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J'aimerais remercier le comité d'avoir accepté d'entendre notre opinion sur la situation des organismes francophones éloignés. Il s'agit de l'opinion d'organismes francophones représentatifs comme les différentes ACFO de l'Ontario, surtout celles se trouvant en région éloignée.
Vous pouvez constater, dans les mémoires qu'on a présentés, que les organisations communautaires que sont les ACFO ont joué et continuent de jouer un rôle vraiment très important à l'égard du développement et de l'épanouissement des communautés franco-ontariennes. L'ACFO provinciale mais surtout les ACFO régionales, qui sont des entités séparées, ont été des instruments de revendication très importants. Parmi les gains qu'elles ont réussi à faire grâce à leur travail acharné, on peut parler des écoles secondaires françaises en Ontario en 1968-1969, des centres de santé communautaire, des garderies francophones, des centres d'alphabétisation, des centres culturels, des journaux francophones et, le dernier en date, des collèges francophones. Il s'agissait dans ce dernier cas d'assurer que tous les francophones, tous ceux qui pouvaient contribuer à la société ontarienne, obtiennent une formation complète et adéquate dans leur langue.
Il reste beaucoup de défis à relever. Ce n'est pas dans toutes les régions qu'on a des centres de santé communautaire ou des journaux francophones. Il y a aussi des combats à mener en ce qui concerne le délestage des services en provenance des gouvernements provinciaux, qu'on appelle communément en anglais le downloading. Pour notre part, ce phénomène nous a particulièrement touchés pendant les années 1990. Je crois que le gouvernement fédéral va transférer Service Canada aux gouvernements provinciaux. Les ACFO doivent être vigilantes et s'assurer que dans le cadre de ce délestage de services vers les municipalités et les provinces, la communauté francophone aura accès à des services en français.
Il faut aussi créer un milieu socioculturel apte à assurer le développement économique et l'épanouissement culturel des communautés éloignées. Il faut combattre l'assimilation, ce qui est un défi de taille. Ce qui rend la chose plus difficile encore, c'est que nos communautés traversent des restructurations économiques profondes. Je ne vais même pas aborder la crise dans l'industrie forestière: elle est déjà assez évidente. Il faut se diversifier économiquement, et la présence des communautés francophones, que ce soit en matière de créativité artistique, de tourisme ou d'autre chose, peut être un avantage.
Assurer le financement de ces organisations de façon à ce qu'elles puissent jouer leur rôle est le plus grand défi auquel on doit faire face. Évidemment, on pourrait discuter longuement de l'enveloppe de 4,2 millions de dollars qui est octroyée par Patrimoine canadien à tous les organismes franco-ontariens. Elle est nettement insuffisante. Il y a 500 000 francophones en Ontario et pourtant, on reçoit le même montant que les francophones de l'Alberta. Ce n'est pas que je veuille leur enlever quoi que ce soit, mais pour notre part, nous sommes éparpillés sur le territoire. Dans les régions minoritaires où il y a des besoins criants, nous aurions besoin de plus de ressources pour être en mesure de jouer efficacement notre rôle.
En outre, nous avons subi au cours des années 1990 des compressions considérables. Si vous regardez le fameux graphique qui traite des subventions de Patrimoine canadien, vous allez constater qu'il y a des chiffres à partir de 1985, quand nous sommes devenus des entités indépendantes de l'ACFO provinciale, jusqu'en 2006. Ce sont des chiffres solides et avérés, fondés sur les subventions qui ont été accordées par Patrimoine canadien. Vous remarquerez, dans le graphique illustrant les subventions de Patrimoine canadien, dans la partie rouge, des chiffres qui tiennent compte de l'inflation. Par exemple, en 1985, la somme de 50 000 $ est une subvention que l'ACFO Timmins recevait. Pour bénéficier d'une capacité d'intervention et d'un pouvoir d'achat équivalents en 2006, il faudrait que le chiffre en rouge qui se trouve juste en haut soit de 86 000 $.
En 2006, nous avons reçu exactement 37 100 $ en subventions. En 1985, une somme de 50 000 $ nous permettait d'avoir deux employés à temps plein. Depuis le début des années 1990, nos employés sont à temps partiel. Nous sommes obligés de travailler à des projets associés à Service Canada ou à d'autres institutions pour avoir du personnel permanent. Il faut d'abord mettre sur pied des projets pour pouvoir exister. Bien sûr, ces projets sont positifs.
Le deuxième graphique, où l'on trouve les différentes teintes de bleu, indique les sources de revenus. On peut voir en bleu foncé les subventions de Patrimoine canadien, en bleu pâle, l'argent que nous avons recueilli auprès de la communauté, des amis de l'ACFO et des institutions économiques, et en bleu très pâle, le premier pic représente l'argent pour le projet de garderie Clin-D’oeil. Tous les revenus ont totalisé 180 000 $ et on a pu fonctionner pendant quatre ou cinq ans.
En 1996, on est retombé dans un no man's land. Par la suite, nous avons obtenu du financement pour d'autres projets qui répondaient à des besoins de la communauté, mais il a fallu travailler très fort. À ce moment-là, on n'a pas pu travailler à tous les dossiers qui touchaient les services francophones des municipalités. Il me semble que les chiffres sont assez clairs et assez éloquents.
Considérons ce que l'ACFO peut faire et apporter à ces régions. C'est un instrument essentiel au développement des sociétés franco-ontariennes. Le problème est qu'on n'a pas assez de moyens financiers pour faire notre travail. On doit beaucoup à nos bénévoles. Je suis moi-même enseignant et j'ai une vie hors de l'ACFO, mais je dois faire ce que j'ai déjà qualifié de bénévolat extrême. Si je ne faisais pas ce genre de bénévolat, comme tous les membres du conseil d'administration, il n'y aurait plus d'ACFO, et on aurait mis la clé dans la porte. À l'heure actuelle, on vit une grave crise. L'ACFO Supérieur-Nord, l'ACFO Kirkland Lake et l'ACFO Cochrane-Iroquois Falls ont reçu une subvention incroyable de 18 000 $ pour une année. Que peut-on faire avec 18 000 $ en 2006? Avoir 37 100 $ dans une ville comme Timmins avec une population de 19 000 francophones n'est guère mieux. Que peut-on faire pour s'assurer que cette population se développe et obtienne les services en français qu'elle mérite? C'est assez difficile.
Nous sommes un organisme de terrain, de proximité. Nous sommes près de la communauté. Je pense que nous devrions être financés adéquatement. Étant près de la communauté, nous sommes en mesure de lui répondre, d'exprimer ses besoins et de trouver des solutions adéquates à ses problèmes. On l'a prouvé par le passé.
La solution que nous proposons est simple. Il faudrait obtenir un financement adéquat et direct aux communautés. L'argent des ententes qui ont été signées, de même que les autres sommes d'argent qui ont été allouées par l'entremise du plan de M. Dion ou par l'entremise de l'entente Canada-Ontario, tout cet argent ne s'est pas rendu aux organismes qui font le travail sur le terrain dans le Nord. Si j'étais réaliste, je dirais qu'une somme de 50 000 $ en 1985 vaut 86 000 $ en 2006. C'est ce qu'on demande, mais on est responsables sur le plan fiscal. On vous demande 60 000 $, avec une formule variable par la suite, en fonction des besoins de la communauté. Dans les régions où il n'existe pas de services, pas d'appui, il devrait peut-être y avoir un peu plus d'argent. On devrait également accorder un financement additionnel en fonction du nombre de francophones desservis, le nombre de francophones qui vont profiter de nos services. À ce sujet, je n'ai pas autre chose à ajouter. J'attends vos questions et je passe la parole à Suzanne.
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Bonjour. Je vais renchérir sur ce qu'a dit M. Bélanger.
Le but des ACFO est de doter la communauté des outils nécessaires à son développement et d'assurer son épanouissement. Évidemment, on désire obtenir des résultats durables et tangibles. Les ACFO sont encore les seuls organismes dans la province à avoir un mandat de développement communautaire pour l'ensemble de la communauté qu'ils représentent. En général, les groupes font du développement au sein de communautés très restreintes. Les aînés travaillent auprès des aînés, les jeunes auprès des jeunes. Nous, par contre, on a la tâche de desservir l'ensemble de la collectivité.
Il est donc essentiel de véhiculer une image très positive du travail fait sur le terrain, et la perception de ce travail, en ce moment, est très fautive. On entend dire que sur le terrain, les bénévoles sont en grand nombre, mais ce n'est pas un travail de bénévolat que nous effectuons, c'est un travail d'appui afin d'assurer l'épanouissement de la francophonie.
L'accroissement de la reconnaissance de la communauté francophone et de ses organismes est donc primordial. On veut être en mesure de vivre en français partout en Ontario. Ce n'est pas une réalité à l'heure actuelle. Le développement communautaire se fait de façon différente, que ce soit à Toronto qui a ses particularités, à Sudbury qui est un grand centre, à Thunder Bay qui est éloignée, ou dans les toutes petites localités comme Kirkland Lake et Hearst où vit une majorité de francophones. On ne peut donc pas comparer ce qui se fait et ce qui réussit dans un endroit, et automatiquement vouloir l'implanter ailleurs. Ce n'est pas réaliste.
Chaque communauté est responsable de son développement et de sa vitalité, et doit identifier ses propres besoins. C'est à ce moment que les ACFO entrent en jeu, c'est-à-dire lorsque chaque communauté a défini ses particularités. On fait du développement en tenant compte des besoins réels de la communauté. Ces besoins s'expriment sur le terrain, à la base.
On a parlé des accomplissements. Évidemment, il y en a plusieurs. On se rappelle la création de sections de langue française au sein des conseils scolaires, l'ouverture de radios communautaires — des réalisations qui demeurent très difficiles à subventionner —, l'établissement de réseaux de santé en français. Il y a plein de choses qui ont été faites, mais il y a encore plein de choses à faire parce que durant les dernières années, on a probablement subi un recul. Il y a des défis de plus en plus grands à relever et on veut continuer à assurer la vitalité de nos collectivités respectives.
La restructuration du mouvement associatif a pu être nuisible, la dévolution de services et les restructurations gouvernementales ont été très préjudiciables au mouvement associatif et ont affaibli de façon considérable les ACFO sur le terrain. Ce qu'on demande, c'est de favoriser le développement durable à long terme, et cela passe par un mode de subvention équitable: on demande des subventions de fonctionnement et non de projets, et des subventions pluriannuelles pour qu'on n'ait pas, chaque année, à reprendre le même processus. Pour obtenir une subvention de 10 000, 15 000, 20 000, 30 000 ou 40 000 $ pour les plus chanceux, c'est impensable, tout le dédale administratif qu'on doit parcourir.
On veut aussi favoriser la mise sur pied d'un regroupement provincial des ACFO, soutenu financièrement, parce qu'il n'en existe plus. L'ACFO provinciale, il y a plusieurs années, avait ce mandat. Au fil du temps, l'ACFO provinciale est devenue plus importante que les seules ACFO régionales, et maintenant le nouvel organisme en place a un secteur de développement communautaire, mais celui-ci n'est pas structuré et est sous-financé. C'est tout de même le secteur qui regroupe le plus grand nombre de membres. Tout le monde, toute la collectivité se retrouve à l'intérieur de ce secteur.
Un autre outil qui pourrait s'avérer très intéressant, et qu'on demande, est un appui à la formation des agents de programme du ministère du Patrimoine canadien. Ce dernier avait autrefois des agents de développement qui travaillaient avec les collectivités, alors que maintenant, il s'agit plutôt d'agents de programme qui travaillent dans un bureau. Il faut que ces agents puissent faire la différence entre le développement communautaire et les projets en développement.
Pour assurer le développement de projets, il faut avoir un financement de fonctionnement adéquat afin d'être en mesure d'aller chercher les projets et les programmes qui appuieront le travail que nous faisons à la base.
Je suis prêtre à répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
De prime abord, je peux vous dire que je suis en faveur d'un financement de fonctionnement plutôt que d'un financement par projet. Au cours d'un précédent gouvernement, j'ai tenté, sans succès, d'influencer mes collègues en ce sens. Je reste cependant convaincu que c'est la meilleure approche.
Je suis également d'accord au sujet du financement pluriannuel, et on a déjà tenté de le faire. Je suis un peu surpris d'entendre dire que ce n'est pas le cas dans le cadre des ententes Canada-communautés, parce que ces ententes sont pluriannuelles. La gestion de l'entente revient présentement à l'AFO, si je ne m'abuse. Il lui appartient donc de se diriger vers un financement pluriannuel. Cette capacité existe au sein même de la communauté, et il lui appartient de faire en sorte que cela se fasse. Je ne crois pas que ce soit les gouvernements qui empêchent un financement pluriannuel. Vous me direz si j'ai tort, car je pense que cela peut être corrigé, si c'est le cas.
Monsieur Bélanger, au début de votre présentation, vous avez énoncé une phrase qui m'a fait un peu sourciller. Vous avez dit que le gouvernement fédéral préparait une sorte de délestage des services vers les provinces.
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Ce l'est pour moi également. Je n'étais pas au courant, et cela nous inquiète grandement. On avait déjà de la difficulté à travailler avec Service Canada pour les projets proposés. Ce n'est pas facile.
Lors des compressions des années 1990, on nous avait dit qu'en vertu des articles 41 et 42 de la Loi sur les langues officielles, qui portent notamment sur la concertation interministérielle, il y aurait des choses précises pour nous et que les ministères auraient l'obligation de proposer des choses concrètes aux organismes représentatifs de la société francophone.
Cependant, cela ne s'est jamais tellement matérialisé dans le nord de l'Ontario. On travaillait avec ce qui est maintenant Service Canada et souvent, quand on proposait des projets — on n'avait pas le choix de fonctionner par projet, parce qu'on n'avait pas l'argent —, on se faisait mettre des bâtons dans les roues. Le seul recours qu'on avait était de demander à notre député d'intervenir. La concertation interministérielle ne s'est jamais véritablement matérialisée.
C'est la raison pour laquelle j'aime bien la première partie de votre commentaire. Pour le financement pluriannuel et pour tout ce qui est complémentaire, cela va, car on peut s'arranger avec ce qui sera proposé. Toutefois, une chose est certaine: pour qu'on soit capables d'être des joueurs à ce chapitre, il nous faut un financement de base suffisant. Dès le départ, on doit corriger cette lacune. Par la suite, si on obtient les fonds, on sera capables d'agir avec les intervenants économiques et les forces politiques; on existera à un bout du spectre. Si on n'existe pas, on est incapables de faire quoi que ce soit.
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Comme notre temps est limité, je vous encourage à répondre un peu plus rapidement.
Au sujet de Service Canada, à ce que je sache, l'intention était de travailler conjointement avec les autorités provinciales et municipales. D'ailleurs, c'était un peu modelé sur ce qui se faisait à Winnipeg, soit d'offrir des points d'arrêt pour permettre à un citoyen de se présenter et d'être desservi par des gens dans les deux langues officielles du pays pour n'importe quel besoin, qu'il soit d'ordre municipal, provincial ou fédéral. Cependant, je ne croyais pas qu'on allait transférer les fonctionnaires aux autorités provinciales.
Vous faites également allusion à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles, que je connais assez bien. Il existe une obligation pour la Couronne de consulter les communautés. Y a-t-il eu une quelconque consultation de l'AFO ou des ACFO régionales au sujet du transfert de Service Canada vers les provinces?
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À Cochrane et Iroquois Falls, il a presque fallu mettre la clé sous la porte. Service Canada devait mettre un projet sur pied, mais il n'y avait pas de personnel administratif pour le faire fonctionner. On parle d'offrir de la formation et des services à des communautés qui sont durement frappées par la crise forestière, qui frappe aussi Smooth Rock Falls. Donc, on est dans une drôle de situation.
À Timmins, le travail reste à faire. La ville compte environ 45 000 habitants, dont 19 000 sont francophones. Il n'y a pas de centre de santé communautaire francophone pour y faire de la prévention et donner des services en français. Il faut former un comité pour refaire toutes les études de faisabilité en vue d'obtenir ces services. On manque de médecins francophones. En fait, on manque de médecins tout court.
Les besoins sont criants, et maintenant que les grands combats ont été menés à l'égard des services en éducation et en santé, on se voit comme des agents de développement économique. On ne demande pas la charité, on veut simplement ce qui nous est dû, selon l'idéal qu'on s'est donné au niveau linguistique et au niveau de Patrimoine canadien. On représente un peu la fibre du Canada. On veut être mesure de faire notre travail pour développer suffisamment nos communautés dans le nord de l'Ontario pour éviter la migration de nos jeunes. Il y a des projets de diversification économique dans le domaine du tourisme et ailleurs, mais on est incapables d'avancer adéquatement.
C'est le temps de le faire maintenant. La conjoncture mondiale invite à la diversification économique, ce qui veut dire davantage de formation de la main-d'oeuvre. Par exemple, à Timmins, il y a un collège francophone qui est totalement inadéquat. On aurait besoin de 65 000 personnes pour travailler dans les secteurs minier et forestier, mais on n'est pas en mesure de les former, parce qu'on n'a ni les institutions ni le personnel qualifié pour le faire.
Nous nous battons parce que nous voulons contribuer à l'épanouissement économique de nos communautés, et pas simplement des communautés francophones.
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Merci, monsieur le président.
Merci tous deux pour votre présence ici cet après-midi.
Je remarque, monsieur Bélanger, que vous dites éprouver une difficulté croissante à... Je crois que vous avez employé l'expression « combattre l'assimilation ».
M. Pierre Bélanger: Oui.
M. Ed Fast: Je suppose que par « assimilation », vous entendez spécifiquement la perte de la langue, du français comme langue officielle.
J'aimerais attirer votre attention une fois de plus sur le graphique que vous nous avez remis. On semble observer, vers 1997, une baisse sensible du financement sur ces deux aspects, qu'on tienne compte ou non de l'inflation. Êtes-vous membre de votre organisme depuis assez longtemps pour connaître quelques-unes des raisons de ces coupures budgétaires? Qu'est-ce qui a motivé ces coupures? Je n'en connais pas les raisons.
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Vous vous souviendrez peut-être qu'essentiellement un assainissement majeur des finances gouvernementales était nécessaire dans les années 90. Les déficits se succédaient sans relâche. Je crois que le raisonnement du gouvernement était qu'il fallait couper dans tous les programmes, pour que chacun assume sa part du dur travail qui était à faire.
Nous pouvons souscrire à ce principe, mais il reste que certains domaines ont besoin d'une protection; ils doivent faire leur juste part, mais il faut aussi les protéger en raison de la nature de leur travail, des avantages qu'ils offrent et des effets qu'ils exercent dans les communautés.
Cette année-là a été particulièrement difficile, et non parce que nous n'avions pas présenté de bons projets: vous noterez, sur le graphique, que chaque pic des différents projets que nous avions préparés se rapportaient à la communauté et aux besoins de la ville. Le deuxième projet, ici, était conçu pour protéger les aînés contre la violence et la fraude. Nous étions engagés dans un programme de formation destiné à donner de l'expérience à nos jeunes francophones; nous collaborions avec la police de Timmins afin d'enregistrer toutes les bicyclettes, parce qu'il y avait un problème de vol de bicyclettes. Nous avions préparé de nos propres mains ce projet, qui répondait aux besoins de la communauté tout entière et pas seulement des francophones.
Vous savez toutefois que, quand on travaille à un projet à la fois, ce n'est qu'au moment de toucher le fond qu’on s’en rend compte. Il est impossible de créer des projets tous les ans parce qu'on manque des effectifs nécessaires, et aussi de l’argent dont on a besoin. Même si nous avions de bons projets, même si nous avions été plus efficaces et fait quelque chose d'utile pour la communauté, cela ne voulait pas dire — ou n'aurait pas voulu dire — que notre financement aurait augmenté l'année suivante. On continuait d'invoquer la même justification pour les coupures. Les choses se sont un peu améliorées à la fin; malgré tout, comme l'autre graphique vous l'a montré, il nous aurait fallu des augmentations du financement de base rien que pour en revenir au niveau de 1985, mais nous ne les avons pas obtenues.
C'est comme l'impôt créé à l'occasion de la Première Guerre mondiale: difficile de sortit du moule une fois qu'il est en place. Vous vous souviendrez que l'impôt sur le revenu des particuliers et des entreprises était censé être une mesure temporaire; il s'est révélé non temporaire, en fait c’est ce qu'il y a de plus durable. Il serait difficile de faire marche arrière.
Savez-vous, c'est d'ailleurs parfaitement normal. Les gouvernements craignaient les excédents de dépense, à la lumière des débordements budgétaires des années 70. Tous les gouvernements tenaient à en avoir davantage pour leur argent. Je partage cette façon de voir, mais nous pensions qu'ils prendraient acte du travail efficace que nous accomplissions avec le peu d'argent que nous recevions. Notre efficacité est exceptionnelle, mais nous ne pouvons continuer; les gens sont lassés. Année après année, nous demandons l'aide financière de la communauté, mais toutes les organisations puisent dans le même trésor communautaire, qui ne grandit pas.
J'ignore si je me fais clairement comprendre, mais il nous faut aujourd'hui une stratégie globale; à défaut, nous manquerons le coche sous l'angle de la formation, de la diversification économique et de l'exode de nos jeunes vers d'autres parties de la province.
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Ce serait compliqué. Je m'explique: une communauté comme Timmins détenait une part importante de l'industrie forestière, qui appartenait à un francophone de Timmins. Mais il a connu des prises de contrôle, et ces gens vieillissent. Je fais référence à Malette Lumber Inc., qui est une très grande entreprise, et dont une partie a été vendue à Columbia Forest Products, une société américaine, et une autre partie à Tembec. Ils ne sont pas originaires de notre communauté et ne soucient pas outre mesure de ce qui s'y passe. Surtout, ils ne sont pas non plus francophones.
Hearst a connu le même problème: la ville regorgeait de Levesques et de Lecours, qui étaient propriétaires de l'économie et en fait de 90 p. 100 du secteur. Aujourd'hui, ce sont Columbia et Grant, qui ne sont pas originaires du Nord.
C'est la difficulté à laquelle nous devons faire face, et qui explique pourquoi notre financement est statique; il y a des limites à ce qu'il est possible d'obtenir, et tout dépend de la santé économique de la communauté. L'industrie forestière traverse actuellement une crise grave qui nous tire vers le bas, parce que certaines de ces entreprises ont tout simplement fermé leurs portes, tandis que d'autres sont achetées par des multinationales qui ne se soucient guère de la communauté francophone. C'est ce qui explique le rôle très important que le gouvernement est appelé à jouer.
J'établirais plutôt un lien avec les résultats. Nous sommes d'accord avec le principe que ceux qui utilisent les fonds publics doivent en faire quelque chose, une utilisation efficace qui réponde véritablement aux besoins de la communauté. C'est pourquoi j'aime ce graphique: nous avons bien fait notre travail à l'égard de tout ce qu'il présente. Nous avons fait le nécessaire et plus que le nécessaire. C'est la raison de notre présence ici: si nous n'avions pas conscience d'avoir fait un emploi judicieux de l'argent des contribuables, nous n'oserions pas nous présenter devant ce comité.
Vous savez ce qu'il en est; certains des députés à cette table proviennent de l'Ouest canadien, de petites villes; vous savez comme il est difficile de traiter avec un gouvernement quand vous en êtes éloignés. C'est tout notre problème: nous sommes si loin au Nord qu'il nous est difficile d'obtenir l'aide qu'il nous faut, de parler aux bonnes personnes et de nouer les relations nécessaires.
Suzanne, voulez-vous continuer sur ce sujet?
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Merci, monsieur le président.
Je veux d'abord vous remercier d'être parmi nous. J'ai eu le plaisir de travailler à la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse entre 1981 et 1983, à l'époque où les ressources étaient passablement abondantes. Ça ne nous empêchait pas de nous plaindre, malgré tout. J'ai été président de ce même organisme pendant des années plus creuses, soit de 1995 à 1997. Pendant cette période, on a dû composer avec toutes sortes de contraintes budgétaires. On a malgré tout établi des tables de concertation, et dans le cadre de celles-ci, des engagements consistant à travailler avec les autres ministères et à maximiser les revenus ont été pris.
Avant d'aller plus loin, j'aimerais répondre à la question de M. Fast. En fait, ce type de financement serait avantageux pour les communautés les plus fortes, mais il affaiblirait davantage les communautés éloignées et plus faibles. Celles de l'Atlantique, Moncton par exemple, pourraient en bénéficier, mais des collectivités comme Baie Sainte-Marie ou Chéticamp en seraient pénalisées.
Pour en revenir à ces années de compressions budgétaires, je dois dire que certains engagements ont été pris. D'autres ministères ont octroyé des fonds de fonctionnement. Vous avez mentionné la question des services en français dans les communautés en situation minoritaire. Chez nous, on a travaillé fort et longtemps pour obtenir de l'éducation en français. On avait établi, en 1995 ou 1996, je crois le Programme de contestation judiciaire. Ça n'apparaît pas nécessairement dans votre document. C'était un appui de base. Quand nos droits n'étaient pas respectés, nous pouvions contester auprès du gouvernement provincial, des conseils scolaires ou du gouvernement fédéral.
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C'est très problématique parce que les changements d'administration municipale peuvent faire passer la situation du noir au blanc. Nous l'avons vécu à Timmins.
À un moment donné, on avait un conseil municipal qui était très ouvert, et on a travaillé à plusieurs dossiers. On a travaillé très fort à un dossier touristique en partenariat avec le Témiscamingue et Rouyn-Noranda. Après les élections, tout cela est tombé à l'eau parce que la nouvelle administration ne considérait pas cela comme une priorité. Elle va peut-être attendre qu'il soit trop tard. L'industrie forestière est en pleine crise. On est dans un boum minier, mais vous savez qu'avec la mondialisation, le Canada doit se tailler une place au niveau des nouvelles technologies. On a besoin d'une main-d'oeuvre hyper-qualifiée, parce qu'on ne peut pas concurrencer la Chine. Il est temps qu'on travaille ensemble. Il s'agit d'une nouvelle façon de voir les choses. Les gens ont toujours travaillé en vase clos. Maintenant, il faut que le gouvernement fédéral, les provinces, les municipalités et les organismes communautaires travaillent ensemble. C'est une culture qui n'est pas répandue partout. Là où elle existe, par exemple à Moncton, au Nouveau-Brunswick, on connaît un succès extraordinaire. Il y a des endroits où on a décidé de prendre le taureau par les cornes, et cela a donné de bons résultats. Nous ne sommes pas encore rendus là. Il faut toujours reprendre le bâton du pèlerin et toujours convaincre, toujours montrer que nous ne sommes pas de dangereux contestataires qui veulent contester pour le plaisir de contester.
Nous avons à coeur le développement économique. Je vous donne un exemple. À Timmins, si on se bat pour obtenir un collège francophone et un centre de métiers, c'est que 30 p. 100 de notre population n'est pas formée. Ce groupe va rater le virage technologique et dépendre du gouvernement. On ne veut pas que ces gens dépendent du gouvernement. On veut qu'ils aient la formation nécessaire pour fonctionner au XXIe siècle. On veut que ces gens soient des citoyens qui paient des impôts, lancent des entreprises, fassent du nord de l'Ontario un endroit où l'économie est en bonne santé. On a maintenant l'occasion de le faire avec la crise de l'industrie forestière. Il faut faire la première, la deuxième et la troisième transformation. Nous pensons que nous pouvons jouer un rôle là-dedans, un rôle de catalyseur, un rôle de chef d'orchestre auprès de nos communautés pour qu'elles puissent obtenir les services qui leur permettront de se former et de prendre le virage du XXIe siècle. C'est un exemple éloquent et précis du genre de rôle qu'on veut jouer.
Je n'ai rien d'autre à ajouter à ce sujet.
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Merci, monsieur le président.
Je me souviens de l'époque où les gens de la communauté francophone étaient considérés comme des citoyens de seconde classe dans le nord de l'Ontario. À l'époque, si vous étiez un travailleur étranger ou un francophone, vous travailliez dans les mines, et si vous étiez un anglophone, vous étiez un gérant.
Mais la situation a changé.
[Traduction]
Je répète, en tant qu'observateur anglophone, que la communauté francophone dans le Nord a très, très bien réussi; un nombre considérable de nos jeunes dirigeants sont des francophones; et le sentiment de fierté, d'identité... Nous avons un drapeau — non pas le pavillon rouge de l'Ontario, mais le drapeau franco-ontarien. Je le vois flotter un peu partout.
J'aimerais entendre votre opinion sur l'ampleur de la transformation opérée dans le Nord et les mesures que nous devons prendre, sous l'angle des politiques gouvernementales, pour veiller à ce qu'elle se poursuive. En guise de question supplémentaire, parce que je vous laisse le soin de répondre à la question, je me souviens des débuts de la lutte très vigoureuse entamée par la communauté francophone du Nord pour maintenir ses droits, et je me souviens aussi du sentiment, dans la communauté anglophone, que ces droits devaient provenir des anglophones. Ce sentiment semble s'être dissipé. Ce sont maintenant les Cris, dans la région, qui réclament eux aussi leurs droits.
La réussite de la communauté francophone dans le Nord de l'Ontario s'inscrit-elle à vos yeux dans le succès global de la communauté, de toutes les communautés, ou demeure-t-il nécessaire d'arracher des droits à un groupe pour assurer ceux de la minorité?
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Je suis né au Québec, mais j'ai vécu toute ma vie à Hearst, en Ontario. Ce qui a fait la particularité de Hearst était son grand dynamisme économique. C'était une des petites villes du Canada où il y avait le plus de millionnaires par habitant. Par exemple, la Banque Canadienne Impériale de Commerce était l'une des banques qui avaient les dépôts les plus élevés au Canada en fonction de la population.
Il y avait plusieurs générations d'entrepreneurs: les Fontaine, les Lévesque, les Lecours, les Gosselin. J'ai été éduqué dans cette communauté. La communauté tout entière n'avait pas de difficulté. Tout comme les gens de l'Ouest, du Nouveau-Brunswick ou des régions éloignées, nous avons été habitués à nous débrouiller seuls; c'est ce qu'on a fait à Hearst. On a créé des centres culturels au début sans l'aide des gouvernements
Par la suite, les choses se sont compliquées. Toutes les grandes entreprises créées par des francophones dans le nord de l'Ontario, que ce soit à Kapuskasing, à Hearst, à Timmins ou ailleurs, ont été achetées par des multinationales américaines ou par d'autres compagnies. C'est un changement très difficile à suivre et à vivre parce qu'on perd les alliés naturels que sont les organisations communautaires.
Il reste qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs francophones dans le nord de l'Ontario. À Timmins, même si elles portent des noms anglais, de 45 à 48 p. 100 des entreprises sont la propriété d'entrepreneurs francophones. Comme il s'agit d'entreprises qui sont exploitées en Ontario, le fait de porter un nom français dans une ville où on est en minorité risque d'entraîner des difficultés.
Notre région jouit encore d'une très grande vitalité. Serons-nous en mesure de prendre le virage du XXIe siècle, de nous moderniser et d'apporter les changements nécessaires? Je suis assez optimiste, mais on a besoin d'aide pour ce faire.
Par le passé, croyez-moi, nous nous sommes battus pour nos droits. J'ai parlé à des entrepreneurs comme M. Brousseau, qui était un sous-traitant de la compagnie Malette Lumber Inc. de Timmins. Au début, il a fallu se battre pour avoir des services en français de Bell Canada et une facturation bilingue d'Hydro Ontario.
Les combats ont été menés pour chaque service qu'on tient pour acquis dans les grands centres. Ces combats sont maintenant chose du passé. On a pris notre place et il ne reste qu'à terminer le travail pour qu'on ait toutes nos institutions. Prenons l'exemple du Québec. La communauté anglophone y est solidement implantée, elle est vibrante et elle accepte le fait que les francophones soient majoritaires dans cette province. Elle contribue au développement économique du Québec. C'est là un modèle extraordinaire. Le Canada a la capacité d'être un pays de tolérance.
Ce qu'on demande, c'est un peu d'aide pour faire la même chose en Ontario. Si on développe les droits des francophones, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas en faire de même pour ceux des communautés autochtones. Quand on omet de former une partie de la main-d'oeuvre et que le système d'éducation n'est pas accessible à tous, on perd la contribution économique et la créativité de génies, d'artistes, de gens dont le Canada ne peut se passer s'il veut se développer et prendre sa place dans l'économie mondiale.
On vit une crise terrible. C'est pourquoi on vous lance un cri d'alarme. On veut que tous les Canadiens — et cela a toujours été la marque de commerce du Canada — puissent trouver les moyens de développer leur potentiel, où qu'ils se trouvent au pays. Cela contribuera au développement économique de tous, et c'est ce dont nos entrepreneurs et nos communautés ont besoin.
Je dois dire, avant que vous finissiez, que je prononce ordinairement, à la clôture, quelques petits énoncés sur des sujets qui ont arrêté mon attention au fil des discussions.
L'un de mes grands amis provient de Timmins. Il jouait un peu au hockey vers chez nous; j'ai toujours maintenu qu'il a dû faire une échappée un jour. Dennis retourne très souvent chez lui; il m'a beaucoup appris au sujet du Nord.
Je ne doute pas qu'il pourrait se révéler fort difficile de trouver des médecins francophones. Samedi dernier encore, dans ma ville natale de Startford située dans ma circonscription, les hôpitaux avaient organisé toute une soirée pour essayer de recruter de nouveaux médecins qui étaient de passage. La pénurie de médecins sévit dans tout le pays, j'en suis certain, et elle est plus fréquente dans certaines des régions éloignées. Je vis en communauté rurale et je sais que certaines de nos petites municipalités rurales n'ont pas de médecin. Je partage sans peine votre préoccupation.
J'aurais une question: votre organisme reçoit-il un soutien financier de l'Ontario?
Il n'en reçoit aucun de l'Ontario?
Vous avez mentionné entre autres qu'il est souvent plus facile de faire du commerce à travers le monde entier ou avec nos voisins américains qu'entre provinces. C'est un problème qui me préoccupe beaucoup depuis des années et qui, à mon sens, doit être rectifié.
En second lieu, vous n'êtes pas le premier à se présenter devant ce comité, ou d'autres comités, pour solliciter un financement durable et à long terme. Depuis que je siège au comité, j'entends les mêmes propos non seulement de la CBC, mais aussi d'organisations sportives, de musées et de la plupart des gens. J'estime qu'il faut évaluer le bien-fondé des demandes, et qu'un financement durable et à long terme est la méthode qui convient, plutôt qu'un financement par projet qui crée les pics dont vous parliez. S'il vous est possible de fonctionner à l'intérieur de certains critères, ce financement durable et à long terme serait à votre disposition.
Ce ne sont que quelques suggestions, qui traduisent mes sentiments. Mais je comprends beaucoup de vos réponses aussi bien que votre présentation.
Une fois encore, merci beaucoup de votre présence parmi nous; je suis heureux que le comité vous ait finalement reconnu et invité. Je sais que les musées, pendant des années, n'ont jamais comparu devant un comité; je suis donc très heureux que vous soyez parmi nous aujourd'hui. Nous avons tous été à l'écoute de vos préoccupations.
Je vous souhaite un bon retour.
Nous allons ajourner pendant cinq minutes environ, puis nous reprendrons nos travaux.
Nous passons à la deuxième partie, soit les travaux du comité.
Tout d'abord, nous avons trois avis de motion, l'un de Jim Abbott, l'autre de Charlie Angus et le troisième de Maka Kotto. Mais nous n'avons pas atteint les 48 heures de séance exigées pour ces motions. Je propose, si nous souhaitons procéder aujourd'hui pour ces motions, qu'un consentement unanime des membres présents soit obtenu au préalable. Nous avons déjà traité de cette question des 48 heures de préavis.
L'un est en date du 15, l'autre du 16 et le troisième du 8, mais la semaine dernière ne compte pas parce qu'on parle de jours de séance, de 48 heures de séance. C'est tout comme si une motion nous parvenait le vendredi à 15 ou 16 heures et que vous vouliez qu'on s'en occupe le lundi: cela serait impossible. Nous sommes déjà passés par là. Nous ne pouvons les traiter avant la séance de mercredi; il en est tout simplement ainsi.
Monsieur Bélanger.
Le comité connaît déjà mes arguments et je m'excuse de les répéter, mais notre difficulté — avant de pouvoir procéder à une discussion valable sur ces motions — est que le comité a décidé que nous allions consacrer trois jours au Programme de contestation judiciaire. Ceci étant, et vu que l'ordre du jour du comité est entièrement rempli, ces deux motions deviennent totalement irréalisables, à mon humble avis.
Je m'excuse d'être unilingue, mais j'ai pris la peine de parcourir les pages que je tiens en main provenant du Comité des langues officielles, et dans lesquelles la question du Programme de contestation judiciaire est soulevée. Je tiens dans mon autre main le procès-verbal du Programme de contestation judiciaire, ou Hansard, provenant du comité de la justice. Ainsi, l'opinion — particulièrement de ceux opposés au gouvernement — est bien consignée, aussi bien au Comité des langues officielles qu'au comité de la justice. Puisque ces deux autres comités s'occupent déjà de la question, le comité voudra peut-être se raviser et ne pas y consacrer trois journées pleines, puis se pencher plutôt sur la politique muséale — en d'autres termes, se ménager du temps afin de pouvoir réagir au cas où l'on voterait en faveur de l'une ou l'autre de ces motions.
Je veux m'exprimer au sujet des motions, mais je pose tout d'abord cette simple question. Il n'y a pas vraiment de temps à l'ordre du jour pour réagir positivement, même si le vote sur ces motions était positif.
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Il a été déterminé que nous consacrerions du temps au Programme de contestation judiciaire; cela est décidé. Le greffier nous a remis cette proposition, sur laquelle le comité s'est entendu, et j'estime que nous devons aller de l'avant à ce sujet.
Concernant les motions devant nous, voici comment je compte voter, à moins que des modifications soient apportées: je n'appuierai pas la motion de M. Abbott. Je n'ai rien contre les musées; je crois simplement qu'à leur égard, notre comité devrait peut-être aller dans la sens de la motion de M. Kotto, puisque le travail est déjà fait — et je ne suis pas le seul à le dire: l'Association des musées canadiens elle-même l'affirme.
Nous avons aussi eu confirmation, à la dernière rencontre de notre comité avec l'Association des musées, que le gouvernement — la ministre — participe véritablement et lui a demandé de proposer des suggestions avant la fin de cette année civile. Si tel est le cas, nous faisons peut-être du travail pour rien, parce que si le gouvernement a décidé de s'en occuper, comme l'y avons encouragé au printemps lors du dépôt d'un rapport à cet effet, je ne suis pas sûr que nous fassions ce qu'il faut.
Je préférerais attendre de voir si le gouvernement compte vraiment présenter une politique. S'il souhaite la présenter au comité, j'en serais personnellement très heureux. Rien ne l'y oblige, ce que je respecte: il est parfaitement loisible au gouvernement de publier ses propres documents et d'adopter ses propres politiques. Il serait le bienvenue ici, dans un esprit de collaboration, pour nous permettre de réagir à sa politique, mais je doute que ce soit un emploi judicieux de notre temps, à cette conjoncture, de déterminer ce qu'en réalité nous examinerons en janvier ou février, quand le gouvernement pourrait avoir fini son travail, comme j'espère qu'il aura fait. C'est grosso modo ce que dit la motion de M. Kotto.
Je compte appuyer celle de M. Angus. Nous accordons une forte priorité à l'avenir de la radiodiffusion publique dans notre pays, particulièrement par CBC et Radio-Canada. Si le gouvernement nous présente une loi sur d'autres sujets — comme il aurait dû le faire, puisque la ministre a pris l'engagement à deux reprises devant ce comité de déposer en chambre une mesure législative sur le droit d'auteur, et de la renvoyer devant un comité, qui fait sans doute partie du nôtre, — à ce moment-là, cette mesure aurait préséance.
À défaut de ce qui précède, si j'avais le choix entre faire un travail en double, dédoubler, sur les mesures que prend le gouvernement concernant la politique muséale (ce qu'il fait assurément, on nous l'a garanti) et m'occuper de l'avenir de CBC et de Radio-Canada, et de leur mandat (ce que ne fait pas le gouvernement), je m'occuperais de CBC et de Radio-Canada. Ce sont pour l'instant mes intentions de vote sur ces motions particulières.
Je pense que nous pouvons revenir sur tout cela le 28 janvier, à notre prochaine rencontre, à la lumière de ce que nous aurons peut-être devant nous à ce moment-là, que ce soit ou non un examen d'une politique sur les musées et que le gouvernement compte ou non avancer sur la question du mandat d'examen de la CBC. Je serai alors parfaitement disposé à me pencher sur ce problème; mais notre chemin est presque entièrement tracé durant les quatre semaines qui nous restent, et je préférerais m'en tenir à cela. Ce sont mes intentions de vote sur ces motions particulières, sous réserve d'une réévaluation le moment venu.
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Monsieur le président, permettez-moi de rafraîchir la mémoire du comité.
Je vais citer M. McAvity en rapport avec la motion de M. Abbott. Lors de la réunion du 20 juin 2006, M. Malo s'est adressé à M. McAvity en ces termes :
Comme vous le savez, la révision de la politique muséale a été entreprise par le gouvernement précédent. Je suppose que vous aviez eu l'occasion de lui faire part de ces revendications.
M. McAvity lui a alors répondu qu'ils avaient mené de vastes consultations et formulé des propositions et que :
La politique muséologique était tout près de se concrétiser quand les élections ont été déclenchées. Malheureusement, il n'a pas été possible d'aller plus loin, mais en réalité, les consultations étaient terminées et une décision était sur le point d'être prise.
Je suis d'accord avec M. Bélanger à ce sujet.
Lors de la réunion du 8 novembre, on a demandé à M. Vadeboncoeur, de la SMQ, si une nouvelle consultation pourrait mener quelque part. Il a répondu ce qui suit :
On vous répétera exactement ce qu'on a dit au cours des autres consultations qui ont eu lieu il y a deux, trois, quatre, voire 10 ans. C'est aussi simple que cela, la situation ne change pas.
Dans la même ordre d'idée, M. Gerry Osmond, du milieu muséal de l'Alberta, nous a dit ce qui suit :
[Traduction]
Pour dire les choses crûment, tout ça est du déjà vu. Nous n'entendrons plus rien de nouveau lors des consultations. Nous avons été très clairs à l'occasion de la dernière consultation; retarder encore ce processus ne produira aucune information nouvelle.
[Français]
Voilà pourquoi je présente cette motion. En ce qui concerne celle de monsieur Angus, cela fait partie de nos préoccupations majeures que de revoir le mandat de Radio-Canada afin d'évaluer les moyens qui lui sont alloués pour remplir ledit mandat. Je suggère donc qu'on ne perde pas beaucoup de temps sur la politique muséale. À la limite, ce serait peut-être nuisible de le faire, parce que le propos et les intentions sont clairs. Perdre du temps à en discuter davantage serait probablement une tentative de gagner du temps, de faire perdre du temps au comité et éventuellement d'altérer la bonne foi dont notre parti fait preuve.
:
Je fais valoir à M. Angus, pour montrer ma bonne volonté, que si je parlais de cela, c'est que nous devrions pouvoir étudier la suggestion que je vais faire maintenant si nous voulons que notre comité soit pertinent et apporte une contribution à la ministre, mais le temps nous fait défaut.
L'un des sujets dont nous n'avons jamais discuté, et qui à mon esprit constitue certainement ici la clé, est toute la question de l'importance nationale. La politique doit fixer des paramètres à l'intérieur desquels on puisse reconnaître les collections d'importance nationale, afin d'établir l'importance et la nature du soutien. Rien de tel n'a jamais existé sous un gouvernement conservateur ou un gouvernement libéral.
Nous devons par exemple nous informer du mandat de la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels. Qu'on me permette de le lire :
La Commission a la responsabilité, entre autres, d'attester les biens culturels aux fins de l'impôt sur le revenu. À cet égard, elle statue quant à « l' intérêt exceptionnel et l'importance nationale » et la juste valeur marchande des objets ou des collections donnés ou vendus à des musées, des établissements d'archives et des bibliothèques canadiens désignés.
Je crois par exemple qu'il serait utile de faire comparaître la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels devant le comité, puis de poser la question suivante à son conseil et aux autres intéressés: si nous voulions établir les critères pour déterminer quels musées et quels artefacts doivent recevoir un soutien national, par opposition à un soutien régional ou un soutien local, seriez-vous capables d'élaborer ces critères? Nous pourrions tenir une audience de cette nature et offrir ce conseil à la ministre.
La ministre est en position de faire venir ces gens. Il se trouve que j'ai un exemplaire de « New Approach », soit la présentation faite par l'Association des musées canadiens sur la politique muséale canadienne, que chacun peut se procurer auprès de cette Association. La présentation a été donnée à la ministre le 30 octobre, et l'Association se fait un plaisir de la partager avec nous.
Nous disposons de toute cette documentation; néanmoins, il manque encore des maillons dans la chaîne. Je veux simplement dire qu'il existe des questions sur lesquelles nous devons recueillir l'information, bien qu'il soit inutile d'y consacrer beaucoup de temps, si nous voulons jouer un rôle pertinent dans le processus.
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Excellent. Je voulais simplement confirmation de ce fait.
Je crois que ce qui m'empêche de voter en faveur, pour l'instant, est qu'il m'a été impossible de consulter tout ce qui a été présenté à la séance précédente du comité, avant même que j'y sois. J'aimerais que cette possibilité me soit offerte, au moins avant la prochaine séance, pour que le personnel puisse préparer un recueil des documents qui ont été présentés; ce serait une chance de lire non seulement le procès-verbal, mais aussi les feuillets bleus d'une partie du témoignage entendu. Ainsi, je serais mieux placé pour évaluer si nous pouvons clore aujourd'hui les séances et procéder à la rédaction de la politique.
Dans cette optique, je dois voter contre la motion aujourd'hui — non pas nécessairement parce que je ne l'appuie pas, mais simplement parce que je ne dispose pas de toutes les informations. Tout aurait été plus facile si je les avais reçues il y a une ou deux semaines. Et bien sûr, le personnel est en bonne position pour nous fournir des informations d'appui supplémentaires.
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Je disais à l'instant, monsieur le président, qu'il est vrai qu'il y a eu beaucoup de contributions sur cette question. Tout n'a pas été fait en comité; en 2005, par exemple, j'ai organisé une tribune sur une question d'importance nationale avec une foule de petits musées, puis nous l'avons soumise à Patrimoine. Nous n'avons jamais su ce qu'il en est advenu, mais des questions ont été posées sur les liens entre les petits musées et la politique nationale.
Nos opinions ne sont pas diamétralement opposées et nous ne faisons que débattre du calendrier et de la méthode, mais ce qui m'intéresse dans cette motion, c'est que je ne me suis jamais trouvé en situation de téléphoner à des intervenants pour leur demander s'ils voulaient se faire inviter à nous parler, pour me faire répondre « non merci; nous avons déjà parlé et fait nos présentations, on nous dit qu'une politique se prépare, voyons donc quelle est cette politique. »
Ce que ces intervenants me font comprendre, c'est qu'ils veulent consulter cette politique, ce qui donne la chance à notre comité de l'examiner et d'appeler des témoins. Si la politique est excellente, tout ira pour le mieux; si elle comporte des problèmes, nous les découvrirons et pourrons soumettre des recommandations au ministre. Mais j'estime que si nous faisons une chose, sachant pertinemment qu'un autre processus est en cours, nous devrons de toute façon convoquer d'autres témoins quand la politique sera publiée.
Je dirai donc que j'appuie la motion de M. Kotto, pour que nous finissions par accomplir quelque chose; nous ne disons pas que nous n'allons pas entendre de témoins, mais que nous voulons savoir ce qui sera fait en premier, afin de pouvoir fixer notre ordre du jour.