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Je suis tout à fait d'accord pour accepter une prolongation pour l'étude du projet de loi , mais les témoignages que nous avons reçus à la dernière réunion avec les représentants ministériels — Daniel Blasioli nous a dit que ce qui est proposé affaiblirait la LCPE — m'ont réellement inquiété.
Ce qui est proposé par un membre du Bloc, M. André — et je le remercie d'être présent — et ce qu'a fait le gouvernement dans l'avis d'intention déposé en février, sont assez semblables, même si les résultats sont différents. En passant par un règlement, plutôt que par un projet de loi d'initiative parlementaire, on peut modifier la LCPE en faisant passer le pourcentage à 0,5 p. 100. La date d'entrée en vigueur serait juillet 2010.
Donc, les deux mesures sont semblables. Le Bloc voudrait que son projet de loi entre en vigueur un an plus tôt, et nous pouvons toujours demander aux témoins quelles en seraient les conséquences. Mais je rappelle aux membres du comité que ce qui est proposé aura pour effet d'affaiblir la LCPE. Nous ne voulons pas affaiblir nos lois environnementales; nous voulons au contraire les renforcer, quand il est possible de le faire. Nous avons réexaminé de fond en comble la LCPE il y a environ un an.
Donc, j'ai des préoccupations, et j'aimerais savoir si M. Bigras accepterait de retirer le projet de loi C-469.
D'abord, j'aimerais vous informer que j'ai été averti un peu tard. Je n'ai donc pas eu le temps d'étudier le projet de loi de manière approfondie. Toutefois, je vais vous parler un peu de ce qui se passe chez nous quant au problème des phosphates.
Je tiens à souligner que notre conseil régional a tenu, en avril dernier, un forum régional sur les répercussions des algues bleues, donc des cyanobactéries, en Montérégie. Il va de soi que les discussions ne se sont pas concentrées uniquement sur les conséquences des détergents. De plus, les échanges ont souligné d'autres conséquences importantes sur les cours d'eau ainsi que sur les nappes phréatiques en Montérégie.
La réglementation sur les détergents aurait, bien entendu, une importance et un effet sur le problème des phosphores dans les lacs du Canada. Par contre, selon nous, cette réglementation ne réglera qu'une partie du problème de la contamination des eaux. Voici donc un aperçu de nos échanges par thème.
Abordons d'abord celui de l'agriculture. Plusieurs ont souligné l'importance de faire une agriculture responsable, qui inclut la protection des bandes riveraines ainsi que des méthodes agricoles plus respectueuses de l'environnement. Des exemples comme le projet de la rivière La Guerre, la culture bio ainsi que l'ajout de la mycorhize favorisent une agriculture plus responsable et encouragent une réduction de l'utilisation importante du besoin d'engrais ainsi qu'une diminution des besoins d'arrosage, donc une diminution de la contamination de nos eaux par des phosphores, des phosphates et d'autres résidus. D'ailleurs, une résolution du forum suggère un appui financier des gouvernements — j'inclus les deux gouvernements — afin de favoriser l'agriculture responsable pour motiver ce genre de culture et de vision
Ensuite, il y a le thème des habitations riveraines des cours d'eau ou dans des secteurs isolés d'un réseau d'égout. La détérioration de certains lacs et cours d'eau a été produite par de mauvaises utilisations et protections des bordures des cours d'eau par les riverains, comme la coupe abusive de la végétation ou l'utilisation d'engrais ou de pesticides afin d'avoir une pelouse plus uniforme. À nos yeux, la solution à ce problème se trouve davantage dans la sensibilisation et l'éducation relatives à l'environnement. Malheureusement, les sommes d'argent octroyées à ces secteurs par le gouvernement, qu'il soit fédéral ou provincial, nous semblent insuffisantes et assez rares.
Il y a aussi les systèmes d'eaux usées des résidences isolées. Lors d'une émission de J.E., au réseau TVA — je pense que les gens ici le connaissent —, nous avons dénoncé les rejets d'eaux usées directement dans les eaux du fleuve Saint-Laurent, dans les fossés et dans les cours d'eau. Cette situation inacceptable se retrouve un peu partout au pays. Rivières, lacs et fossés sont victimes d'une surexposition à des contaminants de toutes sortes, incluant les nitrates, les coliformes fécaux et autres bactéries pathogènes.
Selon les chiffres du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP), au Québec seulement, on compte plus de 850 000 installations septiques pour environ 1,4 million de personnes. Comme chaque individu rejette au moins 250 litres d'eaux usées par jour, plus de 120 milliards de litres d'eaux usées sont rejetées annuellement dans l'environnement. Nous savons qu'au moins 60 p. 100 de ces installations sont polluantes parce que désuètes et non conformes. Pourquoi n'existe-t-il aucun programme de subvention? Pourtant, les programmes d'infrastructures ont aidé les urbains à coups de dizaine de milliards de dollars pour construire des gros réseaux d'égouts et leurs usines d'épuration. Y a-t-il deux classes de Canadiens?
Selon nous, la solution devrait venir des deux paliers de gouvernement. Des subventions existent actuellement pour l'installation d'usines de traitement des eaux usées dans les municipalités qui en font la demande. Par contre, aucune subvention n'existe actuellement pour appuyer l'installation des systèmes septiques certifiés des résidences isolées ou d'un réseau d'égouts retiré ou trop éloigné des infrastructures urbaines, que personne n'a les moyens de construire, d'ailleurs.
Les petites municipalités et les régions devraient pouvoir bénéficier du Programme infrastructures Canada, qui devrait inclure la mise aux normes de ces installations. Les coûts d'opération et d'entretien de celles-ci seraient remboursés à même les comptes de taxes, comme c'est le cas pour les réseaux subventionnés, d'ailleurs. L'incidence d'une telle subvention ou réglementation pourrait favoriser le respect de la réglementation déjà existante et permettrait à des communautés moins favorisées ou en région d'avoir des installations septiques plus respectueuses de la santé et de l'environnement. Nous ne voulons pas d'autres Walkerton.
Il serait d'ailleurs important de favoriser l'uniformisation de la réglementation sur les eaux usées et des exigences des ministères de l'Environnement de chaque province de notre pays.
Il ne faut pas oublier les nappes phréatiques. Une étude de Robert de Tilly, du MDDEP, révélait la possibilité de plus en plus grandissante, à cause des changements climatiques, d'une évaporation de nos cours d'eau, dont le fleuve Saint-Laurent, au cours des 25 prochaines années, et ce, de façon irrégulière, selon la température. D'ailleurs, on le constate déjà dans le fleuve Saint-Laurent. Vous pouvez vous référer à certains études du Comité ZIP Ville-Marie. Cette situation a des conséquences sur la nappe phréatique. La zone capillaire, qui est la zone rapprochée de la nappe phréatique, se dessèche car elle suit la nappe phréatique. Au fil des ans, des fissures importantes pourraient donc se créer en sol argileux, causant par exemple des lézardes dans des maisons dans la région de Montréal et de la rive sud. Cette situation pourrait aussi favoriser une migration non contrôlée de contaminants de tous genres par les nappes phréatiques vers nos cours d'eau.
Voyons maintenant les produits chimiques et détergents. Tous les produits de consommation, comme les détergents, les nettoyants et les savons, devraient faire l'objet de suivis réguliers. Ceux-ci devraient avoir à respecter des normes dès leur création, en tenant compte du principe de précaution. Les agents chimiques déjà utilisés ou leurs succédanés devront avoir démontré leur efficacité par rapport aux effets possibles sur l'environnement. Un produit de remplacement non éprouvé pourrait créer de nouveaux problèmes dans un avenir plus ou moins lointain. Il est donc nécessaire de s'assurer que les nouveaux produits respectent aussi l'environnement.
En conclusion, selon nous, l'efficacité d'une réglementation pour les détergents est intéressante et positive, mais sans l'appui d'autres orientations de protection pour la santé publique et l'environnement, elle serait insuffisante. Cette réglementation a pour but de diminuer les phosphores, mais selon nous, elle ne contient pas de vision intégrée du problème, ce qui serait essentiel. La gestion durable et intégrée doit se faire de façon plus large et tenir compte de plusieurs facteurs d'influence sur notre environnement et nos cours d'eau.
Je m'arrête ici et j'attends vos questions.
J'ai un rhume, et vous m'excuserez donc si je me mets à tousser.
Monsieur le président et membres du comité, je suis très heureuse de comparaître devant le comité aujourd'hui. Malheureusement, comme le président vient de vous le signaler, Shannon Coombs, présidente de l'ACPCS a été empêchée à la dernière minute. Je vais essayer de répondre à vos questions au mieux de mes compétences. Je m'appelle Chera Jelley, et je suis la responsable des politiques à l'ACPCS.
L'Association canadienne de produits de consommation spécialisés est une association commerciale nationale qui regroupe 46 entreprises membres dans toutes les régions du Canada. La valeur collective de cette industrie est de 20 milliards de dollars, et elle compte 12 000 employés dans plus de 100 établissements. Nos entreprises membres fabriquent, transforment, emballent et distribuent les produits de consommation, industriels et institutionnels spécialisés, comme les savons et les détergents, les produits antiparasitaires, des produits désinfectants pour surfaces dures, des désodorisants et des produits chimiques pour les automobiles.
Le 26 septembre 2007, l'ACPCS a annoncé le lancement d'une initiative par l'industrie consistant à limiter la teneur en phosphore des détergents pour lave-vaisselle automatique fabriqués pour la vente au Canada à un maximum de 0,5 p. 100 au poids, et ce à compter de juillet 2010. Plusieurs États américains et les provinces du Manitoba et du Québec s'apprêtent d'ores et déjà à modifier leurs règlements et leurs lois de façon à atteindre ce même objectif. Il est essentiel que les exigences réglementaires soient les mêmes au Canada et aux États-Unis, afin de garantir l'existence d'un marché nord-américain intégré et harmonisé. Ainsi notre industrie sera à même de rester concurrentielle sur les marchés mondiaux.
Le 15 février 2008, le gouvernement du Canada a annoncé son intention de réglementer la teneur en phosphore des détergents à lessive et pour lave-vaisselle en imposant une concentration maximale de 0,5 p. 100 à compter de 2010. L'avis d'intention a été publié le lendemain dans la Partie I de la Gazette du Canada. L'ACPCS est d'accord avec l'objectif de l'avis d'intention et compte participer aux consultations, à la fois sur l'avis d'intention et les modifications proposées au règlement d'application de la LCPE en ce qui concerne la teneur en phosphore.
L'ACPCS recommande au comité de ne pas adopter le projet de loi , étant donné qu'il ne cadre pas avec l'actuel règlement d'application fédéral, l'avis fédéral d'intention concernant le nouveau règlement d'application fédéral, l'avant-projet de loi proposé au Manitoba et l'avant-projet de loi proposé au Québec.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles le projet de loi C-469 ne devrait pas être adopté. Comme le prévoit la LCPE, il est recommandé qu'un règlement distinct soit établi concernant les niveaux de concentration qui caractérisent une nouvelle tendance pour les produits comme les détergents à lessive et pour lave-vaisselle. La LCPE ne visait pas à fixer des niveaux de concentration dans la Loi proprement dite; il était jugé préférable de s'en tenir à une loi concise, sachant qu'il est plus efficace de créer ou de modifier un règlement d'application qu'une loi.
Comme vous l'a fait remarquer l'avocat-conseil du ministère de la Justice la semaine dernière devant le comité, la LCPE présente un cadre pour l'établissement de règlements. Selon lui, il convient de passer par le règlement d'application pour opérer les changements en question. Si on passe par la Loi, comme le propose le , la marge de manoeuvre qui caractérise le régime souple que nous avons actuellement — c'est-à-dire, celui de la LCPE — sera perdue. Modifier la Loi revient à affaiblir le régime actuel, plutôt que de le renforcer.
Il convient de prendre acte du fait qu'une réduction de la teneur en phosphore des détergents à lessive et pour lave-vaisselle ne permettra pas, à elle seule, de régler le problème des algues bleues, étant donné que les facteurs qui contribuent le plus à aggraver ce problème sont les eaux d'égout produits par les humains et le lessivage des terres cultivées. Les détergents à lessive et pour lave-vaisselle automatique sont à l'origine d'environ 1 p. 100 du problème.
À moins qu'on ne s'attaque aux deux autres difficultés qui sont à l'origine de ce phénomène, les algues bleu-vert continueront de poser problème. On peut citer l'exemple de l'Italie, qui est l'un des trois pays européens à avoir imposé une limite précise pour les détergents pour lave-vaisselle automatique. L'Italie a réduit à 6 p. 100 la teneur en phosphore des détergents domestiques pour lave-vaisselle automatique sur une période de huit ans. Bien que l'eutrophisation ait diminué, il est généralement admis que cette diminution est le résultat de plusieurs mesures, y compris des investissements considérables dans la modernisation des installations de traitement des eaux usées et plusieurs années consécutives d'étés secs.
En conclusion, la LCPE permet déjà d'établir des règlements visant à limiter la teneur en phosphore de produits tels que les détergents à lessive et pour lave-vaisselle. Établir des limites dans un règlement d'application, plutôt que dans une loi, donne toute la souplesse voulue pour éventuellement opérer d'autres changements ou ajouter de nouveaux éléments à l'avenir. Il est souvent plus difficile de modifier une loi.
Le gouvernement fédéral a déjà signalé son désir de réglementer la concentration de phosphore dans de tels produits en publiant un avis d'intention. Ainsi le gouvernement pourra modifier le règlement d'application fédéral actuel et s'assurer qu'il cadre avec le projet de règlement du Québec, celui du Manitoba et les règlements déjà en vigueur dans plusieurs États américains.
À notre avis, des gouvernements futurs seront peut-être confrontés à un défi de taille s'ils souhaitent modifier la teneur en phosphore des catégories de produits dont nous discutons actuellement. Par conséquent, de l'avis de l'ACPCS, de deux choses l'une: ou le projet de loi n'est pas adopté et une motion est adoptée demandant au gouvernement fédéral d'établir un règlement fédéral sur la concentration en phosphore, ou le projet de loi est modifié de façon à exiger que le établisse un règlement fédéral sur la concentration en phosphore.
Ainsi nous serons sûrs que les règlements appropriés seront établis, ce qui permettra d'éviter de modifier la LCPE.
Comme les responsables du ministère de la Justice vous l'ont déjà fait remarquer, modifier la Loi, d'après ce que propose le projet de loi , aura pour résultat d'affaiblir la LCPE, plutôt que l'inverse. Même si nous sommes favorables à l'intention du projet de loi, nous sommes d'avis qu'il est préférable de modifier le règlement d'application fédéral actuel.
Je vous remercie de m'avoir permis de participer à vos travaux, et je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
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On m'a demandé de parler du projet de loi C-469. On ne m'a pas demandé de parler d'agriculture et d'autres sources de phosphore. Je pense qu'on sort du sujet énormément. Alors, je veux me concentrer sur ce sujet.
J'ai lu le projet de loi C-469; il me semble très naïf. On dirait qu'il a été écrit par un enfant de l'école primaire. Premièrement, il y a une faute d'orthographe très grave: il est écrit « interdiction de phosphore », au singulier; ce devrait être « interdiction du phosphore ». Il n'y a pas « des phosphores », c'est « du phosphore ».
Dans le texte que j'ai devant moi, on ne spécifie pas de limite maximale en phosphore. C'est très important de spécifier une limite maximale. La majorité des États américains ou des provinces canadiennes qui ont récemment adopté des projets de loi semblables ont la limite de 0,5 p. 100. Cela devrait être indiqué.
Je me demande aussi pourquoi les gens qui ont rédigé ce projet de loi ne se sont pas inspirés d'autres projets de loi qui ont récemment été adoptés dans des États américains, comme l'État de Washington et quatre ou cinq autres. En effet, c'est un problème nord-américain.
Je voudrais aussi corriger une erreur que l'interlocutrice précédente vient de faire. Évidemment, lorsqu'on considère tout le phosphore qui est apporté par les grandes rivières canadiennes, le phosphore dans les détergents à lave-vaisselle y contribue pour 1 p. 100 environ. Cependant, lorsqu'on considère le phosphore d'origine humaine apporté aux lacs de villégiature, entre autres le phosphore qui est apporté aux installations septiques, ce pourcentage monte à 10 p. 100. Je suis d'accord pour dire que le fait d'enlever le phosphore dans les détergents à lave-vaisselle ne réglera pas le problème des cyanobactéries, qui se manifeste depuis plusieurs années. Toutefois, c'est une façon de réduire le phosphore émis par les humains. C'est une façon qui ne coûte rien de réduire d'environ 10 p. 100 le phosphore produit par les êtres humains en bordure de lacs de villégiature.
C'est à peu près tout ce que j'avais à dire. Il faut mettre dans le texte de ce projet de loi une limite supérieure de concentration que les produits ne doivent pas dépasser, soit 0,5 p. 100.
Aussi, je crois que les institutions comme les hôpitaux, où la santé humaine dépend de la propreté des instruments de chirurgie et autres, ne devraient pas être assujetties à cette loi. Cette loi devrait viser spécifiquement les détergents à lave-vaisselle ou les produits domestiques, non pas les produits destinés aux institutions comme les hôpitaux.
J'ai peu d'autres choses à ajouter. Quant à la différence entre un projet de loi et la modification d'un règlement comme celui de la LCPE, je n'ai aucune idée de ce que cela peut apporter de plus ou de moins. Je n'en connais pas les incidences légales, mais je remarque que dans les États américains, on a déposé des projets de loi, alors qu'ils ont sûrement des règlements de protection de l'environnement. La majorité des États américains ont suivi la voie du projet de loi. C'est vous qui avez l'expertise nécessaire pour décider s'il vaut mieux amender un règlement existant ou faire un projet de loi. Je ne peux pas me prononcer là-dessus.
C'est tout ce que j'avais à dire.
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Je vais lire le texte de mon exposé.
[Français]
Le Comité du bassin versant de la rivière Gatineau, le COMGA, est une table de concertation au niveau régional qui réunit l'ensemble des acteurs de l'eau du bassin versant. Son mandat principal est la réalisation du Plan directeur de l'eau, le PDE, et sa mission est d'assurer la protection de la qualité de la ressource eau.
Suite à une augmentation de la détection dans les lacs du bassin versant et du Québec des cas de fleurs d'eau de cyanobactéries causées par un apport extérieur de phosphore, le COMGA, dès le 16 août 2007, a placé une pétition en ligne pour le retrait des phosphates dans les détergents de lessive et de vaisselle.
Au moment de la fermeture de la pétition, deux mois plus tard, 7 843 personnes de partout à travers la province avaient signé en faveur de l'élimination du phosphate dans les savons. La pétition a été immédiatement remise au NPD, au Bloc québécois, au Parti libéral, au Parti conservateur ainsi qu'au Parti vert.
L'implication du Bloc québécois, par l'intermédiaire du porte-parole en matière d'environnement, le député de Rosemont—La Petite-Patrie, M. Bernard Bigras, s'est traduite par la présentation du projet de loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, pour interdire la fabrication, la vente ou l'importation des détergents à lessive ou à vaisselle qui contiennent des phosphates.
Les phosphates sont toujours permis au Canada dans une concentration allant jusqu'à 2,2 p. 100 par poids, dans les savons à lessive. En ce qui concerne les savons pour les lave-vaisselle automatiques, la proportion des phosphates peut être beaucoup plus grande. On en retrouve qui en contiennent jusqu'à 8,7 p. 100 par poids, ce qui correspond à la concentration maximale permise dans la législation de certains États des États-Unis.
Le COMGA appuie toute loi qui vise à réduire l'apport de phosphore dans les plans d'eau, car c'est une des causes principales de la prolifération des fleurs d'eau de cyanobactéries. Pour cette raison, nous appuyons l'élimination des phosphates dans les savons. Cependant, nous devons rester vigilants quant à la composition des produits alternatifs qui remplacent les phosphates. L'addition de phosphates dans les savons augmente l'efficacité du lavage, car ils adoucissent l'eau et libère la saleté en suspension, rendant l'huile et la graisse solubles. Sans les adoucissants, les savons ne fonctionnent pas bien dans des eaux dures. Une eau dure est une eau dont la teneur en calcium se situe entre 80 et 120 parts par million, comme c'est le cas dans de nombreuses municipalités au Québec.
Vers la fin des années 1980, plusieurs pays européens et certains États américains ont éliminé les phosphates dans les savons afin d'éviter l'eutrophisation des plans d'eau et la formation de mucilage dans la mer. L'action adoucissante de l'eau était alors réalisée par d'autres agents séquestrants: EDTA, NTA, zéolite, citrate de sodium.
Le COMGA considère très important que l'usage de ces agents séquestrants alternatifs aux phosphates dans la fabrication de savon doit aussi être légiféré en fonction de leur impact environnemental. Par exemple, l'EDTA s'est démontré parfois très toxique. Il forme des complexes extrêmement stables avec les métaux et peut faire revenir en suspension des métaux lourds comme le mercure, le cadmium ou le plomb, déposés et inertes au fond des plans d'eau. L'EDTA peut aussi réagir avec le fer, l'hémoglobine, ce qui en fait un poison. Un autre agent séquestrant, le NTA, est soupçonné de causer des mutations chez les êtres vivants.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de pouvoir exprimer l'opinion du COMGA sur le sujet.
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Oui. Comme je l'ai indiqué dans mon exposé, nous recommandons l'adoption d'un règlement, plutôt que d'apporter des modifications à la LCPE. Si le projet de loi est adopté et modifie la Loi actuelle, cette dernière ne cadrera plus avec le Règlement fédéral actuel. Voilà quelque chose qui nous préoccupe grandement.
L'ACPCS a annoncé une initiative dirigée par l'industrie ayant pour résultat de limiter la teneur en phosphore dans les détergents pour lave-vaisselle automatique à un maximum de 0,5 p. 100; donc, si le comité décide qu'il convient d'amender le projet de loi, nous n'y verrons aucun inconvénient. De même, nous avons demandé que cette mesure entre en vigueur en juillet 2010. Encore une fois, cela cadrerait avec ce qui a été fait aux États-Unis.
Si 2009 risque de poser problème, c'est parce que nos compagnies membres sont encore en train de mettre au point de nouvelles formulations. Si le projet de loi entre en vigueur en 2009, rien ne garantit que les produits que nos membres sont actuellement en train de mettre au point seront prêts en 2009. Or nos compagnies membres représentent 86 p. 100 du marché canadien. Si nous n'avons pas de produits à offrir pour la vente en 2009, il y aura nécessairement une pénurie très considérable de produits, ce qui risque de faire augmenter le coût des produits de substitution.
De plus, dans le contexte de l'initiative prise par l'industrie, nous sommes favorables à l'idée d'accorder une exemption aux établissements commerciaux et institutionnels. Ces établissements — c'est-à-dire, les hôpitaux, les universités, les écoles, les restaurants et les hôtels — leurs appareils sont complètement différents des appareils ménagers. Leur cycle de lavage et de nettoyage ne dure qu'une minute, comparativement à 30 minutes pour un appareil ménager. C'est une machine complètement différente, si bien qu'il faudrait une exemption complète pour ce genre d'établissements. Aux États-Unis, le maximum est de 8,7 p. 100 pour ce type d'institutions.
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Merci pour cette question.
Je pense qu'il y a peut-être une certaine confusion. Plusieurs pays européens ont complètement interdit l'utilisation du phosphore dans les détergents à lessive; sur ce plan, je suis d'accord avec vous. Mais, nous n'avons pas fait cela au Canada. Les détergents à lessive domestique ne contiennent guère de phosphore, et peut-être pas du tout. La différence se situe au niveau des détergents pour lave-vaisselle automatique. En France, par exemple, aucune limite n'a encore été établie. Des discussions sont actuellement en cours, mais il n'y a pas de limite. En Europe, il y a seulement trois pays qui ont fixé une limite pour la teneur en phosphore des détergents pour lave-vaisselle automatique: il s'agit de l'Italie, à 6 p. 100, de la Norvège, à 3,8 p. 100, et de la Suisse, à 2,5 grammes par brassée, ce qui correspond à environ 3 p. 100.
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Bonjour, madame Jelley, messieurs Vecco, Marois et Carignan.
Je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Carignan.
Il s'agit d'un autre aspect du problème. Je pense en effet qu'on a fait le tour de la question en ce qui concerne les produits pour lave-vaisselle. À ce sujet, je vous remercie d'emblée, monsieur Carignan, pour les réponses très complètes que vous nous avez fournies. Elles vont contribuer grandement aux travaux de notre comité.
Divers projets de loi sont à l'étude présentement. Un de nos collègues a fait allusion plus tôt à celui de M. Scarpaleggia, qui est député dans l'ouest de Montréal. Par ailleurs, nous sommes en train d'étudier des dispositions présentées par M. Bigras. De notre côté, nous avons proposé des mesures visant à indemniser les agriculteurs et à prévenir une partie des facteurs qui sont à l'origine de la production d'algues bleues. On parle d'une bande riveraine de 10 mètres. La compensation pourrait varier en fonction du type de culture qui serait, en quelque sorte, sacrifiée. D'après ce que j'ai constaté, les producteurs agricoles ne sont pas réfractaires à l'idée de céder une partie de leur terrain, mais ils ne veulent pas subir de pertes économiques.
Monsieur Carignan, est-ce que j'interprète correctement votre remarque d'ouverture si je dis que selon vous, toute tentative visant à endiguer le problème des algues bleues doit inclure une composante agricole?
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Monsieur Mulcair, avant de répondre à votre question, j'aimerais insister sur ce qu'ont dit MM. Vecco et Carignan concernant les produits de remplacement. Nous sommes trois à dire que ce n'est pas une question de temps. Je suis entièrement d'accord avec M. Carignan: à cet égard, il faut bien faire les choses plutôt que de les faire trop rapidement. Pour nous, les produits de remplacement sont une question très importante.
Sur le plan de l'agriculture, le conseil a tenu un forum sur les cyanobactéries. On a abordé l'ensemble du problème plutôt que de se pencher strictement sur celui des cyanobactéries. Je suis d'accord avec M. Carignan: la question des cyanobactéries a eu un effet choc parce que les médias s'en sont emparé. Je dirai par contre, en toute honnêteté, que nous allons l'utiliser pour vous sensibiliser à la protection de l'environnement.
Cela dit, nous avons établi, dans le cadre de ce forum, que l'eau était un bien commun. À partir de ce constat, une résolution a été formulée et adoptée précisément pour favoriser des pratiques agricoles comme la bande riveraine de 10 mètres et toutes les technologies durables relatives à l'agriculture. Pour nous, il est clair que l'agriculture est l'un des problèmes majeurs, mais il reste que ces gens ont besoin d'aide. À notre avis, si l'eau est un bien commun, il faut appuyer les gens du domaine de l'agriculture. C'est le genre de problème qu'on pourrait régler en appuyant le projet des bandes riveraines et les nouvelles technologies intéressantes. C'est la raison pour laquelle j'ai parlé de la rivière La Guerre et de la culture « bions ».
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C'était très positif. J'ai entendu ce que disait M. Carignan et je serai franc. Je l'ai dit honnêtement lorsque je suis arrivé, j'ai été contacté il y a très peu de temps. Il fallait que je me retourne dans le temps de le dire.
Pour moi, quand on parle de gestion intégrée, on parle de l'ensemble du problème. À ce sujet, je ne suis pas tout à fait au même diapason que M. Carignan. On ne peut pas éviter une partie du problème. On ne peut pas en régler seulement un aspect. C'est du moins la façon dont on le perçoit.
Le forum sur les cyanobactéries qui s'est tenu chez nous ne portait pas que sur un problème, on y parlait de tous les problèmes. Étant donné que je travaille en mode concertation, je ne peux pas voir ça autrement. C'est pour ça que ma présentation d'aujourd'hui a été faite en ce sens.
Cela dit, nous travaillons avec l'UPA. Ce n'est pas toujours facile de faire de la concertation. Évidemment, les gens sont pour ou contre certaines choses, mais le président de l'UPA de Saint-Hyacinthe et le vice-président de l'UPA de Saint-Jean-de-Valleyfield siègent à notre conseil d'administration. Des progrès font faits.
D'ailleurs, je pourrais vous donner l'exemple d'un beau travail. La région de la baie Missisquoi a travaillé à assainir le bassin versant de la baie Missisquoi, où il y avait un problème de cyanobactéries il y a 10 ans. Quand M. Carignan dit que ce problème n'est pas nouveau, il a entièrement raison. Ce qui est différent, c'est qu'aujourd'hui, les gens s'y intéressent, alors qu'autrefois ils l'oubliaient. Il y a eu une concertation du milieu. Au début, les gens se pointaient du doigt. Tout le monde était responsable. Grâce à la concertation, on a trouvé des solutions. Dans ce cas précis, le problème était évidemment l'agriculture, qui n'était pas de l'agriculture durable. Les gens ont modifié leurs comportements. Évidemment, ça donne de bons résultats.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de leur présence, et je remercie également M. Carignan de participer à cette réunion.
Madame Jelley, je voudrais vous poser des questions au sujet de la date d'entrée en vigueur du projet de loi. Comme vous le savez, le gouvernement a déposé un avis d'intention visant la prise de nouveaux règlements fédéraux au mois de février, et pour la gouverne de nos témoins, je voudrais simplement vous lire ce que prévoit le .
Aux projets de paragraphes 117.1(2) et 117.1(3), respectivement, on lit ceci:
Les alinéas (1)a) et b) entrent en vigueur 180 jours après la date de sanction de la présente Loi.
L'alinéa (1)c) entre en vigueur 360 jours après la date de sanction de la présente Loi.
Donc, si le recevait la sanction royale cet automne, quelles seraient les conséquences pour l'industrie, si cette mesure entrait en vigueur six mois après la date de sanction? Que cela voudrait-il dire pour les consommateurs, si ce produit était disponible?
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Je pense que nous sommes tous d'accord pour reconnaître qu'il y a un problème, mais en même temps, les témoins nous ont fait savoir qu'une meilleure approche consisterait à attendre juillet 2010.
Je voudrais maintenant poser une autre question à Mme Jelley, concernant la possibilité d'opter pour un règlement ou pour une loi. L'avocat-conseil du ministère de la Justice a comparu devant le comité mercredi dernier. Il nous a dit que la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, ou LCPE, adoptée en 1999, correspond au cadre. Donc, si vous créez une interdiction ou une limite dans la Loi proprement dite, vous aurez introduit des contraintes dans un régime qu'on veut souple. Vous aurez ainsi compromis sa capacité d'évoluer avec le temps, en fonction de certains changements, de nouvelles données scientifiques ou d'autres faits nouveaux.
Il a continué en disant ceci:
Selon moi, une modification de la Loi elle-même pour cristalliser ces exigences affaibliraient la réglementation au lieu de la renforcer.
Il me semble que c'est vous qui avez insisté sur la nécessité de bien faire ce travail, de façon à renforcer, plutôt qu'à affaiblir, la Loi actuelle. Vous avez dit que ce que propose le projet de loi C-469 aurait pour résultat de l'affaiblir. Pourriez-vous développer un peu votre réflexion à ce sujet?
De plus, M. Carignan, pourriez-vous nous dire pourquoi il est important de renforcer la Loi?
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Oui. Je pense que la décision du gouvernement du Québec a été très sage parce qu'il y avait une nette exagération, dans les médias, du problème des cyanobactéries.
En réalité, il y a au Québec environ une quinzaine de plans d'eau qui sont sérieusement affectés par les cyanobactéries. Ce sont tous des plans d'eau impactés par l'agriculture. Il y a un problème de cyanobactéries dans beaucoup d'autres lacs, et là, c'est un signe de mauvaise gestion de l'environnement, mais ce n'est pas un problème très grave.
Comme je vous le rappelais précédemment, il y a eu, depuis 50 ans aux États-Unis et au Canada, un seul cas mortel relié aux cyanobactéries. Ce n'est pas un problème de santé publique, c'est un problème de mauvaise gestion de l'environnement, en particulier par l'agriculture non durable.