OGGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 20 mars 2003
¿ | 0905 |
Le vice-président (M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.)) |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.) |
¿ | 0910 |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne) |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.) |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
¿ | 0915 |
Mme Judy Sgro |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.) |
Mme Judy Sgro |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Robert Lanctôt |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Forseth |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Szabo |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Szabo |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
¿ | 0920 |
Mme Sheila Fraser (vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général du Canada) |
¿ | 0925 |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Forseth |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Forseth |
¿ | 0930 |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Forseth |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Forseth |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Forseth |
¿ | 0935 |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Forseth |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Robert Lanctôt |
Mme Sheila Fraser |
¿ | 0940 |
M. Robert Lanctôt |
Mme Sheila Fraser |
M. Robert Lanctôt |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Robert Lanctôt |
Mme Sheila Fraser |
¿ | 0945 |
M. Robert Lanctôt |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Szabo |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Szabo |
Mme Sheila Fraser |
M. Paul Szabo |
¿ | 0950 |
Mme Sheila Fraser |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Robert Lanctôt |
¿ | 0955 |
Mme Sheila Fraser |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Steve Mahoney |
Mme Sheila Fraser |
M. Steve Mahoney |
Mme Sheila Fraser |
M. Steve Mahoney |
À | 1000 |
Mme Sheila Fraser |
M. Steve Mahoney |
Mme Sheila Fraser |
À | 1005 |
M. Steve Mahoney |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
M. Tony Tirabassi |
Mme Sheila Fraser |
M. Tony Tirabassi |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Sheila Fraser |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Sheila Fraser |
À | 1010 |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Sheila Fraser |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Le vice-président (M. Paul Forseth) |
Mme Dyane Adam (commissaire aux langues officielles, Commissariat aux langues officielles) |
À | 1025 |
À | 1030 |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Forseth |
À | 1035 |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Forseth |
Mme Dyane Adam |
À | 1040 |
M. Paul Forseth |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Forseth |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Robert Lanctôt |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
À | 1045 |
Mme Dyane Adam |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
À | 1050 |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
M. Paul Szabo |
Mme Dyane Adam |
À | 1055 |
M. Paul Szabo |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
Mme Judy Sgro |
Mme Dyane Adam |
Mme Judy Sgro |
Mme Dyane Adam |
Mme Judy Sgro |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
Á | 1100 |
M. Robert Lanctôt |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
Mme Dyane Adam |
Á | 1105 |
M. Gilbert Langelier (directeur, enquêtes spéciales, Direction générale des enquêtes, Commissariat aux langues officielles) |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
M. Gilbert Langelier |
M. Robert Lanctôt |
M. Gilbert Langelier |
M. Robert Lanctôt |
M. Gilbert Langelier |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
Mme Dyane Adam |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.) |
Á | 1110 |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
Mme Raymonde Folco |
M. Robert Lanctôt |
Mme Dyane Adam |
M. Robert Lanctôt |
Le vice-président (M. Tony Valeri) |
CANADA
Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 20 mars 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
L'ordre du jour prévoit l'étude du projet de loi C-25, Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois.
Nous accueillons ce matin des témoins du Bureau du vérificateur général du Canada, nommément Sheila Fraser, Maria Barrados et Kathryn Elliott. Bienvenue mesdames.
Avant de commencer, M. Lanctôt voudrait intervenir.
[Français]
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Je fais un rappel au Règlement, monsieur le président. J'aimerais qu'on procède plus rapidement. Hier, j'ai fait part de ce désir à la greffière, et j'aimerais que le comité ordonne à cette dernière de communiquer avec les témoins à venir.
J'aimerais éviter que d'autres témoins viennent nous dire que le projet de loi est parfait et qu'ils n'ont rien à y ajouter; c'est une perte de temps pour le comité. Je ne veux pas perdre la moitié de mon temps, d'autant plus qu'hier, si mes souvenirs sont exacts, on a eu quatre comités, ce qui, en soi, ne me dérange pas, mais je crois qu'il serait plus utile d'entendre les gens qui, même s'ils considèrent la loi bonne, aimeraient qu'elle soit améliorée et ont des amendements à proposer. Le déroulement en sera d'autant accéléré.
J'aimerais, monsieur le président, qu'on demande unanimement à la greffière de communiquer avec chacun des témoins qui restent et de dire à ceux qui n'ont rien à ajouter ou à modifier au projet de loi qu'on a déjà entendu plusieurs témoignages en ce sens.
À mon avis, on perd du temps, et cela a particulièrement été le cas hier. Je suis même parti, à la fin, parce que j'en avais plus qu'assez.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Monsieur Tirabassi.
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Je voudrais m'excuser, car comme j'ai dû me rendre dans mon comté hier, je n'ai pas été en mesure d'entendre les témoins. Si je ne m'abuse, le comité s'est entendu sur une liste de témoins représentant différents horizons. Comme le projet de loi porte sur la fonction publique, on va entendre le point de vue patronal et syndical. Je suis sûr que le parti de mon collègue a aussi remis une liste de témoins. Nous en sommes encore aux premières étapes de l'audition des témoins. En quoi le fait d'entendre dire que le but et l'essence même du projet de loi sont bons pose-t-il problème? L'autre jour, nous avons entendu des témoins qui ont critiqué une partie de ce projet de loi. Je me demande simplement si les mêmes observations seraient justifiées si nous entendions uniquement des témoins critiquer le projet de loi l'un après l'autre.
Nous sommes encore en début de processus, et c'est pourquoi nous devons poursuivre nos délibérations, et si cela devait continuer de poser problème, nous nous y arrêterons. Trier les témoins sur le volet et déterminer ce que nous aimerions qu'ils nous disent ou ce que nous aimerions qu'ils ne disent pas va, à mon avis, tout à fait à l'encontre de ce que nous essayons d'accomplir ici.
¿ (0910)
Le vice-président (M. Tony Valeri): Monsieur Forseth, puis monsieur Szabo.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Merci.
Je fais ce que je fais depuis dix ans maintenant, et à l'instar de mes collègues autour de la table, je suis déjà passé par ce processus auparavant. Je dois avouer que je partage quelque peu l'avis de M. Lanctôt concernant la meilleure façon d'utiliser le temps du comité et le type de témoignage que nous entendons. Cela dit, je dois aussi dire que je suis d'accord avec M. Tirabassi en ce sens que nous ne pouvons déterminer à l'avance la nature des témoignages. Nous avons tenté de répondre aux témoins qui ont exprimé une inquiétude directe et qui voulaient témoigner à cet effet.
En revanche, à la lumière du témoignage que nous avons entendu hier, j'ai effectivement dit à notre greffière que peut-être nous devrions envoyer une nouvelle convocation aux témoins leur demandant de concentrer davantage leurs observations d'une manière qu'ils soient plus utiles pour nos délibérations. Un des témoins a fait un exposé d'une manière qui a été très utile, car il m'avait rencontré et il m'avait demandé ce qui serait productif pour le comité. Plus précisément, ce à quoi je veux en venir, c'est que les témoins devraient faire des observations générales très brèves, ensuite ils pourraient aborder un article précis, et s'ils ont des critiques, ils doivent s'efforcer de suggérer un amendement à l'article. Il y a une grande différence entre formuler une critique générale du projet de loi et se plaindre de ce que le projet de loi fait ceci ou ne fait pas cela et le fait de proposer une démarche intellectuelle visant à proposer des modifications. Si l'on soulève un problème, les témoins qui sont experts en la matière devraient aussi fournir quelques solutions. Ainsi, le comité peut tenir compte des différents amendements suggérés, voire les intégrer au projet de loi.
Fournir des suggestions précises sur la manière d'amender le projet de loi afin de l'améliorer, voilà ce sur quoi les témoins devraient mettre l'accent, et peut-être pourrions-nous envoyer une autre note aux prochains témoins les avisant du genre de témoignages que nous recherchons.
Le vice-président (M. Tony Valeri): D'accord.
Monsieur Szabo, puis madame Sgro.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Je partage l'avis de M. Lanctôt et les sentiments exprimés par M. Forseth. Cela a beaucoup à voir avec la productivité, et j'ai espoir que nous pourrons, lorsque nous communiquerons avec les témoins éventuels, être plus judicieux dans nos instructions. Je ne pense pas qu'il nous soit utile de nous asseoir ici et de les regarder lire, dans la moitié des cas, des déclarations toutes faites. Nous devrions leur demander de mettre l'accent sur les enjeux qu'ils estiment être les plus importants et dont ils voudraient faire part au comité dans l'optique d'apporter des changements éventuels. C'est cela le but de nos délibérations, et ils devraient le savoir. Les témoins peuvent toujours faire ce qu'ils veulent, mais je pense que nous avons l'occasion dorénavant de déterminer de les inviter à nouveau ou non, selon qu'ils pourront être constructifs ou contribuer à nos délibérations. Je pense que nous pourrions poursuivre nos travaux, et je pense que la balle se trouve toujours dans notre camp et que c'est à nous d'encourager les témoins à nous aider à faire un meilleur travail.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Très bien.
Madame Sgro.
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Combien de témoins a-t-on prévus dans le cadre de l'étude de ce projet?
Le vice-président (M. Tony Valeri): Il y en a 12, plus quatre qui n'ont pas encore été approuvés par le comité. D'ailleurs, nous devons trancher là-dessus.
¿ (0915)
Mme Judy Sgro: Nous avons tous des horaires très chargés, et nous voulons que ce projet de loi puisse avancer pour que nous puissions entamer l'étude article par article. Je pense que M. Lanctôt a dit quelque chose d'important. C'est bien d'entendre des gens nous dire du positif sur le projet de loi, et c'est très encourageant, mais dans le même temps, je pense que nous devons garder à l'esprit notre objectif et demander aux témoins ce qui leur pose problème et comment nous pourrions améliorer le projet de loi. De cette manière, nous pouvons passer au témoin suivant et faire en sorte que nous progressions pour entamer l'étude article par article.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Monsieur Mahoney.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.):
J'aimerais vous rappeler la déclaration de la vérificatrice générale de ce matin, notamment le point 13:
Il est sain de débattre de ce qui doit être inclus ou non dans le cadre législatif. Cependant, dans l'étude de ce projet de loi, il faut se poser une question fondamentale: dans quelle mesure les modifications proposées améliorent-elles la gestion des ressources humaines? |
Pourquoi ne pas simplement envoyer cette note?
Mme Judy Sgro: Exactement.
Le vice-président (M. Tony Valeri): J'espérais que nous pourrions utiliser le témoignage de la vérificatrice générale de ce matin comme exemple.
J'ai entendu le point de vue des membres du comité, et je remercie M. Lanctôt d'avoir soulevé la question. Il est clair que les membres des deux côtés de la table ont des réserves valables. Que les observations des témoins soient positives ou négatives, l'important est qu'elles portent sur le projet de loi. Si le projet de loi comporte un aspect positif, qu'on le souligne dans le projet de loi, qu'on explique pourquoi c'est positif, et pourquoi c'est nécessaire dans le projet de loi. Sinon, qu'on explique le problème et que l'on propose une manière de lever une ambiguïté ou d'améliorer la rédaction comme on le souhaiterait. Cela vous convient-il?
[Français]
M. Robert Lanctôt: Je remercie mes collègues. En effet, un comité se doit d'être productif. Je n'ai rien contre le fait d'entendre des témoins dire que le projet de loi est bon. Toutefois, je considère que trois, quatre ou cinq personnes l'ayant dit déjà, c'est suffisant. Il ne s'agit pas de faire du filtrage, mais plutôt de vérifier si les témoins éventuels veulent faire valoir des points qui pourraient améliorer les choses.
Il s'agit simplement d'avancer plus rapidement. Il reste 16 témoins, et ce qu'on veut, c'est que parmi ces derniers, il y en ait 12 qui désirent modifier ou améliorer certains points. Il n'est pas question de faire du filtrage. On a entendu ceux qui venaient nous dire que le projet était très bien et qu'il était basé sur un bon principe. On le sait, maintenant.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Monsieur Lanctôt, je pense que vous nous avez convaincus, et la greffière a entendu ce que vous aviez à dire. Elle s'efforcera de communiquer avec les témoins qui comparaîtront devant le comité pour faire en sorte que leurs témoignages soient plus précis et qu'ils contribuent aux délibérations du comité, plutôt que de faire des observations générales sur ce qui leur plaît ou déplaît dans le projet de loi. Cela vous va-t-il?
M. Paul Forseth: Oui, c'est ce que j'ai suggéré, c'est-à-dire que la greffière rédige une lettre. À la lumière des commentaires faits aujourd'hui, j'aimerais avoir l'occasion d'y jeter un coup d'oeil. Puis on se met en rapport avec ces témoins pour accélérer le processus.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Très bien.
Pendant que nous parlons de témoins, j'aimerais savoir si le comité serait d'accord pour ajouter ces quatre témoins à la liste : l'External Advisory Group on Embracing Change, l'Association canadienne de la gestion du personnel des services publics, le Professional Employees Network et l'École nationale d'administration publique à Gatineau. Hier, nous avons discuté de la possibilité de demander à la Commission de la fonction publique de comparaître de nouveau devant nous. Êtes-vous tous d'accord pour que l'on envoie une invitation à ces groupes?
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Monsieur le président, je ne connais pas très bien ces groupes et j'ignore s'ils voudraient comparaître. Je ne veux pas rejeter leur demande, mais nous pourrions au moins les regrouper autour d'une table ronde pour que nous puissions adresser nos questions à ceux dont l'intervention porte davantage sur le sujet. En ce qui concerne la CFP, je pense que nous avons indiqué que nous pourrions les inviter de nouveau, en tout cas moi je le souhaiterais.
Le vice-président (M. Tony Valeri): On l'invite toute seule?
M. Paul Szabo: Oui.
Le vice-président (M. Tony Valeri): D'accord. C'est convenu alors.
Madame Fraser, madame Barrados et madame Elliott, bienvenue. Madame Fraser, vous avez probablement des remarques liminaires à faire qui comporteront beaucoup de détails et de précisions, j'en suis sûr, surtout que vous venez d'entendre les membres du comité exprimer le souhait que les témoins concentrent leurs interventions sur des aspects précis du projet de loi.
¿ (0920)
Mme Sheila Fraser (vérificatrice générale du Canada, Bureau du vérificateur général du Canada): Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître devant le comité pour discuter du projet de loi C-25. Compte tenu de la discussion que vous venez tout juste d'avoir, je fais une déclaration très brève, après quoi le comité pourra discuter avec nous du rôle de la Commission de la fonction publique, notamment son rôle de vérificateur tel que prévu par la loi. Nous pourrions mettre l'accent sur cet aspect en particulier.
Nous avons déclaré que la qualité du gouvernement repose sur le rendement des fonctionnaires. Le mode de recrutement, la formation, la gestion des fonctionnaires et la façon dont ils sont traités influent grandement sur l'efficacité de la fonction publique. Les coûts en personnel représentent un investissement important qui doit être bien géré.
Monsieur le président, plusieurs modifications législatives importantes sont proposées pour moderniser le cadre législatif, qui a été établi il y a plus de 30 ans. Nous avons, dans nos rapports de vérification précédents, attiré l'attention sur l'importance de moderniser le cadre législatif. Mes observations sont tirées de ces travaux de vérification et elles seront probablement d'intérêt pour votre revue. L'annexe ci-jointe résume les principaux points soulevés dans les récents rapports publiés par mon bureau.
Dans le chapitre 9 de notre rapport d'avril 2000, nous avons indiqué que le régime de gestion des ressources humaines était trop complexe et désuet. Nous avons constaté que les imperfections du système amènent les fonctionnaires à trouver des solutions de rechange afin d'éviter un système qu'ils considèrent comme trop lourd. Notre examen a révélé que le mode d'embauche à court terme est devenu la pratique la plus courante. Il est clair qu'il faut mieux définir les rôles, les responsabilités et l'obligation de rendre compte des nombreux intervenants dans la gestion des ressources humaines. Nous avons aussi insisté sur l'importance d'un système redditionnel solide, et notamment une surveillance plus rigoureuse et l'obligation de faire rapport. En 2001, le Comité permanent des comptes publics s'est dit d'accord avec nos constatations.
[Français]
Le projet de loi C-25 propose de mieux définir les rôles et les responsabilités des principaux intervenants. Les modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques et à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique attribueraient un rôle plus grand au Conseil du Trésor. De plus, d'autres pouvoirs seraient transférés de la Commission de la fonction publique au Conseil du Trésor.
Le projet de loi C-25 modifierait le régime de dotation. La nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique décrit, dans son préambule, les principaux concepts et valeurs de la fonction publique. De plus, les modifications envisagées définiraient mieux ce qu'est le mérite. Elles établiraient une nouvelle procédure de recours pour la dotation et changeraient les règles qui régissent les activités politiques. Les modifications proposées au régime de dotation correspondent aux constatations de nos rapports précédents et à celles portant sur nos vérifications du recrutement.
La commission se concentrerait sur son principal mandat, soit le régime de dotation, la protection du mérite et de la neutralité de la fonction publique. Son rôle opérationnel s'en trouverait réduit. Le projet de loi rendrait les sous-ministres et les chefs d'agences légalement responsables de nombreux aspects de la gestion des ressources humaines.
Cependant, dans les domaines comme la dotation, le gouvernement se servirait d'un modèle de régie déléguée. Les aspects pratiques de la reddition de comptes à assurer à l'égard de ces nouveaux pouvoirs restent encore à définir.
J'aimerais formuler des commentaires sur la supervision à assurer et l'information à communiquer en matière de gestion des ressources humaines. Nous sommes heureux que le rôle élargi confié au Conseil du Trésor comprenne l'obligation de faire rapport au Parlement sur la gestion des ressources humaines. La Commission de la fonction publique fera aussi rapport annuellement au Parlement sur les nominations des employés, ses vérifications et ses enquêtes et sur les activités politiques des employés.
La commission continuerait de superviser la dotation. Cependant, compte tenu de la diminution de son rôle opérationnel, nous ne savons pas très bien si elle continuerait de jouer un rôle dans le recrutement à l'échelle de la fonction publique, la formation linguistique et les tests de connaissance de la langue seconde.
Monsieur le président, à nos yeux, ces propositions permettront d'améliorer le système actuel. Nous pensons que si ce projet de loi est adopté, il contribuera à la réforme de la gestion des ressources humaines. Le Bureau du vérificateur général du Canada est heureux également que la nouvelle loi prévoie un examen législatif dans sept ans.
¿ (0925)
[Traduction]
Il est sain de débattre de ce qui doit être inclus ou non dans le cadre législatif. Cependant, dans l'étude de ce projet de loi, il faut se poser une question fondamentale, question à laquelle M. Mahoney a fait allusion tout à l'heure: dans quelle mesure les modifications proposées améliorent-t-elles la gestion des ressources humaines? Le projet de loi n'est qu'un élément de la modernisation des pratiques de gestion des ressources humaines. Pour que le régime soit efficace, le gouvernement devra mener à terme les autres initiatives décrites. Étant donné l'importance des modifications proposées, il faudra bien gérer et appuyer la transition. Par exemple, il faudra donner de la formation et préciser les attentes. Le Parlement doit veiller à ce que les examens de programme et la réaffectation des fonds annoncés récemment permettent de financer les changements. Il faudra des ressources suffisantes pour assurer le succès de cette initiative. Il faudra maintenir cette impulsion à long terme. Pour cela, les hauts fonctionnaires devront assurer le leadership nécessaire, et le Parlement devra s'engager à surveiller la mise en oeuvre des initiatives de modernisation.
Mon bureau compte suivre la situation de près et rendre compte au Parlement des progrès réalisés. Nous espérons que le comité continuera de surveiller les progrès dans ce domaine.
Monsieur le président, nous serions heureuses de répondre aux questions des membres du comité.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Merci.
Compte tenu de vos observations, je voudrais aller tout de suite à la définition du mérite que contient le projet de loi. Cette définition correspond-elle bien aux préoccupations dont vous nous avez parlé? Il y a déjà eu des commentaires là-dessus dans les médias et certains témoins en ont parlé aussi. Je voudrais savoir ce qu'il en est parce que, si j'ai bien compris, c'est la première fois que le principe du mérite sera défini expressément dans la loi au lieu d'être simplement cité dans des précédents et des décisions rendues par les tribunaux. Pensez-vous avoir réussi? Pour vous donner une idée de ce que je veux dire, il semblerait que la définition du mérite prévoit simplement un seuil inférieur au lieu de favoriser la recherche d'excellence et de compétence. Il me semble qu'il n'en est pas question dans la définition.
Mme Sheila Fraser: Nous sommes satisfaits de la définition du mérite contenue dans le projet de loi. Le système actuel, selon lequel on doit embaucher la personne la plus compétente, a donné lieu à un processus très lourd et très long qui a selon moi fait obstacle aux bonnes pratiques de dotation au gouvernement. La définition proposée d'un projet de loi donnera plus de souplesse, mais les candidats devront malgré tout se conformer aux normes et avoir les qualités requises, ce qui veut dire que les normes ne seront nullement rabaissées. Selon nous, c'est aussi une bonne chose que la nouvelle définition permette de tenir compte des besoins courants et futurs d'un ministère ou organisme parce que cela permettra mieux au ministère d'embaucher des employés à long terme au lieu de recourir à des pratiques d'embauche à court terme. L'une des choses qui nous inquiétait beaucoup était le pourcentage très élevé de travailleurs employés à court terme. Le pourcentage des travailleurs employés pour une période déterminée est de 90 p. 100 et cela doit changer.
M. Paul Forseth: Ce que vous dites est intéressant. A-t-on décidé d'affaiblir l'application du principe à cause d'un problème administratif qui nuit à l'application idéale du principe du mérite? S'il existe un problème administratif, la solution ne devrait-elle pas être administrative? Pour pousser les choses à l'extrême, on pourrait dire qu'il y a trop de vols de banque et qu'on devrait donc rendre les vols de banque légaux pour faire disparaître le problème. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'un problème administratif a entraîné un comportement qui ne tient pas compte des principes. Si vous ne pouvez pas embaucher une personne en temps opportun et examiner les appels convenablement, vous n'avez qu'à affaiblir le principe au lieu de vous attaquer au problème administratif.
¿ (0930)
Mme Sheila Fraser: Nous ne pensons pas qu'on ait affaibli les principes. Bien entendu, une bonne partie du résultat dépendra de la façon dont la loi est mise en vigueur, mais il me semble qu'il existe un principe fondamental selon lequel, lorsqu'on embauche des employés, on veut des gens compétents pour faire le travail. Il y a beaucoup de travail à faire. Les ministères et organismes veulent des gens compétents capables de faire le travail. À l'heure actuelle, vu qu'on doit trouver les meilleurs candidats possible selon toute une série de critères, on a établi un grand nombre de précédents qui font que le processus est très légaliste et extrêmement lourd. Selon moi, cela a probablement dissuadé certains des meilleurs des candidats de persévérer parce que le processus prend tellement de temps. Je pense donc que le processus proposé représente une amélioration considérable.
M. Paul Forseth: Nous avons donc cette tradition du concept du mérite qui nous vient, je suppose, du ministère de l'Intérieur de Grande-Bretagne qui au début du siècle précédent a décidé que les embauches devraient se faire sur la base des qualifications et des compétences plutôt que sur la base des affiliations politiques ou des liens familiaux avec le roi. Quand il y avait changement de gouvernement en Angleterre, soit les catholiques étaient embauchés, soit ils étaient effacés, nous savons tous comment cela se passait et ils ont décidé d'opter pour une approche plus professionnelle. Il y a toujours des gouvernements provinciaux dans notre pays qui semblent faire naître l'espoir d'un grand changement au niveau de la bureaucratie quand leurs amis arrivent au pouvoir. Le problème n'est toujours pas réglé au Canada. C'est le premier élément d'une fonction publique professionnelle indépendante.
L'autre élément ce sont les règles, les règlements et les lois interdisant aux fonctionnaires toute activité politique. Il y a d'ailleurs un article de ce projet de loi qui y est consacré. J'aimerais que vous nous en parliez un peu plus car selon moi ce projet de loi ne résisterait probablement pas à une contestation sur la base de la Charte de la manière dont il limite du haut en bas de la hiérarchie, d'une manière très autocratique, les activités politiques et porte atteinte aux droits politiques des fonctionnaires. Il semblerait que ce sont les tribunaux qui en sont la cause à la suite de nombreuses contestations de la situation, du régime. Le gouvernement a donc décidé de présenter dans ce projet de loi un nouveau régime, et à mon avis, par rapport à ce que diverses provinces ont fini par adopter, ce nouveau régime semble encore avoir un train de retard. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur ce contrôle des activités politiques?
Mme Sheila Fraser: Je crois que ce qui intéresse vraiment M. Forseth c'est toute la question du favoritisme.
M. Paul Forseth: Oui.
Mme Sheila Fraser: Nous sommes persuadés de la nécessité d'avoir une fonction publique impartiale et professionnelle. C'est essentiel à la qualité de la fonction publique. Le projet de loi dit:
Les fonctionnaires peuvent se livrer à des activités politiques, sauf si celles-ci portent ou semblent porter atteinte à leur capacité d'exercer leurs fonctions de façon politiquement impartiale. |
Je crois qu'il y a une disposition en vertu de laquelle si un fonctionnaire souhaite, par exemple, se présenter à une élection, il doit prendre congé car de toute évidence cela pourrait être considéré comme pouvant affecter son impartialité. Ces dispositions ne nous posent pas de problème.
M. Paul Forseth: Pour vous aider un peu, mon premier problème c'est qu'il faut qu'il demande la permission. Rien dans ce projet de loi ne stipule que cette permission ne sera refusée de manière déraisonnable. Si cette permission est refusée, le fonctionnaire n'a pas de recours, il n'y a pas d'instance indépendante, pas même la Commission de la fonction publique, à qui il pourrait au moins demander une examen de ce refus pour déterminer s'il est déraisonnable.
Deuxièmement, il faut même avoir cette permission pour se présenter à la candidature avant même d'être candidat à une élection, et je trouve cela particulièrement contraignant. Je suis devenu candidat un an avant les élections et personne ne savait quand les élections en 1993 auraient lieu. Si j'avais été fonctionnaire fédéral, si je comprends bien le projet de loi, il aurait fallu que je me mette en congé, presque un an à l'avance, dans l'attente qu'à un moment quelconque les élections soient déclenchées, sans aucune garantie d'être élu. Cela pourrait inciter certains des meilleurs et des plus brillants éléments de notre pays à renoncer à se lancer en politique au fédéral. Heureusement, j'étais assujetti à un régime provincial qui me permettait de dire à mon employeur que j'avais l'intention de me présenter aux élections et que les négociations quant à mon statut commenceraient dès que la date de ces élections serait connue. Il suffisait que je le prévienne car j'avais le droit de participer à une activité politique et il voyait bien qu'il n'y avait pas de conflit. Un congé de cinq ans était accordé et un poste de mon niveau était conservé pour moi si bien qu'après cinq ans je pouvais réintégrer la fonction publique car la structure était suffisamment importante pour le supporter. Quand je compare ce régime au régime autocratique proposé, je continue à penser que les droits politiques ne sont toujours pas suffisamment défendus.
¿ (0935)
Mme Sheila Fraser: Je crains que nous n'ayons pas vraiment examiné cette question en détail. Je ne peux donc pas vraiment répondre aux questions de M. Forseth. Je reviendrai simplement à ce principe fondamental d'impartialité. Comment vraiment le garantir pourrait être débattu par votre comité.
M. Paul Forseth: Merci.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Monsieur Lanctôt.
[Français]
M. Robert Lanctôt: Le but premier, bien sûr, est d'améliorer la fonction publique.
On constate, dans un des préambules, que le principe porte surtout sur l'amélioration des relations entre les employés et les gestionnaires. Ne croyez-vous pas qu'il y a un problème potentiel, surtout à l'égard de la dotation et du recrutement? Lorsqu'on essaie d'améliorer le processus et de trouver de meilleurs candidats, il est évident qu'il faut prendre en compte la notion de mérite. Cependant, comme s'il s'agissait d'un retour du balancier, on a tout pris d'un côté pour le mettre de l'autre côté. Autrement dit, le point de départ objectif, avec critères établis à l'appui, devient éventuellement quelque chose de subjectif.
Vous dites qu'on a maintenant une jurisprudence et des critères objectifs. Or, à mon avis, l'absence de critères établis risque par le fait même de donner lieu à une certaine subjectivité. Si on n'est pas dans la manche du patron, on peut avoir des problèmes; en outre, dans le cadre de la nomination, les problèmes pourraient être encore plus graves que ce qu'ils étaient auparavant.
Comment pouvez-vous concilier ces deux possibilités? Cette notion de mérite a été tellement élargie. Comment peut-on améliorer le projet de loi quand on sait que cette crainte prendra de plus en plus d'ampleur lorsque cela sera connu des fonctionnaires?
On veut amener de l'extérieur des gens de grande compétence, mais quand ces derniers comprendront la teneur de cette subjectivité, ils seront peut-être encore moins intéressés à travailler à la fonction publique. Ils le seront, au départ, parce qu'ils auront été choisis. Cependant, comment pourront-ils être sûrs que, dans le cadre de leur cheminement professionnel, la subjectivité ne prévaudra pas? On voit en effet qu'en ce qui concerne les nouveaux critères à être établis, en matière de classification, de normes ou de critères, les syndicats sont exclus.
Pour ma part, je vois là un problème et j'aimerais entendre vos commentaires sur la question, moins à titre de fonctionnaire qu'en tant que vérificatrice générale.
En plus d'avoir donné beaucoup plus de place à la subjectivité, on restreint à un seul les motifs de contestation provenant des employés, en l'occurence l'abus de pouvoir. Vous savez aussi bien que moi comme il est difficile de prouver l'abus de pouvoir.
Il y avait auparavant de nombreuses autres façons de contester. S'il ne reste que l'abus de pouvoir et l'évaluation de la langue de son choix, c'est assez simple. Mais mis à part ces deux facteurs, le cadre dans lequel on peut contester une nomination s'avère très limitatif. Il faut que la personne n'ayant pas obtenu la nomination soit en mesure de prouver qu'il y a eu abus de pouvoir! Qu'en pensez-vous?
Mme Sheila Fraser: C'est toute une question.
Je commencerai par dire que nous n'avons pas fait de travail comme tel sur la question des relations de travail. Alors, je ne suis pas vraiment en mesure de commenter la relation entre le gouvernement et les syndicats, par exemple, et le rôle qu'ils devraient jouer. Je pense qu'il y en a d'autres qui ont fait des études et qui sont mieux informés que moi.
Sur la question de principe de mérite et la dotation, laissez-moi vous expliquer un peu la situation actuelle. Une de nos vérifications a révélé qu'il y a 70 000 règles pour gérer la fonction publique et les ressources humaines. Ça peut prendre de 12 à 18 mois pour recruter quelqu'un, et 90 p. 100 de la dotation actuelle consiste en des postes à courte durée. Alors, je me demande bien franchement si quelqu'un de grande qualité va quitter un emploi ailleurs pour venir passer par un processus qui peut prendre 18 mois ou accepter un contrat à terme de trois à six mois. Je doute fort qu'on puisse recruter des gens de grande qualité dans ces conditions-là.
Il faut admettre aussi qu'en ce qui concerne la dotation, il y a toujours un élément de subjectivité dans le choix d'une personne. On peut avoir des critères objectifs comme l'éducation, l'expérience et d'autres, mais en fin de compte, quand on engage quelqu'un, il y a toujours une dimension subjective. Il va toujours y avoir des critères. Le processus actuel ne fait pas disparaître tous les critères objectifs, mais c'est un processus plus simple. Quand on parle de jurisprudence, je crois que c'est surtout le processus qui était devenu très lourd et très compliqué.
Je vois dans la loi deux mécanismes. Il y a évidemment toute la question de rapport, de divulgation au Parlement. On exige un rapport au Parlement par le Conseil du Trésor, qui peut donner de l'information au Parlement. Il y a aussi le rôle de vérification de la Commission de la fonction publique, qui est là justement pour assurer que la dotation se fait comme il se doit, en respectant des standards et des critères qui sont déjà établis.
¿ (0940)
M. Robert Lanctôt: Mais si les critères ne sont pas établis, sur quoi va se baser la Commission de la fonction publique? Est-ce que quand les membres de la Commission de la fonction publique vont changer, les critères vont changer aussi?
Mme Sheila Fraser: Ce qu'on comprend, c'est que c'est le Conseil du Trésor, comme employeur, qui va établir les critères, et c'est la Commission de la fonction publique qui va vérifier si ces critères ont été mis en place et respectés. Si je peux faire un parallèle avec mon rôle à moi, ce n'est pas mon rôle de commenter les politiques qui sont adoptées par le gouvernement, mais c'est mon rôle de voir si ces politiques ont été bien mises en application et comment elles fonctionnent. C'est un peu le même rôle que celui de la Commission de la fonction publique par rapport au Conseil du Trésor comme employeur.
M. Robert Lanctôt: D'accord. Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président?
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Environ 30 secondes.
[Français]
M. Robert Lanctôt: Bon. À ce moment-là, je ne partirai pas de ce côté-là. Je vais seulement parler d'un aspect qu'on ne retrouve nulle part, tout le problème du harcèlement. Le sondage qu'on a vu révèle qu'un fonctionnaire sur cinq en est victime, ce qui est énorme. Rien n'est prévu dans la loi. Tout ce qu'on a comme réponse de la ministre, c'est qu'on a une politique qui est administrative. Elle existe déjà depuis un certain temps, mais le résultat n'est pas concret. Un fonctionnaire sur cinq, c'est énorme dans une fonction publique qui représente je ne sais combien de milliers de personnes.
Qu'est-ce que vous pensez du fait qu'on n'ait pas introduit de mesures à cet égard? Devrait-on exiger qu'on en introduise dans la législation actuelle? Il ne faut pas oublier que cela a pris 30 ans avant qu'on change cette législation de façon profonde. Est-ce qu'on va attendre encore 30 ans pour régler un problème qui existe et qui cause beaucoup de conflits actuellement?
Mme Sheila Fraser: Moi, je crois que la réponse à la question qui est soulevée est le mécanisme de révision dans sept ans. Le travail qui a été fait jusqu'à présent pour proposer cette loi a été énorme. Changer une loi après 30 ans n'a pas été facile et a exigé de la part des personnes responsables un travail important. Je pense que ça aurait été trop leur demander que de les faire revoir tous les aspects. Parfois, quand on demande de tout revoir, on finit par accomplir peu de choses. Alors, c'est peut-être mieux d'y aller étape par étape et de voir si vraiment les questions de harcèlement et d'autres méritent une révision. Il faudrait faire une étude pendant les sept ans, et le moment opportun pour les changements serait la révision de la législation dans sept ans.
¿ (0945)
M. Robert Lanctôt: Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci, monsieur Lanctôt.
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président et bienvenue à nos témoins.
Nous avons entendu hier les représentants de la Commission de la fonction publique et ils estiment que leur processus de rapport annuel est peut-être un peu restrictif. Ils recommandent l'autorisation de pouvoir déposer des rapports plus fréquents au Parlement chaque fois qu'une question importante le justifie et ne peut attendre le dépôt du rapport annuel. Qu'en pensez-vous?
Mme Sheila Fraser: Nous connaissons cette recommandation et nous y sommes favorables. Il faudrait que chaque fois qu'il y a quelque chose d'important, un mécanisme leur permette de déposer des rapports autres que leur simple rapport annuel. D'ailleurs, dans la loi constitutive du Bureau du vérificateur général, en plus des quatre rapports que nous produisons chaque année, une disposition nous permet de produire des rapports spéciaux en cas d'urgence. Ils devraient donc eux aussi bénéficier d'un mécanisme de ce genre.
M. Paul Szabo: J'ai tendance à penser que c'est une bonne idée. Chaque fois qu'ils déposent des rapports, c'est leur crédibilité qu'ils mettent en jeu et je serais des plus heureux de leur permettre de partager leurs réflexions avec les parlementaires.
Deuxièmement, ils nous ont dit que les rapports actuels avec le Parlement et les parlementaires pourraient être considérablement améliorés. Il semble qu'ils réclament un meilleur dialogue avec les parlementaires. Il y a de nombreux moyens de communiquer avec les parlementaires. Quel genre de méthode vous dicterait votre expérience? Devrait-il y avoir certaines restrictions ou devrions-nous joindre nos efforts pour encourager une communication permanente par le biais d'une méthode ou d'une autre?
Mme Sheila Fraser: Quand je considère notre expérience et les rapports très spéciaux que nous entretenons avec le Comité permanent des comptes publics, je crois qu'il est vraiment capital qu'une créature du Parlement corresponde à un comité permanent qui examine les rapports, qui donne suite à ces rapports, ce qui permet d'établir de bonnes relations. À mon avis, il serait important que la Commission de la fonction publique soit rattachée à un comité qu'elle fréquenterait d'une manière assidue. Cette assiduité resterait à définir, mais c'est ce comité qui examinerait, par exemple, ses plans et ses priorités, son rapport de rendement, ses rapports et ses recommandations. Nous sommes des agents du Parlement et une partie capitale de notre travail est l'établissement de ces liens directs avec un comité, et un comité qui prend ce travail au sérieux.
M. Paul Szabo: Il y a une dernière chose sur laquelle j'aimerais vous questionner. Le changement de culture nous a été présenté comme un des objectifs de cette loi. Je crois que l'expérience des embauches à court terme est un exemple de l'enracinement de la culture actuelle et de la raison pour laquelle il importe tant que vous suiviez et que vous contrôliez les progrès et en fassiez rapport quand il y en a. Par exemple, j'ai eu l'impression que pour la Commission de la Fonction publique la vérification était un concept de gestion totalement étranger. Par sa propre définition, gérer veut dire fixer des objectifs, mesurer le rendement et veiller à ce que les procédures soient appropriées et bien comprises. Nous engageons et nous essayons de retenir les meilleurs, nous faisons des rapports sur le rendement des gestionnaires dans l'espoir que des enseignements seront tirés des erreurs, etc. Dire dans la loi que désormais ils auront le droit de faire des modifications modifie la donne. J'irais presque jusqu'à parler de gestion sans culture. Dans une certaine mesure, si je peux faire inscrire ces dispositions dans une loi, elles légitimisent mes activités qui, d'après moi, dans un changement de culture devraient en réalité faire partie du travail et ne pas nécessiter une loi. J'essaie de comprendre pourquoi il est nécessaire de légiférer le pouvoir de vérifier les décisions de gestion, qu'il s'agisse de mérite, d'embauche, de licenciement ou que sais-je encore. Cette culture ne devrait-elle pas en réalité reposer sur le principe que les gestionnaires sont là pour gérer, pour utiliser les outils qui sont généralement mis à la disposition des gestionnaires pour faire le meilleur travail possible tout en ayant l'obligation de rendre compte de leurs actes?
¿ (0950)
Mme Sheila Fraser: Je répondrai dans l'affirmative à votre dernière question. Cette loi a pour but avant tout de permettre aux gestionnaires de gérer. Elle modifie aussi assez considérablement les responsabilités, en particulier, entre la Commission de la fonction publique et les gestionnaires du gouvernement. Le rôle de la Commission de la fonction publique sera désormais très différent de ce qu'il est aujourd'hui. La Commission porte aujourd'hui deux chapeaux. Elle s'occupe de très près des opérations quotidiennes et de la gestion quotidienne tout en jouant un rôle de vérificateur, ce qui la place en position de conflit. Par exemple, si nous faisions toute la comptabilité du gouvernement et en même temps la vérification des états financiers, cela ne marcherait tout simplement pas. Nous estimons que cette loi permet de clarifier les rôles et les responsabilités, un des gros problèmes que nous avons constatés dans nombre de vérifications sur la gestion des ressources humaines. Les rôles et les responsabilités n'étaient pas clairs. Or, si c'est un modèle délégué, il est certain que l'intention est que les sous-ministres gèrent les ressources humaines et rendent compte de leur gestion. Cela ne veut pas dire que la fonction de vérification devient inutile. Il faut une fonction de vérification pour veiller à ce que le système fonctionne comme prévu et c'est le rôle qui a été confié à la Commission de la fonction publique.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Je réclame l'indulgence des membres du comité. Je crains que nous ne dépassions légèrement le temps prévu. J'ai sur ma liste le nom de M. Lanctôt, je suis sûr que M. Forseth voudra venir pour un deuxième tour et ensuite j'ai les noms de M. Mahoney et Tirabassi. Cela pourrait nous faire déborder d'une dizaine de minutes et j'aimerais que nous ne dépassions pas cinq minutes.
Monsieur Lanctôt.
[Français]
M. Robert Lanctôt: D'accord. Merci, monsieur le président.
Je veux revenir sur une des considérations qui est importante et qui, selon nous, est un grand manquement. Il s'agit de la protection des dénonciateurs, surtout pour ce qui est relié à notre travail de parlementaires. C'est un aspect qui nous touche beaucoup plus, bien sûr, parce que notre travail se fait en relation étroite avec les témoins qui peuvent venir ou du moins avec des témoins qui pourraient venir, qui pourraient répondre.
Il est arrivé à plusieurs occasions que des témoins aient refusé de venir ou, même s'ils se sont présentés, ont refusé de témoigner et de nous donner les informations dont nous avions besoin pour faire un bon travail en tant que parlementaires, en tant que protecteurs des citoyens pour mettre des choses à jour, ou plutôt pour comprendre et même donner des chiffres. On s'est fait dire, même très souvent, qu'ils ne pouvaient donner les informations, alors qu'on savait très bien qu'ils les avaient.
Encore une fois, aucune allégation, aucun article n'est prévu, aucune section n'est prévue à cet effet. À mon avis, ce ne sont pas des employés comme tout le monde, ce sont des employés qui ne sont pas là pour... La partisanerie, ce n'est pas seulement une question de nomination, c'est aussi cacher des choses par obligation parce qu'ils ne peuvent pas le dire ou parce qu'ils craignent les représailles. Ils sont là pour gérer des fonds publics. Ils ont le même travail que nous, mais dans une autre fonction. Ils travaillent à cet endroit-là et même plus souvent que plusieurs des députés qui sont autour de la table.
Ils doivent être protégés, mais pour être protégés, il faut qu'ils fassent leur travail comme il faut pour donner les résultats aux citoyens: une reddition de comptes et de la transparence. Ce n'est pas seulement le ministre, mais aussi tous les fonctionnaires qui sont à l'intérieur de cette boîte-là qui doivent nous donner les informations nécessaires. On a de la difficulté à aller les chercher à cause de ça, et il n'y a aucune section pour protéger ces gens-là. Ce qui va arriver, c'est qu'on va avoir encore de la difficulté et on va retomber dans toute cette partisanerie. Ce n'est pas seulement une question de nomination, comme je vous l'ai dit. On va avoir de la difficulté à faire notre travail, et rien ne va changer.
Quand on parle de changement de culture, c'est ça, un changement de culture pour rendre les biens publics conformes à une reddition de comptes, à de l'imputabilité. Ça part de là, mais si on n'a pas cette section, comment voulez-vous qu'il y ait un changement de culture à la fonction publique?
¿ (0955)
Mme Sheila Fraser: Merci, monsieur le président.
Je suis d'accord qu'il faut avoir une culture, qu'il faut promouvoir une culture où un employé peut dénoncer ou signaler des actes fautifs sans peur de représailles. Je pense que c'est essentiel, surtout dans une fonction publique. Mais je ferais peut-être un parallèle avec la question du harcèlement: la loi ne pouvait pas tout couvrir.
Je crois qu'il y aussi un nouveau poste, celui d'agent de l'intégrité de la fonction publique, qui a été créé assez récemment. Il y aurait lieu de revoir avec l'agent, je pense, l'efficacité et l'évaluation de son travail ou du progrès qui aurait été fait et de voir s'il croit, à ce moment-là, suite à cette étude, qu'il y aurait lieu de légiférer. Pour ma part, je vois la mesure législative comme étant la fin d'un continuum de solutions à cette question. Il serait probablement préférable de voir si d'autres mécanismes pourraient fonctionner pour changer la culture avant d'arriver à légiférer sur la protection des dénonciateurs. Mais, à mon avis, c'est évidemment une question qui doit être revue, à l'heure actuelle.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Forseth): Merci.
Monsieur Mahoney.
M. Steve Mahoney: Merci beaucoup.
Madame Fraser, vous avez dit que vous n'avez pas vraiment de commentaires à faire sur les relations de travail, mais il y a une question essentielle que certains syndicats ont soulevée. D'une part, ils disent qu'ils ne veulent pas cogérer la fonction publique, mais, d'autre part, ils veulent obtenir de meilleures explications lorsqu'un employé fait l'objet d'un renvoi, d'une suspension ou d'une autre mesure disciplinaire. Je pense qu'il est important qu'il y ait un dialogue franc entre les syndicats et la gestion, mais je crois qu'on risque d'enlever certains droits en poussant trop loin l'arbitrage des décisions de gestion. Je prends comme exemple la mise en oeuvre des régimes d'indemnisation des victimes d'accidents du travail dans les différentes provinces canadiennes. En contrepartie de ces régimes qui fournissent des prestations, etc., les employés ont renoncé au droit d'intenter des poursuites. Je pense que ces régimes fonctionnent bien dans l'ensemble. Certains prétendent le contraire, mais je pense qu'ils fonctionnent. Est-ce que vous pensez qu'en allant trop loin on risque que les décisions arbitrales empiètent sur les droits juridiques des employés et qu'ils perdent leur capacité de s'adresser aux tribunaux, recours qu'ils ont à l'heure actuelle?
Mme Sheila Fraser: Je ne pense pas être vraiment qualifiée pour répondre à cette question. Nous n'avons pas étudié cette question et je ne voudrais pas m'aventurer dans un dossier qui de toute évidence est très délicat.
M. Steve Mahoney: Permettez-moi alors de vous demander si vous avez l'intention de vous tenir au courant de l'application de cette nouvelle loi et de l'évolution des relations et de la culture qui en découleront, à supposer que vous puissiez vous intéresser à ce genre de questions.
Mme Sheila Fraser: Tout à fait. Nous allons certainement surveiller la mise en oeuvre de ce projet de loi. Pourra-t-on maintenir l'élan? Des ressources suffisantes seront-elles affectées? Par exemple, les méthodes de recrutement vont-elles changer? Quelles seront les répercussions de cette nouvelle loi?
M. Steve Mahoney: Très bien.
Il me semble qu'il faut mesurer les pratiques de recrutement à court terme en fonction des coûts à long terme. C'est probablement l'une des raisons pour lesquelles cette pratique a été adoptée. Dans le secteur privé, de nombreuses entreprises embauchent des employés à contrat pour des mandats d'une durée précise, ce qui, à bien des égards, est au détriment des travailleurs qui n'obtiennent pas les avantages qui sont normalement associés à un emploi à plein temps. Comment pouvons-nous régler ce problème, surtout au gouvernement, où il y a quelques années seulement on enregistrait chaque année des déficits, d'énormes déficits? C'est encore le cas de quelques gouvernements provinciaux, or nous devons fournir certains services. L'impartialité est contre nature pour moi, mais je dirai néanmoins que depuis dix ans nous jouissons d'une économie assez saine et qui promet de le rester dans un avenir prévisible. Nous nous en attribuons le mérite, ce qui est tout à fait normal en politique, mais le fait est que les choses vont très bien. Il se trouve que cela se produit pendant notre mandat, celui du gouvernement libéral. Cependant, si les modifications que nous apportons nous privent de la possibilité de recruter des employés à court terme, est-ce que nous ne risquons pas de placer le gouvernement dans une position où il ne pourra faire autrement que d'accumuler des déficits?
À (1000)
Mme Sheila Fraser: Vous avez soulevez deux préoccupations. L'une concerne le recrutement à court terme pour doter des postes qui sont en réalité des postes permanents, de sorte qu'on renouvelle constamment les contrats. En fait, il y a des employés qui sont embauchés à contrat alors que l'intention est de les garder longtemps. Je sais qu'il y a de nombreuses raisons à cela. L'une d'entre elles est la complexité des systèmes. Je pense que vous avez raison de dire que le financement pourrait bien être un de ces facteurs. Lorsque les ministères n'ont des fonds que pour une année à la fois, ils hésitent à s'engager en recrutant quelqu'un à long terme.
Mais le véritable dilemme auquel fait face la fonction publique, c'est qu'il y a un très grand nombre de personnes qui prendront bientôt leur retraite. Un grand nombre de personnes quitteront la fonction publique et nous devons nous donner les moyens de les remplacer. En fait, les employés d'expérience qui partent et ceux qui occupent l'échelon inférieur ont à peu près le même âge de sorte qu'il y aura tout un exode au cours des prochaines années. Nous devons avoir un mécanisme pour recruter de manière plus efficace et pour doter des postes à long terme, car je ne pense pas que quelqu'un qui occupe un emploi à plein temps ailleurs soit disposé à le quitter pour accepter un contrat à court terme.
M. Steve Mahoney: Je pense qu'il y a dans le public certaines attitudes qui sont souvent exacerbées par la mentalité de chasse aux sorcières qui peuvent se manifester à certains moments. Le dossier de DRHC qui était censé être un fiasco d'un milliard de dollars n'était finalement pas si épouvantable. J'ai constaté que les fonctionnaires sont devenus très discrets pour ne pas avoir à s'occuper de cette affaire. Ils ont cessé de prendre les appels des députés de quelque parti que ce soit, et ils vivaient dans la crainte, car ils se sentaient menacés tous les jours. Quelqu'un qui avait approuvé un programme pour la région de l'Atlantique, pratique probablement normale dans le cadre de ses fonctions, risquait de voir son nom à la une du Globe and Mail ou, Dieu l'en préserve, mentionné dans la période de questions. D'après mon expérience, les fonctionnaires fédéraux, provinciaux et municipaux—et j'ai travaillé aux trois niveaux—forment un groupe extraordinaire d'hommes et de femmes qui, franchement, sont souvent montrés sous un jour très injuste.
Nous parlons de changement de culture, mais comment réussir ce changement dans l'ensemble du pays?
Mme Sheila Fraser: Je suis d'accord avec vous pour dire que les fonctionnaires sont des gens très dévoués et loyaux et nous devons nous estimer très chanceux de la qualité de notre fonction publique. Pour revenir à la situation à DRHC et à d'autres dossiers semblables, il faut trouver l'équilibre entre le service et les contrôles. Je pense que le pendule est allé trop loin dans un sens. Nous avons signalé, dans un de nos rapports de suivi, qu'on avait exagéré les contrôles en demandant trop de documents de sorte que les gens sont devenus prudents à outrance. J'espère qu'on retrouvera un meilleur équilibre. Il s'agit de gérer les risques et les dossiers concurrents. Si vous me permettez de faire un peu de publicité, dans notre prochain rapport il y aura tout un chapitre sur la gestion du risque; nous pourrions peut-être avoir cette discussion après la publication du rapport en avril.
À (1005)
M. Steve Mahoney: Je pense que la vérificatrice générale peut influencer considérablement l'opinion des gens au sujet de notre fonction publique. J'ai bien hâte de voir cela.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Monsieur Tirabassi.
M. Tony Tirabassi: Merci, monsieur le président.
Ma question porte sur le moyen de mesurer les améliorations tout au long de ce processus. Comment pouvez-vous mesurer l'amélioration de l'efficacité? Pour un programme ou une activité typique on fixe une cible, un objectif, on détermine le processus et les coûts. Il y a des éléments très précis que l'on peut comparer. Lorsque vous reviendrez, comme vous l'avez mentionné, pour nous rendre compte des progrès de la fonction publique, quels éléments de comparaison allez-vous utiliser pour mesurer l'amélioration des relations de travail et l'amélioration de la satisfaction du public, puisque notre objectif ultime est de mieux servir la population? Reconnaissez-vous que cela présente des défis particuliers? Quel sera le résultat de toute cette démarche?
Mme Sheila Fraser: Premièrement, nous nous attendons à ce que la gestion, en l'occurrence la Secrétariat du Conseil du Trésor en tant qu'employeur, ait des plans d'action et des cibles pour la mise en oeuvre; il suivra l'évolution des choses et saura si les changements qu'il préconise se produisent effectivement. Alors, nous vérifierons quelle sorte d'évaluation il fait.
Souvent, lorsqu'on entreprend une modernisation—c'est une question que nous avons soulevée l'an dernier au sujet de l'initiative de contrôle—on fait de belles déclarations d'intention, mais on néglige d'élaborer un plan précis pour déterminer exactement ce qui doit être fait, qui doit le faire, à quel coût, selon quel échéancier. Alors nous allons voir s'il existe un tel plan détaillé pour la mise en oeuvre de cette initiative. Ensuite, nous ciblerons probablement des domaines particuliers, comme la dotation, comme nous l'avons fait dans le passé. Nous chercherons à déterminer si les méthodes de dotation des ministères se sont améliorées, si les gestionnaires estiment que la méthode est plus simple, qu'ils ont plus de souplesse et nous vérifierons si cela se fait dans les règles.
Dans le passé, nous avons vérifié la qualité du service. Nous avons fait une telle vérification il y a cinq ou six ans et une autre il y a environ deux ans et nous avons constaté une amélioration considérable de la qualité du service. C'est une question que nous examinerons de nouveau à l'avenir. Nous choisissons des ministères particuliers et nous examinons des facteurs comme le temps de réponse, ce qu'ils font lorsqu'il y a des files d'attente au kiosque, etc. Nous vérifions divers aspects.
M. Tony Tirabassi: Merci.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Avant de terminer, j'aimerais vous donner une dernière chance de nous parler tout particulièrement de votre mandat de surveillance indépendante du gouvernement au sens le plus large. Y a-t-il des dispositions de ce projet de loi qui vous nuiraient dans l'exercice de ce rôle? Est-ce qu'il manque dans ce projet de loi une disposition qui pourrait aider, faciliter ou rehausser l'exécution de vos fonctions?
Mme Sheila Fraser: Non, il n'y a rien dans ce projet de loi qui pourrait avoir des conséquences négatives pour nous. En fait, nous étions heureux de constater qu'on y traite de nombreuses préoccupations que nous avons soulevées dans le passé. En tant qu'employeur, nous sommes évidemment touchés par cette initiative puisqu'il y a des dispositions concernant la dotation et, en fait, il y a certains assouplissements que nous avions demandés au gouvernement. Nous appuyons tout à fait ce projet de loi.
Le vice-président (M. Paul Forseth): Dans votre exposé préliminaire, vous avez parlé de la possibilité que votre bureau et votre fonction servent de modèle pour la CFP. Pouvez-vous nous en dire plus? Y a-t-il dans ce projet de loi des faiblesses que nous devrions corriger pour rehausser le rôle de la CFP?
Mme Sheila Fraser: Non. Il s'agit plutôt du fonctionnement futur de la CFP lorsqu'elle assumera davantage une fonction de vérification, plutôt qu'une fonction opérationnelle. Je pense qu'elle devra probablement modifier certaines de ses pratiques et de ses méthodes. Nous serions heureux de l'aider à cet égard. Il y a deux questions que vous voudrez peut-être examiner. La première est celle des rapports, que M. Szabo a soulevée tout à l'heure, et la possibilité que la CFP puisse déposer des rapports plus qu'une fois par année. Il y a aussi la question du financement, qui intéresse de nombreux hauts fonctionnaires du Parlement et peut-être que ma collègue qui me suivra aura aussi quelque chose à dire à cet égard. À l'heure actuelle, les budgets des hauts fonctionnaires du Parlement passent par le Secrétariat du Conseil du Trésor, ce qui crée une situation un peu conflictuelle. Nous préférerions que le Parlement ou l'un de ses comités ou sous-comités s'occupe du budget des hauts fonctionnaires du Parlement, tout comme cela se fait en Grande-Bretagne. Nous avons eu de très longues discussions au sujet du financement avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et j'espère qu'on trouvera une solution et peut-être que la Commission de la fonction publique fournira l'occasion de régler cette question.
À (1010)
Le vice-président (M. Paul Forseth):
Il semble que nous ayons un grand avantage dans le fait que nous sommes habitués depuis longtemps au rôle du vérificateur général et que son expérience et ses conseils ainsi que sa mémoire institutionnelle peuvent souvenir les nouveaux rôles de la CFP. En effet, la recommandation deux de son mémoire dit ceci:
De manière à assumer sa responsabilité concernant la protection du mérite, la CFP recommande que le Parlement lui accorde le pouvoir d'ordonner toute mesure corrective qu'elle juge indiquée à la suite d'une vérification, si elle détermine que cette mesure est dans l'intérêt de la fonction publique. |
C'est une recommandation intéressante. Vous ne voudrez peut-être pas en parler ici aujourd'hui, mais peut-être voudrez-vous prendre connaissance de son mémoire et nous dire ce que vous en pensez par le courrier ou autrement.
Mme Sheila Fraser: Brièvement, je vous dirai que je ne suis pas en faveur de cette idée. Vu le rôle que nous jouons, nous n'avons pas le pouvoir d'ordonner aux gens d'appliquer une mesure corrective; c'est aux gestionnaires de gérer et de rendre compte de leurs actes. La fonction de vérification doit en être distincte.
Le vice-président (M. Paul Forseth): D'accord. Sur ces conseils, je vous remercie. Nous allons suspendre la séance.
À (1010)
À (1020)
Le vice-président (M. Paul Forseth): Encore une fois, l'ordre du jour est l'examen du projet de loi C-25, en particulier les mécanismes prévus par le projet de loi.
Du Commissariat aux langues officielles, nous recevons la commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam, Gérard Finn, conseiller spécial, Gilbert Langelier, directeur, Enquêtes spéciales, ainsi que Pascale Giguère, conseillère juridique. C'est avec plaisir que nous allons vous écouter puis vous poser des questions. La parole est à vous.
[Français]
Mme Dyane Adam (commissaire aux langues officielles, Commissariat aux langues officielles): Merci beaucoup, monsieur le président.
Mesdames et messieurs membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de commenter aujourd'hui le projet de loi C-25 sur la modernisation de la fonction publique.
J'aimerais d'abord souligner l'immense défi que devait relever le gouvernement en présentant une reforme législative visant à moderniser la fonction publique du Canada. L'avenir nous permettra d'évaluer les résultats de cette initiative. Toutefois, je pense qu'il est vraiment de mise de saluer la détermination dont la présidente du Conseil du Trésor, Mme Robillard, ainsi que de nombreux fonctionnaires ont fait preuve dans le cadre de la soumission de cette pièce législative d'envergure qui était, selon la plupart, attendue depuis longtemps.
La fonction publique est une institution clé de notre système politique canadien. Elle constitue en effet un lien important entre le Parlement, le gouvernement et la population canadienne, tout en assurant une multitude services qui contribuent au mieux-être de cette dernière. La fonction publique doit refléter les valeurs de la société qu'elle dessert, et les lois qui l'encadrent doivent permettre de concrétiser ces valeurs. La dualité linguistique demeure une caractéristique fondamentale de la société canadienne. Le gouvernement l'a d'ailleurs clairement indiqué dans le discours du Trône de 2001 et dans celui de 2002, en mentionnant que la dualité linguistique est au coeur de notre identité collective. D'ailleurs, le gouvernement vient de le réaffirmer clairement en présentant son plan d'action pour les langues officielles sous un titre fort évocateur: Le prochain acte: un nouvel élan pour la dualité linguistique canadienne. Un des trois axes du plan met l'accent sur la nécessité de créer une fonction publique exemplaire en matière de langues officielles. Un tel changement ne sera possible que si la culture de la fonction publique change à l'égard de la langue.
Selon moi, le projet de modernisation de la fonction publique doit tenir compte de cette importante réalité. Je l'ai donc examiné à la lumière des propositions que j'ai soumises au gouvernement au sujet de la réforme vers septembre 2001, et qui sont résumées dans un document public intitulé Pour une fonction publique moderne et bilingue.
Dans le cadre du projet de loi, le gouvernement a choisi de tenir compte de certains aspects importants touchant les langues officielles et d'interpréter d'autres changements dans le contexte de la modification éventuelle des règlements d'application ou des politiques afférentes.
Par conséquent, je traite aujourd'hui d'abord des améliorations que je souhaite voir apporter au projet de loi actuel et je propose ensuite des orientations que le gouvernement devrait prendre, dans le cadre de la modification éventuelle de règlements d'application et de politiques afférentes. En effet, ces derniers sont également des moyens, on le sait fort bien, très importants pour atteindre l'objectif d'une fonction publique moderne et bilingue.
Pour le projet de loi actuel sur la nouvelle Loi sur l'emploi dans la fonction publique, que vous êtes en train d'examiner, je propose trois modifications. Premièrement, un ajout au préambule de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique visant à tenir compte de la dualité linguistique; deuxièmement, l'ajout d'une clause à la même loi portant sur le tribunal de la dotation de la fonction publique et enfin; des propositions touchant l'intégration et la formation linguistique dans le projet de la réforme.
[Traduction]
Je suis heureuse de constater qu'on ait mentionné, au troisième paragraphe du préambule, la notion d'avoir une fonction publique «capable de servir la population dans la langue officielle de son choix», démontrant ainsi l'importance que le gouvernement accorde à cette dimension de la Loi sur les langues officielles. Toutefois, la Loi sur les langues officielles ne se limite pas seulement à cette dimension. Elle vise aussi à faire de la fonction publique un milieu de travail dans lequel les membres du personnel appartenant aux deux groupes linguistiques peuvent utiliser leur langue tout en y ayant accès de façon équitable. La fonction publique doit également promouvoir la reconnaissance et l'usage de l'anglais et du français au sein de la société canadienne; et appuyer le maintien et l'épanouissement des collectivités de langue officielle. La notion de dualité linguistique englobe bien, à mon avis, toutes les dimensions de la loi. Il faudrait donc qu'elle soit ajoutée au troisième paragraphe du préambule. D'ailleurs, elle compléterait bien la caractéristique de la diversité canadienne qu'on retrouve dans ce paragraphe. À mon avis, la dualité linguistique permet, en effet, d'ouvrir la voie à l'acceptation de la diversité. Étant deux pôles complémentaires de la réalité canadienne, la dualité et la diversité devraient être rattachées au préambule. Le troisième paragraphe pourrait donc être modifié pour se lire ainsi:
qu'il demeure aussi avantageux pour le Canada de pouvoir compter sur une fonction publique vouée à l'excellence, qui incarne la dualité linguistique tout en étant représentative de la diversité canadienne et capable de servir la population avec intégrité et dans la langue officielle de son choix. |
[Français]
Pour la deuxième recommandation, qui touche le Tribunal de la dotation de la fonction publique, le projet de loi propose un changement majeur consistant à transférer de la Commission de la fonction publique à un nouveau tribunal indépendant la responsabilité d'examiner les plaintes des membres du personnel portant sur les nominations internes. Je note avec intérêt que le non-respect du droit d'être évalué dans la langue de son choix dans le cadre d'un processus de sélection fera partie des motifs de plainte potentiels à déposer devant le nouveau tribunal.
Les dispositions de la Loi sur les langues officielles prévoient que dans l'instruction des plaintes, il incombe au tribunal de veiller au respect de la langue de la personne qui porte plainte. Il faudrait cependant, à mon avis, renforcer le dispositif linguistique pour s'assurer que les membres du tribunal aient toujours une capacité bilingue suffisante pour que la personne qui porte plainte soit entendue dans la langue de son choix sans l'aide d'un interprète.
Notre étude de 1999 portant sur les tribunaux fédéraux a révélé qu'on ne tenait pas toujours suffisamment compte de la capacité linguistique des membres des tribunaux quand venait le temps de s'assurer que ces derniers étaient en mesure d'entendre les causes dans la langue des appelants et appelantes. Une recommandation avait été formulée pour que le gouverneur en conseil responsable de ces nominations assume une responsabilité à cet égard. Cependant, la situation a peu changé, et l'exercice actuel est une excellente occasion pour concrétiser cette imputabilité.
Je propose donc l'ajout d'une clause allant dans ce sens à l'article 88 du projet de loi. Elle se lirait comme suit:
Le gouverneur en conseil veille à ce que les membres du tribunal soient capables, en tant que groupe, d'entendre les plaintes dans l'une ou l'autre langue officielle conformément aux dispositions de l'article 16 de la Loi sur les langues officielles. |
Enfin, le troisième point porte sur la formation linguistique.
[Traduction]
À (1025)
Le projet de loi ne tient nullement compte d'une responsabilité importante qui incombe présentement à la Commission de la fonction publique, soit celle de la formation linguistique des fonctionnaires. Je considère qu'il s'agit d'une anomalie importante. La formation linguistique a joué un rôle crucial depuis le tout début du programme des langues officielles visant à accroître la capacité bilingue de la fonction publique tout en assurant aux unilingues des possibilités d'accès et d'avancement dans la fonction publique. Un grand nombre de personnes conviennent que la formation linguistique a besoin d'être repensée, notamment pour l'insérer davantage dans une perspective de perfectionnement professionnel que pour satisfaire sur papier aux exigences linguistiques des postes.
Nous proposons deux façons d'accorder à la formation linguistique la place qui lui revient. Une avenue intéressante à explorer dans cette perspective serait de confier la responsabilité de la formation linguistique à la nouvelle école de la fonction publique dont la création est prévue dans le projet de loi C-25. En agissant de la sorte, le gouvernement démontrerait que l'apprentissage de la langue s'intègre pleinement à l'acquisition des connaissances et compétences que doivent posséder les gestionnaires et les membres du personnel pour bien s'acquitter de leurs tâches. Un avantage connexe important de cette avenue serait que l'École puisse transmettre les valeurs rattachées à la langue et à la culture, par le biais de ses programmes de développement professionnel qui incluraient la formation linguistique. Si le gouvernement adopte cette option, je propose d'ajouter un paragraphe dans la mission et les attributions de la future école comme suit:
d'assurer une formation linguistique visant à permettre aux fonctionnaire d'atteindre les niveaux de compétence qu'exigent les postes désignés bilingues en vue d'assurer la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles, ainsi que de permettre aux membres du personnel de réaliser leurs objectifs de carrière. |
Une autre option qui pourrait être envisagée serait de créer un institut des langues officielles, selon le modèle de l'actuel Centre canadien de gestion, qui regrouperait sous un même toit la formation linguistique, la traduction, la terminologie et l'interprétation et les activités de recherche dans ces domaines. En regroupant ces activités sous l'égide d'un organisme autonome, le gouvernement pourrait ainsi se donner l'outil nécessaire pour moderniser la formation linguistique en y associant la transmission des valeurs culturelles, et poursuivre le développement de notre expertise en traduction et en terminologie. Un tel institut serait un moteur de développement des industries de la langue au Canada et assurerait le rayonnement de notre expertise au niveau international. Si cette option est retenue, il faudrait qu'un projet de loi soit présenté par le gouvernement.
Peu importe l'option choisie par le gouvernement, il est important de s'assurer que la formation linguistique est pleinement intégrée dans les activités de développement professionnel de la fonction publique fédérale.
À (1030)
[Français]
Comme dernier point, je voudrais aborder un autre aspect important rattaché à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique qui n'est pas touché par le projet de loi. Il s'agit du décret d'exclusion sur les langues officielles, qui permet de nommer à un poste bilingue une personne qui ne satisfait pas aux compétences linguistiques requises en lui accordant un délai de deux ans pour acquérir aux frais de l'État ces compétences. C'est ce qu'on appelle, dans le jargon administratif, la dotation non impérative.
À mon avis, il s'agit d'une anomalie importante à laquelle le gouvernement devra s'attaquer dans le cadre de la révision des règlements d'application et des politiques afférentes. En effet, cette politique fait en sorte que la connaissance des deux langues ne soit pas considérée sur le même pied que les autres compétences requises pour remplir les fonctions d'un poste.
[Traduction]
Je voudrais aborder un autre aspect important rattaché à la Loi sur l'emploi dans la fonction publique qui n'est pas touché par le projet de loi. Il s'agit du décret d'exclusion sur les langues officielles qui permet de nommer à un poste bilingue une personne qui ne satisfait pas aux compétences linguistiques requises en lui accordant un délai de deux ans pour acquérir, aux frais de l'État, ces compétences. C'est ce qu'on appelle dans le jargon bureaucratique la dotation non impérative. À mon avis il s'agit d'une anomalie importante à laquelle le gouvernement devra s'attaquer, dans le cadre de la révision des règlements d'application et des politiques afférentes. En effet, cette politique fait en sorte que la connaissance des deux langues ne soit pas considérée sur le même pied que les autres compétences requises pour remplir les fonctions d'un poste. Je propose donc l'élimination, d'une façon progressive, de la nomination non impérative en commençant d'abord par la dotation interne donnant ainsi le signal qu'il faut préalablement acquérir les connaissances requises pour un poste bilingue avant de postuler. Si quelqu'un veut occuper un poste de gestionnaire, il s'y prépare en suivant des cours de gestion ou en participant à des programmes de perfectionnement. Le même principe devrait s'appliquer en ce qui a trait à l'acquisition de connaissances linguistiques. Ainsi, la dotation impérative devrait être une règle pour les cadres, à partir d'avril 2004, et pour les autres postes, à compter d'avril 2006. Dans un souci d'équité, il faudra s'assurer que toutes les personnes motivées qui veulent avoir un accès aux postes bilingues puissent obtenir de la formation linguistique, peu importe la désignation linguistique de leur poste. Il faudra aussi accorder une plus grande priorité au maintien de l'acquis.
Pour ce qui est de l'embauche externe, je propose qu'on maintienne encore pour une certaine période la possibilité de recruter des personnes ne répondant pas aux exigences de bilinguisme, étant donné que les Canadiens et Canadiennes n'ont pas encore suffisamment accès aux programmes favorisant l'apprentissage de l'autre langue. Toutefois, les personnes qui ne répondent pas aux exigences linguistiques de leur poste, après le délai de deux ans prévu pour acquérir la langue seconde, ne pourront être retenues pour une nomination à la fonction publique. Comme le gouvernement vient d'annoncer des investissements importants visant à favoriser l'apprentissage de la langue seconde dans les écoles, il semblerait raisonnable que la nomination non impérative soit graduellement éliminée, pour la dotation externe. Un autre pas important serait ainsi franchi pour faire de la fonction publique une institution bilingue reflétant la valeur fondamentale de la dualité linguistique.
[Français]
Alors, en conclusion, à l'ère d'une société pluraliste et diversifiée, la fonction publique doit continuellement s'adapter pour refléter l'évolution de la société. Elle doit le faire en continuant d'intégrer les langues officielles dans les valeurs qui la sous-tendent. Une fonction publique bilingue peut jouer un rôle crucial, en aidant à bâtir des ponts entre nos deux grandes communautés de langue officielle, et contribuer ainsi à rendre notre société ouverte à l'acceptation des différences, la clé d'un progrès constant dans le respect des droits inscrits dans la Constitution de notre pays.
Je vous remercie de votre attention, et il me fera plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Merci.
Je suis un député de l'Ouest, où l'on entend rarement parler français. Je compatis tout à fait avec votre rôle et votre tâche qui consistent à protéger et à préserver la langue française, au même titre que l'allemand et l'espagnol, entre autres, dans un environnement culturel mondialisé. Toutes ces langues sont aujourd'hui sous pression plus que jamais en raison de la culture planétaire qui se dessine.
Je vous suis aussi reconnaissant du fait que, lorsque vous soulevez un problème, vous essayez de le relier très précisément avec le projet de loi qui pourrait offrir la solution. Voilà le type de témoignage dont nous avons besoin au comité, et vous nous avez en fait donné l'ébauche d'un texte qui répondrait à vos préoccupations. Nous dites-vous que si les trois petits amendements que vous proposez sont adoptés, cela répondra raisonnablement bien à vos préoccupations?
À (1035)
Mme Dyane Adam: Oui.
M. Paul Forseth: Dans ce cas, comment tenez-vous compte du problème de nos jeunes les plus talentueux, dans l'Ouest, qui n'ont aucune compétence en français? De plus en plus, les étudiants de l'Université de la Colombie-Britannique, par exemple, n'envisagent même pas de poser leur candidature pour la fonction publique parce qu'ils savent qu'il y a de très faibles chances qu'ils soient embauchés et que leurs possibilités d'avancement sont strictement nulles, même si la langue de travail dominante de la fonction publique fédérale est l'anglais d'un bout à l'autre du pays. De plus, puisque notre fonction publique fédérale est en interaction avec les autres pays du monde, la langue de travail de toutes les tribunes internationales est l'anglais. Récemment, à l'OSCE, lorsque les pays se sont querellés et se sont embourbés, on s'est replié sur l'anglais. Alors comment allons-nous régler le problème des plus talentueux de l'Ouest qui perdent intérêt ou encore sont exclus de la fonction publique fédérale en raison de l'obstacle linguistique?
Mme Dyane Adam: Ma responsabilité consiste à veiller à ce que le gouvernement respecte ses propres obligations constitutionnelles et législatives relatives aux langues officielles, ce qui fait que je ne vais pas me prononcer sur des questions de relations internationales. Mais avec l'Ouest, par exemple, il importe de vous citer quelques statistiques. Les deux tiers des postes de la fonction publique ne comportent pas d'exigences linguistiques. Deuxièmement, à titre d'exemple, en Colombie-Britannique, 5 p. 100 des postes seulement comportent de telles exigences. Aussi, je crois qu'il est temps de cesser d'alimenter le mythe qui veut qu'une personne unilingue dans l'Ouest ou au Québec ne peut absolument pas accéder à un poste dans notre fonction publique. En outre, une personne jeune et douée qui entre dans la fonction publique et qui veut en faire une carrière ne commence pas normalement au sommet, on ne l'embauche pas au poste de sous-ministre, peu importe son grand talent. Ainsi, cette personne a le temps d'acquérir les compétences nécessaires pour grimper au sommet.
Pour moi, ce qui compte, c'est que, dans notre nouvelle école et dans notre fonction publique, nous traitons cette compétence comme n'importe quelle autre compétence qui doit se développer à mesure que l'on gagne en maturité professionnelle. Dans le passé—et j'espère que la situation sera rectifiée—, nous traitions la question de la compétence linguistique plus tard dans une carrière. Ce que je propose, c'est de veiller à ce que ceux qui souhaitent occuper, disons, un poste administratif ou un poste bilingue aient bel et bien l'occasion d'acquérir ces compétences, d'obtenir la formation et le soutien voulus, et je crois que cela calmerait certaines de vos craintes.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que tous les paliers de gouvernement investissent de plus en plus dans la formation linguistique à l'école élémentaire et secondaire. Par exemple, en Colombie-Britannique, les programmes de cours d'immersion et de base en français se portent très bien, au point où certains étudiants n'accèdent même pas à ces programmes parce qu'il n'y a pas suffisamment de places. La décision du gouvernement fédéral annoncée par M. Dion et par le premier ministre il y a une semaine environ est très importante, parce que le gouvernement réinvestit dans l'éducation et dans des mesures permettant à nos citoyens de devenir officiellement bilingues, voire polyglottes. Bien que l'anglais soit sans conteste une langue importante à l'échelle internationale, de plus en plus de pays encouragent leurs enfants et leurs diplômés à maîtriser plus d'une langue, ce qui n'est pas la tendance à l'heure actuelle.
À (1040)
M. Paul Forseth: De plus en plus de femmes accèdent au rang de cadre, et on entend aujourd'hui parler du plafond de verre. Le phénomène du plafond de verre ne représente-t-il pas en fait un problème au niveau des exigences de compétence en français dans la fonction publique fédérale?
Mme Dyane Adam: Si nous gérons la situation judicieusement, non.
M. Paul Forseth: D'accord. Merci.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Monsieur Lanctôt.
[Français]
M. Robert Lanctôt: Merci, monsieur le président.
Merci, madame Adam, de votre comparution. Moi aussi, j'apprécie un mémoire dans lequel on suggère des choses. Je comprends bien que tout le monde est en faveur du principe de cette loi-là et qu'elle doit être adoptée, mais je sais aussi qu'il n'y a rien de parfait et j'apprécie beaucoup que vous nous donniez des choses à modifier.
Maintenant, pour le bien-être et la compréhension de mon collègue de l'Ouest, vous avez donné des chiffres intéressants. J'aimerais avoir les chiffres inverses au Québec. Vous nous dites qu'il y a 4 ou 5 p. 100 des postes en Colombie-Britannique qui exigent le bilinguisme. J'aimerais savoir, par contre, combien de gens au Québec doivent parler les deux langues pour obtenir un poste à la fonction publique. Ça va sûrement démontrer que les gens unilingues de langue française ont beaucoup plus de difficulté à obtenir les postes auxquels vous faites référence.
Mme Dyane Adam: Monsieur Lanctôt, je peux vous répondre en disant que c'est plus de 50 p. 100 des postes au Québec qui ont des exigences linguistiques, c'est-à-dire un niveau de bilinguisme. Cela exclut, bien sûr, la région de la capitale nationale. En effet, au Québec, il est plus difficile pour un unilingue francophone ou anglophone d'avoir un poste s'il n'a pas une certaine compétence dans la langue seconde. D'ailleurs, je voudrais dire que j'ai signalé ce fait à Mme Robillard dans le cadre de l'intervention que j'ai faite auprès d'elle ainsi que du sous-ministre Quail qui menait l'exercice sur la modernisation de la fonction publique. Je leur ai fait part de cette anomalie, si on peut dire, du fait qu'au Québec, on a effectivement des exigences plus importantes.
M. Robert Lanctôt: Pour ne pas dire qu'on le savait, c'est quand même incroyable. Comment peut-on concilier cela et permettre à ces gens unilingues, anglophones ou francophones du Québec, d'avoir accès à la fonction publique? Comme mon collègue le disait, il y a des gens très compétents et brillants dans leur domaine qui peuvent être de langue anglaise ou de langue française seulement. Comment faire pour que ces gens soient capables d'entrer d'abord dans cette fonction publique et ensuite de suivre des cours? Il ne faut pas oublier qu'on ne peut pas apprendre l'anglais ou le français sans le payer, au Québec. Il faut mettre de l'argent, tandis que lorsqu'on fait déjà partie de la fonction publique, cela entre dans le cadre d'une formation payée par le gouvernement. Qu'est-ce que vous pouvez suggérer pour que ces gens puissent y entrer et en bénéficier? C'est pour cette raison que j'ai aimé un peu votre dotation non impérative, parce que ça peut permettre à des gens compétents qui ont le goût de faire partie de cette fonction publique d'y avoir accès. Ce n'est pas juste une question monétaire, c'est aussi parce que dans la fonction publique, on donne du temps aux gens pour l'apprentissage de la deuxième langue. Ailleurs, ce n'est pas toujours le cas; ce n'est pas toujours possible non plus, parce que c'est la production avant tout. Qu'est-ce que vous en pensez?
À (1045)
Mme Dyane Adam: Les contribuables canadiens paient pour la formation linguistique des Canadiens et Canadiennes de différentes façons. C'est nous qui payons pour l'éducation primaire et secondaire des enfants, n'est-ce pas?
Alors, tant le gouvernement fédéral que le gouvernement provincial, dans ce cas-ci Québec, paient pour des cours de langue seconde. Donc, il est possible d'investir--et on le fait plus tôt que tard--dans la formation, dans le développement. Les recherches indiquent tout de même qu'en ce qui a trait à la compétence linguistique, c'est sûrement plus facile de l'acquérir plus jeune.
La possibilité d'apprendre les deux langues officielles, à mon avis, devrait être présente dans toutes les écoles du pays. La meilleure stratégie, si on peut dire, c'est vraiment d'investir plus tôt que tard. Ce qui est important aussi, et c'est pour cela que je le mentionne dans mon mémoire, c'est que les contribuables, par l'entremise du gouvernement fédéral, paient encore pour la formation linguistique des personnes qui ne sont pas bilingues et qui sont dans des postes désignés bilingues. Ce que j'ai proposé aujourd'hui, c'est qu'on devrait, tôt dans la carrière d'un fonctionnaire intéressé à vraiment rester et à servir le public canadien, lui permettre... En ce moment, la formation linguistique est plutôt restreinte à certains groupes de postes. Donc, à mon avis, c'est à ce niveau-là aussi qu'on doit intervenir, mais sur les deux plans.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci, monsieur Lanctôt.
Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
Madame Adam, votre deuxième recommandation porte sur le tribunal de la dotation de la fonction publique. Vous recommandez, je crois, que le tribunal puisse travailler avec aisance dans les deux langues officielles. Votre observation et votre recommandation se fondent-t-elles sur des cas réels où des personnes se seraient plaintes de ne pas avoir été entendues convenablement ou sur la perception d'un parti pris potentiel dans les activités du tribunal?
Mme Dyane Adam: En fait, cela se fonde sur une étude publiée en 1999 par mon prédécesseur, intitulée «L'utilisation équitable du français et de l'anglais devant les tribunaux fédéraux et devant les tribunaux administratifs fédéraux qui exercent des fonctions quasi judiciaires». Dans cette étude, nous avons examiné comment les tribunaux s'acquittent de leurs responsabilités et de leurs obligations en matière de langues officielles, et nous avons la preuve que, dans certains cas, les compétences bilingues des tribunaux étaient insuffisantes pour permettre à une personne d'être vraiment bien comprise par les juges ou par les personnes appelées à prendre une décision dans l'affaire les concernant. Ainsi, il s'agit davantage d'une mesure préventive pour veiller à ce que, lorsque le gouverneur en Conseil procède à des nominations, les compétences bilingues soient assurées collectivement pour nous permettre de nous conformer à notre loi.
M. Paul Szabo: J'en déduis qu'il y a suffisamment d'éléments pour vous convaincre qu'il pourrait y avoir des nuances dans l'argumentation qui se prêteraient mal à la traduction, et que la situation idéale permettrait à une personne de plaider sa cause dans sa langue maternelle, argumentation qui serait reçue dans cette langue par le tribunal, qu'il s'agisse de l'anglais ou du français, en raison de l'importance du contexte particulier. Et pourtant, je croyais que votre recommandation n'était pas aussi précise qu'elle devrait peut-être l'être en ce qui concerne les membres du tribunal. Je ne comprends pas votre recommandation. Cela peut signifier qu'un membre du tribunal doit être de langue maternelle anglaise et un membre au moins, de langue maternelle française, et le critère serait respecté. Ou encore, votre recommandation stipule-t-elle que chaque membre du tribunal doit être bilingue et que, de surcroît, ils doivent tous afficher un niveau de bilinguisme qui permettrait d'éliminer les inquiétudes relatives à la perception des nuances que vous avez soulevées?
À (1050)
Mme Dyane Adam: En fait, je n'ai rien dit à propos de la langue maternelle. En tant que groupe, le tribunal devrait avoir les compétences nécessaires pour entendre une personne dans...
M. Paul Szabo: Permettez-moi de poser une autre question qui pourrait clarifier le tout. Depuis que le tribunal existe, le groupe a-t-il, dans chaque cas, été constitué d'au moins une personne, parfaitement à l'aise en anglais et d'au moins une personne parfaitement à l'aise en français, affichant le niveau linguistique qui répondrait à vos critères, oui ou non?
Mme Dyane Adam: Je ne saurais vous répondre, parce que le tribunal n'existe pas encore. Pour ce qui est d'autres tribunaux, il y en a beaucoup. Vous me demandez de porter un jugement sur une liste de tribunaux, et je ne peux vous répondre par oui ou par non. L'étude révèle que certains tribunaux n'avaient pas les compétences nécessaires pour accueillir les plaintes dans la langue du plaignant et, d'après la loi, le plaignant a le droit d'être entendu dans la langue de son choix et d'être compris. Le tribunal peut être composé d'une seule personne ou d'un groupe de personnes, tout dépend de la nature du tribunal.
M. Paul Szabo: Mais dans votre témoignage, vous avez dit que vous ne vouliez pas avoir recours à l'interprétation.
Mme Dyane Adam: C'est la loi, monsieur.
M. Paul Szabo: Vous avez dit qu'il faudrait que cette personne soit entendue par le tribunal sans l'aide d'un interprète. C'est ce que vous avez dit dans votre témoignage.
Mme Dyane Adam: Effectivement, monsieur, je l'ai dit parce que c'est conforme à la loi au Canada.
M. Paul Szabo: Je comprends, mais vous dites que ce n'est pas suffisant.
Mme Dyane Adam: Non.
M. Paul Szabo: Vous dites qu'un des membres du tribunal doit être bilingue, peu importe la langue dans laquelle la cause est entendue.
Mme Dyane Adam: S'il s'agit d'un tribunal composé de plusieurs personnes, tous les membres doivent comprendre la langue de l'appelant.
M. Paul Szabo: Vous voulez donc que chaque membre du tribunal parle couramment les deux langues officielles?
Mme Dyane Adam: Non. Le tribunal peut très bien se composer de 25 personnes, et une seule entend la plainte, ou trois.
M. Paul Szabo: Nous revenons donc à ma première question. La seule chose que je voudrais savoir, c'est si vous pouvez nous expliquer ce qu'il faudrait inclure dans la loi pour qu'elle vous satisfasse. La majorité des membres du comité doit-elle être bilingue, doit-on avoir au moins un anglophone et un francophone, ou voulez-vous que tous les membres du comité soient bilingues? Vous ne pouvez pas dire quelque chose d'aussi vague que «en tant que groupe». Cela ne rime à rien.
Mme Dyane Adam: Il pourrait être difficile d'être précis puisque les tribunaux sont très différents les uns des autres. Ce que j'essaie de dire, c'est que chaque tribunal doit avoir une capacité bilingue suffisante pour permettre à la personne qui porte plainte d'être entendue dans la langue officielle de son choix. Si, par exemple, vous aviez un tribunal éventuellement composé de 25 membres dont seul un, deux ou trois étaient bilingues et qu'il y avait une liste d'attente pour les services en français, cela m'indiquerait que la capacité bilingue des membres du tribunal ne permet pas d'instruire les causes en français. Une seule personne bilingue pourrait suffire s'il s'agit d'un tribunal composé d'une personne et si la demande est faible. C'est peut-être vague, mais je ne crois pas que cet aspect de la loi doit être trop précis.
À (1055)
M. Paul Szabo: Merci.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Madame Sgro. C'est le deuxième tour, donc vous disposez de cinq minutes.
Mme Judy Sgro: Merci.
J'ai rencontré des gens pour qui cette question linguistique pose d'énormes problèmes. Ils éprouvent une grande frustration puisque malgré toutes les années qu'ils ont consacrées à l'apprentissage de la deuxième langue officielle de notre pays, ils ne parviennent toujours pas à soutenir une conversation dans cette langue. Comme vous l'avez dit, aucun avancement n'est plus possible pour eux. Ils ne décrocheront jamais un poste de sous-ministre parce qu'ils n'arriveront pas à maîtriser la deuxième langue. Que doit-on faire dans pareil cas? Il n'est pas donné à tout le monde d'apprendre une deuxième langue aussi facilement. Quelle aide supplémentaire peut-on offrir pour pallier le problème? Peut-on faire autre chose?
Mme Dyane Adam: Je crois que l'apprentissage d'une langue est une aptitude comme une autre : il faut être motivé, apprendre les rudiments, mais ce qui importe le plus, c'est de s'en servir, sinon c'est peine perdue. Par exemple, on sait que si on ne joue pas au golf régulièrement, on n'excellera jamais. C'est la même chose pour les langues. Ce qu'il faut offrir à nos futurs employés—nos jeunes dans le système scolaire pour le moment—et dans nos milieux de travail, c'est l'occasion d'apprendre et de s'exercer. Le système de formation linguistique de la fonction publique s'est souvent limité à l'apprentissage des connaissances nécessaires pour satisfaire aux exigences linguistiques des postes, et c'est malheureux. C'est pourquoi je crois qu'il faut intégrer les deux langues officielles à la culture institutionnelle et encourager les employés à s'en servir. Dans une récente étude réalisée par le Conseil du Trésor, on a appris que parmi les anglophones bilingues de la fonction publique—environ 72 p. 100 des postes des groupes de direction sont occupés par des anglophones, ce qui veut dire qu'ils sont bilingues—, l'emploi du français est très limité puisqu'ils ne s'en serviraient que 17 p. 100 du temps dans l'exercice de leurs fonctions. Il faut examiner beaucoup plus en profondeur cette question et nous l'avons bien peu fait par le passé.
Mme Judy Sgro: J'en conviens. En effet, le problème de la pratique est énorme. Moi-même, je suis exposée au français à Ottawa, mais dès que je quitte la ville, je n'y suis plus exposée du tout. Je fais du progrès ici pour reculer aussitôt après. Peut-être faudrait-il se demander comment donner plus d'occasions d'exercer nos connaissances. Vous mentionnez un monde idéal, qui n'existe pas pour l'instant pour la plupart des Canadiens. Mais j'avoue que donner l'occasion de parler couramment les deux langues officielles est certainement l'objectif à viser.
Mme Dyane Adam: C'est un idéal, mais il nous faut susciter les occasions, car personne ne le fera pour nous. Il y a dans notre propre fonction publique des secteurs où l'on emploie plus une langue que l'autre. Le programme de formation du fonctionnaire devrait donc lui permettre d'être affecté à des endroits au Canada où il serait en immersion dans l'autre langue. C'est la seule façon d'obtenir des résultats, d'après les recherches effectuées.
Mme Judy Sgro: Merci.
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci.
Je souhaite à nouveau la bienvenue à Mme Robillard, présidente du Conseil du Trésor, et je la remercie d'avoir pris le temps de se joindre à nous pour écouter les témoins et entendre les questions des membres du comité.
Monsieur Lanctôt.
Á (1100)
[Français]
M. Robert Lanctôt: Merci, monsieur le président.
Les chiffres que vous nous avez donnés plus tôt, à mon collègue et à moi, démontrent l'obligation, je pense, qu'il y ait une modification dans le préambule en ce qui a trait au respect de la Loi sur les langues officielles.
Vous nous dites que ce n'est pas le simple fait de pouvoir servir dans la langue de son choix mais bien d'avoir le respect des gens, qu'ils soient unilingues anglais ou unilingues français. Or, on a vu qu'au Québec, il y a un déséquilibre important suite aux demandes qui peuvent être faites. J'aimerais avoir aussi les chiffres qui incluent la capitale nationale, car cela fait aussi partie de la fonction publique. Les chiffres que vous nous avez donnés plus tôt étaient déjà énormes, mais j'aimerais avoir les chiffres incluant la capitale nationale.
Je suis ici pour vous dire merci aussi, madame Adam, pour le travail qu'on a fait dans le domaine du sport amateur. La loi datait de près de 60 ans. Notre amendement et le vôtre avaient été rejetés en comité. Ensuite, par mon travail, nous avons réussi à démontrer aux membres du comité, à l'extérieur et même après, qu'il fallait inclure dans le préambule le respect de la Loi sur les langues officielles. Je pense que le soutien que vous avez donné au Bloc québécois a permis, même si la loi n'est pas encore adoptée, que cela soit accepté et inclus dans le préambule du projet de loi. Donc, c'est faux de dire que ça n'existe pas et qu'aucune loi ne l'a; il faut que le comité le sache. Il y a déjà deux ou trois autres lois qui ont le respect de la Loi sur les langues officielles dans leur préambule.
Bien entendu, vous aurez mon appui pour que ce soit aussi introduit dans cette nouvelle loi pour permettre, non pas de dire que la dualité linguistique vise seulement à permettre de donner un service en français, mais pour que cette loi-là ait du mordant et pour permettre autant à des unilingues anglophones de l'Ouest canadien qu'à des gens du Québec, qu'ils soient unilingues anglais ou français, de pouvoir avoir accès à cette loi. Êtes-vous d'accord sur l'interprétation que je donne?
Mme Dyane Adam: Oui, c'est bien important que cela soit fait, d'autant plus qu'on parle de la fonction publique fédéral, qui est vraiment le coeur même du service au public. Si on n'est pas capables, au sein de notre appareil bureaucratique, d'incarner les valeurs de la dualité linguistique, la qualité du service au public canadien va également refléter cela. Il y a un lien très direct aussi entre notre capacité d'intégrer les valeurs de la dualité linguistique au sein de nos rangs et la capacité de servir le public canadien. De plus, bien sûr, c'est conforme à la Loi sur les langues officielles, qui ne touche pas seulement le service au public, comme je l'ai mentionné lors...
M. Robert Lanctôt: Comment peut-on convaincre les membres du comité qui sont autour de la table? On a eu de la difficulté l'autre fois. Je l'ai fait par un processus autre que celui qui est habituellement utilisé pour pouvoir arriver à nos fins. Lorsqu'on se fait demander en comité pourquoi il faudrait le mettre, puisque la Loi sur les langues officielles existe... Ils ont compris plus tard.
Quel argument peut-on donner pour que les gens de notre comité comprennent immédiatement les raisons pour lesquelles il faut absolument au moins commencer par ça? Ce serait encore mieux s'il y avait des articles précis dans la loi, mais on peut au moins commencer par ça; on fera la révision plus tard, dans sept ans ou durant les sept ans qui sont prévus pour réviser la loi. Comment l'expliquer?
Je sais bien que vous et moi comprenons la grande différence, car on a déjà travaillé dans l'autre sens sur une autre loi, mais quel argument peut-on invoquer pour que les membres de notre comité comprennent bien la différence entre dire que la loi existe et qu'elle doit être respectée, et le fait de le mettre dans le préambule de cette loi?
Mme Dyane Adam: Il y a deux questions auxquelles je dois répondre. Je vais revenir aux statistiques que vous avez demandées tout à l'heure.
Quant à la question de savoir s'il y a un seul argument, ce qui va convaincre une personne peut être différent de ce qui va en convaincre une autre. Mais moi, ce qui me paraît important, c'est que dans le projet de loi, à l'heure actuelle, on a déjà précisé certaines valeurs dans le préambule, par exemple que notre fonction publique soit représentative de la diversité. On a cru bon de mentionner cela dans le préambule.
Quand on parle de dualité linguistique, c'est quand même une valeur constitutionnelle. C'est une des assises très importantes dans la Constitution canadienne, et on a une loi quasi constitutionnelle qui est la Loi sur les langues officielles. Il est important de rappeler cela lorsqu'on parle de représentativité. Le gouvernement a une obligation par rapport à la mise en oeuvre du cadre constitutionnel, et selon moi, une façon de la satisfaire, c'est justement de s'assurer que notre fonction publique fédérale soit très bien encadrée par la loi suprême du pays, qui est notre Constitution.
Pour ce qui est des statistiques, peut-être que M. Langelier pourrait vous répondre.
Á (1105)
M. Gilbert Langelier (directeur, enquêtes spéciales, Direction générale des enquêtes, Commissariat aux langues officielles): Vous avez demandé, pour la région de la capitale nationale, quelle était la proportion de postes bilingues. D'après les chiffres de la fin du mois de mars 2002, la proportion de postes bilingues est de 63 p. 100, et 36 p. 100 des postes sont unilingues anglais.
Mme Dyane Adam: Je pense qu'il n'y a pas de...
M. Robert Lanctôt: ...postes unilingues français.
M. Gilbert Langelier: Des postes unilingues français, il n'y en a pas beaucoup.
M. Robert Lanctôt: Pas beaucoup ou pas du tout?
M. Gilbert Langelier: On dit «postes unilingues». Je n'ai pas la distinction entre «français» et «anglais».
M. Robert Lanctôt: Est-ce que ce serait possible de l'obtenir?
M. Gilbert Langelier: Oui, ce serait possible.
Mme Dyane Adam: Je pense qu'il y aurait une précision à apporter. Les statistiques sont pour la région de la capitale nationale, tant du côté ontarien que du côté québécois. Ces statistiques ne nous permettent pas de préciser les pourcentages des deux côtés de la rivière. On pourrait vérifier si des statistiques sont disponibles et on pourrait vous les transmettre.
M. Robert Lanctôt: Merci beaucoup.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Merci, monsieur Lanctôt.
Lorsque vous ferez vos calculs, vous voudrez peut-être en envoyer les résultats à notre greffière.
Mme Dyane Adam: Je n'y manquerai pas.
Le vice-président (M. Tony Valeri): La dernière question revient à Mme Folco.
[Français]
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je voudrais, moi aussi, quoique bien en retard, vous souhaiter la bienvenue, madame Adam. J'aimerais également vous féliciter d'avoir continué à exercer une pression sur notre gouvernement. Cela a fait que récemment, le premier ministre ainsi que le ministre des Affaires intergouvernementales ont présenté une très belle initiative. Cette dernière sera largement profitable au Canada pour ce qui est de l'apprentissage et de l'usage des deux langues officielles.
Je voudrais aussi féliciter, puisqu'elle est ici, la présidente du Conseil du Trésor. Autant au plan professionnel que personnel, le bilinguisme au Canada--pas uniquement, mais quand même surtout dans la fonction publique--me semble tout à fait fondamental. En effet, en matière de langues officielles, la fonction publique se veut à l'image de la population canadienne. Pour ce qui est de votre démarche, vous avez, bien évidemment, mon entier appui.
Et puisque j'en suis aux félicitations, j'aimerais aussi féliciter mon collègue d'en face, monsieur Lanctôt, d'avoir indirectement appuyé le geste de notre gouvernement libéral. Je pense que M. Lanctôt et moi avons un sentiment assez semblable en ce qui concerne l'importance de la Loi sur les langues officielles et de l'application de cette dernière par toutes les instances gouvernementales à travers le Canada. Je pense qu'on se rejoint beaucoup sur cette question, peut-être pas entièrement, mais beaucoup.
J'ai surtout des commentaires à faire, madame Adam, et relativement peu de questions à poser. Nous savons tous que le niveau de bilinguisme exigé des fonctionnaires par l'entremise des examens n'est pas ce à quoi la majorité des gens s'attendent. Je pense qu'il est bon de mentionner que pour la plupart des gens, être bilingue dans la fonction publique signifie parler couramment les deux langues.
Corrigez-moi si je fais erreur, mais ce n'est pas le moindrement ce qu'exigent les examens de la fonction publique. Ceux-ci sont orientés vers une connaissance de la langue utile pour la réalisation des tâches du ou de la fonctionnaire. Il y a là une nuance importante.
Je peux vous dire qu'en tant qu'ancienne linguiste, j'en sais quelque chose. Il y a un écart énorme entre être vraiment bilingue et être suffisamment bilingue pour obtenir un poste prétendument bilingue à l'intérieur de la fonction publique.
En tant qu'ancienne linguiste, je fais la différence entre la langue orale qui est parlée, et celle qui est comprise. Or, quand vous parlez du tribunal de dotation et de ses membres et que vous dites que la personne qui entendrait la plainte ou l'individu devrait être bilingue, parlez-vous d'un bilinguisme suffisant pour permettre à cette personne de comprendre la plainte dans la langue de l'individu, ou plutôt de compétences linguistiques lui permettant de réagir verbalement dans cette même langue? Je pense qu'il s'agit là d'un point dont on pourrait discuter.
Merci.
Á (1110)
Mme Dyane Adam: On parle ici, je crois, d'une interprétation légale; en vertu de notre loi, le plaignant ou la personne qui se fait entendre doit être comprise. Rien ne dit qu'elle devrait engager un dialogue soutenu avec la personne qui entend la cause. Le point essentiel ici est que la personne entendue soit comprise. C'est ce que notre loi exige, au pays.
M. Robert Lanctôt: Monsieur le président, me permettez-vous une intervention spontanée afin de continuer la discussion sur ce sujet?
Mme Raymonde Folco: Seulement si j'ai le droit de dire revenir sur que pourrait dire mon collègue!
M. Robert Lanctôt: Je veux comprendre la situation précisément. Pour que la cause d'un individu soit bien entendue par le tribunal et que les décisions rendues par ce dernier soient claires, il faut que la personne qui entend la cause comprenne bien l'individu et soit capable de justifier les motifs de sa décision.
Mme Dyane Adam: Je vous donne pratiquement le texte législatif. Il s'agit vraiment d'une obligation de la part du tribunal que de comprendre le plaignant ou la personne qui est entendue dans sa langue.
Vous avez raison. Est-ce que cela va aussi loin que...? Je peux seulement vous dire ce que la loi dit et ce qu'elle ne spécifie pas. Cette loi est peut-être vague, mais je ne peux pas aller au-delà du texte législatif.
M. Robert Lanctôt: En tant qu'avocat, j'aimerais interpréter cela.
[Traduction]
Le vice-président (M. Tony Valeri): Bien.
Merci beaucoup à tous nos témoins.
La séance est levée.