:
Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer ce projet de loi qui modifie de façon restreinte et progressive la Loi sur l'efficacité énergétique.
Nous savons bien qu'une série de petits pas aboutit à des résultats de grande envergure qui peuvent être impressionnants. Il suffit d'additionner tous les gains d'efficacité énergétique que nous pouvons faire au Canada pour découvrir que la ressource énergétique la plus importante dont nous disposons n'est pas sous terre mais plutôt dans nos foyers et nos collectivités. L'efficacité énergétique est une ressource oubliée.
Lorsque nous en envisageons son potentiel dans l'optique de la collectivité, nous constatons qu'il s'agit de notre plus grande ressource énergétique. C'est la moins coûteuse et celle qui crée le plus d'emplois. C'est une ressource indispensable pour aider les Canadiens à cheminer vers un avenir où les émissions de carbone seront moindres.
Ce qui me déçoit dans ce projet de loi et dans l'approche du gouvernement actuel, c'est qu'il n'a pas obtenu les pleins bénéfices de cette solution éconergétique, qui sont énormes. Nous constatons aujourd'hui un changement progressif de faible importance. Ce que notre gouvernement fédéral doit nous donner, c'est la perspective d'ensemble. Il faut un vrai plan pour tirer parti des avantages de l'efficacité énergétique comme ressource et pour exploiter son potentiel d'avenir.
Le gouvernement fait mine de s'intéresser à la question. Certains de ses membres ont, de toute évidence, lu quelques-uns des documents de Ralph Torrie de la Fondation David Suzuki. Il savent manier les beaux discours, mais ils ne savent pas comment ou ne veulent pas élaborer un plan ambitieux d'efficacité énergétique digne de ce nom pour notre pays.
Si nous comptabilisons les mégawatts en plus des mégawatts d'énergie, l'efficacité énergétique devrait répondre à environ de 30 p. 100 à 50 p. 100 de nos besoins énergétiques dans un monde futur à faibles émissions de carbone. Pour y arriver, nous devons commencer à investir dès aujourd'hui.
L'efficacité énergétique est non seulement une ressource énorme, mais également une excellente source de stimulation économique. Elle entraîne, à long terme, une réduction de coûts pour les entreprises et les propriétaires d'habitations. On estime qu'elle crée cinq fois plus d'emplois que l'énergie conventionnelle et aussi que 80 p. 100 des investissements auxquels elle donne lieu viennent stimuler l'économie locale.
Au lieu d'envisager un plan de stimulation économique axé sur des investissements dans l'avenir qui créent des emplois et qui favorisent des dépenses dans notre économie locale, notre gouvernement prévoit la construction de galeries de cour arrière pour stimuler l'économie. Au lieu d'obtenir des résultats palpables en bâtissant une économie éconergétique, nous construirons des galeries dans les cours arrières plutôt que de construire des maisons éconergétiques.
En Nouvelle-Écosse, j'ai eu le privilège d'étudier la question en profondeur. Je fais partie de la Affordable Energy Coalition et je représente les Néo-Écossais à faible revenu auprès de la commission des services publics. J'ai travaillé avec le service public d'électricité, le Ecology Action Centre, des exploitants industriels, des municipalités et des consommateurs. Ensemble, nous nous sommes entendus sur un plan pour commencer à investir dans l'efficacité énergétique en Nouvelle-Écosse.
Les députés devraient savoir que la Nouvelle-Écosse est sur le point de se placer en tête de file en ce qui concerne l'efficacité énergétique. Une analyse économique de notre système d'approvisionnement en électricité a été effectuée pour déterminer les solutions les plus rentables à adopter à l'avenir. Les résultats de l'analyse sont clairs: la province doit investir activement dans l'efficacité énergétique. L'autre solution serait de construire une autre centrale au charbon qui augmenterait d'un milliard de dollars le coût pour les consommateurs d'électricité. Au lieu de construire une autre centrale au charbon de 400 mégawatts, on compte maintenant construire une centrale électrique efficace sur le plan énergétique.
Les intervenants se sont réunis et se sont entendus sur le fait que, tout d'abord, il faut investir dans ces programmes, ensuite, qu'ils doivent être efficaces, et enfin, qu'ils doivent fonctionner. Après une longue consultation délibérative, nous avons également décidé que la meilleure façon de procéder était de créer le premier poste au Canada d'administrateur dont le mandat serait axé sur le rendement. Malheureusement, notre plan a été retardé. C'est malheureux, parce que chaque jour de perdu revient à de l'énergie gaspillée.
Les intervenants en Nouvelle-Écosse ont milité en faveur d'une impressionnante stratégie sur l'efficacité énergétique, mais elle n'aboutira jamais à rien sans leadership de la part de tous les ordres de gouvernement. Maintenant que je suis députée, je reconnais combien il est important de soulever la question à la Chambre des communes.
La question revêt également une grande dimension sociale, puisqu'il est important que tous, riches ou pauvres, des régions rurales ou urbaines, propriétaires, locataires ou commerçants, aient accès à des services d'efficacité énergétique. Compte tenu de l'augmentation certaine des coûts énergétiques à l'avenir, l'efficacité énergétique devient un nouveau type de service social essentiel à la sécurité. Elle doit devenir un droit fondamental pour tous. Elle doit s'inscrire dans le cadre d'un New Deal vert, que réclament les Canadiens.
En Nouvelle-Écosse, les intervenants conviennent que tout le monde a besoin de participer aux programmes d'efficacité énergétique, y compris les Néo-Écossais à faible revenu, qui sont confrontés aux plus grands obstacles en matière d'efficacité énergétique.
J'ai travaillé avec des Néo-Écossais à faible revenu au Canada qui éprouvent des problèmes d'insuffisance de ressources énergétiques. Ils doivent choisir entre nourrir leurs enfants ou chauffer leurs maisons. Ils doivent choisir entre la nourriture ou le chauffage.
J'ai travaillé avec une famille qui avait perdu son électricité, c'est-à-dire qu'elle n'avait pas de chauffage ou d'éclairage. Les parents avaient très peur que les représentants de la société d'aide à l'enfance leur enlèvent leurs enfants. Ils ont fait ce qui s'imposait, et ils sont allés dans un refuge jusqu'à ce qu'ils puissent économiser assez d'argent pour pouvoir payer leur facture d'électricité. Les membres de la famille ont dû se séparer. Les parents ont retiré leurs enfants de l'école parce que le refuge se trouvait dans une autre région. Le père allait dormir chez des connaissances, et la mère est restée avez les enfants. La mère et ses enfants ont vécu dans un refuge le temps que la famille tente de rassembler assez d'argent pour faire rétablir l'électricité et le chauffage dans sa maison et avoir ainsi un foyer sûr.
J'ai également travaillé avec des clients qui ont réussi à grand-peine à payer leurs factures d'électricité, mais qui n'ont plus eu d'argent après pour payer leur nourriture. Un grand nombre de personnes ne réalisent pas ce que vivent les Canadiens à faible revenu quand ils se trouvent dans une situation où ils doivent faire un choix entre leur alimentation et leur chauffage. Certains de mes clients ont dû manger de la nourriture pour chats parce qu'ils avaient utilisé tout leur argent pour payer leur facture d'électricité. Il est choquant d'apprendre qu'une telle chose peut se produire au Canada.
L'amélioration de l'isolation, le changement des ampoules et le calfeutrage des fenêtres sont de très bons investissements. Cependant, ces investissements ne sont pas possibles pour les Néo-Écossais et les Canadiens qui arrivent tout juste à subvenir à leurs besoins. Nous avons besoin d'un programme au Canada qui permettra aux Canadiens à faible revenu de réduire leurs factures tout en aidant l'environnement.
Des organisations telles que Green Communities Canada ont demandé au gouvernement de créer un programme de rendement énergétique national pour les personnes à faible revenu, mais le gouvernement ne l'a pas fait. Cela signifie que certaines des personnes les plus vulnérables de notre société sont exclues. Ces gens sont ceux qui pourraient être le plus aidés par ces programmes, mais ils sont laissés pour compte.
L'énergie est un service de base nécessaire au Canada, mais il faut vraiment commencer à la considérer comme tel. Autrement dit, il faut poser des questions pour connaître ses besoins en matière de chauffage et d'éclairage plutôt que pour savoir combien d'énergie et de combustibles fossiles on consomme. Les citoyens sont à juste titre préoccupés lorsque le coût de l'énergie augmente. Ils pensent davantage aux tarifs qu'aux factures. Il faut avoir la capacité de fournir aux citoyens les outils pour réduire leurs factures dans l'avenir parce que le prix de l'électricité et du chauffage augmentera certainement.
Il n'est pas étonnant que les gens soient préoccupés par les tarifs ou par le coût unitaire de l'énergie. Nous avons bâti une énorme infrastructure dotée de lignes de transmission, de pipelines de gaz naturel et de raffineries de pétrole. Tous ces éléments d'infrastructure servent à l'approvisionnement énergétique, mais il faut encore bâtir l'infrastructure nécessaire pour réduire la demande d'énergie.
Il faut commencer à vivre dans un monde où l'accès aux services d'efficacité énergétique sera aussi facile que l'accès aux services d'approvisionnement énergétique; où les économies d'énergie, l'utilisation d'ampoules électriques éconergétiques et l'obtention d'une vérification énergétique de son domicile seront aussi aisées que de remplir un réservoir de mazout que l'efficacité énergétique rendra inutile avec le temps; où l'accès au transport en commun sera aussi facile que de se rendre à la station service et où la consultation d'un professionnel en efficacité énergétique sera une pratique aussi courante que d'aller au dépanneur.
Avec un tel potentiel, il faut bien davantage que des changements graduels à l'étiquetage du matériel consommateur d'énergie. Il faut une véritable stratégie comprenant des investissements et des améliorations systématiques en matière d'efficacité des appareils et de l'équipement.
Il faut également une stratégie destinée au marché du travail pour donner le coup d'envoi à l'industrie de l'efficacité énergétique au Canada. Il faut de la formation à tous les niveaux. J'ai travaillé sur ces programmes en Nouvelle-Écosse et le budget devait obligatoirement comporter un poste pour la formation. Nous créons des emplois. Il n'y pas suffisamment de gens pour faire ce travail vraiment extraordinaire et, en fait, spécialisé. Il faut des milliers de personnes pour faire ce genre de travail partout au Canada. À un moment où tellement de travailleurs perdent leur emploi, il est extrêmement décevant de voir l'absence totale de vision du gouvernement en ce qui a trait au potentiel qu'offre pour l'avenir une économie axée sur l'efficacité énergétique.
Il incombe au gouvernement fédéral de tenir compte de la situation d'ensemble. Les changements mineurs et graduels proposés dans cette mesure législative sont importants et il faut les appuyer, mais le gouvernement fédéral doit également être disposé à examiner la situation d'ensemble et à faire preuve de vision et de leadership en créant une économie axée sur l'efficacité énergétique.
:
Monsieur le Président, c’est avec un grand plaisir que je participe au débat sur ce projet de loi, non à cause de son contenu plutôt mince à certains égards, mais en raison des défis que doivent affronter le pays et le monde.
Le projet de loi , vise à donner au gouvernement d’autres pouvoirs, afin de lui permettre d’imposer des restrictions sur certains produits d’utilisation courante, comme les machines à laver et à sécher le linge. Le projet de loi est décevant parce que son but est beaucoup trop petit par rapport à l’objectif général que le Canada doit se fixer. Le Canada doit assumer un rôle de leadership à l’échelle mondiale.
C’est une petite mesure par rapport au grave problème de la hausse des prix de l’énergie. Les Canadiens ont vu ces prix monter d’année en année, même s’il y a eu à l’occasion quelques intervalles de chute des prix. Nous constatons toujours que nos prix montent parallèlement aux prix du marché mondial. Toutefois, quand les prix mondiaux baissent, le prix de l’essence à la pompe et celui de l’électricité ne diminuent pas en conséquence. La tendance générale est constamment défavorable aux consommateurs.
Le projet de loi traite d’une façon très modeste des pouvoirs du gouvernement. La réaction de l’industrie a été plutôt tiède. Le secteur privé n’a pas semblé beaucoup s’intéresser à cette mesure, ce qui signifie ordinairement qu’elle est plus ou moins sans conséquence. Quand le gouvernement présente des mesures énergiques et audacieuses, l’industrie répond souvent en demandant une action moins vigoureuse ou en recommandant d’agir d’une autre façon. Par contre, si le gouvernement propose des mesures insignifiantes, qui n’ont que des effets subtils et pas trop concrets sur les projets de l’industrie, la réaction est semblable à ce que nous avons ici face à ce projet de loi qui ne représente pas grand-chose.
La réponse des groupes qui s’intéressent à ces questions sur le plan environnemental a été modérément positive parce qu’ils considèrent le projet de loi comme un petit pas en avant. N’empêche, le gouvernement s’est constamment gardé de présenter des mesures globales quelconques. Voilà le thème que j’adopterai dans mon discours aujourd’hui parce que tous les efforts déployés en dehors d’une stratégie globale ou d’un plan que les gens peuvent juger cohérent ne sont que des coups d'épée dans l’eau. Ce ne sont que des mesures ponctuelles qui ne nous font pas progresser suffisamment vers l’objectif que nous devons viser et qu’en toute franchise, je crois que les Canadiens souhaitent atteindre.
Le projet de loi comporte peut-être une petite lueur d’espoir, mais il faut chercher partout pour la trouver et explorer soigneusement pour déterminer si elle présente vraiment de l’intérêt. C’est la possibilité que le gouvernement puisse limiter la consommation d’eau de certains appareils. Par exemple, il y a des machines à laver le linge et des lave-vaisselle dont la consommation n’est que d’un tiers, un quart ou même un cinquième de celle des modèles ordinaires. Nous avons besoin de mesures de ce genre.
Il y a des villes qui ont besoin d’investir des milliards et des milliards de dollars dans leur infrastructure. Nous avons des régions de notre pays qui connaissent des pénuries d’eau. Il y a eu des crises en Alberta dans le passé. Selon toute probabilité, ce problème continuera à se poser aux consommateurs et à l’industrie. Le gouvernement devrait s’attaquer aux produits qui gaspillent des ressources sans nécessité. Ces produits n’assurent ni un meilleur service ni un meilleur prix aux Canadiens. Ils ne font que consommer plus d’eau et plus d’énergie pour la seule raison que nous en avions en abondance pendant trop longtemps.
Des pays comme le Canada ont eu énormément de ressources naturelles. On s'imaginait qu'il y en aurait toujours plus, plus d'eau, plus d'arbres, plus d'énergie. Nous pensions pouvoir simplement structurer nos industries et toute notre économie en ne tenant pas compte du gaspillage puisque nous étions convaincus que, si les prix chutaient, il nous suffirait de produire davantage sans tenir compte du gaspillage puisque nous avions tellement de ressources.
Nous commençons à prendre conscience des limites naturelles de l'environnement, des limites de l'exploitation non durable de nos ressources. La même chose se produit ailleurs dans le monde. Nous constatons qu'il y a de plus en plus de conflits dans le monde qui sont motivés par l'eau et l'énergie. La guerre en Irak n'est pas terminée et le gouvernement des États-Unis a finalement admis que cette guerre était motivée par les ressources énergétiques. Nous le constatons au Canada, où le gouvernement a affirmé qu'il dresserait la carte de tous les bassins hydrographiques, mais ne l'a pas fait. Nous entendons fréquemment des avis enjoignant la population de faire bouillir l'eau dans nos collectivités les plus pauvres. Nous voyons aussi au niveau local des gens lutter pour trouver des moyens d'utiliser moins d'eau et moins d'énergie, fermer les robinets, éteindre les lumières. Les gens ne savent pas que beaucoup des appareils que nous achetons sont des dévoreurs d'énergie parce qu'ils consomment en permanence de l'électricité.
Auparavant, lorsque nous allumions nos téléviseurs et nos systèmes de son, il leur fallait une ou deux secondes pour se réchauffer et nous pouvions alors voir l'image ou entendre le son. Maintenant, dès que nous touchons le bouton de nos ordinateurs, de nos téléviseurs et de nos systèmes de son, ils démarrent instantanément. C'est parce qu'ils consomment en permanence de l'électricité pour être prêts en une fraction de seconde lorsque nous voulons nous en servir. Cela représente une consommation constante d'énergie.
En Ontario ou dans ma propre province, la Colombie-Britannique, les gouvernements et les entreprises privées dépensent beaucoup d'argent pour trouver de nouvelles sources d'électricité alors que le moyen le plus simple d'accroître la quantité d'électricité disponible consiste à en réduire la consommation, à l'économiser, ce qui serait dans l'intérêt de tous nos électeurs, des gens qui nous envoient ici, et ce qui réduirait leur facture d'énergie.
Les seules personnes qui ont intérêt à accroître constamment la consommation d'électricité et d'essence, sont les gens qui les produisent et en retirent des profits.
Mais il y a une profonde volonté de changer les choses, comme on commence enfin à le constater chez les entreprises de production d'énergie les plus éclairées. Investir plus dans l'efficacité énergétique et mieux comprendre la nécessité d'avoir une économie plus efficace, plus productive et plus compétitive, c'est fondamentalement se poser la question de l'énergie, que ce soit l'énergie humaine ou celle dont on parle habituellement ici, c'est-à-dire l'électricité, le pétrole et le gaz, etc.
Il faut que les Canadiens sachent que ce projet de loi, en dépit de ses modestes mérites, s'inscrit dans le vide de la politique gouvernementale.
Hier, alors que je discutais avec des experts conseils en énergie, ils ont parlé du plan Prendre le virage. Ce terme m'a surpris, car il y a tellement longtemps que je ne l'avais pas entendu, tellement longtemps que je n'avais pas entendu le gouvernement le mentionner.
Pour ceux qui s'en souviendraient, le gouvernement a présenté ce plan en 2007 et il avait promis de publier toute une réglementation pour le mettre à exécution. Mais ces promesses sont restées lettres mortes.
Que fait l'industrie quand il y a un vide politique? Que fait-elle quand il n'y a pas de réglementation? Elle continue sa petite routine.
Certains des investissements dont nous parlons, notamment dans les énergies qui pèsent lourd, comme le pétrole et le gaz ou l'électricité, nécessitent la réaffectation de milliards de dollars. Je me souviens d'une rencontre avec des gens du secteur minier, qui s'occupaient de l'extraction et du raffinage ou de la fonderie. Ils étaient furieux contre le gouvernement et ses prédécesseurs.
On s'attendrait à ce qu'ils soient les alliés naturels du gouvernement, mais ils ne l'étaient plus parce que le gouvernement avait fait toutes sortes de déclarations sur la nécessité d'améliorer l'efficacité énergétique et de réduire les gaz à effet de serre, et que l'industrie avait fait ses investissements en partant du principe que la réglementation allait suivre, mais il ne s'était rien passé.
Ces gens-là attendent toujours la publication du premier règlement sérieux du plan Prendre le virage.
Dans ce vide politique, on voit le Canada, en la personne du et d'autres, se mettre dans le sillage de Washington, attendre, tergiverser, s'abstenir de fixer un prix du carbone ou de réglementer les niveaux de pollution, attendre enfin que l'administration Obama fasse le travail à sa place.
Comme nous venons de le voir la semaine dernière, l'administration Obama a publié son plan sur le changement climatique, un document d'environ 600 pages, et tout ce que répond le gouvernement canadien, c'est que tout va bien chez nous, avec des mesures en porte-à-faux avec ce que nos partenaires américains suggèrent et vont faire sur tous les plans.
Au Congrès, tant à la Chambre des représentants qu'au Sénat, on présente des projets de loi qui vont à contre courant de ce qu'ont proposé les conservateurs. Dans le cas particulier de la façon de mesurer les gaz à effet de serre, ce qui est un des points les plus fondamentaux pour la lutte contre les gaz à effet de serre, ce gouvernement s'obstine à utiliser des cibles fondées sur l'intensité que personne d'autre n'utilise dans le monde. En tous cas, aucun des pays qui veulent participer à un marché du carbone ne veut en entendre parler, tout simplement parce qu'elles ne marchent pas. On compare des pommes et des oranges.
Une de ces cibles concerne le volume de gaz à effet de serre émis par unité d'énergie ou par unité d'économie. C'est des cibles d'intensité fantaisistes de ce genre que les conservateurs font la promotion. L'autre cible établit simplement un plafond rigide au-dessous duquel on peut faire des échanges, et au-dessus duquel il faut acheter des crédits. C'est ainsi que fonctionne le marché.
Je me suis récemment rendu à Washington pour rencontrer certains de nos alliés au Congrès. Je leur ai demandé quel genre de discussions ils avaient eues avec le Canada à propos de l'intégration de nos régimes de marché. Ces gens-là sont les principaux défenseurs de ces projets de lois et ce sont eux qui vont apposer leur signature sur ces mesures législatives à Washington.
Ils m'ont dit que leur conversation avec moi était la première du genre avec un législateur canadien. Impossible pour moi de croire une telle chose, étant donné que notre magnifique ambassade à Washington est pleine de gens très brillants et hautement qualifiés et que toute une panoplie de ministres se rendent régulièrement à Washington. Pourtant, les discussions sur l'intégration d'un des marchés les plus importants et fondamentaux, qui se produira dans l'année, n'avaient pas été amorcées. Par conséquent, les entreprises canadiennes n'ont pas accès à un des principaux marchés qu'elles doivent percer.
De plus, pour revenir à l'aspect de l'efficacité énergétique, les Américains parlent depuis un certain temps d'une norme pour les émissions de carbone des carburants. Cette initiative a été lancée par les États du Maine, de New York, de la Californie et de Washington et est maintenant reprise par les législateurs fédéraux. La réaction du Canada a été de souhaiter que cela ne se concrétise pas, car nous produisons des carburants parmi les plus polluants du monde. Les Américains veulent imposer une limite à la quantité de ces carburants qui seront importés aux États-Unis. Ils vont limiter la quantité de carbone émise par les carburants utilisés aux États-Unis par les consommateurs et les entreprises, carburants qui sont produits au Canada. Le gouvernement conservateur y pense tous les jours, mais il n'a fait aucun effort pour éviter la catastrophe qui nous attend si nous ne commençons pas à produire des carburants à plus faibles émissions de carbone.
Le Canada s'est contenté jusqu'ici de dire que cela n'arrivera pas, que les Américains vont vaciller et qu'ils n'adopteront pas, en fin de compte, la norme de faible teneur en carbone. J'ai des nouvelles pour les conservateurs. Les personnes qui travaillent sur cette mesure législative, à la Maison-Blanche ainsi qu'au Sénat et à la Chambre des représentants, ont toutes dit, et elles l'ont mis par écrit pour que le gouvernement canadien le voit, que cela s'en vient. C'est ce qui est proposé. Pourtant, le gouvernement canadien refuse de reconnaître l'ampleur et la portée du défi qui nous est lancé.
Il est parfaitement correct que le gouvernement se donne des pouvoirs supplémentaires à l'égard de l'efficacité du matériel électronique et des appareils ménagers que les Canadiens utilisent couramment, mais il n'interdit pas les plus inefficaces. Il dit simplement que quelques-uns de plus seront autorisés, mais de façon plus efficace. Pendant ce temps, les grands coupables, les matériels qui consomment le plus d'énergie et le plus d'eau et qui gaspillent le plus échappent toujours au contrôle du gouvernement qui pourrait carrément les interdire. Je ne vois vraiment pas pourquoi il en est ainsi.
Ce n'est pas comme si les gouvernements d'autres pays ne s'étaient pas déjà engagés dans cette voie sans que les consommateurs et l'industrie n'en souffrent trop. L'Europe et le Japon prennent des dispositions en ce sens depuis plus de 20 ans, et l'Australie, la Nouvelle-Zélande et d'autres pays aussi. La voie est toute tracée. C'est peut-être là le seul avantage dont jouit actuellement le Canada en matière d'efficacité énergétique et de lutte contre les changements climatiques. À cause du retard pris par le gouvernement conservateur et par les gouvernements libéraux précédents, d'autres ont préparé le terrain en ce qui concerne certains éléments de base de la marche à suivre pour avoir une économie qui est plus efficace et qui pollue moins.
Ce n'est pas comme si le Canada devait réinventer la roue. Tellement de gouvernements nous ont déjà ouvert le chemin, faisant preuve d'un leadership réel et sincère. Nous en sommes même témoins à l'heure actuelle au G20. Notre et les dirigeants des autres pays s'y trouvent aujourd'hui.
Il y a en fait 22 pays qui y sont représentés et je présume qu'ils devront un jour changer le nom du groupe, mais nous continuons de parler du G20 puisque tout le monde le fait.
Dans le cadre des discussions sur les mesures de relance qui se tiennent au sommet réunissant les dirigeants européens et l'administration américaine, on parle de niveaux, et le Canada n'atteint pas les 2 p. 100 qu'il avait promis à la rencontre du G20 de Washington il y six mois. Dans les mesures de relance dont les divers gouvernements discutent en Europe et aux États-Unis, on parle d'une relance verte en disant que si les pays sont prêts à investir autant de fonds publics dans les marchés privés, comme le Canada et d'autres pays le font, ne devraient-ils pas aussi tenir compte en même temps d'autres questions d'intérêt public?
La défense des intérêts publics a été forte et constante au cours des quelques dernières années et on parle beaucoup de la nécessité de réduire la pollution causée par les voitures et les industries et de faire preuve de plus d'efficacité dans tout ce que nous faisons parce que les Canadiens ne sont pas très chauds à l'idée. Si nos ancêtres qui ont construit le pays pouvaient encore croire qu'il y avait tellement de ressources que le gaspillage ne constituait pas une grande préoccupation, ce n'est plus le cas aujourd'hui et les Canadiens s'en inquiètent beaucoup. C'est la raison pour laquelle ils s'intéressent au recyclage. C'est aussi pour cette raison qu'ils cherchent à co-voiturer et à acheter des meilleurs appareils électroniques et de meilleurs équipements pour leurs maisons.
Il me semble toutefois qu'à l'heure actuelle, alors que tout le monde parle d'une relance verte, notre gouvernement est toujours paralysé par des idées anciennes. Je ne sais pas combien de fois j'ai entendu le soi-disant dire que nous devons choisir entre l'environnement et l'économie, que nous ne pouvons pas mettre notre économie en danger en nous occupant de l'environnement à l'heure actuelle.
Il semble donc que lorsque les temps sont favorables, ce n'est pas le moment de s'occuper de l'environnement, et que lorsqu'ils sont difficiles, ça ne l'est pas non plus. Tant pour les conservateurs que pour les libéraux, ce n'est jamais le bon moment pour s'occuper de l'environnement.
Le chef libéral actuel a parlé des sables bitumineux comme d'une question d'unité nationale. J'ai entendu bien des choses de la part des défenseurs et des détracteurs des sables bitumineux, mais, bon sang, je n'avais jamais entendu dire que les sables bitumineux unissaient les Canadiens, ou que des Canadiens à Halifax, à Montréal et à Vancouver s'agenouillaient tous les jours pour prier à la gloire des sables bitumineux.
L'insistance peut avoir sa place, mais bon sang, l'équilibre s'impose.
La Chambre a été saisie de plusieurs projets de loi ministériels portant affectation de crédits pour des mesures d'efficacité énergétique, des projets de loi abordant la nécessité d'intensifier la lutte aux changements climatiques, mais le premier que le gouvernement a présenté à la Chambre prévoyait un programme de crédit d'impôt pour les laissez-passer des transports en commun. Le gouvernement a jugé bon d'aider les utilisateurs des transports en commun. Les administrations des transports en commun d'un bout à l'autre du Canada ont accueilli la mesure très favorablement, mais elles ont réclamé une augmentation du nombre de leurs autobus, parce qu'elles connaissaient bien les besoins des utilisateurs des transports en commun: un système plus efficace et un accès à moindre coût au système. Elles avaient cerné le problème.
Le gouvernement a fait la sourde oreille. Il s'est entêté et a offert aux utilisateurs des transports en commun un crédit d'impôt sur les laissez-passer mensuels.
Le gouvernement croit que les crédits d'impôts sont la solution à tous les problèmes. Eh bien, même si ce type de politique économique néo-conservatrice nous a plongés dans une situation difficile, le gouvernement ne veut même pas la réexaminer, et cela pour des raisons qui dépassent l'entendement.
Nous nous sommes opposés à cette mesure parce que nous savions qu'elle ne réglerait pas le problème que le gouvernement voulait régler. Nous savions qu'elle n'inciterait pas un plus grand nombre de gens à utiliser les transports en commun. Une telle mesure ne touche que les gens qui utilisent déjà les transports en commun. En outre, le prix associé à la réduction des émissions de gaz à effet de serre serait exorbitant. Le prix par tonne de réduction, ou par voiture retirée de la route serait exorbitant.
Malheureusement, la vérificatrice générale nous donne raison. Ce programme a fini par coûter au Canada de 5 000 $ à 6 000 $ la tonne de réduction. De toute évidence, le gouvernement n'a pas les capacités et l'intelligence voulues pour atteindre les cibles qu'il propose. Avec des mesures telles que ce crédit d'impôt pour les laissez-passer de transports en commun, à supposer qu'il en coûte de 5 000 à 6 000 $ la tonne de réduction, le Canada ne pourra absolument pas atteindre les buts dictée par l'idéologie du gouvernement actuellement au pouvoir.
Un autre projet de loi dépasse l'entendement en ce qui me concerne. Il y a environ 18 mois, le gouvernement a déposé une mesure législative sur les biocarburants. Nous l'avons étudiée attentivement et nous avons approuvé son renvoi à un comité. À l'étape de l'étude en comité, nous avons proposé deux amendements. Le projet de loi, qui visait à promouvoir l'utilisation des biocarburants, allait entraîner des coûts d'environ 2 milliards de dollars, ce qui représente une ponction importante dans les fonds publics. Nous avons dit que, si l'on voulait subventionner les biocarburants — les éthanols, l'éthanol de maïs et les carburants du monde, peut-être le sucre ou la betterave, qui sait — deux conditions devraient être remplies.
Premièrement, il fallait voir combien d'emplois nous pouvions créer en dépensant 2 milliards de dollars. Ce facteur devrait être un critère. À l'époque, nous n'étions pas en période de récession, mais nous pouvions certainement voir des éléments très fragiles au sein de notre économie. Le gouvernement n'en a pas tenu compte et nous nous sommes tous retrouvés dans le pétrin. Nous avons demandé au gouvernement d'inclure à tout le moins un critère lié à l'emploi, de façon à déterminer combien d'emplois seraient créés suite à cet investissement de 2 milliards de dollars. Le gouvernement a répondu qu'il n'avait pas besoin de s'astreindre à un tel exercice et qu'il allait tout simplement dépenser l'argent.
L'autre point que nous avons fait valoir était que, si nous voulions réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada, cet objectif devrait être un critère aux fins du programme de réduction des gaz à effet de serre. Nous voulions que cet objectif soit un critère afin de réduire le plus possible les émissions de gaz à effet de serre. Le gouvernement a refusé en disant qu'il n'y avait pas de raison d'appliquer ce critère, et il ne l'a pas fait. Les 2 milliards de dollars ont donc été dépensés sous la forme d'une subvention à l'agriculture. Il n'y a rien de mal dans le fait que le gouvernement accorde une subvention au secteur agricole. Toutefois, 2 milliards de dollars ont été dépensés et les réductions d'émissions de gaz à effet de serre découlant de cette subvention sont négligeables, selon toutes les études qui ont été menées à cet égard.
Compte tenu de l'absence d'une politique, les mesures telles que le projet de loi , que le gouvernement présente en disant qu'il s'attaque aux changements climatiques et que nous n'avons pas à nous inquiéter, sont des mesures isolées qui ne font pas partie d'une stratégie d'ensemble.
Par contraste, lorsque les gouvernements de l'époque ont commencé à envisager la possibilité d'exploiter les sables bitumineux, ils ne se sont pas contentés de présenter des mesures isolées. Ils avaient une stratégie d'ensemble. Ces gouvernements ont fait appel à toutes leurs ressources — l'argent, la recherche, le soutien et l'expertise — et leur initiative a porté fruit. L'exploitation des sables bitumineux se fait maintenant à grande échelle.
Lorsqu'il s'agit de l'environnement, on ne constate pas la même intelligence, ou la même authenticité et sincérité. En agissant comme il le fait, le gouvernement ne répond pas aux attentes des Canadiens, et le projet de loi — même s'il s'agit d'une petite initiative — ne va certainement pas corriger la situation.