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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 034 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 20 octobre 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale se réunit pour la 34e fois en ce mercredi 20 octobre 2010.
    Avant de donner la parole à Mme Mourani, je voudrais dire que nous sommes ici aujourd'hui pour commencer notre étude sur le projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur le transfèrement international des délinquants. Je vais présenter nos témoins dans un instant.
    Pour traiter brièvement des travaux du comité, le greffier m'a informé qu'on voudrait fixer la date d'ici laquelle tous les témoins auront comparu au sujet du projet de loi C-5. D'ici la fin de la séance d'aujourd'hui, nous aurons recueilli le témoignage du ministère; nous reprendrions donc l'examen du projet de loi C-5 le 17 novembre.
    Selon le président, le greffier et d'autres, il est très important que vous soumettiez votre liste de témoins pour le projet de loi C-5, si vous en avez une. Avec un peu de chance, le 17 novembre, nous pourrons accueillir des témoins pendant la première heure et peut-être même procéder à l'étude article par article, selon le nombre de témoins présents. Si nous pensons avoir besoin de plus de temps, c'est une autre affaire, mais s'il vous plaît, soumettez votre liste de témoins.
    Maintenant, madame Mourani, voulez-vous invoquer le Règlement ou quoi?

[Français]

    Non, monsieur le président, je veux juste prendre la parole avant que vous ne procédiez à l'écoute des témoins. Aujourd'hui, j'ai reçu une information préoccupante, à savoir que l'un des témoins dont j'ai soumis le nom au greffier refusait de se présenter pour témoigner en ce qui a trait au G20, durant les périodes que nous avons décidées.
    Le témoin en question est le responsable des Services correctionnels de l'Ontario. Nous avons donné son nom et ses coordonnées. Selon l'information que j'ai reçue du greffier — M. Préfontaine pourra me dire si je me trompe —, ce monsieur refuse de se présenter. Je demande que le comité émette un bref de subpoena pour qu'il ait l'obligation de se présenter devant le comité. Une grande partie des témoignages que nous allons entendre concernent deux centres de détention provinciaux de l'Ontario.

[Traduction]

    D'accord.
    Voulez-vous parler à ce...
    Je crois savoir de qui il est question, mais je ne suis pas certain à 100 p. 100. De façon générale...

[Français]

    Monsieur Préfontaine pourrait vous donner son nom.

[Traduction]

    Cela concerne une autre étude. Nous allons réessayer et lui expliquer l'importance de comparaître. C'était peut-être une question de date ou autre, mais nous allons lui expliquer que s'il ne peut pas être là le jour donné, il devra se présenter à un autre moment. S'il refuse à nouveau, nous reviendrons sur la question, mais...

[Français]

    À ce moment là..., c'est-à-dire...

[Traduction]

    Cela signifie que je vous demande un peu de temps, parce que vous venez tout juste de m'apprendre qu'il ne pouvait pas se présenter. Je ne sais pas exactement pourquoi il ne comparaîtra pas, mais s'il le faut, je lui parlerai aussi pour savoir quelle est la raison et pour tenter de fixer une autre date.
    D'accord? Nous ferons un suivi. Je ferai un suivi.
(1535)
    Si vous me permettez, monsieur le président...
    Le président: Allez-y.
    Mme Alexandra Mendes:... je crois que la question n'est pas qu'il ne peut pas se présenter, mais qu'il refuse de le faire.
    Mme Maria Mourani: C'est ça.
    Mme Alexandra Mendes: Voilà la différence. Dans ce cas, pouvons-nous vous recommander de le citer à comparaître s'il continue de refuser...
    Nous allons lui demander à nouveau. Nous en discuterons plus...

[Français]

    Monsieur le président, j'ai compris de M. Préfontaine, par personne interposée — M. Préfontaine pourrait nous confirmer cela aujourd'hui —, que ce monsieur n'a pas dit qu'il ne pouvait pas venir en raison de questions liées aux dates. En effet, M. Préfontaine a proposé cinq journées. Or ce monsieur dit qu'il ne veut pas venir: il refuse catégoriquement, sans aucune explication, de se présenter devant nous. C'est extrêmement grave, monsieur le président.
    Je demande un bref de subpoena pour convoquer cette personne et l'obliger de témoigner à ce comité. Car une grande partie du témoignage porte sur des conditions d'incarcération dans deux prisons provinciales, une féminine et une masculine. Ce n'est pas vrai que ce gars ne va pas se présenter ici! Ce n'est pas vrai, ça!

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Holland.

[Français]

    Il y a une autre option avant d'en arriver au bref de subpoena. On peut lui expliquer que, s'il refuse de venir témoigner ici, le comité aura sans aucun doute recours au bref de subpoena, qu'il a le choix de se présenter ici volontairement ou par suite d'un bref de subpoena. Si la question lui est présentée ainsi, cette personne fera certainement le bon choix.
    M. Préfontaine peut-il nous dire exactement...?

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Préfontaine.

[Français]

    Madame Mourani, j'ai invité M. Small, sous-ministre adjoint, Services en établissement pour adultes, du ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels de l'Ontario. Au début de l'après-midi, quelqu'un de son bureau m'a téléphoné pour m'informer que M. Small déclinait l'invitation. C'est tout.
    C'est cela. Un bref de subpoena, monsieur le président! Nous avons cinq jours et nous n'avons pas beaucoup de temps à perdre. Que ce monsieur vienne nous parler! Moi, je souhaite qu'on émette un bref de subpoena pour obliger cette personne à venir témoigner ici.

[Traduction]

    Étais-je au courant de la situation?
    Le greffier: Non.
    Le président: Dans ce cas, pourquoi eux le sont-ils?
    Le greffier: Parce que j'ai informé le bureau de Mme Mourani qu'un de ses témoins déclinait l'invitation. Voilà pourquoi.
    Le président: D'accord. Je peux faire un autre suivi. Je n'étais pas au courant de la situation. Nous ferons un autre suivi et nous pourrons discuter lors de la prochaine réunion de la manière dont nous voulons procéder, mais j'aimerais lui donner une explication et entendre sa réponse.
    Allez-y, monsieur Davies.
    Monsieur le président, dans le même ordre d'idées, le comité a publié un calendrier, et tous les membres avaient accepté de consacrer une journée à l'étude de l'affaire Fadden. Deux témoins devaient se présenter à ce sujet. Je comprends qu'on ne peut pas citer un ministre ou un député à comparaître, mais on peut sommer Mme Morin, et on devrait le faire.
    Je tiens à exprimer publiquement à quel point j'étais déçu hier, en ma qualité de vice-président du comité, d'apprendre par l'intermédiaire des médias que ni le ministre ni Mme Morin ne comparaîtront.
    À la fin de la dernière séance, c'est vous, monsieur le président, et M. MacKenzie, en tant que conservateur le plus haut placé, qui avez dit que vous vous renseigneriez auprès du ministre et que vous vérifieriez les dates. Personne n'a eu la courtoisie envers le comité de m'informer que cela ne se produirait pas avant qu'un communiqué de presse selon lequel le ministre refuse de comparaître soit publié.
    Une voix: J'invoque le Règlement.
    M. Don Davies: Je suis en train de présenter un rappel au Règlement.
    On ne peut pas invoquer le Règlement pendant un rappel au Règlement.
    Monsieur le président, la journée que nous devions consacrer à l'étude de l'affaire Fadden ne se limitait pas seulement à deux témoins. Il s'agissait également d'un sujet de discussion. Nous devons trouver une autre date. Nous ne pouvons pas tout simplement remplacer la question par le projet de loi C-5. Le comité a approuvé le calendrier. Nous avons tous fait des compromis...
(1540)
    À ce sujet...
    Puis-je finir ce que j'ai à dire, monsieur le président? J'ai le droit de terminer.
    Nous avons tous fait des compromis pour que les dossiers de chacun soient examinés; c'est injuste de tout simplement en laisser tomber un.
    Je veux aussi dire que vous devriez également parler à Mme Morin, qui n'est pas ministre et qui peut être citée à comparaître. Elle n'a pas le droit de refuser de se présenter, comme les médias prétendent qu'elle l'a fait. Elle n'a pas dit qu'elle ne pouvait pas venir, elle a refusé de venir. C'est inacceptable.
    Monsieur Davies, vous pourrez lui poser la question lundi. Je crois comprendre qu'elle sera des nôtres ce jour-là.
    Une voix: Monsieur le président?
    Le président: Il invoque à nouveau le Règlement.
    Vous, vous n'invoquiez pas le Règlement, n'est-ce pas? D'habitude, c'est un rappel au Règlement.
    Je peux en faire un rappel au Règlement.
    Merci.
    Monsieur McColeman.
    J'aimerais rappeler à M. Davies que nous avons discuté des points dont il parle à huis clos. À ma connaissance, la séance actuelle est publique.
    Monsieur le président, convient-il qu'il exprime sa déception en parlant ouvertement de nos travaux, comme il le fait ici depuis une minute environ?
    Monsieur le président, je parle du calendrier qui a été publié. Le fait qu'on doit recueillir le témoignage de certains ministres ce jour-là relève du domaine public...
    M. Phil McColeman: Monsieur...
    M. Don Davies: Il n'y absolument rien de confidentiel...
    M. Phil McColeman: Monsieur le président?
    M. Don Davies: ... dans tout cela.
    Monsieur le président?
    Je suis en train de vérifier.
    Il parle de ce qui a été dit pendant la réunion.
    Non.
    Oui.
    Non.
    Vous venez juste de le faire.
    Non, il parle du calendrier, d'accord?
    M. Don Davies: On l'a clairement accepté.
    Le président: Le procès-verbal de la réunion du comité...
    Allez-y.
    Le procès-verbal de la réunion du comité reflète le calendrier. Le comité s'est entendu sur des dates et sur des sujets pour des dates données, et ces renseignements se trouvent dans le procès-verbal, qui est public.
    Je veux être certain de bien comprendre; il peut donc parler du contenu de la discussion à huis clos, comme il le faisait...
    Une voix: Non...
    M. Phil McColeman:... et mentionner le secrétaire parlementaire et le président...
    J'invoque le Règlement; j'aimerais que M. McColeman précise ce que j'ai dit, ce que j'ai révélé qui était confidentiel. De quel énoncé s'agit-il?
    L'objet de notre discussion était confidentiel.
    M. Don Davies: Quoi?
    M. Phil McColeman: Je ne vais pas le répéter parce que nous sommes en séance publique.
    Vous alléguez que...
    M. Phil McColeman: Je serais heureux de le faire à huis clos.
    Silence, s'il vous plaît. Voici ce que je vais faire: je vais examiner les bleus et vérifier ce que M. Davies a dit exactement, d'accord? Puis, je comparerai ses propos au procès-verbal.
    Nous ferons une comparaison avec le procès-verbal. Si M. Davies a divulgué quelque chose qui n'était pas dévoilé, nous reviendrons sur la question. D'accord?
    Monsieur Holland.
    Monsieur le président, toujours au sujet du calendrier, je m'inquiète beaucoup du fait que la conseillère nationale pour la sécurité a déclaré qu'elle ne serait pas disponible pour discuter de la question. Je présenterais, si vous me le permettez, la même recommandation que dans le cas du témoin précédent, c'est-à-dire qu'on lui donne deux choix: de venir volontairement ou par la force d'une citation à comparaître.
    J'ajouterais également que nous avons l'intention de déposer une motion au sujet de l'affaire Fadden. Étant donné que nous passerons maintenant seulement une heure à recevoir des témoignages parce que le ministre refuse de nous écouter, j'aimerais que nous ayons l'occasion de traiter de la motion à ce sujet...
    Madame Mourani invoque le Règlement.

[Français]

    J'aimerais simplement vous rappeler, monsieur le président, que j'ai déposé ici une demande avant mon collègue M. Holland. Je veux qu'on en termine avec le fait que M. Small ne veut pas se présenter à la séance qui porte sur le G8 et le G20 et qui commence lundi.
    Je présente une motion ici, à savoir qu'il se présente devant nous par bref de subpoena.

[Traduction]

    Ce n'est pas un rappel... C'est tout simplement un autre point que celui de M. Holland

[Français]

    Non, on discutait déjà de quelque chose, monsieur le président. C'est cela, mon rappel au Règlement.

[Traduction]

    Nous allons revenir sur ce que nous allons faire dans le cas de M. Small.
    Mme Maria Mourani: D'accord.
    Ma suggestion par rapport à ce que nous pourrions faire... Puisque deux témoins ont décliné l'invitation du comité, j'ai proposé deux façons de procéder, et elles sont les mêmes dans les deux cas.
    La première est d'appeler les témoins et de leur dire qu'ils peuvent se présenter volontairement ou, sinon, ils recevront une citation. Je pense qu'en procédant ainsi, nous faisons preuve d'une grande générosité à leur égard. Cette méthode leur permet de comparaître sans qu'on les mène de force et contre leur gré devant le comité.
    À mon avis, s'ils savent qu'ils recevront une citation à comparaître, il est fort probable qu'ils reconsidéreront l'invitation et l'accepteront. Or, je suis aussi ouvert à l'idée de passer directement à une citation pour les deux témoins, si c'est ce que Mme Mourani préfère. Cette approche me convient également, mais permettez-moi de dire que pour notre réunion au sujet des questions liées aux déclarations de M. Fadden, étant donné que nous n'entendrons maintenant qu'un témoin — puisque nous ne pouvons pas forcer le ministre à comparaître et qu'il a refusé notre invitation —, je suggère que nous discutions pendant la deuxième heure d'une motion que je préparerai et que je présenterai.
    Ainsi, la deuxième heure peut être employée à une fin productive qui correspond à l'intention originale du comité. Bien sûr, je donnerai un avis de motion bien plus de 48 heures à l'avance.
(1545)
    Premièrement, toute motion visant à assigner un témoin à comparaître sera irrecevable aujourd'hui parce qu'aucun avis de motion n'a pas été soumis 48 heures à l'avance. Nous n'accueillerons pas cette motion. Cela ne fait tout simplement pas partie de nos discussions d'aujourd'hui sur le projet de loi C-5.
    Deuxièmement, la plus élémentaire des courtoisies veut que dans un cas comme celui-ci, où l'on refuse... Il est déjà arrivé que des témoins disent ne pas pouvoir venir. Et nous nous sommes dit: « D'accord, ce témoin n'est pas disponible ». Et d'autres témoins sont venus comparaître. Je pense que c'est la raison pour laquelle le greffier vous a informée que cette personne ne viendrait pas: parce qu'il s'agissait de votre témoin.
    Si le comité souhaite l'obliger à comparaître, il devra d'abord le lui expliquer. C'est une simple question de courtoisie. Je lui téléphonerais et lui expliquerais que nous tenons encore beaucoup à ce qu'il comparaisse et que s'il choisit de ne pas le faire, nous pourrions avoir recours à un bref de subpoena. Si nous devions assigner à comparaître toutes les personnes qui ont dit qu'elles ne viendraient pas témoigner, nous donnerions des brefs de subpoena à des centaines de personnes, car bien des gens ne souhaitent pas comparaître. Pour certaines questions, nous entendons 30 ou 40 témoins. Chaque année, des centaines de personnes choisissent de ne pas se présenter devant les comités parlementaires. Il peut arriver que l'une d'entre elles soit assignée à comparaître.
    Monsieur Holland.
    Même si j'ai peine à croire qu'une personne ne voudrait pas comparaître devant ce comité, ce que je suggère, alors...
    Nous en avons deux ici qui le veulent.
    Des voix: Oh, oh!
    Oui, j'en suis conscient, et j'ai hâte de les entendre.
    Mais étant donné que nous n'avions pas prévu aborder ce sujet aujourd'hui, je crois qu'il est important que nous réglions ces questions en suspens. Je vais vous donner un avis de motion d'assignation pour ces deux témoins. De cette façon, un avis aura été fourni s'ils décident de ne pas venir témoigner de façon volontaire. Cela permettra au greffier de leur dire que le comité considère qu'il est impératif qu'ils soient présents, et de les informer que s'ils décident de ne pas venir, le comité pourrait adopter une motion visant à les assigner à comparaître.
    Très bien. Je vais le mentionner. Encore une fois, vous devez déposer la motion.
    Madame Mourani.
    Je donne un avis de motion, et le libellé de la motion est que le comité assigne ces deux personnes à témoigner. Voilà l'avis et le libellé.
    Madame Mourani.

[Français]

    Monsieur le président, vous venez de dire qu'on n'a pas le droit de présenter des motions aujourd'hui. Je vous informe donc que je vais émettre un avis de motion, autant pour ce qui est de M. Small que de Mme Morin. Je vais le faire de la même manière que M. Holland, d'une part.
     D'autre part, ça ne me pose aucun problème que vous appeliez les deux personnes concernées en vue de les informer et de peut-être les convaincre de venir. Je suis sûr que vous savez très bien convaincre. Par politesse, je n'y vois aucun problème. Cependant, au cas où ces personnes décideraient de ne pas se présenter, nous allons émettre un avis de motion les concernant.
    Par ailleurs, vous dites que des témoins peuvent ne pas venir et qu'on est habitués à ça. Je comprends que M. et Mme Tout-le-Monde ne soient pas intéressés à venir à un comité. Toutefois, quand on est titulaires de charges publiques, on a un devoir non seulement de transparence, mais de répondre des actes de notre institution envers le peuple.
     À mon avis, cette institution a le devoir de venir ici nous dire ce qui s'est passé durant le G20 au chapitre de l'incarcération de plusieurs citoyens québécois et canadiens. C'est fondamental. Ce n'est pas à M. et Mme Tout-le-Monde qu'on demande de venir; on le demande à des personnes titulaires de charges très importantes.
    J'approuve votre décision, j'abonde dans le même sens. Vous pouvez les appeler. Je suis quelqu'un de très poli et j'accepte avec très grande joie votre démarche, mais nous émettrons quand même un avis de motion.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup.
    Puisque personne d'autre ne lève la main — et je ne vous incite pas à le faire —, nous allons continuer.
    Aujourd'hui, nous entreprenons notre étude du projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur le transfèrement international des délinquants. Nous accueillons Mme Mary Campbell, directrice générale, Direction générale des affaires correctionnelles et de la justice pénale, ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Soyez la bienvenue. Nous avons déjà eu le privilège de vous accueillir à notre comité.
    Nous avons également avec nous Michel Laprade, avocat-conseil, Services juridiques.
    Je vous souhaite la bienvenue.
    Nous avons hâte de vous entendre.
(1550)
    Je suis vraiment enchantée d'être ici. Je le suis toujours.
    J'ai préparé un mémoire que je vais parcourir avec vous, mais évidemment, nous voulons nous garder suffisamment de temps pour les questions concernant ce projet de loi.
    J'aimerais simplement vous expliquer les rôles de chacun. Comme vous l'avez indiqué, monsieur le président, je travaille au ministère de la Sécurité publique, où mes responsabilités sont en lien avec la loi proprement dite et la négociation de traités, avec la collaboration du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
    En réalité, le traitement des demandes de transfèrement et le transfert des personnes sont effectués par le Service correctionnel du Canada, mais nous travaillons en étroite collaboration. Les responsables du SCC ne sont pas en mesure d'assister à la réunion d'aujourd'hui, mais mon collègue Michel Laprade, des services juridiques du Service correctionnel du Canada, est un spécialiste de longue date des questions de transfèrement international. Il se peut que nous ne puissions pas répondre immédiatement à certaines questions d'ordre opérationnel, mais je ferai de mon mieux.
    La loi actuelle, la LTID, comme nous l'appelons, est entrée en vigueur en 2004. Elle remplaçait la Loi sur le transfèrement des délinquants, qui a été mise en place en 1978. Le Canada était alors un chef de file mondial dans le domaine du développement d'ententes internationales de transfèrement.
    Depuis 1978, un certain nombre de traités multilatéraux et bilatéraux et d'arrangements ont été conclus. Nous avons des traités multilatéraux, notamment la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées du Conseil de l'Europe, dont le Canada est partie prenante; le Régime de transfèrement des condamnés dans les pays du Commonwealth; et la Convention interaméricaine sur l'exécution des peines pénales à l'étranger. Ces mécanismes permettent de transférer les personnes qui ont été condamnées dans d'autres pays, comme le Japon, le Costa Rica et le Royaume-Uni.
    Nous avons également des traités bilatéraux que le Canada a négocié directement avec d'autres pays, comme le Mexique, le Venezuela et les États-Unis. En tout, nous avons mis sur pied des mécanismes de transfèrement avec 82 pays.
    Sous l'autorité du ministre de la Sécurité publique, la LTID a pour objet de « faciliter l'administration de la justice et la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en permettant à ceux-ci de purger leur peine dans le pays dont ils sont citoyens ou nationaux ».
    Cet énoncé reflète ce que l'on trouve dans les conventions et les traités internationaux afin que nous ne formulions pas nos projets seuls, mais en faisant appel à d'autres pays du monde pour y arriver.
    Par exemple, certaines exigences canadiennes de transfèrement se retrouvent dans beaucoup d'autres traités, comme l'exigence selon laquelle les trois parties, c'est-à-dire le délinquant, le pays de condamnation et le pays d'accueil, doivent consentir au transfèrement. C'est un principe fondamental.
    Un autre principe fondamental est celui de la double incrimination, c'est-à-dire que si un citoyen canadien est emprisonné à l'étranger et qu'il veut revenir au Canada, l'infraction doit être punissable dans les deux pays concernés. Elle n'a pas besoin d'être identique, mais s'il s'agit d'une infraction dans un pays étranger, mais que ce n'est pas un comportement que nous considérons comme criminel ici, la personne ne peut pas être transférée au Canada.
    Dans l'ensemble, le programme international fonctionne très bien. Certains pays, particulièrement en Europe, ont vu leur population carcérale monter en flèche et dans certains cas, paraît-il, près de la moitié de cette population est composée de délinquants étrangers. Les mécanismes de transfèrement international deviennent donc essentiels pour permettre à ces entités, malgré une situation financière assez difficile, d'assurer une gestion efficace de leur population et de renvoyer les délinquants étrangers dans leur pays d'origine.
    Le Canada est particulièrement actif au sein de la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées du Conseil de l'Europe. En fait, j'ai eu l'honneur d'assister à diverses réunions du Conseil tenues à Strasbourg au cours des années, et ce, afin de discuter de nos difficultés mutuelles et de tenter de résoudre les problèmes soulevés. Le dialogue se poursuit. Les choses sont en constante évolution.
(1555)
    De plus, les membres du personnel du ministère des Affaires étrangères contribuent énormément aux discussions et aux dossiers de transfèrements. Je dois dire que ce sont des partenaires exceptionnels. Les agents consulaires qui visitent les Canadiens incarcérés à l'étranger accomplissent un travail remarquable.
    J'ai quelques chiffres à vous donner, et nous avons également d'autres statistiques, si cela vous intéresse. Depuis la création du programme, en 1978, 1 557 délinquants canadiens ont été ramenés au pays, alors que le Canada a renvoyé dans leur pays de citoyenneté 127 délinquants étrangers. De ce nombre, environ 85 p. 100 ont été renvoyés aux États-Unis, notre principal partenaire. Je crois que ce pourcentage s'explique facilement, puisque nous partageons une frontière commune.
    Bon an mal an, environ 2 000 Canadiens sont incarcérés à l'étranger. Le Service correctionnel reçoit environ 264 nouvelles demandes chaque année. Le report des années antérieures est d'environ 308 demandes, ce qui fait en sorte que le nombre total de dossiers à traiter est d'environ 572 par année.
    Par ailleurs, certains Canadiens incarcérés à l'étranger qui décident de ne pas revenir au Canada par l'entremise du mécanisme de transfèrement; des 2 000 Canadiens incarcérés à l'étranger, il y en a donc une grande proportion qui choisissent de ne pas demander de transfèrement. Si un délinquant n'est pas rapatrié dans le cadre d'un transfèrement, il sera habituellement renvoyé du pays de condamnation pendant qu'il purge sa peine ou à la fin de sa peine. Il reviendra au Canada si c'est son seul pays de citoyenneté, ou alors il pourra continuer de voyager dans tout pays qui lui permet d'entrer.
    Évidemment, les Canadiens incarcérés à l'étranger ont souvent de la difficulté à s'adapter aux conditions locales, qui peuvent être très différentes de celles du Canada. Les problèmes les plus courants sont les barrières linguistiques, le choc culturel, une mauvaise alimentation, des soins médicaux inadéquats et, bien entendu, l'incapacité de communiquer avec leur famille et leurs amis au Canada.
    Je tiens également à souligner que des motifs liés à la sécurité publique justifient leur transfèrement dans leur pays. S'ils reviennent au Canada durant leur peine, ce sera sous le contrôle et la garde du Service correctionnel du Canada et de la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Ainsi, ils pourront avoir accès à différents programmes. Lorsqu'un Canadien reste à l'étranger, il n'a bien souvent accès à aucun programme en prison. De plus, la condamnation des délinquants prononcée à l'étranger sera inscrite dans la base de données des condamnés de la GRC. Cela ne serait pas le cas s'ils revenaient au pays après avoir été libérés.
    Comme je l'ai mentionné, la loi a été modifiée en 2004, et le gouvernement va de l'avant avec le projet de loi C-5 dans le but d'apporter d'autres modifications.
    En vertu des mesures législatives actuelles, le ministre doit prendre en considération plusieurs facteurs lors d'une demande de transfèrement au Canada. Je ne vais pas tous les lire; ils sont dans la loi actuelle. Ils visent notamment à déterminer si le retour du délinquant au pays constitue une menace pour la sécurité du Canada et si le délinquant a encore des liens sociaux et familiaux au Canada. Il y a quatre facteurs.
    Ce sont tous des facteurs importants à considérer, mais la LTID, dans sa forme actuelle, ne mentionne pas précisément la protection de la sécurité des Canadiens, ni les victimes, leur famille et leurs enfants. Le gouvernement considère qu'il s'agit là de graves omissions. Voilà pourquoi il propose une série de modifications aux facteurs décisionnels ainsi qu'à l'objet de la loi.
    De plus, la Cour fédérale a récemment revu un certain nombre de décisions ce qui, de toute évidence, a été également instructif. On croit qu'il est important d'expliquer les facteurs encore plus clairement dans la loi. Ils donneront au ministre un cadre de prise de décisions plus souple et étendu, dans lequel il pourra étudier les demandes de transfert. Ils permettront de s'assurer que les Canadiens qui demandent un transfert sont traités de façon impartiale et équitable, mais qu'ils ne peuvent pas échapper à la responsabilité des infractions qu'ils ont commises à l'étranger.
(1600)
    Voici un aperçu des modifications proposées à la loi. La première concerne l'objet de la loi. Elle ferait expressément référence à la sécurité publique dans la loi.
    La deuxième modification permet d'inclure dans la loi un certain nombre de facteurs additionnels dont pourrait tenir compte le ministre afin de décider si un délinquant peut obtenir un transfert au Canada. Encore une fois, il s'agit d'une liste qui figure dans le projet de loi, alors je ne vais pas la lire au complet, mais elle comprend des questions comme le fait de savoir si le délinquant met en péril la sécurité publique au Canada; s'il est susceptible de participer à des activités criminelles à son retour au Canada; s'il a participé à des programmes à l'étranger; s'il a reconnu la responsabilité de ses actes à l'étranger; si le délinquant a coopéré avec les autorités chargées de l'application des lois dans le pays étranger; et finalement, tout autre facteur que le ministre juge pertinent.
    Voici maintenant quelques exemples de la façon dont ces amendements seraient mis en pratique. Si un délinquant représentait une menace pour un membre de la famille, le ministre pourrait en tenir compte avant de prendre une décision. De même, si le délinquant a coopéré avec les responsables de l'application de la loi, si sa santé est fragile, s'il a reconnu sa responsabilité par un plaidoyer de culpabilité, par exemple, ou une coopération avec les autorités, le ministre pourrait prendre ces facteurs en considération. Actuellement, la loi confère au ministre un pouvoir discrétionnaire reconnu par les tribunaux pourvu qu'il soit exercé conformément à l'objet de la loi; il n'est donc pas illimité. Ces amendements visent à exprimer plus clairement dans la loi en quoi consistent ces facteurs additionnels.
    Voilà un bref résumé de la teneur du projet de loi. Comme je l'ai dit, c'est avec plaisir que M. Laprade et moi répondrons à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Campbell.
    Nous allons maintenant entamer le premier tour de sept minutes, en commençant par M. Holland.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins de comparaître à très court préavis et aussi d'avoir attendu patiemment que nous commencions au début de la séance.
    Je dois dire d'emblée que c'est un projet de loi épouvantable, à mon avis, et que l'on aura fort à faire pour me convaincre du contraire.
    Vous avez commencé votre exposé en nous expliquant en détail les raisons pour lesquelles le transfèrement international des délinquants est nécessaire et à quel point il a une fonction importante sur le plan de la sécurité publique. Ce qui me préoccupe, c'est l'idée que nous devrions donner carte blanche au ministre, qu'il devrait pouvoir faire comme bon lui semble, selon son humeur du moment, en ce qui a trait au transfèrement international d'un délinquant. Et c'est sans parler du fait que c'est très arbitraire, car tout repose maintenant entre les mains du ministre.
    Ce qui me préoccupe également — et corrigez-moi si j'ai tort —, c'est que ces gens reviennent au Canada, mais est-ce qu'ils sont transférés dans une prison canadienne pour purger leur peine, en ayant accès à un programme de réadaptation, et qu'ils ont un casier judiciaire canadien après leur libération? Ou encore, sont-ils déportés après avoir purgé leur peine à l'étranger, peut-être sans possibilité de réadaptation, dans des conditions bien pires qu'ici, et reviennent-ils ensuite au Canada, bien plus dangereux qu'auparavant?
    Je tente de comprendre comment une loi efficace, qui constitue un outil important de sécurité publique, peut être améliorée en donnant au ministre des pouvoirs très arbitraires relativement à la prise de décisions pour lesquelles il ne sera pas tenu responsable.
    Merci.
    Je pense que vous comprendrez les limites de mon rôle, en tant que fonctionnaire; le gouvernement pourrait répondre à ce genre de question beaucoup mieux que moi. Je dirais que le projet de loi vise à refléter les décisions prises par les tribunaux jusqu'à maintenant et les avis des services juridiques, afin de mettre en place des paramètres dans le cadre du processus décisionnel.
    Je ne crois pas que l'on donne carte blanche au ministre, ni qu'il y ait quoi que ce soit dans la loi qui lui permette de prendre des décisions qui dépassent la portée de la loi. Je crois que ces facteurs et l'énoncé additionnel de sécurité publique dans l'objet de la loi visent en fait le contraire...
(1605)
    Pardonnez-moi, mais j'aimerais justement avoir des précisions à ce sujet, car j'estime que c'est important... J'ai examiné les raisons que le ministre peut invoquer pour rejeter une demande, et j'ai du mal à voir comment on ne pourrait pas les utiliser à toutes les sauces.
    En second lieu, comment le ministre...? Y a-t-il un processus ou un mécanisme de responsabilisation en place? Je ne crois pas que le projet de loi en parle. Peut-être que vous pouvez me l'expliquer. Le ou la ministre, si le poste devait plus tard être occupé par une femme, est-il tenu d'expliquer sa décision et de la justifier d'après les critères donnés. Je ne vois pas de mécanisme de responsabilisation. Est-ce qu'on en parle quelque part dans le projet de loi?
    La loi oblige le ministre à exposer les raisons de sa décision dans le cas d'un refus, alors c'est un volet du processus de responsabilisation. La décision et la justification sont communiquées au contrevenant canadien, qui peut alors bien sûr recourir aux tribunaux...
    Une voix: Non, non. Où…
    Mme Mary Campell: …s'il veut contester la décision.
    Je suis désolé, mais je crois que les gens ont du mal à vous suivre. Je regarde entre autres le paragraphe 10(1)(l) proposé dans le projet de loi: « tout autre facteur qu’il juge pertinent ». C'est un des facteurs énumérés. Il n'est indiqué nulle part dans le projet de loi que le ministre doit soumettre une lettre...
    Une voix: Non.
    M. Mark Holland: Mais même si le projet de loi en fait mention, et peut-être que quelqu'un peut me dire où cela se trouve, car je ne le vois pas, si le ministre peut employer un article qui dit « tout autre facteur qu'il juge pertinent », alors j'imagine qu'en vertu de cette loi, il peut invoquer à peu près n'importe quelle raison. Outre le fait qu'il doive rédiger une lettre, comment pouvons-nous demander des comptes au ministre quand la norme que l'on nous donne est « tout autre facteur qu'il juge pertinent »?
    Oui. La loi, dans sa forme actuelle, exige que des raisons soient données par écrit. Le projet de loi est essentiellement un amendement à la loi actuelle, et toutes les dispositions qui ne sont pas touchées par le projet de loi demeurent en vigueur...
    Mais on propose dans le projet de loi, sous la rubrique facteurs, le paragraphe 10(1)(l): « tout autre facteur qu'il juge pertinent ». Supposons que je suis le ministre et que je me lève un matin avec une dent contre cette personne, peu importe pourquoi, et que je me contente de lui dire « voici mes raisons et voici votre lettre ». Est-ce que je devrais rendre des comptes à quelqu'un?
    Je pense que c'est là que les tribunaux entrent en jeu. Mais j'inviterais M. Laprade à intervenir à ce sujet.
    Le paragraphe 11(2) de la loi oblige le ministre, lorsqu'il refuse un transfèrement, de justifier sa décision. L'article qui prévoit que le ministre peut invoquer tout autre facteur qu'il juge pertinent ne peut pas être pris à part des autres dispositions de la loi et ne peut certainement pas être dissocié de l'objectif de la loi. Le ministre ne pourrait tout simplement pas décider un matin qu'il n'aime pas un demandeur et de refuser sa demande pour cette raison.
    M. Mark Holland: D'accord, mais permettez-moi de...
    Me Michel Laprade:... la décision doit en réalité respecter l'objectif et le principe de la loi.
    Permettez-moi de vous donner un exemple précis. Supposons qu'un délinquant purge une peine dans une prison à l'étranger, qui n'offre ni mesure de réhabilitation ni programme de la sorte, ce qui est malheureusement très fréquent. Le ministre ne peut refuser le transfèrement en vertu du paragraphe 10(1)(h) proposé: « le refus du délinquant de participer à tout programme de réhabilitation ou de réinsertion sociale ». Eh bien peut-être qu'il n'a tout simplement pas...
    Mme Mary Campbell: C'est exact.
    M. Mark Holland: On pourrait donc invoquer le fait qu'il n'a participé à aucun programme de réhabilitation. C'est peut-être vrai, mais c'est parce qu'aucun ne lui a été offert.
     Ce que j'essaie de dire, c'est que peu importe les motifs invoqués dans sa lettre, par exemple ce que prévoit le paragraphe 10(1)(l) proposé (tout autre facteur qu'il juge pertinent), les limites sont extrêmement larges. Quel est le mécanisme de responsabilisation en place pour que le ministre ait des comptes à rendre si les motifs invoqués sont quelque peu exagérés, si bien qu'ils seraient loin de faire l'unanimité?
    Si j'ai bien lu, je ne vois aucun mécanisme de responsabilisation, outre le fait que le ministre doit soumettre une lettre.
(1610)
    Le même mécanisme est en place depuis l'entrée en vigueur de la première Loi sur le transfèrement des délinquants.
    Alors pourquoi avons-nous besoin de cette loi?
    Cela a toujours été une décision ministérielle. Nous voulons toutefois orienter le ministre en l'obligeant à tenir compte de certains facteurs ou de certaines considérations.
    En fait, la loi ne fait pas état de ces considérations de façon à aider le ministre à décider s'il convient de refuser ou d'approuver une demande: ce sont des facteurs à examiner, c'est tout. Même s'il juge qu'un délinquant répond à l'un de ces critères, le ministre peut tout de même décider d'accorder un transfèrement s'il estime que les autres facteurs sont plus importants. Ce n'est pas une loi qui dicte la recette à suivre pour décider de rejeter un transfert.
    Merci, monsieur Holland.
    La parole est à Mme Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais tout d'abord remercier nos témoins de leur présence et des informations qu'ils nous fournissent sur ce projet de loi.
     J'aimerais éclaircir une chose. La loi actuelle date de 2006. Vous avez les dernières statistiques en matière d'acceptation et de refus. Avez-vous ce genre de statistiques pour la période de 2003 à 2005? Avez-vous constaté une baisse des refus ou y a-t-il plutôt une stabilisation des refus dans ce dossier?

[Traduction]

    Oui, nous avons des statistiques pour la dernière décennie au moins; elles varient beaucoup d'année en année. On remarque des augmentations et des diminutions. Le taux de refus a diminué un peu il y a quelques années, mais je dirais qu'en ce moment, le taux d'acceptation des demandes se situe à 65 ou 70 p. 100.

[Français]

    Vous avez donc vu une baisse dans le taux d'acceptation des transferts et une petite remontée. Est-ce exact?

[Traduction]

    Oui. Je signale que le Service correctionnel du Canada publie sur son site Web ses rapports annuels concernant le transfèrement international, alors beaucoup de données sont disponibles...

[Français]

    J'aimerais que l'on ait ce document, monsieur le président.
    Mon autre question porte sur le libellé de la loi. Vous me direz si je me trompe. La loi actuelle, dans son libellé, oblige le ministre à tenir compte de certains critères. Si le projet de loi C-5 était adopté, il y aurait un changement dans ce libellé. On passerait de « doit tenir compte » à « peut tenir compte », n'est-ce pas?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Cela voudrait dire que le ministre n'a plus l'obligation de tenir compte du fait que l'entité étrangère ou son système carcéral constitue une menace sérieuse pour la sécurité du délinquant ou ses droits. Si le ministre considère que tous les points vont dans le sens d'une acceptation, notamment celle qui est capitale, celle du droit de la personne à sa sécurité et à sa survie, il pourrait en tenir compte ou non, n'est-ce pas?
    C'est exact, il peut ne pas en tenir compte. Ne pensez-vous pas que ce simple élément amène le Canada à ne pas respecter ses conventions internationales relatives à la protection des droits des enfants et aussi les conventions de l'ONU sur les conditions de détention, sur la protection de ses citoyens, même s'ils ont commis des actes criminels?
    Cela ne vient-il pas à l'encontre même de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition qui sont actuellement appliquées au Canada? Il y a comme un non-sens dans tout cela, non?

[Traduction]

    Oui. C'est encore le débat éternel du « pouvoir » contre le « devoir », qui touche bien des questions. J'inviterais Michel à formuler des commentaires à ce sujet.
    Encore là, l'intention n'était pas de se donner les moyens d'ignorer certains facteurs. Il se peut par contre que des facteurs ne soient pas pertinents dans certaines situations. Par exemple, si le délinquant est incarcéré dans un pays très développé où les normes d'emprisonnement sont très comparables aux nôtres, ce facteur n'est tout simplement pas pertinent et d'autres méritent davantage l'attention du juge. De la même façon, le délinquant peut être en excellente santé, alors ce ne serait pas un facteur qui mérite beaucoup de considération. L'idée n'est pas d'ignorer des facteurs, mais bien de s'assurer que le ministre se concentre sur ceux qui sont plus pertinents.
    Mais pour ce qui est du « pouvoir » par rapport au « devoir », peut-être que M. Laprade veut ajouter quelque chose.
(1615)

[Français]

    On parle de pouvoir discrétionnaire. En effet, c'est le pouvoir discrétionnaire d'approuver ou de refuser un transfèrement. Dans le contexte d'un énoncé où on énumère une série de considérations, ou de facteurs, on a essayé de s'éloigner du concept d'un critère. On a essayé de ne pas avoir une liste d'éléments qu'on considérerait comme des critères à respecter ou que le ministre choisirait pour décider d'approuver ou de refuser un transfèrement.
    C'est ce qui se fait à l'heure actuelle.
    Je ne vous dit pas ce que cela fait. On ne parle que des facteurs à considérer, et c'est pour cette raison qu'on a...
    C'est pareil. Qu'on parle de facteur ou de critère, c'est la même chose. Si je suis ministre, je peux accepter ou refuser son cas. Imaginons qu'il soit dans une république où il se fait torturer tous les jours, où il n'y a aucun programme, où il est à peine nourri. Je pourrais décider de tenir compte de cela ou de ne pas en tenir compte si je considérais qu'il représente un problème pour la sécurité publique.
    Je trouve aussi très paradoxal — Mme Campbell le disait très bien au début — le fait que ces gars reviendront au Canada alors que nous ne sommes même pas certains qu'ils ont suivi des programmes ou qu'ils ont travaillé sur leurs facteurs criminogènes, et ils reviendront plus dangereux ou aussi dangereux. À mon avis la prison est l'école du crime. Ils vont donc apprendre à développer des réseaux et être encore plus dangereux. On n'aura pas eu le contrôle là-dessus. Quand ils seront arrivés à la fin du mandat, ils débarqueront chez nous sans même qu'il y ait une surveillance minimale ici. Car si on les transfère, ils feront un bout en prison, mais, par la suite, ils seront surveillés par les services correctionnels à l'extérieur jusqu'à la fin du mandat.
    On perd donc le contrôle et on permet au ministre d'avoir un pouvoir discrétionnaire, comme vous le dites, de choisir les critères qu'il veut. Je trouve cela un peu particulier.
    Pensez-vous qu'on aurait pu, par exemple, ajouter des facteurs comme les enfants et le fait de tenir compte de la sécurité des enfants, de sa famille, mais tout en gardant l'obligation d'en tenir compte?

[Traduction]

    Merci, madame.
    Le temps est écoulé depuis une minute, mais nous allons vous permettre de répondre à la question.

[Français]

    Je reviens encore au concept de « devoir » et de « pouvoir » dans un contexte législatif. Je reviens à la notion de critère et à la notion de facteur, car il y a une différence entre les deux. Quand on doit respecter certains critères et qu'on le fait, en principe, la décision qui suit doit être plutôt dirigée vers un positif ou un négatif, alors qu'ici ce n'est pas cela. C'est une liste de concepts, de facteurs dont le ministre doit tenir compte dans toutes les décisions.
    Il peut en tenir compte.
    De toute façon, il y a la question des termes « may », « shall » ou « will ». Dans un contexte comme celui-là, il faut lire ces dispositions comme étant... Ce sont les facteurs qui vont être pris en considération lors de la prise de décisions par le ministre. D'ailleurs il peut tenir compte de tout autre facteur. L'article 10 nous indique clairement que ce sont des facteurs dont le ministre tiendra compte. Ce sont des facteurs qu'il va considérer.

[Traduction]

    Merci, monsieur Laprade.
    Monsieur Davies, vous avez sept minutes.
    Je vais commencer par quelques questions courtes.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le programme international fonctionne très bien? Est-ce exact?
(1620)
    En général, je crois que c'est le consensus.
    Ai-je raison de dire que les transfèrements ont un effet positif sur la sécurité publique de notre pays? Êtes-vous d'accord avec moi là-dessus également?
    En général.
    Et c'est parce que si on ne transfère pas un délinquant de citoyenneté canadienne, il peut rentrer au Canada sans faire l'objet d'un contrôle, pour reprendre vos paroles. N'est-ce pas?
    En effet.
    Donc, sans transfèrement... Un délinquant condamné pour meurtre ou pédophilie peut rentrer au Canada, et nous n'aurons pas de copie de son dossier. C'est bien cela?
    Normalement, non, à moins qu'une entente d'échange d'informations ait été conclue entre les services de police.
    Il est donc fort possible que ces personnes reviennent s'installer dans nos collectivités sans que nous ne le sachions. N'est-ce pas?
    C'est possible.
    Vous avez dit qu'il y avait aussi « des motifs très valables sur le plan de la sécurité publique qui justifient le transfèrement au Canada des délinquants déclarés coupables ». Et vous nous avez donné différentes raisons pour le justifier. Est-ce exact?
    C'est vrai.
    Vous nous avez aussi dit que « leur condamnation prononcée à l'étranger sera inscrite dans la base de données de la GRC portant sur les condamnations au criminel… Cela ne serait pas le cas si le délinquant était simplement déporté au Canada ». C'est bien ce que vous nous avez dit?
    C'est exact.
    Est-il juste de dire qu'il serait souhaitable que nous effectuions le plus de transfèrements possible au Canada, au point de vue de la sécurité publique?
    J'hésite à quantifier...
    De façon générale, en principe.
    De façon générale, c'est pourquoi ce mécanisme existe à l'échelle internationale: parce que l'on croit que ce système a un certain mérite. Cela dit, il y a évidemment des exceptions et il y a d'autres facteurs à prendre en considération.
    Bien entendu. Si on devait résumer les grandes lignes de votre témoignage, quelle en serait la conclusion? Est-ce que les transfèrements sont une bonne chose ou une mauvaise chose, en général, pour la sécurité publique? Qu'en pensez-vous?
    Je dirais qu'en général ils se sont avérés positifs.
    Positifs, d'accord.
    Maintenant, j'aimerais parler de la question du « devoir » par rapport au « pouvoir ». Dans la loi actuelle, l'article 10 se lit comme suit: « Le ministre tient compte des facteurs ci-après... », puis on en énumère quatre. Dans la loi proposée, l'article se lirait comme suit: « Le ministre peut tenir compte des facteurs ci-après », et tous les facteurs dont le ministre devait tenir compte sont maintenant laissés à sa discrétion.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'on transforme ainsi un examen obligatoire des critères en un exercice purement discrétionnaire, et que rien dans la loi proposée n'obligerait le ministre à tenir compte des facteurs indiqués? Ai-je raison?
    Je ne suis pas certaine que ce soit totalement vrai.
    Je vois dans la loi que « le ministre peut tenir compte des facteurs ci-après… ».
    Oui, mais je vous renvoie également au paragraphe 3(1) du projet de loi, par exemple, qui fait référence à l'alinéa 10(1)(a). Il est vrai que dans le chapeau, il est écrit « le ministre peut tenir compte », mais le critère donné à l'alinéa 10(1)(a) est « constituera une menace pour la sécurité de Canada ». Il est donc très difficile pour le ministre de trancher dans le cas de ce facteur.
    Oui, mais tout le reste, madame Campbell, est qualifié par « peut tenir compte des facteurs ci-après » et « à son avis ». Le ministre n'a pas à tenir compte de ce facteur. Il peut le faire, mais il n'y est pas tenu. Je suis avocat, et je connais la différence entre « doit » et « peut ».
    Est-ce que vous feriez appel de la décision? À l'heure actuelle, aux fins de la révision judiciaire, il est au moins possible d'appuyer sa défense sur les facteurs dont « le ministre doit tenir compte ». En vertu de ce projet de loi, si le ministre ne tient compte d'aucun de ces facteurs, sur quoi pouvez-vous baser votre révision judiciaire avec un régime réglementaire qui montre clairement que le Parlement permet au ministre d'en tenir compte ou non? Quelle serait la base de votre défense?
    Comme M. Laprade l'a indiqué, la décision du ministre doit être conforme à l'intention de la loi, alors même s'il est difficile pour moi d'imaginer les arguments que pourrait invoquer une personne, j'imagine que la défense devrait s'appuyer sur le respect ou le non-respect de l'intention de la loi. Si un facteur qui semble pertinent a été ignoré...
    Mais, madame Campbell, cela ne tient pas la route si le Parlement a dit précisément au ministre qu'il « peut » en tenir compte, surtout s'il décide d'adopter une loi qui modifie la version précédente, selon laquelle cet examen était obligatoire. Un juge trancherait que la volonté du Parlement est que le ministre n'est pas obligé de tenir compte de ce facteur.
    Oui, je comprends...
    Monsieur Laprade.
    Les tribunaux ont déjà tranché. Dans l'affaire Kozarov, la cour a statué que les facteurs énumérés dans la loi ne permettaient pas au ministre de prendre une décision positive ou négative, et que le ministre pouvait aussi tenir compte d'autres facteurs qui sont pertinents selon la situation, et...
(1625)
    C'est vrai, mais la loi actuelle dit que le ministre doit tenir compte de ces quatre critères.
    Oui, mais même s'il n'utilise pas un de ces facteurs pour rejeter une demande de transfèrement, par exemple, ce que le ministre a l'obligation de faire (et c'est ce qu'ont décidé les tribunaux), c'est d'appuyer sa décision par des motifs rationnels. La décision doit être intelligible, de façon à ce que la personne qui la reçoit sache exactement pourquoi sa demande a été rejetée, et les éléments ou les facteurs qu'énumère le ministre doivent être conformes à l'intention de la loi…
    Bien sûr. Je comprends comment le processus de révision judiciaire fonctionne.
    C'est dans le contexte de la loi actuelle.
    Je comprends que le ministre a un certain pouvoir discrétionnaire et qu'il peut prendre la décision qu'il veut, pourvu que ses motifs soient rationnels. Mais la chose que le ministre ne peut pas éviter dans le cadre de la loi actuelle, c'est qu'il doit tenir compte de quatre facteurs: « le ministre doit tenir compte des facteurs ci-après... ». Si le ministre ne tenait pas compte de ces facteurs, un demandeur débouté pourrait gagner sa cause s'il interjetait appel.
    Cela ne serait plus le cas en vertu de la loi proposée. Le ministre ne serait pas tenu de prendre en compte l'un ou l'autre de ces facteurs. C'est là où je veux en venir. Vous ne pouvez pas m'assurer de façon satisfaisante que le ministre aurait à tenir compte de ces facteurs, puisqu'il est indiqué clairement qu'il n'est pas tenu de le faire. C'est ce qui me préoccupe.
    La seule chose que je peux ajouter, et je suis désolée de vous décevoir, mais je ne répondrai pas à votre question directement, c'est que les refus ne constituent pas un nouveau phénomène, il n'est pas rare que cela se produise.
    Par exemple, si vous jetez un coup d'oeil au rapport annuel de 2008-2009, vous verrez un tableau concernant les demandes rejetées. Le tableau couvre les années 2004 à 2009. Sur toutes les demandes rejetées durant cette période, 85 p. 100 avaient été rejetées par les pays étrangers, pas le Canada. Ainsi, 15 p. 100 des refus…
    Pensez-vous qu'il y aura plus ou moins de refus si cette loi est adoptée?
    Il est impossible de répondre à cette question. C'est impossible.
    Vous ne pouvez pas extrapoler? Vous n'avez pas d'opinion?
    Mme Mary Campbell: Non.
    M. Don Davies: D'accord.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Norlock, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vois que les témoignages qui nous sont présentés ici vous enchantent. Je pense que, dans un tribunal — comme nous pouvons tous le voir à la télévision —, M. Davies serait accusé de harceler son témoin. Quoi qu'il en soit, passons à autre chose.
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    M. Rick Norlock: J'allais commencer avec ceci, mais je vais plutôt m'engager sur une autre voie, et il y a des raisons à cela. Vous parliez des refus. Selon les statistiques dont j'ai pu prendre connaissance, environ 40 p. 100 des demandes ont fait l'objet d'un refus du Canada, entre 2003 et 2007.
    Ce sont les statistiques pour la période de 2003 à 2007. Sont-elles relativement exactes? Le temps passe, alors s'il vous faut du temps pour vérifier, nous dirons que ces statistiques sont exagérées ou que vous ne les croyez pas exactes, et nous pourrons y revenir plus tard.
    Selon l'une des principales objections que j'entends, le projet de loi ne serait pas bon parce qu'il accorderait trop de pouvoir au ministre. Je pense que vous avez plutôt bien répondu à cette objection en précisant que le ministre « peut tenir compte » des facteurs, même s'il n'est pas obligé d'en tenir compte.
    Vous dites qu'il est en général plus sûr de rapatrier les Canadiens condamnés pour des crimes à l'étranger parce que nous pouvons mieux les surveiller au pays ou parce que nous disposons ainsi d'un dossier sur eux. Est-il juste de dire que ce problème pourrait être réglé en changeant l'accord de transfert et la réglementation canadienne de manière à ce que le dossier du prisonnier l'accompagne automatiquement lors de son transfert? Ce dossier serait joint au casier judiciaire de la personne, au Canada.
(1630)
    Voulez-vous dire lorsque le délinquant revient au Canada autrement que dans le cadre du programme de transfèrement?
    Non. Je veux dire s'il revient dans le cadre du programme. Si la personne revient...
    Si le détenu revient dans le cadre du programme de transfèrement...
    Le dossier accompagne... ?
    ... le dossier accompagne le détenu. C'est exact.
    Merci. Donc, un dossier accompagne le détenu, mais vous dites que, si la personne termine de purger sa peine dans l'autre pays, puis revient au Canada, le dossier n'est pas nécessairement transféré, à moins qu'il y ait un accord réciproque avec le pays en question.
    C'est exact. Le Canada a conclu quelques accords, par exemple avec certains États des États-Unis, et ces accords font en sorte que l'information est communiquée normalement aux responsables canadiens dans le cas de certaines catégories d'infractions.
    Alors, nous pouvons dire que... si ma mémoire ne fait pas défaut, la police canadienne a accès directement aux dossiers des personnes déclarées coupables d'une infraction criminelle, aux États-Unis, par l'intermédiaire du National Crime Information Center, et vice-versa.
    Est-ce exact, monsieur Laprade?
    Je crois que c'est exact.
    Étant donné que plus de 80 p. 100 des prisonniers transférés sont des Canadiens purgeant leur peine aux États-Unis, nous avons donc accès de toute manière aux dossiers de 80 p. 100 des personnes déclarées coupables à l'étranger, peu importe le moment de leur retour au Canada. Le pays suivant, dans la liste, est la Grande-Bretagne, et je ne serais pas étonné que nous ayons un accord réciproque avec ce pays également, quoique ce ne soit pas indiqué dans la documentation dont je dispose actuellement.
    Si je peux me permettre, l'information disponible ne constitue pas un casier judiciaire au Canada. C'est de l'information contenue dans un dossier à l'étranger.
    Lorsqu'un délinquant est transféré au Canada, le dossier qui l'accompagne n'est pas issu d'une déclaration de culpabilité au Canada, mais il est consigné par le SCC et partout ailleurs, y compris au Centre d'information de la police canadienne. C'est pourquoi, lorsque la Loi sur le transfèrement international des délinquants a été modifiée, la Loi sur le casier judiciaire l'a été en même temps, de manière à ce que le dossier du détenu transféré soit considéré comme un casier judiciaire au Canada.
    Je veux dire que les organismes d'application de la loi du Canada, y compris l'Agence des services frontaliers du Canada, le Service correctionnel du Canada, la GRC, les autres services de police et d'autres organismes encore ont un accès direct aux dossiers de plus de 80 p. 100 des délinquants transférés ainsi qu'aux dossiers des délinquants incarcérés en Grande-Bretagne, ce qui fait peut-être 85 p. 100. Grâce aux systèmes informatiques, les organismes canadiens d'application de la loi ont un accès immédiat, en quelques secondes, à ces dossiers, qu'ils fassent partie ou non des dossiers consignés au Canada. Est-ce bien exact?
    Oui.
    Bien. Passons maintenant à la question des coûts. Des membres nous ont parlé, par exemple, des coûts engendrés par le retour au Canada d'une personne qui n'a pas bénéficié d'un programme de réadaptation. Or, je pense que, quel que soit le parti auquel appartiendra le ministre de la Justice, qu'il soit libéral ou néo-démocrate — mais pas du Bloc québécois parce que cela n'arrivera jamais —, il sera probablement avocat et il aura à coeur la sécurité du public canadien. Ce sera le cas peu importe le parti politique.
    Mais voici ce que je veux dire. Le citoyen moyen perçoit le rapatriement d'un délinquant comme un coût immédiat. Je ne sais pas si vous avez des observations à nous faire là-dessus. On rapatrie au Canada une personne ayant commis, dans certains cas, des actes horribles dans un autre pays. Ce rapatriement entraîne une dépense variant entre 90 000 et 130 000 $ par année pour garder la personne en prison au Canada. La dépense peut aller jusqu'à 180 000 $.
    Quand on regarde les statistiques dont j'ai pris connaissance, on s'aperçoit que la plupart des infractions commises sont punissables de 10 à 15 ans d'emprisonnement ou encore moins, au Canada. Est-ce bien exact?
    À ce sujet, je me contente de vous répondre... Vous avez raison de dire que je ne souhaite pas me prononcer sur les coûts, mais j'examine chaque dossier. J'ai pris connaissance personnellement de plus de 100 dossiers au cours du dernier mois. Je n'ai pas conservé systématiquement des statistiques, mais je vous dirais que, dans la vaste majorité des cas, il s'agit d'un Canadien ayant commis une infraction liée aux drogues à l'étranger. Je ne connais pas la peine maximale, mais ce sont surtout des infractions liées aux drogues, notamment des infractions de trafic de stupéfiants.
    Merci.
    Selon les statistiques dont je dispose, 96 délinquants ont été rapatriés au Canada en 2001-2002. En 2008-2009, c'était 82 personnes. La différence est de 10 personnes. En 2001-2002, aucune de ces modifications législatives n'avait été faite. Pourtant, le nombre de transfèrements était à peu près le même.
(1635)
    Très rapidement, je vous prie.
    Il me faudrait examiner plus attentivement les statistiques que vous citez, car je ne voudrais pas embrouiller le sujet.
    Nous pourrions y revenir plus tard.
    J'en profite pour vous signaler, au sujet des questions qui vous sont posées, que si vous pensez devoir apporter ultérieurement des précisions ou des corrections concernant les réponses que vous nous avez données, vous pouvez faire parvenir cette information supplémentaire au greffier de notre comité, qui verra à nous la transmettre.
    Monsieur Kania, vous avez cinq minutes.
    Les statistiques dont nous disposons nous indiquent qu'en 2004-2005, la dernière année où le Parti libéral était au pouvoir, quatre personnes se sont vu refuser leur demande. Pour la dernière année sur laquelle nous avons des statistiques, 2006-2007, le gouvernement conservateur a refusé sept demandes. Est-ce bien exact?
    Je ne sais pas non plus dans quel document vous puisez ces statistiques.
    Dans le rapport annuel 2008-2009, qui est un document public, il est écrit qu'en 2004-2005, aucune demande n'a été refusée; en 2005-2006, deux demandes l'ont été; en 2006-2007, ce sont 23 refus; en 2007-2008, 43 refus.
    Ça va. Le nombre de refus a augmenté, en valeur absolue, mais c'est un nombre qui demeure relativement petit. Lorsque je regarde le projet de loi, la première question qui me vient à l'esprit est la suivante: pourquoi a-t-il été présenté? Quel problème essaie-t-il de résoudre?
    Si je comprends bien ce que vous nous avez indiqué — et je ne voudrais pas me tromper en vous citant —, vous dites que le projet de loi a été présenté parce que, dans leurs décisions, des tribunaux ont déterminé qu'il fallait obligatoirement tenir compte de certains facteurs. Vous dites que le projet de loi aura comme effet de résoudre le problème soulevé par les juges en ajoutant de nouveaux facteurs dont le ministre devra tenir compte.
    Est-ce bien ce que vous voulez dire? Le projet de loi est-il destiné à corriger une erreur dans la loi soulignée par les juges?
    En tant que fonctionnaire, permettez-moi de vous rappeler encore une fois que mon rôle consiste à expliquer le projet de loi, c'est-à-dire à fournir de l'information factuelle. Je pense que, si vous voulez aborder la question des motifs ou des intentions, vous devriez poser votre question à un représentant du gouvernement.
    Il ne fait aucun doute que le projet de loi vise notamment à donner suite aux décisions des tribunaux, car il y a eu un certain nombre de décisions. C'est manifestement la raison d'être de l'une des dispositions du projet de loi. Le problème sera-t-il ainsi entièrement réglé? Je ne le sais pas, mais la disposition a pour but de donner suite à ce que les juges nous ont indiqué.
    Je suis plutôt d'avis, si vous permettez, qu'il ne s'agit pas de donner suite aux décisions des tribunaux, mais bien d'essayer de contourner ces décisions.
    On essaie en particulier de contourner le jugement dans l'affaire... je n'arrive pas à prononcer le nom, mais c'est Getkate. Êtes-vous au courant de cette affaire?
    Oui.
(1640)
    Alors, après avoir analysé le dossier, la Cour fédérale l'a essentiellement renvoyé au ministre de la Sécurité publique en lui indiquant que son refus n'était pas fondé. Voici plus exactement ce que dit le jugement:
Comme les motifs invoqués par le ministre allaient « à l'encontre de la preuve ainsi que de l'évaluation et des recommandations de son propre ministère », la demande de M. Getkate a été renvoyée au ministre pour une nouvelle décision.
    J'ai parcouru ce dossier. Il est question d'une preuve « claire et indiscutable » fournie notamment par le Service correctionnel du Canada. Selon moi, il est évident que ce jugement est l'un de ceux qui ont inspiré le ministre. Je vous dirais même que le projet de loi a été rédigé principalement à cause de ce jugement. On n'essaie pas de préciser ou de renforcer la loi, mais bien de la contourner, tout simplement parce que le ministre n'aime pas se faire dire qu'il ne peut pas faire tout ce qu'il veut et qu'il doit se montrer raisonnable.
    Êtes-vous d'accord avec moi?
    Permettez-moi de vous éclairer encore une fois sur le contexte. Depuis 2004, la Cour fédérale a rendu 10 jugements. Dans six cas, le juge a estimé que la contestation n'était pas fondée et, dans les quatre autres cas, il a estimé qu'elle l'était.
    En ce qui concerne l'affaire Getkate elle-même, j'inviterais M. Laprade, notre conseiller juridique, à vous répondre.
    Très rapidement, je vous prie, car il ne vous reste pratiquement plus de temps.
    Merci, monsieur le président.
    Comme vous allez nous répondre au sujet des quatre cas où le juge a donné tort au ministre, je me permets de vous répéter que nous assistons à une tentative du ministre de contourner des décisions où il s'est fait dire qu'il n'exerçait pas son pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable.
    Je vais limiter mes observations aux affaires portées à l'attention des tribunaux et à l'orientation des jugements dans ces affaires. Les juges ont beaucoup souligné le grand respect qu'ils doivent avoir pour les décisions du ministre et pour les décisions discrétionnaires en général. C'est l'un des fondements du droit administratif au Canada.
    Néanmoins, les juges ont indiqué que le ministre ne pouvait pas prendre des décisions sans aucun fondement. Ses décisions doivent être compréhensibles et doivent s'appuyer sur des motifs rationnels. Cette conclusion des juges s'appliquait au moment des décisions et s'appliquera encore après l'adoption du projet de loi. Donc, par exemple, dans l'affaire Getkate, les raisons invoquées par le ministre ne concordant pas avec les faits au dossier, il est arrivé ce qui devait arriver.
    Quel que soit le dossier, le ministre doit prendre sa décision selon les facteurs et les circonstances qui lui sont soumis. La décision doit être fondée sur les faits et les preuves en présence. Il doit prendre une décision qui se justifie à partir de cette base. Il ne peut pas prendre une décision purement arbitraire.
    Merci, monsieur Laprade.
    Monsieur Rathgeber.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être présents aujourd'hui et de nous offrir leurs témoignages.
    J'aimerais reprendre où mon ami M. Kania a terminé. Je sais que, selon les statistiques de la décennie qui s'est terminée en 2007, il y a eu 10 fois plus de rapatriements de délinquants canadiens que de délinquants transférés dans un autre pays, depuis le Canada. Est-ce exact?
    C'est le ratio habituel.
    Un total de 1 351 délinquants ont été rapatriés au Canada, tandis que 124 personnes détenues au Canada ont été transférées dans un autre pays.
    Oui.
    Savez-vous pourquoi un nombre si disproportionné de Canadiens souhaitent rentrer au pays?
    Vous savez, je tomberais dans les suppositions et je ne vous répondrais pas de manière professionnelle si j'essayais d'expliquer pourquoi, dans de nombreux cas, les délinquants étrangers ne veulent pas rentrer dans leur pays. Je ne sais pas combien de délinquants étrangers sont incarcérés à l'heure actuelle dans les prisons canadiennes, ce qui m'empêche de pouvoir déterminer quelle proportion d'entre eux demandent de rentrer dans leur pays et quelle proportion ne souhaite pas...
    Mais Michel le sait peut-être.
    Je peux ajouter quelque chose. Plusieurs facteurs déterminent ce que l'on observe dans les statistiques. Les délinquants étrangers se trouvant au Canada peuvent faire l'objet d'une mesure de renvoi, et c'est d'ailleurs le cas de beaucoup d'entre eux. Dès qu'ils sont libérés sous condition... Il y a de nombreuses années, il était possible de libérer sous condition un ressortissant étranger dans le but de l'expulser. Ce n'est plus possible aujourd'hui, mais un certain nombre de délinquants de nationalité étrangère sont expulsés du Canada dès qu'ils obtiennent leur libération conditionnelle ou leur semi-liberté, à leur date d'admissibilité.
    Donc, si le nombre de délinquants étrangers demandant d'être transférés dans leur pays semble un peu plus faible qu'ailleurs dans le monde, c'est que les délinquants retournent dans leur pays lorsqu'ils sont expulsés, plutôt qu'en étant transférés. C'est davantage le cas au Canada que dans d'autres pays, où il n'existe pas de système de libération conditionnelle et où les délinquants demandent un transfert.
    Le Canada reçoit-il une somme d'argent de la part des pays qui lui transfèrent des délinquants canadiens conformément à un accord?
    Non, c'est considéré comme une forme d'aide mutuelle internationale, si vous voulez.
    Par conséquent, nous ne versons aucune somme d'argent au pays qui reçoit un de ses ressortissants transférés après avoir été déclarés coupables au Canada.
    C'est exact.
(1645)
    Merci.
    En consultant les mêmes statistiques, je constate que, dans la vaste majorité des cas, la demande de transfèrement est refusée parce que le délinquant est considéré comme un danger pour la sécurité du Canada ou parce que le délinquant n'a plus l'intention de considérer le Canada comme son lieu de résidence. Est-ce exact?
    Encore une fois, je n'ai pas fait d'analyse stricte qui me permettrait de répondre par oui ou par non à cette question. Je sais que ce sont les deux raisons qui sont citées.
    Le ministère conserve-t-il des statistiques sur les motifs invoqués pour refuser à un demandeur son transfèrement au Canada à partir d'un autre pays? L'information que j'ai en main n'est pas contenue dans un document de la Bibliothèque du Parlement, alors peut-être que nos analystes pourraient nous dire où ils ont obtenu cette information. Quoi qu'il en soit, nous reviendrons à cette question.
    Je n'ai pas en main ces statistiques, personnellement, mais je peux certainement chercher à savoir si elles existent ou si elles sont disponibles.
    Quelqu'un doit savoir quels sont les motifs de rejet des demandes de transfèrement. C'est là où je veux en venir. Il doit y avoir un dossier quelque part. Les motifs sont-ils fournis aux demandeurs?
    Oui, tout à fait. Dans le dossier de chaque demandeur figurent la décision et, s'il s'agit d'un refus, les motifs invoqués.
    Et le demandeur a le droit d'obtenir peut-être pas le dossier au complet, mais certainement la décision elle-même ainsi que les motifs, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Est-ce que le projet de loi aura pour effet de modifier cette pratique?
    Non.
    Alors, pour rassurer M. Davies, qui craint que le demandeur n'ait rien pour fonder un appel, nous pouvons lui affirmer que le demandeur recevra par écrit les raisons pour lesquelles sa demande a été refusée.
    Oui. C'est exact.
    Merci.
    C'est un projet de loi très court, je ne vous apprend rien. J'ai sous la main une version précédente; je crois que c'était le projet de loi C-59 déposé lors d'une législature précédente du Parlement. On y trouvait une clause additionnelle. C'était l'article 4 qui modifiait un projet de loi alors soumis au Parlement qui aurait amendé la clause de la dernière chance. Ce n'est pas dans la version actuelle du projet de loi. Est-ce bien le cas...? Oui, c'est le cas, mais pour quelle raison?
    Encore là, je devrai vérifier et vous répondre ultérieurement. Depuis, un projet de loi a été déposé au Parlement concernant la clause de la dernière chance et c'est peut-être simplement parce que ce projet de loi traite déjà de la clause en question qu'on n'y fait pas allusion dans celui-ci. Nous allons vérifier.
    D'accord. Ce projet de loi prévoit...
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    ... un certain nombre de facteurs additionnels que le ministre peut prendre en considération. On a déjà indiqué quels étaient ces facteurs et je ne vais pas les répéter. À la lumière de votre expertise de ces questions, est-ce que cela crée un processus décisionnel injuste et inéquitable?
    Je ne crois pas pouvoir faire de commentaires à ce sujet.
    Merci beaucoup, monsieur Rathgeber.
    Nous passons maintenant à Mme Mourani.

[Français]

    Vous avez cinq minutes.
    Merci. Je vais partager le temps qui m'est alloué avec mon collègue qui veut pouvoir utiliser deux minutes, c'est ça?
    Même pas. J'ai seulement une question à poser.
    Même pas, alors allez-y en premier.
    J'ai seulement une question à poser. Supposons que je me fasse arrêter en Thaïlande pour une raison quelconque et que je sorte de prison deux ans plus tard après avoir purgé ma peine. J'arrive ici, il n'y a rien à mon dossier. Je pourrais donc devenir premier ministre du Canada. Si vous appelez ça de la sécurité, on fait dur « en saint Pilate »! C'est ma question.
     Ah, ah! C'est très court.
    Je n'ai plus rien à dire.
    C'est bon.
    La personne peut devenir premier ministre du Canada après avoir passé deux ans en prison en Thaïlande. Ça va bien! Il n'y a pas de problème de ce côté! Il faut changer la loi.
    Je souhaiterais qu'on parle du cas de M. Ronald Allen Smith. Connaissez-vous ce cas?

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    M. Smith est un Albertain qui est encore détenu, si ma mémoire est bonne, au Montana, un État qui applique la peine de mort. Il a tué deux personnes. Il est donc condamné à mort, et le Canada refuse toujours de le rapatrier, si je ne me trompe pas.
    En 1976, on a aboli la peine de mort ici, au Canada, et deux ministres conservateurs successifs, le ministre de la Justice et le ministre de la Sécurité publique, ont refusé de faire un transfert de détenus.
    Si j'interprète bien la loi actuelle, lorsqu'une personne est accusée de peine de mort, par exemple, il faut pouvoir commuer cette peine en peine de prison à vie.

[Traduction]

    Le transfèrement est impossible, car la peine de mort est une sentence qui n'existe pas au Canada. C'est exact.

[Français]

    Alors, on doit commuer sa peine en peine de prison à vie.

[Traduction]

    Ce serait les autorités américaines qui en décideraient. Si un détenu purge une peine d'incarcération à vie aux États-Unis, il pourrait être transféré au Canada.
(1650)

[Français]

    Par contre, si une personne est condamnée à mort aux États-Unis, que le Canada accepte de la rapatrier, que les États-Unis soient d'accord, que les deux pays s'entendent et que le délinquant soit aussi d'accord, lorsque ce dernier vient ici, un calcul de sentence se fait, non? Sa peine est commuée: elle devient une peine de prison à vie au lieu d'une peine de mort.

[Traduction]

    L'État devrait intervenir d'abord en infligeant une peine pouvant être administrée au Canada.

[Français]

    Il faudrait que la peine soit exercée au Canada.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Dans une déclaration du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, il accusait le Canada d'offrir la mort en sous-traitance à d'autres pays.
    Pensez-vous que, conformément à ce projet de loi tel qu'il est présentement, on risque de se retrouver avec ce genre de décision encore plus facile à prendre, ou bien ça ne changera pas vraiment grand-chose —  selon le gouvernement et ses valeurs, on risque d'avoir une sous-traitance de la mort ou pas?

[Traduction]

    Tout ce que je puis vous dire, c'est qu'il n'y a actuellement aucune demande de transfèrement qui a été présentée au Canada. À première vue, rien dans ce projet de loi ne serait pertinent dans le dossier en cause.

[Français]

    Vous disiez, tout à l'heure, qu'il y a eu des ajouts justement pour pouvoir combler plusieurs failles dans la loi, notamment en ajoutant les protections pour les enfants, les femmes, etc.
    Ne pensez-vous pas qu'on aurait dû aussi ajouter cette disposition en disant tout simplement que le ministre devrait tenir compte du fait que la personne est condamnée à mort ou pas?

[Traduction]

    Je crois que c'est une question que vous devriez adresser au représentant du gouvernement.

[Français]

    D'accord. Je vous remercie.
    Me reste-t-il du temps?

[Traduction]

    Il vous reste une minute.

[Français]

    One minute. Très bien. Merci, monsieur le président.
    Je me demande comment on pourrait améliorer ce projet de loi, car tel qu'il est actuellement, malheureusement, on ne pourrait pas vraiment voter en sa faveur. Cependant, notre but aujourd'hui en comité, c'est de l'améliorer.
     Par exemple, si on apportait les changements suivants: au lieu de dire « peut tenir compte », on dirait « doit tenir compte ». Au paragraphe 3(1) du projet de loi, à l'article 10 proposé, partout où l'on retrouve les termes « peut tenir compte », on écrirait plutôt « doit tenir compte ». Et, après les alinéas a) à l) — l'alinéa l) disant « tout autre facteur qu'il juge pertinent. » —, on ajouterait un autre alinéa qui dirait: « doit aussi tenir compte des pays qui pratiquent la peine de mort ». Ça pourrait être quelque chose à faire afin d'améliorer ce projet de loi de façon à ce qu'on puisse l'appuyer.

[Traduction]

    Je pense qu'il ne fait aucun doute que le gouvernement a toujours manifesté son respect pour le travail des comités et que toutes les motions ou ajustements proposés à l'étape de l'étude article par article seraient pris en considération.

[Français]

    Mais c'est possible? C'est ça que je demande. C'est possible dans le cadre de ce projet de loi d'ajouter ça? Nous pourrions allègrement nous amuser avec ça, quoi. Ah, ah!

[Traduction]

    Je n'ai rien à ajouter.

[Français]

    Vous le dites avec un sourire.

[Traduction]

    D'accord. Merci.
    Vous n'avez plus de temps.
    Monsieur McColeman.

[Français]

    Ah, ah! Vous êtes au courant de mes amendements, monsieur le président.

[Traduction]

    À 17 h 36, vous pouvez...
    Une voix: La pensée magique...
    Le président: Nous vous écoutons, monsieur McColeman.
    J'attendais simplement que les députés d'en face aient fini leur petite conversation.
    D'abord et avant tout, merci beaucoup pour votre présence. Vos opinions sont importantes à nos yeux.
    J'examine la question en me mettant à la place des victimes de ces crimes et, en toute franchise, je crois que notre gouvernement adopte la même approche en proposant ces mesures. En effet, on n'élargit pas les pouvoirs du ministre qui rend ses décisions en s'appuyant sur des éléments qui, selon moi, relèvent du gros bon sens, du point de vue des gens qui pourraient être touchés ou le seraient, sans doute, si je me fie aux statistiques, dans des circonstances exceptionnelles. Il y a peut-être des cas où nous avons pu ressentir une certaine frustration dans nos efforts pour assurer la sécurité de la population alors que nous avions peut-être les mains liées par certains accords, certaines règles ou certaines politiques incontournables qui ne nous permettaient pas d'agir dans le passé.
    Est-ce une bonne évaluation du contexte général entourant les changements proposés dans ce projet de loi?
(1655)
    Oui, et j'estime que l'une des difficultés vient de la multiplicité des modèles et des situations possibles. Je me souviens d'un cas qui doit remonter à une dizaine d'années, bien que je doive vous avouer qu'à cette étape-ci de ma carrière, j'ai toujours l'impression de devoir retourner 10 ans en arrière...
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Mary Campbell: C'est peut-être mon âge.
    Nous avions eu un cas inhabituel où un Canadien faisait l'objet d'allégations de fraude grave en Ontario. Il est disparu au Royaume-Uni où il a éventuellement été inculpé d'un crime très violent. On l'a reconnu coupable et retourné au Canada en vertu de la Loi sur le transfèrement des délinquants, à l'insu de la famille ici au pays, laquelle avait bien sûr coupé les liens avec lui à ce moment-là. La famille était furieuse. J'ai rencontré ces personnes. On ne les avait pas averties à l'avance. On s'inquiétait beaucoup du fait de la proximité physique de l'individu. On craignait qu'il pose des risques pour la sécurité des gens ici au Canada.
    C'était simplement un exemple d'une situation où le déroulement des choses n'est pas nécessairement celui que l'on pourrait imaginer. Le projet de loi et le processus décisionnel qu'il propose vise à offrir une marge de manoeuvre suffisante sans ouvrir complètement les vannes. Je crois que c'est un bon exemple de cas où il y a ici même au Canada des victimes d'événements s'étant déroulés antérieurement qui se retrouvent victimisées davantage parce que leur situation n'a pas été prise en compte dans la décision de transférer l'individu.
    Je suis heureux que vous citiez cet exemple, car l'une des questions sur lesquelles s'est penché notre comité, en étant capable de dégager un consensus, est celle des délinquants sexuels et de leurs pérégrinations dans différents pays où ils commettent leurs crimes, y laissant des victimes qui constatent un jour que le délinquant est de retour dans leur entourage sans qu'on ne les ait avisées. Ces individus sont parmi les plus monstrueux que l'on puisse imaginer; ils s'en prennent à nos enfants et à nos familles.
    Lorsque mes collègues d'en face prétendent que ce n'est pas une bonne chose d'étendre les pouvoirs du ministre ou du ministère pour qu'il puisse réagir à ces situations horribles lorsqu'elles se produisent... ce ne sont pas les cas les plus fréquents. Il n'est pas question ici des individus qui sont inculpés d'infractions liées aux stupéfiants, au Mexique ou ailleurs. Tout au moins, je ne crois pas que ce soit les mêmes personnes; peut-être pourriez-vous me le confirmer.
    J'estime que ce projet de loi nous permet d'établir quelques critères basés sur le gros bon sens pour déterminer si ces individus devraient pouvoir rentrer au pays alors qu'en vertu de la loi en vigueur, les gens qui prennent ces décisions ont en quelque sorte les mains liées. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ces gens ont demandé que des changements soient apportés. Est-ce que je fais fausse route en affirmant de telles choses?
    Non, et si j'affirme que la vaste majorité des cas de transfèrement concernent des infractions liées aux drogues, il va de soi qu'il y a aussi d'autres types d'infractions. Je peux vous assurer que j'ai vu un bon nombre d'infractions de nature sexuelle dans les dossiers de demandes de transfèrement.
    Comme vous l'avez indiqué, je peux certes penser à un cas où une personne active au Canada en se servant d'Internet pour commettre ses crimes s'est rendue aux États-Unis avec l'intention de poursuivre ses délits, mais a été appréhendée par les autorités américaines. Mais cette personne s'était aussi livrée à des activités criminelles au Canada. Il y a assurément des inquiétudes découlant de la mobilité et de la portée des actions des délinquants sexuels, surtout dans le contexte actuel.
    Concernant ce dernier point du cybercrime et de l'utilisation d'Internet, une problématique dont nous sommes certes tous conscients, mais à laquelle nous ne nous sommes pas encore attaqués vraiment sérieusement dans nos mesures de sécurité publique, lorsqu'on envisage d'apporter des changements à des lois comme celle-ci, jusqu'à quel point ces considérations sont-elles prises en compte par les gens chargés d'analyser les lois de telle sorte que nous puissions réellement amorcer une démarche pour contrer ces activités via tous les moyens législatifs possibles?
(1700)
    C'est assurément un sujet de préoccupation pour tous. Lorsque la loi a été rédigée en 1978, il n'y avait pas d'ordinateurs. Internet n'existait pas. Ce n'était pas une tribune disponible pour les individus ayant des visées criminelles. Il va de soi que le monde a beaucoup changé depuis.
    Merci, madame Campbell.
    Nous passons à Mme Mendes.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    Bonjour, monsieur Laprade et Mrs. Campbell.
    J'aimerais commencer par vous demander si ce n'est pas normal qu'on veuille aussi amener des criminels devant un juge et punir les crimes qui ont été commis au Canada, avant qu'ils ne partent à l'étranger pour commettre d'autres crimes? Vous dites que les victimes craignent que ces criminels aient la possibilité de revenir au Canada. Si les autorités américaines ont été plus efficaces et les ont appréhendés, c'est quand même à l'avantage du Canada de les punir au Canada.

[Traduction]

    Encore là, il y a de nombreux scénarios possibles. Il peut s'agir d'individus ayant déjà un casier judiciaire au Canada et qui sont appréhendés pour des infractions commises à l'étranger. Ils peuvent avoir commis des infractions semblables au Canada sans que l'on ne les ait repérés.
    Nous essayons ici d'aider le ministre à prendre des décisions au sujet des transfèrements. Je ne suis pas certaine que votre question soit...
    Je veux savoir si nous nous sommes donné comme tâche de protéger les victimes. Est-ce le but visé en définitive? Les victimes dont il est question dans les cas de transfèrement pour des crimes commis à l'étranger sont elles-mêmes à l'extérieur du pays; elles ne sont pas au Canada.
    Oui, mais il faut également considérer le fait qu'il peut aussi y avoir des victimes au Canada, tout en voulant éviter qu'on ne les victimise davantage... Alors s'il y a des inquiétudes...
    Peut-être ces individus devraient-ils alors répondre de leurs actes devant nos tribunaux?
    Tout à fait, mais si l'on s'inquiète du fait que leur retour au Canada peut d'une manière ou d'une autre augmenter les risques que de nouveaux crimes soient commis chez nous, qu'il y ait une plus grande victimisation...
    Pourquoi donc? Ces gens ne passent-ils pas d'une prison à une autre?
    Au départ, oui.
    Au départ... jusqu'à ce qu'ils aient fini de purger leur peine, j'imagine.
    Effectivement.
    Si ces individus purgent leur peine au complet aux États-Unis, en Thaïlande ou peu importe, ils peuvent revenir au Canada de leur propre gré et continuer à y commettre leurs crimes. Alors quelle différence cela fait-il qu'ils purgent le reste de leur peine dans une prison au Canada, aux États-Unis ou ailleurs dans le monde? C'est ce que je ne comprends pas dans ce projet de loi et il ne fait aucun doute que les arguments que Mme Mourani faisait valoir tout à l'heure au sujet du « doit » et du « peut » font toute la différence du monde dans le contexte de ce projet de loi.
    Tout le concept de la sécurité publique, lorsqu'il s'agit de transférer des prisonniers... Il n'est pas question de ramener au pays des gens qui seront libres. Ce sont des individus qui sont incarcérés et qui passeront d'une prison à une autre jusqu'à ce que leur peine soit purgée.
    Oui, mais il faut malheureusement constater en pareille situation que, même lorsqu'ils sont incarcérés au Canada, ces individus peuvent poursuivre leurs délits, un élément à ne pas négliger. Si on les ramène au Canada, ils seront réunis à nouveau à un certain réseau ou à leurs acolytes et pourront plus facilement commettre des crimes chez nous, même pendant leur incarcération...
    Comment pouvons-nous être sûrs qu'ils ne profitent pas exactement du même genre de formation ou de réseautage — ou peut-être pire encore — dans les prisons à l'étranger au sein desquelles nous n'exerçons absolument aucun contrôle quant à leurs activités, à ce qu'on leur enseigne ou aux types de réseaux qu'ils peuvent créer?
    Je ne comprends vraiment pas comment il pourrait être préférable pour le Canada de laisser nos citoyens être incarcérés à l'étranger. Nous offrons ici des services de réadaptation. Nous offrons des programmes...
    Désolée?
    Je me demande à quel point cela est pertinent quant à la partie du projet de loi que nous étudions; le projet de loi ne vise pas ce but-là, on ne cherche pas à garder tous les prisonniers au Canada. Je pense que l'on reconnaît... Je vais vous laisser...
    Non, non. On veut plutôt les garder à l'étranger. C'est ce que le projet de loi cherche à faire.
(1705)
    Non, je ne crois pas que ce soit l'intention du projet de loi.
    Une voix: Monsieur le président...
    Eh bien, je pense que c'est exactement son intention.
    Comme j'ai empiété sur le temps qui vous est alloué, je vais vous laisser poursuivre encore quelques instants.
    C'est bien.
    Mais j'estime que le but premier de ce projet de loi qui vise à garder le plus grand nombre possible de criminels à l'extérieur des prisons canadiennes...
    Une voix: Qui est le témoin?
    Mme Alexandre Mendes: D'accord, nous avons des points de vue différents sur la question...
    Une voix: Qui donc est le témoin? Franchement!
    Mme Alexandra Mendes: Mais j'aimerais savoir en quoi cela peut contribuer de quelque manière que ce soit à protéger la sécurité publique au Canada. De quelle façon cette situation pourrait être préférable pour nous une fois que la peine est entièrement purgée, car c'est ce qui arrivera en définitive?
    Je vous signalerais à nouveau que l'amendement à l'article 3, l'objet de la loi, est de portée limitée. Le libellé du reste de l'article en question demeure inchangé quant aux objectifs visés par la loi.
    Mais le fait que nous ayons remplacé « tient compte » par « peut tenir compte » fait une énorme différence...
    Je comprends.
    ... il supprime toute l'impartialité requise dans l'évaluation des demandes de transfèrement.
    Il me reste encore du temps?
    Eh bien, je vous ai déjà laissé 38 secondes supplémentaires.
    Nous allons passer à M. MacKenzie avant de revenir encore une fois au Parti libéral.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Madame Campbell, vous avez cité un cas très intéressant, sans donner de noms, et je peux vous assurer que c'est une affaire que je connais très bien. Il est même probable que mon nom figure dans le dossier.
    Mais vous avez soulevé un point très important et mes collègues devraient savoir qu'il y a effectivement des victimes au Canada. Dans le cas que vous avez souligné, les victimes étaient ici au pays; il n'y en avait pas à l'étranger, où un meurtre a été commis. Il y avait des victimes au Canada. Elles ont été complètement bouleversées. Leurs vies ont été chamboulées pendant plusieurs années. J'ai rencontré certaines de ces personnes, comme vous l'avez fait, madame Campbell. Il nous faut tenir compte de ces éléments.
    Il ne faut pas non plus perdre de vue — et je crois que la question a déjà été soulevée — que, lorsque la loi est entrée en vigueur en 1978, il n'y avait pas de cybercrime et il n'y avait pas de pornographie diffusée sur Internet. Il est probable que nous soyons tous maintenant au fait... Je sais qu'il y a dans ma circonscription — et je pense que c'est la même chose dans celle de M. Norlock — une situation où un individu est incarcéré dans un autre pays pour mauvais traitements infligés à un enfant, mais il y a également des victimes au Canada. Des victimes ont été laissées à elles-mêmes lorsque leur agresseur s'est rendu dans un autre pays où il a finalement été appréhendé.
    Mes collègues ne devraient donc pas s'offusquer de voir ces questions être soulevées ici. Je pense que c'est l'un de ces cas... Ils cherchent des problèmes où il n'y en a pas. Le système a toujours fait l'objet de contestations judiciaires, et ce, depuis très longtemps. Mais la solution n'est pas d'éliminer tous les critères et de permettre à quiconque en fait la demande de revenir ici.
    J'ajouterais simplement que ce système est d'une certaine manière analogue à celui des libérations conditionnelles. Je crois que la plupart des experts conviendraient que libérer un détenu en vertu de certaines conditions, notamment en matière de surveillance, et en lui offrant du soutien avant la date d'expiration de son mandat est la meilleure façon de procéder. Mais il y a bien des années, le gouvernement a déterminé que, sans égard à ce principe, il y a des individus dont les besoins sont si grands et qui présentent un risque si élevé, qu'il est préférable de les garder en détention jusqu'à l'expiration du mandat parce que leur libération soulèverait trop d'inquiétudes.
    D'une certaine manière, cela reflète parfaitement certaines des problématiques en cause ici. On peut convenir que le transfèrement constitue généralement une bonne option, mais il peut y avoir d'autres priorités ou difficultés concurrentes qui obligent à prendre une décision différente. C'est ainsi qu'on retrouve chaque année dans notre système carcéral — et je ne suis pas certaine du nombre actuel — entre 200 et 250 détenus qui purgent leur sentence jusqu'à la toute dernière journée, car c'est simplement la meilleure chose à faire dans leur cas.
    Certainement.
    Lorsque nous examinons les chiffres, et nous pouvons tous consulter les mêmes chiffres... Mes collègues semblent penser que lorsque notre gouvernement a pris le pouvoir, nous avons immédiatement fermé toutes les vannes. Mais les chiffres n'ont pas vraiment changé. Ils peuvent varier d'une année à l'autre, comme c'était le cas auparavant.
    Selon moi, ils devraient accueillir ce projet de loi à bras ouverts, car il dresse la liste des facteurs dont le ministre « peut tenir compte ». Même si l'on écrivait « tient compte », cela ne changerait rien du tout. Le ministre tient compte de ces éléments et peut décider ensuite, peu importe le parti en cause, qu'un transfèrement n'aura pas lieu, à la lumière de ces éléments. Mais je crois que M. Laprade l'a exprimé très clairement: il faut s'en remettre aux décisions des tribunaux. Si mes collègues voulaient bien garder l'esprit ouvert, ils constateraient que cette façon de procéder est nettement préférable à ce que prévoyait la loi en vigueur.
    S'il me reste encore du temps, monsieur le président, je le laisserais à M.  Lobb.
(1710)
    Désolé, monsieur Lobb, mais vous n'avez plus que 50 secondes.
    C'est merveilleux. Merci beaucoup.
    Dans le peu de temps à ma disposition, je soulignerai que la coalition d'en face a posé bien des questions au sujet des termes « doit » et « peut », mais a à peine parlé des victimes elles-mêmes. De toute évidence...
    Une voix: Je n'ai cessé de parler des victimes.
    Une voix: Franchement!
    Le président: Silence, s'il vous plaît.
    M. Ben Lobb: C'était l'observation que je souhaitais faire. Il est dommage de constater que ces gens ont lu le projet de loi, qu'ils y ont réfléchi, mais qu'ils ne peuvent tout de même pas en arriver à la conclusion que l'on s'efforce de tenir compte des victimes.
    Certains des commentaires formulés par la coalition d'en face étaient tout simplement sidérants. M. Holland a parlé d'un projet de loi épouvantable. Je vous laisse imaginer. C'est un projet de loi qui prend en considération les victimes et la sécurité et il le qualifie d'épouvantable. Je n'ai jamais entendu une chose pareille.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Lobb. C'est tout le temps que vous aviez.
    Nous passons maintenant à M. Kania.
    Je vais répondre à M. Lobb. Je vais traiter des victimes et du point de vue du gouvernement réformiste.
    Parlons donc des victimes...
    Une voix: Ça ne fera pas tort...
    M. Andrew Kania: Il y en a pourtant du tort, pour la plupart des Canadiens.
    Nous avons parlé des victimes se trouvant à l'étranger, parce que les Canadiens reconnus coupables et incarcérés dans d'autres pays y ont commis des crimes qui ont fait des victimes là-bas. Ils sont ramenés au Canada dans des circonstances pouvant faire en sorte qu'il y ait ici des victimes qui sont affectées d'une manière ou d'une autre. Si j'agissais au nom de ces victimes au Canada, je me réjouirais du retour de ces individus, car ceux-ci pourraient être inculpés et adéquatement punis au Canada pour ce qu'ils ont fait. Je ne vois pas comment cela peut poser problème. Je crois que l'on vient en aide aux victimes en rapatriant ces individus dans de telles circonstances, plutôt que l'inverse.
    Je ne comprends pas non plus la logique derrière tout cela, car il est question d'individus qui sont reconnus coupables ailleurs dans le monde et qui, de toute manière, reviendront éventuellement au Canada.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, ce n'est pas une période de discussion. M. Kania a la possibilité de poser des questions aux témoins.
    M. Kania peut faire ce qu'il veut de son temps, pour autant que cela concerne le projet de loi.
    Poursuivez, monsieur Kania.
    Merci, monsieur le président.
    Je ne comprends pas le raisonnement derrière cela, car on a affaire à des criminels incarcérés dans un pays étranger qui seront rapatriés au Canada de toute manière.
    Voilà le point. Je regarde la page 5 de votre déclaration, où vous dites ce qui suit:
Ainsi, les délinquants bénéficieraient des différents programmes de réhabilitation offerts par nos établissements fédéraux, ainsi que de la supervision d'agents de libération conditionnelle après leur remise en liberté. De plus, leur condamnation prononcée à l'étranger sera inscrite dans la base de données de la GRC portant sur les condamnations au criminel, souvent appelée le CIPC. Cela ne serait pas le cas si les délinquants étaient simplement déportés au Canada.
    J'aurais tendance à croire que dans l'intérêt de la sécurité publique, il serait préférable de veiller à ce que ces personnes participent à de véritables programmes de réinsertion — comme le gouvernement s'en assurera sans aucun doute dans les mégaprisons qui seront construites. Ainsi, lorsque ces personnes revenues au Canada finiront par être libérées dans notre société grâce à cette formidable nouvelle réadaptation, les Canadiens seront réellement plus en sécurité. Cela ne serait-il pas plus logique?
    Je me contenterai de dire, encore une fois, qu'il ne faut pas oublier que les situations de fait varient énormément. Par exemple, j'ai vu le cas d'un délinquant qui s'était installé aux États-Unis, possiblement pour une très brève période, et qui y avait été incarcéré après avoir commis une infraction à l'égard d'un membre de sa famille. La famille a coupé les ponts avec le délinquant et est revenue s'installer au Canada.
    On a donc là une situation où, en fait, la victime n'est pas quelqu'un qui se trouve aux États-Unis. Il s'agit d'une personne de la famille qui est rentrée au Canada, dans le but exprès de s'éloigner du délinquant. Je le souligne encore pour insister sur le fait qu'il y a une grande variété de situations de fait.
(1715)
    Certes, mais même dans les circonstances de votre exemple, on a une personne emprisonnée aux États-Unis qui reviendra au Canada pour y être incarcérée. Ce n'est pas comme si on rapatriait les détenus en disant: « Voilà, vous êtes libres, allez vous mêler aux victimes ». Ce n'est pas ce qui se produit. Alors, en quoi est-ce même logique ou pertinent?
    Encore une fois, je peux seulement dire que pour certaines victimes, la simple proximité physique est inquiétante, même si leur agresseur se trouve derrière des barreaux et des murs de béton.
    Et quand les délinquants reviennent au Canada sans avoir suivi de programme de réadaptation, et sont libérés sans avoir de dossier criminel, c'est mieux pour les victimes...?
    Non.
    Voilà. Ça ne l'est pas.
    Voulez-vous une minute, Mark? Allez-y.
    Écoutez, ce qui me pose problème, c'est que le gouvernement essaie sans arrêt — comme M. Lobb le répète — de prêter des intentions aux gens, comme si je me préoccupais moins de la sécurité de mes enfants que vous vous souciez de votre famille. Vous devriez avoir honte.
    Nous pouvons débattre des mérites d'un projet de loi. Nous pouvons discuter des meilleures façons de protéger le public. Et nous avons d'honnêtes désaccords quant aux moyens d'y parvenir.
    Mais de là à insinuer qu'un membre de ce comité se fiche des victimes... Tout ce que cela indique, monsieur Lobb, c'est que vous êtes totalement à court d'arguments.
    Merci, monsieur Holland.
    La parole est maintenant à M. Gaudet.

[Français]

    Merci.
    À la page 4 de votre exposé, madame Campbell, il est écrit que 1 557  délinquants canadiens ont été ramenés au pays et que 127 délinquants étrangers incarcérés dans nos pénitenciers ont demandé à être renvoyés dans leur pays. En connaissez-vous la raison?
    Si je calcule le nombre d'immigrants qu'on a eus depuis les 30 dernières années et que j'en mette environ 30 000 par année — peut-être que j'en mets trop ou pas assez —, j'en arrive environ à 1 million de personnes, et il y en a seulement 127 qui ont demandé à retourner dans leur pays. Ça m'intrique.
    Est-ce parce qu'ils sont trop bien nourris dans nos prisons? Je vous pose la question. Ont-ils plus de liberté dans nos prisons qu'ils en ont dans leurs pays? Je veux savoir la vérité.

[Traduction]

    Encore une fois, faute d'une analyse systématique, je ne suis pas certaine de pouvoir vous répondre. Il faudrait que je commence par poser la question suivante: savons-nous combien de ressortissants étrangers nous avons dans nos pénitenciers? Il faut se rappeler que certains individus peuvent être en prison sans avoir révélé qu'ils étaient citoyens d'un autre pays ou qu'ils avaient la double citoyenneté au Canada et dans un autre pays. Donc, lorsque nous voyons ce chiffre de 127 ressortissants étrangers retournés dans leur pays, nous devons le mettre en contexte par rapport au nombre total de ceux détenus ici.
    Quant aux raisons pour lesquelles un grand nombre d'entre eux ne demandent pas d'être retournés, je répète que je ne saurais tirer de conclusions nettes sans recherches plus poussées là-dessus. Il se pourrait qu'en général, ces détenus aient des peines d'incarcération assez courtes et qu'ils soient tout simplement prêts à purger leur peine et à partir à la fin de celle-ci. Je vais examiner la question et vous transmettre le plus d'information possible.

[Français]

    Dans le même recherche que vous ferez, j'aimerais que vous incluiez combien ont été déportés après leur détention. Je ne sais pas si c'est M. Laprade qui a parlé de ça plus tôt, mais ça n'apparaît pas comme étant un transfert, mais une déportation.

[Traduction]

    En effet. C'est une libération à des fins de déportation.

[Français]

    C'est tout, merci.

[Traduction]

    Aucun représentant du NPD n'est présent, alors pourrais-je simplement vous poser une question au sujet de l'introduction de cette procédure? Dans la loi en vigueur, rien ne changera en ce qui concerne cette partie, mais compte tenu que les trois approbations sont nécessaires, est-ce généralement le délinquant qui prendra l'initiative du transfert?
    Oui.
    D'accord. Donc, c'est le délinquant qui amorcera la procédure de transfert. Pour ce qui est des 21 refus, aurait-on raison de déduire que, dans ce cas, les deux autres intervenants en ont fait la demande? L'autre gouvernement aura dit: oui, on souhaite son transfert, et le délinquant aura demandé ce transfert également, mais, ensuite, c'est nous qui aurons opposé notre refus. Pouvons-nous penser cela?
(1720)
    Non. En fait, d'après ce que j'ai compris lors de discussions avec nos collègues américains, qui sont nos plus importants partenaires, il arrive très fréquemment qu'un délinquant présente une demande, que les États-Unis examinent cette demande et la rejettent dès ce stade-là. Donc, la question n'est jamais soumise au Canada pour que nous l'examinions. Les États-Unis procèdent déjà à un certain filtrage, si on veut, des demandes.
    Certains traités — et Michel en saura davantage que moi là-dessus — exigent que ce soit ou bien le pays de condamnation, ou bien le pays d'accueil qui prenne la première décision. Ainsi, dans certaines circonstances, le délinquant fera la demande, qui sera d'abord soumise à la décision du Canada, et ce n'est qu'à partir de là que la décision reviendra à l'État ayant infligé la peine.
    Mais, non: le fait que nous soyons saisis d'une demande provenant d'un Canadien à l'étranger ne signifie pas nécessairement que l'autre pays a déjà donné son accord. Il se pourrait fort bien qu'il n'ait pas encore tranché, et que sa décision soit négative.
    Au moyen des services consulaires ou autrement, informons-nous le délinquant de la possibilité d'un transfert? Nous présumons que quelqu'un va...
    Oui.
    Donc, cette tâche nous revient. Nous le faisons. Ensuite, ils présenteront une demande. Procède-t-on tout simplement verbalement? Les détenus doivent-ils remplir un document, un long formulaire? Comment s'y prennent-ils?
    Toutes ces affirmations sont vraies, monsieur le président. Les services consulaires rencontreront les Canadiens dans des prisons à l'étranger. Ils examineront le programme avec eux.
    On leur donnera probablement un exemplaire du livret conçu pour les délinquants, dans lequel on trouve de l'information sur le programme, la loi et un formulaire de demande. Les agents consulaires informeront le délinquant. Maintenant, il y a un processus. Le délinquant peut soumettre une demande. Une partie de ce processus, bien sûr, consiste à ce que le Canada informe le délinquant de la façon dont sa peine sera administrée ici, de façon à ce qu'il puisse prendre une décision éclairée au sujet du transfert.
    Il y a tout un processus complet et des services offerts aux délinquants.
    Monsieur Davies, je vais vous accorder trois minutes. Vous n'étiez pas là lorsque c'était votre tour. Je reviendrai à vous. Normalement, je laisserais le Parti conservateur terminer, mais allez-y.
    Merci, monsieur le président. Je suis navré.
    Y a-t-il une décision de la Cour fédérale qui a suggéré que le critère change pour passer d'obligatoire à permissif? Non? D'accord.
    Ensuite, vous avez parlé d'assurer un suivi, dans le contexte où il y a une grande différence entre finir de purger sa peine aux États-Unis, disons, ou le faire au Canada. Je dirais que purger une peine au Canada présente des avantages clairs, dont nous avons parlé: l'accès à des programmes de réadaptation, des conditions de libération conditionnelle dans la communauté et le fait que nous serions au courant de la condamnation.
    À mon avis, il s'agit d'indices clairs qui laissent croire qu'il est préférable de faire transférer une personne ici plutôt qu'elle traverse la frontière sans que nous soyons nécessairement au courant. Est-ce une affirmation globalement exacte?
    Globalement. Je crois que vous étiez à l'extérieur de la salle lorsque, pour répondre à M. MacKenzie, j'ai dressé un parallèle avec...
    Avec les libérations conditionnelles? Non, j'étais là. J'ai entendu.
    Les libérations conditionnelles. D'accord.
    J'en déduis donc que la réponse serait oui. Vous êtes d'avis que c'est généralement préférable.
    Généralement.
    Vous avez parlé d'un réseau criminel. Dans le cas d'un individu appartenant à un réseau criminel qui voudrait revenir au Canada, j'ai cru comprendre qu' en vertu de la loi actuelle, ce serait, et cela a été, une raison pour lui refuser un transfert ici, au motif que son retour constituerait une menace pour la sécurité du Canada. Cette question a été soulevée. N'est-ce pas?
    Ce que nous essayons de dire, je crois, c'est que si quelqu'un revient au Canada pour y être incarcéré, nous voyons mal en quoi cela pourrait menacer la sécurité publique, dans la mesure où cette personne restera en prison. Donc, elle ne pourra représenter un danger que pour les autres détenus, à l'intérieur du pénitencier. Vous avez cité, je crois, l'exemple du réseau criminel.
    Mais d'après ce que j'ai compris, aux termes des critères actuels, ce pourrait être un motif valable pour interdire à quelqu'un l'entrée au Canada. La Cour fédérale a cependant tranché que lorsque le ministre avait pris cette décision, le seul problème était qu'il n'y avait aucune preuve en ce sens. Mais le critère relatif à l'appartenance à un réseau criminel pourrait constituer un motif d'interdiction d'entrée au Canada en vertu de la loi actuelle, n'est-ce pas?
    La formulation du projet de loi accorde une plus grande marge de manoeuvre, je crois, en ce qui concerne ce genre de prise de décision. Les facteurs qui se trouvent actuellement à l'article 10 ont été interprétés d'une manière... Prenons, par exemple, l'alinéa 10(1)a): « une menace pour la sécurité du Canada ». Les tribunaux ont imposé des limites assez strictes à cette expression. De façon similaire, à l'alinéa 10(2)a), pour ce qui est de déterminer si on a commis « une infraction de terrorisme ou une infraction d'organisation criminelle », les tribunaux ont encadré ces critères par des paramètres. Le projet de loi vise manifestement à élargir ces limites.
(1725)
    Merci beaucoup, madame Campbell.
    Monsieur MacKenzie, puisque nous nous rapprochons fébrilement de 17 h 30, je vais vous laisser conclure.
    Merci.
    Il est juste de dire que ce ne sont pas tous les citoyens canadiens incarcérés à l'étranger qui présentent une demande pour revenir au Canada.
    C'est juste.
    Je trouve que c'est un élément important car, à entendre mes collègues d'en face, nous devrions rapatrier tous ces détenus pour les réadapter. D'un autre côté, nous avons récemment effectué une étude au cours de laquelle ils disaient qu'il n'y avait pas de réadaptation dans notre système. Si nous affirmons qu'il faudrait rapatrier ces gens à des fins de réadaptation... Selon moi, bien peu de personnes, dans les faits, présentent une demande pour revenir au Canada, peut-être parce qu'un certain nombre d'entre elles ne sont plus au Canada depuis longtemps et n'ont plus de véritables liens avec ce pays.
    Mais il y avait une autre question concernant la façon dont, advenant le retour des délinquants au Canada, les autorités d'ici ne seraient pas au courant de leurs dossiers. Mais pour la vaste majorité d'entre eux, s'ils n'ont pas demandé un transfert, ces délinquants qui reviendront seront déportés... N'est-ce pas?
    Oui.
    Une fois qu'ils auront été renvoyés au Canada, les autorités frontalières connaîtront les raisons de leur expulsion, alors les autorités canadiennes ne seront pas surprises qu'ils reviennent au pays en vertu d'une ordonnance de renvoi.
    C'est exact.
    Je vais simplement réitérer ce qu'a dit M. Laprade tout à l'heure. On aurait cette information, mais elle n'apparaîtrait pas dans le dossier du CIPC de la même manière que s'il s'agissait de quelqu'un qui est revenu en vertu d'une entente de transfert.
    Très bien; mais les policiers, les autorités chargées d'appliquer la loi, effectuent ce qu'on appelle une vérification auprès du NCIC, alors elles savent — particulièrement chez notre principal partenaire, les États-Unis, où se trouve la grande majorité de ces gens —, qu'un tel dossier criminel existe dans le pays concerné.
    C'est exact.
    Donc, en ce qui a trait aux préoccupations exprimées, les tribunaux ont rendu des jugements sur ces transferts depuis 1978, et je suis certain qu'ils ont été nombreux. Nous ne devrions pas nous arrêter à un ou deux cas récents. Je crois juste de dire qu'on s'efforce de donner une dimension plus prescriptive aux facteurs que les ministres devraient considérer, d'une part en fonction de ce que les tribunaux ont établi, et d'autre part en fonction de ce que la société réclame davantage aujourd'hui.
    Il serait assez facile de ne rien faire, mais je ne pense pas que cela réglerait les problèmes du système actuel. Si nous ne changeons rien, qu'est-ce qui se produira?
    Encore une fois, je ne suis pas en position d'émettre des hypothèses. Nous avons eu un certain nombre de décisions judiciaires; le gouvernement a estimé qu'il était important de réagir à ces situations, et la loi a continué d'évoluer. C'est un effort pour poursuivre en ce sens.
    Vous vous souviendrez, bien sûr, que dans le projet de loi S-2 concernant le Registre national des délinquants sexuels, il y a une disposition qui oblige les délinquants sexuels de retour au Canada à révéler leur condamnation à l'étranger et à s'inscrire au registre. On apporte des modifications à la loi sur un certain nombre de fronts pour tenir compte de la mobilité accrue de la société, car elle est plus importante qu'elle ne l'était il y a 20 ou 30 ans.
    Bien sûr. On peut dire, je crois, que si le projet de loi n'est pas modifié, il y aura toujours des transferts, comme c'est le cas depuis 1978, et il y aura toujours des refus également.
    Très bien.
    Merci beaucoup d'avoir assisté à la séance d'aujourd'hui. Nous vous savons gré de votre témoignage au sujet de ce projet de loi, et nous vous remercions également d'avoir enduré ce petit moment au début de la séance où nous avons dû régler certaines affaires du comité.
    La séance est levée.
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