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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 024 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 novembre 2006

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je souhaite la bienvenue, de retour à Ottawa, à tous ceux qui sont allés visiter Fort McMurray.
    Nous allons aujourd'hui avoir une séance normale d'échanges avec des témoins. Je souhaite la bienvenue à Jim Carter, de Syncrude; à Mark Shaw, de Suncor Energy Inc.; à Rob Seeley, d'Albian Sands Energy Inc.; et à Tony Clarke — d'une obédience différente de celle des trois compagnies — de l'Institut Polaris.
    Commençons sans tarder. Nous n'avons rien d'autre à l'ordre du jour que l'audition des témoins. Conformément à notre coutume, nous allons accorder de 10 à 15 minutes aux témoins pour qu'ils nous fassent un exposé liminaire, et ensuite nous leur poserons des questions.
    Il s'agit réellement d'une séance d'information. Nous ne faisons le procès de personne. Nous cherchons simplement à mieux comprendre les sables bitumineux, leur mise en valeur et tout ce qui se passe à cet égard.
    Nous avons eu une très bonne journée hier à Fort McMurray, mais je suis sûr qu'elle a engendré aussi beaucoup d'interrogations.
    Nous allons donc commencer sans plus tarder. Avez-vous décidé de l'ordre dans lequel vous allez parler?
    Jim, allez-vous commencer?
    Très bien. Je vais vous laisser parler pendant dix minutes et si Mark ou Rob souhaitent ajouter quelques mots, ils pourront le faire à ce stade. Ensuite nous donnerons la parole à Tony avant d'ouvrir la période des questions. Cela convient à tout le monde.
    J'aimerais commencer avec Jim Carter, qui est le président-directeur général de Syncrude.
    Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je suis très heureux de m'entretenir avec vous aujourd'hui au nom de l'industrie albertaine des sables bitumineux.
    J'aimerais vous présenter deux collègues qui se sont joints à nous pour la réunion. Mark Shaw est vice-président de la viabilité des sables bitumineux chez Suncor Energy, et Rob Seeley est vice-président du développement durable et des affaires réglementaires chez Albian Sands Energy.
    Comme vous le savez, les répercussions économiques, écologiques et sociales de l'exploitation des sables bitumineux sont actuellement un grand sujet de discussion publique.
    Nous avons été ravis d'accueillir votre comité hier à Fort McMurray, afin que vous puissiez voir de première main ce qui se passe dans les sables bitumineux. J'espère que vous avez apprécié votre visite à ce vaste gisement de sable pétrolifère de l'Alberta et, plus particulièrement, votre visite de Syncrude Canada.
    Je crois savoir que vous avez également entendu sur ce sujet l'Association canadienne des producteurs pétroliers et l'Association minière du Canada. Je suis heureux de pouvoir compléter leurs interventions en vous apportant directement le point de vue des exploitants des sables bitumineux.
    Comme vous l'avez vu à Fort McMurray, le niveau d'activité y est véritablement énorme, ce qui s'accompagne de nombreuses tensions. Mais nous considérons que les bienfaits produits par notre industrie l'emportent largement sur les difficultés rencontrées. Pour ne pas accaparer trop de temps, je vais limiter mon propos aujourd'hui aux contributions économiques et à la gérance de l'environnement.
    Voyons d'abord les facteurs économiques. Comme vous le savez, les sables bitumineux sont une ressource bien particulière. Ils diffèrent des gisements de pétrole et de gaz conventionnels, tant du point de vue géologique que sur le plan de la mise en valeur et des méthodes d'extraction. C'est pourquoi le Groupe de travail national sur les stratégies de mise en valeur des sables bitumineux a proposé un régime de redevances générique tenant compte des particularités de l'investissement dans les sables pétrolifères et des conditions d'exploitation de ces derniers.
    Parmi les principales différences on peut citer le fait que des dépenses d'équipement plus élevées sont nécessaires pour démarrer ou étendre un projet d'extraction de sable bitumineu que pour forer un puits de pétrole. C'est particulièrement vrai des mines à ciel ouvert et des installations de valorisation qui exigent des capitaux de l'ordre de plusieurs milliards de dollars. Je suis sûr que vous en avez eu un aperçu lors de votre visite hier.
    Une fois les installations construites, les coûts d'exploitation unitaires sont également sensiblement plus élevés que pour le pétrole conventionnel et le gaz. Par ailleurs, le réinvestissement de maintien, pour garder en état ces installations complexes qui ont typiquement une durée de vie d'une cinquantaine d'années, est également plus élevé. En raison de la longévité de nos projets et des fluctuations de cours importantes qui peuvent se produire, nous sommes exposés à une plus forte variation du rendement économique sur la durée de vie d'un projet dans les sables bitumineux.
    Le problème est encore aggravé par le fait que, une fois construite, une usine d'exploitation de sables bitumineux doit fonctionner en continu et ne peut être arrêtée en période de bas prix pétrolier. C'est même l'inverse qui est vrai. Lorsque les cours du pétrole chutent, nous cherchons à maximiser nos volumes afin d'abaisser le coût unitaire et tenter de maintenir un flux de trésorerie positif. Ainsi, les exploitations des sables bitumineux doivent adopter une perspective à long terme de la mise en valeur de la ressource.
    Le régime de redevances générique tient compte de ces caractéristiques de l'exploitation des sables pétrolifères et assure un moyen terme juste et équitable entre le risque et la récompense. De fait, ce régime a été établi pour encourager la mise en valeur des sables bitumineux et surmonter les obstacles que représentent des frais d'investissement élevés face à un régime fiscal incertain à long terme. Il a fallu attendre près de dix ans pour commencer à attirer ces gros investissements. Je pense qu'il nous faut maintenir ce régime fiscal stable, sinon la confiance des financiers sera certainement ébranlée.
    Nous avons conscience que l'exploitation de ces gisements présente de nombreuses difficultés. Les deux plus pressantes à ce stade sont certainement la disponibilité de main-d'oeuvre et de matériaux. Ces défis vont déterminer le rythme du développement. Si les promoteurs des projets ne trouvent pas la main-d'oeuvre, le matériel et les services dont ils ont besoin, ils prendront volontairement les mesures appropriées pour gérer cette situation. De fait, il est déjà apparent que tel est le cas. C'est pourquoi nous pensons que l'économie de marché devrait prévaloir.
    Pour expliquer un peu ce phénomène, plus la pénurie de main-d'oeuvre grandit et plus le coût du travail augmente et plus le coût du matériel augmente. Tout cela influence l'évaluation économique des projets. Lorsque ces prix sont à la hausse, les promoteurs tendent à attendre plus longtemps avant de prendre leurs décisions. Nous avons déjà vu reculer l'échéance de certains projets, ce qui montre bien que le marché fonctionne, et si le cours du pétrole brut devait chuter et que ces coûts continuaient à augmenter, alors ces décisions seraient prises en fonction de l'évaluation économique du moment.
(1540)
    Le gouvernement de l'Alberta touche des redevances conformément à un barème double, selon que les investissements sont amortis ou non. Actuellement, plus de 50 p. 100 des projets en production paient la redevance au taux supérieur. En 2005, le gouvernement albertain a perçu environ 827 millions de dollars de redevances sur l'exploitation des sables bitumineux. Ce chiffre va plus que doubler pour atteindre le montant estimatif de 1,8 milliard de dollars en 2006. Plusieurs grands projets, dont l'expansion UE1 de Syncrude, que vous avez visité hier, et le projet Millennium Cogeneration Project de Suncor ont commencé à payer le taux plein.
    La contribution sous forme de redevances versée par l'industrie à la population albertaine continuera de grimper en flèche au cours des prochaines années, au fur et à mesure que davantage de projets d'exploitation des sables bitumineux commenceront à produire.
    En sus des redevances, les pouvoirs publics prélèvent des impôts sur le revenu auprès des sociétés pétrolières et de leurs employés. Si l'on établit des projections pour 2008, en posant l'hypothèse que le prix du pétrole brut sera de 50 $US le baril, les redevances pour cette période atteindraient 2 milliards de dollars. L'Alberta touchera presque 1 milliard de dollars supplémentaire sous forme d'impôt sur le revenu des sociétés, pour un total de 3 milliards de dollars que la province encaissera au titre des redevances et de l'impôt sur le revenu des sociétés. En outre, le gouvernement fédéral aura aussi de jolies rentrées fiscales, avec un prélèvement même encore supérieur à celui de l'Alberta.
    À plus long terme, nous prévoyons que le gouvernement fédéral encaissera entre 5 et 7 milliards de dollars par an sous forme d'impôts et de redevances d'ici 2015. Par conséquent, toute comparaison avec les régimes de redevances d'autres pays doit tenir compte des particularités de la mise en valeur des sables bitumineux et de l'avantage financier total retiré par les pouvoirs publics sur la durée de vie de ces projets. Il faut prendre en considération également la croissance directe et indirecte de l'activité économique et des emplois engendrés par les sables bitumineux. En 2005, par exemple, les 8 milliards de dollars investis dans les sables pétrolifères ont créé des emplois et stabilisé et stimulé l'activité économique d'un bout à l'autre du pays.
    Notre industrie prévoit que les dépenses d'immobilisations au cours des cinq prochaines années vont se situer annuellement entre 8 et 12 milliards de dollars, pour un total d'environ 54 milliards de dollars. Mais surtout, ce chiffre ne comprend pas les milliards supplémentaires qui seront dépensés en réinvestissements de maintien et frais de fonctionnement une fois que ces installations commenceront à produire, après la période de construction.
    Environ 0,40 $ sur chaque dollar dépensé par un promoteur des sables bitumineux aboutit en dehors des frontières de l'Alberta, et cela constitue une contribution considérable à l'économie canadienne. Cela signifie qu'en fin de compte tous les Canadiens bénéficient de la mise en valeur des sables bitumineux par le biais de la création d'emplois et de l'activité de fabrication. Cet effet de propagation a été confirmé par le Canadian Energy Research Institute ainsi que par des études d'experts indépendants.
    Aujourd'hui, il est évident aux yeux de tous les Canadiens que les sables bitumineux produisent des milliers d'emplois dans tous les domaines, depuis les métiers jusqu'aux professions libérales et techniques, et si les activités de fabrication sont concentrées principalement dans la région d'Edmonton, d'autres régions du Canada en bénéficient par le biais de la sous-traitance. Regardez le nombre de vols directs qui ont été ajoutés entre Fort McMurray et d'autres régions du Canada ces dernières années pour jauger l'impact économique des sables bitumineux à l'échelle de tout le pays.
    Nous calculons que les 54 milliards de dollars d'investissement projeté au cours des cinq prochaines années créeront 26 000 emplois directs d'ici 2011. Les études montrent que pour chaque emploi direct, trois emplois sont créés dans les secteurs des services et de soutien, pour un total de 100 000 emplois créés.
    Notre industrie établit des projections très détaillées de dépenses et de création d'emplois. Les sociétés exploitantes participent à des enquêtes de façon à nous permettre d'établir des prévisions d'activité et elles fournissent des renseignements hautement détaillés qui sont ensuite communiqués aux autorités locales et provinciales afin de faciliter leur planification. Nulle part ailleurs au Canada n'effectue-t-on des projections aussi complètes, accompagnées d'une analyse des retombées socio-économiques potentielles et des avantages au niveau de la région, de la province et du pays tout entier.
(1545)
    Ayant situé le contexte et présenté un certain nombre de faits concernant la mise en valeur des sables bitumineux, permettez-moi d'esquisser maintenant la vision d'avenir de notre industrie. Nous avons devant notre porte une énorme abondance de ressources et d'opportunités qui peuvent être et doivent être exploitées de manière responsable pour le bénéfice de tous les Canadiens. Cela exige la collaboration entre les pouvoirs publics, l'industrie et les collectivités locales si l'on veut que cette mise en valeur soit respectueuse de l'environnement et génère un héritage positif à transmettre aux générations futures.
    Notre vision pour le Canada est celle d'un avenir économique solide, la mise en valeur des sables bitumineux étant l'un des piliers de cet avenir. Nous voyons également un pays à la fine pointe de l'innovation, du progrès technologique et de la protection de l'environnement. Grâce à l'investissement et à la recherche-développement, l'industrie et les pouvoirs publics peuvent continuer à ouvrir la voie, avec une industrie des sables bitumineux viable ne relâchant jamais ses efforts d'atténuation de la pollution et de conservation de l'environnement.
    Ces innovations contribueront sans aucun doute à développer l'exploitation des sables bitumineux, mais elles stimuleront aussi d'autres projets d'un intérêt social plus large. À cet égard, j'aimerais souligner le travail de l'Alberta Chamber of Resources qui a réellement fait un excellent travail et esquissé une vision technologique dans sa feuille de route pour la technologie des sables bitumineux. Cette feuille de route décrit les nombreux défis internes et externes à relever pour réaliser la vision de croissance de l'industrie d'une manière qui soit économiquement, écologiquement et socialement responsable. Elle souligne qu'il faudra des investissements soutenus et résolus dans le développement technologique de l'industrie et que les pouvoirs publics et le secteur privé doivent élaborer de concert une stratégie à long terme. Alors que de nombreuses avancées ont déjà été réalisées au niveau de la recherche-développement et des pratiques opérationnelles, il faut continuer à recherche des approches nouvelles et focaliser avec diligence sur cette tâche.
    Je pourrais vous citer maints exemples d'améliorations des procédés d'exploitation qui sont favorables à l'environnement et ont été obtenues grâce à la recherche-développement, mais ce n'est pas pour cela que nous sommes ici aujourd'hui. Nous sommes venus pour parler de la façon de mettre en valeur les sables bitumineux d'une manière responsable, d'une manière respectueuse de l'environnement et d'une manière qui protège aussi les avantages économiques considérables que l'on peut dériver de l'exploitation de cette ressource.
    Tout cela pour dire que nous savons quels sont nos défis environnementaux et que nous sommes résolus à les confronter, ce que nous le faisons déjà, qu'il s'agisse de la consommation d'eau, de la consommation d'énergie, de la gestion des résidus, de la remise en état des terrains, de la qualité de l'air, des émissions de gaz à effet de serre ou d'autres enjeux. De fait, tout comme le développement technologique a été le moteur de la rentabilisation de l'exploitation des sables bitumineux au cours des 40 premières années, le développement technologique coopératif sera la clé qui nous aidera à trouver également les solutions aux problèmes environnementaux.
    Au cours de la dernière dizaine d'années, beaucoup de coordination et de travail de R-D a été effectué dans des organisations comme le Canadian Oil Sands Network for Research and Development, la Petroleum Technology Alliance Canada, le Centre de la technologie de l'énergie de CANMET, près d'Edmonton, l'Alberta Energy Research Institute, l'Alberta Research Council, le Conseil national de recherche, ici à Ottawa, et diverses universités. Cela montre que la recherche d'une approche nouvelle du développement technologique ne part pas de zéro. Il existe déjà une importante base de connaissances.
    Effectivement, il existe déjà une excellente base de recherches qui pourra être mise à profit si l'industrie joue un rôle éminent au niveau du financement et de la promotion de la recherche-développement, avec l'appui de nos gouvernements et des instituts de recherche. La coopération facilitera le financement à long terme et produira des solutions plus complètes et plus efficaces. Certes, c'est là un domaine encore relativement inexploré mais je pense qu'il n'est pas utopique de croire que les solutions existent. Nous avons accumulé une grande somme de connaissances scientifiques qui n'existaient pas lorsque l'usine de Syncrude a ouvert ses portes.
    Ainsi donc, puisque le pétrole brut restera une source d'énergie primordiale dans l'avenir prévisible et puisque nous avons cette vaste ressource sous la main, nous devrions utiliser l'exploitation des sables bitumineux comme la passerelle entre l'ère des hydrocarbures et les formes d'énergie futures — et nous devons en récolter les fruits tant que nous le pouvons, car sinon l'occasion sera perdue à tout jamais.
    En conclusion, permettez-moi de souligner de nouveau la possibilité offerte à l'industrie, aux pouvoirs publics et aux divers centres de recherche-développement de redoubler nos efforts de R-D, de coordonner un vaste programme de développement technologique et de produire les résultats que nous souhaitons tous. Nous faisons beaucoup de bonnes choses à l'heure actuelle, mais nous pouvons faire mieux et nous reconnaissons que notre licence d'exploitation nous est accordée par la société. Aussi, sachons reconnaître le long chemin déjà parcouru vers une industrie des sables bitumineux plus écologiques. Mettons à profit le travail déjà accompli et les structures de R-D coopératives déjà en place pour consacrer les ressources voulues à la recherche de solutions à ces problèmes ardus. De toute évidence, ce sera une entreprise commune de l'industrie, des pouvoirs publics et de la société qui exigera une engagement résolu de la part de tous. Qui cherche, très certainement, trouve.
(1550)
    Pour toutes ces raisons, monsieur le président, nous considérons que les sables bitumineux peuvent être mis en valeur d'une manière compatible avec l'intérêt public. Nous sommes convaincus que cette ressource peut apporter des bienfaits importants et durables à tous les citoyens du Canada et que les problèmes peuvent être gérés de manière responsable et appropriée pourvu que tous les intervenants en aient la volonté.
    Là-dessus, je vous remercie de nous avoir invités aujourd'hui. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci.
    Merci, monsieur Carter.
    Je pense que nous allons écouter tout de suite l'exposé de M. Clarke. Nous passerons ensuite aux questions.
    Monsieur Clarke.
    Je serai très bref aujourd'hui. Je ne vais pas accaparer beaucoup de votre temps.
    Je suis Tony Clarke et je représente l'Institut Polaris. De concert avec le Parkland Institute, en Alberta, et le Centre canadien de politiques alternatives, nous nous occupons de suivre et d'observer l'évolution de la situation dans les sables bitumineux, les sables pétrolifères de l'Alberta.
    Nous avons récemment effectué une étude sur ce sujet et publié un rapport, intitulé Fuelling Fortress America, qui traite des sables bitumineux de l'Athabasca et des répercussions sur la politique énergétique canadienne. Ce travail a été effectué par plusieurs petites équipes qui se déplaçaient et dialoguaient avec différentes personnes travaillant dans le secteur, et aussi avec des Autochtones, des écologistes et divers groupes de la société en général.
    Nous avons ainsi réuni un certain nombre d'observations, que je vais résumer brièvement pour vous aujourd'hui, avant de formuler quelques recommandations et propositions pour l'avenir.
    Je veux concentrer mon propos — en dépit des excellentes remarques que l'industrie elle-même vient de nous faire — sur la profonde inquiétude qui règne face au caractère désordonné du développement en cours. De façon générale, des permis d'exploitation sont accordés un peu partout sans qu'il existe un ensemble clair de critères ou un modèle clair de développement. Toute cette question de la cohérence, tant au niveau des critères que du modèle de développement, est un sujet de grande inquiétude. Il est impératif de maîtriser l'exploitation effrénée de cette ressource à laquelle on assiste aujourd'hui. Voilà un premier point.
    Deuxièmement, il nous faut bien réaliser qu'il s'agit là de la forme de production pétrolière la plus sale qui soit. Il s'agit donc d'examiner de très près les répercussions environnementales et bien cerner les coûts environnementaux ou écologiques à long terme.
    À cet égard, nous avons jugé nécessaire d'aborder un certain nombre de sujets, dont je ne couvrirai ici que quelques-uns. Le premier est celui des émissions de gaz à effet de serre.
    Je pense que tout le monde réalise que lorsque nous parlons de sables pétrolifères ou bitumineux, nous parlons de la production de carbone et de la production d'émissions de gaz à effet de serre, qui sont trois fois supérieures à celles du pétrole conventionnel et du gaz. C'est un aspect qui mérite en toute circonstance une sérieuse réflexion, mais surtout dans le climat actuel.
    Cela met en jeu très directement tout le rôle international du Canada. Le fait que nous soyons incapable de tenir nos engagements de Kyoto — ou même de seulement nous en approcher — est gravement préoccupant aux yeux de beaucoup de Canadiens du point de vue des conséquences, dès à présent, de la mise en valeur des sables bitumineux et pétrolifères.
    La réalité est que, selon l'Office national de l'énergie, pour chaque baril de brut synthétique extrait des sables bitumineux, quelque 125 kilogrammes de dioxyde de carbone sont dégagés dans l'atmosphère. Les sables bitumineux de l'Athabasca seront le plus gros contributeur aux émissions de gaz à effet de serre du Canada d'ici 2010. Selon un rapport du Natural Resources Defence Council et du Sierra Club du Canada de 2002, les émissions de gaz à effet de serre canadiennes vont atteindre 827 millions de tonnes en 2010. C'est un chiffre supérieur de 44 p. 100 à ce que le protocole de Kyoto autorise au Canada.
(1555)
    Ce sont toutes là des dimensions qu'il importe d'examiner très sérieusement, à mon avis. Le fait qu'il n'y ait pas d'objectifs précis relatifs aux émissions de gaz à effet de serre en provenance des sables bitumineux même et le fait que nous ne possédons toujours pas les technologies qui vont nous aider à réduire sensiblement ces émissions suscitent de profondes interrogations. Je pense que votre comité en particulier et le gouvernement fédéral dans son ensemble doivent assumer pleinement la responsabilité d'agir face à ces problèmes.
    Le deuxième aspect, c'est la consommation et la contamination de l'eau. Là encore, je pense que l'on a largement négligé le fait que la production de pétrole à partir des sables bitumineux, tant par extraction en surface que par séparation du pétrole et du bitume en profondeur, exige une grande quantité d'eau douce. Vous en avez probablement vu des exemples au cours de votre visite à Fort McMurray.
    Il ne faut pas perdre de vue que, selon nos études et estimations et différentes enquêtes à ce sujet, il faut entre 4,5 et sept barils d'eau pour produire un baril de pétrole brut à partir des sables bitumineux. Il y a là une énorme disproportion, surtout dans une région quelque peu fragile du point de vue des sources d'eau futures. Si l'on considère l'Alberta dans son entier, 37 p. 100 de toutes les sources d'eau douce de l'Alberta ont été allouées à la production de pétrole et de gaz. Pour ce qui est du bassin de la rivière Athabasca lui-même, plus de 66 p. 100 de son eau a été alloué à la seule exploitation des sables bitumineux.
    Il faut penser cela à la lumière de la pénurie d'eau dans les Prairies que les spécialistes nous annoncent. David Schindler a mis en évidence l'ampleur de la baisse des niveaux dans la Saskatchewan, l'Athabasca, la Bow et d'autres rivières tout au long du XXe siècle. Ces niveaux ne cessent de baisser. La fonte des glaciers de l'Arctique, qui se répercute, par exemple, sur l'alimentation de la rivière Bow, constitue un sérieux avertissement pour l'avenir du point de vue de la disponibilité et de la demande d'eau.
    Je pense qu'il s'agit de regarder cela de très près et de comprendre ce qui se passe. Encore une fois, les solutions technologiques semblent absentes, à moins que l'on trouve de nouvelles façon de raffiner les sables bitumineux qui puissent surmonter les problèmes majeurs que sont la consommation et la contamination de l'eau. En ce qui concerne la contamination, les étangs de résidus qui ont été formés — et qui couvrent, je crois, de l'ordre de 15 kilomètres carrés — se transforment en énormes lacs composés de liquide qui n'est pas vraiment réutilisable ou qui n'est pas transformé et épuré de façon à pouvoir être utilisé comme eau à long terme. Je sais que les compagnies tentent différentes choses à cet égard, mais je veux souligner que la contamination des eaux déjà utilisées présente quelques sérieuses difficultés.
    Le troisième point sur lequel j'aimerais attirer votre attention est le fait que nous sommes à un moment de transition, à mon sens, pour ce qui est de l'énergie et de l'avenir énergétique. Avec les sables bitumineux et pétrolifères, la question n'est pas seulement de savoir quelle sorte de réserves pétrolières et gazières nous avons pour l'avenir; il faut regarder de près ce qui se profile à l'horizon sur le plan d'aspects tels que le pic pétrolier lui-même.
(1600)
    Je pense que beaucoup de régions du monde commencent à en prendre conscience. Elles réalisent qu'il faut procéder à une grande transformation. Si vous allez en Suède et dans d'autres pays d'Europe, vous y voyez à l'oeuvre des stratégies très claires de recours à des énergies alternatives. Sans vouloir faire de jeu de mots, nous allons nous cacher la tête dans le sable si nous ne mettons pas à profit ce moment et ne commençons pas à opérer la transition vers des énergies de remplacement.
    Par-là j'entends simplement qu'il nous faut une nouvelle stratégie énergétique qui soit tournée vers l'avenir et commence à planifier en prévision du fait que, même si les sables bitumineux représentent aujourd'hui le grand espoir des États-Unis, ce n'est pas un grand espoir qui va durer toujours. À moins de mettre en marche quelques véritables mutations, nous allons nous retrouver en difficulté nous-mêmes, ne serait-ce parce que nous exportons vers les États-Unis tellement de pétrole produit à partir des sables pétrolifères et bitumineux.
    Nos réserves en pétrole conventionnel et en gaz naturel sont passées en dessous du niveau de 10 p. 100. Si la consommation de gaz naturel pour exploiter les sables bitumineux se poursuit au rythme actuel, nous allons être confrontés à une pénurie de gaz naturel encore plus grande. Nous devons en prendre conscience et réaliser qu'il nous faut planifier bien davantage pour les 20 à 25 prochaines années et pour le type de transition vers les énergies de remplacement renouvelables qui va devenir indispensable.
    Il nous faut aussi regarder de près les facteurs qui nous propulsent dans cette direction. Nous avons abandonné la politique qui exigeait de garder intactes 25 p. 100 de nos réserves de pétrole et de gaz. Nous sommes passés bien en dessous de ce niveau — et il s'agit là des réserves conventionnelles. En outre, l'Accord de libre-échange nord-américain comporte une clause de partage proportionnel et si nous contingentions ou interdisions les exportations de pétrole ou de gaz pour assurer notre propre sécurité énergétique, nous nous exposerions à des représailles économiques et juridiques sérieuses.
    C'est pourquoi je pense qu'il nous faut réellement faire le point de la situation aujourd'hui, déterminer quelles modifications il nous faut apporter aux instruments politiques actuels et voir comment progresser avec la formulation d'une stratégie et d'une politique énergétique proprement canadiennes.
    Comme nous l'indiquons dans notre rapport, nous jugeons essentiel à ce stade de nous donner l'espace voulu pour élaborer ce type de stratégies d'avenir. À cette fin, il faudrait imposer un moratoire au nouveau projet d'exploitation des sables bitumineux — sans toucher aux projets en cours, mais en suspendant l'octroi de nouveaux permis et l'expansion des installations d'exploitation actuelles — afin de nous donner le temps voulu pour prendre les décisions raisonnables et réfléchies qui s'imposent concernant cette ressource précieuse et les répercussions pour l'environnement et la société dans son ensemble.
    Nous appelons donc à un moratoire et, dans ce contexte, cela signifie nous donner le temps et l'espace pour formuler la stratégie et la politique énergétiques pour le Canada dont nous avons désespérément besoin.
    Merci.
(1605)
    Merci, monsieur Clarke.
    Nous allons maintenant passer aux questions et commencer avec M. St. Amand.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous, messieurs, de vos exposés.
    Permettez-moi de vous dire, monsieur Carter, combien vos employés se sont montrés hospitaliers envers nous hier. J'aimerais juste mentionner Don Thompson, qui nous a fait une présentation très détaillée, notre guide, Laura Gallant, et Charles. De même, chez Suncor, nous avons eu un breffage de Steve Williams, qui vous a fait honneur; même chose pour Janet, de Shell. C'était chaleureux et hospitalier.
    Monsieur Clarke, vous avez dit que les sables pétrolifères seront en 2010 le plus gros émetteur de gaz à effet de serre du Canada. Quel est le plus gros émetteur aujourd'hui, le savez-vous?
    Je ne le sais pas exactement, sauf que l'Alberta est passé devant l'Ontario comme plus gros émetteur de gaz à effet de serre. Dans ce contexte, les sables bitumineux sont en train de passer au premier rang.
    Bien. Pour ce qui est de la séquestration du carbone, je ne suis ni scientifique ni ingénieur. J'ai étudié le droit et je vais attendre d'être persuadé par votre savoir manifeste.
    Je présume, et c'est ma crainte, que le règlement des revendications territoriales dans tout l'Alberta va sûrement se répercuter, voire empêcher, la construction de conduites de séquestration. Cela se profile clairement à l'horizon. La répartition du coût reste à régler, et les principes scientifiques et même les procédés de captation du carbone et de son injection dans le sol restent un peu troubles — sans jeu de mots.
    N'est-ce pas susciter de faux espoirs que d'affirmer au public que, oui, les émissions sont à la hausse, davantage de carbone est rejeté dans l'atmosphère, mais ne vous inquiétez pas, dans un avenir proche nous allons en capter une grande partie, le séquestrer sous terre et il n'y aura plus à s'inquiéter? Est-il réaliste de penser que la séquestration du carbone soit possible dans un proche avenir?
    Permettez-moi de commencer par dire plusieurs choses.
    Premièrement, notre industrie travaille déjà avec grande diligence pour tenter de réduire nos émissions par baril de pétrole produit. Nous le faisons tous depuis des années, depuis que je travaille dans cette industrie. C'est même l'une des choses qui a rendu cette production compétitive, car il en coûte de l'argent de consommer de l'énergie, que ce soit pour fabriquer du pétrole, faire rouler votre voiture ou tout ce que vous voudrez.
    Nous avons réduit l'énergie consommée par baril. De fait, si vous regardez ce que l'industrie a accompli depuis 1990, nous avons réduit cette consommation de 17 p. 100 par unité de production. Nous pensons qu'à l'avenir, nous aurons une autre baisse de 17 p. 100 d'ici 2010-2012. Cela fera donc une réduction de 30 p. 100 par unité de production.
    Nous l'avons fait grâce à des technologies nouvelles. Vous en avez vu une partie à l'oeuvre hier, avec le procédé qui consiste à mélanger le sable pétrolifère à de l'eau pour l'acheminer par pipeline jusqu'à l'usine d'extraction. Nous avons pu ainsi réduire le coût de transport du sable pétrolifère à l'usine d'extraction.
    Nous avons réussi également à diminuer la température de traitement. Nous sommes descendus de 80 degrés centigrade à environ 40 degrés. Cela nous a permis de réduire d'environ 40 p. 100 l'apport d'énergie par baril de bitume extrait du sable.
    C'est une façon de faire les choses. Nous continuons de rechercher d'autres moyens de réduire l'énergie consommée.
    Pour ce qui est de la séquestration, nous y voyons là une méthode prometteuse. L'industrie travaille depuis déjà quelque temps, en collaboration avec le gouvernement provincial de l'Alberta, par l'intermédiaire de l'Alberta Chamber of Resources, à un procédé permettant de capter le CO2 presque pur que nous produisons dans les sables bitumineux.
    Il provient principalement de nos usines d'hydrogène, car notre méthode, en gros, consiste à prendre du gaz naturel, du CH4 ou méthane, et à le convertir en hydrogène, que nous ajoutons ensuite au pétrole. Nous le vendons d'ailleurs à un prix beaucoup plus élevé que la valeur du gaz naturel. C'est là de la fabrication secondaire, et même tertiaire, peut-on arguer.
    Ce faisant, nous produisons beaucoup de dioxyde de carbone. Celui-ci peut être utilisé pour la récupération assistée de pétrole. La difficulté réside dans le coût du transport de Fort McMurray jusqu'aux gisements conventionnels de Swan Hills ou d'ailleurs dans le sud de l'Alberta, là où l'on emploie les techniques de récupération assistée des hydrocarbures.
    Nous y voyons une méthode prometteuse. Il faudrait trouver une façon d'aligner les facteurs économiques. Si l'on pouvait récupérer et convertir pour ce transport un vieil oléoduc utilisé à d'autres fins, et si l'on pouvait revoir le barème des redevances versées sur le pétrole brut conventionnel afin de stimuler la récupération, nous pensons qu'il y aurait une réelle perspective d'aboutir.
(1610)
    Si je puis ajouter un mot à cela, monsieur, vous avez demandé où en est la technologie. Nous pensons que la technologie a déjà fait ses preuves et qu'elle peut capter le dioxyde de carbone et le séquestrer.
    Pour ce qui est des considérations économiques, et je paraphrase respectueusement votre propos, vous avez fait valoir que des milliards de dollars sont versés au gouvernement sous forme de taxe et de redevances — des milliards de dollars — mais les compagnies empochent tout de même, pour leur part, des dizaines de milliards de dollars. Il y a donc là un véritable générateur de revenu pour les compagnies, des milliards et des milliards de dollars de profit. Dans ces conditions, est-ce qu'un niveau de gouvernement doit vraiment intervenir et financer les pipelines de séquestration alors que les compagnies empochent des dizaines de milliards de dollars? N'y a-t-il pas une obligation pour les compagnies de financer cela sans l'aide du gouvernement? C'est une affaire de politique, mais simplement...
    Je pense qu'il faut considérer les flux monétaires qui sortent des sables bitumineux. Comme je l'ai fait remarquer, la province reçoit beaucoup d'argent et le gouvernement fédéral aussi, sous forme d'impôt sur le revenu des sociétés, de cotisations sociales et ce genre de choses. Donc, tout le monde a intérêt à ce que les sables bitumineux rapportent et deviennent une bonne locomotive pour l'économie canadienne.
    Je ne vois pas de différence avec n'importe quel autre domaine où le gouvernement peut décider d'intervenir pour lancer une technologie nouvelle susceptible d'apporter beaucoup d'avantages ultérieurs. Les gouvernements fédéral et provincial auraient tout intérêt à assurer l'exploitation continue du gisement. Cela permettrait de mettre les choses en route.
    Ensuite, c'est comme toute autre technologie. Une fois la machine mise en route, elle se met à tourner toute seule et à accélérer. Mais elle a besoin de ce soutien et de cette impulsion initiale pour se mettre en marche.
    J'ai une dernière question, si vous le permettez, monsieur le président.
    Je sais que c'est peut-être contraire à vos intérêts, mais en rapport avec ce que disait M. Clarke au sujet des énergies de remplacement, solaire, éolienne, des sources d'énergies renouvelables, que font vos sociétés sur le plan de la recherche-développement?
(1615)
    Permettez-moi de répondre d'abord. Je sais que Rob voudra indiquer ce que Shell et Albian ont fait, et Mark aussi, j'en suis sûr.
    Chez Syncrude, nous nous sommes vraiment concentrés sur nos procédés propres. Nous dépensons 50 millions de dollars par an pour la R-D depuis l'ouverture de notre installation en 1978. C'est nous qui avons inventé la technique de l'hydrotransport et nous l'avons vendue aux autres. Nous l'avons vendue à Shell, nous l'avons vendue à Suncor, nous l'avons vendue à CNRL. Nous avons consacré un gros effort de R-D à ces procédés. Nous employons aujourd'hui des chaudières écoénergétiques. Nous utilisons la cogénération pour toute notre génération de vapeur et d'énergie, et nous cherchons donc toutes les façons les plus efficientes, du point de vue de la consommation d'énergie, de produire un baril.
    C'est là-dessus que notre société s'est concentrée. D'autres sont allés plus loin que cela, et je vais les laisser vous en parler.
    À titre de commentaire général sur l'avenir énergétique, M. Clarke a parlé de la nécessité de la diversification et je pense que nous en convenons tous; cependant, il faut bien voir que la demande d'énergie dont le monde continue de croître et que les hydrocarbures resteront un volet important du portefeuille énergétique jusqu'au moins en 2050. Ainsi, la production de pétrole brut à partir des sables bitumineux canadiens remplace le pétrole conventionnel en déclin ici au Canada et en Amérique du Nord. Elle remplace également les bruts importés en Amérique du Nord, qui sont nos concurrents directs. Nous devons pouvoir assurer cette production de manière efficiente et économique et, comme M. Clarke l'a mentionné, nous avons consacré énormément de ressources à l'efficience de notre exploitation.
    Shell investit également dans les énergies renouvelables. Nous avons investi plus de 1 milliard de dollars dans les énergies renouvelables au cours des cinq dernières années, par l'intermédiaire de notre groupe Royal Dutch/Shell, soit dans l'énergie solaire et éolienne et les carburants de remplacement. Il s'agira là d'une diversification de notre portefeuille énergétique, mais elle ne remplacera pas le volet de carburant de transport, qui consiste principalement en hydrocarbures. Dans l'avenir prévisible, les hydrocarbures resteront nécessaires.
    Les énergies de remplacement offriront donc une gamme différente pour les besoins en électricité et les applications hors réseau, mais elles ne remplaceront pas les carburants de transport.
    J'aimerais ajouter un mot. Chaque compagnie choisit les marchés qu'elle veut desservir et, comme M. Carter l'a indiqué, la mise au point de nouvelles technologies est extrêmement importante pour nous tous.
    Suncor a investi plus de 100 millions de dollars par an dans l'énergie éolienne et nous prévoyons de continuer. Nous investissons également dans les biocarburants. Nous convenons donc avec M. Clarke que le monde va connaître une mutation énergétique, mais ce sera dans plusieurs décennies.
    Merci.
    Nous avons un petit peu dépassé le temps imparti.
    Je vais passer à Mme DeBellefeuille.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour votre présentation.
    J'ai apprécié la visite à la compagnie Syncrude, à Fort McMurray. J'y ai beaucoup appris, mais j'en suis ressortie avec en tête un bon nombre de questions.
    On lit tous les jours dans les journaux que l'enjeu planétaire actuel, soit les changements climatiques et leurs effets sur l'ensemble de la planète, est important. Comme parlementaires et élus, nous nous devons d'adopter une approche, dans le cadre de l'étude que nous faisons sur les sables bitumineux, non pas de courte vue mais qui tient compte des 30 prochaines années. On doit se demander, compte tenu de tout ce qui se développe actuellement en Alberta, ce qui va se passer au Québec, dans les autres provinces et au Canada.
    L'Alberta peut choisir de risquer que ses eaux souterraines soient contaminées ou décider de faire couper ses arbres: ce sont là des domaines de compétence qui lui appartiennent. Par contre, ce qui touche tout le monde, partout au Canada et sur la planète, ce sont les gaz à effet de serre libérés dans l'atmosphère.
     Une représentante de Shell Canada, qui s'appelait Janet, je crois, nous a dit que la technologie de captation et de séquestration du CO2 existait déjà, mais qu'on ne la mettait pas en application parce qu'elle n'était pas économique. Elle a dit également que selon elle, cette technologie pourrait être opérante aux environs de 2012.
     J'aimerais, il va sans dire, que vous m'expliquiez exactement ce que cette dame impliquait quand elle disait que cette technologie n'était pas économique. Quand on pense aux profits des pétrolières qui exploitent les sables bitumineux, on est quelque peu choqués, en tant que contribuables, d'entendre dire qu'une technologie qui permettrait de réduire considérablement les gaz à effet de serre n'est pas utilisée parce qu'elle n'est pas économique.
     M. Seeley pourrait peut-être répondre à ma question.
(1620)
    Merci. Si vous le permettez, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    En ce qui concerne la technologie de captation du carbone, comme M. Shaw l'a déjà expliqué, il est possible de capter le dioxyde de carbone émis par nos installations de valorisation, ce dont M. Carter a parlé également. Lorsque nous extrayons des sables bitumineux, nous obtenons du bitume brut que nous devons ensuite valoriser lors d'une opération secondaire au cours de laquelle nous ajoutons de l'hydrogène pour effectuer le craquage du matériau brut et obtenir du pétrole brut synthétique léger qui est ensuite vendu sur les marchés au Canada et aux États-Unis.
    C'est dans ces usines de valorisation que nous pouvons capter le dioxyde de carbone libéré lors de la fabrication d'hydrogène. Différents exploitants utilisent différents procédés. Je sais que Suncor et Syncrude ont installé leurs usines de valorisation sur le site de leurs mines de Fort McMurray. Shell, pour sa part, a construit la sienne à Fort Saskatchewan, près d'Edmonton. Nous avons donc séparé l'usine de valorisation de la mine. Notre installation est à Fort Saskatchewan, juste en périphérie d'Edmonton. Si nous captons le CO2 dans notre usine d'Edmonton, il sera très proche des points de séquestration du centre de l'Alberta, soit les gisements de Pembina et Swan Hills qui commencent à s'épuiser. Il existe donc la possibilité de capter le CO2, de le transporter par pipeline et de l'injecter. Cependant, la captation du CO2 coûte très cher. Il nous faudrait dépenser des centaines de millions de dollars pour construire l'infrastructure de captage et encore des centaines de millions de dollars pour les conduites d'acheminement jusqu'aux gisements, où il pourrait être soit injecté soit vendu à des tierces parties aux fins de la récupération assistée de pétrole. À l'évidence, bien que la technologie existe, Shell ne va pas la mettre en oeuvre et se désavantager par rapport à ses concurrents qui choisissent de ne pas le faire, pour de bonnes raisons qui leur sont propres.
    Pour ce qui est de la mise en oeuvre de cette technologie et de la construction de l'infrastructure, deux solutions existent. L'une consiste à constituer un partenariat pour l'investissement infrastructurel — la construction des pipelines reliant les installations de valorisation, qu'elles soient situées à Fort McMurray ou à Fort Saskatchewan, et les gisements. Donc, la création de partenariats pour construire l'infrastructure est une option.
    Deuxièmement, si le gouvernement adopte des règlements relatifs aux gaz à effet de serre, il devrait envisager ce que nous appelons les mécanismes du marché. La réglementation devra être appropriée mais, tous comptes faits, je crois que l'industrie préférerait ce que nous appelons des mécanismes de marché comportant le commerce de droits d'émission, de telle façon que les réductions de CO2 émis seraient considérées comme des compensations. C'est une autre façon de financer ce type d'investissement.
    Relativement aux gaz à effet de serre, nous rechercherons un régime fiscal stable qui autorise des investissements majeurs. Car se seront également de lourds investissements. En l'absence d'encouragementx ou d'une réglementation équitable pour tous, l'industrie ne les effectuera pas volontairement. car ce serait nous défavoriser par rapport à notre concurrence, qui se trouve être le brut importé en Amérique du Nord, comme je l'ai mentionné. Notre production se substitue au brut importé, et nous serions donc défavorisés par rapport à nos concurrents.

[Français]

    Merci beaucoup.
    On a lu dans les journaux que la Russie se préparait à déposer une plainte auprès de la Cour d'arbitrage international de Stockholm concernant des dommages écologiques causés par un projet pétrolier-gazier. Vous dites que le Canada et l'Alberta profitent de retombées économiques, bref que tout le monde s'enrichit grâce à l'exploitation des sables bitumineux.
    Or, les gens que je représente me posent souvent la question suivante. Comment pouvez-vous assurer les Québécois et les Canadiens que lorsque les ressources seront complètement épuisées, vous ne partirez pas en laissant derrière vous une mine abandonnée? Comment pouvez-vous assurer les contribuables que vous ne partirez pas tout bonnement, après avoir pris ce qu'il y avait à prendre, en les laissant aux prises, comme c'est le cas des Russes, avec des dommages écologiques dont ils devront payer la note?
(1625)

[Traduction]

    Vous posez là une double question. La première concerne Shell en Russie, avec votre référence à des articles de journaux parlant du projet de l'île de Sakhaline en Russie. Il s'agit d'une coentreprise entre Shell et des sociétés japonaises.
    En gros, tous ces articles de journaux recouvrent des nuances très complexes. En vérité, il s'agit là d'une manoeuvre du gouvernement russe pour mettre la main sur ce projet. À mon avis, les accusations et tout ce qu'on lit dans la presse est faux et dénué de fondement. C'est une manoeuvre du gouvernement russe pour se donner un avantage dans les négociations avec Shell et les sociétés japonaises et mettre la main sur ces ressources. C'est donc une question distincte.
    Revenons-en à votre question sur les sables bitumineux et l'assurance que les exploitants peuvent donner qu'ils vont remettre les sites en état et ne vont pas laisser en héritage pour l'avenir des problèmes environnementaux. Je peux vous assurer, et tous mes collègues ici confirmeront, que nos permis d'exploitation de ces mines de sables bitumineux — tant les agréments du gouvernement de l'Alberta que ceux du gouvernement fédéral par le biais du ministère des Pêches et Océans et d'autres organismes — nous imposent de totalement remettre en état ces sites.
    Nous avons l'intention et nous sommes totalement résolus à restaurer les sites d'extraction de sables bitumineux. Toutes les compagnies entreprennent des recherches considérables aux fins des programmes de remise en état et nous prévoyons d'y rétablir des écosystèmes entièrement viables. Je ne peux pas dire que les sites seront exactement comme avant car les tourbières ont évidemment été enlevées. Mais nous rétablirons un paysage diversifié comportant des terres humides — appelons-les des marais —, des zones sèches, des zones boisées. Tout cela fait partie des programmes de restauration qui sont déjà en cours et font l'objet de recherches corollaires. Ces sites ne resteront pas des terrains dégradés laissés en héritage aux Canadiens.
    Je dirais également que l'exploitation des sables bitumineux est réservée à ceux qui ont les poches profondes. Ce sont les gros prometteurs qui ont la surface financière voulue pour s'engager dans ces programmes de restauration et qui possèdent la technologie, le personnel et l'expérience opérationnelle pour les mener à bien.
    J'aimerais ajouter un mot à cela, pour compléter la réponse de M. Seeley.
    En Alberta, pour obtenir un permis d'extraction de sables bitumineux dans une mine de surface, il faut présenter un plan d'aménagement et de remise en état qui décrit l'état final des terrains, et ce avant même de commencer l'extraction. Ces exigences font partie intégrante du processus d'agrément et obligent l'exploitant à remettre les terrains dans un état de productivité plus grand qu'ils n'avaient au départ. Cela explique les plantations d'arbres que vous avez vu hier, l'élevage de bisons et ce genre de choses. Le paysage doit être plus productif qu'avant notre arrivée, et cela est calculé en fonction de la biomasse.
    J'aimerais ajouter un mot.
    Suncor a été la première à faire ce travail, en collaboration avec Syncrude, sur une période de 25 ans. Nous avons investi dans une technologie permettant de transformer nos étangs de résidus en paysages solides possédant une capacité équivalente une fois la restauration terminée. Suncor est tout à fait résolu à rétablir la capacité naturelle du paysage, celle qui existait avant la perturbation. Nous tous avons des réserves considérables qui vont durer de nombreuses décennies.
    Nous vivons dans cette collectivité et nous avons totalement l'intention de tenir ces engagements. C'est également ma responsabilité personnelle au sein de Suncor d'y parvenir. Nous avons été les premiers à faire ce travail et nous sommes sur le point de régénérer notre premier étang. Ayant été les premiers à démarrer, nous serons les premiers à réaliser cela et dans quelques années vous pourrez marcher sur ce qui est actuellement un lac. Il n'est pas très profond car il est presque comblé et sur le point d'être transformé en paysage solide. Nous pourrons vous montrer cela dans quelques années.
    Pour juger de la qualité de notre travail, nous demandons à des aînés autochtones du coin, qui ont grandi dans la région, d'arpenter les zones remises en état et de nous dire si c'est un paysage artificiel ou une forêt naturelle. C'est l'un de nos critères. Ils ne parviennent pas à dire que c'est un paysage que nous avons créé. Nous sommes donc très engagés et sommes sur le point d'y parvenir.
    Pour répondre à une remarque faite par M. Clarke, nous avons pas mal d'eau qui est actuellement retenue dans les étangs de résidus. La technologie requise pour épurer cette eau — que nous réutilisons déjà dans notre fabrication afin de moins puiser dans la rivière Athabasca — et pouvoir la restituer à l'environnement naturel et transformer ces étangs en paysages solides existe déjà et continuera d'être utilisée.
(1630)
    Bien.
    Nous avons dépassé le temps prévu.
    Je vois que M. Clarke souhaite ajouter un petit mot.
    Je signale que dans une semaine le comité recevra des témoins qui traiteront spécifiquement de la remise en état. Nous aurons des représentants de Boreal Initiative. Bruce Friesen, de Syncrude, reviendra pour traiter de la restauration et interviendra probablement de part et d'autre dans le débat risquant de s'ouvrir à ce sujet.
    Si vous pouviez répondre très brièvement, monsieur Clarke, car nous dépassons notre limite de temps.
    Désolé.
    Très brièvement, je ne conteste nullement que des projets de remise en état soient en route. Mais j'espère que le comité prendra en considération tout ce que nous ignorons au sujet des projets de remise en état. De nombreux écologistes ont examiné les terrains en cours de restauration, la capacité des humains de réellement remettre les choses en l'état en apparence, à la surface. Mais qu'y a-t-il sous la surface? Quelle sorte de destruction et de perturbation est-elle réellement intervenue et quels en sont les effets?
    Si vous regardez les études menées par le Pembina Institute en Alberta ou celle du Natural Resources Defence Council et d'autres études effectuées par des scientifiques universitaires renommés, vous verrez qu'il existe de nombreuses interrogations quant à ce qu'il est possible de réaliser avec les projets de restauration. Il ne faut pas oublier que lorsqu'on arrache une partie non négligeable de la forêt boréale, c'est enlever un morceau du poumon nord de la planète. Cela ne cause-t-il pas des dégâts à long terme qui sont irréparables?
    Je veux simplement faire remarquer qu'il y a là des interrogations plus profondes qu'il faut explorer avant de prendre pour argent comptant ces initiatives manifestement crédibles qui sont en cours.
    Je pense que c'est probablement vrai. Il faut se garder de prendre les choses pour argent comptant.
    Madame Bell.
    Je veux moi aussi remercier l'industrie de l'hospitalité dont elle a fait preuve envers nous hier. Cela a été un voyage très intéressant. Je crois que nous sommes tous fatigués après le très long voyage de retour.
    Je suppose que l'inconvénient d'être troisième sur la liste des intervenants c'est que plusieurs questions que je voulais poser ont déjà trouvé réponses. Tony vient juste de poser l'une de mes questions.
    Je m'intéresse aux effets à long terme et à la restauration. J'ai demandé à d'autres témoins ce qui se passe. Que reste-t-il dans le sol une fois que la terre est remise en place et que les lacs sont comblés? Je sais que l'eau est réutilisée maintes fois et je trouve excellent que vous parveniez à la recycler et à réduire les volumes de consommation.
    Je suis d'accord, il ne faut pas... C'est pourquoi je ne veux pas prendre pour argent comptant les assurances que tout est merveilleux et que les forêts et la terre reviennent à la normale.
    J'aimerais savoir où va l'eau, lorsqu'elle s'infiltre? Retourne-t-elle dans les rivières ou les lacs avoisinants? Dans quelle mesure reste-t-elle contaminée et quel en est l'effet sur les rivières? Le sol est également contaminé, et quel en est l'effet sur la végétation? Si des animaux mangent cette végétation, quels sont les effets à long terme? J'ai posé toutes ces questions. En gros, les réponses étaient que nous ne savons pas. Je trouve cela inquiétant.
    Je me pose la question: une fois les terrains restaurés, qui en est le propriétaire? Est-ce qu'ils retournent au gouvernement? Le gouvernement est-il alors responsable de ce qui reste, ou bien l'industrie conserve-t-elle quelques obligations par la suite?
    C'est un effet à long terme, mais je pense que c'est là le genre de choses dont il faut s'inquiéter et auxquelles il faut réfléchir. J'aimerais connaître votre pensée à ce sujet.
(1635)
    Je suis sûr que mes collègues voudront répondre aussi, mais sachez que nous avons un système de gestion de l'eau très sophistiqué dans nos mines de sables bitumineux de surface. Pour vous donner un exemple, à la mine de Syncrude, notre permis ne nous autorise pas à déverser de l'eau entrée en contact avec les sables bitumineux. Vous pouvez imaginer ce que cela suppose dans une mine de surface d'une telle dimension. Cela signifie que nous devons canaliser toute l'eau entrée en contact avec le sable bitumineux dans une certaine direction et la diriger vers un étang de réception où elle sera contenue. L'eau qui n'est pas entrée en contact avec les sables bitumineux peut s'écouler dans les cours d'eau. Nous avons donc un système de gestion de l'eau très complexe pour contrôler tout cela, et nous le faisons en permanence.
    Nous ne cessons de surveiller nos étangs de résidus, nos installations de stockage de l'eau, et principalement d'un point de vue géotechnique pour assurer la qualité du confinement lui-même. Nous surveillons également toutes les fuites éventuelles de ces installations. Tout cela est dirigé vers des déversoirs et contrôlé de cette façon.
    Pour ce qui est du paysage ultime, lorsque tout est terminé nous restituons les terrains au gouvernement de l'Alberta, mais il nous faut obtenir un certificat de remise en état disant que les autorités sont satisfaites du travail que nous avons fait. Tout cela fait l'objet d'un régime de permis, au même titre que le permis d'exploitation initial. Chez Syncrude, nous avons entamé la procédure d'obtention du premier certificat de remise en état de la parcelle à l'extrémité sud de notre concession, là où vous avez peut-être vu les sculptures de bison. Tout ce secteur a été restauré et nous demandons au gouvernement albertain un certificat de remise en état, auquel stade le terrain sera restitué à la Couronne qui en acceptera la responsabilité. Mais c'est un processus très rigoureux. Cela fait quelques temps que nous cherchons à restituer ces terrains à l'État, nous négocions depuis cinq ans. Cela n'est pas accordé facilement.
    J'ajoute que nous effectuons des recherches sur les terrains restaurés. Vous avez parlé des plantes qui poussent sur les terrains restaurés. Nous en avons qui poussent maintenant depuis plusieurs décennies sur des terrains restaurés et nous utilisons des méthodes scientifiques éprouvées pour les suivre. Nous travaillons beaucoup avec l'Université de l'Alberta et d'autres universités pour mesurer les substances que ces plantes peuvent assimiler. Nous avons donc conscience de ce problème et faisons tout pour assurer un paysage final naturel.
    J'aimerais ajouter un mot sur l'hydrologie et la contamination de l'eau. Schématiquement, l'exploitation des sables bitumineux consiste à séparer le sable du pétrole, vendre ce dernier et remettre le sable en place. Pour ce qui est de l'eau contenue dans le sable, il s'agit de trouver la bonne recette pour la remise en place du sable. La recette comporte trois ingrédients, du sable, de l'argile et de l'eau, et il faut trouver le bon mélange de façon à obtenir un paysage stable, puis mettre par-dessus ce que nous appelons du terrain de couverture, composé d'argile lourde, de roc et de matériaux lourdx non sableux. La terre végétale, qui a été soigneusement retirée et entreposée avant l'extraction, est ensuite placée par-dessus le terrain de couverture. Voilà donc en quoi consiste la remise en état.
    Pour ce qui est de l'hydrologie et de la contamination, nous avons sur tous nos sites des puits de surveillance, autour de nos étangs de résidus, entre nos installations et les cours d'eau, ruisseaux ou rivières, et nous surveillons toute infiltration éventuelle de contaminants dans ces cours d'eau. Tout cela est imposé par nos permis et la prévention de cela est une partie intégrante de notre exploitation.
(1640)
    Monsieur Clarke, souhaitiez-vous ajouter quelque chose?
    Non. La seule question que je poserais est de savoir s'il y a ou non un processus indépendant à l'oeuvre, tant au niveau de la surveillance que de l'examen du processus de restauration global. Tout le processus que vous suivez jusqu'à l'obtention d'un certificat de remise en état est très intéressant, mais ce modèle lui-même fait-il l'objet d'un examen indépendant? Des contrôleurs indépendants suivent-ils ce qui se passe à chacune des étapes dont vous parlez? Par indépendants, j'entends distincts et du gouvernement et de l'industrie.
    Cela garantirait l'indépendance, n'est-ce pas? Je suppose que tout dépend du point de vue où l'on se place. Merci.
    À ce sujet, je signale que nous cherchons à combler un créneau vide de notre séance dans 15 jours avec Vance MacNichol, qui est le président du Oil Sands Multi-stakeholder Committee, en Alberta, un comité très représentatif. Il est indépendant de tout groupe particulier en ce sens qu'il comprend des représentants de tous les groupements d'intérêt de l'Alberta. Je pense, madame Bell, que ce serait une bonne question à poser à ce témoin également.
    Merci.
    Nous allons conclure le premier tour avec M. Harris et M. Paradis. Monsieur Harris, aimeriez-vous commencer?
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, de tous les renseignements que vous nous apportez sur cette question cruciale. Malheureusement, je n'ai pas pu être du voyage à Fort McMurray, mais j'irai la prochaine fois, c'est sûr.
    Monsieur Clarke, j'aimerais revenir sur un point. Il me semble que vous préconisez une réduction de la production de pétrole et de nos exportations de pétrole vers les États-Unis. Il me semble que c'est ce que vous avez dit au début, que ce serait une bonne idée de conserver. Vous parliez de conserver nos réserves et de conserver nos ressources pétrolières. Ai-je bien saisi? Avez-vous dit quelque chose de ce genre?
    Je n'ai pas dit que nous devrions automatiquement réduire. Je disais qu'il nous faut élaborer une politique et une stratégie énergétiques qui soient proprement canadiennes, qui tiennent compte de nos besoins à court et à long terme, et revoir certains pièges dans lesquels nous tombons, tels que l'accord ou la clause de partage proportionnel insérée dans l'ALENA. C'est le genre de choses que j'ai prônées.
    Mais cela amènerait probablement une baisse de nos exportations de pétrole vers les États-Unis.
    C'est possible.
    Si nous allions dans cette direction, je suppose qu'il en résulterait que les États-Unis seraient davantage dépendants, par exemple, du pétrole du Moyen-Orient. Leur consommation de pétrole est très élevée et il faut bien que ce pétrole vienne de quelque part. Si nous devions réduire nos exportations vers l'Amérique, celle-ci devrait chercher le pétrole ailleurs. Pensez-vous qu'il serait sain pour la stabilité du monde occidental, par exemple, que les États-Unis deviennent davantage dépendants du pétrole du Moyen-Orient?
    Je reconnais pleinement les implications de votre question pour ce qui est du Moyen-Orient et de l'instabilité de l'accès à son pétrole. Évidemment, du point de vue des États-Unis, de Washington, l'accès au pétrole canadien — avec les réserves potentielles des sables bitumineux — offre un approvisionnement sûr, garanti, auprès d'un pays voisin ami.
    Mais vous avez employé dans votre question le mot « sain ». Pensez-vous que ce soit une situation saine qu'un pays — à savoir les États-Unis — ait besoin pour lui-même du quart de la production mondiale de pétrole? Je pense que nous arrivons à un stade où il faut revoir notre dépendance à l'égard des carburants fossiles à l'avenir. C'est pourquoi nous nous devons aujourd'hui à nous-mêmes, et aussi à nos amis Américains, de poser quelques décisions difficiles concernant l'avenir et la façon d'opérer la transition des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables, et ce en dépit de l'incroyable réserve d'hydrocarbures que le Canada possède dans les sables bitumineux.
(1645)
    Je suis d'accord, mais cela fait des années que ces questions sont posées. Il n'y a là rien de nouveau. Le gros problème, c'est de trouver les technologies qui permettent de rendre économiques les sources d'énergie de remplacement. Vous avez parlé d'énergie éolienne, mais il me semble, d'après tout ce que nous avons entendu, qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire avant que l'énergie éolienne soit rentable. Donc, en attendant que les sources de remplacement ne deviennent des façons efficientes et économiques de créer de l'énergie, nous allons devoir dépendre des combustibles fossiles, que cela nous plaise ou non.
    Je m'interroge donc sur votre idée de réduire notre production et nos exportations vers les États-Unis. Je crois que l'Amérique ira chercher son pétrole là où elle pourra le trouver. C'est au Moyen-Orient qu'il est le plus abondant et il me semble qu'il ne serait pas très sain de trop dépendre d'une seule région.
    Nous contribuons probablement beaucoup à stabiliser l'économie et le niveau de vie du monde occidental en approvisionnant l'Amérique à ce stade, pendant que nous poursuivons notre quête de sources de remplacement.
    Je dois avouer que je connais mal votre organisation, bien que j'en aie entendu parler, évidemment. J'aimerais savoir où se trouve votre centre, où est son siège, et comment le Polaris Institute est financé. D'où proviennent les fonds pour couvrir vos frais de fonctionnement? Qui finance vos rapports, comme celui que vous avez mentionné tout à l'heure? D'où vient l'argent?
    Notre siège est ici, à Ottawa. Les sources de financement de l'Institut sont principalement les fondations. Pour ce qui est du rapport lui-même, il a été financé par les trois organisations qui ont coparrainé le rapport, soit le Centre canadien de politiques alternatives, le Parkland Institute et le Polaris Institute.
    Je vois. D'accord.
    Et ces derniers sont financés par leurs partisans, par des contributions individuelles?
    Oui.
    Il n'y a pas de crédits publics?
    Non.
    D'accord.
    Je cède la parole à mon collègue, M. Paradis.
    Me reste-t-il du temps?
    Certainement. Prenez votre temps. Vous avez quatre minutes.

[Français]

    L'exposé de M. Carter était intéressant.
    Juste pour bien saisir l'importance de l'industrie et l'impact, je vais inverser ma question. Si on freinait la production actuelle et future des sables bitumineux, qu'est-ce que cela représenterait au Canada, tant sur le plan de la sécurité énergétique en approvisionnement qu'en ce qui concerne le prix de l'essence et l'économie canadienne pour les consommateurs, notamment au Québec et en Ontario, par exemple?
    Cette question a un sens large, mais c'est une question d'opinion. J'aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

    Merci.
    Quelles seraient les conséquences pour le Canada si nous cessions d'exploiter les sables bitumineux? Mettons les choses ainsi, et je comprends bien ce qui motive votre question. Cette année, pour la première fois — je crois que c'est plutôt la deuxième année maintenant — la production de pétrole provenant des sables bitumineux dépassera la production de pétrole brut conventionnel au Canada. Nous serons à environ 1,2 million de barils par jour cette année, comparé à environ 985 000 barils de pétrole brut conventionnel. Ce qui se passe, c'est que le bassin sédimentaire de l'Ouest canadien voit sa production décliner et les sables bitumineux comblent la différence. Il se passe la même chose aux États-Unis, et c'est pourquoi nous avons cette possibilité d'exporter du pétrole brut.
    Si nous n'avions pas eu la prévoyance... Et d'ailleurs, je fais remarquer que c'est là une réussite éclatante du Canada. Nous parlons ici de recherche-développement effectuée ici même, au Canada. Ce sont des inventions de notre cru qui permettent d'extraire le bitume du sable et de le transformer en un produit viable qui soit commercialisable sur le marché. Si nous n'avions pas commencé tout ce travail il y a 30 ans, nous serions dans de beaux draps du point de vue de notre approvisionnement en pétrole brut.
    Notre société, Syncrude, produit aujourd'hui à elle seule plus de 15 p. 100 des besoins de brut du Canada, et nos amis un peu plus loin dans la rue, Suncor, que Mark représente, fournissent entre 13 et 14 p. 100. Shell commence aussi à occuper une bonne place. Nous arrivons juste à point nommé, réellement, pour notre consommation énergétique.
    Nous avons eu la visite dans les sables pétrolifères en juin dernier, il y a un peu plus d'un an, de John Snow, le secrétaire du Trésor des États-Unis. Nous lui avons fait survoler l'installation que vous avez vous-même visitée. Il est descendu de l'hélicoptère, s'est tourné vers moi et m'a dit : « Jim, ce que vous avez réalisé au Canada, ce que vous les Canadiens avez accompli ici, est quelque chose de fantastique. Vous avez continué, vous avez persévéré. Vous avez trouvé la façon d'extraire le pétrole de ce sable et de le transformer en une ressource commercialisable et nous n'avons rien fait de pareil aux États-Unis. Nous avions nos schistes bitumineux au Colorado, nous y réfléchissions au début des années 80, et nous les avons abandonnés, nous avons laissé tomber. Vous, vous avez réussi et vous nous avez montré comment faire. »
    Je pense donc que nous avons eu beaucoup de chance; nous sommes les pionniers. Je peux vous dire, d'après mon expérience personnelle... Cela fait 28 ans que je travaille chez Syncrude Canada et que je vis chaque jour à Fort McMurray, et les 15 premières années nous nous échinions dans l'obscurité. Personne ne croyait que nous pouvions réussir. Nul ne croyait que nous pouvions en faire une entreprise viable, notre travail était perçu comme une curiosité scientifique. Grâce à cet effort et à cette énergie, la mise en valeur se fait et nous continuons à investir dans la R-D. Nous continuons à inventer de nouvelles façons de faire les choses, avec des procédés plus éconergétiques, de meilleures façons de remettre en état les terrains, de meilleures façons de stocker les résidus, de meilleures façons de capter l'eau des étangs de stockage tant qu'elle est encore chaude afin de pouvoir en extraire davantage d'énergie.
    Je pense que le Canada serait dans une situation bien moins enviable aujourd'hui si les sables bitumineux n'avaient pas été mis en valeur — et c'est vrai de tout le Canada. Une bonne partie de notre production part dans les raffineries de la région d'Edmonton, mais une partie va aussi à Sarnia et franchit les montagnes jusqu'à la côte Ouest. Ce produit alimente tout le pays et va réellement contribuer à la sécurité énergétique du pays.
(1650)

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci. Votre temps est écoulé — désolé — car je sais combien nous sommes impatients d'entendre M. Cullen.
    Vous dites cela avec un tel manque de sincérité.
    Merci, monsieur Carter, monsieur Seeley, monsieur Shaw et monsieur Clarke.
    Monsieur Carter, je vous remercie de votre hospitalité hier lors de notre visite chez Syncrude.
    Merci également à Suncor et Shell Albian.
    Je suis heureux d'avoir fait le voyage. Nous avons littéralement pu donner des coups de pied dans les pneus et, grâce à l'insistance de notre président, nous avons même eu une photo devant les grandes roues.
(1655)
    Vous parlez des camions.
    Oui, des camions aussi.
    Je trouve que ce que vous avez fait là-bas est étonnant et je suis heureux de l'avoir vu. Vous pouvez être fiers de cette prouesse technique et administrative.
    Ce qui me préoccupe personnellement n'est pas tant ce qui se passe aujourd'hui que la perspective d'avenir. On nous a dit que quelque 18 projets sont en voie d'être agréés et que 27 autres sont au stade des études préliminaires ou avancées de faisabilité.
    Vous avez tous entendu parler de la tragédie des communes en Angleterre, il y a de nombreux siècles, où les éleveurs de moutons avaient tous une petite parcelle de terre privée et où il y avait un pâturage commun. Eh bien, tout le monde a mis ses moutons dans le pâturage commun, qui a été de ce fait oblitéré. Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre ce qui s'est passé.
    Vous avez un certain intérêt, me semble-t-il, dans ce qui est un bien public. Vous avez conscience de vos responsabilités sociales mais il y a manifestement des limites à ce que vous acceptez de faire. Vous avez des obligations envers vos actionnaires et vous avez une entreprise à faire vivre et à exploiter. Nous, parlementaires, avons également une responsabilité à l'égard du bien public, et je suis inquiet.
    Lorsque je parle de bien public, je songe à la production de CO2. Je songe au changement climatique et aux gaz à effet de serre. Je songe à l'eau. Je pense que tous vos interlocuteurs savent que des problèmes d'eau planent sur les sables bitumineux.
    Je m'inquiète également au sujet de l'infrastructure à Fort McMurray et du rythme de croissance dans la région. Je sais que cela vous préoccupe également.
    Vous avez parlé de captation et de séquestration du carbone et des technologies de recyclage de l'eau. Nous savons que l'eau est recyclée, mais une grande partie se retrouve dans des bassins de résidus. Il existe certainement un temps mort ou un délai d'exécution et une partie de l'eau de ces bassins ne retournera jamais dans le réseau hydrographique. Je pense que c'est un problème.
    Si vous pouviez tous convenir entre vous de vous fixer pour objectif la solution de ces problèmes, il n'y aurait pas de nouveaux projets tant que le recyclage de l'eau n'atteinrait pas le seuil de 70 ou 80 p. 100. Je ne sais pas quel devrait être le chiffre. Les émissions de CO2 ne seraient permises que jusqu'à un certain niveau et tout l'excédent devrait être capté et séquestré.
    Le pétrole est un produit de base international. Si vous êtes tous placés sur un pied d'égalité et en mesure de verser un rendement sur l'investissement à vos actionnaires, est-ce un terrain de jeu égal que vous recherchez ou bien y a-t-il des considérations économiques au-delà de cet aspect?
    Eh bien, le problème dans notre industrie, en partie, est que nous ne fixons pas les prix, nous les subissons. Nous acceptons le prix du marché mondial, quel qu'il soit.
    Il est probablement facile de dire aujourd'hui que l'industrie pétrolière se porte très bien à 56 $ le baril, ou quelque soit le cours du jour. Mais il n'y a pas si longtemps, en 1998, il est tombé à 11 $ le baril. Les choses n'étaient pas faciles dans les sables bitumineux à 11 $ le baril. Nous parvenions à peine à couvrir les frais. Il n'est pas facile de fermer ces installations. Nous sommes tributaires des fluctuations du marché des produits de base.
    Notre véritable concurrence, c'est le Moyen-Orient, l'Arabie saoudite. Là-bas, ils peuvent mettre du pétrole sur le marché au prix de 5 $ US le baril. Nous ne fixons pas le prix. Lorsque cela arrive, nous devons faire preuve d'une très grande diligence dans notre gestion.
    Les choses sont beaucoup plus complexes qu'elles ne semblent l'être aujourd'hui, à l'heure où nous parlons, le prix du pétrole brut étant ce qu'il est. Mais pour que nos entreprises soient viables, nous devons prendre toutes ces choses en considération, car nous allons devoir absorber toutes ces fluctuations à la hausse et à la baisse.
    Si vous prenez le prix du brut en 1995 et les prix depuis 100 ans, depuis que l'on produit du pétrole brut, et que vous exprimez ce prix en dollars de 1995, le cours du pétrole brut pendant toute cette période était en moyenne de 20 $ le baril, exprimé en dollars de 1995. Le cours montait et baissait selon qu'il y avait une guerre mondiale ou un conflit majeur dans une région du monde.
    Nous sommes probablement à un plateau différent aujourd'hui. Peu de gens diraient que nous retrouverons du pétrole à 20 $, mais je ne pense pas qu'il reste à 60 $ non plus. Nous allons de nouveau être confrontés à ces défis dans l'avenir.
    Au prix d'aujourd'hui, les conditions économiques sont probablement bonnes, et même très bonnes, mais vous ne savez pas quel sera le cours du pétrole à l'avenir.
    Vous êtes les sociétés les mieux établies dans les sables bitumineux aujourd'hui — Shell Albian, Suncor, Syncrude. Avez-vous des intérêts dans les projets en cours d'agrément, les 18 plus les 27? Êtes-vous le principal promoteur de certains d'entre eux? Allez-vous en bénéficier sous forme de bitume alimentant vos installations de traitement? Quel est votre intérêt dans les nouveaux projets proposés?
    En ce qui concerne Syncrude, nous n'avons pas d'intérêt. Nous sommes une entreprise en coparticipation. Certains de nos propriétaires ont effectivement des projets d'exploitation des sables bitumineux, mais nous n'avons pas d'intérêt direct dans cela. Je dirais même qu'ils vont compliquer les choses pour nous en rendant la concurrence pour les ressources humaines encore plus dure, soit le gros problème que nous connaissons en ce moment.
(1700)
    Qu'en est-il de Suncor et de Shell Albian?
    Je pourrais peut-être juste dire un mot en réponse à votre question précédente, soit votre préoccupation au sujet du rythme de développement et de la capacité environnementale de la région et des problèmes sociaux. Dans tout cet ensemble de considérations, un élément important à prendre en compte c'est la demande de ce pétrole brut synthétique et les facteurs économiques. Il ne faut pas perdre cela de vue car, je répète, c'est un produit mondial, vendu sur un marché mondial. La plus grande partie de notre brut est livré à des raffineries canadiennes et à certaines raffineries américaines, celles que nous appelons Chicago PADD II et PADD V. Ces raffineries ont une capacité limitée, et j'en viens donc à mon argument, à savoir qu'il faut laisser le marché décider. Oui, 18 projets sont en cours d'agrément et 27 au stade préliminaire, mais le nombre qui sera effectivement réalisé dépendra du marché et de la demande. Nous ne pensons pas que tous vont être réalisés, certains vont disparaître.
    Le marché décidera de certaines choses, mais il ne décidera pas si le bien public est menacé ou non. J'ai la responsabilité de protéger un bien public au nom de tous les Canadiens et je ne peux simplement m'en remettre au marché pour qu'il règle ces problèmes.
    S'il s'agit d'un bien public en rapport avec la capacité environnementale, par exemple, vous recevrez probablement dans une semaine ou deux le groupe CEMA, c'est-à-dire la Cumulative Environmental Management Association. C'est un groupe pluripartite composé d'ONG, de groupes autochtones, de représentants des pouvoirs publics et de l'industrie, tous travaillant sur ces questions stratégiques en rapport avec la capacité environnementale de la région, les problèmes d'eau, la qualité atmosphérique, etc. Je pense que c'est un modèle pour le Canada. Beaucoup de travail a été consacré à cela. L'industrie y consacre beaucoup d'argent pour assurer le succès de cet effort et faire en sorte que tous les représentants voulus soient à la table pour prendre ces décisions touchant la réglementation future de cette industrie .
    Pour ce qui est de subir les prix, je sais... J'ai travaillé dans le secteur des produits forestiers — pâte, papier, bois d'oeuvre. Vous subissez les prix, et c'est un marché de produits primaires, mais notre raisonnement était le suivant. Nous ne pouvons fixer le prix. Nous devons donc nous efforcer de produire à faible coût. Quel est votre seuil de rentabilité, celui où vous avez un retour sur l'investissement? Et franchement, pour le reste, qui s'en soucie? Vous ne pouvez contrôler le prix, et vous devez donc veiller à ce que votre flux de trésorerie soit suffisant.
    Permettez-moi de revenir à une autre question. S'il était possible d'accélérer la mise au point et le déploiement de ces technologies qui permettront de mieux recycler l'eau, qui nous aideront à capter et séquestrer le carbone, que pourrait faire le gouvernement fédéral pour contribuer à cela et les recherches sont-elles suffisamment avancées pour...? Je m'y connais suffisamment pour savoir que l'on a beau avoir une idée, la mettre en pratique techniquement et concrètement sur le terrain est une autre affaire, et parfois le délai d'attente est énorme.
    Quel délai de démarrage faut-il escompter? Quels sont les facteurs économiques pour vous, s'il y avait un terrain de jeu égal? Et comment le gouvernement fédéral pourrait-il aider?
    Je vais peut-être tenter de répondre.
    Le gouvernement fédéral aide déjà de certaines façons, par exemple par l'intermédiaire du Conseil national de recherche. Nous travaillons beaucoup avec lui. Nous travaillons avec les universités et nous travaillons avec nos propres centres de recherche. Nous travaillons avec l'Alberta Research Council sur des aspects tels que les meilleures techniques de remise en état des terres.
    L'industrie déploie beaucoup d'effort pour transformer les paysages humides en paysages secs plus tôt qu'il n'était possible jusqu'à présent. Nous avons beaucoup progressé à cet égard en concentrant les matériaux fins dans l'eau elle-même de telle façon qu'ils coulent au fond et que nous puissions réutiliser l'eau plus vite. Pour vous donner un exemple, chez Syncrude, nous consommons maintenant deux barils d'eau — et non plus cinq ou six ou sept ou huit — pour produire un baril de pétrole. C'est une baisse de 60 p. 100 au cours des cinq dernières années.
    Nous recyclons aussi évidemment l'eau. Si vous avez parlé avec Don Thompson hier, il vous a probablement raconté cette histoire. Environ 80 p. 100 de notre eau est recyclée. Nous la recyclons environ 18 fois. Nous ne puisons donc d'eau que pour faire l'appoint dans nos procédés et cette eau d'appoint finit par... Elle est utilisée pour le refroidissement de l'eau dans nos procédés. Dans ce procédé, elle retourne à l'atmosphère ou, si elle finit dans les étangs de décantation, elle s'évapore — pas toute, mais une grande partie — si bien qu'elle est restituée au cycle hydrologique.
    Tous ces efforts sont destinés à minimiser notre impact sur l'environnement et nous continuons à chercher des façons de le réduire encore. Mais je pense que l'industrie, par le biais des collaborations que nous avons déjà en train, comme celle avec le Conseil national de recherche et d'autres, est capable de se débrouiller.
    Nous avons parlé de séquestration de CO2 plus tôt. Dans ce cas, l'industrie dirait probablement que pour cela se fasse, il faut une aide initiale, probablement des deux niveaux de gouvernement. Le gouvernement fédéral pourrait participer et donner l'impulsion.
(1705)
    Vous dépassez déjà votre temps de trois minutes, mais peut-être M. Clarke souhaite-t-il ajouter quelque chose.
    J'aimerais revenir sur vos questions initiales.
    Ces trois compagnies, Syncrude et Suncor en particulier, ont beaucoup fait depuis les premiers stades jusqu'à présent. Elles ont fait un grand travail de pionnier. Elles ont réussi quantité de percées technologiques, etc. Mais ce qui manque maintenant, c'est un cadre dans lequel inscrire tout cela, un cadre stratégique qui puisse s'attaquer aux problèmes tant actuels que futurs. C'est pourquoi nous sommes persuadés qu'il faut un moratoire sur les nouveaux projets, de façon à faire le point de la situation, examiner ce que l'on peut faire au niveau de la séquestration du carbone, ce que l'on peut faire au niveau de la remise en état et ce que l'on peut faire au niveau de l'eau.
    Les chiffres en ma possession diffèrent de ceux de M. Carter concernant Syncrude. Je ne conteste pas qu'il ait ces chiffres en main, mais les études indépendantes réalisées brossent un tableau différent. Mais c'est là un autre sujet.
    Ce que j'essaie de vous montrer, c'est qu'il faut surimposer à tout cela un cadre stratégique, car nous parlons ici de l'avenir d'une grande partie du pays, avec des répercussions pour tout le continent et même des parties de toute la planète. Il est extrêmement important de ne pas commettre d'erreur. Il incombe au gouvernement national du pays, par le biais de votre comité, de prendre cette initiative et de lancer un appel, si vous le pouvez, à un moratoire sur les projets futurs... afin de voir quelle sorte de repères il faut mettre en place, quels moyens de mesures doivent être mis en place et quelles évaluations sont nécessaires pour l'avenir.
    Deuxièmement, je dois dire que tout cela est lié à la nécessité d'une politique énergétique pour le pays. Certes, nous produisons toute cette énergie, tout ce pétrole et ce gaz. Certes, nous exportons vers les États-Unis. Mais il faut aussi réaliser que nous importons une énorme quantité de pétrole. Près de 50 p. 100 du pétrole consommé dans le pays, particulièrement au Québec et dans les Maritimes, vient de l'étranger. C'est là un grand facteur d'insécurité qui montre que la sécurité n'est pas assurée. Toutes ces questions concernent notre avenir énergétique et nous devons leur trouver des réponses. Je pense qu'il faut donc saisir ce moment, prendre le temps de faire ce travail et imposer un moratoire qui nous permettra de réfléchir et de mettre en place le cadre stratégique dont nous aurons besoin pour l'avenir.
    Monsieur Ouellet.

[Français]

    Monsieur le président, j'abonde dans le sens de M. Cullen, mais je vais être un peu plus précis. Je m'adresse particulièrement aux représentants de Syncrude et de Suncor Energy Inc., puisque M. Seeley a un peu abordé le sujet tout à l'heure.
    Je voudrais qu'on ne s'écarte pas du sujet de ma question, si possible, qui porte uniquement sur les gaz à effet de serre. Je ne parle pas de pollution ni d'environnement. Je parle uniquement des gaz à effet de serre qui proviennent des activités liées aux sables bitumineux. Ces gaz, qui sont d'une tonne par huit barils, ne cesseront d'augmenter. C'est ce qu'on nous a dit hier. Contrairement à ce que vous nous avez dit tout à l'heure, le graphique ne bouge pas: plus on produit de pétrole, plus on produit de CO2, de dioxyde de carbone. Donc, si vous en produisez une tonne pour huit barils, vous en produirez toujours une tonne pour huit barils, parce qu'il n'y a pas beaucoup de possibilités d'apporter des changements.
    Alors, quels sont les signaux politiques nécessaires pour ralentir et, éventuellement, renverser cette tendance à l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre?
    Pour être encore plus précis, je vous dirais qu'on ne voudrait pas vous imposer un frein économique, comme M. Harris le disait tout à l'heure avec raison, mais en tant que gouvernement, en tant que parlementaires, nous devons trouver une façon de limiter vos émissions de GES, sans réduire votre production.
    Quelles mesures nous proposez-vous pour que cela change? Ce sont des mesures qu'on vous imposera, mais vous nous les dites maintenant. Que doivent faire les parlementaires pour que vous réduisiez vos émissions? Quelles mesures accepteriez-vous de prendre?
(1710)

[Traduction]

    Permettez-moi de répondre. Je pense avoir dit tout à l'heure — peut-être n'ai-je pas été très clair — que nous avons réduit notre consommation d'énergie par baril de 17 p. 100 environ depuis 1990. Je m'attends à ce que dans l'avenir proche ce chiffre double quasiment, c'est-à-dire que nous allons diminuer les émissions de 17 p. 100 encore. Nous pourrons probablement faire mieux encore. Un facteur qui a été réellement déterminant pour la réussite de l'industrie des sables bitumineux a été tout l'effort de recherche-développement et les améliorations continues dans tout ce que nous faisons. Si vous comparez avec les tout premiers jours, il en coûtait plus de 30 $ pour produire un baril de pétrole à partir des sables bitumineux. Nous n'aurions jamais pu développer cette activité si nous n'avions pas réalisé des améliorations continues et trouvé les moyens de faire baisser ces coûts. Un élément de cette réduction des coûts a été la diminution de l'énergie consommée. C'est pourquoi nous avons obtenu cette réduction de 17 p. 100 dont je parle.
    Nous l'avons fait par toute sorte de moyens. Nous l'avons fait, comme je l'ai mentionné précédemment, en mettant en oeuvre des technologies nouvelles, en mélangeant le sable bitumineux avec de l'eau, en réduisant les températures requises dans ces procédés. Nous ne déplaçons plus le sable bitumineux par convoyeur, mais par pipeline. C'est un moyen de transport plus économe en énergie. Nous sommes passés de camions de transport lourd de 170 tonnes à des camions de 400 tonnes. Ces camions consomment moins des deux tiers de carburant par tonne kilomètre que les camions de 170 tonnes.
    Nous consommons donc moins de carburant pour l'extraction, nous dégageons moins de NOx et nous allons persévérer dans cette voie à l'avenir. Donc, par unité de production, nous allons continuer à réduire la consommation d'énergie.
    Si vous parlez d'une réduction absolue, cela signifie que la production n'augmenterait pas. Une réduction absolue suppose l'absence d'expansion.
    Comme M. Carter, je conteste votre opinion qu'il est impossible d'améliorer la consommation d'énergie et la production de gaz à effet de serre par baril de pétrole produit. Je suis convaincu que nous le pouvons. Nous l'avons fait et nous continuerons de le faire.
    Nous encourageons fortement le gouvernement fédéral à apporter une aide. Vous le faites déjà en stimulant la technologie, et nous vous prions de continuer. Si vous trouvez des façons de faire davantage encore, nous serons certainement d'accord. Nous sommes tout à fait résolus à améliorer la technologie. Nous pensons que cette dernière fera une différence.
    Suncor investit également dans les énergies de remplacement — j'ai mentionné les éoliennes et les biocarburants. Nous pensons que les gaz à effet de serre sont un problème mondial et nous nous tournons vers les mécanismes du marché. Le Canada ne peut pas résoudre ce problème pour le monde entier. Ce serait imposer d'énormes pénalités économiques et sociales au Canada. Nous recherchons des façons dont le Canada peut contribuer à régler ce problème mondial par des moyens optimaux pour nous et pour d'autres.
    Des mécanismes de marché ont été proposés dans maintes tribunes portant sur les gaz à effet de serre, tels que l'investissement dans la technologie à l'étranger. Pourquoi ne pas investir dans le reboisement dans des pays étrangers? Nous respectons énormément la responsabilité que vous exercez au nom des Canadiens et nous pensons qu'il importe que le gouvernement fédéral et les parlementaires ne perdent pas de vue que les gaz à effet de serre sont un problème qui ne peut être résolu exclusivement au Canada.
(1715)

[Français]

    Hier, M. Thompson nous a dit que les gaz à effet de serre, le dioxyde de carbone, le CO2, étaient constants à 0,12 tonnes par baril, quoi que vous fassiez. C'est la même chose depuis des années et c'est à l'horizontal. Ce n'est pas en faisant de la recherche qu'on va changer quelque chose à cela.
    Tout à l'heure, M. Seeley nous a amenés à considérer quelque chose qui aurait pu, il me semble, vous servir de tremplin. Si vous aviez été forcés d'acheter — j'interprète un peu — l'équivalent en tonnes de carbone, vous auriez eu un levier économique. Ou bien vous achetez des tonnes à 40 $ la tonne, ce qui fait 5 $ le baril, ou vous prenez les 100 millions de dollars nécessaires pour faire les pipelines, etc., et vous les utilisez pour mettre ces gaz en terre. Vous avez besoin qu'on vous pousse dans le dos pour faire cela.
    M. Cullen nous l'a fait comprendre, avec raison, tout à l'heure. Ce n'est pas seulement une question économique. Vous faites suffisamment de profits pour faire cela.
    Que doit faire le gouvernement pour vous inciter à faire cela?

[Traduction]

    Je pense que nous avons répondu à cette question plus tôt, à moins que je comprenne mal votre propos.
    Ce doit être le cas, car je n'ai pas encore obtenu de réponse.
    Je pense avoir dit, sauf erreur, que pour des mesures telles que la séquestration nous avons besoin d'une aide gouvernementale pour donner l'impulsion et développer la technologie, construire les systèmes de transport nécessaires et mettre en place quelques mécanismes encourageant les producteurs de pétrole conventionnel à utiliser la séquestration de carbone comme moyen d'accroître leur récupération de pétrole. Si cela était fait et se présentait comme un ensemble de mesures, alors il commencerait à devenir intéressant pour l'industrie de s'engager dans cette voie.
    Nous avons étudié cela. Ce n'est pas une idée nouvelle et nous n'attendons pas simplement que quelqu'un d'autre agisse à notre place. Nous l'étudions et nous y travaillons au niveau de l'Alberta Chamber of Resources mais il faudra un soutien des deux niveaux de gouvernement pour mettre les choses en train et que cela se fasse.
    Pourrais-je juste ajouter un mot? Il y a là une considération importante à prendre en ligne de compte. Une façon de réduire les émissions de CO2 produites par les sables bitumineux serait de vendre le bitume tel quel sans le valoriser. C'est au niveau de la valorisation que nous produisons la plus grande partie de notre CO2. Nous prenons du gaz naturel, nous fractionnons la molécule pour en extraire le carbone et nous utilisons l'hydrogène pour convertir le pétrole lourd en pétrole léger que nous vendons sur le marché. Nous ajoutons de la valeur en le faisant. C'est ainsi que nos installations de traitement produisent de la valeur ajoutée.
    Notre expansion, que vous avez vue hier, a exigé un investissement de 8,5 milliards de dollars, dont 1,5 milliard de dollars sont allés aux initiatives environnementales. L'une consistait à réduire nos niveaux de SO2. Personne n'a parlé du SO2 aujourd'hui, mais nous avons considérablement réduit la quantité dégagée. Nous avons accru notre production de pétrole brut de 100 000 barils par jour et nous avons réduit nos émissions de SO2, en termes absolus, de 15 tonnes par jour.
    Nous avons également amélioré le produit afin qu'il soit plus facile aux raffineries de respecter les spécifications californiennes pour le gazole. Les spécifications californiennes pour le gazole à faible teneur en soufre imposent aux raffineries d'acheter une meilleure qualité de pétrole brut. Nous avons amélioré le produit de Syncrude afin que les raffineries fabriquant du gazole californien y parviennent plus facilement. Mais ce faisant, nous produisons davantage de CO2.
    Je suppose que nous pourrions éviter de dégager du CO2 en ne cherchant pas à respecter cette contrainte ou en vendant un produit de moindre qualité. Nous avons adopté pour position que nous ne voulons pas exporter ces emplois aux États-Unis, mais c'est à toutes fins pratiques ce que nous ferions.
(1720)
    J'aimerais ajouter encore une chose si vous le permettez, monsieur.
    La raison pour laquelle nous coopérons avec le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral sur le réseau de captation et de séquestration du CO2, c'est que nous avons conscience que si nous faisions cela uniquement pour Suncor, le pipeline que je construirais ne répondrait pas aux besoins de ces deux messieurs ou de leurs compagnies. Cela pourrait nous donner un avantage concurrentiel, ou peut-être pas, tout dépend du point de vue où l'on se place.
    Cela représenterait certainement un coût accru, mais nous mettrions en place une solution qui ne serait pas la meilleure pour le pays ou pour la province, car je ne construirai pas de pipeline. Un pipeline ne nous rapporterait rien, il serait un coût supplémentaire pour nous. C'est pourquoi nous pensons important, selon la perspective de l'industrie, si nous allons nous lancer dans cette entreprise de manière responsable, de construire un pipeline et non cinq ou six. C'est l'une des raisons pour lesquelles il faut faire cela en coopération avec les gouvernements et le reste de l'industrie.

[Français]

    Vous nous dites que pour être responsables, vous pelletez le coût dans la cour du gouvernement. S'il vous le paie, vous allez le prendre, mais vous ne voulez pas diminuer vos profits. Et ce qui est incroyable, c'est que vous faites un produit supérieur, donc, vous le vendez plus cher, et vous ne voulez pas couper dans ce produit pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il me semble qu'il vous manque quelque chose. Vous n'êtes plus les investisseurs d'autrefois, qui étaient des gens responsables envers la société. Si le gouvernement le fait, ça va, mais si vous êtes obligés de le faire et de réduire un peu vos profits, vous refusez. C'est malheureux.

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr que c'était là une question, mais de toute façon le temps est écoulé. Je devrais peut-être vous donner le temps de réfuter, mais je ne suis pas sûr que ce soit nécessaire.
    Si vous pouviez être bref, monsieur Carter, merci.
    Je dirais que nous faisons preuve du sens des responsabilités. Les montants que l'industrie des sables bitumineux de l'Alberta verse au gouvernement de l'Alberta sous forme de redevances et les montants d'impôt et de cotisations sociales que nous versons aux deux niveaux de gouvernement... c'est faire preuve de responsabilité.

[Français]

    C'est une grande responsabilité pour vos enfants.

[Traduction]

    Je crois que c'est là une question philosophique que nous n'allons pas régler aujourd'hui, quelles que soient les réponses.
    Monsieur Allen.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de nous avoir accueillis hier. Il me semble que nous avons utilisé à peu près tous l es moyens de transport concevables pour visiter le site, sauf peut-être la bicyclette que nous l'avons vu chevaucher. C'était très intéressant et m'a beaucoup éclairé, car nous avions posé beaucoup de questions ces dernières semaines aux témoins. C'était réellement utile à voir. Je vous félicite du travail que vous faites là-bas.
    J'aimerais poser deux questions, si j'en ai le temps.
    Monsieur Clarke, premièrement, j'ai beaucoup appris là-bas et je vois que le rapport de l'Institut Polaris nous est présenté par vous et M. McCullum. Étiez-vous tous les deux là-haut pour mener cette étude, ou bien qui l'a réalisée?
    M. McCullum s'est rendu là-haut à de nombreuses reprises. J'y étais moi-même une partie du temps.
    D'accord.
    Je suis un peu troublé par certaines des statistiques que vous avez données au sujet de l'eau. Vous avez dit — et après ce que nous avons entendu hier je pensais que c'était clair, mais je suis de nouveau dérouté — qu'il fallait entre 4,5 et sept barils d'eau, mais hier on nous disait que c'était 2,5. Vous avez parlé ensuite de 66 p. 100 de la rivière Athabasca, et je suis sûr que ce n'est pas tout à fait ce que vous vouliez dire, parce qu'en réalité on nous a dit que la consommation était de 4 p. 100 du débit aux basses eaux — et je crois que c'était cela le chiffre. Tout cela me laisse un peu confus. Enfin, vous avez dit que les étangs de résidus étaient des lacs énormes. Eh bien, ce n'est pas réellement vrai car aujourd'hui on peut y circuler en voiture. Vous pourriez peut-être m'expliquer ces contradictions.
    Tout d'abord, au sujet de la rivière Athabasca, je n'ai pas dit que 66 p. 100 étaient consommés. J'ai dit que la politique gouvernementale — celle de l'Alberta — alloue jusqu'à 66 p. 100 du débit de la rivière Athabasca à l'exploitation des sables bitumineux. Je faisais une comparaison entre les 37 p. 100 de toutes les sources d'eau douce de l'Alberta qui sont allouées à l'exploitation du pétrole et du gaz en général. Je disais que la rivière Athabasca représente une énorme proportion de cette quantité; on peut y puiser cette proportion du débit. Cela ne signifie pas que toute cette eau est consommée aujourd'hui — bien sûr que non, c'est sur une longue période. Voilà donc la signification de ce chiffre.
    Pour ce qui est de la consommation d'eau par baril de pétrole, le Pembina Institute a calculé une moyenne de 4,5. D'autres instituts sont arrivés — ce sont des organes indépendants de l'industrie et indépendants du gouvernement — jusqu'à sept, c'est pourquoi nous donnons la fourchette entre 4,5 et sept.
    M. Carter dit qu'ils sont descendus à deux barils d'eau par baril de pétrole, un chiffre de cet ordre. Je suppose que c'est pour 2006.
(1725)
    C'est en 2005 et 2006. La réduction était en cours en 2004.
    Nos chiffres pour 2004 et 2005, toujours de sources indépendantes et toujours du Pembina Institute, indiquent que 6,2 barils d'eau étaient utilisés par Syncrude pour produire chaque baril de pétrole. Manifestement, il y a là quelques divergences d'opinion. Peut-être faudrait-il s'échanger les statistiques et indiquer d'où elles proviennent, etc.
    Veuillez me pardonner, quelle était déjà votre troisième question?
    C'était l'affirmation que les bassins de résidus constituent d'immenses lacs, alors que ce n'est pas vrai. Il se fait une énorme quantité de recyclage de l'eau — 18 fois. Une grande partie de cette eau est récupérée. Bien sûr, nous en avons vu beaucoup couler des étangs de résidus dans le bassin de décantation mais on peut aujourd'hui rouler sur ces étangs. Le seul cas dont on nous a parlé, dans le cadre de la remise en état des terres, est un lac artificiel qui aura une profondeur située entre cinq et 15 mètres ou quelque chose du genre. C'est la seule chose que j'ai vue qui ressemble à un lac, mais les étangs de résidus n'en étaient pas. J'ai un peu de mal à accepter que ce sont tous là des lacs, car ce n'est réellement pas le cas.
    Désolé. J'ai peut-être utilisé le mot « lac » de façon inappropriée. J'ai qualifié de lacs les étangs de résidus. Mais ce sont d'énormes entrepôts d'eaux contaminées qui doivent être maintenant épurés et ramenés à la vie, si c'est possible. On nous dit que de nouvelles technologies sont en train d'être mises au point pour cela. Je suis heureux d'entendre que des progrès ont été réalisés. J'étais là-haut en 2005 et en 2004. Peut-être de nouveaux progrès ont-ils été réalisés au cours des six ou huit derniers mois.
    D'accord.
    J'aurais encore beaucoup d'autres questions, mais je veux donner l'occasion à Brad d'en poser, car la fin de la séance est toute proche.
    Il va y avoir un vote et nous allons entendre la cloche dans une minute.
    Monsieur Trost, avez-vous une question rapide?
    L'aspect qui n'a pas réellement été abordé aujourd'hui, c'est le gros problème, là-haut, des ressources humaines, la nécessité d'attirer suffisamment de travailleurs. La description du problème dépend du camp philosophique dans lequel on se situe, tant à l'intérieur qu'en dehors de ce comité.
    Selon l'optique des compagnies, je serais très heureux de savoir quels programmes de ressources humaines sont le mieux parvenus à attirer des travailleurs possédant les qualifications voulues. Nous allons devoir recommander des mesures, sur le plan de l'immigration ou d'autres. Nous parlons de formation et d'immigration. S'il y a des programmes qui ont donné de bons résultats, j'aimerais les connaître, car nous allons recommander des changements afin de pallier la pénurie de main-d'oeuvre là-haut. Venant de Saskatoon, je sais qu'elle se propage à travers toutes les Prairies.
    Je vais tenter une réponse et d'autres voudront sans doute intervenir aussi.
    Nous voudrons certainement continuer certaines choses que nous faisons depuis une dizaine d'années, tel que les programmes d'apprentissage avec lesquels nous formons des apprentis. Nous avons eu beaucoup de succès avec le recrutement d'Autochtones. Vous qui êtes de Saskatoon, vous connaissez certainement le problème. La population autochtone va croissant en Alberta, en Saskatchewan et au Manitoba.
    Nous tous, dans cette industrie, avons pris toutes sortes de mesures pour recruter des Autochtones et leur offrir des emplois. Ils sont tous en train de suivre une formation aux métiers et ils montent dans le système. C'est le genre de chose qui restera utile. Tout ce que le gouvernement peut faire pour appuyer la formation professionnelle dans les collectivités autochtones sera primordial. Nous avons imposé en 1985 comme critères d'emploi à Syncrude l'équivalent de la 12e année et toutes les autres compagnies font aujourd'hui de même. Cela a contribué à rehausser le niveau d'éducation des Autochtones et les rend plus employables.
    Je suis désolé, mais pourriez-vous donner des réponses plus courtes et plus générales, car nous allons devoir partir voter.
    D'accord.
    Par ailleurs, l'immigration est très importante. Chez Syncrude, nous avons eu la chance de trouver presque toute la main-d'oeuvre dont nous avions besoin au Canada, mais avec l'expansion future de l'industrie, l'immigration deviendra un facteur de réussite crucial.
(1730)
     Y a-t-il des programmes particuliers qui ont bien marché et d'autres moins? Nous avons là les représentants de deux autres compagnies. Avez-vous d'autres remarques à nous faire aux fins des recommandations que nous allons formuler concernant les ressources humaines?
    M. Carter a couvert le sujet.
    Bien.
    Merci, monsieur Trost.
    Pourrais-je obtenir un éclaircissement? Vu les questions que M. Cullen a posées aux responsables et aux personnes que nous avons rencontrés au cours de la visite, deux choses me sont venues à l'esprit hier sur la question de l'eau. J'aimerais déterminer si j'ai raison ou tort concernant la contradiction entre certains chiffres anciens et d'autres récents.
    Il y a deux aspects. Vous avez parlé aujourd'hui du recyclage de l'eau. Vu certains chiffres donnés par l'Institut Pembina et des témoins récents, l'idée m'est venue qu'ils comptaient probablement la même eau deux fois pour calculer le nombre de barils d'eau par baril de pétrole, alors qu'il s'agit en fait d'eau recyclée. La même eau ressert 18 fois et les chiffres anciens la comptent 18 fois pour calculer la quantité d'eau que vous consommez. Mais c'est toute la même eau, qui est recyclée maintes et maintes fois.
    C'est une pratique plus répandue aujourd'hui car vous pouvez maintenant utiliser l'eau des étangs de résidus, car ils sont décantés, alors que pendant longtemps vous ne pouviez pas utiliser cette eau. Il faut attendre de nombreuses années avant que vous puissiez l'utiliser. Cela va changer considérablement la perspective car vous pouvez maintenant recycler cette eau et l'utiliser de nombreuses fois pour divers usages. Est-ce exact, ou bien ai-je mal saisi?
    Je ne sais pas trop comment Pembina en est arrivé à ses chiffres. Je ne peux que vous donner les chiffres tels que nous les avons mesurés chez Syncrude. Nous nous efforçons de réduire la consommation d'eau et, très franchement, il y a à cela une raison très simple. Cela coûte cher d'entreposer l'eau. Nous devons construire ces énormes bassins d'entreposage avec des barrages en terre aux normes strictes, et cela coûte de l'argent.
    C'est un peu comme la consommation d'énergie. Il est dans notre intérêt économique de réduire notre consommation. Je peux vous assurer que je connais les chiffres de Syncrude. Tout notre personnel les suit de près et nous les mesurons trimestriellement, et c'est juste un peu plus de deux barils par baril de pétrole brut synthétique produit, et c'est une baisse de 60 p. 100 par rapport au chiffre d'il y a cinq ans. Mais je ne sais pas comment Pembina a calculé les siens.
    Des témoins nous ont présenté ces chiffres à plusieurs reprises et la mise au point est donc utile et je vous remercie.
    Nous avons devancé la cloche aujourd'hui. Nous avons un vote à la Chambre. La cloche sonne maintenant.
    Je veux remercier tout le monde d'être venu et du temps que vous nous avez accordé, en vous préparant à la réunion et en répondant à nos questions. Je crois que cela a été très utile pour le comité, surtout après notre visite du site. Les questions commencent à devenir plus pertinentes et cela soumet les témoins à une plus grande pression. Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.
    Notre prochaine réunion sera jeudi. La séance est levée.