétrer jusque-là dans leur réserve. Ces gens n'avaient jamais eu la chance de parler à un député. Ils appellent à l'aide et veulent nous faire savoir dans quel dénuement ils vivent.

 

. 1350 + -

Je veux que la ministre des Affaires indiennes me dise pourquoi on ne fait rien à ce sujet, au sujet des conditions sordides qui sont les leurs et de l'argent non comptabilisé. Qu'elle s'assure que tous les mécanismes soient en place, puis qu'elle présente le projet de loi C-49 et elle constatera probablement qu'elle aura tout l'appui désiré une fois que tout sera conçu pour donner aux gens les moyens dont ils ont besoin.

Il y a des conservateurs, des néo-démocrates et des libéraux qui pensent qu'il est honteux d'exploiter ces gens ainsi et que c'est de l'opportunisme. Je vais leur dire de quoi il retourne.

Il y a dans ces régions des êtres humains qui souffrent, qui ont faim, qui vivent dans des conditions sordides. Voilà ce que c'est. C'est un enjeu humanitaire. Tous les députés à la Chambre doivent se donner la main pour m'aider à régler ces problèmes fondamentaux. J'invite les députés à agir ainsi plutôt que de se montrer si critiques, en criant à l'opportunisme et en déballant d'autres foutaises. Qu'on commence à chercher des solutions pratiques et à régler des problèmes. C'est sérieux.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, le projet de loi à l'étude n'est pas facile à comprendre, mais je ferai de mon mieux.

Je suis d'accord avec le député de Wild Rose. J'ai l'impression qu'en adoptant ce projet de loi, nous mettrons la charrue devant les boeufs. Certains se demanderont comment il se fait que j'ai pris la parole si souvent au sujet de projets de loi concernant les autochtones. C'est que je m'intéresse à tout ce qui touche ma circonscription. De nombreux autochtones vivent dans des réserves dans ma circonscription et leur situation m'intéresse au plus haut point. J'accorde beaucoup d'importance à ce qu'ils me disent.

Les gens m'ont téléphoné, moi aussi, pour me transmettre un message clair et net auquel personne ne peut échapper. Ils veulent que nous cessions de jouer à l'autruche à la Chambre des communes et que nous nous éveillions à la réalité des choses.

Comme me le disait le chef l'autre jour, comment est-il possible de conclure une entente administrative sur la gestion des terres, sans gouvernement pour la gérer? On peut bien employer des expressions raffinées comme «créer de nouveaux partenariats», mais nous n'aurons pas de nouveaux partenariats tant qu'il n'y aura pas de responsabilité. Le gouvernement n'a aucune raison de déposer des projets de loi comme celui-ci tant qu'on n'aura pas défini les règles fondamentales de l'autonomie politique.

Pourquoi ne le fait-il pas? Pourquoi les autochtones n'ont-ils pas d'autonomie politique? Que craint le gouvernement? Il craint d'affronter la réalité. N'importe qui peut parler de partenariat, d'expansion territoriale et de toutes sortes de nouvelles entreprises, mais le Parti réformiste aimerait bien voir la réussite d'une entreprise dans une réserve et sur de nouvelles terres. Nous en serions tous très heureux, mais si les autochtones n'ont pas les moyens de lancer et de gérer une entreprise, que va-t-il se passer? Le député de Wild Rose a dit très clairement où va l'argent. Il n'y a aucune responsabilité.

Je sais que les autochtones sont préoccupés par la question de la responsabilité et que la plupart d'entre eux font preuve de transparence. Comment les ministériels peuvent-ils verser 6 milliards de dollars sans en assujettir la gestion à des règles d'obligation redditionnelle?

 

. 1355 + -

Si l'on veut lancer un projet d'aménagement de terres et une entreprise, si l'on veut attirer les gens qui désirent entrer de plain-pied dans le nouveau millénaire, on ne peut pas s'attendre à ce qu'ils le fassent tant qu'ils ne sauront pas à quoi s'en tenir au sujet du gouvernement et de l'entreprise, et tant qu'ils ne marcheront pas la tête haute, sachant qu'ils peuvent se rendre au bureau n'importe quand pour obtenir un compte rendu précis sur la façon dont l'argent a été dépensé. Tant que le gouvernement ne s'apercevra pas que, à défaut d'une reddition de comptes, il continuera de dissiper des milliards de dollars, il ne devrait pas s'attendre à un partenariat.

Je vais donner un exemple qui vient de la Chambre. Nous avons ici le Bloc, qui veut que le Québec se sépare du Canada. Une fois le Québec séparé, il négociera les conditions de la séparation. Il entend faire entièrement l'inverse de ce qu'il faut faire. Nous devrions négocier les conditions de façon à ce que les gens intelligents du Québec et du reste du Canada puissent savoir ce que signifie la séparation. La même chose vaut pour le projet de loi C-49. Nous créons la gestion des terres. Nous espérons susciter la création d'entreprises associées à la gestion des terres. Or, nous n'avons pas offert aux gens qui en ont le plus besoin un modèle de gouvernement autonome. Le gouvernement devrait avoir honte.

Il devrait avoir honte d'employer le terme partenariat. Le Canada est actuellement aux prises avec l'enjeu social le plus important qui soit. Cet enjeu est tellement crucial qu'il prend de l'ampleur chaque jour. Et que fait le gouvernement à ce propos? Rien. La ministre des Affaires indiennes dit que c'est parce que nous voulons un nouveau partenariat. Je sais que le Parti libéral veut me dénoncer comme étant anti-autochtones. Que les libéraux ne viennent pas dans ma circonscription dire cela aux autochtones qui y habitent. Les autochtones veulent l'autonomie gouvernementale et veulent que le gouvernement libéral fasse preuve de leadership pour la leur accorder.

Le Président: Le député aura la parole plus tard. Il lui reste encore quatre minutes et demie pour faire valoir son point de vue. Comme il est près de deux heures, nous passons aux déclarations de députés.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, la décision du comité judiciaire de la Chambre des Lords, en Grande-Bretagne, selon laquelle le général Pinochet doit faire face à la demande d'extradition de l'Espagne relativement à des accusations de crimes contre l'humanité commis lorsqu'il dirigeait le régime chilien n'est pas simplement une décision mettant à jour le droit international coutumier et les règles touchant l'immunité des chefs de gouvernement. Elle transmet également à la communauté mondiale un message concernant l'acceptation du principe de la clameur publique et l'universalité du pouvoir des tribunaux de poursuivre et de juger les gens pour des crimes contre l'humanité et d'autres crimes ignobles semblables.

*  *  *

L'HÉPATITE C

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, il y a un an, le rapport Krever sur le sang contaminé était présenté aux Canadiens. L'expert sur cette tragédie en matière de santé au Canada a formulé des recommandations importantes en proposant, tout d'abord, un nouveau système d'approvisionnement en sang. À cet égard, nous avons réalisé des progrès. Il a recommandé ensuite des filières hiérarchiques claires pour permettre des progrès scientifiques dans le domaine de la transfusion. Là encore, on a réalisé des progrès. Enfin, il a dit qu'on devrait indemniser toutes les personnes qui ont contracté l'hépatite C à cause du sang contaminé. À cet égard, c'est l'échec le plus total.

La décision de n'aider financièrement que les quelques victimes infectées entre 1986 et 1990 est basée sur un argument juridique et technique. On a oublié toute la question de la compassion. Durant cette année anniversaire, 1 200 victimes de l'hépatite C sont mortes, leurs espoirs après la lecture du rapport Krever réduits à néant, les rêves de leurs familles brisés. Je porte le noir aujourd'hui en mémoire de ces victimes et pour rappeler à la Chambre qu'on n'a pas versé un sou aux victimes.

Le Président: Le député de Perth—Middlesex.

*  *  *

L'INITIATIVE SOLIDAIRES DANS LA PAIX

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de signaler à la Chambre la présence à la tribune de six étudiants bosniaques qui sont ici pour une visite de dix jours au Canada. Le ministère de la Défense nationale est fier d'avoir appuyé l'initiative Solidaires dans la paix du club Rotary d'Edmonton—Riverview. Ces jeunes sont venus au Canada à bord d'un avion des Forces canadiennes et des membres des Forces canadiennes les ont accompagnés dans leurs nombreuses activités.

 

. 1400 + -

Durant leur séjour, ils ont visité la ville d'Edmonton et ont pu avoir une idée de notre passe-temps national, en assistant à un match de hockey des Oilers d'Edmonton.

Ces jeunes étudiants ont participé à des activités touchant le leadership, le multiculturalisme, l'unité et la paix, avec des Canadiens de leur âge. Ils ont également partagé leurs expériences de la guerre avec des jeunes Canadiens. En même temps, les étudiants canadiens ont pu entendre parler directement des difficultés auxquelles sont confrontés les jeunes Bosniaques.

En notre nom à tous, je voudrais souhaiter la bienvenue à ces ambassadeurs de la paix à la Chambre des communes et leur offrir nos meilleurs voeux.

*  *  *

L'OURAGAN MITCH

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier tous les Canadiens qui sont venus en aide aux populations du Honduras et des autres pays d'Amérique centrale durement touchés par l'ouragan Mitch.

L'ampleur de cet effort humanitaire est extraordinaire.

J'hésite à citer des groupes en particulier, alors je m'en tiendrai à deux que je connais bien puisqu'ils sont de Peterborough; il s'agit de Friends of Honduran Children et Candles for Cuba.

Le premier groupe aide les enfants honduriens depuis de nombreuses années. C'est par son entremise qu'est acheminée l'aide en provenance de nos YM-YWCA, de nos églises, de nos écoles et de nos entreprises telles que Générale Électrique du Canada. L'autre groupe a détourné son énergie et son aide de Cuba vers le Honduras durant la crise.

Je rends hommage au travail de tous les groupes semblables à ceux-ci et je me réjouis de ce que le gouvernement fédéral et nos forces armées soient si activement mêlés à ces opérations de secours.

Nos pensées et nos prières vont aux victimes de l'ouragan.

*  *  *

LES SANS-ABRI

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, à l'approche de l'hiver, le problème chronique des sans-abri ne devient que plus aigu.

Le groupe d'étude du maire de Toronto sur les sans-abri a publié un rapport provisoire révélant un chiffre effarant: 19 p. 100 des sans-abri, soit 5 300 d'entre eux, sont des enfants.

Ce groupe d'étude est à élaborer une stratégie visant à briser le cycle de la pauvreté chez les sans-abri. Des programmes tels Out of the Cold et des refuges tels que le manège militaire de Moss Park constituent des solutions à court terme certes, mais de nombreux indicateurs font valoir la nécessité d'un effort conjugué de tous les ordres de gouvernement si l'on veut s'attaquer aux racines mêmes du problème.

Il y a tout lieu de clarifier les responsabilités des gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux dans les dossiers touchant les revenus, le logement et la santé.

Bien que le problème soit plus criant à Toronto et dans d'autres grandes villes, il y a des sans-abri et des activistes communautaires compatissants dans ma circonscription, dans Barrie et Bradford...

Le Président: L'honorable député de Souris—Moose Mountain a la parole.

*  *  *

LES AGRICULTEURS CANADIENS

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a été avisé, lors du retour de la Chambre après les vacances d'été, du fait que les agriculteurs étaient en train de faire faillite.

Il commence enfin—il a fallu des semaines de pressions—à prendre conscience de ce que nous savions déjà. Le ministre convient maintenant que les agriculteurs ont besoin d'aide mais il ne comprend toujours pas.

Il veut que les provinces accordent aux agriculteurs une aide équivalente à celle qu'il accorde aux agriculteurs. Ça n'a aucun sens en Saskatchewan.

Ne sait-il pas que la Saskatchewan compte le plus grand nombre d'agriculteurs proportionnellement à sa population? Ne se rend-il pas compte que la Saskatchewan dépend plus que toute autre province de l'industrie agroalimentaire?

Si les agriculteurs ne gagnent pas d'argent en Saskatchewan, la Saskatchewan n'en encaisse pas non plus.

Le gouvernement n'a pas demandé à Terre-Neuve de verser de l'argent lorsque ses stocks de morue ont été épuisés. Il ne devrait pas demander à la Saskatchewan de le faire.

*  *  *

LES AGRICULTEURS CANADIENS

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a l'un des meilleurs filets de sécurité du monde. Cela inclut le Compte de stabilisation du revenu net, le CSRN, l'assurance-récolte et les programmes connexes.

Dans des conditions normales, ces mesures assurent la stabilité de revenus aux agriculteurs. Malheureusement, aujourd'hui les éleveurs de porc et les producteurs de grains ne sont pas confrontés à des conditions normales. Cette crise dépasse nettement les circonstances pour lesquelles le CSRN avait été conçu à l'origine.

La crise du revenu agricole exige des mesures extraordinaires.

Je connais des producteurs qui risquent de perdre l'exploitation familiale. Je comprends le stress et le traumatisme que ce problème cause aux familles et aux individus.

À court terme, nous devons venir en aide aux agriculteurs dont le gagne-pain est menacé. Je sais que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a travaillé dur pour essayer de résoudre ce problème. Il a mon appui et, j'espère, celui de la Chambre.

*  *  *

[Français]

M. JACQUES PARIZEAU

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, l'ancien chef du PQ, Jacques Parizeau, de passage hier dans la région de l'Outaouais, a voulu en passer une vite aux médias.

Le coquin voulait parler d'indépendance, mais à huis clos. Son attitude a soulevé l'ire des médias et le huis clos fut aussitôt levé.

 

. 1405 + -

M. Parizeau dit enfin vérité sur la stratégie des séparatistes. Jacques Parizeau et le Parti québécois se disent uniquement intéressés par l'argent du gouvernement fédéral. Jacques Parizeau perce enfin l'écran de fumée sur la stratégie des séparatistes.

Donnons le crédit à Parizeau qui dit enfin la vérité sur la stratégie du PQ.

Un vote pour le PQ, c'est un vote pour le référendum, c'est un vote pour la séparation.

*  *  *

[Traduction]

L'AN 2000

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, le temps fuit. Il reste seulement 400 jours avant l'an 2000. Notre gouvernement sera-t-il prêt?

Le gouvernement fédéral répète haut et fort qu'il fait tout ce qu'il peut pour se préparer, mais ne fait-il pas trop peu et trop tard pour neutraliser le bogue du millénaire?

Les Canadiens commencent à peine à comprendre les graves répercussions que pourraient avoir le bogue informatique de l'an 2000, mais, selon une étude récente d'Industrie Canada, un grand nombre d'entre eux croient toujours que le gouvernement sera prêt à temps. Or, nous savons qu'il ne le sera pas.

D'après les hauts fonctionnaires qui ont témoigné devant le Comité de l'industrie, les parlementaires peuvent jouer un rôle de premier plan pour sensibiliser la population au problème. Mais comment pourrions-nous le faire, quand le gouvernement ne donne même pas une description exacte de son état de préparation?

Ses ministres ne font pas preuve de beaucoup de leadership. Ils ont beaucoup trop tendance à se défiler. Ils ne fournissent aucune directive, aucune orientation. Comment le gouvernement peut-il dire qu'il fait tout ce qu'il peut pour se préparer à l'an 2000?

*  *  *

[Français]

LES ANCIENS COMBATTANTS DE LA MARINE MARCHANDE

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, en 1992, les anciens combattants de la marine marchande se sont vu accorder le même statut que les anciens combattants des Forces armées, ce qui leur donnait accès aux mêmes pensions et indemnités. Mais ces progrès substantiels n'avaient aucune portée rétroactive, ce qui constitue une situation discriminatoire pour les anciens combattants de la marine marchande.

En outre, ce statut d'ancien combattant fut accordé aux marins de la marine marchande et refusé aux marins marchands civils qui ont servi pendant la Deuxième Guerre mondiale, mais dans des secteurs qui n'étaient pas considérés comme des zones de combat. Les sous-marins ennemis ayant frappé dans toutes les eaux du globe, ceux-ci estiment qu'ils ont encouru les mêmes risques que tous les marins canadiens.

Le Bloc québécois trouve injuste le traitement réservé aux anciens membres de la marine marchande qui ont accompli une tâche vitale et d'autant plus méritoire qu'elle était périlleuse.

Nous réclamons donc qu'ils se voient enfin accorder le même statut et les mêmes bénéfices que leurs camarades qui ont combattu dans les Forces armées, et ce, rétroactivement.

*  *  *

LA CAMPAGNE ÉLECTORALE AU QUÉBEC

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes au dernier droit de la campagne électorale au Québec.

Nous avons eu droit au plus grand nombre d'entourloupettes, de malhonnêteté intellectuelle, d'astuces et de manipulations de la part du PQ. Imaginez-vous que Lucien Bouchard se prenait pour Robert Bourassa hier au Point.

On tente de nous faire avaler des couleuvres. On parle de conditions gagnantes. Du magouillage. On tente de nous faire croire que Lucien Bouchard va se battre pour l'union sociale et le renouvellement du fédéralisme. La prochaine fois, il va même nous convier à un voyage organisé dans les Rocheuses.

Je ne veux pas du nouveau fédéralisme à la Lucien Bouchard. Je voterai pour le vrai fédéralisme. Je ne veux rien savoir de la séparation. Je ne veux rien savoir des astuces. Je ne veux rien savoir d'un référendum. Point. Je voterai pour un Québec plus fort dans le Canada.

Le 30 novembre prochain, mettons fin aux entourloupettes de Bouchard. Votons pour un avenir meilleur pour tous. Votons vrai. Votons libéral.

*  *  *

[Traduction]

L'APPROVISIONNEMENT EN SANG DU CANADA

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui le premier anniversaire du rapport Krever. Le juge Krever avait recommandé l'indemnisation sans égard à la faute pour toutes les victimes du sang contaminé.

Il avait recommandé de veiller à ce que les produits sanguins utilisés au Canada proviennent de donneurs non payés, et non de donneurs américains constituant un risque élevé. Il avait aussi recommandé que la Direction générale de la protection de la santé adopte des règlements efficaces à cet égard.

Comme ces recommandations ont été peu suivies, voire pas du tout, nous allons continuer de poser des questions sur la sécurité des produits sanguins et l'indemnisation équitable des victimes de l'hépatite C, et nous allons insister pour qu'on donne suite au rapport Krever.

Cependant, nous ne pouvons oublier ceux dont la vie et la santé dépendent de nos dons de sang. Nous voulons que tous les Canadiens puissent compter sur un système d'approvisionnement sanguin sûr et efficace.

Lundi, le caucus du NPD parraine une collecte de sang à la pièce 200 de l'édifice de l'Ouest. Pour prendre rendez-vous, il suffit de composer le 236-0199. Mon chef et moi allons donner du sang ensemble à 11 heures et nous invitons les députés de tous les partis ainsi que les employés de la Chambre des communes et du Sénat à faire ce don de vie.

*  *  *

[Français]

LA CAMPAGNE ÉLECTORALE AU QUÉBEC

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, lundi prochain, le 30 novembre, les Québécois et les Québécoises prendront une décision capitale pour l'avenir de notre pays, le Canada.

Un vote pour le PQ signifie rien de moins que l'enclenchement du processus de la séparation du Québec du reste du Canada.

 

. 1410 + -

Un vote pour l'ADQ est tout simplement un vote perdu. Un vote pour le Parti libéral est un vote en faveur de la santé, de l'éducation et de la croissance économique.

Le 30 novembre prochain, ne prenons pas de chances, car nous préférons, de loin, un gouvernement libéral qui assurera une croissance économique en redonnant, entre autres, confiance aux investisseurs étrangers qui contribuent à la croissance économique du Québec.

Le 30 novembre prochain, je voterai libéral, car je crois en mon pays. Je crois dans un Québec fort pour nos enfants et nos petits-enfants. Donnons leur en héritage ce pays avec la meilleure qualité de vie au monde, le Canada. Votons libéral!

*  *  *

LA CRÉATION D'EMPLOIS À MONTRÉAL

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, une fois de plus, les prophètes de malheur de partout au pays doivent rougir de honte. L'emploi au Québec est en pleine progression.

Le 6 novembre dernier, Statistique Canada confirmait que le taux de chômage au Québec passait sous la barre des 10 p. 100 pour la première fois depuis le début des années 1990.

Ce matin, les médias nous apprennent que Montréal compte parmi les dix grandes métropoles nord-américaines pour la meilleure création d'emplois. En fait, Montréal connaît cette année le meilleur taux de création d'emplois depuis 1987.

On en a assez de l'arrogance libérale. Le Québec se rétablit des ravages causés par neuf ans de gouvernement libéral et ce, grâce au savoir-faire de l'équipe de Lucien Bouchard.

Moi, j'ai confiance. Lundi, je voterai pour un bon gouvernement.

*  *  *

LE RAPPORT DE LA COMMISSION KREVER

Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Monsieur le Président, il y a un an aujourd'hui, le gouvernement rendait public le rapport de la Commission Krever.

Une des recommandations du rapport stipulait que le gouvernement devait indemniser toutes les victimes de l'hépatite C.

Or, au lieu d'adopter une approche fondée sur la compassion et le respect de toutes les victimes qui ont eu à subir d'incalculables coûts émotifs et financiers, le gouvernement libéral s'entête à exclure du programme d'indemnisation les personnes ayant été infectées avant 1986.

Pendant ce temps, des victimes meurent les unes après les autres, comme Stan Marshall, ce jeune homme qui faisait l'objet d'un article du Toronto Star, ce matin. Il est décédé le mois dernier, après s'être battu pendant des années avec une rage inassouvie et une frustration alimenté par l'irresponsabilité de ce gouvernement qui oublie de placer son obligation morale au-dessus de toute autre considération.

Qu'attend le gouvernement pour agir? Attend-il que les victimes disparaissent les unes après les autres?

*  *  *

[Traduction]

LA SEMAINE NATIONALE DE SENSIBILISATION AU SIDA

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine est la Semaine nationale de sensibilisation au sida et je voudrais en profiter pour parler de cette question très importante à la Chambre.

Comme le savent la plupart des Canadiens, le sida est une maladie mortelle. À la fin de 1997, Santé Canada avait recensé 15 528 cas de sida rapportés depuis le début de l'épidémie. Beaucoup de ces sidéens sont morts.

Il importe, je crois, surtout au cours de la présente semaine, de signaler les risques et les dangers de cette horrible maladie. Ce n'est que par la conscientisation et l'éducation de la population que nous résoudrons ce problème. Ces dernières années, le nombre des cas rapportés a fléchi, mais il reste encore beaucoup à faire.

J'exhorte tous les Canadiens à s'informer sur le sida et à aider à lutter contre cette maladie. Il faut supprimer cette terrible maladie et nous y arriverons.

*  *  *

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, pendant que l'affaire de l'APEC commence à se dénouer pour le premier ministre et son ancien solliciteur général disgracié, nous apprenons aujourd'hui qu'est prolongée la suspension de Terry Milewski, le journaliste diffamé qui a mis à jour ce fiasco de l'APEC.

C'est déjà assez que le cabinet du premier ministre lance ses petits chiens contre Terry Milewski afin de discréditer et museler son enquête sans que le président de la SRC soit au nombre de ceux-ci.

Les collaborateurs du premier ministre ont sans doute exercé des pressions sur les administrateurs de la SRC et sur son président, Perrin Beatty, pour écarter Milewski. À la manière de quelqu'un qui est prêt à tout pour que son contrat soit renouvelé, Perrin Beatty a suspendu Milewski pour 15 autres jours. Et cela, au lendemain de la démission du solliciteur général. Il est temps, je crois, que Perrin Beatty démissionne comme président de la SRC.

*  *  *

 

. 1415 + -

LA ST. ANDREW'S SOCIETY

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui rendre hommage à la contribution du peuple écossais au développement et à la vie au Canada.

En 1542, un Écossais appelé David Ross a dressé la première carte de l'embouchure du Saint-Laurent. D'autres Écossais ont suivi les traces de M. Ross et ont produit des cartes de tout le nouveau monde.

Dans ma circonscription, Saint John, la St. Andrew's Society, fondée en 1798, célèbre 200 ans d'histoire ininterrompue de services à la ville de Saint John, à la province du Nouveau-Brunswick et à tout le Canada.

N'ayant jamais compté beaucoup plus de 150 membres à la fois au cours de ses 200 ans d'histoire, la société a tout de même produit seize maires, quatre lieutenants-gouverneurs du Nouveau-Brunswick, un lieutenant-gouverneur de la Colombie-Britannique, un premier ministre du Nouveau-Brunswick, un juge en chef de la Cour suprême du Canada, trois sénateurs de même que des leaders nationaux et internationaux dans les domaines des affaires, du droit, des finances et de l'éducation.

C'est là un bilan dont la société peut être fière. Je veux féliciter publiquement la plus vieille société écossaise du Canada pour 200 belles années d'histoire et d'apport à la société canadienne.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'AGRICULTURE

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, depuis maintenant un an, le premier ministre sait qu'une crise agricole se prépare dans notre pays. Les prix tombent et les agriculteurs étrangers continuent à recevoir des milliards de dollars de subventions déloyales.

Les seules nouvelles lois à caractère agricole que le gouvernement ait présentées visent à imposer des taxes sur les carburants et les fertilisants utilisés par les agriculteurs et à interdire aux agriculteurs de vendre eux-mêmes leur blé.

Pourquoi le premier ministre ne prend-il pas la défense des agriculteurs plutôt que de trouver régulièrement de nouveaux moyens de les pénaliser?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je mets la députée au défi d'être un peu plus précise au sujet des taxes sur les fertilisants et les carburants. Ces taxes ont toujours existé et nous le savons. Nous savons bien aussi que nous aimerions tous que les taxes soient moins élevées.

Nous avons reconnu et nous reconnaissons toujours la gravité de la situation actuelle. Nos fonctionnaires et moi travaillons de concert avec le Cabinet, les gouvernements provinciaux et l'industrie pour faire tout ce que nous pouvons aussi vite que nous le pouvons.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, on sait combien les gens sont d'accord avec cela, mais le ministre doit faire plus que parler.

Les États-Unis viennent d'injecter 6 milliards de dollars supplémentaires dans une nouvelle subvention déloyale destinée à leurs entreprises agricoles. Cette somme s'ajoute aux milliards de dollars qu'elles reçoivent déjà. Les subventions représentent jusqu'à 30 p. 100 du revenu des agriculteurs. L'Europe verse des subventions déloyales de l'ordre de 60 milliards de dollars à ses agriculteurs. Dans ces conditions, nos agriculteurs ne peuvent pas soutenir la concurrence.

Pourquoi le premier ministre ne commence-t-il pas à remédier au problème en s'attaquant aux géants américains et européens qui accordent d'énormes subventions à leurs agriculteurs?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je trouve ces commentaires très étranges de la part du parti qui ne veut pas soutenir l'agriculture.

Au cours du débat tenu à la Chambre il y a quelques semaines, non seulement les députés de ce côté-ci de la Chambre mais aussi les autres députés de l'opposition les ont invités à suggérer des mesures, mais ils n'avaient pas de suggestions à faire.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, c'était l'objet de la motion sur l'agriculture dont nous débattions à la Chambre il y a peu de temps. Le ministre a peut-être un petit trou de mémoire.

C'est plus facile d'arrêter un agriculteur du Manitoba que de tenir tête au gros ministère de l'Agriculture des États-Unis. C'est plus facile pour le gouvernement de hausser les frais d'utilisation et les taxes sur les fertilisants en Saskatchewan que de parler aux Américains et aux Européens pour leur demander de réduire leurs subventions.

Voici le problème: les subventions étrangères sont trop élevées et les taxes canadiennes sont trop élevées. Pourquoi le gouvernement n'admet-il pas que le vrai problème, c'est que ses percepteurs d'impôt à la main lourde et les ministres poids plume à l'étranger ne veulent pas aborder la question?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je trouve que c'est absolument stupéfiant. Dans son budget des contribuables, le parti de la députée prévoyait des coupes de l'ordre de 640 millions de dollars dans le financement de ministères comme l'Agriculture, l'Industrie, les Pêches et les Ressources naturelles. Une coupe supplémentaire de 690 millions de dollars était prévue pour les mêmes ministères, dans les régions.

 

. 1420 + -

Il y a là une petite contradiction avec l'argument de la députée.

*  *  *

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Ces dernières semaines, le premier ministre a dit à la Chambre, en ce qui concerne la Commission des plaintes du public: «Je veux que les Canadiens aient toute la réponse aussitôt que possible.»

Aujourd'hui, un juge de la Cour fédérale vient de décider que le président du comité ne peut continuer d'exercer ses fonctions tant qu'un autre juge n'aura pas déterminé s'il a un parti pris ou non. Cela pourrait prendre six mois, voire un an. On ne peut rien faire. L'enquête sur les incidents de l'APEC est suspendue jusqu'à ce que cette cause soit entendue.

Le premier ministre suppléant s'engagera-t-il maintenant envers les Canadiens à ce qu'une enquête judiciaire soit tenue afin qu'on s'attaque très rapidement à cette question et qu'on la règle?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à ma connaissance, la Cour fédérale a dit que le comité ne devrait pas poursuivre ses audiences jusqu'à ce qu'elle ait rendu une décision sur les allégations de parti pris. Je pense que cette façon de procéder est compréhensible. Cela ne veut pas dire que le comité ne poursuivra pas ses travaux. Nous ne savons pas quels seront les résultats. Attendons de voir ce que dira la cour.

En outre, le gouvernement n'a pas le pouvoir, en vertu de la loi, d'ordonner à la Commission des plaintes du public de cesser d'exercer le mandat qui lui a été confié par le Parlement. Je ne comprends pas pourquoi le député tient tant à bloquer, à la Chambre, le travail de la commission.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a tout le pouvoir voulu pour amorcer dès demain une enquête judiciaire qui ira au fond des choses.

À la Chambre, le premier ministre et le premier ministre suppléant disent qu'il faut laisser la commission faire son travail. Ils ne peuvent gagner sur les deux tableaux. Ivan Whitehall, l'avocat du premier ministre, n'a fait aucune déclaration devant le juge au sujet du retard et des problèmes que cela causera.

Nous savons que les retards ne sont pas de nature à améliorer la situation. Même le premier ministre a dit qu'il fallait régler la question afin de pouvoir passer aux questions liées à la santé et à la fiscalité. Que l'on tienne une enquête judiciaire dès maintenant afin de régler cette question une fois pour toutes.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous ne savons pas encore combien de temps durera le délai jusqu'à la décision de la Cour fédérale. Au lieu de s'emporter comme le député, attendons de voir ce que dira la Cour fédérale. Il sera plus facile alors de veiller à ce que la Commission des plaintes du public, qui a été établie par le Parlement, poursuive ses travaux.

Je le répète, le gouvernement fédéral n'a pas le pouvoir, en vertu de la loi, d'ordonner à la Commission des plaintes du public de cesser ses travaux.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans l'avis de convocation de la commission chargée de faire enquête sur les événements de l'APEC, la présidente de la Commission des plaintes du public contre la GRC circonscrit le mandat des commissaires strictement à la conduite des membres de la GRC sur le campus de l'université entre le 23 et le 27 novembre 1997.

Compte tenu de ce mandat restreint, d'autant plus que l'on sait depuis aujourd'hui que les travaux sont suspendus indéfiniment, comment le premier ministre peut-il affirmer que les commissaires seront à l'aise pour enquêter sur sa propre conduite?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que nous devons attendre la décision de la Cour fédérale.

Je pense que l'honorable député a posé une question qui n'est pas «relevant» en ce moment.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce qui n'est pas «relevant», c'est qu'aujourd'hui, on nous avait informés que le solliciteur général devait être ici, mais on le cache. On ne veut pas le faire parler, il est encore absent de la Chambre. C'est ça qui n'est pas «relevant», comme il dit.

Le Président: Comme nous le savons tous, il n'est pas permis de dire si un député est ici ou non. J'aimerais que cela ne se répète pas durant la période des questions orales.

M. Gilles Duceppe: Monsieur le Président, tout le monde sait que le commissaire de la GRC est nommé par le gouvernement et relève du solliciteur général, lui-même nommé par le gouvernement.

Comment le vice-premier ministre peut-il penser que l'un ou l'autre pourrait blâmer le premier ministre? Cela n'a aucun bon sens, il n'y a personne qui croit à cela.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'honorable député a dit quelque chose qui n'est pas correct.

Les commissaires de la Commission ne relèvent pas du solliciteur général. Ce dernier ne joue aucun rôle, sauf de recevoir le rapport. La Commission est indépendante, selon la loi adoptée par ce Parlement.

 

. 1425 + -

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, pour se blanchir des accusations d'avoir suspendu les libertés civiles des manifestants au Sommet de l'APEC de Vancouver, le premier ministre compte sur la Commission des plaintes du public contre la GRC, dont le mandat, selon lui, devrait permettre de faire toute la lumière.

Comment peut-on croire dans la capacité d'enquête de la Commission, quand un de ses enquêteurs, François Lavigne, confirme que celle-ci n'est pas indépendante et qu'on lui a demandé souvent de changer ses rapports quand cela nuisait à la GRC?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la Commission a dix ans de travail. Elle a un très bon record, selon les preuves nécessaires, et je pense que nous devons laisser la Commission faire son travail, évidemment, sous l'égide de la Cour fédérale.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Justement, monsieur le Président, l'ancien solliciteur général devrait savoir qu'en dix ans de travail, cette Commission n'a jamais eu à enquêter sur la conduite du premier ministre, et c'est ce qu'elle va faire présentement.

Comment cette commission d'enquête sur la déontologie policière pourrait-elle se sentir à l'aise pour enquêter le comportement du premier ministre, quand ce dernier va jusqu'à empêcher publiquement son solliciteur général de prendre la parole devant les journalistes, en le prenant par le bras? Quel message le premier ministre envoie-t-il aux membres de cette commission d'enquête sur la déontologie?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en convoquant des audiences publiques sur l'APEC, en février dernier, la Commission a stipulé que ses membres doivent, et je cite, «examiner tous les éléments touchant ces plaintes, entendre toutes les preuves relatives, assurer une audience équitable et impartiale dans le respect de ces plaintes et rapporter les recommandations, tel qu'autorisé.»

C'est évident que la Commission entend faire le travail nécessaire.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, comme une machine, le premier ministre répète qu'il faut laisser la commission faire son travail. Il prétend vouloir que les Canadiens apprennent la vérité au plus tôt.

Voici que la commission a suspendu ses travaux pour six mois. Si le premier ministre veut tant que les Canadiens apprennent la vérité, pourquoi ne met-il pas fin à cette farce de cinéma et ne commande-t-il pas dès maintenant une enquête publique entièrement indépendante?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il n'a pas été établi que la commission ne reprendra pas ses audiences avant six mois. C'est là pure supposition de la part des médias. La Cour fédérale n'a pas dit quand elle terminera ses délibérations sur les allégations de partialité.

La prémisse à la question de ma collègue est complètement fausse, comme d'habitude.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, elle ne fonctionne tout simplement pas. Le premier ministre a suspendu la commission parce qu'il sait qu'elle ne fonctionnera pas. Il sait qu'elle est touchée à mort. Il sait que la commission n'arrivera jamais à établir la vérité.

Pourquoi le premier ministre n'admet-il tout simplement pas qu'il ne veut pas commander une enquête publique entièrement indépendante parce qu'il ne veut pas que les Canadiens apprennent la vérité?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation de la députée est complètement fausse. Le premier ministre a maintes fois dit et répété à la Chambre qu'il veut que les faits soient établis et qu'il compte sur la commission pour faire que cela arrive.

La commission est indépendante conformément à la loi mise en place par le Parlement. Je l'ai déjà dit et je le répète, je suis content que la députée fasse confiance au premier ministre. En effet, elle l'attaque, mais elle veut qu'il établisse une commission. Je la remercie à nouveau pour ce vote de confiance. Pour une fois, elle a raison. De tout ce qu'elle a dit jusqu'à maintenant en connaissance de cause, c'est que le premier ministre est une personne intègre et...

Le Président: Le député de Burin—St. George's.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Bill Matthews (Burin—St. George's, PC): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture sait depuis près d'un an déjà que les agriculteurs traversent l'une des pires crises financières de l'histoire.

Le temps prend une importance cruciale, pourtant, le ministre a opté pour l'attentisme. Il doit pourtant bien voir que les agriculteurs en sont réduits à détruire leur cheptel.

Combien d'agriculteurs devront encore être acculés à la faillite avant que le ministre et le gouvernement fassent preuve de compassion et annoncent un programme d'indemnisation complet?

 

. 1430 + -

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je ne me réjouis certainement pas du triste sort que trop de producteurs connaissent en ce moment ni des situations malheureuses qui poussent certains producteurs à devoir choisir entre abattre leurs bêtes ou les laisser souffrir.

Je suis donc en discussions avec mes collègues du Cabinet et les provinces. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour agir le plus rapidement possible. Nous agirons avec toute la rigueur et la célérité que la situation exige.

M. Bill Matthews (Burin—St. George's, PC): Monsieur le Président, que le ministre sache qu'il est pratiquement trop tard pour parler d'agir avec célérité.

On ne peut que déplorer le fait que le manque de ministres possédant une expérience pratique de l'agriculture a des conséquences si désastreuses sur les agriculteurs de tout le Canada. Les agriculteurs sont acculés à la faillite pendant que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et celui des Finances se querellent au sujet des priorités en matière de finances.

Le gouvernement prouvera-t-il qu'il veut sincèrement aider le secteur agricole canadien à traverser la crise? Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a-t-il assez de poids au sein du Cabinet pour annoncer l'adoption d'un programme d'aide d'urgence à l'intention des agriculteurs canadiens?

Le Président: Mes collègues. Encore une fois, nous avons peine à entendre les questions et les réponses.

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut lancer des attaques personnelles, je peux lui parler de toutes mes années d'expérience dans le domaine de l'agriculture.

Je pourrais aussi le relancer au sujet du renouveau d'intérêt du Parti conservateur pour l'agriculture. Avant les dernières élections, les conservateurs avaient déclaré qu'ils généraliseraient la pratique du recouvrement des coûts dans l'inspection et la réglementation des aliments et qu'ils accéléreraient l'élimination des subventions afin de retirer plus de 6 millions de dollars...

Le Président: Le député de Medicine Hat.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, lorsque le ministre a quitté l'agriculture, il a aussi abandonné les agriculteurs.

Les revenus agricoles ont diminué de 46 p. 100 au cours de la dernière année. Par contre, les frais aux usagers ont augmenté de 28 p. 100 pendant les trois dernières années à cause du ministre des Finances et de son collègue de l'Agriculture. À l'étranger, les subventions augmentent. Chez nous, ce sont les impôts qui sont à la hausse.

Quand le ministre de l'Agriculture va-t-il faire preuve de fermeté avec les Européens et le ministre des Finances, et quand fera-t-il en sorte que les subventions européennes diminuent et que les impôts de nos agriculteurs soient réduits?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je connais fort bien les difficultés des producteurs, et nous prenons le problème au sérieux. Nous nous efforçons de mettre en place un programme pour aider le plus rapidement possible ceux qui sont le plus durement touchés.

Le week-end, quand je rentre dans ma circonscription, qui est agricole, je discute avec les agriculteurs. Je ne pense pas que le député discute avec beaucoup d'agriculteurs pendant le week-end.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le ministre voit venir le problème depuis un an. Pourquoi attendre jusqu'à maintenant pour mettre le Cabinet au courant? Pourquoi a-t-il fallu tant de temps pour s'apercevoir de ce qui se passe?

Pourquoi le ministre a-t-il discuté avec les agriculteurs seulement le week-end dernier plutôt que pendant toute l'année? Pourquoi ne propose-t-il pas des solutions à long terme aux agriculteurs? Ce qu'il propose est tout simplement inadmissible. Il nous faut des solutions durables.

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, que c'est rafraîchissant. Le Parti réformiste a dit pendant des années que les agriculteurs ne devraient recevoir ni subventions ni aucune autre forme d'aide, et voici que, tout à coup, il s'inquiète de leur sort.

*  *  *

 

. 1435 + -

[Français]

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, les propos de l'enquêteur Lavigne, affirmant que la Commission des plaintes du public contre la GRC n'a ni l'indépendance ni les moyens pour bien faire son travail, ont été confirmés par M. Pierre-Yves Delage qui, jusqu'en mars dernier, était l'avocat principal de cette commission.

À la lumière de ces faits, quelle force peut bien avoir la Commission, qui n'est qu'un tribunal administratif, pour venir sanctionner le premier ministre et le personnel de son cabinet?

Des voix: Oh, oh!

L'hon. Herb Gray: Monsieur le Président, avec votre permission, je demanderais à l'honorable député de poser sa question de nouveau.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je demanderais au député de bien vouloir poser sa question.

M. Michel Bellehumeur: À la lumière des faits dans toute l'affaire de l'APEC, quelle force peut bien avoir la Commission, qui n'est qu'un tribunal administratif, pour venir sanctionner le premier ministre et le personnel du cabinet du premier ministre?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la Commission a mentionné, le 5 octobre, et je cite: «Il faut absolument entendre, non seulement la preuve de ce qui s'est passé, mais aussi les raisons. Aussi, nous allons aller où la preuve de nos témoins nous mènera.»

Il est évident que la Commission peut faire son travail et désire faire son travail. Nous demandons à l'honorable député de laisser la Commission faire son travail.

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le vice-premier ministre ne comprend-il pas que la seule façon de calmer toutes nos inquiétudes concernant le comportement du premier ministre dans l'affaire de l'APEC, c'est de nommer une commission indépendante, qui relèverait directement du Parlement, et qui aurait le mandat spécifique d'enquêter sur le comportement du premier ministre ainsi que sur le comportement de tout le personnel du cabinet du premier ministre, et de faire la lumière une fois pour toutes dans toute cette histoire?

J'espère qu'il a compris et qu'il va me répondre.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la Loi sur les enquêtes ne donne pas au Parlement, mais plutôt au premier ministre, le pouvoir de nommer une commission.

Si l'honorable député désire que le premier ministre nomme une commission, encore une fois, je tiens à le remercier pour le vote de confiance envers le premier ministre.

*  *  *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.

Beaucoup de Canadiens se demandent comment nous en sommes arrivés à une telle crise dans le secteur agricole, crise qui est alimentée par la lourdeur de la fiscalité canadienne et l'octroi par les pays étrangers de subventions énormes à leurs agriculteurs.

Cette année, les gouvernements européens donneront plus de 60 milliards de dollars à leurs agriculteurs. Pour ne pas être de reste, les États-Unis accorderont un montant égal à leurs agriculteurs. Cela ressemble fort à une guerre commerciale.

Le ministre du Commerce international va-t-il téléphoner à son homologue américain et lui demander de se joindre à lui pour exiger des Européens qu'ils réduisent leurs subventions afin de protéger les agriculteurs canadiens?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, c'est fait depuis longtemps.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, les agriculteurs canadiens peuvent soutenir la concurrence de n'importe quels autres agriculteurs au monde pour ce qui est de la production, mais pas quand ces derniers reçoivent des subventions énormes de leur gouvernement.

Si le ministre a appelé son homologue américain, peut-il nous dire aujourd'hui si cette conversation téléphonique a eu des résultats positifs?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous faisons tous les deux pareillement confiance aux agriculteurs de ce pays. J'ai abordé la question à maintes reprises, non seulement avec mon homologue, Charlene Barshefsky, mais également avec Leon Brittan.

En outre, le premier ministre est revenu à la charge plusieurs fois et en a entretenu le président des États-Unis et...

Des voix: Oh, oh!

 

. 1440 + -

Le Président: Le ministre du Commerce international, s'il désire poursuivre.

L'hon. Sergio Marchi: Comme je le disais, monsieur le Président, le premier ministre a aussi soulevé la question au dernier sommet canado-européen. Elle sera à nouveau à l'ordre du jour, dans quinze jours, quand les dirigeants européens visiteront notre capitale.

Nous avons fait appel aux deux parties, leur expliquant que les denrées de base étaient déjà assez malmenées comme cela sans en plus avoir à subir le contrecoup d'une guerre des subventions entre l'Amérique du Nord et l'Union européenne. Nous espérons qu'elles tiendront compte de notre avertissement.

*  *  *

[Français]

L'UNION SOCIALE

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, les premiers ministres de la Saskatchewan, de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et du Québec ont réclamé, hier encore, que le dossier de l'union sociale soit réglé avant le prochain budget fédéral.

Cependant, le ministre des Affaires intergouvernementales répond qu'il n'y a pas d'urgence et que ce serait plus facile de négocier avec un gouvernement fédéraliste à Québec.

Le ministre comprend-il que lorsqu'il dit cela, le message qu'il livre, c'est qu'avec un gouvernement plus docile, avec Jean Charest à Québec, les exigences seraient moins grandes, donc plus faciles à satisfaire aux conditions du gouvernement fédéral?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, c'est une allégation fausse. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas d'urgence; j'ai dit qu'on négociait et que les négociations allaient bon train.

Les Québécois ne veulent pas se séparer. Il serait souhaitable qu'ils n'élisent pas un gouvernement séparatiste. Les Québécois sont confiants. Il serait souhaitable qu'ils n'élisent pas le parti de la méfiance.

L'union sociale canadienne, c'est l'entraide de tous les Canadiens, quelque chose qui semble dépasser le député.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre peut-il expliquer, alors que les dix premiers ministres des provinces sont d'accord sur l'union sociale, que c'est lui qui traîne de la patte, que c'est lui qui n'est pas pressé, et que c'est lui qui a l'air de vouloir faire échouer les discussions?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, hier, l'ancien chef péquiste, Jacques Parizeau, a dit que l'union sociale, c'était, pour le Québec, d'aller chercher son butin.

Lors de la crise du verglas, les autres Canadiens ne nous ont pas envoyé notre butin, ils ont envoyé leur coeur et leur générosité. Au Manitoba, on ne leur a pas envoyé notre butin, on leur a envoyé notre coeur et notre générosité.

L'union sociale canadienne, c'est au sujet du coeur et de la générosité de tous les Canadiens, un pays que les Québécois ont fait avec les autres Canadiens et qu'ils ne confieront pas à des gens qui veulent le détruire.

*  *  *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, lorsque les gouvernements étrangers ont fait de la surpêche dans les eaux canadiennes, Brian Tobin leur a tenu tête, mais lorsque les gouvernements étrangers s'attaquent à nos agriculteurs canadiens avec des subventions de dizaines de milliards de dollars, le gouvernement libéral ne fait rien pour mettre un terme à ces attaques.

Pourquoi les agriculteurs des Prairies ne méritent-ils pas le même genre de respect auquel les pêcheurs ont eu droit lorsque leur gagne-pain était menacé?

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture a dit de façon très éloquente cet après-midi que le secteur agricole était un élément essentiel de notre pays.

Il a dit que le secteur agricole aurait l'appui du gouvernement et que, en plus de nos démarches auprès des États-Unis et de l'Union européenne, nous essayions de trouver un terrain d'entente avec d'autres pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et des pays d'Amérique latine. La communauté internationale sera alors capable de régler cette question de façon impartiale.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, les choses vont tellement mal sur les fermes familiales que les producteurs de porc n'ont même plus les moyens de nourrir leurs bêtes. Les Canadiens qui ont regardé les nouvelles hier soir n'en croyaient pas leurs yeux. Des éleveurs sont forcés d'abattre leurs porcs parce qu'ils n'ont pas assez d'argent pour les nourrir.

Comment le gouvernement libéral a-t-il pu laisser la situation se détériorer à ce point?

 

. 1445 + -

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député sait très bien que, malheureusement, cette baisse des prix est survenue très rapidement. Dès que les prix ont commencé à baisser, j'ai rencontré mes homologues provinciaux. Nous travaillons avec l'industrie et le comité consultatif sur le soutien du revenu, et je parle à mes collègues du Cabinet afin que nous puissions travailler ensemble avec les provinces et l'industrie, comme nous l'avons fait dans le passé, pour mettre en place un programme de soutien additionnel qui aidera les agriculteurs dans ce genre de crise.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, la situation actuelle dans le secteur agricole est très difficile.

On assiste à une chute des prix des céréales et de la viande, notamment du porc. Or, on sait que le ministre de l'Agriculture se prépare à annoncer un programme d'aide aux agriculteurs.

Peut-on avoir l'assurance du ministre qu'il va adapter son programme d'aide pour tenir compte des programmes déjà en place au Québec, afin que les agriculteurs et les éleveurs québécois puissent, eux aussi, avoir de l'aide et obtenir leur juste part?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement agira comme il l'a fait par le passé et continuera d'agir ainsi à l'avenir. Si un programme est mis en place, il sera équitable pour tous les agriculteurs du Canada. Il sera mis à leur disposition s'ils en ont besoin, peu importe la province où ils habitent.

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, je suis enchanté de constater que tous les partis de la Chambre reconnaissent que le secteur agricole est en crise, que des sécheresses ont frappé le Canada atlantique et le Québec, que les prix des céréales sont bas, que l'industrie du porc est aux prises avec un énorme problème et qu'une collaboration s'impose entre les provinces et le gouvernement fédéral. Le ministre de l'Agriculture peut-il dire à la Chambre comment il entend collaborer avec les gouvernements provinciaux pour résorber cette crise dans le secteur agricole?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député de Miramichi et ceux de ce côté-ci de la Chambre ont fait un apport très utile en saisissant mes collègues du Cabinet de leur point de vue sur cette situation déplorable. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir, le plus rapidement possible, pour venir à bout de la situation désastreuse que connaissent un trop grand nombre d'exploitations agricoles.

*  *  *

LA SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui l'anniversaire du rapport Krever sur le sang contaminé. Le juge Krever avait recommandé l'indemnisation de toutes les victimes. Un an s'est écoulé et pas une seule victime n'a été indemnisée par le gouvernement. Toutefois, 1 200 d'entre elles sont décédées au cours de cette année. Se pourrait-il qu'un de nos vis-à-vis se lève pour dire que l'abandon des victimes ne lui cause pas le moindre remords? Allons, debout!

Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il y a un an, le gouvernement du Canada a reçu du juge Krever 17 recommandations qui visaient directement le gouvernement fédéral. Je tiens à dire à tous les députés que nous avons donné suite à toutes ces recommandations. Nous avons immédiatement établi le Conseil national de la sûreté du sang. Il existe aujourd'hui deux nouveaux organismes, Héma-Québec et la Société canadienne du sang. Nous avons injecté 125 millions de dollars pour resserrer les règlements de Santé Canada sur le sang...

Le Président: Le député de Macleod.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, comme la secrétaire parlementaire répond pour la première fois à une question à la Chambre, je suppose qu'il faut lui pardonner ces sornettes...

Le Président: J'invite le député à choisir ses mots avec circonspection et à passer directement à sa question.

M. Grant Hill: Monsieur le Président, la première recommandation était d'indemniser toutes les victimes. Si la secrétaire parlementaire peut se lever et dire qu'elle est fière de ce qui a été fait, je dois dire que moi, je ne le suis pas.

 

. 1450 + -

Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, ce dossier est trop grave pour qu'on s'en serve à des fins politiques. Le député sait fort bien que le gouvernement a affecté plus de 1,3 milliard de dollars à cette question et 800 millions de dollars au règlement des réclamations d'un recours collectif. Nous sommes d'avis que les victimes doivent recevoir des soins. Nous avons prévu 300 millions de dollars à cette fin et nous avons offert de collaborer avec les provinces pour qu'au cours de leur vie, les personnes infectées par le virus de l'hépatite C reçoivent les soins dont elles auront besoin.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, selon un rapport paru dans la presse, le caucus du gouvernement et le ministre de l'Agriculture reconnaissent enfin la gravité de la situation que connaissent nombre d'agriculteurs canadiens aux prises avec la pire crise depuis les années 30. Cependant, selon le même rapport, tous les ministres ne l'ont pas encore reconnu.

Ma question s'adresse donc au ministre des Finances. Le ministre reconnaît-il la tragique réalité à laquelle sont confrontées des dizaines de milliers de familles agricoles canadiennes? Dans l'affirmative, s'engagera-t-il aujourd'hui à mettre sur pied tant un programme de secours à court terme en cas de désastre qu'un programme de protection à long terme pour nos familles d'agriculteurs éprouvées?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai rencontré mes collègues du Cabinet pas plus tard que ce matin, au petit-déjeuner, et au lunch, à midi. Je puis donner l'assurance au député que mes collègues du Cabinet ont pleinement conscience de la gravité de la situation dans laquelle se trouvent trop d'agriculteurs du pays à l'heure actuelle.

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président, nos agriculteurs estiment tous être victimes des guerres commerciales internationales, qui font baisser nos prix. Le gouvernement a abandonné nos producteurs en réduisant prématurément le soutien fédéral. En 1995, le ministre des Finances a annoncé la suppression de la subvention du Nid-de-Corbeau. Nos agriculteurs ont perdu 320 millions de dollars par année en Saskatchewan seulement.

Le ministre des Finances appuiera-t-il l'établissement d'un programme national de secours, à court et à long terme, pour sauver les fermes familiales canadiennes et leur permettre de continuer de soutenir la concurrence à l'échelle mondiale?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, oui, des mesures correctives ont été prises, mais le député oublie de dire à la Chambre que la Saskatchewan a reçu un paiement forfaitaire s'élevant à presque 900 millions de dollars.

*  *  *

L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, aujourd'hui, on vient d'entraver encore un peu plus les efforts déployés pour découvrir la vérité au sujet des événements ayant entouré le sommet de l'APEC. À cause du renvoi à la Cour fédérale, les travaux de la Commission des plaintes du public contre la GRC sont maintenant paralysés, et le processus a été tellement malmené que la seule personne au Canada à croire encore à son intégrité, c'est le premier ministre, et peut-être aussi le vice-premier ministre. Ils préfèrent se cacher derrière tout ce qui leur tombe sous la main. Ce fut d'abord le solliciteur général et c'est maintenant la commission d'enquête sur le sommet de l'APEC, qui a subi des coups fatals.

Les Canadiens veulent connaître la vérité. Quand obtiendront-ils des réponses claires et la création d'une commission judiciaire indépendante?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens ont toujours obtenu des réponses claires du premier ministre et de ses collègues. Ce qui manque, ce sont des questions claires de la part du député et de ses collègues.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, le vice-premier ministre et le premier ministre sont passés maîtres dans l'art de parler beaucoup pour ne rien dire; le critère d'évaluation de l'intégrité, ce sont les réalisations et non pas les belles paroles des libéraux. Les réponses pitoyables que le vice-premier ministre nous répète sans cesse ne contribuent en rien à améliorer la confiance.

Si le gouvernement veut faire toute la lumière sur les événements ayant entouré le sommet de l'APEC, pourquoi propose-t-il le projet de loi C-44, qui permettrait au Cabinet de congédier le président de la Commission des plaintes du public sans autre forme de procès? Peut-être que le président du Conseil du Trésor pourrait écouter la question et y répondre.

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-44 a réparé un gâchis que nous a légué le Parti conservateur à la suite des trop nombreuses nominations partisanes qu'il a faites au fil des ans.

 

. 1455 + -

Nous avons supprimé 800 des 3 000 nominations par décret et nous avons ainsi fait économiser des millions de dollars aux contribuables.

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LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. La visite au Canada du haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, marque le 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Quels échanges le ministre a-t-il eus avec Mme Robinson à propos de la décision de la Chambre des lords britannique concernant l'extradition du général Pinochet?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la députée a raison de signaler l'importance de la visite du haut commissaire des Nations Unies. Nous avons eu l'occasion d'aborder de nombreux sujets.

La décision rendue à propos du général Pinochet souligne, comme l'a dit le haut commissaire, à quel point il est important d'instituer une cour pénale internationale. Le haut commissaire a encouragé le Canada à continuer de jouer un rôle de premier plan en vue d'établir cette importante nouvelle institution.

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LA GOLDEN WEST DOCUMENT SHREDDING

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics avait la responsabilité de faire déchiqueter 22 000 boîtes de documents confidentiels, à caractère privé, sur des familles canadiennes. Au lieu d'être déchiquetés, ces documents ont été vendus à profit.

Hier, le ministre nous a dit que tout va bien et qu'après tout, il était au courant de l'affaire depuis juillet. Le commissaire à la protection de la vie privée n'est pas de cet avis. Il lance sa propre enquête.

Pourquoi le ministre a-t-il tenu secret le scandale que constitue cette grave atteinte à la vie privée? À quel point la nouvelle est-elle mauvaise?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, lorsque mon ministère a constaté qu'il y avait rupture de contrat, nous avons réagi immédiatement. Nous avons annulé le contrat et toutes les autorisations de sécurité que détenait l'entreprise.

Nous n'avons rien caché. Les journaux ont fait état de tout ça. Le député vient tout juste de l'apprendre, cinq mois plus tard. Si le commissaire à la protection de la vie privée veut procéder à une enquête, mon ministère et moi sommes prêts à coopérer avec lui.

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[Français]

LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, hier, le ministre a accusé le Bloc québécois de répandre des faussetés dans le dossier du déglaçage.

Il sait pourtant que dans ce dossier, l'action du Bloc s'effectue en concertation étroite avec les gens de l'industrie maritime.

Ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans. Compte tenu des protestations légitimes et unanimes de l'industrie, compte tenu qu'une nouvelle tarification doit entrer en vigueur dans moins d'un mois, le ministre s'engage-t-il à décréter un moratoire, le temps d'apporter à sa politique les correctifs qui s'imposent?

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, hier, j'ai rencontré un groupe de l'industrie qui a discuté les contre-propositions qu'ils ont faites. Je suis en train d'examiner ce qu'ils ont dit hier, ainsi que la contre-proposition qu'ils m'ont donnée la semaine dernière.

Il n'y a aucune bonne raison, à ce moment-ci, de répondre à la demande du député. On verra. Il faut aussi que je discute avec mes collègues du Cabinet.

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[Traduction]

LA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, un récent rapport de la Commission canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre affirme que le système de formation de la main-d'oeuvre du Canada est dans un état de chaos et de confusion.

Le gouvernement a rejeté sur le dos des provinces la responsabilité de la formation de la main-d'oeuvre et a réduit les dépenses de 700 millions de dollars. Il n'y a maintenant plus de planification, plus de coordination, plus de normes nationales, et l'accessibilité est en passe de devenir une farce.

Le ministre du Développement des ressources humaines admettra-t-il que la formation professionnelle est en crise au Canada et utilisera-t-il l'excédent de la caisse d'assurance-emploi pour amener le gouvernement à rétablir les 700 millions de dollars de financement sabrés dans nos programmes de formation?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas rejeté cette responsabilité sur le dos des provinces. Depuis très longtemps, les provinces voulaient un meilleur partenariat avec le gouvernement du Canada à cet égard. Nous avons négocié cette entente avec les gouvernements provinciaux, y compris les deux gouvernements néo-démocrates de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan.

Nous avons investi 800 millions de dollars de plus dans des mesures actives pour aider les Canadiens en chômage à trouver du travail. Cette somme porte à 2,7 milliards de dollars par année le total des fonds que nous utilisons précisément pour accomplir cette tâche en partenariat avec les provinces.

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L'ONTARIO

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, le gouvernement conservateur de l'Ontario a placé sa province au premier rang de la croissance économique et de la création d'emplois au pays. L'économie de l'Ontario croîtra de 4 p. 100 cette année, parce que l'Ontario et le premier ministre Harris savent que, lorsqu'on réduit les impôts, les emplois augmentent d'autant.

 

. 1500 + -

Quand le gouvernement et le ministre des Finances assureront-ils une croissance économique semblable dans le reste du Canada en réduisant les impôts, comme on l'a fait en Ontario, pour que tous les Canadiens puissent jouir de possibilités d'essor économique égales à celles que le gouvernement de l'Ontario a suscitées pour les Ontariens?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, dans le dernier budget, comme le député le sait, nous avons réduit les impôts de 7 milliards de dollars sur trois ans.

S'il veut parler de création d'emplois, je lui signale que, au cours des cinq dernières années, c'est-à-dire depuis que nous sommes au pouvoir, 1,4 million d'emplois ont été créés dans le secteur privé.

Sous le gouvernement précédent, en cinq années d'administration conservatrice, seulement 180 000 emplois avaient été créés. En fait, sous le gouvernement conservateur, le nombre d'emplois à plein temps avait diminué de 97 000 tandis que, dans notre cas, on en compte 1,4 million de plus. Au cours des cinq dernières années du régime conservateur, le taux de chômage avait augmenté de 3 p. 100.

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LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais demander au leader parlementaire du gouvernement ce que sera l'ordre des travaux pour le reste de la semaine. J'aimerais en fait connaître le programme de la Chambre d'ici l'ajournement et savoir si la Chambre doit effectivement ajourner ses travaux le 11 décembre.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à la question du leader de l'opposition à la Chambre.

Cet après-midi, nous poursuivrons l'étude du projet de loi C-49 qui traite de la gestion des terres des premières nations. Puis nous passerons à l'étude du projet de loi C-56 sur le règlement des revendications au Manitoba. Si nous avons le temps, nous passerons alors au projet de loi C-35 sur les importations, puis au projet de loi C-41 sur la Monnaie royale et au projet de loi C-40 sur l'extradition.

Demain, nous étudierons les amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-52 concernant le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, puis nous passerons à la troisième lecture du projet de loi S-16 concernant certaines conventions fiscales.

Je n'ai pas l'intention de mettre d'autres sujets en discussion demain.

Lundi, nous reprendrons le programme que je viens de nommer.

 

. 1505 + -

Mardi prochain sera une journée d'opposition suivie d'un vote sur les crédits à la fin de l'après-midi. Je crois comprendre qu'il y a également un certain nombre d'autres votes qui ont été différés ou qui pourraient l'être plus tard aujourd'hui et par la suite.

Mercredi prochain, nous aimerions reprendre l'étude du projet de loi C-43 sur l'Agence des douanes et du revenu. S'il reste du temps mercredi, nous passerons alors au projet de loi C-57 sur la Cour de justice du Nunavut.

Par la suite, bien sûr, nous tiendrons un débat prébudgétaire avant d'ajourner pour la période des Fêtes. Toutefois, il est encore trop tôt pour que je puisse me prononcer précisément quant au programme des jours qui suivront. Je remercie tous les leaders parlementaires et leurs partis de leur aide pour la mise au point de l'ordre du jour des séances qui restent avant l'ajournement des Fêtes.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-49, Loi portant ratification de l'accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations et visant sa prise d'effet, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de la motion: Que la motion soit maintenant mise aux voix.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, durant les quelques minutes qu'il reste, j'aimerais éclaircir certains doutes que peuvent avoir les députés d'en face.

Mettons les choses bien au clair. Je veux qu'il soit bien entendu que nous ne contestons pas le droit des autochtones d'honorer leurs traités territoriaux. La question n'est pas là. Le problème est de savoir comment faire pour assurer une certaine responsabilisation en vertu de ce projet de loi? Comment allons-nous changer les conditions dont parlait le député de Wild Rose?

Voilà certaines questions qui pèsent lourdement sur les épaules des élus ministériels à la Chambre. Pourquoi refusons-nous à des milliers de personnes le droit de jouir, comme nous, de l'autonomie politique? Pourquoi persistons-nous à le faire? Pourquoi sommes-nous prêts à donner suite à des revendications qui visent des territoires immenses, alors que les gens ordinaires veulent que l'on rende des comptes? Le gouvernement ne les aide pas à réaliser cet objectif.

Dans la plupart des secteurs où le principe de la responsabilité est appliqué, on ne voit pas le genre de choses qu'a constatées le député de Wild Rose. Plus il y a de transparence, plus il y a de responsabilité, mieux cela vaut pour tout le monde. La Chambre n'a pas le droit de refuser la véritable autonomie politique. À l'aube d'un nouveau siècle, nous devrions éviter les projets de loi qui mettent la charrue devant les boeufs.

En refusant l'autonomie politique, le gouvernement refuse de voir la réalité en face. Les ministériels peuvent tenir tous les discours qu'ils veulent sur la responsabilité et le partenariat, mais tant que nous n'aurons pas mis en place les mécanismes permettant de réaliser la responsabilité et de mettre en place un gouvernement local constitué de gens ordinaires, le marasme qui frappe actuellement de nombreux secteurs d'activité au Canada persistera.

Je demande au gouvernement de cesser de présenter des projets de loi qui n'aboutissent à rien et de s'attaquer plutôt aux véritables problèmes. Attaquons-nous efficacement au plus grave problème social de l'heure au Canada.

Le gouvernement peut se soustraire à cette obligation. Il ne veut de toute évidence pas en prendre la responsabilité. Mais tôt ou tard, il devra assumer les conséquences de l'absence d'autonomie politique et de transparence qui se manifestent d'un océan à l'autre.

 

. 1510 + -

Pourquoi devrions-nous promouvoir des ententes concernant les revendications territoriales qui ne laissent pas de place à la responsabilité? Le gouvernement est prêt à le faire, mais pas nous.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur le projet de loi C-49, la Loi sur la gestion des terres des premières nations.

Ce qui a donné naissance à cette mesure, c'est le fait que les premières nations avaient mis au point un système viable de gestion des terres qui devait leur permettre de gérer et de contrôler leurs terres et leurs ressources. Le nouveau régime de gestion des terres qui fait l'objet de ce projet de loi est une entente entre gouvernements qui met fin à l'autorité et aux pouvoirs discrétionnaires du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien en matière de gestion des terres, pouvoirs que lui donne la Loi sur les Indiens.

Ce nouveau régime est au coeur de nos efforts en vue d'améliorer la situation des autochtones partout au Canada. Il remet le contrôle de la gestion des terres entre les mains de plusieurs premières nations. Grâce à ce contrôle, elles auront les moyens de guider leur propre destinée et d'appuyer des collectivités fortes et saines, alimentées par le développement économique et soutenues par une solide infrastructure d'institutions et de services.

Ce nouveau régime est un exemple frappant du type d'arrangement productif envisagé dans le document «Rassembler nos forces: Le plan d'action du Canada pour les questions autochtones».

Lorsque le gouvernement a rendu public ce document en janvier, il s'est engagé a renouveler son partenariat avec les peuples autochtones et à trouver de nouvelles méthodes pour apporter des améliorations pratiques à la situation des autochtones. Cette mesure législative est à la pointe de nos efforts pour donner aux premières nations une plus grande autonomie et pour renforcer leur capacité et leur expertise.

Les députés reconnaîtront sans doute une bonne partie de cette mesure. Nous l'avons déjà vue, en décembre 1996, dans le projet de loi C-75. Il avait été étudié en deuxième lecture, mais il est mort au Feuilleton à la dissolution des Chambres.

Ceux qui s'intéressent à la question savent que ses antécédents remontent encore plus loin que cela. Comme la mesure législative proposée lors de la dernière législature, le projet de loi dont nous sommes saisis a pour but de ratifier un Accord-cadre signé par des premières nations de Colombie-Britannique, d'Alberta, de Saskatchewan, du Manitoba, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Cette mesure législative s'appliquerait à 14 premières nations.

L'accord-cadre confère aux 14 nations signataires le pouvoir de prendre leurs propres textes législatifs pour régir leurs terres et leurs ressources. Auparavant, les premières nations doivent élaborer un code foncier qui établira les règles et procédures fondamentales à suivre pour régir les terres et les intérêts relatifs aux terres et aux ressources une fois que les dispositions de la Loi sur les Indiens relatives aux terres cesseront de s'appliquer à ces communautés.

Les codes fonciers doivent être en conformité avec l'accord-cadre, qui ne peut être modifié que par les parties à cet accord. Les terres touchées seront désignées terres de la première nation et continueront d'être des terres de réserve aux fins des autres lois fédérales applicables. Par exemple, la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes ne sera pas touchée par cet accord.

Chaque première nation conclura avec le Canada un accord spécifique afin de déterminer le niveau de financement nécessaire pour la gestion des terres et de fixer les détails de la transition du régime actuel au nouveau régime.

 

. 1515 + -

Mes collègues de l'autre côté doivent comprendre que cet accord-cadre exige que figurent dans le code foncier adopté par chacune des premières nations les éléments suivants: les règles applicables en matière de responsabilité, devant les membres de la première nation, en ce qui touche la gestion des terres de la première nation et des fonds qui y sont liés; les règles d'édiction et de publication des textes législatifs; les règles applicables en matière de conflit d'intérêts dans la gestion des terres; une disposition prévoyant la constitution d'un organe chargé de régler les différends; les règles générales—de procédure et autres—applicables en matière d'attribution ou d'expropriation par la première nation d'intérêts sur ses terres; les règles générales—de procédure et autres—applicables en matière de délégation, par les autorités de la première nation, de ses pouvoirs de gestion des terres; et la procédure de modification du code foncier et la procédure en matière d'approbation d'échange de terres.

Il semble, d'après ce que disent les députés de l'autre côté, que ce soit là une chose que l'on ne comprend pas.

Je voudrais également signaler que la collectivité doit se prononcer sur ces décisions dans le cadre de la procédure d'adhésion. Ces mesures assurent la participation de la collectivité au départ et cherchent à obtenir son approbation relativement au processus. De cette façon, les premières nations peuvent être sûres que leurs membres sont bien au courant de tous les aspects du processus d'adhésion et de l'administration subséquente des terres et de l'argent. En d'autres termes, il s'agit d'un processus de reddition de comptes respectant des normes très élevées.

Le code foncier et les ententes individuelles exigent l'approbation de la collectivité. Tous les membres de la première nation qui ont 18 ans ou plus, qu'ils vivent sur la réserve ou à l'extérieur, auront le droit de vote dans le cadre du processus d'approbation. Au moins 25 p. 100 des électeurs admissibles devront approuver ces codes fonciers et les accords individuels pour qu'ils soient valides.

Ce processus de ratification est une preuve de plus que l'accord-cadre aidera à renforcer l'exercice des pouvoirs par les autochtones. Il va favoriser la croissance de collectivités autochtones fortes et saines, renforcer les économies et appuyer les gens. Je rappelle à la Chambre que ce sont les principaux objectifs du document intitulé «Rassembler nos forces: le plan d'action du Canada pour les questions autochtones». Il y a tant de choses à dire au sujet de cet accord.

Il est important de noter que ce projet de loi prévoit que chaque première nation et le ministre doivent nommer un vérificateur pour confirmer que le code foncier proposé et le processus d'approbation communautaire respectent les termes du projet de loi et de l'accord. Le vérificateur va également déterminer si le code foncier et l'accord individuel ont été approuvés dans le cadre du processus confirmé.

Le projet de loi dont nous sommes saisis promulgue un accord-cadre profitable à tous. Les signataires vont profiter d'un plus grand contrôle sur leurs terres et leurs ressources. Les municipalités avoisinantes et les provinces touchées profiteront de retombées économiques. Pour sa part, le gouvernement fédéral n'aura plus à administrer certaines dispositions de la Loi sur les Indiens. Il peut réduire sa participation aux décisions et aux activités quotidiennes de ces premières nations.

Les autres premières nations pourront quant à elles étudier les répercussions sur les 14 premières nations signataires et utiliser cet accord-cadre comme modèle de futures ententes sur l'autonomie gouvernementale.

Le projet de loi C-49 est une bonne mesure législative. J'exhorte tous mes collègues à l'appuyer.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je remercie la députée qui vient de déclarer que le projet de loi C-49 est une bonne mesure législative. C'est également mon avis: nous avons là une très bonne mesure législative.

J'aimerais relever certaines erreurs entendues au sujet de ce projet de loi, erreurs que l'on retrouve dans certaines déclarations de députés.

Certes, les questions traitées ici ne sont pas nécessairement faciles mais, tout compte fait, cette mesure législative est très positive, notamment en ce qu'elle accorde le contrôle de la gestion des terres aux premières nations, ce qu'elles réclament depuis toujours.

Je voudrais reprendre le député de Souris—Moose Mountain, qui a déclaré qu'il n'était pas question de responsabilité dans ce projet de loi. Or, la responsabilité est le thème central de ce projet de loi. Le député a peut-être omis de lire certains passages. À l'intention des députés de la Chambre, je vais passer en revue tout ce qui concerne la responsabilité.

 

. 1520 + -

Jusqu'ici, la Loi sur les Indiens donnait au MAINC presque tous les pouvoirs décisionnels concernant l'utilisation et la gestion des terres et des ressources appartenants aux réserves. Le ministre a peu de comptes à rendre aux membres des premières nations en ce qui concerne la gestion des réserves et peu de comptes à rendre aux membres des premières nations en ce qui concerne la gestion des transactions territoriales, des ressources, de l'environnement et des revenus.

La loi actuelle ne prévoit aucune reddition de comptes. Les 14 premières nations qui ont signé cet accord ont fait de la responsabilité envers leurs membres un des principaux piliers de cet accord-cadre.

Le projet de loi C-49 ne traite pas des élections ni d'autres questions telles que l'exercice des pouvoirs qui seront encore régies par la Loi sur les Indiens. Bien des choses importantes mériteraient d'être soulignées à propos de la responsabilité présente dans ce projet de loi.

Ainsi, l'accord-cadre stipule que le conseil d'une première nation représentera à la fois les membres qui vivent dans la réserve et hors de la réserve. Les membres des premières nations, qu'ils vivent dans un réserve ou non, doivent approuver la décision de se soustraire aux dispositions de la Loi sur les Indiens qui touchent l'administration des terres, le contenu du code foncier et toute modification qui lui serait apportée, ainsi que l'accord de transfert individuel avec le Canada. Le conseil d'une première nation doit gérer ses terres dans l'intérêt de ses membres. Il me semble que cela équivaut à rendre des comptes.

Un code foncier doit renfermer des dispositions concernant la reddition de comptes et la transparence des décisions touchant aux terres et aux recettes connexes. Il doit également prévoir des dispositions régissant le processus législatif des premières nations et la publication des lois des premières nations. Tous les codes fonciers sont des documents publics que peuvent consulter les membres des premières nations et le grand public. Tout code doit prévoir un mécanisme local de règlement des différends concernant la gestion des terres.

Le projet de loi porte sur l'obligation de rendre des comptes et strictement sur cela. Il est temps, je crois, que ceux qui s'opposent à ce projet de loi prennent le temps de le lire. Permettez-moi de vous donner d'autres exemples de reddition de comptes.

Les membres votants peuvent présenter des projets de loi concernant la gestion des terres des premières nations. Ces projets de loi sont rendus publics et distribués à tous les membres avant de faire l'objet d'un vote au conseil. Les lois des premières nations concernant les terres doivent être publiées. Le public peut les consulter au bureau des premières nations pendant les heures d'ouverture. Aux termes des règles régissant les conflits d'intérêts, les personnes en position de conflit ne peuvent participer aux décisions touchant à la question qui les concerne.

Les membres votants doivent approuver certains baux et permis relatifs à l'utilisation des terres des premières nations. Le conseil doit adopter un budget, l'expliquer à l'assemblée de ses membres et le remettre aux membres qui voudraient l'examiner plus à fond.

L'inscription des dépenses, le contrôle des marchés, la tenue des livres et des dossiers doivent se faire selon les principes comptables généralement reconnus. Tout membre adulte peut recevoir une copie des états financiers. Le vérificateur a accès à tous les dossiers financiers et se rend coupable d'une infraction toute personne qui tente de limiter l'accès à ces dossiers financiers.

La communauté doit donner son assentiment, au moyen d'un scrutin de ratification, avant que certaines lois puissent être adoptées ou que certaines transactions foncières puissent être conclues. De plus, une réunion annuelle des membres des premières nations doit être convoquée au cours de laquelle les questions relatives à la gestion des terres sont abordées et le rapport du vérificateur est déposé.

Voilà pour ce qui est de la responsabilité. Voilà ce qu'apporte le projet de loi au Canada et aux 14 premières nations signataires de l'accord-cadre.

Il faut comprendre que ces 14 premières nations sont réparties partout au Canada. Il y en a cinq en Colombie-Britannique: Westbank, Lheit-Lit'en, Musqueam, N'Quatqua et Squamish. La nation Siksika est en Alberta. Il y a deux nations en Saskatchewan, soit Muskoday et Cowessess. Les Cris Opaskwayak sont au Manitoba. En Ontario, il y a les quatre nations; les Chippewas de Georgina Island, les Mississaugas de Scugog Island, les Chippewas de Mnjikaning et la nation de Nipissing. Au Nouveau-Brunswick, il y a la nation Saint Mary's.

Est-ce que d'autres nations voudraient souscrire à cette initiative? Oui. Il y a 40 ou 50 premières nations qui songent à signer l'accord-cadre sur la gestion des terres. Certaines sont de ma province, la Nouvelle-Écosse.

 

. 1525 + -

Il n'y a absolument rien dans cet accord qui modifie la Constitution ou la Charte des droits. Il n'y est pas question des dossiers difficiles dont nous sommes saisis à la Chambre des communes. L'accord traite d'une idée très simple qui devrait nous être très familière, c'est-à-dire la gestion de terres qui nous appartiennent.

Il faut que les premières nations occupent la place qui leur revient dans la société canadienne et qu'elles partagent les possibilités économiques du pays. La discrimination exercée aux termes de la Loi sur les Indiens est criminelle. En fait, c'est le ministre de la Couronne qui détermine si les membres d'une première nation qui vivent dans une réserve peuvent couper du bois de chauffage, produire du bois d'oeuvre, exploiter une gravière ou avoir droit à un intérêt minier dans cette réserve.

Ce projet de loi n'exclut pas non plus tous les autres projets de loi que le Parlement a déjà adoptés. La Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes s'applique toujours. Cette mesure législative ne change rien aux autres lois. Elle nous donne simplement l'occasion, en tant que parlementaires, de permettre aux premières nations d'avoir leurs propres possibilités de développement économique dans les réserves au Canada.

Cela me dérange beaucoup lorsque j'entends ce que les députés de l'opposition ont à dire au sujet de cette mesure législative. J'ai examiné ce projet de loi. Je l'ai lu attentivement du début à la fin et je n'y vois aucun problème.

Il y a eu des discussions au sujet des femmes des premières nations et de la façon dont elles seraient traitées en vertu de ce projet de loi. Il reste que le projet de loi contient des dispositions qui portent sur la rupture du mariage, sur la séparation des conjoints et sur le sort des enfants après la rupture du mariage.

Le projet de loi traite de toutes les questions pertinentes auxquelles les premières nations seront confrontées en devenant propriétaires des terres des réserves. En tant que parlementaires, il nous incombe d'appuyer les mesures législatives positives, et ce projet de loi est certainement une mesure positive.

Il y a bien des choses qu'il est très difficile pour nous de faire en tant que parlementaires. J'en ai déjà parlé, mais je crois qu'il est important de le répéter. Il s'agit de ce que ce projet de loi ne fait pas. Il ne modifie pas la Constitution du Canada. Il ne modifie pas les lois qui régissent l'égalité des droits en vertu de la Charte des droits. Il ne fait que donner aux premières nations des possibilités de développement économique et leur permettre de gérer eux-mêmes leurs terres. C'est un bon projet de loi. Je l'appuie et je demanderais aux autres députés de l'appuyer aussi.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les commentaires du député qui vient de prendre la parole. Il a parlé des articles du projet de loi C-49 qui portent sur l'obligation de rendre compte et qui sont très rassurants.

Toutefois, nous savons tous que l'obligation de rendre compte a toujours existé pour tous les aspects des dépenses de fonds dans l'intérêt des Indiens. Cette obligation a toujours existé et pourtant, nous entendons parler les gens de la base, les Indiens dont j'ai parlé cet après-midi.

Quand je leur parle d'autonomie gouvernementale pour les indiens et que j'essaie de savoir ce qu'ils en pensent, il me disent qu'ils sont préoccupés. Quand je leur demande ce qui les préoccupe, ils me disent très clairement qu'ils sont très inquiets à la pensée de voir leurs chefs obtenir davantage de pouvoirs et d'autorité sur eux. Je leur demande ce qu'ils voient comme problème à l'heure actuelle et ils m'expliquent la situation de long en large. Mes collègues de Wild Rose et de Skeena ont donné des exemples de ces problèmes auxquels les gens de la base sont confrontés.

À mon avis, il n'y a personne au Canada qui ne serait pas prêt à poursuivre l'affectation de ressources à la communauté autochtone pour lui venir en aide au chapitre du niveau de vie, de l'instruction et ainsi de suite. Toutefois, si ces ressources ne se rendent pas jusqu'aux gens, comme on semble nous le laisser entendre d'un peu partout, nous devons alors nous pencher sur toute cette obligation de rendre des comptes.

 

. 1530 + -

Le projet de loi C-49 sera adopté, mais les députés de l'opposition ont toujours le devoir et la responsabilité de souligner les lacunes du projet de loi au fur et à mesure que nous les constatons. Toute cette question de reddition de comptes nous préoccupe au plus haut point, comme c'est d'ailleurs le cas de tous les députés qui se sont entretenus avec les indiens de la base.

Ce qu'il y a de malheureux, c'est qu'il y a des autochtones de la base qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent pas faire part de leurs préoccupations à leur chef et à leur conseil. Ils ne peuvent pas non plus s'adresser à la ministre parce que cette dernière ferait alors l'objet de blâmes et de critiques de la part du chef et du conseil si elle se mettait à rencontrer les gens de la base. On l'accuserait de passer outre à l'autorité des représentants locaux élus. Sur ce plan, la ministre est prise au piège.

J'ignore quelle est la solution, si ce n'est d'exiger l'application du principe de la responsabilité de la part des 25 p. 100 des bandes qui n'agissent pas de façon responsable, même s'il existe des directives sur la manière de dépenser l'argent utilisé pour le bien-être des enfants, notamment l'éducation, les soins de santé et le niveau de vie. Il y a un manque de responsabilité quant à la manière dont l'argent est dépensé par les bandes. Il y a un problème.

Nous tenons à en faire part à la Chambre. Il n'y a personne à la Chambre qui soit contre l'autonomie politique des autochtones, mais il nous reste à la définir. Pourquoi le gouvernement ne l'a-t-il pas fait? Pourquoi n'avons-nous pas de modèle dont nous puissions nous inspirer, pour permettre aux peuples autochtones de prendre davantage en main leur existence et la gestion de leurs affaires. Il faut que cela se fasse conformément au principe de la responsabilité à l'égard des gens de la base.

J'ignore les réponses à plusieurs des problèmes dont j'ai entendu parler, mais ces problèmes ne sont pas très différents de ceux qui touchent l'ensemble de la société canadienne. Le Parti réformiste demande l'application des principes populistes qui permettent à la population d'obliger ses représentants élus à lui rendre des comptes sur la manière dont ils gèrent les affaires publiques. La population pourrait, notamment, demander au gouvernement pourquoi il nous a plongés dans l'endettement et pourquoi un si grand nombre d'enfants vivent sous le seuil de la pauvreté alors que les Canadiens paient les impôts les plus élevés de tous les pays du G7. Pourquoi l'État a-t-il emprunté et dépensé 585 milliards de dollars au cours des 25 à 30 dernières années, ce qui n'empêche pas qu'un enfant sur cinq vit actuellement dans la pauvreté?

Nous devons avoir plus d'obligation redditionnelle à la Chambre des communes. Nous devons tenir des votes libres. Les Canadiens doivent pouvoir révoquer les députés qui ne représentent pas honnêtement et fidèlement le point de vue et les préoccupations de leurs électeurs. Voilà le genre de mécanisme dont la population doit disposer à tous les paliers de gouvernement. C'est peut-être la solution pour les peuples autochtones, mais il leur appartient d'en décider.

Le projet de loi semble instituer un degré de responsabilité acceptable. Il existe des politiques et des règlements qui obligent à rendre compte de la façon dont les fonds sont dépensés, mais nous entendons quand même les protestations des gens ordinaires. Tant qu'on n'écoutera pas leurs revendications et qu'on ne s'attaquera pas aux problèmes, ce projet de loi risque d'ajouter aux problèmes des gens ordinaires, pas à ceux du Parti réformiste, du Bloc, du NPD, du Parti conservateur ou les libéraux. Ce projet de loi pourrait aggraver les problèmes des gens ordinaires dans la mesure où il conférera des pouvoirs plus étendus aux gouvernements locaux, précisément là où semble faire défaut la responsabilité qu'exige la population.

Nous devons exprimer nos préoccupations. Comme tout le monde, nous espérons que les choses iront bien, mais jusqu'à maintenant ça n'a pas été le cas. Selon nous, le projet de loi accorde des pouvoirs et une autorité accrus à ceux-là même dont se plaignent les gens ordinaires.

Je donne un exemple. Laura Deedza habite dans ma collectivité, mais est originaire de l'une des réserves du nord de l'Alberta. Elle tente d'obtenir des états financiers de sa bande. Pendant des mois, elle a tout fait pour tenter d'obtenir ne serait-ce que des parties de ces états financiers pour l'année en cours et pour les années précédentes. Elle n'a personne à qui s'adresser, sauf à la ministre. Elle vient constamment à mon bureau pour se plaindre qu'elle se heurte à un mur à ce palier-là. Les modalités d'accès à des documents comme ces états financiers sont énoncées clairement dans le projet de loi. Tous les membres de la bande sont censés y avoir accès. Laura fait partie d'un grand nombre de personnes dans le même cas. Elle nous demande continuellement de l'aider.

 

. 1535 + -

Tous les députés intéressés devraient assister à la rencontre qui aura lieu samedi, à Edmonton, où les gens de la base pourront exprimer plus longuement leurs préoccupations aux députés, afin que ces derniers puissent entendre ce qu'ils ont à dire et transmettre leur message à la Chambre. Je souhaiterais que les ministériels assistent également à cette rencontre, pour qu'ils puissent écouter les gens de la base et transmettre leurs préoccupations à la ministre et au Cabinet.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur la motion: Que la question soit maintenant mise aux voix. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, des discussions ont eu lieu avec les représentants de tous les partis, et je crois que vous obtiendrez le consentement pour reporter le vote par appel nominal sur la motion du secrétaire parlementaire de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, concernant la deuxième lecture du projet de loi C-49, au mardi 1er décembre 1998, à la fin de la période réservée aux initiatives ministérielles.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.  

*  *  *

LOI SUR LA MISE EN OEUVRE DE MESURES CONCERNANT LE RÈGLEMENT DE REVENDICATIONS AU MANITOBA

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 16 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-56, Loi concernant l'accord conclu avec la nation crie de Norway House sur le règlement de questions liées à la submersion de terres et concernant la création de réserves au Manitoba, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, jusqu'à maintenant le débat sur ce projet de loi a été très intéressant. Puisque les terres de la nation crie Norway House font maintenant partie de ma circonscription, je tiens à formuler mes observations.

 

. 1540 + -

Ce projet de loi est le résultat final de nombreuses années de négociations entre la nation crie Norway House, la province du Manitoba et le gouvernement du Canada. Toute mesure législative présentée à la Chambre des communes pour mettre en oeuvre des ententes négociées avec d'autres parties, surtout si ces négociations se déroulent sur plusieurs années, nécessite beaucoup de confiance mutuelle.

Dans ce cas précis, comme le gouvernement dûment élu de la nation crie Norway House a signé l'entente et que les membres de la bande l'ont ratifiée par référendum, nous devons croire que l'entente est satisfaisante pour les gens de Norway House. Nous ne croyons pas pour autant que cette entente a l'appui unanime des intéressés. Puisque les gens de Norway House ont voté en faveur de cette entente, nous devons présumer qu'elle reflète l'opinion de la majorité.

Au cours du débat, certains députés à la Chambre se sont demandé si cette entente reflétait vraiment la volonté des gens de Norway House. Disons clairement ce que ces députés laissent entendre. En s'interrogeant sur la légitimité des résultats du référendum, ils doivent vouloir dire qu'il y a eu de la fraude électorale, sous une forme ou une autre. Ce genre d'allégation ne devrait pas être fait à la légère.

À une époque où les premières nations réussissent enfin à gérer leurs propres affaires, le ministère des Affaires indiennes et, en fin de compte, le gouvernement du Canada doivent s'assurer que les droits démocratiques de chaque membre des premières nations sont respectés. S'ils ne le font pas, les gouvernements des premières nations sont voués à l'échec.

Tous les députés qui, comme moi, croient que les premières nations ont un droit légitime à l'autodétermination savent qu'il n'appartient pas au Parlement de dicter leur conduite aux autochtones. Tout au cours des relations du Canada avec les premières nations, cette attitude condescendante a toujours tourné à la tragédie.

Pour éviter la répétition des erreurs du passé, il faut permettre aux premières nations de prendre les décisions qui les touchent et de tracer elles-mêmes leurs voies. Par conséquent, en l'absence de toute preuve irréfutable que le référendum a été entaché d'irrégularités, je ne saurais, en conscience, m'opposer à ce qui m'apparaît comme le désir de la majorité de la population de Norway House et de son gouvernement de bande démocratiquement élu.

Pour mettre les choses en perspective, comparons la nation crie de Norway House à la première nation voisine de Cross Lake. Ces deux premières nations sont au nombre des cinq premières nations touchées par la submersion de terres survenue dans les années 1970 et toutes deux ont signé la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Chacune d'elles a un gouvernement démocratiquement élu et, comme c'est son droit le plus strict, le gouvernement de Cross Lake suit une voie différente dans sa lutte pour l'obtention d'une indemnisation.

Contrairement à Norway House, Cross Lake n'a pas conclu un accord avec le Manitoba et le gouvernement canadien. Le gouvernement de Cross Lake n'était pas satisfait de l'indemnisation offerte par les gouvernements fédéral et provincial pour l'inondation de ses terres. Il a donc décidé d'attendre l'indemnisation qui lui avait été offerte dans le cadre de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba.

Nous sommes donc en présence de deux gouvernements de première nation qui, dans des circonstances similaires, ont choisi des voies diamétralement opposées pour régler leurs différends. Norway House a décidé de conclure un accord, et Cross Lake non. Certains disent que Norway House a eu tort de prendre cette décision. Mais en tant que députés, nous n'avons pas le droit de dire aux premières nations ce qu'elles doivent faire. J'appuie leur droit à l'autodétermination. Les gens qui doivent prendre cette décision sont ceux de ces communautés.

Les résultats du référendum et le fait qu'ils ont réélu leur chef et leur conseil montrent que la majorité des membres de Norway House appuient cet accord, et je respecte leur décision. De même, j'appuie la décision du gouvernement démocratiquement élu de Cross Lake de suivre une voie différente.

Il est important de noter que la position que j'adopte d'appuyer le droit à l'autodétermination de chaque première nation reflète la position des premières nations elles-mêmes. À la dernière assemblée générale annuelle du Manitoba Keewatinowi Okimakanak, le chef de Norway House a promis son appui aux habitants de Cross Lake dans leur lutte pour obtenir une indemnisation. Il est clair que même quand elles décident d'adopter des voies différentes, les premières nations sont solidaires et appuient le droit des unes et des autres à l'autodétermination.

Je suis heureuse de constater que la mise en oeuvre de cet accord-cadre apporte une solution aux membres de Norway House. Parmi les députés qui ont pris part à ce débat, rares, s'il en est, sont ceux qui ont visité cette fantastique communauté dans ma circonscription.

Je suis heureuse de faire savoir à la Chambre que le développement économique à Norway House progresse. Un nouveau centre commercial a été inauguré cette semaine. Cela va créer des dizaines d'emplois dans la communauté. La communauté s'est embarquée dans plusieurs projets importants, dont une nouvelle garderie et un projet de pavage des routes l'été dernier. Aujourd'hui, presque toutes les routes à Norway House sont asphaltées. En outre, plusieurs nouvelles initiatives sont en cours dans le secteur du tourisme afin de mettre en valeur la longue histoire de la communauté et la beauté spectaculaire de la nature.

Je suis malgré tout profondément troublée par les événements qui se sont produits récemment à Cross Lake. Ces événements montrent que le gouvernement du Canada et le ministère des Affaires indiennes essaient d'user de leur influence pour amener cette première nation à signer l'accord-cadre contre sa volonté.

 

. 1545 + -

Le chef de la bande de Cross Lake m'a demandé de parler à la Chambre des pressions auxquelles son gouvernement et son peuple sont soumis de la part du ministère des Affaires indiennes et du gouvernement du Manitoba.

Il s'agit de la seule première nation qui n'a pas encore signé l'accord. Comme tout autre gouvernement à l'heure actuelle, celui de la première nation de Cross Lake a également une dette. Contrairement à la plupart des autres gouvernements, celui de la première nation de Cross Lake a besoin que le ministère des Affaires indiennes garantisse cette dette. Or, le ministère des Affaires indiennes menace maintenant de cesser de garantir les prêts du gouvernement à la bande, ce qui signifie que la bande fera faillite à moins qu'elle ne puisse immédiatement rembourser sa dette.

Imaginez si les créanciers du Canada exigeaient le remboursement immédiat de notre dette nationale. Il ne serait pas raisonnable de s'attendre à cela et il n'est pas plus raisonnable de réclamer cela à la première nation de Cross Lake.

En fait, le ministère des Affaires indiennes met le couteau sur la gorge de la première nation de Cross Lake. Si les intéressés signent l'accord-cadre de mise en oeuvre, des paiements immédiats leur permettront de rembourser leur dette et d'éviter la faillite. Cependant, la première nation de Cross Lake a précisé clairement qu'elle ne veut pas signer un nouvel accord-cadre de mise en oeuvre.

Le gouvernement progressiste conservateur du Manitoba a jusqu'à maintenant refusé d'offrir un dédommagement équitable et ainsi, la première nation de Cross Lake a décidé de poursuivre le processus plus long de réclamation des indemnités qu'on lui a promise aux termes de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Elle doit être libre de faire ce choix.

Ce chantage de la part du ministère des Affaires indiennes est ignoble et il trahit le mépris total du gouvernement libéral pour le principe de l'autonomie gouvernementale des premières nations. J'exhorte le gouvernement libéral à mettre un terme immédiatement à son chantage à l'égard de la première nation de Cross Lake.

Il est clair que le gouvernement libéral peut traiter les premières nations de façon non éthique. Cependant, rien ne prouve de façon irréfutable qu'il a utilisé des tactiques sournoises de ce genre avec d'autres bandes comme celle de Norway House. En l'absence d'une telle preuve, nous devons supposer que le processus démocratique est légitime.

Je sais que les députés qui s'opposent à ce projet de loi ont de bonnes intentions et qu'ils jugent qu'ils défendent ce qui est juste pour la bande de Norway House. C'est le cas également de certains membres de la première nation de Norway House.

L'appui pour cet accord n'est pas unanime au sein de la bande et c'est le droit démocratique de ceux qui s'y opposent, mais j'exhorte tous les députés à respecter les souhaits de la majorité des membres de la bande de Norway House en appuyant ce projet de loi.

J'invite également tous les députés à se joindre à moi pour lutter contre la terrible injustice dont la première nation de Cross Lake est victime, à l'heure actuelle, de la part du gouvernement.

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-56, Loi sur la mise en oeuvre de mesures concernant le règlement de revendications au Manitoba. Lorsque l'on regarde ce projet de loi, on constate qu'il comporte deux parties. La première traite du règlement de questions résultant de la submersion de terres et la deuxième de mesures pour faciliter le règlement des revendications territoriales au Manitoba, par la création de nouvelles réserves ou l'addition de terres aux réserves existantes.

Je voudrais souligner certaines des difficultés que nous voyons dans la deuxième partie suite à l'expérience du processus touchant les droits fonciers issus de traités en Saskatchewan. Elles ont été portées à mon attention par des municipalités rurales ainsi que par des Indiens nouvellement inscrits en vertu de la loi C-31. Il se pose certains problèmes.

La submersion s'est produite lors de la dérivation de la rivière Churchill pour la production d'électricité. Les Indiens de la région ont alors perdu les terres en bordure de la Churchill. Ces Indiens vivaient de chasse et de pêche. J'ai été là, car j'ai participé à ces projets hydro-électriques en tant qu'arpenteur. J'ai été dans la baie d'Hudson, à l'embouchure de la rivière Churchill et j'ai rencontré certaines des personnes qui ont probablement été touchées par cette mesure législative.

Nous parlons de quelque 12 000 acres de terres de réserve et de plus d'un demi million d'acres d'autres terres touchées par le projet. Ces terres doivent être remplacées pour que les gens puissent continuer à vivre dans le Nord. Certains membres de la nation de Norway House ont soulevé de graves questions concernant les modalités du référendum qui a été tenu. Ils ont parlé de graves irrégularités, notamment d'achat de votes. J'exhorte le gouvernement à examiner les accusations si elles ont été portées à l'attention du ministre également, car nous ne voulons pas que, une fois le dossier clos, le processus soit contesté.

 

. 1550 + -

Nous croyons que les gouvernements autochtones devraient être soumis à l'autorité du directeur général des élections, afin que celui-ci puisse veiller à ce que les élections soient justes et légales et qu'on ne puisse, je le répète, remettre en question la légitimité des élections ou d'un référendum.

Rien ne prouve que les allégations soient fondées, mais il s'agit d'allégations graves qui doivent être examinées.

Dans l'Ouest, l'histoire des droits fonciers découlant des traités remonte à l'époque où les traités ont été signés. Les commissaires aux traités ont parcouru de vastes étendues à la recherche des autochtones pour déterminer leur statut et enregistrer leur nom afin de pouvoir leur réserver des terres. Toutefois, dès les premiers recensements, on s'est aperçu qu'on n'avait pas mis de côté assez de terres pour remettre à chaque autochtone la superficie qui lui avait été promise. À un moment donné, la Saskatchewan a dû consacrer des fonds à l'achat de terres pour les descendants des autochtones pour qui des terres n'avaient pas été réservées au moment de l'achat initial. À l'origine, on avait prévu 128 acres par habitant, ce qui correspondait à 640 acres ou 1 mille carré par famille de cinq membres, ce qui était plus que suffisant par assurer la survie d'une famille.

Parmi les problèmes que pose actuellement le processus de négociation des droits fonciers découlant des traités et que m'ont signalés des autochtones eux-mêmes, mentionnons le fait que le registre des autochtones a servi à justifier l'utilisation de fonds pour l'achat de terrains, puisqu'il n'y a plus assez de terres publiques en Saskatchewan qui peuvent être cédées aux bandes indiennes.

La liste des membres d'une bande est toutefois invoquée lorsqu'on veut refuser des avantages à certains. La bande décide qui figure sur la liste de membres et peut ainsi empêcher que certaines personnes qu'elle juge indésirables soient admises au sein de la bande et profitent des avantages qui en découlent.

Cela crée des difficultés réelles aux gens qui ont droit aux avantages que la bande a obtenus en leur nom. Nous devons veiller à ce que ces listes demeurent publiques, puisque les avantages sont accordés à la bande en raison des noms qui y figurent.

Le Parti réformiste a toujours cru que la propriété privée devrait être accessible aux autochtones qui ont un mode de vie différent de celui des autres membres de la bande elle-même. Imaginez une personne ayant grandi dans une grande ville obligée d'aller s'installer dans le nord de la Saskatchewan, dans une réserve, pour pouvoir profiter des avantages qui lui reviennent dans le cadre du processus de cession de terres en vertu de traités. Ces personnes ne veulent pas quitter leur école, leurs amis, leur parents, les services hospitaliers et tous les autres services qu'on trouve en zone urbaine. Elles n'ont pas grandi dans une réserve et elles ne se considèrent pas comme faisant partie de ce milieu. Il faut trouver un moyen pour qu'elles puissent profiter des avantages qui ont été prévus pour elles.

J'aimerais souligner un autre problème que soulève le processus de cession de terres en vertu de traités. En Saskatchewan, les bandes peuvent acheter des terres à qui veut bien leur en vendre, à un prix mutuellement acceptable. Elles demandent ensuite qu'elles soient classée terres de réserve. Les municipalités rurales voient alors leur assiette fiscale diminuer. Je sais qu'on a prévu un montant qui devrait générer suffisamment d'intérêts pour assurer les services. Toutefois, pour ce qui est des routes qui traversent les réserves, nous savons, pour les avoir empruntées, que le tronçon jusqu'à la réserve et le tronçon à l'intérieur de la réserve sont d'une qualité entièrement différente car il n'est pas dans l'intérêt de la bande de dépenser son argent à construire des routes qui ne sont pas essentielles à son fonctionnement. C'est ce qui se passe dans toute la Saskatchewan.

 

. 1555 + -

On construit des chemins de service à travers toute la province. Ce sont des chemins réservés au trafic lourd. Ils sont devenus nécessaires à cause de la fermeture des lignes ferroviaires et des silos-élévateurs dans les régions rurales. Par conséquent, les chemins de service sont en train de prendre une importance plus grande pour les municipalités rurales.

Quand on prépare un budget pour une réserve, on prévoit un montant donné pour la construction de routes, mais la bande n'est pas obligée de dépenser cet argent tel qu'indiqué dans le budget qui est un simple document indiquant comment on est parvenu au montant total du budget. Par exemple, quand une municipalité rurale construit une route qu'elle classe chemin de service en accord avec les autres municipalités rurales et le gouvernement provincial, des fonds sont affectés à sa construction. La municipalité reçoit 73 p. 100 des fonds nécessaires de la province.

La municipalité rurale va chercher les autres 27 p. 100 dans les poches de ses contribuables. Récemment, une municipalité rurale de la Saskatchewan a construit un nouveau chemin de service dont un tronçon de trois milles passait sur une réserve. La bande n'a pas participé au financement, ce qui fait que les coûts ont été répartis de la façon suivante: le gouvernement fédéral a assumé 67 p. 100 des coûts, la municipalité rurale en a assumé 33 p. 100 et, parce que le chemin passait sur la réserve, la province n'a rien payé. La bande n'a rien payé non plus. Cela veut dire que la part de la municipalité rurale est passée de 27 p. 100 à 33 p.100 du coût total, ce qui représente une hausse de taxes de 22 p. 100 pour la construction de cette route. C'est une hausse énorme.

Avec la prolifération des réserves découlant du processus de cession des terres en vertu de traités, les bandes achètent des terres partout dans les municipalités rurales, comme elles ont parfaitement le droit de le faire, mais les terres des réserves et celles des municipalités rurales commencent à ressembler à un échiquier. Par conséquent, lorsque nous construisons des routes, il y a continuellement des tronçons qui passent sur des réserves, et celles-ci ne participent pas au financement de la construction, sans parler de l'entretien, bien sûr, qui comprend l'épandage du gravier, le nivellement, le déneigement, le désherbage et ainsi de suite.

Les municipalités rurales m'ont demandé d'exposer la situation au gouvernement. Elles veulent que le gouvernement voie à ce que l'argent donné aux bandes pour la construction de routes soit utilisé à cette fin et non à d'autres fins, aussi louables soient-elles.

La bande en question a accepté de fournir le gravier pour les quelques prochaines années jusqu'à ce que la valeur de sa contribution totale soit atteinte, et c'est une très belle initiative, mais aucune bande n'est tenue de faire cela. Les bandes peuvent faire leurs propres règles pour la construction de routes, alors que les municipalités rurales doivent obéir à certaines contraintes venant de la province ou liées aux besoins de leurs contribuables, soit les agriculteurs qui doivent transporter leur produit jusqu'à un point de livraison ou un marché de l'autre côté de la réserve. C'est un sérieux problème qui découle du processus de cession des terres en vertu de traités et qui doit être réglé. J'espère que le gouvernement du Manitoba défendra la position des agriculteurs à cet égard afin que les municipalités rurales n'aient pas à assumer le coût de plus en plus grand de la construction des routes à cause de l'effet d'échiquier créé par la présence de petites réserves indiennes parmi les municipalités rurales.

Nous appuyons le principe selon lequel les terres utilisées pour la construction de routes doivent être remplacées, comme le prévoit le projet de loi. Le processus de cession des terres en vertu de traités est un processus historique qui est accepté au Canada. Il ne sert à rien de s'y opposer. Il faudra cependant examiner de plus près la méthode de remplacement des recettes fiscales des municipalités rurales. Autrement, elles ne pourront tout simplement pas survivre.

 

. 1600 + -

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, le député a présenté une excellente analyse du problème, mais pourrait-il expliquer davantage la question de terres achetées par les bandes indiennes dans diverses parties d'une municipalité?

Sauf erreur, ces terres ne font pas automatiquement partie de la réserve, mais deviennent des propriétés en fief simple des bandes indiennes qui les achètent. Si ce sont des propriétés en fief simple, l'impôt à payer est calculé exactement de la même façon qu'il l'est sur les autres terres de la région qui n'appartiennent pas à des bandes indiennes.

Faut-il comprendre que la municipalité devrait demander une modification législative ou une façon prévisible selon laquelle le gouvernement fédéral déciderait comment ces terres en fief simple achetées par des bandes indiennes pourraient désormais faire partie de la réserve?

M. Derrek Konrad: Monsieur le Président, les bandes qui achètent des terres en vertu de la Loi sur les droits fonciers issus de traités demandent à la province le statut de réserve, ce qui les soustrait au régime fiscal. Comme je l'ai mentionné, un montant est versé dans un fonds gardé en fiducie dont les intérêts doivent servir à payer les services.

Toutefois, un autre problème se pose. Si la province accorde le statut de réserve à une terre agricole, le montant payé est calculé selon l'évaluation en cours, qui est très basse dans le cas des terres agricoles. Une bande pourrait par exemple convertir une terre en terrains résidentiels en subdivisant sa superficie de 160 acres en parcelles de 20 acres, ce qui donnerait huit parcelles distinctes où pourraient éventuellement s'installer huit familles. Il y aurait donc une hausse des coûts liés aux transports publics, à l'éducation et à la santé. La municipalité verrait ses coûts augmenter, mais serait encore tenue de construire des routes et d'assurer la prestation de services pour ces nouveaux habitants.

Ce n'est pas le rezonage qui fait problème pour la municipalité. Bien sûr, cela revient au gouvernement fédéral puisqu'il s'agit maintenant de terres de la Couronne. Il y a sans contredit une hausse des dépenses pour cet ordre de gouvernement dans les régions rurales du Canada, sans qu'il y ait une hausse comparable de ses recettes fiscales.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, j'écoutais la réponse du député de Prince Albert à la question de savoir si les terres en fief simple étaient assujetties à l'impôt foncier. Je n'ai pas très bien compris sa réponse.

Cependant, le projet de loi dit très clairement que les terres en fief simple accordées à la bande de Norway House dans le cadre du régime d'indemnisation ne deviennent pas des réserves spéciales en vertu de la Loi sur les Indiens. Elles sont donc des terres en fief simple, purement et simplement. Les députés peuvent tirer n'importe quelle autre conclusion qu'ils voudront de cette disposition, elles n'en restent pas moins des propriétés en fief simple.

M. Derrek Konrad: Monsieur le Président, je remercie le député de South Shore. Il a raison, elles sont acquises en fief simple et elles peuvent demeurer des propriétés en fief simple, mais, comme les terres appartiennent à une bande, on peut demander qu'elles jouissent du statut de réserve indienne. Quand cela se produit, elles perdent toute exonération d'impôt foncier, comme les terres des réserves en sont évidemment exonérées. Les terres en fief simple appartenant à une société par exemple sont évidemment assujetties à l'impôt foncier au taux courant.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je n'ai pas l'intention de débattre longuement du projet de loi aujourd'hui. Ce que je trouve à redire au projet de loi ne tient pas tant à sa teneur qu'à la façon dont celle-ci est présentée.

 

. 1605 + -

Il y a un véritable danger à aborder un projet de loi omnibus comme celui-ci. Le projet de loi se compose en effet de deux mesures législatives très différentes. Nous ne devrions peut-être pas tenter d'adopter ce projet de loi à la hâte à la Chambre. Nous avons déjà au programme un certain nombre de bons projets de loi dont nous tâchons de terminer l'étude. Nous devrions prendre tout le temps voulu pour examiner soigneusement le projet de loi et tâcher de comprendre toutes les questions pertinentes.

Le projet de loi C-56, Loi sur la mise en oeuvre de mesures concernant le règlement de revendications au Manitoba, comporte deux parties, dont la première a trait à un accord-cadre conclu avec la bande de Norway House en vue de la création de réserves.

La bande de Norway House a signé l'accord-cadre en décembre 1997. Le projet de loi dont nous sommes saisis permet au gouvernement d'affirmer certaines dispositions de cet accord, bien qu'elles soient déjà en voie d'application. Sa mise en oeuvre garantit que les terres accordées en fief simple à la nation crie de Norway House, dans le cadre du régime d'indemnisation, ne seront pas assujetties à la Loi sur les Indiens, à titre de réserves spéciales.

Elle garantit aussi que les sommes versées aux termes de l'accord d'indemnisation seront administrées par une fiducie, pour la première nation. Cela évitera que les sommes en question deviennent de l'argent de la bande, conformément à la définition de la Loi sur les Indiens, et qu'elles soient ainsi à la disposition de la première nation qui pourrait les utiliser comme bon lui semble. Je pense qu'il serait plus juste de parler d'argent des Indiens au sens de la Loi sur les Indiens. Sans le projet de loi, il faudrait continuer de respecter les exigences administratives fastidieuses de la Loi sur les Indiens. Le projet de loi améliore les possibilités d'autodéveloppement et il constitue un pas vers l'autonomie gouvernementale.

La Convention sur l'inondation des terres du nord prévoyait l'indemnisation des premières nations touchées par l'inondation de leurs terres ancestrales. Elle était toutefois tellement mal conçue qu'on n'a jamais pu la mettre en oeuvre. Le projet de loi à l'étude vise, en quelque sorte, à mettre un terme à de nombreux éléments de cette convention.

La deuxième partie du projet de loi améliore le processus de création des réserves. Ce processus pourrait être accéléré et plus efficace si c'est le ministre, et non pas le gouverneur en conseil, qui approuve les réserves.

Le projet de loi permet aussi aux premières nations d'améliorer leur développement économique, car il les autorise à demander à des tiers d'amorcer ou de poursuivre des projets de développement pendant que le processus de création d'une réserve est en cours. Auparavant, les possibilités de développement économique des premières nations et des parties désirant mettre en valeur un intérêt sur les terres des réserves étaient entravées.

Je suis plutôt disposé à ce que l'étude de cette mesure législative se poursuive au Parlement et à voir le projet de loi renvoyé à un comité avant Noël. Je n'ai rien contre cela. Je ne vais pas m'étendre longuement sur la question aujourd'hui. Je tiens toutefois à rappeler que les projets de loi qui traitent de plus d'une question sont dangereux. Celui-ci traite de trois aspects. Il vise certainement deux questions importantes. Il y a un danger à cela. Je tiens à mettre le Parlement en garde: si nous continuons ainsi, à long terme, nous finirons par ralentir le processus parce que nous n'avons pas le temps d'étudier à fond chacune des questions distinctes.

Par exemple, la Convention sur l'inondation des terres du nord comporte 155 pages. Ce n'est là qu'un aspect du projet de loi. Je sais que toutes les mesures législatives sont compliquées et que leur étude peut être fastidieuse. Cependant, il aurait mieux valu scinder en deux le projet de loi dont nous sommes saisis.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je me suis entretenu à de nombreuses reprises avec des membres de la bande de Norway House depuis un an et demi. Il importe que les députés comprennent, avant que le Parlement adopte ce projet de loi, le point de vue des membres de la bande et sachent s'il y a un consensus. La population la plus touchée par ce projet de loi devrait au moins être généralement en faveur de celui-ci.

Je voudrais parler un peu des résultats du référendum. C'est capital à mon avis.

 

. 1610 + -

La bande indienne de Norway House a tenu un référendum pour déterminer si elle acceptait de donner suite à l'entente que renferme ce projet de loi. J'ai commencé à recevoir des appels à mon bureau il y a un peu plus d'un an de la part de membres de la bande qui ont fait de graves allégations au sujet d'irrégularités et d'anomalies dans le processus électoral.

La première allégation qui a été faite, c'est que la réponse au référendum initial avait été non. La bande de Norway House a en fait voté, mais le conseil de bande, de concert, à mon avis, avec le ministère des Affaires indiennes, a décidé de tenir un deuxième scrutin sur exactement la même entente. Rien n'avait pourtant été changé dans l'entente.

La deuxième allégation qui a été faite, c'est qu'un deuxième scrutin a été tenu, mais pas avant qu'une partie des fonds fédéraux aient servi à acheter des votes. J'ignore si c'est la vérité, mais c'est ce qu'on m'a dit.

M. David Iftody: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je tiens à mettre le député en garde contre pareilles allégations d'achat de votes. Ce sont de graves allégations. Je voulais simplement le signaler au député

Le président suppléant (M. McClelland): Je pense que, dans le cas présent, le député de Skeena avait tout à fait conscience de la nature de ses propos et, en fait, il les a fait suivre d'une déclaration selon laquelle les allégations en question lui ont été communiquées et qu'il avait la responsabilité d'y donner suite.

Je pense, en l'occurrence, qu'il n'y a pas lieu d'invoquer le Règlement.

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je suis bien conscient de la gravité de ces allégations. Permettez-moi de signaler à la Chambre et au député d'en face qui a soulevé la question que je ne me suis certainement pas mis là à téléphoner aux représentants de Norway House pour demander leur opinion. Ce sont eux qui ont communiqué avec moi. Ils ont fait ces allégations et m'ont demandé d'examiner l'affaire pour eux. Ils m'ont demandé, ainsi qu'à d'autres députés réformistes, de prendre leur défense, en quelque sorte, et d'aller au fond des choses. Leurs allégations étaient très graves. Ils disaient par exemple qu'on avait versé de l'argent à des électeurs pour les faire changer d'avis et les amener à appuyer cet accord. Comme je n'étais pas là, je n'en sais rien.

Je le demande au gouvernement, ce référendum a-t-il été surveillé par Élections Canada? Y a-t-il eu une tierce partie impartiale, comme c'est toujours le cas pour les élections au Canada? À toutes les élections fédérales où je me suis présenté, une tierce partie impartiale, Élections Canada, a exercé une surveillance pour qu'on puisse établir équitablement à la fin de la soirée la véracité des résultats. Sans cela, comment peut-on prétendre qu'il y a eu un référendum et que la proposition a été acceptée ou rejetée? Personne ne peut le faire. À mon avis, les Canadiens n'accepteraient jamais cela.

Les habitants de ces réserves canadiennes sont hors d'eux-mêmes. Ils demandent comment il se fait qu'il y a une série de règles qui garantissent l'équité aux Canadiens et que, dans les réserves, on peut faire ce qu'on veut, tout le monde s'en fiche.

Il me semble bien étrange que le Parti libéral, qui essaie de se faire passer pour le porte-parole des autochtones, refuse de se pencher sur ces très graves allégations. La situation est injuste. Il n'y a pas eu de tierce partie impartiale, comme Élections Canada ou Élections Manitoba, une tierce partie responsable, pour surveiller la tenue de ce référendum. Il n'y a eu rien de la sorte.

Y a-t-il eu un recensement exhaustif et correct des électeurs? Le savons-nous? Où sont les preuves? Je les ai demandées, mais je n'ai rien obtenu.

 

. 1615 + -

Il nous faut l'assurance, à nous ainsi qu'à la population de la collectivité, que cela représentait bien l'appui de la collectivité. À mon avis, nous n'avons pas cette assurance.

Je donne un autre exemple, plus récent et se rapportant à ma circonscription. Le même principe est en jeu. Je ne veux pas m'écarter du sujet, mais il est très important que nous comprenions bien. Le principe en cause, c'est de savoir si les référendums sont justes et honnêtes et s'ils représentent vraiment le consensus ou l'opinion majoritaire des personnes touchées par les ententes.

Je voudrais parler un peu de l'accord avec les Nisga'as. On nous a dit il y a environ 14 jours que les Nisga'as du nord de la Colombie-Britannique ont tenu un référendum sur la ratification de leur traité. C'est la première étape. Ce traité doit encore être ratifié par le gouvernement de la Colombie-Britannique puis par le Parlement fédéral. Apparemment, le premier ministre a l'intention d'imposer ce traité de force, sans vote libre, comme il le fait constamment. Mais je m'écarte encore.

Les Nisga'as ont voté pendant deux jours. Leur référendum a débuté le vendredi et s'est terminé le samedi soir. Je vis à Terrace, juste au sud de la vallée Nass, qui est visée par le traité des Nisga'as. J'ai attendu les résultats du référendum jusqu'au samedi soir en retenant mon souffle, mais je ne les ai pas appris le samedi soir. J'ai attendu toute la journée du dimanche, mais en vain. Finalement, les résultats sont sortis le lundi. Le lundi matin, la radio a annoncé que les résultats seraient connus l'après-midi.

Élections Canada compte de quatre à cinq millions de votes le soir des élections, six millions, ou peu importe, mais beaucoup de votes, et nous obtenons les résultats en une heure et demie. En deux heures, nous savons qui formera le gouvernement. Tous les députés savent s'ils ont été élus ou défaits.

Lors du référendum des Nisga'as, un peu plus de 2 000 personnes ont voté et il a fallu deux jours pour obtenir des résultats préliminaires. Ce n'était même pas les résultats définitifs.

Voici ce qui s'est produit. Le lundi après-midi, on nous a dit que l'accord avait été ratifié par 70 p. 100 des Nisga'as. Cela a fait les grands titres. Radio-Canada, CTV et tous les autres réseaux ont rapporté la nouvelle. Le lendemain, on nous a dit qu'il y avait eu erreur et que le chiffre exact était en fait de 51 p. 100. À mon avis, il y a toute une différence entre 70 et 51 p. 100.

Encore trois ou quatre jours plus tard, on faisait état d'une nouvelle erreur et on nous disait que le pourcentage final était de 61 p. 100. Ce devait être le résultat final.

On nous a donc donné trois chiffres différents comme résultat d'un référendum auquel avaient participé 2 000 personnes. Dans les circonstances, il est un peu difficile d'ajouter foi à ces résultats.

Cette affaire m'inquiétait. J'ai commencé à recevoir des appels de Nisga'as qui n'appuyaient pas le traité et qui voyaient des irrégularités dans ce référendum.

J'ai appelé au ministère des Affaires indiennes à Vancouver et j'ai demandé qui avait supervisé le scrutin. On m'a dit que le conseil tribal Nisga'a, soit les gens mêmes qui avaient négocié l'accord, était chargé du référendum. Si un député d'en face soutient que c'est une démarche équitable, qu'il aille défendre cette position publiquement. Les Canadiens ne croiraient pas cela un seul instant.

J'ai appris que le ministère n'avait, en fait, qu'un seul observateur, pour couvrir sept bureaux de scrutin, soit quatre dans la vallée de Nass, un à Prince Rupert, un à Vancouver et un à Terrace. Un seul observateur a couvert les sept bureaux de scrutin sur une période de deux jours. Personne ne me convaincra ni ne convaincra les Nisga'as qui n'appuient pas ce traité que c'était là une façon responsable de superviser ce référendum et de s'assurer que le résultat en était juste et exact.

 

. 1620 + -

Ces gens-là ont aussi allégué que des incitatifs financiers avaient été offerts. Encore là, ce sont des allégations que je n'ai pas pu vérifier de façon certaine, mais des Nisga'as de la vallée de Nass m'ont dit avoir été eux-mêmes témoins de cela.

J'ai aussi entendu dire que des mineurs avaient voté. Quelqu'un m'a même dit qu'une personne décédée avait voté. Je ne sais pas si c'est vrai. Je n'accuse personne de quoi que ce soit. Je dirai cependant qu'il n'y a pas eu d'intervenant indépendant comme Élections Canada, une tierce partie indépendante qui est chargée de surveiller le scrutin, de faire un bon recensement et de s'assurer que les personnes non recensées qui prétendent avoir le droit de voter aient vraiment l'occasion de défendre leur cause et de voter une fois leurs papiers d'identité vérifiés. Je n'ai rien contre la façon dont Élections Canada fait les choses et je ne crois pas que les Canadiens aient des réserves à ce sujet non plus. On aurait pu procéder de la même façon dans la vallée de la Nass pour les Nisga'as ou pour la bande de Norway House.

J'ai du mal à comprendre comment le gouvernement nisga'a peut dire que 61 p. 100 des membres ont appuyé ce traité dans le cadre d'un référendum alors qu'un peu plus de 2 000 personnes ont voté et que la bande compte plus de 5 000 membres. Je n'étais pas le meilleur en mathématiques à l'école, mais quand même. Je ne peux comprendre comment le Conseil tribal nisga'a et les libéraux, en fait, qui sont totalement en faveur de cela, pourraient nous faire croire que cela représente 61 p. 100 des Nisga'a.

Avant de poursuivre la discussion sur les bons points du projet de loi, et je ne dis pas qu'il n'y en a pas, nous devons savoir au juste l'appui qu'il obtient. Je crains que la plupart des fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes ne soient au courant de ces allégations, mais qu'ils ferment peut-être les yeux là-dessus parce qu'ils ont tout intérêt à ce que ces accords soient appuyés et approuvés. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'ils ont joué un rôle actif, mais il se peut qu'ils ferment les yeux sur des irrégularités, qu'ils minimisent leur importance et qu'ils fassent simplement le minimum pour que ces dispositions soient adoptées plutôt que de s'assurer qu'on fait la bonne chose.

Le gouvernement devrait nous montrer des preuves irréfutables qu'il s'agissait d'un référendum juste, ouvert et honnête, libre de toute influence ou collusion et qu'on n'a pas versé de pots-de-vin pour pouvoir dire à la Chambre que c'était la volonté de la majorité de la première nation de Norway House. Je prétends que le gouvernement ne peut pas faire cela. Le gouvernement ne peut en aucun cas venir au Parlement devant les Canadiens et dire qu'il s'agissait d'un référendum équitable, ouvert et honnête et qu'on n'a pris aucune mesure peu honorable ou répréhensible en quoi que ce soit. Tant qu'il ne pourra faire cela tout débat à la Chambre sera impossible.

Des gens de Norway House continuent de me dire qu'ils sont furieux. Ils considèrent qu'on les force à accepter cet accord de façon tout à fait antidémocratique, qu'on n'a pas suivi le processus voulu et qu'ils devront se plier à cet accord. Leurs enfants et eux-mêmes seront liés par cet accord et ils ne considèrent absolument pas que le référendum s'est déroulé de façon équitable.

Je mets au défi le gouvernement de nous présenter une preuve irréfutable, et je sais qu'il n'en a pas, montrant qu'il s'agissait d'un processus équitable, qu'il a été supervisé par Élections Canada ou une tierce partie indépendante, qu'il y avait là des observateurs, des scrutateurs centraux, qu'aucune influence indue n'a été exercée aux bureaux de vote par qui que ce soit et que le résultat reflète vraiment la volonté des gens de Norway House. On me dit que ce n'est pas le cas.

Je ne peux affirmer sans crainte de me tromper que les allégations sont justifiées. Ce que je peux dire, c'est qu'en l'absence d'un processus garantissant un résultat équitable, les libéraux d'en face font simplement du boniment s'ils essaient de dire au Parlement et aux Canadiens que cet accord avait l'appui des membres de la bande de Norway House. Je ne pense pas qu'ils aient des preuves solides pour appuyer cette affirmation.

 

. 1625 + -

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député cherche des «preuves irréfutables» qu'il n'y a pas eu de fraude. Nous avons entendu cela toute la journée. Nous l'avons entendu à propos de plusieurs projets de loi, notamment le C-49. Le député a mentionné le traité des Nisga'a. Je ne comprends pas. Chacun des députés, après avoir annoncé son appui au projet de loi C-56, passe 10 ou 20 minutes de son précieux temps de parole à verser du vinaigre et des cendres sur l'entente. J'aimerais bien savoir s'ils sont d'accord ou non.

Je voudrais mettre quelque chose au compte rendu pour l'édification du député. Avec tout le respect que je dois au député, j'aurais souhaité qu'il se documente un peu avant de prendre la parole sur ces questions et de suggérer qu'il y avait des choses incorrectes.

Le 25 novembre, la Section de première instance de la Cour fédérale rejetait une requête présentée par certains membres de la bande. Ils avaient le droit de présenter cette requête au sujet du deuxième vote sur l'accord avec la nation de Norway House. La cour a statué qu'il n'y avait rien d'inapproprié ou d'illégal dans la tenue de ce second référendum pour ratifier l'accord. La Cour fédérale s'est prononcée là-dessus. Les membres de la bande avait le droit de contester le vote comme ils l'ont fait.

Si le député avait lu la documentation et s'était renseigné, il n'aurait certainement pas fait les allégations et suggestions qu'il a faites à la Chambre. La question a déjà été devant les tribunaux et ceux-ci ont déterminé qu'il n'y avait rien eu d'inapproprié ou d'illégal.

M. Mike Scott: Monsieur le Président, mon collègue devrait vérifier sur quoi le tribunal s'est penché et s'est prononcé. La question était de savoir s'il était acceptable ou non de tenir un deuxième référendum. Tel était l'enjeu. Le tribunal n'a examiné aucune des allégations faites par des membres de la bande au sujet du processus ou du détournement du processus, tout simplement parce qu'il n'avait pas compétence pour le faire.

Était-il légal ou acceptable de tenir un deuxième référendum? Nous avons déjà vu des cas où des gouvernements n'acceptent pas le verdict populaire, et ces gouvernements, non seulement au Canada mais ailleurs également, continuent de poser la même question jusqu'à ce qu'ils obtiennent la réponse souhaitée. Est-ce illégal? Est-ce moral? Ce sont là deux questions différentes.

Si le secrétaire parlementaire vérifie les faits, il constatera que le tribunal s'est prononcé uniquement sur ce point. Il n'a pas examiné les allégations d'achat de vote ni les autres allégations concernant des irrégularités dans le processus référendaire.

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je demande à l'avance qu'on m'excuse si la question a déjà été abordée.

Mon collègue réformiste a dit que beaucoup d'allégations portaient sur le processus même du vote. A-t-il reçu confirmation écrite de ces allégations? Si oui, a-t-il fait parvenir ces allégations au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je répondrai affirmativement aux deux questions. J'ai reçu un nombre considérable de documents écrits et d'allégations émanant de membres de bandes et le tout a été transmis au ministère des Affaires indiennes et du Nord.

Une des préoccupations des gens qui vivent dans ces communautés, c'est que dès qu'ils se montrent le bout du nez ils se font canarder. Ils ont raison de s'inquiéter. Ils doivent vivre dans ces communautés. Ce sont de petites communautés et les gens auxquels ils s'opposent sont souvent des amis ou des parents.

Mon collègue comprendra assurément qu'à moins que les membres de bandes ne m'autorisent expressément à faire circuler les informations que je reçois, je ne peux pas les rendre publiques puisque j'estime de mon devoir d'en respecter la confidentialité.

 

. 1630 + -

Nous avons un dossier fort volumineux sur Norway House. Le ministère des Affaires indiennes est au courant de la situation, mais rien n'a encore été fait à ce sujet.

Mme Elinor Caplan (secrétaire parlementaire du ministre de la santé, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à exprimer mon appui au projet de loi à l'étude. J'espère que ce projet de loi sera non seulement adopté, mais adopté à l'unanimité. Nous nous sommes toujours efforcés de régler nos différends avec les autochtones. C'est une des injustices que le projet de loi devrait aider à redresser.

Nous devons agir en toute bonne foi, nous asseoir ensemble, négocier et aboutir à un accord qui bénéficie de nombreux appuis, même si nous savons que les accords négociés ne font jamais l'affaire de tous. Je comprends que le député d'en face veuille se faire le porte-parole des mécontents, mais je doute que ceux-ci ne soient jamais satisfaits quoi qu'on puisse leur proposer à la Chambre.

Le moment est venu pour nous de taire nos intérêts partisans. Le moment est venu pour le Canada d'aller de l'avant en traitant les autochtones avec le respect que leur témoigne ce règlement des revendications territoriales. Nous pourrons ensuite entrer fièrement dans une nouvelle ère de l'histoire du Canada. J'espère que le député appuiera cette initiative du gouvernement.

M. Mike Scott: Monsieur le Président, les libéraux n'arrêteront jamais de m'étonner. Nous nous faisons les porte-parole des gens de la base qui viennent nous demander notre aide, et le député de l'autre côté nous reproche d'être contre les autochtones ou de faire preuve de parti pris.

Ça n'a aucun rapport avec le débat qui nous préoccupe. Comment pouvons-nous avoir un débat éclairé à la Chambre quand les députés d'en face font ce genre de commentaires? Ça me dépasse.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement ce qu'a dit mon collègue de Skeena. Il a soulevé un point très important, celui de veiller à la tenue d'élections selon un processus démocratique et équitable.

Les Canadiens ont une tradition dont ils sont fiers, celle d'élire les députés à la Chambre des communes et aux assemblées législatives ainsi que les membres des conseils selon un processus démocratique. Nous allons également dans d'autres pays à travers le monde—y compris les nouvelles démocraties de l'Europe de l'Est et les pays du tiers monde—pour les aider à adopter le processus démocratique et pour essayer de garantir que le processus soit équitable. Or, nous constatons que le processus appliqué dans le cas des élections générales au Canada ne s'applique pas notamment aux scrutins tenus par la Commission canadienne du blé ou à la question des revendications territoriales à laquelle mon collègue a fait allusion.

Ne semble-t-il pas contradictoire d'aller donner des conseils aux pays du monde entier sur la façon de tenir des élections alors que nous ne sommes pas capables de tenir chez nous des élections selon un processus équitable?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, c'est une excellente question. Nous envoyons des observateurs un peu partout au monde, comme nous l'avons fait récemment pour les élections dans la région du Chiapas au Mexique. Toutefois, dans certains cas, il arrive que nous ne respections pas ces règles au sein de nos propres frontières. C'est tout à fait inadmissible.

J'ai été conseiller municipal. J'ai voté aux élections municipales. J'ai voté aux élections provinciales. J'ai bien sûr voté et participé aux élections fédérales, sans quoi je ne serais pas ici. Au cours de toutes les élections municipales, provinciales ou fédérales auxquelles j'ai participé, que ce soit à titre d'électeur, d'observateur ou de participant, je n'ai jamais entendu dire que quelqu'un ait contesté les résultats obtenus.

En 1993, dans une circonscription d'Edmonton, l'écart final n'était que de quatre ou cinq voix. Après un dépouillement judiciaire du scrutin, tous ont reconnu que la démocratie avait été respectée. Pourquoi la plupart des Canadiens peuvent-ils avoir confiance alors que, de l'avis des députés d'en face, ceux qui habitent dans les réserves ne sont pas régis par les mêmes normes? Je ne comprends pas. Les gens qui habitent dans ces réserves veulent être en mesure de compter, dans le cas de leur système électoral, sur le même sentiment de justice et de confiance que les autres Canadiens ont envers leur système.

 

. 1635 + -

Tant que cette situation persiste, l'autonomie gouvernementale sera encore loin. Nous devons nous assurer qu'il y a déjà la démocratie et la responsabilité financière.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

Le président suppléant (M. McClelland): Le projet de loi est donc renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

*  *  *

LA LOI SUR LES MESURES SPÉCIALES D'IMPORTATION

 

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur, dont un comité a fait rapport sans d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le président suppléant (M. McClelland): Avant d'aborder le débat, voici la décision du Président concernant le projet de loi C-35 et le regroupement des motions.

[Français]

Il y a sept motions d'amendement inscrites au Feuilleton des Avis en ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

[Traduction]

La motion no 1 sera débattue et mise aux voix séparément.

[Français]

La motion no 2 sera débattue et mise aux voix séparément.

[Traduction]

Les motions nos 3 à 6 seront regroupées pour les fins du débat, mais elles seront mises aux voix de la façon suivante: a) la motion no 3 sera mise aux voix séparément; b) si la motion no 4 est adoptée, il ne sera pas nécessaire de mettre les motions nos 5 et 6 aux voix; c) par contre, si la motion no 4 est rejetée, il faudra mettre aux voix les motions nos 5 et 6; d) les résultats du vote sur la motion no 5 s'appliqueront à la motion no 6.

[Français]

La motion no 7 sera débattue et mise aux voix séparément.

[Traduction]

Je mets donc la motion no 1 à l'étude.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je demande le consentement unanime de la Chambre afin que je puisse proposer les motions nos 1, 2, 4 à 6 et 7 au nom de mon collègue de Repentigny.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

 

. 1640 + -

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Stéphane Bergeron (au nom de M. Benoit Sauvageau) propose:  

    Motion no 1

    Que le projet de loi C-35, à l'article 15, soit modifié par adjonction, après la ligne 23, page 10, de ce qui suit:

    «(3.1) Afin de déterminer si le dossier est complet, le sous-ministre ne tient pas compte des observations qu'il a reçues des parties autres que le plaignant.»

—Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir, aujourd'hui, à la Chambre sur le projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur.

Comme le Bloc québécois a déjà eu l'occasion de l'indiquer précédemment, nous appuyons ce projet de loi. Par contre, puisque nous avons certaines réticences face à quelques aspects du projet de loi, nous présentons aujourd'hui à la Chambre des motions d'amendement visant à l'améliorer.

Ces motions découlent de l'étude de la Loi sur les mesures spéciales d'importation devant le Comité mixte des affaires étrangères, du commerce international et des finances.

Les interventions du Bloc québécois ont déjà permis d'apporter plusieurs changements importants et des améliorations notables lors de cette étude. Nous avons fait ajouter, par exemple, des mesures concrètes pour que les petits et moyens producteurs québécois et canadiens aient un accès juste et équitable aux recours prévus par la présente loi.

De même, nous avons apporté des modifications sous la rubrique de l'amélioration du mode de fonctionnement du Tribunal canadien du commerce extérieur.

Le Bloc québécois a également proposé que le cumul soit obligatoire lors de la détermination du dommage par le Tribunal. Également, la modification de l'article 76 de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, qui oblige le Tribunal canadien du commerce extérieur à évaluer les effets préjudiciables cumulatifs d'un dumping ou de l'octroi de subventions dans le cadre des réexamens provisoires, a été renforcée à la suite de nos interventions.

Je vous présente donc les motions qui représentent les points sur lesquels portent notre dissidence.

Il y a tout d'abord motion no 1, qui se lit ainsi:

    Que le projet de loi C-35, à l'article 15, soit modifié par adjonction, après la ligne 23, page 10 de ce qui suit:

    «(3.1) Afin de déterminer si le dossier est complet, le sous-ministre ne tient pas compte des observations qu'il a reçues de parties autres que le plaignant.»

Lors de l'étude en comité, plusieurs témoins ont soulevé quelques inquiétudes. Le Bloc québécois s'est joint aux préoccupations de ces témoins, notamment l'Association canadienne des producteurs d'acier, qui demandent que Revenu Canada ne tienne pas compte des présentations spontanées exposées par d'autres parties que la plaignante, avant le début d'une enquête.

En effet, une telle mesure ferait en sorte que Revenu Canada ne prendrait en compte que l'information de la partie plaignante et que, de ce fait, elle ne serait pas obligée de tenir compte d'observations non sollicitées. Cette mesure nous paraît raisonnable étant donné qu'elle ne s'appliquerait que pour la période précédant l'ouverture d'une enquête.

Malheureusement, le gouvernement ne semble pas se soucier de nos demandes ou de celles d'une industrie aussi importante pour l'économie québécoise et canadienne que celle de l'acier. Il a donc rejeté cette proposition qui n'apparaît pas dans le libellé de l'actuel projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous proposons la motion no 1.

Le président suppléant (M. McClelland): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable députée de Churchill, Les affaires autochtones.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat du projet de loi C-35, à l'étape du rapport. Le projet de loi concerne la Loi sur les mesures spéciales d'importation et, essentiellement, les droits compensateurs et antidumping.

Dans un monde parfait, nous n'aurions pas besoin de mesures semblables, mais on sait que la perfection n'est pas de ce monde. C'est pourquoi nous devons pouvoir compter sur des lois de ce genre.

L'Accord de libre-échange Canada-États-Unis et son aboutissement, l'Accord de libre-échange nord-américain, ont amené l'intégration de nombreuses industries. Le pacte de l'automobile a été l'un des précurseurs de l'Accord de libre-échange, mais il y a eu d'autres ententes semblables par la suite. L'industrie de la sidérurgie a atteint un niveau d'intégration poussé en Amérique du Nord. Je pense également à l'industrie bovine, qui donne lieu à des échanges bilatéraux.

 

. 1645 + -

Le dumping, dans le vrai sens du terme, est absent d'une bonne partie de nos industries. Chaque jour, des camions chargés de produits traversent la frontière vers le Canada. Il y a cependant des pays qui pratiquent le dumping à l'endroit du Canada. Ce sont, dans certains cas, des navires chargés d'acier et autres produits.

Je crois que nous devons avoir une loi de ce genre. La protection de l'intérêt public dans le projet de loi C-35 fait maintenant l'objet d'une reconnaissance plus poussée. J'en suis heureux.

Je crois que nous devons prendre en considération l'intérêt public tout particulièrement lorsque l'industrie canadienne se retrouve temporairement en situation de pénurie parce que les fournisseurs canadiens ne peuvent assurer les approvisionnements; les importateurs canadiens doivent alors pouvoir acheter à court terme pour combler leurs besoins.

En ce qui concerne la partie relative à l'intérêt public, je crois que nous devons prendre en considération le fait que lorsque les producteurs canadiens sont inefficaces et ne parviennent pas à approvisionner le marché, le dumping ne pose peut-être pas un si grand problème, puisque les consommateurs canadiens peuvent en bénéficier grandement.

Je voudrais cependant parler plus particulièrement de la motion no 1 dont nous sommes saisis aujourd'hui. Lorsqu'une industrie ou une entreprise canadienne estime avoir subi un préjudice à cause du dumping, la première étape du processus consiste à porter plainte. Si les plaignants peuvent documenter leurs plaintes et en démontrer le bien-fondé, un processus se met en branle afin d'établir s'il y a eu préjudice et si des droits compensateurs doivent être appliqués pour mettre un terme aux pratiques de dumping. À la fin de ce processus, des audiences sur l'intérêt public peuvent avoir lieu, au besoin.

Ce qu'on tente de faire valoir aujourd'hui, c'est que seul le plaignant devrait fournir la documentation pertinente et que le ministère compétent se prononcerait sur la valeur de la documentation. Aucun tiers ne pourrait intervenir dans ce processus. Le Parti réformiste appuie la motion présentée par le Bloc afin de remédier à cette situation.

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je parle au nom de notre porte-parole en matière de commerce international, le député de Winnipeg—Transcona, sur le projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur. Malheureusement, mon collègue est malade. Il m'a donc chargé de prendre la parole à sa place. C'est tout un honneur pour moi.

Au sujet de la motion no 1, je veux faire savoir à la Chambre que nous appuyons la motion du Bloc. Je veux aussi faire connaître la position du Nouveau Parti démocratique sur ce projet de loi.

Nous nous sommes prononcés contre le projet de loi à la deuxième lecture, le 25 septembre, parce que, à notre avis, il risque d'affaiblir notre système antidumping, surtout face à notre principal partenaire commercial, les États-Unis, le meilleur exemple étant celui de la disposition sur la réduction des droits de douane.

Le Canada a maintes fois tenté sa chance avec les mesures de libéralisation des échanges commerciaux, et pas sans en souffrir les conséquences. Pensons au soutien de nos agriculteurs, à la FDA, à l'ALENA et à l'Organisation mondiale du commerce. Nous croyons que ce ne n'est pas le moment de courir des risques encore une fois.

Récemment, nous avons entendu dans les médias des préoccupations au sujet de l'agriculture. On se demandait pourquoi il était si difficile de soutenir nos agriculteurs en leur offrant les subventions nécessaires en raison des droits compensateurs qui pourraient être imposés par les États-Unis ou par tout autre pays du monde avec qui nous faisons du commerce. Je trouve cela navrant, et je suis sûr que c'est pareil pour les agriculteurs de notre pays de savoir que leur gouvernement hésite à les aider en raison de la réaction possible des autres pays.

Je suis convaincu que c'est la dernière chose à laquelle pensent les agriculteurs qui voient dans leurs champs les bêtes qu'ils ont dû abattre parce qu'ils n'ont plus les moyens de les nourrir ou qui voient les céréales et les semences pourrir parce qu'il n'y a pas de lieux pour les entreposer. Beaucoup d'agriculteurs renoncent à l'agriculture comme beaucoup de pêcheurs ont renoncé à la pêche.

Notre parti s'est opposé à l'AMI, qui, à notre avis, est une version élargie de l'ALENA. Certains pays européens ont récemment refusé de poursuivre les négociations sur cet accord. Malheureusement, les négociations de l'AMI ne sont en ce moment que dans une impasse. Dans notre parti, nous aimerions pouvoir sonner le glas de cet AMI une fois pour toutes parce qu'il a été modelé sur l'ALENA. Les pays européens se demandent ouvertement qui pourrait bien être assez bête pour signer l'ALENA. Le Canada lève la main et dit: «nous». Les Européens ont trouvé de nombreux défauts à cet accord. Nous, du Nouveau parti démocratique, et tous nos partenaires canadiens avons nous aussi trouvé beaucoup de défauts à cet accord.

 

. 1650 + -

Nous nous opposons au projet de loi, mais nous appuyons l'amendement proposé par le Bloc québécois.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): J'ai un petit sourire, monsieur le Président, parce que mon collègue néo-démocrate—la procédure parlementaire est un petit peu bizarre—appuie la motion présentée par le Bloc québécois, mais il est contre le projet de loi. C'est peut-être un aspect de la philosophie néo-démocrate que j'ai encore de la difficulté à comprendre.

Pour nous, c'est clair, nous appuyons le projet de loi C-35. Je ne veux pas faire un long discours sur ce projet de loi. Nous sommes d'accord avec toute mesure qui fera en sorte d'améliorer certaines protections qui sont avantageuses pour nos industries canadiennes.

Présentement, nous étudions la motion no 1. Il s'agit de questions relatives au pouvoir d'enquête. Lorsqu'il y a une plainte, il s'agit de déterminer si on a le pouvoir de partager ou non l'information reçue pour aller vérifier si la plainte est valable ou pas.

Le danger, c'est que lorsqu'on va vérifier, et c'est ce que soutenait le Bloc québécois en comité, on peut avertir les concurrents, un peu partout au pays ou ailleurs dans le monde. Lors des travaux en comité, le Bloc québécois a essayé à plusieurs reprises de faire accepter cette recommandation.

Nous, nous avons encore des questions. Dans les différentes lois et règlements qui traitent du tribunal antidumping, on retrouve quand même à deux endroits certaines mesures de protection pour assurer que la plainte ne soit pas discutée trop ouvertement.

On a beaucoup de réserves à ce sujet. En lisant les rapports, je sais que le député de Repentigny avait accepté l'article 15, avec dissidence cependant à propos de cette recommandation. Je ne suis pas certain que cela servira le projet de loi C-35 que de faire la modification. On enlèverait peut-être un élément supplémentaire au tribunal et au gouvernement pour aller plus loin dans une enquête. Encore là, le plaignant serait protégé en vertu de deux articles que l'on retrouve dans le projet de loi.

Je vais éventuellement communiquer avec mon collègue de Repentigny. Nous avons essayé de le faire aujourd'hui mais, malheureusement, lui aussi est très occupé. Pour l'instant, nous serons contre la motion no 1.

[Traduction]

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, moi aussi, j'aimerais commenter la motion no 1.

L'OMC exige que les pays évitent de rendre publiques les plaintes qu'ils reçoivent tant qu'une enquête n'a pas été entreprise. En fait, c'est ce que fait l'industrie canadienne; elle ne rend pas ses plaintes publiques. On peut ainsi éviter l'intervention d'une tierce partie. Dans la pratique, c'est l'industrie qui, dans un sens, décide si des tierces parties interviendront.

Ceci dit, conformément à ses obligations dans le cadre de l'OMC relativement aux mesures antidumping et aux subventions, Revenu Canada tient compte des observations des tierces parties. Avant de faire enquête, le ministère doit vérifier l'exactitude et la pertinence des renseignements contenus dans la plainte. Ce processus peut donc, à certains égards, être à l'avantage du plaignant puisqu'il peut rectifier les erreurs qu'il a faites dans la plainte qu'il a présentée.

Le ministère ne demande pas aux tierces parties de faire des observations tant que l'enquête n'a pas commencé.

 

. 1655 + -

Pour les raisons que je viens d'énoncer, le gouvernement n'appuie pas la motion no 1. Les autres partis ont dit qu'ils l'appuyaient. Pour les raisons que je viens d'énoncer, c'est une chose qui ne se produit généralement pas du fait du processus qu'il faut respecter.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:  

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion no 1 est reporté.

Nous passons maintenant à la motion no 2.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (au nom de M. Benoît Sauvageau) propose:  

    Motion no 2

    Que le projet de loi C-35 soit modifié par suppression de l'article 27.

—Monsieur le Président, le Bloc québécois estime que le «droit moindre» ne doit pas être inclus dans le projet de loi C-35.

En effet, nous croyons qu'il est prématuré d'aller de l'avant avec la mise en place, à l'intérieur de la Loi sur les mesures spéciales d'importation, du concept de droit moindre.

Nous croyons que le gouvernement doit cesser d'adopter des politiques qui diluent la protection des entreprises québécoises et canadiennes, lorsque nos principaux partenaires économiques n'agissent pas dans le même sens.

Dans le rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, il est recommandé que le concept du droit moindre soit incorporé dans les dispositions de l'article 45 de la Loi concernant l'intérêt public. D'un autre côté, l'article 27 du projet de loi incorpore le concept du droit moindre en modifiant l'article 45 de la présente loi.

Ainsi, le Tribunal canadien du commerce extérieur peut, de sa propre initiative ou sur demande, ouvrir une enquête d'intérêt public, s'il est d'avis que l'assujettissement des marchandises en cause à des droits antidumping ou compensateurs, ou au plein montant des droits prévus à ces articles, serait ou pourrait être contraire à l'intérêt public.

À l'issue de l'enquête, s'il est d'avis que l'assujettissement des marchandises en cause pourrait être contraire à l'intérêt public, le Tribunal doit effectuer deux tâches, et ce, sans délai. Il doit, premièrement, transmettre au ministre des Finances un rapport énonçant que tel est son avis, de même que les motifs de sa décision et, deuxièmement, faire publier un avis dans La Gazette du Canada.

Mais encore, toujours dans le rapport, le Tribunal indique soit le niveau de réduction des droits antidumping ou compensateurs prévus, soit un prix de nature à empêcher un dommage, un retard ou une menace de dommage à la branche de production nationale concernée. C'est par le biais de cette dernière mesure que l'on introduit le concept du droit moindre.

C'est pourquoi nous présentons la motion no 2 pour que l'article 27, qui introduit cette notion de droit moindre, soit supprimé.

 

. 1700 + -

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à dire, d'entrée de jeu, que le Parti réformiste s'oppose à cette motion, en partie parce qu'il est question, dans la disposition visée, de la notion d'intérêt public si importante dans la Loi sur les mesures spéciales d'importation.

Le groupe spécial doit actuellement se prononcer sur des cas où l'intérêt public n'aurait peut-être pas été servi par des droits appliqués à de la nourriture pour bébé qui aurait, dit-on, fait l'objet de dumping au Canada. Ces droits ont essentiellement eu pour effet de conférer un monopole à un fournisseur de nourriture pour bébé. Nous estimons important qu'il y ait de la concurrence. De ce fait, nous pensons qu'il faut maintenir la disposition sur l'intérêt public et la partie de cette disposition qui concerne la notion de droit moindre, afin de garantir une concurrence.

Puisqu'il est question de droit moindre, pourquoi voudrions-nous un droit supérieur à celui qui est nécessaire pour empêcher le dumping de produits?

Je crois savoir que, dans certains cas, des droits allant jusqu'à 40 p. 100 sont appliqués, alors que des droits de 5 p. 100 suffiraient à empêcher l'importation d'un produit. C'est pourquoi nous pensons que la notion de droit moindre est une amélioration et nous aimerions que la partie du projet de loi concernant l'intérêt public soit examinée après quelques années, afin qu'on sache si elle sert les intérêts des consommateurs canadiens autant qu'elle le devrait.

Un comité mixte formé de représentants des Finances, des Affaires étrangères et du Commerce international a examiné le projet de loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation. Ils ont entendu les témoignages d'un certain nombre d'entreprises qui voulaient un droit moindre. Cette modification a été proposée pour tenir compte de leur demande.

Même si dans l'ensemble, nous appuyons le projet de loi C-35 et que nous reconnaissons le besoin de certaines règles concernant les droits antidumping et compensateurs, dans ce cas, l'aspect de l'intérêt public est une composante très importante que nous ne voulons pas voir disparaître. Aussi, nous n'appuierons pas la motion no 2.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme le député l'a mentionné, la prise en considération de l'intérêt public constituait une question clé dans l'examen parlementaire de la loi.

L'article 27 donne essentiellement effet aux recommandations du sous-comité parlementaire que le député a mentionnées. Il leur donne effet, en un sens, pour clarifier et améliorer les dispositions que renferme actuellement la loi en ce qui concerne l'intérêt public.

À cet égard, l'article 27 constitue vraiment une composante clé du projet de loi. Il fait partie intégrante de l'équilibre visé par le sous-comité. Le projet de loi établit cet équilibre.

Qui plus est, parmi les industries canadiennes qui demandent à être protégées aux termes de cette loi et, certes, d'autres intéressés du Canada qui risquent être touchés par l'application de droits, on trouve des organismes comme les producteurs d'acier ou, en aval, les fabricants de pièces d'automobile également.

Le gouvernement désire vraiment faire en sorte que les intérêts de ceux qui risquent d'être sérieusement touchés par l'application de droits aux termes de la loi soient bien pris en considération dans notre système de recours commerciaux.

L'hon. Jim Peterson: C'est une excellente idée.

M. Tony Valeri: Je suis plutôt d'accord. Je remercie donc le député de cette intervention.

Je suis sûr qu'il s'agit ici de l'un des rares cas où nous sommes d'accord sur les propos précédents du député selon lesquels l'intérêt public constitue une composante clé. Nous ne voudrions certes pas en sous-estimer l'importance.

À mon avis, en appuyant l'article qui figure dans le projet de loi, nous atteignons cet équilibre. Il est très important de répéter encore une fois que l'équilibre est atteint entre les industries et les intéressés. Cette disposition améliore grandement la loi et nous sommes impatients de l'appuyer au moment du vote à la Chambre.

 

. 1705 + -

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): La mise aux voix porte sur la motion no 2. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:  

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion no 2 est différé.

L'hon. Jim Peterson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Je veux simplement vous féliciter des efforts que vous avez faits, des progrès que vous avez accomplis en langue française. Vous êtes vraiment un exemple, non seulement pour les députés de ce Parlement, mais pour tous les Canadiens et Canadiennes.

Des voix: Bravo!

Le président suppléant (M. McClelland): Vous êtes très gentil. Je remercie tous les députés.

[Traduction]

Motion no 3

L'hon. Lloyd Axworthy (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose:  

    Motion no 3

    Que le projet de loi C-35, à l'article 44, soit modifié par substitution, dans la version française, à la ligne 38, page 33, de ce qui suit:

      «important à l'entreprise ou aux activités de la»

[Français]

M. Stéphane Bergeron (au nom de M. Benoît Sauvageau) propose:  

    Motion no 4

    Que le projet de loi C-35, à l'article 44, soit modifié par adjonction, après la ligne 41, page 33, de ce qui suit:

    «(3.2) Pour l'application du paragraphe (3.1), «dommage sensible» s'entend d'un dommage qui est plus que négligeable et qui n'est pas sans conséquence ou sans importance.»

    Motion no 5

    Que le projet de loi C-35, à l'article 44, soit modifié par adjonction, après la ligne 41, page 33, de ce qui suit:

    «(3.2) Pour l'application du paragraphe (3.1), «dommage sensible» s'entend au sens des règlements.»

    Motion no 6

    Que le projet de loi C-35, à l'article 51, soit modifié par adjonction, après la ligne 19, page 36, de ce qui suit:

      «(f.3) définir pour l'application de l'article 44 le terme «dommage sensible»;»

—Monsieur le Président, je joins ma voix à celle du secrétaire d'État pour vous adresser mes plus sincères félicitations. Je trouvais qu'il était des plus pertinents de vous permettre de continuer, puisque l'apprentissage d'une langue vient par la pratique, et d'autre part, je dois vous dire que de vous entendre parler français, ici, à la Chambre des communes, sonnait comme musique à mes oreilles.

Les motions nos 4, 5 et 6 concernent la notion de dommage sensible. La définition de dommage sensible, de notre point de vue, pose également problème.

 

. 1710 + -

Le Bloc québécois demande l'insertion d'une définition de l'expression «dommage sensible» dans la Loi sur les mesures spéciales d'importation. Une telle précision, jumelée avec les critères suggérés dans la réglementation actuelle, clarifierait pour toutes et tous ce concept important.

Pour le bénéfice de tous nos collègues à la Chambre, je voudrais reprendre la lecture des différentes motions.

    Motion no 4

    Que le projet de loi C-35, à l'article 44, soit modifié par adjonction, après la ligne 41, page 33, de ce qui suit:

    «(3.2) Pour l'application du paragraphe (3.1), «dommage sensible» s'entend d'un dommage qui est plus que négligeable et qui n'est pas sans conséquence ou sans importance.»

    Motion no 5

    Que le projet de loi C-35, à l'article 44, soit modifié par adjonction, après la ligne 41, page 33, de ce qui suit:

    «(3.2) Pour l'application du paragraphe (3.1), «dommage sensible» s'entend au sens des règlements.»

    Motion no 6

    Que le projet de loi C-35, à l'article 51, soit modifié par adjonction, après la ligne 19, page 36, de ce qui suit:

      «f.3) définir pour l'application de l'article 44 le terme «dommage sensible»;»

Ainsi, la loi ne laisserait pas de zone d'incertitude pour les entreprises québécoises et canadiennes. Ces motions sont très importantes, car cette loi est censée améliorer le système canadien des recours commerciaux, de façon à ce qu'il puisse davantage tenir compte du nouveau contexte économique et de l'évolution des règles du commerce international, et non pas de brouiller les cartes.

Cette motion est d'ailleurs beaucoup plus constructive que celle de notre honorable collègue de LaSalle—Émard qui, par la substitution du terme «dommage sensible» par «dommage important» ne fait que rendre plus nébuleuse encore la portée de ce concept.

Voilà pourquoi nous avons présenté ces trois motions et nous espérons obtenir l'appui enthousiaste des députés de cette Chambre.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, nous appuyons la motion no 3. Je comprends que cela fait correspondre le texte français au texte anglais.

Toutefois, le problème que pose la motion no 4 est plus difficile. Quoique je sympathise certes avec mon collègue du Bloc, car l'expression «dommage sensible» en français ne rend pas «material harm» en anglais et doit donc être clarifiée, l'expression anglaise a un sens très précis dans la loi. C'est un article autonome qui n'a pas besoin d'être défini plus amplement. Il est donc presque ridicule de dire en anglais que «dommage sensible» s'entend d'un dommage qui est plus que négligeable et qui n'est pas sans conséquence ou sans importance.

S'il y avait moyen de résoudre cela, je n'aurais pas de problème. Sinon, nous n'appuierons pas les motions nos 4, 5 et 6.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, en ce qui nous concerne, il n'y a aucun problème pour ce qui est de la motion no 3. En ce qui concerne l'expression «dommage sensible», il y a selon nous une incohérence qui pourrait créer beaucoup plus de dommages que ce qui existait auparavant.

Ce que j'ai essayé de faire, c'est de vérifier dans les notes antérieures du comité pour trouver un peu plus d'arguments à faire valoir à la Chambre. Malheureusement, je n'en ai pas trouvé. Est-ce que c'est simplement une question de langue? J'espère que non, mais il semble cependant que oui.

Nous allons donc nous opposer à la motion no 4 et, automatiquement, à la motion no 7.

[Traduction]

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la motion no 3 est essentiellement un amendement de forme concernant la traduction. À ce propos, c'est le Bloc qui a proposé que l'expression «dommage sensible» comme équivalent français de «material harm, à l'article 44, soit remplacée par une notion différente.

 

. 1715 + -

C'est essentiellement ce que fait la motion no 3 et je me réjouis de constater que cela obtient l'appui des députés d'en face.

En ce qui concerne la motion no 4, je conviendrai avec mes collègues d'en face, à l'exception de l'auteur de la motion, que la définition de «dommage sensible» dans le cas de la divulgation de renseignements confidentiels suppose vraiment une évaluation qualitative dans chaque cas. En fait, la motion telle qu'elle est rédigée crée à bien des égards une plus grande incertitude et ne clarifie pas vraiment l'expression elle-même. En fait, cette motion remplace un adjectif par trois autres et ne clarifie rien.

Je crois que le gouvernement appuie la motion no 3, mais pas les motions nos 4, 5 et 6.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai terminé mon allocution en faisant référence à la motion présentée par notre collègue de LaSalle—Émard, mais je n'ai pas élaboré sur la question.

Avec le consentement des collègues, peut-être pourrais-je dire quelques mots additionnels sur la motion précise de notre collègue, le ministre des Finances.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je veux d'abord remercier tous les collègues qui m'ont permis de poursuivre un petit peu ma présentation portant plus spécifiquement sur la motion no 3 présentée par notre collègue de LaSalle—Émard.

L'amendement qui est proposé m'apparaît pour le moins nébuleux. La notion de «dommage sensible», qu'il remplace par celle de «dommage important», n'ajoute rien de véritablement constructif au concept de dommage lui-même. On ne définit pas cette nouvelle notion et on ne connaît pas non plus sa portée. Nous souhaiterions, en ce sens, peut-être un peu plus d'explications de la part du collègue de LaSalle-Émard.

Je suggère également, advenant le cas où notre motion serait défaite, que ce gouvernement définisse le concept de «dommage important» par règlement, afin d'éliminer toute confusion à ce sujet.

Par le passé, un cas portant sur le dommage sensible, aux États-Unis, a entraîné une condamnation, tandis qu'un cas similaire a été jugé différemment au Canada. De fait, il n'y a même pas eu de condamnation. C'est pourquoi nous exigeons une clarification de cette définition pour ne pas se retrouver devant une politique de deux poids, deux mesures.

Je remercie tous les collègues de cette Chambre de m'avoir permis d'ajouter ces quelques précisions sur la motion no 3.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:  

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion no 3 est reporté.

[Français]

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 4. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:  

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion no 4 est différé.

M. Stéphane Bergeron (au nom de M. Benoît Sauvageau) propose:  

    Motion no 7

    Que le projet de loi C-35 soit modifié par adjonction, après la ligne 43, page 36, du nouvel article suivant:

    «51.1 La même loi est modifiée par adjonction, après l'article 97, de ce qui suit:

    98. (1) Dans les trois mois suivant l'entrée en vigueur du présent article, le gouverneur en conseil prend les règlements nécessaires afin de modifier les articles de la présente loi afin que soit utilisée une méthode rétroactive d'imposition des droits en plus d'une méthode prospective d'imposition des droits. La méthode rétroactive d'imposition des droits ne peut toutefois être utilisée que dans les cas où à la fois

      a) les prix ou les coûts des marchandises risquent de fluctuer de façon appréciable;

      b) les règlements les permettent.

    (2) Sous réserve du paragraphe (2), un règlement pris en vertu du paragraphe (1) entre en vigueur six mois après l'entrée en vigueur du présent article.

    (3) L'entrée en vigueur de tout règlement abrogeant un règlement pris par le gouverneur en conseil en vertu du paragraphe (1) est assujetti à l'approbation de la Chambre des communes par résolution. Le cas échéant, ce règlement entre en vigueur le jour suivant cette approbation.»

 

. 1720 + -

—Monsieur le Président, une autre suggestion du Bloc québécois ignorée dans ce projet de loi concerne la méthode prospective ou rétroactive d'imposition des droits.

Nous souhaitons que Revenu Canada continue d'utiliser la méthode prospective d'imposition des droits. Cependant, nous souhaiterions que dans les cas où les prix ou les coûts risquent de fluctuer de façon appréciable, Revenu Canada soit autorisé à utiliser la méthode rétroactive d'imposition des droits.

L'utilisation de cette méthode se ferait de manière exceptionnelle et seulement lorsque Revenu Canada le jugerait nécessaire. C'est pour cette raison que nous proposons la motion no 7 à la Chambre, aujourd'hui, qui se lit comme suit:

    Que le projet de loi C-35 soit modifié par adjonction, après la ligne 43, page 36, du nouvel article suivant:

    «51.1 La même loi est modifiée par adjonction, après l'article 97, de ce qui suit:

    98.(1) Dans les trois mois suivant l'entrée en vigueur du présent article, le gouverneur en conseil prend les règlements nécessaires afin de modifier les articles de la présente loi afin que soit utilisée une méthode rétroactive d'imposition des droits en plus d'une méthode prospective d'imposition des droits. La méthode rétroactive d'imposition des droits ne peut toutefois être utilisée que dans les cas où à la fois

      a) les prix ou les coûts des marchandises risquent de fluctuer de façon appréciable;

      b) les règlements les permettent.

    (2) Sous réserve du paragraphe (2), un règlement pris en vertu du paragraphe (1) entre en vigueur six mois après l'entrée en vigueur du présent article.

    (3) L'entrée en vigueur de tout règlement abrogeant un règlement pris par le gouverneur en conseil en vertu du paragraphe (1) est assujetti à l'approbation de la Chambre des communes par résolution. Le cas échéant, ce règlement entre en vigueur le jour suivant cette approbation.»

Ce verbiage législatif peut paraître un petit peu technique. Toutefois, ce projet de loi est extrêmement important, puisqu'il régit l'application des droits antidumping et des droits compensateurs aux importations de produits faisant l'objet d'un dumping ou de l'octroi de subventions qui causent un préjudice aux producteurs québécois et canadiens, tout en modifiant le TCCE, le Tribunal canadien sur le commerce extérieur.

Nous appuyons l'esprit de ce projet de loi, puisqu'il s'agit d'un premier effort de clarification de la part du gouvernement. Il y a longtemps que la population québécoise et canadienne, par la voix du Bloc québécois, réclame moins de bureaucratie et plus d'efficacité.

Le gouvernement se doit d'outiller la société québécoise et canadienne des affaires de façon adéquate, de telle sorte qu'elle puisse affronter la concurrence mondiale. Le dumping et les subventions sont des mesures condamnées par les pays industrialisés, bien qu'il soit fréquent qu'ils les pratiquent.

La présente loi et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur sont des instruments nécessaires et même indispensables pour que nous puissions faire face à ces deux type de mesures.

Il est important que ces deux législations soient construites de manière à pouvoir répondre de façon satisfaisante aux fins pour lesquelles elles ont été adoptées. Cette révision a permis de déterminer les améliorations qui devaient être apportées à ces lois, mais certains éléments manquent encore, ceux qui ont été suggérés aujourd'hui par le Bloc québécois.

Par contre, nous sommes d'avis que l'évolution rapide du commerce international devrait faire prendre conscience qu'une révision périodique de ces deux lois sera nécessaire à l'avenir.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, la motion no 7 inscrirait un tout nouveau principe dans la LMSI. La motion traite de rétroactivité et c'est ce qui motive notre opposition catégorique. Je ne comprends pas comment cette disposition s'appliquerait. Cela créera beaucoup de confusion pour les entreprises qui devront connaître les règles de base qui les régissent. Nous allons donc nous prononcer contre cette motion.

 

. 1725 + -

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, nous allons appuyer cette modification.

C'est quelque chose qui se fait de temps à autre, de manière exceptionnelle, au niveau de Revenu Canada. On pense qu'effectivement, cela pourrait être appliqué. Malgré la difficulté d'application, cela enverrait le signal que le gouvernement canadien, par ses lois et ses règlements, peut appliquer une mesure de façon rétrospective.

Nous sommes heureux, même si le Comité soulignait, à la recommandation 10, de ne rien changer quant au fait de garder les mesures rétrospectives. Nous pensons que c'est un pas dans la bonne direction. C'est aussi un message qu'on envoie.

Encore une fois, on n'invente pas le bouton à quatre trous. Cela se fait rarement, mais cela se fait à Revenu Canada. Nous allons donc appuyer la motion no 7.

[Traduction]

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, le Nouveau Parti démocratique compte appuyer la motion no 7, qui autoriserait Revenu Canada à utiliser une méthode rétroactive pour imposer des droits lorsqu'il y aurait une fluctuation suffisante des prix ou des coûts. Dans ce cas, Revenu Canada pourrait exiger un dépôt en argent pour les marchandises entrant au pays, le montant final devant être déterminé au moment de la révision. Voici pourquoi. Cette méthode est utilisée aux États-Unis dans tous les cas, ce qui leur confère un régime plus rigoureux en matière d'antidumping. Il n'est pas déraisonnable de conférer à Revenu Canada des pouvoirs comparables à exercer dans les circonstances appropriées.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à déclarer clairement que cette question a été étudiée avec soin et rejetée par les sous-comités parlementaires.

L'adoption de pareil système hybride aurait, notamment, pour effet d'altérer l'équilibre fondamental que ce projet de loi a établi entre les intérêts des intervenants. Il compliquerait inutilement l'administration du système canadien de recours commerciaux. Le gouvernement n'appuierait pas une telle motion.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote porte sur la motion no 7. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:  

Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion no 7 est reporté.

La Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur le projet de loi à l'étape du rapport. Convoquez les députés.

[Français]

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour reporter les votes par appel nominal demandés à l'étape du rapport du projet de loi C-35 à la fin de la période prévue pour les affaires émanant du gouvernement, le mardi 1er décembre 1998.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.  

Le président suppléant (M. McClelland): En conséquence, les votes par appel nominal sur les motions de deuxième lecture du projet de loi C-35 sont reportés au mardi 1er décembre 1998.

Comme il est 15 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI SUR LE CHOIX DES SÉNATEURS

 

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.) propose: Que le projet de loi C-382, Loi visant à permettre aux électeurs d'une province d'exprimer leur avis sur le choix des personnes qui devraient être mandées au Sénat pour représenter la province, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Monsieur le Président, j'espérais que la Chambre soit saisie du projet de loi le mois dernier avant l'élection sénatoriale en Alberta. Je l'ai fait inscrire au Feuilleton à l'époque en ma qualité de porte-parole de l'opposition pour les questions concernant le Sénat. La Chambre n'a malheureusement pas pu en discuter avant cette élection. La question en reste donc à l'état où elle se trouvait avant l'élection en Alberta.

 

. 1730 + -

Je suis heureux de présenter aujourd'hui à la Chambre le projet de loi C-382 qui cherche à apporter une réforme démocratique à la Chambre haute du Parlement, c'est-à-dire le Sénat.

Mon projet de loi a pour objet que, lorsqu'une province a adopté une loi pourvoyant à l'expression par les électeurs de leur avis sur le choix de la personne qui devrait être mandée au Sénat pour y remplir une vacance, il ne sera pas fait de nomination au Sénat pour remplir la vacance, à moins que les électeurs n'aient exprimé leur opinion et que les résultats n'aient été transmis au Conseil privé ou qu'il se soit écoulé plus d'un an depuis la publication de l'avis de la vacance dans la Gazette du Canada. Pour résumer tout ce jargon juridique, mon projet de loi permet de substituer des sénateurs élus aux sénateurs nommés. En vertu du système actuel, les sénateurs sont en effet nommés.

Cela peut se faire sans changement constitutionnel. Le gouvernement a soutenu à maintes et maintes reprises que cela ne peut pas se faire, qu'il faut pour cela modifier la Constitution. La mesure que je propose concernant l'élection des sénateurs n'exige aucune modification à la Constitution actuelle.

Cela a été démontré en Alberta en 1989 lorsque Stan Waters a été élu et nommé au Sénat par le premier ministre à l'époque, Brian Mulroney. Je tiens à dire bien clairement à la Chambre et à ceux qui suivent nos débats à la télévision que cette mesure n'exige aucune modification à la Constitution. La confusion survient quand nous voulons changer le nombre des sénateurs représentant les diverses provinces. Il faut pour cela modifier la Constitution. Mais il n'est pas nécessaire de la modifier pour élire les sénateurs.

Le premier ministre serait simplement tenu de respecter les voeux exprimés par les électeurs d'une province dotée d'une loi sur le choix des sénateurs. Deux provinces jusqu'à présent se sont dotées d'une loi sur le choix des sénateurs, l'Alberta et la Colombie-Britannique. L'Alberta a décidé de se servir de sa loi à deux reprises.

Notre premier sénateur, Stan Waters, a été nommé au Sénat sans changement constitutionnel. En 1989, des centaines de milliers d'Albertains ont élu le premier sénateur démocratiquement choisi de l'histoire du Canada. C'était une première qui démontrait à quel point il est facile d'apporter des changements démocratiques sans modifier la Constitution.

Mon projet de loi est important. L'élection des sénateurs fait l'objet d'un débat depuis que la Chambre des communes existe. La question a été débattue à maintes reprises, est passée dans l'ombre puis a resurgie. Il faut la régler, car au coeur de ce débat, il y a le fait que les Canadiens ne veulent pas d'un gouvernement par nominations. Ils veulent avoir voix au chapitre. Un Sénat créé selon la façon de penser du siècle dernier ne peut plus fonctionner. Le monde évolue, mais le Canada tire de l'arrière. Il est temps de rattraper le monde moderne.

À l'origine, le Sénat devait représenter les régions. Un sénateur de la Colombie-Britannique devait représenter la Colombie-Britannique. Un sénateur de l'Ontario devait représenter l'Ontario. Un sénateur du Québec devait représenter le Québec. Cependant, dans l'état actuel des choses, le Sénat ne représente guère plus que le parti au pouvoir. Il est crucial de retirer au premier ministre le pouvoir de faire des nominations par favoritisme pour laisser le peuple choisir ses sénateurs. C'est l'objectif de mon projet de loi.

Le mois dernier, les Canadiens ont assisté à une élection sénatoriale en Alberta. Il y a maintenant deux sénateurs en attente. Les résultats définitifs de l'élection du 19 octobre sont les suivants: Bert Brown a obtenu environ 332 000 voix; Ted Morton, environ 261 000 voix; Guy Desrosiers, 147 000 voix; et Vance Gough, 131 000 voix. Près d'un million de votes est un nombre qui n'est pas négligeable. Un million d'Albertains ont voté en faveur d'un Sénat élu. Bert Brown et Ted Morton ont tous deux battu le record établi par Stan Waters, qui avait obtenu 256 000 voix, ce qui était alors le plus grand nombre de voix jamais obtenu par un représentant élu dans toute l'histoire du Canada. Ces deux sénateurs ont battu ce record.

 

. 1735 + -

Il est grand temps que le gouvernement reconnaisse les droits démocratiques des Canadiens et accepte de nommer ces sénateurs élus lorsqu'il y aura des vacances au Sénat. La méthode actuelle de nomination est tout simplement antidémocratique.

Les Canadiens sont gouvernés par les deux chambres du Parlement: la Chambre des communes où nous siégeons, et le Sénat. En théorie, les deux chambres ont pratiquement des pouvoirs égaux. Les sénateurs ont des pouvoirs semblables à ceux des députés élus. Ils peuvent rédiger des lois, voter sur des motions importantes, faire partie de comités parlementaires et exécuter d'autres fonctions gouvernementales.

Or, fait important, les sénateurs peuvent approuver toute mesure législative émanant de la Chambre ou y opposer leur veto. Tout projet de loi qui est adopté par les députés élus de la Chambre doit passer par le Sénat avant de devenir loi. Il est totalement inacceptable que cette importante partie de notre gouvernement soit dirigée par des personnes ayant fait l'objet de nominations politiques et non par des représentants élus.

Les sénateurs doivent rendre des comptes. Or, il n'y a absolument aucune obligation de rendre compte à la chambre haute. Cela doit changer. Les Canadiens s'attendent à des comptes de la part de leurs institutions publiques. Sur ce plan, le Sénat est nettement à la traîne.

Le Sénat est exempté de rendre des comptes aux Canadiens. On l'a vu l'an dernier dans l'affaire de l'ancien sénateur Andrew Thompson. Thompson a montré qu'une fois nommé un sénateur n'a à rendre des comptes à personne, y compris le premier ministre. Une fois nommé, et une fois en fonction, un sénateur peut, s'il le veut demeurer en fonction jusqu'à l'âge de 75 ans. Si les Canadiens veulent une chambre haute efficace, nous devons donner au Sénat un mandat démocratique similaire à celui de la Chambre des communes.

Comme je l'ai dit plus tôt, les élections sénatoriales peuvent se faire facilement sans qu'il soit nécessaire pour cela de modifier la Constitution. Beaucoup de réformes gouvernementales exigent une modification de la Constitution, mais pas les élections sénatoriales. L'élection de Stan Waters en Alberta montre que cela peut se faire facilement, sans que de profonds changements soient nécessaires.

L'autre point, c'est que les gens disent que cela va coûter trop cher. L'élection de Stan Waters et celles des sénateurs élus le mois dernier ont été tenues durant les élections municipales. Le coût n'est pas bien grand. En fait, il est tout à fait minime puisque les gens vont déjà voter aux élections municipales. Il s'agit seulement d'imprimer un autre bulletin de vote.

Les Canadiens s'impatientent et en ont assez de ce problème et des gouvernements qui jusqu'ici n'ont pas changé le système. Le sondage national Angus Reid effectué en avril dernier indique que la population se répartit entre deux choix: la réforme du Sénat ou son abolition. Très peu de Canadiens souhaitent laisser la chambre haute telle qu'elle est. Nous avons trois possibilités: laisser le Sénat inchangé, ce que veulent très peu de Canadiens, procéder à une réforme du Sénat ou l'abolir.

Un sondage tenu en mai dernier démontre que la très grande majorité des Manitobains souhaitent que le prochain sénateur de leur province soit élu et non pas nommé. Ce sondage a également révélé que 86 p. 100 des Manitobains croient que la population, et non pas le premier ministre, devrait désigner les nouveaux sénateurs. Seuls 7 p. 100 se sont dits favorables à ce que le premier ministre nomme les sénateurs et 7 p. 100 se sont dit indécis. D'après un sondage semblable réalisé en Colombie-Britannique, 84 p. 100 des habitants veulent que les sénateurs soient élus.

Voici deux sondages distincts et indépendants, l'un effectué au Manitoba et l'autre en Colombie-Britannique, qui révèlent que 86 p. 100 des Manitobains et 84 p. 100 des habitants de la Colombie-Britannique sont en faveur d'un Sénat élu. Ce ne sont pas des résultats ambigus. Les sondages et les Canadiens indiquent une intention claire et nette. Des sénateurs, notamment le sénateur Gerry St. Germain, ont reconnu qu'un Sénat élu serait plus démocratique. Le sénateur a affirmé qu'on pouvait raisonnablement espérer avoir un jour un Sénat élu. Il est évident qu'un Sénat élu serait beaucoup plus représentatif, responsable et démocratique qu'à l'heure actuelle.

 

. 1740 + -

J'aimerais passer en revue la liste des nominations pour montrer que l'actuel premier ministre a effectué plus de nominations par favoritisme au Sénat que son prédécesseur, M. Brian Mulroney. L'actuel premier ministre est celui-là même qui reprochait énergiquement à son prédécesseur d'avoir nommé des amis au Sénat.

L'actuel premier ministre a effectué de nombreuses nominations par favoritisme au Sénat. Il a nommé huit anciens députés libéraux, dont quatre anciens ministres; un ancien chef libéral au Manitoba et alliée de longue date du premier ministre; un ancien chef libéral de l'Alberta; un ancien chef libéral de l'Île-du-Prince-Édouard; un ancien vice-premier ministre du Québec; un ancien candidat à la direction du Parti libéral du Nouveau-Brunswick, qui a dirigé la campagne à la chefferie du premier ministre en 1990; un candidat libéral provincial défait et loyal militant bénévole du Parti libéral; un ancien président de circonscription libéral et militant bénévole libéral; un éminent organisateur libéral de la Colombie-Britannique, partenaire de golf et d'affaires du premier ministre; un organisateur libéral du Québec; l'épouse du fils de l'ancien premier ministre libéral, M. Lester B. Pearson, et j'en passe.

Comment pouvons-nous avoir un Sénat impartial lorsque le premier ministre le remplit de libéraux qui adopteront sans protester les projets de loi du gouvernement? Le gouvernement précédent avait fait la même chose. On l'a rempli alors de conservateurs. Ce n'est tout simplement pas dans l'intérêt des Canadiens.

À qui les sénateurs doivent-ils rendre des comptes? Ils sont censés, au départ, rendre des comptes aux provinces et aux régions. Cependant, à cause du système de nominations politiques, ils ne rendent des comptes qu'au parti politique qui les nomme, et c'est tout à fait répréhensible.

Des changements récents à la Chambre des Lords en Grande-Bretagne montrent qu'une réforme démocratique se fait attendre depuis longtemps. Cette semaine, la reine Élizabeth a supprimé les privilèges héréditaires de la Chambre des lords en matière de vote. Il s'agissait d'une réforme démocratique historique. Il reste à voir, en Grande-Bretagne, si l'élection de sénateurs va maintenant devenir une réalité ou si, malheureusement, les sénateurs vont être nommés. Il est temps de démocratiser la chambre haute du Canada.

En tant que députés, nous rendons des comptes à nos électeurs. Lorsqu'on nous nous en sortons bien, comme nous espérons tous le faire, nous avons alors des chances de nous faire réélire. Dans le cas contraire, nos électeurs nous flanquent à la porte, ce qui est normal. C'est ce qui se passe dans de nombreuses régions du monde, non seulement à la chambre basse, mais également à la chambre haute.

Pourquoi nos sénateurs ne peuvent-ils être élus et ne peuvent-ils rendre des comptes aux provinces et aux électeurs qui les envoient ici au lieu d'être comptables envers le parti politique qui les nomme? Ce n'est vraiment pas normal.

Beaucoup de gens deviennent las de tout cela, car ils ont un Sénat qui ne fonctionne tout simplement pas. Nous voyons toujours les mêmes disputes et les mêmes sermons. En tant que politique, je crois que c'est la raison pour laquelle les gens ont si peu d'estime pour beaucoup d'entre nous, car nous n'avons tout simplement pas une Chambre haute rendant des comptes aux Canadiens.

Avant les élections de 1993, le premier ministre a proposé un Sénat élu lorsqu'il a déclaré:

    La réforme du Sénat est extrêmement importante. J'y crois. Notre but doit être de rechercher une répartition des pouvoirs qui serve le mieux les intérêts des citoyens, de tous les Canadiens.

Le premier ministre a également déclaré à la Chambre:

    Pour satisfaire aux aspirations des Canadiens de l'Ouest et de l'Atlantique et pour réaliser leurs rêves, il est essentiel de réformer le Sénat. À cette fin, il nous faut un Sénat élu, efficace et équitable.

Cela fait longtemps que le premier ministre aurait dû donner aux Canadiens ce qu'il a promis, un Sénat élu. J'espère que mon projet de loi va donner au premier ministre la petite poussée dont il a besoin pour lui permettre de respecter sa promesse.

 

. 1745 + -

M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole sur ce sujet. C'est une chose à laquelle j'ai beaucoup réfléchi depuis dix ans que je suis député.

Cependant, essayant de placer en contexte ce que j'ai à dire, je me suis souvenu d'une affiche qu'un de mes amis a sur son mur, dans son bureau. Elle dit: «À chaque problème complexe il y a une réponse simple et elle est mauvaise.»

C'est le problème que j'ai avec ce projet de loi. La réforme du Sénat est une question très importante. C'est une question que nous de ce côté-ci de la Chambre considérons depuis des décennies. C'est une question que le Sénat lui-même a envisagée.

Je me sens très mal à l'aise lorsque j'entends les sénateurs décrits de la façon dont le Parti réformiste choisit de les décrire. Je ne sais quel but il espère atteindre en vilipendant d'honnêtes et vaillants Canadiens qui ont accepté de servir leur pays. Je ne vois pas en quoi cela fait progresser la cause de la démocratie.

Il y a de nombreux Canadiens de talent qui travaillent à l'autre endroit. Ils font un bon travail pour leur pays et ils souhaitent des réformes. Que les députés lisent les rapports du Sénat de 1984, 1987, 1992, ils verront que les sénateurs eux-mêmes demandent des réformes, souhaitent d'être élus.

Ce qui est contradictoire dans l'attitude du Parti réformiste, qui cite la nomination de Stan Waters après son élection, c'est que cette nomination au Sénat, par le premier ministre Brian Mulroney, avait été faite par respect pour l'article 4 de l'accord du lac Meech qui prévoyait un processus de nomination sur recommandation des provinces.

Voilà l'exemple que le Parti réformiste présente comme modèle qui pourrait fonctionner. C'est un exemple qui remonte aux discussions du lac Meech, mais si ma mémoire est bonne, c'est le Parti réformiste qui a fait campagne contre l'accord du lac Meech et qui a poussé pour son rejet.

Une voix: Ainsi que le premier ministre.

M. Reg Alcock: Et moi-même.

En 1992, dans le cadre de l'accord de Charlottetown, nous en étions arrivés à des ententes sans précédent dans ce dossier. Nous avions réussi à mettre au point une formule assurant un Sénat triple E. Nous en étions réellement parvenus à une entente prévoyant l'égalité des provinces, chaque province étant représentée par six sénateurs, pour un total de 62 membres. Nous avions prévu la représentation autochtone. Je suis persuadé que bon nombre de personnes qui s'intéressent à la question n'auraient jamais pensé que nous pourrions y parvenir, mais nous l'avions fait. Et qu'est-ce que le Parti réformiste a fait alors? Le Parti réformiste avait devant lui une formule proposant un Sénat composé de représentants égaux, efficaces et élus démocratiquement. Il s'y est opposé. Il a lutté contre cette proposition qui a finalement été rejetée.

L'accord du lac Meech a été rejeté, ainsi que le processus qui y avait mené. Il a également été rejeté. J'ai appuyé l'accord du lac Meech pour ces mêmes principes. Je crois que le principe du Sénat triple E est une très bonne chose, tout particulièrement pour l'Ouest.

Le débat actuel table sur le désir des gens de rire du Sénat ou de continuer de dénigrer un groupe de gens qui à mon avis accomplissent un travail louable au nom de tous les Canadiens et propose ce qu'on voudrait considérer comme une amélioration importante. Je suis stupéfait de constater que le Parti réformiste est prêt à appuyer ce projet de loi ou qu'il ait même pensé à le proposer.

Les deux provinces où le Parti réformiste a le plus d'appui, soit l'Alberta et la Colombie-Britannique, représentent 23 p. 100 de la population du Canada. Ces provinces occupent 11,5 p. 100 des postes du Sénat. Le Parti réformiste propose que nous consacrions ce fait, que nous admettions cette inégalité. Je ne comprends pas ce qui le pousse à vouloir rendre légitime un processus qui renferme une inégalité criante pour les provinces de l'Ouest. Cela semble ne présenter aucun avantage particulier. C'est vrai qu'une réforme du Sénat s'impose, mais si nous voulons la démocratie, un Sénat élu démocratiquement, pensons à ce que le député a dit lui-même, soit que, à la fin d'un mandat, les représentants élus retournent s'adresser à la population pour qu'elle leur confie un nouveau mandat. Une élection unique placerait le sénateur à son poste jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 75 ans, ce qui ne l'obligerait jamais à demander un nouveau mandat. Pour ce qui est du reste du fonctionnement du Sénat, comment faire quand certains sont élus démocratiquement alors que d'autres terminent le mandat qui leur a été confié par nomination? Comment cela peut-il s'organiser en une assemblée compétente, fonctionnelle et bien organisée permettant d'améliorer la démocratie dans notre pays?

 

. 1750 + -

J'appuie cet objectif. C'est louable. Mais la méthode que préconise le Parti réformiste pour la réforme du Sénat est simplement trop sensationnaliste. En outre, à mon avis, elle ne règle pas vraiment les problèmes.

Si nous voulons un Sénat qui contrebalance la formule disproportionnée de représentation d'après la population que nous avons à la Chambre, un Sénat qui devienne une véritable Chambre de représentation des régions ou des provinces, comme j'aimerais personnellement que ce soit le cas, nous devons certainement réformer complètement l'institution.

C'est une organisation trop complexe pour que nous n'en modifiions qu'une facette par ci par là. Nous devons réformer le Sénat après mûre réflexion. Nous devons y parvenir comme nous le faisons pour régler tous les problèmes que nous connaissons actuellement, un élément à la fois, en examinant le problème, en rencontrant nos partenaires provinciaux, en discutant, en parvenant à un consensus et en donnant suite à ce consensus. Voilà comment nous allons arriver à un véritable changement constitutionnel.

C'est en travaillant et en réglant soigneusement les problèmes un à la fois que nous sommes parvenus à nous tirer des conditions financières très difficiles qu'a connues le pays, depuis notre arrivée au pouvoir en 1993 jusqu'à nos jours. C'est le processus que je voudrais voir tous les députés appuyer. Nous lancer dans un débat en vue de changer une petite facette du problème risque selon moi d'empirer la situation et non de l'améliorer.

J'appuie le député dans son désir de poursuivre ce débat sur la réforme du Sénat. Je suis certainement de ceux qui sont prêts à consacrer beaucoup de temps et d'énergie à tenter de façonner un Parlement plus efficace pour les Canadiens, mais je ne peux pas appuyer cette méthode particulière.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, c'est à mon tour de prendre la parole sur le projet de loi présenté par le député du Parti réformiste concernant le mode de nomination des sénateurs.

Je dois avouer que je n'ai pas passé des centaines d'heures à me préparer pour un tel débat, et mes électeurs me le pardonneront sûrement, puisque pour bon nombre de Québécois, le Sénat est une institution assez désuète dont ils se passeraient volontiers.

Pour nous, la modification au mode de nomination ou tout autre réforme du Sénat va se heurter à beaucoup de scepticisme de la part des électeurs du Québec qui attachent très peu d'importance, et certainement aucun attachement émotif, à cette institution. Je les comprends et partage entièrement ce point de vue.

Il y a souvent beaucoup de cynisme, de scepticisme et de discrédit par rapport au rôle des élus et à celui du monde politique en général, à tort et à raison. Quand on voit une institution comme celle-là, je pense que c'est à raison que les gens font preuve de beaucoup de cynisme. On a là un exemple éloquent de la non-modernité et de la désuétude des institutions.

Du point de vue du citoyen, on peut se demander à quoi sert le Sénat, point à la ligne. Quels gestes concrets ou utiles a-t-il faits dans nos vies? Et là, vous pouvez remonter à votre naissance, monsieur le Président.

 

. 1755 + -

Il y a de sérieuses interrogations quant à savoir pourquoi nous dépensons près de 50 millions de dollars chaque année pour une pareille institution. C'est beaucoup d'argent. Quand on parle de 50 millions de dollars, c'est beaucoup de taxes et d'impôts qui, année après année, sont engloutis dans une institution où sont nommés les amis du premier ministre. Dépendant de la couleur, les rouges, les bleus nomment leurs amis pour des récompenses, pour l'achèvement d'une carrière quelconque. Ce ne sont pas nécessairement des gens dans le besoin qui y sont nommés.

Je peux toutefois comprendre ceux et celles qui souhaiteraient avoir une institution efficace, qui joue un rôle quelconque, de vouloir modifier le mode de nomination. Je suis capable de le comprendre. À la limite, s'il doit y avoir un Sénat, les gens doivent s'interroger sur la façon dont ces gens sont envoyés là.

Lorsqu'on prend des décisions dans un système démocratique, il faut qu'il y ait quelque part un minimum d'imputabilité. Ce qui est proposé, c'est de permettre aux provinces, finalement aux citoyens des provinces, de se prononcer sur le choix de ceux qui les représenteront dans cette institution.

Cela ne change en rien ma conviction profonde sur le rôle de l'institution. À tout le moins, cela m'apparaîtrait, à la limite, un mode beaucoup plus respectueux des citoyens. Évidemment, j'aimerais, dans un premier temps, qu'on demande aux citoyens s'ils en veulent un ou pas.

Étant allé à l'extérieur du Québec, l'été dernier, j'ai senti que beaucoup de gens, entre autres, en Colombie-Britannique, partageaient ce point de vue sur l'abolition du Sénat. En Alberta, il y a un courant très fort pour un mode de nomination différent. Pour ce qui est d'ailleurs, c'est un sujet qui préoccupe moins les gens.

Au Québec, c'est un dossier à peu près classé. Dans ma propre circonscription, lors de la précédente législature, on avait fait signer une pétition qui avait été distribuée chez les dépanneurs et ailleurs. En quelques semaines, nous avons recueilli près de 8 000 signatures de gens se prononçant en faveur de l'abolition du Sénat. Je dois dire que des gens me demandaient même où ils pouvaient aller signer cette pétition. Bien que le temps de circulation de la pétition était limité, on avait quand même recueilli 8 000 noms. C'est beaucoup de gens dans un comté comme le mien, ou dans n'importe quel comté.

Lorsqu'on évoque le Sénat, on voit tout de suite que cela touche une corde sensible chez les gens; ils disent qu'on gaspille de l'argent pour rien. Ils ont entièrement raison de tenir ce discours, surtout dans le contexte actuel.

Il n'y a jamais rien qui justifie de gaspiller de l'argent. Mais lorsqu'on demande aux gens de faire des sacrifices, qu'ils voient le gouvernement fédéral réduire les transferts aux provinces, par exemple, dans le domaine de la santé—ce qui a été le cas au Québec, plusieurs milliards de dollars au cours des dernières années—et qu'en même temps, on va engouffrer 50 millions dans le Sénat, les gens ne trouvent pas que les taxes et les impôts qu'ils paient sont utilisés efficacement, et ils ont raison.

Cela coûte 50 millions de dollars par année. Pensez-y! Durant les 20 dernières années, cela représente un milliard de dollars. Comme on ne les avait pas, parce qu'on dépensait plus d'argent qu'on en ramassait au gouvernement, on a emprunté un milliard de dollars dans les 20 dernières années pour payer cette institution.

Y a-t-il quelqu'un dans ce Parlement qui peut me dire que cela a du bon sens? Comment pourrait-on faire pour se débarrasser du Sénat? À la limite, ceux qui en voudront un autre par la suite, ou qui voudront une autre institution pourront entamer le débat, mais je pense que la première étape serait de s'en débarrasser. Ensuite, ceux qui en veulent un ou qui veulent un autre niveau d'intervention politique, un palier de sages au-dessus du gouvernement, pourront entreprendre le débat. Au moins, entre-temps, on arrêterait de jeter 50 millions de dollars à l'eau.

La façon de le faire serait de tenir un vote au Parlement fédéral, mais aussi dans chacune des assemblées législatives des différentes provinces. Je suis convaincu que plusieurs pourraient appuyer cela. Ultimement, et c'est là le problème, il faudrait un vote des sénateurs eux-mêmes. On peut être un peu sceptiques sur leur volonté de s'autodétruire, alors qu'ils sont confortablement installés. Ces gens ne se tuent pas au travail, ils ne se font pas mourir au travail. Il n'y a pas énormément d'ouvrage à faire. Ils n'ont pas de représentations à faire dans les différents territoires qu'ils doivent représenter.

 

. 1800 + -

Il faut savoir que les sénateurs ont un territoire attitré, sauf les huit derniers nommés par le gouvernement conservateur. On se rappellera que le gouvernement de l'époque avaient eu quelques problèmes de calendrier avec les sénateurs qui faisaient de l'obstruction à l'adoption de la TPS. Donc, huit nouveaux sénateurs avaient été ajoutés. D'ailleurs, le premier ministre peut rajouter des postes au Sénat comme il le veut. Encore là, il y a un problème.

Les autres sénateurs ont des territoires. Est-ce qu'il y a des gens qui nous écoutent en ce moment et qui se rappellent avoir vu leur sénateur? Est-ce que les gens savent même qui est leur sénateur? Je présume que non. Il est certain que s'ils étaient élus, les gens s'identifieraient à eux et les connaîtraient davantage.

Par contre, je ne suis pas vraiment en faveur de faire élire ces gens pour, qu'une fois élus, ils se donnent tout à coup une légitimité et se mettent à dire: «Voilà, nous allons gérer davantage de choses.» Nous allons alors nous retrouver—et je reprends la perspective d'un électeur de n'importe quelle province—avec un palier municipal, un palier provincial, un palier fédéral et, par dessus tout cela, un palier sénatorial.

À un moment donné, il y a un peu d'imputabilité qui devient dilué. On connaît la très grande habilité du gouvernement fédéral de se mêler de juridictions qui ne le concernent pas. C'est une tendance très forte ici à Ottawa. Rien nous permet de croire que ce serait différent avec un Sénat élu. On s'aperçoit donc que rien ne viendrait simplifier l'efficacité du système politique, que ce soit dans une perspective québécoise ou canadienne.

Évidemment, nous, au contraire, travaillons avec acharnement pour éliminer un palier. On souhaiterait que le palier fédéral ne soit plus présent. Les Québécois en décideront ainsi un jour, je l'espère. On ne veut pas multiplier les paliers. Au contraire, il faut simplifier les choses, donner davantage de pouvoirs aux paliers locaux qui sont beaucoup plus près des citoyens.

Donc, de vouloir renforcer, accroître le rôle, changer le mode de nomination et tout le reste est, à mon sens, un peu une perte de temps et d'énergie. L'étape numéro un, c'est de s'en débarrasser et d'envoyer un signal clair que ce genre d'institution ne fait plus partie des priorités du gouvernement, tout comme le fait d'y consentir 50 millions de dollars par année.

Ce serait un signal et, par la suite, cela pourrait faire boule de neige. Les provinces qui sont d'accord avec cela pourraient elles aussi adopter la résolution et, ultimement, les sénateurs porteraient eux-mêmes l'odieux d'empêcher la volonté populaire, exprimée par des représentants élus, de faire disparaître le Sénat.

Tous les travaux d'aménagement qu'on fait sur la Colline à l'heure actuelle coûtent les yeux de la tête. En même temps, il faut faire des aménagements pour nos amis sénateurs qui se plaignaient, l'an dernier, de ne pas avoir de tunnel et qui en veulent un aussi pour venir au Parlement. Les gens ont de la difficulté à accepter cela.

Je souhaite fortement qu'on consacre nos énergies—mais pas trop d'énergies—à formuler une résolution et qu'on l'adopte éventuellement pour dire, voilà, on se débarrasse du Sénat. C'est ce que l'on devrait faire plutôt que de proposer des changements cosmétiques qui ne modifieront que peu de choses au fait que c'est une institution qui est totalement désuète, qui ne répond à aucun besoin à l'heure actuelle dans le système politique et à aucun besoin dans la vraie vie des citoyens et des électeurs du Québec et du Canada.

[Traduction]

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat. J'ai bien aimé les interventions des deux orateurs précédents. J'en ai retenu quelque chose et je suis d'accord avec une bonne partie de leurs propos.

La réforme du Sénat est un objectif que visent la plupart des partis politiques représentés à cette chambre. J'ai fait un brin de lecture avant de me présenter à la Chambre ce soir. J'ai appris que le Parti libéral faisait déjà de la réforme du Sénat un de ses enjeux électoraux en 1919, soit à l'époque où le premier ministre Mackenzie King était au pouvoir. À son congrès de fondation en 1933, le CCF tenait à ce que la réforme du Sénat soit l'une de ses priorités réelles. Lorsque le NPD a été créé en 1960, cette question s'est encore retrouvée parmi les priorités de notre parti.

Le projet de loi dont nous sommes saisis me paraît boiteux, en ce sens qu'il ne propose aucune réforme substantielle. Même si un Sénat élu peut être créé aux termes du projet de loi, ce ne serait pas le Sénat triple E que prône habituellement le parti du député.

 

. 1805 + -

C'est le volet «représentation égale» qui fait défaut. Même si nous institutionnalisons ou contribuons à officialiser une institution au moyen du processus démocratique que serait l'élection des sénateurs, si nous oublions les autres aspects de la réforme du Sénat, nous n'améliorerons pas tellement les choses. Aujourd'hui, après tous les tiraillements constitutionnels et tous les beaux projets que n'ont cessé de nous proposer les partis politiques, personne n'a réussi à véritablement réformer le Sénat, surtout en ce qui concerne la représentation égale.

Le député de Winnipeg-Sud a bien raison de dire que nous touchions presque au but avec l'Accord de Charlottetown. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles j'étais heureux de faire campagne pour cet accord. J'ai assisté, à titre de simple citoyen, aux cinq rencontres qui ont eu lieu un peu partout au pays. J'ai beaucoup appris et je débordais d'enthousiasme en voyant toutes les possibilité que l'accord de Charlottetown ouvrait aux Canadiens. Une véritable réforme du Sénat. Un Sénat triple E. Ça, j'aurais pu l'appuyer.

Mais nous avons tout rejeté. Nous avons choisi de ne pas profiter de cette occasion. Elle ne se représentera pas. Je ne suis pas optimiste. On ne la verra pas réapparaître sur la scène nationale de mon vivant. La plupart des Canadiens préféreraient se crever un oeil que de passer par les affres d'un autre accord comme celui de Charlottetown et d'assister à toutes les tractations constitutionnelles qui l'ont entouré. Franchement, je suis de ce nombre.

Le député de Nanaïmo a cité plusieurs sondages et enquêtes qui révèlent un vaste appui pour un sénat élu. Je n'ai aucune raison de douter de l'exactitude de ces sondages. Ce qu'on n'a pas dit, c'est que ces sondages offraient plusieurs options. Êtes-vous en faveur d'un Sénat élu? Préféreriez-vous que le Sénat soit aboli? Préféreriez-vous le statu quo?

Le sondage le plus récent qui ait été fait à l'échelle nationale, soit le sondage Angus Reid qui remonte au mois d'avril, révèle une tendance intéressante. En effet, la courbe à suivre est celle qui indique un engouement croissant pour l'abolition. Une série de sondages effectués en 1987, 1989 et 1998 donne un nombre à peu près égal de personnes en faveur de l'abolition et de l'élection du Sénat. Quarante-cinq pour cent des répondants disent vouloir un sénat élu. Je crois que, pour la majorité, ils pensent à un sénat triple E, pas uniquement à un sénat élu. Un sondage scientifique à l'échelle du pays donne 41 p. 100 en faveur de l'abolition. C'est le camp dans lequel je me range. Je suis heureux de promouvoir cette position au nom de mon parti.

Nous nous sommes rendus à l'évidence que la situation actuelle est sans issue. Certaines choses ne valent pas la peine d'être réparées. S'amuser à essayer d'arranger les choses à la petite semaine ne nous donnera pas la satisfaction que nous recherchons. Nous croyons que l'abolition du Sénat pourrait être la prochaine question inscrite à l'ordre jour de l'unité nationale, au même titre que l'Accord de Charlottetown était censé cimenter le pays et harmoniser nos différences. Je crois que l'abolition du Sénat deviendra la question sur laquelle nous pourrons nous entendre et que nous pourrons faire avancer en conjuguant nos efforts.

Selon le sondage Angus Reid sur la question, l'abolition du Sénat trouve beaucoup plus d'appuis au Québec que dans le reste du Canada. Le chiffre s'établit à 57 ou 59 p. 100 en faveur de l'abolition. Le député du Bloc qui m'a précédé a fait état d'une pétition qui a récemment circulé dans cette province. Cela s'est produit au cours de la dernière législature.

L'été dernier, une pétition a circulé dans tout le Canada. Je sais qu'un bloquiste a pris une copie de cette pétition et l'a fait signer par 11 000 citoyens. Je crois que c'est le chiffre exact. Nous n'avons pas encore vu le compte final. Cela s'est fait en l'espace de quelques semaines. Je vais lire une partie du préambule.

Voici ce que les Canadiens signent en masse dans tout le pays. C'est sans doute ce qu'ils croient: «Nous soussignés», etc., «que le Sénat du Canada est une institution non démocratique composée de membres non élus qui ne sont pas tenus de rendre compte à la population et que le Sénat coûte aux contribuables quelque 50 millions de dollars par an». Voilà un autre argument sensible: «Et que le Sénat fait double emploi étant donné que la cour suprême et les provinces sont déjà là pour protéger les droits des minorités et assurer une représentation régionale; et que le Sénat mine le rôle des députés de la Chambre des communes; et, qu'il faut moderniser nos institutions parlementaires. Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de prendre des mesures visant à abolir le Sénat».

 

. 1810 + -

Cette pétition reçoit l'appui de beaucoup de gens dans tout le pays. Elle bénéficie d'un appui multipartite. Les personnes qui ont assemblé cette pétition sont un député néo-démocrate et un député libéral. Nous avons des citations d'un député réformiste qui dit qu'il voudrait que le Sénat soit aboli. Des membres du Parti conservateur déclarent qu'il faudrait que le Parti réformiste modifie notamment sa position sur le Sénat dans le cadre de l'alternative unie. Nous avons des articles de journaux dans lesquels le Parti réformiste déclare qu'il serait disposé à le faire. Il serait disposé à revenir sur sa position au sujet du Sénat pour permettre que l'alternative unie aille de l'avant. Je serais heureux de fournir ces citations au député du Parti réformiste.

Nous constatons qu'aucune question n'a autant fasciné les Canadiens récemment. C'est une question très concrète et très viscérale. Je ne vais pas m'attarder à cela, mais des cas isolés d'abus ont fait les manchettes.

Je suis le premier à admettre que nous avons beaucoup de personnes excellentes, au Sénat du Canada, qui accomplissent un travail fort utile dans tout le pays. J'ai eu le plaisir d'en rencontrer quelques-unes depuis mon arrivée à la Chambre. Je ne crois pas que ces gens excellents cesseraient de faire leur travail admirable s'ils n'étaient plus sénateurs. Je sais qu'ils ont été nommés parce qu'ils étaient tout à fait engagés et bien informés. Ces personnes n'abandonneront pas ces causes parce qu'elles ne siègent plus dans cet édifice.

Franchement, avec les 50 millions de dollars que cela nous ferait économiser, qui dit que le premier ministre ou le gouvernement ne pourrait pas faire de certaines personnes des émissaires spéciaux sur certaines questions?

Il y a un sénateur avec qui j'ai eu le plaisir de travailler sur la question du travail des enfants. Elle est un défenseur de la justice sociale à cet égard. Qui dit que, si elle ne siégeait plus comme sénateur, le premier ministre ne lui confierait pas la direction d'un groupe de travail sur le travail des enfants et ne l'enverrait pas nous représenter à des tribunes internationales?

Tout cela est du domaine du possible. Les Canadiens considéreraient cela comme de l'argent dépensé à bon escient, car nous ne serions pas aux prises avec le même problème de choix non démocratique et avec l'obstacle à la démocratie qui existe à l'autre endroit.

Je voudrais aborder un instant la question des chiffres. Le représentant du Parti réformiste a parlé du Manitoba dans son intervention. Voici quels étaient les chiffres réels pour la province du Manitoba, d'après le sondage Angus Reid tenu en avril 1998: 45 p. 100 des répondants désiraient qu'on réforme le Sénat, et 41 p. 100 désiraient qu'on l'abolisse. Nous nous situons exactement au niveau de la moyenne nationale en faveur de l'abolition, et à un ou deux points de plus en faveur de la réforme. Voilà les véritables chiffres. Ce n'était pas 87 p. 100 en faveur d'un Sénat élu, et il est intellectuellement malhonnête de présenter les chiffres de cette façon-là.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, malheureusement, dans les précédents exposés, on a beaucoup plus parlé de faire un débat sur l'abolisation ou le maintien du Sénat que sur le projet de loi C-382. J'aimerais y revenir et me concentrer sur cette législation.

Je ferai tout d'abord quelques commentaires. On a beaucoup parlé de sondages sur l'abolition et la réforme du Sénat, mais on me permettra de mettre un peu en doute les sondages, parce que dans tout sondage qui interroge les Québécois et les Canadiens sur les politiciens et les politiciennes, les mots «abolition», «non-confiance», «pas crédible» et «malhonnête» reviennent souvent. Si les Canadiens ont l'occasion, lors d'un sondage, de dire à quel point ils n'ont pas confiance en l'ensemble de l'appareil politique, ils vont se prononcer.

Cependant, si on prend le temps d'expliquer aux Canadiens pourquoi le Sénat existe, on entame une période de réflexion et le débat devient beaucoup plus positif.

Le député réformiste a beaucoup parlé de sondages. Un des sondages que j'examine beaucoup de ce temps-ci, c'est la descente du Parti réformiste et la montée du Parti progressiste-conservateur. C'est peut-être le seul sondage qui m'intéresse présentement.

 

. 1815 + -

Je vais maintenant en venir au projet de loi qui, malheureusement, n'est pas crédible. Le député réformiste disait que ce projet de loi pouvait être mis en vigueur sans aucun amendement constitutionnel. C'est absolument faux.

De la façon dont le projet de loi C-382 est rédigé, il faudrait y apporter une modification constitutionnelle. Le député devrait peut-être s'informer davantage.

Lorsqu'on veut modifier l'article 42 de la Loi constitutionnelle de 1982, on doit se reporter aux articles 38 et 41 qui stipulent que si on change le mode de nomination des sénateurs, on doit faire un changement constitutionnel en appliquant la formule 7-50, c'est-à-dire sept provinces représentant 50 p. 100 de la population.

Le député pourra le vérifier. Plus précisément, l'article 4 de ce projet de loi stipule que ni le Conseil privé de Sa Majesté pour le Canada, ni le premier ministre, ni aucun ministre de Sa Majesté peut faire une nomination au Sénat, tel que prévu dans la Constitution. Ce projet de loi est donc anticonstitutionnel et ne pourrait s'appliquer.

Cependant, nous proposons quelque chose d'intéressant. Le projet de loi C-382 ne règle absolument rien. Le député réformiste rappelait dans quel contexte il a été présenté. C'était à la veille de l'élection d'un sénateur en Alberta. C'était seulement pour mettre plus d'emphase sur l'élection d'un sénateur albertain.

Cependant, encore une fois, de la façon dont les réformistes veulent fonctionner avec ce projet de loi, il faut un amendement constitutionnel, donc sept provinces représentant 50 p. 100 de la population. On les invite donc à retourner faire leurs devoirs là-dessus.

Mais en attendant d'apporter un amendement constitutionnel, tel que l'abolition, la modification ou quoi que ce soit que les Canadiens désireront, on peut commencer à travailler ici, à la Chambre, au Parlement, et faire certaines modifications. Premièrement, on pourrait limiter le mandat d'un sénateur à dix ans.

Cela s'est déjà fait. Oui, c'est un changement constitutionnel, mais c'est un changement qui se fait par une loi du Parlement. Par exemple, le premier changement portant sur le nombre d'années au cours desquelles un sénateur peut occuper son poste a été fait sous Lester B. Pearson, qui avait ajouté un alinéa b), stipulant qu'un sénateur peut siéger jusqu'à l'âge de 75 ans.

On pourrait entamer une procédure similaire et proposer qu'un sénateur siège pendant une période de dix ans. Cela se ferait par une loi du Parlement, et automatiquement, ce serait une modification constitutionnelle. Cependant, cette modification constitutionnelle ne se ferait pas sous le joug du ratio 7-50, c'est-à-dire sept provinces représentant 50 p. 100 de la population.

Donc, ce serait une première étape. Bien sûr, cette mesure ne serait pas rétroactive, mais on enverrait un signal à l'effet qu'ici, au Parlement, on est prêt à faire des modifications et à ouvrir le débat sur le Sénat et sur tout l'appareil parlementaire.

Par exemple, si on abolit le Sénat, automatiquement, le rôle de cette Chambre est modifiée. Il s'agit d'un changement majeur. Est-ce qu'on va ajouter des députés? Est-ce qu'on va inscrire dans la Constitution qu'un nombre spécifique de députés doit provenir de telle région, comme le Québec l'avait fait, pour sa protection, en 1867? Il y a une protection constitutionnelle quant au nombre de sénateurs au Québec. Est-ce qu'on aurait une protection constitutionnelle, au niveau du nombre de députés provenant d'une région particulière, de l'Ouest, des Maritimes, du Québec, ou de l'Ontario? Peut-être.

Nous devons cesser de prendre les sénateurs pour de la monnaie de change politique. Démontrons un peu de sérieux. Nous croyons que la première démarche très sérieuse serait de limiter le mandat des sénateurs à dix ans, et cela doit se faire ici. Je suis convaincu que la majorité des sénateurs seront d'accord et qu'ils demanderont des changements plus profonds du Sénat.

Encore une fois, les députés du Parti réformiste ont un problème avec le Sénat et ils essaient de s'en servir. Cependant, ils utilisent une façon négative. Même dans leur document pour un nouveau Canada, c'est incomplet. On devrait peut-être revoir la façon dont le Parti réformiste travaille au niveau du Sénat.

Il est souvent question de discréditer le Sénat, mais lorsqu'on voit les députés du Parti réformiste ou certains autres députés proposer de telles choses, on n'aide pas les sénateurs, ni le Sénat, pas plus qu'on n'aide la réforme. On ajoute encore plus à la non-crédibilité des gens de la Chambre haute.

Si on prend le temps d'expliquer pourquoi le Sénat est là, à ce moment-là, les bonnes idées et l'aspect positif d'une réforme parlementaire pourront avoir un effet.

 

. 1820 + -

C'est peut-être intéressant, mais j'aimerais que les députés, avant de proposer de grandes réformes pour changer le pays d'un bout à l'autre, regardent ce qu'on peut faire ici entre nous, comme on l'a fait, par exemple, en ce qui touche la confessionnalité des écoles pour Terre-Neuve et pour le Québec. On l'a fait ici. On n'avait pas besoin de l'accord de sept provinces représentant 50 p. 100 de la population.

Pour ce qui est du Sénat, on pourrait faire un pas. Cela pourrait être 10 ans, 7 ans ou 12 ans. Si le gouvernement actuel se dit sérieux pour envoyer le signal d'une réforme du Sénat, si tous les députés de l'opposition sont sérieux aussi pour ce qui touche le Sénat, cette première démarche pourrait se faire.

Il y a peut-être des abolitionnistes du Sénat. Au Québec, on a aboli le Conseil législatif, qui était l'équivalent du Sénat, à la fin des années 1960. Il y avait des raisons pour cela. Mon confrère du Bloc québécois disait que, pour eux, il ne s'agissait pas seulement d'éliminer le Sénat, mais d'éliminer un palier de pouvoir au niveau fédéral. Je veux seulement rappeler que le premier ministre Bouchard a dit que peu importe ce qui va arriver, il va y avoir une sorte de parlement fédéral à l'européenne qui gérera les relations entre le Québec et le Canada, si le Québec devient souverain.

On fait une modification parlementaire en profondeur mais, finalement, on garde quand même un niveau important, qui est un niveau fédéral.

Le Sénat est important. C'est quelque chose qu'on doit changer, qu'on doit modifier, qu'on doit améliorer. Toutefois, on doit aussi regarder ce qui se passe ici à la Chambre au niveau de la députation. On doit être crédibles quant à la manière dont on le fait. C'est ce qui manque au Parti réformiste.

On doit être crédibles quant au rôle que le Sénat joue et, surtout, on doit être crédibles dans l'analyse que nous faisons des sondages. Je l'ai rappelé au début de mon intervention, chaque fois qu'on parle d'un politicien, c'est toujours, à tort, de façon négative. Qu'on arrête de jouer avec les sondages et qu'on dise aux gens exactement ce qu'il en est. Qu'on leur raconte un peu l'histoire de leur pays car c'est une histoire qu'ils ne connaissent malheureusement pas.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je ne peux m'empêcher d'entre ce que disent les libéraux à ce sujet. Au cours de la campagne électorale de 1993, le premier ministre a dit qu'il allait modifier le Sénat. Il allait le réformer. Le premier ministre a dit, et je le sais presque par coeur: «Nous aurons un Sénat élu dans les deux premières années de notre gouvernement». Puis il a ajouté, et je m'en souviens très bien: «En tant que premier ministre, je veillerai à ce que cela se fasse». C'est une promesse qui n'a pas été tenue.

Je tiens à répondre au député de Winnipeg qui a dit que les Réformistes avaient rejeté l'accord de Charlottetown, ce qui prouve que nous parlions pour ne rien dire. La réponse est non. Nous avions bien des raisons de rejeter l'accord de Charlottetown et la petite carotte qu'ils nous ont offerte concernant le Sénat n'en était pas une. Si l'accord de Charlottetown n'avait prévu que cela, nous l'aurions évidemment appuyé.

Le Sénat qui était proposé n'était pas égal et il était élu par les provinces. Il devait être élu non pas par la population, mais par les assemblées législatives si elles le désiraient. Il ne s'agissait donc pas d'un Sénat vraiment élu, ni d'un Sénat égal. En outre, l'accord contenait un certain nombre d'inégalités.

Je crois que le gouvernement veut vraiment garder le Sénat comme refuge où envoyer ses copains qu'il veut récompenser. Ça a vraiment l'air de cela. C'est comme cela que mes électeurs voient les choses. Je crois fermement qu'il faut le modifier. Il faut revoir la façon dont les sénateurs sont élus.

Pourquoi pas? Je ne vois aucune objection à être élu et à rendre des comptes aux électeurs d'Elk Island. Si mes électeurs n'aiment pas ce que je dis ou fait, ils peuvent se débarrasser de moi. En fait, avec un gouvernement réformiste, ils n'auraient pas à attendre la tenue d'élections, car nous favorisons un contrôle vraiment démocratique du gouvernement par le peuple. Nous affirmons que nos électeurs pourraient nous révoquer entre deux élections s'ils sont vraiment offensés par nos activités.

Par contre, avec les sénateurs, les Canadiens ne peuvent rien. Les sénateurs sont nommés par quelqu'un d'autre. Les Canadiens n'ont pas leur mot à dire dans ces nominations et aucun compte n'est jamais rendu. Il n'y a aucune raison au monde pour qu'un sénateur fasse attention à ce qu'il fait.

Nous avons certes l'exemple, à l'heure actuelle, d'un sénateur de l'Alberta qui ne représente absolument pas ce que les Albertains pensent et veulent. Pourtant, ce sénateur touche quand même son salaire, alors qu'il travaille à temps plein en tant que directeur de campagne électorale pour les conservateurs. Il est le directeur de campagne des conservateurs en Alberta et il touche son plein salaire de sénateur pendant ce temps. Nos électeurs trouvent cela offensant. Il n'y a aucune façon de se débarrasser de lui, car il est nommé à vie.

 

. 1825 + -

Monsieur le Président, je crois que mon temps de parole est écoulé. Je pourrais parler longtemps sur cette question. Je n'en ai certes pas terminé, mais je vais m'arrêter là.

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, comme c'est souvent le cas, les libéraux n'ont pas compris grand-chose à mon projet de loi. Ils ont parlé d'un Sénat triple E. Quant à moi, j'ai parlé d'un seul volet du Sénat triple E, celui du Sénat élu. Il est possible de faire quelque chose à cet égard dès aujourd'hui, sans modifier la Constitution.

J'ai été étonné d'entendre le député conservateur dire que c'est impossible sans modification constitutionnelle. Cela s'est fait. Cela s'est fait avec Stan Waters. C'est faisable. Mais pour les libéraux, c'est tout ou rien. Nous avons vu le volet «rien». C'est ce que nous avons vu de la part des différents gouvernements de cette allégeance qui se sont succédé à la Chambre depuis une centaine d'années.

Mon projet de loi ne concerne que l'élection des sénateurs. Il ferait en sorte que les sénateurs soient élus et qu'ils aient des comptes à rendre à ceux qui les élisent, au lieu d'être nommés par un parti politique.

Cela ne règle pas tous les problèmes. Comme l'a dit le député néo-démocrate, la plupart des Canadiens préféreraient se crever un oeil plutôt que de procéder à une modification de la Constitution. Je comprends cela. Les Canadiens ne sont pas prêts à une modification constitutionnelle. Je respecte cela. Mais il est possible de faire quelque chose aujourd'hui à propos de cette question, à propos de l'élection des sénateurs.

Procédons par étapes, au lieu d'attendre et d'essayer de tout faire en même temps. Nous avons vu que l'accord n'a pas permis d'obtenir les résultats souhaités et ce n'est pas le gouvernement actuel qui le permettra. Procédons par étapes, et réglons le problème. Il faut se traîner avant de marcher. Réglons progressivement les problèmes, mais au moins, montrons à la Chambre une certaine détermination politique à régler les problèmes au lieu de nous contenter des beaux discours des députés d'en face qui parlent, mais qui, au bout du compte, ne font rien.

Je pense que c'est faisable. Les élections qui ont déjà eu lieu en Alberta le prouvent. Je propose que nous allions de l'avant.

Enfin, monsieur le Président, je demande le consentement unanime afin que mon projet de loi puisse faire l'objet d'un vote.

Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Le temps prévu pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulé, et l'article est rayé du Feuilleton.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour revenir sur une question que j'ai posée à la Chambre, le 5 novembre dernier, concernant la première nation Shamattawa.

Cette première nation se heurte à des problèmes sociaux horribles. Il y a eu plus de 120 tentatives de suicide depuis 1992 et 80 p. 100 des jeunes ont une dépendance aux solvants. Les répercussions personnelles et sociales de cette dépendance aux solvants constituent une crise sur le plan humain à laquelle nous ne pouvons rester indifférents.

Les efforts actuellement déployés pour y remédier se révèlent vains. La pauvreté qui est à l'origine des problèmes n'est pas d'hier et il faut désespérément y mettre un terme. Comme il n'y a pas le moindre traitement de la toxicomanie au sein même de la plupart des premières nations, y compris la nation Shamattawa, les toxicomanes doivent quitter leur foyer pour se faire traiter. Après le traitement, ils reviennent vivre sans le moindre soutien dans leur collectivité, où sévissent la pauvreté et le désespoir qui étaient la source de leur problème. Il faut absolument améliorer les conditions sociales au sein des premières nations des régions éloignées et assurer un soutien permanent aux toxicomanes qui rentrent chez eux après un traitement.

 

. 1830 + -

La Commission royale sur les peuples autochtones a reconnu le problème et la nécessité d'y apporter des solutions durables. Elle a recommandé l'établissement de centres de guérison dans les communautés perturbées comme Shamattawa, afin d'assurer un soutien permanent dont ont besoin les toxicomanes après un traitement pour ne pas retomber dans leur dépendance.

Il y a plus de deux mois, le chef de Shamattawa a lui-même proposé un centre de guérison à la ministre des Affaires indiennes. L'absence de réponse m'a poussée à demander, le 5 novembre, pourquoi le gouvernement ne répondait pas aux appels de la première nation Shamattawa. On m'a tenu le genre de propos creux et évasifs auxquels, nous, de ce côté-ci de la Chambre, sommes beaucoup trop habitués.

Le secrétaire parlementaire a dit que le gouvernement s'inquiétait du niveau de pauvreté, notamment dans la localité de Shamattawa, et qu'il était très conscient des problèmes de cette première nation. Il a ajouté que le gouvernement tâchait de résoudre ces problèmes avec diligence. C'est bien facile à dire, mais, malgré cette inquiétude et cette diligence, les habitants de Shamattawa n'ont pas encore vu de résultats concrets. Pendant que le gouvernement s'interroge sur les mesures à prendre face à la crise, des enfants de Shamattawa qui n'ont parfois que quatre ans deviennent dépendants des solvants et des sans-abri restent à geler à l'extérieur.

Il y a six jours, des fonctionnaires des Affaires indiennes à Winnipeg ont rencontré le chef de Shamattawa, et ils ne se sont engagés à fournir aucune aide. Pendant cette réunion, il y a eu à Shamattawa un autre décès lié à l'usage de solvants. Un adolescent sous l'effet de solvants a tué un autre garçon par balle.

Le centre de guérison qui est proposé pour Shamattawa coûterait moins de 1 million de dollars au gouvernement. Nous avons appris récemment que le gouvernement donnait 10 millions de dollars pour lutter contre la pauvreté dans le nord de la Russie. Je n'ai rien contre l'aide à l'étranger, mais Shamattawa a demandé moins du dixième de ce que la Russie vient d'obtenir, et elle n'a rien reçu.

Il n'y a bien d'autres localités autochtones éloignées qui sont aux prises avec des problèmes sociaux aussi désespérés que ceux de Shamattawa. Il est criminel que, dans un pays riche comme le Canada, on tolère ces conditions. Il suffit d'une aide relativement modeste.

Le gouvernement va-t-il s'engager à accorder une aide conséquente à la première nation de Shamattawa et à d'autres collectivités du Nord à la première occasion?

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je réponds à la question de la députée de Churchill au nom de la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien au sujet des problèmes sociaux urgents de la première nation Shamattawa.

Je le répète, le gouvernement est très préoccupé et troublé par les conditions dans laquelle se trouve la première nation Shamattawa, et il est en train de prendre des mesures à cet égard. Nous avons rencontré des représentants de cette première nation au cours des derniers mois pour trouver des solutions à long terme et améliorer les conditions de vie des membres de cette première nation.

Durant la rencontre la plus récente, qui s'est tenue le 20 novembre, des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et de Santé Canada ont rencontré le chef de la première nation Shamattawa et le grand chef Francis Flett, que je connais personnellement au sein de l'organisation qui s'appelle Manitoba Keewatinowi Okimakanak. Ils ont discuté des moyens à prendre pour améliorer les conditions de vie des jeunes et réduire les taux élevés de suicide et de consommation abusive de solvants.

Une solution qui a été proposée est que la première nation construise un stade de glace et un centre récréatif pour régler ces problèmes sociaux et lutter contre le désoeuvrement chez les jeunes. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien est heureux d'engager 400 000 $ dans la construction de ces installations, que la première nation prévoit de commencer au printemps.

Le ministère a également dégagé 33 000 $ pour aider la première nation dans le développement de sa propre stratégie de ressources humaines à long terme. Cette stratégie aura pour cibles les possibilités d'éducation et d'emploi pour les jeunes, leur ouvrant plus de perspectives pour un avenir meilleur. Ce n'est pas tout et nos efforts ne s'arrêteront pas là.

Dans le budget de 1996-1997 de la première nation Shamattawa, en plus des déboursés habituels pour des choses, comme le logement, qui influent sur les conditions sociales et le moral des habitants des réserves, nous avons consacré 2,86 millions de dollars au logement, fournissant ainsi 33 logements supplémentaires aux membres de la bande, et 4,73 millions pour une usine de traitement des eaux.

En guise de conclusion, je dirai que nous travaillé avec beaucoup de soin là-dessus. Je remercie la députée de ses questions. Nous tentons de résoudre ces graves problèmes que connaissent un certain nombre de collectivités au Canada avec leurs dirigeants autochtones. Nous voulons les résoudre tout autant que la députée de Churchill.

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 33.)