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Merci, monsieur le président. Je pensais avoir 10 minutes à ma disposition. C'est ce qu'on nous avait indiqué dans les papiers, mais bon.
Dans un premier temps, je voudrais, au nom de notre organisation, le Conseil national des chômeurs et chômeuses, vous remercier, ainsi que vous tous, députés membres du Comité permanent des Ressources humaines, pour cette invitation à venir échanger avec vous sur la question du projet de loi qui vise à prolonger la période de prestations d’assurance-emploi.
Par contre, c’est à regret que nous devons exprimer notre désaccord sur ce projet de loi, notre plus profond désaccord.
En tout premier lieu, nous sommes en désaccord sur la manière. En effet, le gouvernement a choisi la voie législative pour imposer un jeu politique à l’opposition alors qu’il aurait pu procéder par simple annonce exécutive d’un projet-pilote, le 14 septembre. Manifestement, on a décidé de jouer aux échecs politiques en prenant les victimes de la récession comme pions.
Nous sommes en désaccord parce que ce projet de loi crée deux catégories de chômeurs: les bons chômeurs, c'est-à-dire ceux qui n’ont presque pas touché de prestations au cours des dernières années, et les mauvais chômeurs, soit ceux qui ont eu recours au régime d’assurance-emploi au cours des cinq dernières années.
Nous sommes en désaccord et très sceptiques face aux chiffres avancés par le ministère: un milliard de dollars et 190 000 chômeurs visés par la mesure.
Enfin, nous sommes en désaccord, monsieur le président, parce que ce projet de loi vient compliquer une loi déjà très complexe, en créant toutes sortes d’exceptions et d’applications.
Déjà, depuis une vingtaine d’années, les gouvernements qui se succèdent à Ottawa s’évertuent à faire de l’assurance-emploi un monstre à 1 000 têtes, c’est-à-dire une loi complexe farcie d’exceptions et de mesures spéciales. L’actuel gouvernement, avec le projet de loi , a décidé de rajouter des têtes au monstre à 1 000 têtes. Ainsi, il remplace le paragraphe 12(2) de la loi, qui fait à peu près de six à huit lignes, par plus de trois pages d’exceptions de toutes sortes. Ainsi, le paragraphe 12(2) devient 12(2.1), 12(2.2), 12(2.3) et 12(2.4), faisant la différence entre le moment où la demande de chômage est déposée — on fait la différence entre quatre périodes différentes — et établissant jusqu’à six types de prolongations possibles selon le nombre d’années cotisées. Ainsi, les 20 semaines de prolongation ne seraient octroyées qu’à ceux qui auraient déposé leur demande de prestations avant le 5 juin 2010 et qui auraient versé, et je cite le projet de loi: « au moins 30 p. 100 de la cotisation ouvrière maximale pour un an pendant au moins 12 des 15 années précédant le début de sa période de prestations ». Tous les autres, monsieur le président, recevront moins et, très souvent, seulement cinq semaines. Surtout, sont exclus de la mesure tous les travailleurs qui auront reçu plus de 35 semaines de prestations au cours des cinq dernières années. Cela veut dire, bien sûr, tous les travailleurs saisonniers, tous ceux à statut précaire, les employés à temps partiel et les occasionnels, tous ceux qui auront été victimes de ralentissements économiques au cours des dernières années et qui auront été mis au chômage ne serait-ce que pour de courtes périodes de temps. Sont ainsi exclus, monsieur le président, des pans entiers de notre économie: l’industrie forestière, l’industrie de la construction, une partie importante de l’industrie manufacturière, pour ne nommer que ceux-là. Sont aussi exclus tous ceux qui ont moins d’ancienneté sur le marché du travail.
On se retrouve ainsi avec une situation où certains chômeurs se verront accorder quelques semaines de prestations supplémentaires alors que d’autres n’y auront pas droit, même s’ils sont du même lieu de travail, de la même usine, qu'ils habitent la même localité et, parfois, qu'ils sont voisins.
Nous comprenons trop bien aussi que les chiffres avancés par le ministère ne tiennent pas la route, ne serait-ce que parce que le milliard de dollars annoncé repose nécessairement sur un calcul assez simple à partir de la moyenne du taux de prestations, qui est de 348 $ par semaine, et qui vise 190 000 chômeurs. Ce calcul simple, si on part du milliard de dollars et qu'on le divise par 190 000, puis par le taux moyen de prestations hebdomadaires, nous donne une prolongation moyenne de 15 semaines. Je pose la question suivante, monsieur le président: est-ce que le projet de loi est structuré de façon à accorder une telle moyenne de prolongation? Bien sûr que non. Et si la volonté politique était effectivement d’accorder une prolongation moyenne de 15 semaines, pourquoi ne pas avoir établi le projet de loi de cette façon, c’est-à-dire de façon simple, claire, directe, moins compliquée que ce qui nous est présenté?
Dans le même ordre d’idées, y aura-t-il effectivement 190 000 chômeurs ou travailleurs de longue date qui pourront bénéficier de cette mesure? Nous en doutons sérieusement, monsieur le président, ne serait-ce qu’à partir de deux données. Ce sont 27,9 p. 100 des prestataires qui se rendent au bout de leurs prestations.
Vous me laissez encore deux minutes, n'est-ce pas?
D'autre part, le projet de loi exclut tous ceux qui ont eu recours à plus de 35 semaines de prestations au cours des cinq dernières années. Ça fait pas mal d'exclus. Nous croyons qu’il est faux de prétendre que le projet de loi C-50 va « aider 190 000 chômeurs en leur versant un milliard de dollars ». Nous croyons que les travailleurs âgés méritent mieux que ces quelques semaines de prestations supplémentaires discriminatoires et qu’ils méritent un véritable Programme d’aide aux travailleurs âgés, soit le PATA.
Nous croyons qu'à l'assurance-emploi, les problèmes demeurent entiers, comme celui, criant, de l’admissibilité. Cet été, à la fin du mois de juillet, les 10 premiers ministres des 10 provinces canadiennes ont demandé au premier ministre canadien de régler cette question d'admissibilité. Une majorité de municipalités québécoises a signé une déclaration demandant que la question de l'admissibilité soit réglée au fédéral. La Fédération canadienne des municipalités, tout comme nombre d'observateurs, d'économistes, d'associations et de syndicats, de même que l'Église, réclament qu'on règle la question de l'admissibilité.
Dans le cas présent, il ne nous appartient pas de voter sur le projet de loi C-50, de le rejeter ou de l’adopter. Par contre, permettez-nous d’émettre l’opinion suivante: ce projet de loi, dans sa forme actuelle, est inacceptable. Il est discriminatoire. Il ne représente pas le type de solutions constructives et structurantes qui sont attendues pour réparer le régime d’assurance-emploi. Nous croyons, peut-être naïvement, que la politique doit servir à trouver des solutions aux problèmes et que les personnes occupant les plus hautes fonctions législatives doivent avoir la volonté de rassembler.
Est-ce que le Comité permanent des ressources humaines peut user de sa parole et de ses capacités législatives pour soulever les enjeux véritables qui entourent l’assurance-emploi et les faire valoir devant le Parlement de même qu'auprès de la population canadienne? On le croit. C'est pourquoi on est ici aujourd'hui et on continue à espérer.
Merci, monsieur le président.
J'ai le plaisir de témoigner aujourd'hui au nom de la FTQ. La FTQ, pour ceux qui ne le savent pas, représente 500 000 travailleurs au Québec, dont les deux tiers proviennent du secteur privé. Au Québec, le secteur privé est en récession depuis 2003. La récession officielle a commencé en 2008, mais on en vit les effets depuis quelques années déjà. Comme vous le verrez, ça a des répercussions sur nous et sur l'opinion que nous avons du projet de loi .
Au sujet du contenu du projet de loi, deux impressions principales émergent. Je vais faire écho aux propos de mon collègue M. Pierre Céré. Deux choses nous frappent: d'une part, l'insuffisance des mesures proposées pour régler le problème auquel nous faisons face et, d'autre part, le caractère arbitraire, voire discriminatoire et certainement bureaucratique de ce qui est proposé. Laissez-moi vous donner plus de détails.
Depuis plusieurs années, nous soulignons le fait que le programme d'assurance-emploi ne remplit plus son rôle de filet de sécurité. Dans les années 1990, il y a eu une réforme qui, comme on le dit en bon français, équivalait à de l'overreach. On a été trop loin. Or, ça a laissé et ça laisse encore des pans entiers de la main d'oeuvre — travailleurs et travailleuses — sans bouée de sauvetage.
En fait, les plus vulnérables, sur le marché du travail, sont précisément ceux qui n'ont pas de bouée de sauvetage. Au moment où commence la récession, notre système d'assurance-emploi est parmi les moins généreux de l'OCDE. Quand la récession s'est annoncée, nous nous sommes même dit favorables à des mesures, généreuses mais temporaires, visant à endiguer le problème. Or, on a obtenu des mesures temporaires, vraiment pas très convaincantes, qui vont laisser beaucoup de gens en plan.
Je n'utiliserai pas le mot « scandale », mais disons, pour rester poli, que ça nous apparaît comme un paradoxe. La prolongation de la période de prestations d'assurance-emploi est la mesure macroéconomique dont les impacts sont les plus porteurs. Aucune autre ne l'égale. Tous les économistes qui font des études sur les effets multiplicateurs vous le diront. On était donc en droit de s'attendre à ce qu'il y ait un programme musclé. Or, on l'attend toujours.
L'OCDE nous a fait part de ses dernières prévisions. On s'attend à ce que le taux de chômage, comme dans toute récession, demeure assez élevé pendant un, deux ou peut-être même trois ans — comme ce fut le cas pendant les années 1990 — après la fin officielle de la récession. Il s'agit pour nous d'une source de préoccupation.
À notre avis, une réforme aurait dû et devrait avoir comme composante un critère d'admissibilité unique de 360 heures. On sait quel serait l'impact d'un tel critère, étant donné qu'on l'a mesuré. Vous avez entendu des témoignages. Pour 165 000 chômeurs et chômeuses, il en coûterait environ 1,2 milliard de dollars. Dans les circonstances, nous pensons que ça devrait être fait.
Parlons maintenant des mesures. Je n'entrerai pas dans les détails parce qu'à mon avis, M. Céré a bien saisi notre problème. Une des mesures nous cause énormément de difficulté en ce sens qu'elle va classer des gens provenant des mêmes milieux de travail et des mêmes régions dans le camp des méritants ainsi que dans celui des non-méritants. Subir un licenciement, ce n'est pas le résultat d'un péché qu'il faut expier. C'est plutôt le résultat d'une condition économique. À notre avis, le gouvernement fait fausse route et va par le fait même susciter beaucoup de frustration. On vous avertit: les gens qui s'imaginaient avoir droit à une prestation et qui n'en recevront pas vont vous téléphoner. On vous le garantit. Je travaille dans le mouvement syndical et je peux vous dire que lorsque les membres s'attendent à quelque chose mais ne l'obtiennent pas, ils nous le font savoir. Je vous mets en garde.
Au Québec, depuis quelques années, les pertes d'emplois dans le secteur manufacturier — on parle de 125 000 personnes — ont été nombreuses, de même que les mises à pied temporaires. Naturellement, ces mises à pied temporaires auront une influence sur l'admissibilité au programme que vous êtes en train de concocter. Cela nous préoccupe. On aimerait, comme tout le monde, avoir de meilleurs chiffres, mais on ne les a pas. Cela nous rend perplexes, surtout quand on considère le chiffre de 190 000 prestataires potentiels.
On se pose aussi d'autres questions. Réunir Revenu Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada nous a toujours été présenté comme étant difficile, mais maintenant on y croit. Il y a déjà des problèmes d'administration de ce système, et vous allez les décupler. Il ne faut pas minimiser ce que cela peut représenter.
D'autres éléments posent problème. Si vous utilisez vraiment la voie législative et si ce processus sert à quelque chose, on aimerait que vous considériez nos propositions comme des amendements et que vous les traitiez en bonne et due forme. Si ce n'est pas le cas, on se demande pourquoi vous n'avez pas passé par la voie des projets-pilotes, ce qui serait beaucoup plus commode et vous permettrait d'aider les gens demain matin.
Je termine là-dessus. Si vous avez des questions, il me fera plaisir d'y répondre, merci.
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Bonjour, monsieur le président et membres du comité.
Je m'appelle Jean-Claude Rocheleau et je suis président de la section locale 121 du SCEP à la raffinerie Shell à Montréal. Par souci de transparence, je tiens à mentionner que je suis aussi actuellement candidat néo-démocrate à l'élection partielle d'Hochelaga. À mes côtés se trouve Brent Reid, vice-président de la section 630 du SCEP de l'usine de pâtes et papier Catalyst Paper de Campbell River, en Colombie-Britannique. Je vous remercie de l'invitation.
D'entrée de jeu, je veux vous dire que notre organisation appuie le projet de loi . Cette mesure permet de venir en aide à des dizaines de milliers de Canadiens et Canadiennes qui sont déjà touchés par la crise économique. Pour vous faire part du sentiment d'urgence qui nous anime, le texte actuel du projet de loi exclurait 1 100 travailleurs et travailleuses d'AbitibiBowater à Grand Falls-Windsor, s'il ne recevait pas la sanction royale avant la fin novembre.
Nous avons été informés qu'un amendement serait présenté pour maintenir comme date de départ des prestations le 4 janvier, et nous vous encourageons à l'adopter. Malgré notre appui, le projet de loi ne doit pas être confondu avec une réforme en profondeur dont a besoin, à ce stade-ci, l'assurance-emploi. Il s'agit de mesures d'exception qui représentent simplement une meilleure avenue que le statu quo actuel.
Trois points touchent spécialement ce projet de loi. Environ 190 000 travailleurs et travailleuses seront admissibles à cette initiative et à la bonification, au cours des deux prochaines années. Cette prolongation d'une durée de cinq à vingt semaines permettrait aux travailleurs d'allonger leur période de prestations. C'est la seule raison pour laquelle le SCEP appuie ce projet de loi. Quelques travailleurs, on le sait, pourront être aidés, certains peut-être plus que d'autres, mais il s'agit d'un pas vers des changements nécessaires. C'est toujours mieux que le statu quo.
En tant que négociateur, dans ma vie de tous les jours, je suis partisan de la théorie des petits pas, de prendre ce qui est sur la table et de continuer à travailler afin d'améliorer le système. De plus, les travailleurs que je représente à la raffinerie de Montréal risquent d'être touchés prochainement par la fermeture de la raffinerie parce que le gouvernement laisser aller le pétrole vers le sud, vers les États-Unis, ce qui est en train de provoquer la fermeture de nos raffineries et qui pourrait entraîner la mise à pied de plusieurs de nos membres. Cette situation s'applique aussi à plusieurs employés dans la région de Montréal qui, actuellement, sont mis à pied à cause du contexte économique. Cette mesure viendra donc aider certains travailleurs, qui ont besoin de cette aide et de l'espoir de voir d'autres changements subvenir.
Je cède la parole à mon confrère.
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Merci de nous donner l'occasion de présenter le point de vue des petites entreprises concernant l'assurance-emploi et le projet de loi .
Permettez-moi d'abord de vous parler brièvement de notre fédération. Nous représentons plus de 105 000 petites et moyennes entreprises de partout au Canada dont les dirigeants sont propriétaires et assurent l'exploitation. Au total, ces entreprises procurent de l'emploi à 1,25 million de Canadiens et sont à l'origine d'un PIB de 75 milliards de dollars. Nos membres viennent de toutes les régions du pays et de tous les secteurs de l'économie.
La plupart des gens ne se rendent pas compte de l'importance que prennent désormais les petites entreprises au Canada. Ainsi, 98 p. 100 de l'ensemble des entreprises comptent moins de 50 employés. Environ 55 p. 100 des Canadiens travaillent pour ces petites entreprises qui sont responsables de 45 p. 100 de notre PIB. Elles sont également à l'origine de la plus grande partie de la création nette d'emploi au sein de notre économie, dans une proportion qui va même en s'accroissant lorsque la conjoncture est plus difficile.
Parlant des conjonctures économiques moins favorables, la dernière année n'a pas été facile pour bien des gens, et les petites entreprises ne font pas exception. La FCEI produit un baromètre des affaires mensuelles qui permet de suivre l'évolution des attentes commerciales de nos membres parallèlement à différents autres facteurs économiques. Selon l'indice le plus récent que nous avons diffusé le 7 octobre dernier, les perspectives économiques de nos PME ont chuté de façon vertigineuse au cours de la dernière partie de l'an dernier ainsi qu'au début de cette année, mais on note une reprise depuis avril. Cette tendance à la hausse s'est maintenue jusqu'en septembre, ce qui nous porte à croire que l'économie fait ses premiers pas hésitants vers une reprise.
Il faut se réjouir du fait que l'optimisme est élevé dans tout le pays. Pour la première fois depuis bien des années, ce sont nos membres de l'Ontario qui mènent la marche à ce chapitre. Le secteur manufacturier figure également parmi les plus optimistes, ce qui nous incite à penser que les entreprises manufacturières qui sont parvenues à s'adapter et à survivre au ralentissement des dernières années commencent à voir la lumière au bout du tunnel avec un optimisme et un espoir renouvelés.
Bien que l'optimisme soit à la hausse, les plans d'embauche demeurent en suspens: 16 p. 100 des entreprises prévoient augmenter leur personnel à temps plein alors que 13 p. 100 planifient des réductions. Il s'agit de résultats plutôt habituels en période de reprise économique, car les plans d'embauche accusent généralement un peu de retard par rapport à la croissance de l'économie. Comme la croissance de l'emploi est un élément essentiel à la reprise, nous devons faire bien attention de ne pas prendre des décisions qui pourraient éventuellement avoir pour effet de dissuader la création d'emplois. Nous nous demandons d'ailleurs si certaines des décisions prises en matière d'assurance-emploi n'auront pas effectivement de telles répercussions.
J'aimerais que nous jetions un bref coup d'oeil sur les perspectives des petites entreprises relativement à l'assurance-emploi. Vous avez en main une copie de ce rapport intitulé Assurer la prospérité. On y fournit des données assez détaillées sur différents sujets liés à l'assurance-emploi. Je vais m'arrêter seulement sur quelques questions qui sont pertinentes à nos discussions d'aujourd'hui.
Premièrement, l'enquête menée par la FCEI a permis de constater que plus l'entreprise est petite, moins elle risque de devoir procéder à des mises à pied. Les petits employeurs ne seront donc pas nécessairement les premiers à embaucher des travailleurs en grand nombre au sortir d'une récession, mais ils sont davantage susceptibles d'avoir conservé leurs employés plus longtemps à leur effectif. C’est la raison pour laquelle nous n'avons pas vu, tout au long de la récession en cours, un accroissement considérable de la proportion de petites entreprises qui comptaient réduire leur personnel. D'autres études ont démontré que le nombre d'emplois a diminué de 10 p. 100 dans les grandes entreprises au cours du premier semestre de cette année, mais était demeuré à peu près inchangé au sein des petites entreprises. Nous connaissons même des employeurs qui ont renoncé à leur propre revenu pour s'assurer que leurs employés puissent continuer à être payés durant ces temps difficiles. Les employés des petites entreprises bénéficient d'une stabilité et de relations personnelles plus étroites, ce qui n'est souvent pas le cas dans les grandes entreprises.
Deuxièmement, il ressort clairement des résultats du sondage que les propriétaires des petites entreprises appuient le principe fondamental de l'assurance-emploi qui vise à offrir une aide financière à court terme aux travailleurs entre deux emplois. Plus souvent qu'autrement, ils étaient relativement satisfaits du volet du programme qui permet le versement de prestations ordinaires. Lorsqu'on leur demandait par exemple quelles modifications pourraient être apportées au système pour mieux répondre aux besoins de leur entreprise, la majorité ont indiqué qu'ils préféreraient qu'on laisse inchangées les dispositions actuelles concernant le montant des prestations ou la période de référence. En fait, la majorité penchaient du côté du statu quo ou encore de conditions moins généreuses quant aux prestations versées ou aux périodes de référence. Plutôt que d'apporter des changements au volet prestations du régime, la FCEI croit fermement qu'il serait beaucoup plus efficace d'aider les travailleurs de longue date à obtenir la formation requise pour retrouver un emploi le plus rapidement possible.
Suivant un autre rapport intitulé Les pôles de formation du Canada: les PME investissent 18 milliards de dollars dans la main-d’œuvre du pays que nous avons rendu public en mai dernier, lorsqu'on additionne les coûts associés à la formation structurée et informelle, les petites entreprises investissent davantage en la matière pour chaque employé que les sociétés plus grandes. Qui plus est, des organismes comme l'OCDE ont constaté que la façon la plus efficace d'aider les gens à retourner au travail consiste à fournir des incitatifs à la formation en cours d'emploi. Nous estimons qu'en accordant des crédits de formation aux petits employeurs, on optimiserait nettement l'utilisation des fonds affectés à cette fin dans le cadre de l'assurance-emploi tout en contribuant fort probablement à la création de perspectives d'emploi et de formation pour de nombreux travailleurs de longue date.
Le plus inquiétant pour nous avec ce projet de loi, et avec le régime d'assurance-emploi dans son ensemble, ce sont les coûts supplémentaires que l'on ajoute au programme, lesquels auront pour conséquence de faire grimper en flèche les cotisations à l'assurance-emploi juste au moment où nous sortons d'une récession.
Premièrement, les petites entreprises ont elles-mêmes indiqué que les cotisations sociales sont les mesures fiscales qui risquent le plus de nuire à leur croissance. En augmentant le montant des cotisations sociales, comme l'assurance-emploi, vous dissuadez les entreprises d'embaucher de nouveaux employés et moins d'emplois sont ainsi créés.
Les hausses dont il est question sont de quel ordre? Le gel actuel des cotisations à l'assurance-emploi qui est en vigueur jusqu'à la fin de 2010 a été une politique très favorable à bon nombre de chefs d'entreprise qui ont ainsi pu garder leur effectif intact. La plupart des analystes, y compris ceux de la FCEI, ne s'attendent pas à ce que le taux de chômage baisse à 6,5 p. 100 en 2011, projection qui a servi de référence au moment où le taux des cotisations à l'assurance-emploi a été gelé. Il faudra donc hausser ce taux de cotisation en 2011 pour compenser l'écart entre les projections établies et le taux de chômage réel à ce moment-là.
Il est cependant devenu évident que le gouvernement compte aussi imputer au compte d'assurance-emploi le manque à gagner découlant du gel du taux des cotisations pendant deux ans, ce qui obligerait le nouvel Office de financement de l'assurance-emploi du Canada (OFAEC) à rembourser au gouvernement un montant additionnel de 10 à 13 milliards de dollars, avec les intérêts. Pour ce faire, on n'aura d'autre choix que d'augmenter les cotisations. Comme la hausse annuelle est limitée à 15 ¢ par employé et 21 ¢ par employeur, nous prévoyons des accroissements des cotisations maximales tant pour les employeurs que pour les travailleurs pour bien des années à venir. L'adoption du ajouterait un montant additionnel de 935 millions de dollars au total que l'Office est censé rembourser en augmentant les cotisations pendant plusieurs années encore.
La diapositive suivante fait état des conséquences possibles pour un employeur ou un travailleur. Si l'on retient les prévisions les plus pessimistes, qui sont également les plus susceptibles de se concrétiser, compte tenu de ce que nous savons actuellement, nous anticipons une hausse de 65 p. 100 des cotisations à l'assurance-emploi entre 2011 et 2015. Ces augmentations auront éventuellement pour effet de dissuader la création d'emplois à un moment qui ne saurait être plus mal choisi, car l'économie commencera à peine à émerger de sa léthargie actuelle. Paradoxalement, les 935 millions de dollars investis pour aider les travailleurs de longue date à avoir accès à des prestations additionnelles pourraient en fin de compte réduire leurs perspectives d'emploi, car les employeurs verront leurs coûts d'embauche augmenter en même temps que la rémunération nette de leurs travailleurs diminuera.
La situation est d'autant plus frustrante qu'un excédent de 57 milliards de dollars a été accumulé dans le compte d'assurance-emploi entre 1994 et 2008, comme on peut le voir à la diapositive suivante. Nous n'aurions aucune objection à ce que le gouvernement demande à l'OFAEC de payer les coûts additionnels résultant de la récession actuelle si on lui retournait d'abord cet excédent de 57 milliards de dollars. On a plutôt donné à l'Office une réserve initiale de 2 milliards de dollars laquelle, compte tenu des circonstances que je viens de vous décrire, sera facilement épuisée dès la première année. Nous avons la ferme conviction que le gouvernement fédéral a l'obligation morale de rembourser aux employeurs et aux travailleurs l'excédent accumulé à même leurs cotisations en absorbant les coûts additionnels dus à la récession et en maintenant un gel des taux de cotisation jusqu'à ce que cet excédent de 57 milliards de dollars ait été remboursé.
En conclusion, nous sommes d'avis qu'il est impossible de discuter sérieusement du sans chercher à comprendre et régler les problèmes fiscaux plus généraux qui sont reliés à l'assurance-emploi. Nous recommandons que l'on maintienne le gel des taux de cotisation à l'assurance-emploi au-delà de 2010 de telle sorte qu'une hausse des cotisations sociales ne vienne pas nuire à la création d'emplois. Nous recommandons en outre que l'Office de financement de l'assurance-emploi du Canada soit doté des fonds suffisants, via le remboursement graduel de l'excédent de 57 milliards de dollars, pour pouvoir résister aux récessions et éponger les coûts supplémentaires qui s'ensuivent.
Comme il vise à aider les travailleurs de longue date, le est une mesure plus acceptable que d'autres suggestions qui ont été faites pour améliorer les prestations d'assurance-emploi. Nous craignons tout de même grandement que les mesures sélectives de ce genre ne permettent pas une restructuration efficace du régime. Elles risquent simplement de compromettre l'équilibre financier global du système d'assurance-emploi.
Enfin, nous encourageons le gouvernement à envisager la mise en place d'un crédit de formation au titre de l'assurance-emploi qui encouragerait le recrutement et la formation en cours d'emploi de manière à aider véritablement les travailleurs de longue date et les autres prestataires d'assurance-emploi pour qu'ils puissent avoir accès à la formation nécessaire en prévision des nouveaux emplois qui seront créés.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie le comité d'avoir bien voulu m'inviter à comparaître aujourd'hui pour participer à vos discussions au sujet du .
Je parle ici au nom des membres de l'Association des produits forestiers du Canada qui sont à l'origine de la plus grande partie de notre production nationale en matière de bois d'oeuvre, de pâtes et de papier.
D'une manière plus générale, notre industrie compte pour environ 11 p. 100 du PIB provenant du secteur manufacturier au Canada. À l'échelle du pays, nous fournissons directement de l'emploi à 273 000 personnes et indirectement à quelque 500 000 autres. On parle donc d'un total d'environ 700 000 emplois.
Nous sommes le moteur économique de quelque 300 collectivités d'un océan à l'autre, dans toutes les régions du Canada.
[Français]
Je suis certain que les membres du comité savent que l'industrie forestière canadienne vit actuellement une crise majeure. Je suis certain que les députés ont eu l'occasion de noter que lorsque nous parlons des pertes d'emplois, nous ne parlons pas uniquement des personnes qui perdent leur emploi, mais également de la destruction des communautés. Le sujet qui nous intéresse ne concerne pas simplement les pertes d'emplois enregistrées, il concerne l'intégrité sociale du Canada rural.
[Traduction]
Même si la dévastation, la détresse et la désintégration sociale que nous vivons actuellement nous inquiètent au plus haut point — et je crois que le débat d'hier à la Chambre des communes illustre on ne peut mieux à quel point ces questions soulèvent les passions chez tous les partis représentés — j'aimerais tout au moins souligner aujourd'hui que nous prévoyons une forte reprise des marchés pour notre industrie dans un avenir pas si éloigné.
Certains de nos marchés traditionnels vont reprendre de la vigueur et nous verrons également des marchés nouveaux et émergents s'ouvrir pour notre industrie. Nous sommes prêts à profiter de ces nouvelles possibilités lorsqu'elles se présenteront effectivement. D'ici là, il va de soi que nous avons de nombreuses difficultés à surmonter. D'abord et avant tout, nous devons nous assurer de survivre en attendant la reprise de ces marchés. Deuxièmement, nous devons demeurer aussi compétitifs que possible de manière à pouvoir soutenir la concurrence lorsque ces marchés reprendront vie. Il faut en effet s'attendre à ce moment-là à une concurrence plus féroce que jamais auparavant.
La bonne nouvelle c'est que l'industrie canadienne n'est pas la seule à avoir été frappée par cette récession. Nos concurrents étrangers ont subi le même sort. Qu'il s'agisse du Brésil, de la Russie ou de l'Europe, tous et chacun sont confrontés à une configuration particulière de difficultés qui les place sur le même pied que l'industrie canadienne au moment où l'on se parle.
[Français]
Je suis certain que vous vous demandez ce que le gouvernement peut faire. Nous savons ce que nous devons faire dans l'industrie et nous le faisons. Mais que peut faire le gouvernement?
[Traduction]
Nous savons ce que notre industrie doit faire et nous faisons le nécessaire, mais comment le gouvernement peut-il contribuer? Une chose est sûre: le gouvernement ne peut pas ramener l'activité sur les marchés à des niveaux correspondant à nos besoins. C'est la première chose qui doit se produire pour assurer la survie de notre industrie: les gens doivent recommencer à acheter du bois d'oeuvre et du papier. Le gouvernement ne peut rien faire pour l'industrie à ce titre. C'est le principal enjeu pour l'industrie dans la conjoncture actuelle. Mais comme je le disais précédemment, ces marchés vont reprendre.
Il y a toutefois un rôle fondamental que le gouvernement peut jouer dès maintenant. Il se doit d'établir ici au Canada les conditions stratégiques qui nous permettront d'augmenter notre capacité concurrentielle, non seulement dans l'immédiat, mais aussi lorsque ces marchés reprendront. À ce titre, il y a assurément plusieurs avenues d'intervention qui s'offrent au gouvernement, comme le recours à la politique fiscale, la mise en place d'un système ferroviaire concurrentiel et l'investissement immédiat dans l'énergie verte et la bioéconomie. En prenant sans tarder des mesures semblables, le gouvernement permettrait non seulement à notre industrie, mais au pays dans son ensemble, de repartir sur de nouvelles bases.
Nos marchés vont rebondir. Nous savons qu'on va recommencer à construire des maisons aux États-Unis. Nous savons que nos marchés en Chine et en Inde vont reprendre. Nous sommes déjà le principal exportateur vers le marché chinois. Nous sommes les troisièmes plus importants exportateurs canadiens vers le marché de l'Inde. Nous sommes bien positionnés sur ces marchés et nous espérons bien en tirer le meilleur parti possible lorsqu'ils reprendront.
À court terme, il y a certes quelques problèmes importants à régler. Je crois que le risque de perdre nos employés est l'un des facteurs qui nous préoccupent le plus dans le contexte de la présente récession. Les emplois dans le secteur forestier sont très spécialisés. On ne peut pas demander à n'importe quel citoyen dans la rue de remplacer nos travailleurs au pied levé. Dans la conjoncture actuelle, nous nous inquiétons donc surtout de voir nos travailleurs partir pour chercher de l'emploi ailleurs. Les modifications prévues dans le projet de loi et les autres changements apportés au régime d'assurance-emploi en application du budget de 2009 aident grandement notre industrie à conserver ses travailleurs. Le présent projet de loi sera utile en ce sens, mais il faut aussi dire que les modifications apportées au programme de travail partagé via le budget ont été extrêmement bénéfiques.
Parlant du travail partagé, je me permets de proposer au comité un léger changement, ou tout au moins un sujet d'examen, sur lequel nous souhaiterions vous voir vous pencher.
Préalablement aux annonces concernant le travail partagé, un certain nombre d'entreprises bénéficiaient déjà de ce programme. Ces entreprises ont reçu le supplément à l'égard de leur accord en vigueur, à l'expiration duquel elles devenaient automatiquement admissibles à une nouvelle entente de 52 semaines, sans période de restriction. Pour d'autres entreprises qui étaient relativement florissantes à la fin de 2008 et ne participaient pas au programme, le compteur est parti à zéro. Les prestations prendront fin à la conclusion de l'accord de 52 semaines. Une période de restriction de 26 semaines s'appliquera alors. D'après ce que nous prévoyons actuellement, il faudra attendre encore un an pour la reprise des marchés. Bon nombre des entreprises touchées devront composer avec une période d'attente de 26 semaines avant de pouvoir participer de nouveau au programme de travail partagé. Nous souhaiterions que le gouvernement se penche très sérieusement sur la possibilité d'éliminer cette période d'attente de 26 semaines. Nous croyons que cela serait également avantageux pour les gouvernements, car les coûts à engager seraient moindres en fin de compte.
Notre industrie se réjouit de l'existence de ces programmes, mais comme c'est le cas pour la majorité des polices d'assurance, nous préférerions en définitive que nos employés n'aient pas à s'en prévaloir. Nous aimerions beaucoup mieux garder nos usines en opération et permettre à nos employés de continuer à gagner leur vie dans les villes où ils ont grandi ou dans les collectivités avec lesquelles ils ont noué des liens d'appartenance au fil des ans. Tous les ordres de gouvernement devraient continuer à s'efforcer en priorité à fournir à notre industrie un cadre stratégique concurrentiel.
Au nom de l'Association des produits forestiers du Canada et de tous nos membres, je remercie encore une fois le comité pour le temps qu'il nous a consacré et je reste à votre disposition pour toutes les questions que vous pourriez vouloir poser.
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Merci, monsieur le président.
Le Centre canadien de politiques alternatives, fort de l'appui de plus de 10 000 membres et institutions au pays et de bureaux à Ottawa, Vancouver, Winnipeg, Regina et Halifax, constitue le principal groupe de réflexion progressiste au Canada.
Je vous remercie beaucoup de nous avoir invités à vous faire part de notre opinion sur le projet de loi C-50.
Aucune récession depuis la Deuxième Guerre mondiale n'a fait disparaître autant d'emplois au cours des premiers mois de ralentissement économique. Le gouvernement n'a pas tardé à venir en aide au secteur financier, mais les améliorations au régime d'assurance-emploi se font attendre et sont terriblement inadéquates, et ce, malgré le fait que votre comité a déposé, le 15 février 2005, un plan d'action clair de réforme de l'assurance-emploi et qu'ultérieurement, en 2007, tous les partis ont approuvé le projet de loi C-269, qui s'est rendu à la deuxième lecture avant que le gouvernement de l'époque décide de ne pas lui accorder la sanction royale, en novembre 2007. Ainsi, bien avant que ne s'amorce la débandade du secteur financier mondial en automne dernier, nous savions que notre régime d'assurance-emploi n'était pas prêt à faire face à la récession.
Entre octobre 2008 et le mois dernier, le marché du travail a perdu 483 000 emplois à temps plein. Aujourd'hui, plus de 1,5 million de Canadiens cherchent activement un emploi rémunéré. Plus de la moitié d'entre eux ne reçoivent pas de prestations d'assurance-emploi, ce qui signifie que les trois quarts d'un million de Canadiens sont abandonnés à eux-mêmes. La population canadienne n'a pas été aussi exposée aux risques économiques associés au chômage depuis les années 1940, à l'époque où nous avons instauré le régime d'assurance-emploi.
Je ne vous annonce pas là quelque chose de nouveau ou de révolutionnaire. Depuis des années, votre comité souligne le besoin d'améliorer l'accès au régime en réduisant et en uniformisant les critères d'admissibilité fondés sur les heures, de prolonger la période de prestations, qui a été précipitamment réduite au cours des réformes du début des années 1990, et de bonifier le taux de remplacement du salaire, qui est particulièrement catastrophique pour les travailleurs à faible revenu.
Le projet de loi C-50 constitue la réaction du gouvernement à ces problèmes. Il ne porte cependant que sur la période de prestations et restreint encore plus la prolongation des prestations à un petit sous-groupe de chômeurs. Ressources humaines et Développement des compétences Canada a témoigné devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales il y a quelques semaines et a indiqué qu'un tiers des personnes déplacées depuis janvier 2009 pourraient profiter de cette mesure législative. Cela signifie que les deux-tiers de ceux qui se sont déplacés depuis janvier 2009 et qui ont épuisé leurs prestations — c'est-à-dire la majorité des Canadiens qui sont dans cette situation — ne recevront aucune aide. Le projet de loi C-50 oublie également tous ceux qui ont perdu leurs emplois, les premières victimes de la récession.
De combien de personnes parlons-nous? Les statistiques mensuelles sur le chômage réunies par Statistique Canada montrent qu'au moins 200 000 personnes sont venues grossir les rangs des chômeurs depuis l'autonome dernier, auxquelles s’ajoutent 300 000 autres depuis janvier. Inutile de dire qu'il est essentiel d'améliorer le régime d'assurance-emploi. Le Canada ne pourra pas se rétablir pleinement si les travailleurs voient diminuer leurs salaires, leurs prestations et leurs pensions et que les chômeurs ne peuvent pas décrocher de nouvel emploi à des salaires relativement comparables. La demande globale poursuivra simplement sa chute.
Les États-Unis en sont à leur 22e mois de récession et ne voient pas encore la lumière au bout du tunnel. Ce n'est pas demain la veille que nous remonterons la pente. Il faut donc que le gouvernement et ce comité s'attaquent à la diminution du pouvoir d'achat des Canadiens, car la reprise est très fragile et c'est une question que l'on ne peut plus ignorer.
Je ne traiterai que du projet de loi C-50, même si nous comprenons qu'il n'est question que d'un aspect des améliorations que nous souhaitons apporter au régime d'assurance-emploi. On peut rendre le projet de loi C-50 plus efficace en y apportant trois simples modifications pour régler trois points. À partir de quand la mesure devrait-elle s'appliquer? Qui devrait-on aider? Quelle aide les bénéficiaires recevront-ils?
Tout d'abord, le projet de loi C-50 devrait entrer en vigueur le 4 janvier 2008 plutôt que le 4 janvier 2009. Certains se demanderont pourquoi revenir si loin en arrière. C'est tout simplement parce que c'est exactement la date prévue par le gouvernement dans le projet de loi C-10, adopté il y a peu de temps, qui comprend des mesures pour verser cinq semaines de prestations supplémentaires à tous ceux qui ont épuisé leurs prestations. En reculant la date d'entrée en vigueur au 4 janvier 2008, on pourrait verser les prestations prévues dans le projet de loi C-50 au même groupe visé par le projet de loi C-10, c'est-à-dire tous ceux touchés par la récession.
Ensuite, il faudrait éliminer du projet de loi C-50 la disposition excluant tous les travailleurs qui ont reçu 35 semaines de prestations au cours des cinq dernières années. Vous l'avez entendu, il est absurde d'affirmer qu'en cette période économique difficile, certains chômeurs méritent plus d'aide que d'autres.
La majorité des premières victimes de la récession travaillaient dans les secteurs de la fabrication. Il est courant que ces industries se restructurent, rajustent leur inventaire et voient la demande ou l'offre diminuer, ce qui peut entraîner des mises à pied temporaires et des fermetures périodiques. Les travailleurs de ces industries n'ont rien à dire sur leurs horaires de travail, et ceux qui sont mis à pied régulièrement depuis cinq ans pourraient ne pas être du tout rappelés au travail. Ces personnes ne devraient pas être exclues des dispositions du projet de loi . Le projet de projet ne comprenait rien de tel.
Enfin, quelle aide ce projet de loi fournit-il? Contrairement au projet de loi , qui prévoyait le versement de cinq semaines de prestations supplémentaires à tous les chômeurs canadiens ayant épuisé leurs prestations, le projet de loi comprend un ramassis de critères d'admissibilité presque inintelligibles. Dans le petit groupe de chômeurs visés par le projet de loi , on crée six nouvelles catégories de « gagnants », pour qui l'aide sera calculée en fonction des contributions effectuées au régime au cours des 15 dernières années, jusqu'à un maximum de 20 semaines pour quelques chanceux.
La prolongation des prestations devrait être uniforme, comme dans le projet de loi , et le projet de loi devrait prévoir une prolongation substantielle pour tous ceux qui en ont besoin. L'octroi de 20 semaines supplémentaires vous semble-t-il trop généreux? Eh bien, comparons cette situation avec ce qui s'est passé il y a juste deux semaines aux États-Unis. Selon l'Associated Press, le Congrès a ajouté jusqu'à 53 semaines de prestations supplémentaires aux 26 semaines habituellement couvertes par l'État. En outre, la Chambre a approuvé cette semaine une mesure législative qui ajouterait 13 autres semaines dans les États où le taux de chômage est élevé.
Soyons clairs: sans une prolongation substantielle des prestations, vous pouvez être sûrs que ce sont les provinces qui vont assumer une grande partie des coûts. L'été dernier, le premier ministre de Colombie-Britannique, M. Campbell, a proposé de prolonger les prestations jusqu'à deux ans, alors que le premier ministre de la Saskatchewan, M. Wall, a lui aussi insisté sur le besoin de prolonger ces prestations. Il ne s'agit pas là de politiciens socialistes, mais de premiers ministres qui savent parfaitement bien qu'ils vont devoir payer la facture pour le gouvernement fédéral qui se traîne les pieds.
S'il n'apporte pas de changements notables au projet de loi , le gouvernement risque d'assister à ce qui pourrait bien être la plus importante période de déclin financier de la classe moyenne depuis des générations, alors que c'est exactement ce que le régime d'assurance-emploi doit empêcher.
Que l'économie se redresse ou non, les Canadiens subissent un stress économique intense. Il y a des dizaines d'années, vos prédécesseurs ont instauré un régime pour améliorer la vie des Canadiens en temps de vaches grasses et de vaches maigres. Il vous revient de chercher à poursuivre leur oeuvre.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie tous de nous aider dans le cadre de l'examen de ce projet de loi, une tâche qui s'avère ardue. Comme certains d'entre vous l'ont fait remarquer, ce projet de loi départage les Canadiens méritants et travaillants de ceux qui, selon ce que le gouvernement semble penser, ne le sont pas. Le ministre parle en effet des Canadiens travaillants et méritants, comme si certains ne l'étaient pas.
Comme M. Céré l'a souligné, cette mesure complique davantage le régime d'assurance-emploi, qui n'est pas simple au départ. Le projet de loi ne prévoit aucune mesure pour les nombreux travailleurs de longue date ni pour ceux qui ont perdu leur emploi à l'automne dernier. Ils sont laissés pour compte. Il n'y a rien pour les travailleurs saisonniers, les employés à temps partiel ou ceux dont la période d'emploi est fréquemment interrompue. La mesure a toutefois du bon et soutient certains travailleurs de longue date qui ont besoin d'aide, comme tout le monde d'ailleurs. Cependant, les avis sur ce projet de loi sont partagés, comme c'était le cas lors des autres séances. Certains affirment que ce projet de loi ne vaut rien et doit être écarté, alors que d'autres disent qu'il faut s'en contenter, tout imparfait qu'il soit. Ce n'est pas exactement dithyrambique. D'autres témoins présents ici aujourd'hui ont fait des exposés sur l'assurance-emploi sans vraiment expliquer leur position sur la mesure législative qui nous intéresse.
Nous devons donc examiner un projet de loi qui permettra d'aider certaines personnes, mais qui est discriminatoire et semble ne pas tenir compte du besoin réel de réformer le régime d'assurance-emploi. Depuis des années, nous déposons des projets de loi d'initiative parlementaire et des motions de l'opposition pour régler cette question. Le 5 mars, tous les membres de l'opposition ont appuyé une motion présentée par le NPD sur l'assurance-emploi, dans laquelle le parti réclamait l'élimination de la période d'attente de deux semaines, l'instauration d'une norme nationale d'admissibilité de 360 heures, et le passage des prestations de 55 p. 100 à 60 p. 100 en fonction des 12 semaines les mieux rémunérées. Il était également question de formation et des travailleurs autonomes, mais pas de prolongation des prestations. Au mois de mars, cet aspect n'était pas considéré comme une priorité. Je crois d'ailleurs qu'il n'en est pas question dans les 11 recommandations que la FCEI a présentées aujourd'hui.
Il semble donc que le projet de loi bénéficie du soutien de ceux qui la voient comme un pis-aller dont il faut se contenter; mais est-ce que quelqu'un croit vraiment que l'on peut en attendre davantage du gouvernement sur le plan de l'assurance-emploi? Voilà la question difficile à laquelle il faut répondre.
Ma question s'adresse à n'importe qui d'entre vous, mais peut-être pourrions-nous commencer par Mme Yalnizyan et continuer par la suite. Est-ce la meilleure manière de réformer l'assurance-emploi? Est-ce la mesure dont le régime a besoin plus que tout?
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Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec mon collègue.
Je vous remercie, monsieur Godin, de votre intervention passionnée.
Merci, monsieur Lessard, de nous avoir généreusement offert de travailler ensemble. Nous pouvons tous bien nous entendre avec un peu d'aide de nos amis.
Des voix: Oh, oh!
M. Ron Cannan: Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
Nous examinons le projet de loi , qui vise à prolonger la période de prestations d'assurance-emploi des travailleurs de longue date, dans le cadre de la série de mesures présentées dans notre plan d'action économique. Il s'agit de la plus vaste consultation jamais effectuée pour un budget et du budget le plus hâtif de l'histoire du Canada.
Il a été question du fait que nous avons prolongé de cinq semaines les prestations d'assurance-emploi dans le contexte du programme de travail partagé. Environ la moitié des travailleurs canadiens qui cotisent au régime d'assurance-emploi et le tiers de ceux qui ont perdu leur emploi depuis la fin de janvier dernier et qui ont présenté une demande de prestations d'assurance-emploi sont des travailleurs de longue date. Les représentants du ministère qui sont venus témoigner au comité ont indiqué que ce projet de loi vise environ 190 000 personnes sans emploi qui ont travaillé pendant des années et qui se trouvent dans une situation des plus vulnérables. Nous allons d'ailleurs continuer de surveiller la situation.
Je comprends la position de la FCEI. J'ai déjà été propriétaire d'un commerce et j'appuie les petites entreprises. Les PME sont le moteur qui fait tourner l'économie canadienne, et ceux qui prennent des risques, les dirigeants et les entrepreneurs de nos collectivités vont continuer de travailler ensemble.
Je comprends votre inquiétude au sujet des 57 milliards de dollars. Comme l'a dit M. Godin, ils sont disparus, et peu importe qui les a dépensés — nous pourrions nous évertuer à pointer des gens du doigt —, nous ne les avons pas, alors il nous faut faire face à la situation et continuer de bâtir un Canada plus fort.
Monsieur Reid, j'ai aussi été membre du SCEP à une certaine époque. J'ai l'honneur de représenter la circonscription de Kelowna—Lake Country, qui est située dans la vallée de l'Okanagan et la magnifique Colombie-Britannique. Notre bois est bon, et l'industrie forestière est un important moteur économique dans notre province. Comme M. Casey l'a mentionné — et c'est l'orientation que nous voulons prendre avec ce projet de loi — beaucoup de personnes travaillent dans l'industrie forestière.
Ma question s'adresse à M. Casey. Les députés du Bloc nous ont dit douter que ce projet de loi puisse aider l'industrie forestière. Pourriez-vous nous parler plus en détail de la façon dont le projet de loi va aider les travailleurs forestiers, selon vos membres?
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Merci, monsieur le président.
J'ai devant moi un tableau qui montre que, de janvier à juillet 2009, les demandes initiales reçues et acceptées au Québec — pour ne donner qu'un exemple — étaient de 70,8 p. 100, c'est-à-dire que 30 p. 100 des demandes reçues n'avaient pas été acceptées.
Quand je regarde du côté des provinces de l'Atlantique, ce pourcentage est à un maximum de 69 p. 100 et à un minimum de 59 p. 100. Donc, il varie entre 59 p. 100 et 69 p. 100. Ce sont les pourcentages les plus bas pour l'ensemble du Canada. Il me semble que ces chiffres soient très bas dans les provinces de l'Atlantique justement parce que ces provinces souffrent et ont souffert depuis des années d'un manque de travail chronique et que les gens qui sont au chômage ont énormément de mal à trouver du travail, que ce soit à temps partiel, de façon saisonnière ou autre.
Le deuxième élément que je voudrais soumettre et qui est lié à cela, c'est le fait qu'on a beaucoup parlé ici, cet après-midi, de discrimination. On a parlé aussi d'un projet de loi qui traite la population au chômage de façon arbitraire. Mais soyons concrets, soyons spécifiques. À mon avis, une grande partie de cette population qui n'est pas touchée par ce projet de loi, les gens qui ne font pas partie de ces prétendues 190 000 personnes, ce sont surtout des femmes. Ces femmes qui déjà, au départ, travaillent à temps partiel ou alors ont du travail saisonnier — je me reporte aux pourcentages que je vous ai donnés pour les provinces de l'Atlantique — et qui ne sont pas égales aux travailleurs à temps plein, ceux qui ont du travail 12 mois sur 12, et qui, à cause de la nature même du travail qu'elles font, souffrent déjà de discrimination.
Je ne pense pas que le gouvernement avait l'intention d'exercer une discrimination envers les femmes, mais la conséquence de ce projet de loi, c'est une discrimination qui me semble évidente envers un certain type de travailleurs et de travailleuses, comme on le dit au Québec, et ce sont les femmes.
J'aimerais bien entendre au moins deux personnes à cet égard. Évidemment, je m'adresse à Mme Yalnizyan, mais j'aimerais aussi entendre M. Céré, aussi bien que M. Laliberté, au sujet de ce que je viens d'avancer.
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Merci beaucoup, madame Folco, de cette question.
Nous savons que cette récession a été nommée, aux États-Unis et au Canada, la « he-cession », soit la récession masculine. Nous savons que 71 p. 100 des travailleurs canadiens qui ont perdu leur emploi jusqu'ici sont des hommes et que les femmes représentent la « she-covery », c'est-à-dire qu'elles sont l'un des éléments de la relance économique, en particulier les femmes de plus 55 ans, parce que ce sont elles qui acceptent tout emploi qui est disponible afin de pourvoir à la subsistance de leur famille. Nous savons déjà que ce sont principalement les hommes qui sont admissibles à l'assurance-emploi, en général, même quand l'économie va bien, et c'est d'autant plus vrai durant cette récession. Le régime d'assurance-emploi est utilisé avant tout par les hommes; et c'est logique, puisque ce sont les industries de production de biens qui sont les plus touchées par la récession.
Nous sommes donc confrontés à deux problèmes: il y aura toujours des personnes dans l'industrie des services qui seront durement touchées; et le Canada a un bilan peu reluisant en matière d'emplois mal payés pour les femmes ainsi que d'heures de travail précaires.
J'ai une recommandation, dont je n'ai pas parlé dans mon exposé, que j'aimerais formuler maintenant. Je vais également la faire devant le Comité des finances dans le cadre des consultations prébudgétaires la semaine prochaine. Vous pourriez aussi prendre en considération, si vous souhaitez améliorer un peu la situation des gens qui éprouvent vraiment des difficultés — et cela dépasse le cadre du projet de loi —, que beaucoup de femmes ne peuvent pas survivre avec seulement 55 p. 100 de leur rémunération assurable. Ce n'est tout simplement pas suffisant pour payer les factures. En 1996, on a inclus dans la Loi sur l'assurance-emploi une disposition qui permettait d'aider les familles à faible revenu qui recevaient la prestation fiscale canadienne pour enfants. Pour les familles ayant un revenu net — avec la PFCE — inférieur à 25 921 $, une disposition dans la Loi sur l'assurance-emploi permettait de remplacer jusqu'à 80 p. 100 du revenu, ce qui signifie que les femmes qui étaient mises à pied arrivaient presque, au moins, à payer le loyer et à nourrir leurs enfants. Ce sont elles qui utilisent principalement cette disposition.
En 1999, environ 11,5 p. 100 des prestataires d'assurance-emploi ont eu recours à cette disposition. L'an dernier, à peine 7 p. 100 l'ont fait. En accordant un taux de prestations plus élevé pour le revenu assurable dans une autre modification à la loi — ce que j'encourage vivement le comité à faire —, vous pourriez réduire grandement la vulnérabilité des gens.
J'aimerais faire une autre observation, si vous le permettez, madame Folco. Je me demande si le comité sait que si l'on convertit le nombre de semaines requis à l'époque en heures requises actuellement, durant la récession des années 1980, il ne fallait que 165 heures pour être admissible aux prestations d'assurance-emploi dans une région où le taux de chômage était de 8 à 9 p. 100. Durant la récession des années 1990, il fallait 255 heures. Aujourd'hui, il en faut 595. Pour ceux qui craignent qu'il y ait des gens qui cherchent à abuser du système si l'on réduit le nombre d'heures requises pour être admissible à l'assurance-emploi, je tiens à rappeler que nous avons connu une forte croissance économique en 1989 et qu'après la récession des années 1990, nous avons eu 10 années d'essor économique des plus stables; et ce n'était pas en raison des conditions d'admissibilité à l'assurance-emploi. Nous sommes au milieu d'une énorme période de turbulences économiques, et nous pouvons faire mieux.
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Je tiens à remercier les personnes ici qui représentent le mouvement syndical. Je compatis avec vous pour les pertes d'emploi.
J'ai moi-même travaillé au syndicat des TCA au début de ma carrière, alors je sais qu'il est très difficile pour les dirigeants et les représentants syndicaux de subir ces pertes. C'est une source de stress pour vos travailleurs et pour vous.
Je n'ai qu'une observation à faire concernant un point qu'a soulevé M. Lessard à l'égard de M. Rocheleau, quant à savoir s'il y avait ou non une convention collective au sein de son atelier syndical. Je pense qu'il ne resterait pas longtemps président s'il n'avait pas de convention collective. C'était un point intéressant.
Pour ce qui est d'aider les gens, je sais qu'il y a des centaines d'employés mis à pied à l'heure actuelle dans ma circonscription qui retireraient des avantages directs de ce projet de loi. Je vais donc voter en faveur de ces avantages.
On a parlé d'aider 190 000 travailleurs. En votant contre ce projet de loi, MM. Savage et Lessard ne leur fourniront aucune aide. C'est malheureux, bien sûr.
J'aimerais vous parler d'un dernier point. On a utilisé le mot « réforme » à maintes reprises pour parler de ce projet de loi. Je voulais simplement préciser que ce projet de loi vise à modifier la loi.
Ma question s'adresse aux représentants de la FCEI. Il s'agit d'une question axée sur l'avenir. Le passé est le passé, et nous ne pouvons rien y changer, mais dans une perspective d'avenir, appuieriez-vous les initiatives entreprises pour équilibrer les cotisations et les réinvestir dans le programme d'assurance-emploi? Croyez-vous que ce sont de bonnes mesures?
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Merci, monsieur le président. Je vous remercie tous d'être ici.
Il y a deux semaines, nous avons reçu la ministre et certains fonctionnaires. J'ai demandé à la ministre pourquoi elle n'avait pas fait comme dans le cas de l'aide à la transition de carrière, c'est-à-dire un projet-pilote, plutôt que de présenter une nouvelle mesure par le biais du projet de loi C-50. Je n'ai pas eu de réponse très précise de sa part. On se rend rapidement compte que c'est une belle façon de faire de la politique sur le dos des chômeurs. S'il y avait eu un projet-pilote, nous n'aurions eu aucun amendement et aucune décision à prendre.
On trouve que cela crée deux catégories de chômeurs, les bons et les mauvais. Je ne suis pas sûre qu'on se rapproche de la justice, parce qu'on accepte une mesure inéquitable. Je ne sais pas si on se rapproche de la justice sociale lorsqu'on décide de séparer un groupe en deux. Ce pourrait être de décider de sauver ceux qui portent des lunettes et de leur donner à manger alors que tous sont très affamés. En attendant, on dit à l'autre groupe de patienter, car ça sera son tour à un autre moment. Je ne sais pas si on se rapproche de la justice sociale.
Puisque nous sommes en situation de crise économique, le gouvernement a voulu adopter une mesure temporaire et il a présenté le projet de loi . Nous sommes en situation économique difficile. Il y a déjà l'aide à la transition de carrière qui existe. Qu'auriez-vous priorisé?
D'ailleurs, la ministre nous a dit, la dernière fois, qu'elle avait consulté plusieurs spécialistes. Vous a-t-elle consultés, oui ou non?
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On l'a dit plus tôt et je pense que ça fait l'unanimité parmi ceux qui se prononcent sur le projet de loi : l'accessibilité est la première priorité. Comme l'a dit Pierre Céré, il y a consensus, sauf au Parlement. C'est le premier point.
Le deuxième est l'allongement de la période de prestations. Nous sommes en récession. Ce sont des mesures temporaires, mais on en a besoin. Par contre, ça doit davantage être à l'image de ce qui avait été fait quand il y a eu une prolongation de cinq semaines. Il va falloir suivre la situation de près. Selon l'OCDE et les banques, cette situation va perdurer. On a donc toutes les raisons de penser que ça va être le cas.
Par ailleurs, M. Casey a parlé d'une autre mesure, en l'occurrence le travail partagé. Il a dit qu'il y avait un problème, compte tenu du nombre élevé de ces programmes. Au Québec, environ 22 000 personnes font du travail partagé. C'est énorme. Il y en a 50 000 au Canada, ce qui est également énorme. Dans quelques mois, tout ça devrait arriver à son terme. En principe, c'est à terme, en effet. C'est une bonne mesure qui, comme le disait M. Casey, garde le monde au travail. S'il y a moyen de travailler à ça, nous sommes partants.
Le gouvernement dit vouloir aider les travailleurs qui ont été sur le marché du travail pendant longtemps. Pour notre part, nous préférerions qu'un programme soit consacré à ces travailleurs qui auront de la difficulté à trouver un nouvel emploi. On a parlé de formation professionnelle. Parlons-en, mais n'essayons pas de fonctionner avec un système d'assurance-emploi byzantin qui, à notre avis, manquerait la cible et créerait des iniquités évidentes.
Plus tôt, Mme Folco a parlé des iniquités dont les femmes faisaient l'objet. Or, en ce moment, ce sont les jeunes qui souffrent de cette situation. Le taux de chômage est deux fois plus élevé dans leur cas, et il s'avère qu'ils ne répondent pas aux critères d'admissibilité spécifiés parce qu'ils n'ont pas travaillé pendant un assez grand nombre d'années. Dans un sens démographique, on ne fait rien pour les gens qui sont le plus affectés par le ralentissement économique. Je ne parle pas ici du fardeau familial et de choses de ce genre. Je pense que ces aspects devraient être pris en compte.
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Merci, monsieur le président.
M. Céré a dit qu'il était contre le projet de loi , et j'ai entendu le député de Dartmouth—Cole Harbour nous expliquer pourquoi on pouvait être contre. Mais qu'avez-vous à dire aux travailleurs qui profiteraient de ce projet de loi, aux quelque 190 000 personnes qui recevraient 900 millions de dollars sur trois ans? Comment pouvez-vous oser voter contre un projet de loi comme celui-là, comme les députés du Parti libéral et du Bloc se proposent de le faire? Qu'allez-vous dire à ces travailleurs?
Craig Riddell, un professeur de UBC qui fait partie du Groupe d'experts sur les travailleurs âgés, a observé que les travailleurs de longue date étaient les plus durement touchés par le chômage et qu'il leur fallait 35 p. 100 de plus de temps que les autres pour se trouver un nouvel emploi.
Le but, c'est de diriger l'argent vers ceux et celles qui en ont le plus besoin, ceux et celles qui ont le plus contribué au système, qui travaillent depuis le plus longtemps et qui ont besoin d'aide. Comment pouvez-vous leur barrer la route et leur dire que nous ne voulons pas leur donner droit à ces prestations?
J'ai entendu M. Casey dire qu'il fallait mettre cette mesure dans le contexte de tout le reste. Nous ajoutons cinq semaines de prestations. On estime qu'environ 300 000 travailleurs vont en profiter. Nous ajoutons 500 millions de dollars pour environ 40 000 travailleurs de longue date. Il y a aussi 1,5 milliard de dollars qui s'ajoute aux 2,5 milliards déjà prévus pour la formation, et je suis certain que la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante est favorable à cette augmentation. Nous proposons également, dans ce projet de loi, de cibler les travailleurs âgés, à hauteur de 60 millions de dollars, et de leur accorder de 5 à 20 semaines de prestations supplémentaires. Si l'on regarde l'ensemble des programmes, tout l'éventail, il faut dire qu'il y a beaucoup de prestations supplémentaires qui s'annoncent. Nous avons donc pris des mesures de premier ordre.
Pour ce qui est du programme de travail partagé, nous avons déjà reçu beaucoup de réponses. J'en ai une ici des Pneus Michelin, dont 500 employés bénéficient du programme de travail partagé. Le porte-parole de l'entreprise a souligné que ce programme avait permis à Michelin d'éviter des mises à pied et de conserver sa main-d'oeuvre. Il estime qu'il est à l'avantage à la fois de l'entreprise, de ses employés et du gouvernement et qu'il va aider Michelin à rebondir rapidement dès la reprise du marché.
Je reçois pratiquement le même écho de M. Casey et de l'Association des produits forestiers du Canada.
Il y a donc divergence d'opinions, et il y a différentes choses qu'on peut faire. Dans le contexte, je crois cependant que c'est avantageux. Comment vos employés et vos travailleurs réagissent-ils au programme de travail partagé et au projet de loi ?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais récapituler un peu. D'abord, nous avons entendu en long et en large pourquoi certains d'entre vous appuyez le projet de loi: parce qu'il aide les personnes qui sont le plus dans le besoin. J'ai un peu de mal à être d'accord avec vous, parce que vous semblez sous-entendre que les travailleurs de longue date sont ceux qui ont le plus besoin d'aide.
Il y a beaucoup de gens, des femmes entre autres, qui sont laissés de côté. Il y a des gens qui travaillent à temps partiel, d'autres qui ont perdu leur emploi; il y a des gens qui entrent sur le marché du travail et en ressortent fréquemment, qui ne touchent qu'un faible revenu, etc. Il y a des immigrants qui ne répondent pas aux six... Les gens à qui il manque sept ans n'obtiennent rien du tout, et il est difficile pour eux de se trouver un emploi.
J'ai une question à poser à Mme Yalnizyan du point de vue social. Pour ce qui est de déterminer qui est le plus dans le besoin, j'ai l'impression de me faire l'avocate du bon Dieu, de choisir qui va recevoir... Ce ne sera pas nécessairement les personnes le plus dans le besoin.
Il y a aussi toute la question des femmes. La ministre m'a dit que ce projet de loi n'avait pas fait l'objet d'une étude comparative entre les sexes. Connaissons-nous l'impact qu'il va avoir sur les femmes, qui ont de grands besoins elles aussi, et je ne parle même pas de choisir qui a le plus besoin d'aide? Je trouve assez difficile d'avaler cet argument qu'on nous ressert constamment.
Comme je l'ai dit dans ma déclaration d'ouverture, même l'interprétation la plus généreuse des personnes touchées par ce projet de loi laisse les deux tiers des personnes qui ont perdu leur emploi de côté, les personnes qui ont perdu leur emploi à l'automne, par exemple. Donc quels que soient le calcul et les critères, si c'est une bonne mesure, elle devrait s'appliquer également aux personnes qui ont perdu leur emploi l'automne dernier et à la majorité des personnes désormais sans emploi.
Il y a une foule d'hommes qui ont perdu un emploi à 30 $ l'heure et qui peinent à en trouver un à 15 $ l'heure seulement; leurs conjointes sont donc prêtes à accepter des emplois temporaires, je dis bien temporaires, à 15 $ l'heure ou à créer leur propre emploi. Comme chaque fois qu'il y a une récession, les femmes comblent le manque à gagner. C'est ce qui est arrivé pendant la récession des années 1980 et pendant celle des années 1990. Les femmes ne touchent pas aux prestations d'assurance-emploi, elles ne profitent pas non plus des emplois payants sur le marché du travail, mais elles sont prêtes à aider leur famille à boucler les fins de mois.
Le problème, c'est que c'est devenu la nouvelle structure du marché du travail: les emplois temporaires et peu payants se multiplient. Même si une personne a un emploi, elle peut subir une diminution radicale de salaire, de pension et de prestations, si seulement même elle arrive à conserver son emploi. Ce n'est pas une stratégie viable pour la survie de l'économie ou pour la poursuite d'une reprise déjà fragile.
Il y a donc effectivement une partie de la réponse qui se trouve dans l'accès accru au soutien du revenu, mais il faut également surveiller de très près comment sont créés les nouveaux emplois, parce que la donne n'est pas près de changer.