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Monsieur le Président, en tant que député du Bloc québécois, comme tous mes collègues, j'ai voté en faveur de l'étude de ce projet de loi pour lequel, comme d'habitude, ce gouvernement n'avait pas consulté les Premières nations, et ce, malgré les multiples rappels qui lui avaient été faits à l'occasion de l'étude du projet de loi , par exemple.
Nous avions aussi certaines inquiétudes quant à certaines conséquences sur les communautés des Premières nations du Québec et sur certaines municipalités, sans oublier la liberté d'implication du gouvernement du Québec lui-même.
Bien sûr, le manque de consultation a causé certaines manifestations de désaccord relativement à la procédure et quelques revendications qui, autrement, auraient pu facilement être résolues dans des rencontres respectueuses des nations.
L'instauration d'un tribunal spécifique des revendications particulières rendant les décisions exécutoires est une démarche progressive par rapport aux habituelles avocasseries interminables auxquelles les Premières nations ont été soumises jusqu'à maintenant. Cependant, l'accélération du traitement aurait certainement pu être améliorée. Il sera dommage de devoir encore une fois retourner à ce même sujet dans quelques années afin de compléter cet exercice qui demande beaucoup d'énergie, de temps et d'argent des contribuables et des Premières nations, alors que d'autres préoccupations tardent à être traitées.
Actuellement, le traitement de 784 revendications en cause pourraient être accéléré, et plusieurs autres viendront possiblement s'ajouter dans le processus continu, et ce, même si la Commission des revendications des Indiens en soi n'accepte plus de nouvelles demandes de revendication depuis la fin de 2007.
Bien sûr, il y a eu consultation, mais après de multiples dénonciations, faut-il le reconnaître. De plus, il est important de mentionner que plusieurs communautés n'ont pu être consultées, faute de temps. Du temps, c'est ce qui a toujours manqué dans le règlement de questions qui concernent les Premières nations.
Le plus inquiétant dans toutes ces démarches, c'est ce possible cumul de petites ententes parsemées ici et là dans une loi de plus en plus complexe. Cela est justement causé par ce rapiéçage qui ne s'appuie sur aucune continuité et qui, finalement, n'aura que servi d'excuse pour ne pas adhérer à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones signée par 144 pays, faut-il le rappeler.
Plusieurs déclarations de leaders internationaux mettent d'ailleurs le Canada sur la sellette et le placent en position honteuse sur la scène internationale, ce qui nous choque particulièrement, en tant que représentants de la nation québécoise, identifiés que nous sommes à ce pays qui ne nous ressemble pas du tout, que ce soit par sa culture, par sa vision économique ou encore par sa reconnaissance des droits et libertés individuels et collectifs.
Malgré toutes les demandes de consultation et les rappels faits à ce gouvernement, et ce, par l'entremise du dépôt du projet de loi , suivi par les projets de loi , , et , le gouvernement a maintenu son indifférence à l'égard de ce qui était souhaité par la très grande majorité des pays membres des Nations Unies.
C'est une vraie honte de voir ce gouvernement faire partie de l'infime minorité qui s'y oppose, et c'est encore plus honteux de voir des députés québécois de ce parti manquer du courage nécessaire pour s'opposer à une telle vision.
On comprendra certainement l'urgence pour le Québec d'adhérer au concert des nations. On comprendra aussi la méfiance de la population des différentes communautés à croire à l'ingérence de ce gouvernement dans le système juridique.
C'est pour cette raison, d'ailleurs, que le chef de l'APN a bondi, à la suite du discours du lors de sa visite aux Nations Unies. C'est en ces termes que cela a été fait, et je cite les différentes déclarations faites aux Nations Unies. Entre autres, dans un communiqué de presse, le ministre des Affaires indiennes dit:
« Le gouvernement du Canada continue de travailler à d'importants dossiers qui touchent les Premières nations, les Inuits et les Métis [...], ajoute le ministre [...] Il a notamment déposé le projet de loi C-21, qui permettra de protéger les droits fondamentaux de ces groupes. Depuis 30 ans, l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne soustrait les collectivités des Premières nations régies par la Loi sur les Indiens à la protection des droits de la personne. Nous croyons que cette situation a duré trop longtemps [...] »
Je me permets d'ouvrir ici une parenthèse pour rappeler que le dépôt du projet de loi , qui voulait soustraire l'article 67 des droits de la personne, a été dénoncé de façon véhémente par l'ensemble des Premières nations ainsi que par l'assemblée des femmes des Premières nations. Les Premières nations n'étaient pas aptes à recevoir une loi ou à être exclues de la Loi sur les Indiens au moment où elles n'avaient pas les moyens d'appliquer la Loi sur les droits de la personne avec tous les devoirs que cette loi impose aux différentes communautés.
Depuis longtemps, le Canada démontre qu'il est également résolu à promouvoir activement les droits des peuples autochtones à l'étranger. Mais ce n'est pas ce qui se passe aux Nations Unies. Le ministre parle également de certains dossiers dans lesquels le gouvernement du Canada fait des progrès considérables: l'éducation, le règlement des revendications particulières, l'approvisionnement en eau potable salubre, la protection des femmes et des enfants et les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves.
En outre, il discute d'un pas important réalisé pour faire suite à l'engagement du gouvernement du Canada à l'égard de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, c'est-à-dire à nomination du juge Harry LaForme à titre de président de la commission de vérité et de réconciliation. C'est peut être le seul bon geste posé jusqu'à maintenant par ce gouvernement. Le ministre disait ceci:
« Le Canada est plus résolu que jamais à obtenir des résultats véritables pour ses populations autochtones », conclut le ministre. « Nous voulons obtenir des résultats qui représentent davantage que des aspirations qui dépassent la prise des mesures non contraignantes. »
À ce sujet, nous avons vu la sortie du chef national des Premières nations, M. Phil Fontaine, qui déclarait, et je cite:
L'opposition soutenue du gouvernement conservateur à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a terni la réputation du Canada à l’échelle mondiale. Notre pays est désormais considéré comme une nation qui manque de fiabilité et qui se montre peu coopérative en ce qui a trait à la mise en place de processus liés aux droits de la personne à l’échelle mondiale. Il est évident que le programme politique national du gouvernement conservateur prend le dessus sur la promotion et la protection des droits de la personne parmi les peuples autochtones au Canada et dans le monde entier. La position du gouvernement fédéral, par son caractère rétrograde et restrictif, ne favorise pas le développement de relations fructueuses entre les peuples autochtones et l’État, ni au Canada ni ailleurs dans le monde. De toute évidence, notre gouvernement entend miser sur le nivellement par le bas en ce qui concerne la déclaration et les normes relatives aux droits de la personne, bien qu’il tente de nous faire croire le contraire par la rhétorique.
L'opinion du gouvernement conservateur sur la Déclaration des Nations Unies est contraire au point de vue le plus largement répandu parmi les jurisconsultes. Dans une lettre ouverte publiée hier, plus de 100 juristes et jurisconsultes faisaient remarquer qu’aucune raison valable sur le plan juridique n’empêchait le Canada d’appuyer la Déclaration des Nations Unies. Des spécialistes des droits de la personne et des [...] spécialistes œuvrant au sein des Nations Unies partagent cette opinion. Par conséquent, le Canada est de plus en plus isolé sur la scène internationale pour la position non fondée qu’il adopte par rapport à la déclaration ainsi que pour l’utilisation de son statut de membre du Conseil des droits de l’homme aux fins de l’atteinte de ses objectifs politiques nationaux. Le Canada ne peut trier sur le volet les instruments internationaux des droits de la personne qu’il choisit de respecter. Ces décisions imprévoyantes ont d’importantes répercussions à long terme sur la position qu’occupe le Canada à l’échelle mondiale en matière de droits de la personne.
De plus, les décisions du gouvernement conservateur n’ont pas contribué à réparer de profondes iniquités fiscales dans les secteurs de l’éducation, du logement et de la santé, ni à améliorer d’autres conditions socio-économiques qui sont à l’origine de la pauvreté chez les communautés des Premières Nations, et ce, même si le gouvernement persiste à affirmer qu’il « fait avancer les choses ». La Journée nationale de protestation, le 29 mai, mettra en évidence, à l'échelle nationale et internationale, le manquement du gouvernement fédéral à engager des investissements significatifs et à s’attaquer aux importants problèmes qui touchent la qualité de vie des communautés des membres des Premières Nations. Des décisions politiques aussi importantes doivent être prises en collaboration avec les Premières Nations et avec leur consentement.
La Déclaration des Nations Unies est un document capital qui vise à fixer « les normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones du monde » (article 43). Le 13 septembre 2007, avec une majorité écrasante de 144 pays et seulement 11 abstentions, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une Déclaration visant à protéger les droits de la personne, les droits politiques, les droits spirituels, les droits territoriaux et les droits en matière de ressources des peuples autochtones du monde entier. Seuls le Canada, la Nouvelle-Zélande, l'Australie et les États-Unis ont voté contre la Déclaration. Depuis, l'Australie est revenue sur sa décision et a confirmé son soutien à cet instrument unique des droits de la personne pour faire progresser les droits des Autochtones en Australie et ailleurs dans le monde.
Voilà ce que le chef des Premières nations du Canada pensait de la déclaration de notre ministre aux Nations Unies.
Immédiatement après cela, nous avons vu le chef Conrad Polson, de la communauté de Timiskaming, remettre un texte à l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones. Un communiqué de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador explique la situation:
Parlant au nom des chefs de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL), il a livré un message portant sur les conditions précaires de financement de l'éducation des Premières nations au Canada.
En effet, année après année, le gouvernement du Canada continue à fermer les yeux sur les recommandations découlant de plus de 35 ans d'études, de consultations et de divers groupes de travail auxquels il a contribué, dans la majorité des cas. En refusant de tenir compte de ces recommandations, le gouvernement maintient délibérément les établissements scolaires des Premières nations dans des conditions de précarité.
Nos écoles et établissements d'enseignement postsecondaire sont sous-financés. Nombre de nos étudiants ne peuvent faire des études postsecondaires, faute de financement [...]
C'est pourquoi, au nom des chefs de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, [M. Polson s'est] fait un devoir de dénoncer cette situation haut et fort [...]
« Il était important pour nous de faire appel aux Nations Unies pour que tout soit fait pour mettre fin à cette situation. Nous devons faire tout en notre pouvoir pour éviter que les torts subis s'aggravent davantage et qu'on atteigne un point de non-retour », a affirmé le chef [...] Ghislain Picard.
Comme le rapporte un communiqué émanant de New York daté du 2 mai et diffusé par CNW Telbec, au terme des travaux de la septième session de l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, M. Picard a déclaré que le Canada avait perdu toute sa crédibilité. Il s'y était présenté avec une importante délégation qui est intervenue. Les rencontres « ont été en mesure de donner l'heure juste sur la situation des Premières nations au Canada. Aujourd'hui, le gouvernement canadien n'a plus aucune crédibilité à cet égard sur la scène internationale », déclarait-il en réitérant les propos de M. Fontaine à ce sujet.
Le déclare avoir tout fait pour l'éducation. Voici ce qu'on peut lire dans un article de Radio-Canada:
Les chefs de Mashteuiatsh, d'Essipit et de Nutashkuan cherchent depuis des mois à rencontrer le ministre des Affaires indiennes [...] Les chefs souhaitent faire avancer les négociations qui découlent de l'entente de principe d'ordre général sur l'autonomie gouvernementale des Innus, signée en 2004 par le gouvernement [...]
Le processus piétine depuis la nomination [du ministre], l'automne dernier.
Le ministre [...] vient cependant de décliner l'offre. « Il nous dit que pour le moment, il n'est pas en mesure de nous rencontrer, malgré notre insistance. On a besoin d'échanger avec le fédéral sur les grands enjeux derrière la négociation », dit le chef de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique.
[Le ministre] dit manquer de temps, pour une rencontre qu'il ne considère pas comme nécessaire.
Gilbert Dominique affirme qu'il doutait de la volonté des conservateurs à conclure des ententes territoriales avec les autochtones lorsqu'ils ont été élus en 2006. Il se demande si le fait que les Innus aient signé pour la première fois au Canada une entente qui préserve les droits ancestraux d'une communauté autochtone ne freine pas l'ardeur du gouvernement.
Les Innus ont appelé en renfort le premier ministre Jean Charest, qui doit tenter de convaincre Stephen Harper [...]
Je cite l'article de presse, je ne nomme pas le ...
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Monsieur le Président, je suis content de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , la Loi sur le Tribunal des revendications particulières.
Nous nous trouvons actuellement sur les terres qu'occupaient les Algonquins à l'origine; nous sommes en territoire algonquin. Je tiens à saluer le peuple algonquin et à le remercier de son accueil chaleureux non seulement aujourd'hui, mais depuis des générations.
J'interviens aujourd'hui en ma qualité d'Autochtone, en tant que descendant des Inuits du Labrador et d'ancêtres européens. Je suis fier de mon patrimoine. Je me suis battu pendant de nombreuses années pour protéger nos droits et nos intérêts dans nos terres traditionnelles au Labrador, et cette lutte se poursuit.
On peut faire valoir que le projet de loi traite essentiellement du règlement des revendications et de la réconciliation entre la Couronne et les peuples autochtones, ou la réconciliation entre les peuples autochtones et la fédération canadienne en soi. Pour véritablement régler les revendications et parvenir à une vraie réconciliation, il doit y avoir de la confiance et du respect entre toutes les parties en cause.
En ma qualité d'Autochtone, j'ai d'importantes réserves quant aux véritables intentions du gouvernement conservateur du Canada. Je ne fais pas beaucoup confiance au gouvernement conservateur du Canada pour protéger les droits des Autochtones, pour respecter ses obligations fiduciaires à l'endroit des Autochtones ou pour prendre des mesures propices à une vraie réconciliation.
À cet égard, nous devons regarder le contexte dans lequel je parle et le contexte dans le lequel le projet de loi a été élaboré et dans lequel il se trouve. Il faut aussi voir où le projet de loi se situe dans les politiques et l'orientation du gouvernement conservateur du Canada.
Examinons un peu le contexte.
À son arrivée au pouvoir, le Parti conservateur a tué l'accord de Kelowna. Cet accord était aussi concret et solide que tout autre traité et il était le fruit de négociations entre les peuples autochtones et la Couronne. L'accord de Kelowna avait été conclu après 18 mois de consultation. Les gens peuvent se demander où il se trouve. Les gens peuvent se demander si tous les premiers ministres provinciaux et territoriaux se sont rencontrés à Kelowna pour quelque chose qui n'existait pas. Les gens peuvent se demander si tous les dirigeants des principaux groupes autochtones du Canada se sont réunis à Kelowna pour quelque chose qui n'existait pas. Ils peuvent se demander si on a signé l'accord de Kelowna avec autant d'espoir pour l'avenir parce qu'il n'existait pas. Cet accord existait bel et bien.
Au sud de la frontière, on parle beaucoup d'espoir et du facteur Obama. Les communautés autochtones, les sociétés autochtones et nos collectivités attendaient beaucoup de Kelowna, car cet accord représentait l'espoir. C'était une initiative globale visant à résoudre les problèmes des peuples autochtones. Kelowna englobait les questions du logement, de l'éducation, de la gouvernance, de la responsabilité et du règlement des revendications territoriales, ainsi que du développement économique.
La Chambre a adopté l'accord de Kelowna et l'a renvoyé au Sénat, non pas parce qu'il n'existait pas, mais bien parce qu'il était réel et qu'il est encore bien réel dans les coeurs et les esprits des peuples autochtones d'un bout à l'autre de ce grand pays.
Cependant, le gouvernement conservateur a sabordé cette initiative de collaboration et de consultation, cet espoir que les peuples autochtones avaient placé dans Kelowna. Il ne s'agissait pas d'une approche descendante, d'une initiative venant exclusivement du gouvernement du Canada. Kelowna a été négocié d'une façon respectueuse et de manière à ce que la voix de différents peuples autochtones du Canada soit entendue et leurs demandes, mises en oeuvre.
Ce fut là l'un des premiers signes qui ont fait comprendre aux Autochtones de ce pays qu'ils avaient dorénavant quelque chose à craindre, qu'ils ne devraient pas nécessairement avoir confiance dans le gouvernement. Nous sommes ensuite passés à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Quatre pays seulement, dont le Canada et son gouvernement conservateur, l'ont rejetée.
Pourquoi donc, soudainement, le gouvernement choisi-t-il quelles mesures législatives fondamentales il compte appuyer en matière de droits? Cela n'est pas sans rappeler le débat soulevé aujourd'hui à la Chambre au sujet des Canadiens que le gouvernement choisit maintenant de défendre, ceux qu'il protégera de la peine de mort. Le gouvernement conservateur semble faire une sélection entre les personnes d'une liste « A » et celles d'une liste « B ». Celles qui figurent sur la première sont protégées, et celles qui sont sur la seconde ne le sont pas.
Le gouvernement défend certains types de mesures législatives ou de déclarations en matière de droits, mais pas d'autres. Il applique la règle du cas par cas.
À mon avis, nous avons l'obligation de défendre les droits des peuples autochtones dans le monde entier, ce qui a un impact sur les droits des Autochtones canadiens.
Voilà un autre exemple montrant que le gouvernement a terni sa réputation non seulement au pays, mais également à l'étranger. Lorsque les Autochtones et les autres Canadiens échangent avec leurs soeurs et leurs frères du monde, ils se font dire la même chose. Le gouvernement est en train de ternir la réputation du Canada en se montrant capricieux et en n'appuyant que certains projets de loi concernant les droits de la personne, notamment les droits des Autochtones, comme c'est le cas présentement. Je dirais que c'est le deuxième signal bien tangible envoyé par le gouvernement conservateur du Canada, la deuxième mesure adoptée par lui, qui engendre de la méfiance à son égard parmi les Autochtones.
Puis, on a vu le gouvernement annoncer qu'il allait procéder à la pièce pour accorder de l'argent aux Autochtones. Il a simplement prévu cavalièrement une somme et a décidé de donner carte blanche à diverses autorités pour administrer cet argent sans lignes directrices, ni obligations de rendre compte. Le gouvernement aime bien parler de la responsabilité, mais il a simplement envoyé de l'argent en vrac. Ce n'était pas de l'argent frais, du reste, mais de l'argent dont on avait déjà annoncé l'affectation. Il n'y a pratiquement pas d'argent supplémentaire pour l'éducation, les services sociaux, la santé ou le développement économique.
On peut voir que la méfiance des Autochtones envers le gouvernement n'est pas alimentée par les Autochtones eux-mêmes, mais bien par les décisions du gouvernement. C'est lui qui suscite la méfiance.
Je crois sincèrement qu'il s'agit d'un bel exemple du comportement du gouvernement, qui aime faire semblant, pour la galerie, qu'il lutte pour les peuples autochtones et qu'il veut faire respecter leurs droits. Le gouvernement n'est pas sincère.
Le gouvernement voulait faire adopter rapidement le projet de loi , qui vise à abroger l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il n'a pas consulté les peuples autochtones et n'a pas entendu leurs voix. Il n'a pas compris les répercussions qu'aurait ce projet de loi sur les peuples autochtones. Le gouvernement dit vouloir adopter le projet de loi pour que les Autochtones soient sur un pied d'égalité, c'est-à-dire pour qu'ils aient les mêmes droits que tous les autres Canadiens.
Parfois, le gouvernement brandit l'argument de l'égalité, mais il s'agit en fait du traitement identique des uns et des autres, qui fait que l'on gomme les droits constitutionnels uniques accordés individuellement et collectivement aux Autochtones. Le projet de loi a pour effet de réduire à certains égards le caractère unique des droits constitutionnels des peuples autochtones.
Le gouvernement essaie de traiter tout le monde de la même manière. L'idée du traitement identique est une façon déguisée de faire de l'assimilation, de les transformer pour qu'ils deviennent comme nous.
Même si le gouvernement vantait le projet de loi , qui vise l'abrogation de l'article 67, le comité, après avoir entendu ce en quoi consistent vraiment les droits des Autochtones, y a apporté des amendements et l'a renvoyé à la Chambre. Maintenant, le gouvernement ne veut plus procéder à l'abrogation de l'article 67. Il y a donc lieu de douter de la sincérité du gouvernement, puisque ce projet de loi reflète vraiment ce dont les Autochtones ont besoin et ce à quoi ils aspirent.
Je vais donner un autre exemple qui explique pourquoi j'ai l'impression que le gouvernement conservateur a perdu la confiance des Autochtones. Le gouvernement décide qui consulter et qui ne pas consulter, quand les consulter et quand ne pas les consulter, sur quels sujets consulter les Autochtones et sur quels autres ne pas les consulter.
La loi est claire. Le gouvernement a le devoir, la responsabilité constitutionnelle, de consulter les Autochtones lorsque leurs intérêts sont en cause ou peuvent être menacés. Cela n'est pas laissé à sa discrétion. Il n'est pas question de dresser une liste A et une liste B de gens à consulter, au choix. Le gouvernement a le devoir et l'obligation juridique de consulter. L'attitude du gouvernement conservateur ajoute à la méfiance des Autochtones à son endroit.
À propos du projet de loi , le gouvernement avait dit ne pas avoir besoin de mener de consultations parce que la participation est volontaire. Les organisations autochtones peuvent adhérer au processus ou choisir de ne pas y prendre part. Toutefois, le gouvernement a affirmé qu'il avait adopté une approche concertée en rédigeant le projet de loi et qu'il avait parlé aux Premières nations du Canada et, en particulier, à l'Assemblée des Premières Nations en tant qu'organisme représentatif.
Ainsi, dans le cadre d'un projet de loi d'application volontaire, le gouvernement travaille de manière concertée, mais à propos d'une mesure législative imposée, qui n'est pas facultative, il ne collabore pas avec d'autres intervenants ni ne mène de consultations. Il me semble que ce devrait être l'inverse à bien des égards. Voilà une autre raison qui explique pourquoi les peuples autochtones se méfient des mesures du gouvernement conservateur du Canada.
C'est pourquoi, au cours des deux années de règne du gouvernement conservateur, nous avons vu deux journées de protestation organisées par les Autochtones. Nous devons exprimer notre méfiance, notre volonté de lutter pour l'équité et notre désir de nous faire entendre par le gouvernement en descendant dans la rue, en manifestant, en criant et en participant à des manifestations pacifiques partout au pays. Voilà ce que les peuples autochtones doivent faire.
C'est dans ce contexte que le projet de loi a vu le jour. Je souhaiterais seulement que les efforts réalisés à cette occasion soient sincères. Des personnes et des groupes ont soulevé des préoccupations. Nous savons que ce n'est pas une mesure législative parfaite. Des gens infaillibles émanent des choses infaillibles, j'imagine. Aucun d'entre nous n'est parfait. Il n'y aura probablement jamais de projet de loi parfait. C'est un compromis.
Cependant, il vaut la peine de répéter certains des inconvénients du projet de loi. Par exemple, allons-nous imposer un fardeau indu aux groupes autochtones en leur demandant de mener d'autres recherches, compte tenu du temps que cela demande aux ressources humaines? Le résultat ne serait pas différent. Ces groupes ne seraient pas payés pour cela.
Certains font valoir qu'un juge sans droit d'appel n'est pas une approche adéquate. Un groupe de trois juges aurait peut-être convenu davantage. Il aurait pu y avoir une possibilité d'appel concernant certains aspects des revendications.
La terre est si importante pour les peuples autochtones. Bien des Autochtones, dont un grand nombre dans ma propre famille, disent qu'il serait impossible de les en séparer. Ils disent que séparer les Autochtones de leurs terres revient à les priver de leurs droits et de leur capacité de se construire un avenir. Ils disent que le fait d'avoir une terre, la nécessité pour nous d'être sur nos terres ancestrales, est essentiel à la survie de notre culture.
Ce projet de loi ne prévoit pas l'attribution de terres. Même si nous pouvons formuler une revendication au gouvernement en alléguant que nos terres ont été prises illégalement, qu'elles ont été volées, que nous pourrions en avoir été escroqués, ce projet de loi ne prévoit pas le retour de terres. Il ne prévoit que de l'argent. Il y a un adage qui dit qu'une fois l'argent dépensé, si nous n'avons plus nos terres, que nous reste-t-il? C'est là une préoccupation grave, qui a été soulevée lors des travaux du comité.
Puis, il y a la question de la limitation des motifs que nous pouvons invoquer pour faire une revendication. Par exemple, nous ne pouvons pas faire de revendications qui soient fondées sur un titre ou des droits ancestraux. Nous ne pouvons pas faire de revendication ayant pour motif la perte de la culture ou de la langue. Nous ne pouvons pas faire de revendication auprès du gouvernement, en vertu de ce document législatif, pour ces motifs, mais, une fois que le tribunal a rendu sa décision, nous devons nous engager à ne plus jamais faire de revendication au gouvernement pour les raisons mêmes pour lesquelles il nous est interdit de le faire.
Une fois que le tribunal a pris une décision et qu'elle est acceptée, le groupe en question ne peut plus présenter au gouvernement des revendications fondées sur un titre ou des droits ancestraux ou sur la perte de la langue ou de la culture. Même si nous ne pouvons être dédommagés que pour un nombre restreint de motifs à l'origine de revendications, nous devons dégager le gouvernement de toute responsabilité à l'égard d'un ensemble plus vaste de raisons pour lesquelles il n'y a pas de dédommagement.
C'est très semblable à la question soulevée par les négociations sur les pensionnats autochtones, qui avaient achoppé sur ce point pendant un certain temps. En vertu de l'entente relative aux pensionnats indiens, le gouvernement n'offrira d'indemnités que pour les cas de mauvais traitements physiques et d'agressions sexuelles. C'est toujours le cas: mauvais traitements physiques et agressions sexuelles seulement. Plus tôt pendant ces négociations, la partie plaignante avait dû renoncer à intenter toute poursuite future contre le gouvernement pour des cas de mauvais traitements physiques, d'agressions sexuelles et de perte de culture et de langue. Telle était la pierre d'achoppement.
Le gouvernement s'est toutefois ravisé. Il a écouté ce que les Autochtones avaient à dire. Bien des gens et des organismes menaçaient de ne pas signer. L'entente sur les pensionnats autochtones vise maintenant uniquement les cas de mauvais traitements physiques et d'agressions sexuelles, les mêmes motifs pour lesquels nous pouvons obtenir compensation. Les deux cas sont parallèles.
La question a été examinée au comité. Le président a jugé que l'amendement visant à établir un parallèle était inadmissible. Je crois qu'il est important de signaler que cette question préoccupe toujours les gens.
J'ai parlé de confiance et de la sincérité du gouvernement. J'espère et je prie que tout cela ne soit pas seulement une façon de faire belle figure. Je concluerai en disant que le temps nous démontrera la sincérité du gouvernement. Quand cette mesure législative entrera en vigueur, nous aurons une nouvelle loi, mais la question restera la suivante: comment le gouvernement s'assurera-t-il que les ministères pertinents disposent des ressources et des fonds nécessaires à l'application de cette loi afin de vraiment résoudre les revendications? Le gouvernement pourra peut-être alors regagner une partie du respect et de la confiance des peuples autochtones.
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Monsieur le Président, j'ai écouté l'échange de cette période de questions et observations. En fait, c'est surtout la nécessité d'acquérir la confiance des Premières nations qui est en cause dans ce débat. Je veux féliciter ma collègue de , la porte-parole du NPD pour les affaires autochtones. Elle a souvent soulevé ces questions au comité. Elle s'exprime avec conviction sur la nécessité de gagner la confiance des Premières nations et de développer des relations avec elles pour aider notre pays à progresser.
J'ai souvent parlé à la Chambre des nombreuses nations autochtones de ma circonscription, Île de Vancouver-Nord, où l'on compte près de 30 bandes différentes divisées en 2 conseils tribaux distincts. Dans le Nord-Est de la circonscription se trouve le conseil de district Kwakiutl, et dans l'Ouest, le conseil tribal Nuu-chah-nulth.
J'ai rendu visite à beaucoup de leurs collectivités. Ces gens m'ont parlé de ce que leur peuple a vécu au cours des nombreuses années pendant lesquelles les gouvernements successifs ne les écoutaient pas. Ils ont été écartés du processus de consultation à maintes reprises. Leurs terres sont données à des sociétés forestières et minières. Des piscicultures empiètent sur leurs eaux territoriales. Pendant des années, on donnait constamment leurs ressources à d'autres.
Il y a quelques mois, nous avons rencontré le chef Mike Maquinna de la Première nation Mowachaht/Muchalaht à Gold River, son village, pour parler de premier contact. Les premiers colons sont arrivés au Canada à Yuquot, ou Friendly Cove, comme on appelle aujourd'hui cet endroit. Bon nombre de ces visiteurs sont restés et ils ont accumulé de grandes fortunes en exploitant les terres autochtones, mais on ne peut pas en dire autant de la Première nation Mowachaht/Muchalaht. Elle n'a pas connu la même réussite financière.
Comme les Premières nations ont été exclues du processus de consultation quand les terres ont été données aux industries du secteur primaire et comme une grande partie de leurs ressources se trouvent sur des terres contestées, les Premières nations se sont prévalues du seul recours qui leur restait: la contestation judiciaire. Or, comme il n'y a pas eu de règlement pendant de nombreuses années, il y a maintenant un arriéré de près de 1 000 cas à régler. On m'a dit que 60 p. 100 de ceux-ci se trouvent en Colombie-Britannique. Dans ma circonscription, de nombreuses revendications particulières doivent être réglées. Je sais pertinemment que les Premières nations souhaitent un règlement.
Dans un discours concernant le Tribunal des revendications particulières, le chef Phil Fontaine a dit ceci: « Notre peuple a toujours réclamé, avec constance et détermination, le règlement des revendications en suspens et la mise en œuvre des traités. » Plus tard, il a ajouté « Le règlement des revendications en suspens représente une dette du Canada à l’endroit des Premières nations. L’ancien processus d’examen des revendications particulières comportait des délais de règlement intenables. »
Cela fait plus de 60 ans qu'on a présenté l'idée de créer un tribunal pour régler les revendications particulières. Or, aujourd'hui, le problème n'est toujours pas résolu.
Le chef Fontaine a également dit ceci: « Chaque revendication résolue est un nouveau pas vers la justice et est porteuse d’espoir et de possibilités pour chaque Première nation concernée. » Ses paroles adressées au gouvernement sont très importantes. Il faut que cette idée se concrétise.
Pour m'être entretenue avec des membres des Premières nations de ma circonscription et avec d'autres partout au Canada, je sais qu'ils sont préoccupés, notamment à cause de la lenteur du processus et de ce qu'ils ont perdu en cours de route. Au cours de 60 dernières années, ils ont perdu des possibilités sur le plan économique. C'est une honte que le processus soit si long, et nous devons tous en assumer la responsabilité à la Chambre.
Mes collègues et moi appuyons le projet de loi, mais je veux en parler parce que je veux donner une voix aux Autochtones de ma circonscription qui sont préoccupés par la lenteur du processus et qui ont perdu beaucoup à cause de ce délai.
Ma collègue a soulevé bon nombre de ces préoccupations lors des réunions du comité. Certaines ont été réglées, mais quand je pense à ce que les gens de ma circonscription ont perdu, je suis très inquiète.
J'aimerais lire quelques extraits d'un document d'information rédigé par le British Columbia First Nations Leadership Council:
Le Canada se targue d'être le champion des droits de la personne partout dans le monde et condamne ceux qui violent les normes internationales en la matière, mais les peuples autochtones du Canada doivent avoir recours à la justice pour que leurs droits soient reconnus et respectés dans leur pays. Le Canada est aussi un des deux seuls pays membres du Conseil des droits de l'homme à avoir voté contre l'adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le 29 juin 2006.
On peut comprendre pourquoi les Autochtones sont méfiants et veulent s'assurer que leurs inquiétudes soient entendues avant que nous puissions progresser ensemble. Dans un communiqué daté du 12 juin 2007, le British Columbia First Nations Leadership Council, au sujet de ce projet de loi, a déclaré ce qui suit:
Le First Nations Leadership Council est favorable à un organisme indépendant chargé des revendications particulières.
Mais il a aussi ajouté ce qui suit:
Le [...] First Nations Leadership Council fait preuve d'un optimisme prudent au sujet de l'annonce faite aujourd'hui par le gouvernement fédéral de la création d'un nouvel organisme indépendant chargé de rendre des décisions exécutoires en ce qui a trait aux revendications particulières.
Cela montre bien leur méfiance à l'endroit de ce projet de loi, et ce, pour de nombreuses raisons que je vais aborder dans quelques instants.
Voici un extrait d'un document d'information présenté par Femmes autochtones du Québec Inc. en mai de cette année:
Au cours des dernières années, les Premières nations ont [...] éprouvé des frustrations à l’égard du processus rattaché aux revendications particulières; en effet, le processus est long, lourd et coûteux, et il représente une nouvelle source de difficultés avec lesquelles doivent composer les Premières nations qui, déjà, tentent de résoudre des problèmes qui perdurent.
Voilà donc un autre groupe qui se méfie du processus.
J'aimerais citer quelques faits. En 1963, le gouvernement fédéral a présenté un projet de loi très semblable à celui dont nous sommes saisis. Son objectif était de créer un tribunal appelé Commission des revendications des Indiens, chargé de rendre des décisions exécutoires. Malheureusement, ce projet de loi n'a pas été adopté. Il n'a pas reçu la sanction royale et n'a jamais eu force de loi.
Nous revoilà, bien des années plus tard, et nous tentons de recréer la même chose. À l'époque, on avait fait une évaluation du coût du règlement de certaines revendications et celui-ci était estimé à plus de 17 millions de dollars. En 1963, c'était énormément d'argent, mais avec l'inflation, la montée des prix au fil des ans et tout ce temps sans qu'il n'y ait aucun règlement de ces revendications, et il y en a près d'un millier, ce chiffre a grimpé aussi. Je ne sais pas exactement à combien il s'élèverait en dollars courants, mais il est probablement de quelques milliards de dollars. Si nous avions réglé bon nombre de ces revendications en 1963 ou si nous avions eu un processus pour les régler au fil des ans, nous aurions épargné beaucoup de dépenses aux contribuables. Pour des raisons économiques, il est important que nous allions de l'avant pour ne pas nous retrouver ici dans 60 ans et ne pas avoir à recommencer ce processus alors que les règlements se chiffreraient probablement à des billions de dollars.
Ce sont des choses importantes à noter. La méfiance des Premières nations est un fait. Nous comprenons et reconnaissons qu'elles veulent progresser. Nous voulons régler les revendications particulières afin d'entamer la négociation de traités, comme le désirent les Premières nations pour améliorer leur situation économique.
Le passé a son importance. Il faut en parler, surtout pour ce qui est des Premières nations de ma circonscription. Comme je l'ai dit, j'ai visité un grand nombre des bandes éloignées. Ce sont de petites collectivités isolées. Le régime des pensionnats autochtones les a marquées. Leurs enfants leur ont été retirés au fil des années, de sorte qu'ils n'ont pas grandi dans leur milieu. Après leur scolarité, ils ont déménagé dans les villes ou ailleurs et ont perdu les liens qui les unissaient à leur terre natale. Ces petites collectivités isolées des Premières nations ont donc perdu une partie importante de leur population.
Cependant, du même coup, ces jeunes ont également perdu leur culture. Il leur a été très difficile de s'épanouir et d'être dynamiques en étant si dispersés et en ayant si peu de liens avec leurs collectivités, ce qui ne serait pas arrivé s'ils n'avaient pas été déracinés dans leur jeune âge et placés dans des pensionnats autochtones. Voilà encore une autre page triste de notre histoire à laquelle nous devons réfléchir sans complaisance pour que ces gens puissent vivre plus sainement.
Les Premières nations de la côte et de la partie nord de l'île où j'habite ont perdu d'autres occasions. Nous sommes entourés de ressources. Je me suis rendue à Oweekeno, une localité située à l'extrême nord de ma circonscription, et j'ai parlé avec le chef au sujet des possibilités économiques. Il m'a dit que ses gens songeaient à acquérir une petite société d'extraction forestière qui envisageait de fermer ses portes et qu'ils travaillaient fort pour y arriver. Il m'a dit que son groupe était entouré de ressources, mais n'en profitait pas. C'est une vraie honte, si l'on considère que ces gens étaient les premiers habitants et que la terre leur appartenait. On a de bonnes raisons de croire qu'ils y étaient depuis la nuit des temps. Il est très honteux qu'on les ait privés de leurs terres et que des permis d'exploitation forestière aient été accordés à des sociétés qui en ont bénéficié, sans que les Premières nations de la région ne reçoivent quoi que ce soit.
On peut en dire autant de l'exploitation minière. Certaines de nos plus petites bandes commencent à participer à l'extraction du gravier et à d'autres secteurs miniers. La fierté leur revient progressivement puisqu'elles ont des ressources économiques qui leur permettent de développer la collectivité, de construire elles-mêmes leurs logements et de moins dépendre du financement du gouvernement. Tout cela est important. Ces gens veulent également régler leurs revendications particulières avec d'autres secteurs économiques et avec le gouvernement.
Ce sont des occasions perdues pour les Premières nations de ma circonscription, et ces occasions perdues ont eu des conséquences. De nombreuses générations d'Autochtones ont grandi dans la pauvreté, comme nous l'avons vu, et c'est une honte.
L'autre point que je souhaite soulever concerne les revendications territoriales dans le cadre des négociations de traités en Colombie-Britannique. Plusieurs de nos petites bandes négocient en groupes. Certaines se détachent de ces groupes, car elles estiment qu'elles doivent maintenant s'occuper de leurs problèmes pour les régler. Le processus collectif a fonctionné pour ces bandes jusqu'à un certain point. Certaines participent à ces processus depuis une vingtaine d'années.
Le problème, c'est que ces bandes ont emprunté de l'argent, surtout du gouvernement, et qu'elles devront rembourser ces fonds quand tout cela sera terminé. L'argent dépensé pour les avocats, les déplacements, les recherches et ainsi de suite vient du gouvernement. Je crois que bien des Canadiens ignorent que les Premières nations vivent avec de l'argent emprunté. Elles veulent donc en finir avec ces revendications pour pouvoir passer à autre chose.
Il est important que nous appuyions ce projet de loi important, que nous fassions ce petit pas et que nous progressions.
Toutes les Premières nations de ma circonscription, d'Oweekeno à Comox, de la Première nation Namgis à la Ka:'yu:'k't'h'/Che:k:tles7et'h', la Wei Wai Kai, la Wei Wai Kum, la Mowachaht/Muchalaht et la Gwa’Sala-Nakwaxda’xw, de Fort Rupert à Quatsino — je m'excuse d'avance auprès des Premières nations que je n'ai peut-être pas nommées —, toutes ces bandes se battent depuis tellement longtemps et elles voudraient vraiment aller de l'avant. Avec notre aide, nous pourrons faire le prochain pas ensemble.
J'espère qu'il ne faudra pas 60 ans encore pour aller de l'avant. J'espère que lorsque ce projet de loi aura été adopté et qu'il sera en vigueur, les choses progresseront rapidement et efficacement pour les Premières nations du pays qui ont été laissées pour compte, qui n'ont pas été consultées et qui ont été désavantagées pendant beaucoup trop longtemps. Nous devons agir et appuyer ces mesures.
Je suis très contente d'avoir eu l'occasion de parler de ce projet de loi. En outre, je suis très fière du travail que ma collègue de fait au Comité des affaires autochtones, au nom du Nouveau Parti démocratique.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi , à l'étape de la troisième lecture.
À l'intention des gens qui nous écoutent en ce moment et qui entendent parler de revendications territoriales globales et particulières sans trop savoir de quoi il retourne, je placerai le projet de loi en contexte.
Lorsque le Canada était en cours de développement, le roi a émis une proclamation déclarant qu'il devait y avoir une entente avec les Premières nations et les peuples autochtones avant que les colons d'Europe et les autres Canadiens puissent utiliser le territoire. Cela a conduit à l'élaboration de traités, puis aux traités modernes, qui découlent des revendications territoriales.
Nous ne parlons pas de cela aujourd'hui, même si c'est là que l'on peut trouver certaines solutions aux problèmes des peuples autochtones. Nous voulons certes que l'on travaille avec diligence pour que les nombreuses revendications encore en suspens puissent progresser. C'est une très vaste question et une clé.
Aujourd'hui, nous parlons des revendications particulières, qui donnent lieu à des problèmes. Une Première nation, un groupe autochtone ou un groupe inuit peut alléguer qu'il y a eu atteinte à ses droits et que quelqu'un a posé un geste qui va à l'encontre de ses revendications et demande donc que le tort subi soit corrigé. C'est très important et c'est pour cela que, je crois, tout le monde appuie le principe du projet de loi. Cependant, c'est une question tout à fait différente du grand dossier des revendications territoriales, mais il faut certainement s'en occuper.
Comme d'autres députés l'ont affirmé, le projet de loi est en préparation depuis 60 ans et il reste à y mettre la dernière main et à le mettre en oeuvre, aussi n'est-il pas une nouveauté pour les députés. Tout le monde se réjouit parce que ce projet de loi était réclamé depuis 1947. La Commission royale sur les peuples autochtones de 1996 mentionnait aussi un tel projet de loi. Aujourd'hui, nous l'avons et nous espérons tous qu'il sera adopté.
Je tiens à parler de certains éléments abordés en comité. Lorsque le ministre a prononcé son discours à l'étape de la troisième lecture, j'ai constaté qu'il n'a mentionné aucune des préoccupations entendues en comité, et que les audiences des comités visent justement à faire ressortir. Il s'est contenté de réitérer l'objectif du projet de loi.
Tout d'abord, le ministre a déclaré qu'il y avait 900 revendications particulières en souffrance et qu'il fallait les régler rapidement.
D'après ce que j'ai compris après m'être entretenu avec un membre du comité, le gouvernement n'a pas été très flexible devant les préoccupations du comité et des témoins entendus. Une des préoccupations portait sur le plafond de 150 millions de dollars imposé au règlement des revendications territoriales.
Qu'en est-il des revendications qui dépassent 150 millions de dollars? Que se passera-t-il si l'on amorce le processus pour découvrir ensuite qu'une revendication dépasse en fait 150 millions de dollars? Le gouvernement va-t-il garantir que ces revendications seront traitées de bonne foi et avec célérité, comme les autres revendications particulières?
Le deuxième point, que j'ai abordé dans une question il y a une minute, concerne la quantité totale d'argent disponible. Est-ce que 250 millions de dollars suffiront? Si nous avons 900 revendications dont le plafond est fixé à 150 millions de dollars, nous atteindrons vite le total de 250 millions de dollars au cours d'une année.
Je peux comprendre que le gouvernement n'ait pas inclus l'argent dans le budget, mais j'espère qu'il fera preuve de bonne foi et qu'il l'inclura dans le Budget supplémentaire des dépenses. Il faudra que les tribunaux soient en mesure d'approuver beaucoup plus que 250 millions de dollars par année si nous voulons réduire l'arriéré de façon considérable. C'est pourquoi le gouvernement devrait simplement mettre l'argent de côté dans le Budget supplémentaire des dépenses en prévision de ces besoins.
Le troisième point concerne la nomination des juges. Je sais que cette question fait l'objet d'un accord distinct. Je comprends cela. Ce qui préoccupe les gens, c'est que lorsque deux parties négociaient par le passé, pour reprendre l'exemple utilisé par notre collègue il y a quelques minutes, lorsque les États-Unis et le Canada débattaient une question, c'était toujours l'une des parties qui décidait, par exemple, les États-Unis.
Tel était le système autrefois et c'est bien entendu ce que cette nouvelle entente vise à éliminer, avec l'accord général. Un tribunal sera donc constitué. Pour ceux qui pensent que tribunal signifie trois, parce que tri est un préfixe qui signifie trois, il n'y aura en fait qu'un seul juge. Ce juge sera nommé conformément au processus normal de nomination des juges, mais par une des parties, comme dans l'exemple que je viens de donner concernant les États-Unis. On s'est donc demandé si les peuples autochtones auraient un mot à dire au sujet de la nomination des juges, afin qu'ils aient confiance en l'équité du processus. Bien entendu, comme on l'a dit, l'Assemblée des Premières Nations a collaboré à ce processus et l'appuie.
Le point suivant, soulevé si éloquemment par le député de , concerne les terres. Il s'agit d'irritants dans une revendication territoriale. S'il existe un problème non résolu au sujet d'une telle revendication, voilà une façon de le résoudre. Si on nous retire illégalement nos terres, il y a un moyen de régler le problème, sauf que ce processus ne permet pas aux Premières nations d'aborder le sujet des terres. Il existe donc un processus permettant de traiter des revendications particulières, dont une bonne partie pourrait porter sur les terres, mais ce processus ne vise pas les terres.
Le député a soulevé cette question il y a quelques minutes, mais personne n'a offert de véritable réponse quant à la façon de résoudre de tels problèmes. Le ministre a laissé entendre dans son discours que les Premières nations pourraient obtenir le financement nécessaire à l'achat de terres, mais que cela n'était pas nécessairement acceptable dans tous les cas, si je me souviens bien, selon les personnes venues témoigner au comité à ce sujet.
Une autre préoccupation soulevée avait trait au fait que le règlement de bon nombre de revendications particulières exigerait l'accord de la province. La raison est évidente: les terres publiques au Canada relèvent principalement de la compétence des provinces et du territoire du Yukon. Celui-ci s'est fait transférer la responsabilité de la gestion et de la gérance des terres, de l'eau et des ressources sur le territoire du Yukon en vertu d'accords de transfert des compétences. Il en est allé de même pour les provinces. Ce n'est pas encore le cas dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, mais des négociations sont en cours.
Par conséquent, si, dans la majorité des cas au Canada, les terres publiques relèvent de la compétence des provinces et des territoires et qu'une revendication territoriale particulière pose problème, bien souvent, la province ou le territoire du Yukon devra participer au processus étant donné son rôle de gérance des terres.
Le problème, c'est de rallier les provinces et les territoires. Ils ne vont pas nécessairement adhérer à cela, car ils devront accepter d'être liés par la décision d'un juge. Manifestement, un certain nombre de cas ne pourront se régler de cette manière. Ce ne sera pas aussi parfait que cela en a l'air.
L'un des arguments que je voulais faire valoir concerne le tribunal. La première fois que nous en avons entendu parler, nous avons pensé qu'il s'agissait d'un groupe de juges. Je pensais que six juges seraient nommés pour siéger au tribunal pour que divers juges puissent entendre divers cas, ce que nous approuvons. C'est ainsi que cela devrait être.
Toutefois, il n'y a qu'un seul juge. Nous parlons de revendications pouvant atteindre 150 millions de dollars, ce qui est très important pour les gens. Or, pour le meilleur ou pour le pire, les décisions seront rendues par une seule personne. Ces personnes seront très compétentes, mais il va de soi qu'elles ne prendront pas toujours la bonne décision.
Le problème, c'est que personne d'autre personne ne siégera au tribunal avec le juge. Par conséquent, le juge sera seul pour rendre la décision. Il pourrait facilement, par accident ou pour toute autre raison, négliger un point important et rendre une décision erronée. Le juge est seul pour entendre la cause, et la décision qu'il rend ne peut faire l'objet d'un appel.
Au fil des années, tous ici ont eu affaire au gouvernement pour des raisons administratives ou politiques. Nous savons tous que pratiquement toutes les structures au sein du gouvernement et de l'administration publique prévoient un processus d'appel autre que la révision judiciaire qui est autorisée dans ce cas-ci. Nous ne voulons pas contraindre les gens à aller devant les tribunaux.
Sauf erreur, il n'y a que deux situations importantes où cela se produit dans le système canadien, soit dans ce cas-ci et dans le cas de la détermination du statut de réfugié. En dépit des efforts faits depuis des années pour corriger cette situation, une personne peut être forcée de quitter le Canada. Peut-on imaginer être contraint de quitter le Canada suite à une décision sans appel rendue par une seule personne? Ce serait bien triste.
Je pense que la notion d'appel est une caractéristique de notre sens de l'équité. Même dans les tribunaux où siègent de savants juges — comme ce serait le cas avec ce tribunal —, plusieurs niveaux d'appel sont prévus, jusqu'à la Cour suprême du Canada, mais nous n'avons pas à imposer une révision judiciaire. Ce serait beaucoup plus facile si un mécanisme était prévu à cet égard.
Quelqu'un a laissé entendre que le gouvernement espère régler environ 20 cas par année. S'il y a un arriéré de 900 revendications, nous ne serons guère plus avancés. Par conséquent, il faut affecter les ressources nécessaires pour s'occuper de ces dossiers. C'est un bon plan, sauf en ce qui a trait aux préoccupations que j'ai mentionnées et qui ont été présentées au comité par des témoins et des Autochtones. Cela dit, si le plan est meilleur qu'avant, il faut quand même y affecter les ressources nécessaires.
Une autre question soulevée est celle de savoir si le tribunal peut rendre une décision dans des dossiers qui datent d'avant la Confédération, comme par exemple celui de Caledonia. Je n'ai pas entendu la réponse à cette question.
J'aimerais maintenant féliciter le grand chef Phil Fontaine du magnifique travail qu'il a fait pour assurer la réalisation de cet accord. Il a réellement fait beaucoup pour son peuple au cours des dernières années avec cette entente sur les pensionnats indiens qu'il a signée avec notre gouvernement après des années et des années de travail. Je me souviens que j'étais présent lorsque l'entente a finalement été conclue et j'ai été à même de constater l'émotion suscitée par ses efforts, par son dévouement et par le succès attribuable en grande partie à son leadership. Il mérite sans contredit des félicitations, non seulement de la part des peuples autochtones des Premières nations du Canada, mais de tous les Canadiens.
Tout cela s'applique également au cas présent qui permettra de faire disparaître de nombreux irritants alors que les choses n'allaient pas assez rondement par le passé. Je crois que la moyenne était auparavant de 13 minutes par dossier.
J'aimerais toutefois utiliser les dernières minutes auxquelles j'ai droit pour répéter combien j'ai été étonné d'entendre les propos du ministre et du député de , qui tentent réellement cet après-midi de nous convaincre que les réalisations de leur gouvernement sont très positives pour les peuples autochtones, malgré les énormes compressions dans les fonds destinés aux Autochtones et le grand nombre de programmes qui sont disparus.
Comme je l'ai déjà souligné, je cesserais bien d'en parler puisqu'il n'y a personne qui croit réellement le gouvernement et ce qu'il avance. Toutefois, lorsque nous avons pris connaissance de certains exemples précis au cours des quelques derniers jours, j'ai trouvé que cela allait un peu loin. Le député avance, comme l'a d'ailleurs fait le ministre dans une réponse qu'il a fournie au cours de la période des questions, qu'il y avait certaines choses qui ne se trouvaient pas dans l'accord de Kelowna et que c'est pour cette raison que les mesures proposées par le gouvernement étaient aussi bien reçues.
Pour ce qui est des trois grandes réussites du gouvernement, l'une portait sur les revendications particulières. Nous avons déjà établi que la question était à l'étude depuis six ans. Cela n'avait rien à voir avec Kelowna. Le dossier était en cours et il avait fait l'objet de nombreuses discussions entre le ministère des Affaires indiennes et les divers gouvernements pour que nous en arrivions au point où nous en sommes aujourd'hui.
Le deuxième point portait sur l'entente sur les services aux enfants et aux familles des Premières nations. Il est vrai qu'il n'existait alors aucune entente. Le député a affirmé que cela n'avait rien à voir avec l'accord de Kelowna. Cela montre bien le manque total de compréhension de la part de nos vis-à-vis, qui tentent de faire valoir ces arguments relativement à l'accord de Kelowna et au fait qu'il portait sur la question globale des enfants, des adultes et de leur santé.
Je doute qu'il y ait même un député qui serait d'avis que l'éducation, les services de garde, le logement et le développement économique des parents n'ont rien à voir avec les enfants. Si le gouvernement traitait les enfants et leur famille de manière à s'attaquer aux causes fondamentales des problèmes, beaucoup moins de personnes auraient besoin d'une entente sur les services à l'enfance et à la famille.
Au cours des derniers jours, à deux reprises, le ministre a cité un chef parmi les milliers de chefs et de conseillers de bande au Canada. Il est limité par le nombre très restreint de commentaires positifs à l'appui du travail du gouvernement. Ensuite, le comble, c'est que le ministre a donné l'exemple de la signature d'une revendication territoriale après que le député et d'autres membres de son caucus qui faisaient partie du caucus réformiste se soient opposés farouchement à beaucoup des principales revendications territoriales au Canada. Ils ont lutté contre elles. Ensuite, le député a eu le culot de se lever et de dire que c'est de l'excellent travail en raison de la signature d'une revendication territoriale en particulier dont on ne s'était pas occupé pendant des années. Parler des éléments qui ne faisaient pas partie de l'accord de Kelowna équivaut à un constat d'échec de sa part.
Le troisième point que le député a soulevé concernait l'eau. Les deux premiers n'étaient pas des réussites, et le troisième est guère mieux. La réalité — et les gens le savent — est que, lorsque les libéraux étaient au pouvoir, tous les réseaux d'aqueduc des collectivités des Premières nations ont fait l'objet d'une vérification. Cette vérification pancanadienne financée par le gouvernement précédent a fait ressortir de nombreux problèmes qu'aucun gouvernement n'aimerait découvrir. Les renseignements nécessaires ont été recueillis, puis on a entrepris de régler les problèmes.
Comme le député l'a mentionné, le gouvernement en a réglé quelques-uns. Au lieu de s'employer à régler tous les problèmes que la vérification avait permis de déceler, y compris l'état déplorable des réseaux d'aqueduc, qu'a fait le gouvernement? Il a annoncé, le 15 ou le 16 avril, ni plus ni moins que la tenue d'une étude indépendante visant à déterminer dans quels cas le gouvernement précédent n'avait pas suivi les recommandations concernant l'eau.
C'est assez simple. Les collectivités des Premières nations sont aux prises avec des problèmes d'eau. Pourquoi le gouvernement ne passe-t-il pas tout bonnement à l'action, au lieu de se vanter de sa réussite et dire qu'il va vérifier où le gouvernement précédent n'a pas été à la hauteur, alors que la vérification a déjà été faite? Lorsque le ministre prétend que cela n'a rien à voir avec l'accord de Kelowna, la réaction des gens sera encore une fois de penser que le ministre devrait au moins comprendre ce que prévoyait cet accord.
Il prévoyait 100 millions de dollars pour l'eau en 2006-2007, 75 millions de dollars pour l'eau en 2007-2008, 85 millions de dollars pour l'eau en 2008-2009, 75 millions de dollars pour l'eau en 2009-2010 et 75 millions de dollars pour l'eau en 2010-2011.
Le gouvernement a annulé le plus important accord conclu avec les Premières nations du Canada, pas avec un parti ou un gouvernement donné. Cet accord prévoyait l'affectation de 5 milliards de dollars dans des domaines comme l'éducation, de la maternelle à la 12e année, l'enseignement postsecondaire, l'enfance, le logement, le logement dans le Nord, l'eau et les infrastructures, la santé, le renforcement des capacités et le développement économique. Personne, mis à part quelques députés conservateurs, ne croit le gouvernement, il ne se trouvera personne au monde pour qualifier ce qu'il a fait de réussite.
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Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de sa question. C'est difficile d'imaginer que quelqu'un puisse défendre l'idée d'abolir l'accord de Kelowna. C'est une cible facile à attaquer mais, en fait, le gouvernement se tire dans le pied.
Premièrement, le secrétaire parlementaire a dit avoir l'impression que je tentais de détruire le projet de loi et que j'allais voter contre. Il aurait dû écouter mon intervention s'il avait l'intention de poser une question et de formuler une observation. J'ai dit deux fois dans mon discours que j'appuie le projet de loi, et j'ai donné de bonnes raisons de le faire. Il aurait dû écouter.
J'ai dit également que les préoccupations dont je parlais avaient été soulevées au comité. La question des 150 millions de dollars ne m'inquiète pas personnellement. En fait, ce n'est pas tant une préoccupation qu'une question que je soulevais quand j'ai demandé au gouvernement ce qu'il allait faire des revendications représentant plus de 150 millions de dollars. Si quelqu'un devrait connaître la réponse, c'est bien le secrétaire parlementaire, mais il n'a pas répondu.
En réponse à la question concernant l'arriéré de 900 revendications et le règlement de 20 cas par année, il a dit que ce serait fait. Il n'a pas répondu à ma question concernant le grand nombre de revendications en souffrance et le petit nombre qui est traité chaque année.
Toutefois, c'est surtout à l'incroyable audace du député que je veux réagir. Il a tenté de défendre la décision des conservateurs de se débarrasser de l'accord le plus important qui ait été conclu dans l'histoire entre le Canada et les peuples autochtones. Il manque 5 milliards de dollars. Jamais rien n'a approché cette proposition, une entente qui n'était pas conclue seulement avec le Parti libéral du Canada, pas seulement avec le gouvernement du Canada, mais qui a été conclue entre le Canada, les premiers ministres des provinces et les chefs, les dirigeants de partout au Canada.
On dirait que le député pense que cette entente est apparue comme par magie lors d'une séance de discussion. C'est vraiment injuste envers les chefs autochtones du Canada, qui se sont réunis à maintes et maintes reprises.
Si l'accord a été une telle réussite et a bénéficié d'un tel appui au Canada, c'est parce qu'il n'était pas le fait d'un gouvernement. Il n'était pas le fait du gouvernement libéral. Il était le fait des dirigeants autochtones du pays. Le député insulte les dirigeants autochtones en laissant entendre que ce n'est que pour les flatter qu'on leur attribue le mérite d'avoir défini ces problèmes.
Or, les dirigeants autochtones connaissent les problèmes de leurs collectivités. C'est la raison pour laquelle ils ont parlé de l'enseignement de la maternelle à la douzième année, d'enseignement postsecondaire, d'aide pour les enfants, pour le logement et les infrastructures, ainsi que pour le logement dans le Nord. C'est la raison pour laquelle ils ont parlé d'aide pour l'eau et les infrastructures. C'est la raison pour laquelle ils ont parlé de responsabilisation et de renforcement des capacités, de la nécessité de résultats concrets en matière de revendications territoriales, de droits à l'autonomie gouvernementale, d'occasions économiques et de soins de santé.
C'est la raison pour laquelle l'accord prévoyait le financement de tous ces aspects, qui correspondaient aux demandes des peuples autochtones. Le Canada a consenti à l'accord en toute bonne conscience et a prévu les sommes nécessaires, soit 5 milliards de dollars. Le gouvernement conservateur a retiré ce financement. Je serais très mal à l'aise d'avoir à défendre une telle décision si je faisais partie de ce gouvernement.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole concernant le projet de loi .
Au Bloc québécois, lorsque l'on parle des questions autochtones, on le fait évidemment avec beaucoup de solidarité. En effet, de longue date, on considère que les Autochtones forment des nations. Notre porte-parole au Bloc québécois, le sympathique député d', est un homme très engagé dans la défense des droits des Autochtones. Il l'a été lorsqu'il s'est agi de faire la promotion de la signature du traité aux Nations Unies. Ce gouvernement a manœuvré dans les coulisses des Nations Unies — ce forum multilatéral certes important — pour minimiser la protection qui aurait pu être offerte aux Premières nations, aux nations autochtones; et c'est une honte.
On ne dira jamais à quel point nous avons raison d'être inquiets. Lorsque ce gouvernement jette un regard sur les droits de la personne, il le fait généralement de façon négative. On peut parler de la question des Autochtones ou de la question de la contestation judiciaire. Notre collègue, porte-parole du Bloc en matière de condition féminine, pourrait parler de la question des droits des femmes. Ce sont là autant de motifs d'inquiétude qui nous démontrent bien qu'être de droite, dans la politique canadienne, c'est vraiment jeter un regard différent lorsqu'il s'agit de faire la promotion, la défense et l'encouragement des droits de la personne.
Évidemment, je pourrais aussi rappeler que chaque fois qu'ils en ont eu l'occasion, les conservateurs ont voté contre les droits des personnes homosexuelles. Ces députés, tant lorsqu'ils sont dans l'opposition que lorsqu'ils sont au pouvoir, s'opposent à l'inclusion du motif interdit de discrimination qu'est la condition sociale. Bref, c'est un gouvernement détestablement conservateur, qui n'a aucune sympathie pour les droits de la personne.
Cependant, cela ne m'empêchera pas de vous dire que le Bloc québécois appuie le projet de loi C-30. Je le rappelais plus tôt et je le redis avec beaucoup de fierté: dans l'histoire du mouvement souverainiste, il y a toujours eu un très grand capital de sympathie pour la question des droits des Autochtones. Certains ont pu écouter la série télévisée, à Radio-Canada, qui relatait un peu la carrière de René Lévesque, l'ex-premier ministre du Québec. Il a été le chef du gouvernement de 1976 à 1985. Cette série télévisée a fait l'objet de critiques, j'en conviens. Certains faits ont été jugés inexacts au regard de l'histoire. Toutefois, une scène extrêmement bien jouée recrée une rencontre entre René Lévesque et les chefs des Premières nations du Québec.
Vous savez qu'au Québec, on a toujours fait la promotion des langues vernaculaires des Autochtones. On a utilisé des fonds publics pour permettre l'enseignement de ces langues. Dans la mesure du possible, on en a fait la promotion, sans que cela nuise à la nécessité d'un dialogue avec la majorité, évidemment. C'est René Lévesque, le premier, qui a reconnu les droits des Premières nations. Aujourd'hui, cela fait partie d'un droit extrêmement vigoureux. Il y a une vingtaine d'années, c'était un droit émergent. C'est assez révolutionnaire, assez inédit et assez visionnaire de se rappeler les droits ancestraux. Au Québec, on l'a fait en 1985. Au Canada, on l'a également inscrit dans la Charte canadienne des droits et libertés. Mais je pense qu'il faut rendre hommage à M. René Lévesque pour le caractère visionnaire qu'il a démontré lorsqu'il s'est agi de reconnaître les Autochtones.
Le projet de loi se propose de créer un tribunal indépendant qui statuera sur les revendications particulières des nations autochtones. On prendra des décisions concernant le traitement des revendications particulières au Canada. C'est donc un élément important d'un processus de résolution de conflits qui opposent, dans certaines parties du Canada et quelquefois au Québec également, les contentieux territoriaux.
On se rappelle qu'en vertu de la Constitution, le gouvernement fédéral est le fiduciaire des droits des Autochtones. Il en est le gardien. Il a donc la responsabilité de maintenir les peuples autochtones dans les meilleures conditions possibles.
On sait qu'en 1947, le Canada a obtenu sa pleine indépendance judiciaire en ne relevant plus du Comité judiciaire du Conseil privé, de Londres. Depuis cette date, plusieurs comités mixtes ou sénatoriaux ont recommandé la création d'un tribunal indépendant sur les revendications particulières. Si je ne me trompe pas, c'était également une revendication de la commission Erasmus-Dussault, présidée par un ancien juge de la Cour d'appel du Québec, qui avait fait des revendications et déposé un rapport. Si mon souvenir est exact, à l'époque, la ministre Jane Stewart était responsable des affaires autochtones pour le gouvernement libéral.
Bien sûr, cette revendication pour un tribunal des revendications territoriales des Premières nations a des racines, puisque les chefs et les porte-parole autorisés des Premières nations en font la demande depuis maintenant 60 ans.
Le Bloc québécois rappelle que les négociations demeurent toujours le mode privilégié de résolution des revendications. Le tribunal que propose le projet de loi aura le pouvoir de rendre des décisions qui seront exécutoires. Il est évidemment précieux que l'on puisse rendre des décisions exécutoires qui feront l'objet d'une obligation juridique de mise en oeuvre.
Il faut préciser un certain nombre de choses. D'abord, le tribunal qu'on s'apprête à créer — c'est un sujet quand même délicat dans l'opinion publique — ne va pas attribuer des terres. Ce n'est pas le rôle d'une instance comme un tribunal juridique que d'attribuer des terres ou de statuer sur des délimitations territoriales. Le tribunal que l'on s'apprête à créer — et je répète que le Bloc québécois appuie ce projet de loi — statuera sur des indemnités. Autrement dit, il reconnaîtra qu'un certain nombre d'injustices historiques ont été commises et proposera des compensations financières.
Ce tribunal disposera d'un budget de 250 millions de dollars sur 10 ans pour son fonctionnement et pourra traiter des litiges dont l'enjeu se situera en deçà de 150 millions de dollars. Les revendications territoriales dont il est question ici peuvent prendre différentes ampleurs. Certains litiges sont plus circonscrits, d'autres sont plus étendus, mais toujours est-il que ce tribunal, selon le projet de loi qui nous est proposé, ne pourra pas octroyer plus de 150 millions de dollars en guise de compensations financières.
Je répète que ce tribunal ne pourra pas accorder de terres, mais seulement statuer sur des compensations financières. Les revendications qui pourront être acheminées à ce tribunal et sur lesquelles celui-ci pourra statuer devront avoir été demandées depuis au moins 15 ans. Les revendications territoriales doivent porter sur d'anciens griefs formulés par les Premières nations. Ces griefs devront avoir trait aux obligations qui échoient au Canada en vertu de traités historiques, ou à la façon dont le Canada a géré les fonds ou les biens des Premières nations, y compris les terres de réserve.
Je rappelle qu'en vertu de la Constitution, le Canada est le fiduciaire des biens et des droits des Premières nations; il en est donc le gardien.
Ce projet de loi permettra au tribunal de statuer sur des revendications territoriales, et le tribunal pourra se saisir de ces revendications dans trois circonstances. La première, c'est lorsqu'une revendication a été rejetée par le Canada, notamment dans le cas où le Canada n'observait pas le délai de trois ans prescrit par l'évaluation des revendications.
On sait que dans le processus de revendications et d'arbitrage qui existe, normalement, à travers ses différentes commissions des revendications territoriales, le Canada a trois ans pour statuer sur le contentieux ou l'issue d'une revendication. Dans le cas où cela ne sera pas fait, il s'agira de facto d'un motif qui permettra de déférer le contentieux à ce nouveau tribunal qui sera créé.
Le tribunal pourra également se saisir d'une revendication à n'importe quelle étape du processus de négociation, à la condition que les parties soient mutuellement d'accord ou qu'il y ait un consensus pour déférer cette question à un tribunal des revendications. La troisième modalité indique qu'il sera possible de confier une cause au tribunal des revendications particulières après trois ans de négociations infructueuses.
Le tribunal examinera donc des questions de fait et de droit pour déterminer si le Canada a des obligations juridiques non réglées en vertu de la loi. Il sera formé de six juges de cours supérieures nommés à temps plein. Nous savons que le gouvernement fédéral nomme les juges des cours supérieures. Les membres du tribunal seront choisis et nommés conformément au processus actuel de nomination à la magistrature. Normalement, il y a des comités de sélection.
Je considère qu'il est évidemment de mon devoir, en ma qualité de porte-parole en matière de justice, de me permettre une brève intermission pour rappeler combien ce gouvernement a été honteux, a manqué de jugement, a été détestable et mal avisé de vouloir recomposer les comités de sélection des juges. On se rappelle lorsque l'actuel était ministre de la Justice. C'est l'un des esprits les plus conservateurs du Cabinet. Je pourrais employer d'autres mots, mais je ne le ferai pas pour rester parlementaire. Il reste que ce gouvernement veut et a voulu revoir la composition des comités de nomination des juges pour y nommer des policiers.
On se rappelle le tollé que cela a soulevé à l'époque où le Comité permanent de la justice et des droits de la personne se réunissait. L'actuel président du Comité permanent de la justice pousse l'affront, le culot, le manque de savoir-vivre et le manque de fair-play jusqu'à ne pas réunir le Comité permanent de la justice qui est pourtant l'un des comités qui a l'un des mandats les plus importants dans cette Chambre. Pourquoi le président refuse-t-il de convoquer le comité? Ce que le gouvernement ne veut pas permettre que ce comité puisse faire la lumière sur l'affaire Cadman et que nous puissions jouer notre rôle de parlementaires, comme nous sommes en droit de le faire. Évidemment, le comité se pose la question à savoir s'il y a eu, oui ou non, une corruption pour l'achat de votes dans les dernières années de la vie du gouvernement Martin.
Toujours est-il que ce nouveau tribunal des revendications particulières sera donc nommé à partir de six juges des cours supérieures et que ces derniers travailleront à temps plein. On espère que les comités qui conduiront à la nomination de ces juges au tribunal des revendications particulières seront exempts d'intervention et qu'ils seront nommés selon un processus qui a, jusqu'à présent, fait honneur à la magistrature canadienne, jusqu'au moment, bien sûr, où le gouvernement conservateur a voulu maladroitement intervenir.
Les juges rendront des décisions qui seront exécutoires et sans appel. C'est un aspect du projet de loi qui a été un peu critiqué et controversé. Normalement, la règle du droit substantif permet un droit d'appel. Malheureusement, je me fais un devoir de rappeler qu'il y a des précédents dans cette Chambre. C'est encore le cas pour la question des réfugiés.
Malgré le fait que le Bloc québécois a travaillé fort pour s'assurer que nous pourrions un mécanisme d'appel en matière de revendications du statut de réfugié, ce n'est pas encore le cas. Et je comprends que ce sera également le cas pour le tribunal qui sera créé, malgré les représentations faites au comité.
Cependant, même si ce tribunal rendra des décisions exécutoires sans appel, il sera possible d'avoir un contrôle judiciaire. Toutes les lois fédérales peuvent faire l'objet d'un contrôle judiciaire. Cela se fait bien sûr généralement en première instance à la Cour fédérale, et à la Cour fédérale d'appel.
D'autre part, qu'est-ce qu'un contrôle judiciaire? C'est lorsqu'on a des raisons de penser qu'une décision a été rendue dans le non-respect des principes de justice naturelle ou dans le non-respect de la juridiction du tribunal. Ce sont donc des appels qui sont assez spécialisés. Cela ne porte généralement pas sur les motifs de la décision, mais vraiment sur des questions de respect, d'ordre procédural.
Ce tribunal ne sera pas dépourvu de reddition de comptes. C'est normal, puisqu'il y a tout de même plusieurs millions de dollars en jeu. C'est un tribunal qui fera rapport à la Chambre annuellement. Ce rapport annuel, on le présume, sera déposé par un ministre de la Couronne. Je ne sais pas s'il s'agira du ministre de la Justice ou du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, mais tout cela sera à surveiller de très près. Évidemment, le tribunal devra rendre des comptes sur ses dépenses. C'est normal, puisqu'il s'agit de fonds publics. Et les travaux du tribunal seront soumis à une révision. Il y a une clause de révision quinquennale. Ce n'est pas quelque chose d'exceptionnel.
Je pense, par exemple, à la tristement célèbre Loi antiterroriste. Au moment où les libéraux ont fait adopter cette loi, j'étais à la Chambre avec notre collègue responsable du dossier des transports d' — un des meilleurs organisateurs du Québec, comme mes collègues le savent — et avec le député de , et nous avions dit à la ministre responsable du dossier, Mme Anne McLellan, que sa Loi antiterroriste ne passerait pas le test de l'examen de la Cour suprême.
Une fois de plus, le Bloc québécois a été bien avisé de faire ses recommandations, et la Cour suprême nous a donné raison, tout comme elle l'a fait sur la question des certificats de sécurité qui, on le sait bien, briment et heurtent de plein front un principe de justice naturelle: le droit d'avoir accès à la preuve.
Je vois que le temps fuit. Le Bloc québécois appuie ce projet de loi. Nous le faisons par solidarité avec les Premières nations autochtones, et nous lançons un appel pour que ce projet de loi soit adopté prestement. Bien sûr, nous avons des interrogations, mais sur le fond, nous sommes favorables au projet de loi. Je ne peux pas m'empêcher de demander au gouvernement, particulièrement au secrétaire parlementaire, de revoir sa position sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits peuples autochtones et de mettre fin à cette valse-hésitation totalement honteuse — qui fait la honte dans les instances internationales. J'espère que le gouvernement reviendra à la raison et permettra que le Canada prête sa voix à cette convention internationale, en attendant que le Québec le fasse de façon autonome sur la scène internationale.
Me reste-t-il une minute? Deux? On me fait signe qu'il me reste une minute, d'accord. Je croyais que mes collègues voulaient que je dispose de deux minutes, mais on vit à une époque extrêmement compétitive où même si l'amitié est réelle entre le gouvernement et l'opposition, je sais que ce gouvernement m'a à l'œil, mais je veux l'assurer de la plus complète réciprocité en la matière.
Je termine donc en disant qu'au-delà de la reddition de comptes, le Bloc québécois espère que la mise en œuvre de ce tribunal permette l'amortissement des quelque 138 revendications particulières qui sont toujours en négociation au Canada.
Nous espérons évidemment que, très rapidement, nous puissions procéder à la nomination des juges.
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Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi .
D'entrée de jeu, je vous dirais que le NPD va appuyer ce projet de loi. Nous avions certaines réticences et nous avons essayé de présenter des amendements qui auraient amélioré le projet de loi, mais les conservateurs n'ont rien voulu entendre. Nous allons énoncer devant la Chambre nos réticences concernant le projet de loi, qui permettra de réaliser quelques progrès sur certaines questions bien précises, dans le domaine des revendications particulières, mais qui ne résoudra pas certains problèmes figurant parmi les plus importants, dont le Parlement et le pays devraient s'occuper.
Plus je voyage et plus je rencontre des gens, plus je saisis l'importance de l'échec du Canada dans le dossier du legs historique des Premières nations. C'est probablement l'un des obstacles qui empêchent le Canada de devenir le grand pays qu'il pourrait être. Nous devons unir nos forces. Ce n'est pas une question partisane. C'est un échec fondamental qui se manifeste dans l'ensemble du Canada depuis le début. La génération actuelle doit régler ce problème.
J'ai eu le grand honneur de représenter ma circonscription et, d'une certaine manière, de représenter le gouvernement du Canada au cours des activités relatives au traité no 9, qui ont eu lieu dans une grande partie du Nord de l'Ontario. Comme on le sait, le traité no 9 porte sur environ les deux tiers des terres de l'Ontario.
Les activités ont commencé dans le Nord-Ouest ontarien, où les signataires du traité représentant le gouvernement de l'Ontario et le gouvernement du Canada ont rencontré les premières populations. À l'époque, ils s'étaient rendus en canot dans tous les lieux habités, jusque dans la région de la baie James. C'était il y a 100 ans.
J'étais présent lorsque de jeunes canoteurs ont reconstitué la scène à certains endroits. J'ai eu l'occasion de me rendre à Martin Falls. C'est la localité la plus isolée de ma circonscription, loin en aval sur la rivière Albany. Elle est aussi éloignée de tout autre lieu habité qu'on peut l'imaginer. Nous avions été invités à remonter la rivière jusqu'à l'endroit, à Martin Falls, où le traité a été signé il y a 100 ans. Il nous a fallu tout l'après-midi pour remonter la rivière jusqu'à cet endroit. Nous sommes arrivés à l'endroit exact et nous nous sommes trouvés probablement dans les mêmes conditions exactement que les signataires du traité, lorsqu'ils sont arrivés à Martin Falls pour rencontrer la population ojibway.
Cet après-midi-là, j'ai pris la parole en présence du lieutenant-gouverneur de l'Ontario et des représentants du Canada. Un homme s'est levé et a commencé à parler en ojibwé. Il a demandé s'il pouvait prendre la parole. Il nous a priés de l'excuser, disant qu'il n'avait jamais appris l'anglais. Lorsqu'il était âgé de quatre ans, des représentants du gouvernement étaient venus chez lui et avaient emmené sa soeur avec eux. Elle avait un an de plus que lui. Ils ne l'ont jamais ramenée et personne ne leur a dit ce qu'elle était devenue. Lorsque les représentants du gouvernement sont revenus l'année suivante, ses parents l'ont caché dans les bois. Il n'est jamais allé à l'école.
La tristesse était palpable dans cette petite collectivité pendant que nous étions au bord de la rivière et que cet homme parlait de cette petite fille dont personne n'avait jamais donné de nouvelles. Nous pensons aux années de tragédie, de violence et de promesses rompues, autant de drames qui ont empêché ces gens de se développer normalement. Les cessions systématiques et les transferts illégaux de terres de même que le pillage de leurs ressources les ont ébranlés au plan émotif et paralysés au plan financier.
J'étais là 100 ans plus tard en train de parler au nom du gouvernement du Canada en tant que député, et j'ai dit qu'il n'y avait pas de quoi célébrer. Il n'y a rien à célébrer lorsqu'un traité signé de bonne foi n'a pas été respecté par l'autre partie.
Toutes les collectivités dans la région de la baie James et les régions éloignées du Nord que je représente au Parlement sont parmi les plus pauvres au Canada. Nous pouvons faire mieux. C'est pour cela que nous avons besoin de discuter des revendications particulières. Aucun gouvernement, aucun parti ne pourra arriver avec une solution miracle pour réparer le tort causé par des années de promesses non tenues et les effets dévastateurs que cela a eus sur nos collectivités d'un bout à l'autre du Canada. Nous devons prendre les mesures qui s'imposent.
J'en arrive à la question des revendications particulières. Un des grands bonheurs de ma vie a été de travailler pour la nation algonquine au Québec. J'ai travaillé dans le domaine de la recherche en histoire et dans celui des revendications. Les collectivités qui ont présenté des revendications particulières ont été victimes de divers abus économiques et financiers. Certaines ont vu l'exploitation forestière dénuder leurs terres. D'autres ont vu des fonctionnaires fédéraux abuser des fonds en fiducie prévus pour elles. D'autres encore ont vu se produire des choses scandaleuses telles que la modification des frontières d'une réserve pour faciliter la vente de terres.
Remettons les choses dans leur contexte historique. Entre 1898 et 1940, on a assisté à la vente phénoménale de terres des Premières nations. Dans l'Ouest du Canada, dans les provinces des Prairies, on aurait dit que le rôle des députés et des fonctionnaires était d'agir comme spéculateurs immobiliers. On vendait les terres à des prix dérisoires.
Dans ma région, dans la région de l'Abitibi où vit la nation algonquine, on a vendu une énorme quantité de terres. Cela s'inscrivait dans une série de cessions désordonnées. Un grand nombre d'entre elles étaient douteuses, au mieux. On utilisait toutes sortes de méthodes d'intimidation. Quelques acteurs clés participaient à ces transactions. Souvent, un député jouait un rôle. Il était vu comme la personne qui pouvait vous obtenir les terres. Les autres étaient les fonctionnaires, manquant à leur responsabilité fiduciaire. Le troisième acteur était l'agent des Indiens.
Dans la collectivité de la Première nation Timiskaming, de laquelle j'ai tant appris, un seul agent des Indiens a été renvoyé, à ce qu'on sache. Il a été le seul agent des Indiens à dire aux gens de la collectivité qu'il estimait qu'une cession de terre n'était pas dans leurs intérêts et qu'il valait mieux qu'ils gardent la terre, car ils n'en tireraient rien. C'est le seul agent à avoir été renvoyé, d'après ce qu'on sait. Les autres agents étaient plus que disposés à vendre les biens de ces collectivités à rabais.
Nous voici, 100 ans ou 50 ans après ces cessions, et les collectivités demeurent paralysées. Il faut y remédier. Malheureusement, l'attitude envers les revendications particulières est sensiblement la même que face aux autres problèmes des Premières nations. C'est une attitude qui consiste à dire « Traînez-nous en cour ». C'est une attitude qui revient à dire « Nous allons faire traîner les choses. » C'est une attitude qui revient à dire « Nous allons amorcer des négociations et nous commencerons à nous traîner les pieds. » La minute où nous nous engageons dans des négociations, la collectivité est en situation d'emprunt. Elle doit emprunter pour rencontrer les consultants et les experts et, en fin de compte, elle n'obtient pas ce dont elle a besoin. On pourrait régler bon nombre de ces revendications avec un peu de bon foi.
J'ai eu affaire à des collectivités très circonspectes quant à la signature de traités, quels qu'ils soient, parce qu'elles ont vu ce qui est arrivé dans d'autres cas. La simple résolution d'un conflit historique concernant une limite territoriale ou une renonciation illégale entraîne la présentation à la table d'une foule de questions que les avocats font traîner en longueur. La collectivité mise en cause est forcée de payer jusqu'à la fin du processus même si, en fin de compte, ce qu'elle obtient ne répond à ses besoins.
Par surcroît, on demande aux Premières nations de renoncer à leur titre ancestral et de mettre fin à leur revendication collective concernant les terres sur lesquelles elles ont toujours vécu. J'ai rencontré des collectivités vivant dans une pauvreté extrême mais qui ne signeront jamais parce qu'elles estiment que la seule chose qu'elles peuvent transmettre à leurs petits-enfants, c'est le titre ancestral et que, de ce fait, il faut le préserver.
Voilà des éléments de ce processus de revendication. Je félicite l'ancien ministre des Affaires indiennes qui a souligné qu'il faut s'attaquer à l'arriéré, ce qui est effectivement le cas. Je m'interroge sur le rôle du tribunal et je me demande dans quelle mesure il traitera les litiges. C'est le ministre qui établira les principes de négociation. Il aura le pouvoir de rejeter les revendications. Trois ans après la présentation, si personne ne communique avec la collectivité, la revendication sera considérée rejetée. Je crois qu'il sera difficile pour certaines collectivités d'avoir confiance et de poursuivre leur revendication. Je ne suis pas certain qu'au bout du compte, nous serons plus avancés.
Cela m'amène à la question la plus fondamentale concernant les revendications particulières. Il faut vraiment lancer un processus où nous cesserons de trahir la confiance des collectivités à l'égard des accords qui sont signés. Des abus ont été commis il y a 100 ans, mais on peut aussi parler de ceux qui sont commis aujourd'hui quand le gouvernement se soustrait à des engagements déjà pris.
J'ai travaillé dans la communauté de Barriere Lake, qui en a arraché, si je puis dire, qui a eu énormément de difficultés à sortir du cadre traditionnel. Cette communauté est tellement pauvre. Elle est située sur un territoire dont les ressources rapportent chaque année de 50 millions à 60 millions de dollars. Les habitants de cette communauté ne voulaient pas mettre fin à l'exploitation forestière. Ils voulaient simplement trouver un équilibre entre l'exploitation forestière et la poursuite de leur mode de vie, afin qu'un partage des revenus leur permette de sortir de leur incroyable pauvreté. À seulement 300 kilomètres de là, on voit 21 personnes vivant dans une maison de deux chambres à coucher. Une génératrice au diesel fournit l'électricité à la communauté, qui est pourtant située près de certains des plus grands barrages hydro-électriques d'Amérique du Nord.
Le gouvernement fédéral est intervenu en 1997 en supprimant le conseil de bande traditionnel. Pendant une année d'incertitude, il n'y a pas eu d'école. Il n'y a pas eu de chauffage dans la communauté. Cette communauté n'a eu aucun revenu pendant un an. Cela s'est produit dans l'ombre d'Ottawa, jusqu'à ce que cette situation soit reprise par les médias du monde entier.
Clifford Lincoln a joué un rôle important. D'anciens représentants du gouvernement québécois se sont assis avec des représentants du gouvernement fédéral et de la communauté de Barriere Lake afin d'en arriver à une entente. Comment rebâtir cette communauté? Les partis en sont arrivés à une proposition globale visant à rebâtir la communauté, un plan à long terme destiné à la sortir de cette extrême pauvreté. L'entente a été signée, mais il ne s'est rien passé depuis. Ce fut simplement une autre promesse non tenue.
Nous constatons un sentiment de désespoir et d'amertume parmi tellement de jeunes Autochtones. Ils cherchent où sont les résultats. Lorsque nous examinons comment traiter l'arriéré de revendications, et il est important de le régler, il faut aller au-delà du litige et non simplement proposer une recommandation à prendre ou à laisser. Nous devons commencer à nous demander comment traiter notre arriéré de problèmes afin de pouvoir mieux progresser.
Je connais des collectivités qui ont perdu d'immenses étendues de terres. Ces collectivités savent bien qu'elles ne récupéreront jamais leurs terres. Elles ne se font pas d'illusions. Ce qu'elles souhaitent, c'est qu'un processus soit mis au point pour que leurs jeunes puissent avoir des débouchés. Cela devrait être possible dans nombre de ces collectivités, mais seulement dans la mesure où les parties en présence sont de bonne foi.
Nous sommes certes prêts à appuyer le projet de loi, mais nous ne croyons pas qu'il viendra à bout du problème fondamental, à savoir que le gouvernement doit négocier de bonne foi avec les collectivités et consulter les dirigeants dans les diverses régions afin de trouver une façon de procéder pour faire fondre l'arriéré de revendications particulières non résolues.
Le moment est venu de s'attaquer aux revendications particulières et de faire vraiment avancer les choses pour que l'on puisse commencer à remédier à l'incapacité totale du gouvernement de respecter même les plus élémentaires des obligations fiduciaires en matière de logement, d'infrastructure et de partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources.
Chez nous, en Ontario, cela fait de nombreuses années que l'on exerce des pressions par l'intermédiaire des néo-démocrates provinciaux pour faire appliquer cette idée de partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources. Les municipalités dans lesquelles une mine sera mise en valeur ont droit à une part des recettes fiscales, mais cela ne fait sourciller personne lorsqu'on ouvre une mine dans une région isolée où vivent des membres des Premières nations et que la collectivité n'a ni voix au chapitre ni droit à une partie des recettes. Rien.
Le gouvernement libéral de la province fait constamment obstacle aux efforts que nous déployons pour obtenir une part des recettes tirées de l'exploitation des ressources naturelles. Les autorités provinciales ont récemment emprisonné des dirigeants de la Première nation KI, envoyant ainsi comme message qu'elles sont prêtes à négocier tant que leurs interlocuteurs leur donnent un accès complet à leurs conditions à elles, à défaut de quoi elles les traîneront devant les tribunaux ou autoriseront les sociétés à intenter contre eux de grosses poursuites et les jetteront en prison.
Je ne sais pas si, chez les non-Autochtones du Canada, on comprend quelles sont les répercussions de l'impasse actuelle entre la province et la Première nation KI, mais elle a empoisonné les relations qui commençaient à s'établir et que nous souhaitons encourager afin de favoriser le développement des Premières nations.
On ne consulte pas les gens en leur mettant le fusil sur la tempe et en jetant leurs dirigeants en prison. Ce qui s'est passé avec la Première nation KI et qui, à mon avis, est tellement incroyable, c'est que les tribunaux ont confirmé une fois de plus l'obligation de consulter. Nous avons certainement vu cela en Colombie-Britannique, où la plupart des affaires qui ont fait jurisprudence, portaient sur l'obligation de consulter, mais, le hic, c'est que les Autochtones ont besoin d'argent pour payer des avocats pour aller plaider leur cause devant le tribunal. La Première nation KI faisait l'objet d'une poursuite de 10 milliards de dollars parce qu'elle avait chassé de son territoire un mercenaire payé par Platinex et elle n'avait simplement pas autant d'argent. Comme elle n'avait pas d'argent pour faire valoir ses allégations relatives à la consultation, elle était passible d'une amende et, en fin de compte, certains ont été jetés en prison.
Cela a certainement assombri l'un des autres éléments qui, jusqu'à maintenant, figurent parmi les quelques aspects positifs dans ce dossier. Il s'agit du fait que des Premières nations ont accepté de signer ce que nous appelons des traités sur le terrain avec des sociétés d'exploitation de ressources parce qu'elles obtiennent parfois plus des sociétés qu'elles ne pourraient jamais obtenir du gouvernement fédéral.
À l'époque où je travaillais dans la région de l'Abitibi, nous voulions rencontrer Tembec. Nous voulions rencontrer des sociétés de diamants. Nous essayions de trouver une façon d'utiliser le titre ancestral du territoire et nos droits ancestraux pour négocier des ententes qui seraient lucratives. Si nous y avions mêlé le gouvernement fédéral, il aurait empêché toutes ces ententes et nous n'aurions jamais rien fait.
Lorsqu'il est question du développement du Nord canadien, où sont situées certaines des collectivités les plus pauvres de notre pays, les accords de partage des recettes — conclus avec des sociétés minières qui sont de bonne foi, pas avec celles qui sont de mauvaise foi — peuvent représenter un début de modèle à suivre pour le XXIe siècle.
En terminant, je dois dire que nous appuyons l'idée de régler les revendications particulières, mais nous croyons que plusieurs éléments du projet de loi doivent être modifiés. Nous ne croyons pas qu'en fin de compte, le règlement d'une revendication particulière devrait se solder par l'abandon du titre ancestral sur un territoire. Selon nous, le plafond a été délibérément placé trop bas. Nous n'acceptons pas le principe d'un tribunal dont les décisions sont à prendre ou à laisser, premièrement parce qu'il s'agit d'un conflit d'intérêt, et deuxièmement, parce que nous pensons que certaines Premières nations n'accepteront pas de suivre le processus.
Nous devons avancer et commencer à régler le dossier. C'est en partie pour cela que le Nouveau Parti démocratique appuiera le projet de loi à cette étape. Mais nous soutenons que le Canada est jugé en fonction de notre refus de traiter les Premières nations comme des partenaires égaux et de bonne foi. Nous devons changer cela.
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Monsieur le Président, c'est un honneur de prendre la parole relativement à ce sujet très sérieux. J'aimerais tout d'abord poser une question fondamentale à laquelle nous devrions tous tenter de répondre. Les revendications territoriales amélioreront-elles fondamentalement la vie des peuples autochtones?
La semaine dernière, je me suis rendu dans l'une des réserves de ma circonscription, la réserve Pacheedaht, près de Port Renfrew. Les conditions dans cette réserve ressemblent beaucoup à celles d'un pays en développement. Les maisons sont délabrées. Les fenêtres sont fracassées. Les maisons sont infestées de moisissures. Nous savons que la présence de moisissures dans ces types de logis est un important facteur de risque de tuberculose et contribue à l'incidence très élevée de cette maladie chez les peuples autochtones.
Lors de mon passage dans la réserve, je n'ai pas vu beaucoup de monde.
Je suis allé dans la réserve parce que, dans ma collectivité, nous avons créé des bibliothèques destinées aux enfants dans certaines des réserves de ma circonscription. Nous avons mis sur pied trois bibliothèques.
Comme je le disais, lorsque je me suis rendu à Pacheedaht, j'y ai vu très peu de gens. L'appréhension et une grande morosité y régnaient. La nuit précédente, un jeune femme de la réserve avait été violée. Malheureusement, cela n'est pas un incident isolé dans cette réserve et dans un certain nombre d'autres réserves que j'ai eu l'occasion de visiter. C'est le reflet d'une situation plus répandue et plus morose qui affecte de trop nombreux Autochtones qui vivent sur des réserves ou à l'extérieur.
À quoi ressemble la vie dans ces réserves? En Colombie-Britannique, en tant que médecin, j'ai eu l'occasion de prendre l'avion pour visiter certaines réserves autochtones où je faisais des consultations à domicile. Je me rendais sur place et je rencontrais et soignais les gens à domicile.
Rien n'est plus déchirant que de se rendre dans une collectivité où huit personnes et plus vivent dans des maisons hermétiquement fermées. Ici, une grand-mère et un grand-père dorment sur des matelas souillés d'urine. Assis devant la maison, il y a des enfants souffrant d'impétigo, une grave infection cutanée. Des gens sont étendus près des enfants. Il n'est que 10 heures, mais il sont déjà ivres. Le taux de chômage dépasse les 50 p. 100. Pour tout dire, il n'y a plus aucun espoir dans ces collectivités.
Il y a une question fondamentale que je poserais. Les traités doivent être respectés. Ils doivent être menés à bien et les revendications territoriales doivent être réglées. Toutefois, en fin de compte, le fait de conclure ces traités va-t-il fondamentalement améliorer la triste situation d'un trop grand nombre d'Autochtones, tant dans les réserves que hors de celles-ci?
Il existe toutes sortes de statistiques. Je voudrais en mentionner quelques-unes. Il y a 11 fois plus d'hommes autochtones que de non autochtones en prison, et 250 fois plus de femmes autochtones que de non autochtones. Autrement dit, le risque d'être incarcéré est 250 fois plus élevé pour une femme autochtone que pour une non autochtone.
Le revenu moyen des Autochtones est de 13 500 $.
Soixante-quinze pour cent des enfants autochtones n'obtiennent pas un diplôme d'études secondaires.
Le niveau de violence sexuelle et l'incidence du VIH-sida et de la tuberculose sont beaucoup plus élevés que dans les collectivités non autochtones.
La question que je poserais est celle-ci: ces traités vont-ils fondamentalement améliorer la vie des gens qui vivent dans les réserves et hors de celles-ci?
Les Autochtones ont vécu de façon indépendante durant 10 000 ans. Ils ont vécu et se sont épanouis sur le continent. Toutefois, il s'est passé quelque chose qui a tout changé. Je parle de la Loi sur les Indiens. Depuis 130 ans, cette loi régit la vie des Autochtones.
Qu'est-ce que la Loi sur les Indiens? C'est une loi raciste. C'est une loi qui sépare les Autochtones des non autochtones. La Loi sur les Indiens est un boulet attaché à la cheville des Autochtones. Elle les empêche de s'intégrer — je ne parle pas d'assimilation mais bien d'intégration — et d'être égaux dans la société nord-américaine. Elle les empêche d'avoir les ressources économiques que nous, non autochtones, sommes assurés d'avoir.
Le développement séparé, c'est une forme d'apartheid. Il est tragique de constater que l'apartheid existe au Canada. Ce n'est pas quelque chose dont nous devons nous réjouir. C'est plutôt quelque chose dont nous devrions avoir honte. À mon avis, il faut supprimer la mesure législative raciale qu'est la Loi sur les Indiens, parce qu'elle est un boulet attaché à la cheville des Autochtones et qu'elle les empêche d'aller de l'avant et d'être les maîtres de leur destinée.
Si nous voulions construire sur des terres ou faire du développement économique dans une réserve, nous serions obligés de passer par six ministères, ce qui prendrait quatre fois le temps de la construction elle-même. Si un promoteur ou une entreprise venait nous voir avec un projet, il nous faudrait tout ce temps avant d'avoir une chance de réaliser le projet.
Où va le capital? Va-t-il dans les réserves? Non. Parce que, compte tenu de la structure, peu importe le coeur que l'on met à l'ouvrage, peu importe comment on s'applique, peu importe l'espoir que l'on entretient, peu importe l'inspiration qui anime les populations autochtones et leurs chefs et qui leur donne des idées de développement sur leurs terres, pour gagner leur vie, pour se doter de moyens viables d'assurer leur avenir, les gens ne peuvent rien faire. Nous, nous pouvons, mais pas eux. La structure les empêche d'y arriver. Est-ce équitable? Est-ce raisonnable? C'est immoral. Il est scandaleux qu'on laisse cette situation perdurer.
Les revendications territoriales méritent toutes qu'on leur trouve un règlement, compte tenu de l'importance de la terre, de la culture et de l'histoire, en toute équité pour les Autochtones. Mais, nous ne devons pas nous arrêter en si bon chemin. Le règlement de ces revendications ne fera rien pour résoudre les tragédies socio-économiques fondamentales et le traumatisme qui est infligé chaque jour par des Autochtones à d'autres Autochtones.
Nous devons donner une chance aux enfants des réserves. Nous devons leur donner de l'espoir. Nous devons nous assurer qu'ils puissent se prévaloir des mêmes possibilités que nous, car ce n'est pas le cas actuellement. Ils n'ont aucune chance de pouvoir y arriver. C'est ce qui est le plus navrant dans tout cela.
Lorsqu'on prend le temps de regarder, on trouve des populations phénoménales. Le chef Clarence Louie, par exemple, à Osoyoos, fait un travail remarquable, à l'instar d'autres chefs. Ce sont de vrais chefs, qui ont décidé de porter eux-mêmes le fardeau de leur collectivité, malgré les circonstances très difficiles, voire écrasantes.
Je peux à peine m'entendre parler, monsieur le Président, à cause du bavardage incessant.
Des voix: Oh, oh!