OGGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 24 mars 2003
Á | 1110 |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. John Reid (commissaire d'information du Canada, Commissariat l'information du Canada) |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. John Reid |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne) |
M. John Reid |
Á | 1125 |
M. Ken Epp |
M. John Reid |
M. Ken Epp |
Á | 1130 |
M. John Reid |
M. Ken Epp |
M. John Reid |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
Á | 1135 |
M. John Reid |
M. Robert Lanctôt |
Á | 1140 |
M. John Reid |
Á | 1145 |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.) |
M. John Reid |
Á | 1150 |
M. Tony Tirabassi |
M. John Reid |
M. Tony Tirabassi |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
Á | 1155 |
M. John Reid |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Ken Epp |
 | 1200 |
M. John Reid |
M. Ken Epp |
 | 1205 |
M. John Reid |
M. Ken Epp |
M. John Reid |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Ken Epp |
Mme Judy Sgro |
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne) |
M. John Reid |
 | 1210 |
M. Paul Forseth |
M. John Reid |
M. Paul Forseth |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Robert Lanctôt |
 | 1215 |
M. John Reid |
 | 1220 |
M. Robert Lanctôt |
M. John Reid |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Tony Tirabassi |
M. John Reid |
M. Tony Tirabassi |
M. John Reid |
 | 1225 |
M. Tony Tirabassi |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
M. Paul Forseth |
M. John Reid |
M. Paul Forseth |
M. John Reid |
M. Paul Forseth |
M. John Reid |
M. Paul Forseth |
M. John Reid |
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro) |
CANADA
Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le lundi 24 mars 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Je déclare la séance ouverte.
Aujourd'hui, nous avons avec nous John Reid, Commissaire à l'information du Canada, et son adjoint, Daniel Brunet.
Nous sommes très heureux de vous compter parmi nous aujourd'hui. Je pense que vous êtes au courant de l'information que nous souhaitons obtenir. Nous vous saurions gré d'être le plus directs possible, de façon que nous ayons tout le temps voulu pour les nombreuses questions que le comité ne manquera pas d'avoir.
Soyez les bienvenus.
M. John Reid (commissaire d'information du Canada, Commissariat l'information du Canada): Merci, madame la présidente.
J'ai soumis un document dans les deux langues, et je me demande s'il pourrait être imprimé en tant qu'annexe à la réunion d'aujourd'hui. On pourrait éliminer ainsi un certain nombre de documents, et je pourrais passer directement à mes points principaux.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Oui, nous avons tous une copie. C'est donc acceptable.
M. John Reid: Très bien.
D'abord, je tiens à remercier le comité de l'occasion qui m'est donnée de comparaître et d'aborder un des sujets qui, me semble-t-il, devrait faire l'objet d'intenses discussions de la part du comité. Je veux parler de la menace la plus importante qui pèse contre le principe d'un gouvernement ouvert et responsable et--nommément les problèmes critiques qui touchent actuellement la gestion de l'information au gouvernement du Canada.
Lorsqu'on discute de cette question, on mentionne rarement que l'échec de ces systèmes a une incidence sur les processus de prise de décisions, aux niveaux inférieurs et supérieurs.
J'aimerais vous faire part d'une anecdote, qui concerne Henry McDonald, ancien directeur du Ames Research Center de la NASA, premier témoin à comparaître dans le cadre des audiences d'enquête officielles tenues dans le sillage de la désintégration de la navette Columbia.
Le témoignage de M. McDonald a été rapporté dans un article de l'édition du 7 mars 2003 du New York Times, dont voici un extrait:
Le responsable d'une étude récente sur la sécurité des navettes spatiales a signalé aujourd'hui à la commission chargée de l'enquête sur la destruction de la navette Columbia que les ingénieurs de la NASA n'étaient pas en mesure de relever efficacement les problèmes de sécurité parce que les dossiers de cet organisme n'étaient pas tenus adéquatement. [M. McDonald] a déclaré que les ingénieurs et les gestionnaires de la NASA, y compris Ron D. Dittemore, gestionnaire en chef du programme, faisaient de leur mieux pour régler tout problème lorsqu'ils étaient en mesure d'en déterminer la solution. |
Plus loin dans l'article, on trouvait cet extrait du témoignage de M. McDonald:
Je ne doute absolument pas que des personnes comme Ron Dittemore, quand on leur présente les faits, prennent les bonnes décisions... Mais encore faut-il les leur présenter, ces faits. Je crois que l'accès instantané à toute l'information antérieure de l'organisme pourrait être utile, extrêmement utile à quelqu'un comme Dittemore, lorsqu'il essaie d'évaluer un risque. |
De toute évidence, il n'avait pas accès à de tels documents.
Ce à quoi je tiens, c'est l'efficacité du gouvernement, et il me paraît évident qu'un gouvernement ne peut être efficace--et encore moins responsable--s'il ne crée pas de dossiers adéquats, ou s'il est impossible d'accéder rapidement à l'information existante. On ne peut tenir de débats intelligents, à l'intérieur ou à l'extérieur du gouvernement, si ceux-ci ne reposent pas sur de l'information de qualité optimale.
Au Canada, on a parlé dans le National Post d'un rapport rédigé par le Governance Institute sur la qualité de l'information et des conseils fournis aux cadres supérieurs et au Cabinet. Je cite un passage de cet article.
Le Governance Network s'est entretenu avec 33 hauts fonctionnaires, dont l'ancien greffier du Conseil privé et le titulaire actuel de ce poste, ainsi que des cadres supérieurs du Conseil du Trésor et du Conseil privé. Ces personnes ont dit que le travail du gouvernement «laisse à désirer» en ce qui concerne les enjeux stratégiques majeurs, et qu'un trop grand nombre des politiques gouvernementales actuelles ne sont pas efficaces. En outre, les hauts fonctionnaires interrogés ont déclaré que les mémoires au Cabinet ne sont plus étayés de recherches solides, situation qu'ils attribuent à un relâchement des exigences des ministres. |
Lorsque des document sur les mesures, les décisions et les motifs des fonctionnaires ne sont pas créés, lorsque de tels documents, s'ils sont créés, ne sont pas versés dans un système institutionnel d'indexation des dossiers, ou lorsqu'on laisse aux créateurs de ces documents le soin de les éliminer ou de les archiver sans leur donner de directives précises à cet égard, il n'est plus possible de prendre des décisions intelligentes fondées sur de l'information de qualité. En outre, la responsabilité étatique, composante essentielle de toute saine démocratie, devient aussi impossible.
Pour ma part, je crois que tous nos mécanismes de responsabilisation, y compris notre droit à l'accès à l'information, souffrent du manque d'information. La vérificatrice générale, chaque année, rappelle d'une manière de plus en plus pressante aux Canadiens et aux parlementaires que le processus de vérification, pour être fiable, nécessite des traces écrites de la circulation de l'information.
Les parlementaires et les membres des comités parlementaires se disent consternés du manque de dossiers gouvernementaux, dossiers qui leur seraient utiles dans le cadre de leurs discussions. Enfin, il devient de plus en plus difficile pour les journalistes de consulter les données et les documents originaux du gouvernement, ce qui les oblige à se contenter des communiqués que gèrent les porte-parole officiels avec beaucoup de prudence.
Ceux parmi vous qui ont entendu les déclarations publiques récentes de la vérificatrice générale savent que les préoccupations que j'ai exprimées ne sont ni théoriques, ni confinées aux personnes qui travaillent dans le domaine de l'accès à l'information.
Á (1115)
Dans son rapport au ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, la vérificatrice générale, Sheila Fraser, a signalé que certains dossiers de commandite étaient si incomplets qu'il était impossible de répondre à certaines questions de vérification essentielles concernant l'optimisation des ressources et le caractère licite. Ce rapport a rappelé encore une fois aux fonctionnaires qu'il est dangereux de ne pas tenir de dossiers adéquats dans le but d'éviter d'avoir à rendre des comptes : les personnes qui agissent ainsi risquent en effet d'attirer l'attention des enquêteurs de la GRC.
Pourtant, il arrive que des fonctionnaires reçoivent la consigne de ne pas établir de dossiers, et cet ordre vient souvent des échelons les plus élevés de la hiérarchie gouvernementale. Il est rare que les comités rédigent des ordres du jour, des procès-verbaux ou des rapports de décision, et, quand ils le font, ces documents prennent souvent la forme de notes écrites à la main par les participants. Comme ces notes officieuses ne sont jamais versées dans un système ministériel de traitement des dossiers, elles sont rarement retrouvées lorsque la vérificatrice générale ou toute autre personne demande à les voir.
Comme nous le savons tous, et comme le déploreront les historiens des générations futures, ces notes sont considérées comme des documents temporaires et éliminées en conséquence. On les détruit ou, le jour de sa retraite, on les entrepose ad vitam aeternam dans son garage ou son sous-sol. Nous le savons parce que nous avons trouvé des dossiers dans de tels endroits--parfois même des dossiers plus importants que les notes écrites à la main.
De même, on encourage le recours aux communications orales et aux échanges de courriers électroniques afin d'éviter la création de documents permanents. Grâce à l'adoption du projet de loi d'initiative parlementaire de Colleen Beaumier, les fonctionnaires comprennent maintenant que toute personne qui, en vue d'en empêcher la divulgation future, détruit, dissimule, modifie ou falsifie un dossier commet un délit. Ils savent que toute personne reconnue coupable d'une telle infraction est passible d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximale de deux ans ou d'une amende de 10 000 $.
Comme la destruction ou la falsification de documents ne sont pas des moyens très malins d'éviter de rendre compte de son travail, beaucoup de fonctionnaires préfèrent tout simplement ne pas créer de dossiers du tout.
Par conséquent, et puisque c'est un droit démocratique fondamental qui est en jeu, sans parler de toute la notion de gouvernement efficace et efficient, j'en suis venu à la conclusion qu'il nous faut adopter une loi où seront prescrites certaines règles de base en matière de gestion efficace de l'information. Les bonnes raisons de légiférer en matière de tenue de dossiers sont nombreuses; notamment--et surtout--, cette législation améliorera les décisions prises par le gouvernement et la prestation de ses programmes, et en deuxième lieu elle permettra la sauvegarde d'archives de taille acceptable.
La règle la plus importante et la plus fondamentale sera la suivante: les fonctionnaires doivent établir des dossiers sur leurs actions, leurs décisions et leurs motifs.
Si la première règle concerne la création de dossiers, la seconde touche à leur tenue. Tous les documents doivent être versés dans un système de traitement accessible, convivial et normalisé. À l'heure actuelle, ce sont les disquettes et les disques durs de chaque fonctionnaire qui tiennent lieu de salles des archives à l'échelle ministérielle. Les dossiers, extrêmement décentralisés et mal classés, sont inaccessibles et difficiles à communiquer, ce qui, dans l'avenir, en compliquera d'ailleurs la consultation par les décideurs, les organismes de contrôle, les parlementaires et les demandeurs du grand public.
Ces règles, énoncées dans une loi et accompagnées de dispositions prévoyant des pénalités en cas d'infraction, réussiraient là où les politiques semblent échouer: elles inciteraient réellement le gouvernement à mettre en place les ressources nécessaires à la réalisation concrète de ses engagements.
La réforme de la gestion de l'information, je crois, passe par le recours à la législation, et nous pensons, par conséquent, qu'il est temps de créer et d'appliquer une loi sur la gestion de l'information afin de réglementer le cycle de vie complet de l'information gouvernementale. L'organisme chargé du contrôle et de l'application de cette loi serait aussi déterminé dans le texte de cette dernière.
La loi en question devrait, à mon avis, comporter les six principes suivants:
1. Existence: des dossiers d'information doivent être créés, acquis et tenus afin de rendre compte adéquatement des activités importantes et des processus décisionnels;
2. Accessibilité: l'information créée doit être accessible et communiquée à ceux qui en ont besoin et qui ont le droit de la consulter;
3. Responsabilité: les ministères doivent être tenus de veiller à l'exactitude, à l'authenticité, à la pertinence et à la fiabilité de l'information;
4. Création, conservation et extraction: l'information gouvernementale doit être créée, acquise et conservée uniquement dans le but de répondre à des besoins réels sur les plans des opérations, du droit, des politiques, de la responsabilisation et de l'archivage;
5. Confidentialité et sécurité: la sécurité de l'information doit être garantie afin d'en protéger la confidentialité et l'intégrité, conformément aux exigences opérationnelles, juridiques et stratégiques en la matière;
Á (1120)
6. Gestion du cycle de vie: l'information, peu importe son support ou sa forme, doit être considérée comme une ressource stratégique et gérée en conséquence tout au long de son cycle de vie, de sa création ou de sa collecte à son entreposage, son utilisation, sa destruction ou son archivage.
Je vous prie avec insistance de vous efforcer activement de convaincre le gouvernement de faire de la réforme de la gestion de l'information son principal projet d'infrastructure. Ce faisant, vous contribuerez d'une manière remarquable à l'amélioration de l'efficacité et de la transparence du gouvernement canadien du XXIe siècle.
En conclusion, madame la présidente, je pense que nous devons comprendre que le système est brisé. Le réparer ne se fera pas sans mal, mais les efforts en ce sens doivent débuter le plus rapidement possible.
Je vous remercie.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Merci beaucoup, monsieur Reid, et merci d'avoir condensé votre exposé pour nous allouer plus de temps.
Monsieur Epp, êtes-vous prêt à commencer?
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Oui, comme toujours.
Merci beaucoup, monsieur Reid, d'être venu nous rencontré aujourd'hui.
Je constate que le dernier paragraphe de votre mémoire écrit est plutôt présomptueux. Si personne n'était venu, la phrase que vous utilisez ici, «Je vous remercie infiniment de votre attention», aurait été entièrement vraie. Personne ne vous a interrompu pendant votre exposé. Il n'y a eu ni chahut ni rien du genre.
Voici ma question. Ici, au comité, nous sommes conscients de l'existence d'une tension entre votre bureau et celui du commissaire à la protection de la vie privée. Je pense que cette tension est saine. Je pense que nous en avons besoin. Mais vous avez vous-même attiré l'attention sur ce fait dans votre recommandation sur la confidentialité et la sécurité. Vous parlez de l'accessibilité, vous dites que l'information devait être disponible, triée et accessible, c'est-à-dire cataloguée de manière à ce qu'on puisse trouver ce qu'on cherche.
Ce sont de merveilleux idéaux et pourtant, dans la recommandation 5, vous dites ceci:
La sécurité de l'information doit être garantie afin d'en protéger la confidentialité et l'intégrité, conformément aux exigences opérationnelles, juridiques et stratégiques en la matière. |
Encore une fois, nous sentons une tension, un équilibre à atteindre, je suppose, et j'aimerais que vous nous en disiez un peu plus long à ce sujet dans le contexte du gouvernement et, en particulier, des décisions du Cabinet, qui est ce que nous assimilons au gouvernement. Quand nous utilisons le mot «gouvernement», nous voulons parler du Cabinet.
Cette information nous semble tenue confidentielle. Même l'information la plus élémentaire ne nous est pas accessible à titre de parlementaires et de Canadiens. J'aimerais vous entendre à ce sujet parce que vous semblez plaider en faveur d'une plus grande ouverture. Comment conciliez-vous le besoin de confidentialité et la sécurité des renseignements confidentiels?
M. John Reid: Selon un arrêt récent de la Cour suprême, la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels forment un tout harmonieux. Le commissaire à la protection de la vie privée assume la responsabilité d'une partie de ce tout harmonieux, et j'assume pour ma part la responsabilité de l'autre moitié.
Vous devez cependant comprendre que du tiers à 40 p. 100 de mes activités ont trait à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Lorsque nous menons des enquêtes, nous devons également tenir compte de la question des renseignements personnels. Je suis donc tout le temps appelé à porter des jugements de valeur ou à faire des arbitrages entre l'accès à l'information et à la protection des renseignements.
Ce qui me préoccupe dans l'équation sur la protection des renseignements que vous avez citée, c'est qu'il existe deux types de protection des renseignements. Il y a la protection des renseignements personnels qui concerne les particuliers, qui est fondamentale, mais il y a aussi la protection des renseignements confidentiels du gouvernement, qui prend la forme de restriction à l'accès à l'information et qu'on retrouve dans la Loi sur l'accès à l'information.
À titre d'exemple, on peut refuser une demande d'information pour treize motifs. Quel que soit le régime créé, je tiens donc à ce qu'on respecte intégralement les prescriptions de la Loi sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur l'accès à l'information.
Cela dit, je pense qu'il y a place pour un examen du type d'information qui doit demeurer privée. Nous avons entendu un exemple typique lorsque mon adjoint a comparu devant le comité : nous avons dû nous adresser au Conseil privé et au Conseil du Trésor pour déterminer ce que nous pouvions dire au comité puisque la décision du Conseil du Trésor concernant nos dépenses additionnelles était considérée comme de l'information confidentielle du Cabinet.
En fin de compte, on nous a dit que nous ne pouvions pas vous montrer le document, mais que nous pouvions vous dire quelles étaient les dépenses en question. J'estime qu'il est mauvais que les députés qui étudient les budgets des dépenses supplémentaires ne puissent voir les décisions du Conseil du Trésor. C'est le genre de protection des renseignements confidentiels dont j'aimerais que nous nous débarrassions. Il y a des renseignements confidentiels pour des raisons de sécurité que les comités devraient, à mon avis, étudier, mais je serai toujours d'avis qu'il y a place pour la protection des renseignements confidentiels dans ces domaines.
Á (1125)
M. Ken Epp: Je pense que nous sommes tous d'accord, en particulier dans le contexte de la situation mondiale d'aujourd'hui, pour dire qu'il n'est pas bon que certaines informations concernant le gouvernement soient rendues publiques. Ce faisant, nous compromettrions notre sécurité. Nous ferions courir des risques à nos forces armées et à notre police. Je pense que cela va de soi.
Malgré tout, je continue de m'intéresser aux critères qui s'appliquent à ce qui peut être gardé confidentiel. En début de carrière, j'ai été mêlé à une enquête très malheureuse relativement à un ministre du Cabinet qui avait pris des renseignements confidentiels pour les mettre sur une carte de crédit gouvernementale. Dès qu'une personne agit de la sorte, dès qu'une personne a utilisé une carte de crédit financée à même l'argent des contribuables, l'information passe dans le domaine public. Elle ne devrait plus pouvoir demeurer confidentielle.
C'était mon avis à l'époque, et c'est toujours mon avis aujourd'hui. Je ne crois pas que cela a changé. En fait, c'est pire. Nous n'avons presque plus accès aux dépenses des ministres du Cabinet et à l'allocation de leurs fonds, en particulier les fonds discrétionnaires. Ces renseignements sont considérés comme confidentiels, et nous n'y avons pas accès. Lorsque nous y avons accès, il y a deux réactions. La première, ce sont les retards qui s'accumulent. L'autre, c'est que, lorsqu'il n'y a pas moyen d'agir autrement, on insère l'information dans un nombre de boîtes suffisant pour que nous ne puissions jamais mettre la main sur elle.
J'estime donc que ces règles doivent être radicalement changées, et je tenais, je suppose, à le dire aux fins du compte rendu.
J'ai une autre question qui concerne votre rapport, en particulier la section que vous n'avez pas lue, à la page 3:
Parmi ces mécanismes figurent, entre autres, les droits individuels tels que la liberté d'expression et de réunion, la protection contre les atteintes abusives à la vie privée et le droit à un procès impartial avant d'être privé de liberté ou du droit de propriété. |
Il s'agit d'une innovation au Canada puisque notre Constitution ne garantit pas le droit à la propriété et la jouissance de la propriété privée. Certains tiennent ces droits pour acquis, tandis que d'autres les nient, selon l'interprétation qu'ils en font.
Êtes-vous en train de nous dire que nous devrions faire nommément référence, dans notre Constitution, disons, au droit à la propriété et à la jouissance de la propriété?
M. John Reid: On a débattu de cette question. Je me souviens d'avoir été à la Chambre à l'époque où ces questions ont fait l'objet d'un débat. On a décidé de ne pas inclure une telle question parce qu'elle relève du droit de propriété et du droit civil, qui relèvent de la compétence des provinces. On n'a donc pas donné suite. Les provinces n'étaient pas disposées à accepter une ingérence constitutionnelle du fédéral dans leur champ de compétence.
Ce que je voulais dire ici, c'est que ce sont les libertés générales dont nous bénéficions aujourd'hui. Je cherchais à déterminer le genre de mécanisme de reddition de comptes dont on dispose relativement au gouvernement et à nos propres droits individuels. Je tenais pour acquis que ces dispositions existent bel et bien et que nous y avons tous accès.
Dans le cadre du débat sur le projet de loi C-34, je sais qu'on a apporté des modifications aux droits d'une personne inculpée aux termes de certaines dispositions de la loi, que ces personnes perdent certains droits d'appel devant le tribunal pour la protection des libertés.
M. Ken Epp: Personnellement, je suis d'avis que, au pays, nous ne sommes pas assez libéraux dans ce domaine.
Je veux dire un mot de l'information électronique. Dans une vie antérieure, j'ai moi-même enseigné l'informatique. J'étais là lorsqu'on a inventé les ordinateurs, et j'ai en quelque sorte grandi avec eux jusqu'à ce que je me laisse pour ainsi dire détourner vers ma profession actuelle. Aujourd'hui, j'accuse un peu de retard. Je dirais que le nombre de fichiers informatiques créés tous les jours au gouvernement approche probablement la barre du milliard. Chacun des députés a un disque dur de 40 gigaoctets, et j'imagine que les autres ministères, les fonctionnaires et de nombreux autres employés dans l'ensemble du gouvernement ont des tas de fichiers.
Si on adoptait une règle concernant la tenue de ces fichiers, le monde serait bientôt trop petit pour contenir tous les disques où sont stockés ces fichiers. Il faut donc un mécanisme qui régisse l'élimination de fichiers.
Quand on l'aura fait... prenez mon bureau, par exemple. En ce qui concerne mon propre ordinateur, je prends ce genre de décision par moi-même. Quand je vois un dossier dont je n'aurai probablement plus besoin, je clique, et il est parti.
En fait, il n'est pas vraiment parti; comme vous le savez, les fichiers informatiques--
Á (1130)
M. John Reid: Ça tarde.
M. Ken Epp: Oui. Ils ne sont pas effacés du seul fait qu'on les supprime. Ils sont toujours là. Seulement, ils ne figurent plus dans le répertoire.
Quoi qu'il en soit, nous prenons ce type de décisions à titre individuel. Comment proposez-vous que nous réglementions dans ce domaine, de façon que les renseignements importants pour nos archives... et pour l'information que d'autres personnes ont besoin de connaître, l'information à laquelle travaille une autre personne du gouvernement? Comment enlever à ces personnes le droit de décider des fichiers qu'il convient de garder sans, du même souffle, s'ingérer massivement dans leur vie privée?
M. John Reid: Au sein du gouvernement du Canada, naturellement, les dossiers ne sont pas personnels. Ils appartiennent au gouvernement, et c'est donc au gouvernement qu'il revient de déterminer ce qui est important et ne l'est pas. Il existe une règle pratique en vertu de laquelle on peut supprimer un grand nombre de choses : les documents provisoires peuvent être supprimés assez rapidement.
Il y a dans la Loi sur les Archives nationales du Canada une disposition au sujet de l'information qui doit être conservée et du traitement qu'il convient de lui accorder. La règle de base est donc claire et précise, et elle donne de bons résultats. Le problème, c'est que l'archiviste national n'a pas des ressources qui lui permettent de partir en tournée pour informer les ministères et mettre sur pied un mécanisme adéquat de formation concernant ce qui devait être conservé et ce qui ne devrait pas l'être. Mais la règle est très claire. Lorsqu'elle est appliquée, personne n'a de problème, y compris le commissaire à l'information. La règle existe donc.
Le véritable problème, c'est que le système ne comporte pas de programme de formation sur les documents qui devraient être conservés et ceux qui devraient être éliminés. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'il ne faut pas tout garder. Ce serait de la folie. Regardez ce qui arrive lorsqu'un bureau envoie des documents à l'archiviste national : on les passe en revue et on ne garde que de 5 à 8 p. 100 du total.
Inutile d'avoir inventé la poudre pour comprendre que nous voulons vraiment ne retenir que les documents importants, mais il ne faut pas nécessairement que les personnes appelées à prendre ces décisions soient celles qui ont créé les documents en question dans la mesure où elles ne comprennent pas nécessairement l'importance de leur travail. Il faut que ce soit quelqu'un de l'extérieur qui jette un coup d'oeil, évalue la situation et prenne la décision.
Voici le fond de ma pensée: à l'heure actuelle, on effectue du travail au sein du gouvernement du Canada pour voir ce qu'on pourrait faire d'autre, mais, à l'heure actuelle, la Loi sur les Archives nationales du Canada constitue un instrument très valable, où figurent des règles et des règlements sur les modalités d'élimination de ce genre d'information supplémentaire.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Monsieur Lanctôt.
[Français]
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Merci, madame la présidente.
Il y a un aspect que je veux considérer avant de parler de la gestion de l'information, ce qui est le but ultime de votre allocution aujourd'hui, je le sais. J'aimerais soulever un point qui est d'une importance énorme pour les parlementaires et probablement aussi pour les journalistes et pour la population qui demande des renseignements. C'est au sujet des renseignements qui touchent aux contrats qui existent entre le gouvernement et le secteur privé. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là. Je suis conscient que nous, le Bloc québécois, et au Québec en général, nous voulons toujours protéger le renseignement et la vie privée; c'est très important.
Par contre, on trouve des anomalies vraiment évidentes. On fait des demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et on reçoit toujours les mêmes réponses, à savoir qu'il s'agit d'exceptions, qu'on ne peut pas avoir l'information ni voir les contrats ou les factures parce que c'est privé et que ça pourrait nuire économiquement aux compagnies en question, etc.
Lorsqu'on fait affaire avec un gouvernement, on prend pour acquis que les informations pourront être connues de la population. Mais on en est au point que sur 10 demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, on n'obtient même pas une réponse sur 10. On tombe toujours sur l'exception. Certaines choses sortent à la Chambre des communes. Nous posons des questions aux ministres; on nous répond des énormités et même parfois, je ne dirai pas le mot, mais je ne suis pas certain que ce soit toujours la vérité. On a des preuves, mais on aurait besoin de preuves supplémentaires. Ces preuves supplémentaires sont souvent des documents liés au privé et au public, et pas seulement à la gestion de l'information du fonctionnaire, ce qui est écrit sur le papier. La loi doit être changée.
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais nous avons besoin de ça pour faire notre travail, et probablement que les journalistes en ont besoin aussi. Les gens qui sont intéressés à avoir de l'information publique devraient y avoir droit, parce que le contrat est avec un gouvernement. Arrêtez de nous dire que c'est du privé et que ça pourrait nuire à la compagnie concernée. Si la compagnie veut faire des affaires avec un gouvernement, elle doit respecter les normes et on doit pouvoir obtenir les documents. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Á (1135)
[Traduction]
M. John Reid: C'est une question très intéressante, madame la présidente, et nous y sommes régulièrement confrontés. On porte sans cesse en appel les décisions relatives à l'information sur les marchés.
Ce qui se produit, c'est que tout marché intervenu entre le gouvernement et un particulier ou une société est, dans les faits, un document public. Il est accessible en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.
Deuxièmement, la société qui présente une soumission pour l'obtention d'un contrat gouvernemental peut laisser entendre que certaines informations sont sa propriété exclusive et sont par conséquent protégées aux termes de la Loi sur l'accès à l'information. Souvent, c'est vrai. Parfois, c'est faux.
Troisièmement, vous avez accès à la valeur du total du contrat, mais pas nécessairement à la façon dont il est ventilé en sections parce que cela aurait pour effet de trahir des informations commerciales.
De façon générale, cependant, vous devriez pouvoir obtenir le document contractuel dont vous faites la demande. Vous devriez pouvoir savoir qui l'a signé pour le gouvernement et le secteur privé. Vous devriez pouvoir accéder aux modalités. En fait, il ne devrait y avoir que des restrictions restreintes.
En général, nous constatons que les problèmes s'expliquent par la nature de l'information que la tierce partie--en l'occurrence l'entrepreneur--souhaite retenir: s'agit-il d'informations commerciales vraiment significatives qui, si elles étaient rendues publiques, auraient un effet négatif sur l'entreprise.
Il n'y a pas si longtemps, nous avons traité un contrat de ce genre. Après l'avoir examiné, nous en sommes venus à la conclusion que l'information jugée confidentielle par la société ne l'était pas vraiment. Nous avons donc recommandé que le document soit rendu accessible. Si un document renferme de l'information confidentielle exclusive à la société et que cette dernière l'a protégée, nous opterons pour la protection. Dans certains cas, l'information exclusive contenue dans le contrat se trouvait aussi dans le site Web de la société : là, nous avons recommandé qu'elle soit rendue publique. Nous tentons donc de faire enquête à ce sujet et sur ces questions avec le plus de soins possibles.
En ce qui concerne les marchés, la protection des renseignements confidentiels n'est pas vraiment un enjeu dans la mesure où le marché, dès l'instant où il est signé par une entité publique, devient public. Il devrait vous être accessible, sauf en ce qui concerne les exceptions que j'ai évoquées.
[Français]
M. Robert Lanctôt: Exact. Je suis content de vous entendre sur ce point-là. Mais pour aller un peu plus loin, j'aimerais vous entendre justement sur les exceptions qui sont prévues à l'article 16 de la loi. Lorsqu'on regarde l'énumération de ces exceptions, on se rend compte que beaucoup d'informations devraient être publiques et ne le sont pas.
Il devrait peut-être y avoir une exception à l'exception, qui deviendrait la règle, pour qu'on puisse travailler. Nous, on est au Parlement 24 heures sur 24 pour que l'on rende compte, pour que l'on rende imputable. Dans la bouche des ministres, on entend ces deux mots-là 50 fois par jour, je pense. Mais on fait des lois de plus en plus antidémocratiques, on fait des lois comme celle qu'on a vue sur l'antiterrorisme, comme C-17. On a beaucoup de lois qui minent un peu la protection de la vie privée mais qu'on met au secret entre les mains d'un ministre, que ce soit le ministre de la Défense nationale ou un autre qui soit lié à ces nouvelles lois. Ces lois, soit dit en passant, sont censées être des lois contre le terrorisme, mais elles diminuent grandement la démocratie du pays et les droits de tous les gens qui en font partie.
Pourquoi n'y a-t-il pas une exception à l'exception lorsqu'un député ou un parlementaire pose des questions précises à un ministre à la Chambre des communes? Je comprends qu'on veuille protéger la vie privée ou les informations confidentielles d'une compagnie privée, mais si, comme vous le dites, chaque fois qu'il n'obtient pas les informations--c'est à peu près 9 fois sur 10--, le député ou le parlementaire est obligé de porter plainte et d'aller devant le tribunal pour qu'on lui explique pour quelles raisons la confidentialité est obligatoire ou non, on ne pourra jamais bien faire notre travail.
Et c'est la situation actuelle. On a des dossiers très chauds et des informations qui ne devraient pas être confidentielles. Pour les dossiers à la Chambre des communes, on devrait être relevés de ces exceptions de l'article 16 parce qu'on a trouvé des lacunes, on a trouvé des réponses «erronées». Les compagnies devraient nous donner les informations. Cela devrait primer sur la protection pour des raisons commerciales ou autres. J'aimerais que vous me disiez si on pourrait avoir le privilège d'avoir une exception à l'exception.
Á (1140)
[Traduction]
M. John Reid: Ce qu'il importe de reconnaître en ce qui concerne la Loi sur l'accès à l'information, c'est qu'elle a constitué le système de sécurité des documents gouvernementaux. Lorsqu'il cote un document pour indiquer s'il peut ou non être rendu public ou si l'information qu'il renferme peut être rendue publique, le gouvernement en revient toujours à la Loi sur l'accès à l'information. Il s'agit donc de notre document fondamental en matière de sécurité.
Avant la Loi sur l'accès à l'information, nous disposions de systèmes en vertu desquels les documents étaient considérés comme «confidentiels», «très secrets» ou «strictement personnels». Après l'avènement de la Loi sur l'accès à l'information, tout a été quantifié et qualifié, et les faits étaient examinés à l'extérieur du gouvernement par l'entremise du Commissariat à l'information du Canada. Il s'agit donc de notre système fondamental de cotation des documents.
Si vous proposez qu'on permette aux députés de contourner la loi en posant des questions à la Chambre des communes, cette dernière, bien entendu, n'a plus de sens, parce qu'il s'agit d'un lieu des plus publics. Je sais bien que le gouvernement a, de temps à autre, rendu des renseignements publics en comités fermés, à huis clos, et je sais qu'il arrive parfois que le gouvernement rende l'information disponible en dehors du système. Par exemple, il arrive souvent qu'on rende publique de l'information considérée comme confidentielle au Cabinet.
La question fondamentale est donc la suivante : peut-on se substituer à la loi? Non, on ne peut se substituer à la loi, mais on peut l'examiner pour déterminer si les critères élaborés dans les années 70 s'appliquent toujours au début du siècle actuel.
Les critères en question ont été élaborés dans les années 70, et la loi a été adoptée en 1982. Elle est entrée en vigueur en 1983. Le gouvernement a constitué un groupe de travail, qui a soumis un rapport sur la pertinence des dispositions législatives actuelles. J'en profite pour vous dire que les recommandations du groupe de travail, si elles étaient appliquées, se traduiraient par de nombreuses restrictions supplémentaires à la libre circulation de l'information par rapport à la situation actuelle. À mon avis, il s'agit d'un ensemble de propositions «anti»-accès à l'information.
J'espère que votre comité ou un autre comité s'attaquera un jour à la très difficile tâche qui consisterait à examiner la loi et à l'analyser du point de vue de la pertinence de ces restrictions dans le contexte actuel. Comme vous le savez, les tribunaux ont pour mandat d'interpréter les lois adoptées par le Parlement, et ce sont ces interprétations qui déterminent la façon dont l'information circule aux termes de la loi. Je n'y peux rien. Le commissaire à l'information est une création de la loi, et il doit obéir à la lettre de la loi. Le gouvernement doit lui aussi s'y conformer.
Dans certains cas, il y a des exceptions. Il y a ce que nous appelons la «primauté de l'intérêt public», qui permet au gouvernement de déterminer s'il est dans l'intérêt public que telle ou telle information soit divulguée. Il y a d'autres aspects de la loi en vertu desquels le gouvernement n'a aucune marge de manoeuvre. Du point de vue de la protection des renseignements confidentiels, par exemple, il ne peut pas communiquer l'information. Dans d'autres cas, il doit pouvoir prouver que la communication de l'information lui portera préjudice à lui ou encore à l'institution concernée.
Ce sont les trois critères en vertu desquels l'information est communiquée, et je pense qu'ils devraient être examinés. J'ai moi-même plaidé en faveur d'un tel examen parce que, après 20 ans, la loi donne des signes de vieillesse. La fonction publique elle-même a déjà mené une enquête, soit le rapport auquel j'ai déjà fait allusion, et les députés devraient le faire à leur tour.
Á (1145)
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Merci beaucoup, monsieur Lanctôt.
Monsieur Tirabassi.
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente, et je tiens à remercier nos témoins de leur comparution d'aujourd'hui.
Monsieur Epp vous a posé deux ou trois questions qui m'intéressent tout particulièrement, en ce qui concerne la relation que vous entretenez avec le commissaire à la protection de la vie privée--vous avez fourni une réponse satisfaisante--ainsi que la tenue des dossiers électroniques et tout ce qui en ressort. Je vais donc m'intéresser à la question du public par rapport au privé.
Effectuez-vous des enquêtes sur le secteur privé ou effectuez-vous des comparaisons avec ce secteur--si, par exemple, une grande multinationale fait faillite et qu'il y a des enquêtes subséquentes--avec la façon dont ses informations étaient communiquées, sa tenue de dossier, toute sa gestion de l'information? Effectuez-vous ce genre de comparaison?
M. John Reid: Non. Nous observons, mais nous n'avons pas la capacité d'aller au fond des choses. Nous consacrons pas mal de temps--moi, en tout cas, à l'étude de tout le processus de gestion des documents. Je peux dire que la situation n'est bonne nulle part. C'est un problème des plus épineux pour tout le monde. Chacun a le sentiment de subir le même genre de pression, et chacun a le sentiment d'être victime de la même forme d'absence d'accès à l'information. Dans un tel contexte, lorsqu'on n'a pas accès aux données aussi rapidement qu'on le souhaiterait, il devient très difficile de prendre des décisions intelligentes.
De façon générale, les entreprises du secteur privé ont une portée beaucoup plus limitée. Par conséquent, il est beaucoup plus facile de comprendre la nature de la base de données et son importance. Le dilemme auquel le gouvernement est confronté, en raison de la portée et de l'étendue de ses activités, vient de la difficulté d'établir les documents importants et les moyens de les conserver.
Il y a un autre aspect à ce problème, et il s'agit de... même dans les organisations complexes. Je vous ai présenté des citations tirées des audiences de la NASA. Voilà qui montre bien que, même dans les organisations à l'avant-garde de l'innovation technologique, il arrive que la gestion de l'information soit déficiente, ce qui a des effets directs sur la qualité des décisions qui sont prises.
Nous avons d'amples preuves de la crise de l'information que traverse le gouvernement du Canada, étant donné qu'il ne peut accéder à l'information qu'il souhaite avoir et dont il a besoin pour prendre ses propres décisions de façon opportune, au niveau politique et bureaucratique.
J'hésite donc toujours à dire que la situation au gouvernement du Canada est pire que celle de quiconque. Je pense qu'il est en crise. Je ne suis pas en mesure de faire de comparaison avec d'autres gouvernements, ni avec le secteur privé, mais je sais que chacun est aux prises avec toute la question de l'information et de la gestion de l'information.
Je profite de l'occasion pour dire que la décision du gouvernement de tenter de faire du Canada l'un des pays les plus branchés du monde d'ici 2004 (on a maintenant reculé l'échéancier à 2005) a été une tentative très audacieuse de faire face au monde électronique, du point de vue du cyberespace et du point de vue de la documentation électronique et de sa gestion. Pour être le gouvernement le plus branché au monde, on doit avoir un très grand nombre de documents sur support électronique et être en mesure de savoir où ils sont. Ce n'est qu'à cette condition qu'on est en mesure de répondre. Je crois donc qu'il s'agit d'une initiative fort valable.
J'ai déjà dit, en réponse à une question de M. Epp, que des études étaient en cours au Conseil du Trésor. Il serait peut-être utile que le comité se renseigne un jour au sujet de ces études et détermine en quoi elles consistent pour faire le point sur la situation. De même, j'ajoute qu'il y a deux ou trois sites Web intéressants dans le site général du Conseil du Trésor portant sur la gestion de l'information.
Á (1150)
M. Tony Tirabassi: Je serais simplement curieux de savoir quel genre de demandes de renseignements vous recevez. À quel point le grand public s'intéresse-t-il à la question? Quelle est la nature des demandes de renseignements? Proviennent-elles des particuliers, des groupes, des sociétés commerciales? Demande-t-on peut-être des renseignements sur ce qui s'est passé ici à la séance du comité aujourd'hui ou sur ce qui s'est passé à la période de questions? Pourriez-vous me donner une idée globale du genre de demandes de renseignements qui est adressé à votre bureau?
M. John Reid: Environ 40 p. 100 des demandes de renseignements adressées au gouvernement proviennent du milieu des affaires. Les députés sont à l'origine de 3 à 5 p. 100 environ des demandes, les journalistes de même, les universitaires, environ 1 p. 100; le grand public est à l'origine du reste.
Le sujet de mes enquêtes provient des demandes des gens qui me disent qu'ils ont reçu des documents et qui affirment: «On a refusé de me révéler les renseignements que je souhaitais obtenir.» Par conséquent, je ne vois que 10 p. 100 environ de ce qui arrive, et ce sont 10 p. 100 qui font l'objet d'une autosélection.
À titre de particulier, vous pouvez demander d'obtenir des documents sur un sujet qui vous intéresse, et vous pouvez obtenir des documents où les ratures sont très nombreuses, où il y a beaucoup d'éléments qui ont été expurgés, mais vous pouvez aussi y trouver les renseignements que vous y cherchiez, alors, vous n'allez pas vous plaindre. Un journaliste peut obtenir le même genre de documents, ou un député peut obtenir le même genre de documents, et il dira: «On refuse de me donner ce renseignement, et je vais porter l'affaire en appel.» Le libre-choix de la personne intervient donc.
Lorsque nous recevons une plainte, nous commençons par dire à tous que nous l'avons reçue. Le dossier est confié à un de nos enquêteurs, et la première étape de notre démarche consiste à regarder le dossier dans son ensemble--c'est-à-dire tout ce que le ministère a acquis au moment de rechercher le renseignement demandé. Nous examinons donc les documents originaux, puis nous regardons les documents qui ont été traités--et avec les exceptions.
Puis nous passons cela en revue, nous nous adressons au ministère et nous disons: bon, pourquoi avez-vous expurgé cet élément, quelle en est la justification? Quelle partie de la loi est en cause? Avez-vous déterminé s'il s'agissait bel et bien d'une exception? Avez-vous cherché à voir s'il pouvait y avoir un effet préjudiciable? Avez-vous essayé de voir si l'intérêt public suffisait pour que cela se fasse?
À la fin de l'enquête, qui, de nos jours, dure en moyenne de six à sept mois, le commissaire à l'information tire une conclusion et prend une décision, dont il fait ensuite part à la personne qui a porté plainte et au ministère touché. Voilà donc notre démarche.
Comme je l'ai mentionné à M. Lanctôt, nous recevons plusieurs plaintes tous les ans en rapport avec les marchés de l'État. Nous savons quelles questions il faut poser, et nous sondons les intéressés.
De fait, le cas des marchés est relativement facile, car il n'y a pas des tonnes et des tonnes de documents qu'il faudrait parcourir.
M. Tony Tirabassi: Très bien.
Voilà pour moi.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Si le comité est d'accord, je glisserai ici une question rapide.
Monsieur Reid, vous avez mentionné plus tôt le fait que, souvent, les bureaucrates de haut niveau reçoivent pour consigne de ne pas dresser le procès-verbal de diverses réunions. Jusqu'à quel point est-ce là un problème et que pourrions-nous faire pour régler le problème? Enfin, le procès-verbal expose de façon exacte la démarche qui a conduit à une décision, prise à un moment donné. Comment faites-vous pour vous assurer que les procès-verbaux sont dressés, sans, en même temps, être surchargés de documents, comme nous l'avons déjà vu, dans l'ensemble du système?
Á (1155)
M. John Reid: Ce qui est intéressant, c'est que, avant l'avènement de la Loi sur l'accès à l'information, la tenue des procès-verbaux était chose courante. Une fois la loi instaurée, la pratique a cessé. Dans bien des cas, quand nous avons posé la question, les responsables ont justifié cela en disant que c'était pour des raisons financières; ils épargnaient le coût d'un secrétaire et de quelques autres personnes et tout le reste.
Songez tout de même à ceci. Nous avons déjà eu des cas où quelqu'un a demandé des documents, puis, durant notre enquête, nous avons constaté qu'il en avait peut-être été question à la réunion matinale qu'organisent tous les ministères. Nous disons: «Pourrions-nous voir le procès-verbal?» Il n'y a pas de procès-verbal. «Pourrions-nous voir votre ordre du jour?» Il n'y a pas d'ordre du jour. «Est-ce que nous pourrions voir les livres parallèles que vous tenez, à ce moment-là?» Eh bien, le gouvernement ne souhaite pas qu'on voie les livres parallèles qu'il tient, mais, maintenant, il n'y a que là que l'on consigne les choses.
Il y a donc des cas où les hauts fonctionnaires, appelés à révéler ce qui s'est passé durant la réunion, diront: «Je ne m'en souviens pas, c'était il y a six mois.» Eh bien, comment fait-on pour mener une organisation complexe comme celle d'un grand ministère, quand il y a une réunion tous les matins, mais que le procès-verbal n'est pas tenu? Comment sait-on ce qu'on a décidé? Comment fait-on pour rendre des comptes? Si vous prenez une décision, il faut assurer le suivi pour veiller à ce que la décision soit bel et bien mise à exécution de la manière prévue à la réunion, n'est-ce pas?
J'aborde donc la question non pas du point de vue de l'accès à l'information, forcément, mais plutôt du point de vue d'un gouvernement efficace et compétent. Et ce que je constate, dans toute une série de secteurs, c'est que les documents nécessaires ne sont pas établis.
Vous arrivez dans un ministère et vous dites aux fonctionnaires: «Pourquoi cette démarche n'est-elle pas en place?» Il y a six mois, nous avons reçu l'ordre de procéder de cette façon. «Pourrions-nous voir cet ordre?» C'était un ordre verbal. On nous l'a donné au téléphone. «Qui vous l'a donné?» Le responsable. Alors, vous vous adressez au responsable, qui dit: «Je ne m'en souviens pas, mais j'imagine que s'il a dit cela, je l'ai fait.»
Comment avoir un gouvernement efficace en procédant de cette façon?
La question devient donc la suivante: Si la mentalité de la fonction publique est telle que la tenue des dossiers appropriés n'est pas une chose qu'il faut absolument faire, alors il me semble qu'il faut prévoir, dans les lois, l'obligation de tenir des procès-verbaux.
Je vous admettrai que c'est avec beaucoup de réticence que je suis arrivée à cette conclusion, car je ne suis pas d'avis qu'il nous faut accumuler les lois. Mais quand je constate l'effondrement de la culture de la tenue de dossiers et l'effondrement de la culture de la transparence, alors il me semble qu'il faut trouver une autre façon de procéder.
J'ai proposé que nous utilisions la voie législative. Il existe peut-être d'autres façons de procéder, et je suis prêt à en débattre.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Merci beaucoup, monsieur Reid.
Monsieur Epp, voici le second volet de questions.
M. Ken Epp: Merci.
Bien sûr, vous savez ce que cela va donner. Si on adopte une loi qui dit que toutes les réunions doivent comporter un ordre du jour et être consignées dans un procès-verbal, alors les gens vont simplement cesser de se réunir. Ils vont se réunir officieusement, autour de la fontaine, et, purement par hasard, poseront une question à quelqu'un...
Monsieur Reid, je crois que la raison tient à un mécanisme de défense psychologique très simple: de façon générale, nous avons tendance à éviter d'être puni. Il est très rare que quelqu'un demande des renseignements à un fonctionnaire--ou même à un député, en invoquant le droit d'accès à l'information--en vue de louer sa conduite. Habituellement, c'est qu'on veut s'attaquer à lui parce qu'il aurait fait quelque chose de répréhensible ou de stupide. La démarche est utilisée à des fins politiques et elle est utilisée aussi pour obtenir des comptes.
Je suis membre de l'opposition et je crois que, légitimement, mon rôle consiste notamment à faire que les responsables gouvernementaux demeurent toujours vigilants. Et une partie de la crainte qu'ils ont devrait tenir au fait qu'on pourrait découvrir leurs agissements.
Alors, pour ce qui est de la petite phrase que vous mettez ici, selon laquelle il en résultera notamment de meilleures décisions--il faut dire que si les gens croient qu'on va découvrir ce qu'ils font ou qu'il y a des chances raisonnables qu'on le fasse, alors ils ne le feront pas.
De fait, j'ai fait cela moi-même avec les membres de mon propre personnel au début de mon mandat. Je leur ai dit: tout ce que vous écrivez, présumez que cela va faire la une du journal local; songez donc à ce que vous écrivez, quel que soit le contexte. Je crois que c'est un réflexe.
Alors, légiférer pour s'assurer que tous ces documents seront établis--je crois que les gens vont alors trouver soit des façons de se dérober--ou peut-être même, je ne sais pas, falsifier le document, ou omettre certains éléments considérés comme pouvant donner lieu à des problèmes à l'avenir.
Je ne crois donc pas qu'il y ait de solution.
Votre réaction...
 (1200)
M. John Reid: J'ai eu moi aussi la même réflexion. En fin de compte, j'en suis venu à la conclusion qu'il faut faire quelque chose, parce que la situation actuelle n'est bonne pour personne. Au moins, si vous exigez qu'un procès verbal soit tenu, que les documents soient créés là où il faut qu'ils soient créés, les gens sont obligés. Je m'attends à ce que les gens se plient à ce genre d'obligation. Tout de même, la culture de la fonction publique de nos jours est telle que les documents ne sont pas créés dans les cas où il faut qu'ils le soient.
Ce qui me tracasse, c'est que les documents qu'il faut créer ne le sont pas au détriment de l'efficacité dans une organisation grande et complexe. Il me paraît assez amusant de constater que les deux seuls cas où des procès-verbaux adéquats sont tenus sont celui du Cabinet et celui des comités parlementaires et du Parlement lui-même.
M. Ken Epp: Oui. Tous les mots que nous prononçons ici--y compris ceux que je viens de prononcer--sont enregistrés pour la postérité. Je ferais mieux de faire attention à ce que je dis.
J'avais une autre question à propos de votre exposé... et j'ai oublié ce que c'était, car vous m'avez lancé sur une autre voie.
Ah, oui, pour revenir au ton général de votre exposé, l'idée est que la transparence découle de la tenue de dossiers et de l'accessibilité à ces dossiers. Citant le Vérificateur général, vous dites: «L'information est la composante qui alimente la reddition de comptes au gouvernement.» Il y a donc cet élément de comptes à rendre qui s'applique au droit d'accès à l'information.
Bon, je veux vous poser une question et je veux que cela soit porté au compte rendu. Cette année, le match de la Coupe Grey à eu lieu à Edmonton. Toutes les semaines, je fais la navette entre Ottawa et Edmonton. Et j'ai remarqué qu'il y a eu, ce week-end là, un plus grand nombre de députés en visite qu'à l'habitude. J'ai donc essayé de déterminer combien de billets d'avion et combien de notes d'hôtel avaient passé aux frais de la princesse, à Edmonton, entre ces deux dates. J'ai demandé à connaître les chiffres de la Chambre des communes. Ce n'était pas une demande extraordinairement complexe. Je voulais savoir combien de députés il y avait, qui ils étaient, à quel moment ils sont arrivés, à quel moment ils sont partis. J'ai donné comme période de référence, je crois, du lundi avant la Coupe Grey jusqu'au mercredi suivant, juste pour voir quels seraient les frais de déplacement.
On a refusé de me donner ce renseignement. On m'a dit que je ne pouvais l'obtenir, que c'était secret.
Je ne saurais croire qu'il s'agirait, disons, d'une question capitale sur le plan de la sécurité mondiale. Je ne saurais croire qu'il s'agirait d'autre chose que de dire: nous ne voulons simplement pas que les contribuables sachent, que, à leurs frais, plusieurs députés et leur famille sont allés voir le match de la Coupe Grey. Je crois vraiment que c'est cela qui est arrivé.
Je ne peux obtenir le renseignement; je ne peux donc rien faire avec le renseignement. Je ne peux toujours pas l'obtenir. Même le fait de le dire ici, pour le compte rendu public, équivaut à une insinuation, comme quiconque pourrait le dire. Enfin, je connais le visage d'à peu près tous les députés. Cela fait dix ans que je les côtoie ici.
Seriez-vous d'accord pour dire que c'est le genre de renseignements qui devrait être facilement accessible pour que, sur le Web, disons, n'importe quel citoyen du pays puisse cliquer sur Ken Epp et voir la liste complète de ses déplacements? Serait-ce déraisonnable?
 (1205)
M. John Reid: Vous devez d'abord comprendre que la Chambre des communes échappe à la Loi sur l'accès à l'information--
M. Ken Epp: Je le sais.
M. John Reid: --elle n'est donc pas visée. Les députés ont donc la possibilité de créer n'importe quel système d'information qu'ils souhaitent avoir, pour eux-mêmes. Ce serait donc une question qu'il vous faudrait débattre entre députés, à savoir si vous voulez cela, oui ou non. Je ne sais pas quel comité serait chargé de l'affaire, mais c'est là que cela se ferait.
Bon, je crois savoir qu'il y a certains députés qui, sur leur site Web personnel, produisent ce genre de renseignements, et c'est un choix qu'ils font. Mais nous avons étudié la question des comptes de dépenses et nous avons déterminé que dans les cas où des fonds publics sont utilisés, il faut rendre compte de cette utilisation. Par conséquent, nous avons toujours pris pour position que les renseignements sur les dépenses des gens qui font partie de la structure gouvernementale sont accessibles sur demande.
Cela s'est bien appliqué aux ministres jusqu'à ce que le Conseil du Trésor décide de leur épargner cette responsabilité. Plusieurs affaires se retrouvent actuellement devant les tribunaux à ce sujet en ce moment; je n'en dirai donc rien de plus.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Monsieur Epp, vous avez eu sept minutes et demie, au deuxième volet.
M. Ken Epp: Ah, je m'excuse. C'est fou comme le temps file quand on s'amuse, madame la présidente.
Mme Judy Sgro: Je le sais.
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Merci, et je m'excuse d'être arrivé en retard.
Je crois que le désir de savoir du grand public est plus grand que ce que concèdent les autorités centrales. Nous arrivons à l'ère de l'informatique, et l'accès à l'ordinateur personnel au Canada, par habitant, si je comprends, est plus important que dans la plupart des pays du monde. Le gouvernement va devoir réagir à cette attente de la collectivité.
J'ai vu le changement moi-même, même pour la diffusion directe d'informations au public durant des élections. J'ai été élu en 1993, et j'ai compris le rôle très limité des sites Web et du courriel en 1993. J'ai été témoin de tout un changement en 1997. En l'an 2000, un candidat sans site Web en bonne et due forme n'était même pas dans la course. Il y a donc eu une évolution énorme de ce côté-là, et, de même, du côté des ministères.
Qu'est-ce qu'on dit: la forme suit la fonction? Nous avons la capacité technique de faire quelque chose, puis, à un moment donné, le contexte de réglementation et l'éthique et tout le reste finit par suivre. Vous pourriez-nous dire ce que vous pensez de cette idée de la forme qui suit la fonction.
L'horizon technique est toujours très loin de nous. Vous avez parlé du Parlement, mais qu'en est-il au gouvernement lui-même? Les gens du gouvernement ont fait beaucoup de déclarations, et nous mettons beaucoup d'argent dans cet aspect des choses, mais je me demande vraiment où nous en sommes, selon votre évaluation générale, si nous suivons le mouvement, et si nous faisons vraiment ce qu'il faut à cet égard, surtout à la lumière des conférences qui s'en viennent à Ottawa à propos de toute cette question du gouvernement en tant que tel et sa population. Le gouvernement exerce toutes ces activités en son nom, et néanmoins, je me demande parfois si cette technologie sert vraiment... parce qu'on peut se servir de la technologie pour cacher les choses aussi. Avec l'invention de tous ces centres téléphoniques--et appuyez sur ce bouton-ci et appuyez sur ce bouton-là--on ne peut plus parler à personne. Ensuite, il y a les lettres générées par ordinateur et tout le reste.
Vous pourriez nous dire ce que vous en pensez--la mesure dans laquelle la rhétorique correspond aux véritables politiques, par rapport à l'évolution de la technologie.
M. John Reid: Je crois que le projet que le gouvernement a mis en branle--faire du Canada le pays le plus branché du monde--s'est révélé très bon. Je crois qu'il progresse. Il y a certainement eu des accrocs, mais c'est un projet qui vaut la peine. Beaucoup d'efforts y ont été consacrés, et c'est très bon. Par ailleurs, les renseignements qu'il vous faut, la gestion des documents, est une question que les hauts fonctionnaires n'ont pas vraiment réglée d'une manière particulièrement cohérente. Il y a au Conseil du Trésor des groupes de travail qui essaient de faire quelque chose, mais nous n'avons encore rien vu pour ce qui est d'une politique.
Je crois donc que les choses progressent assez bien à l'avant-scène. À mon avis, c'est à l'arrière-scène qu'il faut y mettre l'effort et y mettre de la motivation.
L'autre observation que je pourrais formuler, c'est que je me soucie justement de l'arrière-scène, parce que c'est là que se trouvent les renseignements. Et les renseignements représentent la question que je connais le mieux, car c'est ce qui intervient quand les gens souhaitent obtenir des renseignements. Je me suis intéressé aux questions relatives à la gestion des documents parce que nous n'arrivions pas à trouver le matériel qui, selon les dires de tous au ministère, aurait dû être là. Je me suis intéressé à la question en raison de l'incapacité pour le gouvernement de produire la documentation demandée.
Je me suis intéressé encore à la question quand j'ai découvert que nous demandions des recherches supplémentaires et que nous trouvions beaucoup plus de renseignements qui se rapportaient à la demande en tant que telle. Alors, nous avons passé un an environ à travailler à la gestion de la documentation, et c'est à ce moment-là que j'en suis arrivé à déclarer qu'il y avait une crise au gouvernement en ce qui concerne la gestion de ces fonds d'information.
Je dirais donc que les responsables font un bon travail à l'avant-scène, mais un travail moins intéressant à l'arrière-scène en ce qui concerne la gestion de l'information.
 (1210)
M. Paul Forseth: Nous avons cette rubrique générale pour dire: «Je ne sais pas ce que je ne sais pas» et, vraiment, on ne sait rien. Par contre, quand la porte commence à s'ouvrir et que quelqu'un découvre ce qu'il ne sait pas, c'est la première prise de conscience. C'est peut-être alors la colère ou une idée qui chauffe lentement l'esprit: «Bon, je commence à comprendre toutes ces choses que je ne sais pas. J'en entends parler, ou je vois des répertoires, mais je ne peux accéder aux renseignements.» Il y a là une discordance.
Votre comité a entendu des témoins dire: Ah, nous avons environ 180 000 documents qui seront accessibles en ligne; nous faisons un excellent travail par rapport à d'autres pays.
Est-ce vraiment le cas? Comment progressons-nous?
M. John Reid: Je crois que le côté Internet des choses fonctionne très bien. Je crois que le gouvernement canadien a fait un très bon travail.
Tout de même, du côté de la gestion de la documentation, il ne fait pas un si bon travail. Si vous regardez la question du point de vue de l'avant-scène--ce que le public voit--et que vous songez à ce qu'il vous faut pour prendre des décisions, alors, vraiment, à mon avis, il y a tout un écart.
M. Paul Forseth: D'accord, je m'en tiendrai là.
Merci.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Monsieur Lanctôt.
[Français]
M. Robert Lanctôt: J'aimerais savoir comment il est possible, lorsqu'on fait une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, de recevoir, à l'occasion, les documents qu'on demande. Ça peut même être une demande générale, et on ne reçoit que la moitié des documents. Quand nous faisons une demande, vous transmettez la demande au ministère pour nous, et lorsque nous recevons les documents, plusieurs semaines ou plusieurs mois plus tard, nous avons l'impression que des gens ont retenu des choses.
Quand ça arrive, est-ce qu'il y a un mécanisme automatique qui vous oblige à faire une enquête pour vérifier ce qu'il y a dans les dossiers qu'on a demandés, ou bien vous recevez tout simplement les documents et vous nous les faites parvenir dans un deuxième envoi?
Ça semble très bizarre. Lorsqu'on fait une demande, habituellement, on est censés recevoir le dossier qu'on demande au complet. Pour quelle raison est-ce que ça arrive en deux envois et dans des intervalles quelquefois assez restreints, mais d'autres fois beaucoup plus longs?
Deuxièmement, on est justement en train d'examiner les changements de culture des fonctionnaires. Que pensez-vous du fait que dans le projet de loi C-25, qu'on est en train d'étudier à ce comité-ci, il n'y ait aucune section sur la protection des dénonciateurs des fonctionnaires? Comme vous le dites vous-même dans votre texte, on écrit de moins en moins de choses pour ne pas être obligés de les falsifier. On n'écrit plus rien.
C'est sûr que ces gens-là, comme disait M. Epp, se sentent un peu coincés quand on leur demande des choses. Ils ont peur de donner l'information, ils ont peur de donner les documents et ils vont avoir encore plus peur de venir témoigner devant un comité. Qu'est-ce que vous en pensez?
 (1215)
[Traduction]
M. John Reid: Permettez-moi de traiter d'abord de la dernière question qui a été posée.
Le gouvernement a nommé un ombudsman, M. Keyserlingk, qui est responsable de la protection des dénonciateurs. Il y a donc au gouvernement du Canada un bureau auquel vous pouvez vous adresser si vous mettez au jour une affaire d'importance qui, selon vous, est occultée. Et ce bureau est en place, je crois, depuis six à huit mois, cette période environ. Le gouvernement a donc agi pour essayer de fournir ce genre de protection.
Pour ce qui est de la question de la documentation, souvent, lorsque nous recevons une plainte, nous nous rendons sur place et examinons les documents produits par le ministère en réaction à la demande initiale. Parfois, nous regardons cela et nous disons: «Vous n'avez pas fait une recherche adéquate. Faites une autre recherche.» Inévitablement, cela donne toute une série d'autres documents importants.
Le fait que les documents ne soient pas du tout là au moment de la première recherche découle-t-il d'une volonté de cacher les choses? De manière générale, selon notre expérience, les gens ne savaient tout simplement pas où les documents se trouvaient. Et, de manière générale, la deuxième recherche couvrira non seulement les secteurs où la recherche avait été effectuée la première fois, mais aussi un ensemble plus vaste au sein du ministère. C'est pourquoi nous avons le pouvoir d'ordonner une deuxième recherche, et nous nous servons de ce pouvoir.
Deuxièmement, très souvent, nous passons en revue les documents, nous proposons au ministère de divulguer certains éléments qui n'étaient pas accessibles auparavant, mais nous disons qu'il reste encore des éléments avec lesquels il faut compter et qui représentent un cas plus difficile; nous envoyons donc les nouveaux éléments obtenus à la personne qui a formulé la demande. Nous tenons pour acquis que l'information a une valeur temporelle : plus vite on l'obtient, mieux on s'en porte. Auprès des ministères, nous préconisons l'idée que, pendant la recherche documentaire, si 60 p. 100 des documents sont là, mieux vaut les envoyer à la personne qui en a fait la demande, plutôt que d'attendre les 40 p. 100 qui restent, qui pourraient représenter un cas beaucoup plus délicat.
Nous essayons donc de nous assurer que l'information chemine jusque chez vous le plus rapidement possible, pour que vous ayez l'information--en trois ou quatre colis, peut-être--dès qu'elle est disponible. Si nous n'appliquions pas cette approche, plutôt que d'obtenir 60 p. 100 de l'ensemble dans les 30 jours, vous attendriez peut-être trois mois pour obtenir le tout. Notre approche a privilégié le fait de vous envoyer le plus de matériel possible.
La dernière chose que je veux dire en réponse à cette question, c'est que, dans les cas où nous faisons enquête et ordonnons qu'il y ait une deuxième recherche--et ce n'est pas inhabituel pour nous d'en ordonner une troisième--, nous constatons que, en raison de la façon dont les ministères ont été remaniés depuis dix ans du fait des compressions, du fait de la fusion de ministères, de nombreux dossiers se sont retrouvés dans des salles d'entreposage étranges. Parfois, on les trouve par accident; parfois, on les trouve à dessein. La gestion des documents figure parmi les victimes de la guerre au déficit. Nombre de documents disparaissent simplement, de façon illégale.
Une connaissance à moi se trouvait dans un ministère. Quand il est arrivé pour faire son dernier travail, il a découvert que les informaticiens étaient venus effacer tout ce qui se trouvait sur son disque rigide, effacer son disque réseau. Et quelqu'un était venu et avait décidé qu'il aurait un beau petit bureau propre, et il a fait le ménage dans tous les dossiers et dans tous les papiers. Mon type n'arrivait plus à trouver quoi que ce soit. Il dit qu'il lui a fallu un an pour tout refaire les papiers.
Bon, voilà les signes d'un système qui subit un stress énorme, et quand le gouvernement fait des compressions, il touche énormément à l'infrastructure. Nous le voyons dans les remarques de la vérificatrice générale: elle ne peut plus prêter foi à la piste de vérification des dépenses. Nous le voyons dans les remarques que je fais moi-même--nous n'arrivons plus à trouver la piste de vérification--même quand elle existe toujours--de temps en temps.
 (1220)
La bonne nouvelle, c'est que certains ministères, certains services au sein des ministères, exercent un excellent contrôle documentaire, même aujourd'hui. Si vous y allez, vous pouvez obtenir tout ce que vous cherchez. Par contre, il y a d'autres services où ce contrôle est très mauvais, sinon inexistant.
[Français]
M. Robert Lanctôt: Combien avez-vous d'enquêteurs pour faire la recherche pour laquelle on doit vous donner les dossiers? Combien avez-vous de personnes ou d'inspecteurs qui vont vérifier les informations?
Au départ, on doit prendre les informations qu'on nous donne. Est-ce qu'on peut demander que votre bureau fasse les vérifications, les enquêtes ou les inspections?
[Traduction]
M. John Reid: Nous avons 25 enquêteurs. Leur carnet est mieux que pleinement garni, avec la somme de travail que nous avons. Nous ne cherchons pas d'autre travail, permettez-moi de vous l'assurer.
Je peux vous donner un exemple pour montrer à quel point la tâche a été difficile pour nous. Quand je suis devenu commissaire il y a quatre ans et demi, nos enquêteurs prenaient environ quatre mois pour mener à bien un dossier. Aujourd'hui, il faut sept mois et demi. C'est une statistique que je vous révèle sans aucun plaisir. Mais nous avons beaucoup de travail à faire.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Monsieur Tirabassi.
M. Tony Tirabassi: Merci, madame la présidente.
Vous avez fait allusion à quelques reprises à l'examen par la vérificatrice générale du dossier des marchés de l'État. Elle a bel et bien signalé la difficulté qu'elle a eue à obtenir certains documents, pour approfondir l'enquête. De même, ajouterai-je, elle a mentionné que, à son avis, ce n'est pas de cette façon qu'on faisait les choses, de manière générale, au gouvernement.
Enfin, nous pouvons revenir toujours à ce dossier et--
M. John Reid: Non, je veux dire que je comprends. Les observations que j'ai citées, celles de Mme Fraser et celles aussi de son prédécesseur, sont des observations générales. Si vous voulez une explication approfondie, dans le rapport décennal de M. Desautels, il y a une partie qui porte sur l'effondrement de la piste de vérification; et Mme Fraser est d'accord avec le jugement porté dans ce cas.
Je suis d'accord avec vous quand vous dites que l'exemple utilisé dans le cas des marchés de l'État est exceptionnel. J'essaie toujours d'y faire allusion en ce qui concerne le cas général, l'effondrement général dans les divers ministères, comme les deux vérificateurs généraux ont pu l'attester.
M. Tony Tirabassi: J'apprécie aussi vos observations à ce sujet.
Je me demandais simplement: à propos des comparaisons que vous faites avec d'autres pays, d'autres instances, en ce qui concerne la gestion de l'information, y a-t-il un modèle ou un pays en particulier qui pourrait être utile, qui nous permettrait de créer un meilleur système de gestion de l'information ici au Canada? Où en sommes-nous?
M. John Reid: Je dirais que nous sommes probablement dans le «champ vif» de la carte. Nous sommes dans le champ vif parce que, au moment de décider de faire des compressions dans les années 70, nous avons décidé d'éliminer les postes de commis au classement, de secrétaire et de bibliothécaire. Ce sont les premières personnes qui ont dû partir à la fin des années 70, et il se trouve que la manipulation de l'information était leur affaire à elles. C'était elles qui géraient les flux d'information au sein du gouvernement. L'attente, c'était que si on se débarrasse de ces gens, avec les ordinateurs qui arrivent, on sera--pour citer les responsables--sur l'autoroute de l'information.
Eh bien, nous sommes loin de l'autoroute de l'information au gouvernement.
À ce moment-là, chacun est devenu son propre gestionnaire de l'information, son propre secrétaire, son propre commis au classement, son propre bibliothécaire. Mais aucun d'entre nous n'avait la formation voulue pour cela, et aucun d'entre nous n'est arrivé à obtenir de la formation à ce sujet. Les responsables de la formation ont été éliminés. Tout le monde a donc dû composer le mieux possible avec le flux d'information venant dans sa direction à lui.
Le système s'est maintenu tant bien que mal pendant 15 ans environ. Quand le gouvernement a procédé à l'examen des programmes et que nous avons décidé d'éliminer les postes du système public, les gens qui sont partis étaient les hauts fonctionnaires, et ce sont eux qui s'étaient occupés du mentorat. C'était eux, le capital humain. Si on n'arrivait pas à trouver un document, on pouvait au moins trouver quelqu'un qui savait quelque chose du sujet abordé.
Le problème, maintenant, dans la fonction publique, c'est que la plupart des gens sont partis--d'ici cinq ans, le reste seront partis, et il ne restera plus de mémoire humaine. Alors, non seulement on ne peut trouver la documentation, mais en plus on ne peut trouver quelqu'un qui s'en occupait avant.
Nous avons déjà connu de nombreux cas où on n'arrive pas à trouver les documents et où on n'arrive pas à trouver les gens, et le gouvernement ne peut agir. Ou s'il agit, il le fait sans avoir en main les bonnes informations.
Nous sommes donc dans le champ vif de la carte parce que, d'une certaine façon, nous nous sommes mis là nous-mêmes.
Cela ne veut pas dire que tout le reste du monde, dans les autres gouvernements du Canada, n'est pas aux prises avec les mêmes problèmes. Dans le secteur privé, on est aux prises avec les mêmes problèmes. Ce sont des questions difficiles avec lesquelles nous devons tous composer.
Une des choses qui me fascinent vraiment, c'est que la qualité de l'information sur le Web, maintenant, est vraiment erratique. Comme M. Epp, j'étais un des partisans du Web à ses débuts, et c'était un endroit merveilleux où trouver des renseignements exacts. Vous allez sur le Web maintenant, et vous n'êtes pas sûr du fait que l'information que vous consultez ou téléchargez est vraiment exacte. Il n'y a aucune façon d'authentifier l'information qui se trouve sur le Web.
Une des bonnes choses que l'on puisse dire à propos des sites Web du gouvernement du Canada, c'est que l'information qu'on y trouve a habituellement été authentifiée, et c'est un matériel qui est bon et qui est solide.
 (1225)
M. Tony Tirabassi: Très bien.
Merci.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Avez-vous d'autres questions, monsieur Forseth?
M. Paul Forseth: Peut-être une dernière question sommaire. Avez-vous quelque chose à recommander pour que, essentiellement, vous finissiez par n'avoir plus de travail vous-même? Car je crois que, à un moment donné, c'est la direction objective que nous devrions prendre, que tout est accessible et qu'on n'a plus à préconiser quoi que ce soit--peut-être juste un arbitre pour les documents confidentiels du Cabinet ou quelque chose qui a trait à la sécurité nationale. Si personne ne peut faire valoir qu'un renseignement doit être protégé ou inaccessible, de par le fait même, il devrait être accessible, et au moment même où il est créé, qu'il soit toujours créé selon certaines normes qui font qu'on peut faire des recherches, que tout le monde y a accès. Essentiellement, nous n'aurions pas alors besoin de gens comme vous.
Voyez-vous une façon pour nous d'en arriver là?
M. John Reid: Si, comme vous l'avez dit, essentiellement, toute l'information est accessible sur demande, le commissaire à l'information n'a pas de raison d'être. Mais il faudrait que vous disiez «tous» les renseignements, car dès que vous dites que «certains» renseignements doivent être protégés, il faut que quelqu'un prenne la décision à cet égard. Et ce quelqu'un peut être les tribunaux, comme c'est le cas aux États-Unis, ou une sorte d'ombudsman, comme le commissaire à l'information.
La meilleure façon de procéder, du point de vue du citoyen, c'est de recourir à l'ombudsman. La meilleure façon de procéder, du point de vue du gouvernement, c'est le recours aux tribunaux. Dans un cas, il faut payer pour aller en cour; le gouvernement paie l'ombudsman. C'est beaucoup moins cher de payer l'ombudsman que de forcer tout le monde à aller en cour.
M. Paul Forseth: Mais comment allons-nous en arriver au point où, vraiment, il est question seulement de la sécurité nationale ou des documents confidentiels du Cabinet--les trucs vraiment secrets? Il semble qu'on se batte encore pour des trucs qui ne valent pas la peine. Comment changer cette culture?
M. John Reid: Ce n'est pas une culture. C'est essentiellement ce qui se trouve dans la Loi sur l'accès à l'information, et il faut regarder la Loi sur l'accès à l'information, car c'est là que l'on établit si le titulaire d'une charge publique doit donner un renseignement, oui ou non.
M. Paul Forseth: D'accord, ce serait donc une solution législative...?
M. John Reid: Il y a une solution législative qui ferait que vous examinez cela et que vous dites : bon, nous n'avons pas besoin de cette protection, et cette information-ci peut être divulguée. Plus vous en faites de ce côté, moins il y aura de travail pour le commissaire à l'information.
M. Paul Forseth: C'est de cela que je parlais, du fait pour les fonctionnaires de nous donner des réponses à nos questions, pour que vous n'ayez plus votre raison d'être.
M. John Reid: C'est comme cela que vous faites, en modifiant la loi pour que plus d'information aille automatiquement au citoyen.
M. Paul Forseth: Merci.
La présidente suppléante (Mme Judy Sgro): Il n'y a pas d'autres questions?
Merci beaucoup, monsieur Reid. Cela a été très intéressant de vous entendre répondre à nombre de nos questions. Votre mémoire était facile à lire et très instructif. Merci beaucoup.
Qui sait? À l'avenir, nous allons peut-être pouvoir vous accueillir juste au moment où vous délaissez votre poste parce que nous aurons réussi à organiser les choses de telle sorte qu'un commissaire à l'information n'a plus sa raison d'être.
Bonne chance, et merci beaucoup.
S'il n'y a rien d'autre, je propose que nous levions la séance.