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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 février 2007

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

[Français]

    Je crois que nous avons le quorum.

[Traduction]

    Je déclare ouverte cette séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, conformément à la motion adoptée par le Comité.
    Dans le cadre de notre étude sur les droits de la personne en Chine, je voudrais inviter à notre table les témoins devant comparaître devant nous aujourd’hui: l’honorable Sergio Marchi, président du Conseil commercial Canada-Chine, et M. Paul Evans, coprésident-directeur général et président du comité exécutif de la Fondation Asie Pacifique du Canada.
    Je vous souhaite la bienvenue au comité, messieurs. Je crois que vous avez tous les deux de l’expérience comme témoins. En fait, au moins l’un d’entre vous a déjà été membre d’un comité parlementaire. Vous connaissez donc le fonctionnement des comités. Nous sommes très heureux de vous accueillir. Vous êtes sans doute au courant du contexte de notre étude, qui en est d’ailleurs à ses derniers stades.
    Vous disposez chacun d’une période pour présenter un exposé, après quoi nous passerons aux questions. Lequel d’entre vous veut commencer?
    Vous pouvez y aller, monsieur Evans.
    Je suis très heureux de cette occasion de comparaître devant le sous-comité ce matin.
    La Fondation Asie Pacifique du Canada a été créée par voie législative en 1984. Financée par le gouvernement fédéral, les provinces et le secteur privé, elle constitue un groupe de réflexion indépendant sur les relations entre le Canada et l’Asie. Elle a pour but de mieux faire connaître l’Asie chez nous et de renseigner les Canadiens qui doivent faire des choix à la fois pour réagir aux énormes changements qui se produisent de l’autre côté du Pacifique et pour les influencer.
    M. Marchi et moi sommes les derniers d’une longue liste de témoins qui ont défilé devant le sous-comité pendant les quatre derniers mois. Vous avez entendu de nombreux témoignages sur la situation des droits de la personne en Chine, sur certains cas consulaires ainsi que sur l’approche et les moyens mis en œuvre par le Canada pour protéger ses citoyens et promouvoir les droits de la personne et le gouvernement démocratique en Chine.
    Je vais concentrer mes observations sur le grand contexte politique et économique dans lequel se situe le dialogue bilatéral sur les droits de la personne. Je veux présenter deux arguments aujourd’hui. Le premier est le suivant : aussi importante qu’elle soit pour les Canadiens, la situation des droits de la personne en Chine n’est que l’une de plusieurs grandes questions qui se posent dans nos relations bilatérales. Mon second argument est qu’il est essentiel d’établir des relations politiques positives aux plus hauts niveaux avant de s’attaquer à n’importe laquelle de ces questions, qu’il s’agisse de droits de la personne, de commerce, d’échanges humains ou de la gestion d’une foule de problèmes mondiaux.
    De récents événements permettent de croire que les relations politiques entre le Canada et la Chine sont, contrairement à l’habitude, assez instables. Les réactions publiques indiquent que les Canadiens ne sont pas tous du même avis quant à la façon de gérer les relations avec la Chine. Toutefois, nous ne sommes pas seuls dans cette situation. La Chine pose d’énormes défis pour chacun des pays de l’Asie et du reste du monde.
    Le débat que nous avons actuellement au Canada est très particulier parce qu’il n’est pas centré sur l’évolution de l’économie mondiale, les irritants commerciaux, les pertes d’emplois, les points chauds du monde ou les risques stratégiques qu’occasionne la montée de la Chine. En effet, le débat canadien tourne autour des conditions politiques qui règnent à l’intérieur de la Chine et, dans le contexte actuel, autour d’un cas consulaire particulier.
    Les droits de la personne sont importants pour les Canadiens. D’après une enquête que nous avons réalisée l’année dernière de concert avec le Globe and Mail, 63 p. 100 des Canadiens croient que la situation des droits de la personne en Chine est meilleure aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a 10 ans. En même temps, 72 p. 100 conviennent que la promotion de la démocratie et des droits de la personne en Asie devrait constituer une priorité pour le gouvernement du Canada.
    Peu de Canadiens doutent que la Chine soit devenue une force économique et politique avec laquelle il faut compter. Elle se classe maintenant en deuxième place parmi les partenaires commerciaux les plus importants du Canada, des États-Unis et du Mexique. Ses exportations aux États-Unis dépassent aujourd’hui celles du Canada. D’après nos études, la Chine deviendra probablement le principal partenaire commercial de Washington dans les cinq prochaines années.
    La Chine n’est pas seulement l’atelier de fabrication du monde. Elle se situe aussi au centre des chaînes régionales et mondiales d’approvisionnement qui sont en train de transformer l’économie mondiale. Les multinationales chinoises sont à la recherche de biens à acheter partout dans le monde, et pas seulement dans le secteur des ressources. La Chine n’est plus quelque part là-bas, elle est déjà ici, à la fine pointe de la mondialisation, avec une présence économique quasi quotidienne pour la plupart des Canadiens. Elle a des incidences sur ce que nous produisons et consommons, sur la nature de nos emplois et sur notre rôle dans le monde.
    La route menant à la solution des grands problèmes du monde – changements climatiques, réforme des Nations Unies, sécurité humaine au Darfour, arsenalisation de l’espace, lutte contre l’insurrection dans le monde – passe encore par Washington, mais elle passe aussi par Beijing.
    Le gouvernement du Canada semble avoir emprunté une voie quelque peu différente de celle de ses prédécesseurs libéraux et conservateurs dans sa réaction à la montée de la Chine. Sa politique étrangère fondée sur des principes met en évidence la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit. Le gouvernement n’a publié aucune grande déclaration sur la politique à l’égard de la Chine, mais il transmet, selon certains, un message « de froideur politique et de chaleur économique », expression qui avait été utilisée pour décrire les relations sino-japonaises du temps du premier ministre Koizumi.
(1115)
    Les propos tenus en public par notre premier ministre portaient sur les droits de la personne et les problèmes consulaires. Il a déjà dit qu’il ne sacrifierait pas les droits de la personne sur l’autel du tout-puissant dollar. En même temps, différents ministres s’occupent de la gestion des éléments fonctionnels de nos relations avec la Chine.
    Cette approche n’est pas très appréciée à Beijing. Le ministre assistant des Affaires étrangères de la Chine a déclaré, début février, que les relations économiques vont de pair avec les relations politiques.
    Certains craignent qu’avec sa formule de froideur politique et de chaleur économique, le Canada ne soit en train de jouer au plus brave contre un bulldozer! Pour eux, il sera impossible de régler des cas consulaires compliqués et de faire progresser le dossier des droits de la personne en l’absence de bonnes relations politiques aux niveaux les plus élevés. Les tenants de ce point de vue notent que le nouveau gouvernement a commencé par amadouer Washington avant de chercher à discuter d’affaires telles que le cas Arar et qu’en dépit de constantes divergences avec la Chine, le nouveau premier ministre du Japon s’est vraiment efforcé d’améliorer les relations politiques avec Beijing pour les amener à un niveau équivalent à celui des relations économiques.
    Beaucoup de gens craignent que la froideur envers les dirigeants chinois n’ait des conséquences économiques. Nous devons être très prudents pour évaluer une telle assertion. La plupart des relations économiques avec la Chine sont de nature commerciale et ne souffrent donc pas directement des aléas de la politique. Toutefois, on peut sûrement craindre que certaines transactions commerciales de valeur élevée dépendent d’interventions gouvernementales de haut niveau, par exemple dans le cas de grands projets d’infrastructure fondés sur des marchés publics ou d’opérations touchant l’aviation et les services financiers, qui sont soumis à une réglementation gouvernementale.
    Le risque économique que nous courons à long terme est de voir entraver les efforts destinés à former de nouveaux partenariats, à développer la porte d’entrée du Pacifique et à exploiter des perspectives de recherches conjointes et de développement. Le risque diplomatique immédiat, c’est qu’en l’absence de relations globales, nous perdions du terrain auprès de Beijing sur une multitude de sujets de portée mondiale allant de Kyoto au Darfour.
    Il serait peu sage de surestimer l’influence que le Canada peut exercer sur les dirigeants chinois dans n’importe lequel de ces domaines, mais il ne faudrait pas non plus penser que la froideur politique a des chances de renforcer notre influence. Nous ne devons pas perdre de vue le risque humain de la situation : nous avons affaire à une longue liste de cas consulaires et connexes comportant déjà de nombreux irritants pour les deux parties, sans compter un flux croissant de migrants transnationaux qui complique le tableau. D’après les estimations de ma fondation, il y aurait actuellement plus de 300 000 titulaires de passeports canadiens dans la région de la Chine élargie.
    Pour la première fois depuis l’établissement de relations diplomatiques en 1970, nous sommes revenus à un débat national portant sur les aspects fondamentaux de nos relations. Il n’est pas certain que le partenariat stratégique annoncé en septembre 2005, au cours de la visite au Canada du président Hu Jintao, soit encore au programme. Il est en fait difficile de dire si nous commençons un nouveau chapitre ou un nouveau volume de nos relations avec la Chine.
    Au cours des trois dernières décennies, le gouvernement du Canada et les intervenants de la société civile ont développé toute une série d’instruments destinés à surveiller et à promouvoir les droits de la personne en Chine. Votre sous-comité a reçu des propositions concernant plusieurs nouvelles initiatives.
    Permettez-moi, pour conclure, d’ajouter une proposition de plus à votre intention. Elle concerne la responsabilité sociale des entreprises au-delà des frontières de la Chine. À part leurs activités intérieures, les Chinois jouent un grand rôle comme investisseurs et promoteurs un peu partout dans le monde, et surtout en Afrique et en Amérique latine. Les codes et les pratiques régissant la conduite des affaires, les relations de travail ainsi que les dispositions de transparence et de responsabilité des sociétés chinoises ont d’importantes incidences sur des dizaines de millions de personnes en dehors de la Chine, de même que sur la réputation et l’influence internationales de ce pays. C’est un domaine inexploré qui fait partie des relations avec une Chine mondialisée et une question d’intérêt commun pour le Canada et la Chine, dans laquelle notre gouvernement, nos ONG et notre secteur des affaires peuvent travailler ensemble pour apporter du leadership et établir de nouveaux liens avec des homologues de la Chine mondialisée.
    Je vous remercie de m’avoir donné la possibilité de comparaître devant le comité aujourd’hui.
(1120)
    Merci, monsieur Evans, pour votre effort. Vous êtes venu de Vancouver, je crois.
    C’est toujours un plaisir.
    Je voudrais juste vous demander un éclaircissement. Vous estimez qu’il y a 300 000 titulaires de passeports canadiens dans la Chine élargie. Quelle est votre définition de la Chine élargie?
    Elle comprendrait la République populaire de Chine, Hong Kong, Taïwan et Macao. Certains y font également figurer des zones voisines, mais c’est la région de base.
    Je vous remercie.
    À vous, monsieur Marchi.
    Merci, monsieur le président et membres du comité.
    Je voudrais d’abord vous remercier de l’invitation qui nous a été faite de participer à vos délibérations de ce matin. Le Conseil commercial Canada-Chine ou CCCC est ravi de l’occasion qui lui est offerte.
    Comme vous le savez sans doute, le CCCC est une organisation commerciale. Depuis près de 30 ans, nous servons les intérêts commerciaux du Canada en Chine et nous travaillons pour attirer les investissements chinois au Canada. C’est pourquoi nous reconnaissons d’emblée ne pas posséder une expertise particulière en matière de droits de la personne. Cependant, la riche expérience du CCCC en Chine nous donne une compréhension très nette de nombreux enjeux et des multiples particularités de la société chinoise. C’est précisément cette perspective que j’ai le plaisir de vous exposer ce matin.
    Le CCCC croit que la politique étrangère du Canada à l’égard de la Chine doit refléter la totalité de nos valeurs et de nos intérêts. Le commerce et l’investissement sont indiscutablement des éléments importants des relations bilatérales, au même titre que les droits de la personne.
    Personne ne préconise que le Canada entretienne une relation strictement commerciale avec la Chine. Cependant, en mettant l’accent uniquement sur les droits de la personne, notre pays risque de ne jamais parvenir à bâtir le genre de rapports dans lequel des questions difficiles peuvent être soulevées, discutées et réglées dans une atmosphère de respect mutuel et d’une manière susceptible de déboucher sur des changements véritables.
    Il se peut que les Chinois accordent aux relations plus d'importance que d’autres pays, mais dans la plupart des cultures, des relations ouvertes et empreintes de confiance sont essentielles pour que les parties en présence puissent atteindre leurs objectifs.
    Notre politique étrangère se compose essentiellement de deux ingrédients inextricablement liés, des valeurs et des intérêts. Au fil des ans, les premiers ministres, ministres et hauts fonctionnaires canadiens n’ont pas hésité à discuter avec les dirigeants chinois de l’importance que les Canadiens accordent au respect des droits de la personne en Chine et ailleurs dans le monde.
    On ne peut défendre ses intérêts et ses valeurs au détriment les uns des autres, ni faire des uns la condition préalable aux autres. Notre expérience nous a appris qu’on ne peut progresser sur les deux fronts qu’en faisant des efforts sur les deux fronts. Par ailleurs, le Canada ne fait pas du respect des droits de la personne une condition préalable dans ses rapports avec tous les autres pays du monde.
    Il ne fait aucun doute que les efforts déployés pour régler des cas consulaires en suspens nuisent aux relations bilatérales. Naturellement, le CCCC s’attend que la Chine, comme tous les autres pays, reconnaisse et respecte les droits des citoyens canadiens à l’étranger. L’élément clé de ce dossier est que la Chine ne reconnaît pas la double citoyenneté et refuse dans beaucoup de cas d’accorder un droit d’accès aux agents consulaires canadiens. Cette situation demeurera une source de désaccord entre les deux pays tant qu’on n’aura pas trouvé un moyen de la régler.
    Ces cas consulaires peuvent mettre en cause les droits de la personne, mais nous comprenons bien que le sous-comité cherche principalement à savoir comment évolue le respect des droits de la personne dans une société chinoise en changement continuel.
    Les Canadiens peuvent difficilement imaginer l’ampleur des changements sociaux qui se produisent en Chine. Chaque année, quelque 60 millions de Chinois – l’équivalent de deux fois la population du Canada – connaissent des changements importants : environ 30 millions s’ajoutent à la classe moyenne en pleine expansion et quelque 30 millions d’autres quittent les campagnes pour chercher une vie meilleure dans les grandes villes.
    Grâce à la croissance économique que la Chine connaît depuis 1978, des centaines de millions de personnes se sont élevées au-dessus du seuil de pauvreté défini par la Banque mondiale. En fait, les dirigeants chinois s’efforcent d’élaborer les politiques sociales nécessaires pour avoir une société stable. Les autorités consacrent beaucoup de temps à étudier l’expérience étrangère, aussi bien chez nous que dans d’autres pays, en vue de l’appliquer en Chine.
    Les dirigeants chinois sont très disposés à écouter les suggestions de leurs amis et alliés. Toutefois, les sermons et les remontrances d’étrangers, faites en l’absence d’une véritable compréhension des réalités chinoises, irritent de plus en plus la population en Chine, comme dans bien d’autres pays d’ailleurs. Même en Occident, les sermons sont délicats, qu’ils soient faits par des candidats à la présidence de la République française ou par des ambassadeurs américains à Ottawa.
(1125)
    Depuis leur arrivée au pouvoir en 2003, les dirigeants chinois se sont donné comme tâche principale de combler l’écart entre régions rurales et urbaines ainsi qu’entre riches et pauvres. Maintenant que la société chinoise a réussi à créer une richesse économique colossale, l’un de ses défis, pour créer une société harmonieuse, consistera à trouver le moyen de mieux répartir la richesse.
    Le plan quinquennal 2006-2011 met très précisément l’accent sur la qualité de la croissance. Il insiste notamment sur la nécessité d’élaborer des normes de protection de l’environnement et de les appliquer, de mettre en place des filets de protection sociale, d’améliorer l’enseignement, de réformer la santé et de prendre des mesures pour améliorer les conditions des travailleurs migrants, entre autres groupes. Ces plans d’action ont généralement été bien conçus dans le passé et ont donné des résultats concrets. À mon avis, cela ouvre clairement la porte à des discussions significatives sur les valeurs, domaine dans lequel l’expérience et les pratiques exemplaires du Canada pourraient peut-être influer sur la politique et la pensée chinoise.
    Les pourparlers au niveau des fonctionnaires jouent bien sûr un grand rôle pour renforcer l’influence, mais des programmes d’aide au développement sous l’égide de l’ACDI, des programmes d’échanges universitaires et de formation, des fondations, des ONG et des entreprises ont également le pouvoir de faire avancer les choses. Cependant, ces interactions ne peuvent porter fruit en l’absence de rapports forts aux plus hauts échelons de la hiérarchie politique. Si nous ne parvenons pas à établir une telle relation, nous regarderons simplement passer le train et nous n’aurons pas la possibilité de faire part de notre expérience et, partant, d’agir sur le changement social en Chine.
    Par ailleurs, les sociétés canadiennes déjà actives en Chine continuent de contribuer largement à l’exportation de leurs valeurs nationales. Les sociétés étrangères présentes en Chine ont beaucoup contribué aux progrès économiques du pays, à la hausse marquée du niveau de vie et à l’adoption de pratiques de travail avancées. Petit à petit, ces pratiques se répandent parmi les concurrents chinois de ces entreprises, lorsqu’ils cherchent à attirer certains de leurs employés.
    La Chine a relevé le défi d'une participation active au système économique et politique mondial. L’acceptation d’un calendrier accéléré d’adhésion à l’OMC, imposant de lourdes contraintes aux sociétés chinoises, prouve la détermination de la Chine à devenir un acteur mondial à part entière.
    La Corée du Nord, par contre, a choisi de s’isoler. Dans l’état actuel des choses, la participation de la Chine au système multilatéral et régional a joué un rôle central dans les tentatives de règlement de la situation en Corée du Nord. C’est pourquoi nous devons encourager la Chine à prendre plus de responsabilités, et non moins, aussi bien dans la région que dans le monde.
    Il ne fait aucun doute que le changement politique est beaucoup moins rapide que le développement économique. Nous devons néanmoins reconnaître que des progrès considérables ont été faits et que l’engagement général des pays étrangers, dont le Canada, a contribué d’une façon positive et constructive à cette amélioration.
    Il reste que la compréhension des droits de la personne évolue en Chine. Par exemple, les Chinois ont demandé conseil à des assureurs et des gestionnaires de grands régimes de pension du Canada au sujet de divers aspects de l’établissement d’un régime public de pensions de retraite pour les citoyens chinois. De plus, le juge chinois qui a récemment rendu une décision clé dans une affaire de propriété intellectuelle avait fait ses études à l’Université de la Colombie-Britannique, dans le cadre du programme de la Fondation pour l’Asie.
    Les progrès constatés en Chine n’ont peut-être pas été aussi rapides que nous l’aurions souhaité, mais nous croyons qu’une politique d’engagement continu est essentielle. L’importance que nous accordons aux droits de la personne est en partie fonction de l’ampleur du développement économique. Ainsi, le Canada n’a pas eu une Déclaration des droits avant 1960 et c’est son inefficacité perçue qui a conduit à l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés en 1982. Par ailleurs, les excuses officielles récemment présentées par le gouvernement du Canada nous ont rappelé qu’une taxe d’entrée était imposée il n’y a pas si longtemps aux Chinois qui voulaient s’établir au Canada.
    Par conséquent, le Canada évolue, et la Chine aussi. Depuis l’ouverture de la Chine, en 1979, son gouvernement a adopté plus de 300 lois et règlements visant à ériger un système juridique, largement influencé par les modèles d’autres pays. En 1982, une Constitution a été rédigée et adoptée, puis modifiée en 1994 pour protéger la propriété privée.
(1130)
    Il faut également se dire qu’en Chine comme au Canada, une véritable autocritique en matière de droits de la personne pourrait conduire à un dialogue productif. Dans l’affaire Maher Arar, le gouvernement du Canada a fait preuve d’une grande ouverture en enquêtant sur le problème. Au Canada, les cas de violation des droits de la personne font couramment l’objet de processus publics établis conformément au principe de la primauté du droit. C’est un modèle à encourager auprès des Chinois.
    Pour conclure, monsieur le président, je dirais que le Canada et la Chine ont fait des progrès. De toute évidence, étant plus avancés, nous pouvons offrir notre expérience dans la mesure où elle peut aider les Chinois à s’attaquer aux problèmes découlant de changements radicaux des conditions sociales et économiques.
    Nous devons donc nous engager auprès de la Chine pour encourager et faciliter le maintien du rythme des réformes. Nous devons comprendre qu’un dialogue efficace et constructif sur quelque sujet que ce soit doit être fondé sur la confiance et le respect mutuel. À cet égard, les récentes visites en Chine des ministres canadiens des Finances, du Commerce international, des Ressources naturelles et de l’Agriculture ont été des plus bénéfiques, tout comme le travail soutenu de l’Association législative Canada-Chine.
    Faisons donc du travail constructif auprès de la Chine en matière de droits de la personne. En même temps, mettons en place un cadre complet et équilibré pour nos discussions bilatérales et multilatérales avec elle, car la défense de nos valeurs sans la promotion de nos intérêts nous expose à la perte des deux.
    Je vous remercie.
    Monsieur le président, nous avons joint à notre mémoire, qui est sensiblement plus long que cet exposé, une série de recommandations qui découlent des arguments présentés. Faute de temps, je m’abstiendrai de les lire, mais vous les trouverez dans notre mémoire.
    Merci beaucoup, monsieur Marchi.
    Monsieur Cotler.
    Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux.
    Vous nous avez présenté des exposés réfléchis qui nous permettront d’aller directement au cœur du sujet.
    Je vais récapituler très brièvement ce que vous avez dit. Vous avez mentionné la position caractérisée par la froideur politique et la chaleur économique du gouvernement du Canada, vous avez rappelé la déclaration du premier ministre disant qu'il ne sacrifierait pas les droits de la personne sur l’autel du tout-puissant dollar et vous avez mentionné que sans relations politiques, nous n’aurions aucune influence sur toute une gamme de questions qui se poseront tandis que la Chine renforcera sa position économique et politique dans le monde.
    Vous savez, je crois, que des témoins nous ont dit que la promotion des droits de la personne n’aurait pas de répercussions négatives sur les intérêts commerciaux du Canada. Je voudrais vous demander si vous appuyez ce point de vue. Quel rapport y a-t-il entre la promotion des droits de la personne dans le cadre de politiques, de programmes, de déclarations et de mesures prises, d’une part, et nos intérêts commerciaux, de l’autre? Connaissez-vous des cas précis dans lesquels nos intérêts ont été touchés?
    Avez-vous des suggestions à nous faire, dans ce contexte, pour que les deux aillent de pair? J’aimerais bien aussi que vous nous parliez du dialogue bilatéral Canada-Chine et de son efficacité.
    Mes questions s’adressent à l’un ou l’autre des témoins, ou aux deux.
(1135)
    Je vais peut-être commencer par dire que l’idée centrale de mon exposé est que nous pouvons et devons aborder avec la Chine toute une gamme de questions liées aux droits de la personne, tout un éventail de questions économiques et aussi toute une série de questions mondiales. Nous n’en sommes pas encore au point où nous avons avec la Chine des relations politiques d’un niveau assez élevé pour nous permettre de traiter de ces questions d’une façon complète ou équilibrée. Tant que nous n’aurons pas ces relations politiques de haut niveau, nos interventions relatives à des cas individuels et à la promotion de la bonne gouvernance et de la démocratie en Chine non seulement resteront sans effet, mais créeront de la confusion et de l’hostilité.
    Prenons un peu de recul. Pendant une trentaine d’années, il y a eu chez nous un consensus sur la façon d’équilibrer ces multiples préoccupations. Ce consensus s’est formé avant même que la Chine ne prenne beaucoup d’importance pour nous. Nous en sommes au point où ce consensus est réexaminé, ce qui est très normal et très sain lorsqu’un nouveau gouvernement prend le pouvoir. Pour le moment, je crois que nous n’avons pas vraiment décidé de ce que nous aimerions faire en matière de promotion des droits de la personne.
    Jusqu’ici, comme vous l’avez noté, monsieur Cotler, il y a eu des compromis. Y a-t-il des cas particuliers où la défense des droits de la personne ou d’affaires consulaires nous a nui sur le plan économique? Je ne le sais pas. Il est toujours difficile de déterminer si des mesures prises par l’autre partie constituent ou non des représailles. Pour l’avenir, je pense qu’il est essentiel pour nous d’avoir un moyen de parler aux Chinois pour régler ces questions tout en maintenant les compromis au minimum.
    J’ai remarqué, à l’examen des témoignages reçus par le sous-comité pendant ses quatre mois de délibérations, que les témoins s’entendaient presque parfaitement sur ce que nous devrions faire. Certains préfèrent aller un peu plus loin que d’autres, mais le consensus atteint probablement 90 p. 100. Toutefois, nous ne pouvons pas perdre de vue qu’avant de faire la promotion des droits de la personne, nous devons établir des relations politiques pour que nos interventions soient efficaces. Comme M. Marchi l’a signalé, il y a des leçons à tirer de la façon dont le Canada traite avec d’autres pays, y compris les États-Unis, en cas de désaccord sur des questions bilatérales difficiles, des affaires mettant en cause les droits de la personne et des cas consulaires. La nécessité d’avoir d’abord des relations cordiales avec Washington est assez évidente.
    Monsieur Cotler, il est extrêmement difficile de déterminer ce qui représente des représailles ou des conséquences de désaccords avec les Chinois. Nous avons eu de nombreux désaccords avec Beijing dans les 35 dernières années. J’ai l’impression que nous ne pourrons pas trouver des mesures de représailles à proprement parler. Cependant, s’il y a refroidissement des rapports entre les deux pays, nous prendrons encore plus de retard dans nos contacts avec la Chine. Cela ne se répercutera pas sur des marchés particuliers, car nos relations avec la Chine vont bien au-delà de marchés particuliers. Il s’agit plutôt de notre structure et de la nature de la restructuration industrielle au Canada.
    Je ne peux pas vous donner d’exemples précis pour le moment. Nous ne les connaissons pas. Presque tous les pays du monde cherchent à établir des relations politiques avec la Chine tout en s’occupant d’une foule de questions économiques et autres. Le bilan n’est pas encore clair, mais j’ai bien l’impression que c’est une condition nécessaire.
(1140)
    Je suis d’accord sur la plupart des points que Paul a abordés.
    Je veux insister sur certaines choses. Premièrement, nous pouvons et devons chercher à avoir des relations cordiales sur le double plan politique et commercial. Je crois que c’est tout à fait possible. Cela devrait être notre but. Ce serait conforme à la politique étrangère traditionnelle envers la Chine et de nombreux autres pays. La politique, les relations commerciales, les droits de la personne et les partenariats multilatéraux et mondiaux, tout cela est en jeu. C’est une question d’engagement. Il faut commencer par établir des relations, des liens pouvant amener la bureaucratie, surtout du côté chinois, à fonctionner d’une manière positive.
    Je crois encore que le marché joue lui-même un rôle déterminant dans la façon dont les affaires sont traitées. Dans des pays comme la Chine, l’État joue encore un rôle de premier plan, surtout dans les secteurs et les domaines dont Paul a parlé dans son exposé préliminaire. Lorsque d’importants marchés publics sont en jeu, ce sont les gouvernements qui ont le dernier mot.
    De plus, nous devons faire face à plus plutôt qu’à moins de concurrence. Encore une fois, le monde entier s’affronte en Chine. Ce n’est pas la même chose que dans les années 1970 lorsque nous avons été le premier pays occidental à établir des relations diplomatiques avec la Chine. C’est le monde entier qui cherche maintenant à établir des relations politiques et commerciales avec Beijing.
    Nous avons eu des exemples dans le passé. Même s’il est difficile de mesurer les conséquences, on peut remarquer que dans les années 1970, par exemple, les Français ont vendu des avions Mirage à Taïwan. Les réactions ne se sont pas fait attendre : des consulats français ont été fermés, des contrats ont été annulés. Selon certains, cela aurait également mis fin aux démarches visant à vendre un réacteur nucléaire à la Chine. Ce contrat a été finalement décroché par Énergie atomique du Canada. Ce n’est que lorsque les Français ont accepté de signer une interdiction des ventes d’armes à Taïwan que leurs relations commerciales avec la Chine ont repris.
    Tout cela est cependant très difficile à mesurer. Si quelqu’un doit payer le prix, comment déterminer si c’est la société A, B ou C qui paie pour cette raison précise? Comme n’importe quel autre pays, la Chine ne le dira pas. Si vous parlez aux gens d’affaires canadiens qui se trouvent sur place, vous constaterez qu’ils s’inquiètent beaucoup des relations politiques et veulent s’assurer qu’elles créent un climat positif. Nous ne devrions pas essayer de voir si des mesures concrètes seront prises contre des sociétés canadiennes, car ce sont des emplois et des investissements canadiens qui sont en jeu.
    Le dernier point sur lequel je voudrais attirer votre attention, monsieur le président, c’est que de mauvaises relations politiques ont plus que des conséquences commerciales. J’estime que nous devrions nous poser la question suivante : Comment de mauvaises relations politiques peuvent-elles améliorer la situation des droits de la personne? Pour moi et pour le CCCC, si on n’a pas établi des rapports permettant de discuter de ces questions difficiles, si les Chinois ont l’impression que nous sommes en train de les sermonner, comment pouvons-nous espérer faire avancer la cause des droits de la personne? Les conséquences dépassent donc les considérations commerciales. L’absence de progrès dans le dossier des droits de la personne a aussi des conséquences. C’est la raison pour laquelle nous devrions essayer d’avancer et d’obtenir des résultats sur les deux fronts.
    Monsieur Cotler, nous sommes déjà en retard.
    À vous, madame St-Hilaire.

[Français]

    Nous sommes certainement très heureux de vous entendre ce matin. Vous me permettrez de poser des questions qui vont faire référence aux témoignages qu'on a entendus jusqu'à maintenant. En effet, je pense que vous êtes en désaccord... En tout cas, ce que vous dites est très loin de ce qu'on a entendu, surtout en ce qui a trait aux ONG et à différentes organisations.
    Ce que je comprends ce matin, c'est que vous dites, au fond, essentiellement la même chose tous les deux: vous êtes un peu choqués de la déclaration du premier ministre à l'effet qu'il fallait régler la question des droits de la personne en Chine. Je comprends bien que vous prônez tous les deux davantage le statu quo qui existe depuis 30 ans. On fait des échanges économiques, on parle de temps en temps des droits de la personne pour que cela paraisse bien sur le plan médiatique, mais concrètement, en réalité, ce qu'on veut, ce sont des relations économiques, c'est faire des affaires avec la Chine. Je comprends bien pourquoi.
    Cela m'amène à ma question.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet, justement. Vous parlez d'équilibre, monsieur Marchi. Comment pouvez-vous expliquer que, finalement, les droits de la personne, c'est important, mais pas plus que les échanges économiques, pas plus que les affaires, que les relations d'affaires qu'on a avec la Chine? C'est ce que je comprends. Il ne faut pas négliger les droits de la personne, mais par contre, les relations politiques sont plus importantes. C'est bien ce que vous dites?
(1145)

[Traduction]

    Vous avez dit, dans la première partie de votre question, qu’on parle de temps en temps des droits de la personne pour que cela paraisse bien sur le plan médiatique, mais que le Canada s’intéresse principalement aux relations économiques avec la Chine. Permettez-moi de dire, avec tout le respect que je vous dois, que je ne suis pas d’accord avec vous. Au CCCC, nous n’avons jamais demandé au gouvernement de cesser, en Chine ou ailleurs, de défendre ses valeurs en matière de droits de la personne, de démocratie et de liberté de religion. La question est de savoir de quelle façon procéder. Comment faire pour obtenir des résultats? Quels instruments bilatéraux avons-nous mis en place? Pouvons-nous concevoir de meilleurs instruments? Nos anciens instruments sont-ils devenus inefficaces? Si c’est le cas, par quoi allons-nous les remplacer?
    Par conséquent, nous nous attendons à ce que le gouvernement agisse en matière de droits de la personne auprès de la Chine. Les gouvernements libéraux et conservateurs précédents l’ont fait. Ce n’est donc pas une question de parti. Il s’agit plutôt d’un enjeu bilatéral et mondial. Nous croyons cependant que le fait de parler en public des droits de la personne en l’absence de relations solides n'est pas nécessairement la bonne façon d’améliorer la situation des droits de la personne, sans parler des conséquences sur les intérêts commerciaux en jeu.
    À titre de ministre du Commerce, je suis au courant de ce qui s’est passé au cours des réunions que notre premier ministre d’alors avait tenues avec le président ou le premier ministre de la Chine. Je peux vous affirmer que toutes les questions étaient abordées : politiques, économiques, mondiales, Nations Unies, OMC et même les questions difficiles touchant des cas consulaires et les droits de la personne. En ma présence, le premier ministre d’alors n’a pas parlé à ses interlocuteurs chinois en code ou à mots couverts. Il leur a parlé très ouvertement en leur disant : « Il y a des cas sur lesquels nous avons de très fortes divergences de vues. Nous aimerions que vous les examiniez. Nous nous attendons à ce que vous le fassiez. » L’interlocuteur chinois – c’était le président ou le premier ministre – n’a pas fait une attaque parce que notre premier ministre lui a parlé avec franchise. En fait, il s’attendait à ce qu’un pays démocratique comme le nôtre soulève des questions de ce genre. Cela s’est fait cependant dans le contexte de relations cordiales, caractérisées par la maturité, dans un contexte où on pouvait civilement convenir qu’on n’était pas d’accord.
    Nous acceptons les désaccords dans nos propres familles. Si je m’en souviens encore, nous l’avons fait de temps en temps dans nos propres caucus. Il est parfois très sain de tout sortir au grand air. À ce stade de la réunion, le président ou le premier ministre de la Chine se tournait vers son ministre des Affaires étrangères et lui disait : « Monsieur le ministre, j’aimerais que vous examiniez les trois cas mentionnés par le premier ministre. » Voilà ce qu’il fallait pour débloquer certaines affaires.
    Par conséquent, oui, nous devons défendre la cause des droits de la personne en Chine et ailleurs. Il faut cependant le faire d’une manière civile, qui témoigne de notre respect pour nos interlocuteurs chinois ou autres. Si vous témoignez du respect, il est probable qu’on vous en témoignera aussi. Il est alors possible de faire avancer les dossiers. Je ne tiens pas à être très satisfait de moi-même parce que j’ai sermonné les Chinois sur une affaire de droits de la personne, si je dois me rendre compte le lendemain que mon geste a eu pour effet d’aggraver la situation au lieu de l’améliorer.
    La question est donc de savoir de quelle façon obtenir les meilleurs résultats. C’est là notre but. Nous ne défendons pas le principe des affaires à tout prix. Ce n’est pas du tout le cas parce que ce n’est pas ainsi que nous vivons au Canada. Nous devons bien sûr chercher à exporter nos approches et nos valeurs, comme nous l’avons fait, je crois, partout dans le monde.
(1150)

[Français]

    Madame St-Hilaire, il vous reste deux minutes.
    Sans vouloir vous mettre dans l'embarras, jugez-vous que c'était une erreur de la part du premier ministre que de jeter ce blâme sur les autorités chinoises? Considérez-vous que c'était une erreur? Dans le fond, ce que je comprends, c'est qu'il y a eu un bris de tradition: dans le passé, on dénonçait ce qui se passait en Chine mais de manière respectueuse, polie. Ce que vous constatez, au fond, c'est qu'il y a eu un changement sur le plan de la politique internationale. Je vous demande votre avis, sans vouloir vous mettre dans l'embarras.

[Traduction]

    Non, non, vous ne m’embarrassez pas. De mon côté, je ne veux embarrasser personne non plus.
    Je ne dirais pas que c’était une erreur. Je ne crois pas qu’un premier ministre fasse des erreurs de ce genre en politique étrangère. C’est évidemment une question qui tient beaucoup à cœur à M. Harper. Il est clair que, pour lui, c’est un aspect fondamental de nos relations. Je l’accepte volontiers. Je ne reprocherais certainement pas à M. Harper son grand attachement au respect des droits de la personne.
    Je suis en même temps persuadé que d’anciens premiers ministres étaient tout aussi attachés à ces valeurs fondamentales. Cela revient donc à une question de jugement, de style, de rapports établis. On se demande comment promouvoir ces valeurs et défendre cette cause. M. Harper est libre de choisir le style et l’approche qui lui conviennent le mieux.
    Au CCCC, nous ne voyons aucun inconvénient à l’attachement passionné de M. Harper au respect des droits individuels des Canadiens en Chine ni aux efforts qu’il déploie pour influencer la politique et l'attitude des Chinois envers leurs propres gens. Nous croyons cependant que, pour réussir et faire avancer le dossier, on a besoin d’une approche plus complète et plus équilibrée, d’une approche qui soit fondée sur de solides relations.
    Même si cela a été bref, nous avons été heureux que M. Harper rencontre son homologue chinois au Vietnam. On peut au moins dire qu’ils se sont vus face à face après leur très brève rencontre à la réunion du G7 à Saint-Pétersbourg. J’espère qu’à la suite des dernières visites ministérielles, le premier ministre Harper aura bientôt l’occasion de consolider les rapports établis, non dans un pays tiers, mais plutôt au Canada ou en Chine. Nous sommes convaincus que si cela se produit, nous aurons de meilleures chances de voir progresser les questions qui lui tiennent tant à cœur.
    Merci.
    Monsieur Sorenson.
    Encore une fois, merci d’être venus aujourd’hui.
    Comme vous le savez, nous sommes ici au sous-comité des droits de la personne, qui examine actuellement un certain nombre de pays. Vous êtes venus ici pour parler de la Chine, mais nous étudions les régions où il y a des violations réelles ou perçues des droits de la personne, puis nous cherchons les recommandations à présenter au comité permanent et, par la suite, au gouvernement pour favoriser des changements positifs.
    Vous dites, dans vos recommandations :
Pour élaborer la politique étrangère canadienne, il faut reconnaître que la communauté chinoise établie au Canada est diversifiée et offre tout le spectre des opinions. On ne saurait prétendre que la communauté sino-canadienne pense et s’exprime de manière monolithique. Certains sujets sont causes de division chez les Canadiens d’origine chinoise. C’est pourquoi la politique étrangère canadienne doit être sensible à la diversité.
    Pouvez-vous me donner des exemples précis de situations dans lesquelles nous ne nous sommes pas montrés sensibles à la diversité de la communauté sino-canadienne? Vous avez sûrement des exemples concrets de cas dans lesquels nous devrions modifier notre politique. Autrement, cela n’aurait pas figuré dans vos recommandations.
    Je vous remercie.
    Vous avez cité la recommandation 6. Je n’avais pas lu ce paragraphe dans mon exposé parce que je craignais de dépasser ma limite de temps. Cette recommandation découle du fait que nous avons pu constater des divergences de vues au sein de la communauté chinoise du Canada quant à la façon dont le gouvernement devrait concevoir sa politique étrangère ou sa politique commerciale envers la Chine.
    Nous avons dit dans notre mémoire que oui, certains éléments de la communauté sino-canadienne se féliciteront d’une approche très stricte des droits de la personne, en général et parfois même dans le seul cas de la Chine. En même temps, il y a aussi des éléments de la même communauté qui ont des vues plus nuancées ou complètement divergentes, dans le cadre desquelles ils ne veulent pas que le gouvernement agisse ainsi envers la Chine.
    Nous voulons donc dire qu’il ne faudrait pas interpréter le silence comme signifiant que nous sommes tous sur la même longueur d’onde en cas d’approche très stricte des droits de la personne. Pour nous, la politique étrangère devrait aussi refléter les différentes opinions de cette communauté, dont certains éléments préfèrent une approche plus traditionnelle soulignant les signes de progrès, aussi bien dans le domaine politique qu’en matière de droits de la personne.
    Nous croyons par conséquent que notre politique devrait refléter les différents points de vue qui existent, nous le savons, dans la communauté chinoise du Canada.
(1155)
    Vous ne dites donc pas nécessairement que notre politique étrangère ne tient pas compte de ces divergences. Votre recommandation nous rappelle simplement qu’il y a une certaine diversité, que la communauté chinoise du Canada n’est pas monolithique. C’est un simple rappel.
    Vous avez dit que le premier ministre Harper a très à cœur la question des droits de la personne, mais vous n’avez jamais dit qu’il avait exagéré. Il a pris la défense des droits de la personne. Nous le reconnaissons tous. Votre recommandation laisse entendre que nous devons être très sensibles à la diversité dans notre politique étrangère à cause des divergences de vues qui existent dans la communauté chinoise du Canada. Vous nous rappelez essentiellement qu’il faut avancer avec prudence sur les deux fronts.
    Je crois que c’est une recommandation fondée sur les relations que nous avons établies dans cette communauté. J’ai bien noté dans mes observations que le Conseil commercial ne prétend pas être expert en matière de droits de la personne. Nous avons été invités à venir ici ce matin. Je suis très heureux de cette occasion. Dans le cadre de nos relations avec différents éléments de la communauté sino-canadienne, nous avons constaté qu’il y a des divergences de vues sur la façon dont nous devons nous y prendre avec la Chine. Je suis sûr que les mêmes divergences se retrouvent dans bien d’autres communautés par suite des relations établies par notre gouvernement avec l’Amérique, l’Australie, l’Europe ou l’Afrique. Cette recommandation est plus qu’un rappel. Elle indique que, d’après les relations que nous avons établies, oui, certains éléments de la communauté chinoise sont favorables à une approche très stricte. D’autres éléments ne sont pas convaincus que c’est la bonne façon de réussir, non seulement à faire avancer la cause des droits de la personne, mais aussi à cimenter nos liens avec une puissance politique et économique de plus en plus forte, à un moment où il est de l’intérêt du Canada d’avoir de bonnes relations avec la Chine.
    Cela ne nous impose pas d’être toujours d’accord. De bonnes relations nous permettent d’exprimer notre désaccord avec maturité, sans que personne n’ait à en payer le prix. C’est ce que nous voulons. Nous disons que cet élément existe aujourd’hui dans la communauté sino-canadienne, sur la base des rapports que nous avons avec elle.
    Pourriez-vous retirer pendant quelques instants votre chapeau de président du Conseil commercial Canada-Chine pour remettre votre ancien chapeau de politicien —
    Suis-je autorisé à le faire?
    Dans une certaine mesure, je suppose.
    Le comité, comme les médias et les Canadiens, a appris qu’un citoyen canadien portant le nom de Celil, qui se trouve actuellement en Chine, est privé de certains droits fondamentaux, notamment le droit d’accès aux services consulaires. Vous nous dites – et nous le savons – que la Chine ne reconnaît pas la double citoyenneté et que notre gouvernement devrait prendre contact avec les autorités chinoises pour mettre au point une formule acceptable pouvant servir les intérêts des titulaires d’une double citoyenneté.
    Il semble bien que la Chine se soit montrée inflexible dans ce dossier. D’un point de vue politique et même d’un point de vue commercial, puisque vous êtes président du Conseil commercial Canada-Chine, quels moyens le gouvernement du Canada peut-il mettre en œuvre pour obtenir des résultats différents dans ce dossier?
    Nous avons examiné l’affaire Maher Arar, dans laquelle certains estiment que le gouvernement n’en a pas fait assez ou n’a pas fait ce qu’il aurait dû faire. Dans un cas comme celui-ci, qu’est-ce que le nouveau gouvernement peut faire pour obtenir un maximum de résultats? Et qu’est-ce que des intérêts privés, des entreprises peuvent faire pour l’aider?
(1200)
    Monsieur Marchi, M. Sorenson en est déjà à la huitième minute de son temps de parole de sept minutes. Je vous saurais donc gré de répondre brièvement.
    Je ne crois pas avoir besoin de retirer mon chapeau parce qu’en toute franchise, lorsque j’ai visité la Chine pour la première fois en novembre à titre de président du CCCC et par la suite aussi, j’ai pu aborder avec mes interlocuteurs chinois beaucoup de questions allant bien au-delà des simples opérations commerciales.
    Beaucoup des sociétés que nous représentons vont elles aussi au-delà de leurs produits ou de leurs services. Il suffit de considérer ce qu’Alcan fait dans la province nord-ouest de la Chine, non seulement pour ses travailleurs, mais aussi pour les collectivités locales. Alcan va beaucoup plus loin qu’elle n’est censée le faire dans les domaines de la gouvernance d’entreprise et la responsabilité sociale.
    Un grand nombre de nos sociétés font la même chose. Nous croyons qu’elles exportent ce genre de valeurs. Dans l’économie mondiale, il faut d’abord établir une image de marque et, à cette fin, définir une norme et une approche. Vous constaterez donc que beaucoup de sociétés canadiennes vont au-delà de leurs produits ou de leurs services de base pour améliorer le sort de leurs employés bien sûr, mais aussi pour aider les collectivités, les hôpitaux, les réseaux de transport, etc.
    Deuxièmement, c’est justement parce que les relations peuvent, à l’occasion, donner lieu à de grandes frustrations que nous avons besoin de bonnes relations et d’une approche susceptible de donner des résultats positifs. Je suis bien d’accord qu’il est difficile de convaincre les Chinois en leur demandant de laisser nos agents consulaires aller voir cette personne qui a la citoyenneté canadienne et qui est titulaire d’un passeport canadien.
    Oui, il y a des moments où les Chinois ne facilitent pas la vie à notre gouvernement. J’en sais quelque chose, mais ce n’est pas une raison pour crier plus fort. Qui sait? Peut-être obtiendrons-nous des résultats en criant plus fort, mais je n’en suis pas sûr.
    S’il y a un obstacle sérieux à surmonter, nous avons besoin d’un engagement authentique. Comment alors trouver un nouveau moyen, un nouvel instrument pour régler le problème de la non-reconnaissance de la double citoyenneté? Il faudra que les dirigeants, des ministres, de hauts fonctionnaires se regardent dans le fond des yeux pour aplanir les difficultés et trouver des moyens d’empêcher ces cas consulaires d’entraver la croissance de nos relations.
    Nous croyons donc que ces frustrations devraient constituer une raison de plus pour intensifier l’engagement et le dialogue.
    Merci, monsieur Marchi.
    Monsieur Marston.
    Ce que j’ai à dire ne vous surprendra probablement pas. Vous parlez de divergences de vues. Il y en a certainement entre moi et les députés du gouvernement qui sont présents ici. Lorsque M. Harper est monté à bord de l’avion et a fait ces déclarations, certains milieux les ont interprétées comme un sermon adressé aux Chinois sur les droits de la personne. À mon avis, ce n’était pas du tout une bonne idée. Depuis mars, j’ai des contacts avec la famille et les avocats de M. Celil. Ils ont simplement secoué la tête parce qu’ils étaient très déçus.
    Mettons cela de côté pour le moment. D’après ce que je vous ai entendu dire, il semble y avoir une rupture entre le côté politique et le côté économique. Il semble que les Chinois comprennent assez bien les questions liées à l’économie de marché. Les gens et les entreprises peuvent aller en Chine décrocher des contrats, mais il y a eu un changement du côté politique.
    J’ai écouté ce que vous avez dit des relations que nous avions dans le passé, lorsque le gouvernement pouvait mettre sur la table des questions faisant l’objet d’un désaccord. Il semble que cela soit difficile aujourd’hui.
    Nous examinons ici le dialogue bilatéral sur les droits de la personne. Je crois que certains voudraient y reléguer ces droits. Le dialogue n’a pas été efficace. Il est arrivé que les hauts fonctionnaires chinois n’aient même pas fait acte de présence.
    Les droits de la personne constituent une valeur fondamentale pour les Canadiens, bien plus encore que dans la plupart des autres pays du monde. Avez-vous des conseils à nous donner sur ce qu’il faudrait faire pour essayer de rétablir les relations politiques?
(1205)
    Je crois savoir que vous avez reçu des témoignages de nombreuses organisations, et que beaucoup ont dit qu’il fallait soit améliorer le dialogue soit trouver un autre moyen. Je suis certainement disposé à accepter ce point de vue. Le CCCC n’est pas un organisme de promotion des droits de la personne, et je suis prêt à écouter ceux qui disposent peut-être de meilleurs moyens. Nous sommes disposés à appuyer soit un dialogue amélioré, ce qu’un certain nombre de pays ont fait, soit un autre instrument pouvant le remplacer. Nous ne croyons pas à la diplomatie du mégaphone. Ce n’est pas un bon moyen de faire avancer la cause.
    L’autre point que je voulais mentionner, c’est que le moment est vraiment indiqué pour un engagement réel et novateur sur toute la question des valeurs. C’est la première fois dans l’histoire des plans quinquennaux chinois que les autorités accordent autant d’importance à l’édification d’une société harmonieuse. J’ai l’impression que les dirigeants craignent de voir l’énorme fossé qui existe devenir une source d’instabilité. Pour eux, la stabilité est la toute première priorité.
    Le plan quinquennal actuel traite de questions de qualité de vie, des questions dont nous parlons au Canada. Les Chinois se demandent comment améliorer l’éducation, la qualité de l’air et de l’eau, les soins de santé dispensée à leurs citoyens. Je crois que nous avons actuellement une vraie possibilité de collaborer avec eux sur toute une série d’enjeux beaucoup plus sociaux que commerciaux.
    En matière d’expérience et de pratiques exemplaires, nous avons quelque chose à apprendre aux autres, même si nous sommes loin d’être parfaits. La question est de savoir comment aborder les Chinois. Il est notoire qu’ils aiment examiner différentes approches, puis en essayer quelques-unes, quitte à les remplacer, à les améliorer ou à les laisser telles quelles. Je crois que nous avons vraiment la possibilité de les toucher, mais il faut, comme je l’ai dit et comme Paul l’a mentionné aussi, établir au préalable des relations de respect mutuel et de compréhension permettant d’aborder et de régler des questions difficiles.
    D’après ce que vous dites des changements survenus en Chine, le bol de riz de fer a disparu. L’État ne s’occupe plus des gens aussi étroitement qu’il le faisait. Je suis bien d’accord avec vous que nous en sommes à un stade où les occasions et les possibilités sont importantes. Il est donc essentiel de faire preuve de respect, ce qu’il est parfois difficile de faire lorsque les droits de la personne sont en jeu.
    Je crois que j'accepte la plus grande partie de votre exposé. Vous avez bien raison de dire que nous avons eu des témoins qui insistaient beaucoup sur les droits de la personne en disant que le commerce s’arrangerait tout seul. Il s’agissait essentiellement de défendre les droits de la personne. Je comprends votre —
    Je dois dire aussi que je me rappelle —
    Monsieur Evans, voulez-vous intervenir? Vous me faites signe. Vous pouvez y aller.
    Je vous remercie.
    Je remarque, monsieur Marchi, qu’un ancien politicien capte mieux l’attention du comité qu’un universitaire ou un professeur.
    Je ne faisais que répondre aux questions, Paul.
    La question de M. Marston met en évidence le fait que l’idée centrale avancée dans les discussions tenues au comité ces derniers mois est que les droits de la personne sont au cœur de notre vision du monde et de nos relations avec la Chine.
    L’idée que nous avançons aujourd’hui, c'est que les droits de la personne doivent constituer un aspect fondamental de nos relations, un aspect qu’on ne devrait pas séparer de l’aspect commercial et des enjeux mondiaux qui font également partie de ces relations. Il est donc vraiment difficile pour un gouvernement de trouver un juste équilibre et d’avancer simultanément sur tous ces fronts.
    Nous disons aussi qu’il faut avoir des relations avant d’être en mesure de régler des problèmes. Une fois les relations établies, il est possible de formuler des observations générales sur les droits de la personne, de créer toute une nouvelle architecture – je serais heureux de vous présenter quelques idées à ce sujet – et de trouver des solutions aux cas consulaires.
    Nous avons actuellement des centaines de milliers de citoyens canadiens tout près de la Chine. Ils n’y vivent pas nécessairement, mais ils sont revenus dans la région ou se trouvent à proximité de la République populaire. Si vous vous posez la même question que Mme St-Hilaire, non, nous ne pouvons pas revenir à l’ancien statu quo. Nous devons maintenant aller au-delà.
    Les Canadiens veilleront à ce que ces cas consulaires restent en tête de notre liste de priorité. Notre premier ministre en a fait état. Il s’agit maintenant de savoir de quelle façon nous allons mettre la main à la pâte pour conclure des arrangements et des ententes avec les Chinois afin non seulement de régler un cas particulier, mais de résoudre l’énorme problème de relations transnationales que représentent plusieurs centaines de milliers de Canadiens vulnérables à cause de la double citoyenneté.
    Par conséquent, le statu quo ne suffit plus. Nous devons intensifier nos pressions, mais nous devons le faire dans le contexte de relations globales.
(1210)
    Cela met fin à notre premier tour de table. Avant de passer au second, je vais vous poser quelques questions de façon à établir certains faits concrets.
    Monsieur Evans, j’ai cru comprendre que la part du Canada dans l’ensemble du marché chinois a diminué ces dernières années. Est-ce exact?
    Oui, monsieur.
    J’ai également cru comprendre que le déficit commercial du Canada dans ses échanges avec la Chine a augmenté considérablement. Est-ce exact?
    Oui, monsieur.
    Le rapport entre nos exportations et nos importations a été d’environ un à quatre au cours de la dernière décennie, n’est-ce pas?
    C’est encore pire que cela. D’après les statistiques que nous avons pour la période de janvier à novembre 2006, les exportations canadiennes à la Chine se sont élevées à quelque 6 milliards de dollars, tandis que nos importations étaient d’environ 38 milliards.
    Vous avez dit que l’attitude du gouvernement actuel se caractérise par sa chaleur économique et sa froideur politique. Diriez-vous que l’attitude du gouvernement précédent se caractérisait par sa chaleur politique?
    Il ne s’agit pas seulement du gouvernement libéral précédent. Je dirais que depuis l’époque de Pierre Trudeau, les gouvernements successifs du Canada ont cherché à faire preuve de chaleur politique. D'ailleurs, il s’agit davantage de tiédeur que de chaleur car nos relations n’ont jamais atteint un degré de complexité et de profondeur permettant de partager des valeurs avec la Chine.
    Diriez-vous que des relations commerciales dans lesquelles les exportations baissent à un sixième des importations témoignent de chaleur ou de froideur économique?
    Je dirais que nous sommes à la limite de la chaleur économique et que dans l’ensemble, malgré l’énorme déficit commercial, ces relations sont excellentes pour l’économie canadienne.
    Lequel des deux pays tire le plus d’avantages de ces relations, compte tenu du déficit commercial actuel?
    Il est impossible de le dire parce que nos systèmes de production sont tellement intégrés qu’un déficit commercial avec la Chine peut avantager nos relations commerciales avec d’autres régions du monde.
    Vous voulez dire qu’un déficit commercial de 25 milliards de dollars est aussi avantageux pour nous qu’il l’est pour la Chine?
    Je dirais que ce n’est pas la bonne façon de mesurer. Nous avons affaire à une situation dans laquelle les entreprises canadiennes apprennent à soutenir la concurrence à l’échelle mondiale et cherchent à se brancher sur des chaînes d’approvisionnement. Pour le moment, nos importations de biens chinois sont très importantes, mais, dans l’ensemble, la Chine n’est pas un grand exportateur mondial. Il s’agit de la balance commerciale.
    Compte tenu de ce que vous savez de la situation politique en Chine, croyez-vous qu’il y ait une opposition efficace au Congrès national du peuple?
    Pardon —?
    Pensez-vous qu’une opposition efficace se manifeste au Congrès national du peuple?
    Je ne parlerais pas d’une opposition efficace.
    Croyez-vous qu’il soit utile, pour montrer que le Canada se soucie de la démocratie et des droits de la personne, d’affirmer qu’il y a une opposition efficace au Congrès national du peuple? Pensez-vous qu’il soit indiqué pour un premier ministre canadien de faire une telle affirmation?
    Je ne sais pas si des premiers ministres ont fait une telle affirmation dans le passé. Je ne dirais pas que l’expression « opposition efficace » soit très indiquée —
(1215)
    En 2005, j’étais à Beijing en compagnie d'un ancien premier ministre qui a félicité le gouvernement chinois parce qu’il a eu la possibilité de s’entretenir avec le chef de l’opposition au Congrès national du peuple.
    Monsieur Marchi, vous avez dit que d’importants contrats, notamment liés à l’infrastructure, pourraient souffrir du contexte politique. Quel est le nombre approximatif de sociétés canadiennes qui font partie des grands fournisseurs d’infrastructure en Chine?
    J’étais d’accord avec Paul que le gouvernement a une énorme influence sur ces grands projets d’infrastructure. Je ne suis pas en mesure de vous donner un nombre exact. Je ferai cependant des recherches pour le fournir au comité. Je dirais qu’en gros —
    Pouvez-vous nommer de mémoire les principaux fournisseurs canadiens d’infrastructure?
    Quelque 500 entreprises canadiennes sont présentes dans différentes régions de la Chine.
    Quels sont les plus grandes, les trois ou quatre sociétés les plus importantes?
    Il y aurait SNC-Lavalin, Hatch, Bombardier et la Power Corporation. Ce sont les quatre noms qui viennent immédiatement à l’esprit.
    Je crois que, d’après les statistiques, la Power Corporation est le plus grand investisseur canadien en Chine. Pouvez-vous le confirmer?
    C’est l’un des plus grands. Je ne suis pas certain que ce soit le plus grand.
    Qui est le président de votre organisation?
    Peter Kruyt.
    Pour quelle société travaille-t-il?
    La Power Corporation.
    Je vous remercie.
    Monsieur Khan.
    Merci beaucoup, messieurs.
    Je vous ai écouté avec intérêt, et je comprends l’équilibre entre le commerce et les droits de la personne dont vous avez parlé. Je peux vous dire que j’étais en visite en Arabie Saoudite récemment. J’ai découvert que ce qu’a subi M. Sampson découlait, comme dans les cas que vous avez mentionnés, d’une très mauvaise compréhension de la culture et de l’absence de relations personnelles. Je suis bien d’accord avec vous sur ce point.
    Les Chinois sont des gens d’affaires très astucieux. Je crois qu’ils ont beaucoup évolué, mais ils le font à leur propre rythme. Pour certains, leur engagement en Afrique et en Amérique latine est merveilleux, mais il faut reconnaître en même temps que beaucoup des autres pays avec lesquels ils ont des rapports ne brillent pas particulièrement par leurs réalisations dans de nombreux domaines. Par exemple, ils n’ont pas signé certaines conventions, ce qui fait que quelques pays d’Europe et d’Amérique du Nord ne veulent pas y aller.
    Ma question, monsieur, est la suivante : À votre avis, combien de temps faut-il attendre, combien de personnes doivent faire l’objet de violations de leurs droits avant que le premier ministre du Canada prenne leur défense en public, s’exposant ainsi à des critiques?
    De plus, monsieur, vous avez dit, je crois, que le Canada doit continuer à établir et à maintenir des relations de confiance et de respect mutuel, comme il l’a fait au cours des récentes visites de ministres canadiens en Chine. Nous sommes bien d’accord avec vous à ce sujet. C’est la raison pour laquelle les ministres y sont allés. Cela permet un engagement constructif sur toute la gamme des questions d’intérêt commun entre les deux pays.
    Par conséquent, où faut-il tirer la ligne? Est-il malvenu de dire ce qu’on pense tout en envoyant des ministres en visite? Vous dites que nous devons avoir des relations. Je réponds, monsieur, que nous nous efforçons d’établir des relations grâce aux visites de nos ministres. Je pense en même temps que les propos du premier ministre étaient admirables. Il a pris la défense d’un Canadien qui a été jeté en prison. Il faut bien que quelqu’un s’occupe de le défendre. Je trouverais personnellement inacceptable que le premier ministre du Canada ne soulève jamais une question de ce genre.
    Nous parlons aussi en privé. Je crois que des gens d’affaires comme les membres de votre Conseil devraient aussi se faire les champions de la cause. Je pense, par exemple, que les États-Unis ont probablement moins d’influence en Inde que Bill Gates. Avez-vous fait des efforts quelconques sur ce plan? Je vous pose la question, monsieur.
    Mon autre question porte sur le déficit commercial dont le président a déjà parlé. Croyez-vous qu’on puisse jamais envisager la possibilité d’un équilibre des échanges entre la Chine et l’Inde?
    Une voix: Le Canada.
    Mr. Wajid Khan: Entre la Chine et le Canada — Excusez-moi. Atteindrons-nous jamais l’équilibre? Ne parlons pas d’excédent. Pour le moment, je ne parle que d’équilibre.
(1220)
    Pour répondre la première question qui m’a été adressée, je dirais qu’il n’est pas acceptable que les droits des gens continuent d’être violés. Je ne crois pas qu’il soit malvenu pour un premier ministre de parler en public de choses qui lui tiennent à cœur. La question qui nous intéresse le plus, celle qui motive notre présence ici, c’est de déterminer la meilleure façon de progresser. Qu’est-ce qui peut nous assurer un maximum de succès, non seulement pour protéger les Canadiens qui voyagent en Chine, mais pour améliorer le sort des Chinois, d’une façon générale?
    J’ai parlé plus tôt du dialogue. Beaucoup de témoins ont dit qu’il avait quelque chose qui clochait. Nous avons participé au dialogue pour la même raison qu’il y a des années. Les premiers ministres d’alors n’étaient pas satisfaits du fonctionnement de la Commission des droits de l’homme de Genève. J’ai eu l’occasion de passer quelque temps à Genève. Chaque année, on pouvait constater quelque huit semaines d’intense activité dans le domaine des droits de l’homme. Je peux vous dire que la plupart des ambassadeurs qui y participaient n’avaient pas du tout l’impression, en bout de ligne, que le dossier avait bougé d’un iota. Le processus de la Commission ne menait tout simplement à rien.
    Lorsque nous avons fait la transition entre l’adoption de vaines résolutions à Genève et un dialogue, nous pensions qu’un échange franc, honnête et plus ou moins privé ferait avancer les causes qui nous tenaient particulièrement à cœur. Je crois que c’était la bonne chose à faire à ce moment.
    Je regrette de vous interrompre. Je suis bien d’accord avec vous, mais ne croyez-vous pas que les visites ministérielles et la prise de position du premier ministre en faveur des droits de la personne constituent une approche équilibrée?
    Sur ces 500 sociétés, ou quel que soit leur nombre, qui se trouvent en Chine, combien ont vraiment des activités dans le pays? Beaucoup d’entreprises sont inscrites, mais elles ne sont pas nécessairement actives.
    Nous avons déjà pris trop de temps. Je vous prie donc de répondre très brièvement.
    Je suis d’accord, et j’en dirais autant. Les récentes visites ministérielles ont été positives et utiles. Toutefois, les relations avec la Chine doivent également s’étendre jusqu’aux niveaux politiques les plus élevés. J’espère donc que le premier ministre se joindra à ses ministres pour contribuer au renforcement des relations avec ses homologues. Nous aurions ainsi des relations à l’épreuve du temps, qui nous permettraient de nous attaquer aux problèmes les plus difficiles.
    Monsieur Silva.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais également remercier le témoin d’être venu.
    Le comité se débat avec toute cette question d’un véritable dialogue Canada-Chine sur les droits de la personne. Nous nous demandons si le dialogue bilatéral peut jouer un plus grand rôle dans la politique canadienne en Chine. La façon de mener le dialogue est très importante. Certains soutiennent qu’il est inutile, que nous devrions y renoncer et repartir à zéro. S’il existe une façon de mesurer le succès, nous aimerions bien la connaître pour être en mesure d’évaluer le dialogue.
    Pour moi, toute la question réside dans la façon de concrétiser les principes universels des droits de la personne au niveau local. Comment le faire sans passer par les administrations locales, les autorités et les ONG? Le problème, c’est que notre dialogue avec la Chine ou avec tout autre pays se situe toujours au niveau des gouvernements. Nous parlons de relations bilatérales, mais c’est en fait que les relations entre notre gouvernement fédéral et leur gouvernement.
    Lorsque nous parlons de droits de la personne, ils peuvent avoir l’impression, à l’occasion, que nous les sermonnons. En fait, nous faisons la leçon au régime, et non à la population. De toute évidence, il y a beaucoup de gens en Chine qui se soucient vraiment des droits de la personne et veulent défendre cette cause. Mais comment faire pour avoir avec ces gens des contacts susceptibles d’assurer des changements efficaces? Je ne suis pas sûr. C’est une grande question pour moi, mais je suis vraiment persuadé qu’il ne peut pas y avoir un vrai dialogue sans engagement local. Autrement, tout cela ne servirait à rien parce qu’au niveau des gouvernements, le dialogue ne mène nulle part.
    Peut-être Paul Evans peut-il répondre à cette question.
(1225)
    Je vous remercie de votre question.
    Comme vous, je crois que le dialogue sur les droits de la personne ne donne pas tous les résultats attendus. Il faut cependant prendre du recul. Ce dialogue ne représente qu’un élément de toute une série d’initiatives que les gouvernements canadiens, les universités et le secteur privé ont prises dans les 18 dernières années en vue de faire progresser le dossier des droits de la personne en Chine.
    Votre comité a examiné d’assez près les problèmes du dialogue lui-même. Je ne reviendrai donc pas là-dessus sauf pour dire qu’en soi, le dialogue n’est pas très utile. Toutefois, il reste intéressant dans le contexte d’un effort concerté comportant plusieurs autres dimensions et dans lequel les activités dirigées par le gouvernement sont reliées à ce que font les ONG, les fondations et les universités.
    Mme St-Hilaire nous a demandé ce que nous pouvions faire de nouveau. Les audiences de votre comité ont permis de dégager un aspect très précieux en examinant non seulement le dialogue entre gouvernements en soi, mais aussi la façon dont il se rattache aux activités des ONG et d’autres intervenants.
    Pour l’avenir, nous devrons trouver de nouveaux mécanismes pour toucher la Chine à de multiples niveaux. En faisant preuve de responsabilité sociale, les sociétés peuvent, comme nous l’avons dit, ouvrir un nouveau front tant dans leurs pourparlers avec leurs interlocuteurs chinois que dans leurs contacts avec les associations. Le Conseil commercial Canada-Chine pourrait servir d’instrument pour établir des contacts avec certains de leurs partenaires chinois.
    Nous sommes en quelque sorte à la croisée des chemins. Aucun Canadien ne croit que nous devrions reculer pour ce qui est de la promotion des droits de la personne en Chine. Nos sondages, de même que les délibérations de votre comité et d’autres discussions révèlent invariablement que les Canadiens veulent faire avancer ce dossier. S’il faut déployer encore plus d’énergie, nous aurons besoin de nouveaux mécanismes. L’ancienne structure n’est pas mauvaise, mais elle ne suffit plus et a besoin d’être améliorée. C’est du moins mon point de vue.
    Vous ne croyez donc pas que le dialogue bilatéral actuel devrait être élargi. Faudrait-il y renoncer carrément? Faudrait-il étendre les relations?
    Je ne peux pas formuler un jugement raisonné. Toutefois, ayant vu comment le dialogue s’est déroulé et ce qu’en disent les autres pays, je ne crois pas qu’il soit complètement inutile. Il est juste un peu boiteux et a besoin d’être amélioré. Plusieurs bonnes recommandations ont été formulées, mais la plus importante, c’est qu’il ne faut pas trop en attendre, ni y attacher trop d’importance. Sur une échelle de 1 à 10, je dirais qu’il a une utilité de 3 ou 4. Dans le contexte d’une dizaine d’autres activités dont il serait le centre, on pourrait peut-être lui attribuer un 7.
    Avez-vous terminé, monsieur Silva?
    Nous sommes déjà en retard, monsieur Marchi, mais je vais vous laisser répondre.
    Je voulais juste dire qu’il y a eu de nombreux témoignages concernant le rôle de l’ACDI. En pensant à votre question, je crois qu’il y a aussi un rôle que l’ACDI a essayé de jouer dans le passé, pas nécessairement au niveau des relations entre gouvernements, mais dans son travail avec les provinces, les régions et les collectivités.
    J’ai eu l’occasion de visiter en Chine un certain nombre des projets de l’ACDI qui avaient eu un grand succès. L’ACDI avait réussi à établir des rapports concrets, pas nécessairement avec le gouvernement ou les dirigeants des régions en cause, mais plutôt avec les leaders communautaires locaux. Par conséquent, quelle que soit l’opinion du comité sur le rôle de l’ACDI, je crois que l’Agence peut aussi créer des capacités dans la société civile.
    Quelqu’un a mentionné qu’il y a là quelque 30 000 ONG. Ces organismes ne s’inscriraient probablement pas tous dans notre définition d’ONG, mais nous pouvons espérer qu’ils y parviendront en évoluant progressivement. Je crois que vous avez raison: il est nécessaire d’adopter une approche multidimensionnelle. Les relations entre gouvernements sont importantes, bien sûr, mais ce n’est qu’un élément parmi d’autres.
(1230)
    Puisque Mme St-Hilaire n’a pas l’intention d’utiliser son temps de parole au second tour de table, je voudrais peut-être revenir à l’une des questions que j’avais déjà abordées, concernant la chaleur politique ou économique qui caractérisait le statu quo dont vous avez parlé, monsieur Evans.
    N’est-il pas vrai qu’après le massacre de Tiananmen, le gouvernement du Canada a imposé des sanctions assez sérieuses à la République populaire de Chine et a pris d’autres mesures, comme l’octroi du statut de réfugié à des étudiants de la RPC qui résidaient au Canada à ce moment?
    Oui, monsieur, vous avez raison pour la deuxième partie, mais le commerce entre le Canada et la Chine n’a pas vraiment baissé après le massacre de Tiananmen. C’était une époque que M. Khan trouverait intéressante parce que nous avions alors un excédent dans notre commerce avec la Chine.
    Ainsi, à un moment où le gouvernement du Canada a condamné d’une façon très énergique les violations des droits de la personne et particulièrement le massacre de Tiananmen, à un moment où des sanctions ont été imposées, nous avons eu une période de croissance positive du commerce.
    Je dirais que cela se situait dans le contexte de la quasi-totalité des pays occidentaux. Je dois ajouter que « sanctions » n'est peut-être pas le bon mot en ce qui concerne notre commerce. Après Tiananmen, nous avons limité pendant une certaine période les échanges politiques que nous avions avec la Chine. Nous n’avons pas imposé de sanctions financières, sauf peut-être dans le cas de matériels particuliers dont les forces armées chinoises auraient pu se servir.
    Par conséquent, il y a eu un refroidissement des relations politiques qui a été suivi par une croissance des relations économiques.
    Les relations économiques se sont maintenues à peu près au même niveau. Elles ont peut-être augmenté légèrement.
    Vous avez dit que le statu quo actuel se caractérise par la froideur politique et la chaleur économique. Avez-vous trouvé, au cours de la dernière année, des données permettant de croire que des sociétés canadiennes ont perdu des contrats ou que des intérêts commerciaux canadiens ont souffert de mesures dilatoires par suite de ce que vous appelez la froideur politique?
    Non, monsieur, nous ne disposons pas de détails précis. Je dois dire cependant que nous en sommes à un stade où nous ne savons pas encore quelle sera la pleine réaction chinoise à une attitude de froideur politique à long terme.
    Est-il vrai que des sociétés canadiennes – monsieur Marchi, n’hésitez pas à intervenir si vous voulez – expriment depuis un certain temps des préoccupations concernant la violation de droits de propriété intellectuelle et de droits d’auteur en RPC? Est-ce exact?
    Au chapitre de la propriété intellectuelle, il n’y a pas de doute que les Chinois ont fait d’énormes progrès en matière de législation et de réglementation.
    Mais est-il vrai qu’il y a des problèmes?
    Je vais essayer de vous répondre.
    Le plus grand défi ou problème, comme vous dites, se situe au niveau de la mise en œuvre et de l’exécution. Il y a encore des difficultés sur le plan de la mise en vigueur des lois et des règlements. De toute évidence, cela s’applique non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis et à l’Union européenne.
    Il est évident, d’après les discussions que les Chinois ont tenues, notamment à l’OMC, que la mise en œuvre et l’exécution nécessitent encore beaucoup de travail. En fait, nos pays les aident aussi à mettre sur pied les systèmes et les règlements nécessaires à cette fin.
    Il y a donc un problème de mise en vigueur. Les lois et les règlements sont déjà en place. Il faudrait leur laisser quelque temps pour qu’ils puissent faire respecter la réglementation.
    Quelques sociétés canadiennes ayant des activités en Chine ont affirmé – j’ai des lettres venant de plusieurs d’entre elles – qu’elles ont été victimes d’espionnage industriel. Est-ce que c’est une difficulté ou un problème, ou bien rejetez-vous tout cela d’emblée?
    Aucune société ne m’a approché à ce sujet. Je n’ai donc pas de commentaires à formuler.
    Vraiment?
    Monsieur Evans, croyez-vous qu’il existe un problème à cet égard?
    Je crois que beaucoup de sociétés canadiennes qui ont des activités en Asie ont mentionné des cas de ce que vous appelez l’espionnage industriel. Ce ne sont pas seulement les sociétés canadiennes ayant des opérations en Chine qui sont touchées.
    Pour récapituler, je dirais que les paramètres de la situation sont les suivants: marché d’exportation en régression, déficit commercial croissant, problèmes constants en matière de droits d’auteur et de propriété et ce que certaines sociétés appellent, comme vous l’avez dit, l’espionnage industriel. J’ai bien l’impression que ce sont là les paramètres des relations économiques fondées sur la politique du statu quo. À votre avis, est-ce là un succès ou un échec sur le plan économique?
    Je crois que les paramètres des relations économiques entre le Canada et la Chine comprennent tout ce que vous venez de mentionner, mais qu’ils vont plus loin. En fait, la compétitivité et la productivité du secteur manufacturier canadien dépendent d’une meilleure intégration dans les systèmes de production mondiaux dont la Chine constitue un élément essentiel.
(1235)
    J’ai une dernière question.
    Puis-je également —
    Monsieur Marchi, j’ai une question particulière à vous poser. Ce sera ma dernière.
    À la page 12 de votre mémoire, vous —
    Mais je ne voudrais pas que mon silence passe pour une acceptation de votre hypothèse.
    Ma question s’adressait à M. Evans.
    Oh, je croyais qu’elle s’adressait à tous les deux.
    À la page 12 de votre mémoire, vous dites: « Le Canada risque de perdre une chose précieuse: sa réputation; elle doit y tenir à tout prix. »
    De quelle façon pouvez-vous dire que le Canada peut perdre ou risque de perdre sa réputation en Chine? Soutenez-vous qu’avec un gouvernement qui défend plus énergiquement les droits de la personne, nous risquons de perdre notre réputation? Quel genre de réputation est-ce là que nous risquons de perdre?
    Cela revient à toute la question d’établir des rapports fondés sur la confiance et le respect mutuel, de comprendre les défis que chacune des deux parties doit relever et d’essayer de régler nos différends d’une façon civile. Il y a donc une réputation.
    Qu’il s’agisse de M. Diefenbaker lorsqu’il a vendu du blé à la Chine, de M. Trudeau lorsqu’il a établi des relations avec elle, de M. Mulroney lorsqu’il s’est montré très progressiste, de M. Chrétien ou de M. Martin, il y a une tradition et une réputation qui se sont établies au sujet de notre façon d’aborder nos relations avec la Chine. C’est de cela que nous voulions parler dans cette phrase.
    Merci beaucoup. Je vous remercie tous les deux.
    Je sais que vous êtes tous deux très occupés. Nous apprécions beaucoup votre contribution aux audiences du comité. Merci beaucoup.
    Nous avons maintenant à régler certaines questions liées aux travaux du comité. Nous allons siéger à huis clos. Je vais donc demander à nos invités de quitter la salle.
    Avons-nous vraiment besoin de siéger à huis clos? Non, je ne le crois pas. Si les membres du comité sont d’accord, nous examinerons les motions dont nous sommes saisis en séance ouverte. Est-ce d’accord?
    Monsieur Marston, il s’agit de vos motions. Y a-t-il un problème?
    Merci, monsieur le président.
    Je crois que les motions sont évidentes et ne nécessitent pas de grandes explications.
    Comme chacun le sait, le Canada s’est beaucoup occupé du protocole facultatif des Nations Unies. Au cours de la dernière campagne électorale, le premier ministre a dit qu’il chargerait un comité de cette question dans les premiers temps de son mandat. Cela ne s’est pas produit. Je crois que notre sous-comité est habilité à entendre des témoins et à formuler des recommandations au comité principal.
    D’accord.
    Monsieur Silva.
    Est-il possible d’amender la motion? C’est une excellente motion qui se rattache à certains autres travaux que nous faisons ou espérons faire au sujet de l’Iran. Serait-il possible d’ajouter l’Iran à la motion?
    S’agit-il d’une seule motion ou de deux motions distinctes?
    Ce sont deux motions distinctes.
    De quoi parlez-vous actuellement?
    Du protocole facultatif.
    C’est très bien. Je n’y vois aucun inconvénient.
    Était-ce bien de cela que vous parliez?
    Non, je m’excuse. Mon intervention portait sur la seconde motion.
    C’est très bien.
    La première motion est donc proposée au comité. En voici le texte :
Que le Sous-comité des droits internationaux de la personne fasse une étude, invite des témoins et formule des recommandations au Parlement au sujet du respect par le Canada du Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture.
    M. Marston a parlé de sa motion. Le comité est-il prêt à se prononcer?
     (La motion est adoptée.)
    Nous avons reçu avis de la seconde motion selon les règles. Voulez-vous prendre la parole à ce sujet?
    Je voudrais parler de la suggestion concernant l’amendement. Je ne vois aucun inconvénient à adopter une motion semblable au sujet de l’Iran, mais j’ai l’impression que cela irait un peu loin à ce stade.
    Je vais en fait retirer cette suggestion. Je pensais à la convention. Je me rends compte que nous n’avons pas encore signé la convention facultative contre la torture. Je pensais donc à la convention par rapport à la Chine et à l’Iran. Je comprends que les deux motions sont distinctes. Je vais donc retirer mon amendement.
    Cela nous facilite la vie.
    Ces derniers temps, beaucoup d’électeurs, un peu partout au Canada, ont parlé aux députés de notre parti de la situation en Chine, notamment en ce qui concerne les Coréens qui s’y sont réfugiés. Lors de la grande famine de 1995, il y a eu d’importants déplacements. Avec le gouvernement actuel de la Corée, la menace nucléaire et les événements connexes ont suscité beaucoup d’inquiétude.
    Nous avons cru bon d’inviter des témoins à venir nous parler de la Chine, puisque nous étudions déjà la situation dans ce pays.
    Très bien. Qui est en faveur de la motion de M. Marston?
     (La motion est adoptée.) [Voir le Procès-verbal.]
(1240)
    Je dois maintenant demander au comité d’approuver une demande provenant du comité de liaison relativement à un montant de 22 900 $ pour les opérations, y compris la convocation de témoins devant le comité dans le cadre de l’étude des droits de la personne en Chine. Quelqu’un peut-il proposer une motion d’approbation de cette demande?
    Une voix: Je le propose.
     (La motion est adoptée.)
    J’invite les membres à proposer des noms de témoins.
    Marcus, vous pouvez parler.
    Monsieur Marston, je voudrais avoir des éclaircissements sur la situation des réfugiés nord-coréens en Chine. Est-ce que cela fera partie de l’étude sur les droits de la personne en Chine? Allons-nous intégrer les résultats dans le rapport, ou bien est-ce quelque chose de distinct?
    J’imaginais que ce serait distinct. Pendant que je lisais la motion, j’ai peut-être donné une autre impression, mais je considérais que c’était distinct.
    C’est très bien. Je vous remercie.
    Le greffier me demande de mentionner les témoins de la semaine prochaine.
    Avons-nous confirmé la présence des quatre témoins? Nous avons des confirmations pour M. Mendes et M. d’Aquino. Qu’en est-il de M. Lu Ducheng?
    La seule difficulté, si vous me permettez d’expliquer, c’est la durée de la séance. Si nous devons avoir quatre témoins, examiner avec les fonctionnaires du MAECI les parties confidentielles du rapport de M. Burton et discuter comme convenu du plan du rapport concernant le dialogue bilatéral sur les droits de la personne, cela fait beaucoup dans une seule réunion.
    Parlez-vous du rapport Burton?
    Il y a deux choses distinctes. Le rapport Burton concerne les fonctionnaires du MAECI. Il s’agit d’une réunion à huis clos qui, j’imagine, nous prendra au moins une demi-heure. Nous devions également consacrer un peu de temps à la discussion du contenu du rapport sur la Chine pour que je puisse commencer la rédaction pendant l’interruption de deux semaines. Il appartient au comité d’en décider.
    Comme M. Silva tient à M. Mendes, nous allons certainement le garder. J’insiste de mon côté sur l’utilité de la présence de M. Lu Ducheng comme témoin. Il a un point de vue assez particulier que nous n’avons pas entendu. Je n’ai pas l’impression que M. d’Aquino ait quelque chose de nouveau à nous dire. À moins que des membres ne soient pas d’accord, je —
    De quel M. d’Aquino parlons-nous?
    Thomas d’Aquino, qui est président du Conseil canadien des chefs d’entreprises. Je ne crois pas que son point de vue soit très différent de ce que nous avons déjà entendu, et les membres du personnel nous recommandent de réduire le nombre des témoins.
    Êtes-vous d’accord pour procéder ainsi?
    Des voix: D’accord.
    Serait-il également utile, monsieur le président, de se limiter à un seul tour de table?
    Nous pourrions consacrer 45 minutes à M. Mendes et 45 autres à M. Lu Ducheng, puis 30 minutes au rapport Burton et 30 autres au plan du rapport. Est-ce que cela vous convient?
    Oui.
    Très bien. Une partie de la réunion de la semaine prochaine se déroulera à huis clos pour que nous puissions finalement voir quelques passages très banals du rapport Burton.
    Monsieur Sorenson.
    Pour parler d’autre chose, monsieur le président, je voudrais juste vous informer que, dans les deux heures qui ont précédé notre réunion d’aujourd’hui, le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international a adopté deux motions nous concernant. La première renvoie au Sous-comité des droits internationaux de la personne une demande d’audience au sujet de la Colombie présentée par le Conseil canadien pour la coopération. La seconde renvoie au même sous-comité une demande d’audience au sujet de l’Ouganda présentée par GuluWalk. Ces questions ont été abordées au comité directeur, puis transmises à notre comité permanent pour que nous les examinions.
    Nous avons trop à faire la semaine prochaine pour nous en occuper.
    Merci, monsieur.
    Merci beaucoup. La séance est levée.