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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 052 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 7 février 2007

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 25 octobre 2006, le projet de loi C-257, Loi modifiant le Code canadien du travail en ce qui concerne les travailleurs de remplacement, le comité reprend son étude du projet de loi.
    Je veux simplement prendre le temps de souhaiter la bienvenue à tous nos témoins. Je vous ai dans l'ordre ici, et je vais vous indiquer quand vous aurez la parole. Vous disposerez de sept minutes chacun. Je vais vous faire signe lorsqu'il vous restera une minute, si vous ne surveillez pas l'heure vous-même, puis nous allons commencer avec quelques tours de table au cours desquels nous allons poser des questions, en commençant par l'opposition, avant de passer au gouvernement. Pendant le premier tour de table, chaque personne disposera de sept minutes, puis, pendant le second tour, ce sera cinq minutes.
    Je pense que la NWT and Nunavut Chamber of Mines participe à la réunion par téléconférence. Je vous souhaite la bienvenue. Je vais vous indiquer quand ce sera votre tour de parler.
    Si vous me le permettez, je vais demander à notre premier témoin, le Conseil canadien des employeurs, de commencer. Je crois qu'il s'agit de Steve Bedard.
    Monsieur Bedard, vous avez sept minutes.
    Le Conseil canadien des employeurs est la voix des entreprises canadiennes sur les questions internationales liées au travail et auprès de l'Organisation internationale du travail, l'OIT. Le CCE représente les intérêts des entreprises canadiennes pour les questions liées au travail à l'échelle internationale depuis plus de 80 ans, depuis 1919, en fait, et les membres du CCE représentent un vaste échantillon des employeurs canadiens, dont bon nombre sont régis par le gouvernement fédéral.
    Le CCE s'exprime au nom des entreprises canadiennes à l'Organisation internationale du travail, l'organisme des Nations Unies promulguant les normes internationales du travail; à l'Organisation internationale des employeurs, l'OIE, l'organisme international représentant les intérêts des employeurs auprès de l'OIT; et dans Ie cadre du processus du Sommet des Amériques.
    Notre équivalent à l'OIT est le CTC, le Congrès du travail du Canada. Le CCE et ses membres s'opposent au projet de loi C-257 et sont d'avis que celui-ci devrait être rejeté. Quant aux questions de fond soulevées par le projet de loi C-257, le CCE appuie les témoignages des ETCOF, les employeurs des transports et communications de régie fédérale. D'après ce que nous savons, le directeur exécutif des ETCOF, Don Brazier, a présenté un mémoire et a témoigné devant le comité permanent le 5 décembre 2006.
    Le témoignage du CCE devant le comité permanent se limite aux principes internationaux en matière de travail qui devraient servir de guide à tout examen du projet de loi C-257.
    Je renvoie les membres du comité permanent au mémoire du CCE, que nous vous avons fourni dans les deux langues officielles. Nous souhaitons aborder deux questions principales dans notre témoignage. La première est la suivante : le projet de loi C-257 constitue une politisation injustifiée de la réforme du droit du travail à l'échelon fédéral. Michael McDermott, l'ancien sous-ministre adjoint principal responsable du programme du travail, a brièvement abordé cette question à l'occasion de son témoignage devant le comité permanent le 7 décembre.
    La position du CCE est que la politisation de la réforme du droit du travail est contraire à la tradition de tripartisme découlant des principes internationaux en matière de travail et à laquelle le gouvernement fédéral adhère depuis longtemps.
    Ensuite, le CCE est d'avis que les principes du droit international du travail n'appuient pas l'interdiction d'avoir recours à des travailleurs de remplacement.
    L'OIT n'a jamais formulé de conclusion défavorable à l'endroit du Canada en ce qui concerne le recours aux travailleurs de remplacement et n'a jamais adopté de texte interdisant de manière explicite ce recours.
    En ce qui concerne les inquiétudes liées à la politisation de la réforme du droit du travail, contrairement aux réformes du droit du travail entreprises dans de nombreuses provinces, la réforme fédérale est parvenue à éviter la politisation. À la place, on a adopté des processus de réforme tripartite au sein du régime fédéral afin de permettre une contribution active et significative de la part des employeurs, des syndicats et des gouvernements. Le tripartisme est axé sur le processus menant à une réforme substantielle du droit du travail. Il favorise la stabilité et l'équilibre dans un régime de relations de travail.
    Un engagement envers le tripartisme est à la base de l'OIT, et il se reflète dans trois normes du travail internationales importantes, dont il est question en détail dans le mémoire du CCE. Ces normes favorisent la consultation et la coopération efficaces entre les autorités publiques, les employeurs et les associations de travailleurs. Ces principes internationaux permettent d'illustrer comment le processus politisé sous-tendant le projet de loi C-257 constitue un écart inquiétant face à la tradition qui existait au gouvernement fédéral.
    La forte tradition d'engagement fédéral envers le tripartisme en matière de réforme du droit du travail s'est reflétée dans la mise sur pied de l'équipe Woods en 1968 et dans le rapport qu'elle a produit, ainsi que dans le rapport du groupe de travail Sims de 1995, intitulé « Vers l'équilibre », dont on a déjà abondamment parlé devant le comité permanent.
    La principale inquiétude du CCE en ce qui concerne le processus menant à la présentation du projet de loi C-257 est que celui-ci constitue une tentative politique de réformer le code dans le but de modifier l'équilibre des pouvoirs entre les employeurs et les syndicats.
    En ce qui concerne l'absence de processus tripartite mené par des experts dans le cadre de la rédaction du projet de loi C-257, au contraire, le groupe de travail Sims avait suivi un processus de consultation tripartite d'experts, dans le cadre duquel il avait entendu de nombreux arguments pour et contre l'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement temporaire. Au bout du compte, ce processus a donné lieu à la conclusion qu'il fallait rejeter l'interdiction.
    Le CCE est d'avis que le projet de loi C-257 sera en lui-même une source d'instabilité dans le secteur fédéral du droit du travail. En adoptant le projet de loi, on va ouvrir la porte à de nouveaux changements découlant non pas d'un processus de consultation tripartite d'experts, mais d'un processus politique, comme cela s'est produit en Ontario dans les années 90 — une expérience que, je crois, ni les employeurs ni les syndicats ne veulent refaire.
(1540)
    Au chapitre des principes internationaux du travail concernant les travailleurs de remplacement temporaire, il n'y a absolument aucune ligne directrice politique, norme ou loi à l'échelle internationale qui interdise le recours à ces travailleurs. Cependant, l'OIT a formulé des principes à l'appui du droit de participer à de libres négociations collectives, ainsi que du droit à la liberté syndicale.
    Même si le Congrès du travail du Canada a formulé de nombreuses plaintes à l'intention de l'OIT sur des questions de relations de travail au Canada et dans les provinces, le Congrès n'a jamais formulé de plaintes au sujet des travailleurs de remplacement. En réalité, la plupart des plaintes ont trait à la loi imposant le retour au travail et aux lois provinciales qui limitent les négociations collectives et les grèves.
    Avant l'application des recommandations du rapport Sims, l'OIT a reçu un certain nombre de plaintes concernant la loi imposant le retour au travail dans le secteur fédéral. Depuis le rapport Sims, en aucune occasion, la loi imposant le retour au travail —
    Il vous reste une minute.
    — et nous croyons que cela illustre bien l'équilibre qu'a établi le rapport Sims entre les différents enjeux concurrents au chapitre de la réforme du droit du travail.
    Nous savons qu'on a discuté abondamment de l'article 87.4 au cours des audiences comme celles d'aujourd'hui, et qu'on a cru à tort que cet article assurait le maintien des services essentiels. Nous avons demandé un avis juridique là-dessus, et, d'après cet avis, il est clair que l'article 87.4 n'a jamais eu pour objectif de garantir le maintien des services essentiels, et que ce n'est pas quelque chose qu'il prévoit.
    L'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement, qui modifierait l'équilibre qu'avait trouvé le rapport Sims, entraînerait un retour à l'époque où on avait assez régulièrement recours, en cas d'urgence, à des lois de retour au travail dans le secteur fédéral. Dans ce cas, nous nous attendrions à la multiplication des plaintes du mouvement syndical canadien auprès de l'OIT au sujet d'interférences dans le processus de libre négociation collective.
    Enfin, nous souhaitons ajouter qu'en interdisant le recours aux travailleurs de remplacement, il ne faut pas oublier le fait que cette interdiction n'a pas seulement pour effet d'interdire les travailleurs qui viennent de l'extérieur, elle empêche aussi les employés des unités de négociation de traverser les lignes de piquetage. Elle aurait pour effet de forcer les membres dissidents de l'unité de négociation en grève —y compris les employés qui ne font pas partie du syndicat — à s'associer au syndicat et aux membres des unités de négociation en faveur de la grève. Il s'agit d'une forme de coercition législative qui soulève des préoccupations importantes quant à la liberté syndicale.
    La liberté syndicale est l'une des assises des normes du travail internationales de l'OIT. En fait, le préambule du Code canadien du travail en parle. Elle est aussi protégée par l'alinéa 2d ) de la Charte des droits et libertés.
    Merci.
    Merci, monsieur Bedard.
    Je vais demander aux Métallurgistes unis de poursuivre. Je pense que Cathy Braker est avec nous, ainsi que Daniel Roy. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Le Syndicat des Métallos est une organisation ouvrière internationale comptant plus de 280 000 membres au Canada. Environ 15 000 d'entre eux occupent des emplois qui relèvent de la compétence fédérale.
    Les Métallos sont des hommes et des femmes de tous les milieux sociaux, culturels et origines ethniques qui oeuvrent dans toutes les industries et professions. Nos membres sous l'autorité fédérale travaillent pour des entreprises de camionnage, de chemin de fer, de livraison de courrier, des banques, des lignes aériennes, dans les domaines de la sûreté des aéroports, de l'expédition, des services de traversier et des communications.
    Nous sommes heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de présenter notre mémoire dans le cadre du processus visant à améliorer le Code canadien du travail et à interdire le recours à des travailleurs de remplacement pendant les conflits de travail dans les entreprises relevant de la compétence fédérale. Une telle occasion permet de faire progresser la lutte des Métallos pour la dignité, le respect et l'égalité de leurs membres, et d'améliorer la vie professionnelle de toute la population active au Canada.
    Le Code canadien du travail. Le droit du travail au Canada reconnaît et donne effet depuis longtemps au droit de grève. Le droit d'un syndicat d'exercer des pressions économiques sur des employeurs par le retrait collectif des services de ses membres pour appuyer ses revendications contractuelles est un droit fondamental dans notre société démocratique. Aux termes du Code canadien du travail, le droit de grève est un élément fondamental d'un code complet de droits et d'obligations qui régit les relations de travail dans les entreprises relevant de la compétence fédérale.
    Le Code canadien du travail confère aux syndicats le droit de négocier collectivement et, par la suite, d'administrer et d'appliquer les conventions collectives au nom de leurs membres. Le droit des syndicats de négocier collectivement est soigneusement équilibré par une obligation de représenter leurs membres de manière équitable. En guise de compromis pour être reconnus comme uniques agents négociateurs, les syndicats sont tenus légalement de garantir à tous les employés de l'unité de négociation qu'ils représentent une juste représentation. Le code permet aux employés de l'unité de négociation, dans certaines circonstances, de faire révoquer l'accréditation de leur syndicat ou de faire annuler son statut d'agent négociateur. Ce droit constitue un moyen supplémentaire de contrôler et d'équilibrer l'autorité des syndicats. Le code comporte des dispositions supplémentaires et exhaustives qui interdisent aux employeurs et aux syndicats de recourir à des pratiques de travail déloyales avant l'accréditation, pendant les campagnes de syndicalisation, tout au long de la durée de la convention collective, ainsi que durant les grèves et les lock-out.
    Le droit de grève. L'équilibre du pouvoir économique entre les employeurs et les syndicats au tout début d'une grève est influencé par des facteurs dont les deux parties ont le droit de tenir compte : d'une part, le syndicat détermine s'il doit ou non entreprendre une grève et, d'autre part, l'employeur décide s'il doit ou non maintenir des positions pouvant entraîner une grève. Le syndicat évalue normalement le soutien qu'il a et prévoit sa capacité de réussir dans une situation de grève en tenant un vote de grève auprès de ses membres. Cela constitue une mesure fondamentale et démocratique du soutien à l'égard du syndicat qui démontre le consentement et l'habilité de l'unité de négociation à faire face aux pressions économiques. L'employeur s'engage dans un exercice semblable afin d'évaluer sa capacité à résister à une grève. Encore là, comme pour les autres aspects du rôle du syndicat à titre d'agent négociateur, le droit du syndicat de faire la grève est soigneusement restreint par les dispositions du code. Un équilibre entre les droits et les obligations des parties à la relation de négociation est atteint.
    Pourquoi faut-il interdire le recours à des travailleurs de remplacement?
    Les travailleurs de remplacement sont étrangers à la relation de négociation. Ils ne font pas partie de l'unité de négociation du syndicat. Ils ne participent pas à la négociation collective. Ils ne prennent pas part au vote de grève. C'est pourquoi la simple introduction de travailleurs de remplacement en elle-même bouleverse l'équilibre du pouvoir que les parties ont établi et évalué au début de la grève. En outre, des chercheurs ont lié l'introduction de travailleurs de remplacement à un grand nombre de résultats négatifs, notamment à une violence accrue sur les lignes de piquetage et à des grèves prolongées. De plus, une étude de la Princeton University à une usine de Bridgestone/Firestone à Decatur, au milieu des années 1990, a étudié la question de savoir si une grève litigieuse et l'embauche de travailleurs de remplacement étaient liées ou non à la production de pneus défectueux. Cette étude a conclu que le conflit de travail dans l'usine coïncidait étroitement avec une qualité de produits inférieure.
    La recherche décrite ci-dessus reflète avec précision l'expérience de notre syndicat avec les travailleurs de remplacement. Lorsqu'un employeur embauche des travailleurs de remplacement pendant une grève, ceux-ci entrent en contact direct avec les grévistes et les autres membres du syndicat qui continuent d'appuyer la grève. D'après notre expérience, ce contact est provocateur et perturbateur. Les employeurs comptent souvent sur ce contact pour démoraliser les membres syndiqués.
(1545)
    Dans ces circonstances, il n'est pas surprenant que la présence de travailleurs de remplacement fasse augmenter le nombre d'incidents et la violence sur les lignes de piquetage. Cette hausse des incidents et de la violence mine les règles de droit.
    Le recours à des travailleurs de remplacement fausse injustement l'équilibre du pouvoir économique dans une situation de grève, et il joue énormément contre tout syndicat qui choisit d'exercer son droit de grève. Il n'existe aucune raison légitime de permettre à l'employeur de recourir à des travailleurs de remplacement dans le contexte d'un système de relations de travail reconnaissant que les parties doivent déterminer la relation à la convention et non la mettre en danger, la miner ou même la faire détruire par des étrangers.
    Le recours à des travailleurs de remplacement fausse l'équilibre que l'on cherche par ailleurs à atteindre en appliquant un code de conduite complet et détaillé régi par nos lois sur le travail.
    En conclusion, notre syndicat accueille favorablement toute modification au code qui établit la base d'un système plus équitable pour la résolution des conflits. Nous croyons que le code aurait dû, il y a longtemps, faire l'objet de modifications indiquant clairement que le droit des employeurs de recourir à des travailleurs de remplacement pendant une grève est effectivement limité.
    Nous appuyons les modifications que comporte le projet de loi C-257, qui vise clairement à éliminer l'injustice inhérente à un système qui permet à un employeur de continuer à exercer ses activités en recourant à des travailleurs de remplacement pendant une grève. Le Syndicat des Métallos appuie le projet de loi et félicite ses alliés politiques au Parlement pour leur travail.
    Merci.
(1550)

[Traduction]

    Merci de votre temps, monsieur Roy.
    Nous allons maintenant passer à la vidéoconférence, et écouter le témoignage de M. Vaydik, de la Northwest Territories and Nunavut Chamber of Mines, qui va durer sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Notre organisation représente toutes sortes de sociétés et de particuliers dans les domaines de la prospection et de l'exploitation minière dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Elle compte au-delà de 800 membres, allant de prospecteurs, de petites sociétés d'exploration, de sociétés d'exploitation minière, d'entreprises de services de tous genres et, de plus en plus, de sociétés autochtones oeuvrant dans le domaine de l'industrie minière. Les entreprises de service que nous comptons parmi nos membres se spécialisent dans le domaine de l'aviation, du forage, du camionnage, de la construction, de l'expédition et de la restauration, ainsi que dans de nombreux autres domaines. Bon nombre de résidents du Nord tirent directement ou indirectement leur subsistance de l'industrie minière.
    Au nom de l'industrie minière du Nord, je vais m'exprimer contre l'adoption du projet de loi en question.
    Les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut constituent le tiers du territoire du Canada. La taille de cette région, son paysage accidenté, les coûts élevés et le climat rude constituent ensemble des obstacles formidables à la croissance. Résultat : nous avons l'infrastructure la moins évoluée au Canada. Ces obstacles limitent souvent les choix que nous ne pouvons faire pour favoriser véritablement la croissance économique.
    À l'heure actuelle, l'industrie la plus importante du Nord, ce sont les mines. En comptant les investissements réalisés dans le domaine de l'exploration, nous parlons d'une industrie de deux milliards de dollars. Avec les nouvelles mines, nous prévoyons que la valeur du secteur va atteindre trois milliards de dollars par année à moyen terme. À part le gouvernement, l'industrie minière est l'employeur le plus important, plus de 2 500 personnes travaillant aux mines des Territoires du Nord-Ouest seulement. Le secteur des mines compte pour la moitié de l'économie des Territoires du Nord-Ouest, c'est-à-dire la moitié de leur PIB. Il s'agit d'une industrie en croissance au Nunavut, où il y a une mine en rapport, et deux autres qui ont obtenu récemment l'approbation réglementaire et qui vont bientôt être en construction.
    À titre de générateur d'importantes possibilités d'emploi et d'affaires, nous sommes en faveur de l'accroissement des avantages pour les gens du Nord et les Autochtones. L'industrie minière peut aussi stimuler la mise en oeuvre de nouvelles infrastructures comme les routes, les ports et les centrales hydro-électriques, dont profitent aussi les collectivités de notre région. Cependant, l'efficacité du code du travail est un facteur essentiel de la capacité de l'industrie minière d'offrir ces avantages à long terme aux résidents du Nord. Nous ne sommes pas convaincus que le projet de loi va nous aider.
    Nous savons que certaines personnes sont susceptibles d'évoquer la grève de la mine Giant, dans les Territoires du Nord-Ouest, en prétendant qu'il s'agit d'une excellente justification à l'appui d'une loi anti-briseurs de grève. Ce serait cependant simplifier à l'excès la situation complexe qui a abouti à cette grève. Il n'y a pas eu d'enquête officielle pour déterminer ce qui a causé la grève, et les mesures prises en conséquence par l'employeur et par le syndicat. C'est malheureux, puisque, selon nous, un vote au scrutin secret aura peut-être donné le résultat contraire, comme l'aurait fait l'imposition plus précoce d'un recours à la médiation. En ce qui concerne l'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement, notre position n'a rien à voir avec cet événement historique malheureux.
    La réalité contemporaine de l'industrie minière est que les nouvelles mines sont situées dans des régions très éloignées du pays, difficilement accessibles. Les nouvelles mines sont des camps autonomes où les travailleurs se rendent par avion en fonction d'horaires variables. Les mines génèrent leur propre électricité, offrent leurs propres services comparables à des services municipaux, et sont desservies par des voies de communication saisonnières et précaires. Nos nouvelles mines de diamant sont desservies par une route de glace ouverte pendant huit à douze semaines. On construit cette route chaque année, et on l'entretient pendant cette très courte période. Elle traverse plus de 700 kilomètres de toundra et de lacs glacés. Pour vous donner une idée, il y a 763 kilomètres entre Calgary et Regina, et 792 kilomètres entre Toronto et Québec. C'est la mine qui paie pour la construction et l'entretien de cette route.
    Le fait que les mines du Nord soient autonomes et éloignées signifie qu'on doit transporter, pendant cette très courte période, et sur de longues distances, ce dont on a besoin pour un an, comme de l'essence, tant pour les activités que pour la production d'électricité, des explosifs, de l'acier, du ciment, des pneus pour les camions et d'autres fournitures essentielles, qu'il faut ensuite stocker sur place. Les mines en rapport prévoient à elles seules transporter cette année l'équivalent de plus de 10 500 camions de matériel et de fournitures vers le Nord au cours de cette courte saison.
    Auparavant, des navires de charge brise-glace se rendaient aux mines du Grand Nord pendant environ cinq mois par année. Les nouvelles mines dont l'ouverture est projetée au Nunavut devront être ravitaillées par bateau ou par barge au cours de la courte période où la voie maritime est praticable. Ces mines continueront d'être particulièrement vulnérables aux arrêts de travail au cours de cette période.
(1555)
    Un syndicat pourrait utiliser cette vulnérabilité relative à l'approvisionnement pour appuyer ses demandes. En provoquant une grève pendant la période où l'approvisionnement est possible, le syndicat tiendrait essentiellement la mine en otage. Dans le pire des cas, la mine devrait fermer. Même si une partie seulement de la cargaison essentielle n'était pas livrée pendant la période où c'est possible, cela pourrait nuire à la viabilité de la mine. Si la mine devait faire des concessions coûteuses aux grévistes, les frais grimperaient, et la durée de vie de l'exploitation minière pourrait être réduite.
    L'exploitation des mines modernes est complexe; elle se fait dans le cadre d'un régime réglementaire très complexe, dans un contexte de lois environnementales strictes, et elle est assujettie à un certain nombre d'ententes dont le respect est obligatoire pour l'obtention des permis d'exploitation. Les exploitations minières doivent offrir des avantages aux habitants du Nord, et surtout aux Autochtones, sous forme d'emplois, de formation et d'occasions d'affaires. De plus, elles effectuent des paiements directs aux collectivités autochtones dans le cadre d'ententes sur les répercussions et les avantages. Ajouter l'incertitude provoquée par l'interférence découlant de mesures syndicales à des liens logistiques ténus et fragiles sur le plan temporel pourrait surcharger inutilement les exploitations minières et les rendre peut-être non viables sur le plan économique.
    Il vous reste une minute.
    Merci.
    Nous pensons que le projet de loi, dans l'état actuel, aurait pour effet de faire pencher la balance de façon excessive en faveur des syndicats, au détriment de notre industrie, qui est si importante pour nous.
    Jusqu'à maintenant, le code du travail confirmait le droit des syndicats de retenir leurs membres, mais aussi le droit des employeurs d'exploiter leur entreprise. Nous pensons que cet équilibre est nécessaire pour maintenir des relations de travail justes et productives. Nous croyons que c'est en permettant à l'industrie de préserver le lieu de travail, de façon que les travailleurs puissent retrouver leur emploi à la fin d'un conflit, que le code du travail servirait le mieux les intérêts des résidents du Nord.
    Selon nous, le projet de loi est gravement défectueux, en ce qu'il fait beaucoup trop pencher la balance en faveur des syndicats. Nous croyons que son adoption affecterait la viabilité de notre industrie minière du Nord, et, par conséquent, l'économie de notre région. Cela irait à l'encontre de l'intérêt des résidents du Nord et réduirait de façon draconienne leurs possibilités d'avenir.
    Merci.
    Merci, monsieur Vaydik, de votre exposé.
    Nous allons passer à M. Pennings. Essayez de vous en tenir à sept minutes, s'il vous plaît, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui, ainsi que la greffière du comité et le personnel de m'avoir aidé pour ce qui est de la traduction.
    Le rapport du groupe de travail de 1996 qu'on a utilisé comme fondement pour la dernière réforme majeure du code canadien du travail s'intitulait, de façon plutôt appropriée, Vers l'équilibre. C'est ironique que la seule question sur laquelle le groupe d'experts n'a pas réussi à se mettre d'accord est celle dont doit s'occuper le comité, la question des travailleurs de remplacement.
    Dans le rapport en question — j'ai mis la référence complète dans mon mémoire — les membres du groupe de travail font remarquer, à la fin, que, malgré les divergences de vues, il y a certains aspects sur lesquels ils se sont mis d'accord, et ils ont aussi proposé plusieurs autres façons de protéger les droits des différentes parties pendant un arrêt de travail.
    Au moment de préparer l'exposé que je vous présente aujourd'hui, j'ai examiné les témoignages que vous avez entendus jusqu'à présent, et, sans aucun doute, « équilibre » est le mot qui revient le plus souvent. Tous les témoins, peu importe le point de vue qu'ils défendent, reconnaissent que l'équilibre est une norme à laquelle il faut faire appel. Cependant, il semble que cet équilibre, comme la beauté, tient à une question de point de vue. Les gens qui ont témoigné devant le comité percevaient l'équilibre de façons très différentes.
    Ainsi, plutôt que de vous fournir encore des données et des statistiques ou de passer au peigne fin celles que vous avez déjà devant vous et pour lesquelles on vous a proposé diverses interprétations, j'ai pensé utiliser le peu de temps qui m'a été alloué pour vous faire d'abord part de mon parti pris, puisque si l'équilibre, comme la beauté, est subjectif, alors il n'est que juste d'avouer son parti pris, puis pour formuler trois observations qui, je l'espère, vous aideront dans le cadre de votre étude du projet de loi.
    J'ai grandi au sein d'une famille immigrante d'une petite ville de l'Ontario. À l'époque, je me faisais une image négative des syndicats. Les employés de l'entreprise où ma mère travaillait étaient syndiqués, et cela n'a pas été une expérience positive pour elle. J'entendais parler d'inquiétudes au sujet de la mise en place de certaines conditions qui avaient des effets négatifs sur elle, et avec lesquelles elle était en désaccord, contrairement à la majorité. Nous vivions dans une ferme familiale, et les fréquentes interruptions du service postal, qui étaient la norme à l'époque, posaient d'importants problèmes pour notre famille, sur le plan économique.
    Il va sans dire que lorsque, dans la vingtaine, j'ai accepté un poste de représentant syndical, cela n'a pas vraiment fait le bonheur de ma famille ni de beaucoup de mes amis. Pendant 11 ans, j'ai été à l'avant-plan des négociations syndicales. J'ai négocié des ententes qui concernaient des dizaines, et parfois même des milliers, de travailleurs. J'ai représenté mon syndicat pendant les négociations sur le contrat social en Ontario. J'ai représenté le syndicat dans le cadre d'un programme de formation et d'adaptation de la main-d'oeuvre du secteur de la santé évalué à 30 millions de dollars. J'ai siégé à des conseils d'arbitrage constitués en vertu de la Loi sur l'arbitrage des conflits de travail dans les hôpitaux de l'Ontario et de dispositions relatives aux griefs de nombreuses conventions collectives.
    J'ai pris publiquement parti, d'une façon que je qualifierais de conservatrice, en faveur de la négociation collective, en soutenant, premièrement, que la nature du travail au sein de l'économie moderne crée une demande naturelle d'organisations représentant les travailleurs, deuxièmement, que la plupart des arguments économiques traditionnellement utilisés pour décrire les syndicats comme ayant un effet préjudiciable sur l'économie sont, en fait, fallacieux, et troisièmement, que les syndicats peuvent contribuer de manière importante à la justice et à la démocratie en milieu de travail.
    J'ai soulevé ces points uniquement pour démontrer que, en venant ici, j'ai un préjugé favorable envers la négociation collective. Je crois qu'il s'agit d'une bonne chose, et il ne fait aucun doute, pour moi, que la restriction concernant les travailleurs de remplacement que propose le projet de loi renforcera la position des syndicats dans le cadre des conflits de travail. Après avoir peiné avec des membres de syndicats en situation de grève, je suis en mesure de comprendre l'attrait que recèle le fait de voir modifier les règles de la guerre de façon à offrir un avantage à l'une des deux parties. Cependant, permettez-moi de faire trois commentaires qui, à mon avis, devraient donner à réfléchir à ceux qui pensent que le projet de loi va nécessairement donner les résultats intéressants qu'ils espèrent.
    Je voudrais commencer par faire un commentaire au sujet de ce qu'est l'équilibre dans les relations de travail. À la table de négociations des conventions collectives, on apprend très rapidement que le processus est aussi important que la substance des négociations. Il arrive souvent qu'il ressorte la même chose d'une convention collective, et, en fonction de la perception du processus, lorsqu'on retourne voir les membres du syndicat pour leur demander d'approuver cette convention collective, ils la rejettent ou l'approuvent en fonction de leur perception du processus, et non pas nécessairement de la substance de la convention collective.
    Je crois qu'il existe un impératif semblable dans le processus de réforme du droit du travail. Le rapport Sims a donné lieu à un ensemble de réformes pour lesquelles presque tous étaient d'accord.
(1600)
    Les lois qui en ont découlé ont généralement été considérées comme étant équilibrées non seulement en raison de leur contenu, mais aussi du processus suivi.
    Je soutiens respectueusement que, peu importe le bien-fondé des arguments concernant les travailleurs de remplacement, le processus même concernant à examiner un projet de loi comportant une seule modification au code du travail relativement à une question controversée — le seul point sur lequel les trois commissaires n'ont pas réussi à se mettre d'accord dans le rapport Sims — constitue une approche déséquilibrée et imprudente relativement aux relations de travail.
    J'ai participé à de nombreuses réunions de ratification de conventions collectives, et il m'est arrivé souvent que des membres de syndicats me demandent « Pouvons-nous voter sur telle ou telle disposition séparément? » Chaque fois, il s'agissait d'une disposition controversée qui avait fait l'objet de concessions au cours du processus de négociation. Supprimer cette disposition aurait vraiment compromis l'équilibre du document.
    D'autres personnes ont parlé de la politisation du processus, ce à quoi il faut faire attention, d'après le rapport Sims. Pendant toutes les années 90, je travaillais dans le domaine des relations de travail en Ontario, et j'ai vu ce qui se produit lorsque la balance penche d'un côté ou de l'autre.
    Deuxièmement, il ne s'agit pas seulement d'un équilibre entre le syndicat et la direction d'une entreprise; il s'agit aussi d'un équilibre entre la majorité et la minorité. La négociation collective, de par sa nature même, est une affaire de majorité : un syndicat doit s'exprimer d'une seule voix. Nous devons cependant reconnaître l'existence de voix dissidentes. Dans certaines situations de conflit de travail — il y en a que j'ai vécues — le problème n'est pas toujours tant entre l'employeur et les employés qu'une division parfois profonde au sein du syndicat lui-même, qui force les éléments politiques du processus à évoluer d'une certaine manière. Il y a beaucoup de choses à dire, et j'en parle dans mon mémoire.
    La troisième chose que je veux dire, c'est que je déplore la diminution de notre représentation — et je pense qu'il s'agit d'un problème de politique publique important —, et les chiffres diminuent depuis plusieurs années. Un projet de loi comme celui qui nous occupe aujourd'hui nous ramène, j'en ai bien peur, à la définition des règles de la guerre et aux points négatifs des relations de travail.
    Je veux citer des données que nous avons demandé à Gallup de recueillir pour nous, qui, en gros, indiquent que lorsqu'on demande aux Canadiens s'ils sont en faveur des syndicats, on obtient une réponse positive, plus positive que jamais, mais si on leur pose des questions au sujet des détails des différentes activités syndicales —les grèves, et certaines autres activités — les résultats sont remarquablement négatifs. En d'autres termes, les Canadiens sont en faveur des syndicats, mais pas nécessairement de la manière dont certaines négociations collectives se sont déroulées dans le passé.
    Je sais que mon temps est presque écoulé, alors je vais vous laisser mes commentaires écrits. Je crois que nous devons régler un certain nombre de problèmes beaucoup plus pressants si nous voulons qu'un mouvement syndical essentiel continue de représenter les travailleurs à l'avenir.
    Merci.
(1605)
    Merci de votre exposé, monsieur Pennings.
    Nous allons maintenant passer à M. Vines et à Mme Nicholas.
    Je veux préciser qu'ils appartiennent au Conseil canadien des relations industrielles, une organisation gouvernementale. Je prierais les députés de ne pas leur demander ce qu'ils pensent du projet de loi. Ils sont ici aujourd'hui pour nous donner des précisions, et peut-être nous éclairer quant à la manière dont le projet de loi peut toucher le code du travail.
    Monsieur Vines, vous avez sept minutes.
    Mesdames et messieurs les députés, bonjour. Merci de m'avoir invité à témoigner.
    Je suis le directeur général et le greffier de la Région de l'Atlantique du Conseil canadien des relations industrielles. À ce titre, je suis responsable des activités du Conseil dans les provinces de l'Atlantique. Je représente aujourd'hui le Conseil, invité par le comité à témoigner.
    Permettez-moi de commencer par expliquer brièvement le rôle et le mandat du Conseil. Le CCRI est un tribunal quasi judiciaire, indépendant et de représentation. Le Conseil est chargé de l'interprétation et de l'application du Code canadien du travail, Partie I, Relations du travail, et de certaines dispositions de la Partie II. Le Code régit les relations de travail des entreprises qui sont assujetties à la réglementation fédérale. Le Conseil a pour mandat de favoriser l'établissement et le maintien de relations de travail harmonieuses et le règlement positif des différends. Dans l'exécution de son mandat, il est appelé à interpréter et à appliquer les dispositions du Code d'une manière permettant l'atteinte des buts et des objectifs établis par le Parlement et énoncés dans le Code. Dans le cadre des demandes et des plaintes dont il est saisi, il tente de régler les questions soulevées et de rendre des décisions de façon juste, rapide et économique, et d'une manière qui sert le mieux les objectifs en matière de relations de travail qui sont énoncés dans le Code. Il y parvient grâce aux divers mécanismes de règlement des différends dont il dispose. Le Conseil joue un rôle à la fois de médiateur et de décideur dans le règlement des demandes et des différends dont il est saisi.
    Il est tout aussi important de comprendre que le Conseil est un tribunal neutre et impartial. Il ne contribue aucunement à l'élaboration des politiques ou à la formulation des dispositions législatives qu'il est ensuite appelé à interpréter et à appliquer. Il ne lui appartient donc vraiment pas de se présenter devant le comité pour exprimer une opinion ou adopter un point de vue sur des modifications que l'on propose d'apporter au Code. Je me propose donc d'aborder, dans un premier temps, le paragraphe 94(2.1) du Code, la disposition qui traite, à l'heure actuelle, des travailleurs de remplacement, de me pencher ensuite brièvement sur l'article 87.4, qui régit le maintien des activités, puis de discuter, en dernier lieu, des répercussions que, de l'avis du Conseil, des modifications au Code pourraient avoir sur ses ressources et ses capacités.
    Depuis l'adoption, en 1999, de la disposition qui, à l'heure actuelle, traite des travailleurs de remplacement, le Conseil a été saisi d'environ 20 plaintes s'y rapportant. Seize d'entre elles ont été retirées, trois ont été rejetées, et l'une d'entre elles est en instance. La question des travailleurs de remplacement est généralement considérée comme une question importante, délicate et controversée qui touche les syndicats et le patronat. En outre, les demandes présentées en vertu de la disposition qui traite des travailleurs de remplacement surviennent généralement à un moment où les relations de travail entre les parties sont particulièrement tendues et difficiles. C'est la raison pour laquelle le Conseil traite ces dossiers en priorité et en mode accéléré. Toutefois, sur le plan de la procédure, cette tâche peut se révéler ardue. En effet, nous avons pu constater par le passé que de telles demandes s'accompagnent généralement de plaintes concernant des pratiques de travail déloyales et d'allégations de mauvaise foi dans les négociations. Dans l'espoir d'en arriver à une résolution globale et efficace sur le plan des relations de travail, le Conseil regroupe souvent différentes plaintes ou les entend ensemble. Cela exige fréquemment la présentation d'éléments de preuve plus nombreux et la tenue d'une audience plus longue pour que toutes les questions puissent être pleinement débattues et tranchées et que les principes de justice naturelle soient respectés à toutes les étapes du processus pour toutes les parties en cause.
    L'article 87.4 du Code porte sur le maintien des activités pendant une grève ou un lock-out. Il est l'une des diverses dispositions ayant trait à la grève qu'on a intégrées au Code en 1999, à la suite de la révision de la loi. Cette disposition aborde de front la question des obligations dont les parties doivent s'acquitter pour que certaines activités et certains services soient maintenus, pendant une grève ou un lock-out, dans la mesure nécessaire pour prévenir des risques immédiats et graves pour la sécurité ou la santé publique. Cette disposition impose aux parties l'obligation conjointe d'assurer la sécurité ou la santé du public pendant une grève ou un lock-out et, à ce titre, traite d'enjeux et de circonstances très différents de ceux qui sont le point de mire de la disposition relative aux travailleurs de remplacement. Aux termes de la disposition actuelle sur les travailleurs de remplacement, le recours à ces travailleurs dans le but de miner la capacité de représentation d'un syndicat, plutôt que pour atteindre des objectifs légitimes de négociation, constitue une pratique de travail déloyale.
(1610)
    En ce qui concerne les répercussions que pourraient avoir des changements apportés aux textes législatifs actuels, le Conseil est en mesure, en raison de son expérience, de formuler les observations et les commentaires suivants à l'intention du comité.
    La question des travailleurs de remplacement étant très délicate et portant généralement à controverse pour les syndicats et pour les employeurs, la modification de cette disposition particulière du Code entraînera probablement une augmentation de la charge de travail du Conseil.
    Nous avons été à même de constater, à l'occasion des modifications de la loi les plus récentes, que l'adoption d'une nouvelle disposition entraîne une hausse du nombre de demandes ou de plaintes déposées, les parties souhaitant mettre à l'épreuve la nouvelle disposition et sonder le Conseil en ce qui a trait à son interprétation ou son application de celle-ci. Il en découle par le fait même une hausse du nombre de demandes de réexamen, car les parties mettent la disposition à l'épreuve non seulement en première instance, mais également dans le cadre d'un réexamen et devant les tribunaux. En outre, la jurisprudence concernant telle ou telle question ou disposition n'est jamais établie sur le fondement d'une seule affaire ou d'une seule décision; elle évolue au fil des années dans le contexte propre à chaque cas, tel qu'il est présenté au Conseil.
    La hausse du nombre de demandes engendre des pressions accrues sur toutes les ressources du Conseil, sur les plans administratif, opérationnel et décisionnel. Ces pressions accrues sur les ressources sont particulièrement importantes compte tenu du traitement en priorité des plaintes déposées en vertu des nouvelles dispositions que, à mon avis, le Conseil n'aurait d'autre choix que d'effectuer. Dans le but d'éviter toute montée de la tension entre les parties, je crois que le Conseil devra réagir rapidement pour régler les différends mettant en cause des travailleurs de remplacement.
    En conclusion, j'aimerais répéter que le Conseil est neutre et impartial, et que son rôle est d'interpréter et d'appliquer les dispositions du Code, ainsi que d'aider les parties à résoudre leurs conflits de travail de manière constructive. Compte tenu de la neutralité que doit observer le Conseil, il ne lui appartient pas d'exprimer une opinion sur des questions portant sur l'élaboration de politiques et sur les répercussions de modifications qu'on propose d'apporter à la loi sur les parties et sur l'équilibre de leur pouvoir de négociation.
    Merci.
    Merci d'être ici, monsieur Vines.
    Madame Davies invoque le Règlement.
    Je suis simplement curieuse de savoir une chose, étant donné que M. Vines a dit qu'on l'avait invité à témoigner devant le comité, mais qu'il a aussi dit très clairement que sa collègue et lui ne pensent pas qu'il fait partie de leur rôle d'être ici. Je me demande donc simplement comment cela s'est produit. Est-ce que nous avons invité des gens? Pourquoi seraient-ils invités? Je veux dire — vos commentaires m'intéressent beaucoup.
    Les gens souhaitaient obtenir des éclaircissements au sujet des répercussions que le projet de loi peut avoir. Donc, encore une fois, M. Vines est ici pour parler non pas des politiques, mais bien de la manière dont le projet de loi, s'il est adopté, peut avoir ou non un effet sur la loi.
    Qui l'a invité, alors?
    Nous l'avons invité. Le comité l'a invité.
    Qui, nous? Je suis simplement curieuse. Je veux dire — nous allons recevoir un témoin qui viendra nous donner des précisions sur le plan technique. En fait, je pense que l'organisation qui est ici aujourd'hui sera peut-être là aussi. Je ne me souviens plus. Je sais cependant que nous allons recevoir des gens de Travail Canada, qui vont s'occuper du projet de loi, et que nous pourrons à ce moment-là parler des répercussions du texte législatif en tant que tel, et ainsi de suite. Je suis juste surprise d'entendre un témoin dire que, en fait, il ne devrait pas être là.
(1615)
    Ce que le témoin dit, c'est qu'il ne peut formuler de commentaires au sujet des politiques. Donc, si vous ne voulez pas lui poser de question, vous n'avez probablement pas à le faire.
    Non, j'étais simplement curieuse parce qu'il a dit qu'il avait été invité à venir témoigner.
    Nous allons passer au premier tour de table, avec interventions de sept minutes. Monsieur Silva, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins. Je dois dire que j'ai beaucoup apprécié leur exposé. Ils étaient excellents. Je veux aussi les remercier du bon travail qu'ils font autour de ces questions, et de porter certaines questions à l'attention du comité.
    Monsieur Bedard, vous avez mentionné avoir demandé un avis juridique au sujet des services essentiels. Pouvez-vous nous fournir un exemplaire de cet avis juridique?
    Oui.
    De façon que nous puissions le déposer aujourd'hui, si possible.
    Nous l'avons apporté avec nous.
    Excellent. J'aimerais beaucoup en avoir un exemplaire.
    Est-ce que c'est vous qui avez abordé la question de savoir qui peut traverser le piquet de grève?
    Oui.
    Cela pique aussi ma curiosité, parce que je n'ai pas lu là-dessus. Je ne sais pas si vous avez un avis juridique à ce sujet aussi.
    C'est dans le projet de loi, là où il y a la définition de travailleurs de remplacement. Aux termes du projet de loi, il s'agit des personnes extérieures à l'entreprise qu'on embauche spécialement pour remplacer les grévistes. Les membres de l'unité de négociation qui choisissent de ne pas faire la grève sont inclus.
    J'ai l'impression que vous nous dites que la direction d'une entreprise peut entrer dans les locaux. C'est comme ça que j'interprète ce que vous dites. Est-ce que c'est ce que vous dites?
    Non, il s'agit des employés qui font partie de l'unité de négociation et qui choisissent de traverser la ligne de piquetage.
    Ah bon, d'accord. Très bien. Je voulais simplement éclaircir ce point, parce que j'avais mal interprété ce que vous disiez, alors merci beaucoup.
    Je dois dire, monsieur Pennings, que j'ai beaucoup apprécié votre exposé, surtout la partie concernant l'importance du processus. Je comprends que le processus est extrêmement important lorsqu'il s'agit d'apporter un quelconque amendement aux lois du travail.
    Je ne fais cependant pas partie du gouvernement. Nous ne faisons pas partie du gouvernement; nous représentons l'opposition. Nous nous occupons par ailleurs d'un projet de loi d'initiative parlementaire, que beaucoup de gens appuient, mais il y a aussi beaucoup de gens contre. Au bout du compte, si le gouvernement avait souhaité modifier le processus et proposer son propre projet de loi, il aurait pu le faire, et nous aurions peut-être pu nous occuper des questions liées au processus. Je dois cependant vous dire que le projet dont le comité s'occupe est un projet de loi d'initiative parlementaire, juste pour que vous le sachiez.
    Dans un monde idéal, je suis d'accord avec vous, il y aurait dû y avoir un processus différent pour la présentation de ce projet de loi, qu'on soit pour ou contre celui-ci. Je vous remercie donc d'avoir soulevé ce point. Je crois qu'il s'agissait d'un point tout à fait valable.
    Je n'ai pas d'autres questions à poser, mais ma collègue, Ruby Dhalla, en a.
    Merci beaucoup à tous de vos exposés. Comme mon collègue l'a dit, ils ont été utiles, et ils nous ont offert un point de vue unique.
    J'ai une question à laquelle répondra qui veut. Dans le projet de loi, il y a une disposition qui prévoit une amende maximale de 1 000 $ par jour pour les entreprises qui violent les règles. Quel genre de répercussions croyez-vous que cette disposition peut avoir, et pensez-vous qu'elle peut avoir des répercussions sur toutes les entreprises qui doivent payer cette somme?
    Monsieur Bedard.
    J'allais dire que 1 000 $, ça peut être un problème, en fonction de la taille de l'entreprise. En règle générale, les employeurs canadiens n'aiment pas enfreindre la loi, alors je suis convaincu que la plupart des entreprises ne se placeraient pas en situation d'être passibles d'une amende de 1 000 $ par jour, peu importe ce que cela représente pour elles.
    Je crois que la question à laquelle il faut répondre, c'est plutôt de savoir s'il faut bannir le recours aux travailleurs de remplacement. Cette interdiction aurait des répercussions très importantes sur toutes les entreprises du secteur fédéral, et, par leur intermédiaire, sur la plupart des employeurs et des citoyens du Canada.
    Quelqu'un d'autre veut faire un commentaire?
    Je suis d'accord. Je pense que les répercussions probables du projet de loi ne toucheront pas les grèves en soi. Je pense que la conséquence la plus importante de l'adoption de ce projet de loi va être, d'après ce que je soupçonne, l'augmentation des interruptions de travail pendant une certaine période. On peut affirmer qu'il aura un effet sur le poids de deux parties à la table de négociation. Il se peut qu'on voie une modification de l'équilibre des pouvoirs de ces deux parties, qui doivent essayer de démêler ce que cela veut dire, dans les faits.
    Lorsqu'on modifie les règles, comme on l'a dit au sujet des plaintes et de la législation, mais aussi au sujet de ce qui se passe à la table de négociation, un processus de mise à l'épreuve s'enclenche, et je soupçonne qu'on verrait les deux côtés mettre la nouvelle loi à l'épreuve. Avant l'adoption d'un nouveau projet de loi, on connaît les règles en place, on sait jusqu'où on peut aller et on connaît les limites, ainsi que les conséquences qui sont susceptibles de se produire. Cela va probablement avoir davantage de répercussions que l'amende de 1 000 $, en fonction de l'entreprise. Pour des entreprises comme Telus, qui a connu une grève l'an dernier, je ne pense pas que 1 000 $ par jour soit aussi important que pour d'autres entreprises plus petites.
    Je suis d'accord. Je pense que la plupart des parties concernées ne veulent pas enfreindre la loi, et c'est l'enjeu le plus important.
(1620)
    Pensez-vous qu'on devrait fixer un maximum quelconque?
    J'ai travaillé du côté des syndicats, et non du patronat. Je ne sais pas où se situe ce seuil quant à l'ensemble des entreprises visées par le projet de loi, et je ne voudrais pas m'aventurer à deviner.
    J'ai une dernière question, que je veux poser au Conseil canadien des employeurs. Pouvez-vous nous dire combien le Conseil a de membres, et, parmi ces membres, combien sont visés par la partie 1 du Code canadien du travail et combien d'entreprises sont syndiquées?
    Je ne suis pas sûr d'avoir tous ces chiffres. Nous avons de 40 à 50 membres environ qui paient des cotisations. Nous sommes une organisation bénévole, et nous n'avons donc pas de personnel à temps plein. Nous sollicitons la participation de tous les employeurs, qu'ils soient ou non membres du Conseil. Si un événement se produit à l'OIT, nous en parlons à l'employeur concerné au Canada.
    Parmi nos membres, il y a Postes Canada, la Chambre de commerce du Canada, de laquelle bon nombre d'employeurs de compétence fédérale sont membres, bien entendu, NavCanada, le CN et les entreprises du secteur des télécommunications. Bon nombre d'employeurs de compétence fédérale sont aussi membres du CCE, directement ou par l'intermédiaire de leurs associations.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Savage, nous allons revenir à vous au cours du prochain tour de table. Nous allons maintenant demander à la prochaine personne de poser des questions.
    Madame Lavallée, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis assez d'accord avec Mme Davies, à savoir que M. Vines, du Conseil canadien des relations industrielles, aurait dû être invité mardi prochain plutôt qu'aujourd'hui. En effet, il ne s'agit pas exactement du même genre de propos. Je vais tout de même lui adresser mes questions, si vous le permettez. C'est plaisant parce que vous m'écoutez.
    Monsieur Vines, je suis très contente que vous ayez accepté l'invitation de M. le président. Cependant, lors d'une rencontre qui aura lieu mardi prochain, on va aborder des questions plus techniques. Vous vous seriez en quelque sorte retrouvé davantage en famille. Cela étant dit, je suis tout de même contente de vous rencontrer et de vous poser des questions.
    Comme vous l'avez vous-même soulevé, le paragraphe 87.4(1) de l'actuel Code canadien du travail dit ceci :

87.4 (1) Au cours d'une grève ou d'un lock-out non interdits par la présente partie, l'employeur, le syndicat et les employés de l'unité de négociation sont tenus de maintenir certaines activités — prestation de services, fonctionnement d'installations ou production d'articles — dans la mesure nécessaire pour prévenir des risques imminents et graves pour la sécurité ou la santé du public.
    Le sujet de cet article, qui se trouve à la gauche de celui-ci, est décrit par les mots « Maintien de certaines activités ». D'après vous, est-ce qu'on aurait pu parler de maintien de services essentiels?

[Traduction]

    On trouve l'expression « maintien de certaines activités » dans le Code canadien du travail, mais beaucoup de gens l'interprètent comme le maintien des services essentiels. Il peut y avoir des conflits entre les parties quant au fait qu'il existe ou non une différence entre le maintien de certaines activités et le maintien des services essentiels.
    Le maintien de certaines activités, aux termes du Code canadien du travail, a trait à la sécurité et à la santé publique. Sack a publié un dictionnaire du travail au Canada qui s'intitule Labour Law Terms et qui définit les services essentiels en rapport avec la préservation de la sécurité et de la santé publique.
    D'autres personnes se font une idée différente de ce que sont les services essentiels, et ils les définissent parfois comme ayant trait à la santé et à la sécurité publique ainsi qu'à des répercussions économiques. Bien entendu, l'expression « services essentiels » ne figure pas dans le Code canadien du travail. Si vous regardez dans la marge, le seul terme que vous pouvez voir, c'est « maintien de certaines activités ».
(1625)

[Français]

    Pensez-vous que la définition du terme «  certaines activités » corresponde à des services essentiels? Peut-être connaissez-vous le Code du travail du Québec? Est-ce que ça correspond à la description qu'on fait des services essentiels dans le Code du travail du Québec?

[Traduction]

    Je ne connais pas bien le Code du travail du Québec ni la jurisprudence québécoise.
    Je peux vous dire que l'interprétation par le Conseil de l'article 87.4 dans les affaires touchant Marine Atlantique et différents autres employeurs n'a trait qu'à la protection de la sécurité et de la santé publique; elle ne comporte aucun élément économique.

[Français]

    À ma connaissance, aucun des codes du travail ne considère le maintien des services économiques comme un service essentiel.
    Toujours dans le Code canadien du travail, on dit ceci :

(2) L'employeur ou le syndicat peut, au plus tard le quinzième jour suivant la remise de l'avis de négociation collective, transmettre à l'autre partie un avis pour l'informer des activités dont il estime le maintien nécessaire pour se conformer au paragraphe (1) en cas de grève ou de lock-out et du nombre approximatif d'employés de l'unité de négociation nécessaire au maintien de ces activités.
    On parle ensuite de la façon d'aviser l'autre partie en vue de déterminer les services essentiels. On traite également de l'entente entre les parties, de sa formulation et du dépôt de celle-ci au CCRI.
    Enfin, voici ce qu'on dit au sujet des cas où il n'y a pas d'entente :

[...] le Conseil, sur demande de l'une ou l'autre partie présentée au plus tard le quinzième jour suivant l'envoi de l'avis de différend, tranche toute question liée à l'application du paragraphe (1).
     C'est bien ce que vous faites?

[Traduction]

    Je vais essayer d'expliquer la procédure le plus clairement possible.
    Premièrement, l'article 87.4 prévoit une obligation non seulement pour le syndicat et pour l'employeur, mais aussi pour les employés, de s'assurer que, pendant une grève ou un lock-out, tout ce qui doit être fait pour protéger la sécurité et la santé publiques est fait. L'article 87.4 est donc formulé de façon à permettre à l'employeur et au syndicat de négocier. S'ils en viennent à une entente, alors, en vertu du paragraphe 87.4(3), ils peuvent déposer cette entente devant le Conseil, et celle-ci devient un ordre du Conseil.
    S'ils n'arrivent pas à s'entendre, alors, aux termes de l'article 87.4, dans un délai de 15 jours après un avis de différend, l'une ou l'autre partie peut se présenter devant le Conseil. Une fois que cela est fait, le Conseil enquête et rend une décision quant à ce qui est nécessaire pour assurer la sécurité et la santé publique. Les parties ne sont pas autorisées à décréter une grève ou un lock-out légal avant que le Conseil ait rendu sa décision.
    À l'époque où la loi était toute nouvelle et que les gens ne la connaissaient pas bien, il y avait une autre disposition — le paragraphe 87.4(5) —, qui autorisait le ministre du Travail à renvoyer la question devant le Conseil. À l'époque où cette disposition était nouvelle, il arrivait parfois, évidemment, que les parties arrivent à l'étape de l'avis de différend sans avoir répondu aux exigences des premières parties de l'article 87.4. Une fois que le ministre du Travail renvoie la question devant le Conseil, cela est aussi vrai : les parties n'ont pas le droit de décréter une grève ou un lock-out légal avant que le Conseil ait rendu une décision.
    C'est, en gros, la manière dont les choses sont censées fonctionner.
(1630)
    Merci, monsieur Vines.
    C'est tout le temps que nous avions pour le tour de table. Nous avons dépassé un tout petit peu le temps alloué.
    Madame Davies, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui, et merci à notre invité qui participe à la séance par vidéoconférence.
    J'ai trois questions qui s'adressent à différents témoins, alors je vais toutes les poser d'un coup, puis vous pourrez y répondre.
    Premièrement, monsieur Pennings, je sais que vous êtes ici à titre personnel, et vos observations m'ont vraiment intéressée. Je veux simplement m'assurer que je suis bien renseignée : vous dirigez une organisation qui s'appelle la Work Research Foundation, vous avez auparavant travaillé pour l'Alliance canadienne et vous êtes l'un des militants importants en ce qui a trait à la question du droit au travail. J'aimerais que vous nous éclairiez sur votre expérience.
    Deuxièmement, monsieur Bedard — ainsi que les métallos qui sont ici aujourd'hui — vous avez parlé de l'OIT et de son importance et vous avez parlé de la Convention 87 en ce qui concerne la liberté syndicale, en disant que vous pensiez que le projet de loi y était contraire. Je ne sais pas si vous le savez, mais la jurisprudence là-dessus à l'échelle internationale est importante, et les experts juridiques de l'OIT ont déclaré que l'embauche de travailleurs de remplacement pour briser une grève constituait une violation grave de la liberté syndicale. Je ne sais pas si vous connaissez cet avis. Vous pourriez peut-être formuler un commentaire à ce sujet — et les métallos aussi.
    En fait, puisque nous parlons de l'OIT, il y a une autre convention, la Convention 98, qui concerne le droit d'association et le droit à la négociation collective. Le Canada ne l'a pas encore ratifiée. Je me demande, monsieur Bedard, si le Conseil canadien des employeurs sera en faveur de la ratification de cette convention par le gouvernement canadien, parce que je pense vous avoir entendu dire que vous étiez en faveur de cela.
    Ma troisième question s'adresse à M. Vaydik, des Territoires du Nord-Ouest. Vous avez parlé de la vie dans le Nord, mais il me semble qu'il y a un argument encore plus fort en faveur de l'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement en cas de conflit de travail et de grève dans une région éloignée. Dans ce genre de situations, comme nous l'avons constaté, dans le passé, je crois, il est très difficile de former un piquet de grève; on parle de demander à des gens de parcourir des milliers de milles en avion, comme ça été le cas à la mine de diamants Ekati. Il est alors beaucoup plus facile pour l'employeur de faire venir des travailleurs de remplacement. Je pense donc que l'expérience nous a appris que, dans ce genre de situations, interdire le recours aux travailleurs de remplacement constitue une mesure très importante pour prévenir la violence et la prolongation des conflits, qui peuvent survenir si l'employeur fait venir des travailleurs de remplacement, ce qui est plus facile pour lui dans un lieu éloigné.
    Ce sont mes trois questions; si les témoins veulent bien y répondre.
    Merci.
    Je suis vice-président à la recherche de la Work Research Foundation. Dans le formulaire, vous pouvez cocher soit patronat, soit syndicat, soit à titre personnel, et je ne représente ni une organisation syndicale ni une organisation patronale, et c'est pourquoi, j'imagine, j'ai coché la case à titre personnel. Je ne représente pas vraiment ici l'un ou l'autre des deux côtés.
    La Work Research Foundation est un groupe de réflexion indépendant. Nous effectuons des travaux dans le domaine des relations de travail. Nous avons organisé un certain nombre de sondages en collaboration avec Environics et Angus Reid, et nous avons fait connaître un certain nombre de choses.
    Essentiellement, même si nous sommes tout à fait en faveur de la négociation collective, nous pensons qu'il faut apporter des modifications fondamentales au régime de relations de travail. C'est le point de vue que nous avons toujours défendu.
    C'est là que je me situe du point de vue philosophique. Oui, j'ai milité à divers moments de ma carrière.
    En ce qui concerne vos commentaires au sujet du droit au travail, je n'ai jamais été en faveur de ce droit. J'ai été assez contre le droit au travail. Je pense que la négociation collective est une bonne chose. De la même manière que les employeurs embauchent des avocats, les travailleurs peuvent embaucher les syndicats pour défendre leurs intérêts.
    En fait, la démocratie doit fonctionner. Il faut pouvoir parler au nom du groupe. En fait, j'ai toujours été contre le droit au travail.
    Merci.
    En ce qui concerne la première question, l'OIT a évidemment pris position au sujet du remplacement permanent des grévistes par l'intermédiaire d'agences de placement, etc. Évidemment, la législation et la jurisprudence canadiennes prévoient aussi cette éventualité. On ne peut garder les personnes embauchées après le début de la grève et ne plus rappeler les autres. Ce n'est pas un problème à l'heure actuelle dans le cadre législatif fédéral au Canada.
    Comme je l'ai dit dans mon témoignage et comme l'indique le mémoire que nous avons fourni, la convention de l'OIT parle du remplacement permanent des travailleurs, et non de leur remplacement temporaire, ce dont nous parlons aujourd'hui.
(1635)
    Je citais en fait un avis juridique provenant de l'OIT, qui parle de l'embauche de travailleurs de remplacement pour briser une grève. C'est clairement une mesure temporaire. C'est ce que les experts juridiques de l'OIT disent.
    D'accord. Je crois que nous en parlons en partie dans notre mémoire.
    D'accord.
    En ce qui concerne la Convention 98 et le droit à la négociation collective, vous avez raison lorsque vous dites que le Canada n'a pas ratifié cette convention. C'est important de remettre les choses en contexte encore une fois.
    Au Canada, le droit de participer à des négociations collectives et le droit de participer à une grève ou à un débrayage sont assujettis à des considérations de politique publique. Par conséquent, ces droits ne sont pas absolus, tandis que l'OIT les voit comme des droits absolus.
    Le gouvernement canadien a toujours maintenu la position selon laquelle il faut tenir compte de considérations de politique publique. Il arrive parfois qu'ils nient ou limitent le droit des employeurs et des syndicats à participer à des négociations collectives qui pourraient éventuellement donner lieu au droit de participer à une grève ou à un débrayage.
    Dans les faits, bon nombre de plaintes dont le mouvement syndical canadien a saisi l'OIT concernaient les lois de retour au travail.
    Le CCE appuie-t-il la Convention 98?
    Non.
    Vous ne l'appuyez pas.
    Non.
    Madame Davies, il vous reste environ 30 secondes.
    Puis-je demander au Syndicat des métallos de répondre?
    En fait, je voulais répondre à deux des questions.
    La première a trait à la Convention 87 et à la Convention 98. Une partie du processus du Code canadien du travail et une partie de l'objectif du Code canadien du travail est de garantir que ces libertés générales, notamment la liberté syndicale, le droit d'association et le droit aux négociations collectives, sont inscrits, équilibrés et équitables. Il est clair que le droit à la grève et le droit d'organiser une grève efficace font partie de cette liberté syndicale.
    Nous avons toujours été d'avis, et c'est toujours le cas, que la seule façon d'organiser une grève efficace, c'est dans le contexte de l'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement. Faire intervenir une tierce partie dans le processus compromet l'équilibre et l'objectif du code, qui est de faire en sorte que les deux parties résolvent leurs différends dans le cadre de négociations, face à face, sans l'intervention d'étrangers ou de personnes extérieures à la convention collective et au processus de négociation.
    Merci beaucoup, madame Davies.
    Nous allons passer à la dernière personne à poser des questions pour le tour de table en cours. Monsieur Lake, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Voilà qui était intéressant, en fait; les dernières observations de Mme Braker préparaient très bien les questions que je veux poser à M. Bedard.
    Je cherche à obtenir certaines précisions. Les gens parlent souvent des travailleurs de remplacement comme s'il ne s'agissait que de personnes qu'on va chercher dans la rue, de personnes qui n'ont jamais rien eu à voir avec l'entreprise. C'est pourquoi certaines personnes ont dit que l'économie va bien quand les entreprises n'arrivent pas à trouver de travailleurs de remplacement, ce qui fait que ce n'est pas un problème, du moins à l'échelle provinciale.
    Je crois cependant que le projet de loi empêche les travailleurs d'exercer leur droit au travail au sein de leur propre entreprise. Je crois sincèrement qu'il aurait pour effet de contraindre les travailleurs à ne pas travailler — tout comme les dirigeants — même s'ils ont choisi d'occuper leur propre poste, là où ils travaillent peut-être depuis plusieurs dizaines d'années. Qu'en pensez-vous?
    Oui. Je crois que le projet de loi pose véritablement problème en ce sens.
    Le secteur fédéral est différent de tous les autres secteurs d'emploi du Canada. Il englobe l'infrastructure fédérale : les transports, les communications, les banques —
    Le Conseil est en faveur d'unités nationales de négociation, ce qui fait que les organisations syndiquées tendent à avoir une portée nationale. Ainsi, d'un océan à l'autre, ils touchent toutes leurs activités. Ce n'est donc pas une seule usine, dans une seule ville, qui relève d'une unité de négociation, ce qui est habituel dans le cadre d'une accréditation provinciale, qui se fait usine par usine. Il s'agit en général plutôt de grandes entreprises qui font des affaires à l'échelle nationale, et qui offrent des services tout à fait essentiels comme les transports, les communications, ou encore les ports et ce genre de choses.
    D'après ce que je comprends, le projet de loi parle des travailleurs de remplacement comme de gens qu'ont fait venir d'ailleurs — j'imagine que l'expression qu'on utilise, c'est « étrangers ». Il va cependant plus loin. Il vise les employés déjà au service de l'entreprise, qui font partie de l'unité de négociation et qui choisissent de ne pas participer à la grève, ce qui pose un problème important pour nous au chapitre de la liberté syndicale. C'est le point que j'ai soulevé. Il s'agit d'une question fondamentale que nous devons régler.
    Le projet de loi porte aussi sur les entrepreneurs qui travaillent dans l'établissement. Le projet de loi parle de l'« établissement ». Le code définit ce qu'est un établissement. Il s'agit d'une zone géographique où se trouve l'organisation de l'employeur. Cette définition limite véritablement le recours aux cadres dans les établissements, définis en termes géographiques. Dans le cas d'une unité de négociation de portée nationale, cependant, si les employés en grève font partie de cette unité de négociation, cette façon de penser compromet grandement la capacité de l'employeur de recourir même à ses cadres. Bien entendu, il est aussi interdit d'avoir recours aux sous-traitants, même s'il semble s'agir de sous-traitants embauchés auparavant, avant l'arrêt de travail, dans l'établissement en question.
    La question est donc beaucoup plus vaste que certaines choses qu'on a dites aujourd'hui et qui semblent laisser entendre qu'il ne s'agit que de gens qui viennent de l'extérieur pour travailler temporairement pendant une grève. Je crois que la question est beaucoup plus vaste que cela.
(1640)
    D'accord, merci de votre réponse.
    J'ai une autre question pour vous. Nous avons entendu beaucoup de choses au sujet des ententes de maintien des services. La position de certains témoins a été qu'il est assez facile de faire en sorte que les syndicats et les employeurs s'entendent pour maintenir les services en cas d'arrêt de travail — ce que nous avons entendu hier, par exemple — même dans le cas des infrastructures fédérales essentielles.
    Je crois que ce qui m'inquiète, encore une fois, c'est que nous créons un problème en cherchant la solution à un problème qui n'existe pas. En fait, il n'est pas sûr du tout que nous puissions protéger les services essentiels en adoptant le projet de loi. Il me semble aussi très inapproprié que, à l'échelle fédérale, nous comptions tout simplement sur la bonne foi des syndicats ou des employeurs pour protéger, par exemple, les services de 911. Ce processus spécial de protection vous semble-t-il avisé?
    Non, pas du tout, et j'ai vécu certaines expériences de négociations en ce qui concerne les ententes de maintien des activités.
    Je crois qu'un témoin de la TWU a déposé la semaine dernière une entente de maintien des activités conclue entre ce syndicat et Telus. Il s'agit d'un cas intéressant. L'entente a été conclue deux ans après le début des négociations.
    Le syndicat a refusé de s'asseoir avec l'employeur pour parler des exigences relatives au maintien des activités. L'employeur a dû présenter une demande au Conseil canadien, qui a rendu une décision et ordonné au syndicat de discuter avec l'employeur en vue de la conclusion d'une entente de maintien des activités.
    Le syndicat a accepté de le faire, avec une réticence extrême, et si vous examinez le document — l'employeur l'a présenté à la TWU, et le document était joint au mémoire du syndicat — même dans la lettre d'entente, au paragraphe 9, on dit que l'entente est conclue sans préjudice, que la TWU pense qu'une entente de maintien des activités n'est pas obligatoire dans le secteur des télécommunications.
    Le projet de loi tourne tout entier autour de cette section. L'article 87.4 parle de façon très précise de la santé et de la sécurité, tandis que nous soutiendrions avec force que, dans le secteur fédéral, du point de vue des services essentiels, cela dépasse largement la santé et la sécurité. Il s'agit de fournir les services de télécommunications aux familles ordinaires; tout le secteur bancaire dépend des télécommunications, comme beaucoup d'autres. Ce serait tiré par les cheveux de dire qu'il y a un lien direct avec la santé et la sécurité, mais on peut dire, bien entendu, qu'il s'agit de la vitalité économique du Canada.
(1645)
    J'ai une dernière question à poser pendant qu'il me reste un peu de temps.
    Nous avons aussi beaucoup entendu parler du groupe de travail Sims pendant les réunions du comité. Très brièvement, d'après ce que je comprends, le groupe de travail a été en gros constitué pour régler le problème des arrêts de travail dans le secteur fédéral qui exigent régulièrement une intervention, un arbitrage ou une loi fédérale, tout en ne cessant d'engendrer des soubresauts économiques et sociaux, et la tâche du groupe de travail était d'équilibrer les droits des travailleurs et les besoins de l'économie canadienne de façon à ce que les infrastructures essentielles fédérales continuent de fonctionner.
    Il y a une raison pour laquelle le code fédéral peut continuer d'offrir un minimum de services publics, n'est-ce pas? Une grève des éboueurs ou à une mine est très différente de celle qui touche les lignes téléphoniques, la capacité des gens d'obtenir de l'argent ou de recevoir des dépôts directs de la part du gouvernement, de faire transporter des céréales ou d'expédier de la nourriture vers des collectivités éloignées.
    Qu'en pensez-vous?
    En ce qui concerne le groupe de travail Sims, vous avez tout à fait raison. Il avait pour tâche de trouver un équilibre entre des intérêts concurrents, en essayant d'offrir le plus d'occasions possible aux deux parties de participer à de libres négociations collectives, tout en tenant compte des problèmes et des inquiétudes touchant la population. Le groupe de travail a réalisé cet équilibre au moyen de l'article 87.4, au moyen des dispositions du code qui touchent les travailleurs de remplacement, et je pense qu'il a très bien réussi à trouver cet équilibre.
    Je serais très surpris d'apprendre que quiconque envisage les négociations qui ont eu lieu au sein de la fonction publique fédérale depuis l'adoption des recommandations du rapport Sims par le Parlement en 1999 n'est pas convaincu qu'il y a eu de libres négociations collectives vigoureuses au sein de la fonction publique, ce qui a donné lieu à des avantages intéressants tant pour les travailleurs que pour les employeurs.
    Merci.
    Merci monsieur Lake. C'est tout le temps que nous avions.
    Nous allons passer au second tour de table. Monsieur Savage, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous.
    Ma première question s'adresse à M. Vines.
    Dans votre témoignage, vous indiquez que toute modification de la disposition en question du code entraînerait probablement une augmentation de la charge de travail du Conseil. Prévoyez-vous que cela vous coûtera quelque chose? Allez-vous devoir mobiliser davantage de ressources pour faire face à ce changement?
    Ce qui est le plus important pour le Conseil canadien des relations industrielles, c'est le processus de nomination. Si vous examinez la structure actuelle du Conseil, vous constaterez que le mandat de notre président se termine à la fin de 2007. Nous avons aussi un vice-président dont le mandat prend fin en même temps. Le mandat de deux de nos vice-présidents prend fin cet été, et il y en a un autre qui se termine en 2008.
    Pendant le mois de janvier seulement, il y a eu trois membres à temps plein du côté patronal et trois du côté syndical. Il s'agit d'une question qu'on voudrait voir régler par un conseil représentatif. Pendant l'année écoulée avant janvier dernier environ, lorsque nous avions nos deux membres, nous n'avions qu'un membre à temps plein et un à temps partiel. Il est très difficile de constituer un conseil représentatif.
    Nous avons des membres à temps partiel, mais ceux-ci ont une carrière ailleurs, et il est très difficile d'organiser l'horaire à cause de cela. Ainsi, le fait que le Conseil puisse régler rapidement les différentes questions, advenant l'adoption du projet de loi, dépend du fait que nous disposions des bonnes personnes au bon endroit lorsque le projet de loi sera adopté.
    Pensez-vous que vous aurez donc besoin de plus de ressources que d'habitude?
    Ce que je dis, c'est que, à l'heure actuelle, nous avons quatre vice-présidents et —
    En ce qui concerne la charge administrative, cependant, vous ne seriez peut-être pas en mesure de vous en acquitter si le projet de loi était adopté maintenant?
    Si nous disposions du complément approprié qui se trouve dans le code à l'heure actuelle, je suis convaincu que nous pourrions nous acquitter de nos tâches, mais nous pouvons être pris de court à tout moment. Vu la nature même de ce genre de choses, ils vont exiger que le Conseil réagisse très rapidement, et il faut que les organes soient en place pour qu'on puisse faire cela.
    D'accord. Merci.
    Nous avons beaucoup écouté M. Bedard, et il a offert un bon témoignage. Je me demande si M. Roy ou Mme Braker veulent nous faire part de leurs réflexions au sujet des observations que M. Bedard a faites jusqu'à maintenant. Sinon, ce n'est pas grave.
    J'aurais quelques choses à dire en réponse à ce que M. Bedard a dit, et elles dépassent peut-être la portée de ses observations.
    L'une des choses qui semblent inquiéter le comité, c'est la question des services essentiels. J'ai remarqué qu'il y avait eu plus tôt quelques échanges au sujet du fait que le Code canadien du travail parle non pas de « services essentiels », mais plutôt du « maintien de certaines activités ». On a dit plus tôt que le texte parle d'un « danger immédiat et grave pour la sécurité et la santé publique ».
    Bien entendu, le Syndicat des métallos représente des employés dans l'ensemble du Canada, et nous travaillons évidemment dans toutes les parties du Canada. Je peux vous dire que le libellé de l'article 87.4 est sensiblement le même que celui de tous les textes législatifs qui portent sur les services essentiels au Canada. Ainsi, la loi de la Colombie-Britannique parle d'une intervention lorsqu'un conflit menace la santé, la sécurité ou le bien-être des résidents de la Colombie-Britannique, et le processus prévu par le code de la Colombie-Britannique est en grande partie le même que celui prévu par le Code canadien du travail.
    En outre, je voudrais faire remarquer que je connais plus d'une décision du Conseil dans laquelle il a lui-même cité la disposition en question comme étant une disposition portant sur les services essentiels. Je pense donc que le Conseil serait surpris d'apprendre que cette disposition n'est pas considérée comme une disposition sur les services essentiels. De plus, je peux vous dire, pour avoir pratiqué et pour avoir eu affaire à ce genre de demandes, que chaque fois que j'ai dû témoigner dans le contexte de ce genre de demandes, on les a traitées comme des demandes concernant les services essentiels. Le projet de loi ne comporte certainement aucun élément permettant de distinguer ces demandes concernant des services essentiels de celles qui sont présentées en Colombie-Britannique, au Québec ou en Ontario. C'est le commentaire que je voulais faire.
(1650)
    Monsieur Savage a une autre question à poser rapidement.
    Merci, monsieur le président. Vous êtes un président très aimable, dans la mesure où les présidents peuvent être aimables.
    Je tenais simplement à faire une remarque. Nous touchons à la fin de ces audiences, et je ne sais pas si le projet de loi est modifiable. Certains disent que c'est le cas, d'autres, non. Tout de même, j'encouragerais quiconque souhaite formuler des modifications à nous les faire parvenir très rapidement. Pensez-y un peu, sinon ce sera un échec, et quelqu'un sera déçu. Ce serait peut-être le cas de toute façon, et c'est peut-être pour le mieux. Tout de même, si vous avez des idées à propos des modifications, faites-le nous savoir.
    Merci de prendre le temps d'être là aujourd'hui.
    Merci.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Lessard, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier aussi nos invités d'être venus nous faire part de leur opinion sur le projet de loi C-257.
    Je commencerai par commenter un certain nombre d'affirmations de M. Bedard. Je pense que tout le monde ici comprend que nous avons la délicate et importante responsabilité de faire des recommandations à la Chambre des communes relativement à ce projet de loi. On essaie le plus possible de retenir l'essentiel de vos propos. Vous représentez un organisme ayant un très grand rayonnement, et j'ai tenté de cerner la justification de votre opposition au projet de loi C-257. Vous avez, d'entrée de jeu, parlé de politisation non justifiée des relations de travail. Vous avez dit qu'ouvrir la porte à d'autres changements causera de nombreuses plaintes. Tout au cours des échanges, je n'ai pas entendu d'exemple concret de cela. J'ai cherché ailleurs et je pense que M. Vaydik nous a donné le meilleur exemple de ce qu'on pourrait appréhender, parce qu'on arrive avec du concret.
    J'ai grandi dans le Nord québécois, dans une région qui ressemble à celle que M. Vaydik représente présentement et où vivent aussi des communautés autochtones. J'ai connu les ponts de glace qui servent à transporter le bois et d'autres matières. Vous avez donné cet exemple et parlé d'une grève dans le domaine du transport, le camionnage par exemple. Vous avez dit qu'environ 110 500 cargaisons passaient sur les ponts de glace en quelques semaines parce que, par la suite, la glace fondait. Pendant que vous avez expliqué cela, je me suis dit que vous alliez sûrement parler des humains à un moment donné. Mais non, vous nous avez dit qu'il était important d'amener de l'équipement, des pneus et de la machinerie pour faire fonctionner la mine. Je me suis dit que vous parliez sûrement d'une mine de sel, qu'il devait y avoir quelque chose. Non, il était question des mines de diamant. Je me suis demandé ce qui était si essentiel pour qu'on appréhende l'arrêt momentané des opérations de la mine. Est-ce que le fait de manquer de diamants pour garnir les parures des riches de la Terre est quelque chose d'essentiel? Je ne veux pas vous offenser lorsque je dis cela. Au contraire, je vous remercie, parce que cela illustre bien ce qui est recherché par le présent projet de loi.
    Si, d'aventure, il y avait un danger de manquer d'aliments, de biens essentiels ou de biens pour la santé des communautés autochtones, on pourrait dire qu'il ne faut pas de travailleurs de remplacement , qu'il faut voir avec le syndicat — car il s'agit de personnes sensées — et convenir de services essentiels. Je pense à des communautés au Nunavut, à Kuudjuak, à Kuujjuarapik, et à Purvinituq. Vous connaissez probablement ces communautés qui sont très isolées et en même temps organisées, très autonomes, mais qui ont besoin de services essentiels. J'utilise cette intervention pour bien marquer la distinction à faire entre ce qui est essentiel pour une communauté et ce qui ne l'est pas.
(1655)

[Traduction]

    Vous avez une minute.

[Français]

    Lorsqu'on nous dit que cela pourrait faire fermer la mine, je dis qu'on ne ferme pas la mine, on négocie. Vous ne négociez pas à la mine, parce que vous êtes dépendants du camionnage.
    Je m'excuse si je n'ai pas de question, mais je tiens à vous dire que si vous avez d'autres propos à nous transmettre, ils nous convaincront peut-être du bien-fondé de ne pas adopter ce projet de loi. Cependant, vos propos nous ont convaincus — moi en tout cas — de nous assurer que cette distinction soit incluse dans le projet de loi sans en altérer la portée. Je vous le dis.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lessard.
    Nous allons maintenant écouter Mme Davies pour cinq minutes.
    Je peux peut-être faire suite à ce que M. Lessard disait : la question que j'ai posée plus tôt à M. Vaydik portait sur le Nord.
    Vous avez parlé de la mine de diamants et de l'histoire là-bas. Tout de même, dans le cas du conflit de travail récent à la mine de diamants d'Ekati, il faut dire qu'il s'agit d'une société multinationale qui a amassé d'énormes profits et il y a eu des problèmes en ce qui concerne les travailleurs de remplacement.
    Je voulais simplement soulever la question à nouveau. M. Lessard a soulevé la question des services essentiels, et le projet de loi renferme une disposition sur la façon de les définir, en lien avec le code du travail. Par contre, je crois qu'il y a bien lieu de faire valoir pour diverses raisons que, dans les endroits très éloignés, là où il est difficile d'organiser un piquet de grève et facile, pour l'employeur, de faire venir des travailleurs de remplacement par avion, ce genre de dispositions législatives devient très important en tant que mesure de prévention.
    De nombreux témoins sont venus nous dire que la plupart des employeurs n'auront pas besoin de ce genre de dispositions législatives. Il est à espérer que votre commission ne recevra pas beaucoup de demandes. Il existe quand même des cas où des conflits surviennent et où des travailleurs de remplacement sont amenés sur place, et c'est là l'objet du conflit, plutôt que le règlement d'une grève. C'est une des bonnes raisons qui militent en faveur de ce projet de loi.
    Je voudrais demander à M. Vaydik de dire pourquoi ce ne serait pas là en vérité un outil de prévention, particulièrement dans le cas des entreprises situées dans des endroits reculés.
    Merci.
    Le lieu est éloigné pour les deux parties. La direction doit relever des défis de ce fait, tout comme le syndicat doit le faire, mais il faut aller là où se trouve le minerai. Nous avons découvert des gisements qui sont très précieux, comme vous le faites remarquer, mais ils sont situés dans des lieux très éloignés.
    Pour parler de l'exemple récent de la grève d'Ekati, je sais que les piquets de grève étaient installés aux points d'embarquement, pour le transport, dans le cas des sites éloignés dont il est question, et dans plusieurs autres localités outre Yellowknife. Évidemment, il aurait été inutile d'organiser un piquet de grève sur le site minier lui-même, mais les voies de transport ont été choisies comme lieu pour le piquet de grève.
    En toute équité, l'entreprise et le syndicat se sont bien entendus après une période assez courte, et il n'y a pas eu d'incidents vraiment déplorables au piquet de grève.
    Vous dites qu'il y a eu des problèmes. Je crois qu'il y a aussi des problèmes du côté de la direction. Je regrette de n'avoir pas apporté de diapo du chemin hivernal qui serpente dans la toundra. Il n'y a littéralement rien de part et d'autre de cette route sur des centaines de kilomètres. C'est un lien très ténu qui pourrait très facilement être bloqué par des piqueteurs.
    C'est là la crainte qu'ont les gens, à mon avis : que le nouveau projet de loi fasse pencher la balance en faveur du syndicat.
    Pour ce qui est de la nature des services essentiels, si vous n'êtes pas d'avis que faire un travail est un service essentiel — les gens nous paient pour que nous allions chercher ces diamants. Ce sont des emplois qui sont vivement sollicités dans l'économie fragile du Nord.
    Il y a environ 2 500 emplois dans le secteur minier diamantaire en ce moment. Selon nos données économiques, pour la première fois, les Territoires du Nord-Ouest deviennent peut-être « nantis » plutôt que « démunis ». C'est une époque formidable pour qui se trouve dans les Territoires du Nord-Ouest, et la cause en est la découverte et l'extraction de diamants.
(1700)
    Permettez-moi de répondre rapidement.
    Je sais que, dans le cas du conflit d'Ekati, le recours à des travailleurs de remplacement a prolongé la durée du conflit. Si cela n'avait pas été permis, je crois que vous auriez réglé le conflit beaucoup plus rapidement. Et, oui, il y a eu des piquets de grève.
    Souvent, nous avons eu droit à des témoignages qui mêlent la question de la grève à celle des travailleurs de remplacement. Oui, il y a des problèmes entourant une grève qui ne plaisent pas aux gens, des deux côtés. Par contre, il n'est pas question d'une grève ici; il est question d'interdire le recours à des travailleurs de remplacement, à titre de mesure de prévention, pour nous assurer de bien insister sur les questions entourant la grève et pour régler le conflit le plus rapidement possible.
    Je suis vraiment d'avis qu'il y a une confusion qui entoure tout cela; bon nombre des groupes d'employeurs ne cessent de revenir à la question de l'impact d'une grève. Eh bien, oui, nous savons qu'une grève a un impact, mais il y a ce droit légal de faire la grève, et ce n'est pas la question dont nous discutons ici.
    Merci, madame Davies.
    Nous allons maintenant écouter le dernier intervenant du deuxième tour de table. Madame Yelich, vous disposez de cinq minutes.
    Ma question s'adresse à M. Vaydik.
    Je n'arriverai à persuader personne de l'importance de ce projet de loi du point de vue de nos cultivateurs, car ils sont entourés de terres, mais doivent acheminer leurs céréales vers la côte. Que diriez-vous de parler de l'importance de la chose du point de vue du secteur minier?
    Comme vous le savez, il y a une exploitation minière très importante en Saskatchewan. Vous venez de le dire : le Nord aura enfin compétence en la matière, et c'est ce qui se passe en Saskatchewan. J'aimerais que vous puissiez situer les événements en perspective. Nous sommes les chefs de file de l'exploitation minière en uranium, en potasse et en diamants — et je sais que ce n'est pas essentiel dans l'esprit de certaines personnes. Pouvez-vous mettre cela en perspective?
    Je tiens à représenter ma province également. Il semble y avoir une attitude qui dit que ce ne sont que les entreprises et les syndicats qui vont souffrir, mais notre province, elle, va souffrir énormément. J'aimerais que vous mettiez la question en perspective, pour le secteur minier, car c'est le grand secteur d'activités en ce moment, qui a pris le pas sur l'agriculture en Saskatchewan.
    Malheureusement, notre climat dans le Nord ne se prête pas à l'agriculture. Nous avons le secteur minier et, de plus en plus, un secteur pétrolier et gazier prometteur, et c'est à peu près cela. Nous n'avons pas un grand nombre de pêcheurs commerciaux, ni d'entreprises d'exploitation forestières: notre climat —
    Ma question est la suivante : êtes-vous au courant de l'activité minière qu'il y a en Saskatchewan? Ou de ce qui se produirait si ce projet de loi était adopté? Quel est le genre d'impact que cela aurait?
    Par exemple, nous avons un secteur de l'uranium qui est en plein essor, où des Autochtones détiennent de très bons emplois. Nous assurons nos arrières avec de bonnes entreprises comme Cogema et Cameco, qui ont de très bonnes relations avec les travailleurs. Je crois que ce genre de projet de loi leur nuirait. Il importe de dire cela au comité. Cela m'encourage de voir que l'un de mes collègues ici provient de la Saskatchewan, et je tiens à ce qu'il sache à quel point il importe, pour notre province, que le projet de loi dont il est question ne soit pas adopté.
(1705)
    Nous sommes certainement conscients des bons efforts déployés pour engager des Autochtones dans les mines du Nord de la Saskatchewan. De fait, au moment où nous avons établi notre comité de formation minière dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons pris pour modèle la Saskatchewan. Il y a à peine quelques semaines, des localités autochtones du Nord ont été invitées à se rendre sur place pour voir les mines du Nord de la Saskatchewan.
    Malheureusement, je ne peux faire une comparaison directe : je ne suis pas au courant de l'infrastructure qui sous-tend l'exploitation de ces mines. Il paraît qu'il y a des chemins praticables en toute saison. Les contraintes temporelles liées à un chemin de glace hivernal ne sont peut-être pas tout à fait les même, mais nous reconnaissons certainement l'importance d'avoir du travail et une économie à laquelle participer dans ces localités du Grand Nord. Les localités n'avaient pas grand-chose à se mettre sous la dent avant que ne débarque l'industrie minière.
    Monsieur Lake.
    Monsieur Pennings, je veux aborder rapidement les observations que vous avez faites à propos de certains des témoignages que nous avons entendus au sujet du projet de loi et de son impact sur un équilibre chèrement acquis dans les négociations avec les travailleurs.
    Mme Braker a fait remarquer aujourd'hui que cela semblait être un air très connu. Durant une des réunions précédentes, nous avons entendu Paul Forder, témoin des TCA. Appelé à réagir au fait que même les gestionnaires n'auraient pas le droit de travailler afin de tenir leur entreprise à flot suivant le projet de loi en question, il a répondu ce qui suit :
Si l'entreprise ne peut fonctionner avec des travailleurs de remplacement, cela ne nous pose pas de problème. Nous pourrons en venir à une entente plus rapidement. C'est d'ailleurs ce que tous les membres veulent. Voilà l'objectif du projet de loi.
    Aujourd'hui, Mme Braker a parlé de l'importance de cette mesure du point de vue du syndicat. Je crois qu'elle a dit que cela nous permettrait de faire la grève efficacement. C'est un air très connu.
    Est-il juste de dire que, si le projet de loi est adopté, la balance pencherait en faveur du syndicat, de telle sorte qu'il y aurait un déséquilibre qui donnerait peu de choix à l'employeur : soit de céder, soit de fermer ses portes?
    Il y a deux choses auxquelles il faut penser, du point de vue de l'équilibre. Évidemment, le recours à des travailleurs de remplacement a une incidence sur la grève. J'ai déjà eu affaire à une grève, et ce n'est pas beau. C'est difficile de part et d'autre; les nerfs sont à fleur de peau. Évidemment, une fois qu'il y a grève, les deux parties font ce qu'elles peuvent pour remporter la bataille. Les deux essaient de respecter les lois, mais nous savons tous que, parfois, cela est mis à rude épreuve en cas de grève. Je ne crois pas que ce soit un élément ou l'autre de l'équation qui soit en cause. On peut trouver des exemples d'abus d'un côté comme de l'autre.
    Je parlerais de l'effet du projet de loi — non pas l'effet qu'il aura au moment de s'appliquer, mais l'effet qu'il aura sur le processus de négociation — qui sera nettement plus important. C'est une chose qui comporte deux aspects aussi. D'une part, il peut y avoir des situations où ce serait une mesure de prévention, cela servirait à prévenir ou à écourter un lock-out. D'autre part, je prévois aussi des situations où cela entraînera plus souvent un arrêt de travail. Nous pourrions imaginer des scénarios et, évidemment, personne n'a ici une boule de cristal qui lui permet de prédire l'avenir avec exactitude.
    J'ai eu affaire à un conflit de travail où le problème essentiel se situait à l'intérieur même du syndicat. Les membres du syndicat étaient divisés à 51 voix contre 49 pour ainsi dire et, au bout du compte, rien ne pouvait se signer. Cela a amené un arrêt de travail.
    Il y avait des questions à régler à l'interne — et c'est le fait de rater quelques chèques de paie qui a apporté à la situation la rigueur voulue, pour que les gens s'entendent un peu au sein des unités de négociation. J'imagine que c'est à cela que ça revient en dernière analyse.
    Il faut élargir le droit du travail, le rendre complet, pour tenir compte de toutes les situations possibles. Nous pouvons chercher des données qui se rapportent à l'un ou l'autre des éléments de l'équation, mais chaque cas demeure unique. Je soupçonne que l'adoption de ce projet de loi modifiera effectivement l'équilibre des choses en amont, et de manières que personne, à mon avis, ne peut prédire de manière entière et exacte. C'est pourquoi vous avez devant les yeux tous les chiffres contradictoires que vous devez parcourir.
    Merci beaucoup.
    Je veux souhaiter la bienvenue à Gary Merasty, qui remplacera M. Dryden au comité. Gary, bienvenue. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis nouveau au comité, comme on l'a fait remarquer, mais je fais partie du syndicat des travailleurs de l'acier depuis un certain nombre d'années; j'ai travaillé dans une mine à Flin Flon.
    J'ai fait partie aussi du secteur privé à divers titres, dans les sociétés, et j'ai été membre du conseil d'une administration aéroportuaire. Je comprends les deux parties. J'entends beaucoup de discussions là-dessus et je reçois une correspondance abondante à ce sujet.
    Bien entendu, l'élément clé consiste à savoir — et n'attendez pas que je vous donne une réponse là-dessus — comment on définit les « services essentiels » et quelle direction il faut adopter, ce qui se produit dans le cas des aéroports et autrement.
    En deuxième lieu, bien entendu, il y a l'impact sur des régions économiquement marginalisées du pays. Il y a des avantages et des inconvénients qu'il faut noter.
    Même si j'ai une expérience favorable des syndicats et une expérience du monde du commerce, il n'en demeure pas moins que, dans le cas qui nous occupe, la nature humaine étant ce qu'elle est, quand on utilise des travailleurs de remplacement, il est entendu que l'employeur s'en sert comme d'un marteau contre les grévistes. M. Lake demande s'il faut renvoyer la pendule de l'autre côté, c'est-à-dire retirer à l'employeur le marteau et, la nature humaine étant ce qu'elle est, le remettre aux syndicats pour qu'ils s'en servent contre l'employeur.
    C'est une question qu'on me pose de part et d'autre. Dans le cas de la Saskatchewan — les syndicats y sont forts —, les deux parties vont valoir leurs points de vue.
    Peut-être que M. Roy pourrait en toucher un mot. Je sais qu'il a essayé d'intervenir à quelques reprises, en réaction à certaines des réponses données. Vous pourriez me donner votre perspective sur la réponse qui a été donnée plus tôt.
(1710)

[Français]

    Cela me fait plaisir d'avoir l'occasion de répondre à une question.
    Je suis un travailleur d'usine. J'ai travaillé dans des usines pendant 15 ans à Sept-Îles sur la Côte-Nord, au Québec. Depuis que je travaille, le Code du travail du Québec interdit les travailleurs de remplacement. J'ai participé à des grèves, et l'employeur en face de nous était de force égale en matière de négociation. Quand on a fait la grève, il n'y avait pas de travailleurs de remplacement. Cela disciplinait les parties et les forçait à s'asseoir et à négocier de bonne foi.
    Je vais vous citer un exemple. Sur la Côte-Nord, à Sept-Îles, la Compagnie Minière IOC et Chemin de Fer QNS&L, une compagnie de minerai de fer sous réglementation fédérale, a imposé un lock-out en février 1994 pour forcer les travailleurs à accepter les conditions de l'entreprise. Lors du lock-out, l'entreprise a engagé des travailleurs de remplacement. Des hélicoptères passaient pendant la nuit au-dessus des travailleurs pour amener des travailleurs de remplacement. Des gardes du corps surveillaient les travailleuses et travailleurs sur la ligne de piquetage. Le résultat de tout cela a été de la violence, des congédiements et toutes sortes de mesures violentes. On a concentré toutes nos énergies à régler toutes ces situations plutôt que de régler la convention collective. Pour tous les dossiers qui sont sous réglementation provinciale, les travailleurs de remplacement sont interdits, car on ne veut pas vivre de telles situations. Les parties sont généralement disciplinées et elles savent conclure des conventions collectives.
    Vous en avez la preuve au Québec. Il n'y a pas de révolution. Je ne vous dis pas que les propriétaires d'entreprises étaient heureux quand cela est arrivé. Cependant, ils ont appris à vivre avec cela et il n'y a pas eu de désastre économique, ni de renversement, ni de révolution. Au contraire, cela a discipliné les deux parties et les a forcées à s'asseoir autour d'une table pour conclure une convention collective correctement.
    Au Québec, on conclut des conventions collectives entre 95 et 97 p. 100 du temps sans conflit. On doit avoir réussi quelque chose. Avant que nous ayons cette loi, dans les années 1970, au Québec, il y avait des travailleurs de remplacement. Les gens de Murdochville ont connu l'époque des travailleurs de remplacement qui venaient prendre la place des travailleurs dans les usines. Ça a brisé des collectivités pendant des années. C'est ce qui brise les relations entre les êtres humains. C'est ce qui brise la vie économique d'une région.
    Quand une convention collective est signée alors qu'il y a un rapport de force où les parties sont égales, cela fait en sorte que les parties soient disciplinées. Ce n'est pas un miracle. Venez au Québec et vous verrez que ça a réussi.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter M. Brown, qui dispose des cinq dernières minutes allouées aujourd'hui.
    Merci, monsieur Allison.
    J'ai trois questions à poser, à M. Bedard et à M. Pennings à la fois.
    La première question a trait aux expériences que j'ai vécues en Ontario. À titre de député de l'Ontario, j'ai vu des cas où nous avons vécu des expériences malheureuses où il y avait interdiction de travailleurs de remplacement. Je me souviens vivement des années 1993 à 1995, et de la récession économique qui est survenue à ce moment-là. Il est très intéressant de savoir que le premier ministre Harris a éliminé cette faute économique. Il y a moins longtemps, le premier ministre libéral de l'Ontario, Dalton McGuinty, a choisi la même approche que Harris et déterminé que l'interdiction des travailleurs de remplacement n'était pas la voie à suivre. Je voudrais donc vous demander, d'abord, pourquoi, à votre avis, l'Ontario a choisi une telle approche.
    Deuxièmement, très près de ma circonscription, le secteur de l'automobile tient une place importante. Je sais que les gens s'y soucient non seulement de la récession économique qu'il pourrait y avoir, mais aussi de la possibilité que des investissements ne soient pas faits. Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'effet de cette mesure sur les investissements éventuels. Croyez-vous que les employeurs qui se penchent sur différents secteurs avant de décider d'investir envisagent vraiment ce critère et cherchent les régions qui interdisent les travailleurs de remplacement? Est-ce un élément qui entrerait dans leur processus décisionnel?
    Troisièmement, pour ce qui est de l'équilibre dans son ensemble en ce qui concerne la négociation collective, quels en seraient selon vous les effets sur l'équilibre délicat que nous avons réussi à avoir? En ce moment, la recherche d'une paix entre les syndicats et les employeurs est un succès modéré au Canada, si on compare la situation à ce qui se passait il y a 25 ans. Entre autres choses, si ce projet doit être adopté au Canada, je crains qu'il y ait un plus grand recours aux lois de retour au travail. Craignez-vous qu'on revienne à un contexte où les recours seront plus fréquents, ce qui nuira à l'équilibre atteint?
(1715)
    Si j'ai bien compris les questions, pour ce qui est de l'usine du secteur de l'automobile, tout à fait.
    Il est question ici du secteur fédéral, et j'ai entendu les observations qui ont été faites. Je vais répéter ce que j'ai dit plus tôt, soit que le secteur fédéral ne ressemble guère aux autres secteurs au Canada pour ce qui est du droit du travail. C'est l'épine dorsale du Canada, d'une province à l'autre. Alors, l'usine du secteur de l'automobile... et c'est un élément de la question : il est question du secteur fédéral. Si quelque chose fait obstacle au secteur fédéral en ce qui concerne les services clés que fournissent les employés du secteur fédéral, il n'y a plus de camions qui arrivent à l'usine, les trains ne peuvent livrer la marchandise, si bien que les activités de l'usine en question ralentissent. Et cette usine ne fait pas partie du conflit. De fait, elle se trouve sur un autre territoire du point de vue des relations de travail. Les conflits de travail ont donc un impact, cela ne fait aucun doute, sur pratiquement toutes les entreprises au Canada.
    J'aimerais parler aussi des exemples que nous invoquons. Certains d'entre eux ne s'appliquent pas au secteur fédéral. Quelqu'un a fait remarquer que les relations de travail sont marquées par une certaine paix par les temps qui courent. Chaque employeur, chaque syndicat traverse des cycles, cela ne fait aucun doute. Par conséquent, dans la plupart des administrations au Canada et à l'étranger, les relations de travail du secteur fédéral sont considérées comme étant extrêmement heureuses. Voilà pour le secteur fédéral.
    Quant à la décision d'investir, les relations de travail représentent un facteur qui entre certes en ligne de compte. C'est un facteur envisagé, sans aucun doute. C'est bien une considération, j'en suis convaincu. Il en a été question, je crois, dans le mémoire de la Colombie-Britannique; je présume que c'est donc le cas. Je ne suis pas dans le secret des dieux.
    Quant à l'équilibre qui a été atteint —
    Il vous reste une minute, monsieur Bedard.
    ... cela ne fait aucun doute, vous allez voir — Comme les services essentiels ne sont pas visés par l'article 87.4, les syndicats acceptent rarement sauf sous le coup de la menace, et la plupart des conventions collectives conclues au Canada ne comportent pas de lettre d'entente sur la continuation des activités. C'est la réalité. Ces ententes ne se concluent pas.
    Vous aurez donc un équilibre.
    Vous avez un commentaire à formuler rapidement?
    Oui, j'aimerais parler rapidement de chacune de ces questions.
    Pour ce qui est de faire le lien entre la situation d'aujourd'hui et les données économiques qui existent — il y a les données concernant la prospérité économique et les données concernant les arrêts de travail —, on peut procéder à une analyse de régression et se demander : y a-t-il, oui ou non, un lien? Cela fait intervenir des combinaisons complexes de facteurs —  j'hésite à dire que l'existence d'un seul texte de loi peut rendre les choses terriblement bonnes ou mauvaises. Il y a toute une série de facteurs — et il y a l'investissement aussi.
    Pour passer tout de suite au troisième élément, je dirais que, ce qu'il nous faut vraiment — et j'en ai parlé dans mon mémoire aussi —, ce sont, du côté des représentants des travailleurs, des organismes dynamiques qui cherchent à relever certains des défis qui se présentent du point de vue des compétences à acquérir, du point de vue des avantages à acquérir. Dans un monde où la main-d'oeuvre est de plus en plus transférable — les gens ne sont plus visés par un seul contrat syndical ni par un seul employeur comme avant —, nous devons repenser certaines de nos organisations syndicales et songer à la façon de les intégrer à la nouvelle économie moderne. J'en suis convaincu, quelle que soit la réponse à la question, l'adoption de ce projet de loi n'aidera pas forcément les choses.
(1720)
    Merci.
    D'accord, et merci beaucoup.
    Je veux prendre le temps de remercier tous les témoins qui sont venus comparaître aujourd'hui.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps que les témoins s'en aillent, puis nous allons discuter de quelques motions qu'il faut étudier en rapport avec des mesures législatives à venir.
    Encore une fois, je tiens à remercier les témoins. Je vous souhaite une bonne journée.

(1725)
    Je veux que vous sachiez que l'avis juridique dont M. Bedard a parlé vous sera remis. Il l'avait dans les deux langues officielles.
    Ce que nous devons faire maintenant, c'est d'adopter trois motions utiles, au sens où elles permettront aux gens de savoir, et c'est certes le cas de la greffière — pour ce qui est d'essayer d'intégrer les amendements.
    Selon la première motion que nous avons devant les yeux, les membres du comité remettent à la greffière l'ensemble des modifications qu'ils proposent au projet de loi C-257 au plus tard le 14 février, à midi. M. Silva proposera cette motion.
    La raison, c'est que nous accueillons le conseil le 13. Si nous recevons des centaines d'amendements, nous aurons peut-être à consacrer toute la journée à cela, jeudi. Tout de même, pour l'instant, il est entendu que nous allons commencer mercredi après-midi, le 14. Voilà donc. Je ne prévois pas une tonne d'amendements, mais des choses plus étranges se sont déjà produites. Nous devons quand même fixer un délai. Les amendements dont il s'agit peuvent être déposés dès maintenant.
    S'il n'y a pas de questions, je mets la motion au voix.

[Français]

     Je regrette, mais je n'ai pas entendu ce que vous avez dit.

[Traduction]

    M. Silva propose que nous recevions des amendements seulement jusqu'au 14.

[Français]

    Si j'ai bien compris, vous voulez reporter au 14 février le dépôt des amendements. Ai-je bien entendu?

[Traduction]

    Non. Nous voulons recevoir les amendements au plus tard le 14. Il nous faut un délai pour que la greffière puisse organiser le tout. Les amendements peuvent être déposés à n'importe quel moment.

[Français]

    Est-ce que ça pourrait être le 13?

[Traduction]

    Il faut que ce soit le 14, car, le 13, les gens vont écouter le conseil. Ce sera mardi après-midi; il faut donc reporter ça à midi, tout au moins, le lendemain. Il faut adopter un délai. Ainsi, je crois que la greffière aura suffisamment de temps pour organiser les modifications.

[Français]

    Je m'excuse infiniment, monsieur le président. Normalement, je comprends rapidement, mais je ne comprends pas ce que vous voulez au juste.
     Le calendrier prévoit toujours que nous entamions l'étude article par article du projet de loi mercredi prochain à 15 h 30. C'est bien. Il faut donc déposer les amendements avant le 14, sinon le laps de temps sera trop court. On n'aura que quelques heures pour réagir. Idéalement, il faudrait donc déposer les amendements le 13, c'est-à-dire mardi.

[Traduction]

    Le seul problème, c'est que nous allons assister à une séance d'information technique donnée par des responsables, le 13, de 15 h 30 à 17 h 30. Je ne prévois pas un grand nombre d'amendements. Nous avons toutefois prévu que, s'il y en a un trop grand nombre, nous pourrons siéger toute la journée jeudi. Le jour où il faut régler cela, c'est jeudi. Ce sera réglé d'ici 17 h 30 jeudi. Voilà ce que disait la motion tel que nous l'avons lue.
    Madame Davies.
    Une précision: si je comprends bien, comme nous accueillons mardi des témoins dont les propos auront peut-être une incidence sur ce que nous allons dire au sujet des amendements, il faut probablement que nous les écoutions. Vous avez peut-être des amendements qui pourraient être réglés avant cela —
    Tout à fait.
     — auquel cas, vous pouvez les présenter, mais juste au cas où un truc se présenterait à la fin, nous avons un délai qui nous permet d'entendre tous les témoins et qui vous donne encore jusqu'au lendemain matin pour présenter cela.
    Vous pouvez les présenter avant, mais cela vous donne une marge de manoeuvre un peu plus grande, au cas où il arriverait quelque chose à la fin, lorsque le dernier témoin appelé à donner des précisions techniques aura fini de nous éclairer, la veille.
    Merci, madame Davies. C'était très bien dit.
    Monsieur Lessard.

[Français]

    Oui, c'est une sage suggestion, pourvu que nous convenions entre nous que les partis qui connaissent à l'avance leurs amendements nous les envoient pour le 13 février. Quant aux autres, nous les prendrons à la dernière minute. Nous nous rallierions à cette suggestion pour faciliter les choses.
    Monsieur le président, j'aimerais ajouter un commentaire. En déposant les amendements le plus rapidement possible, nous pourrons en discuter avec les personnes ressources techniques qui viendront ici. Sinon, le lendemain, nous serons peut-être assaillis par des angoisses existentielles, sur le plan technique.
(1730)
    Nous avons beaucoup de difficulté à vivre avec l'angoisse.

[Traduction]

    Nous n'avons pas encore reçu d'amendements, et, à mon avis, il n'y en aura pas un grand nombre. Nous avons le 14. Cela nous donnera l'occasion d'écouter la séance d'information technique.
    (La motion est adoptée.)
    Selon la deuxième motion, les membres du comité remettent à la greffière l'ensemble des amendements qu'ils proposent au projet de loi C-36 au plus tard le 21 février, à midi.
    Une voix: J'en fais la proposition.

[Français]

    Monsieur le président, je pense qu'il serait de mise d'adopter la même démarche et qu'on envoie nos amendements à l'avance, d'autant plus qu'on a plus de temps pour le projet de loi C-36, tout en respectant le calendrier qui est ici.

[Traduction]

    Quiconque le souhaite peut présenter ses amendements avant le délai. C'est certes le cas. Nous entendons étudier le projet de loi article par article le 22 février. Encore une fois, ce sera le 21 février.
    (La motion est adoptée.)
    Selon la dernière motion que j'ai devant les yeux, les membres du comité doivent remettre à la greffière l'ensemble des amendements qu'ils proposent au projet de loi C-269 et C-278 au plus tard le 28 février, à midi.
    Encore une fois, nous entendons étudier cela article par article, le 1er mars.
     J'en fais la proposition.
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.