Monsieur le président et membres du comité, je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui avec mes deux collègues, M. Gardiner, directeur chargé du développement économique du Nord, et M. Traynor, directeur principal chargé de l'amélioration du régime de réglementation dans le Nord. Je sais que ce sont là deux questions qui vous intéressent beaucoup.
J'ai une brève déclaration à faire. Je vais tâcher de me limiter à 10 minutes, de façon à laisser le plus de temps possible pour les questions.
[Français]
Le discours du Trône du 19 novembre 2008 a annoncé l'intention du gouvernement d'établir un nouvel organisme de développement économique pour le Nord en tant qu'élément clé de la Stratégie pour le Nord.
La Stratégie pour le Nord a quatre volets: protéger notre souveraineté dans l'Arctique alors que l'intérêt international dans la région augmente; encourager le développement social et économique et les améliorations réglementaires qui bénéficient aux résidants du Nord; s'adapter aux changements climatiques et s'assurer que les écosystèmes arctiques fragiles sont protégés pour les générations futures; et finalement, assurer aux résidants du Nord plus de contrôle sur leur destin économique et politique.
Comme ce comité le sait bien, le Nord est une région très prometteuse économiquement, particulièrement dans le développement pétrolier, gazier et minéral, mais aussi dans les industries renouvelables, comme le tourisme et le secteur émergent des pêcheries au Nunavut. Les activités économiques traditionnelles continuent d'être importantes, particulièrement pour beaucoup de peuples autochtones du Nord, mais la croissance dans les économies des territoires sera dans le développement des ressources naturelles, pour les emplois et les entreprises. On estime que le tiers du potentiel hydrocarbure du Canada se trouve au nord du 60e parallèle, dont la majorité dans le delta du Mackenzie et la région de la mer de Beaufort, ainsi que dans le bassin de Sverdrup.
[Traduction]
Comme pour tout potentiel, il y a des défis à relever, et la conjoncture actuelle diffère de celle d'il y a quelques mois à peine. Les prix du pétrole ont plongé, tout comme les prix de la plupart des métaux de base comme le cuivre, l'aluminium, le minerai de fer, l'étain, le nickel, le zinc, le plomb et l'uranium. Seuls les prix de l'or...
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Seuls les prix de l'or ont gardé leur valeur. Même les prix des diamants ont baissé de 40 p. 100, ce qui a entraîné récemment la perte de 128 emplois à la mine de diamants de Snap Lake, qui appartient à De Beers.
Les prix en baisse des denrées ne sont pas le seul problème. Le resserrement du crédit pour les entreprises est également un sujet de préoccupation en ce qui concerne le développement des affaires dans le Nord. Conséquemment, nous avons remarqué une réduction marquée des dépenses en capital prévues par le secteur privé dans l'ensemble des territoires, variant entre une réduction de 15 p. 100 au Yukon et une baisse de 33 p. 100 dans les Territoires du Nord-Ouest et de 44 p. 100 au Nunavut, par rapport à l'an dernier.
Il est vrai que les prix des denrées sont souvent cycliques, mais il existe dans le Nord des problèmes qui ne le sont pas, et ils exigent des efforts beaucoup plus considérables si on veut que les habitants du Nord participent activement au développement de leur région.
[Français]
Ceux-ci peuvent être regroupés en trois catégories principales: l'environnement facilitant le développement; les capacités institutionnelles pour le développement économique; et les capacités en ressources humaines. Le Nord fait face à des défis à ces trois niveaux.
En ce qui concerne l'environnement facilitant le développement, les résidants du Nord sont d'accord que davantage devrait être fait en matière d'infrastructure, que l'environnement réglementaire est trop complexe et que les décisions prennent trop de temps.
Par rapport aux institutions, je suis heureux d'être ici aujourd'hui afin de discuter avec vous relativement au nouvel organisme de développement économique pour le Nord qui, selon nous, apportera un élan additionnel au développement du Nord et relèvera quelques-uns des défis concernant les institutions y ayant trait.
Finalement, il existe des défis dans la participation des résidants du Nord autochtones à l'économie du Nord, étant donné qu'ils manquent souvent d'éducation et de compétences afin de faire partie de la main-d'oeuvre. Cela entrave leur capacité à participer davantage au développement économique du Nord.
[Traduction]
Je suis heureux de pouvoir aborder aujourd'hui deux éléments clés du développement économique du Nord que nous ciblons dans notre action: le nouvel organisme et l'amélioration du régime de réglementation dans le Nord.
À propos du nouvel organisme de développement économique du Nord, je vais dire un mot des engagements du gouvernement en ce qui concerne l'établissement d'un organisme, son rôle et son mandat prévus, ainsi que les étapes clés qu'AINC suivra pour donner suite à ces engagements.
Le discours du Trône de novembre 2008 a annoncé que le développement économique du nord du Canada serait dirigé par un organisme indépendant. Le budget de 2009, présenté en janvier, a prévu 50 millions de dollars sur cinq ans pour établir l'organisme. La création de cet organisme représente, dans l'appareil administratif du gouvernement, un changement qui relève entièrement de la prérogative du premier ministre. Bien qu'il n'ait pas pris les décisions finales sur le mandat, la structure et le rôle de l'organisme, le premier ministre a dit clairement qu'il s'agirait d'une entité indépendante dont l'administration centrale serait située dans le Nord et qui aurait une forte présence dans chacun des trois territoires.
[Français]
Dans notre élaboration de conseils sur l'organisme, nous avons procédé à des consultations avec les intervenants territoriaux afin d'obtenir leurs points de vue sur les activités prioritaires qui devraient être poursuivies et sur la façon dont ils voudraient travailler avec ce nouvel organisme afin d'atteindre les objectifs communs de développement économique. Nous avons également discuté avec les autres organismes de développement fédéraux, l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, Diversification de l'économie de l'Ouest, l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et l'Initiative fédérale de développement économique dans le nord de l'Ontario.
[Traduction]
Comme les organismes fédéraux de développement régional qui existent déjà, le nouvel organisme du Nord aura trois grandes fonctions: d'abord, la prestation de programmes de développement économique dans les trois territoires; deuxièmement, la coordination de la politique et des programmes économiques nationaux dans les territoires et, s'il y a lieu, le rôle d'agent d'exécution pour d'autres ministères fédéraux; troisièmement, la recherche, l'élaboration des politiques et la défense des intérêts régionaux dans l'appareil fédéral.
Nous prévoyons appliquer le mandat et remplir les fonctions de l'organisme en deux phases, avec des étapes claires pour chacune. Dans la première phase, déjà engagée, nous prévoyons mettre l'organisme sur pied, le doter d'un personnel et lui transférer les programmes actuels et nouveaux de développement économique du Nord. Aucune décision n'a été prise sur les programmes à transférer, mais il y a de fortes chances pour qu'il s'agisse du programme Investissements stratégiques dans le développement économique du Nord, ou ISDEN, récemment renouvelé, et de deux nouveaux programmes annoncés dans le budget de 2009: le Fonds d'adaptation des collectivités et Infrastructure de loisirs du Canada.
[Français]
Les étapes importantes liées à la première phase incluent la conception de l'organisation, la nomination d'un administrateur général, la détermination des catégories et niveaux d'emploi, la planification transitoire relative au transfert des employés et programmes existants, la détermination des locaux pour les employés dans les trois territoires et dans la région de la capitale nationale et, bien sûr, l'embauche et la formation.
Une importante considération, au cours de la première phase, concerne la meilleure façon d'assurer la continuité des services de la programmation actuelle et nouvelle de développement économique durant la transition au nouvel organisme. Ceci est une priorité clé et la principale raison pour laquelle une approche par étapes a été privilégiée.
[Traduction]
Les représentants d'AINC sont déterminés, au cours de l'établissement de l'organisme, à maintenir la participation d'intervenants divers et dynamiques des territoires. Depuis le discours du Trône de novembre 2008, les habitants du Nord ont été consultés de différentes façons. Un document contextuel a été distribué à plus d'une centaine d'intervenants en janvier dernier, les invitant à donner leur point de vue sur l'organisme. Ce document a été remis au greffier pour distribution. En outre, nos représentants sont allés dans le Nord pour y rencontrer les représentants des administrations provinciales et territoriales, des gouvernements et organisations autochtones ainsi que des associations industrielles du secteur privé.
Le prochain cycle de séances de participation débutera bientôt. Il coïncidera avec le renouvellement du programme ISDEN dont j'ai dit un mot tout à l'heure. Des intervenants clés de chaque territoire seront réunis pour élaborer des plans d'investissement qui guideront la répartition des fonds du programme ISDEN au cours des cinq prochaines années. Nous profiterons de I'occasion afin de mettre de I'information en commun, de faire le point sur la mise en place de l'organisme et de solliciter le point de vue des intervenants sur les prochaines étapes.
[Français]
Bien que les efforts actuels soient concentrés sur un début solide pour l'organisme de développement économique pour le Nord, nous continuons à travailler avec les résidants du Nord sur les développements à venir de l'organisme, y compris l'examen du développement et de l'adoption d'une loi habilitante, au besoin, et l'analyse des politiques approfondie et des consultations afin d'identifier des lacunes dans la programmation du développement économique pour le Nord par l'intermédiaire des gouvernements fédéral, territoriaux, municipaux et autochtones, où le gouvernement fédéral pourrait avoir un rôle à jouer, ou s'il s'avérait pertinent de transférer la livraison de programmes existants d'autres ministères vers l'organisme basé dans le Nord.
Comme je l'ai dit plus tôt, le premier ministre prendra les décisions clés à propos de l'organisme, et nous sommes prêts à procéder à sa mise en oeuvre aussitôt que possible.
[Traduction]
Je voudrais dire quelques mots de l'amélioration du régime de réglementation.
L'un des outils de développement économique les plus importants dans le Nord est un régime de réglementation fonctionnel et efficace, avec ses exigences législatives.
Les modalités d'approbation réglementaire des projets de mise en valeur des ressources dans le Nord varient d'un territoire à l'autre. Chacun a sa propre législation régissant les eaux, les droits de surface, l'évaluation environnementale et socioéconomique et l'aménagement du territoire. Les régimes découlent des accords sur les revendications territoriales. Les projets doivent satisfaire une série d'exigences législatives pour pouvoir obtenir les licences, permis et autorisations d'organismes de réglementation et de consultation cogérés. Il y a notamment des organismes qui s'occupent de la planification de l'utilisation du territoire, de l'impact environnemental et des permis relatifs à l'utilisation des terres et de l'eau.
[Français]
Le Yukon est différent des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, car la responsabilité pour la gestion des terres et des ressources a été transférée au gouvernement du Yukon en 2003, tandis que le ministre des Affaires indiennes et du Nord Canada conserve le pouvoir de décision clé dans les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut.
L'Initiative d'amélioration de la réglementation dans le Nord a été conçue, en partie, due à l'augmentation du nombre de commentaires de parties intéressées et de rapports indépendants qui ont indiqué que nous devions réduire la complexité des processus de réglementation dans le Nord, en particulier dans les Territoires du Nord-Ouest. Le régime en place dans les Territoires du Nord-Ouest a maintenant environ 10 ans et fut établi par la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie et par divers accords de revendications territoriales.
[Traduction]
Nous savons qu'il y a eu une période de croissance avec son lot de problèmes dont certains sont plus graves que d'autres. Nous savons qu'il faut rendre les processus réglementaires plus efficaces, prévisibles et rapides tout en respectant les accords sur les revendications territoriales et les négociations en cours sur la dévolution avec le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest.
En novembre 2007, le ministre Strahl a chargé M. Neil McCrank, ancien président de l'Alberta Energy and Utilities Board, de trouver des moyens d'améliorer les processus réglementaires dans les territoires. Au cours des quelques mois qui ont suivi, M. McCrank a tenu plus d'une centaine de réunions avec des organisations autochtones, des organismes de gestion des ressources, des représentants de l'industrie, des organismes environnementaux, les gouvernements territoriaux et des ministères fédéraux. Fort de sa vaste expérience en matière de réglementation, il a rédigé, à partir de tout ce qu'il avait entendu, un rapport intitulé La voie de l'amélioration, qui a été publié en juillet 2008. Nous en avons remis des exemplaires au greffier du comité.
[Français]
Depuis, Affaires indiennes et du Nord Canada a élaboré un plan d'action pour apporter des améliorations à la réglementation dans le Nord, qui permettra de répondre aux recommandations de M. McCrank et d'apporter des améliorations au régime réglementaire dans le Nord. Ces dernières ont été identifiées dans le rapport de la vérificatrice générale en 2005 et dans le cadre de la vérification environnementale des Territoires du Nord-Ouest en 2006.
[Traduction]
Pendant que nous élaborions cette réponse globale, nous ne sommes pas restés inactifs dans le dossier de l'amélioration de la réglementation. Nous avons élaboré des règlements sur les eaux dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Nous avons travaillé à un cadre national de formation pour les organismes de réglementation. Nous avons modifié l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut pour éliminer le double emploi entre le travail de la Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions et celui de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Nous avons modifié le règlement d'application de la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie prévoyant une liste d'exemptions en faisant appel au Conseil du Trésor, de façon que chaque projet ne fasse l'objet que d'une seule évaluation. Nous avons fourni des fonds pour la surveillance des effets cumulatifs dans les Territoires du Nord-Ouest et nous avons accéléré l'élaboration de la Loi sur l'aménagement du territoire et l'évaluation des répercussions des projets au Nunavut.
[Français]
Notre plan d'action couvrira un large éventail d'améliorations. II reste encore beaucoup à faire. Nous avons encore besoin d'aborder les questions de gouvernance. Des engagements qui portent sur la surveillance de I'environnement dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut et qui découlent d'accords de revendications territoriales sont en suspens. Des lacunes législatives et réglementaires doivent être comblées pour que le système fonctionne efficacement.
[Traduction]
Nous devons également nous souvenir que, même si certains des changements qui s'imposent relèvent uniquement du pouvoir fédéral, nous devons, pour apporter les améliorations nécessaires, travailler avec les organisations autochtones qui ont conclu des accords sur leurs revendications territoriales, avec les gouvernementaux territoriaux et avec l'ensemble des habitants du Nord.
Des régimes de réglementation qui donnent des résultats rapides et prévisibles tout en respectant notre gestion de l'environnement du Nord et le mode de vie traditionnel des peuples autochtones sont essentiels à la prospérité économique du Nord.
Même s'il existe un potentiel de diversification de l'économie du Nord, l'exploitation des ressources demeurera l'élément central. Je sais que le comité souhaite mieux comprendre l'ampleur du potentiel de l'exploitation des ressources dans le Nord. Voilà pourquoi nous vous présentons une carte qui indique tous les projets miniers qui sont actuellement à des phases différentes du développement: prospection avancée, évaluation environnementale, permis, production et même parfois, remise en état du site.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il reste beaucoup à faire pour améliorer les régimes de réglementation dans le Nord. Je peux vous donner l'assurance que le ministre continue de travailler avec ses collègues afin de faire avancer ce plan d'action et qu'il a hâte de donner une réponse globale au rapport de M. McCrank, ce qu'il devrait faire bientôt.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, d'être présents.
Je suis extrêmement préoccupé par ce qui se passe en ce qui a trait au développement du Nord. Au mois de juin dernier, ceux qui faisaient alors partie du comité se sont rendus à Iqaluit et à Pangnirtung, qui est tout à fait au nord. Nous avons rencontré le maire du village de Pangnirtung et son conseil. La personne est un vieil Inuit de 70 ans, maire de sa communauté depuis plusieurs années. Nous lui avons demandé ce qu'il souhaiterait dans l'éventualité où on ne pourrait faire qu'une seule chose, rapidement, pour sa communauté. Il a répondu qu'il nous demanderait de ramasser nos déchets.
Pour ma part, cette réponse m'a profondément marqué. Vous avez déposé un tas de documents et j'ai écouté avec attention ce que vous nous avez dit, monsieur Borbey. Quelle est la garantie? Comment pouvons-nous nous assurer que la principale priorité va être de protéger l'écologie, le fragile équilibre du Nord?
Quand je considère le développement minier qui se prépare, quelle garantie peut-on avoir que les Inuits seront et sont consultés, et que la protection des écosystèmes est la priorité, compte tenu du développement qui s'amorce dans le Grand Nord, comme tout le monde le sait?
Il y a trois documentaires d'une heure à la télévision de Radio-Canada, consacrés à ce sujet. Je comprends que ce ne sont pas tous les membres du comité qui regardent cette chaîne. Toutefois, je crois que nous aurions intérêt à faire traduire cette série. Elle est présentée dans le cadre de l'émission Découverte, le dimanche soir de 18 h 30 à 19 h 30. Il y a eu une émission dimanche dernier, le dimanche précédent, et la troisième sera présentée dimanche prochain. Ces émissions traitent du développement du Nord. J'ai beaucoup de difficulté à voir comment le gouvernement canadien peut s'assurer que ce développement va se faire en harmonie avec le pergélisol qui fond à vue d'oeil et tous les changements climatiques qui surviennent. Quelle garantie peut-on avoir? Est-ce vraiment une priorité dont on tiendra compte? Sinon, cela passe-t-il par-dessus la tête de tout le monde? Voilà pour la première question. Je sais que mon introduction était très longue, mais je voulais vous donner le contexte.
Pour ce qui est de ma deuxième question, je n'ai entendu nulle part dans votre introduction que des discussions avaient lieu avec la Société Makivik qui s'occupe du territoire du nord du Québec. Comme vous le savez sûrement, il y a énormément de relations entre tous les Inuits. Je parle de ceux de la côte est, non seulement de la baie d'Hudson mais de l'Arctique et du Nunavik. Existe-il des relations avec cette société? En parle-t-on? Aucun développement ne va se faire à Kimmirut ou à Cap Dorset sans que la Société Makivik soit au courant. Ce sont ses gens qui vont travailler là.