FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 7 octobre 2003
¿ | 0935 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
Mme Danielle Shaw-Buchholz (directrice, Relations gouvernementales, Armée du Salut) |
Mme Mildred Jarvis (consultante en soins de longue durée, Armée du Salut) |
Mme Danielle Shaw-Buchholz |
¿ | 0940 |
La présidente |
Mme Ellen Russell (économiste principale en recherche, Centre canadien de politiques alternatives) |
¿ | 0945 |
¿ | 0950 |
La présidente |
Mme Ellen Russell |
La présidente |
Mme Margaret Fietz (présidente et directrice générale, Alliance nationale pour les enfants) |
La présidente |
Mme Margaret Fietz |
Mme Dianne Bascombe (directrice, «National Children's Alliance and Social Policy Issues», Alliance nationale pour les enfants) |
¿ | 0955 |
À | 1000 |
La présidente |
Mme Suzanne Sabourin (directrice générale , Relations gouvernementales, Bureau d'assurance du Canada) |
À | 1005 |
La présidente |
M. Glen Tully (président, Canadian Co-operative Association) |
À | 1010 |
À | 1015 |
M. Jean-Yves Lord (directeur général, Canadian Co-operative Association) |
La présidente |
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne) |
Mme Mildred Jarvis |
M. Rick Casson |
À | 1020 |
Mme Ellen Russell |
M. Rick Casson |
Mme Jane Voll (vice-présidente intérimaire, Politique et développement, économiste en chef, Bureau d'assurance du Canada) |
À | 1025 |
La présidente |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
Mme Dianne Bascombe |
Mme Margaret Fietz |
Mme Pauline Picard |
À | 1030 |
Mme Dianne Bascombe |
Mme Margaret Fietz |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
La présidente |
Mme Ellen Russell |
À | 1035 |
M. Bryon Wilfert |
Mme Mildred Jarvis |
M. Bryon Wilfert |
Mme Mildred Jarvis |
À | 1040 |
La présidente |
Mme Dianne Bascombe |
La présidente |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
La présidente |
Mme Jane Voll |
À | 1045 |
M. Roy Cullen |
Mme Ellen Russell |
Le vice-président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)) |
M. Bruce Campbell (directeur exécutif, Centre canadien de politiques alternatives) |
À | 1050 |
Le vice-président (M. Nick Discepola) |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
Mme Ellen Russell |
Le vice-président (M. Nick Discepola) |
Mme Ellen Russell |
Le vice-président (M. Nick Discepola) |
Mme Ellen Russell |
M. Bruce Campbell |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Mme Ellen Russell |
À | 1055 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Glen Tully |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
La présidente |
Mme Suzanne Sabourin |
La présidente |
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
Á | 1100 |
Mme Margaret Fietz |
Mme Maria Minna |
Mme Ellen Russell |
Mme Maria Minna |
La présidente |
Mme Ellen Russell |
La présidente |
La présidente |
M. Lawrence Cannon (directeur général, Société de transport de l'Outaouais) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
La présidente |
La présidente |
Mme Maura Volante (coordinatrice, Alliance to End Homelessness) |
Á | 1145 |
Á | 1150 |
La présidente |
M. Gilles Vaillancourt (maire de Laval; président, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec) |
Á | 1155 |
 | 1200 |
La présidente |
M. André Bergeron (directeur général, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators) |
La présidente |
 | 1205 |
Mme Amelia Shaw (directrice des affaires publiques, Association canadienne du transport urbain (ACTU), National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits) |
La présidente |
Mme Donna-Lynn Ahee (secrétaire-trésorière, Syndicat uni du transport, conseil canadien, National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits) |
Mme Amelia Shaw |
 | 1210 |
Mme Donna-Lynn Ahee |
Mme Amelia Shaw |
La présidente |
M. Rick Casson |
 | 1215 |
M. Gilles Vaillancourt |
M. Rick Casson |
 | 1220 |
La présidente |
M. Rick Casson |
La présidente |
M. Lawrence Cannon |
M. Georges O. Gratton (directeur, Société de transport de l'Outaouais) |
M. Rick Casson |
La présidente |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
M. Gilles Vaillancourt |
M. Pierre Paquette |
M. Gilles Vaillancourt |
 | 1225 |
M. Pierre Paquette |
M. Lawrence Cannon |
La présidente |
Mme Amelia Shaw |
M. Roy Cullen |
 | 1230 |
M. Gilles Vaillancourt |
M. Roy Cullen |
Mme Amelia Shaw |
M. Roy Cullen |
La présidente |
 | 1235 |
Mme Maura Volante |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 octobre 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0935)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, nous poursuivons aujourd'hui nos consultations prébudgétaires.
Nous recevons ce matin cinq groupes pour notre première table ronde.
De l'Armée du salut, nous accueillons Danielle Shaw-Buchholz, conseillère juridique associée, et Mildred Jarvis, experte-conseil sur les soins de longue durée. Bienvenue à vous deux.
Du Centre canadien de politiques alternatives, nous accueillons Ellen Russell, chercheure universitaire principale. Elle est accompagnée de Bruce Campbell, qui pourra répondre à vos questions plus tard.
De l'Alliance nationale pour les enfants, Dianne Bascombe, directrice, est accompagnée de Margaret Fietz, présidente et directrice des Services à la famille-Canada. Bienvenue à vous deux.
Du Bureau d'assurance du Canada, nous accueillons Suzanne Sabourin, directrice générale, Relations gouvernementales, qui est accompagnée de Jane Voll, vice-présidente intérimaire, Politiques et développement et économiste en chef. Bienvenue à vous deux.
De la Canadian Co-operative Association, nous accueillons Glen Tully, président, et Jean-Yves Lord, directeur général. Bienvenue.
[Français]
Bienvenue à tous.
Nous allons maintenant commencer les témoignages
[Traduction]
selon le même ordre que celui prévu à l'ordre du jour.
Nos premiers intervenants seront donc les représentants de l'Armée du Salut. Vous disposez de sept minutes. Si vous me voyez lever mon stylo, vous saurez que votre temps est écoulé.
Vous avez la parole.
Mme Danielle Shaw-Buchholz (directrice, Relations gouvernementales, Armée du Salut): Merci. Bonjour.
Je m'appelle Danielle Shaw. Je suis actuellement directrice des relations gouvernementales pour l'Armée du salut, si bien que je n'occupe plus le poste de conseillère juridique. Ma collègue, Mildred Jarvis, est l'experte-conseil nationale de l'Armée du salut concernant les soins de longue durée. Nous vous remercions de l'occasion qui nous est donnée ce matin de faire cet exposé.
Nous nous présentons devant vous pour vous parler de dépenses que nous jugeons essentielles pour garantir que la situation de tous les membres de la société canadienne progressent et que tous bénéficient de soins appropriés et de compassion. Plus précisément, nous venons encourager le gouvernement fédéral à investir dans la prestation de soins aux personnes en fin de vie. Les soins prodigués aux personnes qui arrivent au terme de la vie a fait l'objet d'études importantes par le Sénat et la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada. Ces études ont insisté sur la nécessité d'investir dans la prestation de soins de bonne qualité aux personnes en fin de vie.
L'Armée du salut, une section internationale de l'Église chrétienne, est l'un des plus grands fournisseurs de services sociaux du monde. Guidée par son engagement à faire preuve de respect et de compassion dans ses rapports avec autrui, l'Armée du salut du Canada assure des services à plus d'un million de citoyens chaque année, y compris 1 500 personnes en fin de vie.
L'Armé du salut possède ou exploite actuellement 23 établissements d'un bout à l'autre du Canada qui prodiguent des soins aux personnes en fin de vie. Il s'agit d'hôpitaux, d'établissements de soins de longue durée, et d'hospices communautaires.
Mme Mildred Jarvis (consultante en soins de longue durée, Armée du Salut): L'Armée du salut favorise un mode intégré de prestation de soins de santé qui permet aux malades en phase terminale de rester chez eux le plus longtemps possible. Un modèle intégré permet d'assurer toute la gamme de services requis, y compris les soins à domicile, les soins de jour, les programmes de soins infirmiers paroissiaux, des services de soutien en établissement et à domicile assurés par des bénévoles, des services et soins de relève, et des soins palliatifs en établissement.
Bien que nous favorisions vivement un modèle intégré de prestation des services, tout le monde n'a pas la possibilité de mourir chez soi. L'Armée du salut exhorte donc le gouvernement fédéral à investir dans toute la gamme de soins prodigués aux personnes en fin de vie et d'inclure parmi ses priorités de financement la prestation de soins palliatifs à la fois à domicile et communautaires.
L'Armée du salut soutient les recommandations du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, que nous appellerons le comité Kirby, selon lesquelles le gouvernement fédéral devrait investir 250 millions de dollars par an dans un programme national de soins palliatifs à domicile qui serait conçu de concert avec les provinces et territoires et cofinancé avec eux selon une formule de partage des coûts 50-50.
Le fait d'investir dans les soins à domicile permettrait d'assurance de meilleurs soins aux personnes en fin de vie. On pourrait aussi respecter ainsi les voeux de Canadiens qui préfèrent mourir à la maison. De même, la demande de lits pour soins actifs et de soins dans les services d'urgence des hôpitaux serait réduite, permettant ainsi de faire des économies.
Les établissements de soins de longue durée sont de plus en plus appelés à répondre aux besoins des malades en phase terminale ou nécessitant des soins palliatifs. Le personnel et les autres ressources sont vraiment utilisés au maximum, si bien qu'il devient difficile d'assurer des soins de bonne qualité aux malades, qu'ils soient ou non en phase terminale.
Les deux principales études menées jusqu'ici indiquent que la plupart des Canadiens voudraient mourir chez eux. Mais pour de nombreux Canadiens, les établissements de soins de longue durée constituent leur chez-eux. L'Armée du salut exhorte donc vivement le gouvernement à inclure les établissements de soins de longue durée dans le programme national de soins palliatifs à domicile.
Comme nous vous l'avons déjà dit, tout le monde n'a pas la possibilité de finir sa vie à la maison. Une dynamique de famille malsaine, l'absence d'un soignant à la maison, l'épuisement des soignants, des besoins qui dépassent les ressources et les capacités disponibles à la maison, de même que des facteurs culturels font qu'il peut ne pas être pratique ou même possible pour certains de mourir chez eux. Par conséquent, les soins palliatifs prodigués en établissement doivent être financés afin que ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas mourir chez eux reçoivent les soins nécessaires.
Mme Danielle Shaw-Buchholz: Le niveau de financement dont bénéficient les divers soins et services varie considérablement d'une province à l'autre, et d'un milieu à l'autre. Le comité Kirby a fait remarquer que les soins palliatifs dans les hôpitaux sont normalement payés par le régime provincial d'assurance-santé, qui assure normalement les soins professionnels et les médicaments, les fournitures médicales, et l'équipement. Par contre, dans les établissements de soins de longue durée, les résidents peuvent être appelés à payer certains soins et fournitures à des degrés variables.
L'Association canadienne de soins palliatifs a fait observer que peu de provinces ont désigné les soins palliatifs comme étant un service essentiel doté d'un budget précis. Ainsi les ressources nécessaires pour prodiguer des soins de bonne qualité, soit à domicile, soit dans un établissement spécialisé de soins palliatifs, n'ont pas été fournis, alors que l'accès aux lits dans les hôpitaux est maintenant réduit.
Ces réalités ne font que renforcer notre conviction que le gouvernement fédéral doit investir dans un programme national de soins palliatifs qui réserve une certaine somme pour les soins aux personnes en fin de vie, et assure le financement de toutes la gamme des soins à domicile, des soins de longue durée prodigués en établissement, et des soins palliatifs assurés en établissement. Pour l'Armée du salut, l'idéal serait que les services et soins assurés aux personnes en fin de vie soient inscrits dans la Loi canadienne sur la santé à titre de services médicaux essentiels.
L'un des modèles qui, selon nous, a donné de très bons résultats jusqu'à présent est celui adopté par la Régie régionale de la santé de Regina Qu'Appelle en Saskatchewan. Le William Booth Special Care Home de l'Armée du salut est un établissement de soins de longue durée doté de 81 lits, y compris six lits pour soins palliatifs pleinement financés. La Régie régionale de la santé de Regina Qu'Appelle prévoit un seul point d'entrée au système et coordonne les ressources pour toute la gamme des services afin de s'assurer que les citoyens reçoivent les services qu'ils requièrent lorsqu'ils en ont le plus besoin.
Les malades en phase terminale du William Booth Special Care Home sont soignés dans un milieu familial durant les dernières phases de leur maladie. Ils ont accès aux services de base d'un établissement de soins de longue durée, ainsi qu'aux services de l'équipe régionale de soins palliatifs. Ce modèle de prestation des services constitue une solution de rechange économique par rapport aux soins à domicile et hospitaliers qui sont de courte durée et fort coûteux.
En plus de désigner certains crédits pour les soins aux personnes en fin de vie, nous estimons qu'il faut faire de la recherche sur les besoins des malades en phase terminale, et sur les défis que présentent les niveaux et modèles de financement actuels. Nos recommandations précises sont présentées aux pages 11 et 12 de notre mémoire. Nous encourageons le gouvernement—c'est-à-dire, le gouvernement fédéral—à jour un rôle de chef de file dans ce domaine et donc à investir dans d'autres recherches pour que les Canadiens puissent bénéficier des meilleurs soins possibles au terme de leur vie.
En terminant, nous désirons vous remercier encore une fois de l'occasion qui nous a été donnée de comparaître devant le comité pour exhorter le gouvernement fédéral à faire les investissements appropriés pour que les soins prodigués aux personnes en fin de vie soient de la meilleure qualité possible. Il est temps que le gouvernement investisse davantage dans ce type de soins pour que tous les Canadiens puissent bénéficier de soins communautaires de grande qualité au terme de leur vie.
Merci.
¿ (0940)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant au Centre canadien de politiques alternatives. Madame Russell, vous avez la parole.
Mme Ellen Russell (économiste principale en recherche, Centre canadien de politiques alternatives): Je suis inquiète. Si je suis inquiète c'est parce que je crains que des attitudes dépassées nuisent au débat public sur le budget fédéral. Je vous exhorte donc à réévaluer ces attitudes, à abandonner les éléments anachroniques qui les caractérisent, et à vous ouvrir à de nouvelles idées qui aideront l'économie canadienne à relever les prochains défis auxquels nous serons confrontés.
Voilà en quoi consiste l'ancien modèle. À l'époque où le gouvernement fédéral était aux prises avec des déficits budgétaires, on estimait que la prudence financière exigeait que le gouvernement fédéral réduise ses dépenses. Cela a été fait, le déficit a été épongé, et cette bataille est maintenant finie, et ce depuis plusieurs années. Non seulement les déficits ont-ils été éliminés, mais la dette fédérale ne cesse de diminuer chaque année depuis, en tant que pourcentage du PIB.
Maintenant nous nous trouvons confrontés à une nouvelle difficulté. Le fait est que les principes qu'il semblait raisonnable de respecter à l'époque où le gouvernement fédéral enregistrait sans arrêt des déficits commencent à être appliqués de manière perverse. Maintenant ces principes semblent être remplacés par des demandes persistantes pour qu'on néglige les dépenses de programmes, malgré le fait que l'hydre du déficit a été abattue. C'est ainsi que certains ont commencé à réclamer un gouvernement qu'on pourrait qualifier de «non interventionniste», c'est-à-dire que si le gouvernement fédéral fait l'impossible pour réduire les dépenses et, encore mieux, les impôts aussi, il a forcément moins de recettes, si bien qu'il devient possible à ce moment-là de diminuer le rôle de l'État.
Cette longue attaque lancée contre les dépenses de programmes était présentée au début des années 90 comme une nécessité pour que le gouvernement puisse faire preuve de responsabilité financière, mais on peut dire que maintenant, c'est tout à fait l'inverse. On peut dire aujourd'hui que le gouvernement ferait preuve d'irresponsabilité financière s'il devait continuer de ne pas jouer son rôle en ce qui concerne les dépenses de programmes. En réalité, si vous continuez à ne pas faire des dépenses essentielles, vous allez compromettre les possibilités de croissance économique au Canada. Une croissance économique vigoureuse repose sur une infrastructure économique suffisante, et l'État est le seul acteur économique qui puisse entreprendre d'établir et d'entretenir cette infrastructure. Si nous continuons à ne pas vouloir bien financer les programmes, nous risquons de compromettre l'infrastructure qui constitue le fondement de la croissance économique canadienne.
Là je vous parle de l'infrastructure à la fois essentielle et accessoire, c'est-à-dire des projets et systèmes de grande envergure et fort complexes dont dépend toute l'activité économique. Notre infrastructure économique englobe la vaste gamme de services de transport et d'électricité, de même que tous les autres services qui permettent au Canada de continuer de commercer avec les autres pays, en plus des soins de santé, des programmes d'éducation et des autres éléments de l'infrastructure sociale qui permettent de créer une main-d'oeuvre efficace. Elle comprend également les stabiliseurs automatiques qui protègent l'économie canadienne contre des chocs économiques inévitables.
Évidemment, la fourniture d'une infrastructure économique relève de multiples administrations. Certaines des responsabilités incombent au gouvernement fédéral, et même lorsque ces responsabilités incombent à d'autres administrations, les ententes de partage des coûts font que le gouvernement fédéral y participe indirectement. Donc, le gouvernement fédéral a certainement un rôle de chef de file à jouer pour ce qui est non seulement de financer l'infrastructure économique, mais d'exiger la cohérence et le respect de normes de rendement élevées par rapport à l'infrastructure économique qui est déjà en place.
Or le gouvernement fédéral est de moins en moins en mesure de jouer ce rôle de chef de file. Si nous cessons d'investir dans les programmes et, pire encore, si nous réduisons les impôts de sorte que le gouvernement n'est plus à même d'assumer les lourdes responsabilités financières qui lui incombent parfois, nous courons le risque de nous trouver vite acculés. En fin de compte, ce sont tous les Canadiens qui en pâtiront, car le gouvernement fédéral ne sera plus en mesure d'assurer l'intendance requise de l'économie.
Donc, quel est l'état actuel des dépenses de programmes, et est-il à ce point catastrophique?
Le budget de l'an dernier a été favorablement accueilli parce qu'il proposait des dépenses de programmes correspondant à 12,2 p. 100 du PIB, ce qui représentait certainement une amélioration par rapport aux années précédentes, puisque les dépenses s'étaient situées autour de 11,6 p. 100 au moins du PIB au cours de chacune des trois années précédentes. Il reste que 12,2 p. 100 du PIB est une proportion très modeste par rapport à celle enregistrée par le passé.
Entre 1961 et 2001, soit une période de 40 ans, les dépenses de programmes se sont situées autour de 15,9 p. 100, et à aucun moment elles ne sont passées en deçà de 14,1 p. 100 au cours de cette période, jusqu'au moment où l'on décide de viser l'élimination du déficit dans les années 1990. De plus, il s'agissait d'un niveau de dépenses qu'on pouvait maintenir. Dans les années 1970, par exemple, les dépenses de programmes ont représenté entre 16,2 et 19,5 p. 100 du PIB, mais à la fin de cette décennie-là, le ratio de la dette au PIB n'était plus que de 27,6 p. 100, ce qui correspond parfaitement à l'objectif approximatif dont Paul Martin a récemment parlé.
Donc, étant donné que de 1961 au milieu des année 1990, au moins 14,1 p. 100 du PIB étaient consacrés aux dépenses de programmes, 12,2 p. 100 ne correspondent pas à un résultat spectaculaire, vu ce qui s'était fait jusque-là.
¿ (0945)
De plus, le gouvernement libéral a promis que le dividende découlant de l'élimination du déficit serait réparti moitié-moitié, ce qui veut dire que la moitié serait utilisée pour accroître les dépenses de programmes afin de tenir compte de priorités sociales, alors que l'autre moitié servirait à réduire les impôts et à rembourser la dette. Selon notre analyse, le gouvernement fédéral est très loin d'affecter 50 p. 100 du dividende budgétaire au rétablissement des dépenses de programmes. Si l'on prend comme niveau de référence les dépenses de programmes pendant l'année financière 1997, au moment où le budget était équilibré, en tenant compte de la croissance de l'inflation et de la population futures, au cours des cinq premières années suivant ce nouvel équilibre budgétaire, les nouvelles dépenses de programmes ont bénéficié de seulement 10 p. 100 de ce dividende budgétaire.
C'est maintenant que nous commençons à subir les conséquences de cette négligence des dépenses de programmes. Tout se paie, et si nous voulons une infrastructure de bonne qualité, nous devons la payer. Les soins de santé, l'éducation et toutes sortes de programmes sociaux ont beaucoup souffert à cause de cette négligence. De plus, l'infrastructure matérielle de base dont dépend l'économie canadienne a, elle aussi, été négligée. Par exemple, la concentration brute de capitaux gouvernementaux fixe, en tant que pourcentage des dépenses gouvernementales, se situait entre 16 p. 100 et 18 p. 100 au début des années 1960. Or depuis les années 1990, elle n'est plus que de l'ordre de 6 p. 100.
Comme les dépenses de programmes ont été négligées, nous mettons à présent en danger notre infrastructure économique, et nous finirons par payer le prix de cette négligence. Par exemple, la capacité de notre économie de supporter des chocs économiques est compromise lorsque notre infrastructure économique est négligée; les crises causées par le SRAS, les incendies de forêt, la panne de courant, la maladie de la vache folle, et maintenant l'ouragan dans les provinces maritimes illustrent bien cet affaiblissement. Les services publics de toutes sortes doivent avoir la capacité requise de prendre des mesures préventives afin d'éviter de telles crises et d'intervenir efficacement face à des imprévus.
L'économie canadienne en subit davantage de contrecoups qu'il ne le faudrait normalement en raison d'une infrastructure sous-financée qui ne nous permet plus de bien intervenir face à de tels chocs, ce qui veut dire que ces difficultés ont un effet d'entraînement sur l'économie dans son ensemble et lui nuisent encore plus.
Voici donc nos recommandations.
Premièrement, il faut augmenter les dépenses de programmes. Pour l'instant, je n'ai pas l'intention de vous dire exactement comment vous devriez répartir ces dépenses. Le Centre canadien de politiques alternatives prépare depuis des années un contre-budget fédéral qui aborde toutes ces questions en détail, et vous pourrez consulter nos plans pour le renouvellement des dépenses de programmes à notre site Web, soit www.policyalternatives.ca/afb.
Deuxièmement, il faut résister aux pressions en faveur des réductions d'impôt. D'autres réductions d'impôt constituent un luxe que le gouvernement fédéral ne peut se permettre. Certaines propositions de réduction d'impôt sont actuellement à l'étude qui sont censées aider les Canadiens à faible revenu, mais je trouve qu'elles sont particulièrement malavisées, et si vous le souhaitez, je pourrais vous expliquer pourquoi tout à l'heure.
Troisièmement, il faut retirer le remboursement de la dette de la liste des priorités. La dette diminue déjà en tant que pourcentage du PIB, et nous devons recommencer à mettre l'accent sur la croissance économique afin de réduire progressivement le rapport dette-PIB. Réaliser un rapport dette-PIB de 25 p. 100 à court terme, ou même à moyen terme, nécessitera des compressions budgétaires draconiennes qui mettront encore plus en danger l'infrastructure économique canadienne.
Merci.
¿ (0950)
La présidente: Je pense que vous aviez une quatrième recommandation dans votre document. Si vous voulez nous la présenter brièvement, je vais vous permettre de le faire. Non?
Mme Ellen Russell: Non, ça va. Merci.
La présidente: Très bien. Merci.
Nous passons maintenant à l'Alliance nationale pour les enfants. Madame Fietz, vous avez la parole.
[Français]
Mme Margaret Fietz (présidente et directrice générale, Alliance nationale pour les enfants): Bonjour. Merci beaucoup de me donner l'occasion de soumettre nos suggestions.
Nous regrettons que notre présentation ne soit pas encore disponible en français.
[Traduction]
L'Alliance nationale pour les enfants est un regroupement de 56 organismes bénévoles membres—surtout nationaux, mais il y en a aussi des provinciaux et des locaux—dans tout le Canada qui s'intéressent à la question du bien-être des enfants au Canada et défendent cette cause. La liste des organismes membres se trouve à la première page de notre mémoire, et vous y trouverez aussi une description du travail et du mode de fonctionnement de l'Alliance nationale pour les enfants.
Ils s'agit effectivement d'une alliance. Nous établissons nos politiques de façon coopérative et par voie de consensus, et c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas eu le temps de faire traduire notre mémoire, puisque les réactions de certains organismes membres nous sont arrivées seulement tard hier après-midi.
La présidente: Nous avons envoyé votre mémoire à la traduction ce matin et nous le ferons distribuer à tous les membres dans les deux langues le plus rapidement possible.
Mme Margaret Fietz: Merci.
Je vais maintenant demander à Dianne Bascombe de vous présenter nos recommandations.
Mme Dianne Bascombe (directrice, «National Children's Alliance and Social Policy Issues», Alliance nationale pour les enfants): Ce matin, je compte surtout mettre l'accès sur les recommandations que nous sommes venues vous présenter, et je tiens d'ailleurs à vous remercier d'avoir fait en sorte que l'on donne suite lors de budgets fédéraux précédents à certaines de nos recommandations. Nous espérons qu'il en sera de même aujourd'hui.
Dans un premier temps, je me permets de vous rappeler le programme d'action national pour les enfants, signé par les administrations fédérale, provinciales et territoriales en 1999, qui constitue un excellent fondement pour les initiatives futures, et je tiens aussi à reconnaître les progrès très positifs réalisés ces dernières années en ce qui concerne la politique gouvernementale relative aux enfants. Nous espérons pouvoir faire fond sur cette base pour élaborer un cadre stratégique durable et bien coordonné.
Nos recommandations concernent trois domaines précis. Nous souhaitons aider les familles par l'entremise de programmes de soutien du revenu; et nous nous intéressons à la prestation de certains services qui sont à notre avis prioritaires, dans certains cas, et feront une très grande différence en matière d'investissement; nous avons également une recommandation à faire concernant la manière de surveiller les résultats de nos politiques et de suivre la situation des enfants au Canada.
Je vais donc surtout me servir du temps qui n'est imparti pour vous présenter nos recommandations, et je serai à votre disposition lors de la période des questions pour vous donner d'autres détails à ce sujet.
D'abord, nous reconnaissons évidemment que des progrès importants ont été accomplis pour ce qui est de réduire la pauvreté chez les enfants grâce à la prestation fiscale nationale pour enfants, et nous recommandons que le gouvernement fasse un investissement additionnel d'un maximum de 4 200 $ par enfant, ce qui permettrait vraiment d'améliorer la situation des enfants pauvres. De plus, nous sommes toujours préoccupées par les mesures de récupération fiscales imposées aux familles bénéficiant d'assistance sociale par les administrations provinciales, et nous aimerions que ces dernières soient éliminées lors des prochaines négociations sur la prestation fiscale pour enfants.
Nous nous sommes déjà présentées devant vous par le passé pour insister sur la nécessité de prolonger la durée du congé parental, et nous sommes donc très heureuses que la durée maximale de ce congé soit maintenant d'un an. Nous reconnaissons également, grâce aux études, que le fait de verser seulement 55 p. 100 des revenus met beaucoup de familles à faible revenu dans des situations difficiles. Nous souhaitons par conséquent que le montant de la prestation parentale corresponde désormais à 75 p. 100 des gains.
Nous recommandons également que les conditions d'admissibilité soient modifiées pour inclure les travailleurs à temps partiel et autonomes, étant donné que de nombreuses femmes à faible revenu travaillent pour leur propre compte ou à temps partiel.
Toujours sur la question du congé parental, il convient à notre avis de revoir les dispositions visant les familles adoptives et de les mettre sur un pied d'égalité avec les autres familles, et d'envisager également d'éliminer le délai de carence, qui crée de graves difficultés pour les familles.
Il ne fait aucun doute que le congé pour raisons familiales prévu dans le cadre du programme de l'assurance-emploi annoncé au dernier budget est fort utile, mais nous aimerions qu'il soit élargi pour inclure des congés payés pour les familles dont les enfants ont des besoins spéciaux. Vu les statistiques sur les familles avec des enfants qui ont un handicap, et l'impact économique que cela peut avoir sur une famille, nous recommandons que les parents qui doivent soigner provisoirement ou de temps à autre un enfant qui a un handicap ou une incapacité bénéficient d'un congé payé.
Voilà donc toutes nos recommandations concernant le programme d'assurance-emploi, recommandations qui à notre avis influeraient de façon très positive sur le bien-être des enfants et des familles si l'on devait y donner suite. Voilà donc nos principales recommandations relatives aux mesures de soutien du revenu.
S'agissant maintenant de services, nous sommes parfaitement d'accord avec la position énoncée par le Centre de politiques alternatives. Il n'est plus du tout approprié de continuer à réduire les programmes et services au Canada. Nous avons déjà subi suffisamment de réductions; l'impact sur les enfants et les familles au cours des 10 dernières années a été extrêmement négatif. Les études nous ont permis de constater qu'il n'est pas possible d'éliminer les répercussions négatives de la pauvreté simplement en créant des programmes de soutien du revenu. Nous avons besoin de programmes et de services appropriés pour les enfants et les familles vulnérables dans les collectivités.
Nous souhaitons aussi que le gouvernement fédéral poursuive l'excellent travail qu'il a déjà accompli dans le cadre de l'initiative de développement des jeunes enfants, si bien que grâce à l'Accord sur le cadre multilatéral, on puisse élaborer une stratégie nationale coordonnée sur les soins et services aux enfants. Je vous rappelle le rapport publié par l'ONU la semaine dernière, soit le 3 octobre, qui critiquait le Canada, l'un des pays les plus riches du monde, pour un manque de coordination autour d'une stratégie sur les services aux enfants. À notre avis, il a été possible, grâce à l'initiative de développement des jeunes enfants et le cadre multilatéral, de réaliser de grands progrès dans ce domaine. Il y a donc lieu de profiter de l'immense potentiel qui existe maintenant pour mettre au point une stratégie nationale coordonnée sur les soins et services aux enfants.
¿ (0955)
De plus, compte tenu du travail déjà réalisé par le gouvernement fédéral dans l'élaboration de politiques et de stratégies qui favorisent une vie saine et active, nous sommes d'avis qu'il serait approprié d'y inclure des programmes et politiques qui vis spécifiquement les enfants. La fréquence accrue du diabète et de l'obésité chez les enfants canadiens nous inquiète beaucoup, et nous pensons qu'il serait possible de prévoir un fonds d'infrastructure à l'intention des enfants dans le cadre de cette stratégie de promotion d'une vie saine.
Nous avons évidemment travaillé avec la Fédération canadienne des municipalités dans ce domaine, et nous souhaitons que l'on investisse dans les espaces publics et les espaces destinés aux familles par l'entremise de la stratégie de vie saine afin d'établir un fonds d'infrastructure pour les enfants. Nous recommandons que 300 millions de dollars par an soient investis en vue d'accroître l'accès aux jeux et aux activités ludiques dans nos collectivités, et ce de concert avec les municipalités et les organismes bénévoles, notamment pour régler les problèmes d'accès des enfants et jeunes vulnérables et de leurs familles.
L'autre question qui nous préoccupe, toujours dans l'optique de la situation des enfants au Canada, est celle du logement et, plus précisément, le nombre de familles qui vivent dans la pauvreté à cause du prix de leur logement, puisque les loyers qu'elles paient dépassent 30 p. 100 de leur revenu. Nous vous recommandons par conséquent d'investir dans une stratégie que vous avez déjà établie, c'est-à-dire que vous affectiez 625 millions de dollars de plus à l'initiative de logement social au cours des quatre prochaines années, ce qui aiderait à la construction de 25 000 unités chaque année—encore une fois, pour les familles et les enfants qui vivent dans la pauvreté.
L'autre domaine qui continue de nous intéresser au plus haut point est celui des enfants autochtones. Le 29 octobre, l'Alliance nationale pour les enfants se réunira avec des organismes autochtones au Canada afin d'élaborer une stratégie visant l'élaboration d'une politique sur les enfants autochtones. Nous avons déjà attiré votre attention sur cette grande priorité, et nous savons que le gouvernement en est conscient. Mais nous sommes très préoccupées par le nombre d'enfants autochtones qui sont recueillis par l'État. Il faut revoir immédiatement les formules de financement du MAINC afin d'accroître les crédits auxquels peuvent accéder les organismes autochtones qui desservent les enfants et les familles autochtones.
Notre dernière recommandation porte sur l'ensemble des engagements du gouvernement, à la fois au Canada et à l'étranger, puisque nous savons que tout cela suppose une certaine responsabilisation, y compris à l'égard des mécanismes qui nous permettent de suivre les résultats au niveau communautaire, de suivre la situation des enfants, et de savoir dans quelle mesure notre politique est vraiment bénéfique aux enfants et aux familles.
Nous avons examiné cette question à maintes reprises. En 2001, nous avons beaucoup apprécié la recommandation du comité selon laquelle le tiers secteur devrait recevoir des crédits pour assurer ce suivi. Cela ne s'est pas encore concrétisé, et nous espérons par conséquent que cette recommandation sera réexaminée. Nous demandons également que des fonds soient prévus pour permettre l'établissement d'un mécanisme de suivi permanent grâce auquel nous pourrons suivre de près la santé et le bien-être des enfants au Canada, et ce afin que nous puissions collectivement respecter les conditions d'accords à la fois internationaux et nationaux.
À (1000)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant au Bureau d'assurance du Canada.
Commencez, s'il vous plaît.
Mme Suzanne Sabourin (directrice générale , Relations gouvernementales, Bureau d'assurance du Canada): Merci, madame la présidente. Bonjour, mesdames et messieurs.
Je m'appelle Suzanne Sabourin. Je suis directrice générale des Relations gouvernementales au Bureau d'assurance du Canada, qui est l'organisme national représentant les compagnies privées qui assurent nos voitures, nos maisons et nos entreprises dans tout le Canada. Je suis accompagnée aujourd'hui de Jane Voll, vice-présidente intérimaire, Politiques et développement, et économiste en chef.
Tout d'abord, je voudrais vous présenter les excuses de notre président-directeur général, M. Stan Griffin . Il devait comparaître devant le comité ce matin, mais un engagement imprévu l'a malheureusement empêché de venir à Ottawa aujourd'hui. M. Griffin attache beaucoup d'importance au travail du comité et a donc demandé que Jane et moi représentent le BAC en son nom.
Le BAC tient à féliciter le gouvernement d'avoir assaini les finances publiques. Une saine situation financière est essentielle. Il s'agit d'une base essentielle pour l'innovation et la croissance. Et ce qui est tout aussi important, c'est qu'elle donne un fondement solide pour les investissements publics et privés que nous devons faire. C'est grâce à une combinaison de mesures, englobant des réductions d'impôt, la réduction de la dette et des dépenses de programmes ciblées, que le Canada continue de connaître la plus longue période d'expansion économique qu'il ait jamais connue depuis les années 1960, ainsi que de faibles taux d'inflation et taux d'intérêt. Il faut que le Canada tienne le cap.
Le mémoire prébudgétaire du BAC soumis à l'examen du comité au mois d'août insistait sur la nécessité de bien gérer les risques pour assurer la santé économique. Ce matin, je vais donc vous parler surtout d'initiatives de gestion des risques que nous prenons à l'heure actuelle en vue de favoriser la création d'un environnement plus favorable pour les citoyens et les entreprises. Il s'agit de mesures mettant l'accent sur l'atténuation des catastrophes naturelles et la prévention de la criminalité et des blessures.
Les paiements aux sinistrés par les compagnies d'assurance et les contribuables ont doublé tous les cinq à 10 ans pendant toute la période entre 1980 et 1990, non seulement au Canada, mais à l'étranger. Les pertes vont en augmentant en raison de la croissance rapide des grands centres urbains, de notre infrastructure vieillissante, et de l'augmentation de la fréquence et de la gravité des conditions météorologiques exceptionnelles. Au Canada, les récents incendies de forêt à Kelowna ont constitué la catastrophe la plus coûteuse jusqu'à présent, puisque les coûts sont évalués à 250 millions de dollars. Nous ne savons toujours pas combien coûteront les effets dévastateurs de l'ouragan Juan. L'autre catastrophe naturelle tout à fait dévastatrice que nous avons connue au Canada était évidemment la tempête du verglas de 1998, qui a causé 28 décès et 5,5 milliards de dollars de dommages pour les gouvernements et les assureurs.
Le BAC et les membres du Comité des finances de la Chambre des communes sont des chefs de file depuis plusieurs années pour ce qui est de recommander que des mesures soient prises afin de nous permettre de mieux gérer les effets des calamités naturelles. Pour sa part, l'industrie a investi dans des études sur la prévention des sinistres par l'entremise de l'Institut for Catastrophic Loss Reduction à l'University of Western Ontario. Cet institut est à l'origine d'une soixantaine de rapports de recherche, a été l'hôte de plus de 95 ateliers, et a parrainé diverses initiatives de sensibilisation du public.
Comme l'Institut reconnaissait la nécessité d'une approche multidisciplinaire et multisectorielle en matière de recherche, l'Institut a récemment présenté une proposition dans le cadre du programme des réseaux de centres d'excellence, en vue d'améliorer la capacité d'adaptation des villes canadiennes. La Research Alliance for Disaster-Resilient Cities propose de faire progresser le savoir scientifique en matière de prévention des sinistres et d'approfondir la capacité de recherche au Canada afin de répondre aux préoccupations précises des villes en ce qui concerne leurs infrastructures essentielles.
Par le passé, le comité s'est dit favorable à l'idée d'investir dans la prévention des sinistres. Voilà qui a amené le gouvernement fédéral à établir une stratégie nationale d'atténuation des effets des catastrophes en 2001. Nous sommes reconnaissants envers le comité et nous espérons qu'il continuera à exhorter le gouvernement à transformer son engagement en mesures concrètes en désignant certains fonds afin de mettre en oeuvre cette stratégie et de soutenir d'autres projets, tels que celui de la Research Alliance For Disaster-Resilient Cities visant à créer des villes durables et concurrentielles.
Je viens de décrire une composante de la gestion des risques qui peut grandement contribuer à créer un environnement dans lequel les Canadiens bénéficieront de la meilleure qualité de vie possible. Il y en a d'autres également, comme la prévention de la criminalité et des blessures, où les dividendes sont potentiellement faramineux du point de vue de la réduction des coûts d'exécution des programmes.
Comme vous le savez, l'industrie dépense chaque année environ 4 milliards de dollars pour les soins de santé. La plus grande proportion des dépenses de ce genre concerne des services de réadaptation dont se prévalent 250 000 personnes chaque année blessées par suite d'accidents de la route. Notre expérience nous a permis de constater que le moyen le plus efficace de réduire les coûts humains et économiques est d'établir des programmes de prévention des blessures. Nous avons été des chefs de file dans la lutte pour réduire la conduite en état d'ébriété, pour encourager l'utilisation des ceintures de sécurité et, plus récemment, pour favoriser la bonne utilisation des appuie-têtes. Nous avons d'ailleurs obtenu des résultats concrets grâce à ces programmes.
À (1005)
Par exemple, l'introduction en Ontario d'un régime d'immatriculation par étape progressive a permis de réduire de 27 p. 100 le nombre de décès et de blessures chez les conducteurs débutants, permettant ainsi de réaliser des économies qui sont évaluées à 59 millions de dollars. Nous savons que les blessures ne sont pas le résultat du hasard; il est possible de les prévenir. Grâce à un engagement financier de 600 000 $ de la part de notre industrie, nous avons établi un partenariat avec SMARTRISK afin d'élaborer une stratégie canadienne de prévention des blessures. Nos efforts ont surtout porté sur l'établissement des partenariats nécessaires avec des organismes de promotion de la sécurité au travail, les organismes sanitaires, les ONG, les assureurs privés, les fabricants de produits de consommation, les universitaires, et les gouvernements, afin d'encourager le gouvernement fédéral à devenir le champion d'une initiative nationale permanente de prévention des blessures de toutes sortes, y compris les chutes, les accidents de voiture, les accidents du sport, et l'utilisation des produits de consommation. Nos efforts portent d'ores et déjà leurs fruits.
Nous aurons d'ailleurs l'occasion de présenter un rapport sur l'élaboration d'une stratégie canadienne intégrée de prévention des blessures ici à Ottawa à l'occasion de la conférence sur la prévention des accidents et la sécurité qui se tiendra les 23, 24 et 25 novembre. SMARTRISK et le BAC sont les hôtes et parrains de cette conférence. Nous avons trouvé encourageant que le gouvernement fédéral ajoute la question de la prévention des blessures à la liste des blessures à la liste des nouvelles priorités nationales du programme d'action pour la santé des populations. Nous encourageons le gouvernement fédéral à cautionner le modèle de partenariat privé-public établi par le BAC et SMARTRISK, et à s'engager à l'élaboration d'un cadre d'affectation des fonds sur cinq ans de l'ordre de 250 millions de dollars en vue de renforcer la capacité du Canada de prévenir efficacement les accidents et les blessures.
Le comité a déployé de vigoureux efforts de promotion d'une meilleure sécurité et de la création de nouvelles possibilités pour les Canadiens grâce à une bonne gestion financière, et à l'innovation et la croissance économique. Alors même que nous nous réunissons pour discuter de toutes ces questions et examiner les objectifs, les représentants du secteur des assurances et des forces policières se réunissent ici à Ottawa, sous l'égide du Comité des exportations nord-américain, en vue de s'attaquer au problème du vol et de l'exportation des véhicules. Pourquoi faisons-nous cela? Eh bien, parce que le vol des véhicules par les groupes de crime organisé est un phénomène dont il faut tenir compte dans toute discussion ayant pour objectif d'améliorer la sécurité des Canadiens et leur bien-être économique.
Nous avons été des chefs de file dans ce domaine, et nous constatons qu'il y a une corrélation entre le crime organisé, le vol des véhicules et la fraude dans les assurances, et nous avons maintenant des indications que la mondialisation des activités liées au crime organisée, telles que l'exportation de véhicules volés, facilite le financement du réseau terroriste international. Cela dit, le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle utile en modifiant le Code criminel pour faire en sorte que la fraude dans les assurances et le vol des véhicules y sont inscrits à titre d'actes criminels. Voilà qui aiderait grandement à réduire le fardeau économique des Canadiens qui ont à supporter ces dépenses et à diminuer les activités liées au crime organisé.
Madame la présidente, voilà qui termine nos remarques liminaires. Merci de nous avoir donné l'occasion de participer à ces consultations.
La présidente: Merci.
Nous passons maintenant à la Canadian Co-operative Association. Monsieur Tully, vous avez la parole.
M. Glen Tully (président, Canadian Co-operative Association): Merci beaucoup. Bonjour à tous et à toutes.
Je m'appelle Glen Tully. Je suis président de la Canadian Co-operative Association, soit la CCA. Je suis heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de participer aux consultations prébudgétaires du Comité des finances de la Chambre des communes. Je suis accompagné ce matin de Jean-Yves Lord, notre directeur général.
La Canadian Co-operative Association est une association nationale de coopératives et de caisses de crédit. Nous sommes une coopérative à but non lucratif. Notre mandat consiste à promouvoir la croissance et le développement du secteur du crédit coopératif afin d'améliorer la situation économique et sociale des collectivités et des citoyens au Canada et à l'étranger. Nous travaillons de très près avec notre organisme consoeur, soit le Conseil de la coopération.
Le secteur coopératif est différent des secteurs public, privé et bénévole. Les coopératives participent à une multitude d'activités économiques et sociales. Ce qui nous distingue des autres, c'est que ce sont les mêmes personnes qui emploient les produits et services des coopératives qui les organisent, les possèdent et les contrôlent.
Les coopératives sont des compagnies constituées en personne morale qui appartiennent à leurs membres et sont contrôlées par eux, conformément au principe démocratique, et ce afin de répondre aux besoins de ces derniers. Le modèle coopératif reconnaît qu'il importe que les collectivités définissent leurs propres besoins par rapport au renforcement de leurs capacités. Ainsi des particuliers et des collectivités peuvent conjuguer leurs efforts pour améliorer la qualité de vie des régions et collectivités dans lesquelles ils vivent et mènent leurs activités. Il existe plus de 10 000 coopératives, caisses de crédit et caisses populaires au Canada ayant plus de 15 000 millions de membres, 150 000 employés, 160 milliards de dollars d'actif, et 70 000 bénévoles.
Les membres de la CCA sont présents dans toutes les régions géographiques du Canada et participent à une vaste gamme d'activités, y compris les finances, l'agriculture, les assurances, la vente de détail et de gros, le logement, et les soins de santé. Bon nombre d'entre vous vous êtes sans doute déjà adressés à nos membres pour obtenir des assurances, acheter de l'essence, des produits d'épicerie, des produits laitiers, ou des objets d'art inuit. Nos membres comprennent, entre autres, les Coopératives fédérées, organismes dont je suis le vice-président; la Compagnie d'assurance Co-operators; Co-op Atlantic; Scotsburn Co-operative Services Limited; Gay Lea Foods Cooperative Limited; et Arctic Co-operatives Limited. Comme un tiers de la population canadienne, vous vous adressez sans doute aux caisses de crédit et caisses populaires pour obtenir des services financiers.
Nous avons remis des exemplaires de notre rapport annuel au personnel du comité. Deux de nos membres sont la Fédération de l'habitation coopérative du Canada et la Centrale des caisses de crédit du Canada, dont les responsables ont déjà comparu devant le comité pour discuter de leurs recommandations et de leurs intérêts particuliers.
À notre avis, les consultations prébudgétaires organisées par le Comité des finances représentent un véhicule important pour les Canadiens qui souhaitent avoir voix au chapitre en ce qui concerne la définition du budget fédéral. La tradition de la CCA veut que nous comparaissions devant vous pour présenter nos vues, et nous sommes très heureux d'avoir, aujourd'hui encore, l'occasion de le faire. Vous avez déjà reçu une copie de notre mémoire écrit, si bien que nous allons nous contenter de mettre en relief un certain nombre de points importants qui s'y trouvent.
L'un des thèmes retenus par le comité pour les consultations prébudgétaires de cette année concerne les mesures qui pourraient être prises pour garantir le succès économique et social du Canada, ainsi que le succès de ses habitants, de même que des mesures permettant de garantir le dynamisme de nos collectivités, qu'elles soient situées en milieu urbain ou rural, ou dans les régions éloignées du pays. Ces thèmes cadrent tout à fait avec la mission de la CCA puisque notre secteur reconnaît que les coopératives constituent le moyen le plus efficace de permettre aux collectivités de se définir et d'orienter leur avenir.
Nous sommes heureux que le gouvernement fédéral considère aussi les coopératives comme un outil important émanant de la population et des collectivités pour permettre aux Canadiens de façonner un meilleur avenir pour eux-mêmes. Nous félicitons ce dernier d'avoir démontré son engagement en annonçant, en juin 2002, une affectation de crédits fédéraux de l'ordre de 15 millions de dollars sur cinq ans, pour l'initiative de développement des coopératives.
Cette initiative comporte deux volets: la recherche et l'innovation, et le service de consultation. Les activités liées à la recherche et à l'innovation sont gérées directement par le Secrétariat des coopératives du gouvernement fédéral et permettront aux Canadiens de faire des études et de mettre à l'épreuve des façons novatrices d'appliquer le modèle coopératif. Le service de consultation est géré par la Canadian Co-operative Association et le Conseil canadien de la coopération au nom du secteur coopératif. Grâce à ce service de consultation, des groupes souhaitant établir de nouvelles coopératives ou qui ont besoin pour administrer des coopératives déjà établies pourront bénéficier des conseils d'experts.
À (1010)
Nous qui oeuvrons au sein du secteur coopératif sommes résolus à profiter au maximum de cette possibilité de partenariat. L'histoire a démontré que les coopératives ne naissent pas comme ça, en vase clos; elles sont plutôt le produit d'un effort commun auquel participent les collectivités, le secteur coopératif et le gouvernement. À notre avis, l'initiative de développement des coopératives permettra de créer une masse critique de nouvelles coopératives au Canada et donnera ainsi l'occasion à notre gouvernement fédéral d'aider les Canadiens à réussir et d'appuyer le développement permanent de collectivités dynamiques dans tout le Canada.
Bien que nous soyons reconnaissants envers le gouvernement fédéral d'avoir prévu des crédits pour l'initiative de développement des coopératives, nous reconnaissons également que la somme accordée correspond à moins de la moitié de ce que nous, le secteur coopératif, jugions nécessaire au départ. Nous savons également que de nombreuses autres possibilités de partenariat entre le gouvernement fédéral et le secteur coopératif qui seraient bénéfiques à l'ensemble de la population sont maintenant à notre portée. C'est ainsi que nous encourageons le Comité des finances, lorsqu'il donnera son avis sur les éléments à inclure dans le prochain plan budgétaire, à explorer la possibilité de nouveaux programmes de financement pour élargir les partenariats avec les secteurs coopératifs.
À (1015)
M. Jean-Yves Lord (directeur général, Canadian Co-operative Association): Un autre exemple précis du travail de partenariat accompli de concert par le secteur coopératif et le fédéral pour atteindre des objectifs communs est la Caisse des coopératives de travail, un projet pilote financé par DRHC et administré par la Fédération canadienne des coopératives de travail, qui est membre de la CCA. Ce projet pilote a permis d'investir 1,25 million de dollars dans les coopératives de travail afin de créer et de maintenir des emplois. Ces investissements ont permis de soutenir la création d'environ 145 emplois au Canada. Sur les 20 projets financés jusqu'à présent, 12 prévoient des investissements dans l'économie rurale.
Ce projet pilote, qui devait se dérouler sur trois ans, arrivera bientôt à échéance. Selon la Fédération canadienne des coopératives de travail, cette caisse-pilote, si elle disposait d'un capital de 20 millions de dollars, serait financièrement autonome et pourrait ainsi soutenir la création de milliers d'emplois.
Étant donné que les coopératives peuvent fournir presque tous les produits ou services imaginables, sont présentes dans tous les secteurs de l'économie, et qu'elles peuvent être des compagnies à but non lucratif ou à but lucratif, chaque fois que le gouvernement fédéral prend des mesures, quelles qu'elles soient, les coopératives peuvent être touchées.
En conclusion, nous encourageons le gouvernement fédéral, à mesure qu'il élaborera et adoptera de nouveaux programmes, politiques, services et règlements, à tenir compte de l'éventuelle incidence de ses projets sur les coopératives. D'ailleurs, quand des changements sont envisagés, nous encourageons également le fédéral à consulter le secteur coopératif.
Madame la présidente, merci d'avoir pris le temps de nous recevoir ce matin. Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.
La présidente: Merci.
Pour ce tour de questions, les membres disposeront d'un maximum de sept minutes. Nos premiers intervenants seront M. Casson et Mme Picard.
Monsieur Casson.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Je voudrais commencer par remercier tous nos témoins de leur présence ce matin. Je vais d'abord aborder certaines des demandes des responsables de l'Armée du salut.
Je crois que la situation est à peu près la même dans toutes nos collectivités. Nous avons accès à des maisons pour personnes âgées, des soins prolongés, des soins actifs, des soins à domicile, et des résidences-services. Il me semble que les différents conseils et régies régionales de la santé essaient de collaborer en vue de fournir les meilleurs soins possible à tout le monde. Il y a eu un certain nombre de changements. Les maisons pour personnes âgées assurent maintenant certains services, ce qui a nécessairement influé sur la dotation en personnel dans ce secteur.
Êtes-vous donc en train de nous dire que le système a encore des lacunes parce que les gens ne peuvent recevoir les soins dont ils ont besoin, ou plutôt que ces activités devraient être jugées plus prioritaires, par rapport à d'autres, quand il s'agit de déterminer où investir des fonds pour répondre aux besoins des Canadiens?
Mme Mildred Jarvis: Nous sommes tout à fait conscientes du f ait qu'il y a eu une très forte augmentation du nombre de mesures de soutien communautaire et que les collectivités essaient de travailler en étroite collaboration avec les régies de la santé de leur région pour fournir tous ces services. Ce sur quoi nous voulions surtout insister, c'était le fait que la situation n'est pas la même dans toutes les provinces.
Nous savons que les services et soins de santé relèvent des provinces et que ce sont ces derniers qui doivent assumer leur responsabilité, mais nous pensons aussi, compte tenu du fait que le fédéral transfère des crédits aux provinces, qu'il serait peut-être possible de réserver certains fonds qui serviraient à multiplier les mesures de soutien dans les établissements communautaires de soins palliatifs, afin que les gens puissent rester à la maison plus longtemps si c'est ça qu'ils veulent faire, et aussi à financer d'autres solutions de recherche, étant donné que certaines provinces prévoient beaucoup plus de financement pour les initiatives communautaires que d'autres.
Pour ce qui est d'assurer des soins de première qualité aux personnes en fin de vie, nous estimons que cela représente un droit pour tous les Canadiens, et malgré tout, les tendances ne sont pas les mêmes dans chaque province. Ainsi nous nous disions qu'il serait peut-être utile que certains crédits soient réservés afin de soutenir cette infrastructure dans chaque province.
M. Rick Casson: Très bien. Merci.
Il semble y avoir une différence d'opinions entre le Centre canadien de politiques alternatives et le Bureau d'assurance du Canada. Le Bureau d'assurance est d'avis que d'autres réductions d'impôt bénéficieraient à tous, alors que le Centre canadien de politiques alternatives estime que nous n'avons pas du tout besoin d'autres réductions d'impôt.
Dans votre quatrième recommandation, vous dites que les dépenses de programmes doivent aboutir à des résultats concrets. Je suis d'accord avec vous, à savoir qu'il convient d'analyser et de vérifier chaque programme de temps à autre pour voir dans quelle mesure il atteint son objectif.
J'ai bien aimé votre observation, à savoir que l'échange de chèques entre le fédéral et les provinces correspond à du «théâtre fiscal». Je ne pense pas avoir déjà entendu cette expression, mais je suis d'accord avec vous jusqu'à un certain point. Des transferts de fonds semblent toujours se faire avec beaucoup d'éclat, bien que personne ne prenne le temps de voir sur quoi tout cela débouche.
Vous qui êtes du Centre de politiques alternatives, j'aimerais vous demander de justifier l'affirmation selon laquelle les réductions d'impôt ne sont pas appropriées, et ensuite je vais peut-être demander aux représentantes du Bureau d'assurance de nous dire pourquoi elles sont appropriées, à leur avis.
Peut-être pourrais-je commencer, madame la président, par demander à Mme Russell de répondre.
À (1020)
Mme Ellen Russell: Si je comprends bien votre question, vous voulez savoir si les réductions d'impôt sont indiquées ou non, et je présume que vous voulez dire par là dans quelle mesure elles favorisent la croissance économique, par exemple, n'est-ce pas? Commençons par examiner cette hypothèse.
Je dois dire que les avis sont partagés à ce sujet pour le moment. Il y a des gens qui sont à la fois pour et contre et qui font valoir différents arguments en vue de prouver que les impôts favorisent ou ne favorisent pas la croissance économique. Selon nous, l'infrastructure économique qui favorise la croissance économique a besoin de soutien sous forme de recettes fiscales. Nous croyons également que les contributions qu'elles apportent à la croissance économique ne sont pas évaluées à leur juste valeur.
S'agissant de savoir si les réductions d'impôt favorisent ou non la croissance économique, quand vous comparez le Canada aux autres pays membres de l'OCDE, du point de vue de la proportion de notre PIB que représentent les recettes fiscales, on constate que nous nous plaçons à peu près au milieu, ce qui veut dire que notre compétitivité est comparable à celle des autres. En moyenne, les recettes fiscales correspondent à environ 35 p. 100 du PIB. Nous sommes à 35,8 p. 100, et donc, notre situation est tout à fait comparable à celle des autres pays.
Si nous nous servons de nos recettes fiscales de manière judicieuse et conformément à un régime de responsabilisation approprié, comme vous l'avez dit vous-même, nous pourrons les investir dans les éléments de l'infrastructure économique qui sont susceptibles de déboucher sur les résultats les plus positifs en ce qui concerne la promotion de la croissance économique.
M. Rick Casson: Très bien. Peut-être que les responsables du Bureau d'assurance aimeraient nous dire pourquoi elles estiment que des réductions d'impôt peuvent stimuler l'économie et aider les Canadiens.
Mme Jane Voll (vice-présidente intérimaire, Politique et développement, économiste en chef, Bureau d'assurance du Canada): D'abord, nous sommes généralement très satisfaites de la politique fiscale adoptée par le gouvernement, et notamment le calendrier accéléré prévu pour la réduction de l'impôt des sociétés. Le passage du taux d'imposition de 28 p. 100 à 21 p. 100 en 2004 a été une initiative très importante pour ce qui est de permettre à nos entreprises de continuer à affronter la concurrence américaine, et nous félicitons donc le gouvernement de cette mesure.
Il faut absolument suivre de près la charge fiscale imposée aux sociétés canadiennes de manière à savoir comment nous nous situons par rapport aux autres pays industrialisés. Il faut que nous continuions d'attirer des capitaux vers le Canada pour stimuler la croissance économique. En même temps—et là je réponds directement aux points soulevés par la représentante du Centre de politiques alternatives—il ne s'agit pas de faire l'un ou l'autre. Nous devons absolument rester concurrentiel du point de vue de notre fardeau fiscal, mais en même temps, nous indiquons dans notre mémoire qu'il faut investir dans l'infrastructure, à la fois matérielle et sociale, afin de soutenir nos collectivités; il s'agit d'établir le bon équilibre.
Pour ce qui est des réductions d'impôt proprement dites, nous avons voulu mettre en relief la situation du secteur des assurances en particulier. Nos recherches ont été menées par le professeur Jack Mintz, et certains d'entre vous savez qu'il est président de l'Institut C.D. Howe. Il a étudié la situation du secteur des assurances (coupé) incendie, accidents, risques divers (IARC) et pays membres du G-7, et a constaté que le régime d'imposition qui s'applique aux assurances—maison, automobile et commercial ne s'inscrit pas du tout dans la tendance générale qu'on observe chez les autres pays membres du G-7. À un moment où les consommateurs et les entreprises ont du mal à supporter le coût de leurs assurances, nous devons envisager de modifier le fardeau fiscal associé à ce produit. Donc, nous encourageons le gouvernement à examiner cette question de plus près.
Dans le cadre de la plus récente série de réformes touchant le secteur financier, le groupe de travail MacKay a demandé au gouvernement fédéral d'examiner le régime d'imposition qui vise les assurances maison, automobile et commercial, de même que les impôts qui s'appliquent au niveau provincial. Cet examen n'a pas encore été effectué, bien que nous ayons commandé des études universitaires et autres et mené nous-mêmes des recherches sur cette question. Donc, Je profite de l'occasion pour insister auprès du gouvernement fédéral sur la nécessité de porter une attention particulière à cette question, tout en le félicitant des mesures qu'il a déjà prises pour maintenir la compétitivité des entreprises et attirer des capitaux vers le Canada, et en abondant dans le même sens que ma collègue, qui disait que nous devons investir davantage dans notre infrastructure. Il est vrai que cette dernière est un moteur important de la productivité au Canada.
À (1025)
La présidente: Madame Picard.
[Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Merci, madame la présidente.
Ma question s'adresse à Mme Bascombe. J'ai écouté avec beaucoup d'attention votre exposé. Vous vous réjouissez du nouveau crédit d'impôt que le gouvernement a mis en place pour éliminer ou réduire la pauvreté chez les enfants. Je pense qu'on est d'accord pour dire que s'il y a des enfants pauvres, c'est parce qu'il y a des parents pauvres. On sait que les parents pauvres ne paient pas d'impôt parce que leurs revenus sont insuffisants et que les récentes statistiques nous disent qu'il y a encore un million et demi d'enfants pauvres au Canada. Qu'est-ce qui vous permet de dire que le nouveau crédit d'impôt a eu un impact significatif sur la réduction de la pauvreté chez les enfants au Canada?
[Traduction]
Mme Dianne Bascombe: J'ai dit qu'il avait été un impact, sans qualifié cet impact de significatif, et j'expliquais qu'en faisant passer le plafond à 4 200 $, l'impact serait encore plus important. Il est certain que nous n'avons pas réussi à éliminer la pauvreté chez les enfants grâce à la prestation fiscale nationale pour enfants.
À l'Alliance nationale pour les enfants, nous estimons qu'il s'agit là d'un élément parmi d'autres qu'il faut prévoir dans notre stratégie d'élimination de la pauvreté chez les enfants. Mais il ne fait aucun doute que selon les statistiques sur la pauvreté chez les enfants, cette initiative semble avoir eu des répercussions positives sur le revenu des familles et la pauvreté.
Mme Margaret Fietz: L'autre élément de notre recommandation concerne les mesures de récupération fiscale auprès des familles bénéficiant d'assistance sociale. La grande majorité des enfants canadiens, qui sont au nombre d'un million, dont le niveau de vie est bien en deçà du seuil de la pauvreté vivent dans des familles qui ont besoin d'assistance sociale. Ce n'est pas leur choix; en fait, dans ces cas, on n'a jamais le choix de ne pas demander l'assistance sociale.
Dans les provinces où l'argent versé par le fédéral est récupéré et n'est donc pas disponible aux familles, les familles touchées par cette mesure de récupération fiscale arrivent à peine à survivre. Ce sont ces familles qui ont régulièrement recours aux banques alimentaires et qui n'ont pas les moyens de faire participer leurs enfants aux activités du système d'éducation publique qui sont maintenant payantes—par exemple, les excursions parascolaires, les livres, les crayons et le papier, etc., qui étaient autrefois fournis par le système d'éducation publique.
Le problème de la pauvreté est tellement complexe. Nous exhortons le gouvernement fédéral à faire preuve de leadership et d'insister auprès des provinces pour qu'elles rendent des comptes des sommes fédérales qui leur sont consenties. Nous n'avons pas beaucoup insisté là-dessus dans notre mémoire, mais il est certain que nous en parlons chaque fois que nous rencontrons des ministres ou les représentants de partis politiques, quels qu'ils soient; nous voulons que les provinces soient comptables envers la population pour les crédits fédéraux qui permettent de financer les programmes sociaux.
Quant à l'équilibre à établir entre les réductions d'impôt dont devraient bénéficier les particuliers, et sans doute moins, les sociétés, en ce qui nous concerne—et là on pourrait ouvrir un tout autre débat—les dépenses actuelles au titre des programmes sociaux ne devraient pas devenir les victimes d'un programme de réduction d'impôt. Nous estimons qu'il faut un juste équilibre; il faut investir dans les particuliers, dans les familles, et dans les enfants, et ce tout de suite, pas lors de la prochaine génération.
[Français]
Mme Pauline Picard: Je crois qu'on ne se comprend pas bien.
Un crédit d'impôt est accordé aux familles qui paient de l'impôt. Si vous ne payez pas d'impôt, si vous vivez de l'aide sociale, même si le gouvernent hausse le crédit d'impôt, vous n'en bénéficierez pas.
Seriez-vous d'accord pour que ces sommes d'argent qu'on veut investir sous forme de crédit d'impôt soient données aux provinces pour les aider à appliquer une politique familiale comme celle des services de garde qu'on a au Québec, par exemple? Chaque province connaît les besoins de sa population, et grâce à cet argent que le fédéral pourrait leur remettre, les provinces pourraient mettre en oeuvre des politiques comme celle des services de garde pour soutenir les familles pauvres. De même, les organismes dans les provinces qui viennent en aide aux familles pauvres et à celles qui vivent de l'aide sociale auraient bien besoin d'être soutenus financièrement, parce qu'on voit une augmentation de plus en plus marquée de la pauvreté. L'écart entre les riches et les pauvres s'accentue actuellement.
Au lieu d'accorder un crédit d'impôt qui ne va pas nécessairement aux plus démunis, le fédéral ne devrait-il pas augmenter ses paiements de transfert aux provinces pour les programmes sociaux?
À (1030)
[Traduction]
Mme Dianne Bascombe: À notre sens, il n'y a pas de compromis ou de choix à faire entre les deux. Nous estimons qu'il s'agit là de deux outils stratégiques bien importants. Avoir recours au régime d'imposition fédéral est un excellent moyen d'aider les familles en leur accordant un crédit d'impôt. Nous sommes également favorables à l'idée d'accroître le financement des programmes sociaux par l'entremise des transferts aux provinces. Pour nous, ces deux éléments sont essentiels à une politique familiale bien intégrée.
Mme Margaret Fietz: Nous avons également que certains programmes fédéraux ont été particulièrement efficaces—à titre d'exemple, le PACE qui a permis de verser des fonds directement aux collectivités. Ceci a permis aux collectivités de concevoir leurs propres programmes pour aider les familles ou pour aider un parent seul à ne plus avoir à demander l'assistance sociale, ou encore pour aider à réduire la violence de tout type.
L'un des facteurs qui contribuent le plus à aggraver la pauvreté au Canada demeure la violence, violence qui se solde souvent par des séparations ou des divorces, si bien que le parent qui a la garde des enfants—et ça peut être le père aussi—vit dans la pauvreté, n'ayant plus qu'un seul revenu. Il s'agit donc d'une question très complexe, et nous avons besoin de programmes et de mesures fiscales qui aident les gens lorsqu'ils retournent au travail. C'est à ce moment-là que les crédits d'impôt sont particulièrement bénéfiques aux familles à faible revenu dont les parents travaillent.
La présidente: Merci beaucoup.
Je donne la parole à M. Wilfert, qui dispose de sept minutes.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
Pour ce qui est de la question dont nous sommes actuellement saisis, le ministre présentera sa mise à jour relative à la situation économique le 3 novembre, et donc, tout est incertain jusque-là. Il faut absolument que nous sachions de combien d'argent nous disposerons. De plus, le ministre doit rencontrer ses homologues provinciaux pour parler de la péréquation, qui est très, très importante au Canada et qui n'a pas été réduite, même pendant l'examen des programmes. Il est certain que pour le gouvernement, et pour le ministre qui tiendra des discussions à ce sujet plus tard cette semaine, le maintien d'un niveau comparable de services d'un bout à l'autre du pays est très important. En même temps, il faut se rendre à l'évidence qu'un budget déficitaire est absolument exclu. Par conséquent, il faut que tous les éléments s'équilibrent.
Pour ce qui est des différentes solutions stratégiques, vous parlez du fait que les transferts sont faits sans condition. Je suis d'accord avec vous pour dire que la contribution fédérale en matière de programmes et de transferts est très peu reconnue. D'ailleurs, le fait que les transferts se fassent sans condition signifie que certaines provinces consacrent cet argent aux mauvaises priorités. À part la possibilité de signer des accords plus stricts—ce qui susciterait certainement beaucoup de remous chez les provinces—avez-vous une idée de ce que nous pourrions faire pour nous assurer de ne plus faire face à ce genre de problème?
Je me permets aussi de remettre en question vos affirmations concernant la réduction de la dette, car le fait est que nous avons réalisé une économie de 3 milliards de dollars par an, plus les intérêts, et que cet argent a servi à financer les programmes sociaux.
La présidente: Madame Russell.
Mme Ellen Russell: S'agissant des conditions que vous pourriez éventuellement rattacher aux transferts fédéraux, je sais qu'il s'agit là d'une question très complexe et délicate et que vous devez tenir compte d'énormément de sensibilités en essayant de voir quelle serait la meilleure solution. On peut supposer que les provinces ont en commun un certain nombre d'objectifs relativement aux avantages économiques qui devraient, nous l'espérons découler de ce vaste programme de dépenses, et j'imagine par conséquent que cela pourrait être un point de départ pour dégager un consensus sur la conception de programmes auxquels se rattachent des mesures d'incitation sophistiquées; une fois que les acteurs s'accordent sur leurs objectifs communs, ils pourront plus facilement déterminer comment ces programmes devraient être conçus.
À (1035)
M. Bryon Wilfert: J'espère qu'il existe un certain nombre d'objectifs communs, mais il semble bien souvent que le seul objectif que les provinces ont en commun est celui d'obtenir plus d'argent. Le problème, c'est que nous essayons de collaborer avec nos collègues provinciaux et de leur venir en aide lorsqu'ils ont un manque à gagner et ont besoin de crédits additionnels, mais en même temps, nous devons continuer à financer nos propres programmes et à supporter nos propres dépenses. De plus, d'autres paliers de gouvernement s'adressent également à nous pour obtenir des crédits.
En ce qui concerne les dépenses de programmes, j'estime personnellement que ces dernières ont atteint une limite raisonnable pour l'instant. Il est vrai qu'elles sont moins importantes qu'autrefois, mais il ne faut pas oublier l'engagement que nous avons pris de réaffecter les fonds, ce qui est très important. L'engagement pris par le gouvernement à l'égard de ce milliard de dollars était, à mon avis, particulièrement important, puisqu'il s'agit de quelque chose que nous ferons non seulement cette année, mais chaque année. Ce n'est pas l'équivalent de l'examen des programmes; il s'agit simplement d'examiner nos dépenses actuelles et de déterminer si les crédits disponibles sont utilisés de la façon la plus efficace possible et éventuellement s'il y aurait lieu de réaffecter certaines sommes de façon à répondre aux demandes de bon nombre de personnes ici présentes.
La position adoptée par l'Armée du salut en ce qui concerne le programme national de soins palliatifs à domicile est très intéressante, mais aucune somme n'a été mentionnée. Combien faudrait-il pour y donner suite et comment cela pourrait se faire, à votre avis?
Mme Mildred Jarvis: L'une des recommandations du rapport Kirby est que 250 millions de dollars par année devraient être consacrés à la création d'un programme national de soins palliatifs à domicile, l'idée étant que les provinces et territoires concevraient ce programme avec le fédéral et paieraient la moitié des frais. Cela veut donc dire que la somme globale qui serait investie dans cette initiative serait de 500 millions de dollars.
Nous voulions surtout attirer votre attention sur le fait que le rapport Kirby établit un montant précis et recommande l'investissement de cette somme. Par rapport à l'ensemble du système des soins, il va sans dire que ce programme sera plus économique et efficace si les crédits qui y sont affectés servent à financer des soins palliatifs dans les établissements communautaires. Ainsi, il sera possible de réduire le nombre de lits pour soins palliatifs qui sont financés dans les hôpitaux de soins actifs et d'adopter un modèle communautaire de prestation des services plus approprié et surtout plus économique. Ceci nous permettra de faire des économies et d'éviter ainsi d'avoir à vous demander des crédits supplémentaires.
M. Bryon Wilfert: Je présume que cela dépendrait de l'acceptation des provinces. Contrairement à un programme de soins à domicile, où les provinces recevraient l'argent mais seraient à même de concevoir leur propre programme, vous demandez qu'il y ait des normes nationales et que tous les éventuels participants donnent leur aval.
Mme Mildred Jarvis: Oui, mais nous estimons que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans l'affectation de ces 250 millions de dollars—c'est-à-dire qu'il lui incombe de faire comprendre aux provinces qu'une partie de cet argent doit servir à financer des soins palliatifs dans les hospices communautaires. Il existe des modèles de prestation des services dans certaines provinces qui donnent de très bons résultats et sont à la fois efficace et économique. Donc, si les autres provinces acceptaient d'adopter ces modèles, non seulement ce serait bénéfique du point de vue du financement de ces services dans les provinces, mais on profiterait davantage de l'apport financier fédéral.
À (1040)
La présidente: Monsieur Wilfert, je crois que Mme Bascombe voudrait ajouter quelque chose.
Mme Dianne Bascombe: Je voulais également aborder la question du suivi et de la responsabilisation, dont nous avons brièvement parlé dans notre mémoire. Bien entendu, il serait possible d'effectuer notre analyse en examinant certains des accords touchant les enfants conclus ces dernières années, par l'entremise de l'initiative de développement des jeunes enfants et de l'accord intervenu par la suite sur le cadre multilatéral. Toute une série d'objectifs ont été fixés pour le programme d'action pour les enfants par le fédéral, les provinces et les territoires, et même si je ne serais pas prête à vous affirmer qu'il s'agit là du modèle parfait, le fait est que ces accords prévoient le respect des engagements pris en matière de suivi et de responsabilisation.
Le potentiel de tout cela n'est pas réalisé pour le moment, c'est en partie parce que—et c'est pour cela que nous vous présentons nos recommandations aujourd'hui—nous devons absolument examiner de près le rôle du tiers secteur relativement au régime de responsabilisation touchant les dépenses publiques engagées au titre de nos programmes et services au Canada. Nous ne disposons pas des ressources requises pour suivre aussi près que nous le souhaiterions certaines de ces dépenses et leur incidence sur les activités communautaires. Nous avons recommandé que le suivi des activités intéressant les enfants se fasse dans l'optique de la tierce partie, pour que les crédits ne continuent pas à être versés de cette façon sans condition, de sorte qu'on ne sache jamais à quoi a vraiment servi l'argent? Nous voulons être en mesure de savoir comment les crédits réservés pour les activités de développement et d'éducation des jeunes enfants ont été utilisés.
La présidente: Merci.
Je regrette d'avoir à dire que nous avons déjà dépassé le temps imparti. Trois intervenants ont demandé la parole, alors qu'il ne nous reste qu'environ 20 minutes. Je vais donc donner d'abord la parole à M. Cullen, et je vous demande de raccourcir vos questions, de même que les réponses.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à nos témoins.
Madame Sabourin, bon nombre de nos électeurs dans tout le Canada se heurtent au problème de l'augmentation du coût des assurances CARD, et c'est vraiment un problème. Bien sûr, dans une certaine mesure et même dans une large mesure, ce problème est d'envergure mondiale, étant causé par une multiplicité de facteurs, tels que les catastrophes naturelles, le terrorisme, etc. Cependant, en cherchant à me renseigner davantage sur l'augmentation des primes d'assurance imposées à mes contribuables, j'ai constaté que lorsque ces derniers retournaient voir leur compagnie d'assurance pour demander une explication, ils ont découvert qu'il y a des compagnies qui font une distinction entre différents risques. Certaines compagnies refusent tout simplement d'assurer certains risques; ou alors elles vous disent que cela ne les intéresse plus, ou alors les primes sont à ce point élevées que le client doit forcément aller voir ailleurs, et le plus souvent, ce client trouvera une compagnie qui accepte d'assurer ce genre de risques. À mon avis, nos électeurs peuvent trouver des solutions de rechange s'ils savent comment fonctionne le système. Peut-être pourriez-vous me dire si vous êtes d'accord ou non pour dire que ce genre de chose se fait et si vous estimez que c'est une bonne chose ou non.
Je me demande s'il ne conviendrait pas d'examiner ce phénomène mondial qui influe sur les marchés de réassurance. Ces derniers ne sont plus très forts, même si je crois comprendre qu'ils reprennent du poil de la bête. Nous serait-il possible au Canada d'atténuer les risques, si bien que grâce à des programmes de prévention et de gestion des risques, le marché canadien pourrait être traité à part et nos primes pourraient rester faibles? Ou sommes-nous tout aussi sujets aux aléas de la réassurance mondiale et des marchés d'assurance en général, quoi que nous fassions? Je songe à des propositions concrètes concernant les inondations que nous avons connues, les ouragans, et le terrorisme. Si nous établissions des programmes de prévention et de gestion des sinistres—et je sais qu'une proposition à ce sujet faisait l'objet de discussions ici et là il y a un an ou deux—serait-il possible de bénéficier de certains avantages en ce qui concerne les primes d'assurance que paient les Canadiens? Voilà ma question.
La présidente: Allez-y, madame Voll.
Mme Jane Voll: Merci.
Merci pour cette question; je suis ravie de vous entendre dire que les électeurs qui s'adressent à différents fournisseurs finissent par en trouver un qui accepte de les assurer. Voilà justement l'une des forces du secteur des assurances incendie, accidents, risques divers—c'est-à-dire le secteur des assurances maison, automobile et commercial au Canada, parmi d'autres types d'assurances qui sont disponibles dans le secteur des services financiers; il s'agit effectivement de l'industrie financière la plus concurrentielle du Canada. Nous avons au Canada plus de 200 compagnies qui se concurrencent activement les unes les autres et offrent une vaste gamme de produits et services. Voilà qui, à notre avis, est tout à fait dans l'intérêt des consommateurs, puisque ces derniers ont accès à une grande diversité de produits, et les courtiers et compagnies se concurrencent pour répondre aux besoins des consommateurs. C'est l'une des forces de notre secteur qu'il convient de mettre en relief.
Quant aux questions mondiales, vous avez parlé de la prévention des sinistres et de l'éventuel impact de ce genre d'initiative sur le Canada. Il s'agit là justement d'un des principaux thèmes de notre mémoire: la prévention des sinistres. Faire en sorte que nos collectivités soient mieux préparées à intervenir en cas de catastrophe constitue à notre avis la voie de l'avenir. Nous espérons que nous pourrons obliger le gouvernement fédéral, de concert avec les administrations provinciales, les municipalités, et les chercheurs, à profiter des connaissances que nous avons déjà acquises et à les mettre en pratique pour faire en sorte que nos collectivités soient plus sécuritaires. Voilà qui permettra de réduire le nombre de sinistres et, éventuellement, de faire baisser les primes que doivent payer les collectivités, de même que les entreprises et les particuliers qui vivent dans ces collectivités.
À l'heure actuelle, le coût d'une catastrophe—c'est-à-dire le coût potentiel d'un ouragan qui détruit la côte est, le coût potentiel d'un incendie irréprimé, ou encore le coût potentiel d'un tremblement de terre—doit être incorporé dans les primes qu'on fait payer aux clients, afin qu'il y ait suffisamment d'argent disponible pour indemniser les sinistrés. Bien sûr, si on peut prendre des mesures dès maintenant pour nous assurer de réduire les dommages, les blessures et les décès découlant de ces événements-là, l'estimation des coûts éventuels baissera, de même que les primes.
À (1045)
M. Roy Cullen: Donc, cela pourrait éventuellement déboucher sur des résultats concrets.
Je constate que vous parlez d'une stratégie nationale d'atténuation des effets des catastrophes et de la stratégie canadienne de prévention des accidents, et effectivement, il serait peut-être utile de les sortir du placard et de les soumettre à l'examen du comité. Nous pourrions revoir tout cela pour déterminer dans quelle mesure des mesures fédérales nous permettraient de nous protéger jusqu'à un certain point contre les tendances mondiales et donc de réduire le fardeau des consommateurs canadiens. Merci.
Je suis sûr que nous pourrions passer beaucoup de temps à parler de cela, mais je voudrais maintenant poser quelques questions aux représentantes du Centre de politiques alternatives. Dans votre mémoire, madame Russell, vous parlez de la possibilité d'annuler certaines des réductions d'impôt annoncées en 2000; vous avez même dit que vous seriez particulièrement intéressée à en éliminer certaines. Même si je suis d'accord avec vous pour dire que dans l'immédiat, ces réductions d'impôt ne vont pas tellement stimuler l'économie, à moyen et à long terme, je pense qu'elles créeront un meilleur climat d'investissement, ce qui crée forcément des emplois et favorise l'activité économique. Vous auriez voulu vous étendre un peu plus là-dessus, mais vous avez manqué de temps. Pourriez-vous donc me dire quelles réductions d'impôt vous semblent particulièrement problématiques?
Mme Ellen Russell: Je suis au courant d'une proposition de réduction d'impôt faite par la Fédération des contribuables canadiens, et elle consiste à augmenter l'exemption personnelle de base. Cette dernière se situe actuellement à environ 7 756 $, et la Fédération propose qu'elle passe à, disons, 15 000 $. Selon ses arguments, ce changement aurait pour avantage de faire en sorte que les Canadiens à faible revenu n'aient plus à payer des impôts. D'après l'information que j'ai pu obtenir, la Fédération estime que cette seule mesure permettrait de ne plus faire payer des impôts à 2,1 millions de Canadiens à faible revenu.
D'après mes propres calculs—et j'avoue que je travaille à partir de leurs chiffres et que tout n'est pas encore publié sur leur site Web—un contribuable individuel ayant des gains de 15 000 $ ferait une économie d'environ 697 $ grâce à cette proposition—c'est-à-dire, après avoir tenu compte du crédit au titre de la TPS. Bien sûr, tout dépend des hypothèses qu'on retient concernant les conjoints, les personnes à charge, etc., mais le maximum qu'une personne pourrait économiser grâce à ce changement serait de l'ordre de 675 $. La Fédération des contribuables canadiens est d'avis qu'une telle réduction d'impôt coûterait environ 17,8 milliards de dollars au Trésor. Cela veut donc dire qu'en moyenne, le gouvernement fédéral perdrait 8 476 $ pour chaque Canadien à faible revenu qui ne paierait plus d'impôt, alors que cette même personne pourrait économiser au grand maximum 675 $. Pour moi, il n'y a pas de moyen moins efficace qu'une réduction d'impôt de ce genre pour aider les Canadiens à faible revenu.
Le vice-président (M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.)): Soyez bref, s'il vous plaît.
M. Bruce Campbell (directeur exécutif, Centre canadien de politiques alternatives): Je voudrais répondre à la question concernant les impôts et la croissance économique. Mr. Cullen, ainsi que M. Casson, ont tous les deux soulevé la question.
Je voudrais simplement vous faire remarquer qu'il n'existe pas de corrélation entre les réductions d'impôt et la croissance économique. Certains pays, comme les Pays-Bas et le Danemark, où les impôts sont élevés, ont un excellent bilan en matière de croissance et de productivité. Même s'il est vrai que certains pays où les contribuables sont moins lourdement imposés ont un bilan semblable, il est tout aussi vrai que d'autres pays ayant un régime de faible imposition ont un très mauvais bilan.
Le Canada a connu une forte accélération de sa croissance dans les années 1960 et 1970 et cette croissance était beaucoup plus forte durant cette période-là que dans les années 1990 et même en 2000. Le taux de croissance entre 1950 et 1980 était de 5 p. 100 en moyenne, alors que si nous sommes si satisfaits de nos résultats ces dernières années, c'est uniquement parce que le bilan était très négatif pendant les années 1990.
Aux États-Unis, Ronald Reagan, avec son économie à la Reagan, a beaucoup réduit les impôts, mais si vous comparez la croissance économique pendant les années 1980, comparativement à la performance de l'économie américaine dans les années 1990, sous le régime de Bill Clinton, qui a voulu fortement imposer les contribuables à revenu élevé, vous constaterez que le bilan en matière de croissance économique était plus positif pendant le mandat de Clinton, comparativement à la période où Reagan était président.
Donc, il n'y a tout simplement aucune corrélation entre une faible imposition et la croissance économique ou une lourde imposition et la croissance économique.
À (1050)
Le vice-président (M. Nick Discepola): Madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.
Moi, aussi, j'ai des questions à adresser aux représentants du Centre canadien de politiques alternatives, mais avant de commencer, je voulais juste rappeler que Bryon Wilfert disait tout à l'heure que nous devrons attendre de connaître les prévisions économiques du ministre des Finances pour savoir où nous en sommes et comment nous devons nous orienter.
Je voulais simplement dire à Bryon et aux autres qu'en fait nous disposons de l'expertise nécessaire dans cette même salle, étant donné que le CCPA a réussi à établir le montant approximatif du dividende budgétaire de façon beaucoup plus exacte que le gouvernement fédéral, puisque l'écart entre les estimations de ce dernier et la réalité est de l'ordre de 80 milliards de dollars depuis 10 ans. Peut-être devrions-nous envisager de demander que le CCPA reçoivent certains crédits afin d'aider le gouvernement dans cette période difficile.
Ce dont vous parlez vraiment aujourd'hui—et c'est très important pour notre discussion—c'est du changement de paradigme. L'ancien paradigme ou modèle consistait à réduire les dépenses et à équilibrer le budget, mais cela n'a pas suffi. Ensuite il a été décidé de réduire les impôts au profit des grandes sociétés riches. L'obsession actuelle, c'est la dette.
J'aimerais donc commencer par vous demander ce que vous diriez à Paul Martin, qui sera sans doute le prochain premier ministre, et qui, dans son exposé budgétaire, démontre qu'il est très préoccupé par la dette, même si (coupé) rapport dette-PIB au Canada est raisonnable. Il veut nous ramener aux années 1960. Qu'est-ce que vous lui répondriez, et que pouvez-vous faire pour nous aider à réorienter les politiques économiques du prochain premier ministre du Canada?
Mme Ellen Russell: J'avoue que j'ai un peu de mal à vous répondre, puisque je ne sais pas sur quoi on peut se fonder pour affirmer qu'un rapport dette-PIB de 25 p. 100 correspond à une sorte de chiffre magique et que nous devons essayer d'atteindre cet objectif, coûte que coûte. Si vous regardez notre bilan historique, vous verrez que pendant une bonne partie de la période de l'après-guerre, nous avons rarement enregistré un tel rapport dette-PIB. Au début des années 1960, une période de forte croissance, selon les experts…en 1961-1962, le rapport dette-PIB était de 35,9 p. 100. Pendant presque toute la période des années 1960, il était supérieur à 25 p. 100. Donc, je ne comprends pas pourquoi—
Le vice-président (M. Nick Discepola): Avez-vous une recommandation à faire au comité sur ce que nous devrions recommander comme objectif?
Mme Ellen Russell: À mon avis, la croissance économique réglera votre problème. Si nous mettons l'accent sur le maintien d'un climat qui favorise la croissance économique, nous n'aurons pas à nous préoccuper du rapport dette-PIB puisque le dénominateur ne sera plus le même. À mon avis, il n'est pas nécessaire d'utiliser cette donnée comme point de départ pour déterminer—
Le vice-président (M. Nick Discepola): Mais dans cas, il pourrait être inférieur à 25 p. 100.
Mme Ellen Russell: Oui, mais nous n'en sommes pas encore là.
M. Bruce Campbell: Permettez-moi de vous poser une question: si vous avez un toit qui fuit, que faites-vous: décidez-vous de rembourser votre hypothèque à un rythme accéléré, ou faites-vous réparer votre toit?
À mon avis, nous en sommes encore au point où notre maison a besoin d'être remise en état, et par conséquent, nous devons mettre l'accent sur la reconstruction sociale et la remise en état de notre infrastructure.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Dans le même ordre d'idées, étant donné qu'on ne semble pas vouloir parler de ce nouveau paradigme, peut-être pourriez-vous nous expliquer quelles sont priorités cachées dans tout cela?
Il n'est pas possible que ce soit encore l'histoire des budgets équilibrés, par exemple. Les mêmes personnes qui protestaient vigoureusement avant que l'on sabre dans les programmes sociaux sont tout à fait muettes actuellement devant le déficit américain de 488 milliards de dollars. Pourquoi ces mêmes personnes ne critiquent-elles pas ce genre de déficit?
Qu'est-ce qu'ils veulent vraiment? À quoi s'attaque-t-on en réalité? Qu'y a-t-il de si important par rapport au travail que nous avons à accomplir à l'avenir?
Mme Ellen Russell: De toute évidence, ces normes de prudence financière sont extrêmement variables, puisqu'elles semblent amener telle ligne de conduite dans un cas, et une tout autre ligne de conduite la fois suivante. Et le résultat semble être que le gouvernement fédéral se trouve dans l'impossibilité de prendre des mesures positives sur le plan économique qui permettraient d'atteindre les objectifs que nous et les membres d'autres groupes avons mentionnés aujourd'hui. Le fait est que ce système a pour résultat de lier les mains au gouvernement fédéral, de sorte qu'il ne peut plus prendre les initiatives que revendiquent depuis un moment les groupes sociaux.
À (1055)
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je me demande si l'intention cachée dans tout cela n'est pas de diminuer le rôle du gouvernement et de s'attaquer au secteur public, ce qui semble correspondre parfaitement aux voeux des grandes sociétés. Je ne sais pas, mais on ne peut pas exclure cette possibilité.
Dans le même ordre d'idée, il y a évidemment toute la question du mouvement coopératif et son rôle au sein de la société actuelle, car pour moi, cela fait partie du mouvement vers un nouveau paradigme. Je sais que dans ma propre circonscription électorale, un quartier plutôt pauvre du nord de Winnipeg, en l'absence du mouvement coopératif, il y aurait très peu d'espoir pour les sans-abri ou même pour l'économie. Mais j'ai l'impression que le mouvement coopératif est bien présent et dynamique, et ce malgré le gouvernement, pas grâce à lui, et j'aimerais savoir ce qu'on peut faire pour qu'il fasse partie intégrante de l'appareil gouvernemental.
M. Glen Tully: Merci pour vos remarques. Il est certain que nous avons entretenu de bons rapports avec le gouvernement du Canada, de même qu'avec les gouvernements provinciaux, dans l'initiative de développement des coopératives. En ce qui nous concerne, le modèle coopératif présente des occasions très intéressantes que nous devrions saisir.
Pour vous citer l'exemple de l'industrie ovocole, où on parle beaucoup de valeur ajoutée, je dois vous dire qu'en tant qu'agriculteur, je ne sais pas où je serais aujourd'hui si je n'avais pas pu bénéficier des services de ma coopérative locale, ma caisse de crédit locale, et la compagnie d'assurance Co-operators.
En ce qui nous concerne, le développement du mouvement coopératif à l'avenir va certainement se faire autour des coopératives sociales. Le message que nous essayons de vous communiquer aujourd'hui, c'est que lorsque le gouvernement prend une décision, cette décision influe sur la capacité des coopératives d'élargir et de diversifier leurs activités. Donc, nous attendons avec impatience l'occasion de participer à des consultations sur ce que nous, au secteur coopératif, nous pourrions faire pour aider le gouvernement à donner suite à toutes ces priorités futures. Encore une fois, c'est surtout au sein des coopératives sociales que ce développement va se faire.
Nous avons un excellent bilan pour ce qui est de la création et du développement des coopératives à l'échelle internationale, et à cet égard, nous travaillons en étroite collaboration avec l'ACDI. On nous dit tout le temps: ce serait formidable de ramener ce modèle de développement coopératif international au Canada et de s'en servir pour renforcer le développement coopératif au Canada. Et c'est vrai; c'est un excellent modèle, mais nous avons besoin de l'aide et de l'assistance du gouvernement pour que cela se réalise.
Comme je vous l'ai déjà dit, nous avons obtenu la moitié de ce que nous demandions. Nous faisons notre possible, mais cela ne suffit pas. Nous avons besoin d'aide supplémentaire pour aider à la mise en place de nouvelles coopératives.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Pourrais-je poser une autre question? En fait, le président a utilisé une minute de mon temps de parole.
La présidente: Oui, je comprends, mais nous avons déjà dépassé d'une minute. Soyez donc très brève.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Donc, très rapidement, quand nous avons discuté de la question de la priorité accordée aux enfants, lors d'une séance précédente, nous avions comme témoins les représentants d'un groupe de promotion des services de garde à l'enfance, et aussi Investment—je ne me rappelle plus du nom—of Canada. Quand j'ai demandé aux représentants de ce groupe d'entreprises s'ils seraient disposés à renoncer à une réduction supplémentaire de l'impôt sur le capital, afin qu'on puisse accorder au programme d'action pour les enfants l'importance qu'il mérite et vraiment faire des enfants notre grande priorité, qu'est-ce qu'ils m'ont répondu? Eh bien, ils m'ont dit: non, il faut éliminer l'impôt sur le capital; c'est la seule façon de sauver le pays, et on verra ensuite ce qu'on peut faire pour les enfants.
Je ne comprends pas. Si les Canadiens sont prêts à renoncer à une réduction d'impôt afin qu'on puisse investir davantage dans les services de garde d'enfants ou les soins de santé, pourquoi les entreprises refusent-elles cette possibilité? Pourquoi les compagnies d'assurances privées refusent-elles de renoncer à une réduction de l'impôt sur le capital, afin qu'on puisse préparer et améliorer l'avenir de nos enfants?
La présidente: Je vous demande d'être très bref, parce qu'une autre personne voudrait poser une question.
Chers collègues, il s'agit d'une sonnerie de 30 minutes. Il y aura un vote à la Chambre. Je vais donner la parole à Mme Minna dans une seconde pour conclure ce tour de questions, et je vais ensuite demander au deuxième groupe d'experts de s'installer, afin qu'on puisse entendre quelques exposés avant que je ne lève la séance pour permettre aux députés d'aller voter et de revenir ensuite.
Je vous invite donc à nous faire une très brève réponse.
Mme Suzanne Sabourin: Je vous le promets.
Je voudrais simplement vous rappeler que nous avons déjà pris un engagement financier de 600 000 $ au titre d'une initiative de prévention des accidents. Cela est en rapport direct avec les enfants et les soins qu'ils reçoivent, car la plus importante source d'endettement des adultes âgés de moins de 45 ans est leurs enfants, et par la suite, cela s'étend sur toute la durée de vie de l'individu. Donc, nous apportons une contribution à la réalisation des priorités du programme d'action sociale au Canada.
La présidente: Madame Minna, vous avez la parole.
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je voudrais tout d'abord adresser une question aux représentantes de l'Alliance nationale pour les enfants. Je suis désolée d'avoir manqué une partie des exposés de ce matin, mais j'ai vos mémoires écrits—même s'il n'y en a pas eu pour l'Alliance nationale pour les enfants. Mais je voudrais vous poser une question.
J'ai beaucoup participé au travail de préparation de la prestation fiscale pour enfants, lorsqu'elle a été créée au départ. Je crois que c'est moi et huit autres députés qui avons fait pression sur le premier ministre et le ministre des Finances pour les faire accepter de prendre cet engagement-là, et par la suite, nous avons continué à l'améliorer.
Elle est actuellement d'environ 3 200 $ pour le premier enfant. L'objectif fixé l'année dernière par les gens du milieu était de l'ordre de 4 200 $. L'objectif est-il donc toujours le même, ou avez-vous réexaminé ce chiffre?
Á (1100)
Mme Margaret Fietz: Je pense que ce montant correspond toujours à notre objectif. Nous avons demandé que la prestation passe à un maximum de 4 200 $ par enfant—et ce serait évidemment pour l'année prochaine—mais nous avons également demandé que les familles bénéficiant d'assistance sociale ne soient pas visées par une mesure de récupération fiscale.
Mme Maria Minna: Il n'a jamais été prévu qu'il y ait une mesure de récupération fiscale lorsque nous avons créé la prestation fiscale pour enfants, et nous nous battons depuis lors pour l'éliminer. J'espère qu'à un moment donné, il sera possible de la supprimer.
Il y a aussi la question de la pauvreté chez les enfants. Pour moi, c'est un problème qui a trois volets. D'abord, il y a le problème du revenu, mais il y a aussi celui du logement, étant donné que 50 à 60 p. 100 du revenu sert à payer le logement, quand vous avez un revenu faible, et bien sûr, à payer les services de garde d'enfants. Voilà les trois éléments sur lesquels il faut se concentrer pour éliminer la pauvreté chez les enfants.
Merci infiniment pour votre exposé.
Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps, mais je voudrais poser une question à Mme Russell. J'ai toujours défendu vos budgets, si bien qu'en 1995, j'étais l'une des rares députées à m'être opposée publiquement à notre propre budget.
J'ai lu votre mémoire, et je suis d'accord avec vous pour dire que le fait de ne pas investir dans l'infrastructure sociale et autres crée une dette ou un déficit d'une autre nature. Tout dépend de sa façon de définir un déficit. Et pour moi, le déficit qui compte n'est pas nécessairement celui inscrit au grand livre—autrement dit, du côté du rapport dette-PIB.
Je suis d'accord avec vous, et par conséquent je n'ai pas l'intention de vous poser toutes sortes de questions. Cependant, on nous dit constamment—notamment certains organismes et groupes d'entreprises, qu'il faut réduire encore le taux d'imposition des sociétés, parce que cela va améliorer notre compétitivité. Les Américains sont en train de le réduire encore chez eux. Pour moi, il ne s'agit pas de voir qui va être le premier à les réduire à zéro, et donc, quand pourra-t-on déterminer que cela suffit?
Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de notre taux d'imposition des sociétés par rapport à celui des États-Unis, et de son éventuelle incidence sur notre compétitivité, par rapport à celle des autres pays industrialisés au cas où vous auriez eu l'occasion de faire une telle analyse?
Mme Ellen Russell: À mon avis, l'écart n'est pas très grand. Si vous regardez le World Competitiveness Yearbook, vous verrez que nous sommes deuxième par rapport à tous les autres pays, c'est-à-dire juste après les États-Unis. Notre structure d'imposition des sociétés n'est donc pas tellement décalée par rapport à celui des États-Unis.
S'agissant maintenant des décisions que prennent les entreprises pour ce qui est de s'implanter dans telle région au pays par rapport à un autre, il est clair que ces décisions reposent essentiellement sur la présence d'une bonne infrastructure, d'une main-d'oeuvre spécialisée, et d'un bon accès aux marchés. Et le fait est que les dépenses de programmes nous aident à améliorer notre infrastructure, comme je l'affirme depuis un moment, de même que le degré de spécialisation de notre main-d'oeuvre. Cela ne fait que rehausser notre compétitivité.
Mme Maria Minna: Qu'en est-il de l'impôt sur le revenu des particuliers? C'est la bête noire de bien des gens. On nous dit que nos impôts sont trop élevés et, ce qui encourage les jeunes à partir est que c'est cela la raisons de la fuite des cerveaux. Pour ma part, je n'en suis pas du tout convaincue, mais peut-être pourrez-vous me dire si ce facteur influence la situation ou non. Ce sont des thèmes qui reviennent régulièrement, et j'aimerais avoir votre avis à ce sujet.
La présidente: Ce sera la dernière réponse pour ce groupe.
Allez-y.
Mme Ellen Russell: À notre avis, la fuite des cerveau est surtout le fait du potentiel de gains qu'ont certaines personnes, plutôt que du taux d'imposition du revenu des particuliers. Là où il peut y avoir un certain décalage, c'est pour le taux d'imposition qui vise les personnes à revenu très élevé, et par conséquent, je me demande vraiment dans quelle mesure la décision de quitter le Canada peut vraiment y être liée.
La présidente: Merci beaucoup.
Au nom de tous mes collègues, je voudrais vous remercier de votre participation, de nous avoir fait parvenir vos mémoires, et d'avoir accepter de répondre à nos questions. Nous allons tenir compte de toutes vos observations. Je vais maintenant lever brièvement la séance pour vous permettre de quitter la salle et pour laisser le temps à nos prochains témoins de s'installer.
Merci infiniment à vous tous.
Á (1104)
Á (1107)
La présidente: Mesdames et messieurs, je vous invite à prendre vos places.
Nous accueillons l'Alliance to End Homelessness, dont la coordonnatrice est Maura Volante. Comme je ne la vois pas pour l'instant, nous allons passer tout de suite à la Société de transport de l'Outaouais, représentée par le directeur général, Lawrence Cannon. Bienvenue. Georges Gratton en est le directeur. Bienvenue à vous deux.
De plus, de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec, nous accueillons Gilles Vaillancourt, maire de Laval et président de la Coalition. Bienvenue, monsieur.
De l'Association of Canadian Airport Duty Free Operators, nous accueillons André Bergeron, le directeur général. Bienvenue.
Et du National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits, nous accueillons Amelia Shaw, directrice des Affaires publiques pour l'Association canadienne du transport urbain, ainsi que son adjointe, Donna-Lynn Ahee. Bienvenue à vous deux.
Comme vous l'aurez certainement remarqué, les cloches sonnent, ce qui veut dire que nous devrons aller voter à la Chambre en moins d'une demi-heure. Nous allons commencer à entendre vos exposés, et nous devrons suspendre nos travaux pendant une dizaine de minutes pour nous permettre d'aller voter. Je vous invite donc à vous servir du thé et du café, et nous reviendrons le plus rapidement possible pour poursuivre la réunion.
Donc, sans plus tarder, je donne la parole à M. Cannon.
[Français]
M. Lawrence Cannon (directeur général, Société de transport de l'Outaouais): Merci, madame la présidente.
Mesdames et messieurs les députés, d'entrée de jeu, je vous remercie infiniment de l'accueil que vous nous réservez ce matin. Je commencerai la présentation du mémoire en vous disant qu'à titre de membres de l'Association canadienne du transport urbain, nous endossons le rôle et la contribution dévolus par cette association aux transporteurs canadiens et ce, compte tenu des nombreuses études réalisées à cette fin. Nous nous déclarons donc solidaires de ses prises de position.
Au chapitre 2 du mémoire, vous pourrez constater également qu'à titre de membres de l'Association du transport urbain du Québec, nous partageons les informations et les conclusions ayant trait à l'importance du transport au Québec.
Á (1110)
Au chapitre 3, nous traitons de la crise actuelle du financement du transport. Je vous dirai, en résumé, que depuis 12 ans, le manque de financement de la part des pouvoirs publics se fait sentir, plus précisément depuis la réforme Ryan de 1991, qui a consacré le retrait du gouvernement du Québec du financement des opérations budgétaires des organismes publics de transport.
Cette même année, le gouvernement fédéral, notamment la Commission de la capitale nationale, a retiré à la STO la subvention annuelle de un million de dollars qui permettait de maintenir la réciprocité avec le réseau d'OC Transpo. Cependant, les services intégrés des centres-villes ont été maintenus. La STO s'est donc retrouvée avec un manque à gagner de 6,145 millions dollars et s'est vue contrainte d'adopter les mesures suivantes pour répartir cette somme, à savoir la réduction des services, à raison de 11 p. 100, l'augmentation des tarifs, à raison de 39 p. 100 et finalement, une augmentation de 50 p. 100 de la contribution des municipalités.
Concrètement, ces mesures se sont traduites par des mises à pied en mars 1992, une réduction des heures de service, une augmentation moyenne de 17 p. 100 pour les utilisateurs de laissez-passer et une augmentation de près de 50 p. 100 de la contribution municipale. La réponse de la clientèle n'a pas tardé puisqu'en 1992, la STO connaissait une baisse de l'achalandage de 7,78 p. 100.
De 1993 à 2002, la STO a connu une hausse de 50 p.100 de son achalandage. Ce sont notamment les revenus supplémentaires engendrés par cette hausse qui ont permis à la société d'accroître les services au cours des dernières années. Cependant, les usagers et les municipalités ayant fait plus que leur part pour la relance du transport en commun, il est impératif que les gouvernements supérieurs prennent la relève si on veut que le transport en commun occupe la place qu'on désire lui attribuer. La STO n'a plus la capacité d'autofinancer les nouveaux projets, car elle n'a plus de marge de productivité. Il est impensable, madame la présidente, de croire que les usagers et les municipalités peuvent, à même l'impôt foncier, continuer de fournir suffisamment d'argent pour prévoir le développement et le maintien du transport en commun.
De façon globale, le financement des budgets d'exploitation et d'immobilisation assurant le soutien financier du transport se répartissait comme suit en l'an 2000: la clientèle finançait 46 p.100 du budget; la ville en finançait 32 p. 100; le Programme provincial d'aide gouvernementale au chapitre des subventions pour les infrastructures en finançait 7 p. 100; le Programme d'aide gouvernementale au transport adapté en finançait 3 p. 100; les droits sur les immatriculations en représentaient 9 p. 100; les revenus autogénérés en représentaient 3 p. 100.
La contribution au service de la dette du ministère des Transports du Québec a baissé en moyenne de 8 p. 100 depuis 1995. Ce constat nous amène à réfléchir à la composition des sources de revenus du budget total de la STO, surtout lorsqu'on prend conscience de sa vulnérabilité face à sa clientèle pour ce qui est de maintenir ses services, alors que celle-ci contribue 46 p. 100 du financement total.
En outre, la STO est confrontée aux questions suivantes: sa capacité de développer de nouveaux services lorsque la contribution du MTQ, par le biais de son programme d'aide, se limite à 9 p. 100 du budget; sa capacité d'offrir des services en adéquation avec les besoins de la population lorsque la municipalité collabore à la hauteur de 32 p. 100 du budget total, particulièrement à l'égard des nouveaux besoins engendrés par la fusion municipale; enfin, l'insuffisance des autres sources de financement qui sont par ailleurs stables au fil des années--l'immatriculation, 9 p.100 et le transport adapté, 3 p. 100--pour développer l'attrait du transport en commun.
Je vous rappelle que les constats face à cette situation font l'objet de nombreuses études de la part de notre société, d'autres sociétés sur le territoire québécois ainsi que d'organismes et de ministères gouvernementaux. La conclusion qui s'impose est que le transport en commun est vraiment en péril.
En guise de conclusion et de recommandation, madame la présidente, messieurs et mesdames les députés, la Société de transport de l'Outaouais propose que le gouvernement fédéral établisse une stratégie d'investissement afin de soutenir les réseaux de transport collectif au Canada. Au chapitre de l'investissement, la STO propose la mise en oeuvre d'un programme d'investissement pour de grands projets reliés au transport en commun. Cette contribution du gouvernement fédéral devrait prendre un caractère permanent et être versée dans le cadre d'un programme d'infrastructures consacré au transport en commun et géré en partenariat avec les gouvernements provinciaux et municipaux. Aucun reliquat ne devrait être assumé par les revenus d'exploitation de la Société de transport.
Á (1115)
Les propositions suivantes couvrent plusieurs domaines.
Au chapitre de la demande, nous vous recommandons de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu pour abolir l'iniquité qui existe entre les avantages en matière d'emploi consentis aux conducteurs et les usagers du transport en commun; d'exonérer d'impôt les laissez-passer du transport en commun consentis par l'employeur; d'investir une somme de cinq millions de dollars tous les ans dans des mesures destinées à sensibiliser davantage la population au transport collectif ainsi que dans la recherche et l'élaboration de mesures destinées à améliorer l'efficacité et l'efficience du transport en commun.
En matière d'offre, nous vous recommandons d'encourager de façon tangible la population à utiliser le transport en commun par des moyens incitatifs tels qu'un programme de crédit d'impôt pour les usagers.
Au chapitre de l'exploitation, nous vous demandons de faire en sorte que les ressources nécessaires pour offrir les services reçoivent le soutien financier requis par le biais de crédits de taxes et d'impôt tels que des remises de TPS sur les intrants et les taxes sur l'essence des automobilistes.
Pour ce qui est de l'innovation technologique, nous vous demandons de soutenir les sociétés de transport au chapitre du développement des innovations technologiques pour faciliter la réalisation de l'idéologie sociétale canadienne.
Enfin, au niveau local, nous vous demandons de remettre en application l'aide financière permettant l'interchangeabilité des titres de transport entre la Société de transport de l'Outaouais et OCTranspo.
Merci de votre attention, madame la présidente. Il va sans dire que nous sommes prêts à répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup.
Je voudrais souhaiter la bienvenue à Maura Volante, coordonnatrice de l'Alliance to End Homelessness.
Comme il nous reste moins de sept minutes avant le vote, je pense qu'il serait préférable de ne pas interrompre l'exposé du prochain témoin, et que nous devrions donc suspendre nos travaux immédiatement. Nous reviendrons tout de suite après le vote. Nous allons prolonger la séance de 10 minutes, pour permettre à ceux et celles qui peuvent rester de continuer à poser des questions. Voilà qui me semble être la meilleure solution pour notre prochain témoin.
Nous allons donc suspendre nos travaux, et je vous invite tous à rester.
Á (1117)
Á (1142)
La présidente: Nous allons donc poursuivre nos discussions avec notre groupe de témoins, et je redonne donc la parole à la représentante de l'Alliance to End Homelessness.
Madame Volante, vous disposez de sept minutes pour votre exposé.
Mme Maura Volante (coordinatrice, Alliance to End Homelessness): Merci.
L'Alliance to End Homelessness a pour mandat la coordination des stratégies et des services visant à mettre fin aux problèmes des sans-abri d'Ottawa. Notre principal objectif est de promouvoir la construction d'un plus grand nombre de logements abordables, mais nous reconnaissons également qu'une panoplie de services est nécessaire pour faire en sorte que ces personnes puissent demeurer dans leur logement. L'année dernière, notre mémoire a surtout mis en relief le droit des gens d'avoir un logement approprié. Bien que l'accès aux logements abordables demeure problématique ici à Ottawa, nous aimerions cette fois-ci mettre l'accès sur la question de mesures permanentes de soutien, soit l'autre volet important de notre lutte pour mettre un terme aux problèmes des sans-abri.
Sans une aide extérieure, très peu de gens réussissent à surmonter les circonstances difficiles qui pourraient occasionner la perte de leur logement. Ceux et celles qui ont le plus de chance peuvent compter sur leur famille et leurs amis proches pour les héberger provisoirement pour les aider dans leur recherche d'emploi, pour la garde d'enfants et pour l'éducation, et surtout, pour leur apporter le soutien affectif qui est si important pour réussir à traverser une telle crise. En fait, cela peut prendre des années pour se remettre d'une telle crise, même lorsqu'on a accès à un tel réseau. Malheureusement, nombreux sont ceux qui n'ont pas la chance de bénéficier du soutien de leur famille et de leurs amis, et dont les problèmes sont beaucoup plus complexes qu'un simple revers de fortune. En effet, l'aide que reçoivent ces personnes des organismes de service social est tout à fait critique pour assurer leur survie.
Bien des gens qui ont les besoins les plus impérieux en matière de service social ont de multiples obstacles à surmonter afin d'acquérir et de conserver un logement. Certaines d'entre elles souffrent de maladie mentale ou d'incapacités physiques, alors que d'autres sont toxicomanes, ou encore sont à la fois toxicomanes et atteintes de maladie mentale. Certaines personnes sont trop jeunes pour réussir sans les conseils d'un adulte, alors d'autres subissent encore les contrecoups psychologiques de la violence dont elles ont été les victimes soit dans leur foyer, soit dans un environnement de guerre. De plus, bon nombre de ceux qui se retrouvent dans ce genre de situation ont un faible niveau d'éducation et peu de compétences professionnelles.
Bien que certaines des mesures de soutien que requièrent ces personnes fassent partie des services de base assurés par le gouvernement, une bonne partie de ces services de soutien sont dispensés par des organisme à but non lucratif qui dépendent de sources de financement de plus en plus aléatoires. Ottawa n'est qu'une ville parmi bien d'autres au Canada où les organismes à but non lucratif sont confrontés à une nouvelle réalité en ce qui concerne leur financement.
En effet, selon une étude intitulée Funding Matters, menée par Katherine Scott pour le Conseil canadien de développement social, les organismes à but non lucratif d'un océan à l'autre ont observé, avec inquiétude, l'émergence de certaines nouvelles tendances en matière de financement, par rapport à la situation qui prévalait il y a une dizaine d'années. Premièrement, le modèle du financement de base, qui permet aux organismes de remplir leur mission, est abandonné de plus en plus.
Le nouveau modèle de financement est plutôt axé sur les projets et se caractérise par la conclusion de contrats qui permettent aux bailleurs de fonds d'exercer un contrôle plus strict sur les activités de l'organisme et sa façon de les mener. Les bailleurs de fonds sont réticents à financer les dépenses administratives qui ne peuvent être directement liées à un projet ou programme particulier. Le financement est consenti pour des périodes plus courtes, et est de moins en moins prévisible. Les exigences en matière de préparation de rapports sont plus rigoureuses. De plus en plus, les bailleurs de fonds exigent que les organismes présentent des demandes de subvention conjointes avec d'autres partenaires, afin que ces derniers puissent démontrer qu'ils ont également d'autres sources de financement (il peut s'agir de crédits ou de prestations en nature) avant d'accepter de leur fournir une aide financière.
Mme Scott fait état de plusieurs tendances qui sont observées de plus en plus en raison de cette réalité changeante, à savoir, un phénomène qu'elle qualifie de volatilité; elle parle également de dérive par rapport à la mission originelle des organismes; d'une perte d'infrastructure; d'exigences trop lourdes en ce qui concerne la communication de rapports et d'information; et du phénomène du «château de cartes », c'est-à-dire l'effondrement des projets en raison de formules de financement interdépendantes, si bien que quand l'un des partenaires se retire du projet, tout s'effondre.
Ici à Ottawa, les directeurs d'organismes se disent très frustrés devant cette tendance à prévoir du financement temporaire qui semble devenir de plus en plus la norme dans le secteur de l'aide aux sans-abri, tout comme dans de nombreux autres secteurs. Même si bien des gens nous ont fait part de leurs commentaires à ce sujet, Valerie Davis, du Centre communautaire Pinecrest-Queensway, résume ainsi la situation actuelle:
En effet, l'un des plus grands défis liés au financement d'un projet est celui du recrutement et du maintien en poste de personnel qualifié. Le roulement constant du personnel et l'incertitude qui entourent les ressources humaines entravent le processus de planification et perturbent la distribution des services. |
Bien que cette réalité caractérise tous les paliers de gouvernement, la responsabilité du comité se situe au niveau fédéral, et il importe donc de vous parler de l'Initiative de partenariats en action communautaire (l'IPAC). L'initiative fédérale pour les sans-abri a eu de nombreux résultats positifs. Par contre, l'IPAC pose encore certains problèmes, entre autres le fait qu'on s'attend qu'elle puisse devenir financièrement autonome, grâce à d'autres sources de financement.
Á (1145)
Bien que notre réseau ait pour nom l'Alliance to End Homelessness, personne ne croit vraiment que ce problème va bientôt disparaître. Même lorsque nous aurons atteint notre objectif, qui consiste à trouver un logement pour tous les citoyens d'Ottawa, il y en aura toujours un certain nombre qui auront besoin d'aide afin de pouvoir continuer à occuper leur logement. Ce besoin ne va pas disparaître d'ici trois ans, ni même, à supposer que l'IPAC soit renouvelée, trois ans après cela.
Certains projets subventionnés par l'IPAC étaient, de par leur nature, délimités dans le temps, mais d'autres ont été approuvés qui doivent permettre d'accomplir un travail valable et utile en permanence. Mais même si certains organismes réussissent à se trouver des partenaires dans le secteur privé ou à décrocher d'autres subventions gouvernementales afin de poursuivre leur travail, le financement qu'ils obtiennent est presque toujours de la même nature—c'est-à-dire des crédits prévus pour des projets à court terme.
Une autre préoccupation que suscite l'IPAC est la longue période d'attente entre l'adoption du budget fédéral et la distribution des fonds. En effet, à la suite de son implantation en l'an 2000, à titre de programme triennal, la mise sur pied du système de financement a été retardée à plusieurs reprises. Par conséquent, les crédits n'ont été distribués qu'en l'an 2001. Ainsi certains projets n'ont pas pu se réaliser comme prévu, puisque l'échéancier avait été écourté.
Nous avons été encouragés en apprenant, lors du dépôt du budget de février, que l'IPAC serait reconduite. De plus, les services auront été interrompus depuis longtemps entre le moment où les premiers crédits accordés en vertu de l'IPAC auront été utilisés, soit le 31 mars 2003, et le début du nouveau programme, dont la date est inconnue pour l'instant mais qui devrait être au début de 2004. Encore une fois, la première année d'un programme triennal sera perdue.
Ces observations ne visent nullement à rejeter le blâme sur qui que ce soit. Le travail des responsables gouvernementaux demande un certain temps en raison de sa complexité et parce que ces derniers doivent rendre compte de l'utilisation des deniers publics. Bien qu'il ne soit peut-être pas possible d'écourter ce processus, il serait beaucoup plus efficace d'avoir à passer par là moins souvent, ce qui serait possible si le financement était accordé sur une plus longue période.
La solution que nous préconisons, ce que nous appelons la solution 1 p. 100, consiste à faire des investissements permanents dans la construction de logements abordables, de manière à faire fond sur l'actuel accord cadre sur les logements à prix abordable.
Nous, les membres de l'Alliance to End Homelessness, appuyons la position du réseau national en faveur du logement et des sans-abri qui propose la solution 1 p. 100. Bien qu'il ne soit pas nécessaire de vous en retracer les grandes lignes, nous tenons à vous rappeler que quel que soit le cadre que vous choisirez, et quels que soient les montants investis par le gouvernement fédéral, ce n'est qu'en garantissant la continuité du financement que nous pourrons aussi garantir la prestation continue des services.
Merci.
Á (1150)
La présidente: Nous passons maintenant à la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec.
Monsieur Vaillancourt, s'il vous plaît.
[Français]
M. Gilles Vaillancourt (maire de Laval; président, Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec): Merci, madame la présidente.
Mesdames, messieurs, membres du comité, je m'appelle Gilles Vaillancourt. Je suis maire de Laval et je préside la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec.
M'accompagnent aujourd'hui M. Marc Couture, ingénieur et président du comité technique de la coalition; M. Jean-Guy Frenette, représentant de la FTQ; Mme Patricia Devine, directrice nationale des Affaires publiques et gouvernementales, Association canadienne du béton; M. Alain Robert, vice-président de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec; M. François Lalande, président de l'Association québécoise des entrepreneurs en égout et aqueduc; M. Clément Bélanger, président de l'Association nationale des camionneurs artisans; M. Marcel Guibord, président du Groupe Aqua Data et représentant de la société Gaz Métropolitain; M. Gilles Taillon, président du Conseil du patronat du Québec; M. Pierre Vincent, directeur général de RÉSEAU environnement; Mme Karine Oscarson, directrice technique de RÉSEAU environnement; M. Jean Audet, représentant de l'Association des ingénieurs municipaux du Québec; M. Pierre Gaudreau, président-directeur général du Centre d'expertise et de recherche en infrastructures urbaines; et M. Michel Langelier, directeur exécutif de la Société canadienne de génie civil.
Madame la présidente, nous formons une coalition constituée de 21 organisations qui représentent les spécialistes du domaine des infrastructures municipales: les constructeurs, les organisations syndicales et patronales, les chambres de commerce, les ingénieurs, ainsi que les élus et les gestionnaires des différentes municipalités au Québec. Il s'agit du plus grand regroupement jamais constitué au Québec pour souligner l'importance des investissements à réaliser dans les domaines de la gestion de l'eau et de la voirie.
Permettez-moi de vous remercier de l'occasion que vous nous donnez de vous faire part de nos attentes relativement au rôle que devrait jouer le gouvernement fédéral dans le renouvellement des infrastructures urbaines et routières au Québec. Ce que nous venons vous dire aujourd'hui se résume à trois points.
Premièrement, nos infrastructures de base que sont l'aqueduc, les égouts et les routes urbaines et locales sont mal en point et leur renouvellement devrait faire partie de nos premières priorités.
Deuxièmement, le mode selon lequel les montants ont été alloués aux programmes d'infrastructures jusqu'à présent devrait être revu pour le rendre plus adéquat et plus performant.
Finalement, de nouvelles sommes devraient être investies dans la mise à niveau des infrastructures pour parvenir à une solution qui soit viable à long terme.
Les infrastructures locales et régionales sont un des meilleurs indicateurs de notre qualité de vie et de l'état de notre développement en tant que société. À en juger par leur état actuel, ces caractéristiques sont loin de là où l'on voudrait qu'elles se situent. Et cet état des choses n'est pas unique au Québec. Le phénomène est répandu dans tout le Canada, mais ce qui nous est propre, c'est le degré de vétusté de nos infrastructures.
Rappelons entre autres que l'âge moyen des territoires urbanisés au Québec est plus élevé que celui de la très grande majorité des autres milieux urbains au Canada, puisque c'est là que la première industrialisation à grande échelle de notre pays a pris naissance.
Si nos infrastructures sont toujours en aussi piètre état aujourd'hui, ce n'est pas parce qu'on n'a pas consenti des efforts, souvent appréciables, à ce chapitre. Depuis maintenant trois ans, au Québec seulement, 2,6 milliards de dollars ont été engagés par les trois niveaux de gouvernement à des degrés divers, qui portent sur des programmes qui s'exécuteront jusqu'en 2006. Mais force nous est de constater aujourd'hui que cet effort a été et demeure insuffisant.
En 1999, nos études indiquaient qu'il fallait investir un milliard de dollars par année pendant 15 ans pour seulement mettre à niveau les infrastructures existantes au Québec. Les efforts consentis jusqu'à présent couvrent à peine 33 p. 100 des besoins et encore, certains de ces investissements n'ont pas été alloués aux infrastructures de base, ce qui nous importe ici, soit celles relatives aux réseaux d'aqueduc, d'égout et de routes urbaines et locales.
Ce sous-investissement au titre des infrastructures constitue un véritable déficit caché qui menace à terme notre productivité et notre niveau de vie. L'investissement est important. Une récente étude du Conference Board portant sur le Québec l'évalue maintenant, non pas à 15 milliards de dollars, comme nous l'avions évalué à l'époque, mais plutôt à 17,9 milliards de dollars.
Á (1155)
Cette étude nous indique aussi que si nous ne faisons rien, ce déficit croîtra de façon exponentielle.
Notre pays et particulièrement nos enfants seront tôt ou tard soumis à un lourd tribut, autant par l'ampleur des investissements à effectuer que par leur incidence négative sur le développement de notre économie et de notre environnement. La solution à ce déficit n'est pas insurmontable. Pourquoi ne pas l'aborder comme nous l'avons si bien fait pour éliminer les déficits budgétaires des provinces et du gouvernement central au Canada? Il faudra de la détermination, certes, mais surtout, nous devrons y allouer les efforts voulus pour finalement en disposer. Comment?
D'abord, en allant au-delà de l'effort financier. Notre coalition estime qu'il nous faudra élargir aux municipalités les discussions entre le gouvernement du Canada et les provinces. Au Québec, par exemple, plus de 30 p. 100 des budgets des divers programmes conjoints liés aux infrastructures ont été alloués à des fins autres que l'entretien et le renouvellement des infrastructures existantes.
Afin que les besoins des municipalités soient pris en compte adéquatement, la coalition propose ce matin au comité de retenir l'idée d'une conférence des trois ordres de gouvernement sur la question du déficit des infrastructures, d'accepter que cette conférence se tienne dès 2004 selon un plan d'action commun qui garantira que les efforts voulus seront consacrés d'abord au renouvellement des infrastructures existantes, ensuite d'inclure l'objectif du financement tripartite pour le renouvellement des infrastructures à l'occasion des négociations sur les nouvelles ententes fiscales qui se tiendront sans doute entre le fédéral et les provinces.
Sur le plan financier, l'effort à consentir sera majeur. Nos études démontrent que la seule remise en état des infrastructures existantes accaparerait la quasi-totalité des sommes disponibles en vertu des programmes fédéraux actuels sur les infrastructures. Mais comme les montants des programmes couvrent également beaucoup d'autres investissements comme ceux des ports de pêche, des équipements d'assainissement des eaux des communautés amérindiennes ou des systèmes de communication à large bande des communautés rurales, les sommes requises pour les fins des infrastructures urbaines et routières sont insuffisantes et devront donc être majorées.
À cet égard, la coalition suggère au comité les aménagements suivants: d'abord, revoir à la hausse les sommes consacrées au Programme d'infrastructures Canada de 150 p. 100, c'est-à-dire 900 millions de dollars par année, dès l'année financière 2004-2005; atténuer l'incidence de l'importance de cette hausse sur les fonds publics en étalant l'allocation de cette hausse sur deux périodes budgétaires à compter de 2004-2005, de manière à ce que la hausse totale allouée à Infrastructure Canada soit disponible dès l'exercice 2005-2006; faire en sorte que les sommes ainsi engagées soient disponibles sur une période de 15 ans.
Je termine, madame la présidente. Merci de votre patience.
Même s'il est important, ce nouvel effort financier demandé au gouvernement ne serait pas effectué sans retour, car il faut tenir compte du rendement sur l'investissement découlant des travaux sur les infrastructures urbaines et routières. Selon les fiscalistes que nous avons consultés ainsi que sur la base des évaluations faites par le vérificateur général du Canada, le gouvernement fédéral peut s'attendre à récupérer près de 92 p. 100 de son investissement de base dans de tels travaux.
Nous croyons qu'il s'agit pour notre pays et pour notre province d'une proposition gagnante. Investir dans nos infrastructures n'est plus aujourd'hui une question de choix. C'est devenu une obligation. L'avenir de notre société et la qualité de vie de nos populations en dépendent. Je vous invite une autre fois à vous pencher sur cette question.
Je vous remercie, madame la présidente.
 (1200)
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup.
De l'Association of Canadian Airport Duty Free Operators, nous accueillons M. Bergeron. Vous avez la parole.
M. André Bergeron (directeur général, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators): Bonjour. Merci de nous avoir invités à comparaître devant le comité.
Je m'appelle André Bergeron. Je suis directeur général de l'Association of Canadian Airport Duty Free Operators.
Je comparais aujourd'hui au nom des détaillants canadiens de marchandises hors taxes des postes de douane frontaliers et des aéroports. Nous avons comparu devant le comité l'année dernière ainsi que l'année précédente, et nous n'avons donc pas l'intention de revenir sur les recommandations que nous avons faites par le passé. Je vais donc me contenter de vous résumer un certain nombre de points importants.
Comme vous le savez, pour la première fois dans l'histoire du Canada, le gouvernement fédéral a décidé de faire payer des impôts aux détaillants canadiens de marchandises hors taxes à compter du mois d'avril 2001. Le moment n'aurait pas pu être plus mal choisi. Bien que le produit visé soit le tabac, l'élément important à considérer est celui-ci: le principe selon lequel les détaillants de marchandises hors taxes ne doivent vendre que des produits en franchise de droits a complètement disparu. D'un trait de plume, ce principe était rayé à tout jamais.
Que s'est-il passé? Les consommateurs ne comprenaient plus et ont cessé de fréquenter nos boutiques. Après l'imposition de cette taxe, les affaires ont commencé à mal aller. Cette taxe a influé sur les entreprises et les emplois dans de nombreuses circonscriptions électorales au Canada.
Peu de temps après l'imposition de cette taxe aux articles en franchise de droits, nos problèmes se sont aggravés encore. Les attentats tragiques du 11 septembre 2001 ont gravement affaibli le secteur du tourisme et les voyages, ce qui a encore influé sur notre chiffre d'affaires. Cette année, nous avons eu droit à la guerre en Iraq, qui a, elle aussi, causé de graves difficultés. Nous nous rappelons tous des séquelles de la guerre du Golfe de 1991. Il nous a fallu plusieurs années pour rattraper ce que nous avions perdu entre-temps, et on ne s'attend pas à ce que la situation soit différente cette fois-ci.
Ensuite nous avons été confrontés à la crise du SRAS, qui a eu un grave impact sur les voyages et le tourisme, et un impact encore plus négatif en raison de la période de l'année où elle a surgi, du fait qu'il y a eu une deuxième phase, et de l'incertitude qu'elle a créée pour les voyageurs. Selon les estimations, les pertes subies par les exploitants des postes frontaliers terrestres et des aéroports en raison du SRAS étaient plus importantes, de l'ordre de 15 à 25 p. 100, que celles qu'ils avaient déjà subies en raison des autres événements.
Et de quelle aide avons-nous bénéficié? Dans son rapport de l'an dernier sur les consultations prébudgétaires de 2002, le comité a même reconnu les difficultés que présente cette taxe. Vous avez ainsi recommandé que le ministère des Finances s'intéresse à la question et donne suite à votre recommandation. Nous étions d'accord avec votre recommandation, et comme vous, nous étions favorables à l'idée de faire en sorte que les marchandises hors taxes continuent d'être vendues en franchise de droits.
Bien que les problèmes causés par cette taxe soient bien évidents, nous nous représentons devant vous, un an plus tard, mais non pas pour demander la charité. En fait, nous ne l'avons jamais fait. Nous vous demandons simplement, une fois de plus, de nous aider à renverser l'impact très négatif sur le secteur des marchandises hors taxes causé par l'introduction de cette taxe.
Voilà donc les remarques que je voulais vous faire aujourd'hui. J'ai été assez bref, mais permettez-moi de conclure en insistant encore sur quelques points critiques.
Cette taxe a été créée pour régler un problème de santé et pour protéger la santé des jeunes, entre autres. L'objectif fixé par le ministre était une réduction de 30 p. 100 en 10 ans. Mais dans notre secteur, cet objectif a été atteint en 12 mois. De plus, les jeunes ne représentent que 3,5 p. 100 des voyageurs internationaux et transfrontaliers. Autre fait intéressant, les ventes des boutiques hors taxes ne représentent que 1,4 p. 100 du marché canadien du tabac.
S'agissant de contrebande, cette taxe a été créée pour nous protéger contre la contrebande. Permettez-moi de vous citer les propos de Brian Willis, directeur principal des Accises, et rattaché à la Division des taxes de vente au sein de la Direction générale de la politique fiscale, en réponse à une question que lui posait le sénateur Banks. M. Willis a répondu que, et je le cite «le secteur canadien des boutiques hors taxes n'a pas été une source de contrebande. Cette industrie est rigoureusement contrôlée.» Donc, le problème de la contrebande ne saurait justifier l'imposition de taxes dans les boutiques hors taxes.
Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de faire cet exposé.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à notre dernier témoin, soit Amelia Shaw, qui représente le National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits.
 (1205)
Mme Amelia Shaw (directrice des affaires publiques, Association canadienne du transport urbain (ACTU), National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits): Merci.
Ma collègue, Donna-Lynn Ahee, va commencer.
La présidente: Vous avez la parole.
Mme Donna-Lynn Ahee (secrétaire-trésorière, Syndicat uni du transport, conseil canadien, National Task Force to Promote Employer-Provided Tax-Exempt Transit Benefits): Madame la présidente, je tiens à vous remercier de nous avons donné l'occasion de comparaître aujourd'hui. Nous demandons au gouvernement fédéral de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu afin de prévoir que les titres de transport fournis par l'employeur soient exonérés d'impôt. Nous désignons cette initiative par le sigle TTEI.
Les avantages que constituent le stationnement fourni par l'employeur et les titres de transport fournis par l'employeur sont tous deux considérés comme imposables aux termes de la Loi fédérale de l'impôt sur le revenu. Toutefois, l'avantage fiscal prévu par la Loi permet à de nombreux employés de bénéficier, sans avoir à payer des impôts, d'un stationnement gratuit. Les sondages indiquent que le stationnement gratuit ou subventionné constitue un avantage courant offert à quelque 80 p. 100 des navetteurs automobiles. Les avantages de transport en commun fourni par l'employeur sont, par contre, pratiquement inexistants au Canada.
La plupart des navetteurs ne comparent que les coûts d'utilisation d'un véhicule—soit l'essence et le stationnement—aux coûts du transport en commun. Le stationnement fourni par l'employeur devient ainsi une puissante incitation à l'utilisation de la voiture. Pour les employeurs, une façon de faire concurrence au stationnement gratuit consiste à offrir des avantages de transport en commun et une exonération d'impôt les inciterait justement à offrir de tels avantages à leurs employés. De plus, le fait d'offrir des avantages sous forme de titres de transport en commun encourage les conducteurs à changer de moyen de transport.
Les États-Unis ont déjà apporté une telle modification à leurs lois. Le gouvernement américain a examiné l'impact de cette exonération d'impôt dans le rapport de son GAO, qui signalait une augmentation du nombre de passagers empruntant les transports en commun de l'ordre de 25 p. 100 parmi des employés bénéficiant d'un avantage de seulement 21 $ par mois. Les résultats du sondage laissent d'ailleurs prévoir des hausses plus importantes du nombre de passagers, advenant l'augmentation du montant de l'avantage.
À raison de 21 $ par mois, cette augmentation du nombre de passagers a eu relativement peu d'impact sur le nombre total de passagers. Mais si les États-Unis ont décidé d'augmenter l'avantage fiscal maximum, c'était surtout pour encourager les entreprises à offrir de tels avantages à leurs employés. En 2001, l'avantage admissible est passé à 100 $ par mois. Dans la région de la baie de San Francisco, ce changement a donné lieu à une hausse de 100 p. 100 des ventes de titres de transport fournis par l'employeur. La participation des employeurs est passée de 3 p. 100 en 1992 à 27 p. 100 en 2001.
Cette initiative continue de jouir d'un vif appui dans toutes les régions du Canada. En 1998, c'était le seul changement à propos duquel la table de concertation sur les questions de transport établie dans le cadre du processus national d'examen du changement climatique avait recommandé que des mesures soient prises immédiatement. En 1999, un sondage mené auprès des entreprises de Vancouver a permis de constater que 75 p. 100 des répondants étaient favorables à l'idée du TTEI. La motion 360, parrainée par Nelson Riis du NPD, a été adoptée par 240 voix contre 25 à la Chambre des communes en 1999. En 2002, cette mesure a été recommandée par le Groupe de travail des affaires urbaines du premier ministre. En 2003, elle a été cautionnée par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie dans son rapport sur la qualité environnementale dans les villes canadiennes.
Elle a l'appui de centaines d'organismes représentant les travailleurs, les personnes âgées, les étudiants, les professionnels de la santé, les entreprises, les municipalités et les écologistes. Elle a également l'appui de plusieurs comités permanents de la Chambre, et du milieu des affaires, y compris la Chambre de commerce de Saskatoon, les Chambres de commerce d'Ottawa et de Toronto, et la Chambre de commerce de London.
Mme Amelia Shaw: Au fil des ans, le ministère des Finances a exprimé diverses préoccupations à cet égard. Par exemple, ce dernier est d'avis qu'une taxe ne constitue pas un outil approprié pour modifier le comportement des citoyens, mais malgré tout, nous avons plusieurs taxes canadiennes qui visent justement cet objectif, telles que la taxe d'accise sur les cigarettes et l'alcool. De plus, nous bénéficions des déductions fiscales qui encouragent les dons de bienfaisance, l'épargne-retraite, et les contributions politiques, alors pourquoi ne pas en prévoir pour les transports en commun?
Une autre préoccupation concerne la possibilité que cette mesure impose un fardeau administratif au gouvernement fédéral. Mais c'est la perception des impôts qui entraîne un fardeau administratif, et non pas les exonérations. Outre un changement législatif mineur, aucun autre effort ne serait nécessaire en permanence. La majeure partie du travail serait effectuée par les compagnies de transport en commun, les municipalités, et le secteur privé.
Le ministère des Finances craint également qu'une telle mesure ne profite pas aux étudiants, aux personnes âgées, aux sans-emploi, et aux personnes qui préfèrent marcher ou prendre leur vélo. Mais les personnes âgées et les étudiants jouissent déjà de certains avantages. Les deux groupes peuvent bénéficier de rabais. D'ailleurs, peut-être êtes-vous au courant du nouveau programme U-Pass adopté par un certain nombre d'universités et collèges au Canada. En vertu de ce programme, les étudiants peuvent obtenir des rabais importants.
La hausse du nombre de passagers du transport donnera lieu à de meilleurs services, et c'est justement ce que nous souhaitons avec l'introduction du TTEI. Cela veut dire une fréquence de service accru et un plus grand nombre d'itinéraires; par conséquent, tous en bénéficieront. Tout effort déployé pour améliorer les transports en commun influera sur les autres modes de transport durables, comme la marche et le cyclisme, puisqu'il en découlera des améliorations au niveau des trottoirs, de l'éclairage, etc. Vous ne savez peut-être pas qu'à mesure que l'utilisation des transports en commun augmente, le nombre de personnes qui font de la marche ou utilisent leur vélo augmente également. Ces deux phénomènes ont tendance à aller de pair.
Une autre préoccupation du ministère concerne la possibilité que cette mesure ne soit pas efficace, puisque ce sont surtout les utilisateurs actuels qui en profiteraient. Le ministère des Finances est d'accord pour reconnaître que le nombre de passagers augmenterait de 25 p. 100, mais n'y voit pas d'avantage environnemental particulier. Ce dernier préfère se concentrer sur les 75 p. 100 qui se servent déjà des transports en commun.
Mesdames et messieurs, rien n'est garanti en ce qui concerne l'utilisation des transports en commun. Au Canada, nous avons un très grand groupe de personnes qui peuvent décider de s'en servir ou non. De plus, les utilisateurs actuels, tels qu'ils sont actuellement définis, peuvent décider de recourir aux services de transport en commun seulement une ou deux fois par semaine. Grâce au TTEI, nous espérons que ces gens-là voudront y recourir trois ou quatre fois par semaine, et peut-être davantage, ce qui permettra encore une fois de réduire les émissions.
Les nouveaux utilisateurs seront sans doute des personnes qui voyagent seules dans leur voiture, ce qui veut dire que l'impact positif sur l'environnement sera significatif. Pour le moment, aucun autre mécanisme n'est disponible qui permettrait d'accroître de 25 p. 100 le nombre d'utilisateurs des services de transport en commun.
On nous dit souvent que le projet de loi C-209, déposé par le Bloc, a d'abord été rejeté par le Comité des finances. C'est vrai. Mais cette mesure est différente de ce que nous proposons avec le titre de transport exonéré d'impôt fourni par l'employeur. Bon nombre d'entre vous vous souviendrez que selon le ministère des Finances, le projet de loi C-209 aurait entraîné des dépenses de 500 millions de dollars. Or le TTEI coûtera beaucoup moins cher.
On nous dit souvent: «Amelia et Donna-Lynn, vous vous adressez à nous pour obtenir aussi des fonds au titre de l'infrastructure.» Nous sommes d'ailleurs parfaitement conscientes du fait que nous nous présentons devant vous pour vous demander des crédits au titre de l'infrastructure. Normalement, nous demandons une injection de fonds allant de 700 millions à 900 millions de dollars. Il ne fait aucun doute que les services de transport en commun ont besoin de cette injection de fonds. Mais là nous parlons d'une mesure très différente. Il s'agit en réalité d'un programme d'incitation qui ne coûtera que 20 millions de dollars.
 (1210)
Mme Donna-Lynn Ahee: En fait, le coût et l'incidence du TTEI peuvent être financés par la Loi elle-même. Si le voeu du comité ou du gouvernement est de faire les choses très progressivement de façon à réduire autant que possible le coût d'une telle initiative, il serait possible de prévoir que la loi canadienne prévoit les mêmes conditions que la première loi américaine. Par exemple, en fixant le plafond de l'avantage fiscal à 21 $ par mois—comme aux États-Unis—le coût pour le fédéral dans la première année serait de seulement 670 000 $, et augmenterait progressivement de manière à atteindre 3,35 millions de dollars dans la dixième année. Le coût pour chaque nouvel utilisateur continuerait d'être de 202 $, en supposant une hausse du nombre d'utilisateurs de 25 à 35 p. 100. Cependant, la participation des employeurs resterait faible, soit 1 p. 100 dans la première année, et 5 p. 100, dans la dixième année.
Nous espérons que vous voudrez tirer les leçons de l'expérience américaine et donc prendre comme modèle les programmes américains en concevant les mesures législatives requises. Autrement dit, il faut éviter de fixer un plafond pour cet avantage et de prévoir des restrictions en matière d'admissibilité. Le fait d'opter pour un tel scénario aurait pour conséquence de faire passer les dépenses fédérales à environ 20 millions de dollars pour la première année, somme qui passerait progressivement à 118 millions de dollars dans la dixième année. Le coût pour chaque nouvel utilisateur resterait faible, soit 264 $ pour le gouvernement fédéral, et quand à la participation des employeurs, elle pourrait être de l'ordre de 10 p. 100 dans la première année, et passer progressivement à 60 p. 100 dans la dixième année.
Mme Amelia Shaw: Il faut se rappeler qu'il ne s'agit pas là de coûts réels, mais plutôt d'un manque à gagner. Les avantages financiers continuent de profiter aux employés et aux employeurs. Ce sera à eux de déterminer comment ils voudraient dépenser cet argent.
La Loi de l'impôt sur le revenu prévoit déjà des mesures d'incitation. Par exemple, le montant qu'on peut investir dans un REER a été augmenté, permettant ainsi à 5 p. 100 des Canadiens de bénéficier de cet avantage fiscal. Lors de la récente annonce sur les mesures relatives au changement climatique, il a été question de donner des incitations pour encourager les citoyens à moderniser leurs maisons pour qu'elles soient plus éco-énergétiques. Nous avons également entendu parler de mesures d'incitation à l'intention des sociétés pétrolières.
En modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu pour autoriser les TTEI, les services de transport en commun auraient à leur disposition un moyen d'encourager les citoyens à recourir aux services de transport en commun et d'inciter les entreprises canadiennes à y participer. Pour le gouvernement fédéral, le TTEI présente l'occasion rêvée d'orienter les politiques gouvernementales au niveau local. Le TTEI est l'un des rares instruments financiers permettant de soutenir les efforts des employeurs pour modifier les habitudes de transport de leurs employés. Le moment est venu d'agir.
Merci beaucoup.
La présidente: Merci à vous tous.
Je vais donc ouvrir la période des questions; chaque intervenant aura six minutes. Le premier intervenant sera M. Casson, qui sera suivi du député du Bloc, M. Paquette.
M. Rick Casson: Merci, madame la présidente. Merci pour votre présence et pour vos observations.
Je voudrais commencer par M. le maire Vaillancourt et lui parler un peu de la composante municipale de l'infrastructure et des responsabilités des municipalités. Moi-même j'ai travaillé dans ce secteur pendant quelques années avant de venir ici. Nous avons d'abord essayé d'établir des réserves de capital—c'était une petite ville, et non pas une grande ville—pour chaque catégorie d'activité budgétaire, afin que nous ayons les crédits nécessaires au moment d'avoir à porter certaines améliorations à notre infrastructure. Certaines d'entre elles étaient plus faciles à effectuer que d'autres. Bien sûr, les stations de traitement d'eau et les réseaux d'assainissement sont extrêmement coûteux.
Nous avons également essayé de recouvrer nos dépenses en capital et dépenses d'exploitation, notamment au titre du système de traitement des eaux et du réseau d'assainissement—ce n'est pas possible pour les travaux de voirie—par le biais de frais d'utilisation, pour nous permettre de supporter nos dépenses d'exploitation et de mettre de côté un peu d'argent pour l'expansion future et l'entretien des systèmes. J'aimerais savoir ce que vous pensez de ça, et de la possibilité que les municipalités prévoient ce genre de latitude au moment d'établir leurs budgets.
Quand nous avons travaillé à l'élaboration d'accords intéressant les trois paliers de gouvernement, en vertu desquels le gouvernement fédéral, les provinces et les municipalités devaient payer chacun leur part, des fois nous avions du mal à même trouver un peu d'argent pour financer ces grands projets, même lorsque les coûts étaient partagés à trois ou à deux. Des fois nous avions du mal à trouver même la contribution qui nous aurait permis de participer. Peut-être pourriez-vous commenter cette problématique.
Pour ce qui est du déficit caché, je suis d'accord pour dire qu'une somme considérable sera requise pour tout mettre en état, notamment les bâtiments et institutions publics. J'aimerais vous entendre sur la question des systèmes de traitement d'eau et d'égout. Est-il possible à votre avis de mettre cela à part et d'instituer un système de frais d'utilisation à ce moment-là?
 (1215)
M. Gilles Vaillancourt: Merci beaucoup pour cette question. Si cela ne vous dérange pas, je vais répondre en français. Pour moi, c'est beaucoup plus facile.
[Français]
Devrait-on s'assurer que tous les Canadiens paient leur consommation d'eau, que ce soit par des compteurs ou d'une autre façon? C'est une question très intéressante, mais il y a une réalité. Prenons l'exemple de la ville que je dirige. Pendant une trentaine d'années, on n'a pas installé de compteurs d'eau. Depuis 1988, il est obligatoire que toute nouvelle construction soit dotée d'un compteur d'eau, bien que tout notre secteur commercial et industriel soit déjà tarifé sur la base de la consommation.
L'installation de compteurs coûterait 22 millions de dollars, selon une estimation qui date déjà de quatre ans et qui est donc relativement dépassée. Comment pourrais-je expliquer à des citoyens qu'on doit dépenser 22 millions de dollars pour créer une meilleure conscience environnementale et une meilleure équité environnementale entre les citoyens, alors que 45 p. 100 de l'eau que produit la ville de Montréal ne se rend jamais au robinet du citoyen? L'eau est perdue dans des fuites dans des conduites qui ont besoin d'être remplacées.
Donc, la tarification de l'eau comme mesure d'équité entre citoyens sur le plan environnemental, pour créer une meilleure conscience environnementale, est très intéressante, mais il y a urgence en amont de cela. Nous devons, à l'heure actuelle, nous occuper d'abord de mettre nos réseaux publics dans un état acceptable et, parallèlement, cheminer avec les citoyens et les citoyennes du Canada pour leur apprendre un meilleur respect de l'eau. Un peuple qui a toujours vécu avec une grande disponibilité de l'eau n'a peut-être pas appris autant que ceux qui en ont été privés à la mieux respecter et surtout à la mieux conserver.
Pour répondre à la première partie de votre question, je dirai que c'est intéressant, mais que cela demanderait des investissements très importants que nous ne sommes pas en mesure de faire actuellement. Si vous me donniez demain matin le choix d'investir de l'argent dans des compteurs d'eau ou de prendre cet argent pour réparer les conduites qui fuient, je vous dirais que la première priorité est de réparer les conduites qui fuient, autant celles de l'aqueduc que celles de l'égout, pour ensuite passer à des politiques tarifaires.
Il n'est pas très surprenant que le Québec et le Canada n'aient pas adopté des politiques de tarification de l'eau à l'usage, parce que le Canada a été l'un des derniers pays occidentaux à se doter d'un programme d'épuration de l'eau. Tant qu'on n'épurait pas l'eau, les coûts associés au traitement final de l'eau lors de son retour dans le cours d'eau n'existaient pas. C'est une politique récente. Je vous dirais qu'il y a un travail énorme à faire pour faire accepter à la population que la première priorité doit être de tarifer l'eau et de la contrôler auprès des citoyens, alors que tous les citoyens savent que nous perdons de l'eau partout dans un réseau qui est dans un état extrêmement vétuste et qui est tout à fait désuet.
[Traduction]
M. Rick Casson: Me reste-t-il encore un peu de temps?
 (1220)
La présidente: Oui, il vous reste quelques secondes, si vous voulez faire d'autres commentaires.
M. Rick Casson: Je devrais peut-être poser une question à M. Cannon.
Votre première recommandation consistait à créer un programme pour investir dans les grands projets de transport en commun. À votre avis, quelle somme faudra-t-il prévoir chaque année pour financer ce genre de programme?
La présidente: Monsieur Cannon.
M. Lawrence Cannon: Avec votre permission, je vais demander à M. Gratton de vous répondre.
[Français]
M. Georges O. Gratton (directeur, Société de transport de l'Outaouais): Lorsqu'on parle de 1,5 ¢ sur l'essence, cela équivaut à six millions de dollars, c'est-à-dire 12 p. 100 de notre budget. Donc, un projet d'investissement fédéral qui nous permettrait d'avoir des retombées de cet ordre nous donnerait la marge de manoeuvre nécessaire pour construire un grand nombre d'infrastructures dans nos municipalités, et particulièrement chez nous.
[Traduction]
M. Rick Casson: Merci.
La présidente: Chers collègues, vous entendez une sonnerie de 30 minutes. Je vais donc accepter trois autres séries de questions d'une durée maximale de six minutes, et ainsi nous pourrons conclure nos discussions avec ce groupe avant d'aller voter.
[Français]
Monsieur Paquette, c'est maintenant votre tour.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci, madame la présidente.
D'abord, monsieur Vaillancourt, je veux vous dire combien nous sommes impressionnés par la délégation qui vous accompagne et l'importance de la Coalition pour le renouvellement des infrastructures du Québec. Il est quand même assez remarquable de voir le président du Conseil du patronat et un représentant de la FTQ assis ensemble. Je peux vous dire que je n'ai pas vu ça souvent. Donc, cela veut dire qu'on a devant nous une bonne partie de la société québécoise qui fait une proposition extrêmement importante.
Je sais que vous aviez été extrêmement déçus de ce qu'on avait retrouvé dans le budget l'année dernière. On s'en était d'ailleurs parlé. Je rappelle que le gouvernement avait annoncé, à ce moment-là, un milliard de dollars, ce qui semblait correspondre à vos revendications, mais sur 10 ans. Pour cette année,100 millions de dollars ont été débloqués et pour les deux prochaines années, on parle de 250 millions de dollars. Donc, on est loin du compte.
Je veux bien comprendre vos recommandations 1 et 2. Compte tenu du budget qui a été annoncé en février dernier, est-ce une façon nouvelle de les présenter? Vous nous parlez maintenant de 900 millions de dollars par année sur 15 ans; c'est la deuxième recommandation. Votre revendication traditionnelle était de un milliard de dollars sur 15 ans. Selon ce que je comprends, vous escomptez recevoir les 100 millions de dollars par année qui ont déjà été annoncés et vous demandez au gouvernement d'ajouter 900 millions de dollars pour arriver à un milliard de dollars sur 15 ans.
M. Gilles Vaillancourt: C'est cela.
M. Pierre Paquette: Comment cela devrait-il s'étaler dans le temps, selon vous, en tenant compte de l'élément que vous avez soulevé et qui me semble extrêmement important, c'est-à-dire la question de la planification? Parlez-vous de montants qui devraient être accordés année par année ou d'un engagement à dépenser l'équivalent d'un milliard de dollars par année sur 15 ans pour éviter les engorgements et aussi pour profiter de ces programmes pour investir un peu plus en période de ralentissement économique?
Donc, je voulais avoir vos commentaires et m'assurer que votre revendication était la même que l'année dernière.
M. Gilles Vaillancourt: C'est la même revendication que l'année passée, mais exprimée autrement. Nous avons besoin d'une somme d'argent qui viendrait assez rapidement. Il nous faudrait une somme assez importante au départ pour nous assurer d'arrêter la détérioration des réseaux. Si nous n'investissons pas suffisamment, si nous attendons tout simplement qu'il y ait une déprime dans l'économie pour nous en servir comme élément de relance--bien sûr, c'est bon et cela peut aussi servir à cela--, si, au départ, si nous n'avons pas la garantie que les fonds entreront et que nous ne sommes pas capables de faire une programmation, nous serons victimes de deux choses. Tout d'abord, pendant qu'on attendra, la difficulté s'accentuera et le déficit caché se creusera à un rythme de 10 à 12 p. 100, alors qu'actuellement, le gouvernement canadien se finance à un taux d'environ 3 p. 100. Donc, on accepterait que le déficit caché se creuse trois fois plus vite au lieu de redresser la situation actuelle.
D'autre part, si nous condensons trop les travaux au cours de certaines périodes, nous allons aussi créer une inflation dans ce genre de travaux qui sera extrêmement difficile à contrôler. Je vous répète que pour être capables de travailler efficacement, les municipalités doivent avoir la garantie d'un programme à caractère relativement permanent, sinon tout le monde attend le programme, tout le monde se lance en même temps dans le programme, nous engorgeons le système, cela fait augmenter les coûts et, quand le programme est terminé, ce qui est le cas de tous les programmes actuels au Québec, il n'y a plus rien de disponible pour nous. La municipalité avait fait accepter des projets de modernisation des usines de production d'eau potable d'une valeur de 12 millions de dollars, mais j'ai reçu une belle lettre du gouvernement me disant que nos projets étaient retenus mais qu'il n'y a pas de fonds disponibles, et que nous serons donc traités en priorité quand des fonds deviendront disponibles. Le problème n'est pas de savoir s'il y a actuellement une problématique à régler et s'il y a des solutions. Le problème est tout simplement qu'il n'y a pas de solution financière valable pour les municipalités.
Les municipalités doivent affronter une autre difficulté. Je suis très heureux que le gouvernement du Canada ait réservé des programmes d'infrastructures routières et frontalières pour les premières nations, mais nous n'avions pas analysé la problématique des premières nations. Donc, les chiffres que nous vous donnons ne comprennent pas ces chiffres. Au Québec, le volet des infrastructures municipales rurales va régler quelques petits problèmes, mais dans cela, il y a une provision non seulement pour la réfection des infrastructures existantes, mais aussi pour la création de nouvelles infrastructures. Quand on enlève tout l'argent qui a été réservé à d'autres fins, il est évident qu'il nous manque de l'argent.
Ce déficit caché--il y a des tuyaux qui coulent partout et vous ne les voyez pas--n'apparaît pas au bilan du gouvernement, non plus qu'à celui de la province et à celui de la municipalité, mais il est énorme et il hypothèque quotidiennement la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes, qu'ils soient au Québec ou ailleurs sur le territoire.
 (1225)
M. Pierre Paquette: Merci beaucoup. Soyez assuré qu'on va insister pour que le Comité des finances fasse cette recommandation dans son rapport.
J'en ai déjà parlé, mais je voudrais en rediscuter. Monsieur Cannon et madame Shaw, vous faites une proposition sur laquelle je suis évidemment d'accord lorsque vous parlez de consentir aux employés qui utilisent le transport en commun les avantages qui sont consentis aux conducteurs de voitures. Par contre, cette mesure me semble inéquitable pour ceux qui paient le transport en commun, mais qui ne sont pas des employés.
Ne vaudrait-il pas mieux s'assurer que les avantages consentis aux conducteurs soient imposés plutôt que d'élargir la non-imposition? Prenons l'exemple des personnes à la retraite ou des travailleurs autonomes, qui sont de plus en plus nombreux. Ces gens ont à se déplacer et ne pourraient pas bénéficier de cette mesure. Donc, par souci d'équité, est-ce qu'on ne devrait pas plutôt proposer au gouvernement de tenir compte des avantages, comme il l'a fait à plusieurs égards au cours des dernières années? Ce serait plus équitable, me semble-t-il. Je vous pose la question.
D'ailleurs, le Bloc québécois avait proposé quelque chose de plus large pour s'assurer qu'il y ait de l'équité pour tous les citoyens.
M. Lawrence Cannon: Monsieur le député, je me rappelle avoir eu l'occasion de discuter longuement de cela avec Mme Bujold, votre collègue. Bien sûr, on l'avait assurée de notre appui à cette démarche.
Il faut comprendre aussi qu'il y a eu une autre initiative, qui était celle de Mme Marois à l'occasion du dernier budget. Nous nous étions réjouis, du côté québécois, puisque ce geste permettait d'augmenter l'offre dans une certaine mesure. Toutes les initiatives qui étaient reliées au rapport des mandataires, M. Bernard, M. Angers et M. Grégoire, avaient obtenu l'aval des membres de l'Association du transport urbain du Québec.
Je vous dirai qu'à l'étape où nous sommes rendus, toutes les mesures visant à augmenter l'offre et à nous appuyer dans les demandes économiques du dossier sont les bienvenues. Il y a quelques instants, j'écoutais Mme Shaw et sa collègue parler de ce qui se déroule aux États-Unis. Bien sûr, comme nous faisons partie de cette association, nous sommes très solidaires des propositions qu'elle met de l'avant.
Aujourd'hui, c'est un véritable cri du coeur qu'on entend. On lance un appel. En tant qu'élu municipal, je suis extrêmement sensible aux représentations de M. Vaillancourt. En tant que responsable de la Société de transport à la Ville de Gatineau, je constate exactement la même chose. On est vraiment dans un cul-de-sac et on a besoin d'un coup de main quelque part.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup.
Madame Shaw, vouliez-vous intervenir? Après je donnerai la parole à M. Cullen.
Mme Amelia Shaw: Oui, absolument.
En ce qui nous concerne, c'est une façon de mettre un pied dans la porte. Nous serions très contentes si le gouvernement devait décider d'appliquer cette mesure à davantage de citoyens, pour qu'ils puissent déduire cela de leurs impôts, mais pour le moment, nous parlons d'une approche très ciblé. Il faut que les entreprises soient nos partenaires. Il faut qu'on les convainque d'y participer, pour que cette initiative puisse se réaliser. Pour nous, ça c'est le premier pas.
J'espère que cela vous donnera des idées pour ce qui est des mesures à prendre.
[Français]
M. Roy Cullen: Merci beaucoup, madame la présidente. Je remercie aussi tous les témoins de leurs présentations.
Monsieur Vaillancourt, pour atteindre les objectifs que vous avez si bien décrits, comment pourrions-nous encourager le secteur privé à participer au renouvellement des infrastructures du Québec et du Canada? Quelles sont les possibilités et est-ce qu'il y a des limites à l'engagement du secteur privé dans les programmes d'infrastructures? Pouvez-vous décrire ces limites et ces possibilités?
 (1230)
M. Gilles Vaillancourt: Actuellement, le secteur privé est directement interpellé, parce que presque partout au Québec, les travaux de réfection d'infrastructures sont confiés au secteur par voie d'appel d'offres.
Il y a d'autres hypothèses pour les milieux plus petits, où des problématiques un peu différentes peuvent se développer, c'est-à-dire la prise en charge, par le privé, de la remise en état d'une usine et de son financement. Évidemment, ce financement pourrait être assumé par le privé et cela pourrait être transféré à la municipalité par voie d'entente.
Ces choses-là sont toutes sur la table actuellement. Le secteur privé y participe à différentes étapes. En général, le coût de financement des municipalités au Canada est intéressant. J'ai fait une émission d'obligations hier, et le loyer de l'argent sur cinq ans est d'environ 4 p. 100 par année. Je ne pense pas que le privé serait capable d'offrir mieux au monde municipal à l'heure actuelle.
Certaines petites collectivités qui n'ont pas l'habitude d'emprunter régulièrement et qui n'ont pas de cote de crédit peuvent avoir des difficultés de financement. Mais si vous regardez l'ensemble des besoins, vous verrez que c'est extrêmement marginal. Le privé est très impliqué dans la reconstruction de nos égouts, de nos aqueducs et de nos usines de production d'eau potable, et dans les corrections que nous apportons à nos pavages. Dans certains cas, les municipalités en sont rendues à demander des soumissions, non seulement pour la réfection, mais également pour l'entretien et la maintenance.
Donc, l'apport du secteur privé est une chose qui existe actuellement et qui se développe de plus en plus. Je dirais que cela évolue dans la bonne direction.
[Traduction]
M. Roy Cullen: Merci.
J'ai une autre petite question et j'invite l'un ou l'autre des témoins à y répondre. À mon avis, il faut que les citoyens se servent davantage des transports en commun. Si le gouvernement devait choisir entre la possibilité de retenir des titres de transport exonérés d'impôt ou de faire davantage d'investissements directs dans les transports en commun, quel choix lui recommanderiez-vous?
Deuxièmement, je me demande si nous devrions envisager d'établir des politiques fiscales ou financières qui décourageraient l'expansion tentaculaire de nos villes parce qu'il me semble, surtout à Toronto, qu'à cause de cette expansion constante, nous avons besoin d'une infrastructure de plus en plus importante—des services de transport en commun, ou encore plus de voitures. Il me semble donc que nous devrions peut-être élaborer des politiques financières et fiscales qui auront pour résultat de décourager ce genre d'expansion tentaculaire. Je me demandais si vous auriez des propositions à nous faire à ce sujet.
Mme Amelia Shaw: Je voudrais répondre à votre question concernant le choix à faire entre les titres de transport exonérés d'impôt et l'investissement dans l'infrastructure. À mon avis, il ne fait aucun doute qu'une bonne infrastructure est requise pour les transports en commun, et nous en avons parlé. Selon les estimations de l'Association canadienne du transport urbain, il faudrait investir entre 700 millions et 900 millions de dollars chaque année au Canada. Pour ce qui est du titre de transport exonéré d'impôt fourni par l'employeur, il serait possible de commencer de façon modeste. Vous auriez tout à fait la possibilité de déterminer le coût qui vous conviendrait, si bien que vous pourriez prévoir au départ un manque à gagner de 1 million de dollars, ou peut-être moins—tout cela pourrait être prévu dans la loi.
Ce que j'essaie de vous dire, c'est que vous pourriez faire les deux en réalité, mais il faudrait commencer dès maintenant à offrir des incitations aux citoyens, parce que cela pourrait prendre un certain temps pour développer cette initiative.
Si vous me permettez de faire un peu marche arrière, vous avez soulevé la question de la participation du secteur privé dans l'avant-dernière question que vous avez posée, et bien sûr, aux États-Unis, c'est le secteur privé qui est chargé de cette initiative. C'est donc l'occasion rêvée de créer un partenariat entre les secteurs public et privé pour faire augmenter le nombre d'utilisateur des transports en commun.
M. Roy Cullen: Y a-t-il d'autres personnes qui voudraient intervenir?
Très bien. Merci.
La présidente: Je voudrais soulever un dernier point en demandant à Mme Volante de répondre. Si vous pouviez choisir, sur quelle période souhaiteriez-vous que l'IPCA se déroule?
 (1235)
Mme Maura Volante: Eh bien, je pense qu'il convient d'examiner quels seraient les meilleurs moyens d'assurer le financement de ces services en permanence. Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse d'une initiative visant particulièrement les sans-abri; il pourrait s'agir de la prestation de services plus traditionnels—par Santé Canada ou d'autres mécanismes. J'aimerais qu'on puisse répondre à ces besoins à long terme, plutôt que de prendre des initiatives de courte durée pour essayer de régler le problème des sans-abri, sans pour autant reconnaître que même lorsque nous aurons réussi à trouver un logement pour tous les sans-abri, ils auront encore besoin de certains de ces services.
L'autre élément essentiel serait une stratégie du logement permanente qui prévoirait des sommes minimales pour la construction de logements à prix abordable.
La présidente: Merci.
Au nom de mes collègues qui ont dû partir tôt—je crois qu'ils devaient assister à d'autres réunions et ils m'ont donc demandé de présenter leurs excuses—je tiens à vous remercier de nous avoir accordé un peu plus de temps, pour qu'on puisse conclure la réunion. Je regrette qu'on ait dû interrompre la réunion pour aller voter, mais c'est ça la procédure, et le Règlement de la Chambre le permet.
Donc, au nom de tous mes collègues, merci.
La séance est levée jusqu'à 15 h 30 cet après-midi. Vous avez environ six minutes pour vous rendre à la Chambre afin de voter.