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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 21 mars 2003




· 1300
V         Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.))
V         Mme Sharon Menow (membre, «Aboriginal Peoples Council of Toronto»)
V         Le président
V         M. Roger Obonsawin (président, «Aboriginal Peoples Council of Toronto»)

· 1305

· 1310
V         Le président
V         Mme Sharon Menow

· 1315
V         Mme Jackie Mc Clure («Aboriginal Peoples Council of Toronto»)

· 1320
V         Le président
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)
V         M. Roger Obonsawin
V         M. Pat Martin

· 1325
V         M. Roger Obonsawin
V         Le président
V         M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.)
V         M. Roger Obonsawin
V         M. Stan Dromisky
V         M. Roger Obonsawin
V         M. Stan Dromisky

· 1330
V         M. Roger Obonsawin
V         Le président
V         M. Roger Obonsawin
V         Le président
V         M. Michael Cheena («Aboriginal Urban Alliance of Ontario»)

· 1335

· 1340
V         Le président
V         M. Pat Martin

· 1345
V         M. Michael Cheena
V         M. Pat Martin
V         M. Michael Cheena
V         M. Pat Martin
V         M. Michael Cheena
V         M. Pat Martin
V         M. Michael Cheena
V         Le président
V         Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.)

· 1350
V         M. Michael Cheena
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         M. Michael Cheena
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         M. Michael Cheena
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         M. Michael Cheena
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         M. Michael Cheena
V         Mme Nancy Karetak-Lindell
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         M. Michael Cheena
V         M. Pat Martin
V         Mme Donna Marshall («Aboriginal Urban Alliance of Ontario»)

· 1355
V         M. Pat Martin
V         M. Michael Cheena
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         Mme Donna Marshall
V         Le président
V         M. Stan Dromisky
V         M. Michael Cheena
V         M. Stan Dromisky
V         M. Michael Cheena
V         M. Stan Dromisky
V         M. Michael Cheena
V         M. Stan Dromisky
V         M. Michael Cheena
V         M. Stan Dromisky
V         M. Michael Cheena
V         M. Stan Dromisky

¸ 1400
V         M. Michael Cheena
V         Le président
V         M. Michael Cheena
V         Le président
V         M. Mark Stevenson (président, «Indigenous Bar Association»)

¸ 1405

¸ 1410

¸ 1415

¸ 1420

¸ 1425

¸ 1430
V         Le président
V         M. Pat Martin

¸ 1435
V         M. Mark Stevenson
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.)
V         M. Mark Stevenson

¸ 1440
V         M. Rick Laliberte
V         M. Mark Stevenson
V         M. Rick Laliberte
V         M. Mark Stevenson
V         M. Rick Laliberte
V         M. Mark Stevenson
V         Le président
V         M. Pat Martin
V         M. Mark Stevenson

¸ 1445
V         M. Pat Martin
V         M. Mark Stevenson
V         M. Pat Martin
V         M. Mark Stevenson
V         M. Pat Martin
V         M. Mark Stevenson
V         Le président
V         M. Stan Dromisky

¸ 1450
V         M. Mark Stevenson
V         M. Stan Dromisky
V         M. Mark Stevenson
V         M. Stan Dromisky
V         M. Mark Stevenson
V         Le président
V         M. Pat Martin

¸ 1455
V         M. Mark Stevenson
V         M. Pat Martin
V         M. Mark Stevenson
V         M. Pat Martin
V         Le président
V         M. Mark Stevenson
V         Le président
V         Mme Ava Hill (membre des «Six Nations of the Grand River», À titre individuel)

¹ 1500

¹ 1505
V         Le président
V         Mme Ava Hill
V         Le président
V         Mme Ava Hill
V         Le président
V         M. Philip Monture (membre des «Six Nations of the Grand River», À titre individuel)
V         Le président
V         Mme Audrey Logan (À titre individuel)

¹ 1510

¹ 1515
V         Le président
V         Mme Rebeka Tabobondung (À titre individuel)

¹ 1520
V         Le président
V         M. Dan Smoke (À titre individuel)
V         Mme Mary Lou Smoke (À titre individuel)
V         M. Dan Smoke
V         Mme Mary Lou Smoke
V         M. Dan Smoke
V         Mme Mary Lou Smoke
V         M. Dan Smoke
V         Le président
V         Mme Ethel Lavalley (À titre individuel)

¹ 1525
V         Le président
V         Mme Deborah Richardson (À titre individuel)
V         Le président
V         Mme Amber Silversmith (À titre individuel)
V         Le président

¹ 1530
V         Mme Amber Silversmith
V         Le président
V         M. Tim Brown (À titre individuel)
V         Le président
V         M. Dean Sayers (À titre individuel)
V         Le président
V         M. Patrick Lavalley (À titre individuel)

¹ 1535
V         Le président
V         M. Patrick Lavalley
V         Le président
V         Mme Rosie Mosquito (À titre individuel)
V         Le président
V         M. Kevin Daniels (À titre individuel)

¹ 1540
V         Le président
V         M. Luke Nicholas (À titre individuel)
V         Le président
V         Mme Lisa Thundercloud (À titre individuel)

¹ 1545
V         Le président
V         M. John Bigeye (À titre individuel)
V         Le président
V         Mme Merie Rita Anderson (À titre individuel)
V         Le président










CANADA

Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles


NUMÉRO 050 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 21 mars 2003

[Enregistrement électronique]

·  +(1300)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Nous allons reprendre nos séances publiques sur le projet de loi C-7, Loi concernant le choix des dirigeants, le gouvernement et l'obligation de rendre compte des bandes indiennes et modifiant certaines lois.

    Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de l'Aboriginal Peoples Council of Toronto, soit Roger Obonsawin, président, et Sharon Menow, membre. Je vois qu'une jeune dame vous accompagne. Je vais vous demander de la présenter, puis nous allons lui donner une carte, pour que tout le monde sache qu'elle participe, malgré son jeune âge, au processus démocratique.

+-

    Mme Sharon Menow (membre, «Aboriginal Peoples Council of Toronto»): Il s'agit de ma fille, Jackie McLure.

+-

    Le président: Bonjour Jackie. Bienvenue. C'est comme une table de cuisine pour nous. Je veux que vous soyez bien à l'aise. J'espère que M. Obonsawin va vous laisser répondre à l'une des questions s'il croit que vous pouvez le faire. Je sais que vous le pouvez. Peut-être que les députés vont poser des questions à notre jeune témoin. Peut-être va-t-elle répondre à toutes les questions, puis nous pourrons amender le projet de loi en conséquence.

    Nous vous invitons à présenter votre exposé, puis nous espérons qu'il restera suffisamment de temps pour les questions. 

+-

    M. Roger Obonsawin (président, «Aboriginal Peoples Council of Toronto»): Merci. Bonjour à tous.

    Nos enfants entendent parler des traités dès leur très jeune âge par leurs grands-parents. Ces connaissances sont transmises de génération en génération. Ils sont donc très au courant des processus politiques et savent qu'être Indien est une chose politique, c'est bien clair. Il n'y a pas de choix au Canada. Je suis donc heureux que Jackie soit ici avec nous pour le confirmer.

    Je tiens à vous remercier, au nom de l'Aboriginal Peoples Council of Toronto, de me permettre d'aborder une question très importante: «Est-ce que le comité devrait appuyer l'adoption du projet de loi C-7, Loi sur la gouvernance des Premières nations, avec ou sans amendement?»

    L'Aboriginal Peoples Council a été créé il y a un an et demi afin d'analyser, dans une optique politique, les problèmes touchant les plus de 60 000 Autochtones vivant dans la région du Grand Toronto. Nous tiendrons nos premières élections le 5 mai prochain. D'ici là, un conseil provisoire a été formé pour préciser le fonctionnement et les structures d'un conseil permanent et pour régler quelques problèmes pressants.

    Comme vous le savez, monsieur le président, j'ai présenté un exposé au comité à titre de sénateur de l'Association nationale des centres d'amitié le 27 février. Ceux qui faisaient des présentations ont été invités alors à aborder des dispositions précises du projet de loi plutôt que ses grands principes. Après avoir analysé la procédure parlementaire, je crois comprendre que des questions peuvent et devraient être posées sur les principes du projet de loi avant la deuxième lecture, mais que par la suite, il faut se limiter uniquement aux questions touchant des dispositions particulières. La position du Conseil est limpide: Nous nous opposons aux principes sous-tendant le projet de loi et nous ne sommes pas prêts à discuter des détails de la mesure législative qui est proposée. Voici pourquoi.

    Premièrement, le ministre Nault a répété à maintes reprises que les conseils et les chefs de bande devront rendre plus de comptes à leurs membres aux termes de ce projet de loi. Le ministre a déclaré plus récemment que ce texte législatif s'imposait pour assurer le contrôle des salaires des chefs, dont 17 ont touché un traitement supérieur à 100 000 $ l'année dernière. Dans les faits, il y a plus de 600 chefs des Premières nations dans l'ensemble du Canada, dont seulement 17 qui reçoivent des salaires supérieurs à 100 000 $. Est-ce que le ministre adopterait un projet de loi dans le but d'assurer le contrôle de son salaire, de celui du président d'une banque ou du PDG d'une société d'État? Ce projet de loi n'a pas de rapport avec la reddition de comptes. Comment font foi les propos du ministre, il s'agit plutôt d'une mesure qui a trait au racisme et à la poursuite du colonialisme. Est-ce que le travail, la détermination et le dévouement d'un Autochtone ont moins de valeur que ceux d'un non-Autochtone?

    Monsieur le président, je soutiens que ce projet de loi est un leurre, qu'il vient rompre les liens spéciaux qui unissent les peuples autochtones et le gouvernement du Canada aux termes des traités. Ce serait une insulte à mon intelligence que de penser que je pourrais voir les choses autrement.

    Deuxièmement, l'objectif véritable de ce projet de loi et des textes législatifs qui l'accompagnent lesquels ont été proposés par le ministre Nault, est de supprimer les droits ancestraux et issus de traités reconnus et affirmés par l'article 35 de la Constitution. Ce projet de loi ne fera que renforcer la mainmise exercée par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien sur les affaires autochtones.

·  +-(1305)  

    Troisièmement, il existe des solutions de rechange valables et éprouvées pour remplacer ce projet de loi et les mesures connexes. Ces solutions sont concrétisées avec succès avec les Premières nations aux États-Unis, comme en témoigne l'exposé présenté aux membres du comité par M. Stephen Cornell, de l'Université Harvard. J'aimerais citer une déclaration faite par le président Richard Nixon devant les membres du Congrès américain le 8 juillet 1970. Il existe une corrélation directe entre cette nouvelle politique et la situation décrite dans les études menées à l'Université Harvard.

Il est grand temps que les politiques du gouvernement fédéral touchant les Indiens commencent à reconnaître et à mettre à profit la capacité et les perspectives des peuples indiens... La première et la plus importante question à laquelle il faut répondre dans cette perspective a trait aux liens historiques et juridiques unissant le gouvernement fédéral et les collectivités indiennes...



La politique d'extinction forcée des droits est mauvaise... Elle signifie que le gouvernement fédéral s'est arrogé un rôle de tuteur des collectivités indiennes pour être généreux envers un peuple défavorisé et qu'il peut donc abandonner ses responsabilités unilatéralement, quand bon lui semble... Les liens spéciaux entre les Indiens et le gouvernement fédéral découlent plutôt en fait d'obligations solennelles acceptées par le gouvernement des États-Unis... par le biais de traités écrits et d'ententes officielles et non officielles...



L'autodétermination des peuples indiens peut et doit être encouragée sans faire peser la menace d'une extinction éventuelle des droits... Nous devons garantir aux Indiens qu'ils peuvent être maîtres de leur destin sans être séparés involontairement du groupe tribal. Nous devons aussi affirmer clairement que les Indiens peuvent se soustraire au contrôle du fédéral sans perdre son appui et son soutien...

    J'aimerais souligner que j'ai beaucoup d'expérience au chapitre de l'élaboration de politiques et de la prestation de formation pour des organismes autochtones en matière de gouvernance et de reddition de comptes, notamment. J'en ai conclu que le processus législatif est la voie la moins efficace pour favoriser la reddition de comptes. Mon expérience a consisté à tenter de faire appliquer des textes législatifs comme des lois sur les sociétés et des lois redditionnelles destinées aux organismes de bienfaisance. Le problème est qu'il n'y a pratiquement pas de processus de contrôle et que le coût des litiges découlant de l'exécution sont prohibitifs.

    À mon avis, la meilleure voie à emprunter est celle des normes de gouvernance et de fonctionnement établies de manière responsable, en misant sur la collaboration. De cette manière, les organismes de financement ont la possibilité de récompenser les bons comportements. Combinée à un processus efficace de règlement des différends, qui peut faire appel ou non à un tiers parti comme un ombudsman, cette approche favorise assurément la reddition de comptes et l'efficacité. Je soutiens que l'approche actuelle du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a exactement l'effet contraire. Manifestement, le ministère récompense les mauvais comportements en accordant et en retenant des fonds avec le dessein explicite de conclure des ententes avec les conseils de bandes et les organismes qui répondent à ces critères. Je soutiens également que c'est à ce niveau que se situe la majorité des problèmes de reddition de comptes.

    Nous proposons que le comité recommande au Parlement de ne pas poursuivre l'étude du projet de loi C-7 en deuxième lecture. Comme solution de rechange au projet de loi C-7 et au texte législatif qui l'accompagne, nous recommandons que le gouvernement du Canada modifie sa politique actuelle qui consiste à dominer et à assimiler les Autochtones, et qu'il la remplace par une politique de compromis et de coexistence, comme le recommandaient la Commission royale sur les peuples autochtones et le président Richard Nixon dans l'allocution qu'il faisait en 1970 devant les membres du Congrès américain. Je vous rappelle que ce n'était qu'un an après le dépôt du Livre blanc de 1969, qui a renforcé les politiques actuelles. Nous proposons que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien n'ait plus rien à voir dans les négociations et l'élaboration des politiques et textes législatifs visant les Autochtones et qu'un ministre d'État soit nommé pour négocier un nouvel accord avec les Premières nations, en respectant l'esprit et l'intention des traités, comme l'a recommandé la Commission royale sur les peuples autochtones. Nous proposons que cette nouvelle entente soit appelée Loi sur les relations Canada-Autochtones, comme l'a recommandé également la Commission royale sur les peuples autochtones. Nous recommandons finalement que les questions de reddition de comptes soient abordées par l'entremise de normes de pratiques établies par les gouvernements des Premières nations et contrôlées au moyen d'un processus de règlement des différends supervisé par un ombudsman, comme cela était recommandé dans le rapport du Comité spécial sur l'autonomie politique des Indiens, soit le Rapport Penner-Jamieson.

    Merci, monsieur le président. Chi-Meegwech. Mes cordiales salutations.

    Je vais maintenant céder la parole à Sharon et à sa fille.

·  +-(1310)  

+-

    Le président: Merci.

    Allez-y.

+-

    Mme Sharon Menow: Ce document s'intitule «L'avenir de nos enfants est en péril: Le projet de loi C-7, Loi sur la gouvernance des Premières nations».

    Bonjour, je suis membre de la Nation crie et du clan de l'ours. Mon nom spirituel est Strong Heart Eagle Woman. D'abord et avant tout, je reconnais et remercie les Mississaugas of the New Credit, dont nous occupons le territoire. Je suis reconnaissante au président, Roger Obonsawin, de m'avoir invitée à témoigner devant les membres du comité au nom de l'Aboriginal Peoples Council of Toronto. Je remercie les membres du comité permanent de me permettre de m'exprimer sur cette mesure législative des plus importantes connues sous le nom de projet de loi C-7, Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    À mon avis, la LGPN et les textes législatifs connexes qui ont été présentés à la Chambre des communes par le ministre des Affaires indiennes, Robert Nault, constituent une attaque directe contre nos droits ancestraux ou issus de traités. Ils contreviennent aussi à la Constitution du Canada, paragraphe 35(1), qui reconnaît notre droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Je m'oppose donc avec véhémence au projet de loi C-7, que je rejette et dénonce dans son intégralité, tout comme les textes législatifs qui l'accompagnent, car ils violent nos droits ancestraux et issus de traités, au point où ces droits pourraient disparaître complètement.

    Avant la promulgation de la Loi sur les Indiens, les problèmes étaient soumis à toute la collectivité. Un conseil siégeait alors durant une longue période, jusqu'à ce que chaque représentant ait eu l'occasion de s'exprimer. Les discussions se poursuivaient jusqu'à ce qu'un consensus soit dégagé. La tradition voulait qu'on tienne très sérieusement compte des effets que les décisions auraient sur les enfants de la génération actuelle et des sept générations suivantes. Lorsque nos ancêtres ont signé les traités, ce facteur a été pris en compte et intégré aux droits que nous exerçons maintenant. À la lumière des nombreuses analyses juridiques auxquelles ont été soumis les textes législatifs regroupés qui sont à l'étude, je conclus que nos futures générations d'enfants risquent de ne pas pouvoir jouir des droits ancestraux et issus de traités. Le projet de loi C-7 présente beaucoup de lacunes, tellement que cette mesure législative doit être rejetée en bloc.

    Par exemple, aucune disposition de non-dérogation ne vient protéger les Premières nations et reconnaître leur droit à l'autonomie gouvernementale. De plus, si nous ne mettons pas au point nos propres structures dans un délai de deux ans, les textes législatifs imposés par défaut entreront en vigueur sans qu'on tienne compte de notre point de vue, de nos systèmes de valeurs, de nos traditions et de notre culture. Qui plus est, aucun fonds supplémentaire n'est accordé pour élaborer une structure bien à nous.

·  +-(1315)  

    Si le projet de loi C-7 doit être rejeté, c'est parce qu'il n'y a pas eu de consultation valable, du fait que le ministre Nault a échelonné le processus sur une période de six mois seulement. Comment peut-on imaginer pouvoir visiter en si peu de temps plus de 633 collectivités à travers le pays, dont certaines sont situées dans des endroits très éloignés et très difficiles d'accès? Manifestement, les consultations ont été très mal menées et elles ont échoué lamentablement, comme en fait foi le taux de participation des Premières nations, qui est inférieur à 1 p. 100. La majorité des personnes consultées résidaient en milieu urbain: on a ignoré celles qui vivent dans les réserves et qui subiront les répercussions les plus graves.

    Il est question de reddition de comptes en vue d'éliminer la corruption dans ce projet de loi, mais de quelle manière viendrait-il protéger la communauté advenant qu'un chef se serve des terres en garantie pour un prêt consenti à l'étranger et qu'il ne rembourse pas? Lorsque tout l'argent aura été dépensé, qui assumera le titre des terres et qu'adviendra-t-il des gens qui vivent sur ces terres? Que restera-t-il pour nos enfants?

    Les mesures législatives afférentes viennent abolir notre immunité fiscale. De quelle façon le fait de payer des taxes peut enrichir nos mères monoparentales qui élèvent leurs enfants à la maison et qui vivent sous le seuil de la pauvreté? Il aurait mieux valu utiliser la somme de 15 millions de dollars qui a été accordée à ce projet pour améliorer les conditions de vie de nos enfants qui vivent dans la pauvreté, comme dans le tiers monde. Ne serait-ce pas votre priorité si ces enfants étaient les vôtres?

    Finalement, j'aimerais inviter le gouvernement de ce pays à se retirer et à laisser aux Premières nations le soin de diriger l'élaboration des politiques s'appliquant à leurs enfants et aux futures générations et de concevoir leur propre vision.

    Je vous invite maintenant à écouter ma fille, Jackie McLure, qui a neuf ans.

    Meegwech.

+-

    Mme Jackie Mc Clure («Aboriginal Peoples Council of Toronto»): Allo. Mon nom spirituel est Circle of the Clouds. Je suis membre de la Nation crie et du clan de l'ours. Mon nom anglais est Jackie. Je sais que j'ai simplement l'air d'une jeune Autochtone comme toutes les autres, mais j'ai vraiment beaucoup à dire.

    Lorsque mes ancêtres ont signé le traité, il était clair que nous avions des droits. Je pense qu'il est mal que vous preniez nos droits et que vous nous disiez quoi faire. J'aimerais avoir un bel avenir. Au nom des enfants des Premières nations, arrêtez la LGPN s'il vous plaît.

    Je vous remercie de votre temps. Meegwech.

·  +-(1320)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, Jackie. Votre député ferait bien de se surveiller, parce que vous vous en venez.

    Nous pouvons faire un tour de cinq minutes. Cela va nous laisser quelques minutes pour conclure.

    Monsieur Martin.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Merci à tous d'être ici aujourd'hui et de nous avoir présenté ce mémoire très touchant. Il ne laisse place à aucun doute sur votre profonde conviction à l'égard de ces questions importantes. Je vous félicite d'avoir préparé un mémoire et une analyse si détaillés, même si je sais que vous n'aviez accès à aucun financement pour préparer un mémoire sur ces changements importants à la Loi sur les Indiens.

    J'aimerais revenir directement à l'une de vos recommandations. On nous a déjà fait des recommandations semblables à votre troisième recommandation. L'idée est excellente, et je crois qu'elle vient de la Commission royale sur les peuples autochtones. Personne, d'après ce que j'ai entendu d'un océan à l'autre, ne veut de cela. Personne ne veut que 15 millions de dollars soient dépensés en fausses consultations et que 110 millions par année soient alloués à la mise en oeuvre d'un projet imposé de force aux Premières nations qui n'en veulent pas ni n'en ont besoin. Pouvez-vous nous parler d'une meilleure façon de dépenser cet argent, s'il doit être dépensé, soit de la nomination d'un ministre d'État chargé de négocier de nouveaux accords en vue d'une nouvelle loi sur les relations avec les Autochtones?

+-

    M. Roger Obonsawin: Je crois qu'une partie des fonds—je n'en consacrerais pas beaucoup à cela—pourrait servir à trouver des moyens d'amener les Affaires indiennes à rendre plus de comptes à notre peuple. Le ministère a l'obligation fiduciaire d'agir dans le meilleur intérêt de notre peuple, mais nous ne cessons de multiplier les poursuites parce qu'il ne respecte ses obligations et qu'il utilise nos ressources. C'est là où la reddition de comptes doit commencer, pas dans nos conseils. C'est pourquoi nous recommandons la nomination d'un ministre d'État dépourvu de pouvoirs de financement et chargé d'enclencher le processus afin que le financement ne serve pas à manipuler les résultats en fonction de ce que vous souhaitez. Nous pouvons nous asseoir à une table d'égal à égal pour régler les détails de la Loi sur les relations Canada-Autochtones sans interférence ni coercition, des valeurs contraires au concept de l'autonomie gouvernementale, mais qui persistent au ministère.

    Cet argent pourrait être bien mieux dépensé. Nous dépensons déjà de l'argent pour concevoir nos propres solutions, et cet argent ne provient pas du gouvernement, merci. Nous avons en place des structures traditionnelles que nous pouvons développer. Il serait bien plus judicieux d'investir dans ces projets.

+-

    M. Pat Martin: Merci.

    Même si le projet de loi est qualifié de loi sur la gouvernance, beaucoup sont d'avis qu'il a très peu à voir avec la gouvernance. En fait, je vous demanderais de vous exprimer sur l'un des arguments qui a été avancé, soit sur le fait qu'il va à l'encontre de l'idée même de l'autonomie gouvernementale, parce qu'il impose des codes de gouvernance, alors que l'un des aspects fondamentaux de l'autonomie gouvernementale est qu'elle permet à un peuple d'établir ses propres institutions de gouvernance en fonction de ses coutumes et de ses traditions. Pouvez-vous nous parler de la contradiction apparente qui se dégage du titre du projet de loi?

·  +-(1325)  

+-

    M. Roger Obonsawin: Si je comprends bien le principe du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, il ne s'agit pas d'un droit conféré par une loi, mais bien d'un droit qui a toujours existé. Comment pouvez-vous proposer une loi sur la gouvernance qui ne satisfait pas au principe du droit inhérent? Voilà à quoi je suis si vivement opposé. Si nous sommes des nations souveraines, il faut commencer à se comporter comme tel et cela signifie, entre autres, d'élaborer des codes, ce que font bon nombre de nos nations. Certaines s'y prennent de manière plus traditionnelle, en s'appuyant sur la Grande loi de la paix ou sur la codification de la nation crie Pimicikamak dont j'ai déjà parlé au comité et qui a, je crois, présenté des mémoires. Cela signifie qu'elle en a l'autorité. Le véritable pouvoir de gouvernance vient des collectivités, non pas d'un autre gouvernement. La nation crie Pimicikamak a prouvé d'où viennent son pouvoir et son autorité. C'est là la meilleure façon de faire respecter l'exigence de reddition de comptes.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Monsieur Dromisky, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Monsieur le président, je vous remercie.

    Je remercie beaucoup le témoin d'être venu. Il est bon d'entendre le point de vue des jeunes.

    Vous êtes suffisamment intelligent pour vous rendre compte, puisque vous participez à ce processus depuis de nombreuses années, que ce qui est proposé dans le projet de loi C-7 est en réalité le résultat de toute une série d'épisodes, d'expériences, de plaintes, de problèmes et ainsi de suite vécus avec les Premières nations et au sein même des Premières nations, en d'autres mots les problèmes internes survenus durant de nombreuses années. Le résultat est ce qu'on appelle le projet de loi C-7, qui couvre peut-être trop de domaines à la fois. Je n'en suis pas sûr, mais peut-être que la bouchée est trop grosse. L'essentiel à retenir, c'est que ces problèmes sont liés au genre de choses qui se passent dans une réserve, au sein même d'une réserve, entre ceux qui ont le pouvoir et ceux qui sont soumis aux décisions des conseils et des chefs. Il existe dans certaines réserves des irrégularités si je me fie à des expériences qu'a vécues notre comité et à des témoignages qui ont déjà été faits dans d'autres provinces. Certains témoins ont qualifié certains chefs de dictateurs. Ils ont parlé de pratiques diaboliques, de gens qui sont punis pour s'être opposés à des politiques mises en oeuvre par le chef, à toutes sortes d'irrégularités. Je ne parle pas de la majorité des chefs au Canada, mais bien d'une minorité.

    Je ne voudrais pas que nous sacrifiions les droits inaliénables de la minorité. Vous parlez d'autodétermination et de tout le reste, qui est déjà couvert pour le bénéfice de la majorité. Comment nous aiderez-vous à rectifier le problème sur plusieurs réserves du pays? Nous n'avons aucune idée du nombre de réserves touchées, mais j'estime qu'il n'y en a pas que trois ou quatre. Nous entendons trop de récits du genre. Pouvez-vous nous aider? Comment pouvons-nous nous y prendre pour aider de la manière la plus efficace possible ceux qui n'ont pas les droits que vous avez dans cette région-ci du pays, vous qui avez un leadership efficace qui a adopté le genre de politiques au fil des ans qui vous permet de vivre au sein d'une collectivité très démocratique?

+-

    M. Roger Obonsawin: Je comprends ce que vous me demandez. Je reçois de pareils appels très souvent de membres de la collectivité—un sentiment de frustration et l'absence d'un intermédiaire. Mais pourquoi faut-il que ce soit vous qui régliez ces questions? Le ministère a été prié de nombreuses fois d'intervenir dans certains de ces dossiers, mais il ne souhaite pas en porter la responsabilité politique. Il alimente lui-même le problème, d'ailleurs, puisqu'une grande partie de l'argent investi sert, comme je l'ai dit, à se retrouver dans des situations d'abus où l'argent sert à faire progresser les objectifs du MAINC.

+-

    M. Stan Dromisky: Vous vous dérobez, monsieur.

+-

    M. Roger Obonsawin: Non, je ne me dérobe pas.

+-

    M. Stan Dromisky: J'estime qu'il faudrait que les Autochtones et les Premières nations du pays se serrent les coudes pour le bénéfice de tous les Autochtones du Canada, pour améliorer leur qualité de vie. Je suis député depuis 1993. Les premiers à me pressentir en 1988, quand je projetais de me présenter à l'élection—j'ai été candidat en 1988, mais je n'ai pas été élu—étaient des Autochtones. Mon bureau accueille plus d'Autochtones qui viennent se plaindre et raconter leurs histoires d'horreur que de personnes qui viennent se plaindre des armes à feu, de commerçants, d'entrepreneurs et ainsi de suite. Ils exigent que le gouvernement fédéral fasse quelque chose, mais il n'y a pas d'organisme d'exécution de la loi qui soit prêt à le faire.

·  +-(1330)  

+-

    M. Roger Obonsawin: Ce que vous dites m'irrite, parce que j'ai signalé ce genre de situations—et ce n'était pas auprès de conseils de bande—aux sources de financement. Je mentionnais qu'on pourrait agir en invoquant la Loi sur les corporations , mais elles ont refusé de l'appliquer. Il a fallu que ce soit la collectivité qui le fasse. Le gouvernement refusait d'exécuter la loi. Alors pourquoi adopter une loi pour faire respecter quelque chose que vous ne souhaitez même pas faire respecter? Ce n'est pas une dérobade. Je dis qu'il existe d'autres moyens de traiter de ces questions, l'ombudsman pour les cas très particuliers et des codes internes au sein de la collectivité. Ce sont là des travaux qui sont en cours et qui devraient continuer. Je dis qu'il faut que nous prenions le contrôle de ces dossiers en tant que nations, non pas en tant que simples particuliers. Une Première nation n'est pas en réalité une réserve, elle est beaucoup plus que cela, par exemple la nation Ojibway, la Nation crie. En tant que collectif, il faut que nous nous prenions en charge et que nous commencions à appliquer nos propres codes et des normes avec lesquelles nous pouvons travailler.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Si vous souhaitez ajouter quelques mots avant de partir, je vous invite à le faire maintenant. Vous avez deux minutes.

+-

    M. Roger Obonsawin: Je serai très bref. Je vais suivre qui vote pour et qui vote contre le projet de loi. Je sais—et ce que je dis là s'adresse aux députés libéraux—quelles consignes vous avez reçues, soit de faire adopter ce texte. Vous n'agirez pas selon votre conscience si vous suivez les consignes de votre chef. Je vais suivre le résultat du vote pour voir qui vote selon sa conscience et qui vote en fonction de la discipline de parti.

    Voilà. C'est tout ce que j'avais à dire.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup. Et j'adresse des remerciements spéciaux à vous, Jackie.

    Nous accueillons maintenant, de l'Aboriginal Urban Alliance of Ontario, Michael Cheena et Donna Marshall. Soyez les bienvenus. Nous vous invitons à faire votre exposé, après quoi, avec un peu de chance, nous pourrons passer aux questions et réponses. Vous avez la parole.

+-

    M. Michael Cheena («Aboriginal Urban Alliance of Ontario»): Je suis membre de la nation crie de Moose Factory, dans le nord de l'Ontario, qui est signataire du traité numéro 9. Ma collègue, Donna Marshall, est membre d'une bande de la Première nation Nipissing, dans la région de North Bay.

    Nous tenons à remercier la présidence et les membres du comité parlementaire chargés d'examiner le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations du Canada, nos concitoyens autochtones et vous, mesdames et messieurs, de l'invitation à prendre la parole devant le comité au sujet d'une question si importante.

    L'Aboriginal Urban Alliance a été établi en 1991 pour représenter les intérêts sociaux, culturels, économiques et politiques de membres des Premières nations signataires d'un traité et de plein droit habitant en milieu urbain, en Ontario. Nous sommes un organisme non constitué n'ayant pas de lien direct avec des organismes autochtones, bien que nos membres détiennent des intérêts particuliers directs dans les Premières nations respectives de nos réserves d'attache. Notre organisme est strictement bénévole. Il prône l'intérêt du membre des Premières nations signataires de traité et de plein droit. Nous faisons de notre mieux pour parler de questions intéressant les membres de Premières nations vivant à l'extérieur des réserves ou en milieu urbain. Contrairement à toutes les Premières nations et à de nombreux organismes représentant les Autochtones en milieu urbain, nous ne recevons pas de fonds gouvernementaux.

    Malheureusement, nous ne sommes pas bien représentés par nos Premières nations là d'où nous venons, pour diverses raisons. Être membre d'une Première nation, recevoir des services adéquats et avoir accès aux activités de gouvernance des Premières nations sont parmi les défis contemporains que doivent relever les membres de Premières nations d'Ontario et de tout le Canada. Nous, des centres urbains du pays, aspirons à une meilleure qualité de vie comme bon nombre des membres habitant dans les réserves. De plus, notre statut spécial en tant que membres de Premières nations signataires de traité et de plein droit n'est pas représenté par un groupe, ni par les centres d'amitié, ni par l'Ontario Federation of Indian Friendship Centres, parce qu'ils ne sont pas clairement mandatés pour prendre en charge nos questions urbaines. Leur structure organisationnelle est très confuse, sans véritable mandat concernant les dossiers des Premières nations signataires de traité et de plein droit. Enfin, nous ne sommes représentés ni par l'Assemblée des premières nations, ni par le Congrès des peuples autochtones.

    Parmi tous les groupes urbains différents qui prétendent peut-être nous représenter, nous sommes seuls, car ils ne nous représentent pas, pas plus qu'ils n'en ont le pouvoir juridique. Nos collectivités de Premières nations ne souhaitent pas nous aider vraiment, même si les fonds qu'elles reçoivent par tête en Ontario et ailleurs au Canada nous incluent. Plus de la moitié d'entre nous vivent loin de leur collectivité de Première nation, pour diverses raisons, mais entre autres pour trouver de l'emploi, faire des études, trouver du logement et donner une meilleure qualité de vie à leurs familles. Bon nombre d'entre nous travaillent très fort pour répondre à nos besoins essentiels, comme se nourrir, se loger dans des appartements loués à des prix inabordables et sans protection, ainsi que vêtir nos familles. Nous n'avons pour l'instant ni le temps ni les ressources voulus pour nous occuper comme il convient de nos droits inhérents à l'autonomie gouvernementale et de nos droits issus de traité et droits ancestraux.

    Voilà qu'un nouveau projet de loi sur la gouvernance est proposé et qu'il aura d'énormes conséquences sur la vie des membres de Premières nations. Nous souhaitons partager avec vous nos vues au sujet de certains points principaux du projet de loi à l'étude.

·  +-(1335)  

    La Loi sur les Indiens actuelle ne mentionne pas du tout les questions contemporaines, comme les membres de Premières nations de plein droit qui vivent à l'extérieur de leurs collectivités. Pourquoi cette omission n'a-t-elle pas été corrigée? Cessons-nous d'exister lorsque nous quittons notre collectivité de la réserve? Qu'en est-il des enfants qui naissent par la suite? Tout comme nous, ce sont des Indiens légitimes au sens de la Loi sur les Indiens, définition qui est renforcée par le projet de loi C- 31 selon lequel les règles discriminatoires de la Loi sur les Indiens violent la définition des droits de la personne des Nations Unies et, plus tard, le Code des droits de la personne du Canada. Nos préoccupations légitimes ont été renforcées par l'arrêt rendu dans l'affaire Corbière, qui reconnaît notre droit légal de voter lors d'élections tenues au sein des Premières nations. Pourquoi faut-il faire appel à des tribunaux pour jouir de droits égaux? Ne faudrait-il pas que le Canada ait le courage moral et la volonté politique de traiter avec égalité et justice tous les membres de Premières nations?

    Nous continuons d'être pénalisés pour avoir osé dépasser les limites de nos réserves pour trouver de l'emploi et du logement, faire des études et avoir de meilleurs services de santé. Nous estimons que chaque nouvelle loi visant les Premières nations doit conférer des droits égaux à tous les membres de Premières nations, qu'ils vivent dans les réserves ou à l'extérieur de celles-ci. Sans cette reconnaissance, il n'y a pas de justice. Par conséquent, il faut que la nouvelle loi soit juste en droit.

    Le projet de loi abolira les quelques exemptions symboliques que nous cherchons à faire préserver dans l'actuelle Loi sur les Indiens et l'actuelle situation. En d'autres mots, si vous examinez nos chèques de paie, nous sommes loin de ne pas payer d'impôt. De nombreux Autochtones, qu'ils le soient de plein droit ou non, s'efforcent de mieux profiter personnellement de cette exemption fiscale que confèrent les droits issus de traités et ancestraux, au point de laisser tomber le reste d'entre nous. Malheureusement, la plupart de nos membres qui méritent de profiter de l'exemption fiscale de manière à supporter un moins grand fardeau économique n'en profitent pas. C'est injuste et il faut apporter des changements de manière à privilégier ceux qui en ont besoin.

    Enfin, à cet égard et à tous les égards concernant les Premières nations du Canada, il faudrait envisager la possibilité de verser une indemnité convenable et équitable pour toutes les richesses naturelles, y compris les terres et l'eau, qui sont exploitées par le gouvernement du Canada et par les grandes sociétés qui existaient et qui existent encore de ce fait. L'exemption fiscale et les recettes fiscales tirées des ressources naturelles devraient être rendues à nos collectivités pour qu'elles puissent assurer leur durabilité économique. Nos Premières nations devraient profiter de ces arrangements pris par le gouvernement à l'égard de leurs collectivités. Toute nouvelle loi devrait bien le préciser.

    De nombreux organismes en milieu urbain touchent des millions de dollars de deniers publics, mais n'aident pas vraiment la majorité des membres de Premières nations signataires de traités et de plein droit, ni n'accroissent leur qualité de vie. Seul un faible pourcentage de ces groupes urbains profitent des fonds publics annuels qu'ils touchent. Habituellement, seuls les amis proches, autochtones comme non autochtones, les membres de la famille et les conjoints profitent des services d'emploi et des autres services de la plupart de ces groupes urbains. La plupart de ceux-ci ne sont pas vraiment obligés de rendre des comptes au grand public pour les fonds qu'ils touchent. Au pire, ils n'ont pas de compte à rendre à la clientèle qu'ils prétendent servir. Enfin, ceux qu'ils déclarent comme membres ne sont pas forcément des membres légitimes d'une Première nation au sens de la Loi sur les Indiens ou selon les listes respectives des bandes de Premières nations. La majorité des services qui sont censément fournis le sont à des membres de Premières nations signataires de traités et de plein droit qui vivent en milieu urbain.

    Nous souhaitons maintenant souligner les recommandations suivantes qui permettent de répondre à nos préoccupations légitimes.

    Tout d'abord, nous souhaitons que la Loi sur la gouvernance des Premières nations mentionne expressément les membres de Premières nations vivant en milieu urbain comme ayant un statut spécial et des droits au sein de leur Première nation respective. Nous demandons au gouvernement du Canada de réaligner les fonds publics versés et de les rediriger vers les collectivités de Premières nations, de manière à ce qu'elles soient en mesure de mieux représenter les intérêts juridiques et politiques de même que les droits de leurs membres vivant éloignés. Ce sont les collectivités de Premières nations qui doivent décider qui en est membre et elles incluront des catégories comme les Indiens au sens de l'actuelle Loi sur les Indiens, du projet de loi C-31 et quiconque la bande estime être un membre, par exemple des conjoints et des descendants. Les Premières nations du Canada aideront le gouvernement à déclarer qui sont leurs citoyens. Les collectivités de Premières nations devraient déclarer leurs citoyens non autochtones afin de justifier le niveau adéquat de ressources requis pour offrir des services de base, comme le logement et l'éducation, ainsi que les services publics pertinents qui sont offerts à toutes les collectivités canadiennes.

·  +-(1340)  

    Ensuite, il faudrait que l'exemption fiscale soit expressément mentionnée dans le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations du Canada comme une assise au niveau de la gouvernance des Premières nations. Elle serait alors accessible aux citoyens des Premières nations, qu'ils vivent dans la réserve ou en milieu urbain, à distance de leurs collectivités respectives de Premières nations. Les Premières nations pourraient examiner de nouvelles politiques fiscales à réaligner sur celles de Revenu Canada.

    Enfin, en ce qui concerne les deniers publics destinés aux organismes autochtones en milieu urbain, ceux qui ont des membres de Premières nations signataires de traités et de plein droit dans la région où ils se trouvent devraient être tenus de rendre des comptes et de justifier l'affectation des fonds publics qu'ils ont touchés. Le conseil d'administration et le personnel devraient se composer, sur une base proportionnelle, de représentants de chaque groupe urbain supposément représenté, de manière à permettre une représentation des Premières nations signataires d'un traité et de plein droit. Cela devrait être un critère préalable à l'obtention de fonds publics pour les groupes autochtones.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Martin, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Cheena, je vous remercie de votre exposé.

    Je prends certes note du fait que la Loi sur la gouvernance des Premières nations ne tient pas compte des questions qui intéressent les Autochtones vivant en milieu urbain, pas plus qu'elle ne tient compte des intérêts et aspirations authentiques des Premières nations dans leurs collectivités. Je représente le centre-ville de Winnipeg, où il y a plus de 14 000 Autochtones vivant à l'extérieur de la réserve, et même ce chiffre me semble faible—il s'agit du nombre d'Autochtones qui se sont eux-mêmes identifiés comme tels. Je ne puis l'affirmer aujourd'hui, parce que je n'ai pas parlé à tout le monde, mais on m'a certes fait savoir que les gens sont tout aussi frustrés que vous de voir que, pour la première fois que nous nous apprêtons à modifier la Loi sur les Indiens en 50 ans presque en vue d'en combler des lacunes pressantes, les modifications ne satisfont personne. Les dirigeants des collectivités de Premières nations en sont insatisfaits, et nous en avons entendu des milliers. De plus, comme vous le dites, elles ne répondent pas aux besoins des personnes que vous représentez.

    J'aimerais que vous partagiez avec nous certaines des lacunes que vous avez remarquées. On a prétendu qu'il y avait eu une vaste consultation, que le projet de loi à l'étude avait été conçu avec la participation de milliers littéralement d'Autochtones de tout le pays. Estimez-vous avoir suffisamment participé à la rédaction du projet de loi à l'étude et d'avoir été bien consultés?

·  +-(1345)  

+-

    M. Michael Cheena: J'estime que nous n'avons pas été suffisamment consultés à cet égard, en raison du calendrier, du court préavis que nous avons eu, comme les autres groupes autochtones. Nous cherchons à obtenir une représentation convenable des personnes qui habitent à l'extérieur des réserves. Il existe tant d'organismes autochtones qui prétendent représenter les Autochtones vivant à l'extérieur des réserves, mais la moitié de nos membres habitant à l'extérieur de la réserve sont sans représentation politique aucune.

+-

    M. Pat Martin: Des décisions rendues récemment par les tribunaux obligent effectivement votre collectivité d'attache à vous fournir certains services et à vous donner accès au vote durant des élections, par exemple, l'arrêt Corbière, mais nous avons assurément entendu des dirigeants de Premières nations qui estiment ne pas avoir les ressources voulues pour répondre aux besoins fondamentaux de membres de leurs collectivités ou de membres vivant à l'extérieur des réserves, encore moins de ceux que le projet de loi C-31 pourrait ajouter à la liste de bande. Aucun fonds supplémentaire correspondant n'a été versé pour ces personnes qui se sont ajoutées aux listes de la bande. Le problème est-il la relation fiscale entre le gouvernement fédéral et les membres des Premières nations, plutôt que les questions de gouvernance soulevées par le projet de loi?

+-

    M. Michael Cheena: Le gouvernement se débarrasse de sa responsabilité. Le gouvernement fédéral a une obligation de fiduciaire à l'égard des Autochtones, mais il affirme que les membres qui habitent à l'extérieur des réserves sont la responsabilité des provinces.

+-

    M. Pat Martin: Voilà donc une autre lacune flagrante du projet de loi. S'il y avait eu consultation adéquate, auriez-vous dit au gouvernement que c'était là des questions que vous vouliez voir régler dans le projet de loi ou y aurait-il eu d'autres priorités, comme dans votre mémoire, à régler auparavant?

+-

    M. Michael Cheena: Ce ne sont là que quelques-unes des questions. Nous en avons d'autres.

+-

    M. Pat Martin: Certains nous ont dit, cependant, que les problèmes réglés dans la Loi sur les Indiens ne se rapprochent même pas des questions prioritaires qu'ils souhaitent voir régler afin de pouvoir aller de l'avant comme peuple souverain. Vous avez parlé d'aller de l'avant, de reconnaître le statut, que l'on habite dans la réserve ou à l'extérieur de celle-ci. À nouveau, s'il venait vous voir et que vous aviez le temps de soumettre un mémoire convenable à un comité de consultation, les questions que vous soulèveriez seraient-elles celles que nous voyons dans le projet de loi C-7 ou toute autre chose?

+-

    M. Michael Cheena: J'estime qu'elles seraient différentes. Nous avons des problèmes liés à nos droits issus de traités, à l'exemption fiscale, à l'autonomie gouvernementale et à l'accès aux terres. Nous n'avons pas de territoire qui nous est propre.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Madame Karetak-Lindell, vous disposez de cinq minutes.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Je vous remercie.

    J'essaie de comprendre un peu plus la situation des Autochtones qui habitent à l'extérieur des réserves. Votre mémoire a répondu à certaines questions que j'ai posées à d'autres témoins tout à l'heure, mais j'essaie toujours de comprendre ce qui serait, selon vous, l'organisme voulu pour administrer les fonds en votre nom. Vous dites vouloir avoir accès aux ressources auxquelles les membres de votre réserve d'attache ont accès. J'imagine que cela inclut l'aide au logement, aux études et l'exemption fiscale qui, selon vous, devraient s'appliquer aux membres habitant à l'extérieur des réserves. Est-ce bien cela?

·  +-(1350)  

+-

    M. Michael Cheena: Comme je l'ai demandé à la Commission royale en 1992, est-ce que je reste Autchtone, même lorsque je quitte ma collectivité? Je n'ai pas laissé mes droits issus de traité dans ma collectivité lorsque je suis parti. Mon statut et mes droits issus de traités existent toujours.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: Lorsque vous dites que le Congrès des peuples autochtones, ou l'APN, ne vous représente pas, avez-vous un autre groupe à proposer qui serait susceptible de représenter les gens qui vivent hors des réserves?

+-

    M. Michael Cheena: Pour commencer, le Congrès des peuples autochtones n'est pas signataire des traités. L'Assemblée des premières nations, si je ne m'abuse, ne dispose pas des ressources ni du financement voulus pour régler les questions autochtones urbaines.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: D'après vous, il faudrait donc un autre groupe ou dites-vous que l'APN devrait recevoir les ressources voulues pour s'occuper de vous en tant qu'Indien visé par un traité?

+-

    M. Michael Cheena: Je pense que l'APN devrait recevoir ces ressources, à cause de la décision Corbiere. En effet, l'un des points en litige dans cette affaire, c'était que l'Assemblée des premières nations ne disposait pas des fonds nécessaires pour procéder à une consultation.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: Lorsque vous devez participer aux élections de votre réserve d'origine, comment procédez-vous? Le faites-vous par procuration, pouvez-vous voter par correspondance? Comment exercez-vous votre droit de vote pour les élections de bande alors que vous vivez à Toronto?

+-

    M. Michael Cheena: Certains d'entre nous votent par correspondance, d'autres retournent dans la réserve pour voter en personne.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: Si vous devez retourner dans votre collectivité d'origine pour voter, payez-vous vous-même votre déplacement?

+-

    M. Michael Cheena: Oui, nous devons payer pour l'aller et le retour.

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell: Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Martin, quatre minutes.

+-

    M. Pat Martin: J'aimerais simplement vous demander ce que vous conseillez au comité et à la Chambre des communes au sujet de ce projet de loi. Qu'aimeriez-vous que l'on fasse—qu'on y renonce, qu'on le modifie, qu'on reparte à zéro?

+-

    M. Michael Cheena: À mon avis, il faudrait y renoncer. Je crois que le rapport Penner ainsi que le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones devraient servir de plan pour l'autodétermination et l'autonomie gouvernementale.

+-

    M. Pat Martin: Madame Marshall, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    Mme Donna Marshall («Aboriginal Urban Alliance of Ontario»): Je mettrais l'accent sur l'accessibilité. En cas de questions juridiques, n'auriez-vous pas une représentation par avocat pour protéger vos droits juridiques? Rien n'est prévu à cet égard. Le processus de consultation n'a absolument pas fait mention des citoyens du Canada qui vivent hors des réserves et pourtant, on prétend qu'il s'agit d'une version modernisée de la Loi sur les Indiens prévoyant de meilleures dispositions pour les structures de gouvernement des Premières nations. À mon avis, ce qui est fondamental, c'est l'accessibilité aux activités des Premières nations, aux services d'un conseiller juridique pour assurer la protection des droits issus de traités et des droits propres à notre statut, sans compter l'obligation de rendre compte des groupes urbains qui ne nous représentent pas comme il le faut pour l'instant. Ces questions sont évidentes si bien qu'on peut se demander pourquoi le gouvernement du Canada ne les envisage même pas?

·  +-(1355)  

+-

    M. Pat Martin: Vous avez raison. En fait, le Congrès des peuples autochtones qui prétend représenter les Autochtones hors des réserves nous a présenté des instances. Des millions de dollars lui ont été versés pour promouvoir le projet de loi C-7 au moment même où le financement accordé à l'Assemblée des premières nations était réduit de 50 p. 100. L'assemblée a dû licencier 70 personnes, soit les spécialistes nécessaires pour mener une campagne contre ce projet de loi. C'est l'autre groupe qui a été financé. Vous êtes un groupe représentant les Autochtones urbains, hors des réserves, qui s'opposent au projet de loi C-7. Il me semble que les fonds ont été utilisés pour acheter l'appui de groupes qu'on voulait financer. Est-ce ainsi que vous interprétez l'exposé du Congrès des peuples autochtones devant notre comité?

+-

    M. Michael Cheena: Le Congrès des peuples autochtones ne m'a jamais invité à son assemblée générale annuelle et ne me représente pas. C'est aussi clair que cela. Le congrès ne s'intéresse qu'au financement qu'il est en mesure d'obtenir.

+-

    Le président: Je suis sûr que ce n'était pas votre intention, monsieur Martin, mais vous avez parlé du financement prévu pour les exposés devant notre comité. Je crois que vous vouliez parler de la consultation avant les séances du comité.

+-

    M. Pat Martin: C'est exact. Le Congrès des peuples autochtones a reçu beaucoup d'argent pour organiser des séances à l'échelle du pays, énormément d'argent en fait.

+-

    Mme Donna Marshall: Certaines Premières nations novatrices, comme Nipissing, ont mis au point leur propre code foncier fondé sur la Loi sur la gestion des terres des Premières nations. Elles souhaitent ardemment représenter leurs membres hors des réserves, mais ne disposent pas des ressources voulues pour ce faire. Nous voulons dans toute loi touchant les Premières nations des dispositions précises pour ce processus. Nous sommes engagés à établir ce lien légitime avec nos collectivités des Premières nations.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Dromisky, quatre minutes.

+-

    M. Stan Dromisky: Vous êtes tous les deux originaires de la réserve de Nipissing; quel en est le nom?

+-

    M. Michael Cheena: C'est la Première nation de Moose Factory.

+-

    M. Stan Dromisky: Vous êtes donc de Moose Factory, d'accord.

    L'Assemblée des premières nations et le Congrès des peuples autochtones se composent d'Autochtones et je suis sûr que votre réserve y a un représentant.

+-

    M. Michael Cheena: Ma réserve est membre du Conseil tribal Mushkegowuk et elle a également un représentant à l'Assemblée des premières nations.

+-

    M. Stan Dromisky: Oui, tout comme Nipissing.

+-

    M. Michael Cheena: Je crois que oui.

+-

    M. Stan Dromisky: Toutefois, vous vivez dans un centre urbain. À Thunder Bay, d'où je viens, on dénombre près de 20 000 Autochtones qui sont partis de leur réserve pour vivre dans notre ville. Ils ont exactement le même problème que vous. Ces deux groupes autochtones nationaux, d'après ce que vous me dites, ne reconnaissent pas officiellement l'élément urbain de leur population totale. En d'autres termes, ils ont un représentant pour Moose Factory, pour Nipissing et pour la réserve Fort William à Thunder Bay, mais pas pour les milliers de ceux qui vivent à Toronto. Apparemment, Toronto compte le plus grand nombre d'Autochtones que n'importe quelle autre ville du Canada. C'est ce qu'on m'a dit et je crois que c'est effectivement le cas.

+-

    M. Michael Cheena: Oui.

+-

    M. Stan Dromisky: Ils ne sont toutefois pas représentés au sein de ces groupes.

+-

    M. Michael Cheena: C'est exact.

+-

    M. Stan Dromisky: Peut-être est-il temps pour ceux qui vivent hors des réserves et qui vont probablement passer le reste de leur vie hors des réserves... Je sais ce qui se passe dans le nord-ouest de l'Ontario. Les réserves ont de moins en moins de population. Les Autochtones se rendent dans de plus grandes villes comme Winnipeg, Thunder Bay, Toronto, Vancouver. Ces deux organisations devraient peut-être changer, reconnaissant qu'il existe un groupe unique d'Autochtones, dont la culture, voire le niveau de vie, ne sont plus les mêmes. Ils ne sont plus de Moose Factory, mais de Toronto. La vie à Moose Factory n'a absolument rien à voir avec la vie à Toronto, rue Bathurst, rue College ou toute autre rue. C'est l'approche qu'il faudrait adopter, à mon sens. Il s'agit d'un problème que vous devez résoudre car le gouvernement fédéral ne peut intervenir et le résoudre à votre place.

    Pour ce qui est du problème d'argent, vos réserves reçoivent de l'argent et vous avez l'impression qu'elles ne le répartissent pas équitablement. Ce sont ces genres de problèmes sur lesquels je me penche depuis une dizaine d'années avec les gens de Thunder Bay qui viennent des réserves de tout le nord-ouest de l'Ontario et du Manitoba. Le gouvernement fédéral n'a aucun pouvoir à cet égard, mais vous pensez qu'il devrait s'en mêler, n'est-ce pas?

¸  +-(1400)  

+-

    M. Michael Cheena: Oui. Les réserves ne sont pas économiquement viables. C'est la raison pour laquelle de plus en plus d'Autochtones déménagent. Les conseils de bande et les chefs doivent rendre compte au ministre des Affaires indiennes, mais non aux membres de la bande. C'est l'autre problème. Je le répète, les membres hors des réserves ne bénéficient pas de l'indemnité journalière que les bandes reçoivent pour ceux qui figurent sur leur liste.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Comme il reste deux minutes, je vous invite à conclure.

+-

    M. Michael Cheena: J'aimerais vous remercier de nous avoir donné l'occasion de témoigner devant vous et j'espère que vous prendrez des mesures au sujet de ce projet de loi C-7. J'espère avoir servi les meilleurs intérêts de nos membres ainsi que des Autochtones urbains. Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci beaucoup à vous.

    J'invite maintenant M. Mark Stevenson, président de l'Indigenous Bar Association, à prendre la parole.

+-

    M. Mark Stevenson (président, «Indigenous Bar Association»): Merci beaucoup.

    J'aimerais tout d'abord remercier les membres du comité permanent de permettre à l'Indigenous Bar Association (IBA) de présenter cet exposé.

    D'abord, il est important de déclarer que notre organisme appuie fortement les principes de transparence, de responsabilisation et de gestion financière appropriée. L'IBA adopte aussi les principes fondamentaux de la démocratie et souhaite que ces principes soient inclus dans tous les aspects de la gouvernance canadienne. Ces principes et le processus pour les créer, doivent toutefois être en harmonie avec l'article 25 de la Charte des droits et libertés, afin de garantir que ces principes et valeurs démocratiques sont appliqués d'une manière qui permette l'entière expression de l'ensemble des droits protégés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, notamment le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. De l'avis de l'IBA, le processus par lequel il est convenu de ces principes et par lequel de nouvelles lois et institutions peuvent voir naissance doit être fondé sur l'équité, l'ouverture d'esprit, la transparence et la responsabilisation—sans lesquelles il n'y aurait aucun respect pour le processus ou les lois et institutions qui peuvent subséquemment être crées.

    L'Indigenous Bar Association est un organisme professionnel qui représente des avocats, des juges, des juristes-conseil et des étudiants en droit amérindiens, inuits et métis au Canada. Notre mandat vise, entre autres, la défense des droits, l'éducation du public et la promotion de la compréhension de la perspective autochtone pour les questions juridiques autochtones. Selon la constitution de l'IBA, nous avons les objectifs suivants: reconnaître et respecter les fondements spirituels de nos lois, us et coutumes autochtones; promouvoir l'avancement de la justice juridique et sociale pour les peuples autochtones; favoriser la sensibilisation du public dans la collectivité juridique, la communauté autochtone et le public en général en ce qui concerne les questions juridiques qui préoccupent les peuples autochtones; en conformité avec les objectifs qui précèdent, offrir une tribune et un réseau aux avocats autochtones, subvenir à la formation professionnelle continue en ce qui concerne les progrès du droit autochtone; échanger des renseignements et des expériences en ce qui a trait à l'application des lois autochtones et discuter des questions juridiques visant les Autochtones.

    Du fait que nous sommes un organisme professionnel, dont certains des membres travaillent comme avocats de la Couronne et conseillers en politique au sein du gouvernement, tandis que d'autres travaillent comme hommes de loi et dans des associations autochtones nationales, nous ne prenons pas de position politique sur les questions soumises au comité et nous limiterons nos commentaires aux questions de procédure. Toutefois, nous nous sentons obligés de soulever des questions qui préoccupent notre organisme, en tenant compte de nos objectifs généraux et de notre désir de voir honorer les droits ancestraux et les droits issus de traités. À cet égard, il existe plusieurs questions de principe que nous voudrions porter à votre attention en ce qui concerne le processus lié au projet de loi C-7.

    L'indigenous Bar Association estime que les principes suivants devraient être inscrits tant dans le contenu que dans le processus relatif au projet de loi C-7. Premièrement, le processus lié au projet de loi C-7 devrait être ouvert et transparent afin que les Premières nations aient suffisamment de renseignements pour prendre des décisions éclairées sur l'incidence des mesures législatives. Deuxièmement, tant le processus que le contenu du projet de loi C-7 ne devraient en aucun cas violer le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Troisièmement, tant le processus que le contenu du projet de loi C-7 ne devraient avoir une incidence défavorable sur la relation fiduciaire entre la Couronne et les Indiens. Quatrièmement, le projet de loi C-7 devrait traiter de façon approfondie les questions liées au cadre de responsabilisation. Enfin, le processus de consultation relatif au projet de loi C-7 devrait être ouvert et universel, tout comme l'étaient les processus liés au rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones et au rapport Penner. Je vais passer en revue chacun de ces principes.

¸  +-(1405)  

    Lorsque je parle d'un processus ouvert et transparent, je parle en fait de la question de la divulgation. Dans le cadre du mandat de l'IBA lié à l'éducation du public, la direction de l'IBA a estimé qu'il était nécessaire de donner à nos membres suffisamment de renseignements pour leur permettre de bien aider les collectivités à comprendre les incidences du projet de loi C-7. À cet égard, nous avons noté avec intérêt qu'à maintes reprises, le ministre Robert Nault et ses fonctionnaires ont mentionné qu'il était nécessaire d'apporter des modifications à la Loi sur les Indiens du fait du grand nombre de litiges en ce qui concerne certaines dispositions de la loi. Il a été mentionné à plusieurs reprises plus de 200 affaires en instance devant les tribunaux. Il existe des dossiers publics à cet égard. Les déclarations du ministre ont été rapportées par le National Post et ces déclarations ont été faites dans d'autres endroits, y compris au cours du processus de consultation. Par conséquent, l'IBA a cherché à comprendre l'incidence du projet de loi C-7 sur les litiges.

    Le 4 janvier 2002, par le biais de nos membres, une demande a été faite au Service d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour obtenir la liste des affaires mentionnées par le ministre et pour savoir comment les mesures législatives proposées régleraient les affaires en litige. Le Service d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels au sein du ministère a été incapable de nous aider. Une plainte officielle a été ultérieurement déposée auprès du Commissariat à l'information. La demande initiale a été faite il y a plus d'un an, mais nous n'avons reçu les renseignements demandés qu'au mois de février 2003. Ceci a eu lieu après que le processus de consultation AINC a été terminé et après que le projet de loi C-7 a été déposé. Le fait qu'AINC ne fournisse pas les renseignements en temps opportun est très gênant.

    De plus, l'IBA a cherché à obtenir des renseignements auprès du ministère en ce qui concerne l'incidence éventuelle du projet de loi C-7 tant sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale que sur la relation fiduciaire entre la Couronne et les Indiens. Notre recherche a été inspirée par la publication du rapport du Comité consultatif ministériel conjoint, lequel était fondé sur des hypothèses selon lesquelles les mesures législatives proposées n'auraient aucune incidence sur la relation fiduciaire et ne violeraient pas le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Nous comprenons également que le ministre Nault a fait des déclarations à cet effet au cours du processus de consultation. En fait, un document de la Direction de la recherche parlementaire indique que: «Le ministre a déclaré clairement que les modifications envisagées devaient ne pas porter atteinte aux droits existants—ancestraux ou issus de traités; et ne pas modifier la relation de nature fiduciaire qui lie les Premières nations à la Couronne.» Le 14 août 2002, nous avons envoyé une lettre au Service d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien pour obtenir «tout renseignement que possède le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ou le ministère de la Justice qui sont de nature à appuyer ou à contredire ces hypothèses.» Nous avons, par la suite, déposé une autre plainte auprès du Commissariat à l'information, puisque nous ne recevions tout simplement pas les renseignements demandés.

    À ce jour, nous n'avons obtenu absolument aucun renseignement de la part du ministère en ce qui concerne ces hypothèses, malgré les efforts de nos membres et de ceux du Commissariat à l'information. Les renseignements existent, mais nous ne pouvons pas y avoir accès. Dans une lettre datée du 16 octobre 2002, provenant du Service d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels au sein d'AINC, nous avons été informés que les renseignements demandés ne seraient pas divulgués à cause des exigences de «documents confidentiels du Conseil privé de la Reine pour le Canada». Nous sommes très préoccupés par le fait que le gouvernement fédéral ne fournisse pas certains renseignements fondamentaux que nous avons demandés, en ce qui concerne l'incidence du projet de loi C-7. En tant que fiduciaire, le Canada est tenu de divulguer entièrement les renseignements qu'il possède sur l'incidence que les mesures législatives peuvent avoir sur les droits conférés par l'article 35, ainsi que l'incidence qu'elles auront sur la relation fiduciaire entre la Couronne et les Indiens. À ce jour, il n'y a pas eu divulgation et, à notre avis, l'honneur de la Couronne est mis en péril.

    Je devrais également indiquer que nous avons reçu la liste des quelque 200 affaires mentionnées par le ministre. Elle n'est pas complète, beaucoup de choses sont laissées en blanc, mais nous sommes encore en train de l'analyser.

¸  +-(1410)  

    Nous recommandons qu'il y ait divulgation complète de l'incidence éventuelle du projet de loi C-7 sur les litiges auxquels le ministre a fait référence dans ses commentaires antérieurs. Nous recommandons également que la Couronne divulgue tout renseignement qu'elle possède sur l'incidence éventuelle que les mesures législatives proposées peuvent avoir sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et la relation fiduciaire. Nous ne nous attendons à rien de moins d'un gouvernement qui exige la transparence et la responsabilisation des Premières nations.

    Je vais maintenant parler du processus de consultation et de la violation du droit inhérent. La Cour suprême du Canada a statué que les droits ancestraux et issus de traités sont tant fondamentaux que procéduraux. Autrement dit, l'article 35 reconnaît et confirme les droits ancestraux et issus de traités et, ce faisant, protège ces droits et nécessite un processus de consultation et d'accommodement. Il se peut que le gouvernement fédéral ait mis en oeuvre pour cette raison son processus de consultation relativement coûteux et inefficace pour ce projet de loi. D'après le critère énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sparrow, pour déterminer s'il y a violation injustifiée des droits ancestraux ou issus de traités, il faut fournir une certaine preuve de l'existence du droit, déterminer s'il y a eu violation et déterminer si la violation est justifiée. C'est ce qu'on appelle l'analyse de justification.

    Sans s'étendre sur ce point, c'est un fait historique que les peuples autochtones étaient ici les premiers, exerçant des droits à l'autonomie gouvernementale et comme nation. Il n'est pas question de prouver l'existence du droit et j'ai ici une liste de renvois à ce sujet. Fait tout aussi important, afin de provoquer le respect des obligations constitutionnelles dans le cadre d'une consultation sérieuse et d'un accommodement, les Premières nations ne sont plus tenues de prouver l'existence d'un droit. Les tribunaux exigent simplement une preuve prima facie. C'est important, parce que lorsque le processus de consultation a été déclenché il y a environ un an et demi, les tribunaux étaient d'avis que le devoir de consulter n'est pas déclenché tant que l'existence du droit inhérent ou d'un droit n'est pas prouvée. Ce n'est plus le cas. Les Premières nations doivent simplement donner une preuve prima facie et en fait, les tribunaux sont allés plus loin, décrétant que le devoir de consulter est toujours là et que ce devoir exige une consultation sérieuse. Les critères de consultation ont considérablement changé depuis le début de ce processus, et il se pourrait fort bien que le processus de consultation au sujet du projet de loi ne réponde pas aux critères fixés par les tribunaux.

    Si la Loi sur la gouvernance des Premières nations est adoptée sous son libellé actuel, elle constituera une imposition sur un droit qui existe et qui est exercé par les peuples autochtones depuis des temps immémoriaux. Bien qu'il soit clair que la Loi sur les Indiens constitue une violation d'un bon nombre d'aspects du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, cela est, en soi, une justification insuffisante pour imposer le projet de loi C-7 à ceux qui ne l'acceptent pas et grâce à un processus qui ne respecte pas les critères juridiques d'une consultation sérieuse, établis par les tribunaux. Le processus par lequel la Couronne a entrepris de présenter le projet de loi C-7 ne respecte pas les exigences minimales de consultation sérieuse, parce qu'il ne vise pas à traiter de façon approfondie les préoccupations des Premières nations. AINC a offert de rencontrer les Premières nations pour discuter du projet de loi, mais non pour amorcer un dialogue avec les Premières nations. AINC a offert de rencontrer les Premières nations pour répondre à des questions sur le projet de loi, mais n'a pas demandé aux Premières nations à participer pleinement à l'élaboration du projet de loi. Comme je l'ai indiqué plus tôt, AINC n'a pas été ouvert et transparent en ce qui concerne le partage de renseignements. En conséquence, le processus même d'élaboration et de promotion du projet de loi C-7 est, jusqu'à présent, incompatible avec les exigences des tribunaux.

¸  +-(1415)  

    La justification nécessite au minimum une consultation sérieuse, et dans certains cas, si la question doit avoir une incidence fondamentale sur les droits des peuples autochtones, un consentement sera exigé. L'IBA fait valoir que la détermination du processus de choix des dirigeants, de la responsabilisation financière et de la structure du gouvernement des Premières nations et de ses institutions est au coeur du droit à l'autonomie gouvernementale et amène la question du degré de consultation sérieuse requis par la Couronne à son niveau le plus élevé. Autrement dit, à notre avis, l'objet du projet de loi et la nature de son incidence sur le droit inhérent entraîneront l'obligation d'obtenir un consentement.

    Dans l'arrêt Delgamuukw c. Colombie-Britannique, en ce qui concerne la question de la consultation, la Cour suprême a déclaré ce qui suit:

Évidemment, même dans les rares cas où la norme minimale acceptable est la consultation, celle-ci doit être menée de bonne foi, dans l'intention de tenir compte réellement des préoccupations des peuples autochtones dont les terres sont en jeu. Dans la plupart des cas, l'obligation exigera beaucoup plus qu'une simple consultation. Certaines situations pourraient même exiger l'obtention du consentement d'une nation autochtone...

    Le seuil minimal des obligations juridiques de la Couronne relatives à la tenue d'une consultation sérieuse n'a pas été respecté. En fait, selon l'expérience de l'IBA jusqu'à ce jour, le processus des AINC pour déposer le projet de loi C-7 a été marqué par le secret, le défaut de fournir suffisamment de renseignements et le défaut de divulguer.

    Le processus de consultation entourant le projet de loi C-7 était vicié dès le départ. Nous faisons valoir qu'à cause du caractère fondamental de ces vices, il faut retourner au stade de l'élaboration du projet de loi, en garantissant un processus de consultation qui soit complet, ouvert et cherche à traiter les préoccupations fondamentales des Premières nations. Il faudrait donc qu'un processus de consultation soit mis en place dans le respect des normes établies par les tribunaux en vue d'une consultation sérieuse, complète, ouverte et transparente.

    Permettez-moi de parler maintenant de l'incidence du projet de loi sur la relation fiduciaire. La Couronne a l'obligation de se conduire au mieux des intérêts des peuples autochtones, et ce, du fait que lorsque la Couronne a fait valoir ses droits sur les terres et territoires autochtones, elle a assumé certaines responsabilités. Ces responsabilités découlent du degré de pouvoir discrétionnaire exercé par la Couronne sur les terres autochtones et sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Un exemple évident de ce pouvoir discrétionnaire tient tant aux processus et contenu de la Loi sur la gouvernance des Premières nations proposée qu'au pouvoir que le ministre exerce, à sa discrétion, dans l'ensemble de la Loi sur les Indiens. Il découle de ce pouvoir discrétionnaire et de la situation vulnérable dans laquelle se trouvent les Premières nations que la Couronne a l'obligation fiduciaire d'agir au mieux des intérêts des peuples autochtones. Cette relation fiduciaire entre la Couronne et les Indiens découle de la Proclamation royale de 1763; dans bon nombre de traités, elle est liée tant au paragraphe 91(24) qu'à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et elle est devenue un impératif constitutionnel. Autrement dit, elle fait partie du cadre constitutionnel de ce pays.

    Il existe un lien entre la nature et la portée de la relation fiduciaire et des obligations correspondantes et la diminution du pouvoir discrétionnaire du ministre ainsi que l'augmentation de l'autorité exercée par les conseils de bande. Cependant, comme nous l'avons mentionné plus haut, le rapport du CCMC et le ministre sont partis de l'hypothèse voulant que les mesures législatives proposées n'auront aucune incidence sur la relation fiduciaire ou toute autre obligation correspondante. Les fonctionnaires des AINC ont également réitéré ce message.Toutefois, le public ne dispose d'aucune analyse pour appuyer ces affirmations. Nous recommandons que la question relative à l'incidence du projet de loi C-7 sur la relation fiduciaire et sur les obligations correspondantes soit étudiée à fond par un tiers et que les résultats de l'étude soient accessibles au public.

¸  +-(1420)  

    Je parlerai maintenant de la responsabilisation. Il existe au moins trois niveaux différents de responsabilités qui interviennent lorsqu'on traite des questions relatives à la Loi sur les Indiens et du lien entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et les Premières nations. De façon générale, ces différents niveaux de responsabilités peuvent être appelés le cadre de responsabilisation et peuvent être résumés de la façon suivante : responsabilités administratives du ministère en ce qui concerne les décisions qu'il prend et qui touchent les bandes et les conseils de bande; responsabilisation de la Couronne en ce qui concerne la relation fiduciaire et les peuples autochtones ainsi que les obligations fiduciaires correspondantes; responsabilisation des conseils de bande envers leurs membres, notamment la responsabilisation au niveau politique, la responsabilisation financière et la responsabilisation pour les décisions qui touchent les droits des membres de la bande.

    Les premiers aspects de ce cadre de responsabilisation font porter le fardeau de la preuve au gouvernement fédéral afin de garantir qu'il se conduit de manière ouverte et transparente et de façon à ce que l'exercice injuste de la discrétion administrative puisse être contesté. Actuellement, aucun processus ne permet aux Premières nations de contester le pouvoir discrétionnaire exercé par le ministre et ses fonctionnaires, sans avoir recours aux tribunaux.

    Deuxièmement, il existe des questions de responsabilisation relatives à la conduite de la Couronne en tant que fiduciaire. Nous avons soulevé cette question plus tôt en raison de notre préoccupation à l'égard du défaut de la Couronne, en tant que fiduciaire, de divulguer des renseignements sur l'incidence du projet de loi C-7 sur la relation fiduciaire et sur les droits ancestraux et issus de traités. On déplore l'absence d'un organisme indépendant qui pourrait surveiller la façon dont le Canada s'acquitte ou ne s'acquitte pas des différents aspects de ses obligations fiduciaires. Nous comprenons que le projet de loi C-7 n'a pas été conçu pour étudier ces questions plus larges de responsabilisation, mais ces questions doivent être traitées.

    Le troisième aspect de ce cadre tient à la responsabilisation générale des conseils de bande. Dans ce contexte, il existe plusieurs aspects auxquels il faut porter attention, notamment la gestion financière et l'obligation de rendre compte, la responsabilisation au niveau politique et la responsabilisation pour les décisions administratives. Nous concentrerons nos commentaires sur la responsabilisation pour les décisions administratives.

    Cette question vise les décisions administratives et la responsabilisation pour l'exécution de programmes et la prestation de services aux membres par les gouvernements des bandes et le besoin correspondant d'avoir un processus indépendant pour traiter les préoccupations des membres de la communauté et de disposer de recours lorsque ces derniers estiment avoir été lésés. Il est nécessaire d'établir un processus de traitement des plaintes et de recours permettant d'examiner les circonstances particulières des Premières nations et respectant certains critères objectifs. Ces critères incluent: l'indépendance, l'équité, la transparence, l'accessibilité, le respect, l'efficience, la responsabilisation, la stabilité, les pouvoirs d'enquête, la confidentialité, l'établissement de rapports destinés au public, le pouvoir de faire des recommandations et la capacité d'entreprendre des enquêtes de son propre chef. Nous estimons que cette question est d'une importance fondamentale et qu'elle devrait être traitée de façon plus approfondie par la création d'un poste d'ombudsman des Premières nations.

    À titre d'information, je vous communique que l'IBA a récemment commandé une étude intitulée The First Nations Ombudsman, préparée par la chef Roberta Jamieson, I. P. C., ancien ombudsman pour le gouvernement de l'Ontario. Le rapport fournit une analyse des critères énoncés ci-dessus et leur application dans le contexte des Premières nations. Nous n'examinerons pas tout le rapport, mais nous le laisserons au comité pour qu'il fasse officiellement partie des audiences.

    Ces mêmes principes devraient aussi s'appliquer à la création d'un organisme indépendant qui jouerait un rôle de surveillance en matière de responsabilisation du ministère à l'égard des décisions administratives applicables aux peuples autochtones.

    Nous recommandons que la Couronne s'engage à traiter les questions relatives à la responsabilisation, notamment en créant: un organisme de surveillance de la conduite du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à l'égard du respect de ses décisions administratives; une autorité de surveillance des droits conférés par l'article 35, qui ferait rapport sur la surveillance de la relation fiduciaire et; un poste d'ombudsman des Premières nations.

¸  +-(1425)  

    J'aborderai maintenant la question de savoir comment on peut avoir un processus ouvert et accessible. La Commission Penner a été créée par la Couronne pour établir les manières dont les peuples autochtones pourraient être mieux représentés dans la structure du Canada et de ses institutions. En fin de compte, le Rapport Penner, publié en 1983, a énoncé que les institutions des Premières nations doivent être créées pour promouvoir la participation institutionnelle des peuples autochtones du Canada et le respect de ces peuples entre eux. Le rapport a été publié au terme d'un processus de consultation long et exhaustif auprès des représentants du gouvernement, des peuples autochtones, des Canadiens et de divers tiers. Dès sa publication, le Rapport Penner a reçu un appui important de bon nombre de parties intéressées et il n'a pas fait l'objet d'une controverse comparable à celle entourant le projet de loi C-7.

    De plus, entre l'automne 1991 et 1995, la Commission royale sur les peuples autochtones a entamé un processus de consultation qui a permis de se réunir

...près d'une centaine de fois... Chaque réunion durait généralement plusieurs jours. Toutes ces réunions, ainsi que les audiences publiques et autres rencontres importantes, commençaient et se terminaient par une prière au Créateur. On le remerciait d'être arrivé sans encombre, on l'implorait pour que chacun rentre chez soi sain et sauf, et on lui rendait grâce d'avoir créé tous les êtres vivants qui forment le Cercle de la vie. Avant le début d'une réunion, on demandait aux participants d'aborder la journée dans un esprit positif, de s'exprimer clairement et honnêtement et de bien écouter les autres. On soulignait l'importance d'avoir l'esprit libre quand on se réunit pour une grande cause et qu'on traite de questions difficiles.

    Le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, publié en 1996, constituait le rapport le plus exhaustif sur les peuples autochtones de l'histoire du Canada. Tout comme le Rapport Penner publié quelques années auparavant, le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones n'a pas fait l'objet de protestations des peuples autochtones et il n'a pas non plus été qualifié d'injuste ni fait l'objet de protestations ou de menaces de contestation judiciaire de la part du Canada. Le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones et le Rapport Penner ont été acceptés par les peuples autochtones, non seulement sur le fond, mais aussi parce que le processus d'élaboration du contenu était équitable, ouvert, responsable et démocratique et incluait la pleine participation des peuples autochtones de façon respectueuse et digne.

    À la lumière de ce qui précède, nous recommandons qu'il y ait un processus de consultation sérieux sur le projet de loi C-7, qui reflète bien le processus et les valeurs du Rapport Penner et de la Commission royale sur les peuples autochtones. De plus, nous recommandons que le processus soit établi selon un délai raisonnable convenu par toutes les parties, sans qu'il y ait d'échéancier serré.

    Voici donc le sommaire des recommandations. Suite à cela, s'il reste du temps, je répondrai à vos questions.

    Nous recommandons qu'il y ait une divulgation complète de l'incidence éventuelle du projet de loi C-7 sur les litiges auxquels le ministre a fait référence dans ses commentaires antérieurs; que la Couronne divulgue tout renseignement qu'elle possède sur l'incidence éventuelle que les mesures législatives proposées peuvent avoir sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et la relation fiduciaire; qu'on retourne au stade de l'élaboration du projet de loi et qu'un processus de consultation soit mis en place dans le respect des normes établies par les tribunaux en vue d'une consultation sérieuse, complète, ouverte et transparente; que les questions relatives à l'incidence du projet de loi C-7 sur la relation fiduciaire et les obligations correspondantes soient étudiées à fond par un tiers, et que les résultats de l'étude soient accessibles au public avant que le projet de loi ne soit adopté; que la Couronne s'engage à traiter les questions relatives à la responsabilisation, notamment en créant: un organisme de surveillance de la conduite du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien en matière de respect de ses décisions administratives, une autorité de surveillance des droits conférés par l'article 35, qui ferait rapport sur la surveillance de la relation de fiduciaire et un poste d'ombudsman des Premières nations; qu'il y ait un processus de consultation sérieux sur le projet de loi C-7, qui reflète bien le processus et les valeurs du Rapport Penner et de la Commission royale sur les peuples autochtones; et que le processus soit fondé sur un délai raisonnable convenu par toutes les parties, sans qu'il y ait d'échéancier serré.

¸  +-(1430)  

    Pour conclure, nous voulons insister sur le fait que nos préoccupations essentielles visent le processus. Cela dit, nous devons tous nous rappeler que les droits conférés par l'article 35 sont autant fondamentaux que procéduraux et que les vices de procédure peuvent être irréparables.

    En vous remerciant d'avoir pris le temps d'examiner notre mémoire, nous vous souhaitons le plus grand succès dans cette difficile tâche qui vous attend.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Nous passons maintenant aux questions. Monsieur Martin, c'est à vous de commencer; vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Pat Martin: Merci.

    Je vous remercie beaucoup pour cette déclaration fort utile et très détaillée. Je trouve scandaleux que vous ayez eu toutes les peines du monde à recueillir l'information que vous jugiez nécessaire. Je sais qu'il y a parmi nous des représentants du ministère, et je suis content que soit officiellement consigné au compte rendu permanent qu'il vous a été pratiquement impossible d'obtenir les renseignements qui vous auraient permis de mieux saisir, je crois, les intentions du ministre.

    Comme nous l'avons entendu aux quatre coins du pays au travers de nombreux témoignages très émotifs, les gens craignent qu'il y ait des objectifs secondaires en jeu et que derrière cette façade selon laquelle le projet de loi vise l'amélioration de la gestion financière ou la responsabilisation des Premières nations se cache un cheval de Troyes poursuivant d'autres objectifs, dont celui de défaire le gouvernement de ses obligations fiduciaires ou de diminuer et de saper les droits ancestraux ou issus de traités des Autochtones. Je pense que ce qui interpelle même les plus profanes, c'est l'absence de disposition de non-dérogation dans ce projet de loi. Pouvez-vous nous dire jusqu'à quel point ces craintes sont fondées, puisque jusqu'à preuve explicite du contraire, on pourrait redouter une manoeuvre destinée à atténuer, réduire ou miner la responsabilité fiduciaire du gouvernement et les droits ancestraux ou issus de traités des Autochtones?

¸  +-(1435)  

+-

    M. Mark Stevenson: Je ne tiens pas à spéculer sur les motivations. Tant que nous n'aurons pas accès à l'information et qu'il n'y aura pas de divulgation complète des renseignements, il sera très difficile de se prononcer sur la question. À ce stade-ci, l'Indigenous Bar Association, les Premières nations de partout au pays et même les membres de ce comité sont dans l'ignorance car ils ne disposent pas de tous les éléments voulus.

    En ce qui concerne la disposition de non-dérogation, je dois dire que beaucoup de travail a été fait à ce chapitre et que nous avons examiné le rapport du CCMC. Celui-ci contient une bonne analyse des dispositions de non-dérogation possibles. Ce comité a reçu beaucoup de propositions à ce sujet et nous respectons grandement l'excellent travail accompli. Nous avons essayé de corriger certains éléments de fond, mais nous nous sommes heurtés à des difficultés. Dans notre mémoire, nous avons conclu que le processus était fondamentalement faussé en raison du manque de communication des informations et aussi parce que l'examen article par article, y compris d'une disposition de non-dérogation, ne permettra pas de résoudre le problème. Même si je n'ai rien contre ceux qui ont proposé des dispositions de non-dérogation, si le processus est faussé à la base, n'importe quelle disposition de non-dérogation n'y changera rien. S'il y a bel et bien viol des droits, je ne vois pas comment une disposition de non-dérogation pourrait nous servir. Je ne m'oppose pas à ce type de disposition; je ne fais qu'exposer les problèmes fondamentaux que nous avons relevés après analyse.

+-

    M. Pat Martin: Votre mémoire nous fournit des éléments utiles. D'après ce que nous avons entendu un peu partout au pays, certaines personnes craignent que ce ne soit le cas. Étant donné le niveau d'engagement observé ici aujourd'hui et dehors à la manifestation, il faut se rendre à l'évidence que des gens d'un bout à l'autre du Canada ne veulent pas de ce projet de loi. Je vous remercie pour votre exposé car il nous sera très précieux.

    Merci.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Martin.

    Monsieur Laliberte, je vous accorde cinq minutes.

+-

    M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

    À ce stade-ci, compte tenu de votre expérience juridique, j'aimerais vous demander quelques précisions au sujet de la terminologie employée dans le projet de loi, de certains éléments manquants et de points à élucider.

    Le préambule du projet de loi dit ceci: «Attendu que les gouvernements au Canada jouissent d'attributions...», mais pour devenir une nation, le Canada a dû s'approprier des territoires. Pour ce faire, il a conclu des traités. Considérez-vous que toute mesure législative concernant les Autochtones doit faire référence aux traités signés entre les nations originelles?

+-

    M. Mark Stevenson: Sans m'attarder sur les spécificités du projet de loi, je dirais que si une mesure législative doit être adoptée au terme d'un processus sérieux auquel ont pleinement pris part les nations ayant signé des traités ou ayant des droits ancestraux, c'est parce que les parties sont arrivées à une entente et s'accordent pour dire que, d'une façon ou d'une autre, la mesure législative aura une incidence sur les droits issus de traités, et elles s'entendent également sur les termes à utiliser.

¸  +-(1440)  

+-

    M. Rick Laliberte: Y a-t-il une différence de définition juridique entre Premières nations avec un «P» et premières nations avec un «p»?

+-

    M. Mark Stevenson: Je ne tiens absolument pas à entamer une discussion sur les particularités du projet de loi car, comme je l'ai dit précédemment, nos préoccupations essentielles portent sur le processus; cela n'aurait donc pas beaucoup de sens de se lancer dans ce type de débat.

+-

    M. Rick Laliberte: Permettez-moi de vous poser une autre question.

    La définition de la capacité juridique des conseils de bande est la même que celle des personnes physiques, mais en matière de gouvernance, impose-t-on la capacité juridique d'une personne physique aux administrations municipales et aux gouvernements provinciaux et fédéraux?

+-

    M. Mark Stevenson: La plupart des mesures législatives accorderont une forme de capacité juridique à ces organes. Par exemple, les commissions ou les entités administratives doivent s'acquitter de certaines obligations. Par conséquent, la loi permettant de créer telle ou telle commission, conférera à cette dernière le pouvoir de mener à bien sa mission. Dans certains cas, ce pouvoir est total, dans d'autres, il ne l'est pas. Cela dépend donc de l'entité et des fonctions qu'elle doit accomplir.

+-

    M. Rick Laliberte: Pour en revenir au processus, pensez-vous que ce comité devrait prendre pleinement connaissance du contenu du rapport Penner et du rapport de la CRPA avant de décider quoi que ce soit à l'étape de l'étude article par article de ce projet de loi?

+-

    M. Mark Stevenson: Le processus entourant ce projet de loi était faussé, alors que les processus mis en place par Penner et la CRPA étaient ouverts et transparents et ils garantissaient une pleine participation des Premières nations et du public. Par conséquent, nous recommandons l'instauration d'un processus semblable afin de s'assurer que les Premières nations ont bien été consultées.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Monsieur Martin, je vous accorde cinq minutes.

+-

    M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.

    Je m'intéresse au volume d'affaires judiciaires auquel a fait référence le ministre et dont vous avez finalement obtenu la liste. On nous a dit que si le projet de loi devait être adopté et que si on tentait de recourir à des mécanismes d'imposition de règles et d'un code de gouvernance contre la volonté des Premières nations, nombre de celles-ci, une fois la période de deux ans écoulée, s'adresseraient aux tribunaux. Cela pourrait entraîner toute une série d'affaires judiciaires, au point que les 200 causes portées actuellement devant les tribunaux nous sembleraient insignifiantes en comparaison. Je sais qu'il est difficile de donner un avis juridique au pied levé sur cette question, mais considérez-vous qu'il y a des motifs de croire que l'imposition de ces nouveaux codes puisse être contestée, compte tenu du fait que le processus de consultation était absolument inadéquat et ne respectait en rien la définition juridique d'une consultation en bonne et due forme?

+-

    M. Mark Stevenson: Il y a pas mal d'avis juridiques sur cette question. Tous ceux que j'ai pu voir disent que le processus de consultation était inadéquat et que le projet de loi portait donc atteinte au droit inhérent à l'autodétermination. Je n'ai connaissance d'aucun avis affirmant le contraire, même si j'en ai cherché. Ainsi, si l'on se fonde sur ces avis, et non sur le mien, il n'y a rien d'autre qui dise que le projet de loi n'enfreint pas le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. S'il existe d'autres informations à ce sujet, ce serait intéressant de les obtenir.

¸  +-(1445)  

+-

    M. Pat Martin: Le ministre, le ministère ou qui que ce soit d'autre a certainement envisagé cette éventualité. Si ce n'est pas le cas, ils agissent en sachant pertinemment qu'ils vont au devant d'une contestation et qu'ils risquent même de perdre leur cause devant les tribunaux.

+-

    M. Mark Stevenson: Une fois encore, tout ce que je peux dire, c'est que nous avons déposé des demandes, mais le Service d'accès à l'information nous a répondu que les renseignements voulus ne nous seraient pas communiqués.

+-

    M. Pat Martin: Confidence du Conseil privé de la Reine.

+-

    M. Mark Stevenson: Par conséquent, si on nous dit que l'information ne nous sera pas communiquée, nous en concluons qu'elle existe bel et bien.

+-

    M. Pat Martin: En tant que membre du Parlement, je trouve cela vraiment frustrant. J'ai l'intention de déposer une motion, dès que ce sera possible, pour que ce comité exige d'être informé de tout avis juridique existant sur la question. Je crois que ce comité a la compétence nécessaire pour disposer de ce type d'information.

    Vous serez peut-être intéressé de savoir, à propos de la mascarade entourant le processus de consultation, qu'une personne travaillant pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien—pendant qu'il menait ses consultations—est venue témoigner devant notre comité. Et même s'il ne s'agissait que d'une réunion d'information, on avait demandé à cette personne de compter les participants, de noter s'ils étaient pour ou contre et même s'ils étaient venus à la rencontre pour parler de logement, de santé, d'éducation ou de quelqu'autre point de litige entre le gouvernement et les Premières nations. Ces personnes devraient faire partie des 10 000 individus que le ministre prétend avoir adéquatement consultés.

    En ce qui concerne la définition d'une consultation en bonne et due forme, j'ai lu qu'il ne pouvait pas y avoir de véritable consultation sans certains accommodements. Autrement dit, le simple fait de dire aux gens ce qu'on a l'intention de faire et de leur demander leur avis n'est pas, à proprement parler, de la consultation. Pourriez-vous nous préciser davantage ce que vous comprenez par échange véritable dans le cadre d'un processus de consultation?

+-

    M. Mark Stevenson: Je pense que cela n'a pas beaucoup d'importance étant donné que les tribunaux ont déjà établi les normes de consultation auprès des Premières nations. Ces derniers ont statué que lorsqu'il est question de dossiers fondamentaux, qui se rapportent notamment aux règles de chasse et de pêche, le consentement des Autochtones est requis. Les tribunaux ont fixé des normes. Ils ont parlé de bonne foi, d'ouverture et de transparence. Je pense qu'il suffit d'examiner ces critères pour déterminer si oui ou non le processus de consultation satisfait pleinement aux exigences.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Dromisky, vous disposez de cinq minutes.

+-

    M. Stan Dromisky: Je vous remercie beaucoup.

    Votre mémoire est excellent, mais je pense que la partie la plus remarquable est celle sur la responsabilisation. En y regardant de plus près, à titre de député de Thunder Bay, région où il y a plus de 16 réserves, j'en conclus que mon travail pourrait être beaucoup plus facile. Dans votre document, vous parlez de responsabilisation dans trois grands domaines. Deux d'entre eux ont à voir avec la relation entre les bandes indiennes et les peuples des Premières nations avec le gouvernement. Le troisième concerne la façon dont les bandes s'administrent et établissent leurs propres politiques et leurs systèmes de reddition des comptes, non seulement à des fins administratives, mais aussi pour leurs décisions financières et leurs programmes. Tout ceci me paraît très bien. J'aime tout ce que vous dites et je suis absolument d'accord avec vous, mais comment pouvons-nous arriver à nous faire véritablement confiance sur l'application de ce que nous avons convenu par écrit ou établi d'un commun accord?

    Pour commencer, j'aimerais m'attarder sur une question d'ordre juridique. Allons-nous appuyer l'adoption d'un tel projet de loi? Est-ce ainsi que cela va se passer? Devrons-nous dire dans la loi que ces trois modes de reddition des comptes devront s'appliquer dans la relation entre le gouvernement fédéral et les Premières nations ainsi que dans la relation entre le chef d'un conseil et les membres de chaque bande? Faut-il en arriver là? Je ne sais pas. Que ferons-nous alors? Si nous pouvions enfin comprendre que nous voulons une relation franche à l'égard de ces trois niveaux de responsabilités...

¸  +-(1450)  

+-

    M. Mark Stevenson: Ce n'est certainement pas une tâche facile, mais si vous lisez le rapport de Roberta Jamieson, vous verrez qu'il renferme beaucoup de détails sur la façon de créer un poste d'ombudsman pour les Premières nations. Mais pour en arriver là, il faut établir un véritable processus de consultation et il faut que cela aboutisse à la création d'une institution autochtone. Ceci est le premier aspect.

    Le deuxième aspect auquel j'ai fait référence porte sur la question de la responsabilisation à l'égard des décisions administratives émanant du ministère. À plus d'un titre, ceci fait partie des attributions d'un ombudsman. D'ailleurs, vous remarquerez que beaucoup de provinces ont des ombudsmen, mais que le gouvernement fédéral n'en a pas, même s'il possède un commissaire à l'information, un vérificateur général et différents organes indépendants qui sont là pour le rappeler à l'ordre de temps en temps. Il convient de noter que ces organes ont été créés au moyen de mesures législatives. Ce sont des modèles à étudier, mais, je le répète, nous avons besoin d'un processus de consultation ouvert et équitable.

    Celui qui poserait problème est celui auquel nous faisons référence dans notre document, c'est-à-dire celui de l'établissement d'un organe de surveillance des droits conférés par l'article 35, qui ne serait autre qu'une institution indépendante chargée de surveiller la façon dont la Couronne s'acquitte ou ne s'acquitte pas de ses obligations fiduciaires. Le ministère des Affaires indiennes se trouve dans une situation singulière. D'un côté, il a des obligations fiduciaires. Toute la question est de savoir si les décisions qu'il prend sont dans le meilleur intérêt des Premières nations. C'est à déterminer. Nous avons besoin de créer une entité chargée de voir si ces décisions affectent positivement ou négativement les Autochtones puisqu'il n'existe aucune autre façon de le faire autrement qu'en passant par les tribunaux; c'est pourquoi il y a autant de litiges.

+-

    M. Stan Dromisky: Vous parlez d'un organe chargé de la surveillance des activités du gouvernement. Que pensez-vous d'un organe chargé de la surveillance des chefs?

+-

    M. Mark Stevenson: Cet élément fait partie des trois aspects que nous avons décrits. Le premier concerne la création d'un poste d'ombudsman pour les Premières nations, qui serait chargé de surveiller, en se fondant sur des normes internationales, les décisions prises par les gouvernements autochtones, y compris celles des chefs, qui affectent la vie des peuples des Premières nations. Cela répond donc à votre question.

+-

    M. Stan Dromisky: Non, pas complètement. Imaginez que je suis un ombudsman et que vous êtes un chef qui se moque éperdument des plaintes déposées contre lui et qui me dit d'aller au diable. De quels recours disposent l'ombudsman, le gouvernement et les membres de la bande si le chef maintient sa position quoi que dise l'ombudsman?

+-

    M. Mark Stevenson: Beaucoup de gouvernements font des erreurs, pas seulement les gouvernements autochtones, mais aussi les gouvernements fédéraux et provinciaux ainsi que les administrations municipales, et ils ont tous des pouvoirs politiques.

+-

    Le président: Monsieur Martin, vous disposez de trois minutes.

+-

    M. Pat Martin: Je m'intéresse encore beaucoup aux difficultés auxquelles vous vous êtes heurtés en demandant l'information dont vous aviez besoin auprès du ministère. J'imagine que la question que vous lui avez posée était de savoir s'il avait commandé ou élaboré des avis juridiques sur l'incidence possible du projet de loi C-7 sur...quoi? Aidez-moi.

¸  +-(1455)  

+-

    M. Mark Stevenson: Le droit inhérent à l'autodétermination et la relation fiduciaire.

+-

    M. Pat Martin: Et vous n'auriez pas demandé cela si vous n'aviez pas eu quelque raison de penser que cela pouvait être le cas, n'est-ce pas? Vous croyez donc que c'est possible.

+-

    M. Mark Stevenson: Comme je l'ai dit, il existe de nombreux avis juridiques selon lesquels cette loi porterait atteinte au droit inhérent à l'autodétermination, et le public peut les obtenir. Je n'ai vu aucun avis juridique auquel a accès le public disant le contraire. Il se peut qu'il y en ait, nous les avons demandés, mais on ne nous les a pas fournis.

+-

    M. Pat Martin: Étant donné les informations que nous venons de recevoir, je chercherai à savoir à la première occasion si le ministère dispose d'avis juridiques concernant l'incidence possible du projet de loi C-7 sur les droit ancestraux. Je suis très frustré et horrifié d'apprendre que ces documents n'ont pas été mis à votre disposition.

    Je tiens à vous féliciter pour votre excellente présentation. J'ai un ami avocat d'ascendance autochtone qui m'a confié que la plus grosse erreur qu'on avait pu commettre, c'était de laisser des gens comme lui aller à l'université.

    Merci.

+-

    Le président: Vous pouvez conclure.

+-

    M. Mark Stevenson: Je vous remercie beaucoup.

    C'était pour moi un honneur que de témoigner devant vous. Je réalise que vous faites face à une tâche colossale, mais permettez-moi de vous mettre en garde face au risque énorme que ce projet de loi porte atteinte aux droits des Autochtones. S'il a une influence négative sur ces droits, que ce soit les droits procéduraux ou fondamentaux, les conséquences pourraient être irrémédiables. Je sais que votre mandat est limité, mais je vous prie d'agir avec la plus grande prudence et je vous souhaite la meilleure des chances.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Nous invitons maintenant Ava Hill et Philip Monture, membres des Six Nations of the Grand River, pour un exposé de 10 minutes.

    Soyez les bienvenus, veuillez commencer sans tarder.

+-

    Mme Ava Hill (membre des «Six Nations of the Grand River», À titre individuel): Aujourd'hui, m'accompagnent Nina Burnham des Six Nations, ancienne conseillère et aînée de notre communauté, pour laquelle j'ai le plus grand respect, ainsi qu'un ami qui jouit d'une vaste expérience en matière de politique autochtone, je veux parler d'Andrea Chrisjohn, de la nation des Oneidas de la Thames.

    Pour commencer, je veux qu'il soit absolument clair que je n'appuie pas du tout le projet de loi sur la gouvernance des Premières nations. Je tiens également à exprimer mon mécontentement à l'égard du processus de consultation mené dans le cadre de cette mesure législative. Le ministre a non seulement entrepris d'obtenir la rétroaction et l'appui des membres des Premières nations, mais aussi des non Autochtones. Cela m'a beaucoup troublée car je considère fermement que les collectivités non autochtones n'ont rien à dire sur la façon dont nous conduisons nos affaires sur notre territoire. Cela concerne les gens qui vivent sur nos terres, ceux qui s'y présentent à des élections ou qui peuvent y voter.

    Permettez-moi de parler un peu de toute l'information qui a circulé autour de la LGPN. Je tiens à dire, en tant que membre d'une bande vivant dans une réserve indienne, qu'il est difficile de savoir qui dit vrai. Est-ce le ministre des Affaires indiennes, qui a peut-être visité notre réserve une ou deux fois, ou sont-ce nos chefs et nos conseils, qui font une propagande que certains qualifient d'alarmiste? Par exemple, le ministre affirme qu'il rendra les Premières nations plus responsables et qu'il leur donnera davantage de pouvoirs pour mener leurs propres affaires. En même temps, on dépose dans nos boîtes aux lettres des prospectus disant que la LGPN consacrera la fin de nos droits ancestraux, nous imposera des administrations municipales, réduira les responsabilités fiduciaires du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations et instaurera un régime d'imposition dans les réserves. Il me semble que nous en sommes arrivés à une guerre de mots qui se fait aux dépens des Autochtones.

    D'après ce que j'ai pu lire, la LGPN porte sur un certain nombre de dossiers que beaucoup de Premières nations ont déjà pris en mains. La réserve des Six Nations où je vis a déjà son propre code électoral, sa propre politique de gestion financière ainsi que des politiques administratives, tout comme beaucoup d'autres Premières nations. Tout cela pour dire que ce qui me déplaît dans la LGPN, c'est que c'est une loi passe-partout. Elle ne fonctionnera jamais dans un pays où il y a tant de peuples différents ayant leur propre identité et leur propre culture.

    Ce qui ne me plaît pas non plus dans la LGPN, c'est que le ministre continue de garder tous les pouvoirs. Que fera le ministre si les chefs et les conseils ne satisfont pas aux normes établies dans la LGPN? Va-t-il suspendre le financement que le gouvernement nous doit et qui nous revient de plein droit? Qui sera touché? Ce seront précisément les personnes qu'il prétend protéger, c'est-à-dire les Autochtones de la collectivité.

    Plutôt que de nous imposer cette LGPN, le gouvernement du Canada devrait mettre en oeuvre les recommandations émanant du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Le gouvernement a dépensé des millions de dollars pour obtenir ces recommandations qu'il refuse toujours d'appliquer. Si vous adoptez ce projet de loi, nous pouvons presque vous garantir que dans 20 ou 30 ans on créera une autre commission royale pour voir comment aider les peuples autochtones à survivre sur cette terre qui, à l'origine, était la leur.

    Vous devriez aussi vous occuper du système des pensionnats. Ce système avait été mis sur pied par le gouvernement du Canada, soi-disant pour aider les Autochtones. Vous savez tout comme moi que ces internats n'ont absolument jamais aidé les Autochtones. Au contraire, ils sont à l'origine de beaucoup des problèmes économiques et sociaux dont souffrent actuellement nos communautés, non seulement en raison des effets sur notre langue et sur notre culture, mais aussi à cause des sévices physiques et sexuels infligés dans ces institutions.

    Je suis d'accord pour que les dirigeants des Premières nations rendent davantage de comptes, mais je ne pense pas que ce soit au ministre des Affaires indiennes de jouer les grands manitous en exigeant des comptes. C'est aux peuples des Premières nations eux-mêmes de le faire, et pour y parvenir nous devons permettre à la base de se prendre en mains. Beaucoup de chefs et de conseils défendent le même point de vue lorsqu'ils cherchent à obtenir le pouvoir et disent aux membres de poser des questions, d'exiger des réponses, mais lorsqu'ils sont élus, ils ne sont pas meilleurs que leurs prédécesseurs qu'ils ont tant critiqués.

    Notre peuple doit se débarrasser de l'apathie qui règne dans de très nombreuses communautés. Nous devons nous lever et faire entendre notre voix. Nous devons être attentifs à ce qui se passe. Nous devons nous inquiéter de l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants. Malheureusement, beaucoup trop de gens ont peur de s'exprimer.

¹  +-(1500)  

    Nos collectivités ont besoin de dirigeants responsables. C'est à nous qu'il appartient de les élire et de vérifier qu'ils s'acquittent bien des responsabilités que nous leur avons confiées. Nous n'avons pas besoin de dirigeants qui se croient l'égal des maires et des premiers ministres qui dirigent des gouvernements à l'extérieur des Premières nations. Nous n'avons pas besoin de dirigeants qui invitent des personnes ne faisant pas partie de la bande à décider qui vit sur notre territoire. Nous n'avons pas besoin de dirigeants qui font le jeu des grands médias et, pourtant, refusent de parler à nos journalistes locaux. Nous n'avons pas besoin de dirigeants qui imposent leurs décisions aux conseillers que nous avons élus pour défendre nos intérêts.

    J'aimerais me servir de la tribune d'aujourd'hui pour lancer un défi à tous nos peuples. Il faut que nous prenions nos collectivités en charge et que nous décidions de leur destinée. Il faut remonter dans le temps, revenir à nos traditions. Ceux d'entre nous qui ont la chance d'avoir encore dans leurs collectivités un système traditionnel doivent s'en servir et y prendre appui. Il faut rebâtir nos nations. Il faut s'asseoir avec le gouvernement du Canada, non pas en tant que première nation d'Ontario, mais en tant que Nation iroquoise, Nation ojibway, Nation crie ou Nation dakota. Jadis, notre peuple était fort et fier et exerçait sa propre souveraineté. Il faut puiser à même nos ressources intérieures et internes pour retrouver cette force et cette fierté, parce qu'elle est encore là. Nos dirigeants disent constamment que nous sommes une nation souveraine. Eh bien, il faut se comporter comme telle. Il faut commencer à exercer notre droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, nos droits ancestraux et nos droits issus de traités, non seulement pour notre propre bien, mais pour le bien de nos générations futures.

    En guise de conclusion, je tiens simplement à dire que, quand j'ai commencé à travailler à la fin de mes études secondaires, c'était au ministère des Affaires indiennes à Toronto, en juillet 1969. J'y ai travaillé deux semaines, après quoi le ministre des Affaires indiennes d'alors a publié un décret qui disait essentiellement qu'il n'y avait plus de ministère des Affaires indiennes. C'était il y a 34 ans, et le ministre des Affaires indiennes d'alors était Jean Chrétien. Le décret qu'il a émis était l'infâme Livre blanc. Selon moi, cette Loi sur la gouvernance des Premières nations est le Livre blanc. Il a été mis en veilleuse en 1969, mais Jean Chrétien ne l'a pas jeté. Il l'a simplement rangé sur une tablette et, maintenant, il demande à son ministre actuel de le mettre en oeuvre avant qu'il ne se retire de la vie politique.

    Soit dit en passant, le ministère des Affaires indiennes existe toujours, et il n'a jamais été aussi gros. Je suis allée à l'administration centrale, il n'y a pas longtemps. Chaque fois que j'y vais, j'y vois étage par-dessus étage d'employés qui travaillent. Je me demande combien d'entre eux ont déjà mis les pieds dans une réserve indienne. Je parie qu'ils ne sont pas nombreux. Pour eux, nous ne sommes que des données statistiques, des chiffres et un chèque de paie. Ils ne savent pas vraiment ce qui se passe dans nos collectivités. Les millions de dollars dépensés par cette bureaucratie seraient peut-être mieux employés à donner plus d'argent aux Premières nations, particulièrement à des fins récréatives et pour le développement économique, c'est-à-dire là où il est censé être dépensé.

    Je vous remercie.

¹  +-(1505)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    J'invite maintenant Philip Monture à nous faire son exposé. Il nous reste dix minutes.

+-

    Mme Ava Hill: Pourquoi donnez-vous une heure de parole au Indigenous Bar Association et seulement cinq minutes à ces gens?

+-

    Le président: Parce qu'il représente une association nationale.

+-

    Mme Ava Hill: Souhaitez-vous dire quelque chose? Vous avez une minute.

+-

    Le président: Nous gaspillons du temps. Il faut avoir quitté la salle à 16 heures.

+-

    M. Philip Monture (membre des «Six Nations of the Grand River», À titre individuel): Je vais vous montrer comment on fait vite. Voici mon mémoire, qui a été déposé. Ava, beau travail! Il est plutôt difficile d'enchaîner sur cela.

    Le gouvernement du Canada a eu l'occasion d'agir dans le cadre du projet de loi C-6, c'est-à-dire de la Loi sur le règlement des revendications particulières. En décidant de ne pas opter pour le tribunal indépendant des revendications qui avait été établi conjointement par le Canada et l'Assemblée des Premières nations, il ne s'est pas acquitté de sa responsabilité à l'égard du peuple du Canada et à l'égard des Premières nations, car il ne leur a pas donné de base économique proportionnelle à leur investissement dans le pays. Sans cette base économique, nous allons quêter tout ce qui nous est donné pour le reste de la présente génération. Tout ce que vous avez ici, c'est un gouvernement qui continue de faire comme il a toujours fait, qui ne changera rien à l'état actuel des choses. C'est un échec. Si le gouvernement opte pour le processus de règlement des revendications sans que nous ayons notre propre base économique en vue d'établir notre indépendance, nous ne sommes rien et nous n'arriverons jamais à sortir du marasme dans lequel nous nous trouvons. Ajoutez à cela l'instabilité des Premières nations durant les périodes électorales, le traitement des employés autochtones. Nous nageons dans le noir le plus total—quelle loi s'applique et quelle loi ne s'applique pas à nous? Il n'y a pas de stabilité. Nous sommes en train de perdre notre mémoire collective, dans les réserves. Il y a un manque total de leadership.

    Ajoutez cela à l'exposé fait par Ava.

+-

    Le président: Cela fera partie du compte rendu officiel. Le greffier me dit que c'est vous qui aviez demandé à comparaître ensemble.

    Nous devons passer au témoignage de Audrey Logan. Il reste dans la salle plus de 15 personnes qui veulent prendre la parole, et nous devons avoir quitté d'ici 16 heures.

    Audrey Logan, je vous prie.

+-

    Mme Audrey Logan (À titre individuel): [Le témoin s'exprime dans une langue autochtone]

    C'est ainsi que je me présente, parce que c'est ma langue maternelle. Pour vous, il s'agit d'une langue étrangère. Je vois que vous essayez de retrouver les mots prononcés dans le mémoire, mais j'ai fait exprès de ne pas les inclure, parce que notre langue vous est tout aussi étrangère que l'est cette loi pour nous. Mon nom en anglais est Audrey Logan, et j'appartiens au clan de la tortue. Je suis membre de la Première nation des Delaware, qui se trouve juste à côté de l'autoroute 401, près de Thamesville.

    On fait l'éloge de la Loi sur la gouvernance des Premières nations comme étant la suite donnée par le gouvernement fédéral à la demande des Premières nations de tout le Canada. Il semblerait que l'entrée en vigueur de cette loi ne soit rien de plus que la réponse du gouvernement du Canada à la réduction de la dette. Par le passé, le gouvernement fédéral était vivement intéressé à assumer la propriété à l'égard des terres et des ressources autochtones, mais beaucoup moins intéressé à assumer la responsabilité de fournir des services aux populations des Premières nations.

    Il est vrai que les Premières nations cherchent de l'appui dans le domaine de la gouvernance depuis l'entrée en vigueur de la toute première Loi sur les Indiens. Cependant, les Premières nations du Canada ont l'intime conviction que ce genre et ce style de gouvernance devraient venir de l'intérieur. Le style de gouvernement qui existait avant la Confédération était une gouvernance sophistiquée qui a donné la certitude aux signataires de la Proclamation royale de 1763 que les peuples autochtones étaient capables de gérer leurs propres affaires. Le style prédominant de gouvernement avant la Confédération était un style consensuel et il a encore cours dans de nombreuses collectivités. La Loi sur la gouvernance des Premières nations est une loi de surveillance, l'autorité ultime demeurant entre les mains du gouvernement fédéral.

    L'État a pour la première fois assumé la responsabilité de fiduciaire en signant la Proclamation royale d'octobre 1763. Cette proclamation incluait un libellé visant à protéger les Indiens, pour qu'ils ne fassent pas l'objet de mauvais traitements et qu'ils ne soient pas autrement perturbés. Dans la Loi constitutionnelle de 1867, le gouvernement fédéral a exercé les pouvoirs qui lui étaient conférés à l'article 91, classe 24, pour adopter la Loi fédérale sur les Indiens qui regroupait toutes les lois fédérales relatives aux Indiens prises après la Confédération. La Loi de 1927 sur les Indiens comportait des dispositions concernant la cession de bandes de terre, le sol, le sable, la pierre, le minerai et ainsi de suite avantageant la Couronne. La réforme de 1952 de la Loi sur les Indiens a permis aux hommes des Premières nations de voter tout en discriminant contre les femmes. L'actuelle Loi sur les Indiens, modifiée pour la dernière fois en 1986, est celle l'on est en train d'examiner. Dans le passé, le gouvernement fédéral s'intéressait vivement à assumer la propriété des terres et des ressources autochtones, mais beaucoup moins à assumer la responsabilité d'offrir des services aux collectivités des Premières nations.

    Le gouvernement du Canada, par l'intermédiaire de la Couronne, a une obligation de fiduciaire à l'égard des peuples des Premières nations, obligation qui est inscrite dans la Loi constitutionnelle de 1982. L'arrêt Sparrow a clairement décrit les obligations de fiduciaire de la Couronne à l'égard des peuples autochtones. Elles vont beaucoup plus loin que la cession de terres autochtones et couvrent les relations entre la Couronne et les Autochtones. Elles ont d'ailleurs été inscrites au paragraphe 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982. La Loi sur la gouvernance des Premières nations à l'étude est une tentative faite par la Couronne pour se débarrasser de son obligation de fiduciaire à l'égard des Premières nations du Canada.

    Le gouvernement du Canada a toujours élaboré des lois qui grugent les droits de nos peuples. Qu'il suffise de dire qu'aux yeux des Premières nations, le gouvernement présente un processus qu'elles ont jusqu'ici jugé tout à fait insatisfaisant.

¹  +-(1510)  

    Il y a eu très peu, s'il y en a eu, de consultations pour l'élaboration de ce texte législatif avec les Premières nations qui sont directement touchées par son application. L'Assemblée des Premières nations, les Chiefs of Ontario, l'Association of Iroquois and Allied Indians, le Grand Council Treaty no 3, le Nishnawbe-Aski Nation et l'Independent First Nation ont tous rejeté ce projet de loi. Le gouvernement fédéral s'apprête à l'adopter sans avoir suffisamment consulté les principaux intéressés. Le gouvernement fédéral, en tant qu'ordre politique établi, refuse de faire confiance aux peuples, non seulement aux peuples autochtones, mais à tous les Canadiens, pour prendre les bonnes décisions, même si ce sont eux qui devront vivre avec les conséquences de ces décisions.

    Il semblerait que cette loi soit une mesure de la part du gouvernement fédéral visant à réduire la dette, en réduisant son obligation de fiduciaire à l'égard des Premières nations du Canada. Naturellement, le fait que le gouvernement du Canada laisse les Premières nations assurer leur propre gouvernance signifie qu'avec le temps, il y aura un impôt local à payer. Quand une collectivité demande plus de pouvoirs dans le domaine de la gouvernance, elle facilite également le recul de la responsabilité fiscale du gouvernement supérieur. Vous pouvez utiliser des exemples auxquels n'importe qui en Ontario pourrait s'identifier, par exemple la réduction des services que vivent actuellement les Ontariens. Il sera prouvé que les collectivités de Premières nations sont au bas de l'échelle économique au Canada et n'ont pas la capacité de produire leurs propres revenus en prélevant des impôts, comme le font leurs homologues non autochtones. La Loi sur la gouvernance des Premières nations ressemble à un exercice de réduction et mènera à la taxation éventuelle des collectivités des Premières nations. Par le passé, le gouvernement s'est intéressé à assumer la propriété des ressources, mais était moins intéressé, je le répète, à fournir une répartition équitable de la richesse produite par les terres communautaires de la Première nation. L'imposition des membres de Premières nations au Canada n'est pas une option viable, puisqu'il n'existe pas d'assiette de l'impôt. La réduction d'un service aura aussi un effet, à la fois économique, social, physique et émotionnel, sur tous les citoyens des environs. L'argent produit par les collectivités de Premières nations est en effet dépensé dans les localités voisines.

    Il faut mentionner que la Couronne est peut-être en conflit d'intérêts dans la mise en application de la Loi sur la gouvernance des Premières nations. Cette loi permet aux intérêts propres à la Couronne ou aux intérêts de tiers de l'empêcher d'assumer ses obligations à l'égard des Premières nations. La Couronne a un intérêt dans la gestion fiscale par l'intermédiaire de cette loi. Le Parti libéral du Canada, en tant que tierce partie, a un intérêt dans la réduction de la dette et dans un programme électoral qui lui permettra de se faire réélire grâce à l'application de la Loi sur la gouvernance des Premières nations. Il est du devoir de la Couronne d'agir en toute bonne foi dans le meilleur intérêt des peuples autochtones. Le texte de loi à l'étude correspond au meilleur intérêt de la Couronne, non pas à celui des peuples autochtones à l'égard desquels elle a une obligation de fiduciaire.

    Je suppose que la question constitutionnelle qu'on se pose ici est de savoir si un organe unique a le droit absolu de décider quels seront, s'il y en a, les pouvoirs réels d'un autre gouvernement. L'argument présenté par les Premières nations est que nous avons un gouvernement qui s'appuie sur la tradition et sur le droit coutumier. Le fait que le gouvernement du Canada ait signé des traités avec les Indiens indique qu'il les a reconnus comme groupe politique, comme peuple souverain, et que les négociations se sont déroulées de nation à nation.

    Si vous le voulez bien, j'aimerais rappeler à Robert Nault qu'en démocratie, le droit n'est pas établi par les représentants élus et les bureaucrates.

¹  +-(1515)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Nous allons maintenant passer aux témoins de dernière minute. Nous avons 15 noms. Je crois savoir que trois ou quatre de ces personnes ont indiqué qu'elles aimeraient témoigner et, si nous pouvons les retrouver, nous inscrirons provisoirement leurs noms sur la liste, en espérant que nous pourrons les insérer avant 16 heures. Je vais être très strict au sujet des deux minutes de temps allouées. Certains disent que ce n'est pas très long, que nous ne faisons habituellement pas cela, mais le comité a décidé de donner la parole au plus grand nombre de personnes possible, et c'est là la meilleure façon que nous avons trouvé de le faire.

    Je vais inviter cinq personnes à la fois, que nous entendrons une à une: Rebeka Tabobondung, Ethel Lavalley, Dan Smoke, Robert Adams et Deborah Richardson.

+-

    Mme Rebeka Tabobondung (À titre individuel):  Je suis membre de la Première nation Wasauksing, c'est-à-dire du clan du castor. Je suis venue ici aujourd'hui pour dire au comité que je suis totalement opposée au projet de loi C-7, c'est-à-dire à la Loi sur la gouvernance des Premières nations, de même qu'à toute la série de lois qu'a présentées le ministre des Affaires indiennes Robert Nault à la Chambre des communes.

    Qu'a fait le gouvernement du Canada depuis 1969, quand il a essayé de faire adopter le Livre blanc? Le projet de loi C-7 me semble une copie exacte du Livre blanc qui avait fait l'objet d'une vive opposition de la part des peuples autochtones de tout le Canada. De toute évidence, comme en 1969, les peuples autochtones s'opposent actuellement au projet de loi à l'étude. Le gouvernement du Canada a-t-il passé les 34 dernières années les yeux fermés et les oreilles bouchées? Depuis 1969, je ne sais combien d'ouvrages universitaires et politiques ont été publiés par des Autochtones pour dire que ce que l'on souhaite, c'est l'autodétermination. Le gouvernement du Canada lui-même a investi des millions de dollars dans la Commission royale sur les peuples autochtones qui a elle aussi conclu qu'il faut que le Canada négocie avec les peuples autochtones de nation à nation, non pas en tant que dictateur menant des négociations bidons et unilatérales. Il est tout à fait honteux et absolument illogique que le gouvernement du Canada tourne le dos aux 35 années d'efforts déployés depuis le Livre blanc de 1969. La Loi sur la gouvernance des Premières nations est un recul qui nous ramène à l'âge des ténèbres et prouve que le racisme et le colonialisme se portent encore bien au sein du gouvernement du Canada.

    Meegwech.

¹  +-(1520)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Je ne vois pas Ethel Lavalley, de sorte que nous allons céder la parole à Dan Smoke.

+-

    M. Dan Smoke (À titre individuel): Monsieur le président, moi et mon épouse allons nous partager les deux minutes qui nous sont allouées.

+-

    Mme Mary Lou Smoke (À titre individuel): Le ministre des Affaires indiennes, Robert Nault, dit qu'il a l'intention de remplacer la Loi sur les Indiens par la Loi sur la gouvernance des Premières nations. La première annonce faite il y a deux ans s'est soldée par un rejet catégorique de la part des dirigeants des Premières nations. Les deux camps ont fini par s'entendre pour régler les questions sociales et économiques des Autochtones, les rapports établis par traité et la base des revenus territoriaux nécessaires pour appuyer la gouvernance.

+-

    M. Dan Smoke: Monsieur Nault tire son pouvoir législatif de l'article 91 d'une Loi sur les Indiens désuète. D'abord adoptée en 1876, la loi réglemente les liens entre le gouvernement fédéral et les collectivités autochtones. Chacun reconnaît que la loi est paternaliste et qu'elle limite les droits à l'autodétermination des Autochtones. Nous nous demandons pourquoi le ministre a décidé d'ignorer l'article 35 de la Loi constitutionnelle du Canada, qui reconnaît et affirme les droits ancestraux et issus de traités.

+-

    Mme Mary Lou Smoke: Quand de pareilles contradictions se produisent dans les lois visant les Autochtones, nous estimons qu'il faudrait que la loi soit interprétée comme privilégiant les droits autochtones, plutôt que l'autorité des bureaucrates. Par exemple, la tentative faite par M. Nault en vue de légiférer les pouvoirs délégués dans la Loi sur la gouvernance des Premières nations est loin des rapports de nation à nation affirmés à l'article 35.

+-

    M. Dan Smoke: Le ministre devrait travailler de concert avec les Premières nations à promouvoir notre droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et à rétablir le gouvernement traditionnel. Le gouvernement du Canada devrait respecter la Loi constitutionnelle qu'il a adoptée il y a que 21 ans, de même que la charte des droits de la personne des Nations Unies, dont le pays est signataire. La prise de lois à l'égard des Autochtones doit se faire en partenariat avec les dirigeants autochtones, plutôt que dans leur dos.

+-

    Mme Mary Lou Smoke: L'automne dernier, l'initiative de gouvernance des Premières nations a été présentée au Parlement par le ministre des Affaires indiennes. Il a dit que la loi sur la gouvernance modernisera la Loi sur les Indiens. lI est indéniable qu'il faut abroger la Loi sur les Indiens. Les dirigeants de Premières nations ont dit qu'il fallait tenir de grandes consultations sur ce qui la remplacerait, ce qui n'a pas été fait.

+-

    M. Dan Smoke: Aux termes du projet de loi, il faudrait que les bandes autochtones élaborent des codes décrivant comment elles choisiront leurs dirigeants, se gouverneront et dépenseront leur argent. Les bandes seront autorisées à adopter leurs propres lois dans ces trois domaines tant et aussi longtemps qu'elles satisferont à certaines normes minimales établies par le gouvernement fédéral. Si elles n'élaborent pas leurs propres codes dans les deux années qui suivent, le gouvernement fédéral pourrait imposer des règles par défaut.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    À vous tous, je donne l'assurance que, si vous laissez un document écrit, nous ferons en sorte que chaque membre du comité en reçoive un exemplaire, même ceux qui ne pouvaient pas être des nôtres aujourd'hui.

    J'invite Ethel Lavalley à prendre la parole tout de suite.

+-

    Mme Ethel Lavalley (À titre individuel): Je remercie beaucoup les membres du comité permanent.

    Je suis la secrétaire-trésorière de la Fédération du travail de l'Ontario et vice-présidente autochtone du Congrès canadien du travail. Je vous transmets les salutations et l'appui de 2,3 millions de membres du mouvement ouvrier. Je suis venue appuyer nos Premières nations qui rejettent cette loi sur la gouvernance.

    Je n'en crois pas mes oreilles. Aujourd'hui, en ce jour international de l'élimination du racisme, j'entends des Autochtones en train de décrire au comité ce qu'est le racisme. Je trouve très ironique qu'en l'an 2003, il soit encore nécessaire de venir dire à un comité de laisser nos droits tranquilles, de les négocier, de parler à nos membres, de ne pas nous dire quoi faire. Deux guerres sont en cours actuellement. Il y a, d'une part, la guerre en Irak dont on parle beaucoup dans la presse, mais il y a aussi, d'autre part, une guerre plus sournoise qui se livre depuis des décennies: je parle de la guerre contre les Premières nations. C'est une guerre qui se poursuit contre nos Premières nations et contre leurs droits.

    Je vous suggère de négocier, de consulter et de parler aux gens, de parler aux chefs, aux membres des bandes. Toutes ces personnes savent ce qu'elles veulent. Nous ne sommes pas stupides. Nous étions les premiers ici et nous supplions le gouvernement de nous prendre au sérieux. Nous sommes ici en grand nombre aujourd'hui. Ne commettez pas l'erreur de croire que nous ne reviendrons pas en grand nombre si le gouvernement n'agit pas et qu'il ne retire pas ce projet de loi. Ce n'est pas une menace, c'est une promesse.

¹  +-(1525)  

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Robert Adams n'est pas ici.

    Deborah Richardson, si vous voulez bien commencer.

+-

    Mme Deborah Richardson (À titre individuel): Mes salutations.

    Je ne vais pas répéter ce que bon nombre de mes frères et soeurs vous ont dit. Je viens de la Première nation Papineau, au Nouveau-Brunswick, et voici ma fille, Jasmine.

    J'ai été directrice exécutive du Native Canadian Centre of Toronto, un des 118 centres d'amitié du pays. Durant notre assemblée générale annuelle, des représentants des Affaires indiennes sont venus nous demander si un des leurs pouvait s'adresser aux membres pour leur donner de l'information. Les membres ont accepté, mais ont adopté une résolution précisant qu'il ne s'agissait pas d'une consultation et que les Affaires indiennes ne devaient jamais la qualifier de telle, qu'il s'agissait d'une séance d'information uniquement. Nous estimions que les membres devraient y avoir droit. Peu après, quand nous sommes allés visiter le site Web des Affaires indiennes, nous avons appris qu'ils avaient eu une consultation avec le Native Canadian Centre of Toronto.

    Autre exemple, un aîné mohawk d'Akwesasne, transporté par autocar jusqu'à Toronto, s'est présenté à ce qu'il croyait être une réunion. En fait, il s'agissait d'une consultation. C'est un vieux monsieur de 90 ans. Il était très bouleversé et estimait avoir été exploité.

    Voilà deux exemples que je tenais à vous donner au sujet du processus de consultation. Je suis sûre que vous avez entendu des récits analogues partout au pays.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Je vais faire une observation, parce que la prochaine personne que nous allons entendre est plus jeune. Nous sommes très fiers de vous. Nous vous félicitons d'avoir ce courage. Vous disposez de deux minutes.

    Amber Silversmith.

+-

    Mme Amber Silversmith (À titre individuel): Nous sommes des Ongwehonweh de descendance et non dans le sens défini par la Loi sur les Indiens. Nos enfants ne seront pas considérés comme des biens. Nous sommes plus forts que jamais. Nous sommes les gardiens et les protecteurs de la Terre mère. Nous parlons au nom de tous les animaux, de la terre, de l'eau. Nos responsabilités et notre mode de vie consistent à prendre soin de ces cadeaux précieux. C'est le Créateur lui-même qui nous a confié cette tâche, que nous accomplirons tant que les rivières couleront et l'herbe poussera. Il a également dit qu'il serait de retour, que ce serait le retour du grand roi lui-même.

    Pourquoi n'arrêtez-vous pas de nous dire comment être des Autochtones et pourquoi ne nous donnez-vous pas ce que nous jugeons nécessaire pour nous? Chaque voix autochtone ici peut vous dire ce dont elle a besoin dans sa vie. Chaque personne mérite d'être heureuse, d'avoir de la nourriture et d'être en sécurité. Arrêtons de nous tourner les pouces à cette table pendant que vous essayez de nous définir, parce que vous n'y réussirez pas. Nous ne sommes pas des enfants dont vous ou votre gouvernement doit s'occuper, nous sommes les enfants de Dieu. Il est inutile que vous déterminiez ce que nous sommes à vos yeux. Nous sommes des Autochtones de descendance et non des Indiens au sens de la Loi sur les Indiens. Nos âmes ne sont pas à vendre. Nous ne sommes pas à vendre. Je crois fermement que nous ne sommes pas des enfants appartenant à la Reine. Nous avons une tâche à accomplir, et vous essayez de nous en empêcher. Mon âme n'est pas à vendre.

+-

    Le président: Merci et félicitations.

¹  +-(1530)  

+-

    Mme Amber Silversmith: Cela ne fait pas de moi une Indienne. Mon coeur, mon âme, mon esprit, mon sang font de moi une Indienne.

+-

    Le président: Nous comprenons.

    Monsieur Brown, veuillez commencer.

+-

    M. Tim Brown (À titre individuel): Je suis vice-président de la FTO pour les personnes autochtones.

    J'ai écrit votre nom dans le sable, et le vent l'a effacé. J'ai écrit votre nom dans les nuages, et il s'est dissipé. J'ai écrit le nom de mon peuple dans mon coeur, et il va y rester pour toujours. Apprenez à retenir votre jugement. Écoutez pour apprendre et apprenez à écouter. Entrez en contact avec votre intérieur. Regardez la vie avec joie. Ne pleurez jamais pour quelque chose qui ne peut pleurer pour vous. Voilà les leçons qu'on nous apprend. Ce sont des leçons, et nous avons des obligations et des responsabilités envers notre peuple, notre territoire et cette terre. Nous ne pouvons pas les abandonner, ils ne sont pas à vendre, ils ne le seront jamais. Nous tenons fermement à ces principes, et c'est de cette façon que nous nous tenons devant le Créateur.

    Meegwech.

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup.

    Je vais prendre quelques secondes pour vous expliquer que tout ce que vous dites est envoyé instantanément à Ottawa et que tout est tapé comme vous le dites. Vous ne perdez donc pas votre temps ici, tout est enregistré officiellement. Si vous avez des documents, vous pouvez également nous les laisser.

    Dean Sayers.

+-

    M. Dean Sayers (À titre individuel): Je suis du clan du héron bleu. Mon nom est He Stands and Walks Tall and Takes Care of the Medicine. Je suis membre de la Nation des Ojibways, qui vit sur les territoires des Batchewanas, sur la rive nord du lac Supérieur, qui s'étend jusqu'à 300 milles au nord et à 10 milles dans les terres.

    Avant de venir ici, j'ai discuté avec des aînés qui m'ont conseillé au sujet de notre relation avec le gouvernement canadien, qui a hérité de responsabilités fiduciaires. Selon ce qu'on m'a expliqué, nous sommes un peuple souverain. Nous avons signé des traités de nations à nations avec la Couronne, avec la Grande-Bretagne. Lorsque Trudeau a rapatrié la Constitution en 1982, il a assuré à la Reine que le Canada avait évolué et qu'il était devenu suffisamment responsable pour devenir un grand pays, un grand garçon comme les autres pays du monde et qu'il n'avait plus besoin de la Reine pour signer tous ses papiers. Je ne crois pas que la Reine signerait ce projet de loi. Je crois qu'il est dégradant. Depuis que le peuple canadien a rapatrié la Constitution, à ce que les aînés m'ont expliqué, s'il y a des accords ou des traités qui doivent être interprétés, on ne devrait jamais les abroger ou déroger à leur signification. Si des traités ou des ententes doivent être interprétés, ils doivent l'être en faveur du peuple autochtone. Cela ne fonctionne pas pour nous. L'un de mes aînés a dit que nous aurions dû repousser les bateaux dans l'eau.

    Je suis travailleur social. Je travaille dans 29 collectivités autochtones urbaines de la province de l'Ontario, et les répercussions des institutions, des pensionnats, des différentes religions qui nous ont été imposés, des systèmes d'éducation qui nous sont étrangers sont énormes. Beaucoup d'atrocités ont été commises dans nos collectivités, et cette loi est une autre institution dans la même veine, qui va causer la mort...

+-

    Le président: Je vous remercie beaucoup. Je vous garantis que je ne prends pas plaisir à interrompre les gens. Peut-être vous soulagera-t-il d'apprendre que lorsque le ministre a comparu devant notre comité, j'ai dû l'interrompre à deux reprises. Il n'est pas très agréable d'être président.

    Patrick Lavalley.

+-

    M. Patrick Lavalley (À titre individuel): Puis-je prendre le temps alloué aux deux derniers intervenants? Je suis le seul représentant de la Première nation non cédée de Neyaashiinigmiing. J'ai donc besoin des dix minutes allouées à une nation.

¹  +-(1535)  

+-

    Le président: Vous êtes en train d'empiéter sur vos deux propres minutes.

+-

    M. Patrick Lavalley: Je vous souhaite la bienvenue sur le territoire non cédé de Mississauga Anishinabek.

    J'ai été victime des enlèvements qui ont eu lieu de la moitié à la fin du 20esiècle afin de venir en aide aux enfants. À la fin des années 90, j'ai voté un jour pour un chef et un conseil, et cela m'a bien écoeuré. J'ai dû prendre une douche après. Mais je n'en tiens pas rigueur à ma bande, parce que c'est la seule option qui s'offre à nous.

    J'aimerais répondre à quelques questions que vous avez posées à mes frères et soeurs. Premièrement, les membres de notre bande orientent nos chefs et nos conseils. Ils n'ont pas besoin de votre aide. Ensuite, si vous prenez des lois, veuillez respecter celles que vous avez adoptées dans les 300 dernières années. Je l'apprécierais beaucoup. Si vous voulez en adopter de nouvelles, faites en sorte qu'il soit obligatoire pour vous de respecter ces anciennes lois.

    Je suis membre de l'Aboriginal Peoples Council of Toronto. Je représente les Autochtones sans abri de la région du Grand Toronto. Peu importe que vous pensiez que cette loi va être adoptée, je veux vous rappeler que vos ancêtres pensaient que la Terre était plate, et que vous l'avez répété pendant des dizaines de milliers d'années, même si c'était faux.

    De plus...

+-

    Le président: Votre temps est écoulé.

    Rosie Mosquito.

+-

    Mme Rosie Mosquito (À titre individuel): Le comité se promène d'un bout à l'autre du pays. On nous a dit que le ministre Nault avait l'appui total du cabinet et que le travail du comité recevait l'appui des 10 000 personnes qui ont apparemment été consultées pendant la première phase. En Ontario, il y a 157 000 personnes qui vivent à l'intérieur et à l'extérieur des réserves: 445 ont été consultées, soit 0,03 p. 100, et c'est en Ontario que le nombre d'Indiens inscrits est le plus élevé de toutes les provinces et de tous les territoires du Canada. Il y a eu 25 audiences, dont 19 à l'extérieur des réserves. Sur ces 19, 14 ont été organisées par l'Association des Métis et des Autochtones de l'Ontario. En toute déférence, cette association a ses propres valeurs et ses propres principes, mais elle ne représente pas les Premières nations de l'Ontario. Sur les 157 000 membres des Premières nations de l'Ontario, 53 ont été consultés et 55 étaient des employés autochtones du gouvernement fédéral. Malheureusement, je suis convaincue que ces employés fédéraux n'avaient pas le choix.

    Vous dites donc qu'il y a eu des consultations, mais je ne crois pas que ce soient de véritables consultations. Elles ont vraiment échoué lamentablement en Ontario. Nous avons des opinions, mais nos voix ne sont pas entendues. Tous les organes de l'appareil fédéral clament haut et fort le nombre de 10 000 personnes consultées.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Kevin Daniels.

+-

    M. Kevin Daniels (À titre individuel): Vous ne voulez pas savoir qui je suis. Je suis président du Comité des affaires caucasiques, et si je devais adopter une loi caucasique, je vous donnerais au moins la chance de vous laisser en proposer une plutôt que de vous la présenter et de vous l'imposer en vous disant: «Voici une loi caucasique pour vous, elle décrit comment vous allez vivre dans mon pays». Nous ne sommes pas comme cela. J'espère que vous allez nous donner l'occasion de proposer une loi autochtone de notre cru, une loi qui nous donnerait à nous, les membres des Premières nations, le droit à l'autosuffisance économique, le droit de sortir nos membres de la pauvreté et des droits sur les terres. Je n'ai toujours pas de droit sur les terres. Je suis un Indien des réserves routières, un Indien qui n'est pas le bienvenu dans les réserves indiennes, un Indien qui n'est pas le bienvenu dans les petites villes. Nous sommes maintenant de retour, en train de nous organiser dans les centres urbains du pays pour nous opposer à la Loi sur la gouvernance des Premières nations.

    Je connais assez bien les différents comités qui ont parcouru le pays. Je fais de la politique depuis longtemps. Je crois que l'une de mes présentations les plus importantes est celle que j'ai donnée pendant la Conférence des premiers ministres sur les questions constitutionnelles intéressant les Autochtones. J'avais alors dit au premier ministre Brian Mulroney que pour maintenir l'esprit de paix avec les peuples autochtones du Canada, il fallait qu'il envisage nos solutions à nos propres problèmes. C'est la clé du maintien de l'esprit de paix dans la confédération canadienne. Lorsque j'ai fait cette déclaration, j'ai vu la rage et la frustration de nos Autochtones qui étaient à l'extérieur. Je ne l'ai pas seulement vu en 1985, mais aussi en 1987, à la conférence des premiers ministres précédente. Cette rage et cette frustration persistent. Peu de temps après, la crise d'Oka a éclaté.

¹  +-(1540)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Luke Nicholas.

+-

    M. Luke Nicholas (À titre individuel): Bonjour.

    Je viens du groupe des Premières nations de Onyota'a:ka. J'ai 21 ans et j'étudie à London. À 18 ans, j'ai été l'un des plus jeunes membres élus au conseil et j'en suis maintenant à mon deuxième mandat. Je viens aujourd'hui non pas pour vous parler des dispositions du projet de loi C-7, mais pour vous implorer de prendre en considération les effets négatifs qu'il aura sur les générations futures. Notre peuple en a toujours tenu compte dans ses décisions avec ses dirigeants. Qu'arrivera-t-il si nous l'adoptons? Qu'arrivera-t-il si nous prenons des décisions aujourd'hui et comment toucheront-elles les gens demain?

    Aujourd'hui, en tant que peuple fort d'une longue sagesse, nous vous disons que cela va avoir beaucoup d'effets négatifs sur notre peuple. Nous devons conserver et nous avons conservé bon nombre de nos institutions sociales, mais ce projet de loi est un obstacle au maintien de ces institutions sociales, politiques, éducatives et familiales ainsi que de tout ce qui nous permet de rester souverains. Au début, j'ai eu peur en entendant parler du projet de loi C-7. J'ai pensé qu'il aurait beaucoup d'effets négatifs, mais nous étions du peuple de la longue maison avant que les Blancs ne débarquent ici, nous étions du peuple de la longue maison avant que la Loi sur les Indiens ne soit adoptée, nous étions du peuple de la longue maison avant que le projet de loi C-7 ne soit proposé et nous serons toujours du peuple de la longue maison après le projet de loi C-7.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Vous pouvez dire beaucoup de choses en une minute et demie.

    Lisa Thundercloud.

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    Mme Lisa Thundercloud (À titre individuel): Je suis un produit de mon environnement. Je suis un être humain qui vit ici, sur la planète Terre, et je me suis arrêtée un jour pour réfléchir à ce qui se passait ici. Je venais tout juste de rentrer à la maison, puis j'ai compris ce qui se passait. Il n'y aura plus de réserves.

    Je suis une éponge fraîche. J'absorbe tout. Je me suis dit que vous nous deviez notre droit de souveraineté. Vous possédez tout le continent nord-américain, mais vous ne voulez toujours pas nous laisser tranquilles. Arrêtez. Regardez. Regardez autour de vous. Vous croyez que tout va être encore ici dans 100, 200 ans? Rien ne sera plus ici si les choses continuent ainsi. Vous n'avez toujours pas compris. Je vais retourner dans mon trou et je vais comprendre tout cela. Il y a une solution. Si vous êtes prêts à écouter, il y a une solution. Nous pouvons tous vivre en paix. Invitez tout le reste du monde à le faire aussi. La paix mondiale: c'est ce que vous essayez de comprendre, n'est-ce pas? C'est là, vous n'avez qu'à arrêter une journée de faire ce que vous faites. Arrêtez le monde entier. C'est là, juste devant vous, et nous sommes là à essayer de vous le dire. Il faut des gens de notre côté pour vous dire qu'il y a une réponse.

¹  -(1545)  

+-

    Le président: Merci. C'est pourquoi nous sommes venus ici pour vous écouter, et nous apprécions votre contribution.

    John Bigeye.

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    M. John Bigeye (À titre individuel): Je viens de Black Lake, en Saskatchewan.

    Je souhaite la bienvenue à mes frères et soeurs coloniaux. J'aimerais que vous compreniez que dans un monde spirituel, ces exigences n'existeraient pas. Vous devez apprendre à penser les yeux fermés, à voir le coeur ouvert. Après toute cette ingérence et cette mauvaise interprétation de qui nous sommes en tant que peuple, il y aura toujours une autre bataille. Ceux qui ne sont pas gênés sont là pour écouter; ceux qui ont peur parlent. Il n'y a rien qui se gagne facilement dans ce monde, mais lorsqu'on viole un peuple, il faut être prêt à se faire violer en retour. Ce n'est pas une menace, c'est une solution commune. Dans mon monde, je ne suis pas heureux de voir ce que je vois aujourd'hui. Je veux une éducation et aujourd'hui, je vais recevoir une éducation. Si vous essayez de m'arrêter, je vais trouver d'autres moyens de réussir. Je n'ai plus rien à partager avec vous. À partir de maintenant, je suis libre, je suis votre bailleur.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Merie Rita Anderson.

+-

    Mme Merie Rita Anderson (À titre individuel): Je vous remercie beaucoup.

    J'aimerais profiter de cette réunion pour vous faire part de nos doléances sur les questions autochtones. Beaucoup d'Indiens n'ont pas de logement adéquat. Certains Indiens n'ont même pas de lit chaud où dormir, ni ne peuvent rire et jouer avec leurs enfants. J'ai attendu trois ans en vain pour obtenir un logement dans ma réserve. En fin de compte, j'ai décidé de construire ma propre maison. Je suis une Indienne chanceuse, n'est-ce pas? On nous a chassés de nos terres avec des promesses de nouveaux logements, mais ce sont les autres qui y ont emménagé—un traité qu'ils ont enfreint il y a longtemps. Nous avons perdu toutes nos maisons, et comme vous le savez, la terre coûte cher. Il fait froid l'hiver. Les gens chassent et pêchent, mais ils vendent leurs prises simplement pour payer le loyer.

    Je ne parle pas de langue indienne, parce que je suis déménagée à Toronto lorsque j'avais six ans. On a coupé nos forêts, on a coupé nos arbres, et les animaux sont morts. J'ai été torturée, parce que j'ai été placée dans un pensionnat. Les maîtres d'école me battaient souvent. Chaque fois que je parlais en langue indienne, j'étais punie. J'étais attachée à un lit des jours durant. Mon oncle Graham est venu me chercher une nuit. J'avais 32 ans, et je n'ai pas regardé derrière. Nous avons un casino dans notre réserve, pour nous. Je l'appelle le monstre parce qu'il pollue le lac. Nous avons toutefois besoin d'argent pour payer le chauffage, la nourriture, les logements et les loyers. Nous serions censés obtenir de l'argent, mais les autres Indiens ne veulent pas que Rama en ait. Je suppose que c'est parce qu'ils sont presque aussi désespérés que nous.

    Il est triste que nous, frères et soeurs, nous battions et que le problème soit si profond et si répandu. Unissons-nous, disons ce que nous pensons et réglons ce dilemme. Battons-nous jusqu'à ce que nous obtenions des résultats et que quelque chose soit fait. Bientôt, il n'y aura plus de bisons. L'homme blanc coupe les arbres et tous les animaux vont mourir. Ce n'est pas de la faute de l'homme blanc, c'est la faute de l'ignorance. Peut-être va-t-il nous retirer nos cartes d'Indiens, peut-être nos filles—c'est horrible d'y penser. Je m'appelle Merie, et je suis fière de mon patrimoine. Je suis fière d'être une Indienne. Oh oui, les Indiens d'Akwesasne ont perdu votre bataille.

    Je vous remercie sincèrement.

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    Le président: Je vous remercie.

    Cela met un terme à nos audiences de Toronto. Il n'est pas facile d'être membre de ce comité. Dans nos déplacements nous, qui siégeons ici, nous faisons beaucoup insulter, mais nous ne répliquons pas. Nous savons que ces commentaires s'adressent aux gouvernements. Nous ne sommes pas le gouvernement, nous ne sommes pas un comité du ministre, du premier ministre ou du gouvernement, mais un comité de la Chambre des communes. Nous entendons vos insultes en leur nom. Je suis très sérieux, parce que notre comité prend son travail très au sérieux, et nous vous promettons que malgré tout, nous allons faire notre travail du mieux que nous le pouvons et que nous le prenons à coeur.

    Merci beaucoup.