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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 036 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 4 juin 2008

[Enregistrement électronique]

(1555)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Le greffier est en train de distribuer le rapport du comité de direction. Il est très bref. Nous nous sommes réunis, hier, pour discuter des questions que nous allons examiner, une fois l'étude du projet de loi C-469 terminée.
    Nous avons analysé la proposition de M. Scarpaleggia et avons convenu de tenir deux séances d'information sur les sables bitumineux, l'historique des projets d'exploitation, la technologie employée, les plans futurs de mise en valeur, ainsi de suite. L'objectif, ici, est de recueillir le plus d'informations possible. Bien entendu, à l'automne, nous entreprendrons une étude plus détaillée.
    Je vous demande d'y réfléchir pendant quelques instants. Si vous êtes d'accord, nous allons convoquer des témoins les 16 et 18 juin pour qu'ils nous renseignent sur le sujet. Nous allons faire tout notre possible pour inviter un large éventail de témoins.
    Des voix: D'accord.
    Le président: Nous allons faire le point sur la réunion de lundi. Quatre témoins ont confirmé leur présence. Il se peut qu'il y en ait deux autres du Manitoba, ce qui ferait six.
    Y a-t-il des questions? Tout est clair.
    Nous allons maintenant accueillir notre témoin et lui demander de nous parler de son projet de loi. Je vous souhaite la bienvenue.

[Français]

    Merci, monsieur le président, de bien m'accueillir à ce comité pour parler du projet de loi C-469 que j'ai déposé à la Chambre en octobre 2007 et qui vise la modification de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
    Je suis heureux d'être ici parce que je viens de la circonscription de Berthier—Maskinongé, où l'on retrouve environ 700 lacs et plusieurs rivières. Il y a aussi plusieurs activités récréotouristiques. Les gens se baignent l'été et pratiquent d'autres activités aquatiques. L'an dernier, dans la même circonscription, cinq lacs ont été fortement touchés par les cyanobactéries, de sorte que plusieurs activités aquatiques ont été compromises.
    Comme vous le savez, ce projet de loi propose d'interdire la fabrication, la vente ou l'importation des détergents à lessive ou à vaisselle qui contiennent des phosphores, et ce, dans le but de freiner la problématique de la prolifération des cyanobactéries appelées également algues bleues, que l'on connaît depuis quelques années. Le projet de loi qu'on étudie aujourd'hui est en fait la suite logique des décisions qui ont été prises par votre comité.
    En effet, dès le 12 juin 2007, considérant qu'il était urgent d'amorcer rapidement la lutte contre la prolifération des algues bleues, le député de Rosemont—La Petite-Patrie, au nom du Bloc québécois, a déposé et fait adopter, par votre comité, une motion qui demandait au gouvernement d'agir rapidement afin qu'il modifie ses règlements pour interdire rapidement l'usage des phosphates dans les détergents.
    Constatant que le gouvernement refusait de répondre favorablement à cette motion à l'époque, et toujours soucieux de lutter contre le phénomène des algues bleues, j'ai déposé, le 25 octobre 2007, à la suite de plusieurs pressions de citoyens dans ma circonscription et de l'augmentation du phénomène dans l'ensemble du Québec, le projet de loi C-469 visant à interdire la fabrication et l'importation de détergents contenant des phosphates dans un délai de 180 jours, ainsi que la vente de tels produits dans un délai de 360 jours.
    Par ce projet de loi, nous demandions au gouvernement d'agir dans le champ de compétence qui est le sien. Puisque Ottawa est responsable de réglementer les produits importés, le gouvernement fédéral se doit d'agir afin d'exercer un impact réel sur les fabricants et de les forcer à modifier leurs pratiques. De plus, si l'interdiction s'applique sur l'ensemble du territoire canadien, une entreprise n'a plus d'intérêt à fabriquer, à importer et à vendre des détergents qui contiennent des phosphates.
    Entre-temps, il ne faut pas oublier que le 25 septembre 2007, le gouvernement du Québec faisait savoir qu'il entendait présenter un programme gouvernemental de lutte contre les algues bleues, qui comprendrait notamment l'interdiction des phosphates dans les détergents pour lave-vaisselle. La ministre québécoise de l'Environnement enjoignait dès lors le gouvernement fédéral de faire de même en changeant son règlement pour augmenter l'effet commercial de l'interdiction des détersifs pour lave-vaisselle et les détergents qui contiennent des phosphates, et ainsi renforcer et rendre plus efficace la législation dont le Québec entendait se doter.
    Finalement, ce n'est que lorsque le projet de loi C-469 a été adopté à l'étape de la deuxième lecture, le 13 février 2008, que le gouvernement fédéral a finalement présenté son plan. En effet, le vendredi 15 février, le gouvernement a fait savoir qu'il emboîterait le pas aux gouvernements du Québec et du Manitoba en restreignant la concentration de phosphates dans les divers détergents.
    En conséquence, selon le plan annoncé, le gouvernement fédéral entend imposer d'ici 2010 une limite pour les phosphates de 0,5 p. 100 du poids, pour ce qui est des détersifs à lessive et à vaisselle.
(1600)
    Nous avons pu constater que le plan fédéral est similaire au plan québécois. Par contre, le gouvernement aurait pu, malgré tout, être plus ambitieux, car l'interdiction n'est pas totale et, surtout, n'entrera en vigueur qu'en 2010, alors que les produits de remplacement, comme vous le savez, existent déjà.
    Je crois qu'il est important de répéter qu'il est urgent d'agir le plus rapidement possible face à cette problématique, afin de freiner la prolifération des algues bleues.
    Depuis le tout début, si nous avons décidé d'intervenir dans ce dossier, c'est que nous pouvons tous constater à quel point cette prolifération prend de l'ampleur. Ce phénomène n'est pas nouveau, mais il a pris de l'expansion au cours des dernières années. Au Québec, en 2005, on a détecté des cyanobactéries dans 50 lacs. L'année suivante, on a vu ce nombre doubler: il est passé à 107 lacs touchés par les cyanobactéries. Et en 2007, plus de 200 lacs du Québec étaient touchés par le même phénomène. Il y a donc eu quatre fois plus de lacs touchés en deux ans.
    Rien ne nous dit qu'en 2008, ce phénomène diminuera. Au contraire, il devrait augmenter, d'où l'importance d'agir rapidement. Plus nous retardons la mise en œuvre de ces mesures, plus la situation va se détériorer, et davantage de plans d'eau seront touchés.
    C'est pour cela que nous demandons que la nouvelle réglementation s'applique dès 2009, d'autant plus qu'il existe déjà sur le marché, comme je l'ai déjà mentionné, des produits de remplacement en grande quantité et accessibles.
    Je suis tout à fait conscient que l'interdiction des produits contenant des phosphates dans les détersifs ne suffira pas à enrayer complètement la présence des algues bleues dans nos plans d'eau. Nous savons tous que le surplus de phosphore dans les plans d'eau provient de nombreuses activités humaines, par exemple les rejets d'eau non traitée ou insuffisamment traitée, les installations septiques déficientes et, surtout, les activités agricoles.
    Par contre, il ne faut pas oublier que dans certaines régions, les activités agricoles sont moins présentes près des plans d'eau. Par exemple, de plus en plus de personnes choisissent de vivre de façon permanente aux abords des plans d'eau, ce que je peux constater dans la circonscription que je représente. De nombreuses personnes qui occupaient des résidences dites secondaires à l'époque choisissent de les occuper de manière permanente. Ce ne sont plus des chalets d'été, mais bien des résidences principales équipées, par exemple, d'un lave-vaisselle qui utilise des phosphates, ce qui amplifie le phénomène des cyanobactéries, d'où l'importance de ce projet de loi et la nécessité d'agir rapidement.
    Mais comme je l'ai dit, éliminer les phosphates dans les détergents ne va pas enrayer complètement cette problématique. D'autres actions seront nécessaires, comme conserver ou restaurer la végétation et le caractère naturel des rives et des lacs — des actions qui sont davantage entreprises actuellement au Québec —, éviter d'utiliser des fertilisants ou des engrais chimiques, et voir au bon fonctionnement et à l'entretien des fosses septiques.
    Toutes ces questions qui touchent l'aménagement du territoire et les pratiques agricoles relèvent de la compétence du Québec et des provinces. D'ailleurs, le plan d'intervention du gouvernement du Québec propose une série d'outils réglementaires de prévention et de sensibilisation et les met à la disposition des municipalités, pour les aider à faire face à ces défis.
    Je terminerai, monsieur le président, en répétant que l'interdiction des phosphates dans les détersifs peut être facilement mise en œuvre par le gouvernement fédéral. Depuis le tout début de ce processus, nous avons été ouverts aux discussions et aux propositions afin d'améliorer le projet de loi, comme la possibilité d'ajouter un amendement qui éviterait de pénaliser les centres hospitaliers, s'il n'y a pas de produits de remplacement.
    Je crois qu'il est primordial de répéter l'importance d'agir rapidement et de s'assurer que la réglementation s'applique dans les plus brefs délais, afin d'éviter que cette situation s'aggrave.
    Merci, monsieur le président.
(1605)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons poser une première série de questions avant d'entendre les autres témoins. Nous sommes un peu pressés par le temps.
    Nous allons commencer par M. Scarpaleggia.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur André, de vous être déplacé pour nous présenter votre projet de loi.
    Si j'ai bien compris, en ce moment, il n'y a pas d'exemption dans votre projet de loi pour les usages commercial ou industriel. Cependant vous seriez en faveur d'exempter, par exemple, les centres hospitaliers, les universités, les institutions publiques, etc. où beaucoup de gens mangent dans une cafétéria, où, autrement dit, on nettoie la vaisselle ou on fait la lessive à grande échelle.
    Seriez-vous en faveur d'inclure à votre projet de loi des exemptions par voie d'amendement?
    Oui, merci de votre question, cher collègue.
    Nous avons étudié le sujet. J'ai travaillé dans le réseau de la santé dans une carrière précédente. C'est une question que nous nous sommes posée, au Bloc québécois, dernièrement.
    Vous savez, il y a quand même certains produits actuellement à l'étude pour remplacer les phosphates dans le détergent, comme ceux à base de sel. Mais jusqu'à maintenant, ces produits n'ont pas été éprouvés scientifiquement.
     Dans le moment, je crois que les phosphates servent beaucoup à désinfecter certains articles, surtout dans les centres hospitaliers. Bien sûr, il ne faudrait pas que ce projet de loi vienne nuire en partie à la santé publique et aux soins dans les centres hospitaliers. On serait donc prêts à examiner cette question.
(1610)
    Donc, vous exempteriez uniquement les centres hospitaliers, et non pas les institutions scolaires ou les restaurants, par exemple?
    Nous avons considéré la question des centres hospitaliers. Il peut y avoir d'autres endroits pour lesquels il est démontré qu'un retrait du phosphate des détergents est nuisible et met en danger la santé publique, et il faut être ouverts à cet égard; mais il ne faut pas non plus adopter une position extrême.
    Savez-vous si le projet de réglementation annoncé par le gouvernement inclut des exemptions?
    En ce qui concerne la réglementation, je n'ai pas vu, dans les documents, qu'elle exemptait nécessairement les hôpitaux ou d'autres institutions.
    Vous dites donc que des produits qui ne contiennent aucune trace de phosphore ou de phosphates se vendent actuellement dans les supermarchés. Cela existe-il déjà?
    Comme je vous le disais auparavant, il y a près de 800 lacs dans ma circonscription et il y a beaucoup de touristes. Il y a eu réellement une très grande concertation des gens qui vivent aux abords de ces lacs avec les municipalités et les commerçants.
    On retrouve dans ces régions touristiques — prenons Saint-Mathieu ou Saint-Gabriel-de-Brandon, par exemple — des commerçants qui font la promotion des produits sans phosphate parce qu'ils tiennent à maintenir en santé leur milieu, leurs lacs. Car c'est toute une menace...
    Je comprends, monsieur André, et je ne veux pas vous interrompre, mais vous disiez tout à l'heure que ces produits n'ont pas été évalués de façon scientifique.
    Alors, sait-on si on peut effectivement substituer ces produits à des produits qui auraient peut-être 0,5 p. 100 de traces de phosphate? Peut-on aller de l'avant et affirmer que ces produits n'ont aucune trace de phosphates, qu'on peut s'en servir pour remplacer les produits qui contiennent, à l'heure actuelle, des phosphates ou des produits qui contiendraient 0,5 p. 100 de phosphates?
    Lorsque je parlais de preuves scientifiques, je pensais à des produits pouvant être utilisés dans les centres hospitaliers pour désinfecter de la vaisselle de même que certains matériaux ou substances. Au Québec, les pharmacies Jean Coutu ont décidé, de leur propre initiative, de vendre seulement des produits sans phosphate. On retrouve ceux-ci dans plusieurs autres commerces. Je sais que vous vous intéressez à cet aspect de la question. Pour ma part, j'en utilise dans mon lave-vaisselle, et je constate qu'ils sont aussi efficaces que les produits contenant des phosphates. Ces produits existent déjà, et je crois qu'il s'agit simplement d'en faire la promotion. La table est mise. Il faut maintenant adopter des mesures législatives qui permettront de faire de la prévention en vue de garder l'eau de nos lacs aussi propre que possible.
(1615)
    Mais comme vous le savez, l'industrie propose de réduire à 0,5 p. 100 le contenu en phosphates des produits pour le lave-vaisselle et la lessiveuse. Savez-vous pourquoi elle propose une réduction de cet ordre plutôt que leur élimination complète? Il doit y avoir un raisonnement derrière cela. Étant donné que les provinces du Manitoba et du Québec ont elles aussi proposé 0,5 p. 100 et que c'est en outre la limite imposée dans certains États américains, seriez-vous ouverts à l'idée d'adopter ce pourcentage?
    Oui, on le serait. On a parlé de 0 p. 100 parce qu'après avoir vérifié ce qu'il y avait sur le terrain, on a noté qu'il y avait des produits sans phosphate. J'ai pris contact avec des fabricants à quelques reprises. Pour ce qui est des phosphates, ces fabricants disent être dans l'impossibilité de garantir un taux de 0 p. 100. En ce qui a trait à celui de 0,5 p. 100, compte tenu du fait que le Québec, le Manitoba et d'autres États américains ont légiféré en ce sens, je crois qu'on serait prêts à étudier la question.
     Comme vous le savez, j'ai présenté un projet de loi qui limiterait à 0,5 p. 100 l'utilisation des phosphates. Vous et moi sommes donc sur la même longueur d'onde. Mais vu qu'il va y avoir une réglementation, pourquoi devrait-on inclure ces dispositions dans le projet de loi? Ne s'agit-il pas d'un double emploi? Ne devrait-on pas tout simplement préciser dans le projet de loi que le gouvernement doit réglementer le niveau de phosphates?
    Je crois qu'un projet de loi a un caractère plus structurant qu'une réglementation. Le fait d'adopter un projet de loi plutôt qu'une simple réglementation peut être plus profitable. C'est dans cette optique que nous présentons ce projet de loi.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Bigras.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    D'abord, monsieur André, je vous félicite pour votre initiative. J'ai eu la chance d'aller dans votre circonscription il y a quelques mois. J'ai vu que ce genre de mesures est attendu, plus particulièrement par les citoyennes et citoyens riverains — qui vivent près des lacs et des rivières — non seulement de votre circonscription, mais de toutes les régions du Québec. Je pense, entre autres, au Saguenay–Lac-Saint-Jean.
    On se rend compte que cette mesure n'est pas simplement reliée au fait que la contamination ou l'eutrophisation des lacs est attribuable aux activités agricoles, mais également aux activités humaines. En ce sens, le projet de loi a toute sa valeur.
    Vous avez répondu aux questions de M. Scarpaleggia sur différents aspects. Je comprends que vous souhaitez une exemption pour les établissements de santé, par exemple les centres de soins de longue durée et les hôpitaux, bien sûr, tout en assurant le respect d'un certain nombre de normes de santé publique.
    Vous nous avez dit aussi être prêts à amender le projet de loi pour intégrer la limite de 0,5 p. 100 prévue dans la réglementation tant fédérale que québécoise. On est donc près de s'entendre. La seule chose sur laquelle on discute est le moment où la réglementation devrait s'appliquer.
    Devrait-elle s'appliquer maintenant ou en 2010? Est-ce bien ce que je comprends de votre témoignage d'aujourd'hui? Presque tout le monde s'entend, sauf pour ce qui est de l'application immédiate de la réglementation. On finira peut-être par s'entendre là-dessus.
(1620)
    Vous avez fait une bonne synthèse du témoignage, monsieur Bigras. Je vous remercie de votre question.
    On s'est demandé pourquoi on n'agirait pas immédiatement. Le Manitoba ou la Nouvelle-Écosse vivent le même phénomène, mais je vais vous parler du Québec, que je connais davantage.
    Les gens sont prêts et organisés. On s'est rendus dans certaines régions où il y a des lacs. Comme je le mentionnais à M. Scarpaleggia, on retrouve des produits sans phosphate. Les gens sont sensibilisés. Les municipalités légifèrent sur la végétation des berges. Elles veulent prendre des moyens pour surveiller et encadrer davantage les fosses septiques. Pourquoi ne pas agir maintenant, alors qu'on sait que le phénomène grandit d'année en année?
    L'année dernière, 200 lacs ont été touchés. Quel sera leur nombre, en 2008? Le nombre de lacs touchés pourrait augmenter d'une centaine et atteindre 300, et cette tendance se poursuivra. Une fois qu'un lac est touché, il faut compter quelques années avant qu'il ne redevienne sain et qu'on puisse exercer des activités aquatiques de façon sécuritaire.
    L'eutrophisation du lac Mandeville, qui est situé dans mon comté, est élevée. Ce lac est mort, actuellement. Il contient une quantité de phosphore tellement élevée qu'une des solutions envisagées est de vider l'eau du lac. C'est incroyable mais vrai. Certaines études examinent cette option. Bien sûr, il y a la question des phosphates dans les détergents, des fosses septiques et de la pollution agricole. On parle de lacs dans lesquels les gens se sont baignés pendant des années.
    Notre eau douce est notre richesse naturelle de l'avenir. Si on ne peut pas garantir la sécurité des activités aquatiques, il y a un sérieux problème. On a des moyens à notre disposition, et on peut agir rapidement. Le phénomène va s'amplifier. Pourquoi attendre encore deux ans?
    Donc, vous dites qu'il faut intervenir maintenant. Ce qui m'a frappé d'abord, c'est de constater qu'il y a des produits de remplacement. En principe, cela devrait permettre une accélération de la mise en place de la réglementation, il me semble.
    Je consulte la revue Protégez-vous de mars 2008, une revue s'adressant aux consommateurs. Ce qui me frappe d'abord, c'est qu'il y a des produits de remplacement. De plus, les produits sans phosphate sont parfois plus efficaces — et je ne veux pas mentionner de noms bien connus — que des produits contenant des phosphates. Dans ceux contenant des phosphates, il est question d'une teneur entre 2 p. 100 et 6 p. 100. On a fait l'analyse des produits sans phosphate, en considérant effectivement la règle du 0,5 p. 100. Non seulement il y a des produits de remplacement, mais bien souvent ceux-ci sont plus efficaces que les produits qui contiennent des phosphates. C'est un peu paradoxal, il me semble.
    Il y a un autre élément dont j'aimerais vous entendre parler. Les notes d'information de la Bibliothèque du Parlement nous disent: « La plus grande partie du phosphore anthropique provient de l'agriculture et des déchets humains. Au total, une part minime, peut-être 1 p. 100 à 1,5 p. 100, provient des détergents pour lave-vaisselle. »
     Je me rappelle des arguments lors de l'étude de ma motion. On avait reçu un témoin à ce moment-là, M. Carignan — qu'on recevra encore prochainement —, qui nous disait qu'il y a un danger à utiliser une règle et des résultats canadiens, et de tenter de les appliquer dans des régions du Québec. Il nous donnait l'exemple des Laurentides — ce n'était pas particulièrement dans les plus Hautes-Laurentides, où il n'y a pas d'activité agricole — où il y a des lacs contaminés.
    Constatez-vous la même chose dans votre région? N'est-il pas évident que, naturellement, la contamination est due bien souvent à des activités agricoles, mais aussi, dans certaines régions où il n'y a pas d'activités agricoles, à une contamination des lacs. Donc, c'est lié directement à l'utilisation. C'était ma première question.
    Une deuxième chose m'intrigue: c'est de savoir s'il n'y a pas aussi un impact économique sur la valeur foncière des résidences autour de ces mêmes lacs. Prenons le cas de quelqu'un qui a acheté un chalet en 1960, alors que la qualité de l'eau respectait les normes, et que 30 ou 40 ans plus tard, à ce même endroit, il y a un lac contaminé.
    Cela n'a-t-il pas aussi un impact pour ces citoyens et ces citoyennes qui font l'acquisition de ces résidences secondaires, qui, à un moment de leur vie, deviennent bien souvent des résidences principales? Donc, il y a un aspect environnemental, bien sûr, mais il me semble qu'il y a aussi un aspect économique lié à cet enjeu.
(1625)
    Bien sûr, je suis d'accord avec vous, monsieur le député.
    Lorsqu'on ferme un lac l'été, parce qu'il y a un taux trop élevé de cyanobactéries, cela a des effets économiques importants sur le milieu. Le Lac Maskinongé, à Saint-Gabriel-de-Brandon — vous devez le connaître — est fermé régulièrement. Cela a une conséquence désastreuse sur le plan économique, parce que l'économie de ce milieu repose sur l'industrie récréotouristique. Le Lac Maskinongé, c'est là où les gens pratiquent des activités aquatiques et viennent dans les chalets. Toute une vie estivale s'y passe. Cela a une conséquence économique pour le milieu, pour ce qui concerne les chalets et les maisons. Les gens qui viennent vivre aux abords d'un lac choisissent un lac dont l'eau leur inspire confiance. Ils veulent que cette eau soit saine, qu'elle réponde aux normes sanitaires et aux normes de santé publique. Dans ce cas, cela a un impact.
    L'agriculture est un phénomène important. On sait que les engrais chimiques et tout le lisier de porc qui se déversent engendrent beaucoup de phosphore, qui entraîne des cyanobactéries. Dans ma circonscription, dans les Laurentides et dans d'autres circonscriptions — j'ai visité quelques autres endroits touchés par les cyanobactéries —, il y a des endroits où l'on retrouve seulement des chalets, où il n'y a pas d'activité agricole.
    J'ai mis la main sur une étude du gouvernement de l'Ontario, réalisée par l'organisme Gartner Lee Ltd., portant sur les lacs Muskoka — plusieurs Ontariens doivent les connaître — à proximité desquels l'on retrouve plusieurs résidences. Cette étude démontrait que chaque résidence située à 300 mètres des lacs produisait environ 800 grammes de phosphore par personne. Si on multiplie par le nombre de chalets et le nombre de personnes, vous comprenez qu'une quantité importante de phosphore se déverse dans ces lacs. De 30 . 100 à 40 p. 100 du phosphore provenaient des installations septiques. Les installations septiques non conformes, non entretenues ou trop proches des lacs peuvent avoir un impact important sur le taux de phosphore. De 55 p. 100 à 60 p. 100 du phosphore provenaient des détergents qui contenaient des phosphates. C'est une étude du gouvernement de l'Ontario dont je pourrai indiquer la référence au comité.
    Cela a quand même un impact important. Bien sûr, si en plus il y avait des activités agricoles autour de ces lacs, ça deviendrait...
(1630)
    Est-ce possible d'obtenir l'étude que le député vient de présenter?

[Traduction]

    Je suis certain qu'il peut nous la fournir.
    Monsieur Bigras, vous avez parlé des différents produits qui étaient mentionnés dans un article d'une revue. Il serait peut-être intéressant d'avoir une copie de celui-ci. Vous pourriez peut-être remettre l'article et l'exemplaire de l'étude au greffier pour qu'il puisse les photocopier et les distribuer aux membres du comité.
    Nous allons maintenant entendre M. Warawa.
    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur André.
    Avant de commencer, je voudrais savoir si je suis le dernier à intervenir dans ce tour-ci, et si la parole va ensuite être cédée au parti ministériel.
    Oui.
    Je vais partager mon temps de parole avec M. Harvey. Vous pouvez m'arrêter au bout de cinq minutes.
    Monsieur André, avez-vous eu l'occasion de lire les notes d'information de la Bibliothèque du Parlement?

[Français]

    Non.

[Traduction]

    C'est malheureux, parce que c'est un document fort intéressant qui porte sur le projet de loi C-469.
    M. Scarpaleggia vous a posé certaines questions que j'allais moi-même soulever. Toutefois, il y en a une, importante, qui me préoccupe. Vous lui avez dit que vous êtes d'accord avec l'idée de prévoir, dans le projet de loi, des exemptions pour les hôpitaux, par exemple. Vous êtes prêt, aussi, à faire passer la limite de zéro à 0,5 p. 100, ce qui correspond à la limite imposée par le Québec, le Manitoba et plusieurs États américains.
    M. Scarpaleggia vous a demandé pourquoi vous insistez pour aller de l'avant avec le projet de loi, si la question doit faire l'objet d'un règlement. Vous avez dit, si je ne m'abuse, qu'une mesure législative est plus efficace qu'un règlement. Le rapport en discute, sauf qu'il n'y a pratiquement aucune différence entre l'approche réglementaire et l'approche législative. Les deux permettent d'atteindre le même but.
    Vous savez que le gouvernement a publié un avis d'intention de modifier le règlement en février. Si l'on peut obtenir le même résultat par voie réglementaire ou législative, que le processus est déjà lancé et qu'il risque d'être achevé avant l'adoption du projet de loi, pourquoi aller de l'avant avec celui-ci?

[Français]

    Merci de votre question.
    Comme je l'ai indiqué auparavant, bien sûr, il y a d'autres règlements en cours de préparation. Aux États-Unis, plusieurs États, dont Washington, emboîtent le pas et vont adopter un taux d'environ 0,5 p. 100. Il y a l'Union européenne, qui se dirige vers ce 0,5 p. 100. Le gouvernement du Québec, par exemple, a légiféré à 0,5 p. 100. Le fédéral, comme je vous l'ai dit, n'aura pas de réglementation avant 2010 et va adopter le 0,5 p. 100.
    Dès lors, on est prêts à accepter le 0,5 p. 100. Comme je l'ai expliqué, lorsqu'on a mis en place le projet de loi, il y avait des produits domestiques — et il y en a toujours — qui avaient une teneur de 0 p. 100. Cependant, après quelques contacts avec les entreprises, on a constaté que certaines entreprises ne pouvaient garantir de respecter ce 0 p. 100.

[Traduction]

    Excusez-moi. Je suis désolé de vous interrompre, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
    Donc, vous dites que vous voulez aller de l'avant avec le projet de loi.

[Français]

    Oui.
    Vous demandez pourquoi tout de suite et non en 2010? C'est parce que la réglementation du gouvernement entre en vigueur en 2010. Mais, pourquoi pas tout de suite; pourquoi attendre à 2010? Voilà ce que j'ai compris.

[Traduction]

    Je voulais savoir pourquoi vous insistez pour aller de l'avant avec le projet de loi alors que le gouvernement compte modifier le règlement. Nous pouvons peut-être attendre que les modifications entrent en vigueur en 2010 au lieu d'agir tout de suite, c'est-à-dire en 2009, comme vous le proposez.
    Vous n'avez pas eu l'occasion de lire le document. Je vous encourage à le faire, maintenant que vous l'avez en main.
    Passons maintenant aux consultations. Qui avez-vous consulté? Les industries? Les hôpitaux? Concernant les produits désinfectants avec phosphates qu'emploient les hôpitaux, vous avez dit que vous utilisez des produits de remplacement dans votre lave-vaisselle et qu'ils sont efficaces.
    Sauf votre respect, vous n'habitez pas dans un hôpital, mais vous avez un chalet. Pouvez-vous dire au comité, et aux hôpitaux, quelles sont les preuves scientifiques sur lesquelles vous vous fondez pour arriver à cette conclusion? Parce que nous allons rencontrer des témoins. Sur quelles preuves scientifiques vous fondez-vous pour dire que les phosphates peuvent être éliminés? Les industries et les hôpitaux affirment avoir besoin de ces produits.
(1635)

[Français]

    Comme je l'ai indiqué, après avoir étudié la question, nous sommes d'accord avec vous pour conserver un pourcentage de phosphates pour certaines industries, ou pour les services de santé. Nous sommes favorables à cette position.
     Par contre, dans certaines autres études scientifiques, que je n'ai pas avec moi, il est question de produits à base de sel qui pourraient éventuellement remplacer les phosphates. Je n'ai pas le terme exact, mais je l'ai dans mes documents. Actuellement, ce n'est pas au point. Pour répondre à votre question: il va falloir maintenir un certain niveau de phosphates dans certaines industries ou hôpitaux, c'est à voir.

[Traduction]

    Monsieur Harvey.

[Français]

    Premièrement, le phosphate n'est pas un désinfectant. C'est plutôt un élément qui permet à l'eau de se défaire. Les liens entre les molécules d'eau se défont et cela permet à l'eau d'agir comme un solvant et de nettoyer les choses. Il ne s'agit donc pas d'un élément qui, comme le chlore ou l'ozone, désinfecte. Un peu plus tôt, j'examinais les calculs de votre étude. Il y était mentionné que chaque résidant émettait à peu près 800 grammes de phosphates dans l'eau et qu'environ 50 p. 100 de ce phosphate provenaient d'éléments personnels, de la maison.
    Il est question d'utilisation de phosphates.
    Ce pourcentage de 50 p. 100 était directement relié aux détergents. Cela veut dire environ 200 grammes par habitant, ce qui est l'équivalent d'une tasse par habitant, par année, grosso modo. C'est de cela que vous parlez.
    Un peu plus tôt, mon collègue a parlé d'une réglementation qui ne touchait pas seulement les phosphates des savons, mais l'ensemble de l'industrie, que ce soit pour l'agriculture, etc. Par conséquent, pourquoi présenter un projet de loi qui, finalement, s'attaque à une très faible partie du problème des algues bleues?
    Premièrement, précisons: on parlait de 60 p. 100, environ, des 800 grammes.
    Il s'agit de 250 grammes.
    On augmente un peu. Je pense que c'est quand même assez important parce que des lacs dans des villégiatures touristiques sont touchés de manière importante juste par ce type de phosphore provenant des fosses septiques et des phosphates des détergents. Cela a quand même une conséquence importante. Vous le savez, vous êtes au Québec, vous y avez sûrement vu certains phénomènes. Ainsi, le Lac-Saint-Jean a été touché.
    Pourquoi aller de l'avant avec ce projet de loi? Il y a un élément qui est de compétence fédérale lorsqu'on parle d'importation.
(1640)
    Monsieur André, là n'est pas la question. Une réglementation existe déjà et elle sera mise en œuvre en 2010. Elle couvrira l'ensemble du problème des phosphates et non pas seulement 1 p. 100 du problème. Ce problème, c'est l'ensemble des engrais qui aboutissent dans l'eau, qu'il s'agisse des éléments provenant de la gestion des fosses septiques, des engrais utilisés par les résidants près des lacs, que ce soit à cause du déboisement, de changement des bassins hydrauliques, etc.
    Je vous inviterais à examiner de nouveau cette réglementation parce qu'elle ne contient rien, ni pour les engrais chimiques, ni pour les fosses septiques, ni pour quelqu'autre élément à part les phosphates.
    Il y a d'autres éléments: la question des engrais chimiques, la question des bandes protectrices autour des rives, pour les agriculteurs, ce dont vous avez sûrement entendu parler. Comme vous savez, il s'agit d'une compétence provinciale, donc, du Québec. Il faudra respecter les compétences des provinces et du Québec en cette matière, car elles ont commencé à agir. Vous savez qu'un plan a été mis en avant par la ministre de l'Environnement du Québec relativement à la question du reboisement des rives et de l'amélioration de la qualité des fosses septiques, et pour permettre aux municipalités d'agir, d'aller de l'avant, de réglementer et même d'émettre des amendes aux gens qui ne se conforment pas aux règles.
    Encore aujourd'hui, dans plusieurs régions au Québec, il est question de fosses septiques non conformes. Il y a des gens qui n'ont même pas de fosses septiques, et les déchets domestiques vont directement dans les... Il y a donc encore beaucoup de choses à faire, et une partie importante est de compétence provinciale. L'élément derrière ce projet de loi est que le fédéral peut agir. C'est pourquoi le Québec a demandé au fédéral d'agir dans ce champ de compétence.

[Traduction]

    Merci, monsieur Harvey.
    Merci beaucoup, monsieur André. Tout cela, pour moi, est du déjà-vu. Il y a 35 ans, je disais qu'il fallait trouver un moyen d'éliminer le phosphore des plans d'eau. On semble enfin agir dans ce domaine, ce qui est une bonne chose.
    Je tiens également à préciser que dans mon coin de pays, on a recours au GPS pour assurer la répartition des engrais et des semences. Aucune application n'a lieu dans les endroits situés près des cours d'eau ou là où le phosphore n'est pas nécessaire. Le secteur agricole a maintenant recours à des méthodes très scientifiques. Je ne sais pas si cela fait l'objet d'une loi ou non, mais il est économiquement avantageux, pour l'agriculteur, de contrôler l'application d'engrais qui coûtent, aujourd'hui, très chers.
    C'est là un autre aspect positif de votre projet de loi. Merci de l'avoir déposé. Je sais que le comité va l'examiner. Nous allons entendre plusieurs autres témoins à ce sujet. Donc, merci d'être venu nous rencontrer.
     Nous allons maintenant céder la parole aux représentants des ministères de l'Environnement et de la Justice. Je crois comprendre que nous allons avoir droit à un bref exposé de la part d'Environnement Canada. Nous passerons ensuite aux questions.
    Madame Kenny, il paraît que vous avez une déclaration à faire. Je vous souhaite la bienvenue. Je sais que les membres du comité vont vouloir vous poser des questions.
    Merci.
(1645)
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Nous sommes heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour appuyer le Comité dans l'examen du projet de loi.
    Tout d'abord, je souhaiterais faire le point sur l'important problème que constituent les algues bleues et le rôle que joue le phosphore dans leur croissance. Nous savons que la charge en polluants phosphorés dans les eaux de surface peut entraîner de nombreux problèmes, dont l'épuisement d'oxygène, et que ces polluants agissent aussi comme des éléments nutritifs ou des engrais qui favorisent la croissance de certaines algues bleues.
    Lorsque les concentrations d'éléments nutritifs dans les eaux de surface sont élevées, les algues bleues peuvent proliférer et dominer la communauté naturelle, et aussi produire des toxines nuisibles pour les êtres humains, le bétail et les poissons. Bien que ces toxines soient elles-mêmes inodores et insipides, d'autres composés peuvent occasionner des problèmes de goût et d'odeur désagréables, et affecter l'utilisation de l'eau à des fins de consommation et récréatives.
    Environnement Canada surveille la présence d'algues bleues depuis bon nombre d'années et reconnaît qu'il est d'une importance capitale de réduire le risque que représentent ces toxines.
    Il y a un facteur de prolifération que nous pouvons contrôler, et c'est la concentration de phosphore dans les eaux de surface. En fait, Environnement Canada a adopté pour la première fois un règlement à cette fin en 1970, d'abord en vertu de la Loi sur les ressources en eau du Canada, et ensuite de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
    Depuis l'entrée en vigueur de ce règlement, l'utilisation du phosphore dans les détergents à lessive a diminué de façon constante, mais le nombre croissant de lave-vaisselle dans les ménages canadiens indique que la quantité de phosphore provenant de cette source a augmenté. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a récemment publié un avis d'intention dans la Partie 1 de la Gazette du Canada pour modifier le Règlement sur la concentration en phosphore.
    Cet avis d'intention indique que les modifications proposées au règlement établiront à 0,5 p. 100 ou moins la concentration maximale de phosphore dans les détergents pour lave-vaisselle, selon le poids. À l'heure actuelle, les détergents pour lave-vaisselle ont une concentration moyenne en phosphore de 1 à 8 p. 100. Les résultats visés par cette proposition permettraient de réduire considérablement les concentrations de phosphore qui entrent dans les eaux usées.
    L'avis d'intention propose également de diminuer davantage la concentration de phosphore dans les détergents à lessive et de ramener la limite actuelle, qui est de 2,2 p. 100, à 0,5 p. 100 ou moins, selon le poids.
    Enfin, d'autres produits de nettoyage seront également examinés afin de déterminer s'il est possible de baisser la concentration maximale en phosphore à 0,5 p. 100 ou moins, selon le poids.
    Au cours des derniers mois, nous avons mené d'importantes consultations, examiné les données scientifiques dans ce domaine et cerné les meilleures pratiques utilisées par d'autres gouvernements. Pour cette raison, il est clair que les modifications que je viens de décrire nécessiteront une reformulation à grande échelle des produits.
    L'industrie a clairement signalé qu'elle est prête à respecter ces nouvelles limites, mais qu'elle a besoin de temps pour pouvoir reformuler tous les produits et trouver des solutions de rechange sûres et efficaces. En fait, l'Association canadienne de produits de consommation spécialisés a annoncé, en octobre, une initiative prise par l'industrie pour ramener volontairement à 0,5 p. 100 la concentration maximale de phosphore, selon le poids, dans les détergents pour lave-vaisselle d'ici juillet 2010. Nous savons également qu'un certain nombre d'États américains, de même que le Québec et le Manitoba, proposent des limites qui devraient entrer en vigueur en juillet 2010. Pour toutes ces raisons, nous pensons que l'on devrait prendre en compte toutes nouvelles normes ayant pris effet en juillet 2010.
    En menant nos consultations et nos recherches, nous avons établi qu'il est important d'autoriser des exemptions raisonnables pour des raisons de santé et de sécurité. Cela est particulièrement crucial pour des établissements comme les hôpitaux et les restaurants, où les appareils ont une capacité bien plus importante, fonctionnent à plus haute température et ont un cycle beaucoup plus rapide que les appareils ménagers. Le phosphore contenu dans les détergents utilisés dans ces établissements joue un rôle majeur sur le plan sanitaire.
    Les résultats de nos consultations et de nos recherches ont également mis en évidence les facteurs à prendre en considération concernant la concentration réglementaire de phosphore prescrite dans le règlement.
(1650)
    Il est important de noter que tous les autres gouvernements, notamment celui du Manitoba et du Québec, ont proposé une concentration maximale de phosphore de 0,5 p. 100 pour tenir compte de sa présence accidentelle et des difficultés techniques que pose son élimination totale de la composition des détergents.
    À ce titre, une interdiction complète du phosphore dans les détergents pourrait être vue comme une infraction aux obligations auxquelles le Canada s'est engagé en vertu de l'Accord sur les obstacles techniques au commerce de l'OMC ou de l'ALENA, car elle constituerait une mesure plus restrictive que nécessaire au plan commercial, surtout que d'autres pays n'imposent pas une telle interdiction.
    En plus de chercher des moyens de modifier le Règlement sur la concentration en phosphore, Environnement Canada travaille de concert avec les provinces et les territoires pour élaborer des normes et des règlements communs relatifs aux effluents d'eaux usées municipales en vue de réduire la concentration de phosphore qui entre dans nos eaux de surface.
    Selon les données scientifiques actuelles, les effluents d'eaux usées municipales constituent l'une des plus importantes sources du phosphore qui entre dans nos cours d'eau. L'élaboration de normes nationales et de règlements harmonisés sur les effluents d'eaux usées municipales permettra de renforcer la norme canadienne pour le traitement des eaux usées municipales, et de veiller à ce que plus de phosphore soit éliminé par filtrage durant le traitement. Nous prévoyons proposer de tels règlements cette année.
    Avant de conclure, je voudrais préciser que tous les plans d'eau et bassins versants sont uniques, et que la méthode de contrôle et de gestion des phosphates peut différer d'un système à l'autre. Les sources de pollution peuvent sembler évidentes, mais en réalité, le problème est complexe, car il existe de nombreuses sources.
    Dans un bassin donné, certaines sources de phosphate peuvent être difficiles à repérer et à évaluer parce qu'elles se propagent, par exemple, dans les fosses septiques mal entretenues. C'est la raison pour laquelle il est également important qu'Environnement Canada continue de travailler de concert avec ses partenaires municipaux, provinciaux et territoriaux pour s'assurer que les mesures nécessaires sont prises en vue de protéger et de préserver les eaux canadiennes.
    Comme je l'ai expliqué précédemment, le ministère de l'Environnement reconnaît que la prolifération d'algues bleues est un problème important et complexe. Par conséquent, nous sommes en faveur du projet de loi C-469. Notre approche consiste, comme je viens de le décrire, à modifier le Règlement sur la concentration en phosphore, afin de réduire efficacement la quantité de phosphore que de tels produits déversent dans les eaux canadiennes et d'allouer le temps nécessaire pour atteindre les limites proposées.
    Je conclurai en disant que le projet de loi C-469 est une option qui permet de faire face au problème important de la prolifération des algues bleues dans les rivières et lacs du Canada. Cependant, ce projet de loi présente un certain nombre de défis qui doivent être examinés davantage.
    Nous répondrons volontiers aux questions des membres du comité. Je fournirai aussi les analyses ou les renseignements complémentaires que me demandera le comité.
    Merci beaucoup, madame Kenny.
    Monsieur McGuinty.
    Merci beaucoup, madame Kenny.
    Il y a de nombreuses municipalités qui comptent des plans d'eau douce. Elles se sentent souvent tiraillées, car elles voudraient élargir l'assiette de l'impôt foncier municipal dans le but d'accroître leurs recettes. Il y a différentes régions du Québec qui sont soumises à des pressions, notamment celles qui connaissent une forte hausse de la construction de maisons ou de chalets typiques, ainsi de suite. Des variations ont été observées dans les plans d'aménagement des municipalités. Certaines exigent que les constructions se situent à 100, 200, 50 pieds des berges, ou encore imposent des limites minimales. Or, les règles, d'une province à l'autre, ne sont pas uniformes.
    Avez-vous eu connaissance, dans le cadre de vos consultations, d'analyses économiques qui montrent à quel point les prix des propriétés peuvent chuter lorsqu'un cours d'eau ou un lac est touché par les algues bleues, ou qu'il commence à l'être? Avez-vous des analyses qui font état des répercussions économiques qu'entraîne ce phénomène?
(1655)
    Malheureusement, nos consultations ont surtout porté sur la mise en place d'une norme et sur les aspects techniques de la question, de sorte que nous n'avons pas exploré les conséquences économiques de ce problème plus vaste que vous décrivez.
    D'accord. Merci.
    Vous avez parlé de la limite de 0,5 p. 100 et de la norme volontaire à laquelle les fabricants entendent se conformer en juillet 2010.
    Oui.
    Lorsque le président-directeur général de Loblaws se présente à la télévision et vante les mérites, en anglais et en français, du nouveau détergent sans phosphate pour lave-vaisselle que vend Loblaws, est-ce qu'il fait vraiment la promotion d'un produit sans phosphate?
     À notre connaissance, il n'existe pas de norme régissant l'appellation « sans phosphates ». Je crois qu'ils veulent en fait dire qu'ils n'utilisent pas de produits contenant des phosphates dans leur détergent. Lorsqu'on fabrique un détergent, on doit décider sur quoi baser le pouvoir nettoyant, que ce soit des phosphates, des agents synthétiques ou autres. Mais en tant que chimiste, je peux vous affirmer qu'il est techniquement très difficile de garantir l'absence d'un élément. Les phosphates sont naturellement présents dans l'environnement et leur présence peut ne pas être détectable.
    Je ne connais aucun véritable fondement scientifique permettant de confirmer l'absence de phosphates. C'est une définition opérationnelle. Je pense plutôt qu'ils veulent dire qu'ils n'utilisent pas de produits contenant des phosphores comme agents nettoyants dans leur détergent.
    D'accord.
    Je laisserai de côté la question des normes publicitaires et tout ce qui s'y rapporte pour le moment. Nous pourrons y revenir plus tard.
    Pour ce qui est de l'accord de l'OMC relatif aux obstacles techniques auquel vous avez fait référence, madame Kenny, avez-vous un avis juridique à nous donner à ce sujet? Ou est-ce que les services juridiques d'Environnement Canada ou d'une autre organisation pourraient nous aider à comprendre comment cela pourrait devenir un problème?
    Oui. Peut-être que mon collègue de Justice Canada pourrait vous répondre.
    Monsieur le président, comme Mme Kenny l'a mentionné, l'accord de l'OMC sur les obstacles techniques au commerce, et l'avis du gouvernement à l'effet que le projet de loi proposé interdisant l'utilisation de produits contenant des phosphores contreviendrait aux dispositions... Les obligations en vertu de l'ALENA en ce qui a trait aux règlements et aux normes d'ordre technique se rapprochent beaucoup de celles établies dans l'Accord sur les obstacles techniques au commerce, et certaines sont même identiques.
    L'article 2.2 de l'accord en question est particulièrement pertinent. En voici un extrait :
Les Membres feront en sorte que l'élaboration, l'adoption ou l'application des règlements techniques n'aient ni pour objet ni pour effet de créer des obstacles non nécessaires au commerce international. À cette fin, les règlements techniques ne seront pas plus restrictifs pour le commerce qu'il n'est nécessaire pour réaliser un objectif légitime...
    Le projet de loi, s'il est adopté tel quel, constituerait un règlement technique au sens de cet accord. De plus, l'information dont nous disposons au sujet des phosphores, de leurs origines, et de leurs effets sur l'environnement, ainsi que les mesures prises par d'autres gouvernements, indiquent clairement qu'une interdiction totale de l'utilisation de phosphores serait considérée comme une norme plus restrictive qu'il n'est nécessaire pour le commerce.
    Ce le serait plus que d'imposer un seuil de 0,5 p. 100, par exemple?
    Oui.
    Est-ce qu'une limite de 0,5 p. 100 serait plus restrictive pour le commerce qu'un seuil de 1 p. 100?
    Sauf le respect que je vous dois, ce n'est pas de ça qu'il est question ici, monsieur le président. Le fait que d'autres gouvernements limitent de façon justifiée, à leur point de vue en tout cas, à 0,5 p. 100 la concentration de phosphores ne pose pas de problème; ce qui serait problématique, c'est si le Canada en interdisait complètement l'utilisation.
(1700)
    Si l'on adoptait le projet de loi tel quel — supposons qu'il reçoive la sanction royale — à quels mécanismes pourrait-on alors recourir pour contester cette loi?
    En tant qu'avocat-conseil, je n'aime pas du tout faire des suppositions, mais je tenterai tout de même de vous répondre. Je m'en tiendrai évidemment aux conséquences juridiques.
    Dans l'éventualité d'une contestation, on peut recourir à au moins un des deux processus de règlement des différends.
    Et qui devrait les invoquer?
    Il existe deux processus: un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, et un mécanisme de règlement des différends entre États. Dans ce dernier cas, un pays membre peut contester la mesure qu'il soutient être non conforme aux règles commerciales applicables. Si le comité d'arbitrage déterminait qu'il y a eu violation, le Canada devrait modifier ses lois de façon à se conformer aux obligations pertinentes, ou la partie lésée pourrait à la limite interrompre les avantages accordés au Canada en vertu de l'accord applicable -- par exemple, par l'augmentation des tarifs douaniers ou l'élimination des réductions leur étant appliquées.
    Comme je l'ai indiqué, il existe également un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États. Dans ce cas-ci, un investisseur peut présenter une demande en dommages-intérêts découlant de la mesure qu'il soutient être non conforme aux règles applicables. La décision du groupe d'arbitrage fait force de loi et ce dernier peut accorder des dommages-intérêts à la partie lésée et ordonner la restitution de biens. Ces situations pourraient évidemment nuire grandement à l'industrie canadienne.
    Madame Kenny, vous avez parlé plus tôt des phosphates et de l'élaboration de normes nationales. Je crois que cela aurait des répercussions sur les normes canadiennes relatives au traitement des eaux usées. Savons-nous, est-ce qu'Environnement Canada sait, ou est-ce que le gouvernement fédéral sait combien de systèmes de traitement des eaux usées permettent et combien ne permettent pas, à l'heure actuelle, d'éliminer les phosphates des eaux résiduaires?
    Nous disposons de données assez claires à cet égard. Il s'agirait de procéder à un traitement secondaire des eaux résiduaires municipales, ce que prévoit la norme nationale proposée. Le traitement secondaire nous permettrait probablement de réduire d'environ 40 p. 100 la concentration de phosphores dans l'arrivée des eaux usées municipales.
    Dans certains cas, il est possible que...
    Pardonnez-moi. On pourrait réduire les taux de phosphore de 40 p. 100 si tous les systèmes du pays permettaient de faire un traitement secondaire?
    Je veux dire que 40 p. 100 des phosphores pénétrant dans le système seraient éliminés grâce à un traitement secondaire. S'il devait y avoir une augmentation, il existe des moyens pour réduire dans une proportion pouvant atteindre 90 p. 100 la quantité de phosphores présents dans l'effluent déchargé de l'usine.
    Vous affirmez donc à la population que nous détenons le savoir-faire et les capacités techniques pour éliminer les phosphates des eaux usées avant que celles-ci ne retournent, généralement, dans les eaux de surface. Est-ce bien cela? Nous avons déjà les compétences et les technologies nécessaires sur les tablettes. Nous pouvons...
    Il existe en effet des technologies qui pourront grandement contribuer à les éliminer.
    Le terme « traitement secondaire » est vaste, et il y a de nombreuses façons de l'effectuer. Nous parlons de résultats moyens ici. En fait, selon les techniques employées, si l'usine est bien gérée et qu'un suivi adéquat est assuré, il est possible d'éliminer jusqu'à 60 p. 100 des phosphates.
     On peut également recourir à la déphosphatation biologique, un procédé couramment employé en Europe dans certains bassins hydrologiques fragiles. Bien qu'il ne puisse pas complètement les éliminer, ce processus permet de supprimer jusqu'à 90 p. 100 des phosphates, des résultats que l'on obtient déjà dans certaines usines. En Europe, c'est parfois un procédé obligatoire.
    Finalement, avez-vous une idée de ce que cela coûterait dans l'ensemble du Canada pour arriver à une réduction de 40 p. 100 grâce au traitement secondaire des eaux usées?
(1705)
    Je n'ai pas ces chiffres, mais nous disposons d'analyses qui pourraient nous éclairer à ce sujet. Les coûts se situent certainement dans les milliards.
    Des milliards de dollars. Merci.
    Monsieur Lussier.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Kenny, vous avez parlé de votre avis de règlement et expliqué en partie la portée du règlement concernant les produits pour lave-vaisselle. Des dispositions sur les savons à lessive sont déjà incluses dans la LCPE; vous n'allez donc traiter que des produits pour lave-vaisselle.

[Traduction]

    Comme on l'indique dans la déclaration d'intention, les détergents à lessive font partie des éléments que l'on veut réglementer. La LCPE contient déjà des dispositions à cet égard, mais la limite est fixée à 2,2 p. 100 en poids de phosphore. Cette nouvelle proposition viendrait réduire la limite à 0,5 p. 100 pour les détergents à lessive. La norme proposée de 0,5 p. 100 s'appliquerait également aux détergents pour lave-vaisselle.

[Français]

    Dans votre présentation, vous avez parlé de la concentration de phosphore dans les rejets d'eaux usées dans les lacs. Avez-vous aussi pensé aux rejets dans les cours d'eau?

[Traduction]

    Je crains avoir mal compris la question. Je n'ai pas parlé, dans mon exposé, de la concentration de phosphores dans les lacs ou dans les cours d'eau.
    Il s'agit de la concentration du produit.

[Français]

    Dans votre présentation, vous avez mentionné que vous vouliez faire adopter une nouvelle réglementation sur les déversements d'eaux usées dans les lacs, mais vous n'avez pas parlé de déversement dans les rivières. Était-ce intentionnel?

[Traduction]

    Je me suis peut-être mal exprimée. Nous parlions de la réglementation des effluents d'eaux usées municipales qui établirait une norme en matière de traitement. Elle permettrait de réduire la quantité de phosphores, entre autres substances, qui pourraient s'infiltrer dans les cours d'eau.

[Français]

    Si j'ai bien compris,

[Traduction]

    pour les eaux de surface, parce que c'est sur cela que porte votre question, on dispose de lignes directrices canadiennes relatives à la qualité de l'eau, dont certaines visent la protection de la vie aquatique. Il ne s'agit pas de règlements nationaux, mais de directives nationales, qui sont appliquées par les provinces, plutôt que...

[Français]

    ... ciblant particulièrement...

[Traduction]

    Par ailleurs, nous travaillons depuis quelques années avec Agriculture Canada en vue de formuler des normes de qualité de l'environnement afin d'établir de saines pratiques de gestion agricole, comme l'aménagement de bandes de protection et de zones tampons, ainsi que d'examiner les concentrations réelles dans les eaux réceptrices, ce qui pourrait orienter la formulation de ces pratiques exemplaires.

[Français]

    Monsieur Blasioli, avez-vous étudié aussi certains documents concernant la Suisse qui, elle, a des interdictions sur les phosphates depuis 1986, et qui fait partie de l'OMC depuis 1995? Leur a-t-on imposé des contraintes concernant leurs produits ou leurs activités dans l'OMC? Vous semblez vouloir transférer ce problème dans l'ALENA, mais cette question a-t-elle déjà été étudiée dans les ententes de l'OMC?

[Traduction]

    Nous n'avons pas examiné ces faits.
    Je ne dis pas que c'est le cas dans la situation présente, mais je vous dirais que le terme « interdiction » peut s'avérer un euphémisme pour parler d'une très faible limite, comme 0,5 p. 100, plutôt qu'une réelle interdiction totale.

[Français]

    Monsieur Carey, vous avez dit que vous étiez un spécialiste en chimie. Trouve-t-on du phosphore dans les boues de dragage?
(1710)

[Traduction]

    Analyse-t-on les concentrations de phosphore dans les boues de dragage? Je suis persuadé que nos lignes directrices sur l'élimination des déblais de dragage tiennent compte des phosphores. De mémoire, je ne pourrais pas vous donner de chiffres, mais c'est certainement un contaminant connu. Sa présence a été décelée il y a un bon moment.
    Mais nous disposons effectivement de lignes directrices sur l'élimination des déblais de dragage.

[Français]

    D'accord.
    Il y a quelques minutes, dans son exposé devant le député qui a présenté le projet, M. Harvey a fait une sortie où il a parlé de la portée un peu plus large de votre projet de règlement. Il a même englobé la question des rives. Le gouvernement a-t-il l'intention de légiférer aussi sur la protection des rives, dont celles des lacs?

[Traduction]

    Les règlements auxquels nous faisons référence se rapporteraient à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Un volet de cette loi traite des substances nutritives particulières aux produits nettoyants, et c'est ce secteur que nous voulons réglementer pour le moment.

[Français]

    Je vois la distinction. Nous pensions qu'il avait reçu de l'information en priorité. Je pense que nous allons avoir de l'information plus concrète de la part de nos fonctionnaires.
    D'après vous, la réglementation des eaux usées domestiques est-elle une compétence provinciale ou fédérale?

[Traduction]

     Je répondrai d'abord à cette question.
    Il s'agit d'une initiative que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et les territoires, entreprend dans le cadre du Conseil canadien des ministres de l'Environnement. L'objectif est d'établir conjointement des normes communes, dont une serait publiée en vertu de la Loi sur les pêches, une loi fédérale; par contre, chaque province et territoire aurait la possibilité de mettre ses propres mesures en place.

[Français]

    Le gouvernement fédéral compte-t-il mettre des conditions au programme d'infrastructures qui finance les ouvrages de traitement des eaux usées? Compte-t-il imposer des règles et des conditions aux municipalités qui construisent ces infrastructures de traitement des eaux usées?

[Traduction]

    Si je ne me trompe pas, la stratégie consiste à mettre en oeuvre progressivement les normes en question; les municipalités, par exemple, devraient donc faire des investissements pour être plus tard en mesure de satisfaire à ces normes. Je sais que des discussions ont cours entre les programmes d'infrastructure, mais je ne peux répondre en détail à votre question.

[Français]

    Le présentateur du projet de loi C-469 a souvent mentionné les installations septiques. On y associe très souvent le mot « défectueuses ». Les recherches du gouvernement vont-elles permettre de fixer, par exemple, les distances à respecter entre un lac et des installations septiques? Le ministère a-t-il l'intention d'intervenir dans ces règles de construction?

[Traduction]

    Merci de votre question.
    Nous avons fait quelques recherches sur l'absorption dans les sols des substances nutritives, des microbes et des virus provenant d'installations septiques, constatations que nous communiquons aux provinces et aux territoires, qui sont responsables des règlements applicables. Alors, oui, nous disposons de certaines informations à ce sujet, qui pourraient orienter l'aménagement de bandes de protection et l'utilisation d'autres processus.
    Toutefois, je crois qu'un des problèmes dont on ne tient pas nécessairement compte, c'est que beaucoup de ces résidences sont construites sur des terrains qui ne conviennent pas aux installations septiques. Les bandes de protection ne règlent pas tout, notamment si on construit des maisons sur le Bouclier canadien, où il n'y a tout simplement pas suffisamment de sol pour faire fonctionner une fosse septique.
(1715)

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lussier.
    Je permettrai aux deux derniers membres d'utiliser tout le temps qui leur est alloué, alors nous devrons prolonger légèrement la séance, car nous avons commencé avec une demi-heure de retard. Cependant, si vous avez besoin de moins de dix minutes, c'est parfait également.
    Monsieur Cullen.
    L'ambiance est à l'amabilité au Parlement lorsqu'on tient des soirées en l'honneur d'un de nos membres. Alors, je n'utiliserai pas tout le temps qui m'est alloué.
    Je n'ai que quelques questions. Je vous prie d'excuser mon retard, car vous avez peut-être déjà fourni ces renseignements.
    Le projet de loi ne vise que 1 ou 2 p. 100 des quantités totales de phosphore émises. J'essaie de voir s'il y a moyen de déterminer si les détergents contribuent à 1 ou 2 p. 100 du problème. Est-ce proportionnellement plus ou moins élevé? Plus précisément, si la majeure partie des phosphores relâchés dans l'environnement et touchant les lacs proviennent des terres agricoles, est-ce parce que ces dernières sont situées près des lacs et qu'il y a une plus grande interaction entre les deux écosystèmes? Dans un sens, les 1 ou 2 p. 100 de phosphore provenant des détergents pourraient en fait contribuer à peut-être 5 p. 100 ou plus de l'ensemble du problème d'hypereutrophisation des lacs.
    Je vous dirais que les bassins hydrologiques sont différents.
    Pourriez-vous répéter, monsieur?
    Les bassins hydrologiques sont différents, et c'est un peu risqué de se fonder sur des moyennes nationales comme si elles représentaient des conditions individuelles. Nous avons constaté que le phénomène des algues bleues est tout de même présent dans des régions du Bouclier canadien où l'agriculture n'est pas un facteur majeur. Dans ces régions précises, ou dans les lacs en question, il est certain que les détergents contribuent davantage au problème.
    Voulez-vous dire sur le bouclier lui-même?
    Pour certains bassins, les détergents joueront un rôle plus marqué là où l'agriculture est plus ou moins en cause.
    Madame Kenny, j'essaie d'imaginer la situation. Parfois, lorsqu'on envisage de mettre une loi en place, on tente de comprendre les répercussions qu'elle aura pour vous. Par exemple, vous devrez un jour ou l'autre traiter avec les fabricants de produits chimiques.
    Allez-vous accueillir favorablement l'adoption de ce projet de loi? Vous facilitera-t-il la tâche? Est-ce que cela engendrera une série de consultations compliquées? Comment entrevoyez-vous la situation, en supposant que tout ça venait à se concrétiser et qu'on devait faire appliquer cette nouvelle limite de 0 p. 100?
    D'après les consultations que nous avons menées jusqu'à présent, nous croyons que nous pouvons réduire de façon considérable la concentration de phosphates dans les détergents et les produits de nettoyage que l'on trouve actuellement sur le marché.
     Lorsque ce genre de règlement est adopté, il faut également mettre en place un processus de promotion de la conformité dans le cadre duquel on peut informer l'industrie et assurer un suivi auprès d'elle. Nous devrions aussi établir un plan d'application de la loi, qui nous permettrait d'effectuer des tests sur les produits et de répondre aux plaintes formulées et aux inquiétudes soulevées. Cela fait partie du processus réglementaire.
    Il arrive par ailleurs, comme dans le cas des détergents à lessive, que nous devions revoir et mettre à jour les règlements.
    Je crois que la plupart des membres du comité comprennent ce processus. J'essaie plutôt de savoir quelle est la réaction de l'industrie lorsque vous présentez un règlement comme celui-là. Qu'avez-vous obtenu comme réponse lors de vos nombreuses consultations? Les joueurs de l'industrie ont-ils tendance à dire que tout ça n'a pas de sens et que la majeure partie des produits devront être retirés des tablettes, ou sont-ils prêts à se conformer aux règles malgré leur frustration?
    Les intervenants de l'industrie nous ont indiqué que si on leur allouait suffisamment de temps pour trouver des solutions de rechange sûres et efficaces, ils allaient se conformer aux nouvelles exigences.
    J'aimerais être certain de bien comprendre, et ce sera ma dernière question. En ce qui a trait aux coûts de remplacement, nous avons parfois eu affaire à un régime de gestion des produits chimiques où l'on a banni ou limité l'utilisation de certains produits, qui ont par la suite été remplacés par quelque chose qui s'est avéré encore plus nocif que l'original.
    Avez-vous des inquiétudes à propos des produits de remplacement qui pourraient être employés dans le cas présent? Ou savons-nous déjà ce qu'on utilisera, des produits qui ne coûtent pas trop cher, et s'agit-il seulement de modifier les processus de fabrication?
(1720)
    C'est certainement une question importante à poser à l'industrie. Je crois qu'aucun problème n'a été relevé pour certaines des solutions de rechange que nous avons vues. Il se peut que l'industrie envisage d'employer des produits chimiques brevetés, mais je ne saurais vous en dire davantage à ce sujet.
    À Environnement Canada et Santé Canada, nous avons une liste de substances d'intérêt prioritaire que nous examinons en ce moment. Il est possible de la consulter sur notre site Web. L'industrie est en mesure de savoir quels sont les produits chimiques qui nous préoccupent le plus à l'heure actuelle.
    Finalement, j'ai une courte question pour M. Carey. Pourquoi les initiatives provinciales ont-elles mis l'accent sur le Manitoba et le Québec jusqu'à maintenant? Pourquoi ne pas viser l'Ontario et la Saskatchewan? Est-ce le fruit du hasard ou ce choix a-t-il été motivé par des raisons politiques? Par raisons politiques, je veux dire que les conseils provinciaux concernés ont décidé de s'attaquer au problème. Je présume qu'il y a également des épidémies d'algues bleues dans les autres provinces. Ou peut-être que la situation est moins problématique là-bas?
    La prolifération d'algues est certainement plus marquée au lac Winnipeg, par exemple. Les algues bleues sont naturellement présentes dans à peu près tous les lacs du pays. C'est la prolifération soudaine des végétaux qui attire l'attention des gens. C'est dans cette région que le problème s'est d'abord manifesté, mais on remarque le même phénomène au lac Simcoe et au lac des Bois, en Ontario.
    Merci.
    Monsieur le président, aux fins du compte rendu, je tiens à mentionner que lorsque Mme Kenny dit que l'industrie a fait part de sa volonté et de sa capacité de se conformer, elle ne fait pas référence au taux de 0 p. 100 du projet de loi, mais à celui de 0,5 p. 100 de teneur en phosphore dont on a parlé lors des consultations.
    Merci.
    Monsieur Warawa.
    Je vous remercie d'être venus.
    J'ai plusieurs questions. Si les réponses sont brèves, je pourrai partager mon temps de parole avec M. Harvey.
    Je crois que vous étiez ici lorsque nous avons entendu M. André. Il a indiqué qu'on pourrait peut-être exempter les centres hospitaliers et envisager d'imposer une limite de teneur en phosphore de 0,5 p. 100.
    Y a-t-il d'autres exemptions particulières? Pourriez-vous faire une recommandation au comité concernant le projet de loi C-469? Pensez-vous à des exemptions précises? Serait-ce seulement pour les hôpitaux? Que préconisez-vous?
    Je répondrai rapidement que selon nos consultations, beaucoup de ces produits institutionnels sont utilisés dans divers endroits. Ils ne sont pas limités à un type d'établissement. Il peut s'agir de restaurants, d'hôpitaux, d'usines d'embouteillage, etc. Nous sommes donc d'avis qu'il faut voir toute l'étendue de l'utilisation du produit.
    Ce n'est donc pas une simple question d'exemption.
    Non il faut davantage se pencher sur l'utilisation industrielle et institutionnelle des produits.
    Y a-t-il actuellement des produits ayant fait l'objet de tests scientifiques qui pourraient remplacer les détergents contenant du phosphore et servir de nettoyants commerciaux pour les institutions, en plus de satisfaire aux normes de santé et de sécurité des Canadiens? Peut-on obtenir les résultats de ces tests, éventuellement?
    Je n'en ai pas connaissance, mais nous pourrions vérifier si quelqu'un d'autre en a. Je doute qu'il y en ait.
    Je crois que nous n'avons pas encore réglé la question de la date d'entrée en vigueur. Nous savons que le Manitoba, le Québec et un certain nombre d'États américains ont choisi 2010. Pouvez-vous indiquer au comité pourquoi on a opté, de façon générale, pour juillet 2010?
    Nous avons tenu compte des propositions de diverses provinces, de divers États américains. Nous avons aussi consulté l'industrie, qui compte beaucoup de petites entreprises manufacturières au Canada. Celles-ci ont indiqué qu'elles ont besoin d'un certain temps pour changer la formule des produits et l'emballage, se procurer les ingrédients, et s'assurer que le produit est sans danger. C'est plutôt un marché qui se limite au Canada et aux États-Unis; d'ailleurs, actuellement, plus d'une douzaine d'États ont fixé la date d'entrée en vigueur à 2010. On a donc estimé opportun d'avoir la même date pour tout le monde.
(1725)
    Le projet de loi C-469 propose que cela se fasse beaucoup plus tôt, et le choix du moment est très important. Comme les détergents sont produits en série, se pourrait-il que l'application du projet de loi C-469 uniquement au Canada — si seul le Canada était concerné — limite la capacité de l'industrie à changer la formule de ses produits et à offrir aux consommateurs canadiens des produits sans danger, efficaces et bon marché?
    À mon avis, c'est une question importante dont il faudrait discuter avec les représentants de l'industrie. Comme je l'ai dit, au cours des consultations que nous avons menées, ils ont souligné la nécessité que les entreprises se conforment correctement à une mise en oeuvre coordonnée à l'échelle nord-américaine.
    Recommandez-vous que l'entrée en vigueur ait lieu en juillet 2010?
    C'est une date à considérer sérieusement et nous le ferons dans le cadre du processus réglementaire.
    Je vous remercie.
    M. Harvey avait une question.
    Monsieur Harvey.

[Français]

    Le projet de loi qui est présenté ici aujourd'hui me semble un peu redondant par rapport à la réglementation proposée par le gouvernement. Jugez-vous nécessaire de changer la LCPE? Jugez-vous que ce serait plus efficace que de procéder seulement par réglementation, comme le gouvernement l'a proposé —, réglementation à laquelle il travaille présentement?

[Traduction]

    Merci.
    La procédure normale pour établir des normes relatives aux produits — et celle pour de telles substances —, passe par le processus réglementaire. Peut-être que Dan Blasioli, du ministère de la Justice, pourrait vous en parler de manière générale.
    Je crois que c'est un sujet important.
    La Loi canadienne sur la protection de l'environnement est un cadre, une mesure législative. Elle permet de prendre des règlements afin de régler les questions de protection de l'environnement et de la santé. La Cour suprême du Canada a reconnu à maintes reprises que la protection de l'environnement ne peut être complètement codifiée. Mais nous pouvons adopter des règlements. En fixant une interdiction ou une limite directement dans la loi, vous nuisez à la flexibilité du régime et à sa capacité d'évoluer selon les changements des données scientifiques.
    Selon moi, une modification de la loi elle-même pour cristalliser ces exigences affaiblirait la réglementation au lieu de la renforcer.

[Français]

    Avez-vous tous la même position? Madame Kenny ou monsieur Carey, qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Nous croyons que le comité prendra en considération les pour et les contre de ce projet de loi.

[Français]

    Le phosphate est un produit qu'on retrouve dans la nature, et l'on sait pertinemment qu'il n'est pas mauvais pour la santé. Il est neutre. C'est bon d'avoir un peu de phosphate. On utilise des phosphates pour nettoyer la vaisselle. Qu'y a-t-il de plus important que la vaisselle puisque c'est en contact direct avec nous? S'il y a des traces de phosphate sur la vaisselle et sur les vêtements que je porte, il y a de fortes probabilités que j'assimile un peu de phosphate aussi. Les produits de remplacement sont-ils aussi sûrs que le phosphate pour la santé humaine? Je comprends qu'il est important de réduire le phosphate, mais les éléments de remplacement qu'on a trouvés, ceux qui sont disponibles, ont-ils été testés? Est-on assuré qu'ils n'auront pas d'effets secondaires et qu'on ne déplacera pas tout simplement le problème?
(1730)

[Traduction]

    Je ne pense pas que nous sachions encore tout à propos des produits de remplacement: de quelle sorte de produits s'agira-t-il, quelle sera leur nature, sans parler de leur toxicité. Je dois dire qu'ils n'ont pas tous été évalués.

[Français]

    Serait-il sage d'attendre à 2010? Cela nous donnerait le temps d'évaluer les effets secondaires que peuvent avoir les produits de remplacement.

[Traduction]

    Nous aurons certainement besoin de temps pour les évaluer, en particulier s'il y a de nouvelles substances qui doivent être conformes à nos directives visant les nouvelles substances. Nous devrons suivre le processus. L'industrie devra nous signifier son intention de commencer à les utiliser, et nous devrons les évaluer. Cela prend du temps.

[Français]

    Vous jugez donc plus sage d'attendre à 2010 pour évaluer les produits de remplacement.

[Traduction]

    Je crois que nous devrons évaluer les produits de remplacement aussitôt que nous en connaîtrons la nature. Ce sera un peu long. Nous ne les avons pas encore tous répertoriés. Si certains produits que nous n'avons pas encore évalués sont de nouvelles substances, nous aurons besoin de temps.
    Avez-vous une idée du coût des substances de remplacement connues? Sont-elles beaucoup plus chères que le phosphate? Est-ce un problème? Cela dure depuis 30 à 40 ans.
    D'après mon expérience concernant les détergents à lessive durant les années 1970 et 1980, les premiers produits de remplacement étaient beaucoup plus coûteux, mais on a élaboré des produits de marque qui sont devenus des adjuvants pour détergents, ce qui a entraîné une réduction des coûts. C'est un autre processus qui nécessite du temps. Les prix des premiers produits pourraient très bien être plus élevés. Je ne crois pas que nous ayons des données à ce sujet. Il faudra consulter l'industrie.
    J'ai un peu de difficulté à comprendre pourquoi on a besoin de plus de temps. Le problème est connu de longue date. À mon avis, c'est la question des coûts qui est derrière tout cela.
    Je vous remercie d'être venus témoigner. Au nom du comité, merci de nous avoir fourni ces renseignements, et nous allons continuer de nous pencher sur cette question.
    Merci.
    La séance est levée.