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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 036 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 28 mai 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Français]

    Bonjour à tous. J'espère que vous avez passé une belle semaine dans votre comté.
    Bienvenue à la 36e séance du Comité permanent de la condition féminine. Nous allons consacrer les 20 premières minutes aux travaux du comité et, ensuite, nous reviendrons à notre étude sur l'amélioration des perspectives économiques des filles au Canada. Nous commençons à l'instant les travaux du comité.
    Madame Truppe, vous voulez dire quelque chose?

[Traduction]

    Madame la présidente, puisqu'il est question des travaux du comité, nous devrions probablement poursuivre à huis clos.

[Français]

    Mme Truppe propose que la séance se poursuive à huis clos. Quelqu'un s'oppose-t-il à cette proposition?
    Madame Ashton, vous avez la parole.
    Je m'y oppose. Les travaux de notre comité ne se font pas toujours à huis clos. Je ne vois donc pas pourquoi ils le seraient aujourd'hui.
    Nous allons passer au vote.
    Madame Sgro, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je me demande seulement si nous allons parler de choses confidentielles exigeant une séance à huis clos? Autrement, si ce n'est que les travaux habituels, je ne crois que cela ne soit nécessaire.
    Une voix: J'invoque le Règlement...

[Français]

    Il n'y aura pas de débat. Nous passons au vote tout de suite.
    Je donne la parole à Mme Truppe, puis à M. Albas.

[Traduction]

    Je voulais juste ajouter que cela ne peut pas faire l'objet d'un débat.
    Merci.
    Je demande un vote par appel nominal, madame la présidente.

[Français]

    Mme Sgro demande un vote par appel nominal.
    (La motion est adoptée par 7 voix contre 4.)
    La proposition de Mme Truppe est adoptée.
    Nous allons passer à huis clos pour les travaux du comité. Je suspends la séance pour 20 minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
(1530)

(1550)
    La séance publique reprend.
    Bonjour. Nous continuons notre étude sur les perspectives économiques des filles au Canada.
    Aujourd'hui, nous entendrons en direct de Victoria, en Colombie-Britannique, par vidéoconférence, Mme Mary-Ellen Turpel-Lafond, de l'organisme Representative for Children and Youth, et Mme Jennifer Flanagan, directrice générale de l'organisme Actua.
     Je vous souhaite la bienvenue à notre comité et vous remercie d'accepter de venir partager vos idées avec nous.
    Nous allons commencer par Mme Turpel-Lafond, qui aura droit à 10 minutes. Ensuite, Mme Flanagan aura droit à 10 minutes également. Par la suite, nous allons passer à un tour de questions. Je ne parle pas plus longtemps, je vous laisse témoigner.
    Madame Turpel-Lafond, vous disposez de 10 minutes.
(1555)

[Traduction]

    Ma déclaration préliminaire portera sur la situation économique des filles et des femmes, particulièrement en ce qui concerne mon travail à titre de représentante de Children and Youth.
    Dans le cadre de mes fonctions, je défends les intérêts des enfants et des jeunes jusqu'à l'âge de 19 ans, dans la province de la Colombie-Britannique, et je leur fournis du soutien. Je travaille surtout auprès des populations vulnérables de jeunes, comme les enfants et les jeunes sous responsabilité du gouvernement par souci de protection de l'enfance. J'interviens auprès de jeunes ayant des besoins spéciaux et liés au développement ainsi que des besoins complexes en matière de santé mentale.
    Mon travail touche aussi de près les filles et les femmes autochtones. Je tiens à souligner ce fait, car ces jeunes filles et jeunes femmes présentent des vulnérabilités particulières; par exemple, certaines ne vivent plus dans la maison familiale et risquent grandement d'éprouver des difficultés financières parce qu'elles ont été élevées dans la pauvreté ou atteignent l'âge adulte dans la pauvreté.
    Je veux parler de certains des facteurs de leur vie qui constituent des problèmes à long terme au chapitre de leur mobilité socioéconomique et de leur sécurité. Je vais aborder quelques points et répondrai ensuite à vos questions, si vous en avez.
    J'ai en main quelques statistiques générales sur cette population. La Colombie-Britannique comptait 900 000 enfants et jeunes en 2011, ce qui représente environ 20 p. 100 de la population totale de la province. Parmi ceux-ci, de 13 000 à 15 000 enfants et jeunes ne vivent pas dans le domicile familial. Certains sont sous la responsabilité de l'État, tandis que d'autres vivent seuls avant même d'avoir atteint l'âge adulte. En Colombie-Britannique, plus de la moitié des enfants pris en charge sont autochtones, de sorte qu'ils sont surreprésentés, compte tenu de leur pourcentage de la population globale.
    Pour ce qui est des enfants qui demeurent dans le système de protection de l'enfance jusqu'à leur majorité, les jeunes femmes en particulier, près de 4 000 enfants ont vu leur prise en charge terminée au cours des trois dernières années. Tous les mois en Colombie-Britannique, environ 57 jeunes ne sont plus pris en charge parce qu'ils atteignent l'âge de 19 ans. Bon nombre d'entre eux sont des jeunes femmes autochtones. Nous tenons beaucoup à leur réussite lorsque c'est l'État qui joue le rôle de parent et nous souhaitons qu'ils réussissent autant que s'ils avaient été élevés au sein d'une famille.
    En ce qui concerne les vulnérabilités de ces jeunes femmes, un faible niveau de scolarité constitue un problème important et continu. D'après nos études détaillées des résultats scolaires d'enfants vulnérables, comme les enfants autochtones, les enfants pris en charge et les jeunes vivant à l'extérieur du domicile familial, ceux-ci n'ont pas le même taux de réussite dans le système scolaire public. Ils ne réussissent pas leur 4e et leur 7e année ou les études secondaires au même rythme que leurs pairs. À titre d'exemple, les élèves autochtones obtiennent généralement des résultats de 15 à 18 p. 100 plus faibles que les autres à l'évaluation normalisée des compétences de base, en Colombie-Britannique. La 4e année constitue le premier niveau. À la 7e année, leurs résultats diminuent. On observe ensuite une chute des résultats aux examens obligatoires de l'enseignement postsecondaire.
    Même si la Colombie-Britannique fait meilleure figure que de nombreuses autres provinces sur le plan de la situation des Autochtones, seulement environ 42 p. 100 des filles autochtones prises en charge terminent leurs études. L'écart est très important par rapport à 83 p. 100 des filles qui ne sont pas prises en charge par l'État.
    L'autre facteur important qui augmente la vulnérabilité de ces filles et jeunes femmes au chapitre de leur autonomie socioéconomique est le problème continu de la pauvreté. La Colombie-Britannique compte le taux de pauvreté infantile le plus élevé d'après toutes les mesures, que ce soit la Mesure du panier de consommation ou d'autres mesures de Statistique Canada.
    En Colombie-Britannique, environ 100 000 enfants vivent dans des foyers à faible revenu. Encore une fois, je mets l'accent sur la population autochtone. D'après les données les plus récentes à ma disposition, dans la province, 58 p. 100 des familles monoparentales dont le chef est une femme autochtone ont un revenu annuel de moins de 20 000 $, et seulement 7 p. 100, de 50 000 $ ou plus. Nous observons les conséquences néfastes de la pauvreté des parents sur leurs enfants ainsi que le manque d'inclusion sociale, de soutien et d'évolution sur le plan de la réussite scolaire, et des problèmes de santé et de mieux-être connexes.
(1600)
    Je veux aborder aussi les problèmes liés à la violence, qui touchent l'autonomie socioéconomique des filles et des femmes.
    Sur le plan de l'exposition des filles et des femmes à la violence familiale, je sais que, par le passé, votre comité a déjà élaboré un rapport très important sur la violence familiale chez les Autochtones dans lequel étaient soulevées certaines préoccupations. En tant que représentante de Children and Youth, je constate à coup sûr que les enfants qui sont témoins de violence familiale sont aussi blessés par cette expérience que s'ils l'avaient vécue eux-mêmes, et cette situation les met à risque. Cela ne signifie certainement pas qu'il existe un lien absolu entre la violence familiale, la pauvreté et une situation précaire, mais il est très important d'encourager activement leur résilience et leur mieux-être dans le cadre de notre système de services sociaux en vue de prévenir la violence et de soutenir les victimes de violence. Nous remarquons des lacunes importantes à cet égard, particulièrement dans le cas des filles et des femmes autochtones.
    Qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur des réserves, le système de soutien n'est pas aussi solide, et le système de justice pénale n'intervient pas nécessairement aussi rapidement. Le soutien et les services sociaux offerts aux filles et aux femmes sont inadéquats, et cela peut les désavantager considérablement. En fait, l'ensemble des filles et des femmes exposées à la violence familiale éprouvent certains désavantages, mais je soulignerais que cela touche particulièrement les filles et les femmes autochtones.
    En ce qui a trait aux autres formes de violence et d'exploitation, dans le cadre de mon travail de représentante, je connais très bien les conséquences de la violence sexuelle et de l'exploitation sexuelle des filles et des femmes. Dans mes fonctions, on me signale des cas d'enfants connus du ministère du Développement des enfants et de la famille de la Colombie-Britannique, qui auraient été victimes d'une agression sexuelle. Je traite évidemment cette information et mène une enquête, et il m'arrive parfois de rédiger un rapport d'enquête ou un résumé à ce sujet.
    Laissez-moi vous donner un aperçu du dernier exercice: on m'a signalé 62 agressions sexuelles contre des jeunes. Environ 15 p. 100 des cas dont j'ai été saisie étaient des agressions sexuelles contre des filles. Au total, 90 p. 100 touchaient des personnes de sexe féminin — il y a quelques victimes de sexe masculin, mais 90 p. 100 des victimes étaient des filles ou des femmes, et 66 p. 100 d'entre elles étaient des filles autochtones. Les filles et les femmes autochtones sont au moins trois fois plus susceptibles d'être victimes de violence conjugale, et de violence sexuelle, en particulier.
    Il reste encore à explorer plus profondément le lien fondamental entre le préjudice infligé et le bien-être ultérieur. Il est très important de comprendre les problèmes sociaux et économiques liés à la vulnérabilité d'une personne à la violence ainsi que de coordonner les interventions et le soutien en vue de renforcer la résilience des victimes.
    Le dernier point sur lequel je veux attirer votre attention et qui touche la santé, le bien-être ainsi que la situation économique et la mobilité sociale des filles et des femmes est la difficulté d'accéder aux services de santé mentale, problème que j'observe régulièrement dans mon bureau. Dans le cas de filles et de femmes ayant vécu des traumatismes durant leur enfance — que ce soit la violence, la pauvreté extrême ou l'exclusion sociale — qui sont atteintes d'un trouble mental autre que les troubles liés aux traumatismes, la capacité d'obtenir et de recevoir rapidement des services de santé mentale et de santé générale adéquats constitue un facteur important.
    Mes fonctions professionnelles m'amènent couramment à travailler auprès de filles et de femmes qui n'ont pas de médecin de famille, qui ne sont pas aiguillées vers les soutiens et les services de santé mentale et qui ne participent donc pas pleinement à leur collectivité ou qui ne se développent pas normalement.
    Si nous voulons améliorer la situation économique des filles et des femmes canadiennes, même si les perspectives sont généralement très bonnes dans l'ensemble des sphères de la société, je crois que nous devons prêter une attention particulière à certains groupes extrêmement vulnérables de filles et de femmes. Nous devons utiliser l'information à notre disposition pour élaborer des approches de politique sociale et de développement communautaire plus efficaces et novatrices afin que nous puissions mobiliser les filles et les femmes et les soutenir adéquatement pour les aider à améliorer leur sort.
    Je n'ai pas parlé beaucoup de cela, mais je serais ravie de répondre à vos questions à ce sujet.
(1605)
    Je tiens à mentionner ici qu'il existe la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes des NU. Les processus relatifs à cette convention ont permis de faire certaines constatations importantes sur les progrès du Canada au chapitre du soutien des populations vulnérables de femmes et de filles, dont les Autochtones.
    Nous avons aussi la Convention relative aux droits de l'enfant des NU. Les mécanismes prévus dans cette convention ont eux aussi permis de souligner la capacité du Canada de planifier et de prendre des mesures en vue d'éliminer les profondes inégalités qui touchent les femmes et les filles.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup de votre témoignage.
    Nous allons maintenant continuer avec Mme Flanagan.
    Vous disposez de 10 minutes.

[Traduction]

    C'est avec grand plaisir que je suis ici. Je suis très reconnaissante de l'occasion qui m'est donnée d'aborder un sujet si important avec le comité.
    Je m'appelle Jennifer Flanagan, et je suis la présidente et directrice générale d'Actua. Actua est un organisme de bienfaisance national qui représente 33 organisations universitaires et collégiales de partout au Canada. Avec nos membres, nous touchons 225 000 jeunes âgés de 6 à 16 ans dans 500 collectivités de l'ensemble des provinces et des territoires. Nous les faisons participer à des activités interactives et pratiques liées aux sciences, à l'ingénierie et aux technologies, et c'est sur quoi mes commentaires porteront aussi. Nous organisons notamment des ateliers dans les écoles, des clubs permanents, des camps d'été et d'autres initiatives de mobilisation communautaires.
    Au cours de 20 années passées à exécuter des programmes, nous avons élaboré et amélioré un modèle de prestation de programmes qui mobilise les enfants à un jeune âge, avant qu'ils commencent à faire des choix de carrière et à déterminer leur avenir et les possibilités qui s'offrent à eux. Compte tenu de nos recherches formelles, nous savons que nos programmes ont influé sur les attitudes et les comportements des jeunes et les ont motivés à envisager des études et une carrière dans le domaine des sciences, de l'ingénierie et de la technologie. De façon plus générale, il est important de souligner que nous jouons un rôle essentiel dans l'amélioration des connaissances des jeunes Canadiens en matière de sciences et de technologie, et nous savons que c'est ainsi que la prochaine génération de Canadiens sera présente dans tous les secteurs économiques.
    Nous savons que les femmes sont encore très sous-représentées dans le domaine des sciences, de l'ingénierie et de la technologie. Même si des progrès ont été réalisés dans certains domaines scientifiques, comme la santé et la médecine, la présence des femmes est très faible dans de nombreux autres, comme l'ingénierie, les sciences informatiques, la physique et les mathématiques. Cette sous-représentation est particulièrement évidente dans les postes de direction de ces secteurs, qui sont traditionnellement plus rémunérateurs et, par le fait même, mieux placés pour améliorer la situation économique des filles et des femmes. Les femmes sont aussi largement sous-représentées dans les métiers.
    Compte tenu du nombre important d'occasions d'emploi qu'il y aura dans ces domaines au cours des prochaines années, cette sous-représentation présente un problème important sur le plan de la prospérité économique future des filles. De plus, notre pays ne pourra tout simplement pas atteindre son plein potentiel en matière d'innovation si les femmes ne participent pas dans une mesure équivalente dans ces domaines. Afin d'améliorer la situation économique des filles, nous devons les mobiliser et leur montrer qu'il existe une place pour elles dans ces domaines critiques. Des stratégies sont maintenant requises pour combler l'écart entre les sexes dans ces secteurs. Cela assurera l'autonomie financière des femmes et permettra d'améliorer leur prospérité économique, mais en plus, de telles stratégies contribueront à la création d'une main-d'oeuvre plus importante et plus diversifiée.
    Le programme national d'Actua pour les filles a été élaboré en 1999 pour répondre à une diminution notable de la participation des filles à nos camps partout au pays. Nous observions aussi des changements négatifs dans l'attitude, la confiance et l'intérêt manifestés par les filles lorsqu'elles passaient de nos programmes destinés aux écoles primaires, jusqu'à la 4e année, à nos programmes destinés aux écoles intermédiaires, jusqu'à la 6e et 7e année. Cela était particulièrement évident dans les interventions auprès des groupes de filles plus à risque.
    Les commentaires des parents en provenance de tous les coins du Canada indiquaient également que ceux dont les filles optaient pour les domaines des sciences, de l'ingénierie et de la technologie se butaient toujours à des stéréotypes.
    À partir de nos observations et de nos expériences ainsi que des recherches soutenues que nous avons effectuées sur la vie et les réalités des filles, nous avons mis au point un modèle de programmes destinés exclusivement aux filles qui permet de procurer à celles-ci un environnement sûr, exempt de jugements et divertissant où elles ont la possibilité d'explorer, de créer et d'entrer en interaction avec des personnes qui représentent, pour elles, des modèles positifs. Nos programmes, qui comptent des clubs et des camps pour filles seulement, sont conçus pour permettre aux filles d'acquérir des compétences essentielles dans leur vie personnelle et professionnelle, comme le travail d'équipe, la collaboration, la résolution de problèmes, la pensée critique, les connaissances financières et les aptitudes techniques. Je souligne aussi que nos programmes visent aussi les filles éprouvant des problèmes économiques et sociaux, particulièrement les filles autochtones. Nous nous penchons de façon importante sur la situation des jeunes autochtones d'un bout à l'autre du pays.
    Notre programme national pour les filles vise d'abord et avant tout à accroître la confiance en soi et l'autonomie des filles, qui sont les plus importants facteurs de réussite. Il leur permet aussi de vivre une expérience positive dans un établissement d'enseignement universitaire ou collégial, ce qui est essentiel pour les encourager davantage à envisager des études postsecondaires.
    Une des plus importantes constatations tirées de nos premières recherches est le fait que, même si les participantes à nos programmes améliorent leurs connaissances et compétences en matière de sciences et de technologie et s'y intéressent davantage, elles n'envisageaient pas davantage de faire des études dans ce domaine ou d'y faire carrière. En l'absence de modèles positifs féminins, même si les filles s'intéressaient aux sciences, elles ne se voyaient pas travailler dans ce domaine.
(1610)
    Nous avons lancé un programme national de mentorat pour les filles en réaction à cette recherche en 2003. Les participantes à nos programmes interagissent maintenant régulièrement avec des femmes qui sont pour elles des modèles et à qui elles peuvent s'identifier. Nous voulons que les filles qui terminent nos programmes sachent que leur avenir nous tient à coeur et qu'il y a une place pour elles dans les domaines de la science, de l'ingénierie et de la technologie.
    Nous déployons aussi de grands efforts pour souligner aux parents et aux fournisseurs de soins l'importance d'encourager les filles à étudier les mathématiques et les sciences et de leur montrer que ces domaines peuvent les mener à de nombreuses carrières et expériences de vie excitantes, et non pas seulement aux sciences pures.
    L'atteinte de ces objectifs prépare les jeunes filles à explorer pleinement leur potentiel dans les sphères scolaire et professionnelle et à devenir des leaders dans le cadre de leurs études et de leur carrière dans le domaines des sciences, de la technologie et de l'ingénierie. Cela constitue une importante contribution à l'autonomisation des filles, qui seront en mesure d'assurer leur autonomie financière.
    La participation précoce est absolument essentielle. Beaucoup d'activités de promotion des études postsecondaires et des carrières visent les adolescents. La recherche révèle — et nous l'avons aussi observé personnellement — qu'il est déjà trop tard à ce moment-là pour la plupart des filles. En fait, la recherche montre que les filles déterminent très tôt ce que, d'après elles, elles seront capables ou ne seront pas capables de faire plus tard. C'est à l'école primaire ou avant qu'elles doivent vivre des expériences positives à cet égard pour changer de vision.
    Compte tenu de notre expérience, de nos recherches et du fait que nous avons réussi à mobiliser des milliers de filles au cours des 20 dernières années, voici les principales recommandations que nous faisons au comité.
    D'abord, nous devons investir dans les programmes de sensibilisation axés sur les sciences, la technologie, l'ingénierie et les mathématiques conçus pour promouvoir les connaissances scientifiques et nous devons encourager, inspirer et inciter les filles à étudier dans ces importants domaines. Le soutien devrait viser particulièrement les programmes touchant les filles à un jeune âge, avant qu'elles ne prennent une décision définitive concernant leurs études et leur carrière. Ces programmes jouent un rôle important dans l'accroissement de la résilience des filles et des jeunes femmes et dans leur accession à l'autonomie financière. Cela constituera une importante contribution à la prospérité économique globale et à l'indispensable diversification de la main-d'oeuvre.
    Ensuite, nous devons soutenir financièrement les programmes de mentorat conçus pour permettre aux jeunes filles de faire connaissance avec des femmes scientifiques et ingénieures, qui pourront partager leur vécu et contribuer à dissiper les stéréotypes persistants sur le rôle des femmes dans ces domaines au Canada.
    Enfin, nous devons soutenir les personnes qui élèvent les filles — les parents, les fournisseurs de soins, les écoles, les organisations communautaires et le secteur privé — et leur souligner l'importance d'aider les filles au moyen de programmes de sensibilisation informels offerts à un jeune âge.
    En guise de conclusion, j'espère que ma déclaration a bien souligné l'importance de donner aux filles l'occasion de vivre des expériences positives qui leur permettront de voir leur propre avenir d'un bon oeil. Les investissements liés à cette question permettront de combler l'écart entre les sexes, d'élargir la main-d'oeuvre et, fait le plus important, d'atteindre l'objectif global du comité consistant à améliorer les perspectives économiques des filles et des femmes.
    Merci.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
     Nous allons maintenant passer à la période des questions.
    Madame Truppe, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à vous remercier toutes les deux d'être avec nous aujourd'hui. Votre expertise est très importante et nous permettra de conclure notre étude.
    Madame Flanagan, je n'ai jamais entendu parler d'Actua. Il semble que vous avez fait un excellent travail au sein de l'organisation. Toutes vos réalisations sont impressionnantes.
    Si je comprends bien, le gouvernement fédéral soutient partiellement votre organisation. Est-ce le cas?
    Oui, en effet.
    Quels éléments soutient-il? Comment est-ce que cela fonctionne?
    Nous bénéficions du soutien de l'Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l'Ontario. Nous recevons aussi une petite subvention par l'intermédiaire du CRSNG et une autre subvention des IRSC pour nos activités de promotion de la santé et de la recherche en santé.
(1615)
    Excellent.
    Qui d'autre finance l'organisation? Vous fiez-vous seulement sur les dons ou recevez-vous l'aide d'entreprises?
    Il s'agit principalement de partenaires d'affaires qui investissent dans notre travail et qui gagneraient à voir la main-d'oeuvre des sciences et de la technologie prendre de l'expansion.
    Nos plus importants bailleurs de fonds du milieu des affaires sont GE Canada et la Fondation Suncor Énergie.
    Excellent: GE Canada et Suncor.
    Je crois que vous avez mentionné que vous comptez 33 organismes. Est-ce correct?
    Oui, exactement.
    Comment est-ce que cela fonctionne? Quels sont ces organismes?
    Les 33 organismes sont rattachés aux universités et aux collèges. Ils se trouvent toujours au sein de l'école d'ingénierie et de sciences et sont habituellement soutenus par le doyen de l'ingénierie, par exemple. Les universités assurent le soutien administratif des organismes et doivent assurer le recouvrement des coûts.
    Comment mesurez-vous le succès des projets?
    Nous effectuons de nombreuses mesures et évaluations à l'échelle locale et nationale. Nos membres responsables de la prestation évaluent régulièrement leurs programmes de camps, par exemple. Il s'agit d'une évaluation formative. Ils s'interrogent constamment sur les activités qui fonctionnent et celles qui ne fonctionnent pas ainsi que sur la réalisation des objectifs d'apprentissage. C'est une évaluation continue.
    Nous avons également effectué une recherche formelle. Nous avons demandé à un chercheur de l'Université d'Ottawa de mener une évaluation triennale formelle des conséquences de nos programmes, avant et après la participation, en vue d'examiner particulièrement les valeurs intrinsèques de la confiance en soi, de l'intérêt envers les sciences et la technologie et la connaissance de ces domaines, et de déterminer le comportement futur. Les résultats étaient assez positifs, d'avant la participation à après.
    Fait intéressant, les filles qui, au début du programme, avaient le plus faible niveau de confiance en soi sont celles qui se sont améliorées le plus à cet égard tout au long de leur participation.
    C'est excellent. Il semble que vous faites un excellent travail. Je reconnais que nous sommes sous-représentées dans les postes de direction, alors j'apprécie beaucoup ce que vous faites.
    Vous parliez de votre façon de mesurer les réussites et les échecs. Quelle est, selon vous, votre plus grande réalisation? Parmi vos programmes, lequel fonctionne le mieux?
    Au cours des 15 dernières années, nous avons joué avec les éléments les plus importants. Je crois que le fait d'avoir un environnement sûr dans lequel les filles peuvent explorer, faire des erreurs et apprendre de nouvelles connaissances avec leurs pairs et de faire appel à des mentors constitue la formule gagnante pour la plupart des filles et leurs parents. C'est l'environnement dans lequel elles ont l'occasion de rencontrer des modèles de comportement positifs.
    Je suis certaine que vous comprenez l'objet de notre étude, mais je vais seulement le répéter. Il s'agit de la participation à l'économie, à la prospérité et au leadership.
    Dans le même ordre d'idées, compte tenu du mandat de Condition féminine Canada et du fait que votre financement provient d'un autre ministère, quelles mesures devrait prendre Condition féminine selon vous pour tenter d'améliorer directement la participation des filles à l'économie, leur prospérité et leur leadership, au Canada?
    Nous avons pris un engagement à long terme, et nous allons continuer nos activités jusqu'à ce qu'elles ne soient plus nécessaires. C'est extrêmement difficile de le financer. En tant qu'organisation, nous avons bien réussi à obtenir les investissements dont nous avons besoin pour répondre aux demandes de la collectivité. Le programme pour les filles est le plus difficile à financer.
    Pour ce qui est des entreprises, leur intérêt varie. Ce n'est pas qu'elles ne sont pas intéressées, mais elles ont d'autres priorités.
    Je crois que l'investissement dans les programmes de mobilisation précoce des filles en vue de leur présenter autrement les carrières et les occasions d'avenir pourrait avoir d'importantes retombées.
    Merci.
    Combien me reste-t-il de temps?
    Vous avez une minute et trente secondes.
    C'est parfait.
    D'après vous, comment le ministère de la Condition féminine du Canada peut-il faire participer les hommes et les garçons à l'amélioration des perspectives pour les filles canadiennes sur le plan de la prospérité économique, du leadership et de la participation?
(1620)
    C'est une excellente question.
    Je vais parler de notre propre expérience. Nous créons des programmes uniquement pour les filles dans le cadre desquels la plupart des animateurs sont des femmes, compte tenu du manque de modèles de comportement positifs dont il a été question.
    Nous donnons une formation de sensibilisation sexospécifique. Celle-ci vise les 600 étudiants de premier cycle qui animent nos programmes partout au pays. Nous en embauchons environ 600. La moitié sont des hommes, qui suivent la même formation. On vise simplement à les sensibiliser à la façon dont les filles perçoivent ces domaines et au fait qu'elles sont traitées différemment dans les classes. Je crois qu'il y a ici un avantage non prévu, mais très positif. Ce sont des personnes qui occuperont des postes de direction dans les domaines de l'ingénierie et des sciences et qui seront déjà sensibilisées à cette situation. Je crois qu'il est important de saisir toute occasion de sensibiliser les hommes et les garçons.
    Excellent. Je vous remercie de votre intervention.
    Très rapidement...
    La présidente: Madame Truppe...
    Mme Susan Truppe: Oh, c'est terminé? D'accord.

[Français]

    Je suis désolée, je vais être obligée de vous arrêter: votre temps est écoulé.
    C'est maintenant au tour des députés de l'opposition officielle.
    Madame Ashton, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Turpel-Lafond et madame Flanagan de vos témoignages d'aujourd'hui.
    Je partagerai le temps qui m'est accordé avec ma collègue, Anne-Marie Day, mais je veux d'abord poser quelques questions. Je m'adresse d'abord à Mme Turpel-Lafond.
    Ma question touche une partie de votre travail et le témoignage que d'autres invités ont présenté au comité quant à la réalité de nombreuses filles autochtones prises en charge. Le gouvernement fédéral doit-il augmenter son financement dans les services aux familles, particulièrement dans les réserves et pour ceux qui interviennent auprès des jeunes dans les réserves?
    Vous connaissez la situation en Colombie-Britannique, et nous savons évidemment qu'elle est intimement liée aux occasions qui se présentent aux filles plus tard au cours de leur vie. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet.
    Je crois que c'est un problème très important en Colombie-Britannique et partout ailleurs au Canada. J'ai aussi été présidente du Conseil canadien des défenseurs des enfants et des jeunes, alors je connais bien la situation des défenseurs des droits au Canada en ce qui concerne les enfants autochtones et le système de protection de l'enfance. Les enfants autochtones sont nettement surreprésentés, particulièrement dans le cas des filles.
    Les raisons de leurs interventions auprès du système de la protection de l'enfance touchent profondément les désavantages socioéconomiques auxquels font face les familles autochtones. Ces problèmes persistent: pauvreté extrême, manque d'occasions et absence d'une stratégie fédérale coordonnée et précise qui permettrait de soutenir les filles et les femmes et d'encourager leur résilience. En effet, le gouvernement fédéral a demandé récemment à un groupe national de se pencher sur l'enseignement dispensé aux Autochtones dans les réserves, de la maternelle à la 12e année, et d'importantes inégalités et un énorme sous-financement ont été observés. Cela entraîne de très mauvais résultats.
    Ce que je veux dire, c'est que l'enfance passe vite — même pas 188 semaines. Si nous n'investissons pas, que nous mettons sur pied des systèmes inadéquats et que nous n'appuyons pas les gens, ils ne réussiront pas. Dans le cas des enfants et des jeunes autochtones du Canada, nous voyons cela comme une quasi-tragédie nationale. Je ne dis pas qu'aucun effort n'est déployé, mais il existe d'importantes inégalités sur le plan du soutien personnel et organisationnel permettant aux femmes et aux filles de réussir autant que leurs pairs. Il faut une intervention fédérale ciblée et volontaire pour remédier à la situation.
    Merci beaucoup
    Madame Flanagan, un des points que vous avez soulevés est l'importance du mentorat et de l'occasion pour les jeunes filles de voir des femmes travailler dans les domaines des sciences, de la technologie et de l'ingénierie. Un autre témoin nous a affirmé qu'un des problèmes auxquels font face bon nombre de femmes dans ces domaines est la conciliation travail-famille.
    Comme nous le savons, bon nombre de femmes au Canada n'ont pas accès à un service de garde abordable. Nombreuses sont celles qui sont en âge de procréer ou qui ont de jeunes enfants et qui abandonnent ces sphères d'emploi, réduisant ainsi le nombre de mentors pour les jeunes filles.
    Selon vous, madame Flanagan, l'accès à un service de garde abordable est-il essentiel pour maintenir les femmes en poste dans ces domaines et cette solution permettrait-elle d'augmenter le nombre de modèles féminins pour les filles dans ces domaines?
(1625)
    Compte tenu de mon travail, ce n'est pas vraiment mon domaine de spécialité, mais nous consultons des études parce que la question de la relève nous préoccupe vraiment. Nous motivons les filles à choisir ces domaines et cette direction, et nous voulons nous assurer que la situation est positive, et nous collaborons avec les organismes qui travaillent en aval.
    Auparavant, les femmes travaillant dans ces domaines quittaient leur emploi dès l'université ou peu de temps après avoir intégré le marché du travail, mais maintenant, comme vous l'avez mentionné, elles le font plutôt au début de la trentaine. Je suppose que c'est l'âge où elles fondent leur famille.
    Croyez-vous qu'il s'agit d'un problème? J'entends beaucoup dire que c'est le cas. Dans les cercles et les réseaux où j'évolue, c'est un problème. Je crois qu'à cela s'ajoutent beaucoup d'autres problèmes encore associés à ces domaines sur le plan du traitement général des femmes, et non pas seulement de la question des services de garde — il existe aussi un problème plus général quant aux occasions ou à l'absence de celles-ci. Encore une fois, je me fonde sur ce que j'ai entendu dans le cadre de mon travail au cours des 20 dernières années. Je crois certainement que la question des services de garde constitue un problème, et la conciliation travail-famille aussi, mais cela ne s'arrête pas là.

[Français]

    Ma question, qui sera brève, s'adresse à Mme Turpel-Lafond.
     On sait qu'il y a une corrélation entre la maltraitance et le coût économique — combien il en coûte. Le Canada s'est engagé à réduire et à éliminer la pauvreté chez les enfants il y a maintenant plusieurs années. Le taux de pauvreté est passé de 11 à 9 p. 100. Il y a donc encore beaucoup de pauvreté.
     Qui finance votre organisme? Le gouvernement canadien a-t-il réduit le financement pour pallier la pauvreté chez les jeunes, ceux qui ont moins de 19 ans?

[Traduction]

    Eh bien, je suis une agente de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, alors je surveille le système de protection de l'enfance. En Colombie-Britannique, le taux de la pauvreté infantile est d'environ 12 p. 100, soit un peu plus élevé que le pourcentage national.
    Pour ce qui est des interventions efficaces pour réduire la pauvreté chez les enfants, je crois que tout le monde s'entend assez en ce qui a trait à la Mesure du panier de consommation et au fait de donner aux parents une aide sociale adéquate pour qu'ils puissent répondre aux besoins immédiats de leurs enfants et un montant d'argent adéquat pour se loger, manger des aliments sains et combler les besoins fondamentaux. Tout cela est nécessaire.
    À de nombreux endroits, particulièrement en Colombie-Britannique, le taux d'aide sociale est inférieur à ce qui est nécessaire pour assurer le bon développement de l'enfant sur le plan de l'accès à des aliments sains de qualité, et de nombreux enfants ont recours aux banques alimentaires par l'intermédiaire de leur parent ou de leur fournisseur de soins. Au chapitre du soutien direct de l'État, il existe aussi des problèmes d'aide sociale.
    Par ailleurs, il y a la question de la mobilité sociale: pourquoi les enfants issus de famille à faible revenu réussissent-ils moins bien à l'école primaire et secondaire et ne font-ils pas d'études postsecondaires? L'éducation est déterminante pour qui veut atteindre un niveau de vie adéquat et pour assurer la nature démocratique de notre société, mais le système n'est pas efficace. C'est un autre problème que d'autres soutiens...

[Français]

    Pardonnez-moi, madame Turpel-Lafond, je suis obligée de vous arrêter ici. Je vous remercie beaucoup. Mme Day a écoulé son temps de parole.
    Je vais maintenant céder la parole aux députés du gouvernement.
    Madame Ambler, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier nos deux invités de leurs témoignages et de l'excellent travail qu'elles font auprès des enfants et des jeunes au Canada.
    Madame Flanagan, Actua oeuvre-t-elle auprès des jeunes ou des filles autochtones dans les collectivités rurales?
    Globalement, dans le cadre de son mandat qui consiste à rejoindre les garçons et les filles, Actua mobilise 225 000 jeunes par année dans 500 collectivités. Il est important pour nous d'atteindre les jeunes qui ne sont visés par aucune autre organisation, c'est-à-dire les jeunes sous-représentés.
    Notre plus grand programme est le programme national pour Autochtones, qui touche 30 000 jeunes Autochtones par année dans 200 collectivités de partout au pays. Il a une très grande portée géographique et s'adresse aussi à des collectivités rurales et éloignées. Il est important pour nous de joindre même les plus petites collectivités du pays, accessibles uniquement par avion ou par bateau.
(1630)
    C'est excellent.
    Est-ce que le financement de l'Agence canadienne de développement économique du Nord vous aide à cet égard?
    Oui, en effet.
    Pouvez-vous nous en parler un peu?
    Oui. En fait, j'ai oublié de le mentionner avant. Nous bénéficions d'une subvention qui nous aide à mettre en oeuvre les programmes dans les trois territoires. L'année dernière, 35 collectivités du Nunavut, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon ont participé à nos programmes. Encore une fois, ce sont les mêmes types de programmes, mais ils sont davantage axés sur la situation des collectivités. D'importants efforts sont déployés pour faire participer les chefs et les aînés locaux.
    Excellent. C'est fantastique.
    Vous avez mentionné FedDev Ontario. C'est quelque chose que je connais un peu. Le financement viserait-il des programmes d'alphabétisation ou de promotion des STIM?
    Seulement les STIM. Ce sont les STIM qui touchent le plus l'innovation et le développement économique. Il est donc question de la science au service des affaires, de l'entrepreneuriat et de sujets semblables.
    Et c'est toujours pour les jeunes?
    Toujours pour les jeunes âgés de 6 à 16 ans, et toujours les STIM.
    Après y avoir réfléchi quelques minutes, je comprends que CRSNG renvoie au Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.
    Je ne suis pas très habile avec les acronymes. Je ne sais pas à quoi renvoie IRSC.
    Ce sont les Instituts de recherche en santé du Canada.
    Pouvez-vous nous parler des programmes ou des organismes qui financent Actua?
    Les IRSC nous versent deux subventions, dont une vise à soutenir notre programme national pour la santé, donc pour un mode de vie sain et la recherche en santé. Nous transmettons aux jeunes des messages sur la santé avec un point de vue scientifique. Au lieu de leur dire de faire de l'exercice, de se brosser les dents et de se laver les mains, nous leur présentons les données scientifiques qui sous-tendent ces activités. Le fait d'aborder ces sujets différemment est essentiel dans notre travail auprès des Autochtones. Les IRSC nous permettent aussi de faire la promotion de la recherche en santé au Canada et de jumeler les jeunes à des mentors. Ils nous versent aussi une petite subvention pour travailler dans le Nord.
    Votre travail repose-t-il sur la théorie selon laquelle, si vous expliquez à quelqu'un pourquoi il fait quelque chose, il est plus susceptible de faire le bon choix?
    C'est notre théorie.
    Cela a du sens.
    Cela a certainement un impact différent auprès des jeunes — au lieu de leur dire toujours les mêmes...
    Vous feriez cela au lieu de simplement leur dire quoi faire.
    Absolument.
    Le programme axé sur la santé à l'intention des filles est particulièrement pertinent. Nous parlons entre autres de l'image du corps et d'une alimentation saine, toujours d'un point de vue scientifique — par exemple, c'est pour cela que votre corps a besoin de gras, voilà ce à quoi ressemble un mode de vie sain, etc. Nous abordons un sujet que nous connaissons tous, mais d'un angle différent.
    Excellent. J'aime ça.
    Et qu'en est-il du CRSNG?
    Le CRSNG nous soutient de façon générale à l'échelle nationale. Encore une fois, il s'agit d'une subvention relativement petite. Une petite partie est affectée au Nord, et l'autre, au soutien général des programmes.
    Vous avez aussi mentionné un soutien du secteur privé, soit de Suncor, de l'Impériale et de Shell. Que font-ils? Est-ce principalement du mentorat?
    Non. Ils nous fournissent une aide financière, mais ils visent aussi le renforcement de la capacité au sein de l'organisation. Ils nous fournissent aussi des mentors, si possible. La plupart de nos bailleurs de fonds s'engagent activement.
    J'ai bien pensé que c'était le cas.
    Pouvez-vous me dire depuis combien de temps vous travaillez pour Actua, comment vous avez commencé et quelle est votre expérience? Je suis curieuse de savoir si vous êtes ingénieure ou mathématicienne.
    Je fais partie de la petite équipe d'étudiants de niveau universitaire qui ont mis sur pied l'organisation. Nous célébrerons le vingtième anniversaire de notre organisation l'an prochain.
    Félicitations
    Merci.
    Vous venez aussi de nous dire quel âge vous avez.
    Oui, j'avais 18 ans lorsque j'ai commencé!
    Nous avons eu des débuts très rudimentaires. Nous étions des étudiants d'université qui croyaient que ce type de programmes constituait un besoin. Selon nous, ce serait excellent de réaliser cela à l'échelle nationale, et c'est comme cela que nous avons commencé.
    C'est fantastique.
    J'ai un diplôme en sciences et j'ai obtenu un MBA par la suite.
    Fantastique. Merci beaucoup.
(1635)
    Merci de votre intérêt.
    Ai-je encore du temps?
    Vous avez une minute.
    Parfait.
    Je veux vous poser des questions sur le modèle pour filles seulement et vous demander pourquoi vous le jugez important. Même si nous nous écartons de notre champ de compétence, particulièrement ici au comité ou au gouvernement, nous avons discuté avec d'autres témoins des modèles pour filles seulement dans le cadre de l'enseignement et d'autres programmes. Pourquoi est-ce important, d'après vous?
    Cela est fondé uniquement sur la recherche que nous avons effectuée à l'interne. Nous avons demandé à des filles ce qu'elles préfèrent, quel est leur niveau d'aise et comment elles voudraient participer. Dans le contexte des sciences, de la technologie et de l'ingénierie, elles préféraient de loin un environnement pour filles seulement.
    Même à un jeune âge?
    Oui. Elles suivent souvent un enseignement mixte au moment où elles participent au programme, mais d'après les réponses des parents et des filles... Et en ce qui a trait aux listes d'attente, il n'est jamais difficile de remplir les camps pour filles seulement. La demande existe, manifestement.
    C'est bon à savoir. C'était intéressant de vous entendre parler des années scolaires et du fait que vous avez remarqué qu'un déclic se fait entre la quatrième et la sixième année.

[Français]

    Je dois vous arrêter ici. Je suis désolée. Votre temps est écoulé. Merci.
    Madame Sgro, il vous reste environ cinq minutes. Vous pouvez y aller.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Flanagan et madame Turpel-Lafond, de l'intérêt que vous portez à ces questions.
    Madame Turpel-Lafond, pourriez-vous m'expliquer quelque chose, s'il vous plaît? Un des problèmes des familles d'accueil qui m'ont toujours préoccupée est la situation des jeunes lorsqu'ils atteignent l'âge de 19 ans. Dans quelle mesure prépare-t-on les jeunes avant de les laisser à eux-mêmes et comment le fait-on en Colombie-Britannique, à titre d'exemple?
    Un des problèmes est la transition à l'âge adulte. En Colombie-Britannique et dans la plupart des provinces, la transition se fait à 18 ou 19 ans. Dans ma province, c'est à 19 ans. Toutefois, la recherche et notre expérience auprès des familles canadiennes nous révèlent que l'adolescence se poursuit jusqu'au début de la vingtaine. La plupart des gens disent qu'elle prend fin à 24 ans.
    Très peu de mesures sont prises avant qu'un enfant ne quitte le système de protection de l'enfance. D'après nos enquêtes et notre travail auprès de jeunes qui ne peuvent plus avoir recours au système de la protection de l'enfance, bon nombre d'entre eux ne comprennent pas le système des services sociaux. Ils passent de la prise en charge à l'aide sociale.
    Le soutien personnel et organisationnel qu'un enfant et sa famille recevraient, disons, pour faciliter l'accès aux études postsecondaires ou aider un enfant qui éprouve des difficultés dès le départ n'est pas offert aux enfants pris en charge. Il existe donc de très grandes lacunes et inégalités à cet égard. Les services provinciaux sont inadéquats, et les services fédéraux, inexistants, évidemment.
    Par rapport aux filles, les garçons sont-ils traités différemment dans les familles d'accueil?
    Non. Il n'y a pas vraiment de différence. Le problème, c'est que nous faisons face à un taux élevé de grossesses chez les adolescentes et que, par conséquent, le ratio de dépendance, l'obligation de jouer le rôle de mère à un jeune âge... Le fait d'être mère et de ne pas avoir terminé ses études, de n'avoir aucun soutien personnel au sein d'une famille et de ne pas être encouragée dans son rôle de parent à un jeune âge... Si elles gardent l'enfant, ce que les filles et les femmes font souvent... Je crois qu'il existe des problèmes continus quant au fait d'offrir des programmes adéquats aux jeunes pris en charge, de les encourager à participer, de les écouter et de les soutenir.
    Il y a aussi des jeunes qui vivent seuls avant d'avoir atteint la majorité. Autour de 16 ou 17 ans, ils peuvent toucher de l'aide sociale et vivre de façon indépendante. Dans le cadre de notre travail, nous observons beaucoup de risques liés à cette situation sur le plan de la sécurité, du bien-être et de l'absence de liens sociaux. C'est un groupe très vulnérable dont le revenu figure sans surprise parmi les plus faibles.
    Effectivement, cela présenterait de grandes difficultés. C'est indéniable.
    Madame Flanagan, du point de vue d'une jeune femme, croyez-vous que les sciences et la technologie sont encore perçues comme des domaines d'hommes? C'est encore probablement dix pour un... il y a dix hommes pour chaque femme qui termine ses études en sciences ou ingénierie.
    C'est ce que nous observons. Le stéréotype est encore très répandu, ce qui est assez incroyable. Un des plus gros problèmes auxquels nous faisons face est de justifier notre travail, car de nombreuses personnes croient que la situation a changé, compte tenu du nombre d'années que nous avons consacrées à la situation.
    Il y a eu certaines améliorations. Comme je l'ai déjà mentionné, dans certains domaines scientifiques liés à la santé, comme la médecine, les femmes ont fait une percée considérable. Malheureusement, ce n'est pas vraiment le cas en ingénierie et dans les sciences informatiques.
    En troisième année, certains ont déjà le stéréotype en tête, à moins que leur mère ou une tante ou leur père ait suscité leur intérêt.
(1640)
    Comment pouvons-nous les atteindre encore plus tôt? Je suppose que vous pensez à ce que les enfants regardent à la télévision, au rôle des personnages des dessins animés, par exemple. Nous avons peut-être besoin de voir plus de scientifiques et plus d'ingénieurs, entre autres.
    Certains de mes collègues croient que nous devrions commencer dans les cours prénataux, car cela touche beaucoup l'éducation des parents.
    Il est évident que nous pouvons influencer des filles de deuxième ou troisième année. Leur perception de ce qu'elles peuvent faire ou ne pas faire peut changer. Elles ont déjà leur propre idée, mais on peut la changer. C'est pourquoi nous travaillons si fort auprès des parents. Nous savons qu'ils sont toujours les premiers à influencer la vie des filles.
    Eh bien, ce serait certainement...

[Français]

    Je dois vous arrêter. Le temps du présent groupe de témoins est malheureusement écoulé. Je les remercie de leur présence. Merci beaucoup.
     Je suspends la séance pour une minute, afin de nous permettre d'accueillir convenablement nos deux prochains témoins.
(1640)

(1645)
    Nous poursuivons notre séance.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Tout d'abord, nous entendrons par vidéoconférence, Mme Claudia Mitchell, de l'Université McGill, professeure au Département d'études intégrées en éducation.
    Bienvenue, madame Mitchell.
    Ensuite, nous aurons au téléphone Mme Danforth, directrice générale du Native Youth Sexual Health Network.
    Vous aurez droit à 10 minutes, chacune. Ensuite, nous allons passer à une période de questions.
    Madame Mitchell, vous avez la parole et disposez de 10 minutes.

[Traduction]

    Merci et merci beaucoup de m'avoir trouvé une place dans l'horaire. C'est très important.
    Je vais lire ma déclaration pour ne pas dépasser les dix minutes.
    Je tiens à féliciter le comité d'étudier l'importante question des perspectives économiques des filles canadiennes, et je remercie le comité de m'avoir invitée à présenter un exposé aujourd'hui.
    J'ai eu l'occasion de lire au moins une partie de l'information déjà présentée. Pour prendre le moins de temps possible, je tenterai de ne pas répéter ce qui a déjà été mentionné. Cela dit, je veux souligner également que ce qui m'a le plus impressionnée dans ma lecture, ce sont les exposés sur les filles autochtones du Canada, concernant la pauvreté.
    Je me présente devant vous aujourd'hui comme chercheure universitaire dans le domaine de la jeunesse féminine à titre de discipline universitaire. En 2008, j'ai fondé avec deux collègues un journal international avec comité de lecture intitulé Girlhood Studies, qui, autant que je le sache, est le seul journal universitaire axé sur les filles sans qu'elles soient une sous-catégorie des enfants, des jeunes ou des femmes.
    Dans le cadre de notre mandat qui vise une intervention auprès des filles, pour les filles et à propos des filles, nous avons tenu des consultations internationales sur divers sujets socioéconomiques: la jeunesse féminine dans les pays nordiques et la nouvelle situation des filles selon l'évolution de l'État-providence; la jeunesse féminine en Russie et les nouvelles économies de marché; et une analyse comparative de la jeunesse féminine en Australie et au Canada. Nous soulignerons cette analyse comparative à McGill, dans le cadre d'une conférence tenue à l'université sur la jeunesse féminine entre le 10 et le 12 octobre, ce qui coïncidera avec la première Journée internationale des filles.
    Je suis également ici devant vous à titre d'intervenante dans ce que l'on pourrait appeler le milieu global de la jeunesse féminine. J'ai travaillé pendant trois ans sur la campagne Because I am a Girl de Plan International et j'ai mené de nombreuses études sur l'éducation des filles en Afrique du Sud, en Gambie, en Éthiopie, en Zambie et au Swaziland, et j'ai récemment mené une évaluation pour l'Initiative des Nations Unies en faveur de l'éducation des filles.
    Ce que j'aimerais faire maintenant, c'est vous présenter quatre aspects pour lesquels j'ai quelques recommandations fondées sur mon travail dans divers contextes.
    Ma première recommandation à l'intention du comité touche le nouveau programme de recherche de Condition féminine et d'autres organismes du Canada ainsi que l'importance de la participation directe des filles et des jeunes femmes à la recherche. Le début des années 1990 a peut-être été l'âge d'or du soutien pour les filles au Canada. L'ACDI a grandement soutenu les programmes pour les filles, et le Canada était bien connu pour plusieurs études clés. La première était l'étude « A Capella » sur les adolescentes menée par la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, et l'autre, le sondage « J'ai des choses à dire... Écoutez-moi! », du Conseil consultatif sur la situation de la femme. Ce qui était excitant dans notre travail, c'était les mesures novatrices liées à la mobilisation des filles et ce qu'elles avaient à dire.
    Mes propres recherches partout dans le monde laissent croire que nous devons plus que jamais consulter les filles de partout au pays et fournir du financement pour que de nouveaux chercheurs participent à ces travaux. J'irais jusqu'à suggérer que le comité — votre comité — envisage de formuler des recommandations au Conseil de recherches en sciences humaines du Canada en vue d'établir l'ordre de priorité des travaux liés aux perspectives économiques pour les filles et les jeunes femmes.
    Comme vous le savez peut-être, il a déjà plusieurs priorités. Il est notamment question de recherches sur la situation des Autochtones et l'économie numérique. Aucun de ces projets ne touche les filles et les jeunes femmes, mais si nous ne faisons pas une priorité de la jeunesse féminine, celle-ci passera à travers les mailles du filet. Ce que nous avons appris sur la scène internationale avec ONU Femmes, l'Initiative des NU en faveur de l'éducation des filles et d'autres organismes, c'est que les problèmes doivent être considérés comme des priorités si l'on veut qu'ils restent au programme, et c'est pourquoi j'en ai fait une première recommandation.
    Ma deuxième recommandation touche la situation des études sur la jeunesse féminine dans le contexte des travaux sur les garçons et les jeunes hommes. C'est un domaine délicat dans les régions nordiques, où on estime que les filles surpassent habituellement les garçons dans de nombreux domaines scolaires et professionnels.
    Cependant, comme un autre témoin l'a déjà mentionné, la situation des filles autochtones ne correspond pas aux résultats de cette analyse. Je crois que la Fondation Filles d'action a aussi souligné les nouvelles études sur les échecs scolaires au Québec et a laissé entendre que les travaux sont beaucoup plus complexes. Je souhaite recommander au comité de faire son possible pour ne pas mêler la situation des filles à celle des garçons au moment d'attribuer des fonds.
(1650)
    Beaucoup d'information révèle que les hommes et les femmes doivent s'allier avec les filles et les femmes dans le cadre de leur travail, en ce qui a trait particulièrement à la violence associée au sexe de la personne et que le Canada est en bonne position pour exercer son leadership dans l'avancement des études sexospécifiques, du point de vue des garçons, des filles et des relations. Nous devons soutenir les garçons et les filles et nous avons besoin de bourses d'études et de nouvelles lignes directrices stratégiques dans ce domaine. Cela a fait l'objet d'un débat féministe pendant un certain temps. La dernière campagne Because I am a Girl de Plan International mettait l'accent sur la place des garçons dans l'optique de la situation des filles. C'est sans précédent, mais il ne faut pas arrêter là. Cela veut dire non pas que nous cessons d'explorer la situation des filles, mais que nous avons besoin de modèles et de concepts distincts, mais inclusifs, si nous voulons comprendre la prospérité économique.
    Ma troisième recommandation concerne les filles, la sexualité et le risque de contacter des ITS, particulièrement le VIH-sida. Il s'agit d'un domaine clé de mes propres recherches auprès des jeunes autochtones, garçons et filles, au Canada. Je sais que Jessica Danforth nous en parlera davantage. C'était très important dans le cadre de notre étude du leadership des jeunes autochtones, particulièrement dans le contexte de la colonisation. C'était aussi un élément important de mon travail en Afrique du Sud. Là-bas, le taux d'infection est très élevé, et les filles et les jeunes femmes sont jusqu'à trois fois plus susceptibles que les garçons et les jeunes hommes de devenir séropositives.
    Mon travail est associé à la violence fondée sur le sexe, à la faible estime de soi dans le cadre des relations sexuelles dès le départ et à la capacité d'insister sur le port du condom. Je sais que, au Canada, de nombreuses initiatives s'attachent aux filles et au leadership, mais nous devons nous concentrer davantage sur la sexualité et son lien avec la prospérité économique, et son lien direct avec le leadership.
    Enfin, je veux parler de l'énorme difficulté liée au fait de rassembler la recherche et les programmes concernant les filles au Canada et à l'échelle internationale. D'après la séance actuelle, il est évident que beaucoup de travaux sont réalisés dans le domaine de la jeunesse féminine, mais il y a très peu de coordination, et les résultats ne sont pas centralisés. Cette situation s'explique en partie par la grande portée des enjeux et le fait que l'étude de la vie des filles englobe de nombreux secteurs qui n'ont aucun lien entre eux — la santé, la technologie, l'éducation, les services sociaux, le travail, les études sur les Autochtones, sur l'immigration, etc. Je veux donc que nous prenions en considération le fait que, s'il existe un pays qui peut exercer un leadership en cette ère de l'information et coordonner les travaux relatifs à la jeunesse féminine, c'est bien le Canada.
    À quoi ressemblerait un organisme axé sur les filles? Pourrait-il relever de Condition féminine? Comment pourrait-il concrétiser les rôles mobilisateurs dont j'ai parlé et comment pourrait-il permettre aux filles et aux jeunes femmes d'exercer une fonction consultative? Comment un tel organisme pourrait-il intégrer aussi la question des garçons? La complexité de l'étude des perspectives économiques pour les filles exige ce type de recherche, et il serait important qu'une organisation comme Condition féminine Canada établisse une direction qui se pencherait sur la situation des filles au Canada et qui serait aussi liée à d'autres initiatives canadiennes menées dans le monde par l'entremise de l'ACDI, du CRDI et d'autres organismes.
    Ce sont là mes quatre recommandations. Je vous remercie de votre attention. Merci.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame Mitchell.
    Nous allons maintenant continuer avec Mme Danforth, qui est avec nous par l'intermédiaire du téléphone.
    M'entendez-vous bien?

[Traduction]

[Français]

    Oui, excellent. Je vous laisse la parole, madame Danforth. Vous disposez de 10 minutes.
(1655)

[Traduction]

    D'accord. Excellent.
    Merci à vous tous. Ce doit être bizarre de seulement m'entendre par téléconférence et de ne pas me voir; je suis désolée.
    Je m'appelle Jessica Danforth, avant, Jessica Yee, et je suis la directrice exécutive du Native Youth Sexual Health Network. Je suis également la présidente du National Aboriginal Youth Council on HIV/AIDS au Canada, et coprésidente du Groupe mondial des jeunes autochtones pour la région de l'Amérique du Nord à l'Instance permanente sur les questions autochtones des Nations Unies. Aujourd'hui, je vais principalement vous parler de mon travail au sein du Native Youth Sexual Health Network à titre de directrice exécutive.
    Le Native Youth Sexual Health Network est un organisme géré par les jeunes autochtones, et qui s'adresse à eux. Il s'attache aux aspects de la santé, des droits et de la justice en matière de sexualité et de reproduction, aux États-Unis et au Canada. Je communique aujourd'hui avec vous de notre bureau américain situé dans la réserve d'Oneida, au Wisconsin. Notre organisation nationale axée sur les pairs est entièrement composée de jeunes Autochtones âgés de moins de 30 ans. Nous travaillons en collaboration avec les aînés et les collectivités ainsi que d'autres personnes issues de minorités visibles.
    Notre organisation doit souvent répondre aux mêmes questions: comment pouvons-nous être composés de pairs, comment pouvons-nous être disséminés dans l'ensemble de l'Amérique du Nord et comment pouvons-nous être gérés par des jeunes âgés de moins de 30 ans et nous occuper uniquement d'eux? Au cours des cinq dernières années, nous avons appris au sein de notre organisation que, pour parler du travail exécuté par les pairs et pour mettre en pratique un leadership exercé par les pairs, ceux-ci doivent participer à toutes les sphères de l'organisation, et non pas y jouer un seul rôle ou rôle symbolique. Pour ce faire, il faut adopter une structure globale.
    Nous sommes également fiers de nous présenter comme une organisation qui encourage fortement l'autodéclaration des femmes, qu'il s'agisse de femmes bispirituelles, lesbiennes, bisexuelles, transgenres, transexuelles, intersexuées, allosexuelles, en questionnement et les autres femmes marginales sur le plan de la sexualité. Je crois qu'il est très important de comprendre que le fait d'imposer ou de définir ce que constitue une femme, particulièrement dans le cadre de la présente étude, sans inclure les femmes que je viens de mentionner et sans tenir compte de leur expérience, fera en sorte qu'un groupe de femmes parmi ceux qui éprouvent le plus de difficultés financières au Canada sombrera dans l'oubli.
    Pour nous, les préjugés liés à la classe sociale et la pauvreté font certainement partie des réalités auxquelles nous faisons face — par « nous », j'entends les réalités des Autochtones, mais aussi des groupes racialisés, des LGBT et des autres minorités visibles au Canada. Comme je l'ai remarqué dans les documents du comité, les chiffres et les statistiques ne sont que ça: des chiffres et des statistiques. Vous êtes peut-être au courant de la grave violence dont sont victimes les femmes autochtones ainsi que des dures réalités auxquelles elles font face au chapitre du suicide, de la pauvreté et de la monoparentalité. Ce qu'il faut comprendre, c'est que la situation découle d'une oppression systémique et structurelle des femmes, sur le plan économique et social, et que le gouvernement du Canada lui-même continue de renforcer cet important facteur fondamental, qui sous-tend ce que j'appelle l'injustice économique.
    Pour moi, il est primordial que nous ne parlions pas seulement de chiffres et de statistiques, mais que nous cherchions à atteindre la justice économique. C'est un terme que j'ai appris dans le cadre de mon travail à temps partiel ici, aux États-Unis, et de nos voisins et alliés du Sud. Nous devons nous concentrer sur la justice économique lorsqu'il est question de la réussite des femmes et des filles canadiennes. La justice économique exige que nous remettions en question et modifions les systèmes qui suscitent la pauvreté et l'injustice économique au sein de nos collectivités. Je veux vous donner quelques exemples de mon travail au Native Youth Sexual Health Network pour illustrer le fonctionnement de l'injustice économique et de la justice économique. J'aimerais qu'ils figurent dans votre étude.
    Si nous visons la justice économique, il faut la mettre en place sans crainte de pénalités économiques ou juridiques. Par exemple, si l'étude portera entre autres sur l'établissement ou la protection de droits juridiques des pauvres et des travailleurs, nous devons encourager et faciliter l'autonomie sociale. Nous devons exiger une modification radicale et humanitaire des systèmes dont il est question, dont le logement, le milieu de travail, les tribunaux, les établissements correctionnels, l'aide sociale et d'autres avantages sociaux, la citoyenneté et l'immigration, les soins de santé et d'autres services sociaux. Nous devons comprendre comment divers types d'oppression sont interreliés et perpétuent l'injustice économique et travailler sur de nombreux fronts à leur élimination. Nous devons aussi réaliser ces changements par l'intermédiaire de l'organisation de base, de la sensibilisation du public, de la défense des droits, de la recherche communautaire, d'interventions juridiques, de l'exercice du leadership et de l'établissement d'une coalition. Cela favorise particulièrement la justice économique, telle que nous la percevons.
(1700)
    Dans le cadre de notre travail, nous remarquons que ce déni de justice économique et de la réalité des femmes autochtones se traduit par une injustice sur le plan de l'environnement et de la reproduction.
    Dans de nombreuses régions du Canada où l'on exploite des ressources — mines, extraction de gaz et de pétrole, forage —, particulièrement dans les régions rurales, éloignées et nordiques des provinces et des territoires, nous voyons des prétendues perspectives économiques et le développement qui s'ensuit imposer du même coup de nombreux changements radicaux qui touchent les femmes et les filles autochtones, à l'échelle de la collectivité. Bien que nous soyons au courant de l'exploitation des sables bitumineux et d'autres ressources minières, gazières et pétrolières dans le Nord de l'Alberta, par exemple, le taux élevé et croissant de violence sexuelle passe inaperçu — et c'est également le cas des infections transmises sexuellement, dont le VIH et la syphilis — ainsi que le suicide, divers problèmes de santé mentale, la dépression, etc.
    Le développement économique côtoie ce que l'on peut appeler l'injustice économique. Ces deux réalités qui coexistent demeurent incomprises.
    Je veux citer la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, à laquelle le Canada a confirmé son appui très, très récemment; il y est question du « consentement préalable libre et informé ». S'il y avait une justice économique au Canada pour les femmes et les filles autodéclarées, cela devrait se concrétiser avec un consentement préalable libre et informé. On ne saurait y parvenir grâce à une simple consultation ou en affirmant simplement que des discussions ont été menées auprès de certains groupes de femmes, d'une personne symbolique ou de son représentant, et que nous avons la permission de leur faire justice ou de tenter d'éliminer leur oppression. Au sens de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, le consentement préalable libre et informé exige du Canada non pas seulement qu'il consulte, mais aussi qu'il obtienne un consentement préalable informé et éclairé — dans plusieurs langues, cultures et collectivités — pour pouvoir réaliser quelque chose et le faire différemment.
    Pour conclure, je veux vous parler d'une pratique prometteuse que nous aimerions voir se poursuivre. Nous avons reçu un financement partiel de Condition féminine dans le cadre d'un projet national de partenariat avec la Fondation Filles d'action intitulé Jeunes femmes autochtones: Partager nos réalités, unir nos forces. Le nom du projet a été déterminé par notre groupe consultatif de pairs composé de dix jeunes femmes autochtones de partout au Canada, coordonné directement par le Native Youth Sexual Health Network.
    Le groupe est entièrement géré par des jeunes femmes autochtones autodéclarées et tient entre autres un rassemblement national, le premier du genre, organisé exclusivement par et pour les jeunes femmes autochtones. Le groupe élabore des ressources, dont [note de la rédaction: inaudible] la création d'une trousse sur l'estime de soi. Nous espérons que ce projet continue, mais il est de plus en plus difficile de financer un projet entièrement géré par des pairs qui ne suppose aucune autre reddition de comptes par ailleurs.
    En guise de conclusion, je veux souligner qu'il ne peut être question de nouvelles occasions de financement ni d'affectations de fonds pour divers problèmes qui continuent de cacher ou d'isoler les identités, les collectivités et les problèmes multiples associés à ces personnes.
    Dans le contexte de l'injustice sur le plan de l'environnement et de la reproduction que j'ai mentionnée précédemment, lorsqu'il est question de développement économique entraînant de multiples types d'oppression prenant la forme d'injustices environnementales touchant les collectivités autochtones, particulièrement dans le cas d'exploitation de ressources, il est impossible d'aborder le sujet sans obtenir le consentement préalable libre et informé des collectivités. Il est évident que ce que l'on appelle le développement économique ne fait pas l'objet d'un consentement préalable libre et informé, qui constitue un droit international des femmes et des filles.
    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Danforth.
    Nous allons maintenant passer à la période des questions. Nous commençons par Mme James.
    Vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos deux invitées.
    Je tiens à souligner que je partagerai mon temps avec Mme Bateman, alors je demanderais à la présidente de me faire signe lorsque mes trois minutes et demie seront écoulées.
    S'il me reste une question importante à poser, je pourrais vous couper un petit peu, alors je m'en excuse à l'avance.
    Ma première question s'adresse à Mme Mitchell. Vos recommandations touchent quatre aspects particuliers. Celui qui m'intéresse concerne la participation des jeunes garçons et des jeunes hommes à l'amélioration des perspectives économiques des filles. Comme vous le savez, cela fait aussi partie du mandat de Condition féminine. Personnellement, j'estime que leur mobilisation est très importante.
    Vous n'avez pas vraiment mentionné comment vous les feriez participer. Que diriez-vous à nos jeunes garçons ou quel message devrait leur transmettre Condition féminine afin que nous puissions améliorer les perspectives économiques des jeunes filles à l'avenir. Je veux en savoir plus sur le message que nous devrions transmettre aux jeunes hommes quant à l'amélioration...
(1705)
    Je crois que votre question est très importante. Il existe de nombreuses façons de mobiliser les garçons et les jeunes hommes, en commençant par l'examen de leur situation par rapport aux filles et aux femmes qui font partie de leur vie. Quelles sont leurs propres aspirations? Quels points positifs apportent-ils à la situation?
    D'après moi, c'est une question de communication et de dialogue. Je crois que cela peut avoir lieu n'importe quand. On peut commencer dans les écoles primaires. C'est le genre de sujet que l'on aborde dans les programmes de dynamique de la vie et de résolution de conflits. Je crois que cela peut également être abordé à l'école secondaire et dans les universités.
    Je crois qu'il faut démystifier les privilèges et ce que l'on peut ou ne peut pas faire. Dans quelle mesure votre vie serait-elle différente si vous êtes une fille ou un garçon? Je crois que c'est surtout une question de communication.
    Merci.
    Est-ce aussi simple que de dire aux garçons et aux filles à un très jeune âge que les filles sont égales aux garçons, qu'elles devraient bénéficier des mêmes occasions que les garçons et qu'elles méritent le respect? Je cherche un message clair que nous pourrions transmettre.
    Je mentionne cela, car un témoin d'Actua a parlé durant la dernière séance du grand intérêt que manifestent de jeunes filles en quatrième année pour divers sujets, dont les sciences et la technologie. Une fois en sixième ou septième année, leur intérêt diminue. Je me demande si cela a un lien avec la puberté. Pourquoi les filles ne s'intéressent-elles plus à ces domaines, tandis que les garçons y réussissent? J'essaie de comprendre, d'après ce que vous savez, pourquoi les filles d'un certain âge perdent intérêt et ne choisissent pas nécessairement ces domaines et ce que le Comité de la condition féminine peut faire pour les encourager et faire participer les hommes et les garçons en vue d'encourager nos jeunes filles à continuer à s'intéresser à ces domaines.
    Je crois qu'il faut écouter les filles et savoir pourquoi elles ne choisissent pas les domaines scientifiques. Les raisons peuvent être très complexes, ou très simples.
    À moins d'adopter une approche de participation et de mobiliser d'autres filles et femmes à cet égard — et je sais qu'il y a eu des études sur le mentorat, notamment —, je crois que nous ne pouvons jamais en faire assez. Nous devons explorer la situation des filles lorsqu'elles atteignent l'âge de 12 ou 13 ans et les messages contradictoires.
    Il est tout à fait correct que les garçons prennent ce genre de décisions; cela ne revient pas aux filles. J'abonde dans ce sens jusqu'à ce que nous ayons un changement total de...
    Merci.
    D'autres témoins nous ont dit que cela pourrait être attribuable à un manque de confiance. Croyez-vous que les filles d'un certain âge commencent à se questionner ou qu'elles manquent de confiance en elles-mêmes par rapport aux garçons? Est-ce que cela fait partie du problème?
    Comment le Comité de la condition féminine peut-il transmettre le message selon lequel il faut s'assurer qu'elles peuvent faire tout ce qu'elles veulent?
    D'autres témoins en ont également parlé. Deux personnes peuvent avoir vécu les mêmes expériences de vie, mais une est plus déterminée et s'efforce de réussir, tandis que l'autre décide d'abandonner ses études secondaires. D'après votre expérience et vos connaissances, que pouvons-nous faire pour encourager les élèves à terminer leurs études secondaires et à se munir des outils nécessaires pour réussir?
    Toutes les situations sont possibles, tant chez les garçons que chez les filles. Certains réussiront, et d'autres feront autre chose. Qu'est-ce que le Comité de la condition féminine peut faire pour assurer la réussite d'un plus grand nombre de filles, les encourager à prendre une décision qui les aidera à avoir du succès et veiller à ce qu'elles n'abandonnent pas leurs études pour obtenir un emploi au salaire minimum? Quel message clair et définitif devons-nous transmettre?
(1710)
    Je crois que nous devons fournir des outils aux femmes qui les entourent. Nous devons leur transmettre un message. L'idée qu'on peut réaliser n'importe quoi est là, mais sans système de soutien pour les filles, je crois que cela n'est pas nécessairement possible. J'investirais davantage dans le système de soutien social des écoles et des collectivités. Les écoles ont leurs limites, mais les organismes communautaires sont très importants.
    Merci.
    Le dernier témoin — je crois qu'elle représentait Actua, si je ne me trompe pas — a parlé de trois aspects, dont les programmes de mentorat. Je vais peut-être gruger le temps de Mme Bateman avec ma question.
    Elle a parlé de l'importance de sensibiliser les parents, les collectivités, les écoles et des organismes de liaison afin qu'ils puissent encourager les filles à réussir et les assurer du fait qu'elles en sont capables. Je me demande comment on peut rejoindre les filles qui ne sont pas nécessairement soutenues par leurs parents ou qui sont peut-être issues d'un milieu culturel favorisant la discrimination entre les sexes au sein de leur propre famille.
    Encore une fois, il faut déterminer ce que Condition féminine Canada peut faire pour atteindre ces jeunes filles et leur transmettre ce message. Comment pouvons-nous intervenir pour nous assurer que les parents et les écoles donnent des occasions aux filles?
    Eh bien, je crois qu'une partie de cela...
    Excusez-moi. Allez-y.
    Désolée.
    Je crois qu'il existe des obstacles dans certaines cultures...
    Est-ce que mes sept minutes sont écoulées?

[Français]

    Je suis désolée, madame James, votre temps est écoulé. J'ai fait signe à Mme Bateman, mais...
    Elle préfère vraiment continuer.
    Oui, mais le temps est écoulé.

[Traduction]

    Je suis désolée. Est-ce que mes sept minutes sont écoulées?
    La présidente: Oui.
    Oh, je m'excuse.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Il n'y a pas de problème.
    Nous passons maintenant aux députés de l'autre côté.
    Madame Freeman, vous disposez de sept minutes.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec Mme Ashton.

[Traduction]

    Ma question s'adresse à Jessica Danforth du Native Youth Sexual Health Network.
    Votre parcours d'activiste est très impressionnant, et je vais me lancer tout de suite afin que vous puissiez en dire le plus possible sur la situation sur le terrain. Pouvez-vous expliquer au comité l'importance d'assurer l'accès aux services en matière de reproduction dans les collectivités que vous connaissez et dans lesquelles vous travaillez?
    Oui, absolument.
    Les services liés à la reproduction faisant partie intégrante de ce que nous appelons la justice en matière de reproduction ressemblent beaucoup aux éléments de la justice économique. Il est impossible d'améliorer les perspectives économiques des femmes et des filles canadiennes sans protéger leur santé reproductive, même dans les grandes villes, comme Toronto.
    Le Toronto Teen Survey effectué en partenariat avec Planned Parenthood of Toronto a révélé que, seulement l'année dernière, près de 80 p. 100 des adolescents de Toronto ne consultaient pas les services de santé sexuelle. Parmi les principales raisons données, mentionnons que les services étaient inadéquats sur le plan culturel et non axés sur les pairs et qu'ils ne tenaient pas compte des réalités des adolescents, particulièrement des jeunes Autochtones et des jeunes de minorités visibles. Cela montre que, même dans une grande ville où on croirait qu'il y a beaucoup de services et de choix et que le développement économique y est important, les jeunes n'ont pas recours à ces services, et cela est attribuable à l'absence d'aide dispensée par les pairs et de mobilisation de ceux-ci.
    Je peux aussi brosser le portrait de la réalité des régions rurales, éloignées et nordiques du Canada. À titre d'exemple, même si l'avortement est légal au Canada, cela ne le rend pas accessible partout. Bon nombre de femmes canadiennes n'y ont pas accès, même si elles le désirent; en région nordique, rurale ou éloignée, il faut passer par plusieurs instances pour avoir accès aux services auxquels on a droit, mais, en réalité, ce droit ne peut être respecté ni concrétisé au sein de sa propre collectivité.
    Par exemple, dans certaines collectivités, disons, du Nord de l'Ontario ou de l'Alberta ou même à l'Île-du-Prince-Édouard n'ont aucune clinique d'avortement, même s'il s'agit d'un droit protégé par la loi. S'il faut demander une subvention aux résidents du Nord pour frais de transport vers le Sud, s'il faut engager soi-même une partie des fonds, si c'est une étudiante à l'extérieur de sa province qui se voit facturer des frais de soins de santé... Ce sont seulement quelques exemples de réalités auxquelles font face les femmes et les filles canadiennes en ce qui concerne le plein contrôle de leur santé reproductive et de l'accès aux services connexes.
    J'ai également parlé de collectivités nordiques connaissant un prétendu développement économique grâce à l'exploitation minière, gazière et pétrolière, mais celles-ci sont également le théâtre de violence sexuelle et présentent un taux extrêmement élevé d'infections transmissibles sexuellement, et très peu de services y sont offerts.
(1715)
    D'accord. Pouvez-vous préciser aussi pourquoi l'accès est important dans le cadre de l'étude et pour le comité. Pourquoi l'accès est-il important?
    L'accès est extrêmement important. D'une part, c'est censé être un droit protégé par la loi au Canada, mais, comme je l'ai déjà mentionné, une loi protégeant un service au Canada ne rend pas celui-ci plus accessible. Ainsi, ce ne peut pas être un service auquel on a droit s'il n'est pas accessible ou si on n'y a pas accès malgré tous les efforts déployés, compte tenu des injustices économiques dont j'ai parlé, mais aussi de votre emplacement géographique, entre autres.
    Cela est particulièrement important pour l'étude, car nous ne pouvons pas nous pencher sur le développement et les perspectives économiques des femmes et des filles canadiennes sans comprendre qu'il n'y aura jamais une véritable justice économique ni aucune perspective connexe si elles n'ont aucun contrôle sur leur santé reproductive, leur propre corps et leurs choix. Il est impossible de se concentrer sur la planification familiale ou la fin d'une relation de violence ou d'abus et de tenter du même coup de planifier les perspectives économiques dont nous voulons tirer profit.
    Il faut intervenir sur le terrain. D'après mon expérience des collectivités nordiques, rurales et éloignées, les études sont principalement axées sur les personnes en milieu urbain et ne tiennent pas compte du fait qu'un service auquel on a droit peut ne pas être nécessairement accessible et ne pas être offert sur place.
    Merci, Jessica.
    Je vais donner le temps qu'il me reste à Mme Ashton. Merci.
    Merci beaucoup, madame Danforth et madame Mitchell, de votre excellent témoignage.
    Ma question s'adresse à Mme Mitchell.
    Vous avez lancé l'idée, que j'ai trouvée très intéressante, de travailler avec le CRSH et d'orienter quelque peu ses recherches et sa vision quant à l'avenir des filles au Canada. Cependant, dans un contexte plus large, le présent gouvernement a coupé énormément dans la recherche et la défense des droits en ce qui a trait aux programmes pour les femmes au cours des six dernières années et, dernièrement, dans les réseaux de santé des femmes, qui sont présents partout au pays. En fait, il y a quelques années, les programmes de défense des droits associés au VIH-sida figuraient parmi les premiers à être éliminés. Un programme dans le Nord du Manitoba, d'où je viens, a été éliminé, et nous avons évidemment vu le taux de VIH-sida augmenter.
    Pouvez-vous nous dire quelles seront les conséquences de l'absence de financement de la recherche et de la défense des droits sur l'avenir des femmes et des filles au Canada?
    Il est évident que les chercheurs cherchent à obtenir des fonds dans les domaines prioritaires. En ce moment, le CRSH est critiqué quant à la détermination des domaines prioritaires, mais je crois que nous avons tout à gagner en faisant la promotion des domaines spéciaux. Actuellement, une recherche sur le sport fait une grande différence sur le plan des réalisations des chercheurs.
    L'autre côté de la médaille est que, sans ces domaines prioritaires, nous allons tout perdre.
    Tout ce que je peux dire, c'est que la présente étude doit absolument faire en sorte qu'une pression soit exercée sur des organismes, comme le CRSH. Je sais que les restrictions budgétaires auront des conséquences absolument dévastatrices, et je crois que votre étude et la communication de ces possibilités économiques sont essentielles.

[Français]

    Je vous remercie, madame Mitchell.
    Nous allons maintenant céder la parole aux députés du gouvernement.
     Monsieur Albas, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier nos deux invitées d'avoir témoigné ici aujourd'hui.
    Je veux d'abord m'adresser à Mme Mitchell.
    J'apprécie votre expertise dans ce domaine, particulièrement au chapitre de la jeunesse féminine. J'ai moi-même trois filles remarquables, alors cette question me tient vraiment à cœur. J'aimerais vous poser quelques questions concernant ce que certains de mes collègues ont déjà soulevé à propos des tendances actuelles.
    En 2006, le Conseil canadien de développement social a établi le profil des jeunes au sein de la population active et a révélé que l'écart entre les sexes était inversé et que la situation sur le marché du travail s'était améliorée davantage pour les filles que pour les garçons.
    Selon vous, qu'est-ce qui explique cette situation? S'agit-il d'une amélioration des industries dans lesquelles on retrouve habituellement beaucoup de filles? Les filles sont-elles de plus en plus présentes dans les industries habituellement associées aux garçons? Y a-t-il quelque chose que nous ne savons pas à propos de la situation des garçons?
(1720)
    Je peux parler de la situation au Québec, où les garçons abandonnent leurs études en plus grands nombres et plus tôt, et je crois qu'une étude effectuée récemment au Québec — encore une fois, je parle de la situation dans cette province — se penchait sur la situation des garçons et des filles qui abandonnent leurs études. Il a été constaté que les garçons ont beaucoup plus d'occasions de retourner aux études plus tard. Peu importe les observations de cette étude, nous savons tous que les hommes sont plus nombreux à occuper des postes clés au sein des organisations au Canada.
    C'est peut-être une question de types de travail — peut-être de main-d'œuvre semi-qualifiée — mais nous n'observons pas les gains pour les femmes auxquels fait allusion ce type d'étude. Je crois qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire.
    Vous dites donc que le contexte est plus large en ce qui a trait au cycle de l'apprentissage...
    Oui, oui, absolument.
    ... et il y aurait une réintégration en aval.
    J'apprécie vos affirmations.
    Maintenant, d'après la sixième édition de Femmes au Canada, « la majorité des femmes occupant un emploi continuent à travailler dans des professions à prédominance féminine ». Le rapport ajoute que les jeunes femmes nouvelles sur le marché du travail choisissent des domaines non traditionnels.
    Ce n'est qu'une question de temps avant que certains des derniers écarts soient comblés. Savez-vous pourquoi les filles sont de plus en plus nombreuses à choisir des domaines non traditionnels?
    Eh bien, je n'ai pas étudié cette question directement, mais je connais certains documents sur la question. Dans de nombreuses écoles secondaires, on mise peut-être davantage sur l'orientation professionnelle maintenant qu'il y a quelques années. Par contre, je ne sais pas si cela est le cas partout.
    C'est peut-être parce qu'il y a de plus en plus d'emplois non traditionnels à pourvoir. Si nous nous en tenons qu'à la disponibilité, les jeunes femmes ont davantage l'occasion d'occuper des postes non traditionnels. Encore une fois, peut-être qu'il y a tout simplement plus de possibilités dans les domaines de la technologie et des sciences qu'il y en avait auparavant.
    C'est peut-être une question d'innovation technologique ou de démographie. C'est une situation très complexe. D'accord.
    Nous avons déjà eu la chance d'avoir un exposé de représentantes de la Fondation Filles d'action. Elles nous ont présenté un témoignage et ont formulé quelques recommandations. Je vais vous les mentionner brièvement.
    La première était d'offrir des programmes de mentorat aux filles et de les mettre en contact avec des personnes qui pourraient leur servir de modèles de comportement. La deuxième consistait à sensibiliser les garçons et les jeunes hommes aux attentes qu'on se fait à l'égard des deux sexes, afin qu'ils développent un esprit critique et qu'ils favorisent l'égalité entre les sexes. La troisième était de mettre en place et d'élaborer des programmes de lutte contre le harcèlement sexiste, notamment dans les établissements d'enseignement.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette approche. D'après votre expérience et votre expertise, existe-t-il d'autres facteurs à la lumière de ces recommandations?
    J'aimerais fournir quelques précisions sur le harcèlement. Je ne sais pas si vous parlez avec des spécialistes de la cyberintimidation, notamment. Je crois qu'il y a encore beaucoup de harcèlement au sein des établissements. Malheureusement, dans les universités, dont la mienne, nous avons un comité de lutte contre le harcèlement.
    Je crois que le harcèlement est de plus en plus subtil. Ce n'est pas un problème que les gens signalent facilement. Je crois que dans les classes, à l'école primaire et secondaire, le harcèlement nuit toujours à la vie des filles. Nous ne pouvons pas en faire assez pour lutter contre ce problème. Il y en a même dans les réunions entre collègues. Les gens sont de plus en plus subtils, au fil du temps. Je crois que, pour une fille, surtout en situation minoritaire, il peut être encore très difficile de seulement traverser une classe. Je crois que nous devons en faire beaucoup plus pour que les filles puissent circuler dans les écoles et les organismes en toute sécurité.
    Madame la présidente, combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez une minute et trente secondes.
    Ce sujet m'intéresse.
    D'après vos derniers commentaires, il me semble que nous faisons face à des changements sur le plan de la technologie, de la société et du type de harcèlement — vous avez mentionné la cyberintimidation. Nous devrions aussi trouver de nouvelles façons de régler le problème ou de nous adapter afin que nous puissions gérer cette situation. Est-ce exact?
(1725)
    Oui, c'est exact. Nous croyons avoir réglé le problème, mais ce n'est pas le cas. Il y a encore beaucoup à faire. Si vous y ajoutez la race et la classe sociale, le problème est encore très ancré dans nos institutions.
    Je vous remercie beaucoup de votre témoignage. Madame la présidente, j'apprécie l'occasion d'avoir pu parler aux témoins. Merci.

[Français]

    Je vous remercie.
    Comme Mme Sgro a dû quitter, nous allons passer au deuxième tour de questions.
    Madame Bateman, il vous reste environ cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame la présidente. Je tiens aussi à remercier nos deux témoins d'aujourd'hui. J'ai beaucoup apprécié les commentaires que nous avons entendus.
    Je veux seulement parler, madame Mitchell, de certains de vos commentaires. J'apprécie beaucoup la façon concise et très claire dont vous nous avez présenté vos objectifs.
    Je veux revenir sur un de vos sujets. Il était question de la mobilisation des garçons et des jeunes hommes. J'ai une fille et un fils. Je sais qu'il est important qu'ils s'entendent bien et qu'ils contribuent à la société.
    Vous avez mentionné que, actuellement, les filles surpassent les garçons dans certaines situations. Pouvez-vous nous en parler?
    Oui. Depuis longtemps, les filles surpassent les garçons dans certains domaines associés à la lecture et à la langue. Le fait de savoir si cela est inné ou acquis et si le fait que les filles obtiennent de meilleurs résultats dans les cours de langue est associé au fait qu'elles communiquent davantage ont fait l'objet de nombreux débats. Par contre, certaines recherches laissent croire que cela va au-delà de la langue. Je ne peux pas répondre ici à la question de l'inné et de l'acquis. Toutefois, je crois que les filles surpassent les garçons dans de nombreux domaines, et je crois que c'est aussi le cas au deuxième cycle du primaire et à l'école secondaire. Certains prétendent que les écoles sont peut-être trop féminisées, qu'il y a beaucoup plus d'enseignantes et qu'il faut davantage d'enseignants pour que les élèves aient davantage de modèles positifs masculins. De nombreuses hypothèses à cet égard ont été formulées.
    Cela ne veut pas dire que les filles ne font pas l'objet de discrimination. En fait, lorsqu'elles ont terminé leurs études, ce sont tout de même les hommes qui touchent les meilleurs salaires. Par contre, dans le milieu scolaire, ce sont les filles qui font meilleure figure à de nombreux égards, mais ce ne sont pas toutes les filles ni toutes les écoles. Dans l'ensemble, je crois que de nombreuses mesures ont été prises pour équilibrer la situation, et certaines personnes prétendent que l'on devrait en faire plus pour soutenir les garçons. Évidemment, j'estime que c'est une bonne idée. Je veux que l'on tire des leçons de ce que nous avons fait pour les filles.
    À ce sujet, vous avez fait un autre beau commentaire selon lequel vous ne voulez pas opposer les garçons aux filles ou les filles aux garçons.
    Mme Claudia Mitchell: Oui.
    Mme Joyce Bateman: Pouvez-vous nous dire comment vous vous y prendrez? Il me semble que vous avez utilisé le terme « alliés » dans votre description. Pouvez-vous nous éclairer davantage sur cette question?
    Tout d'abord, je crois que cela s'explique par le manque de fonds. Je peux faire particulièrement allusion au contexte de l'Afrique du Sud, qui est encore aux prises avec de nombreux problèmes. Selon moi, les personnes qui se penchent sur la situation des garçons se sont révélées très convaincantes lorsqu'elles ont expliqué pourquoi les fonds devraient revenir à eux et non pas aux filles, parce que tous les problèmes associés aux filles ont déjà été réglés.
    Nous devons nous rappeler que tous les enfants ont besoin de soutien et qu'il faut éviter les conflits entre les études axées sur les hommes et celles axées sur les femmes. Ces domaines d'études universitaires demeurent, mais nous devons réfléchir de façon stratégique à la façon dont ce type de travail peut aider tant les hommes que les femmes. Je crains que, aussitôt que l'idée d'un organisme spécial pour les filles est lancée, comme je l'ai fait, les gens diront « Oui, mais qu'en est-il des garçons? » Je crois que nous devons montrer que nous travaillons pour les deux groupes et soutenir le travail des personnes qui observent des problèmes chez les garçons. Nous devons éviter cette polarisation et l'analyse binaire.
(1730)
    D'accord. Je comprends.
    Il me reste un peu de temps, et je me demande si vous pouvez nous parler de l'importance du mentorat, que certains témoins ont mentionné. Quelle est votre opinion à ce sujet?
    La présidente: Très rapidement.
    D'accord. Il faut que des filles encadrent d'autres filles plus jeunes; ce ne doit pas être nécessairement des femmes. Je crois qu'il y a des mentors dans toutes les écoles et dans toutes les collectivités, et nous devons nous pencher sur cette question et déterminer comment les jeunes filles peuvent être encadrées par des filles ayant seulement quelques années de plus qu'elles. C'est un rôle très important.

[Français]

    Je vous remercie. Je dois vous interrompre ici, malheureusement. C'était très intéressant.
    Je remercie nos deux témoins qui ont accepté de nous parler aujourd'hui dans le cadre de notre étude.
    Je vous souhaite une bonne fin de journée. Sur ce, j'ajourne notre séance.
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