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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 054 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er novembre 2012

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Bienvenue à la 54e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
    Nous recevons aujourd'hui Keith Mussar, vice-président des Affaires réglementaires de l'Association canadienne des importateurs et exportateurs; Dennis Laycraft, vice-président directeur, et Ryder Lee, directeur des Relations fédérales-provinciales de la Canadian Cattlemen's Association, et Christian Lacasse, vice-président de la Fédération canadienne de l'agriculture.
    Bienvenue.
    Je crois que vous avez tous déjà comparu devant le comité, alors vous savez que vous présentez vos déclarations et qu'on passe ensuite aux questions des membres.
    Monsieur Mussar, voulez-vous commencer, s'il vous plaît?
    Je m'appelle Keith Mussar. Je représente I.E. Canada, l'Association canadienne des importateurs et exportateurs. C'est un privilège pour moi de témoigner devant le comité au sujet du projet de loi S-11, la Loi sur la salubrité des aliments au Canada.
    I.E. Canada, l'Association canadienne des importateurs et exportateurs, est une association commerciale nationale qui représente le milieu des affaires canadien depuis plus de 80 ans. Parmi nos membres, mentionnons des fabricants de produits alimentaires qui importent et exportent des produits alimentaires, des importateurs et des exportateurs canadiens, des grossistes, des distributeurs et des détaillants en épicerie. Nous représentons certains des plus gros fabricants, importateurs et exportateurs de produits alimentaires au Canada ainsi que des petites et moyennes entreprises. Nos membres importent et exportent des produits alimentaires de la plupart des catégories.
    Le projet de loi S-11 remplacera et modifiera les lois actuelles régissant la salubrité, l'emballage et l'étiquetage des aliments et les inspections aux termes de la Loi sur l'inspection des viandes, de la Loi sur l'inspection du poisson, de la Loi sur les produits agricoles et des dispositions sur l'étiquetage des produits alimentaires de la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation. Il créera aussi de nouvelles exigences que devront respecter les entreprises qui fabriquent, importent et exportent des produits alimentaires.
    Le projet de loi S-11 donne au ministre le pouvoir de délivrer des licences à des personnes pour les autoriser à importer, à exporter ou à transporter des produits alimentaires d'une province à une autre. Le projet de loi est fondé sur l'initiative de réglementation de l'ACIA en matière de délivrance de licences à tous les importateurs de produits alimentaires dans le secteur non enregistré au fédéral. Le projet de loi étend le pouvoir du ministre de délivrer des licences aux importateurs et exportateurs de produits alimentaires. Il donne aussi au ministre le pouvoir de définir les conditions de délivrance des licences, comme l'exigence de mettre en place un système préventif de contrôle de la salubrité des aliments pour obtenir et conserver une licence.
    Le projet de loi inclut aussi un certain nombre d'autres améliorations, y compris des amendes plus salées en cas de non-conformité, des pouvoirs accrus pour l'Inspectorat et des activités d'inspection et d'application de la loi uniformes pour tous les produits. De plus, le projet de loi pourrait mener à la création de règlements pour définir des exigences d'approbation préalable pour tout produit alimentaire importé, ce qui pourrait faciliter le déplacement des produits alimentaires importés au Canada et qui serait conforme aux dispositions proposées dans le cadre de la Food Safety Modernization Act des États-Unis.
    Même si son objectif est clairement d'augmenter la salubrité des aliments, le projet de loi, dans sa version actuelle, aura d'importantes répercussions négatives sur les fabricants de produits alimentaires et les consommateurs canadiens. Premièrement, il y aura des pertes d'emplois dans le secteur canadien de la fabrication de produits alimentaires. Des emplois canadiens seront transférés aux États-Unis et dans d'autres pays. Deuxièmement, les exportateurs de produits alimentaires canadiens n'auront plus accès à certains marchés étrangers. Troisièmement, les Canadiens, particulièrement les membres de groupes ethniques, auront moins de choix de produits salubres, sains et nutritifs. Les exemples qui suivent permettent d'illustrer ces préoccupations.
    Premièrement, la production de beaucoup de fabricants de produits alimentaires canadiens est destinée exclusivement à l'exportation et à la vente aux États-Unis et dans d'autres pays. Il arrive couramment que de tels produits contiennent des ingrédients interdits au Canada, mais permis dans le pays de destination. On ne peut pas vendre de tels produits au Canada parce qu'ils ne respectent pas les règlements canadiens. L'article 12 du projet de loi interdit à toute personne d'avoir en sa possession aux fins d'exportation un produit alimentaire visé par règlement, sauf si le produit satisfait aux exigences des règlements du Canada. Ainsi, la fabrication de tels produits sera interdite au Canada. Les entreprises multinationales qui possèdent des usines de fabrication au Canada et aux États-Unis devront transférer les activités de fabrication de ces produits du Canada aux États-Unis.
    Deuxièmement, le paragraphe 10(3) du projet de loi interdit à toute personne d'exporter un produit alimentaire visé par règlement sauf si le produit satisfait aux exigences des règlements du Canada. En d'autres mots, un produit alimentaire visé par règlement qui est exporté vers un pays étranger doit satisfaire aux exigences des règlements canadiens et aux exigences du pays de destination. Cette exigence limitera l'exportation des produits fabriqués au Canada. Par exemple, le Règlement sur les aliments et drogues exige que la farine moulue canadienne soit enrichie de vitamines comme l'acide folique. S'il faut que les produits fabriqués au Canada comme les biscuits, les craquelins, les pâtes et le poisson pané, pour ne nommer que ceux-là, contiennent de la farine enrichie, ils ne pourront plus être exportés vers les pays de l'Union européenne, où il est interdit d'enrichir la farine avec de l'acide folique.
(0850)
    Aux termes des règlements canadiens actuels, les entreprises canadiennes peuvent importer des produits qui ne satisfont pas aux exigences des règlements canadiens, si elles en assurent la conformité avant de les vendre au Canada. Elles peuvent procéder ainsi sans aviser préalablement l'ACIA. Les inspecteurs de l'ACIA rendent visite aux entreprises canadiennes pour veiller à la conformité de ces produits avec les règlements canadiens, comme ils le feraient pour toutes les autres installations de fabrication au pays. On procède ainsi en particulier pour corriger les cas de non-conformité liés à l'étiquetage des produits alimentaires. C'est souvent le cas pour les produits qui visent de petits segments du marché, comme les marchés ethniques. La correction de la non-conformité avant la vente est une solution de rechange économique et efficiente à la fabrication de produits dans des emballages uniques visant exclusivement de petits marchés canadiens. L'interdiction d'importer des produits non conformes aux termes du paragraphe 6(2) du projet de loi entraînera l'interdiction de ces pratiques et limitera les choix en matière d'aliments, particulièrement pour les consommateurs dans les petits segments de marché.
    En outre, on estime que 50 p. 100 des épices importées au Canada font l'objet d'un traitement subséquent au pays pour en assurer la salubrité et la conformité avec les règlements canadiens. L'interdiction d'importer des produits en contravention de l'article 4 de la Loi sur les aliments et drogues rendra impossible l'importation de telles épices brutes au Canada, ce qui entraînera des pertes d'emplois dans le secteur canadien de la transformation.
    Les membres de I.E. Canada ont aussi soulevé des préoccupations liées à deux autres aspects du projet de loi.
    Premièrement, le pouvoir illimité des inspecteurs de prendre des photographies aux termes de l'alinéa 24(2)g) soulève des préoccupations concernant la sécurité et, possiblement, la divulgation intentionnelle ou non de renseignements confidentiels, comme les méthodes de transformation, la conception de l'équipement et le fonctionnement. Beaucoup d'entreprises ont pris des mesures pour interdire l'utilisation ou la possession de caméras, de téléphones cellulaires ou d'autres dispositifs avec lesquels on peut prendre des photographies aux employés et aux invités des installations de fabrication dans le but, justement, de réduire au minimum ce risque.
    Deuxièmement, l'incorporation de documents par renvoi dans les règlements est un important pouvoir qui permettra de tenir les règlements à jour et d'apporter des modifications en temps opportun de façon à suivre le rythme rapide de l'innovation. Même si cela est souhaitable, il faut adopter un processus pour s'assurer qu'on consulte les intervenants afin que ceux qui sont touchés par un changement ont l'occasion d'exprimer leur point de vue. De plus, il faut adopter un processus pour s'assurer que les changements proposés aux documents incorporés dans la réglementation par renvoi sont communiqués à l'échelle internationale et qu'on donne l'occasion aux intervenants touchés de formuler des commentaires.
(0855)
    Monsieur Mussar, je dois vous demander de conclure, s'il vous plaît.
    En conclusion, même si les objectifs touchant la salubrité des aliments du projet de loi sont clairs, il y a des dispositions qui, si on ne les modifie pas, entraîneront d'importantes pertes d'emplois au Canada et réduiront le choix des consommateurs. Nos membres sont prêts à participer à des consultations avec les représentants du gouvernement pour dissiper ces préoccupations.
    Au nom de I.E. Canada et de ses entreprises membres, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'être parmi vous aujourd'hui pour parler d'un sujet extrêmement important pour tous les Canadiens. Je suis prêt à répondre à toutes vos questions.
    Merci.
    Monsieur Laycraft.
    Bonjour, et merci de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui. Je suis le vice-président directeur de la Canadian Cattlemen's Association, la CCA.
    Nous voulons, au nom de nos 83 000 membres d'un océan à l'autre, souligner que la salubrité des aliments est un enjeu absolument crucial dont nous tenons compte tous les jours.
    Je suis aussi le coprésident représentant l'industrie de la Table ronde sur la chaîne de valeur du boeuf et j'assume le même rôle au sein du Sous-comité sur la salubrité des aliments de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qui a été créé à la demande des diverses tables rondes sur les chaînes de valeur qui représentent l'industrie de l'agriculture.
    Je suis accompagné de Ryder Lee, qui travaille dans nos bureaux d'Ottawa et que beaucoup d'entre vous connaissent.
    Notre système de salubrité des aliments est l'un des aspects fondamentaux de la réussite de notre industrie et de la promesse liée à notre marque — et vous avez probablement vu ce logo à beaucoup d'endroits partout au pays, sur de nombreux menus, le logo homologué du boeuf canadien, que seulement certaines personnes qui respectent nos exigences peuvent utiliser. Le Canada possède actuellement un système de salubrité des aliments de classe mondiale. Notre système se compare favorablement à ceux des autres pays industrialisés, y compris les États-Unis et les pays de l'Union européenne. Récemment, dans le cadre d'un examen, il a été considéré comme l'un des meilleurs systèmes à l'échelle internationale. Nous croyons que le fait de sous-entendre le contraire, comme certains l'ont fait récemment, envoie le faux message aux Canadiens selon lequel, pour une quelconque raison, les aliments étrangers importés sont plus salubres que les aliments produits au pays.
    En réalité, tous les aliments vendus au Canada doivent respecter des normes alimentaires canadiennes rigoureuses, peu importe le lieu de production. C'est ce solide système de classe mondiale qui nous permet d'exporter notre boeuf aux quatre coins du monde. En fait, plus de la moitié de notre production est régulièrement exportée. Ces activités d'exportation renforcent aussi la sécurité de notre système en raison de l'examen continu par des tierces parties des processus et du rendement de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, examen qu'effectuent, en rotation, les pays importateurs. Nous sommes probablement le pays où il se fait le plus d'inspections.
    Nous croyons que le projet de loi S-11 est une étape positive dans le processus d'amélioration continue du système de salubrité des aliments du Canada. Cette mesure législative est le complément du processus de modernisation de la réglementation actuellement en cours au sein de l'ACIA. Nous appuyons ces deux processus parce qu'ils sont importants pour assurer la compétitivité des producteurs de boeuf et des grands éleveurs et favorisent la modernisation des processus d'inspection de la viande tandis que nous continuons à adopter de nouvelles technologies, à améliorer les procédures d'essai et à inclure les analyses statistiques, qui devient un élément d'un système solide.
    Comme vous l'avez entendu mardi, le fait d'accroître l'uniformité de la réglementation et des activités d'application de la loi et de permettre une intervention plus musclée en cas de sabotage et dans d'autres situations problématiques qui mettent en danger notre approvisionnement en aliments sont toutes des mesures positives rendues possibles par le projet de loi.
    De nombreux règlements découleront de cette modification législative. La façon dont on effectue le suivi de la viande et des aliments dans le système est aussi importante pour les producteurs primaires, comme on l'a constaté au cours des derniers mois. Nous espérons que le contenu du projet de loi et les règlements qui en découleront nous permettront de renforcer nos capacités d'intervention, de prise de mesures correctives et de reprise de la production en cas de découverte de problèmes à l'avenir.
    De telles situations sont regrettables, mais la réalité, c'est qu'elles se produisent. La façon dont nous y réagissons a souvent un impact plus durable que l'événement initial lui-même et a une incidence directe sur la perception que les gens ont de la crédibilité de notre système.
    Le projet de loi modifie aussi les dispositions de la Loi sur la santé des animaux touchant la traçabilité des animaux vivants. Nous croyons savoir que la traçabilité des animaux vivants est régie par la Loi sur la santé des animaux plutôt que par le projet de loi. La CCA a toujours été favorable à une structure d'identification nationale de tous les animaux et, en fait, a formulé la recommandation qui a mené à la création du système. Elle a aussi travaillé avec les gouvernements pour déterminer quelles étaient les prochaines mesures à prendre en matière de traçabilité des animaux vivants.
    Le projet de loi s'inscrit dans un programme législatif et réglementaire plus général. Dans le cadre du programme actuel, nous apprécions l'engagement du gouvernement à l'égard de la règle du un-pour-un, ce qui signifie que, pour chaque nouveau règlement créé, il faut en éliminer un ancien. Nous sommes aussi tout à fait favorables aux travaux du Conseil de coopération en matière de réglementation avec les États-Unis. Nous demandons aux législateurs de faire ce qu'il faut pour s'assurer que l'initiative donne les résultats escomptés. Dans notre secteur, nous oeuvrons vraiment dans un marché intégré à l'échelle de l'Amérique du Nord.
    À mesure que le gouvernement rédigera les règlements en gardant à l'esprit ces engagements, nous travaillerons avec lui pour veiller à l'amélioration de la compétitivité et de la salubrité des aliments au Canada.
(0900)
    Nous avions déjà mentionné une petite préoccupation concernant le libellé du projet de loi qui laisse la porte ouverte à une éventuelle augmentation du fardeau administratif des éleveurs de bétail en matière d'enregistrement et de licences. Nous continuerons à surveiller le dossier. Nous témoignerons en gardant à l'esprit ces dispositions précises afin de nous assurer que le projet de loi n'ajoute pas inutilement une couche supplémentaire de réglementation.
    Nous sommes prêts à répondre à vos questions, et nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de commenter le processus législatif.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Lacasse, bienvenue.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité.
    Je suis Christian Lacasse et je suis producteur agricole dans la région de Bellechasse, au Québec. Je suis vice-président de la Fédération canadienne de l'agriculture.
    D'abord, mes félicitations pour votre nomination, monsieur le président. Je vous souhaite du succès dans vos nouvelles responsabilités.
    D'entrée de jeu, la Fédération canadienne de l'agriculture appuie le principe du projet de loi. Depuis plusieurs années, la traçabilité et la salubrité des aliments sont des éléments très importants pour les producteurs et productrices agricoles au Canada.
    D'ailleurs, vous êtes sans doute au courant que, au cours des quelque vingt dernières années, soit dès le début des années 1990, les producteurs agricoles se sont engagés, par l'entremise de leurs organisations de producteurs, dans des programmes de salubrité. Ils ont posé ce geste pour améliorer leurs pratiques et leurs mesures de contrôle afin de s'assurer que les produits qui proviennent de la ferme sont de très haute qualité. Cela témoigne bien, je pense, de l'engagement que les producteurs ont pris depuis nombre d'années à l'égard de cet objectif. Ces programmes de salubrité reposent sur des normes nationales, mais ils pourraient être de portée mondiale.
    D'ailleurs, depuis 1998, conjointement avec Agriculture Canada et l'Agence d'inspection des aliments, nous travaillons à nous assurer que les programmes de salubrité utilisés par les producteurs à la ferme et à d'autres étapes du processus vont satisfaire aux exigences mondiales tant sur le plan administratif que sur le plan des différents contrôles. Il est important de mentionner que l'ensemble de ces programmes de salubrité couvrent 99 p. 100 de la production agricole primaire. Cela veut dire que l'ensemble de la production est maintenant couverte par ces programmes de salubrité.
    Par ailleurs, ces programmes témoignent aussi de la grande sensibilité développée par les producteurs à l'égard de la salubrité et de l'innocuité des aliments. Comme producteurs, notre objectif est de pouvoir répondre à la demande des consommateurs, qu'elle soit d'ici ou de l'étranger, par des produits de très haute qualité. Avec les années, le Canada s'est bien démarqué à cet égard.
    Néanmoins, nous avons certaines préoccupations à l'égard du projet de loi. Je vous en énumère quelques-unes.
    D'abord, il semble que les producteurs soient obligés d'obtenir un permis pour exporter, c'est-à-dire envoyer leurs animaux ou leurs produits dans d'autres provinces. À l'inverse, les producteurs qui n'ont pas à envoyer leurs produits dans une autre province, étant donné qu'il existe des établissements de transformation dans leur province, n'ont pas à obtenir de permis.
(0905)
    Nous soulevons le même problème pour les mécanismes de prévention et d'inspection. Des producteurs qui doivent envoyer leurs animaux dans d'autres provinces doivent répondre à des inspections supplémentaires. Nous remettons cela en question sérieusement. Nous souhaitons que les agriculteurs, peu importe leur province, soient traités de manière égale. Nous souhaitons qu'ils n'aient pas à se procurer de permis supplémentaires ni à répondre à de nouvelles inspections sous prétexte qu'il n'y a pas d'établissements de transformation dans leur province.
    Notre deuxième préoccupation concerne la traçabilité. Vous savez que les producteurs, avec d'autres partenaires, ont été à l'avant-garde dans la mise en place de systèmes de traçabilité. Nous ne remettons pas en cause cet objectif et ces façons de faire. Je crois que la traçabilité est un élément très important pour s'assurer que l'on maîtrise la situation et que l'on a de bons éléments de contrôle. Le projet de loi prévoit de nouveaux pouvoirs liés à la traçabilité, mais ils ne sont pas clairs. Le projet de loi manque de précision. Nous souhaitons avoir plus d'information et des clarifications.
    Les systèmes de traçabilité mis en place créent une surcharge administrative pour les producteurs. Je répète que nous ne sommes pas contre la traçabilité, mais il faut faire en sorte que ces systèmes n'imposent pas trop d'exigences supplémentaires aux producteurs et productrices agricoles.
    Le dernier élément, et non le moindre, concerne l'accès à certaines informations confidentielles. Le projet de loi mentionne que des inspecteurs pourraient avoir accès aux ordinateurs sur les fermes. Je vous rappelle que ces ordinateurs contiennent beaucoup d'information confidentielle qui ne concerne pas la salubrité. Nous souhaitons que l'accès aux renseignements par l'entremise des ordinateurs sur les fermes soit limité et toujours justifié. Il s'agit aussi d'une question d'activités commerciales pour les producteurs, puisque leurs fermes sont des entreprises en concurrence. Alors, nous voulons nous assurer que ces informations restent confidentielles.
    En résumé, la Fédération canadienne de l'agriculture appuie l'objectif d'établir une plus grande harmonisation des différents paliers de l'inspection. Nous saluons l'objectif d'établir une meilleure cohésion des activités d'inspection. Nous appuyons la création de nouvelles infractions liées à l'altération d'un produit alimentaire, à la formulation de menaces de rendre un produit alimentaire nuisible, et ainsi de suite. Je crois que cela fait partie des éléments dissuasifs nécessaires à la loi.
    Nous saluons particulièrement les dispositions qui feront en sorte que les agriculteurs canadiens soient sur un pied d'égalité avec les concurrents étrangers. Nous soulevons la question de la réciprocité des normes depuis de nombreuses années. Nous souhaitons que l'adoption de ce projet de loi amène de nouveaux outils visant à empêcher l'importation au Canada de produits alimentaires qui ne satisfont pas aux normes canadiennes.
(0910)
    Finalement, je rappelle que nous sommes favorables aux objectifs de ce projet de loi. Cependant, ce projet de loi va amener une réforme de la réglementation dont on ne connaît pas les différents éléments en ce moment. Or c'est par la réglementation que nous serons en mesure de déterminer si le projet de loi — ou la réforme — est satisfaisant, s'il nous permet d'atteindre nos objectifs et s'il répond aux préoccupations que nous avons soulevées. Nous ne connaissons pas les éléments qui constituent cette réforme, mais nous souhaiterions les connaître le plus rapidement possible et être mis à contribution, de façon à ce que les grands objectifs de cette réforme nous permettent vraiment d'atteindre nos objectifs et que les produits alimentaires canadiens continuent d'être à l'avant-garde au chapitre de la salubrité et de l'innocuité.
     Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lacasse.
    Monsieur Atamanenko.
    Merci beaucoup à vous tous d'être là.
    Nous en sommes à une partie très importante du processus. Nous avons préparé un projet de loi pour améliorer la salubrité des aliments au pays, et je suis sûr que tout le monde ici veut la renforcer davantage. Vos commentaires sont très utiles.

[Français]

    Avant de passer à d'autres questions, j'aimerais m'adresser à vous, monsieur Lacasse.
     Je crois comprendre que vous voulez que, au moment de commencer l'élaboration de la réglementation, votre fédération et d'autres fédérations soient impliquées. Est-ce exact?
(0915)
    Tout à fait. Comme je l'ai dit déjà, nous sommes d'accord sur les grandes lignes du projet de loi, mais ça soulève beaucoup de préoccupations et ça nécessite un bon nombre d'éclaircissements. Ces réponses vont venir avec la réglementation, sans doute, mais il est essentiel que nos organisations soient mises à contribution.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Mussar, j'aimerais vous poser une question.
    Je crois que personne ici ne veut voir des pertes d'emplois au Canada. Que pouvons-nous faire pour garantir la salubrité des aliments? En effet, nous ne voulons pas non plus maintenir des emplois aux dépends de la salubrité. Nous devons trouver une façon d'atteindre notre objectif de protéger les Canadiens.
    Vous avez mentionné l'article 12 du projet de loi, qui interdirait la production de produits au Canada parce que certains ingrédients sont interdits ici. Par conséquent, ces entreprises transféreraient leurs activités ailleurs. J'aimerais que vous en disiez davantage à ce sujet, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup de votre question.
    Au Canada, des entreprises canadiennes fabriquent des produits destinés exclusivement à la vente à l'exportation. Puisque les exigences au Canada sont différentes de celles de certains autres pays, nous pouvons utiliser des ingrédients qui sont interdits au Canada dans leur fabrication, à condition que ces produits soient uniquement destinés à la vente à l'exportation.
    La préoccupation soulevée par nos membres est que, si les produits qu'ils exportent doivent respecter les exigences réglementaires canadiennes en plus des exigences réglementaires étrangères, ils ne pourront pas avoir accès aux ingrédients dont ils ont besoin pour fabriquer les produits autorisés dans un pays étranger.
    Donc, en fait, il y aurait deux volets.
    Oui.
    Je crois que vous avez aussi mentionné l'article 10, parce que ça touche nos exportations. Et vous avez donné l'exemple de la farine, parce que le projet de loi propose que toutes les farines devront être enrichies. Cependant, au sein de l'Union européenne, c'est interdit. Pouvez-vous nous en dire plus, s'il vous plaît?
    C'est le même genre de problème, mais à l'inverse. Dans ce cas, la réglementation exige que nous incluions des ingrédients dans nos produits qui sont interdits dans un pays étranger. Par conséquent, nous ne pourrons plus vendre nos produits dans certains pays s'il faut respecter les exigences canadiennes. Actuellement, une entreprise peut fabriquer un produit destiné à la vente à l'exportation qui contient une farine non enrichie, et c'est pour cela que le produit peut être vendu dans un pays étranger.
    Ça ne pose pas un problème sur le terrain? Il n'y a pas de contamination? On peut s'y faire? Dans une minoterie, par exemple?
    C'est un problème législatif. C'est une conséquence involontaire du libellé du projet de loi. Si on élimine la disposition sur l'exportation du projet de loi, le risque de pertes d'emplois au Canada dont j'ai parlé, à part dans le cas précis des épices que j'ai mentionné, serait inexistant.
    Merci.
    Merci.
    C'est tout? Je commençais juste à prendre mon rythme.
    C'est tout.
    Monsieur Hoback.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tout le monde ce matin. Je suis heureux que vous soyez parmi nous.
    Je crois que nous reconnaissons tous que, s'il y a une chose qui est importante pour les Canadiens, c'est bien la salubrité des aliments. Ce doit être une priorité, et c'est notre principale tâche dans le cadre de notre étude du projet de loi S-11.
    Monsieur Mussar, bien sûr, une des priorités du gouvernement est la création d'emplois et le commerce. On ne peut pas troquer la salubrité pour des emplois, mais, quand même, il faut essayer de permettre ce qui semble logique lorsque c'est possible.
    Vous avez utilisé l'exemple des épices, pour M. Atamanenko, je crois. C'est une situation où on importe des ingrédients d'un autre pays pour les y réexporter par la suite. Je crois que la réglementation, lorsqu'on la présentera, tiendra compte de ces situations. Ne croyez-vous pas? Croyez-vous qu'il faut vraiment que ça figure dans le texte législatif?
    Nous avons discuté avec l'ACIA de la façon dont on pourrait le faire. Encore une fois, comme mon collègue l'a mentionné, tant que nous ne pourrons pas consulter les règlements, nous ne saurons pas s'ils tiennent adéquatement compte de nos préoccupations.
    De plus, l'un des défis auxquels nous sommes confrontés relativement au processus réglementaire canadien, c'est que, une fois un règlement en place, il est très difficile de le modifier s'il ne répond pas aux besoins des Canadiens ou de l'industrie. Par exemple, nous avons besoin d'un représentant qui s'occupe de la réglementation au sein du gouvernement. En outre, en moyenne, il faut deux ans pour modifier un règlement. C'est préférable de s'assurer de bien rédiger la loi que d'avoir à la corriger par la suite.
(0920)
    Je ne veux pas vous contredire, mais, en même temps, la loi est un cadre, et les règlements n'existent pas pour rien. Il est encore plus difficile de modifier une loi que de modifier un règlement. Je crois qu'il faut s'assurer de bien définir ce qui doit figurer dans la loi et ce qui doit figurer dans la réglementation, mais ce n'est pas une question dont je veux débattre aujourd'hui.
    Devant le comité sénatorial, vous avez donné l'exemple de l'interdiction d'importer des produits qui vont être « fabriqués », je ne sais pas si c'est le bon mot. Vous pourriez peut-être fournir un exemple pour que tout le monde comprenne. On parle ici de l'importation d'un ingrédient qui est importé puis transformé et, quand il arrive au Canada, il ne satisfait pas aux exigences des règlements, mais il respecte la réglementation une fois transformé au Canada.
    Pouvez-vous me donner un exemple d'un produit alimentaire ou d'une épice dont c'est le cas?
    Actuellement, beaucoup des épices importées au Canada ne sont pas propres à la consommation humaine, soit en raison du haut taux de biocontamination soit parce qu'elles contiennent des brindilles et des pierres et d'autres substances naturelles qu'il faut enlever.
    Au Canada, les transformateurs traitent ces épices afin d'en assurer la salubrité microbienne et les transforment pour enlever les brindilles et les pierres. Ensuite, on les emballe, soit pour les vendre directement aux consommateurs, soit en vue d'une transformation subséquente avec d'autres produits fabriqués au Canada ou exportés.
    Si on ne peut pas importer ces produits au Canada, et c'est ce que le projet de loi dit actuellement, on n'aura plus accès à ces épices brutes, qui créent de l'emploi au Canada.
    D'accord, alors vous auriez besoin d'une exemption pour ces types de situations. Comme je l'ai déjà dit, les règlements seraient probablement l'endroit pour le faire.
    Les épices ne sont qu'un exemple parmi tant d'autres. Le problème, c'est qu'il faudra tout examiner et cerner toutes les exemptions précises et trouver une façon de les intégrer adéquatement dans la réglementation.
    D'accord.
    Un des résultats du projet de loi, c'est qu'on réunit les différents ministères. Plutôt que de procéder à trois types d'inspection des aliments, il y en aura un seul. Selon vous, quel sera l'impact de la nouvelle structure sur les importateurs et les exportateurs? J'imagine que vous voyez ça relativement d'un bon oeil.
    Je crois que le projet de loi est l'occasion de faire beaucoup de bonnes choses pour le milieu de l'importation.
    Dans un premier temps, une des choses qui nous a causé des problèmes est la compartimentation de l'Inspectorat. Par exemple, si un camion se présente à un poste frontalier au Canada en provenance des États-Unis et qu'il y a un inspecteur de viandes sur place, ce dernier ne peut pas inspecter le camion s'il contient des fruits et des légumes frais ou d'autres produits.
    Un des résultats du projet de loi est la création du poste d'inspecteur général des aliments, ce qui permettra à cette personne d'inspecter un large éventail de produits. Cela améliorera le déplacement des marchandises à la frontière canadienne. Cela fera en sorte qu'il y aura moins de camions qui arrivent à leur destination finale en retard. Il y a beaucoup de bonnes occasions à saisir.
    D'accord.
    Je m'arrête ici, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Valeriote.
    J'ai des questions pour M. Mussar et M. Lacasse. Vous avez tous les deux exprimé des préoccupations concernant les conséquences involontaires. Je les ai prises en note.
    Monsieur Mussar, dans votre dernière réponse, vous avez parlé de possibles incidents qui pourraient limiter l'exportation, et mentionné le fait que la farine est enrichie au Canada, mais que le procédé est interdit en Europe.
    Monsieur Lacasse, vous avez abordé certaines questions touchant la traçabilité, si je ne m'abuse, et l'exigence selon laquelle il faudrait obtenir différentes licences selon que le produit reste dans la province ou qu'il en sort afin d'être vendu ou transformé ailleurs.
    C'est très important, parce qu'on n'établit pas les règles d'un jeu de société pour enfants. Il s'agit d'une législation qui sera en vigueur longtemps et, comme tout le monde le sait, le processus de modification est très long. Croyez-vous que la législation elle-même doit être modifiée et doit faire l'objet d'une évaluation et d'un examen plus approfondis grâce à des consultations auprès des intervenants? Croyez-vous que ces préoccupations pourront être dissipées grâce à la réglementation et qu'il faudra procéder à davantage de consultations avant la rédaction des règlements? Si c'est dans la législation, alors c'est maintenant qu'il faut y voir, et il ne faut pas attendre.
    Monsieur Mussar, voulez-vous répondre en premier, puis ce sera le tour de M. Lacasse?
(0925)
    Merci beaucoup de poser la question.
    Il est évident que nous préférons modifier la législation plutôt que d'attendre et de régler les problèmes avec des règlements. Nous n'avons pas vu les règlements, alors nous ne savons pas si on pourra adéquatement régler les problèmes de cette façon.
    Comme je l'ai déjà dit, un des plus gros défis consistera à déterminer comment définir toutes les exemptions alors qu'on parle, possiblement, de beaucoup de produits alimentaires canadiens exportés à l'étranger. Nous avons l'habitude de dresser des listes positives au pays, et il y a toujours un risque qu'on oublie quelqu'un ou un produit. Si ça se produit, que faudra-t-il faire?
    Allez-y, monsieur Lacasse.

[Français]

    En ce qui nous concerne, nous trouvons que la façon dont la question de la traçabilité est introduite dans le projet de loi est assez vague. On y parle de nouveaux pouvoirs qui pourraient donner lieu à de nouvelles exigences en matière de traçabilité. La définition va être incluse dans la réglementation; nous comprenons ce principe. Par contre, si les règlements sont élaborés sans qu'on nous consulte ou qu'on nous mette à contribution et que des éléments négatifs ne nous conviennent pas, il risque d'être trop tard pour réagir.
    Nous souhaiterions à tout le moins savoir quel est l'objectif poursuivi dans le cas des nouveaux pouvoirs inclus dans le projet de loi. Nous ne disposons pas de cette information et nous voulons des clarifications à ce sujet, de façon à ne pas avoir de surprises désagréables lorsque la nouvelle réglementation sera prête.

[Traduction]

    Un des risques que nous courons, c'est qu'on reçoive en premier le son de cloche du ministre, celui de l'ACIA, et que ce soit seulement ensuite qu'on parle à ceux qui seront vraiment touchés. Nous ne pouvons pas demander au ministre et à l'ACIA de nous fournir des précisions concernant les questions que vous portez à notre attention. C'est regrettable, surtout que nous avons peu de temps pour examiner le projet de loi.
    Monsieur le président, je crois que, si vous en faites la demande, j'ose croire que vous obtiendrez un consentement et qu'on pourra prolonger au moins de deux ou trois jours l'étude du projet de loi. Nous reconnaissons tous la valeur du projet de loi et la nécessité de la réforme, mais je suis préoccupé par le nombre d'amendements et de suggestions d'amendements portés à notre attention.
    Nous avons seulement jusqu'à demain pour préparer le rapport, le soumettre aux fins de traduction et vous communiquer les amendements. En plus, nous accueillons des témoins la veille de la journée où il faut présenter ces amendements, ce qui est pratiquement impossible. Il s'agit d'un texte important. Par conséquent, nous voulons tous participer et bien faire les choses. Je ne crois pas que nous pouvons tenir pour acquis que les commentaires formulés par ces témoins ne sont pas pertinents. Ils sont très pertinents. Si nous voulons leur accorder tout le poids qu'ils méritent, je crois que nous devons nous donner quelques jours de plus, demander une rencontre avec les représentants du bureau du ministre et leur demander des précisions. De plus, il faudra nécessairement reporter la date à laquelle il faut présenter les amendements, monsieur le président.
    Votre temps est écoulé. Je dois dire que la décision ne me revient pas, elle revient au comité. Si vous voulez proposer une motion...
    Je suis prêt à la proposer.
    J'ai prévu du temps à la fin de la réunion pour en discuter. Si vous voulez qu'on le fasse maintenant, nous pouvons le faire.
    J'ai dit ce qui devait être dit concernant la motion. J'aimerais la proposer.
    Nous voulons bien faire les choses. Si nous avons une semaine de plus, je crois que ce serait utile de demander à des représentants du bureau du ministre de comparaître afin que nous puissions leur poser directement des questions au sujet de la traçabilité, de la confidentialité des renseignements, ce dont M. Lacasse a parlé, et des répercussions sur les exportateurs qu'il faut préciser, de façon à ce que nous puissions déterminer si, oui ou non, en fait, on peut régler ces problèmes grâce à la réglementation ou s'il faut y voir dans le projet de loi. Oui, dans ce cas, je propose que nous ajoutions au moins deux jours aux audiences afin d'obtenir des précisions et d'assurer à tous les intervenants que nous allons dans la bonne direction.
(0930)
    Une motion a été proposée — nous en sommes saisis et nous pouvons en débattre. Elle vise la prolongation de l'étude du projet de loi S-11 de deux jours de réunion.
    Monsieur Hoback.
    Je crois qu'on devrait passer tous les témoins en premier. Vous pourriez peut-être réserver du temps à la fin et nous y reviendrons. Je crois que ce serait préférable, si vous le voulez bien, monsieur Valeriote.
    Ça me va.
    Je ne veux tout simplement pas utiliser...
    Non, vous avez raison.
    Merci. J'avais déjà prévu un peu de temps à la fin de la réunion pour traiter des affaires du comité. Nous y reviendrons à ce moment-là.
    Monsieur Payne.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être parmi nous aujourd'hui. C'est important pour nous de connaître vos problèmes et vos préoccupations concernant le projet de loi S-11. Je crois que la plupart d'entre vous ont déjà dit qu'il s'agit potentiellement d'un très bon projet de loi qui permettra d'assurer la salubrité des aliments. Je crois qu'il ne fait aucun doute que les Canadiens le croient aussi.
    C'est un sujet qui a suscité beaucoup d'attention en raison de la situation chez XL Foods, à Brooks, qui est dans ma circonscription. J'ai le plaisir de dire que l'usine a repris ses activités. Je crois qu'elle a transformé environ de 1 200 à 1 500 bovins au cours des derniers jours. C'est très bien non seulement pour la collectivité, les employés et l'entreprise, mais aussi pour tous les Canadiens. Je crois que l'ACIA a fait son travail pour assurer la reprise des activités et le respect de toutes les exigences établies.
    Je voulais le dire d'entrée de jeu.
    M. Hoback, M. Valeriote et un certain nombre d'entre vous ont parlé de la réglementation. Il est évidemment beaucoup plus difficile de modifier le projet de loi. Les règlements sont probablement le bon véhicule pour régler tous vos problèmes et toutes vos préoccupations. Je crois savoir qu'il y aura des consultations là-dessus. Je tenais à mentionner qu'il y aura une telle occasion. Je crois que vous pourrez communiquer ces renseignements aux représentants appropriés d'Agriculture et Agroalimentaire Canada ou de l'ACIA pour vous assurer que c'est le cas, et ils pourront dissiper toutes vos préoccupations.
    Vous avez un certain nombre de préoccupations. M. Laycraft et M. Lacasse ont parlé des licences pour les producteurs. Je ne crois pas qu'il y a quoi que ce soit à cet effet dans le projet de loi lui-même. Ça relève de la Loi sur la santé des animaux. Je ne crois pas qu'il s'agit d'une préoccupation qui nous concerne. Si vous voulez formuler d'autres commentaires à ce sujet, n'hésitez pas.
    Merci.
    J'aimerais dire quelque chose au sujet de la consultation sur la réglementation. Du point de vue du secteur du boeuf, je dois dire que, chaque fois qu'on organise une table ronde sur la chaîne de valeur du boeuf, nous sommes bien informés des progrès réalisés dans le cadre des travaux de modernisation et nous sommes invités à participer directement et activement aux processus de modification réglementaire. Du point de vue de notre secteur, nous avons été longuement consultés au sujet de ces modifications. Par conséquent, je peux dire sans peur de me tromper qu'il y a un assez bon processus de consultation sur l'élaboration de la réglementation visant le secteur du boeuf.
    Nous sommes au fait de discussions entre des avocats sur la signification de la loi. Nous ne savons pas exactement comment réagir à tout ça, mais notre préoccupation est liée au transport des animaux d'une province à une autre. Il y a des gens qui le font fréquemment dans le cadre de leurs activités ordinaires, et nous ne voulons pas qu'ils aient besoin d'obtenir une licence pour faire ce qu'ils ont toujours fait sans problème. Si on peut nous confirmer que le projet de loi ne nous mènera pas là, alors nous serons contentés. Dans la négative, selon nous, il serait assez facile de créer une exemption afin qu'il ne soit pas nécessaire d'obtenir une licence pour transporter des animaux d'un endroit à un autre, ce qui, autrement, est considéré comme une activité normale pour un agriculteur ou un grand éleveur.
(0935)
    Vous parlez d'animaux vivants et non d'animaux abattus?
    D'animaux vivants.
    Au pays, l'industrie de la transformation est très concentrée. On ne peut pas transporter un animal sans respecter certaines exigences en matière de traçabilité, et une bonne partie de ces exigences sont provinciales. Nous travaillons sur des choses qui vont plus loin que ce qui est envisagé. Nous évaluons la possibilité de créer des manifestes de bétail nationaux, et différentes choses que l'on peut faire de façon efficiente. Nous pouvons élaborer des outils qui amélioreront notre système sans créer plus de bureaucratie et entraîner de nouveaux coûts pour les contribuables du pays.
    Merci.
    Votre temps est écoulé, je suis désolé.
    Madame Raynault.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Lacasse, dans le document que vous nous avez remis, il est écrit que la collaboration entre les agriculteurs et le gouvernement fédéral a conduit à un nombre important de développements. Un paragraphe mentionne des « programmes hors de la ferme ».
    De quoi s'agit-il, exactement?
    Lorsque le producteur adopte un programme de salubrité, il doit acheter des intrants. L'achat d'intrants est l'un des éléments qui répond à la définition de « hors de la ferme ». À la fin, le produit que le producteur vendra découle d'une production agricole pour laquelle il a acheté certains intrants.
     Les programmes de salubrité assurent que les produits que le producteur achète pour faire sa production agricole répondent à des objectifs de salubrité. Cela permet d'assurer que le produit final est de très haute qualité.
    C'est un exemple parmi plusieurs. Vous avez les fournisseurs d'intrants. C'est la même chose à l'étape de la distribution. Lorsque le produit d'un producteur de fruits et légumes quitte la ferme, il sera soumis au même processus pour se retrouver dans les chaînes d'alimentation.
     On vise à avoir des systèmes de salubrité — ou de traçabilité — de la ferme jusqu'à la table. Cela permet de suivre le produit à toutes les étapes et nous assure que ce produit est de très haute qualité lorsqu'il arrive à la maison.
    Merci.
    Tout à l'heure, vous avez parlé un peu de l'enregistrement et de l'octroi de permis. Il semble que ce ne soit pas vraiment bien compris des agriculteurs et agricultrices.
    Comment voulez-vous qu'on remédie à ce problème?
    Vous dites que les producteurs ne semblent pas bien comprendre ce système, mais je ne suis pas sûr que ce soit le cas. Nous remettons en cause l'idée que pour acheminer ses produits dans une autre province, un producteur soit obligé d'obtenir des permis supplémentaires, répondre à d'autres exigences ou se soumettre à un autre processus d'inspection.
    Si nous avons un bon système de traçabilité et d'identification, nous serons en mesure de savoir en tout temps quel parcours suivent les produits. Compte tenu de cela, même si les produits passent d'une province à l'autre, il n'est pas nécessaire d'ajouter des normes d'inspection ou des permis supplémentaires. Nous nous demandons à quoi ça va servir, à quoi ça va répondre, étant donné qu'un bon système de traçabilité permet de connaître tous les déplacements des produits alimentaires, peu importe où ils circulent au Canada. En ce sens, il n'est pas nécessaire d'établir des normes ou des inspections supplémentaires.
(0940)
    Merci.
     Monsieur Laycraft, dans le projet de loi S-11, on dit que les inspecteurs acquièrent de nouveaux pouvoirs. Or ils se voient retirer celui d'arrêter une personne et de lui faire prêter serment, ce que leur permet actuellement la Loi sur l'inspection du poisson.
     Croyez-vous que les nouveaux pouvoirs vont améliorer l'efficacité des inspecteurs et garantir que les intervenants de l'industrie se conforment aux exigences en matière de salubrité alimentaire?

[Traduction]

    J'imagine que vous voulez parler des intervenants sur le terrain, des agriculteurs et des grands éleveurs. Au pays, une bonne partie des dispositions qui les touchent directement sont contenues dans la Loi sur la santé des animaux. On nous a confirmé à maintes reprises que le projet de loi traite en grande partie des animaux une fois qu'ils sont transformés et de l'impact de la traçabilité dans le système à partir de la transformation, période durant laquelle, fait intéressant, sont concentrés 94 p. 100 des risques réels en matière de salubrité des aliments. Si l'on veut cibler quoi que ce soit, c'est le bon endroit pour le faire.
    Selon nous, ces questions sont visées par un certain nombre d'autres projets de loi qui sont probablement l'endroit approprié où gérer ces questions. Il ne faut pas oublier qu'il y a des textes législatifs provinciaux, et ce, parfois, en plus des textes législatifs fédéraux et des dérogations au niveau de la province. La question du transport des animaux vivants est en grande partie traitée, et je crois que ce serait l'enjeu principal. Nous travaillons directement avec les provinces et des représentants de l'industrie dans le cadre d'un large éventail d'initiatives qui, selon nous, seront la bonne solution à plus long terme. Il y a de tout, de nos systèmes vérifiés de production de boeuf à la façon dont nous pouvons évaluer les divers programmes de formation au sein de l'industrie. Une chose dont tout le monde se réjouit, c'est que, dans la quasi-totalité des industries au Canada — et je parle en toute connaissance de cause pour l'industrie de la viande, du bétail et du porc —, on traite la salubrité des aliments comme étant une question non compétitive, dans nos propres termes. Il faut communiquer les renseignements et les percées technologiques sans restriction.
    En ce qui a trait aux améliorations, et j'ai mentionné un nouveau manifeste national, nous essayons de pousser le gouvernement fédéral à moderniser son système afin que nous puissions commencer à utiliser des certifications électroniques. Nous discutons de cette question depuis plus de sept ans maintenant, et on nous dit encore que le tout sera prêt en 2016. Si on se concentre sur ce qu'il faut et qu'on règle les problèmes, je ne crois pas que l'on constatera que c'est l'absence de réglementation qui permettra d'apporter d'autres améliorations à notre système. Ce qui importe, c'est la façon dont nous pouvons utiliser la technologie et la façon dont nous pouvons travailler en collaboration sur des systèmes qui amélioreront la sensibilisation générale à l'égard de la salubrité des aliments à l'échelle du pays.
    Merci. Cela conclut la première portion de la réunion de la journée. Je remercie nos invités d'être venus nous parler. Nous avons appris beaucoup de choses.
    Nous allons suspendre la séance et inviter nos autres invités à prendre place. Nous reprendrons les travaux dans environ trois ou quatre minutes.
(0940)

(0950)
    Merci, et bienvenue à la deuxième partie de notre journée d'étude du projet de loi S-11.
    Nous accueillons M. Bill Jeffery, coordonnateur national du Centre pour la science dans l'intérêt public, M. Mel Fruitman, vice-président de l'Association des consommateurs du Canada, et, à titre personnel, M. Keith Warriner, de l'Université de Guelph. Bienvenue.
    Je ne sais pas si tout le monde a déjà comparu devant un comité, mais nous vous permettrons de présenter une brève déclaration, puis nous passerons directement aux questions des membres. J'informe les membres que nous avons réservé quelques minutes à la fin de la réunion. Quand il restera environ 15 minutes à la réunion, j'interromprai les procédures, et nous pourrons passer aux affaires du comité.
    Cela étant dit, monsieur Jeffery, la parole est à vous.
    Le Centre pour la science dans l'intérêt public est une organisation sans but lucratif de défense des droits en matière de santé qui se spécialise dans la nutrition et la salubrité des aliments. Nous n'acceptons aucun financement de l'industrie ni du gouvernement. Nous sommes soutenus par les 100 000 abonnés à notre bulletin, la Nutrition Action Healthletter. Il y a, en moyenne, un ménage abonné à notre bulletin dans un des pâtés de maisons de chaque intersection du Canada.
    Même si la présente réunion porte expressément sur les répercussions sur la salubrité des aliments du projet de loi S-11, j'aimerais souligner aux membres du comité que, selon les estimations de l'Organisation mondiale de la santé, environ 48 000 Canadiens meurent chaque année des suites de maladies liées à la nutrition, comme la consommation excessive de sel ou de gras trans et la consommation insuffisante de fruits et légumes. Nous croyons qu'il y a certaines répercussions à cet égard dans le projet de loi S-11.
    Le projet de loi S-11 pourrait renforcer la capacité de l'Agence canadienne d'inspection des aliments d'assurer la santé publique, de protéger les consommateurs contre la fraude et d'améliorer la confiance du public, mais il serait plus à même de le faire si on réglait certains problèmes.
    Premièrement, l'impact de l'augmentation du plafond des amendes sera peut-être limité en raison du fait que les amendes imposées sont toujours très petites comparativement au plafond actuel. Même s'il y a d'importantes exemptions relativement aux plafonds d'amendes rehaussés proposés — je parle de l'augmentation de 250 000 $ à 5 millions de dollars —, en 2011, par exemple, l'amende moyenne était d'environ 5 p. 100 du plafond dans le cas des infractions punissables par mise en accusation. Près des deux tiers des amendes étaient de 1 p. 100 ou moins du plafond, et aucune amende ne dépassait 20 p. 100 du plafond. Et puis, le montant total des amendes liées à toutes les poursuites aux termes d'une demi-douzaine de lois appliquées par l'Agence canadienne d'inspection des aliments était légèrement supérieur à 400 000 $, ce qui donne un peu plus de 100 $ par année par inspecteur. Par conséquent, nous nous demandons si le désir du gouvernement d'augmenter l'amende maximale s'accompagne d'une réelle intention de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et du ministre d'imposer des amendes plus salées et de le faire plus souvent.
    Deuxièmement, le Parlement doit augmenter les limites des amendes correspondantes de la Loi sur les aliments et drogues pour les amener aux mêmes niveaux que ceux de la Loi sur la salubrité des aliments au Canada. Si le gouvernement veut augmenter les limites des amendes à 5 millions de dollars, et, dans certains cas, à la discrétion du conseil d'arbitrage, il devrait aussi le faire pour les limites actuellement établies dans la Loi sur les aliments et drogues, qui continuera à être appliquée par les tribunaux plutôt que par le conseil d'arbitrage.
    Troisièmement, actuellement, pour l'Agence canadienne d'inspection des aliments, les renseignements sur la nutrition sur les étiquettes des aliments constituent une question de qualité ou une question de préférence des consommateurs mineure, et non un enjeu de santé et de salubrité. Selon les renseignements sur les amendes affichés par l'Agence canadienne d'inspection des aliments sur son site Web, de janvier 2010 à septembre 2012, pas une seule amende n'a été imposée concernant l'impression de renseignements sur la nutrition inexacts sur des étiquettes de produits alimentaires, malgré le fait qu'au moins deux des enquêtes par sondage sur les produits de l'Agence ont révélé la présence à grande échelle d'importantes inexactitudes dans les renseignements sur la nutrition fournis sur les produits alimentaires préemballés et les sites Web des restaurants. Nous serions favorables à des amendements du projet de loi S-11 qui préciseraient que les infractions liées à la nutrition sont aussi malvenues que les infractions graves touchant la salubrité des aliments, sans pour autant banaliser l'importance de s'attaquer aux fraudes de masse concernant les facteurs liés à la qualité des aliments.
    Quatrièmement, pour évaluer l'impact des mesures en matière de salubrité des aliments sur la santé publique, il faut procéder à une surveillance accrue et plus transparente des flambées de maladies d'origine alimentaire, des décès qu'elles entraînent et des importantes maladies qui en découlent.
    Cinquièmement, le projet de loi propose une disculpation fondée sur la prise des précautions voulues, ce qui pourrait très bien protéger les entreprises contre les poursuites. Nous demandons instamment au comité de déterminer si la proposition de permettre une défense fondée sur la prise des précautions voulues au paragraphe 39(2) affaiblira de façon importante les protections existantes, minera la confiance des Canadiens à l'égard de notre approvisionnement alimentaire et permettra de gagner la confiance de l'Union européenne envers nos exportations. Apparemment, le Royaume-Uni a récemment rejeté une proposition pour modifier de la sorte sa législation sur la salubrité des aliments pour cette raison.
(0955)
    Sixièmement, les procureurs de pratiques privées ont besoin de mesures plus strictes pour décourager l'adoption de comportements risqués par les entreprises du secteur de l'alimentation. Si le gouvernement fédéral veut s'appuyer sur des entités privées, comme les sociétés d'avocats qui se spécialisent dans les recours collectifs, pour faire appliquer les lois de protection des consommateurs, comme il l'a fait dans le cas de la pandémie de listériose de Maple Leaf, qui s'est soldée par le décès de 23 Canadiens et n'a cependant donné lieu à aucune amende, il faudrait au moins modifier la Loi sur les aliments et drogues et d'autres textes législatifs pour donner aux tribunaux de plus grands pouvoirs d'imposer des dommages-intérêts punitifs, de tripler la valeur des jugements en dommages-intérêts, de restituer les bénéfices et de prendre d'autres mesures extraordinaires pour mieux décourager les comportements dangereux, frauduleux et insouciants des entreprises.
    Septièmement, il faut créer un mécanisme d'intervention pour défendre l'intérêt public au niveau du conseil d'arbitrage et des tribunaux pour équilibrer, d'un côté, les intérêts des entreprises et, de l'autre, ceux des défenseurs de la santé publique et des consommateurs. Un tel mécanisme visant à permettre un minimum d'équilibre existe depuis longtemps dans le cadre des activités du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC. En outre, le pouvoir proposé à l'article 105 du projet de loi, qui permet aux entreprises de remettre en question des rappels de l'ACIA, peut être dangereux dans des situations où il faut absolument agir vite.
    Huitièmement, la proposition visant l'intégration de normes de référence ouvrira peut-être la porte à des conflits d'intérêts qui auront un impact sur l'établissement des politiques, et le gouvernement pourrait perdre entièrement son pouvoir de surveillance, même dans deux organisations qui sont en conflit d'intérêts commerciaux.
    Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. Je suis prêt à répondre à vos questions par la suite, bien sûr.
    Merci, je l'apprécie.
    Monsieur Fruitman, bienvenue.
    Au nom de l'Association des consommateurs du Canada, l'ACC, je suis ravi de pouvoir témoigner aujourd'hui.
    Depuis 65 ans, l'ACC défend les intérêts des Canadiens ordinaires en tant que consommateurs de biens et de services fournis par les secteurs public et privé. Notre mandat consiste à informer et à sensibiliser les consommateurs en ce qui a trait aux questions liées au marché, à défendre les droits des consommateurs auprès du gouvernement et de l'industrie et à favoriser une résolution positive des problèmes sur le marché.
    Le projet de loi S-11 pourrait grandement améliorer la salubrité des aliments en reproduisant les mécanismes instaurés l'année dernière dans la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation, qui vise les produits non alimentaires.
    Nous sommes heureux de constater l'intention du gouvernement de s'efforcer d'assurer la salubrité de tous les produits alimentaires vendus au Canada, peu importe leur provenance, et le fait que le projet de loi renforcera les pouvoirs d'application de la loi touchant les importations et permettra d'imposer des amendes élevées à quiconque compromet sciemment la salubrité de nos aliments. Nous avons toujours été surpris et préoccupés par le fait qu'il est possible que des produits alimentaires importés ne fassent pas nécessairement l'objet du même niveau d'examen que les produits fabriqués au pays. Même si les cas d'altération délibérée des aliments sont rares, les nouvelles interdictions et les pénalités salées dissuaderont la plupart des délinquants et feront en sorte qu'il sera plus facile de poursuivre les mécréants. Et, espérons-le, on pourrait peut-être même dissuader les personnes troublées qui font des choses comme mettre des lames de rasoir dans des pommes qu'elles donnent ensuite aux enfants le soir de l'Halloween, comme hier.
    Les exigences accrues en matière de traçabilité devraient faire en sorte qu'il sera plus facile de déterminer d'où viennent les produits alimentaires et où ils se trouvent à n'importe quel moment dans le système de distribution. Cela renforcera la capacité d'appliquer les dispositions interdisant la vente de produits alimentaires visés par un rappel aux termes du paragraphe 19(1) de la Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Malheureusement, il ne semble pas y avoir une description précise de ce en quoi consiste un ordre de rappel, si ce n'est le fait que le produit peut être rappelé ou envoyé à un endroit désigné par le ministre. Les consommateurs interprètent la notion de « rappel » comme voulant dire que, s'ils ont le produit fautif en leur possession, ils doivent le retourner, probablement là où il a été acheté. Les consommateurs croient aussi qu'ils ne devraient pas souffrir sur le plan financier en raison du fait qu'ils ont acheté un produit alimentaire qui fait par la suite l'objet d'un rappel. Il est inacceptable que l'on s'attende à ce que les consommateurs jettent les produits à la poubelle, comme l'a suggéré un représentant de l'ACIA.
    Même si nous appuyons le projet de loi, nous espérons que vous ne croyez pas qu'il permet de pallier toutes les déficiences de notre système de protection de la salubrité des aliments. Je vous fais remarquer que j'ai conjugué nos commentaires favorables au conditionnel. On pourrait et il faudrait en faire beaucoup plus, tant sur le plan de la prévention que sur le plan opérationnel.
    Il existe maintenant plusieurs vaccins conçus pour réduire le niveau d'E. coli dans le bétail. Une récente étude de la Kansas State University a conclu qu'il est possible de réduire les niveaux d'E. coli de 50 p. 100. Au moins un de ces vaccins a été approuvé au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni. Même si on ne sait pas encore quel serait le coût réel, certains ont avancé qu'inoculer tout le bétail canadien coûterait 50 millions de dollars.
    L'irradiation est une autre procédure qui permettrait de réduire les préjudices. Santé Canada l'a recommandée il y a 10 ans dans le cas du boeuf haché et d'autres produits après avoir conclu que l'irradiation des aliments pouvait améliorer la salubrité et la qualité en réduisant les niveaux de pathogènes comme l'E. coli et la salmonelle, en prolongeant la durée de conservation et en réduisant l'infestation d'insectes. Un sondage réalisé pour notre association plus tôt cette année, avant les problèmes chez XL Foods, a révélé que 70 p. 100 des Canadiens sont préoccupés par les bactéries pouvant se trouver dans la viande et que, malheureusement, trois sur cinq d'entre eux n'avaient pas entendu parler de l'irradiation alimentaire. Cependant, lorsqu'on leur décrivait les utilisations actuelles de l'irradiation, les deux tiers étaient favorables au fait qu'on donne le choix aux consommateurs d'acheter de tels produits.
    Nous recommandons au gouvernement d'envisager sérieusement la vaccination et l'irradiation dans le cadre du processus visant à offrir aux Canadiens les produits de viande les plus sécuritaires possible. Le projet de loi S-11 contient de nouveaux outils. Cependant, ces outils sont seulement efficaces si on les utilise et si on procède comme il se doit. L'ACIA a adopté une approche fondée sur le risque pour assurer la sécurité des consommateurs. Cela peut être une approche efficace et économique. Dans un système fondé sur le risque, on élabore des procédures pour obtenir les résultats escomptés. Durant les premières étapes de l'élaboration, chaque mesure doit faire l'objet d'un contrôle étroit pour garantir qu'elle donne les résultats escomptés. Si elle est déficiente, on apporte des changements. À mesure que le processus évolue, un contrôle constant n'est plus requis, et on met l'accent sur la documentation pour prouver le respect des procédures, des tests ponctuels et des activités de vérification. De plus, à la fin du processus, il est essentiel de prélever des échantillons statistiquement valides pour vérifier de façon générale qu'on obtient de façon constante les résultats escomptés. Théoriquement, si on respecte les procédures d'évaluation et de vérification, il ne devrait pas y avoir de problème.
(1000)
    Cependant, si l'échantillon statistique révèle qu'on obtient des produits contaminés au bout du compte, il faut arrêter sans hésiter l'expédition des produits aux consommateurs. Puis, le plus rapidement possible, il faut déterminer quels produits contaminés sont peut-être déjà expédiés et doivent faire l'objet d'un rappel obligatoire. Enfin, il faut déterminer ce qui n'a pas fonctionné et corriger la situation.
    Malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est produit durant le fiasco chez XL Foods. L'arrêt des livraisons et les ordres de rappel, qui, pour une raison ou pour une autre, étaient volontaires, et non obligatoires, n'ont pas été assez rapides. Le fait qu'on a tardé à recueillir des renseignements donne aussi à penser que les procédures de contrôle nécessaires n'étaient pas en place. Il semble aussi qu'on a donné du temps aux propriétaires de XL Foods pour qu'ils préparent leur stratégie de relations publiques. Rappelons que leur réaction est l'exemple parfait de ce qu'il ne faut pas faire.
    Enfin, et c'est peut-être l'élément le plus important, selon nous, bon nombre des failles découlent du fait qu'il y a un problème de culture au sein de l'ACIA. L'Agence est-elle une protectrice ou une promotrice? Dans le préambule de la Loi sur l'ACIA, on précise que l'Agence « contribuera à la protection des consommateurs et facilitera l'application uniforme et coordonnée des normes de salubrité, de sécurité et de qualité et des méthodes d'inspection fondées sur les risques » et que « le gouvernement fédéral entend promouvoir les échanges commerciaux et le commerce ».
    L'Agence relève du ministre de l'Agriculture, qui est responsable de tout ce qui touche l'agriculture. Cela inclut appuyer la productivité agricole et le commerce, stabiliser les revenus agricoles et être responsable de l'inspection et de la réglementation des animaux et des formes de vie végétales.
    Comme on l'a constaté durant le fiasco chez XL Foods, l'ACIA a échoué sur les deux fronts. Elle a permis à des produits de viande possiblement dangereux d'être vendus sur le marché, et cela a entraîné une suspension des exportations de boeuf vers les États-Unis. Selon nous, cette double responsabilité a créé une schizophrénie culturelle empêche l'ACIA de bien faire son travail principal, qui consiste à protéger les consommateurs canadiens des produits alimentaires dangereux. Malheureusement, les préoccupations au sujet de la façon dont certaines mesures prises au pays et certaines publicités pourraient être perçues par nos partenaires commerciaux ont un impact sur la rapidité, l'ampleur et l'efficacité de l'intervention.
(1005)
    Je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.
    Il y a déjà eu un ministère fédéral de la consommation. Nous recommandons le rétablissement d'un tel ministère et le transfert de l'ACIA sous ce ministère avec un mandat de « protecteur » clair.
    Merci. Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci.
    Monsieur Warriner, allez-y, s'il vous plaît. Bienvenue.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les honorables membres du comité de m'avoir invité à témoigner au sujet du projet de loi S-11, la Loi sur la salubrité des aliments au Canada.
    Pour ma part, je suis membre du corps enseignant du département des sciences de l'alimentation de l'Université de Guelph. Je suis aussi directeur du programme de salubrité alimentaire et d'assurance de la qualité offert par le département et dont l'objectif est de former la prochaine génération de gestionnaires, de coordonnateurs et d'inspecteurs des plans HACCP, entre autres.
    En général, je suis favorable au projet de loi parce qu'il constitue une décision claire d'adopter une approche fondée sur les résultats. Cela rend les inspections beaucoup plus efficaces et renforce la transparence des processus pour assurer la salubrité des aliments.
    La philosophie sous-jacente au projet de loi, c'est que la salubrité n'est pas une question d'inspection, ce que rappelle le fait que le Canada a un système de salubrité des aliments en deux volets, un volet provincial, et l'autre, fédéral. Si l'histoire nous a appris quelque chose, c'est que les incidents liés à la salubrité des aliments peuvent se produire autant chez les petits que chez les grands transformateurs, si les procédures ne sont pas respectées, et ce, peu importe le niveau d'inspection.
    Le projet de loi S-11 amènera le Canada au même niveau que ses partenaires commerciaux et assurera la prestation d'un service d'inspection plus efficient et plus dynamique.
    Les dispositions sur l'altération, les articles 7 à 9, arrivent au bon moment, compte tenu d'une tendance à la falsification délibérée de produits alimentaires. Les nouvelles dispositions qui figurent aux articles 10 à 13 sont un élément important de la nouvelle loi, compte tenu des enjeux liés à la salubrité des aliments touchant les importations et la préoccupation accrue relativement aux aliments de contrefaçon.
    Cependant, il y a certaines préoccupations dont je tiendrais compte au moment d'appliquer la nouvelle loi.
    L'article 73 constitue la principale avancée du projet de loi parce qu'il rassemble toutes les lois sur les produits en une seule. Parallèlement, les articles 39 à 45 renforcent les pouvoirs des inspecteurs et leur permettent de travailler de façon plus indépendante.
    Le pouvoir s'accompagne de responsabilités, évidemment, et il y a une préoccupation selon laquelle les inspecteurs n'auront pas suffisamment de connaissances ou d'expérience pour s'acquitter de cette tâche. Il faut se demander si les inspecteurs peuvent inspecter des muffins une journée, et du poisson le lendemain. Il s'agit de produits très différents associés à des dangers qui le sont tout autant. Peut-on s'attendre des inspecteurs qu'ils soient des hommes et des femmes à tout faire?
    Si on ajoute les pouvoirs accrus des inspecteurs, alors les probabilités d'erreurs sont beaucoup plus élevées. D'un côté, un inspecteur pourrait jouer de prudence et réagir trop vivement, ce qui perturberait les activités de l'entreprise et pourrait avoir des répercussions à l'échelle du secteur. Il faut trouver le juste équilibre avec la sécurité des consommateurs.
    Il convient de signaler que, au paragraphe 32(1), il est précisé que les inspecteurs doivent avoir des motifs raisonnables pour évaluer la salubrité de produits alimentaires importés, mais ce n'est pas le cas pour les produits fabriqués au pays.
    La liberté de communiquer des renseignements du producteur aux termes des articles 46 et 47 pourrait aussi avoir des répercussions négatives au-delà du transformateur examiné. Par conséquent, il est primordial que la prochaine génération d'inspecteurs possède de bonnes connaissances générales et de bonnes capacités décisionnelles. D'ici là, il serait prudent d'inclure dans le projet de loi un genre de processus de consultation entre les inspecteurs avant l'exercice de leurs pouvoirs.
    Je vais maintenant parler de la responsabilisation. L'article 59 accorde l'immunité aux inspecteurs et au gouvernement. Le paragraphe 39(5) offre une protection aux dénonciateurs contre d'éventuelles poursuites, alors que ces dénonciateurs pourraient être les responsables des cas de non-conformité.
    Si on veut renforcer la culture liée à la salubrité des aliments, il faut que tout le monde soit imputable et qu'il y ait des conséquences en cas de non-conformité volontaire. Si cela signifie qu'il faut imposer des amendes aux travailleurs, alors il faut l'envisager. Je doute qu'une amende de 5 millions de dollars aux entreprises aura un impact sur les travailleurs, qui sont ceux qui font le travail.
    En ce qui a trait à la responsabilité, j'aimerais aussi préciser que, aux termes du paragraphe 105(4), si l'activation d'un plan HACCP peut être utilisée en tant que défense fondée sur la prise des précautions voulues, comme un autre témoin l'a signalé, cela pourrait avoir pour effet d'empêcher tout type de poursuite.
    Mon dernier point concerne l'efficacité des plans HACCP pour contrôler les dangers. Il serait prudent d'inclure la notion de « plan HACCP validé et vérifié » à l'article 51. Il ne s'agit pas simplement d'appliquer le plan HACCP, il faut s'assurer qu'il est efficace.
    En résumé, le projet de loi constitue bel et bien un changement majeur dans la philosophie d'inspection des aliments, et mise sur une autoréglementation accrue de l'industrie. Selon moi, c'est la seule façon efficace d'assurer la salubrité des aliments. Cependant, la réussite du projet de loi dépend de l'adoption d'une culture axée sur la salubrité des aliments au sein de l'industrie et des services d'inspection. Et ça, pour y arriver, il faut la carotte qui va avec le bâton que représente le projet de loi.
    Merci de m'avoir écouté, je suis prêt à répondre à vos questions.
(1010)
    Merci beaucoup.
    Madame Brosseau.
    Je remercie tous les témoins de la journée.
    Je crois bien que personne ne se présentera devant notre comité pour dire qu'il est contre le projet de loi sur la salubrité des aliments. En principe, nous sommes tous d'accord. Il faut moderniser le système et aller de l'avant, mais, à la lumière des témoignages que nous avons entendus aujourd'hui, tout est dans les détails. Il s'agit de savoir comment nous irons de l'avant et de quelle façon auront lieu les consultations par la suite concernant les règlements.
    Je crois que nous progressons, mais je suis tout de même préoccupée par certains aspects du projet de loi.
    Monsieur Warriner, vous avez mentionné le fait que les inspecteurs devront être des hommes et des femmes à tout faire. C'est quelque chose qui m'inquiète moi aussi. Si vous êtes un spécialiste d'un domaine, par exemple, la viande, comment passer au poisson ou aux produits agricoles? Il y a eu des compressions au sein de l'ACIA, et ça me préoccupe. Ces gens seront-ils bombardés de toutes parts? Nos inspecteurs seront-ils dépassés en raison des nouvelles responsabilités? Pourront-ils bien faire leur travail lorsqu'ils inspecteront différents produits?
    C'est un très bon point.
    En réalité, pour devenir inspecteur, il ne faut pas seulement avoir les qualifications, il faut de l'expérience. Il est difficile d'acquérir de l'expérience en inspection d'un type de produit. Une des grandes préoccupations touchant ce projet de loi, c'est que, même si c'est intéressant de réunir des lois sous un seul texte simplifié, ce n'est pas pour rien qu'il y avait différentes lois et différents types d'inspecteurs.
    La seule façon que ce sera possible, selon moi, c'est si l'industrie de l'alimentation devient, au bout du compte, responsable d'assurer la salubrité des aliments et que les inspecteurs sont là pour vérifier la paperasse. Il est évident qu'ils ne seront plus en première ligne, parce qu'ils ne seront pas qualifiés pour vraiment évaluer quoi que ce soit. C'est une grande préoccupation. Essentiellement, nous transférons la responsabilité liée à la salubrité des aliments à l'industrie. Il faut simplement espérer qu'elle pourra s'en occuper.
    Il est très optimiste de dire que quelqu'un qui inspecte des poissons peut tout aussi bien inspecter des fruits et légumes frais.
    J'ai travaillé dans des restaurants et été gérante d'un restaurant. Je sais à quel point il est important de créer une culture axée sur la salubrité. Tout le monde doit travailler ensemble. Qu'il s'agisse du débarrasseur, du serveur, du sous-chef ou de la personne qui nettoie, il faut adopter une culture et créer un environnement favorable à la salubrité des aliments. Tout le monde doit faire la même chose. C'est un travail d'équipe.
    Je me demandais — et j'imagine que tous les témoins pourront répondre — ce que vous pensiez de la possibilité de vérifier l'ACIA? Croyez-vous que c'est quelque chose qu'il faudrait faire pour créer une base de référence et déterminer où nous en sommes et comment aller de l'avant?
    Je vais commencer puisque mon microphone est allumé.
    Le problème avec une base de référence, c'est qu'il faut se rappeler que nous modifions les normes. Par conséquent, toute base de référence actuelle perdra totalement sa pertinence. Ce qu'il faut se demander, c'est ce que sera la nouvelle norme. C'est ce que j'ai à dire à ce sujet.
    Ce n'est pas une mauvaise idée. Je ne suis pas convaincu de la pertinence d'une base de référence. Comme je l'ai mentionné, nous croyons qu'il y a des problèmes liés au fait que l'ACIA ne respecte pas sa méthode. Peut-être qu'une vérification permettrait de le prouver et de déterminer là où il faut apporter des améliorations. Il pourrait s'agir du genre de vérification dont s'occupe le vérificateur général, qui porte sur ce que l'agence fait, comment elle le fait et si elle obtient les résultats escomptés.
    Il y a certainement un avantage à demander à un intervenant externe d'évaluer le travail de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Évidemment, l'opinion du vérificateur général a beaucoup de poids. Il faut que ce soit étoffé. Il est possible qu'il y ait déjà eu collecte de renseignements, mais il n'y a certainement pas eu de rapport.
    Nous ne savons pas combien de personnes, selon l'Agence canadienne d'inspection des aliments, meurent en raison de pathogènes d'origine alimentaire chaque année. L'agence ne communique pas le nombre de personnes qui meurent de maladies liées à la nutrition. Ce sont des renseignements que nous obtenons des communicateurs de l'Organisation mondiale de la santé. C'est parfait de dire que nous bénéficions de l'approvisionnement alimentaire le plus sécuritaire du monde entier, mais il faut le prouver avec des données. L'Agence canadienne d'inspection des aliments, peut-être en raison de son mandat contradictoire, ne communique pas ce genre de données.
(1015)
    Monsieur Jeffery, vous avez dit que combien de Canadiens meurent chaque année?
    Selon les estimations de l'Organisation mondiale de la santé, pour des pays comme le Canada, environ 20 p. 100 des décès sont liés à une consommation excessive de sel ou une consommation trop importante de gras saturés et de gras trans. Ça donne environ 48 000 Canadiens. Nous avons obtenu certaines estimations qui ont été publiées. Un des témoins qui a comparu devant le comité sénatorial a publié des estimations selon lesquelles de 300 à 500 personnes meurent chaque année en raison de pathogènes d'origine alimentaire, mais je n'ai pas vu de données de l'Agence canadienne d'inspection des aliments à ce sujet.
    Le projet de loi S-11 fait-il quelque chose au sujet de la consommation de sel? Aidera-t-il à protéger les Canadiens à cet égard?
    Je ne crois pas. Nous allons présenter au comité un mémoire technique qui contient des recommandations précises de modifications. Une des choses que nous avons remarquées, au fil des ans, et ça nous a surpris, c'est le fait que l'Agence canadienne d'inspection des aliments fait de la nutrition un enjeu touchant la qualité des aliments et, par conséquent, une priorité secondaire. C'est étrange que ce ne soit pas une question de santé et de salubrité du point de vue des inspecteurs alors que c'en est clairement une.
    On voit cette vision à l'oeuvre. On n'a qu'à regarder les très bas niveaux d'amendes et leur rareté: presque aucune n'est liée à la nutrition.
    Merci.
    Monsieur Richards.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous tous d'être parmi nous. Il est évident que vous connaissez tous très bien le dossier, et nous apprécions beaucoup le fait que vous ayez accepté de partager votre expertise avec nous aujourd'hui.
    J'espère avoir assez de temps pour poser des questions à chacun d'entre vous ce matin. Je vais commencer par vous, monsieur Jeffery.
    Vous avez présenté au comité sénatorial un mémoire sur le projet de loi. Vous avez écrit que, selon vous, ce projet de loi pouvait renforcer la capacité de l'ACIA d'assurer la santé publique, de protéger les consommateurs contre la fraude et d'améliorer la confiance du public.
    Pouvez-vous approfondir chacun de ces trois points précis et nous dire pourquoi vous croyez que le projet de loi pourrait contribuer à la salubrité des aliments au Canada?
    Je me dois de préciser, monsieur, que l'exposé que j'ai présenté au comité sénatorial est le même que celui que j'ai présenté ici. On pourrait atteindre ces trois objectifs si on règle les 9 ou 10 préoccupations que j'ai mentionnées.
    En vérité, nous n'avons pas de bonne donnée sur le nombre de personnes qui meurent en raison de pathogènes d'origine alimentaire chaque année. Par conséquent, nous ne savons pas comment ça... D'un certain point de vue, il semble s'agir d'une bonne initiative de fusion législative. Ça semble rendre le système plus efficient, mais je suis préoccupé par le fait que les inspecteurs devront devenir des hommes et des femmes à tout faire, par exemple.
    Honnêtement, je ne sais pas si ça donnera de meilleurs résultats, et je ne crois pas que personne ne peut vraiment le savoir si nous ne faisons pas un suivi des résultats.
    D'accord, je comprends.
    Monsieur Fruitman, je sais que vous avez eu l'occasion de témoigner devant le comité sénatorial en plus de témoigner ici ce matin. Pouvez-vous me donner des exemples précis de la façon dont le projet de loi sera bénéfique pour les consommateurs? Je sais que vous avez déclaré que, selon vous, le projet de loi renforcera sans aucun doute la capacité de l'ACIA de réaliser des activités liées au suivi, à la traçabilité et au rappel d'aliments.
    Si on respecte les procédures, et, selon moi, malheureusement, rien n'est aussi sûr, si on connaît les procédures de vérification de ce qui se passe dans l'usine et qu'on connaît la destination de la production, l'origine des intrants, le cheminement des produits dans l'usine et où les produits sont allés depuis qu'ils ont quitté l'usine et qu'on découvre des problèmes, je crois qu'on aura alors la capacité de demander un rappel obligatoire presque immédiatement après la découverte du problème, si le produit a quitté l'usine.
    Actuellement, il faut entreprendre un long processus pour déterminer le où, le quand, le quoi, le comment et ce genre de choses. La capacité accrue de poursuites prévue dans le projet de loi, si poursuites il y a, et les exigences relatives à une meilleure tenue des dossiers dans l'usine devraient rendre le processus beaucoup plus efficace. Ça devrait être plus facile de cerner les problèmes lorsqu'ils se produisent et de déterminer comment les corriger et ce qu'il faut faire pour s'assurer qu'aucun produit ne se retrouve dans les assiettes des consommateurs canadiens.
(1020)
    Selon vous, cela permettrait très certainement d'améliorer la salubrité des aliments et, probablement, aussi, d'améliorer le niveau de confiance des consommateurs?
    Oui, tout à fait. Mais rien n'est plus sûr cependant. Il faut bien faire les choses.
    Très bien. Comme c'est toujours le cas, il faut s'assurer de bien faire les choses. Je comprends.
    En ce qui a trait précisément à l'application d'importantes pénalités en cas d'altération d'aliments, je veux savoir ce qui, selon vous, pourraient être les avantages pour les consommateurs.
    Comme je l'ai déjà dit, je ne suis au courant d'aucun fait récent. Bill en connaît peut-être. Je ne sais pas où une possible altération d'aliments pourrait réellement avoir eu lieu. Cependant, si ça se produit, les amendes sont suffisamment salées et pourraient selon toute vraisemblance être appliquées, et des peines d'emprisonnement pourraient être imposées beaucoup plus rapidement que par le truchement de procédures civiles. On peut espérer que cela dissuadera quiconque de faire quoi que ce soit pour contaminer des aliments. Comme je l'ai déjà dit, on pense toujours à l'affaire des Tylenol, il y a un certain nombre d'années. Quelqu'un avait mis délibérément du cyanure, si je me rappelle bien, dans des boîtes de Tylenol. On peut espérer que cela dissuadera quiconque de faire quelque chose d'aussi stupide.
    Je dois vous arrêter ici. Le temps passe vite.
    Nous allons passer à M. Valeriote.
    Merci, monsieur le président. Merci, messieurs d'être parmi nous ce matin.
    Monsieur Jeffery, vous avez recommandé certains amendements. J'espère que, plus tard ce matin, le comité envisagera de prolonger notre étude d'au moins deux ou trois réunions pour évaluer les amendements que vous avez proposés et que d'autres avant vous ont aussi proposés, y compris le Conseil canadien du commerce de détail et l'Association canadienne des importateurs et exportateurs. J'espère qu'il pourra le faire. Sinon, c'est quasi impossible d'évaluer le projet de loi et de le changer maintenant. Dans la situation actuelle, je ne veux pas sacrifier un bon texte législatif simplement pour être expéditif.
    Monsieur Warriner, j'aimerais vous poser quelques questions.
    Vous avez entendu M. Fruitman parler d'une double responsabilité qui a provoqué une schizophrénie. Je suis d'accord avec vous. Le ministre est dans une position très difficile. Il doit veiller à la poursuite des activités commerciales et s'assurer que les aliments sont salubres. Il y a un conflit là-dedans. C'est pourquoi, compte tenu de ce conflit, nous avons proposé la réalisation par une tierce partie d'une vérification indépendante approfondie de l'ACIA. Il faudrait le faire maintenant, puis à tous les cinq ans. Cette recommandation découle du rapport Weatherill, selon lequel, à ce moment-là, à la suite de la crise de la listériose, on n'avait pas eu l'occasion de comprendre la complexité de la structure des ressources humaines et des autres ressources de l'ACIA. L'organisation est tout simplement trop vaste. Même si un examen a été entrepris ultérieurement, il ne s'agissait pas d'une vérification indépendante, ce que Carole Swan, l'ancienne présidente de l'ACIA, a déclaré être deux choses essentiellement différentes.
    Compte tenu de cette double responsabilité, ne croyez-vous pas que, à tout le moins, plutôt que de laisser des représentants de l'agence effectuer eux-mêmes l'examen qui sera réalisé aux cinq ans dorénavant, aux termes de l'article 68, il faudrait demander à quelqu'un de l'extérieur de le faire? Cette entité pourrait bien examiner les ressources humaines et toutes les autres ressources pour s'assurer que tout le monde sait ce qu'il fait et déterminer qu'il y a suffisamment de ressources pour y arriver.
    Durant la réunion de mardi, j'ai dit au groupe de témoins que j'étais préoccupé par le fait que les inspecteurs étaient propres à tout et bons à rien. Un des témoins m'a assuré qu'ils pouvaient appliquer leurs compétences en matière d'inspection en vertu d'une loi à une autre. C'est peut-être vrai.
    J'aimerais que vous parliez de la vérification indépendante et de la question de savoir si les inspecteurs seront propres à tout et bons à rien.
(1025)
    C'est une très bonne question. Le problème, c'est que l'ACIA vit un genre de crise identitaire. D'un côté, nous nous attendons à ce que l'industrie alimentaire soit pleinement responsable, l'ACIA jouant uniquement un rôle de supervision, mais, de l'autre, des gens suggèrent que l'ACIA devrait mettre les mains à la pâte et faire des inspections de première ligne. Quelqu'un de l'extérieur ne comprendrait probablement pas, comme vous l'avez dit, le genre de schizophrénie que l'agence combat. En réalité, les rôles de l'ACIA sont mal définis.
    On l'a bien vu avec l'affaire de XL Foods. Il y avait des inspecteurs dans l'usine qui disaient qu'ils avaient un ensemble de tâches bien défini dont ils devaient s'acquitter. Ils semblaient complètement inconscients de ce qui se passait autour d'eux. Les consommateurs s'attendent peut-être à ce que l'ACIA joue un rôle plus actif.
    Je crois qu'une vérification interne serait beaucoup plus efficace qu'une vérification externe, pour la simple raison que l'ACIA doit comprendre quel est son vrai rôle. C'est l'un des avantages du projet de loi. Tout ça est défini clairement.
    En ce qui a trait à la deuxième question concernant le fait que les inspecteurs seront propres à tout et bons à rien, je dis toujours que les gens qui sont sûrs d'être capables de faire quelque chose évaluent peut-être mal toute la portée de la tâche.
    Nous en revenons à ce à quoi on s'attend des inspecteurs et si on s'attend à ce qu'ils inspectent directement les produits et qu'ils puissent cerner beaucoup de dangers différents. On pourrait donner l'exemple des vétérinaires qui essaient d'évaluer des animaux malades. S'attendrait-on d'eux qu'ils examinent de la laitue pour voir s'il y a un organisme nuisible pouvant avoir un effet dévastateur sur notre agriculture?
    Le fait de demander aux inspecteurs d'être des hommes et femmes à tout faire est certainement un problème. Si nous allons dans ce sens, et que les inspecteurs doivent examiner un large éventail de produits, alors, selon nous, l'ACIA sera uniquement là pour contrôler la paperasse et ne travaillera pas en première ligne. C'est mon opinion.
    Encore une fois, je dois vous arrêter ici. Je suis désolé.
    Monsieur Lobb, vous êtes le dernier à prendre la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos invités d'être là aujourd'hui.
    Ma première question porte sur les commentaires de M. Fruitman. Vous avez parlé de dissoudre l'ACIA — je crois que c'est ce que vous avez dit — ou de la séparer. D'où vient cette idée?
    Nous sommes depuis longtemps préoccupés par la dualité de l'ACIA, qui est à la fois protectrice et promotrice. Il y a déjà eu un ministère de la consommation qui réunissait tous les textes législatifs sur la protection des consommateurs et en assurait la supervision.
    Cependant, il est réaliste et logique de s'attendre à ce qu'une organisation aussi importante que l'ACIA, qui compte des milliers d'employés, ait la capacité de s'acquitter des deux tâches. Nous parlons de milliers d'employés, alors ce n'est pas vraiment raisonnable de supposer que ça ne peut pas se faire.
    Vous voulez dire dans sa forme actuelle?
    Oui, je veux dire dans sa forme actuelle.
    Selon nous, dans sa forme actuelle, l'agence ne fait pas bien son travail en raison de cette dualité. Cela crée une culture dans laquelle il est difficile pour les employés de savoir comment trouver un juste équilibre entre les deux rôles: faut-il pencher d'un côté ou de l'autre? Très souvent, il faut faire des compromis.
    Cependant, en toute honnêteté, si on s'en tient strictement aux fonctions d'inspection dans les usines de transformation, toute la fonction d'inspection est fondée sur des données scientifiques. Les inspecteurs travaillent en collaboration avec les fabricants de l'équipement d'un bout à l'autre de la chaîne pour prendre des décisions logiques de façon à ce que les inspecteurs qui travaillent dans telle ou telle usine puissent faire ce qu'il faut pour assurer la salubrité des aliments. Les personnes qui s'occupent des inspections ne sont pas celles qui partent en mission commerciale avec le ministre.
    Comprenez-vous ce que j'essaie de dire?
    Je comprends votre point de vue, mais je crois que vous devez prendre du recul et regarder comment l'agence fonctionne et tenir compte aussi des niveaux supérieurs de l'organisation, et, en fait, de la façon dont les divers directeurs ont réagi à la situation chez XL Foods. Selon nous, ils n'ont pas bien réagi. Ils étaient sur la défensive, et ils n'ont pas pris le genre de mesures nécessaires dès qu'il fallait le faire.
    Si les échelons supérieurs ne savent pas quel est leur objectif principal, cela a un impact sur la façon dont les employés subalternes font leur travail.
(1030)
    Je ne suis pas dans leur tête, mais je crois bien qu'ils se concentrent vraiment sur leur principale priorité, soit la salubrité des aliments et la sécurité de tous les Canadiens.
    Selon moi, l'objectif des améliorations prévues dans le projet de loi S-11 et le concept sous-jacent, c'est de fournir aux intervenants de première ligne une façon de mieux faire leur travail. Et en fait, c'est le cas, ça leur permet de poursuivre leur travail.
    J'aimerais poser une question à M. Warriner.
    J'ai cru comprendre dans vos commentaires que les inspecteurs faisaient peut-être leur travail, mais qu'ils ne tenaient pas compte des autres choses qui se passaient dans l'usine. C'est ce que vous avez insinué?
    Insinué? Je crois avoir été assez direct.
    Selon moi, et il est évident que la situation chez XL Foods l'a prouvé, tout comme la flambée chez Maple Leaf, les inspecteurs ont un rôle très précis, et des gens sous-entendent que...
    D'accord, mais ce rôle n'a pas été défini par pure fantaisie. Comme je l'ai mentionné à M. Fruitman, le rôle est défini en fonction de données scientifiques, en fonction du travail fait avec les fabricants. C'est ainsi dans toute la chaîne. Ce n'est pas comme s'ils ont tout simplement regardé autour d'eux une journée et décidé qu'ils devraient peut-être faire ceci ou cela.
    Diriez-vous que c'est le cas? Que les inspecteurs font ce qu'ils sont censés faire, c'est-à-dire des inspections, et que cela n'est pas fondé uniquement sur ce qu'ils veulent faire, mais sur des données scientifiques et peut-être aussi leur expérience?
    Non, je crois que c'est fondé... l'élément scientifique vient au moment de l'élaboration du plan.
    Je crois qu'il y a une certaine culture régissant les interactions entre les entreprises et l'ACIA. Je l'ai constaté directement. Je crois que certains inspecteurs, comme je l'ai mentionné en réponse à la question précédente, ne savent pas vraiment quel est leur rôle. C'est la seule façon dont vous pouvez expliquer qu'il y avait autant de lacunes chez XL Foods et que les inspecteurs n'ont semblé rien voir.
    Je crois que l'intervenant affirme que c'est ce qu'ils ont élaboré et que c'est ainsi qu'ils font leur travail efficacement. Mais il est évident qu'ils ne font pas leur travail efficacement, et je crois que c'est parce que leurs tâches sont mal définies, c'est ce que je crois du moins.
    Merci.
    Comme je l'ai dit plus tôt, je vais maintenant intervenir.
    Je remercie nos invités d'avoir été là et de leurs commentaires.
    Je demanderais qu'on libère la salle. Nous allons poursuivre à huis clos pour discuter des affaires du comité. Nous allons prendre quelques minutes, et je demande aux visiteurs de quitter la salle.
    Merci. Je suspends la séance pendant deux minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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