:
Bonjour. Je vous remercie beaucoup de cette occasion de faire une présentation devant cet important comité, qui a toujours joué un rôle pour assurer le respect et la défense des droits des femmes au Canada. J'apprécie beaucoup l'occasion qui m'est donnée.
[Traduction]
L’Alliance de la fonction publique du Canada est le plus grand syndicat de fonctionnaires fédéraux. Nous représentons plus de 180 000 personnes dans l’ensemble du pays. De plus, bien que la majorité de nos membres soient des fonctionnaires fédéraux et des employés des organismes et des sociétés d’État fédéraux, nous représentons aussi des travailleurs du secteur privé.
J’ai préparé quelques notes écrites. Malheureusement, la traduction n’a pu être terminée à temps, mais j’inviterais le greffier du comité à vous transmettre ces notes dès qu’elles seront prêtes. Je vous présenterai un résumé de ces notes aujourd’hui.
Le thème de la réunion d’aujourd’hui de votre comité est vraiment important. S’il est nécessaire d’améliorer les perspectives économiques des filles, c’est qu’elles subissent encore de la discrimination et de l’oppression.
Des filles sont victimes d’incestes et de sévices sexuels dans leur famille. Nous savons que les deux tiers des cas de sévices sexuels se produisent au domicile des victimes et que la plupart de celles-ci ont moins de 25 ans.
Le racisme, l’islamophobie, la discrimination contre les Autochtones, l’homophobie et la discrimination contre les jeunes filles handicapées demeurent endémiques. Au moins une fille sur dix vit dans la pauvreté. Loin de moi l’idée de défendre le travail des enfants, mais lorsque des filles ou des jeunes femmes travaillent, elles le font souvent au salaire minimum, à temps partiel et occupent des emplois sans avantages sociaux et sans possibilité d’avancement.
Les jeunes filles qui vivent dans les régions rurales — environ 20 p. 100 de la population — n’ont souvent même pas accès au transport en commun. Dans ces régions, il y a peu de services de garde, et parfois pas du tout. Des services importants ne sont pas offerts, par exemple les services d’avortement. Les jeunes lesbiennes sont souvent isolées et encore plus marginalisées qu’ailleurs.
Les modifications de la législation sur l’immigration et l’accueil des réfugiés qui sont proposées dans ce budget marginaliseront et désavantageront encore plus les jeunes filles. Des milliers de personnes qui reçoivent actuellement des médicaments grâce au Programme fédéral de santé intérimaire n’y auront plus droit à compter du 30 juin 2012, ce qui aura certainement des répercussions très dures sur les jeunes filles immigrantes ou réfugiées.
[Français]
Il va sans dire qu'il y a beaucoup à faire pour améliorer la condition économique des filles. Somme toute, les mesures qui doivent être prises pour améliorer leur condition sont semblables à celles qui doivent être prises pour améliorer la situation des femmes. On parle de réformes politiques et sociales qui visent à transformer la nature systémique de la violence contre les femmes et de la discrimination, y compris la discrimination économique.
Que faut-il faire pour s'y attaquer? On va proposer quelques pistes d'action, qui ne sont évidemment pas exhaustives.
[Traduction]
Parmi les mesures qui nous semblent les plus importantes se trouve l’amélioration des soins de santé pour les jeunes filles dans les réserves. Le taux de grossesses parmi les adolescentes autochtones est très élevé, pourtant il est très difficile de donner naissance à un enfant dans une réserve éloignée des grands centres. En fait, c’est même dangereux. Par exemple, au Manitoba, les femmes des Premières nations risquent deux fois plus que les femmes non autochtones de voir leur bébé mourir. De plus, environ 20 p. 100 des bébés nés à certains endroits au Manitoba se retrouvent à l’hôpital avec des maladies des voies respiratoires. Moins d’un tiers des enfants nés entre 2003 et 2005 à Hollow Water et à Sagkeeng, au Manitoba, ont reçu les vaccins habituels.
Le gouvernement fédéral a un rôle vraiment important à jouer dans ce dossier, car c’est lui qui est responsable de services de santé dans les réserves. Il y a un besoin urgent d’argent et d’eau potable. Plus de 100 populations autochtones doivent faire bouillir l’eau avant de la boire, actuellement. Pourtant, le gouvernement fédéral s’apprête à faire adopter le projet de loi , la Loi sur la salubrité de l’eau potable des Premières Nations, qui aura pour effet de transférer la responsabilité de l’eau aux réserves, mais sans leur accorder le financement nécessaire.
[Français]
Un autre programme essentiel au bien-être des jeunes filles est le financement adéquat des services de garde à la jeune enfance. Le Canada est l'un des plus riches pays du monde. Pourtant, nous sommes au bas de l'échelle internationale en ce qui concerne la qualité de nos services de garde et l'accès à ceux-ci. Plus de 70 p. 100 des mères ayant des enfants de moins de cinq ans sont présentement actives sur le marché du travail au Canada. Pourtant, seulement 20 p. 100 des enfants ont accès à des places réglementées en garderie. Le Québec est l'une des seules provinces à avoir réellement investi des fonds publics dans les garderies, avec ses fameuses garderies à 7 $ par jour. Une étude récente vient de démontrer que le gouvernement rapporte plus d'argent qu'il n'en dépense en subventionnant des réseaux publics de garde à l'enfance.
Pourtant, malgré ces preuves, en 2006, le gouvernement fédéral a aboli les accords fédéraux-provinciaux-territoriaux en matière de financement des services de garde, pour les remplacer par une prestation qui coûte très cher et qui, finalement, n'offre que très peu de choix aux parents.
[Traduction]
L'éducation des jeunes filles dans les réserves est un autre élément essentiel à une stratégie efficace pour la prospérité économique. Nous savons que l'obtention d'un diplôme universitaire fait disparaître les écarts de revenu entre les Autochtones et la population non autochtone. Toutefois, à l'heure actuelle, seulement 8 p. 100 des Autochtones ont un diplôme universitaire, comparativement à 22 p. 100 dans la population non autochtone. Il est donc urgent que le gouvernement fédéral fournisse des fonds pour améliorer l'éducation dans les réserves.
[Français]
En ce qui a trait aux politiques d'équité en emploi, encore aujourd'hui, sept femmes sur dix travaillent dans des domaines de travail traditionnels: travail de bureau, éducation, services sociaux, et ainsi de suite. Le Plan d'action économique fédéral et le Plan Nord du Québec contiennent tous deux de grands projets qui rapportent très peu aux femmes, puisqu'elles sont encore exclues du domaine de la construction et des grands projets.
Il faut améliorer les politiques d'équité en emploi. Encore là, on voit dans le budget déposé il y a quelques semaines un recul par rapport à l'équité en emploi, puisque le fédéral vient d'annoncer un affaiblissement considérable de l'obligation des entrepreneurs fédéraux en matière d'équité en emploi.
Il faut développer des mesures efficaces pour protéger les jeunes filles contre la discrimination et le harcèlement en milieu de travail. Il faut leur donner de l'information et les aider à exercer leurs droits. Il faut leur fournir de l'aide juridique et des mécanismes d'accès à la justice. Encore là, qu'est-ce qu'on voit au palier fédéral? Il y a une attaque contre les mécanismes d'accès à la justice. On a éliminé des bureaux régionaux de la Commission canadienne des droits de la personne, et on a aboli le Programme de contestation judiciaire et la Commission de réforme du droit du Canada. Ce n'est pas la bonne direction à suivre.
De plus, il faut qu'il y ait une équité salariale. On sait que 30 ans après l'adoption de la Loi canadienne sur les droits de la personne, les femmes continuent à subir de la discrimination sur le marché du travail et gagnent en moyenne 70 p. 100 de ce que gagnent les hommes, lorsqu'elles travaillent à temps plein et toute l'année. En 2004, le Groupe de travail sur l'équité salariale du gouvernement fédéral a recommandé que l'on adopte une loi fédérale sur l'équité salariale. Pourtant, dès qu'il a été élu, ce gouvernement a annoncé qu'il n'avait pas l'intention de donner suite à ses recommandations. Nous trouvons que c'est une mesure essentielle.
Nous venons récemment de gagner, pour nos membres à Postes Canada, dans un jugement de la Cour suprême sur l'équité salariale. Il a fallu que les femmes se battent pendant quasiment 30 ans devant les tribunaux pour y arriver. Le système actuel ne marche pas et est inefficace, de toute évidence.
Il faut protéger les emplois dans le secteur public. Les emplois dans la fonction publique fédérale sont une bonne source d'emplois pour les jeunes filles et les femmes. Et les compressions...
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Bonjour. Je vous remercie d'avoir pensé à nous.
Je vais aborder le thème de l'amélioration des perspectives économiques des filles au Canada en vous donnant le point de vue de l'école Rosalie-Jetté, une école secondaire montréalaise qui dessert une clientèle d'élèves enceintes ou de jeunes mères âgées de 12 à 18 ans. En trois points, je vais vous exposer notre point de vue.
Je vais d'abord vous parler de la situation économique de nos élèves en évoquant l'historique de l'école. Il faut remonter jusqu'en 1845 pour saisir le fil qui conduit à la mission actuelle de notre école. C'est en effet cette année-là que Mme Rosalie Cadron-Jetté, originaire de Lavaltrie, veuve et mère de 11 enfants, ouvre la porte de sa maison à quelques filles-mères, comme on les appelle à l'époque, ainsi qu'à leurs enfants. Quelques années plus tard, l'évêque du temps, Mgr Ignace Bourget, convainc Mme Cadron-Jetté de venir s'installer à Montréal pour fonder une communauté religieuse qui poursuivrait son oeuvre charitable. Devenue soeur de la Nativité, Rosalie Cadron-Jetté poursuit sa mission jusqu'à sa mort, en 1864, et la congrégation continue alors son oeuvre.
C'est presque 100 ans plus tard, soit autour de 1964, que des services scolaires sont offerts d'abord aux enfants, puis aux mères. On leur enseigne au départ les matières de base, auxquelles s'ajoutent graduellement la sténodactylographie, les arts plastiques et l'enseignement ménager. Malgré les efforts louables et charitables des religieuses, ces jeunes femmes obtiendront des emplois peu rémunérés et peu valorisés. Cet enseignement va durer environ 10 ans.
En 1974, la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui porte aujourd'hui le nom de Commission scolaire de Montréal, accueille dans ses établissements une école à vocation spécifique destinée aux mères célibataires. Il s'agit de l'école Rosalie-Jetté, établie dans l'est de Montréal. On y offre les matières de base, des cours sur la psychologie de l'enfant, l'alimentation et la couture ainsi que des cours d'art plastique et de sténodactylographie. Cinq ans plus tard, une garderie ouvre ses portes. Le programme complet des cours réguliers, de la première à la cinquième année du secondaire, est offert à partir de l'année scolaire 1976-1977, puis on ajoute du personnel professionnel et des services aux élèves, pour en arriver à l'école que nous avons aujourd'hui, en 2012. Les perspectives d'avenir sont un peu plus encourageantes.
Grâce à divers parcours que nous avons ajoutés au fil des ans, nos élèves peuvent obtenir un diplôme d'études secondaires qui leur ouvre la porte des cégeps, puis, éventuellement, des universités. Elles peuvent recevoir les acquis nécessaires pour suivre un programme de formation professionnelle et apprendre un métier. Enfin, elles peuvent obtenir un certificat de formation menant à un métier semi-spécialisé et intégrer le marché du travail.
Pour ce qui est d'accéder à des études supérieures, nous reconnaissons que les possibilités demeurent plus élevées que les probabilités. Plusieurs quittent l'école avant d'avoir terminé leur secondaire ou sans avoir obtenu les acquis nécessaires pour suivre une formation professionnelle. Lorsqu'elles arrivent chez nous, leur apprentissage accuse déjà un retard important, et elles s'absentent souvent, notamment pour des raisons liées à la maternité et à un vécu psychosocial à défis multiples.
Pour plusieurs de nos élèves, il est très difficile d'accéder à un emploi bien rémunéré qui leur permettrait de se loger et de bénéficier d'un soutien financier décent pour elles-mêmes ainsi que pour leur enfant. Les emplois liés à la formation professionnelle et les emplois semi-spécialisés génèrent des salaires moyens ou très bas. Les emplois obtenus après avoir réussi un baccalauréat sont plus intéressants, mais nos élèves doivent alors rembourser leur prêt étudiant pendant des années.
Deuxièmement, je parlerai des programmes et des subventions qui nous aident en ce moment.
Pendant leur séjour chez nous, nos élèves sont aidées financièrement par un ou quelques programmes, selon leur situation particulière. Nous avons des prestations d'aide sociale, des allocations familiales, un programme pour mineures enceintes, un programme pour jeunes élèves avec enfant. Quelques-unes ont l'aide d'un parent, quelques-unes vivent avec un conjoint qui travaille. Toutes peuvent déjeuner à l'école pour 25 ¢ pour elles et leur enfant. Des collations gratuites sont offertes deux fois par jour et notre friperie pour les bébés offre des vêtements neufs ou usagés à 10 ¢ la pièce.
Nous avons une fondation qui vient en aide aux plus nécessiteuses. La plupart des élèves reçoivent suffisamment d'argent pour parer à l'essentiel. Notre défi consiste à leur apprendre à gérer un budget qui compte peu d'entrées.
Finalement, je voudrais parler de l'éducation en finances personnelles et faire une recommandation. Plusieurs jeunes des écoles secondaires n'ont pas encore le goût d'être informés sur leurs finances personnelles. Nos élèves n'y échappent pas. Elles savent qu'elles doivent gérer leurs finances, mais le sujet les répugne. Elles sont également à l'âge où les diktats de la mode en font dépenser plusieurs. Les adultes en position de leur prodiguer des conseils ont quelquefois tendance à basculer dans des jugements de valeur lorsqu'ils voient une maman nouvellement coiffée qui tarde à régler les frais de garderie. C'est très difficile de ne pas réprouver ces comportements, mais le fait de le faire n'arrange rien.
La plupart des adolescentes qui vivent une grossesse entre l'âge de 12 et 18 ans vivent déjà dans l'opprobre, dans la solitude engendrée par le rejet, les abus et le manque de ressources. Elles ont davantage besoin d'un accompagnement sur mesure qui respecte leur réalité, plutôt que d'une tentative de les ramener dans un quelconque droit chemin. Elles ont besoin d'une reconnaissance identitaire.
Comme recommandation à formuler sur l'amélioration des perspectives économiques des filles au Canada, nous croyons, à la lumière de notre vécu à l'école Rosalie-Jetté, qu'il serait sensé d'investir dans l'éducation en finances personnelles en misant sur la formation spécialisée de formateurs à l'esprit ouvert, inclusif et créatif, sur la création de contenus adaptés pour ces formations, sur la création de méthodes d'évaluation respectueuses des cheminements des filles et sur la création d'un plan de formation participatif.
En somme, nous devons réussir à rendre dynamiques et utiles les apprentissages sur des sujets tels que les intérêts sur une carte de crédit, les différences entre un prêt personnel et une marge de crédit, le traitement des documents bancaires reçus par la poste, la préparation d'une déclaration de revenus, la gestion d'un compte de banque, etc. Cette prise de conscience à un jeune âge ne peut qu'aider à développer la confiance en sa valeur personnelle et la conviction que l'on peut accéder à des revenus décents.
Voilà. Je vous remercie.
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Je vous remercie de votre question.
C'est un enjeu très important, qui a de nombreuses répercussions. L'abolition du questionnaire long de recensement aura d'énormes répercussions sur notre capacité de mettre en oeuvre l'équité en matière d'emploi, car celle-ci est fondée sur la disponibilité des femmes et d'autres membres des groupes visés par l'équité en matière d'emploi, en l'occurrence les Autochtones, les minorités raciales et les personnes handicapées. Nous examinons leur disponibilité sur le marché du travail.
Donc, la perte de connaissances sur notre réalité sociale et économique aura des répercussions négatives sur notre capacité d'élaborer des politiques sociales éclairées en milieu de travail, dans les écoles et dans la société, car nous avons besoin de nombreux renseignements pour les élaborer.
Les compressions visant la recherche auront aussi des répercussions sur notre capacité de cerner les lacunes en ce qui concerne les politiques sociales et de déterminer la source des problèmes qu'éprouvent les différents groupes de femmes dans la société, ainsi que sur notre capacité d'élaborer ensuite des options stratégiques en vue d'y remédier.
Au cours des dernières années, nous avons à toutes fins utiles perdu l'Institut canadien de recherches sur les femmes, qui se débat pour survivre. Cet institut effectuait des recherches et offrait des fiches d'information très utiles non seulement pour le mouvement syndical et les groupes de femmes, mais aussi, j'en suis sûre, pour le milieu universitaire.
Nous avons aussi perdu une partie du financement destiné à défendre les droits des femmes. L'Association nationale Femmes et droit a fermé ses portes. Cette association faisait beaucoup de recherches et proposait des réformes du droit en vue d'améliorer les lois et les politiques canadiennes de manière à ce que nous puissions respecter et promouvoir le droit à l'égalité des femmes.
C’est la première fois que je participe à la présente étude. Le sujet m’intéresse beaucoup. À ce que je vois, c’est un comité qui œuvre de manière constructive, dans l’intérêt du public.
J’aimerais revenir à deux ou trois points dont vous avez parlé.
Il s’agit des répercussions budgétaires qui nuisent à la réussite économique des filles et des femmes. Vous avez parlé du rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration des conditions, madame Côté. Certains organismes ont perdu leur financement, ce qui leur rend la tâche plus difficile. Certains programmes ne sont plus financés. Vous avez parlé des services de garde d’enfant. Ce sont des répercussions directes.
Mais je m’intéresse beaucoup à la dimension de la défense des droits, que vous avez mentionnée. Les statistiques de 2009 sont assez incroyables pour le secteur caritatif : 7,8 milliards de dollars en dons de bienfaisance; 23 p. 100 des familles demandent une déduction pour des dons de bienfaisance; 5,6 millions de donateurs; 161 000 organismes; 6,5 millions de bénévoles.
Votre organisme collabore-t-il avec certains de ces 161 000 organismes? Ont-ils un rôle important à jouer pour créer les conditions permettant de favoriser la réussite des filles?
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idées que l'intervention de la députée Murray, en ce qui concerne certains renseignements que nous obtenons grâce aux statistiques.
Au début de notre étude, on nous a remis un livre, en l'occurrence la sixième édition de Femmes au Canada: rapport statistique fondé sur le sexe. Chaque année, le gouvernement du Canada publie ce rapport. Nous en avons donc reçu une grosse pile. J'aurais bien aimé l'avoir avec moi ici aujourd'hui, mais j'aimerais quand même poser quelques questions à nos témoins au sujet de certains extraits du rapport et de statistiques qu'on y trouve.
J'ai peut-être manqué quelque chose parce que je discutais avec quelqu'un, mais la députée Murray a mentionné certaines statistiques sur les organismes de bienfaisance. Je ne suis pas certaine de la source de ces statistiques. Elles viennent peut-être du même livre. Je vous serais reconnaissante de nous le laisser savoir lorsque votre tour sera venu.
Revenons à la sixième édition du rapport. J'aimerais lire quelques phrases, qui portent sur les statistiques relatives au marché du travail:
Les femmes de presque tous les groupes d’âge ont été touchées par la dernière crise du marché du travail. Les femmes de 15 à 24 ans ont été particulièrement concernées : leur taux d’emploi a chuté en un an, passant de 60,3 % en 2008 à 57,1 % en 2009. Malgré cela, elles s’en sont mieux sorties que les jeunes hommes, dont le taux d’emploi est passé de 58,9 % à 53,6 % au cours de la même période [...].
Il ne fait aucun doute que cette tendance est préoccupante.
Madame Côté, quel type de données vous seraient utiles lorsque vous examinez ces enjeux?
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Nous serons heureux de vous remettre un exemplaire du rapport
Femmes au Canada. Je crois qu'il pourrait vous être utile, car je sais que vous avez mentionné que c'est le genre de renseignements que vous recherchez.
En outre, la sixième édition du rapport Femmes au Canada indique aussi ceci:
La majorité des femmes au travail continuent d’occuper des emplois à prédominance féminine.
Vous savez, ceux qu'on a tendance à considérer comme des emplois traditionnellement féminins: les soins infirmiers, l'enseignement...
Or, le nombre de femmes qui optent pour des domaines non traditionnels, un sujet dont il a été question à quelques reprises aujourd'hui, augmente lui aussi. On trouve de bonnes statistiques à ce sujet à la page 127 de la version anglaise du rapport.
Pensez-vous que ce n'est plus qu'une question de temps avant que ces écarts se rétrécissent? Le rapport montre que nous allons dans la bonne direction, ce que je trouve encourageant. C'est ma première question. Croyez-vous que ce n'est plus qu'une question de temps et que nous nous en allons à tout le moins dans la bonne direction?
J'ai aussi une question qui s'adresse à vous deux. Avez-vous pu déterminer les raisons pour lesquelles les filles optent pour les industries non traditionnelles? Quels sont les facteurs qui les incitent à choisir un domaine de travail non traditionnel?
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Merci de vos questions.
Évidemment, un bon salaire serait l'un des facteurs qui motiveraient les jeunes filles, car il s'agit d'emplois beaucoup mieux rémunérés qu'un travail dans le milieu de la coiffure ou de la vente en magasin.
Il y a eu une légère augmentation, et notre mouvement pour les femmes a travaillé fort, au cours des 40 dernières années, pour l'obtenir. Les gains se font lentement, et ils sont obtenus grâce aux politiques et aux groupes de financement comme Action travail des femmes, à Montréal, dont quelqu'un a parlé plus tôt, et le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, ou CIAFT. Ces types de groupes ont contribué à former et à conseiller les femmes pour les aider à accéder au marché du travail. Mais en ce qui concerne l'accès à ces emplois, selon les études que j'ai vues, je crois que l'accès aux services de garderie est aussi important. Souvent, ces emplois ne sont pas assortis d'un horaire habituel de 9 h à 17 h, et ils exigent beaucoup d'heures supplémentaires, alors il faut avoir accès à des services de garderie.
Pour rendre ces emplois attrayants, il faut aussi...
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Ça rejoint un peu la discussion qu'on vient d'avoir avec Mme Ambler sur l'équité en emploi. Le budget propose effectivement d'éliminer en pratique l'obligation contractuelle. Cette obligation vise les compagnies privées sous compétence provinciale ayant plus de 100 employés et qui ont un contrat avec le gouvernement fédéral de plus de 200 000 $. Elles doivent respecter toutes les obligations qui figurent dans la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Cette obligation touche 1 million de travailleurs et de travailleuses; c'est très important.
C'est grâce, entre autres, à cette obligation contractuelle qu'il y a eu des progrès au fil des années. Cela a permis à des femmes d'accéder à des emplois non traditionnels. En vertu de la loi fédérale, les compagnies sont tenues d'entreprendre ce genre de démarche pour obtenir un contrat du gouvernement fédéral. Concrètement, cela veut dire que l'employeur doit faire une analyse de sa force de travail, un workforce survey. Il doit évaluer et analyser ses pratiques d'embauche et déterminer quelles sont les barrières. Ce n'est pas tout d'embaucher des femmes, encore faut-il que le milieu du travail soit accueillant pour elles. Par exemple, il faut interdire le harcèlement sexuel au travail. Il faut aussi qu'il y ait des politiques flexibles pour concilier travail et obligations familiales, des services de garde dans le milieu de travail et de bonnes politiques en matière de congé de maternité et parental, et ainsi de suite.
Ce n'est pas tout d'embaucher des femmes. Il faut aussi transformer la culture en milieu de travail pour que les femmes puissent rester dans ce milieu et s'y sentir réellement acceptées et bienvenues.
Avec la loi d'exécution du budget, il y a un recul. Elle comprend un article qui vise à quasiment éliminer l'obligation des entrepreneurs de respecter l'équité en emploi. C'est malheureux, parce que ça va vraiment affaiblir les progrès et risquer de nous ramener en arrière au chapitre de l'équité en emploi.
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Oui, c'est une question extrêmement importante... Évidemment, il est très important pour les femmes de décider si elles souhaitent ou non avoir des enfants, tout d'abord, et si elles en veulent, de décider quand et dans quelles conditions. La juge de la Cour suprême, Rosalie Abella, a statué que les services de garderie sont pour les femmes la voie d'accès au marché du travail.
Nous savons qu'il est très important que les femmes aient accès à des services de garderie de qualité pour qu'elles puissent se rendre au travail en toute tranquillité, sachant qu'on prend bien soin de leurs enfants. Comme je l'ai dit, les études révèlent que de bons services de garderie financés par le secteur public sont avantageux pour l'État, car celui-ci reçoit plus qu'il ne dépense en permettant aux femmes d'occuper un emploi rémunéré et de payer des impôts, et en permettant aux enfants de se développer sainement. Nous savons que les services de garderie sont très importants pour les enfants des familles défavorisées. Pour les enfants d'immigrants, c'est un véritable tremplin pour l'intégration.
Actuellement, pour ce qui est des congés de maternité et des congés payés pour le retrait préventif, il y a très peu de dispositions dans le Code canadien du travail pour permettre aux femmes qui sont enceintes ou qui allaitent d'être réaffectées à un autre emploi sécuritaire pour elles et pour leur bébé. Le Code canadien du travail ne prévoit pas de congés payés lorsque les femmes doivent arrêter de travailler en raison d'une grossesse.
Je crois que cette question vient d'être débattue à la Chambre, la semaine dernière. Malheureusement, un projet de loi a été perdu, mais...
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Je voudrais prendre un instant pour remercier le comité d’avoir invité la Coalition d’Ottawa contre la violence faite aux femmes à prendre la parole aujourd’hui.
De plus, au nom de notre coalition, je voudrais vous remercier de prendre le temps de vous pencher sur les moyens éventuels en vue d’assurer un meilleur avenir aux jeunes filles du pays.
Je me nomme Stefanie Lomatski et je suis la directrice générale de la Coalition d’Ottawa contre la violence faite aux femmes. Je suis accompagnée aujourd’hui de Bailey Reid, présidente du Comite´ de l’intéressement du public de la coalition.
La Coalition d’Ottawa contre la violence faite aux femmes est une coalition d’organismes et de personnes qui œuvrent pour mettre fin à la violence faite aux femmes, et, par leur leadership, l’action politique et l’éducation, font valoir l’efficacité d’une action coordonnée pour venir en aide aux femmes victimes d’abus et à leurs enfants.
La coalition repose sur de solides valeurs qui lui sont fondamentales, soit la collaboration pour atteindre l’égalité des droits, l’accès équitable aux ressources et aux services et la justice sociale pour les femmes et leurs enfants.
Nous nous inquiétons aujourd’hui du taux élevé de violence conjugale et de violence sexuelle subie par de jeunes femmes canadiennes. Cette violence et les inégalités entre les sexes créent une situation d’iniquité empêchant les jeunes femmes de s’épanouir.
Dans les écoles secondaires de l’Ontario, environ 46 p. 100 des filles disent être victimes de commentaires désobligeants à caractère sexuel. De plus, quatre étudiantes sur cinq dans les collèges et les universités canadiennes sont victimes de violence au cours de leurs fréquentations. Nous encourageons les jeunes femmes à faire des études supérieures. Cependant, nous omettons de leur dire explicitement qu’au cours des huit premières semaines de leurs études de premier cycle, elles courent un risque élevé d’être violées par une personne qu’elles connaissent. Nous ne leur disons pas non plus qu’elles gagneront assurément moins d’argent que les hommes une fois qu’elles auront leur diplôme, simplement parce que ce sont des femmes.
Les jeunes femmes du pays doivent sentir que nous souhaitons les voir vivre en sécurité et être maîtres de leur destin. Pour que se produise un changement culturel de nature à permettre aux jeunes femmes de se prendre en main, nous devons prévenir la violence qu’elles subissent et comprendre qu’être une femme est un facteur additionnel de marginalisation. Nous devons absolument tenir compte des obstacles qui se dressent devant les jeunes femmes, qui nuisent à leurs chances de réussir dans la vie et qui sont engendrées par le racisme, leurs capacités et leur statut socio-économique.
Notre première recommandation est de mettre en œuvre des programmes de prévention de la violence dans les écoles. Lorsque nous nous efforçons de prévenir la violence, nous devons avoir la force de reconnaître que la violence n’est pas neutre, comme nous le font croire les campagnes contre l’intimidation dans les écoles. Selon nous, ces programmes ne discernent pas les formes de violence, comme le sexisme et le racisme, mais les regroupent, ce qui a pour effet de ne pas imputer les responsabilités comme il le faudrait. Si nous cherchons à mettre fin à la violence contre les filles et les femmes, nous devons comprendre que, même à l’école primaire et à l’école secondaire, les croyances persistent à propos des rôles des filles et des garçons ou des hommes et des femmes.
Qu’est-ce qui fait qu’un programme de prévention donne de bons résulats? Premièrement, nous devons nous engager financièrement à maintenir et promouvoir des programmes mettant l’accent sur le changement des attitudes. Deuxièmement, les programmes doivent viser avant tout un changement d’attitudes à long terme.
Pour effectuer des changements substantiels, le Canada doit incorporer les apprentissages souhaités dans la culture des écoles. Les jeunes hommes et les jeunes femmes ne comprennent toujours pas ce qu’est une relation saine et ils ne valorisent pas la recherche d’une telle relation. L’idée qu’ils se font de la violence sexuelle repose encore sur des mythes. Par exemple, ils pensent que les actes de violence sexuelle sont surtout perpétrés par des étrangers.
C’est une question qui nécessite un engagement à l’échelle nationale. À Ottawa, des programmes ont donné de bons résultats, comme le programme « En amour et en danger », qui vise à conseiller les jeunes hommes et les jeunes femmes pour les aider à entamer des dialogues dans l’école qu’ils fréquentent. Ce genre de programme fait appel à l’influence des pairs afin de provoquer des changements souhaitables.
Permettez-moi par ailleurs de saisir l’occasion pour souligner une dimension importante du travail de la Coalition d’Ottawa contre la violence faite aux femmes. Nous considérons comme essentiel que les jeunes femmes disposent d’endroits où elles peuvent être conseillées. Il nous apparaît en outre important que les jeunes hommes soient inclus dans les efforts de changement.
La Coalition d’Ottawa contre la violence faite aux femmes a commencé à s’adresser aux hommes il y a environ deux ans. C’est l’une de nos priorités, et nous croyons qu’aucun changement culturel n’est possible dans un milieu si les hommes n’en sont pas partie prenante.
Récemment, à l’automne 2011, nous avons entrepris la mise de notre programme intitulé « D’homme à homme », qui incite les jeunes hommes à mettre fin à la violence contre les femmes en abordant des sujets comme la masculinité, la féminité, le sexisme et la violence sexuelle. C’est un programme qui éveille l’espoir et qui nous rappelle que ce ne sont pas tous les hommes qui sont violents.
Je cède maintenant la parole à Bailey Reid, présidente du Comite´ de l’intéressement du public, pour qu’elle vous présente la suite de notre exposé.
Je suis aussi la directrice exécutive d'une organisation d'Ottawa appelée Achieving Excellence, qui offre des services d'alphabétisation et de mentorat aux femmes qui ont commis des crimes. L'une des choses les plus importantes que nous puissions faire pour améliorer les perspectives économiques de filles, c'est de leur offrir des programmes d'alphabétisation et de mentorat. Il est très facile de démarrer de tels programmes, et on constate presque immédiatement des changements chez les jeunes filles.
Le Conseil canadien sur l'apprentissage a déterminé qu'au Canada, le taux d'analphabétisme est d'environ 48 p. 100, ce qui signifie que 48 p. 100 des Canadiens possèdent des compétences inférieures à celles qu'on estime nécessaires, à l'échelle internationale, pour fonctionner en société.
Supposons que vous êtes une jeune fille analphabète. Vous vous sentez vulnérable, car vous ne pouvez ni lire, ni écrire. Vous pensez peut-être que vous n'êtes bonne à rien parce que vous avez été victime d'abus ou d'exploitation ou parce que vous avez des problèmes de santé mentale. Vous avez sans aucun doute dû composer avec les inégalités simplement parce que vous êtes une fille. Vous êtes peut-être une jeune femme de couleur, ce qui augmente le risque d'être encore plus marginalisée et d'être, par conséquent, analphabète.
Selon l'économiste adjoint en chef des Services financiers de la Banque Toronto-Dominion, Craig Alexander, l'économie canadienne pourrait bénéficier d'un apport de 32 milliards de dollars si les taux d'alphabétisation augmentaient de seulement 1 p. 100. Une telle situation serait avantageuse tant pour les filles que pour l'économie: en grandissant, les filles pourraient acquérir de la force de caractère et de la confiance, ce qui leur permettrait d'exiger qu'on réponde à leurs besoins et qu'on leur donne tout ce dont elles ont besoin, tandis que l'économie canadienne serait renforcée.
Nous devons renforcer la capacité des jeunes filles et des femmes à défendre leurs droits, à trouver un emploi équitable et à avoir prise sur leur situation. Pour cela, nous pouvons facilement avoir recours à l'alphabétisation. Le gouvernement doit aussi reconnaître que l'analphabétisme est intimement lié à l'accès aux perspectives économiques, et allouer des fonds aux programmes communautaires d'alphabétisation et aux écoles. Je sais que l'éducation relève de la compétence des provinces. Cependant, je crois que l'alphabétisation est un droit de la personne et que cette responsabilité incombe donc au gouvernement fédéral. Une personne qui ne possède pas les compétences nécessaires pour fonctionner en société ne peut absolument pas aspirer à l'équité financière.
Enfin, notre troisième recommandation consiste à avoir davantage recours à l'analyse comparative selon les sexes pour tous les changements de politique. Nous sommes d'avis qu'il est essentiel de continuer d'avoir recours à l'analyse comparative selon les sexes lorsque nous élaborons des politiques dans différents secteurs. Nous croyons qu'on enverrait un puissant message aux filles et aux jeunes femmes si on intégrait l'analyse comparative selon les sexes à notre système de reddition de comptes, et ce, pour chaque politique, qu'il s'agisse d'une politique du gouvernement, d'une politique scolaire ou d'une politique sur les soins de santé. Si nous voulons créer une société plus équitable pour les filles et les femmes, nous devons faire des progrès et nous engager à examiner de façon critique les répercussions que les décisions auront sur elles.
Nous devons reconnaître les répercussions que les politiques ont sur les différents groupes de femmes au Canada et nous assurer que toutes les jeunes femmes bénéficient des mêmes perspectives. Par exemple, nous devons suivre l'exemple de nos consoeurs autochtones et ainsi mettre en oeuvre et maintenir des programmes qui leur offrent des perspectives équitables.Nous devons montrer aux jeunes femmes autochtones que leur contribution est valorisée en leur offrant des ressources, des programmes d'éducation et des soins de santé.
Je vous remercie de nous avoir permis de témoigner au comité. Nous sommes très heureuses d'avoir pu aborder cette question et de vous avoir communiqué notre point de vue au sujet des mesures qui peuvent être prises pour donner plus de pouvoir aux filles et aux jeunes femmes. Nous voulons assurer leur sécurité dans l'avenir, et nous serons heureuses de collaborer avec vous afin de bâtir un avenir durable pour les filles canadiennes et d'apporter des changements qui leur seront profitables. C'est toujours avec plaisir que nous fournissions des conseils et un soutien à ce comité en ce qui concerne les changements de politique.
Merci.
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Je veux également parler du rappel au Règlement.
Je me réjouis que vous ayez réitéré que l'objectif de cette étude consiste à examiner le leadership et les perspectives économiques des jeunes filles au Canada. N'oublions pas non plus que nous avons décidé que le comité se pencherait au fond sur...
Je le répète, car, concrètement, Condition féminine ne peut rien faire de plus et n'a aucun contrôle sur une motion d'initiative parlementaire. Par conséquent, je me demande où on veut en venir avec ce genre de questions. Manifestement, Condition féminine ne fera pas valoir son opinion ou sa ligne de conduite à l'égard d'une motion d'initiative parlementaire que le gouvernement a déjà dit qu'il n'appuyait pas.
Je tiens donc simplement à le réitérer, car plusieurs témoins de l'opposition ont parlé d'une kyrielle de questions qui sont importantes, mais qui ne sont pas pertinentes dans le cadre de cette étude du comité, qui concerne le leadership, l'orientation, la prospérité, les perspectives économiques des jeunes filles et les mesures que Condition féminine peut prendre à cet égard.
Je tiens à l'indiquer clairement.