Passer au contenu

AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 010 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 avril 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bon après-midi mesdames et messieurs. Nous allons commencer la séance. Il manque encore quelques membres du comité, mais je crois que nous sommes assez nombreux pour qu'il y ait quorum, alors commençons.
    Nous reconnaissons que l'ordre du jour de cet après-midi est assez bien rempli. Nous avons donc intérêt à commencer le plus tôt possible.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins, députés et invités à notre 10e séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Nous reprenons notre étude du projet de loi C-3 conformément à l'ordre de renvoi en date du 29 mars.
    Je vais vous exempter des longues présentations. Nous avons un horaire chargé aujourd'hui. Le premier groupe de témoins se fera entendre jusqu'à environ 16 h 30. Il y aura quatre groupes de témoins. Je vois que vous êtes quatre groupes différents. Nous allons essayer de faire de notre mieux. Nous allons essayer de vous allouer cinq minutes chacun pour vos exposés. Vous aurez chacun l'occasion de présenter un exposé. L'idéal, c'est que vous puissiez résumer vos recommandations clés dans ces cinq minutes. Cela donnera davantage de temps aux députés pour poser des questions.
    Je propose aux membres du comité de limiter les séries de questions à cinq minutes, dans l'espoir de pouvoir poser quelques questions additionnelles. Est-ce que tout le monde est d'accord?
    Une voix: Non.
    Le président: D'accord. La proposition ne fait pas l'unanimité, alors nous allons procéder de la façon habituelle.
    Monsieur Lemay, vous avez un commentaire.

[Français]

    Monsieur le président, tout à l'heure, je vais faire une proposition — je vais attendre mes collègues libéraux — en vue de reporter l'étude du projet de loi article par article à mardi prochain. J'expliquerai plus tard pourquoi. Je sais qu'il y a beaucoup de gens et c'est justement ce que je déplore. J'ai du respect pour les témoins. En cinq minutes, on va leur demander de se prononcer sur un projet de loi capital pour leur avenir, pas le nôtre, le leur.
    Pour ma part, je commence à trouver cela un peu pénible, monsieur le président, avec tout le respect que je vous dois. J'aimerais qu'on leur laisse le temps nécessaire pour expliquer leurs positions. Si jamais on n'a pas le temps de poser les questions, on continuera jeudi au cours de la première heure. Les témoins sont ici et je sais que, parmi eux, certains ont travaillé énormément pour se préparer. C'est probablement, avec le projet de loi C-8, Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves et le projet de loi C-21, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personnesur l'abolition de l'article 67, l'un des projets de loi les plus importants que nous allons avoir à débattre. Je crois qu'on peut se donner encore une journée ou deux. Je regarde les gens autour de moi et je suis prêt à les écouter. On a jusqu'à 18 h 30. Si on n'a pas fini, on continuera jeudi après-midi. Cinq minutes pour parler de l'article 6 de ce projet de loiC-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs), c'est trop court.
    Monsieur le président, je ne mets pas votre bonne volonté en doute, je sais que vous voulez bien faire. Je respecte cela au plus haut point, mais il y a des aspects capitaux. Les membres du comité ont des questions et les témoins en ont également. C'est leur avenir qui est en train de se jouer ici, avec tout le respect que je vous dois.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lemay. Je comprends votre commentaire, mais vous comprenez que nous avons distribué le document à l'avance pour que les membres puissent comprendre. Personne n'a formulé de remarques à ce sujet. Commençons pour voir comment les choses se déroulent. Le comité a le droit d'établir son propre ordre du jour et nous faisons de notre mieux pour nous assurer que... Je suis d'accord, et je suis certain que tous les membres comprennent l'importance d'entendre tous les témoins qui ont exprimé un intérêt en nous faisant connaître leur point de vue au sujet de ce projet de loi important à l'étude aujourd'hui. Si notre emploi du temps est si chargé, c'est parce que nous voulions accueillir toutes les personnes désirant se faire entendre ainsi que les intervenants recommandés par des membres du comité qui pourraient se faire entendre au sujet du projet de loi.
    Je prends bonne note de vos remarques, monsieur Lemay. Commençons.
    Nous accueillons tout d'abord l'Association du Barreau Autochtone, représentée par Mme Dianne Corbiere et M. David Nahwegahbow, qui viennent de ma circonscription de Simcoe—Nord. C'est toujours un plaisir d'accueillir quelqu'un de ma circonscription, mais cela n'enlève rien aux excellents témoins qui sont aussi ici aujourd'hui.
    Nous allons commencer. Madame Corbiere, vous avez la parole.
    Je vous transmets les salutations de notre présidente. Elle n'a pas pu être des nôtres aujourd'hui, c'est pourquoi elle nous a demandé, à David et moi, de représenter l'Association du Barreau autochtone.
    Je suis désolée, nous n'avons pas pu traduire le document et le remettre à l'avance, mais le président m'a dit qu'il peut être distribué plus tard.
    Pour ceux qui ne nous connaissent pas, l'Association du Barreau autochtone est un organisme sans but lucratif qui représente les Autochtones du milieu juridique du Canada. Nos membres comprennent des juges, des avocats, des universitaires, des étudiants en droit ainsi que des diplômés en droit d'origine autochtone vivant au Canada.
    L'Association s'est montrée active depuis sa création en 1988. Elle était tout aussi dynamique sous son ancien nom, la Canadian Indian Lawyers' Association. À cette époque, je n'en faisais pas partie, mais mon collègue David Nahwegahbow en était déjà membre. l'Association met l'accent sur... En fait, l'un des objectifs clés de l'Association c'est de faire la promotion de la reconnaissance et du respect du droit, des coutumes et des traditions autochtones dans le cadre de notre travail. J'essaierai donc de résumer les recommandations pour respecter les cinq minutes qui nous sont allouées.
    Étant donné que le projet de loi C-3 ne constitue à peine qu'une réaction à un texte de loi archaïque et gravement vicié — je suis certaine qu'on vous l'a souvent répété —, il n'arrive aucunement à présenter une solution élargie. Sa portée étroite ne bénéficiera qu'à ceux qui tombent dans la même catégorie que Mme Sharon McIvor, car il ne s'attaque qu'à la question du statut perdu des suites d'un mariage. Les questions portant sur la citoyenneté, les compétences des gouvernements autochtones et la viabilité à long terme du système d'attribution du statut en général ne sont toujours pas abordées.
    On a raté l'occasion de s'attaquer à ces questions élargies, par conséquent les collectivités des premières nations et, d'après moi les Canadiens aussi, continueront de souffrir en raison des préjudices infligés par la perte continue d'accès à la citoyenneté.
    C'est un point de vue largement répandu que les premières nations à la grandeur du Canada ont défendu avec véhémence le fait que l'appartenance ou la citoyenneté constitue un élément fondamental de l'autonomie gouvernementale. Ces affirmations ont également été appuyées par de grandes études, notamment le rapport Penner sur l'autonomie gouvernementale des Autochtones en 1983 et le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1995. Comme vous le savez, ces initiatives ont reçu l'appui des différents groupes parlementaires de l'époque.
    Dans l'affaire Haida, la Cour suprême du Canada a reconnu que les nations autochtones jouissaient d'une souveraineté préexistante, ce qui comprend indubitablement le droit de déterminer l'appartenance ou la citoyenneté.
    En d'autres termes, les premières nations du Canada ont traditionnellement exercé leur droit à déterminer leur propre citoyenneté. Il s'agit maintenant d'un droit constitutionnellement reconnu par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. D'après l'Association du Barreau autochtone, le système actuel d'attribution du statut aux termes de la Loi sur les Indiens constitue une ingérence injustifiable en regard du droit inhérent des nations autochtones à déterminer leurs propres citoyens.
    Le fait que la Couronne et que le gouvernement fédéral ne reconnaissent pas le droit des Autochtones à déterminer leurs propres citoyens, en plus de l'imposition du système d'attribution du statut, via la disposition 33.1 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui énonce que les peuples autochtones ont le droit de déterminer leur propre identité ou appartenance en fonction de leurs coutumes et traditions.
    Je vais sauter quelques passages de mon exposé. Le projet de loi C-3 n'est qu'une modification mineure au statu quo. Il continue de perpétuer les inégalités au sein des collectivités des premières nations. Ce n'est pas seulement une question de sexe.
    En ne s'attaquant pas au problème, on cause des torts à toute la communauté.
(1535)
    Certaines familles ont des membres qui sont inscrits au titre du paragraphe 6(1) ou 6(2) ou qui ne sont pas inscrits du tout. Pensez-y, quelle autre communauté au Canada est assujettie à ce type de détermination législative? Je suis moi-même inscrite au titre du paragraphe 6(1). Mon enfant est inscrit au titre du paragraphe 6(2). Je suis rentière par application du Traité de Robinson-Huron... et je suis une Canadienne. Il y a toutes sortes de façons de me décrire.
    L'Association a pour principale recommandation que le gouvernement du Canada arrête de définir les Indiens et qu'il appuie plutôt une approche reconnaissant la compétence des premières nations lorsqu'il s'agit de déterminer leur citoyenneté. Je répète que de notre avis, le fait de perpétuer cette injustice dans le cadre du projet de loi C-3 et d'autres lois constitue une violation de nos obligations constitutionnelles mutuelles énoncées dans l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
    De plus, le gouvernement fédéral persiste à s'ingérer dans les champs de compétence des premières nations en déterminant lui-même la citoyenneté, ce qui est non conforme aux normes internationales. Le fait que ces dispositions législatives existent encore va à l'encontre des conventions internationales actuelles, surtout la disposition 33.1. Or, je vous invite à consulter aussi d'autres dispositions: 4, 9, 18 et 19.
    L'Association formule comme deuxième recommandation que le Canada établisse un autre comité parlementaire spécial pour agir à titre de groupe de travail parlementaire se penchant sur la question élargie de l'autonomie gouvernementale, de l'appartenance et de la citoyenneté en plus des articles 6 à 14 de la Loi sur les Indiens.
    Du temps du comité Penner, l'Association du Barreau autochtone avait transmis ses recommandations au sujet de l'autonomie gouvernementale. L'une de ces recommandations, qui a été adoptée par le comité Penner, visait un changement constitutionnel pour s'attaquer aux questions sur lesquelles nous donnons notre avis aujourd'hui et qui ne sont pas requises. Le gouvernement fédéral a toujours eu la capacité de résoudre ces questions avec des solutions législatives.
(1540)
    Madame Corbiere, voulez-vous formuler une autre recommandation aux fins du procès-verbal? Nous devrons par la suite passer à un autre témoin.
    Notre troisième recommandation porte sur le projet de loi lui-même. L'association souscrit à la position de nos collègues de l'Association du Barreau canadien qui avance que l'article 9 devrait être supprimé du projet de loi C-3.
    Voilà, c'était mes observations pour le moment.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Gabriel. Mme Ellen Gabriel est la présidente des Femmes Autochtones du Québec.
    Madame Gabriel, bienvenue. Allez-y.
    Merci. Bonjour monsieur le président et honorables députés membres du Comité permanent de la Chambre des communes.
    Mon regroupement, Femmes Autochtones du Québec, se réjouit de cette occasion de s'adresser à vous tous et de présenter son point de vue sur la discrimination historique infligée aux femmes autochtones et à leurs descendants en vertu de la Loi sur les Indiens, une injustice qui n'a pas été réparée avec l'adoption du projet de loi C-31 en 1985. Femmes Autochtones du Québec rejette la vision limitée proposée par le gouvernement fédéral, car le projet de loi C-3 n'éradiquera pas complètement la discrimination fondée sur le sexe.
    J'aimerais que vous preniez note des lacunes de ce processus, qui n'a pas compris une consultation adéquate, efficace et constructive des peuples autochtones au sujet d'une question grave touchant leurs droits. Les cinq minutes qui nous sont accordées ne seront pas suffisantes pour aborder toutes les préoccupations soulevées par le projet de loi C-3, mais je vais néanmoins en souligner quelques-unes.
    Il y a entre autres l'absence de consultation réelle auprès des peuples autochtones, ce qui aurait été conforme aux obligations constitutionnelles du gouvernement fédéral.
    Deuxièmement, on ne tient pas compte de la nature historique et institutionnalisée de la discrimination à l'endroit des femmes autochtones qui a été permise par la Loi sur les Indiens depuis son imposition en 1876, car la définition d'Indien ne s'applique qu'aux hommes.
    Troisièmement, il n'y a pas de planification financière pour s'attaquer à la pénurie de logements dans les réserves. Il n'y a déjà pas assez de terres ni de ressources dans les réserves, et ces besoins seront encore plus criants avec les amendements proposés, car il y aura une augmentation de 6 p. 100 de la population inscrite.
    Quatrièmement, aucune disposition ne prévoit l'acquisition immédiate de l'appartenance à une bande à une personne nouvellement inscrite, ce qui fait fi des droits inhérents ainsi que des droits issus de traités.
    Nous avons décidé d'exposer plus en détail deux de nos principales préoccupations.
    Le projet de loi C-3 découle d'une décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Cette décision est limitée et viciée, car elle a pour prémisse la poursuite de la discrimination. D'ailleurs, le seuil d'admissibilité proposé, soit après le 4 septembre 1951, date de naissance d'une personne nouvellement inscrite, repose sur la présomption selon laquelle c'est strictement une question de discrimination sexuelle qui devrait être réglée dans le cadre du régime d'inscription. La rétroactivité s'arrête à 1951, date à laquelle la disposition « mère grand-mère » a été reconnue et mise en application. Par conséquent, le projet de loi C-3 est non seulement erroné, mais il va continuer de maintenir les inégalités fondées sur la date de naissance.
    La discrimination sexuelle vécue par les femmes autochtones remonte en réalité à 1876, avec l'adoption de la Loi sur les Indiens, et non pas à 1951, date à laquelle le statut de femme indienne a commencé à être fonction du statut du mari. Les petits-enfants qui remontent leur arbre généalogique autochtone en suivant leur lignée maternelle continueront de se voir refuser le statut s'ils sont nés avant le 4 septembre 1951 sauf s'ils ont au moins un frère ou une soeur né après cette date. Ce qui n'est pas le cas pour les descendants d'hommes autochtones. En outre, d'autres politiques administratives gouvernementales, notamment la paternité non déclarée et les biens immobiliers matrimoniaux dans les réserves, continuent de perpétuer une discrimination à l'égard des femmes autochtones qui ont des enfants.
    Étant donné les contraintes de temps aujourd'hui, nous nous limiterons aux recommandations qui suivent.
    Premièrement, que les différentes catégories de statut d'Indiens, comme le statut au titre des paragraphes 6(1) et 6(2), et l'inadmissibilité en fonction de la date de naissance dont le seuil est établi au 4 septembre 1951 soient supprimées du projet de loi C-3.
    Deuxièmement, que les politiques administratives au sujet de la paternité non déclarée d'un enfant né d'une femme célibataire soient immédiatement modifiées en une exigence permettant à la mère de signer un affidavit ou une déclaration solennelle sur le statut du père de l'enfant.
    Le projet de loi C-3 ne reconnaît pas les droits des peuples autochtones à l'autodétermination. Il ne tient pas compte des droits fondamentaux des peuples autochtones en tant que nation, droits qui sont appuyés par la législation internationale en matière de droits de la personne. Ces droits fondamentaux permettent de déterminer qui peut être un citoyen d'une nation, de définir sa nationalité et son identité propres ainsi que les obligations et droits rattachés à leur définition. Le droit des peuples autochtones à l'autodétermination est soutenu par le droit international ainsi que par la Constitution canadienne. Les instruments internationaux comprennent la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Déclaration universelle des droits de l'homme.
    Les peuples autochtones ont le droit de se gouverner eux-mêmes, de renforcer leur propre forme de gouvernement et de citoyenneté, un droit non pas accordé par le gouvernement du Canada mais un droit inhérent aux peuples autochtones. Nous recommandons également que le gouvernement du Canada reconnaisse les droits inhérents des peuples autochtones de définir qui peut devenir un citoyen de leur nation et quelles sont les obligations et droits rattachés à cette définition. Toutefois, cela doit être réalisé en conformité avec la législation internationale en matière de droit de la personne, de façon à permettre aux peuples autochtones de faire une transition positive vers l'autodétermination avec les ressources suffisantes pour en faire une réussite.
(1545)
    En conclusion, pour ce qui est du projet de loi C-3 et de la proposition d'un processus conjoint distinct pour s'attaquer à des questions élargies, bien que Femmes Autochtones du Québec reconnaisse le besoin de changer le caractère archaïque de la Loi sur les Indiens, notre organisation, comme je l'ai dit plus tôt, déplore la vision restrictive du gouvernement fédéral qui se limite à des solutions à la pièce pour remédier au problème précis de discrimination soulevé par l'affaire McIvor et telle qu'analysée par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans le cadre de son mandat limité. Le gouvernement du Canada a laissé passer l'occasion de mettre fin au régime patriarcal de la tutelle autochtone que constitue la Loi sur les Indiens en mettant en oeuvre un processus de décolonisation où les valeurs, la culture, la langue et les institutions autochtones de même que l'autodétermination et l'appartenance à une nation autochtone seraient respectées et renforcées.
    Malgré que le gouvernement fédéral ait reconnu qu'il y a un certain nombre de questions élargies rattachées à l'inscription et à l'appartenance qui dépassent la portée de la décision McIvor, les changements proposés à la Loi sur les Indiens ne s'attaquent pas à ces questions élargies. Au lieu de cela, le gouvernement canadien se fie à un processus distinct et parallèle au cours duquel le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien travaillera en partenariat avec des organisations autochtones nationales pour établir un processus exploratoire comprenant la participation des premières nations et d'autres groupes et organisations autochtones. Un processus aussi exclusif, qui se limite à la participation d'organisations autochtones nationales, soulève des préoccupations, car ces discussions ne sont aucunement démocratiques et elles font fi de l'obligation constitutionnelle du Canada de mener des consultations adéquates au sujet des questions touchant les droits des peuples autochtones.
    Ces discussions parallèles prévues excluent également le droit des peuples autochtones à l'autodétermination dans le cadre du processus législatif en cours, car c'est le gouvernement qui décidera une fois de plus qui a le droit de déterminer le statut d'Indien, soit une étape importante dans l'identité, l'appartenance et la citoyenneté autochtone. Par conséquent, ces faits soulèvent la question suivante: cela signifie-t-il qu'il faut absolument des décisions des tribunaux pour motiver le gouvernement du Canada à s'attaquer à la question épineuse de la légitimité de la Loi sur les Indiens et qu'à chaque fois, la réponse du gouvernement sera des plus restreintes? Au vu du projet de loi C-3, malheureusement, il semble que oui. Ainsi, il est raisonnable de s'attendre que de nouvelles causes se feront entendre devant les tribunaux pour dénoncer la poursuite de la discrimination fondée sur le sexe et sur la race présente dans la Loi sur les Indiens.
    Je crois que je m'en tiendrai à cela aujourd'hui.
    Merci beaucoup.
    Avez-vous quoi que ce soit à ajouter?
    Je crois que, lorsqu'il a fallu définir le statut, le Canada a décidé qui allait être bénéficiaire des traités. Le Canada, ce faisant, n'a pas tenu compte du fait que les traités étaient conclus entre des nations, et qu'en tant que nations, nous avons le droit de décider de nos règles d'appartenance.
    Nous avons formulé d'autres recommandations, par exemple: tenir une conférence constitutionnelle de deux jours avec les peuples autochtones et leurs représentants afin de discuter des ententes et des accords fédéraux, provinciaux et territoriaux et plus particulièrement les implications et les obligations de chaque partie en matière de compétence; voir à ce que le projet de loi C-3 élimine toutes formes de discrimination; supprimer les catégories prévues dans le projet de loi C-3; veiller à ce que le gouvernement du Canada reconnaisse la nature historique et institutionnelle... Nous voulons dire par là que nous n'avons jamais abandonné notre souveraineté, nous n'avons jamais abandonné nos droits. Les femmes autochtones sont celles qui possèdent la culture, la langue et le patrimoine qu'elles laisseront aux enfants.
    Ce projet de loi est une initiative qui permet d'apporter certains changements à la Loi sur les Indiens, une loi archaïque. Mais il reste beaucoup de travail à faire. Nous espérons que les discussions sur le renouvellement de notre relation commencera enfin entre nous, de nation à nation, entre le gouvernement du Canada et les peuples autochtones. Non pas seulement entre organisations autochtones nationales, mais entre peuples autochtones en tant que nations. C'est ce qui avait été décidé lors de la Commission royale sur les peuples autochtones. La commission s'est attachée à voir comment définir cette relation, à la fois nouvelle et en évolution. Ce que la Loi sur les Indiens a fait, c'est de nous priver de nos droits à titre de nations autonomes.
    Merci de m'avoir écoutée. Je sais que d'autres personnes veulent présenter un exposé, et je vais m'arrêter ici.
    Merci.
(1550)
    Merci beaucoup, madame Gabriel.
    Selon l'ordre du jour, je crois que nous aurons du temps pour tout le monde. Nous allons accorder trois minutes de plus à Mme Corbiere. Les autres auront 10 minutes pour leur exposé, et les membres du comité disposeront de sept minutes chacun pour poser des questions. Il nous faudra neuf ou dix minutes de plus, mais nous n'avons pas à aller voter à 17 h 30. Nous allons donc poursuivre tel que prévu jusqu'à ce que nous ayons terminé. Les témoins auront donc 10 minutes pour s'exprimer, comme d'habitude. Chaque séance d'une heure devra se prolonger un peu, mais nous pourrons terminer aujourd'hui.
    Nous accueillons maintenant le grand chef Lucien Wabanonik. C'est un plaisir de vous accueillir, grand chef. Le chef Wabanonik représente l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador.
    Chef Wabanonik.

[Français]

    Merci, monsieur le président, de nous accorder un peu plus de temps. Vous comprendrez que c'est un dossier extrêmement sensible pour nos peuples et nos nations. On apprécie votre flexibilité par rapport au temps qui nous est alloué.
    Mesdames et messieurs, membres du comité, le 24 novembre 2009, à l'issue du court processus d'engagement mis sur pied dans le cadre du projet de modification du programme d'inscription au Registre des Indiens, le chef Ghislain Picard de l'APNQ écrivait au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien pour lui suggérer d'obtenir une prolongation du délai de suspension de la déclaration d'illégalité prononcée par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique le 6 avril 2009.
    Afin de pouvoir consulter les Premières Nations — on parle de consultations —, il apparaissait en effet pour le chef Picard que la brève rencontre avec les fonctionnaires, visiblement mal informés, à laquelle les chefs des Premières nations du Québec et du Labrador avaient eu droit le 4 novembre 2009, ne répondait pas à l'obligation de consultation par le gouvernement du Canada.
    Le fédéral devait nous consulter sur cette importante question. Il ressort que le délai imparti au Parlement pour une si importante affaire est quelque peu artificiel. En fait, on pourrait croire que cela sert le gouvernement d'invoquer certaines contraintes factices pour éluder sa responsabilité d'éliminer toutes les distinctions discriminatoires que comportent les règles d'inscription des Indiens et de concevoir, en collaboration avec les Premières nations, un plan adéquat pour mettre en oeuvre ces modifications.
    Somme toute, la nouvelle échéance du 5 juin 2010 ne devrait pas servir de prétexte pour ne corriger qu'imparfaitement une seule distinction discriminatoire parmi celles qui subsistent encore dans la Loi sur les Indiens et pour ne pas prévoir, avec les Premières nations, les multiples effets des changements aux règles d'inscription. Mais en même temps, nous croyons que les huit semaines qu'il reste d'ici l'ajournement des travaux de la Chambre devraient suffire au Parlement pour améliorer le projet de loi C-3, Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens en donnant suite à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor v. Canada (Registrar of Indian and Northern Affairs) au regard des exigences de la Charte canadienne des droits et libertés.
    Nous croyons que ces huit semaines devraient suffire au gouvernement pour convenir avec nous, en parallèle, d'un plan de mise en oeuvre pour gérer l'afflux de nouveaux arrivants dans nos communautés. Par ailleurs, si, malgré la bonne foi et les efforts de toutes les parties concernées, ces huit semaines étaient insuffisantes, le gouvernement devrait se prévaloir en temps utile de l'ouverture manifestée par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans son jugement du 1er avril dernier et demander une autre prolongation du délai de suspension de la déclaration d'invalidité.
    Si le Canada est vraiment le champion de la justice et de l'équité pour tous, le Parlement doit apporter au projet de loi C-3 les changements nécessaires pour que la règle des frères et soeurs soit éliminée des règles d'inscription, en même temps que la distinction qui a été jugée illégale dans l'arrêt McIvor.
    Au cours de la brève rencontre que les chefs du Québec et du Labrador ont eue avec les fonctionnaires du ministère dans le cadre du processus d'engagement, il n'a pas été possible d'obtenir le moindre renseignement sur ce que le gouvernement, fort de l'expérience récente fournie par la Loi C-31, entendait faire pour atténuer les problèmes causés par l'application des modifications proposées aux règles d'inscription. Nous en avons conclu que le ministre ne s'était pas encore penché sur la question au moment d'entreprendre la rédaction du projet de loi C-3, l'automne dernier.
    L'application du projet de loi C-3 engendrera plusieurs problèmes, notamment des problèmes d'accès des personnes visées par le projet de loi C-3 à l'information ou visant les modifications aux règles d'inscription et les bénéfices accompagnant le statut d'Indien ainsi que des problèmes reliés au processus et au délai d'inscription; des problèmes d'ordre social et politique reliés à l'intégration sur ou hors réserve des nouveaux arrivants dans les communautés des Premières nations, problèmes pouvant découler d'un marché de l'emploi restreint, de différences culturelles potentielles ou tout simplement d'une hostilité naturelle face à un choix imposé et, enfin, des problèmes liés à la capacité financière et autre d'intégrer de nouveaux arrivants sur les réserves et de leur fournir les programmes et services auxquels ils ont droit.
(1555)

[Traduction]

    Il est donc essentiel qu'Affaires indiennes et du Nord Canada s'entende avec les premières nations pour établir une feuille de route visant la mise en oeuvre des modifications aux règles d'inscription avant l'adoption du projet de loi C-3. Le comité peut s'assurer que le gouvernement le fasse. Il est également essentiel que le projet de loi comprenne une disposition qui exige que les ministres fassent régulièrement rapport au Parlement concernant la mise en oeuvre de ces modifications et des questions particulières soulignées dans le rapport.
    Les premières nations du Québec et du Labrador espèrent non seulement que, avec le temps, toutes les distinctions discriminatoires soient supprimées des règles d'inscription au statut d'Indien, mais que ces règles ne soient plus jugées nécessaires. Les premières nations espèrent récupérer tous les pouvoirs en matière d'appartenance qu'elles exerçaient avant le milieu du XIXe siècle. Cela exige au préalable l'autonomie politique et économique des premières nations, la reconnaissance de nos droits traditionnels et le respect des traités. C'est uniquement lorsque ces objectifs seront atteints que l'article 33 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones sera vraiment respecté. Les peuples autochtones ont le droit de déterminer les structures et la composition de leurs institutions selon leurs propres procédures.
    Les premières nations du Québec et du Labrador demandent entre-temps au comité de prendre les deux premières mesures suivantes et d'inciter le gouvernement à prendre la troisième: d'abord, améliorer le projet de loi C-3 pour éliminer toutes les règles d'inscription au statut d'Indien qui créent une distinction discriminatoire; ensuite, doter le projet de loi d'une disposition qui oblige le gouvernement à faire rapport au Parlement sur la mise en oeuvre des modifications apportées aux règles d'inscription; enfin, créer avec les premières nations un plan de mise en oeuvre de ces modifications.
    J'ai terminé, monsieur le président. Merci de m'avoir écouté.
    Merci beaucoup, grand chef.
    Je crois avoir mentionné que nous allons redonner la parole à Mme Corbiere. Vous avez trois minutes de plus pour aborder d'autres questions de votre exposé. Nous pouvons maintenant continuer.
    Nous accueillons aujourd'hui

[Français]

    M. Daniel Nolett, directeur général, Conseil de bande des Abénakis d'Odanak, et Michèle Taina Audette, représentante, Marche Amun.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous avons également Paul Dionne parmi nous aujourd'hui.
    Le représentant du conseil de bande d'Odanak n'a pas pu se joindre à nous aujourd'hui, mais je crois comprendre, monsieur Dionne, que vous êtes du conseil et que vous témoignez en compagnie de M. Nolett et de Mme Audette. Est-ce bien cela? Il y aura un exposé pour les deux?

[Français]

    En fait, il va y avoir deux présentations, monsieur le président. Me Dionne est ici avec nous. C'est l'avocat qui s'occupe de la cause des Abénakis. Il répondra aux questions éventuelles des membres du comité.

[Traduction]

    D'accord, allez-y. Vous avez 10 minutes.
(1600)

[Français]

    Merci, monsieur le président et membres du comité. D'abord, veuillez excuser l'absence du chef Rick O'Bomsawin qui devait faire la présentation. À cause d'obligations de dernière minute, il n'a pas pu se présenter. Je vais faire la présentation pour le Conseil de bande. J'inviterais Mme Michèle Audette à débuter la présentation.
    Merci beaucoup. Je tiens, en mon nom, à dire un gros merci à la nation abénaquise d'avoir pensé à notre beau projet, la Marche Amun. Je vous salue, tout le monde, ici cet après-midi.
    À mes yeux, le projet de loi C-3, qui est en stricte conformité avec le jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'arrêt McIver contre Canada, n'envisage que quelques corrections partielles aux aspects discriminatoires des règles d'inscription des Indiens. J'ajouterai que, selon moi, ce projet de loi est un prétexte de la part du ministère pour faire le minimum. Le ministère se dépêche trop, et on risque de créer de sérieux problèmes à court, à moyen et à long terme.
    Vous, ici autour de la table, avez une chance incroyable, et vous devriez l'utiliser pour corriger complètement tous les aspects discriminatoires qui découlent de la Loi sur les Indiens. Vous êtes d'autant plus chanceux que le jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique ne nous empêche pas de corriger ces aspects. Aidez-moi, je vous le demande, aidez-nous, celles et ceux qui participent à la Marche Amun, à écrire une nouvelle page d'histoire sur la question des Premières nations, sur la question des peuples autochtones du Canada. Mettons fin, une fois pour toutes, à la discrimination qui perdure depuis trop longtemps.
    Dans l'histoire, la discrimination fondée sur le sexe est arrivée sans qu'on ne le demande, en 1868. Des mesures législatives décrétaient alors que le statut d'Indien pouvait être transmis seulement par les hommes. Vous connaissez la chanson: lorsqu'un homme autochtone mariait une non autochtone, cette femme devenait indienne et leurs enfants aussi. Mais quand des femmes, comme ma mère ou comme nos grand-mères, mariaient un non autochtone ou encore un autochtone non statué, elles perdaient leurs droits ancestraux et leurs droits issus de traités. Leurs enfants les perdaient également. Dans le jargon de la Loi sur les Indiens, on dit qu'elle perd son statut et elle est en plus expulsée de sa communauté et de son territoire.
    C'est triste de constater à l'heure actuelle, en 2010, que ce sont encore les femmes qui en paient le prix. Les femmes autochtones continuent d'être victimes de discrimination fondée sur le sexe — comme dans le cas de Mme Kim Arseneault, que mon collègue va vous présenter dans quelques minutes —, et ce, dans plusieurs domaines.
    Une telle discrimination va à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés, comme l'a mentionné Mme Gabriel. J'aimerais aussi ajouter certaines conventions que le Canada a signées et qu'il ne respecte pas: la Déclaration américaine des droits et devoirs de l'homme, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et, surtout, la Convention relative aux droits de l'enfant .
    Oui, monsieur Lemay, il y a beaucoup de gens qui travaillent fort pour venir vous parler aujourd'hui.
    Le 4 mai prochain marque le début d'un geste symbolique. Un groupe de femmes va marcher 500 kilomètres, à partir de Wendake jusqu'à Ottawa, sur la Colline du Parlement, pour laisser un message au premier ministre Stephen Harper et à son ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, M. Strahl.
    Chaque jour, nous allons dire le même message à tous les citoyens du territoire du Québec, aux Québécois et Québécoises, et aussi aux Canadiens. Nous voulons dire que le Canada est en train de présenter un projet de loi qui vise à renforcer — je dis bien renforcer — l'inéquité des sexes, quand nous, nous exigeons que le Canada corrige toute forme de discrimination.
    Pour ce qui est l'obligation de divulguer le nom du père à la naissance de nos enfants, on ne demande ça a aucune Canadienne. Si une Canadienne amène son enfant à l'hôpital pour une urgence, jamais on ne va lui demander de prouver qui est le père avant qu'on lui offre un service. C'est ce qui nous arrive, dans nos communautés, depuis 1985. Il y a aussi le droit à l'obtention du statut d'Indien pour les femmes et leurs enfants; il faut abolir ces catégories.
    De plus, il faut se rappeler que la discrimination perdure quant au droit d'appartenance à la bande pour ces femmes et leurs enfants. Imaginez des codes d'appartenance restrictifs dans certaines communautés. En adoptant le projet de loi C-3, elles ne pourront pas revenir dans ces communautés. Et il y a le refus d'ajouter de nouvelles sommes d'argent pour de nouvelles inscriptions au statut d'Indien. Les femmes en paient encore. Elles ont encore des blessures qui datent de 1985. Avec le projet de loi C-3, on va revivre sinon vivre les mêmes représailles qui ont cours depuis 1985.
(1605)
    Ce qui me lève le coeur, en tant que mère de cinq enfants — dont un est plus indien que moi, un n'est pas reconnu, et j'illustre bien ici la situation —, c'est que c'est toujours le droit exclusif d'Ottawa de déterminer qui est Indien et qui ne l'est pas. J'ai 38 ans, même si aux yeux de la loi j'ai 17 ans. Je pense qu'il y a des gens dans le communautés qui peuvent le faire.
    Avant de terminer, je vous dis que si le projet de loi C-3 est adopté tel quel, la discrimination va perdurer. La discrimination va continuer et je ne veux pas être complice de ça. Je vous demande à vous aussi, chers députés, de ne pas être complices de cette injustice.
    En mon nom personnel et au nom de mes enfants, je vous dis que vous avez la chance de faire une différence. S'il vous plaît, faites-la.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Maintenant, c'est à votre tour, monsieur Nolett.
    Merci, monsieur le président.
    D'entrée de jeu, j'aimerais vous dire que la nation abénakise a été active pour ce qui est d'essayer d'apporter des modifications à la loi. On a intenté une action à la Cour supérieure en mars 2009. Des gens de la nation abénakise sont aussi intervenus dans l'affaire McIvor pour faire avancer la lutte contre la discrimination qui subsiste aux termes de la Loi sur les Indiens.
    Je voudrais aussi vous dire, comme d'autres l'ont dit plus tôt, que le projet de loi C-3, tel que soumis, présente encore des aspects discriminatoires qui n'ont pas été modifiés. Cet après-midi, j'aimerais notamment vous présenter deux cas. On vous a présenté des documents et des tableaux qui illustrent mieux ces cas de discrimination.
    Tout d'abord, il y a la règle des frères et soeurs qui est représentée par le cas de Susan et Tammy Yantha, illustré dans le tableau. Le projet de loi C-3 ne remédie pas à ce type de problème. En 1951, quand le registre a été créé, lorsqu'un homme indien avait des enfants hors mariage avec une non-indienne, seuls les garçons avaient le droit à l'inscription. Les filles issues d'une telle union n'avaient pas droit au statut d'Indien.
    En 1985, avec le projet de loi C-31, les filles issues d'une telle union ont pu obtenir leur statut en vertu du paragraphe 6(2). Dans le tableau, il est indiqué que la première génération, soit l'Indien et la non-Indienne qui sont mariés ensemble, étaient soumis à la loi de 1951. Pour ce qui est de la deuxième génération, le père de Susan Yantha était un Indien, mais sa mère ne l'était pas. Ainsi, si Mme Yantha avait eu un frère, son frère aurait eu son statut en vertu du paragraphe 6(1). En 1985, Mme Yantha a obtenu son statut en vertu du paragraphe 6(2). Aujourd'hui, sa fille, Tammy Yantha, qui est de la troisième génération, n'a toujours pas son statut, alors que si Susan avait eu un frère, les enfants de ce dernier auraient aujourd'hui leur statut en vertu du paragraphe 6(1). Présentement, le projet de loi C-3 ne permet pas aux enfants de Susan Yantha d'être statués. Le projet de loi oublie ces cas.
    Revenons à l'autre exemple qu'on a et qui est directement lié à l'affaire McIvor, soit la cause des cousins. Il s'agit du cas de Kim Arseneault, qui est membre de la première nation de Wôlinak. Elle est de la troisième génération.
    En 1985, sa grand-mère a récupéré son statut en vertu du projet de loi C-31. Sa grand-mère ayant eu des enfants avec un non-Indien après s'être mariée a perdu son statut. Ce qui fait que, en 1985, sa grand-mère a récupéré le statut en vertu du paragraphe 6(1). Cette femme a eu des enfants, dont la mère de Kim. Celle-ci est venue au monde dans les années 1950 et a eu Kim avant 1985.
    Ainsi, si on observe de façon précise le projet de loi C-3 — je comprends que cela peut être compliqué, mais avec le tableau vous serez en mesure de suivre — aujourd'hui, avec le projet de loi C-3, Kim va récupérer le statut en vertu du paragraphe 6(2). Alors que si Kim avait été dans la lignée d'un homme, elle aurait, comme tous les enfants de la troisième génération, le statut en vertu du paragraphe 6(1).
    Donc, parce que Kim appartient à la troisième génération de la lignée d'une femme et qu'elle est venue au monde avant 1985, selon les amendements à la loi, elle devrait récupérer le statut d'Indien en vertu du paragraphe 6(1). Alors que, présentement, avec le projet de loi C-3, à cause d'une discrimination fondée sur le sexe, Kim récupérera seulement le statut en vertu du paragraphe 6(2).
(1610)
    Merci. Malheureusement, votre temps est écoulé.

[Traduction]

    Nous retournons maintenant à Mme Corbiere pour trois minutes.
    Monsieur, nous vous écoutons.
    J'aimerais apporter quelques précisions à l'un des points abordés dans le mémoire. De façon générale, je crois que le projet de loi représente une solution assez peu efficace. Je pense que tout le monde en convient. Il ne résoudra pas les problèmes qui découlent depuis longtemps de la Loi sur les Indiens.
    Différentes études dont celle de la Commission royale sur les peuples autochtones et du rapport du comité Penner de 1985, recommandent de ne pas toucher à la Loi sur les Indiens. La loi est trop inefficace et il est inutile de vouloir la réparer. L'essentiel consiste à reconnaître le droit des premières nations à définir leurs propres règles d'appartenance.
    L'une des difficultés sur lesquelles le comité bute à ce moment-ci, c'est son incapacité d'aborder la question plus vaste de l'autonomie gouvernementale. Selon ce que j'ai compris des règles établies, des limites sont imposées à la portée de votre étude. Vous devez vous limiter au contenu du projet de loi. Nous recommandons que le comité se lance dans une initiative de plus grande envergure, une initiative comme celle qui avait donné naissance au rapport du comité Penner en 1985.
    En fait, comme mon plus jeune collègue l'a fait remarquer, j'étais déjà là à l'époque, et je me souviens exactement dans quelles circonstances l'étude s'était tenue. La Charte venait d'entrer en vigueur. L'article 15 était aussi sur le point d'entrer en vigueur, sa mise en oeuvre ayant été retardée jusqu'à 1985. L'affaire Lovelace avait été portée à l'attention des Nations Unies, et il y avait beaucoup de pression pour qu'on arrive à des solutions.
    Depuis, nous avons compris que ces solutions étaient inadéquates. On le voit bien aujourd'hui. Je croyais néanmoins à l'époque que l'idée que le Parlement étudie les questions d'appartenance, de citoyenneté et d'autonomie gouvernementale était plutôt intéressante. C'était une occasion pour les parlementaires de comprendre un peu mieux le portrait global de la situation. Je crois que la même chose s'impose aujourd'hui.
    Nous recommandons d'abord et avant tout que vous preniez le temps d'élargir votre mandat, si c'est possible, et d'examiner les questions d'autonomie gouvernementale, d'autodétermination, et de citoyenneté.
    Merci à vous tous de votre compréhension et de votre patience.
    Nous allons maintenant passer à la série de questions. Nous commençons par M. Russell, qui aura sept minutes. Je rappelle aux témoins que chaque période de sept minutes comprend les questions et les réponses. Nous serons très stricts à ce sujet.
    Monsieur Russell, allez-y.
(1615)
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour à vous tous et toutes, et merci de vos exposés instructifs.
    Je prends bonne note, tout comme, j'en suis sûr, les autres membres du comité, de vos commentaires concernant les aspects plus larges des enjeux qui vous occupent, qu'il s'agisse des champs de compétence, de l'autonomie gouvernementale, de l'appartenance aux bandes, du droit relatif à la citoyenneté ou de l'établissement des critères de citoyenneté. Je comprends ce que vous dites et je suis fondamentalement d'accord avec vous.
    Je suis d'accord sur le fait que le gouvernement s'est attaqué à la question de l'inégalité de genre présente dans la Loi sur les Indiens parce qu'il a été forcé de le faire à la suite d'un jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Je conviens aussi que le projet de loi C-3 est très restreint et qu'il ne touche que les faits exposés dans l'affaire McIvor. Je crois que toutes les personnes ici présentes savent que l'inégalité de genre, la discrimination sexuelle, ne disparaîtra pas après l'adoption du projet de loi C-3. Je crois aussi que nous avons l'obligation d'agir.
    J'ai bien écouté vos arguments concernant le caractère archaïque de la Loi sur les Indiens. J'aimerais cependant régler une question une fois pour toute: croyez-vous que les parlementaires peuvent s'attaquer pour le moment aux problèmes de la discrimination sexuelle causée par la Loi sur les Indiens, tout en tenant compte du fait qu'il existe des enjeux plus larges à régler? Chacun et chacune d'entre vous a-t-il des recommandations précises à formuler pour qu'on mette fin, une fois pour toute, à cette discrimination sexuelle?
    Si vous en avez, je serai heureux de les entendre pour qu'on puisse les analyser dès que possible et les présenter au comité. Ce serait un plaisir pour moi de le faire pour vous.
    Chaque témoin peut-il répondre ou brièvement à cette question?
    Monsieur Russell, est-ce bien ce que vous préféreriez, qu'ils répondent maintenant? Devraient-ils plutôt soumettre leurs observations plus tard?
    Absolument, monsieur le président.
    Nous allons donc laisser chacun des témoins répondre, en commençant par Mme Audette.
    Veuillez vous limiter à une minute et demie, s'il vous plaît.

[Français]

    C'est parfait.
    Je vais seulement réitérer mon appui à ce qu'ont dit le l'Association du Barreau autochtone, Femmes autochtones du Québec et l'Assemblée des chefs relativement au droit à l'autodétermination et à l'autonomie gouvernementale. Je suis parfaitement d'accord avec cela. Toutefois, vous me demandez une chose. Il y en a tellement. Je pourrais vous dire qu'il faut arrêter d'obliger les mères à dévoiler le nom du père de leur enfant. Je vous jure qu'il y en a une foule d'autres. Votre question constitue une impasse. Pour moi, cela aurait dû être enlevé depuis 1985.
    Je n'ai pas de solution globale à proposer à M. Russell, mais il y a une solution partielle. Dans le cadre de l'arrêt McIvor, afin de corriger la situation que M. Nolett a expliquée, c'est-à-dire les troisièmes générations de femmes que touche le projet de loi C-31 et qui sont nées avant le 17 avril 1985, l'Association du Barreau canadien a proposé la semaine dernière d'ajouter paragraphe C.2 à la loi. Cela se lirait comme suit:

[Traduction]

Cette personne est un enfant né après le 4 septembre 1951 et avant le 17 avril 1985, d'un parent ayant le droit d'être inscrit en vertu de l'alinéa 6(1)(c.1).
    Je crois que cette disposition améliorerait beaucoup le projet de loi. Elle permettrait aux enfants de troisième génération qui sont nés avant le 17 avril 1985 d'obtenir le statut en vertu du paragraphe 6(1) plutôt que le statut en vertu du paragraphe 6(2), ce à quoi ils ont droit.
    Poursuivons.
    Grand chef Wabanonik.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je ne suis ni à l'aise ni d'accord avec la question. C'est tellement difficile de répondre à cela. Si nous disons des choses, cela pourrait créer d'autres discriminations. Ma crainte est de cette nature. On répond seulement à une question et cela peut être présenté en Chambre pour une seule question. J'ai une crainte par rapport à cela.
    Toutefois, si je devais répondre, monsieur Russell, je dirais pourquoi ne pas respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones? Elle dit de respecter l'autonomie gouvernementale des peuples et des nations. Dans ce sens, on pourrait amener nous-mêmes nos propres solutions à cette question. Il faut que le gouvernement fasse preuve de flexibilité et d'ouverture.
    Merci.
(1620)

[Traduction]

    Mesdames Gabriel et Corbiere, vous avez chacune une minute.
    Je ferai de mon mieux.
    Merci de poser cette question, qui est très importante d'après moi. S'il n'y avait pas de soi-disant avantages économiques — j'utilise ce terme même s'il n'y a pas vraiment d'avantages —, je ne crois pas qu'on discuterait de cette question aujourd'hui. La Constitution canadienne reconnaît les droits inhérents des peuples autochtones. Pourquoi devons-nous toujours aller devant les tribunaux pour définir nos droits inhérents? Pourquoi devons-nous dépenser temps, énergie et argent de cette façon? On dit souvent que la Loi sur les Indiens est archaïque et qu'il faudrait s'en débarrasser — et cela, depuis bien des générations — mais personne n'a encore décidé de le faire. Il faut s'en débarrasser. C'est une mauvaise loi.
    Dans un sondage effectué auprès de nos membres, 86 p. 100 des répondants ont dit qu'il fallait éliminer les catégories. Soixante-dix pour cent ont dit qu'il fallait revenir à la création de la Loi sur les Indiens, en 1876, pour régler la question du statut, et nous voici à parler de droits issus des traités...
    Nous allons en rester là, madame Gabriel. Merci.
    Mme Corbiere ou M. Nahwegahbow?
    C'est une question intéressante, et nous aimerions pouvoir vous aider, mais c'est aussi un terrain glissant. Je crois que la meilleure solution serait d'adhérer à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et de laisser les peuples autochtones décider eux-mêmes. Il faudra que le Canada accepte de faire un acte de foi. Cela permettra d'apporter des changements profonds. C'est ce que le comité devrait faire.

[Français]

    Merci.
    Monsieur Lemay, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'être parmi nous. Les trois projets d'amendement qui seront déposés par le Bloc québécois concernent le sous-alinéa 6(1)(c.1)(iv) de la Loi sur les Indiens. Si vous consultez le mémoire présenté en anglais et en français par l'Association du Barreau canadien — et je les en félicite, en passant — , vous verrez qu'il s'agit exactement des trois mêmes amendements. Je voudrais connaître votre opinion sur ces derniers.
    Dans le premier amendement, nous proposons que le sous-alinéa 6(1)(c.1)(iv) de la Loi sur les Indiens soit modifié. On lirait ce qui suit:
Une nouvelle inscription en vertu du paragraphe 6(2) serait possible pour toute personne satisfaisant à tous les critères suivants: sa grand-mère a perdu le statut d'Indienne en épousant un non-Indien; un de ses parents est actuellement inscrit ou a le droit d'être inscrit en vertu du paragraphe 6(2) de la Loi sur les Indiens; elle est née le 4 septembre 1951 ou après cette date.
    Je vous demanderais d'en prendre connaissance. Je vais proposer dans quelques minutes qu'on reporte l'étude article par article à mardi prochain. Vous auriez donc jusqu'à jeudi ou vendredi prochain pour nous faire part de vos commentaires. Je sais que c'est vite, mais c'est ce que veut selon moi le gouvernement.
    Dans le deuxième amendement, nous proposons d'abolir carrément l'article 9 du projet de loi C-3. Je vous inviterais à en prendre connaissance.
    Dans le troisième amendement, on ajouterait au paragraphe 6(1) de la Loi sur les Indiens le paragraphe (c.2). On lirait ce qui suit:
Cette personne est un enfant né après le 4 septembre 1951 et avant le 17 avril 1985 d'un parent ayant le droit d'être inscrit en vertu du sous-alinéa 6(1)(c.1).
    Ceux qui me connaissent savent à quel point j'ai du respect pour les Premières Nations. Nous allons tenter d'éliminer la discrimination. Nous pensons que ce serait possible par l'entremise de ces trois amendements. Pour ce qui est du droit de consulter, d'étudier, etc., je pense que ce n'est pas l'objet du présent projet de loi. Il faut s'en tenir à ce dernier. Je pense que mes collègues de ce côté-ci de la table vont vouloir essayer d'éliminer la discrimination. Il se pourrait que ce projet de loi aille plus loin, mais il faudrait que mes collègues d'en face se rappellent le projet de loi C-21, qui a aboli l'article 67 de la Loi sur les Indiens. Il y avait un petit article, mais après son passage ici, il y en avait neuf. Et pourtant, c'est fait. Je ne vous demande pas de me donner une réponse immédiatement. Si vous pouvez le faire, ce sera tant mieux.
    Monsieur le président, si vous le permettez, je vais terminer par un rappel au Règlement. Je vais demander que ce comité reporte l'étude article par article de ce projet de loi à mardi le 27 avril prochain et que les projets d'amendement soient déposés au plus tard le vendredi 23 avril à 16 heures.
(1625)
    Je pense que nous avons trouvé un moyen d'éliminer la discrimination, mais que ça ne sera pas facile.

[Traduction]

    Merci. Les témoins ont entendu la question.
    En ce qui concerne le rappel au Règlement, monsieur Lemay, il ne s'agit pas en fait d'un rappel au Règlement; cela concerne plutôt le programme du comité. Laissez-moi y réfléchir pendant quelques minutes et je vous donnerai une réponse.
    Souhaitez-vous donner du temps aux témoins pour qu'ils puissent vous répondre?
    Nous passons maintenant à Mme Crowder.

[Français]

    S'ils sont prêts, j'aimerais si possible qu'ils répondent. Sinon, on peut reporter la chose.
    Je voudrais que le rappel au Règlement soit débattu et fasse l'objet d'un vote avant 18 h 30.

[Traduction]

    Nous ferons de notre mieux. Comme vous le savez, monsieur Lemay, nous n'avons pas de questions urgentes à régler à la fin de la séance. Je comptais plutôt prendre le temps d'écouter tous les témoins. C'est pourquoi la réunion pourra dépasser 18 h 30, au besoin, afin que nous puissions entendre les témoins invités à se présenter aujourd'hui. Nous pourrons passer aux travaux du comité à la fin. Je m'y engage.

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Vous savez comme moi, vu votre longue expérience, que n'importe qui autour de la table pourrait demander à 18 h 30 l'ajournement du comité. Cela ne pourrait faire l'objet d'un débat et devrait être mis aux voix. Je voudrais qu'on en discute immédiatement après. Cela se ferait avant qu'on reçoive d'autres témoins et nous permettrait d'ajuster nos agendas avant la semaine prochaine.

[Traduction]

    Je poserai donc la question. En fait, en ce qui concerne l'ordre du jour, le moment où on ajourne la séance est laissée à la discrétion du comité. L'ordre du jour sert de guide, et on ne peut pas ajourner la séance sans le consentement des membres du comité. Vous avez raison concernant la motion sur l'ajournement, mais cette motion peut être défaite si une majorité des membres le décident.
    Je pose donc la question simplement: y a-t-il consensus parmi les membres du comité pour que nous remettions à plus tard l'étude article par article, qui était prévue au départ pour la deuxième heure de la séance de ce jeudi après-midi? M. Lemay propose que nous reportions cette étude à mardi prochain, le 27 avril, aux heures de réunions habituelles, de 15 h 30 à 17 h 30.
    Y-t-il consensus à ce sujet?
    Monsieur Duncan.
(1630)
    Je crois que, avant de permettre à l'opposition de présenter toute une série d'amendements, nous ayons l'occasion de tenir une réunion informelle, en dehors du comité, pour passer en revue les questions et les réponses du ministère concernant de possibles amendements. De cette façon, on pourra au moins tenir une discussion ouverte avant la présentation des amendements. Je crois que ce serait plus productif. C'est ce que je propose. En fait, nous avions déjà fait cette proposition, mais c'était pour demain, et je sais que demain ne convient pas au Bloc. Peut-être pouvons-nous nous réunir vendredi? Ce serait certainement utile.
    Vous parlez d'une réunion en dehors du cadre du comité.
    Une réunion tenue en dehors du comité permanent, mais conformément au Règlement.
    Le ministère est donc prêt à participer à ce type de consultations.
    Dans ces conditions, nous n'avons pas d'objections à reporter à mardi l'étude article par article.
    Pour être franc, c'est probablement ce qui va arriver de toute façon.
    Y a-t-il donc consensus pour que le comité permanent se réunisse mardi prochain pour procéder à l'étude article par article?
    De la même façon, monsieur Lemay, en ce qui concerne votre deuxième point, il faudrait que le greffier reçoive les amendements proposés d'ici vendredi 24 avril.

[Français]

    C'est le 23.

[Traduction]

    Le 23 avril.
    Ce sera l'occasion de soulever certaines questions.
    Je crois que cela sort du mandat du comité. M. Duncan propose essentiellement que le ministère soit disponible pour participer à ce type de consultations. Est-ce que j'ai bien compris? D'accord.
    Y a-t-il d'autres commentaires à faire sur ce point
    Oui. Je crois qu'il est très important que nous ayons l'occasion de poser certaines questions à AINC et au ministère de la Justice, parce que certains points soulevés par les témoins méritent d'être éclaircis.
    Bien entendu, au moment de l'étude article par article...
    Je voudrais faire cela avant l'étape des amendements. Je pense que M. Lemay propose que nous ayons le temps de réfléchir aux amendements. Cette réflexion pourrait influencer les amendements éventuels que nous proposerons.
    Si je ne m'abuse, on présentera les amendements pour étude au moment de l'étude article par article du projet de loi. Comme vous le savez, les fonctionnaires du ministère seront présents à ces réunions. Nous proposons de fixer le début de cet exercice à mardi.
    Comme vous le savez, si une seule réunion ne suffit pas pour terminer cette étude, il y en aura une autre.
    Excusez-moi, monsieur le président, je n'ai peut-être pas été claire. Certaines questions ont été soulevées qui pourraient entraîner d'éventuels amendements mais qui demandent peut-être que des précisions.
    Vous voulez des précisions alors, n'est-ce pas?
    C'est cela. Au lieu de répondre à l'intéressé, parce que j'ai cru comprendre que les fonctionnaires du ministère avaient offert de s'entretenir avec nous en particulier, il serait plus logique, comme M. Duncan l'a rappelé, que tous les membres du comité bénéficient des explications afin...
    Proposez-vous que les fonctionnaires du ministère viennent témoigner jeudi?
    Pourquoi pas?
    Nous avons...
    Je proposais que cela se fasse en dehors d'une réunion formelle du comité.
    D'accord. Monsieur Duncan, je m'en remets à vous pour faire le nécessaire. Il faudra que ce soit cette semaine, avant...
    L'invitation a été lancée. Il s'agit de trouver un moment qui convienne à tous.
    C'est cela.
    Pour l'instant, nous aurions une heure supplémentaire jeudi. Les membres du comité souhaitent-ils que nous invitions les fonctionnaires du ministère pour cette deuxième heure? Au cours de la première heure, actuellement nous avons prévu des représentants de la Commission canadienne des droits de la personne, ce jeudi. Voulez-vous entendre les représentants du ministère au cours de la deuxième heure?

[Français]

    Si cela convient au gouvernement, nous pourrions consacrer jeudi la première heure à la Commission des droits de la personne et la deuxième aux représentants du ministère. Nous aurions jusqu'à 16 heures vendredi pour déposer nos amendements. Nous étudierions ces amendements mardi prochain à compter de 15 h 30.
(1635)

[Traduction]

    Êtes-vous d'accord?
    Oui.
    Puisque personne n'y voit d'inconvénients, nous ferons ainsi. Nous inviterons les fonctionnaires du ministère à témoigner pendant la deuxième heure de la réunion de jeudi. Nous passerons à l'étude article par article le mardi suivant.
    Vous avez la parole, monsieur Russell.
    Merci, monsieur le président.
    Vous avez sûrement mon accord pour commencer l'étude article par article mardi et pour y consacrer le temps nécessaire pour veiller à ce que nous fassions les choses correctement. Les témoins que nous avons entendus nous ont fait une mise en garde. De plus, certains témoins hésitaient à proposer des amendements qui pourraient occasionner une discrimination quelconque encore une fois en raison des dispositions de la Loi sur les Indiens. Ainsi, à mon avis, il faut procéder avec la plus grande prudence car cette loi n'est pas toute simple, et certains amendements non plus.
    Je voudrais ajouter que par courtoisie, nous devrions recevoir les amendements proposés avant la fin de la journée vendredi.
    Bien sûr.
    Rien n'interdit de présenter des amendements le jour même de l'étude article par article, n'est-ce pas?
    Vous avez raison. Par courtoisie, nous demandons de recevoir le texte des amendements d'ici vendredi, mais le Règlement n'interdit pas qu'on propose des amendements pendant la réunion de mardi au moment de l'étude article par article.
    Nous savons, notre travail est soumis à certaines contraintes. Parfois, au Parlement, des amendements peuvent être proposés et ne jamais aboutir à quoi que ce soit. Ils peuvent être déclarés irrecevables par le greffier législatif ou, déclarés tel par le président. Nous allons faire de notre mieux dans les limites de ce que nous pouvons faire.
    Puisque c'est ce que les membres du comité souhaitent, nous procéderons ainsi.
    Merci de votre patience pendant que nous réglions quelques questions d'intendance. Vous êtes tous très patients et tolérants cet après-midi.
    Il restait quelques minutes de temps de parole à M. Lemay. Quelqu'un souhaite-t-il faire une brève remarque à cet égard? M. Lemay a posé la question.
    La parole est à M. Nolett.

[Français]

    Pourriez-vous vous limiter à 30 secondes, si possible?
    Selon moi, ça vaut la peine de considérer à tête reposée la proposition de modification de M. Lemay. Elle contient de bons points, mais on doit s'assurer que l'on ne manque pas l'essentiel des amendements. On a pris des notes et on va regarder ça. On propose de soumettre quelque chose d'ici à vendredi.
    Monsieur le président, je suggère que l'on distribue, en anglais et en français, le mémoire de l'Association du Barreau canadien qui aborde les articles en anglais et en français. C'est très précis et il n'y a pas d'ambigüité. On pourrait peut-être faire cela d'ici la fin pour que vous puissiez les avoir et nous faire parvenir quelque chose avant vendredi midi car nous devons déposer cela avant vendredi après-midi.

[Traduction]

    Nous allons faire faire des copies.
    Madame Audette.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Mes préoccupations portent sur tout ce que l'on a soulevé relativement à l'obligation de divulguer le nom du père, le droit à l'appartenance à la bande et le droit de résider dans la réserve. Je crains que tout cela soit omis à cause de ce que vous proposez. Toutefois, je ferai mes devoirs, c'est-à-dire que je le lirai et que je vous ferai part de ma position à ce sujet.

[Traduction]

    Quelqu'un d'autre a quelque chose à ajouter? Il reste environ 20 secondes. Très bien.
    La parole est à Mme Crowder pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier tous d'être venus. Vous avez soulevé des questions graves concernant les éléments discriminatoires qui figurent toujours dans la Loi sur les Indiens. Bien sûr, nous sommes nombreux à nous inquiéter de l'approche fragmentée choisie pour traiter de l'inscription et de la citoyenneté en même temps. Quand il a comparu devant le comité, le ministre lui-même a rappelé que les tribunaux ont été saisis d'au moins 14 affaires portant sur une discrimination quelconque, et nous sommes tous au courant de cela. Chose très inquiétante, si à l'issue des instances, les tribunaux décrètent qu'il y a effectivement discrimination, nous nous retrouverons autour de cette table pour encore une fois étudier d'autres modifications à la Loi sur les Indiens.
    Je pense qu'à l'occasion d'un autre projet de loi, c'était l'Association du Barreau Autochtone — et je ne me souviens plus de quel projet de loi il s'agissait — qui avait signalé les dangers d'une approche fragmentée dans le cas qui nous occupe et qui avait exhorté le gouvernement et le comité à y réfléchir sérieusement. Vous êtes nombreux à avoir parlé des conséquences accidentelles du projet de loi C-31 qui remonte à 1985 et des problèmes qu'il continue de soulever dans bien des collectivités. Si je comprends bien, ce genre d'approche suscite une inquiétude grave.
    Notre défit est le suivant: un arrêt de la Cour suprême de Colombie-Britannique a invalidé deux articles de la Loi sur les Indiens et cela aura des conséquences pour environ 45 000 personnes. Le président nous a déjà averti que certains amendements pourraient être déclarés irrecevables. Nous ne serons pas fixés tant que nous ne les aurons pas présentés. Je suppose que je cherche conseil auprès de vous. Étant donné que le projet de loi dont nous sommes saisis est de portée limitée, qu'il traite seulement d'aspects très limités des pratiques discriminatoires qui figurent dans la Loi sur les Indiens, plusieurs d'entre nous pensent appuyer le projet de loi C-31 malgré cette approche profondément bancale.
    Advenant que nous ne l'appuyions pas, avez-vous des suggestions à faire concernant le sort de ces 45 000 personnes qui risquent de perdre leur statut d'Indien inscrit dès le 5 juillet? Avez-vous des solutions? Non?
    Nous sommes confrontés à un défi même si nous convenons que ce n'est pas la voie à suivre. Si vous avez des remarques à faire, n'hésitez pas à intervenir. Je voudrais rappeler que certains de nos témoins ont envoyé des documents de référence. J'en ai un qui remonte à 2008; c'est un rapport de recherche préparé par l'APN et le MAINC sur l'inscription et l'appartenance des membres des premières nations. Ainsi, dès 2008, le gouvernement était parfaitement au courant de l'existence de problèmes: le rapport de la CRPA en 1996, le rapport Penner, que l'on a cité en témoignent et je pense qu'en 1988, un rapport de comité a signalé les défis.
    Pouvez-vous nous parler des recommandations du rapport de 1988 car c'est 22 ans plus tard que la question est abordée?
(1640)
    Si vous le souhaitez, je peux citer ce que dit le rapport du comité en 1988 en ce qui concerne la règle discriminatoire à l'égard de la fratrie...
    Car c'est le cas que vous avez expliqué, n'est-ce pas?
    Il s'agit du cas de Susan et Tammy Yantha. M. Nolett l'a décrit. En 1988, le MAINC a déposé un rapport sur l'application du projet de loi C-31. Le comité a déposé son propre rapport et recommandé... Permettez-moi de lire la 11e recommandation du cinquième rapport du comité:
Nous recommandons que le paragraphe 6(2) de la Loi modifiant la loi sur les Indiens, 1985 soit modifié avant la fin de la session courante du Parlement
... et cela était en 1988...
afin de supprimer la discrimination entre frères et soeurs.
    C'est le cas dont Daniel Nolett a parlé et les deux requérantes sont Susan et Tammy Yantha.
    Ainsi, les pratiques discriminatoires étaient publiquement reconnues et 22 ans plus tard nous ne savons toujours pas comment régler un problème dont les tribunaux sont saisis encore une fois. Je ne me trompe pas, n'est-ce pas? Je pense que vous nous avez envoyé un document sur l'affaire dont les tribunaux ont été saisis et ils l'ont été...
    C'était en mars 2009.
    Ainsi, étant donné la complexité de la l'appareil judiciaire, on peut attendre encore 10 ans avant que le problème ne soit résolu, problème que l'on avait reconnu en 1988.
(1645)
    Tout à fait. Vous allez sans doute vous réunir ici dans 10 ou 12 ans pour discuter du même enjeu car il y aura eu une autre décision du tribunal sur une autre situation discriminatoire.
    Je pense que nous savons tous, et du reste quelqu'un l'a signalé, que même si les tribunaux ont donné au gouvernement un délai jusqu'au 5 juillet, ils reconnaissaient que ce délai aurait pu être plus long étant donné la complexité de la situation et la nécessité de consulter les premières nations avant d'apporter des modifications substantielles à la Loi sur les Indiens.
    Voici pourquoi je proposerais une autre solution. Le gouvernement pourrait demander une prolongation du délai, retirer son projet de loi — parce que nous savons d'ores et déjà que nombre d'amendements éventuels seront déclarés irrecevables parce que hors de la portée du projet de loi — et le gouvernement pourrait présenter un projet de loi après avoir travaillé avec chaque nation individuellement pour trouver une solution aux situations auxquelles nous sommes confrontées.
    Cela vous semble-t-il une solution raisonnable?
    J'ai terminé mes questions.
    Merci, madame Crowder.
    La parole est à M. Duncan.
    Merci beaucoup. Il y a tant d'enjeux et bien peu de temps.
    Ce qui m'a frappé dans les témoignage, ce sont les nombreuses mentions du droit inhérent à déterminer l'appartenance à la bande.
    Ellen Gabriel, vos remarques m'ont frappé également. S'il n'y avait pas la perception d'« avantages », nos séances n'auraient pas lieu d'être. Si l'appartenance à la bande était déterminée strictement par les premières nations, ce n'est pas le gouvernement qui serait l'objet d'une action en justice mais sans doute y aurait-il des plaintes en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ainsi, c'est une conséquence qui découle des modifications abrogeant l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
    Toutefois, Dianne Corbiere nous a appris autre chose. Dianne, vous parliez du droit inhérent à déterminer l'appartenance à la bande. En même temps, vous abondiez dans le sens d'une recommandation faite par le chef national, offrant la même recommandation — et je ne sais pas qui abonde dans le sens de l'autre. Mais vous avez préconisé un comité parlementaire spécial pour étudier les questions de citoyenneté, d'appartenance à la bande et d'autres enjeux.
    Deux choses me frappent. D'une part, nous avons instauré un processus exploratoire, un processus parallèle, en même temps que l'étude du projet de loi C-3, pour traiter de ces sujets. N'y a-t-il pas toutefois une contradiction entre le droit inhérent et le souhait qu'un comité parlementaire se penche sur ces questions précisément? C'est là essentiellement la question que je vous adresse, madame Corbiere.
    Je vais répondre à cette question.
    L'argument est valable. C'est un sujet avec lequel le comité Penner s'est débattu à l'époque.
    La difficulté vient du fait que vous piétinez les droits des gens de toute façon. Plutôt que de le faire de façon vraiment inopportune, examinez bien la situation. Autrement dit, ne vous bornez pas à une série de modifications minimes mais considérez le tableau d'ensemble. Peut-être vous faut-il apporter les modifications qui vous sont présentées mais n'oubliez pas le tableau d'ensemble.
    Vous avez l'occasion d'aborder la question. Il existe désormais une déclaration internationale des droits des peuples autochtones et le Canada, citoyen du monde, doit s'occuper de ces droits.
    Il peut sembler y avoir contradiction mais si vous examinez la situation, faites-le sous l'angle qui s'impose.
(1650)
    J'ai une brève question complémentaire que je tiens à poser pour mémoire. Je crois qu'il y a 230 bandes d'un bout à l'autre du pays qui déjà déterminent leur propre citoyenneté. Si je ne m'abuse, rien n'empêche les autres premières nations d'en faire autant. Est-ce que je me trompe?
    Ce n'est pas tout à fait juste. La façon dont les premières nations peuvent actuellement déclarer l'appartenance de leurs membres est prescrite par la Loi sur les Indiens. La délégation à cet égard est très limitée et était prévue dans le projet de loi C-31. Je suppose qu'on essayait, à l'époque, de s'occuper de la question de l'autonomie gouvernementale et de la détermination de l'appartenance à la bande/citoyenneté. Les mesures prises toutefois n'étaient pas satisfaisantes et elles ne le sont toujours pas.
    Si je ne m'abuse, rien ne peut limiter le droit des Indiens inscrits quant à leur appartenance à une bande. Comment donc peut-on prétendre que l'article 10 de la Loi sur les Indiens est limitatif?
    Eh bien, il l'est. Il donne aux premières nations une certaine latitude pour déterminer l'appartenance à la bande mais il faut reconnaître une appartenance possible à ceux qui éventuellement ne sont pas inscrits. Le gouvernement doit être capable de conjuguer ces deux notions de façon équilibrée.
    Des représentants de nombreuses premières nations d'un bout à l'autre du pays veulent pouvoir déterminer l'appartenance à la bande, mais elles ne sont pas suffisamment financées. Vous avez parlé des avantages. C'est la grande question.
    Autre aspect dont le rapport Penner a fait état: il faut prévoir des accords fiscaux convenables avec les premières nations plutôt que d'accorder le financement, comme quelqu'un l'a dit, à des particuliers ou sur une base individuelle. Il faut pouvoir financer les premières nations, nation par nation.
    Monsieur le président, je tiens à dire que je pense que le processus exploratoire a démarré.
    Merci.
    Il semble que oui. Merci beaucoup, monsieur Duncan.
    Madame Gabriel, vouliez-vous faire une dernière remarque?
    Oui. Je voudrais rappeler que pour appartenir à une bande, il faut être Indien inscrit. Le fait d'être Indien inscrit ne confère pas nécessairement l'appartenance. Cela a posé des difficultés à bien des femmes autochtones qui ont recouvré leur statut en 1985 mais à qui on ne permet pas de vivre dans leur collectivité, d'y être enterrée ou de posséder les terres que leur lèguent leurs parents. C'est une des difficultés qui se posent à nous.
    Si ce projet de loi est adopté sans amendement, il faudra alors des garanties que les conseils de bande vont en respecter les dispositions. C'est le ministre des Affaires indiennes qui confère aux conseils de bande le pouvoir qu'ils détiennent. Certains de nos membres ont du mal à obtenir les services qu'ils demandent car, même si Ottawa reconnaît leur appartenance et le fait qu'ils soient inscrits, leurs propres bandes refusent de leur dispenser à eux et à leurs enfants les services demandés. La discrimination a été soulevée, mais il nous faut aborder le problème de la discrimination à tous les paliers.
    Bien.
    Notre temps est épuisé. Merci beaucoup.
    Je remercie tous nos témoins pour leur compréhension, cet après-midi, et particulièrement pour leur respect de nos règles strictes en matière de temps.
    Aux membres du comité: nous suspendons la séance pendant environ trois minutes. Nous essayerons de procéder le plus rapidement possible avant de passer à notre deuxième heure de séance.

(1655)
    Mesdames et messieurs, nous invitons nos témoins à prendre place, pour la deuxième heure.
    Je vous prie de m'excuser de bousculer tout le monde mais nous avons un ordre du jour chargé cet après-midi.
    Ceux qui étaient là pendant la première heure le savent, nos règles en matière de temps sont très strictes, aujourd'hui, mais nous les respecterons.
    Un peu de silence, s'il vous plaît. Il serait bon que ceux qui tiennent des discussions le fassent à l'extérieur.
    Nous poursuivons notre examen du projet de loi C-3.
    Comme je le disais, nous respecterons le format des exposés d'une dizaine de minutes suivis de séries de questions et réponses de sept minutes.
    Pour cette deuxième heure, souhaitons la bienvenue au chef Angus Toulouse, chef régional de l'Ontario, pour les chefs de l'Ontario, qui est accompagné de Johanna Lazore, conseillère principale de direction.
    Souhaitons aussi la bienvenue au chef William Montour, accompagné par M. Richard Powless, tous deux de la Six Nations of the Grand River. Bienvenue.
    Nous accueillons aussi le grand chef Stewart Philipp ainsi que le chef David Walkem, de la Union of British Columbian Indian Chiefs.
    Enfin, qui s'apprêtent à s'asseoir, nous avons le chef Guy Lonechild, accompagné de Paul Chartrand. Tous deux sont de la Federation of Saskatchewan Indian Nations.
    On l'a déjà dit, les exposés seront entendus rapidement. Vous devrez vous en tenir aux 10 minutes accordées et j'essaierai de vous faire signe lorsque vous arriverez près de cette limite.
    Commençons par le chef Toulouse, des chefs de l'Ontario.
    Chef Toulouse, vous avez la parole.
(1700)
    Je suis de Sagamok Anishnawbek, sur les rives nord du lac Huron. Je suis ici pour représenter les chefs de l'Ontario. Merci de nous avoir invités à comparaître devant vous, sur cette question d'importance.
    Les modifications proposées par le Canada en réponse à la décision rendue par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor n'élimine pas complètement la discrimination inhérente à la Loi sur les Indiens. Le projet de loi ne traite que d'un type de discrimination de la Loi sur les Indiens et encore, de manière très étroite.
    Depuis que les nouveaux arrivants sur nos territoires ont commencé à nous imposer leurs lois, les femmes des premières nations, en particulier, ainsi que leur descendance ont été assujetties à diverses formes de discrimination fondée sur le sexe, la race et l'état matrimonial ou familial. Cette pratique est contraire au traitement qui était traditionnellement réservé aux femmes des premières nations avant les contacts avec les nouveaux arrivants.
    En outre, le MAINC n'a pas déclaré vouloir fournir des fonds supplémentaires aux premières nations compte tenu des coûts supplémentaires que représenteront les nouveaux membres à qui cette loi donnerait un statut. Dans cette situation, le manque de fonds risque de causer des conflits et des déchirements au sein des premières nations. Les modifications proposées par le MAINC à la Loi sur les Indiens, en réponse à la décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire McIvor se rapporte à l'inégalité entre les sexes quant au statut d'Indien inscrit, mais nuit aux premières nations en érodant leurs droits de déterminer qui fait partie de leurs membres et quelle est leur identité.
    Le projet de loi C-3 est muet quant à la détermination par les bandes de l'admissibilité de certains nouveaux membres. Pourtant, avec la demande relative à la Loi canadienne sur les droits de la personne du 18 juin 2011, faite auprès des gouvernements des premières nations, on comprend que les codes quant à l'admissibilité au statut de membre adoptés par les bandes pourraient être contestés, si elles choisissent de ne pas accepter de nouveaux membres en raison d'un des motifs interdits par la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cette lacune du projet de loi C-3 sur la détermination par les bandes de leurs codes, pour les bandes relevant de l'article 10, doit être considérée comme une non-observation par le Canada du droit des peuples autochtones de décider de leur identité et de l'appartenance de leurs membres.
    Plus de la moitié des 133 premières nations de l'Ontario n'ont aucun contrôle sur les listes de leurs membres. Cela signifie que les nouveaux Indiens inscrits seront ajoutés aux listes par le MAINC. C'est une façon d'éroder progressivement le droit des premières nations de déterminer qui sont leurs membres et quelle est leur identité.
    En outre, le MAINC a proposé une méthode de cueillette de renseignements pour traiter des questions plus larges d'appartenance aux premières nations. Ces méthodes seront complètement inutiles si le Canada ne s'engage pas à reconnaître la compétence des premières nations en matière d'identité et d'appartenance. Nos identités collectives et individuelles ont été insidieusement modifiées par des concepts appartenant à une autre idéologie, qui ne visent qu'à affaiblir nos nations. Ces questions ne peuvent être étudiées sans d'abord reconnaître le contexte de colonialisme qui continue d'exister au Canada et qui continue de nuire aux premières nations.
    Ce colonialisme perdure surtout grâce aux actions ou omissions de ceux qui refusent de reconnaître leur paternalisme à l'endroit des premières nations et leur assujettissement. Malheureusement, c'est un aspect de notre histoire qu'il faut constamment rappeler dans tout notre travail, puisque ce n'est pas encore pleinement compris et accepté par le Canada.
    Non seulement notre sens d'appartenance culturelle a été miné par des définitions qui nous ont été imposées, mais notre psychologie, notre spiritualité et nos structures politiques ont été affectées. Depuis quelques générations, nous avons subi individuellement et collectivement l'intrusion de la Loi sur les Indiens dans notre quotidien. Le droit à la maîtrise de notre identité sans ingérence doit être reconnu comme un aspect essentiel de la réconciliation puisqu'il s'agit essentiellement de notre droit d'exister comme peuples.
    Le 1er avril 2010, en s'entretenant avec votre comité, le ministre Strahl du MAINC a déclaré qu'il n'y avait pas de consensus au sein des premières nations sur les questions plus larges d'appartenance et d'identité. Cette déclaration est peut-être juste en partie, mais on semble oublier que c'est là une preuve que le gouvernement ne comprend pas le contexte du colonialisme.
    Il va de soi qu'après quelques siècles d'assujettissement délibéré et systémique, le MAINC ne pouvait pas s'attendre à ce que les premières nations, en quelques mois, puissent arriver à un consensus sur la meilleure solution dans la question de l'appartenance aux premières nations. Même après un long processus de réparation des torts causés par les derniers siècles, même après ce processus de décolonisation, il est peu probable que les premières nations du Canada, d'une grande diversité culturelle et linguistique, puissent atteindre un consensus qui aille au-delà des principes fondamentaux.
(1705)
    Le Canada continue de faire fi d'un outil international clé, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, où sont décrites les normes minimales pour la survie des peuples autochtones.
    Bien que le dernier discours du Trône ait donné une idée de l'intention du gouvernement actuel d'appliquer cette déclaration d'une manière tout à fait conforme à la Constitution et aux lois du Canada, cet engagement pourrait, pense-t-on, imposer une norme inférieure pour les droits de la personne garantis par la déclaration. Les modifications proposées et le processus de cueillette de renseignements du MAINC ne répondent pas aux normes minimales décrites dans la déclaration.
    Notre dépendance économique envers le gouvernement du Canada a contribué à l'effondrement de nos identités collectives. On a délibérément bafoué nos droits issus de traités, on nous a privés de nos territoires et de nos ressources et on nous a imposé des lois paternalistes: tout cela a contribué à la situation actuelle. Cette triste réalité montre à quel point nous en sommes venus à dépendre des définitions des mots « Indiens » et « Autochtones » qui sont toujours associés aux droits et aux avantages dont nous avons besoin pour vivre.
    En Ontario, beaucoup des membres des premières nations vivent dans une pauvreté qu'il est difficile de surmonter. Les gouvernements des premières nations ont aussi du mal à répondre aux besoins fondamentaux des membres de leur communauté.
    Au sujet des modifications législatives proposées dans le projet de loi C-3, le MAINC a avoué ignorer quelles seront exactement les incidences sur les premières nations. On s'attend toutefois à ce qu'il y ait environ 45 000 nouvelles inscriptions.
    L'Ontario a l'une des plus grandes populations de membres des premières nations au Canada. Comme le discours du Trône fédéral et le récent budget sont muets à ce sujet, les premières nations en Ontario risquent d'être exposées à des pressions massives pour les fonds limités qu'elles reçoivent dans des secteurs essentiels comme l'éducation et le logement.
    Le gouvernement actuel fait peu de cas des nombreux citoyens et familles des premières nations qui vivent déjà sous le seuil de la pauvreté. Les effets conjugués de la TVH, la taxe de vente harmonisée, du nombre supplémentaire de membres grâce au projet de loi C-3, de l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, des modifications législatives à la propriété foncière matrimoniale proposées par le projet de loi S-4 pourraient avoir un effet dévastateur sur l'économie déjà fragile des premières nations. Ironiquement, tant l'Ontario que le Canada se sont publiquement engagés à contribuer à l'éradication de la pauvreté chez les premières nations. Sans un financement accru accompagnant ces changements législatifs, les premières nations n'en sentiront que les effets négatifs.
    En terminant, j'aimerais formuler les recommandations suivantes au gouvernement du Canada:
    Reconnaître et respecter le droit des premières nations et leurs compétences à décider de leur identité et de leur citoyenneté;
    Reconnaître l'histoire coloniale du Canada et s'engager dans un processus de décolonisation qui servirait de fondement à tous les autres efforts visant à aider les peuples des premières nations;
    Respecter les normes en matière de droit de la personne découlant du droit international se rapportant aux peuples autochtones, en particulier le droit des Autochtones de déterminer leur identité et leur appartenance ainsi que le droit à un consentement libre, préalable et éclairé;
    Travailler avec les premières nations à régler les problèmes financiers pour en venir à s'écarter des accords de contribution actuels qui sont insatisfaisants. Reconnaître que la question des coûts est une question clé qui détermine l'insistance du gouvernement pour le contrôle du statut des Indiens;
    Enfin, s'engager à offrir une aide financière aux premières nations avant la mise en oeuvre de ce projet de loi.
    Meegwetch.
(1710)
    Merci, chef Toulouse. C'est apprécié.
    Nous passons maintenant au chef Guy Lonechild. Ravi de vous revoir, chef. C'est cette fois un autre sujet, mais je suis content de vous voir. Vous avez la parole, pour une dizaine de minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Au nom des premières nations de la Saskatchewan, je tiens tout d'abord à rendre hommage aux anciens de la nation algonquine.
    Je tiens à remercier les députés, membres de ce lieu de délibérations qu'est le Parlement, de me donner l'occasion de leur adresser la parole sur le projet de loi C-3. J'ai deux points à soulever cet après-midi
    Le premier, c'est que le projet de loi C-3 pourrait avoir pour effet d'ajouter 45 nouveaux Indiens inscrits au registre des Indiens. À ce propos, je m'interroge sur les répercussions financières du projet de loi C-3. Comme à chaque fois où le gouvernement présente un nouveau projet de loi, nous les dirigeants et les membres des premières nations voulons savoir combien coûteront les modifications proposées, le cas échéant. Que prévoit le gouvernement en ce qui concerne les coûts accrus qui découleront de la reconnaissance de nouveaux Indiens inscrits? Je pense tout particulièrement à ce qu'il en coûtera pour assurer des services publics à ces nouveaux Indiens inscrits.
    Ma deuxième question concerne le processus exploratoire. Nous sommes préoccupés par les propositions du gouvernement, telles que nous les comprenons. Nous avons des inquiétudes au sujet du processus qui, d'après nous, serait imposé unilatéralement et dans le cadre duquel des agents du gouvernement viendraient écouter les gens et recueillir des informations mais ne chercheraient à avoir une discussion saine et conviviale sur la façon d'établir de bonnes relations respectueuses avec les premières nations visées par un traité.
    Nous entendons beaucoup parler de réconciliation ces jours-ci, et qui dit réconciliation dit dialogue. Nous souhaiterions un processus de consultation pour établir de bonnes relations, qui seraient notamment fondées sur le modèle des relations de nation à nation où la question de l'appartenance serait décidée par la première nation concernée, dans un avenir où la Loi sur les Indiens aurait été remplacée par des relations de gouvernement à gouvernement qui seraient fondées sur le respect et régies par un traité. La mode au Saskatchewan est de dire que nous sommes tous visés par un traité. Les premières nations visées par un traité disent haut et fort qu'elles sont prêtes à laisser derrière elles la Loi sur les Indiens pour passer plutôt à un modèle d'édification des nations où l'appartenance serait décidée par la nation concernée comme c'est son droit. C'est là quelque chose qui fait largement consensus.
    La FSIN, de par son document fondateur, la Convention Act de 1982, est précisément un instrument qui a fait ses preuves pour ce qui est d'assurer leadership et orientation et aboutir à un consensus parmi les 74 premières nations de la Saskatchewan. Il a permis de s'entendre sur plusieurs initiatives, visant la province toute entière, qui ont été élaborées en collaboration avec le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial.
    Permettez-moi de revenir au projet de loi C-3. Ce projet de loi vise à donner suite à un arrêté de la cour. Le gouvernement n'avait pas le choix. Nous sommes d'accord pour dire qu'il fallait modifier la Loi sur les Indiens afin de maintenir le cadre législatif qui régit l'inscription des Indiens, mais nous incitons fortement le gouvernement à adopter une nouvelle approche pour élaborer les lois et les politiques concernant les premières nations. En proposant le projet de loi C-3, le gouvernement fait comme il a toujours fait, c'est-à-dire qu'il cherche à gérer les problèmes ou à réagir aux crises en passant à l'action uniquement quand il est obligé de le faire. Nous sommes pour une approche fondée sur des principes, une approche d'édification des nations, où l'appartenance est décidée par la nation concernée dans le cadre de négociations sur les institutions du gouvernement autonome, le respect des traités et l'élimination de la Loi sur les Indiens. Nous souhaiterions une approche fondée sur des principes et sur l'édification des nations, mais nous souhaiterions aussi qu'elle soit fondée sur le respect des droits de la personne, y compris le droit à l'autodétermination. L'appartenance serait décidée par la nation concernée. Les négociations avec les premières nations sont essentielles parce que chacune d'entre elles doit pouvoir décider librement la question de l'appartenance.
    L'idée que les premières nations ont le droit et sont les mieux placées pour décider de l'appartenance est depuis longtemps reconnue par le Parlement fédéral. En 1983, le comité parlementaire Penner avait recommandé que les premières nations aient le droit de décider de l'appartenance aux fins de l'élaboration des procédures et des institutions du gouvernement autonome. Cette approche se trouve reflétée dans le rapport final qu'a présenté la Commission royale sur les peuples autochtones en 1996. Je suis d'ailleurs accompagné d'un des membres de la commission, M. Paul Chartrand. La commission avait recommandé l'approche de nation à nation en se fondant sur le droit à l'autodétermination qui fait partie des droits humains.
    Plusieurs organismes des Nations Unies qui ont la responsabilité de surveiller le respect par le Canada des obligations qui lui incombent en vertu des traités sur les droits de la personne l'ont incité, depuis 1998, à adopter l'approche préconisée par la Commission royale sur les peuples autochtones en vue d'appliquer sur son territoire le droit à l'autodétermination. La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones énonce le droit humain à l'autodétermination des peuples autochtones, qui inclut le droit de décider de l'appartenance à une première nation.
(1715)
    Vous n'arriverez pas à obtenir le consensus sur la définition du terme « Indien » qui figure dans la Loi sur les Indiens. L'approche de nation à nation est réaliste. Elle énonce que chaque nation devrait être libre de décider dans le cadre de négociations avec le gouvernement fédéral. Voilà ce dont nous avons besoin, plutôt que d'un autre processus exploratoire.
    Merci beaucoup.
    Merci, chef Lonechild.
    Nous allons maintenant entendre le grand chef Phillip et le chef Walkem, qui sont tous deux du groupe Union of British Columbia Indian Chiefs.
    Grand chef Phillip, voulez-vous bien commencer?
    Wai xast skelhalt ipsi nuxsil. Encha es quist Ascasiwt.
    Je tiens tout d'abord à souligner la présence des grands-mères, des mères et des petites-filles algonquines de ce territoire et à leur rendre hommage. Je tiens également à souligner la présence des chefs traditionnels et spirituels ainsi que celle des représentants élus du peuple algonquin.
    Je remercie le comité de nous donner l'occasion de venir présenter notre exposé. Le chef David Walkem vous présentera les détails de notre argumentation.
    J'aimerais vous lire la résolution la plus récente qui a été adoptée par la Union of B.C. Indian Chiefs, organisation politique qui existe en Colombie-Britannique depuis 1969. Il convient de faire remarquer que ce sont les femmes autochtones qui ont recueilli les fonds et réuni les ressources nécessaires pour que cette organisation puisse être créée et leur servir de porte-parole politique pour les questions les touchant.
    Je vous fais donc lecture de la résolution adoptée par le conseil des chefs, Union of B.C. Indian Chiefs, à leur assemblée tenue à Vancouver, en Colombie-Britannique, les 17 et 18 mars 2010. Résolution no 2010-08, concernant le projet de loi C-3:
ATTENDU QUE l'approche qui convient pour déterminer la citoyenneté est celle qui se fonde sur les lois et traditions des peuples autochtones;
ATTENDU QUE le projet de loi C-3 ne reconnaît pas les lois autochtones et que le Canada n'a pas prévu de discussions en ce sens pour l'élaboration des modifications à la Loi sur les Indiens;
ATTENDU QUE le projet de loi C-3 prévoit des modifications qui ne tiennent pas compte des nombreux exemples de discrimination à l'endroit des femmes autochtones et de leurs descendants qui continuent d'exister dans la Loi sur les Indiens. Fait important, la règle d'inadmissibilité de la seconde génération continuera à faire baisser le nombre d'Indiens inscrits à long terme, et des personnes qui sont reconnues comme des citoyens aux termes des lois de leurs collectivités et nations continueront à se voir refuser le droit d'être inscrites;
ATTENDU QUE le Canada n'a pas présenté de plan convenable pour aider les collectivités autochtones et pour leur assurer les ressources nécessaires afin qu'elles puissent composer avec l'accroissement du nombre d'Indiens inscrits et de membres de bandes qu'entraînera le projet de loi C-3 et qu'il a plutôt créé une situation qui divisera encore plus les nations, collectivités et familles autochtones;
IL EST RÉSOLU que le conseil des chefs de l'UBCIC adopte l'énoncé de position sur le projet de loi C-3 qui a été présenté par le groupe de travail sur le projet de loi C-31, tel que modifié à l'Assemblée du conseil des chefs de l'UBCIC;
IL EST ÉGALEMENT RÉSOLU que le conseil des chefs de l'UBCIC donne instruction à l'exécutif et au personnel de l'UBCIC ainsi qu'au groupe de travail sur le projet de loi C-31 :
De communiquer avec d'autres organisations autochtones afin de travailler en collaboration avec elles pour réagir aux modifications à la Loi sur les Indiens qui sont proposées par le Canada au regard du projet de loi C-31;
De chercher à obtenir que l'exécutif de l'UBCIC puisse comparaître devant le comité permanent de la Chambre qui étudie ces modifications;
D'entreprendre une campagne énergique en vue d'informer les députés et sénateurs membres du Parlement fédéral (y compris le ministre des Affaires indiennes et du Nord et les porte-parole en matière de questions autochtones des divers partis fédéraux) sur cette question et de faire du lobbying pour obtenir des modifications plus inclusives au projet de loi C-3;
De soutenir les efforts que devront déployer les collectivités de l'UBCIC afin de réagir aux conséquences que pourrait avoir le projet de loi C-3, notamment pour ce qui est de l'éducation des collectivités quant aux répercussions éventuelles;
De chercher des occasions de travailler avec les nations et collectivités membres de l'UBCIC afin d'élaborer des lois autochtones sur la citoyenneté comme solution de rechange au processus fondé sur l'inscription que suit actuellement le Canada, explorant notamment la possibilité que le conseil des chefs de l'UBCIC donne au groupe de travail sur le projet de loi C-31 le mandat d'élaborer, d'organiser et de mettre en oeuvre un plan d'action sur la citoyenneté autochtone qui soit fondé sur les lois autochtones;
De produire du matériel d'information publique, d'organiser une série d'allocutions visant à recueillir l'appui de la population, en ayant notamment recours aux ressources médiatiques et de réseautage social populaires, afin que toutes les premières nations de la Colombie-Britannique aient accès, peu importe leur emplacement, à un ensemble de messages clairs et bien sentis;
D'examiner la possibilité de contester par la voie des tribunaux le processus qu'a suivi le Canada en vue de proposer le projet de loi C-3 sans avoir consulté les nations autochtones et sans avoir obtenu leur consentement;
(1720)
Il est enfin résolu que le Conseil des chefs de l'UBCIC nomme les représentants suivants comme membres actifs du groupe de travail sur le projet de loi C-31: le chef Nelson Leon, bande indienne du lac Adams; le chef David Walkem, bande indienne de Cook's Ferry; la chef Donna Gallinger, bande indienne Nicomen.
    La résolution a été proposée par Ko'waintco Michel, bande indienne Nooaitch, appuyée par le chef Jonathan Kruger, bande indienne Penticton, et adoptée.
    Cela dit, nous passons maintenant au chef David Walkem.
    Kuk'chem. Merci à vous, monsieur le président, et à vous, mesdames et messieurs les membres du comité, de bien vouloir nous entendre aujourd'hui.
    Comme l'a dit le grand chef Phillip, je suis de la bande indienne de Cook's Ferry, de la nation Nlaka'pamux. Sharon McIvor représente une des bandes qui fait partie de notre nation. La question à l'étude nous tient beaucoup à coeur.
    Nous avons trois amendements bien précis à proposer, et nous vous présenterons les nouvelles dispositions que nous recommandons. Malheureusement, elles sont toujours en voie d'être traduites, si bien que nous vous les ferons parvenir le plus tôt possible.
    Tout d'abord, comme l'a dit le grand chef, la grande question est celle de la citoyenneté. Nous limiterons nos propos au projet de loi qui a été présenté. Parce que le projet de loi C-3 n'est qu'une solution partielle et que la discrimination à l'endroit des descendants des femmes autochtones sera maintenue, l'Union of B.C. Indian Chiefs recommande que le projet de loi C-3 soit amendé afin d'éliminer les dispositions qui maintiennent la discrimination.
    À l'heure actuelle, ceux à qui on refuse le statut d'Indien inscrit parce que leur grand-mère a épousé une personne n'ayant pas le statut d'Indien inscrit et qui sont nés avant le 4 septembre 1951 ne seront pas admissibles à l'inscription. Nous recommandons l'élimination de la date d'inadmissibilité de 1951. Il n'est ni juste ni équitable de maintenir la discrimination simplement parce qu'une personne est née avant cette date de 1951. L'amendement proposé mettrait fin à la discrimination fondée sur la date de naissance, qui a été fixée au 4 septembre 1951.
    Le deuxième amendement que nous proposons vise les cas où la paternité n'a pas été déclarée. Le projet de loi C-3 vise uniquement à ratifier la situation de ceux à qui on a refusé le statut d'Indien inscrit parce que leur grand-mère avait perdu son statut à la suite de son mariage. D'autres personnes sont nées en dehors des liens du mariage et se sont vues refuser le statut d'Indien inscrit parce que le registraire avait jugé qu'elles n'y avaient pas droit et que leur père n'était pas un Indien inscrit.
    La Union of B.C. Indian Chiefs recommande que les descendants des femmes indiennes qui ont perdu leur statut à la suite de leur mariage puissent récupérer leur statut — comme le prévoit actuellement le projet de loi C-3 — et qu'il en soit de même pour les personnes nées en dehors des liens du mariage à qui le statut d'Indien inscrit a été refusé parce que le registraire avait supposé que leur père n'était pas un Indien inscrit. Cet amendement ferait disparaître la discrimination qui est maintenue dans le projet de loi C-3 à l'endroit de ceux qui sont nés en dehors des liens du mariage.
    Notre dernier amendement vise à supprimer l'article 9 afin que les femmes indiennes et leurs descendants qui ont perdu le statut d'Indien inscrit en raison de l'application discriminatoire de la Loi sur les Indiens puissent chercher à obtenir par la voie des tribunaux ou par des négociations la restitution de leur statut ou une indemnisation pour les pertes subies par leur famille en raison de la discrimination historique que leur a imposée cette loi, dans le cadre d'un processus semblable à celui qui a été suivi pour les victimes des pensionnats indiens.
    Je m'arrête là et je vous remercie d'avoir bien voulu nous entendre. Nous sommes maintenant prêts à répondre aux questions. Nkwusm.
(1725)
    Je vous remercie tous les deux.
    Nous allons maintenant passer au chef William Montour. Il représente la Six Nations of the Grand River, tout comme M. Powless.
    Bienvenue, chef Montour. Allez-y s'il vous plaît.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord saluer le peuple algonquin, dont nous visitons le territoire, ainsi que remercier M. Lemay d'avoir convaincu le comité que nous avions besoin de cinq minutes supplémentaires.
    Je vous remercie, monsieur Lemay.
    La communauté de Six Nations of the Grand River est la plus nombreuse de toutes les premières nations au Canada: 23 183 citoyens, dont environ 12 000 habitent la réserve, de même que 5 000 autres personnes, y compris des Indiens non inscrits, des non-membres et des non-Autochtones.
    Bien que ce soit le conseil élu de Six Nations qui se présente devant vous aujourd'hui, il y a lieu de souligner que notre gouvernement traditionnel, le Conseil des chefs de la Confédération de Haudenosaunis, est toujours en fonction à Six Nations. Nous avons préservé nos traditions, nos coutumes, nos pratiques et nos langues iroquoises.
    À titre de la plus grande population d'Indiens inscrits au Canada, nous avons davantage de chance que ce projet de loi ait des répercussions plus importantes pour nous. Il est possible que, une fois inscrites, de nombreuses personnes veuillent revenir à notre communauté, ou sont peut-être déjà dans notre communauté, pour s'établir dans leur communauté, pour connaître leurs culture et traditions, et peut-être même apprendre la langue. Ce phénomène entraînerait une hausse de la demande pour nos services, comme le logement, l'éducation et la santé. Notre système fonctionne déjà à plein régime dans ces domaines en raison du maximum de financement de 2 p. 100 d'AINC. Nous ne connaissons pas toutes les conséquences de ce projet de loi parce que nous n'avons pas les ressources nécessaires pour entreprendre une telle étude.
    Le titre du projet de loi C-3 « Loi favorisant l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens », fait en sorte qu'il est difficile de croire qu'à notre époque, avec toutes les lois en place pour protéger toutes les femmes contre la discrimination, on demande toujours au gouvernement de faire quelque chose contre le traitement inéquitable des femmes dans nos nations. Je félicite Mme Sharon McIvor de sa persistance et de son dévouement pour veiller à ce que cette iniquité ne soit pas transmise à ses petits-enfants et aux prochaines générations de notre peuple.
    Depuis la création des articles sur l'inscription de la Loi sur les Indiens, les femmes des premières nations sont perçues comme étant inférieures aux hommes des premières nations et ont été punies et bannies en raison des choix qu'elles ont faits par rapport au mariage. Le gouvernement fédéral a également entrepris une guerre mentale contre notre peuple en légiférant notre identité au point où de nombreuses personnes se sont déclarées Indiens inscrits, Indiens non inscrits, Indiens visés par le projet de loi C-31, et je suis certain que certains se déclareront eux-mêmes comme des Indiens visés par le projet de loi C-3.
    En fait, nous, des Six Nations, avons toujours été des citoyens de nos nations. Il s'agit de notre droit acquis à la naissance. Vous n'avez pas le droit de légiférer notre identité, pourtant, pour une raison ou une autre, on continue de l'accepter. Le temps est venu de prendre le contrôle de nos identités et d'aller au-delà de nos demandes d'équité et d'approbation auprès d'un gouvernement extérieur qui poursuit cette guerre mentale. À titre de chef élu de la plus grande première nation au Canada, j'avertis le gouvernement du Canada que nous avons l'intention de passer de la parole aux actes dans notre communauté.
    J'aimerais présenter nos préoccupations concernant l'intention et les répercussions possibles du projet de loi C-3 dans quatre domaines: d'abord, le devoir de consulter; deuxièmement, l'égalité entre les sexes; troisièmement, les conséquences financières; et quatrièmement, la compétence des premières nations.
    D'abord, pour ce qui est de l'obligation de consulter, tout projet de loi fédéral qui risque de toucher nos droits ancestraux enclenche le processus de consultation et d'accommodement, tel que réaffirmé dans diverses décisions de la Cour suprême du Canada — par exemple, Haida, Taku, et première nation crie Mikisew. Le devoir de consulter et d'accommoder du gouvernement fédéral n'a de toute évidence pas été respecté relativement au projet de loi C-3. Vous avez entendu les parrains du projet de loi dire que la consultation n'est pas nécessaire parce qu'il n'y a pas de conséquence sur nos droits. On ne saurait se tromper davantage. Il n'y a pas de droit plus fondamental pour les nations indigènes que celui de déterminer qui sont nos citoyens et de protéger leurs droits. Le gouvernement fédéral devrait être prêt à examiner cette question d'un point de vue plus vaste que l'inscription des Indiens.
    Deuxièmement, éliminer toute iniquité entre les hommes et les femmes. Je suis d'accord quant à la recommandation de Mme Sharon McIvor selon laquelle si la Loi sur les Indiens est la norme utilisée par le Canada pour déterminer le statut et que le gouvernement du Canada décide de présenter ce projet de loi comme façon de mettre fin à l'iniquité entre les sexes, le projet de loi C-3 doit aller plus loin qu'indiqué dans la décision de la Cour d'appel et mettre fin à l'iniquité entre les sexes à partir du moment où la loi a été présentée dans l'histoire. Il n'est pas nécessaire pour le gouvernement fédéral d'adhérer strictement à la décision de la Cour d'appel; le gouvernement a l'occasion d'éliminer toute discrimination entre les sexes au moyen de ce projet de loi, mais choisit de ne pas le faire. Nous sommes d'accord avec Sharon McIvor pour dire que toutes les personnes nées avant le 17 avril 1985 devraient être visées à l'alinéa 6(1) a). Le projet de loi C-3 ne donnera pas lieu à l'égalité complète entre les sexes. Il s'agit simplement d'une autre solution adoptée à la hâte pour régler temporairement les litiges que le gouvernement doit régler.
(1730)
    Troisièmement, il y a les répercussions financières d'une augmentation de la population. Dans l'amendement de 1985 de la Loi sur les Indiens, le gouvernement fédéral a mal estimé le nombre de personnes qui voudraient retourner dans nos collectivités. Il n'a jamais fourni les ressources nécessaires promises. Ce qui empire le problème, c'est que le gouvernement fédéral a limité le financement aux communautés des premières nations à 2 p. 100 depuis 1996.
    Dans le cas de Six Nations, les répercussions sur le financement des personnes qui sont retournées à Six Nations ont été dramatiques. En 1985, nous comptions environ 11 000 citoyens inscrits sur la réserve et hors de la réserve. En 1987, 3 880 personnes ont été ajoutées à notre liste d'Indiens inscrits, ce qui représente une augmentation de 36 p. 100 de notre population.
    Nous ne croyons pas que le gouvernement fédéral ait entièrement évalué les conséquences possibles ni fait une analyse suffisante des répercussions financières qu'aurait cet amendement proposé pour les premières nations. Comme ce projet de loi fera augmenter la population d'Indiens inscrits de toutes les premières nations au Canada, nous recommandons qu'une augmentation de financement soit une composante clé de la mesure législative proposée.
    Puis, il y a la question de la compétence des premières nations. Les citoyens des premières nations et les membres des communautés des premières nations verront la reconnaissance entière de leur statut refusé même après l'adoption de ce projet de loi selon qu'ils sont issus de l'affiliation matrilinéaire ou patrilinéaire.
    Selon l'article 33.1 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, les peuples autochtones ont le droit de décider de leur propre identité ou appartenance conformément à leurs coutumes et traditions, sans préjudice du droit des autochtones d'obtenir, à titre individuel, la citoyenneté de l'État dans lequel ils vivent. Nous considérons le processus proposé par le ministre Strahl comme une première étape pour faire en sorte que l'article 33.1 devienne réalité au Canada. Toutefois, nous n'appuierons pas de processus par lequel le cabinet décide d'examiner des façons de favoriser l'égalité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens. Nous ne voulons pas participer à un processus qui appuie l'inscription au registre des Indiens; nous voulons un processus qui examinera de façon plus vaste la question de la citoyenneté des premières nations déterminée par ces dernières. On présumerait ainsi que le cabinet fait preuve de la volonté nécessaire pour faire le travail exigé et consentir les ressources appropriées relativement à cette question. Ces mesures doivent prévoir un engagement juridique exécutoire de la part du gouvernement fédéral relativement à la reconnaissance et à l'inscription comme citoyens de toute personne considérée par une première nation comme étant son citoyen.
    Nous parlons ici de citoyenneté au sein de premières nations, et non pas de dispositions d'inscription qui refusent toujours les droits à la naissance aux citoyens des premières nations en vertu d'une mesure législative coloniale archaïque. Nous devons mettre fin à l'identité légiférée de notre peuple et reconnaître la compétence des gouvernements des premières nations de déterminer qui sont ces citoyens en fonction des droits acquis à la naissance et de la descendance.
    Ainsi, toutes les personnes reconnues par les premières nations comme citoyennes doivent être admissibles au financement du gouvernement fédéral en fonction de ces nouveaux chiffres. Les gouvernements des premières nations devront aussi être proactifs et prendre des mesures pour déterminer et définir qui sont leurs citoyens au moyen d'un code écrit ou d'une loi. Dès qu'une telle mesure sera en place, elle devrait remplacer les dispositions de la Loi sur les Indiens sur l'inscription au registre des Indiens, et elle deviendrait la loi pour le gouvernement et la communauté des premières nations.
    Nous recommandons au comité d'exhorter le gouvernement fédéral d'aller au-delà du processus d'inscription au registre de la Loi sur les Indiens et d'entamer un processus qui commencerait par la reconnaissance et l'acceptation de modèles de lois sur la citoyenneté des premières nations. Nous recommandons aussi au comité d'exhorter le cabinet à donner suite à l'engagement du ministre Strahl d'entamer ce processus exploratoire.
    Pour terminer, nous reconnaissons les limites du comité relativement à cette mesure législative, mais nous reconnaissons aussi que le comité a la capacité et l'autorité de recommander au gouvernement fédéral d'aller au-delà du processus actuel d'inscription au registre des Indiens. Voilà ce que nous vous recommandons.
    Nia:weh.
     Meegwetch, chef Montour. Nous sommes ravis de vous avoir tous ici.
    Je dois vous dire, soit dit en passant, que je vous remercie d'avoir fait preuve de souplesse. Nous avons un petit peu de retard aujourd'hui, et je sais que nous n'avons pas exactement commencé à l'heure cet après-midi, alors je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés. Nous allons commencer par Mme Neville. Vous avez sept minutes.
(1735)
    Merci beaucoup. Je vous remercie tous de votre présence ici aujourd'hui.
    Bien que vous n'ayez pas tous la même position, vous avez certainement soulevé de nombreux points importants.
    Ma première question s'adresse au grand chef Stewart Phillip. Le comité du projet de loi C-31 qui travaille au sein de la Union of B. C. Chiefs... La recommandation que vous avez faite aujourd'hui découle-t-elle de ses discussions? Y-a-t-il actuellement des discussions en cours et pouvez-vous nous dire là où elles mèneront?
    Je siège au comité. Oui, ce que nous vous présentons aujourd'hui découle des discussions sommaires de notre comité. Nous avons présenté un exposé de positions concernant les grandes questions de citoyenneté en novembre dernier lorsque le gouvernement nous a demandé de le faire. L'exposé a été adopté à nos réunions du conseil des chefs.
    Le comité a-t-il reçu cet exposé?
    Non, il est en cours de traduction. Il n'était pas prêt à temps pour aujourd'hui, mais nous allons vous le faire parvenir.
    Je vous remercie.
    J'imagine que ma question s'adresse à tous les témoins ici. Si le comité avait l'occasion de recommander au gouvernement qu'il veille à ce que toutes les femmes soient traitées de façon égale, si nous pouvons amender le projet de loi — et nous examinons des possibilités — pour faire en sorte que certaines femmes autochtones ne soient pas plus égales que d'autres, aimeriez-vous que nous allions de l'avant, compte tenu des nombreuses autres questions que vous avez soulevées, qu'il s'agisse de citoyenneté, de consultations, de droits inhérents, de financement, etc.?
    Si j'ai bien compris, vous nous demandez si nous voulons que vous appuyiez des amendements qui élimineraient les iniquités ou la discrimination contre les femmes autochtones?
    Et voulez-vous que nous allions de l'avant sans aborder certaines des autres questions soulevées?
    Dans nos discussions — et c'est pourquoi nous avons été très précis concernant des parties de la mesure législative présentée —, nous voulions mettre fin à cette discrimination maintenant. Nombre de ces personnes — surtout en ce qui concerne la date de démarcation de 1951 — sont âgées. Ce projet de loi touche les personnes âgées de 29 à 59 ans, mais au-delà de cette période, il y a les personnes âgées. Elles ne sont pas nombreuses, et nous voulons mettre fin à la discrimination maintenant.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Est-ce que d'autres témoins désirent répondre à la question de Mme Neville?
    Chef Toulouse.
    J'ai quelques commentaires rapidement.
    Pour ce qui est des recommandations du gouvernement de façon générale, les premières nations, collectivement et individuellement, sont en train de développer, reconstruire ou revitaliser leurs nations. Elles disent qu'à cette fin, le gouvernement devrait abandonner cette activité ou ce projet de loi et honorer les traités et droits ancestraux et humains, afin que nous puissions continuer à construire nos économies. Ce qu'il faut vraiment faire, c'est de bâtir nos propres structures de gouvernance et de revitaliser nos cultures et nos traditions. Nous voulons minimiser les répercussions ou le pouvoir que la Loi sur les Indiens a sur nos premières nations et nos communautés.
    Chef Montour, je pense vous avoir vu lever la main. Voulez-vous prendre la parole?
    Oui, il m'a volé la vedette.
    Je crois que nous avons besoin des deux. En attendant, il faut reconnaître que ces personnes ont été lésées. Mais plus encore, je crois qu'il faut retourner au début de toute notre histoire, en 1876. Comme le disait Dan George dans un de ses films: les femmes sont au centre de nos nations, au centre de nos mondes.
    Nous voulons que ces lois, nos lois en matière de citoyenneté, redonnent aux femmes la place qu'elles avaient avant les réformettes des gouvernements coloniaux, qui ont retiré aux femmes leurs pouvoirs. Dans notre communauté, dans notre société, c'est la matrilinéarité qui compte. Les femmes peuvent faire et défaire des chefs. Il faut revenir à ces valeurs, selon moi.
    Je vous remercie.
(1740)
    Nous avons deux minutes.
    Madame Neville, ces réponses vous conviennent-elles?

[Français]

    Je cède maintenant la parole à M. Lemay ou M. Lévesque.
    Tout d'abord, je suis honoré de vous rencontrer. Nous accueillons les grands chefs des Premières nations de l'Ontario, de la Saskatchewan et d'une partie des six nations de la Colombie-Britannique. La majorité des peuples autochtones du Canada sont probablement représentés ici.
    J'ai une question générale et, si j'ai le temps, je poserai une question particulière. Vous êtes tous des chefs impliqués dans vos communautés. Je le sais car je vous rencontre à l'occasion lors d'assemblées des Premières nations. Quelle a été votre réaction lorsque le gouvernement a déposé le projet de loi C-3? Je suis conscient qu'il n'y a pas eu beaucoup de consultations au sens légal, au sens des arrêts de la Cour suprême. Quelqu'un d'entre vous peut-il rapidement me dire quelle a été votre réaction face au dépôt de ce projet de loi?

[Traduction]

    M. Lonechild, suivi de M. Montour.
    Très rapidement, je vous remercie de la question, monsieur Lemay.
    Ce qu'on dit souvent, c'est que c'est reparti. En 1985, le projet de loi C-31 visait à régler certaines de ces mêmes questions. Soyez assurés, le projet de loi ne mettra pas entièrement fin à la discrimination. Évidemment, nous croyons que cette mesure vise encore une fois à tenter de légitimiser la Loi sur les Indiens au moyen de modifications mineures, que la Loi canadienne sur les droits de la personne et diverses autres mesures, au moyen de la Charte, vont éliminer de toute façon. Je crois qu'on prend simplement les mêmes mesures que par le passé.
    Je crois que c'est la raison pour laquelle nous voulons dès que possible vous faire part de nos préoccupations pour ce qui est de légitimiser au moyen de ces recommandations un document qui n'est pas dans l'intérêt de nos premières nations à titre de peuple visé par un traité. Je crois que nous revivons simplement le mauvais cauchemar qu'ont vécu nombre de nos chefs en 1985. Je n'étais pas là à cette époque évidemment, mais nous devons nous y exposer encore une fois.

[Français]

     Chef Walkem, vous avez la parole. Ensuite, ce sera au tour du chef Montour. Non, c'est M. Powless, je m'excuse.

[Traduction]

    Je crois que ma première réaction a été une déception. Nous nous demandons pourquoi le gouvernement doit être forcé contre son gré de faire ces choses. La dernière fois qu'il a examiné cette question, c'était il y a 25 ans. Et le résultat à ce moment-là a laissé à désirer.
    Les tribunaux n'établissent pas de politiques, et on a la chance de pouvoir bien faire les choses. On avait un an pour consulter; on ne l'a pas fait. Le fait d'avoir des processus de mobilisation avec tout le monde ne constitue pas la meilleure approche à cet égard. On le répète à chaque fois dans le cadre de chaque projet de loi présenté.
    Malgré les excuses du gouvernement fédéral relativement aux pensionnats, l'approche est toujours la même. On adopte la mentalité de l'agent indien qui dit « nous savons ce qui est bien pour vous ». On se demande quand le gouvernement va comprendre et commencer par le début en faisant les choses comme il faut, en commençant par nous consulter.
(1745)
    Chef Walkem.
    Merci, monsieur Lemay.
    La première réaction a été que ce projet de loi est le minimum absolu pour donner suite à une autre décision des tribunaux. C'est pourquoi dans nos recommandations, nous avons tenté d'élargir la mesure pour tenir compte de nombreuses autres causes actuellement devant les tribunaux, comme d'autres exposés l'ont indiqué. Nous croyons que nos amendements régleront la majorité des cas, mais il y a toujours la question de ce processus exploratoire. Nous avons demandé des consultations complètes. Le processus exploratoire avec les organismes nationaux ne suffit pas. Le processus doit être abordé au niveau des communautés et des nations.
    Oui, la première réaction a été de dire « Les tribunaux ont dit de faire quelque chose, et nous allons faire le strict minimum pour nous conformer à la décision des tribunaux. »

[Français]

    Si j'ai bien compris vos remarques, ce projet de loi tel qu'il est actuellement ne réglera pas les problèmes et on risque de se retrouver, encore une fois, devant les tribunaux. C'est ce que j'ai cru comprendre.
    J'ai écouté les amendements proposés par les représentants de la Colombie-Britannique. Je vous en remercie beaucoup, d'ailleurs. Ces amendements ressemblent étrangement à ceux que l'Association du Barreau canadien nous a présenté.
     Croyez-vous qu'avec ces projets d'amendements, on pourrait au moins tenter d'éliminer la discrimination qui existe actuellement et que vous avez soulignée dans vos remarques et dans vos mémoires?

[Traduction]

    Nos amendements n'élimineront qu'une partie de la discrimination. Nous n'avons pas eu le temps d'examiner la question en entier.
    Nous tentons aussi de comprendre les limites du processus parlementaire: on présente un projet de loi et on demande ce qui peut être fait à son égard. Nous tentons de trouver des façons de maximiser les avantages avec le moins de modifications possible. Ce n'est pas parfait.

[Français]

    D'accord. Toutefois, si...
    Il reste 30 secondes.
    Comme il ne reste que 30 secondes, je serai bref.
    Je sais que vous êtes très occupé. L'amendement propose qu'on élimine l'ajout proposé, qui constituerait le sous-alinéa 6(1)c.1)(iv). Si on enlève cela, on éliminerait une grande partie de la discrimination parce qu'on enlèverait les mots « elle a eu ou a adopté, le 4 septembre 1951 [c'est ce que vous vouliez] ou après cette date, un enfant avec une personne qui, lors de la naissance ou de l’adoption, n’avait pas le droit d’être inscrite; » On enlèverait cela et on éliminerait une bonne partie de la discrimination.
    D'accord.

[Traduction]

    On vous demande de répondre par oui ou par non. De confirmer ou d'infirmer.
    Probablement.
    Un bon politicien.
    Passons maintenant à Mme Crowder.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens également à remercier les témoins de comparaître.
    Pendant votre témoignage et un petit peu plus tôt, nous avons entendu parler d'un rapport de la Chambre des communes, le cinquième rapport du comité permanent en 1988. Je voulais simplement indiquer aux fins du compte rendu — et nous devrons confirmer avec le ministère — que de nombreuses personnes ont soulevé la question de la paternité non déclarée. Dans le rapport, il est indiqué que:
Nous recommandons qu'il n'y ait aucune exigence juridique dans la loi contraignant les femmes autochtones non mariées de nommer le père de leurs enfants pour établir leurs droits d'inscription et d'adhésion à une bande, qu'on mette fin à cette pratique immédiatement.
    Selon le rapport de 1988, il n'y a aucune exigence juridique à cet égard. Si c'est le cas, il semblerait raisonnable d'abandonner la pratique. Une autre chose a été soulevée: la discrimination entre frères et soeurs, dont on a parlé plus tôt.
    J'aimerais faire allusion à une autre chose contenue dans le rapport, parce que certains parmi vous ont soulevé la question des ressources. Nous avons eu de la difficulté à obtenir des estimations du ministère quant aux conséquences financières. Le ministère fait valoir qu'il ne sait pas combien de personnes vont vouloir retourner dans leurs collectivités ou combien de personnes vont faire des demandes parce que les personnes intéressées devront décider si elles veulent demander l'inscription.
    Encore une fois, dans le rapport de 1988, il y a une analyse détaillée des répercussions financières. Il me semblerait raisonnable compte tenu de l'expérience de 1985, qu'on ait une estimation raisonnable des répercussions financières pour les bandes et des ressources financières nécessaires à cette fin. Avez-vous des commentaires là-dessus? Tout figure à la liste: écoles primaires et postsecondaires, logement, santé et bien-être, services sociaux. On a des listes de tableaux, de graphiques et de coûts.
(1750)
    Je siégeais en fait au comité. En fait, j'ai présidé le comité des chefs sur la citoyenneté à l'Assemblée des Premières Nations de 1985 à 1991, et nous avons travaillé là-dessus.
    En 1985, lorsque le projet de loi C-31 a été adopté, le gouvernement fédéral estimait que 56 000 personnes à l'échelle nationale voudraient redevenir Indiens. De ce nombre, environ 10 p. 100. ou 5 600 retourneraient en fait vivre dans leur communauté. Pour atténuer les répercussions, le gouvernement avait établi les coûts à 295 millions de dollars à l'époque.
    Sur cinq ans seulement, cependant, n'est-ce pas?
    Oui. Mais comme je l'ai dit dans mon exposé, il y a près de 200 000 nouveaux Indiens au Canada, et les énormes conséquences sur nos communautés nous dépassent.
    Prenons l'estimation qu'il y a 45 000 personnes qui deviendront des Indiens inscrits à la suite de l'adoption du projet de loi C-3. Ne pourraient-ils pas utiliser une estimation semblable? Au moins, les communautés des premières nations pourraient partir de quelque chose pour trouver des façons de réduire les conséquences, et surtout, pour aider les gens qui veulent revenir chez eux et s'établir dans leur communauté d'origine. Dans notre cas, beaucoup de gens sont revenus, et ils ont amené des connaissances nouvelles au sein de la communauté. De nombreuses personnes ont dit que c'était une mauvaise chose, mais d'après moi, beaucoup de bonnes choses se sont produites. Les gens reviennent avec de nouvelles idées, de nouvelles connaissances, différentes façons de comprendre le monde, et nous pourrions manquer cette occasion.
    Me reste-t-il du temps?
    Vous avez quelques minutes.
    Le ministre et le ministère nous ont dit qu'avec l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et l'un d'entre vous l'a mentionné, les gens pourront porter plainte pour atteinte aux droits de la personne contre leur bande. Ma question est la suivante: avez-vous reçu, à ce jour, des ressources pour aider les chefs et les conseils à composer avec les conséquences, notamment financières, qui en découlent? Lorsque ce projet de loi a été adopté, on s'était engagé à vous fournir des ressources pour vous aider à le comprendre. Alors, je me demande si l'un d'entre vous en a reçues, parce que l'on nous a dit que ce projet de loi vous permettra d'en recevoir. Quelqu'un a-t-il reçu des ressources?
    Non. Personne?
    À ce que je sache, il n'y a pas de ressources. Ce dont je me souviens, ayant été chef de l'une de ces communautés qui avaient des règles d'appartenance, c'est que ces règles contenaient beaucoup de problèmes et auraient pu être facilement contestées en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. La communauté n'avait pas les ressources financières pour mettre en oeuvre les modifications nécessaires. La politique gouvernementale avait prescrit des choses en 1985 qui limitaient réellement la capacité des conseils des premières nations d'élaborer un code de citoyenneté qui serait plus représentatif de la société et des besoins d'aujourd'hui.
    Le chef Montour a également levé la main.
    Je ne suis pas avocat, mais j'essaie de comprendre les choses à l'aide du gros bon sens. La Loi canadienne sur les droits de la personne, d'après ce que j'en comprends, traite des programmes et des services offerts à une communauté, et si quelqu'un ne les reçoit pas, ils ont un point à défendre. Nous parlons ici de la citoyenneté, de l'identité d'un peuple. Je ne vois pas ce que la Loi canadienne sur les droits de la personne a à voir avec cela. D'un point de vue communautaire, ce n'est pas pertinent, parce que tout ce qu'ils examinent, c'est si la procédure établie a été suivie lorsque l'on a demandé à une personne de quitter un comité ou si on l'a congédiée parce qu'elle n'était pas autochtone. Selon moi, c'est ce dont traite la Loi canadienne sur les droits de la personne, et non pas de citoyenneté ou d'identité.
(1755)
    La commission comparaîtra en tant que témoin, alors c'est une question qui pourrait lui être posée.
    Y a-t-il d'autres commentaires suite à la question de Mme Crowder?
    Bien, allez-y.
    On a mentionné à quelques reprises le processus exploratoire, et nous avons bien compris qu'il ne doit pas se limiter aux organisations autochtones nationales. Êtes-vous d'accord qu'on doit aller plus loin pour qu'il n'y ait pas que les organisations autochtones nationales qui participent au processus exploratoire?
    Grand chef Phillip.
    Oui. Comme je l'ai dit plus tôt, l'Union of B.C. Indian Chiefs se bat depuis sa création il y a 40 ans contre la discrimination, les préjugés et le racisme envers les femmes autochtones. J'ai également mentionné que nous avons un groupe de travail sur le projet de loi C-31, qui pourrait dire aux membres du comité que nous travaillions activement sur ce dossier depuis longtemps.
    Nous avons un plan d'action pour examiner une stratégie sur les litiges, et nous allons certainement nous pencher sur la déclaration sur les droits des peuples autochtones. Nous allons étudier les questions de citoyenneté chez les autres peuples autochtones dans le monde. Nous allons collaborer avec nos communautés pour déterminer les conséquences de ce type de loi.
    Une chose dont nous n'avons pas discuté ici, c'est l'effet possible d'effritement que les projets de loi C-31 et C-3 pourraient avoir en ce qui a trait au nombre de nos membres, et c'est une dimension très insidieuse de ces projets de loi dont nous discutons dans notre exposé de principe et qui doit être discutée plus en détail.
    Nous devons nous arrêter là.
    Merci, grand chef, et merci, madame Crowder.
    Passons à M. Rickford.
    Merci, monsieur le président.
    Chef Montour, vous devriez vous réjouir de ne pas être avocat, mais d'avoir du gros bon sens. Être avocat et avoir du gros bon sens vont rarement de pair. Comme mon collègue vient de le souligner, c'est une vraie déclaration d'avocat. M. Lemay est fâché que je critique ma profession.
    Depuis deux semaines, nous avons entendu des témoignages sur le sujet central qui peut être relié au contenu du projet de loi C-3 et ensuite au processus exploratoire et ce qui le justifie; c'est-à-dire, qu'il semble y avoir des problèmes assez graves et importants concernant l'appartenance et la citoyenneté des Indiens inscrits et les conséquences de cette appartenance et cette citoyenneté.
    Je tiens à mentionner, aux fins du compte rendu, que je suis du même avis que le ministre et ses fonctionnaires, qui ont dit avec raison que le ministère n'avait pas d'idées préconçues sur le processus exploratoire distinct, mis à part le fait d'être inclusif. À mon humble avis, cela peut contrer l'impression que ce processus en sera un de type colonial ou d'agent indien.
    En tant que signataire de l'accord sur les pensionnats indiens, même dans les limites du droit et de l'un des règlements de recours collectif les plus importants de l'histoire du monde libre, je crois qu'il y avait un consensus sur un certain nombre de questions juridiques et de politiques précises, qui auraient pu être examinées par un tribunal si le dossier s'était rendu là.
    Cela dit, pendant cette deuxième moitié de mes sept minutes, j'essaierai de comprendre certains des éléments clés de la convergence ou des divergences d'opinion jusqu'à maintenant.
    Je comprends et respecte certaines des inquiétudes concernant les forums nationaux, mais je crois qu'il faut souligner qu'un certain nombre de personnes à cette séance ont participé et participent actuellement à des forums nationaux au sujet de la gouvernance des premières nations. Afin de mieux comprendre quelles sont les opinions divergentes et convergentes, je demanderai à peut-être seulement deux chefs...
    Chef Lonechild, vous avez fait certaines remarques intéressantes à propos d'une approche fondée sur les principes qui respectent une relation de nation à nation basée sur un traité pour la construction d'une nation. Je vous en remercie. Vous aviez l'impression qu'il y avait un consensus général.
    Peut-être pourriez-vous lancer la discussion concernant certains des points concordants et discordants. Il vaut la peine de dire que le processus exploratoire est très ouvert, et pourrait très bien inclure un dialogue au sujet des points de fond que vous avez soulevés.
    Merci.
(1800)
     Merci beaucoup, monsieur Rickford.
    Là encore, la FSIN n'en est pas à son premier processus exploratoire. En Saskatchewan, nous avons le Bureau du commissaire aux traités, qui est, bien sûr, un processus exploratoire; le Treaty Governance Office, qui est en fait un prolongement de ce processus; ainsi que d'autres processus exploratoires qui soit n'ont pas répondu aux attentes en matière de gouvernance des premières nations...
    Mais qu'est-ce qui ferait fonctionner ces processus, chef? Désolé de vous interrompre comme ça, mais c'est que le temps est très limité.
    Bon, alors pour faire vite, nous ne voulons pas des preneurs de notes à nos tables de discussion; nous voulons des décideurs. Si vous envoyez des gens capables de prendre des décisions qui puissent s'asseoir et discuter avec respect avec nos chefs, comme ils l'ont fait — et je le dis avec tout le respect que je dois aux chefs qui siègent à ces tables de discussion depuis longtemps —, je pense au chef Denton George de la première nation Ochapowace, qui n'est plus aujourd'hui.
    Si le gouvernement est vraiment sérieux, il n'enverra pas de preneurs de notes, il enverra des décideurs.
    Oui, nous enverrions des gens pour obtenir un consensus sur le contenu du projet de loi C-3, mais également pour étudier les grandes répercussions de certaines politiques qui ont été soulevées par plusieurs chefs et grands chefs aujourd'hui.
    Je ne peux pas parler pour eux. Je cherche tout simplement à répondre à la question du processus exploratoire. Ce processus est vicié et il faut éviter que cela ne devienne qu'une perte de temps pour vous et pour nous.
    Chef Montour, j'ai été frappé par une de vos observations. Vous avez une histoire riche de collaborations avec le comité de la citoyenneté de l'Assemblée des Premières Nations. Dans le cadre de ce processus, et en vue d'atteindre un consensus, pourriez-vous nous dire ce qui existe déjà, afin de nous permettre de mieux comprendre? Je parle de votre perspective sur la citoyenneté, ainsi que sur les modèles de citoyenneté dans les différentes administrations. Et je ne parle pas premières nations-gouvernement fédéral-gouvernements provinciaux, mais tout simplement des premières nations en tant que telles. Comme je l'ai dit, on essaie de concilier statut, inscription et citoyenneté, et il y a des personnes dans ces trois catégories qui ont leur mot à dire dans ce processus.
    C'est une critique de nos propres gouvernements. Nous ne nous sommes jamais réellement demandés ce que devait être une loi sur la citoyenneté. Je pense qu'il est grand temps que nous le fassions, car la citoyenneté doit remplacer le système d'inscription et le système de statut de nos membres. Les gens doivent devenir citoyens de nos nations. C'est important pour nous.
    L'Assemblée des Premières Nations a mené une étude en 1992. D'après cette étude, il n'y aura plus d'Indiens inscrits d'ici 100 ans si on continue ainsi. Cela veut dire que d'ici 2092, il n'y aura plus d'Indiens inscrits. D'où la question, qu'arrivera-t-il alors? Pour vivre sur nos terres, il faut être membre. Pour être membre, il faut avoir le statut d'Indien. Plus de statut, plus de membres. Le gouvernement du Canada pourrait alors considérer qu'il n'y a nul besoin de préserver ces terres pour les Indiens puisqu'il n'y a plus d'Indiens. Je pense que ce serait le plus grand vol de terres du siècle.
(1805)
    Votre temps est écoulé, monsieur Rickford.
    Grand chef Phillip, avez-vous une observation en 10 secondes ou moins?
    Oui. Je voulais tout simplement dire qu'il y a un monde de différences entre un rendez-vous galant et un mariage. Ce processus exploratoire exhaustif, à notre avis, ne répond absolument pas à la définition légale d'une consultation en bonne et due forme et tout ce que cela implique.
    Cela conclut notre deuxième séance.
    Je voudrais remercier tous les témoins du temps et de l'attention qu'ils nous ont consacrés cet après-midi et des réponses concises qu'ils nous ont données.
    Membres du comité, nous allons encore une fois suspendre brièvement la séance. Nous reprendrons à 18 h 10 pour entendre le dernier groupe.
    La séance est maintenant suspendue.

(1810)
    Je demanderais aux membres du comité de bien vouloir reprendre leur place. Nous allons entamer la dernière partie de notre séance, qui durera une heure.
    Je voudrais aussi demander aux témoins de venir se joindre à nous à la table.
    Chef Maracle, un membre du personnel va vous aider à vous installer.
    Nous sommes ici pour représenter l'AIAI, qui fait partie de ce groupe, mais nous ne ferons pas le même exposé.
    C'est bien, il y aura trois exposés différents.
    Chef Maracle, pendant que vous vous installez, nous allons commencer.
    Je voudrais tout d'abord profiter de l'occasion pour vous présenter des excuses parce que nous vous rencontrons plus tard que nous l'avions prévu au départ. Cela arrive parfois. Nous sommes conscients du fait que nos témoins sont venus d'assez loin pour nous rencontrer aujourd'hui. Il est important que nous ayons l'occasion de verser leurs observations au compte rendu.
    Commençons. Au fait, il y aura trois exposés de dix minutes. Je pense que vous étiez ici pour une partie de la séance et que vous avez pu voir comment nous procédons. Il y aura donc d'abord des exposés de dix minutes. Nous passerons ensuite à une série de questions des membres du comité.
    À ce moment-ci, j'aimerais inviter Mme Sharon Venne à faire un exposé liminaire de dix minutes, s'il vous plaît.
    Je voudrais remercier les membres du comité de nous donner le temps de présenter un exposé.
    Je suis ici aujourd'hui pour représenter le chef et le Conseil de la nation crie d'Onion Lake, qui se trouve dans le territoire visé par le Traité 6 situé dans les provinces actuelles de la Saskatchewan et de l'Alberta. Je représente en outre un certain nombre de peuples visés par des traités qui m'ont demandé de faire entendre leurs voix.
    Dans le titre du projet de loi à l'étude, on parle de l'équité entre les sexes. L'équité entre les sexes est un concept qui existe dans le régime juridique eurocentrique. Notre perception des rôles associés à chaque sexe et de l'équité entre les sexes peut être bien différente de ce que le Canada considère comme étant universel. Le projet de loi à l'étude n'a pas d'incidences sur les lois autochtones de notre nation.
    Pour vous faire un petit historique de la situation, nous venons d'un territoire qui a conclu un traité en 1876 avec la Couronne britannique pour chaque nation individuelle. Lorsque le traité a été signé, le lieutenant-gouverneur et commissaire impérial, Alexander Morris, a demandé qu'un traité d'amitié et de paix soit conclu avec nos nations. Le traité a été conclu entre les nations, et non pas sur une base individuelle. La Couronne suivait ses propres lois qui étaient codifiées dans la Proclamation royale de 1763 selon laquelle les traités sont conclus avec les nations collectivement.
    Lorsque le traité a été conclu, le Commissaire aux traités a demandé aux chefs d'identifier leur peuple. C'était l'auto-identification. Le particulier s'identifiait à une certaine bande et cette bande l'acceptait alors comme faisant partie de sa bande. Le Commissaire aux traités ne choisissait pas les gens en les associant à leurs chefs. Les peuples autochtones se sont associés à leurs chefs et on a créé des listes de bénéficiaires de traités. C'est à partir de ces listes qu'on a créé les listes des Indiens inscrits lorsque la Loi sur les Indiens a été modifiée en 1951.
    Si on regarde les éléments de l'auto-identification des peuples autochtones, l'un des aspects les plus fondamentaux de l'identification est le suivant: premièrement, sur le plan individuel, un Autochtone est une personne qui s'est identifiée comme appartenant à un peuple autochtone — la conscience de groupe; et deuxièmement, une personne autochtone est reconnue et acceptée par le groupe comme étant l'un de ses membres — acceptation par le groupe.
    Cela préserve pour ces collectivités le droit souverain et le pouvoir de décider qui en est membre, et ce sans interférence extérieure. Il s'agit là essentiellement de la définition qui a été acceptée par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Powley en ce qui a trait aux Métis. Ce n'est pas la définition habituelle qui est utilisée au Parlement lorsqu'il traite avec les peuples visés par un traité.
    Au moment où le lieutenant-gouverneur Alexander Morris se trouvait à la maison Carlton pour conclure un traité avec mes ancêtres, le Parlement à Ottawa a adopté une loi pour la civilisation graduelle des Indiens. Lorsque le traité a été conclu, on n'a pas mentionné les lois du Canada. Au fil des ans, le Canada a apporté des modifications fragmentaires à la Loi sur les Indiens pour faciliter son propre programme politique.
    Je vais vous donner des exemples de la Loi sur les Indiens et ses modifications de 1868 à 1975 que j'ai indexés il y a quelques années, pour vous donner une idée du nombre de lois dont nous parlons. La Loi sur les Indiens existait bien avant le rapatriement de la Constitution en 1982. Les peuples autochtones ont lutté très fort pour que nos droits issus de traités soient protégés au cours du processus de rapatriement de la Constitution. C'est grâce à de nombreux efforts de lobbying de la part des peuples autochtones que certains articles ont été insérés dans la Constitution, notamment l'article 25 de la Charte et l'article 35 de la Loi constitutionnelle du Canada.
    La Reine est venue au Canada et a signé la Loi constitutionnelle sur la Colline parlementaire en avril 1982, mais par la suite le gouvernement du Canada et le ministère des Affaires indiennes ont prétendu que la Loi constitutionnelle n'avait pas été édictée. Il n'y a aucune révision des lois du Parlement afin de les rendre conformes à la Constitution, comme on l'a fait lorsqu'on a conclu l'Accord de libre-échange nord-américain. Au contraire, on a eu droit au silence le plus complet de la part du Parlement à cet égard.
    La Loi sur les Indiens a été modifiée à la petite semaine au fil des ans, de façon à ce qu'elle corresponde aux buts et aux objectifs de l'État du Canada, et non pas aux dispositions de la Constitution. Il y a une tendance qui veut qu'on utilise la loi comme moyen d'individualiser les droits des peuples autochtones. Encore une fois, le Parlement participe à ce processus en apportant des modifications à la Loi sur les Indiens, comme si l'article 25 de la Charte n'existait pas.
    Lorsque les listes des bénéficiaires d'un traité ont été converties en listes d'Indiens inscrits, cela constituait un abus des rapports fondés sur les traités. Il s'agissait un abus de l'honneur de la Couronne. Et où est l'honneur de la Couronne dans ces rapports?
    Le gouvernement du Canada, par l'intermédiaire du ministère des Affaires indiennes et d'autres ministères, a pris la définition d'un Indien et a élaboré des politiques dans le but de financer divers programmes et services. Ces programmes et services ont été offerts sans tenir compte des obligations juridiques et constitutionnelles à l'égard des peuples visés par les traités, comme l'a fait ressortir la vérificatrice générale.
(1815)
    Les membres du comité se demandent sans doute ce que tout cela a à voir avec le projet de loi C-3. Si vous m'accordez un moment, je vais vous l'expliquer.
    Lorsqu'il a présenté le projet de loi C-31, le ministre David Crombie s'est exprimé très clairement au sujet de la reconnaissance des Indiens de plein droit. Il s'agit du mécanisme dont se sert le gouvernement pour reconnaître l'identité autochtone aux fins de la prestation de certains avantages à accorder sur le plan individuel. Cette reconnaissance ne se fonde pas sur les obligations constitutionnelles découlant des traités signés avec les Autochtones. Or, l'appartenance est un droit collectif. Ce sont les premières nations qui décident ensemble qui peut faire partie de leurs groupes. En tant qu'État successeur chargé de la mise en oeuvre des traités, le gouvernement du Canada doit accepter la décision collective des Autochtones, tout comme le Commissaire aux traités était tenu d'accepter la liste relative au traité au moment de la signature. Il ne revient pas au Canada de décider qui appartient aux groupes autochtones en utilisant des lois, dont l'objectif est d'assimiler et de détruire les premières nations.
    Permettez-moi maintenant de citer un extrait du jugement rendu par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. À la disposition 66 du jugement — disposition d'ailleurs omise par le ministère de la Justice dans son historique de la cause —, on trouve un libellé extrêmement important. Voici donc ce que les juges de la Cour d'appel ont affirmé, et je cite:
Je ne doute pas qu'on puisse invoquer l'argument selon lequel les éléments de la reconnaissance de l'Indien de plein droit doivent faire partie des droits autochtones issus d'un traité. Les liens entre les droits accordés aux Indiens par la loi et les droits des autochtones protégés par la Constitution...
(1820)
    C'est important, mais parlez lentement, pour les besoins de l'interprétation.
    Excusez-moi. Je tenais à vous citer le passage entier avant la fin des 10 minutes qui me sont imparties. Je vais ralentir.
    Il vous reste cinq ou six minutes.
    Bien. À la disposition 66 du jugement de la Cour d'appel, les juges ont dit ce qui suit, et je cite:
Je ne doute pas qu'on puisse invoquer l'argument selon lequel les éléments de la reconnaissance d'un Indien de plein droit doivent faire partie des droits autochtones issus d'un traité. Les liens entre les droits accordés aux Indiens par la loi et les droits des autochtones protégés par la Constitution sont complexes et n'ont pas encore fait l'objet d'un examen approfondi fondé sur la jurisprudence. Toutefois, il semble probable que le Parlement ne dispose que d'une marge de manoeuvre limitée lorsqu'il s'agit d'établir qui est et qui n'est pas un Indien, tout au moins par rapport à certains faits.
    Tel est le jugement de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique. Nous proposons donc que le comité face appel a des avocats indépendants — c'est-à-dire à des avocats autres que ceux du ministère de la Justice — et qu'ils vous apportent les preuves appuyant cette importante affirmation et montrant comment les pouvoirs de votre comité sont peut-être limités.
    Le comité se penche sur la question de la reconnaissance des Indiens de plein droit. Vous n'ignorez pas qu'à l'occasion de l'adoption du projet de loi C-31, des problèmes sont survenus lorsqu'il s'est agi de définir l'appartenance. À l'heure actuelle, on observe que chez les premières nations, des gens reconnus comme Indiens de plein droit ne reçoivent pas de prestations, des gens qui appartiennent à un groupe d'Indiens ne sont pas reconnus comme des Indiens de plein droit et qu'il n'y a aucun lien entre ces deux situations. Il faut qu'on reconnaisse de nouveau nos droits issus de traités en tant que premières nations. Si toutefois vous avez l'intention de faire participer des gens qui n'ont rien à voir avec ces deux formes d'appartenance, alors le comité est en train de semer la zizanie en ce qui a trait à toutes ces questions qui ne sont pas encore réglées par rapport aux traités.
    Le gouvernement du Canada n'a pas sauvegardé l'honneur de la Couronne. Il n'a pas donné suite aux engagements sacrés qu'il avait pris. Chaque fois, le gouvernement a profité de son non-respect des traités. Il ne s'agit pas d'omissions innocentes.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour examiner les modifications proposées à la Loi sur les Indiens. Nous nous rendons fort bien compte de l'objectif. Le Parlement en 2010 veut faire la même chose que ce qu'ont fait les parlements successifs depuis 1876. Le Parlement veut prétendre que le traité n'a pas été signé. Il veut prétendre que l'article 35 de la Constitution n'a pas été adopté. Le Parlement veut prétendre que le reste du monde n'a pas voté pour accepter la Déclaration sur les droits des peuples autochtones comme norme internationale. La colonie du Canada tient encore à s'accrocher à son passé colonial en définissant qui est un Indien.
    Le comité peut cependant se tourner vers l'avenir et faire entrer le Canada au XXIe siècle en établissant des rapports fondés sur les traités et en mettant ces derniers en oeuvre. Toute la prospérité du Canada résulte de la suppression des avantages dont les Autochtones sont censés jouir grâce aux traités qu'ils ont signés car on n'a pas respecté les obligations issues de ces mêmes traités.
    À cette fin, nous allons vous faire un certain nombre de recommandations, dans l'espoir qu'elles se concrétiseront de notre vivant.
    Madame Venne, puisque vous n'avez plus que 30 secondes, je voudrais vous demander combien de recommandations vous avez.
    J'en ai quatre.
    Très bien. Pourriez-vous nous les énumérer très rapidement?
    Oui. Les voici: que le Parlement délaisse le soutien physique des personnes pour se tourner vers un soutien physique des premières nations; que le concept de statut prenne de l'importance et évolue davantage vers une identification des premières nations; que le gouvernement revienne à la base du traité, en tenant compte que c'est la Couronne qui est signataire du traité, et non pas le gouvernement fédéral; et que cette relation soit fondée sur l'honneur de la Couronne.
    Merci.
    Merci beaucoup. C'était parfait.
    Nous passerons maintenant à Dre Palmater pour les 10 prochaines minutes. Elle est présidente du Centre for the Study of Indigenous Governance de l'Université Ryerson.
    Bienvenue, docteure Palmater.
    Merci beaucoup de m'avoir invitée à m'exprimer sur cette question particulièrement importante. Je suis d'accord avec tout ce qui a été dit jusqu'ici sur l'autonomie gouvernementale et l'autodétermination dans notre province.
    Cela étant dit, mon exposé porte surtout sur l'aspect technique du projet de loi C-3. Je voulais également vous dire que je ne suis pas l'avocate de qui que ce soit aujourd'hui. Je ne représente aucune organisation politique. Je représente aujourd'hui mes ancêtres, ma famille élargie, mes enfants et les générations futures — en fait, les sept prochaines générations.
    Je m'appelle Pam Palmater et je suis une femme micmaque; toutefois, je suis une Indienne non inscrite. Je suis une Indienne non inscrite de première génération car je suis Indienne du côté de ma mère, et non pas du côté de mon père. Cela a un effet négatif sur tous les membres de ma famille, non seulement sur moi en tant qu'Indienne non inscrite, mais sur mes enfants également. Tous mes frères et soeurs seront touchés d'une façon ou d'une autre par le projet de loi C-3 en raison de nos différentes circonstances. En effet, certains d'entre nous sont nés avant 1951, d'autres, sont illégitimes, et d'autres encore, sont adoptés. Tout cela va diviser notre famille encore davantage.
    Je vois six problèmes majeurs dans le projet de loi C-3. Le paragraphe 2(2) du projet de loi C-3 ne fait que reprendre l'alinéa 6(1)a) de la Loi sur les Indiens, tel qu'on le retrouve actuellement, et ne fera donc rien pour éliminer la discrimination sexuelle. Il n'y a rien dans la décision de la Cour d'appel dans l'affaire McIvor qui empêche le Canada de s'attaquer à la discrimination sexuelle dans son ensemble.
    Dans le jugement Marshall, la Cour suprême du Canada a confirmé le droit issu d'un traité des premières nations micmaques de pêcher à des fins commerciales. La cour a fait valoir qu'il ne s'agissait pas seulement d'une entente signée avec une première nation en ce qui concernait l'anguille; en fait, l'accord était beaucoup plus large. On a signé des ententes sur toutes sortes d'espèces de poissons avec toutes les premières nations intéressées. Jamais nous a-t-on dit que l'affaire Marshall nous limitait à un seul scénario.
    Pareillement, lorsque Mme Lovelace a présenté sa cause aux Nations Unies, le Canada a non seulement fait appliquer l'alinéa 12(1)b) aux femmes, mais également à leurs enfants. De plus, les bandes pouvaient désormais choisir leurs membres. Ils ont modifié la présomption de paternité lorsque celle-ci n'est pas précisée pour la faire passer de la paternité indienne à une paternité non indienne. Enfin, ils ont réinscrit beaucoup d'autres personnes. Il est inconcevable qu'à l'heure actuelle, nous puissions dire qu'une seule cause limite nos capacités d'une façon ou d'une autre.
    En ce qui concerne le deuxième problème, en présumant que le paragraphe 2(2) du projet de loi C-3 n'est pas amendé, le paragraphe 2(3) du projet de loi, qui ajoute le sous-alinéa 6(1)c.1)(i) à la Loi sur les Indiens, est toujours problématique parce qu'il contient cette date butoir de 1951. Il a été dit au sein de ce comité qu'il n'y a pas de date butoir de 1951 et qu'il n'y aura donc aucun effet négatif sur qui que ce soit, surtout sur les personnes qui ont des frères et des soeurs nés après cette date, mais je n'y croirais pas trop parce que ce n'est pas ce que dit la loi.
    Le troisième problème, c'est que le paragraphe 2(3), qui ajoute le sous-alinéa 6(1)c.1)(iv) à la Loi sur les Indiens, est probablement le plus grave parce qu'il crée une nouvelle distinction que l'on ne retrouvait pas auparavant dans la Loi sur les Indiens. En effet, on fait maintenant la distinction entre les enfants des femmes indiennes qui ont marié un non-Indien et qui ont donc des enfants indiens non inscrits, et ceux qui n'ont pas d'enfants indiens non inscrits. Il n'est pas nécessaire que le Canada crée une nouvelle distinction qui, dans les faits, discriminera sur la base du statut familial.
    Le quatrième problème, c'est que les dispositions 7 et 8 du projet de loi C-3 ne garantissent pas l'appartenance à une bande aux personnes inscrites en vertu du projet de loi C-3, contrairement à ce qui avait été fait en 1985. En effet, à l'époque, on protégeait dans une certaine mesure l'appartenance à une bande des personnes qui se réinscrivaient. Pourquoi ne pas le faire maintenant? L'affaire Lovelace ne porte pas strictement sur l'appartenance à une bande, et cette affaire non plus, mais cela ne veut pas dire que l'on ne puisse pas y inclure des dispositions de protection fondées sur le sexe.
(1825)
    Cinquièmement, même si le comité n'adoptait pas un amendement plus élargi pour résoudre le problème de la discrimination sexuelle en vertu de l'article 6, le projet de loi devrait quand même être amendé puisqu'il ne résout pas non plus le problème de la discrimination sexuelle soulevé dans l'affaire McIvor. Les personnes visées par la règle « mère grand-mère » ont toujours un meilleur statut que celles visées par l'alinéa 12(1)b). Dans mon mémoire de 15 pages — je ne sais pas si vous l'avez tous reçu, car il est peut-être toujours en cours de traduction —, je fournis des graphiques qui l'expliquent bien.
    Bref, ne pas résoudre le problème de la discrimination sexuelle soulevé dans l'affaire McIvor est contraire à l'objectif du projet de loi C-3. De quoi parlons-nous si ce n'est de résoudre les problèmes soulevés dans l'affaire McIvor?
    Le dernier problème, c'est l'article 9, qui est une insulte aux femmes indiennes et à leurs descendants qui attendent justice depuis 25 ans déjà. Cette disposition est également contraire à l'esprit et à l'objet de la Charte canadienne des droits de la personne. Des fonctionnaires des Affaires indiennes ont témoigné devant le comité et ont dit que même si le projet de loi C-3 ne traitait pas des grandes questions de discrimination sexuelle et autres types de discrimination, l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne permettrait à des particuliers de présenter des plaintes en matière de discrimination. Pourtant, parallèlement, le Canada comparaît devant la Commission canadienne des droits de la personne et remet en question la compétence de la commission d'entendre de telles plaintes, vu que le statut n'est pas un service. Il me semble malhonnête de la part du Canada de limiter le recours en vertu du projet de loi C-3 sous prétexte qu'il existe d'autres recours, alors qu'en fait, ce n'est pas le cas.
    J'ai donc neuf recommandations très précises.
    Premièrement, le Canada devrait retirer le projet de loi, demander un délai de grâce, et rédiger une loi mieux ficelée.
    Si cela s'avère impossible, alors je propose une modification au projet de loi C-3 en ajoutant, « ou est né avant le 17 avril 1985 et est un descendant direct de cette personne », à l'alinéa 6(1)a) de la Loi sur les Indiens.
    Troisièmement, il faudrait supprimer les articles 3 et 4 du projet de loi C-3 et les références à l'alinéa problématique 6.(1)c.1) de la Loi sur les Indiens.
    Quatrièmement, il conviendrait d'ajouter une nouvelle disposition avant ou après les articles 7 et 8 du projet de loi C-3 pour garantir les droits des personnes visées par le projet de loi en ce qui concerne l'appartenance à une bande, en particulier pour ceux qui sont nés avant 1985.
    Cinquièmement, l'article 9 du projet de loi C-3 devrait être abrogé intégralement ou modifié de façon à accorder une protection limitée aux bandes et uniquement en relation avec le statut.
    Sixièmement, il faudrait accorder un financement adéquat aux premières nations pour les programmes et services fournis par les bandes aux premières nations en fonction du nombre de membres inscrits. Par ailleurs, il serait bon d'encourager les bandes à revoir leurs codes d'adhésion et à les comparer avec la Charte des droits de la personne et la Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'y apporter les modifications nécessaires pour assurer le respect de l'égalité entre les sexes.
    Septièmement, le Canada, en partenariat avec les organisations autochtones nationales, provinciales et régionales, les communautés des premières nations, et les particuliers, négocie un processus permettant d'indemniser les personnes touchées par le projet de loi C-3 de la façon la plus équitable et la plus rapide possible. Après tout, ces personnes attendent déjà depuis plus de 25 ans.
    Huitièmement, il conviendrait de rédiger immédiatement des lois, en partenariat avec ces mêmes groupes autochtones, visant à supprimer les quelques dispositions de la Loi sur les Indiens qui entraînent encore une discrimination fondée sur le sexe.
    Neuvièmement, le Canada, en partenariat avec ces mêmes groupes, devrait négocier la mission, le mandat, la structure financière, les objectifs mesurables d'un processus de consultation collectif visant à préparer d'autres modifications ayant pour but de supprimer les autres problèmes de discrimination à courte échéance, mais il devrait négocier un processus semblable à longue échéance pour établir des traités modernes favorisant l'autonomie gouvernementale et l'autodétermination des premières nations.
    Me reste-t-il encore du temps?
(1830)
    Il vous reste environ dix secondes.
    D'accord.
    Premièrement, il faut noter que le projet de loi C-3 ne résout pas les questions de discrimination sexuelle dans la cause McIvor. Deuxièmement, le Canada n'est pas limité par la décision McIvor. Troisièmement, si le projet de loi C-3 n'est pas amendé, il sera incompatible avec la Loi canadienne sur les droits de la personne. Et quatrièmement, on présume que le projet de loi C-3 aurait des conséquences imprévues. Nous savons que ce n'est pas le cas.
    Merci, docteure Palmater.
    Passons maintenant au chef Donald Maracle. Je vois que vous êtes accompagné par Velma Hill-Dracup — bienvenue — et aussi par Keith Sero. M. Sero est conseiller auprès des Mohawks de la baie de Quinte, tout comme Mme Hill-Dracup.
    Passons donc au chef Maracle. Allez-y, vous avez 10 minutes.
    She:kon sewakwe:kon.
    Bonjour.
    Bonsoir, tout le monde.

[Français]

    Nous offrons nos meilleurs voeux aux députés de ce comité de la Chambre des communes.

[Traduction]

    Je représente l'Association des Iroquois et des Indiens alliés. J'ai su vendredi que je devrais remplacer aujourd'hui le grand chef, donc je ferai de mon mieux.
    L'Association des Iroquois et des Indiens alliés inclut huit communautés du Sud de l'Ontario, c'est-à-dire 20 000 membres. Les Mohawks de la baie de Quinte, dont je suis le chef, comptent 8 000 membres.
    Mon exposé vous a été distribué. Le projet de loi C-3, Loi sur l'équité entre les sexes relativement à l'inscription au registre des Indiens, qui porte sur la citoyenneté des premières nations, est contraire à la Proclamation royale de 1763 et au Traité de Niagara de 1764. La Proclamation royale de 1763 a été exécutée au terme de la guerre du Pontiac et visait à reconnaître la souveraineté et l'autonomie des premières nations sur leur territoire dans le cadre d'une relation nation à nation. Le Traité de Niagara, quant à lui, était un traité de paix et d'amitié signé avec la Couronne un an après la revendication de souveraineté; il confirmait le respect mutuel entre les deux parties et l'engagement de la Couronne à respecter la compétence des premières nations sur leur terre et leur peuple.
    La Loi sur les Indiens a été adoptée unilatéralement en 1876, alors qu'on établissait les pensionnats indiens, et elle n'a jamais fait l'objet d'un consentement de la part des premières nations. L'article 35 de la Loi constitutionnelle du Canada reconnaît et réaffirme les droits des premières nations, et les droits ancestraux et issus des traités. Les droits des Autochtones et les droits issus des traités sont des droits inhérents qui n'ont jamais été dévolus au Canada et qui sont toujours en vigueur.
    Le projet de loi C-3 est incompatible avec l'article 35.1 de la Loi constitutionnelle sur le droit à l'autonomie gouvernementale. Les premières nations ont le droit d'exercer leur compétence et de se gouverner sans ingérence de la part du fédéral. Ces droits incluent le droit à la détermination de nos membres.
    La Commission royale sur les peuples autochtones reconnaît que la citoyenneté relève des premières nations; c'est elle qui détermine leur citoyenneté et les critères de citoyenneté. Les Nations Unies se sont également prononcées sur cette question à l'article 33.1 de sa déclaration, qui dit que les peuples autochtones ont le droit de déterminer leur propre identité et leurs membres conformément à leurs coutumes et traditions.
    La Couronne a toujours une obligation de nous consulter sur toute question législative ou politique qui touche nos peuples ou le bien-être de nos communautés. La Cour suprême du Canada a reconnu que le gouvernement fédéral doit consulter les premières nations et répondre à leurs besoins avant de prendre toute mesure qui pourrait toucher leurs droits ancestraux et issus de traités.
    Le projet de loi C-3 déroge au traité signé avec les premières nations et aux droits autochtones. Il s'agit d'un autre cas où le Canada allègue que les lois ne s'appliquent pas lorsqu'il traite avec les premières nations. Le Canada a tenu de nombreuses séances de participation publique...
(1835)

[Français]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Ai-je bien compris que le chef a distribué un document? S'il a été distribué, il ne l'a pas été dans les deux langues officielles. Donc, ce document ne devrait pas être entre les mains des membres de ce comité sans qu'il y ait eu traduction. Je ne l'ai pas et je n'ai pas de traduction. Je vois que certains ont des documents que je n'ai pas.
    Le greffier a reçu le document et il est maintenant en train d'être traduit. Nous ne l'avons pas ici.
    Certains l'ont.
    Le président: Non.
    M. Marc Lemay: Alors, il n'a pas été distribué.

[Traduction]

    Non, ils n'ont pas encore été distribués.
    Karen Campbell les a distribués au début de la séance.
    Il a été envoyé au greffier, mais il faut le traduire avant de le faire circuler aux... excusez-moi un instant.
    D'accord. Un document a été distribué par un membre du personnel de l'un des témoins. Les documents qui sont distribués à titre personnel ne doivent pas nécessairement suivre le protocole, car ils n'ont pas été distribués par l'entremise du greffier. Nous demandons aux témoins de fournir les documents à distribuer dans les deux langues officielles. Ce n'est pas la première fois que cela arrive; aussi, lorsque vous citez le document, tel que vous nous l'avez donné aujourd'hui, encore faut-il le traduire et ensuite le remettre à tous les membres. Sachez que certains membres n'auront pas le document sous la main, et lorsque vous y ferez référence, veuillez en tenir compte pour que nous puissions plus facilement vous suivre.
    Merci, chef Maracle.
(1840)
    Je m'excuse, monsieur Lemay.
    Le Canada a organisé un nombre limité de séances de participation publique dans un délai très serré et les a fait passer pour des séances d'information. L'obligation de consulter et de répondre aux besoins ne peut pas être reléguée à des tierces parties comme le MAINC ou l'APN. Des consultations dignes de ce nom doivent être faites auprès des détenteurs des droits, c'est-à-dire nos membres. Il y a un énorme problème de capacités et de ressources. Les premières nations n'ont ni les capacités ni les ressources pour administrer leurs propres règles d'appartenance, tandis que les Affaires indiennes continuent de jouer un rôle paternaliste en appliquant des politiques opprimantes comme la Loi sur les Indiens.
    Les premières nations sont en tête de toutes les statistiques socioéconomiques du Canada, y compris la pauvreté et le chômage. Le projet de loi C-3 ne fera qu'exacerber les problèmes socioéconomiques parmi les premières nations en raison du manque de ressources et de services comme le logement, l'éducation, les soins de santé et l'application des règles d'appartenance. Le Canada n'a promis aucune ressource financière supplémentaire pour accompagner l'augmentation marquée du nombre de membres proposée en vertu du projet de loi C-3.
    J'ai distribué à titre personnel un rapport qui a été publié dans le Hill Times le lundi 1er mars 2010 sur les conditions socioéconomiques que l'on retrouve dans toutes les réserves au Canada. On y parle plus particulièrement du sous-financement chronique, problème à la base d'une plainte en matière de droits de la personne présentée à la Commission des droits de la personne ainsi qu'au rapporteur spécial des Nations Unies.
    Le projet de loi C-3 ne reconnaît pas les institutions, les processus et les approches des premières nations pour déterminer quels sont leurs membres. Les premières nations avaient ces processus des milliers d'années avant d'avoir des contacts avec les Blancs. Les formes traditionnelles de médiation et de mode alternatif de résolution des différends, comme les conseils des aînés et les cercles des aînés, doivent être établies, reconnues et utilisées. De plus, l'abrogation de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui est prévue pour 2011, rend les premières nations vulnérables en cas de poursuite en matière d'appartenance dans toutes sortes de situations, y compris le refus d'offrir des services, services qui ne peuvent pas être fournis en raison du manque de service et de financement. Là encore, les Affaires indiennes prévoient qu'il y aura de 20 000 à 45 000 nouveaux membres, mais il n'y a aucune promesse de ressources financières additionnelles pour servir tous ces nouveaux membres dans les réserves. Les ressources et les services des premières nations seront étirés davantage à la suite de l'adoption du projet de loi C-3.
    De plus, le Canada ne reconnaît pas que les premières nations dont les territoires sont limités auront besoin de terres supplémentaires pour servir une population grandissante. Le Bureau régional de l'Ontario du ministère des Affaires indiennes ne peut même plus financer des systèmes de traitement des eaux ou la construction de nouveaux quartiers pour loger tous les membres supplémentaires. Nous avons actuellement 18 000 acres de terre dans une réserve, mais une grande partie de ces terres ne peuvent pas être utilisées car elles sont marécageuses. Les premières nations ont les terres les plus pauvres au Canada et elles doivent souvent attendre très longtemps pour obtenir des services de base que tous les autres Canadiens tiennent pour acquis, tels que l'approvisionnement en eau potable.
    Je m'exprime en tant que chef de l'une des grandes premières nations en Ontario. Il y a actuellement 105 noms sur notre liste d'attente pour le logement. Le logement abordable pose problème. Il n'y a pas assez d'argent pour payer les études postsecondaires afin que les gens puissent se sortir de la pauvreté. Je pense que la plupart des gens à cette table reconnaîtront que l'éducation est un outil important pour se sortir de la pauvreté. Adopter des lois pour résoudre un problème en matière de droits de la personne, tout en imposant une pléthore de nouveaux problèmes socioéconomiques à des communautés déjà en difficulté, n'est pas un pas dans la bonne direction. Je me rends compte que les tribunaux ont ordonné au Canada de corriger une injustice faite aux femmes autochtones, et nous sommes tout à fait en faveur de cette mesure. Toutefois, il faut adopter une approche holistique à ce problème; sinon, nos problèmes socioéconomiques ne vont qu'empirer.
    Merci, chef Maracle. Je vous suis reconnaissant.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés.
    Nous allons commencer avec M. Russell, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et bonsoir.
    Je vous remercie de votre patience. Je sais que vous avez attendu longtemps, mais je crois que ce travail est très important, et les commentaires que vous faites aideront les membres du comité à améliorer ce projet de loi.
    Je suis très curieux de savoir pourquoi Mme Palmater dit que le projet de loi C-3 ne satisfait pas au critère établi par la décision McIvor. Je me demandais si vous pouviez nous en dire un peu plus à ce sujet. Je pense que nous devrons certainement poser cette question aux fonctionnaires du ministère également, pour connaître leurs réponses.
    Je pense que vous soulevez un très bon point. Lorsqu'il y a eu d'autres dossiers concernant les droits des Autochtones ou le statut d'Indien, le gouvernement s'est donné du mal pour aller au-delà du jugement du tribunal et élargir un peu la portée du projet de loi. Vous avez donné deux exemples: l'affaire Marshall et, bien sûr, l'affaire Lovelace. Cependant, il semble ici que le gouvernement s'est employé à limiter la portée le plus possible, comme si le projet de loi devait répondre uniquement à la situation familiale dont il est question dans l'affaire McIvor, et c'est tout. Et cela pourrait convenir à d'autres cas également s'ils sont assez chanceux. Il semble que ce soit l'approche que l'on a utilisée. J'aimerais connaître votre opinion sur le premier point, que le projet de loi ne répond pas à la décision McIvor, parce que c'est très important.
    Le deuxième problème concerne les droits de la personne. Ai-je raison de croire que vous dites que nous créons une situation qui amènera les premières nations à déposer des plaintes? Plus de gens seront des Indiens inscrits, mais nous n'offrons pas les ressources nécessaires. Voilà ce que fait le gouvernement. Conséquemment, comme le chef Maracle l'a dit, si ces gens ne peuvent pas avoir accès au logement ou à d'autres services de base, il y aura plus de plaintes pour atteinte aux droits de la personne. Est-ce la relation entre le projet de loi C-3 et l'abrogation de l'article 67, qui entrera en vigueur d'ici un an?
(1845)
    Au sujet de votre premier commentaire, selon lequel le Canada a choisi de présenter un projet de loi à la portée très limitée, nous avons beaucoup d'exemples où le Canada a présenté une réponse beaucoup plus vaste pour régler les problèmes fondamentaux. Il me faut également souligner que le Canada ajoute de nouveaux Indiens à la liste régulièrement. Il y a eu Conne River, il y a eu les Innus, et maintenant, il y aura la Fédération des Indiens de Terre-Neuve. Mais il n'y a rien pour les femmes indiennes et leurs descendants qui veulent être traités de façon équitable. Je crois que c'est le chef Montour ou M. Powless qui a dit que le Canada a dû participer à cette discussion malgré lui. Cela constitue une importante inquiétude.
    Dans la version traduite du document, j'ai inclus deux tableaux, un qui démontre de quelle façon la situation des femmes indiennes qui ont marié des non-Autochtones et celle des gens à qui s'applique la disposition « mère grand-mère » ne sont toujours pas pareilles, même avec le projet de loi C-3. J'ai aussi inclus un tableau qui donne l'exemple de ma famille pour démontrer que ce n'est pas le cas. La majorité des descendants touchés par la disposition « mère grand-mère » auront toujours le statut d'Indien en vertu de l'aalinéa  6(1)a) et pourront transmettre le statut à leurs petits-enfants en vertu du paragraphe 6(2). Ce n'est pas le cas pour les descendants visés par l'alinéa 12(1)b), et voilà où réside l'iniquité. Il ne faut pas se limiter à certaines personnes touchées par la disposition « mère grand-mère ». Il faut prendre en compte toutes les personnes touchées par cette disposition.
    Pour répondre à votre question concernant la Loi canadienne sur les droits de la personne et sa relation avec le projet de loi C-3, je suis d'accord avec vous quand vous dites que nous allons créer un problème pour les premières nations. Plus précisément, je voulais parler de l'article 9, qui refuse toute indemnisation à ceux qui ont été victimes de discrimination après 1985 et la mise en oeuvre de la charte, et qui pourrait limiter les recours à la Commission canadienne des droits de la personne.
    Si vous allez devant la Commission canadienne des droits de la personne pour dire que vous avez été victime de discrimination à cause de votre statut d'Indien, et que le ministère de la Justice n'obtient pas gain de cause en matière de compétence, ou retarde les procédures à cause du processus conjoint, quel sera le recours? Si le Canada ne peut pas être tenu responsable en vertu du projet de loi C-3, quelles seront les répercussions sur la Loi canadienne sur les droits de la personne? Je n'ai pas encore vu d'analyse du ministère de la Justice, du MAINC ou de toute autre organisation. J'aimerais savoir ce que la Commission canadienne des droits de la personne a à dire à ce sujet.
    Ce qui m'inquiète le plus, c'est qu'on dit que vous pouvez avoir un recours en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne, mais peut-être pas si le projet de loi est adopté.
(1850)
    Monsieur Maracle, au sujet des conséquences du projet de loi C-3, en gros, tous les témoins ont dit qu'il restera une certaine discrimination. Bon nombre d'entre eux ont dit que nous devrions l'éliminer, si possible, par la procédure. Je ne sais pas quelle sera la réponse du gouvernement, mais c'est certainement notre position. Et il pourrait y avoir des conséquences au-delà du projet de loi C-3 — il ne s'agira peut-être pas de 45 000 personnes, mais de 100 000 ou de 150 000. Nous ne connaissons pas le chiffre.
    Lorsque nous leur avons demandé s'ils avaient fait une analyse des conséquences financières, ils nous ont répondu par la négative. Je ne peux pas croire tout ce que j'ai entendu, mais ils m'ont dit qu'ils ne l'avaient pas fait. Connaissant tous les comptables à la petite semaine qui sont en face, il doit y avoir quelqu'un qui a fait le calcul.
    Mais vous dites qu'il y aura des conséquences importantes pour vos communautés. Est-ce exact?
    C'est ce que nous croyons. M. Crombie a fait des promesses aux chefs en 1985. Les chefs avaient alors demandé qu'il y ait une analyse financière des répercussions des lois sur les programmes et services des premières nations. Cela n'a pas été fait.
    Monsieur Crombie, qui était alors le ministre des Affaires indiennes, nous avait promis que les premières nations n'y perdraient pas. Nous nous sommes retrouvés avec des pressions énormes en matière de logement, ainsi que de longues listes d'attente pour les études postsecondaires. Je crois que l'Assemblée des Premières Nations dit qu'il y a 10 000 membres des premières nations sur la liste d'attente pour les études postsecondaires. Sans éducation, les premières nations ne peuvent pas régler leur problème de pauvreté.
    Lors de l'adoption de tout projet de loi visant à corriger la discrimination fondée sur le sexe, il est essentiel qu'une analyse financière des conséquences soit faite, afin de s'assurer que le projet de loi n'aggrave pas les conditions socioéconomiques des premières nations.
    L'autre aspect ayant trait à la justice sociale, c'est que la disposition « mère grand-mère » touche généralement des gens qui descendent de deux générations de femmes non autochtones qui ont obtenu leur statut par le mariage. Il s'agirait d'une insulte raciale envers les femmes des premières nations si les petits-enfants des femmes qui ont obtenu le statut par le mariage puissent transmettre ce statut à leurs descendants plus éloignés que ne le peuvent celles qui sont d'origine indienne.
    Merci, monsieur Russell.

[Français]

    Monsieur Lévesque, la parole est à vous.
    J'aimerais partager le temps qui m'est alloué avec M. Lemay. Je N,ai qu'une question à poser
    Mesdames, messieurs, je ne suis pas avocat, mais conseiller en relations de travail. Tout cela me donne l'impression d'un rapiéçage, encore aujourd'hui, pour combler une mesure qui a été établie. Avec tout le temps que le gouvernement a eu, on a deux petits paragraphes pour satisfaire la Cour suprême. Cela me fait penser un peu à un ingrédient qu'on ajoute à une recette et qui peut sauver toute la sauce. Les membres du Barreau pourraient dire qu'il s'agit de rendre plus difficile une vue d'ensemble claire du corpus législatif.
    Madame Palmater, vous avez présenté des éléments. M. Maracle a très bien illustré le problème existant, soit que des Premières nations ont leurs propres règles. Il faudra agir en fonction de cela, quitte à tenir une retraite fermée avec les décideurs pour établir une base égale pour tout le monde.
    Pour le moment, étant donné qu'il faut satisfaire à une décision de la Cour suprême, voyez-vous une possibilité de modification? Mon collègue M. Lemay, qui a les idées fertiles, pourra soumettre une suggestion. Je ne sais pas si vous étiez présent quand il l'a mentionnée. Seriez-vous capable, d'ici vendredi, de soumettre des idées qui, sans heurter les protections existantes, vont garantir et améliorer la reconnaissance des mères, des grand-mères et des filles et, peu importe le sexe, la reconnaissance d'appartenance à un statut?
(1855)

[Traduction]

    Est-ce que quelqu'un...?
    Allez-y.
    Parliez-vous de l'appartenance à une bande et du statut, ou seulement du statut?

[Français]

    Je parlais de la reconnaissance du statut et de l'inscription à une bande. On ne se contente pas que de la reconnaissance du statut. Je suis Québécois, je connais mon statut mais si je ne peux pas m'inscrire au sein d'une population, cela ne vaut pas grand-chose.
    Je suis d'accord.

[Traduction]

    Avant 1985, les bandes ne contrôlaient pas les règles d'appartenance. C'est le Canada qui décidait pour toutes les bandes. Alors lorsque l'on parle de redonner le statut d'Indien aux descendants de femmes indiennes qui ont marié des non-Autochtones, cela devrait également inclure l'appartenance à une bande, parce que c'était à une époque où les bandes n'avaient pas le contrôle de leurs règles d'appartenance.
    Si vous parlez de la période après 1985, c'est une toute autre histoire, et j'ai des tonnes de recommandations à faire sur les règles d'appartenance aux bandes.
    Mais je parle de la période avant 1985. Il est évident que les descendants de ces femmes indiennes qui ont marié des non-Autochtones devraient appartenir à une bande, puisque c'était la responsabilité du Canada à l'époque. Comment pouvons-nous leur donner le statut seulement, sans l'appartenance à une bande? Et si vous me demandez de soumettre des suggestions plus tard au comité, je le ferai, bien sûr.

[Français]

    Me reste-t-il du temps?
    Le président: Il reste trois minutes.
    D'accord.
    Il y a deux aspects. Le premier est l'inscription. Elle se fait en vertu de l'article 6 de la Loi sur les Indiens. Cette inscription est discriminatoire, tout le monde est d'accord là-dessus. Depuis deux semaines, tout le monde l'est. Pour notre part, nous ne pouvons intervenir qu'en ce qui concerne l'article 6. J'ai vu, Dr. Palmater, que vous parlez également des règles d'appartenance à la bande. Mais ça, on ne peut pas y toucher. Voyez vous la limitation? On ne peut toucher qu'à l'inscription. C'est déjà assez compliqué, je l'admets. Si nous enlevons la discrimination — nous allons tenter de l'enlever —, il restera toujours à la bande autochtone le pouvoir de ne pas accepter une telle personne. Celle-ci devra alors se présenter devant la Commission des droits de la personne. Je ne sais pas si vous me comprenez. Ici, le pouvoir qu'on a, c'est uniquement de modifier l'article 6. Je ne peux pas toucher à l'article 10 ou alors ce serait ultra vires par rapport aux pouvoirs de la Chambre. Qu'est-ce que vous en pensez?

[Traduction]

    Allez-y.

[Français]

    Je ne suis pas d'accord.
    Ah, bravo! Enfin!

[Traduction]

    Pourquoi?
    Voici pourquoi. En 1985, l'affaire Lovelace portait sur le statut. Mais lorsque le Canada y a répondu, il ne s'est pas limité à modifier le statut des Indiennes et de leurs descendants; il a aussi modifié la capacité des bandes à déterminer leurs propres règles d'appartenance. L'affaire n'avait pourtant pas porté sur cette question. Le Canada a également changé la présomption légale de paternité chez les Indiens. De plus, il a apporté des changements qui ont touché d'autres types de personnes pour qui le statut pourrait être rétabli. C'est une autre question qui n'avait pas été abordée du tout dans le cadre de l'affaire. Il n'avait jamais été question d'apporter de tels changements. Et pourtant, le Canada a dit: « Savez-vous quoi? Nous allons jouer avec les règles d'appartenance aux bandes. Quiconque veut le faire peut le faire. » C'est la même chose aujourd'hui.
    Je veux être bien claire: je ne parle pas de la situation à partir de 1985. Je parle de toutes les personnes qui ont été touchées, dont le statut a été rétabli, parce qu'avant 1985, les bandes n'avaient pas la capacité d'établir leurs règles d'appartenance. Comme cette responsabilité lui incombait, le Canada a l'obligation de protéger les personnes nées avant 1985, que ce soit au chapitre de l'appartenance à une bande ou à celui du statut.

[Français]

    Madame Crowder, vous avez la parole pour sept minutes.
(1900)

[Traduction]

    Monsieur le président, j'aimerais remercier les témoins. Vous avez présenté des renseignements de première importance.
    J'aimerais commencer par la Dre Palmater. Je suis impatiente de lire votre mémoire, parce que vous avez présenté des questions complexes qui, je crois, doivent attirer notre attention. J'aimerais maintenant vous poser deux questions brèves.
    Si je comprends bien, vous voulez que nous supprimions les articles 3 et 4 en entier du projet de loi C-3?
    Cela dépend. Si on ajoute les mots déjà indiqués à l'alinéa 6(1)a), il faut supprimer le sous-alinéa 6(1)c)(i) en entier. Dans le cas contraire, il faudrait supprimer le sous-alinéa 6(1)c.1)(iv) et la division 9.
    Est-ce que cette demande se trouve aussi dans votre mémoire?
    Oui.
    J'aimerais revenir un peu en arrière. Vous avez raison, le gouvernement aurait pu décider de présenter un projet de loi de portée beaucoup plus grande. Rien, dans le jugement McIvor, n'empêchait le gouvernement de présenter un tel projet de loi — rien. En conséquence, nous nous retrouvons aujourd'hui avec un projet de loi très restreint qui est difficile à amender. Il sera intéressant de voir quelles décisions seront prises concernant les amendements que nous proposerons, et de voir si ces amendements seront considérés comme faisant partie de la portée du projet de loi. Voilà le défi que nous devons relever. Vous savez probablement qu'on a déjà proposé de retirer le projet de loi et d'en présenter un autre qui conviendrait mieux.
    J'aimerais maintenant parler des droits de la personne au Canada, une question que vous avez mentionnée, mais qui n'a pas été approfondie. Des députés ont reçu une lettre d'un dénommé Jeremy Matson, né en 1977, qui a porté un litige devant le Tribunal canadien des droits de la personne. Si je vous comprends bien, vous dites que le ministère fait valoir devant le tribunal que celui-ci n'a pas l'autorité d'instruire l'affaire? Même si le ministère et le ministre nous disent qu'il est possible de présenter une plainte relative aux droits de la personne, le gouvernement lui-même, le ministère lui-même, allègue que le Tribunal des droits de la personne n'a pas compétence en la matière. Est-ce que j'ai bien compris?
    Vous avez bien compris. J'ai reçu la même lettre de Jeremy Matson. Il a communiqué avec moi parce qu'il connaît mon site Web, qu'il sait que j'ai été invitée à témoigner ici aujourd'hui, et qu'il veut bien faire comprendre que les allégations du gouvernement sont contraires à ce qui a été dit au comité.
    C'est pourquoi j'ai soulevé la question.
    On a donc éliminé ce recours, ni plus, ni moins. C'est pourquoi vous avez mentionné la division 9. Si le tribunal se range du côté du gouvernement et juge qu'il ne s'agit pas d'un service, et donc qu'il n'a pas l'autorité d'instruire cette affaire, et que la division 9 demeure, les gens n'auront plus de recours. Ils ne pourront plus faire appel au Tribunal des droits de la personne pour faire valoir leur statut, parce que la division 9 limite leur capacité en la matière. Ils n'auront plus aucun recours.
    Ce que nous disons, c'est qu'en rendant une telle décision, le tribunal affirmerait que les Indiennes et leurs descendants n'ont pas le droit d'avoir un recours en cas de violations de la charte. Seules les Indiennes et leurs descendants seront concernés. Je ne pense pas que de nos jours, on ait le droit ou l'autorité de prendre une telle décision, à moins bien sûr de modifier la Constitution.
    Je reviens un peu en arrière. Un projet de loi antérieur — je crois que c'était le C-21 — portait sur l'abrogation de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cette mesure permettait, en théorie, de déposer une plainte relative aux droits de la personne. Elle est cependant sans effet si on empêche aujourd'hui les gens de présenter des plaintes sur le statut en faisant valoir l'argument concernant le service.
    Oui, ce sera en raison du service ou parce que les affaires en cours devront être suspendues à cause du processus mixte. Devra-t-on attendre 20 ans pour régler la question?
    Vous parlez du processus exploratoire.
    Oui, il faudrait peut-être retarder l'audition des causes en raison du processus mixte.
    Cela ne me semble pas raisonnable.
    À moi non plus.
    Non.
    J'aimerais maintenant poser au chef Maracle une question sur le financement. D'autres en ont déjà parlé, il me semble. Il est troublant de voir qu'aucun financement n'est prévu à cet égard. De toute évidence, le budget ne réserve aucun financement à l'adoption éventuelle du projet de loi C-3. D'autres projets de loi ont été adoptés sans que des fonds soient prévus. La Loi sur l'éducation des premières nations de la Colombie-Britannique en est un bon exemple. Les premières nations de la Colombie-Britannique tentent toujours d'obtenir de l'argent pour un projet de loi adopté, si je me souviens bien, il y a trois ans. Il est inquiétant qu'on ne tienne pas compte de l'effet de ce manque de financement sur les chefs, les conseils et les gens qui veulent ravoir leur statut, non seulement dans ce dossier, mais aussi en éducation, en sensibilisation et dans d'autres secteurs.
    Avez-vous quoi que ce soit à ajouter?
(1905)
    Les formules de financement actuelles ne tiennent pas compte de la croissance. Par exemple, j'ai déjà dit que, si on veut procéder à un développement de style urbain, il faudra une infrastructure de base, des aqueducs, des égouts, de l'éclairage dans les rues et des routes pour aménager les lotissements. Le ministère n'a pas la capacité financière requise pour répondre aux besoins en infrastructure des communautés des premières nations.
    Les Six Nations forment la plus grande communauté du Canada. Ce n'est que l'an dernier qu'elles ont reçu des fonds pour leur usine de traitement de l'eau. De notre côté, cela fait 20 ans que nous essayons de nous doter d'une usine de traitement de l'eau. Nous n'avons pas l' infrastructure de base nécessaire pour subvenir aux besoins du nombre croissant de personnes qui vivent dans la réserve.
    Le projet de loi S-4, qui se trouve actuellement au Sénat, aggrave la situation. Il permettrait à plus de gens de vivre dans la réserve. Il n'existe aucune loi et aucune entente entre le Canada et les provinces concernant la responsabilité de payer pour les services fournis aux non-Indiens qui s'établiront dans la réserve. Les gouvernements fédéral et provinciaux ne semblent pas intéressés à régler cette question.
    La responsabilité concernant la prestation de ces services de base, lesquels les Canadiens tiennent pour acquis, ne suscite de la confusion que dans les réserves. Le fait que les gouvernements fédéral et provinciaux négligent ces questions constitue une forme de discrimination parce que cela montre que les besoins des membres des premières nations et des non-Indiens qui vivent dans les réserves ne sont pas importants aux yeux des pouvoirs publics. C'est une forme de discrimination inacceptable.
    Nous n'avons plus de temps, malheureusement.
    Merci, madame Crowder.
    Nous passons maintenant à M. Duncan.
    Un rappel au Règlement, monsieur Lemay?

[Français]

    Il s'agit d'une simple question. Madame Palmater a-t-elle produit un mémoire?
    Le président: Oui.
    M. Marc Lemay: On va donc avoir la traduction de son mémoire. Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lemay.
    Monsieur Duncan.
    Merci, monsieur le président.
    Depuis 1994, j'ai été, la plupart du temps, membre du comité. Je reconnais que le monde a beaucoup changé depuis cette époque. À mes débuts, le projet de loi C-31 n'était pas si ancien. Aujourd'hui, il semble appartenir au lointain passé, mais à ce moment-là, il était encore frais à notre mémoire. Je suis donc bien placé pour dire que la prudence s'impose lorsqu'on parle de conflit, de litige et de ce qui en découle, parce qu'il s'agit de questions très complexes.
    Je pense notamment au fait que nous avons maintenant un devoir légal et très clair de consulter, et que nous avons des responsabilités et des obligations à satisfaire.
    Il faut aussi préciser que le Tribunal canadien des droits de la personne est assez récent. Ce tribunal n'existait pas en 1994. En fait, les gens du tribunal suivent les audiences de notre comité et témoigneront devant nous la semaine prochaine.
    Je ne crois pas qu'on puisse faire de lien entre les allégations du ministère devant le tribunal et le mandat du tribunal. Il est bien clair qu'il appartient au tribunal d'établir son mandat.
    Étant donné la complexité du devoir de consulter, ainsi que du délai avant lequel il fallait régler l'affaire McIvor, je dirai que oui, le projet de loi est restreint. Nous n'avons jamais dit le contraire. Il s'agit d'une réponse restreinte: nous avons établi un processus exploratoire, mais sans définir de paramètres ou de contexte. Nous voulons plutôt donner aux organisations nationales autochtones, aux centres d'amitié et à d'autres groupes l'occasion de participer à ce travail. Ce n'est donc pas comme si nous...
    Madame Palmater, vous avez dit que le problème pourrait durer 20 ans. Je suis certain que les parties concernées ne veulent pas attendre 20 ans, et c'est pourquoi elles travailleront ensemble pour établir les paramètres exigés.
    Plutôt qu'une consultation, ne croyez-vous pas que cette façon de faire est préférable, étant donné que toutes les parties comprennent qu'elles sont responsables d'établir les paramètres, le contexte et l'échéancier? Pour sa part, le « devoir de consulter » est, à mon avis du moins, moins équilibré, si je puis dire.
    C'est ce que je crois. Qu'en pensez-vous?
(1910)
    Il s'agit de commentaires très importants, car ils éclaireront les délibérations du comité. Vous me demandez si le projet de loi C-3 et un processus mixte indéfini constituent une réponse raisonnable du Canada au jugement McIvor. Je dirais que non. Il ne s'agit pas d'une réponse juridique raisonnable; il ne s'agit pas d'une réponse raisonnable en ce qui concerne les relations et la réconciliation.
    Je suis d'accord pour dire que personne ne veut attendre 20 ans. Bien sûr, nous ne voulons pas que le processus mixte dure 20 ans. Mais l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne devait être une mesure très temporaire, le temps de mettre en place un « processus mixte » afin d'examiner la discrimination causée par la Loi sur les Indiens et de régler le problème. Cet article n'a été abrogé que 25 ans plus tard.
    Je ne suis pas du genre à faire des prédictions. Je préfère me fier aux pratiques antérieures, parce que c'est tout ce dont nous disposons. Vous connaissez mes craintes. Le projet de loi C-3 ne dit rien sur le processus mixte, rien sur les mesures à prendre, rien sur le financement. Il ne s'agit que d'idées politiques. Si on conjugue ces idées politiques et les pratiques antérieures, sans apporter de vrais changements au projet de loi C-3, j'ai de sérieuses craintes.
    Je préciserai brièvement que l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne était une initiative gouvernementale vivement dénoncée par l'opposition du gouvernement minoritaire de l'époque, et à laquelle s'opposait vivement une bonne partie des premières nations et des Autochtones.
    Rappel au Règlement.
    D'accord, allez-y.
    Si tous les partis de l'opposition y étaient vivement opposés, cette mesure n'aurait jamais été adoptée, étant donné que le gouvernement était minoritaire. Il a fallu l'appui des partis de l'opposition pour abroger l'article 67. Il faudrait corriger le compte rendu.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Au départ, l'opposition à cette mesure était très forte.
    Des voix: Oh, oh!
    Non, M. Duncan a la parole. Il a le droit de s'exprimer. Il en va du respect de la liberté d'expression.
    M. Maracle et Mme Venne veulent peut-être répondre à ma première question.
    Je parle en tant que chef de ma communauté, et je ne prétends pas tout savoir sur le projet de loi C-3. Ce que je sais, c'est qu'il n'y a pas assez de financement, à l'heure actuelle, pour répondre aux besoins de la population. Cela nous force parfois à priver des gens de services de base, par exemple, en éducation ou en logement. Si aucun engagement n'est pris à l'égard de la population croissante des premières nations, la situation ira en s'aggravant pour nous.
    Je crois aussi que le projet de loi C-3 n'est qu'une solution partielle à la discrimination que vivent les femmes des premières nations. Si le Canada est vraiment déterminé à appliquer sa Constitution et à éliminer toutes les formes de discrimination sexuelle, il doit poursuivre le travail et mettre au point la loi afin d'atteindre son grand objectif, celui de libérer les femmes des premières nations du problème de la discrimination.
    Cette cause continue de faire des progrès. Il y aura, sans aucun doute, d'autres affaires judiciaires et d'autres plaintes de discrimination présentées aux Nations Unies. Je ne suis pas certain que les députés comprennent suffisamment bien la nature du problème pour être en mesure de présenter un bon projet de loi à ce stade-ci.
    Les autres témoins voudraient-ils ajouter un bref commentaire?
    Madame Venne, appuyez-vous ce qui a été dit? D'accord.
    Madame Palmater, allez-y, très brièvement.
    Je serai brève.
    Lorsqu'on parle du délai perçu pour régler le dossier McIvor, il faut souligner le mot « perçu ». Le Canada a réussi à obtenir une prolongation. Les tribunaux ont même dit qu'un délai plus long aurait pu être accordé. Je crois que le Canada aurait pu et aurait dû prendre un engagement important à l'égard de la consultation. Il aurait pu établir un délai de 18 mois et attendre la réponse des tribunaux. Si je me fie au jugement de la Cour suprême du Canada, je parie que le Canada aurait pu obtenir le délai voulu.
(1915)
    Ce sera le mot de la fin.
    Je tiens à remercier les témoins de leur temps et de leur patience. Nous avons terminé un peu plus tard que prévu.
    Je remercie aussi les membres du comité d'avoir bien voulu s'adapter au programme très chargé d'aujourd'hui. Mardi après-midi, nous recevrons les témoins qui ont été proposés.
    Merci beaucoup, et bonne soirée.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU