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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 042 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 18 octobre 2012

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 42e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
    Nous avons deux témoins aujourd'hui, soit Diane Lank, de Desire2Learn Incorporated, et Jason Kee, directeur de l'Association canadienne du logiciel de divertissement.
    Madame LeBlanc, vous avez quelque chose à dire avant que nos témoins commencent leur exposé.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président.
    Je voulais souligner la présence sur la Colline du Parlement de représentants du secteur manufacturier. J'ai eu le plaisir de les rencontrer. Comme on parlait des travaux futurs du comité, je veux rappeler aux membres du comité que nous avions adopté une motion pour faire une étude portant sur les différents secteurs, dont le secteur manufacturier, dans la perspective de l'innovation. Nous pourrions considérer cette motion pour des études ultérieures.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Je suis désolé, j'ai raté la première partie. De quelle motion parlez-vous, madame LeBlanc?

[Français]

    C'est une motion qui avait été adoptée et qui était déjà sur notre planche de travail. Il était question de se pencher sur l'industrie canadienne, dont fait partie le secteur manufacturier, dans l'optique de la création d'emplois et de l'innovation. Je voulais profiter de la présence de représentants du secteur manufacturier pour rappeler à mes honorables collègues que nous avions adopté cette motion et que nous pourrions étudier ce sujet dans un avenir rapproché.
    C'est tout simplement un rappel.

[Traduction]

    D'accord. Nous en discuterons à la prochaine réunion sur nos travaux.

[Français]

    Certainement. Je voulais profiter de la présence de ces représentants pour le souligner.
    C'est très bien.
    Merci.

[Traduction]

    Je vous ai présenté nos deux témoins, et nous allons commencer. Nous allons suivre l'ordre du programme et commencer par Diane Lank.
    Le greffier vous a mentionné, je crois, que vous disposez de six ou sept minutes pour faire votre exposé, mais comme vous êtes seulement deux, je ne serai pas trop sévère. Je pense que tous les membres du comité seront d'accord avec moi.
     Madame Lank, vous pouvez commencer votre déclaration.
     Je vous en remercie. Je pourrai donc ralentir le tempo.
    Bonjour, monsieur le président, et distingués membres de cet important comité.
    La compagnie pour laquelle je travaille est honorée d'avoir été invitée à comparaître sur cet important sujet qu'est la PI au Canada, et je suis tout aussi honorée d'être ici. Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous faire part de nos vues sur le sujet.
    Je m'appelle Diane Lank, et je travaille comme avocate générale pour Desire2Learn Incorporated, une entreprise située à Kitchener-Waterloo.
    Notre entreprise est une belle histoire de réussite, et ce, non seulement selon les critères de Kitchener-Waterloo, mais aussi selon tous les critères mesurables. Tout n'a pas toujours été facile toutefois. L'entreprise a été fondée par John Baker en 1999, lorsqu'il était encore étudiant en conception de systèmes à l'Université de Waterloo. Il a constitué la jeune entreprise en société l'année suivante, et John en est encore aujourd'hui le président-directeur général.
    Notre entreprise se spécialise dans l'apprentissage en ligne. À l'heure actuelle, nous aidons plus de huit millions de personnes à parfaire leur formation. Nous nous sommes donnés comme objectif de lever les obstacles à l'apprentissage et de motiver les gens partout dans le monde à développer leur potentiel.
    L'Université de Guelph et l'Université du Wisconsin ont été parmi nos premiers clients, et ils sont toujours du nombre aujourd'hui. Aujourd'hui, toutefois, nous débordons le cadre de l'enseignement supérieur. Nous comptons aussi parmi nos clients des écoles de la maternelle à la 12e année, des sociétés et des associations. Notre siège social se trouve toujours à Kitchener-Waterloo — en face, en fait, de nos premiers locaux —, mais nous avons aussi des succursales aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie, à Singapour et, dernier venu dans la famille Desire2Learn, au Brésil.
    J'ai commencé à travailler pour l'entreprise en 2005. Il y avait alors environ 50 employés. John et moi avions convenu que je travaillerais d'abord à temps partiel pour voir comment les choses iraient. Moins d'un mois plus tard, je travaillais à temps plein et j'étais débordée. C'est alors que le plaisir a commencé.
    Quelques mois plus tard, nous avons appris que notre principal compétiteur, beaucoup plus gros que nous, Blackboard Inc., situé à Washington D.C., avait intenté une poursuite contre nous devant la cour de district est du Texas aux États-Unis pour contrefaçon de brevet. La nouvelle est arrivée un mercredi après-midi, et notre congrès des utilisateurs devait avoir lieu la fin de semaine suivante à Guelph. Comme notre clientèle est composée en grande partie d'établissements d'enseignement pour qui la transparence compte beaucoup, nous avons décidé sur-le-champ d'être le plus transparent possible. Nous avons annoncé la nouvelle aux employés le vendredi, et nous avons informé nos utilisateurs à l'ouverture du congrès le dimanche.
    Au départ, nous avions estimé les frais judiciaires à environ 2 millions de dollars américains — et c'était bien avant la parité — pour nous défendre au cours des deux années suivantes, un montant qui s'avérera largement sous-estimé. En effet, nous n'avions pas inclus les autres frais importants liés à une poursuite aux États-Unis: les frais d'enregistrement vidéo et de transcription de dizaines de dépositions, d'interrogatoires oraux, dans le jargon canadien, qui ont donné littéralement des millions de pages de documents que nous avons dû examiner pour savoir ce que nous transmettions à notre principal compétiteur.
    Puis, il nous a fallu examiner les millions de pages produites par Blackboard: les motions, les témoignages d'experts en dommages et technologie, les déplacements pour les audiences, les dépositions et les rencontres; les frais judiciaires et les coûts liés à la demande de réinterrogatoire que nous avons présentée à l'Office des brevets et des marques de commerce des États-Unis. Et la liste continue. Les frais judiciaires, les menus frais et les dépenses afférentes ne tiennent pas compte, de plus, de l'affolement que la poursuite a créé au sein de l'entreprise et de ses effets négatifs sur nos ventes.
    En février 2008, après l'injection de millions de dollars et un procès de deux semaines dans la belle ville de Lufkin, au Texas, nous avons perdu. Le jury a statué que les brevets de Blackboard étaient valides et que nous les avions enfreints. Nous étions sous le coup d'une injonction presque immédiate qui nous empêchait de vendre la version de notre logiciel qui était en cause.
    Je n'ai jamais oublié le voyage de retour au Canada après le procès. Les principaux experts de Desire2Learn étaient dans l'avion. Dès que la consigne lumineuse des ceintures s'est éteinte, John et les autres dirigeants ont commencé à discuter entre eux des solutions pour lancer rapidement un produit qui n'enfreindrait pas le brevet. Au moment de l'atterrissage, ils avaient un plan. Dans les 30 jours qui ont suivi, nous avions un nouveau produit qui, à notre avis, respectait le brevet. Fait étonnant, tous nos clients américains ont accepté la mise à jour dans le court délai de trois mois autorisé par la cour. Pendant toute la durée de la poursuite, nous n'avons pas perdu un seul client.
    En juillet 2009, soit près de trois ans après le début de la poursuite, la Cour fédérale américaine approuvait notre point de vue. La victoire était complète.
(1105)
    Pendant ce temps, notre compétiteur avait intenté d'autres poursuites contre nous: une au Texas, au sujet d'un nouveau brevet qui avait été accordé; une devant la Commission du commerce international aux États-Unis — un sujet très intéressant dont nous pourrions discuter un autre jour —, un organisme quasi judiciaire; et une devant la Cour fédérale canadienne, au sujet d'un brevet qui avait été accordé par l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. Compte tenu des nouvelles poursuites, de notre victoire retentissante en cour d'appel aux États-Unis et du camouflet incontestablement infligé à la réputation de Blackboard sur le marché, tous les litiges se sont réglés en notre faveur en décembre 2009.
    Depuis lors, Desire2Learn a connu une croissance exponentielle. Aujourd'hui, nous sommes fiers d'employer près de 600 personnes dans le monde, dont près de 90 p. 100 se trouvent ici au Canada.
    Qu'est-ce que le Canada aurait pu faire pour nous éviter tous ces problèmes? En pratique, bien peu sans doute. Si un compétiteur veut votre peau, les poursuites, surtout aux États-Unis, sont l'outil idéal pour y arriver.
    Il ne sert à rien de vouloir régler les problèmes liés à la propriété intellectuelle en vase clos au Canada. Nous devons accepter la réalité et être prêts à jouer selon les règles américaines. Bien peu d'entreprises canadiennes peuvent s'offrir le luxe d'être exclusivement canadiennes. Les États-Unis représentent plus de 70 à 80 p. 100 de notre marché; même si nous avons de plus en plus de clients partout dans le monde, les États-Unis demeurent notre principal marché.
    Nous avons adopté la mentalité du « si votre adversaire est plus fort que vous, joignez-vous à lui »; nous déposons des demandes de brevet. Bien que nous ayons recours au Canadian Patent Counsel, toutes nos demandes sont déposées tout d'abord aux États-Unis. Même si nous protégeons nos marques de commerce et nos brevets au Canada, s'y limiter serait néfaste pour nous, tant d'un point de vue offensif que défensif.
    Ce que le gouvernement pourrait faire toutefois, c'est d'allouer des fonds pour sensibiliser les nouvelles entreprises à l'importance de protéger leur PI et leur donner des conseils sur la façon de se préparer à se défendre en cas de poursuites. La sensibilisation pourrait se faire dans le cadre de cours sur la PI dans les programmes d'ingénierie ou par des organisations comme Communitech chez nous, ou même par une très bonne entreprise d'apprentissage en ligne que je connais.
    Vous pourriez également examiner les taxes sur les brevets. Elles sont parfois très élevées. Le montant des taxes pour le maintien en état des brevets, par exemple, est parfois prohibitif pour les nouvelles entreprises. Sur ce point, notre régime diffère de celui des États-Unis, où ces taxes ne sont exigées qu'après l'émission du brevet. Il pourrait aussi être utile de subventionner en partie les demandes de brevet. Selon notre expérience, il coûte entre 8 000 et 12 000 $, sans compter les taxes de dépôt et les coûts à l'interne qui sont importants, pour déposer un brevet de modèle d'utilité provisoire d'un côté ou l'autre de la frontière.
    Les établissements d'enseignement peuvent également être utiles. Les établissements d'enseignement supérieur pourraient, et devraient, dans le cadre d'ententes de confidentialité, nouer le dialogue avec les entreprises ayant mis au point des outils technologiques qui pourraient leur être utiles. Nous sommes actuellement en contact avec un client aux États-Unis qui nous a sollicités à cet égard.
    Je sais qu'il s'agit là d'un grand défi, mais nous encourageons le Canada à collaborer davantage avec les autorités américaines qui s'occupent du régime des brevets, tant l'Office des brevets et des marques de commerce que les autorités judiciaires. Moins d'un mois après avoir perdu notre cause au Texas, l'Office des brevets aux États-Unis déclarait non valide le brevet qui faisait l'objet du litige à la suite du réinterrogatoire que nous avions demandé plus de deux ans plus tôt. La cour a refusé de suspendre les procédures pendant que l'office procédait à son réinterrogatoire. Si les procédures avaient été suspendues pendant le réinterrogatoire, nous aurions économisé des millions de dollars en frais et en coûts. Si on encourageait les autorités judiciaires aux États-Unis à collaborer avec l'Office des brevets et des marques de commerce, plutôt que de travailler à contre-courant, le système en serait d'autant plus efficace.
    Nous aimerions également que les autorités américaines soient mieux informées des dommages à allouer dans les causes de brevet. En effet, bien que le brevet pour lequel nous avons été poursuivis avait très peu de lien avec notre produit dans son ensemble, Blackboard exigeait à l'origine des droits de 45 p. 100 sur toutes nos recettes.
(1110)
    Il doit y avoir un lien entre la valeur de la technologie brevetée et le produit dans son intégralité. Il serait très utile à un moment donné d'avoir des discussions, en particulier avec les États-Unis, sur l'intérêt d'avoir des brevets pour les logiciels. Nous croyons qu'il serait préférable d'opter pour des droits d'auteur, comme pour les livres. Pourquoi devrait-on breveter les logiciels et les méthodes commerciales? Dans certains pays, comme ceux de l'Union européenne, ce n'est pas le cas. Dans les faits, le régime des brevets est davantage lié, aux États-Unis du moins, aux guerres commerciales qu'à la protection de la PI. Dans notre cas, notre compétiteur voulait simplement nous acheter. Il avait tenté de le faire à maintes reprises, mais comme nous refusions, il nous a poursuivis.
    En terminant, je dirais que tous les joueurs, sauf les gros, sont naïfs et ignorants au sujet des poursuites, à moins d'avoir eu comme nous la malchance de goûter à cette médecine. En fin de compte, le Canada ne peut pas vraiment influer sur les tendances en matière de poursuites, bonnes ou mauvaises. La sensibilisation peut aider, mais seulement à prendre conscience des risques. Le Canada peut outiller les entreprises en les sensibilisant et en s'efforçant de réduire les risques lorsque c'est possible. Dans un monde idéal, les États-Unis comprendraient que des juges spécialisés dans le domaine seraient mieux placés pour entendre les causes sur les brevets, comme c'est le cas au Canada, mais le Canada n'a pas d'emprise sur le système judiciaire américain. Le Canada pourrait toutefois jouer le rôle dont il a si bien su s'acquitter dans d'autres domaines: celui d'asseoir les parties à la table pour examiner sérieusement les questions entourant la propriété intellectuelle pour déterminer ce qui doit faire l'objet d'une protection, et comment procéder.
    Je me présente donc devant vous avec plus de questions que de réponses, et une bonne histoire sans doute, mais avec plus de problèmes que de solutions, et bien peu de recommandations fermes. Le régime de PI au Canada, si on adopte la bonne approche, pourrait aider d'autres entreprises à éviter de se trouver dans la même situation que nous. On peut maintenant se demander où en serait notre entreprise aujourd'hui si elle n'avait pas eu à affronter trois ans et demi de procédures judiciaires brutales et extrêmement coûteuses en temps et en argent.
    Merci de votre attention.
(1115)
    Merci, madame Lank.
    Nous passons maintenant à M. Kee.
    Je m'appelle Jason Kee. Je suis le directeur de la politique et des affaires juridiques à l'Association canadienne du logiciel de divertissement. L'ACLD est l'association industrielle qui représente les entreprises au Canada qui fabriquent, commercialisent et distribuent des jeux pour les consoles de jeux vidéo, les appareils mobiles ou de poche, les ordinateurs personnels et Internet.
    Les jeux vidéo sont le divertissement qui connaît la plus forte croissance dans le monde à l'heure actuelle, le succès de certains jeux rivalisant même avec les films d'Hollywood en termes de ventes et de popularité. En 2011, au Canada, les ventes au détail de matériel et de logiciel de divertissement ont connu une hausse de 3 p. 100 et atteignent maintenant 2,5 milliards de dollars. On prévoit actuellement qu'elles continueront de croître pour atteindre les 3 milliards de dollars d'ici 2016.
    Le Canada s'est taillé une place de chef de file mondial dans le développement des jeux vidéo. Les éditeurs et les concepteurs canadiens créent certains des jeux les plus populaires. Le Canada est maintenant le troisième plus important producteur de jeux vidéo dans le monde, derrière les États-Unis et le Japon. Nous sommes le premier par habitant. L'industrie canadienne du logiciel de divertissement a connu une croissance exponentielle, et on prévoit qu'elle croîtra de 17 p. 100 au cours des deux prochaines années, malgré le climat économique difficile.
    Un instant, monsieur Kee.
    Monsieur Lake.
    Si vous pouviez ralentir un peu, ce serait parfait. Nous n'avons que deux témoins aujourd'hui. Vous semblez parler très vite. J'essaie de prendre des notes. Comme le président l'a mentionné, vous pourrez prendre un peu plus de temps pour votre déclaration.
    Et ça donne une chance aux interprètes.
    Merci. L'industrie, qui compte près de 350 entreprises au pays, embauche près 16 000 personnes qui occupent une variété d'emplois très spécialisés et très bien payés. Les employés qui débutent gagnent presque deux fois plus que ce que gagnent en moyenne les diplômés collégiaux. Le salaire moyen offert dans les provinces canadiennes se situe à un peu moins de 75 000 $ par année, soit le double de la moyenne canadienne. L'industrie injecte directement 1,7 milliard de dollars dans l'économie canadienne, et des milliards de dollars de plus indirectement. Qui plus est, les entreprises de jeux jouent un rôle moteur dans la recherche et l'innovation, puisque 55 p. 100 d'entre elles conçoivent une technologie propriétaire et consacrent 25 p. 100 ou plus de leur budget global de production à la recherche et au développement.
    Les éditeurs et les concepteurs de jeux canadiens sont, à n'en pas douter, des chefs de file mondiaux en matière d'innovation et de créativité, et elles jouent un rôle important dans l'économie du savoir. Leur raison d'être est de créer, financer et commercialiser de la PI, ainsi que de concevoir, commercialiser et vendre une grande variété de services et de produits logiciels de divertissement à une vaste gamme de clients. En conséquence, nous pouvons donc dire que la propriété intellectuelle est la pierre angulaire de notre industrie, et que le succès et la croissance continus de notre secteur passent nécessairement par une solide protection des droits de PI et l'application des lois.
    Dans le marché actuel, la conception et l'édition d'un nouveau jeu vidéo très populaire sont des activités très risquées qui exigent souvent des investissements considérables. Un jeu haut de gamme nécessite habituellement des investissements de 15 à 40 millions de dollars et les efforts d'équipes de 100 à 200 personnes qui travaillent ensemble sur le projet pendant au moins deux ou trois ans. On s'attend à ce que ces coûts de conception continuent avec l'arrivée de nouveaux appareils sur le marché.
    Dans l'industrie des jeux, le gros des recettes provient des ventes qui sont effectuées immédiatement après la sortie du jeu sur le marché. Comme nous sommes dans un marché très concurrentiel, les risques sont élevés que l'on n'arrive pas à vendre un nombre suffisant d'unités pour rentabiliser les millions de dollars d'investissement que le jeu a nécessité. En conséquence, les entreprises doivent utiliser les recettes provenant de la vente des jeux très populaires pour éponger les coûts de conception de ceux qui remportent moins de succès. Dans ce type de marché, le piratage des logiciels de jeux vidéo a un effet dévastateur, car il prive les entreprises des recettes dont elles ont besoin pour récupérer les investissements colossaux nécessaires pour concevoir des produits populaires. Si rien n'est fait pour contrer le piratage, cela mène à la fermeture des studios et à des pertes d'emplois.
    En procurant aux titulaires de droits les outils dont ils ont besoin pour protéger leurs droits et poursuivre ceux qui facilitent le piratage, un régime de PI robuste permet aux créateurs et aux entreprises de choisir eux-mêmes la meilleure façon de commercialiser leurs produits sur le marché. On stimule ainsi les investissements dans les nouveaux produits et services et les nouvelles méthodes de distribution, et on ouvre la voie à de nouveaux modèles d'affaires novateurs et variés, qui à leur tour favorisent une concurrence légitime, un choix varié, et en fin de compte, de meilleurs prix pour les clients.
    On en trouve un exemple dans le projet de loi C-11, la Loi sur la modernisation du droit d'auteur, qui a été adopté récemment et qui contient de nouvelles dispositions pour empêcher le contournement des mesures techniques de protection, ou MTP, utilisées pour protéger les oeuvres couvertes par le droit d'auteur. Ces mesures sont cruciales dans l'industrie du jeu vidéo, car nous utilisons abondamment des MTP sophistiquées pour protéger nos produits. En l'absence d'une interdiction légale de contournement de cette forme de protection, un marché prospère et lucratif, mais illégitime, d'appareils et de services visant expressément à briser le mécanisme de protection et à faciliter le libre piratage s'est développé. En fait, le commerce des appareils et des services qui permettent le piratage de nos jeux a libre cours au Canada, si bien que notre pays s'est acquis la réputation peu enviable d'être un important centre de transbordement pour ces appareils.
    De plus, nous sommes au coeur d'un changement radical dans notre façon de consommer notre contenu. Les créateurs se servent de plus en plus des plateformes en ligne et d'autres moyens de distribution nouveaux et novateurs pour obtenir du contenu. Les mesures anticontournement solides comme celles prévues dans le projet de loi sont indispensables, non seulement pour prévenir le piratage et permettre aux créateurs de décider comment leur oeuvre sera utilisée, mais aussi pour s'assurer que les nouvelles plateformes sont sûres et préservent l'intégrité du marché numérique naissant et en développement. Le projet de loi contient des mesures urgentes pour nous permettre de poursuivre ceux qui facilitent le piratage en faisant le trafic de ces appareils et services, et nous attendons impatiemment que ces dispositions entrent en vigueur.
    Nous recommandons fortement, de plus, de renforcer les recours civils et criminels qui s'appliquent à la violation du droit d'auteur à des fins commerciales, de même que l'instauration de nouvelles mesures à la frontière, comme l'octroi de pouvoirs aux douaniers pour les autoriser à saisir d'office tout produit piraté ou contrefait et tout appareil de contrefaçon sans ordonnance du tribunal, ce qu'ils ne peuvent pas faire à l'heure actuelle.
    Des mesures similaires font déjà partie de l'accord commercial sur la contrefaçon qui fait actuellement l'objet de discussions.
    Enfin, on devrait enjoindre aux agents d'application de la loi et aux procureurs d'appliquer plus vigoureusement les mesures législatives touchant la PI dans le cadre de leurs activités et d'exiger des peines dissuasives pour ceux qui sont reconnus coupables d'un crime lié à la PI.
    Merci beaucoup, et je serai heureux de répondre à vos questions.
(1120)
     Merci beaucoup, monsieur Kee.
    Entamons la période de questions. Monsieur Lake, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins, qui nous ont donné amplement matière à réflexion.
    Je débute par Mme Lank. Il y a environ un mois, j'ai eu l'occasion de visiter Desire2Learn. Comme je vous le disais plus tôt, j'ai été sidéré par l'ampleur de l'opération. Je n'en avais aucune idée. J'ai cru comprendre que sa croissance est rapide. Vous pourriez peut-être nous en toucher un mot.
    Combien d'employés y a-t-il? Il semble que les effectifs vont augmenter. Dans quelle mesure et pourquoi?
    Pour commencer, un peu de publicité. Si vous êtes à la recherche d'un emploi, nous en offrons environ 170 sur notre site d'offres d'emplois. Nous avons environ 600 employés dans le monde entier. Environ 90 p. 100 sont au Canada, l'immense majorité à Kitchener-Waterloo. Nous inaugurons bientôt un petit bureau à St. John's, mais la plupart des employés sont à Kitchener-Waterloo. En fait, c'est là que se trouve notre seul bureau officiel, du moins cette semaine.
    Notre croissance a été phénoménale. En 2005, nous étions 50 employés, et nous sommes maintenant 600, mais la croissance n'a pas été continue. Lorsque le procès sur le brevet s'est terminé en décembre 2009, nous étions environ 150. La plus grande partie de la croissance a eu lieu ces trois dernières années.
    Je ne pense pas que personne, dans notre compagnie, n'ait reconnu à quel point le procès sur le brevet avait refoulé la demande, chez les deux parties, notre concurrent et nous. Beaucoup de clients éventuels attendaient le dénouement, et, depuis, la demande est phénoménale.
    Nous sommes emballés. Nous avons emménagé dans de nouveaux locaux, qui, à Kitchener-Waterloo, sont vétustes. Nous cherchons maintenant à nous agrandir. Nous sommes dépassés par le rythme de l'embauche. Je connaissais les trois personnes du service des ventes, maintenant, je n'y arrive pas. Nous adorons notre siège canadien et nous n'avons aucunement l'intention de le quitter.
    Certains savent peut-être que nous venons de conclure notre toute première opération de financement, ce qui est assez remarquable pour une société de notre taille. Nous avons bénéficié d'un investissement transnational de 80 millions de dollars. Près de la moitié provient de l'OMERS, le Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario, le reste d'un groupe américain d'investissement, NEA.
    Nous sommes vraiment excités par la tournure des événements.
(1125)
    Ce qui se produit à Kitchener-Waterloo est très excitant. Je suis sûr que M. Braid partage cette émotion, mais, pour moi, le rajeunissement du centre-ville historique où vous vous trouvez a été une vraie révélation. Vous avez quelque chose en commun avec Google et beaucoup d'autres compagnies prospères.
    Ce procès est un sujet intéressant. Malgré votre victoire...
    Finalement...
    ... il a empêché votre croissance. Il a vraiment paralysé l'incroyable potentiel de croissance qui se serait probablement manifesté plus tôt, au moment propice pour l'économie de votre région.
    Qu'est-ce que la compagnie aurait fait de différent, depuis le début? Sachant ce que vous savez maintenant, qu'est-ce que vous auriez changé?
    C'est une question dont nous discutons dans une certaine mesure entre nous.
    Après coup, je pense que nous aurions estimé les frais et les coûts de façon plus réaliste. J'ai beau être avocate et être habituée à ce genre de calcul, mais j'ignore comment nous aurions pu. Personnellement, j'aurais eu des discussions plus sérieuses avec John et le reste de la direction sur l'effort marathonien que peut exiger un procès aux États-Unis.
    Si vous permettez, je vous interromps. Je voulais dire plus tôt que cela, je parlais du mode d'organisation de votre propriété intellectuelle, tout ce qui se trouve à l'origine du procès.
    À propos, John vous présente ses excuses. Je sais qu'il aurait adoré se retrouver ici.
    Hier, lui et moi, nous nous en sommes parlé. Je lui ai demandé ce qu'il aurait fait de différent. Je pense que la seule différence possible aurait été de garnir notre portefeuille défensif de brevets. C'est une stratégie assez répandue chez beaucoup de compagnies d'aujourd'hui. C'est un peu comme, dans la course classique aux armes, l'assurance d'une destruction mutuelle: vous avez deux brevets, nous en avons trois, et si vous nous attaquez, nous allons l'emporter. Au début de son entreprise, rien ne l'incitait à prendre cette précaution. En fait, il dit qu'on lui a fait comprendre que, au Canada, les bonnes idées ne se brevetaient pas. Il faut se rappeler que, au début, son horizon se limitait pas mal au Canada.
    C'est probablement la seule chose qu'il aurait pu faire, à l'exception de vendre sa compagnie à notre concurrent ou de s'entendre à l'amiable. Si nous avions eu des brevets, cela aurait pu changer quelque chose. Rappelez-vous, nous avons été actionnés en 2006 pour un brevet déposé aux États-Unis en 1999. L'antériorité a donc beaucoup d'importance. Même si nous avions demandé un brevet en 2000, 1999 l'emporte. C'est une question très difficile, et la seule réponse, c'est de s'informer plutôt deux fois qu'une. Les jeunes entrepreneurs, les jeunes compagnies doivent connaître les risques. Je sais, 8 000, 10 000, 12 000 $, c'est beaucoup d'argent pour un brevet d'utilité, mais c'est des broutilles par rapport aux millions que nous avons dépensés en pure perte, de l'argent qui, en grande partie, s'est envolé vers le Sud.
    Merci beaucoup. Nous avons écoulé notre temps.
    Merci beaucoup, madame Lank et monsieur Lake.
    Passons à Mme LeBlanc.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs présentations.
    Madame Lank, j'aimerais vous interroger à mon tour. Dans votre allocution, vous avez dit:

[Traduction]

    « ce n'est pas utile, d'un point de vue offensif ou défensif », mais ce qui précédait m'a échappé.

[Français]

    Pourriez-vous nous en dire un peu plus à propos de cet énoncé?

[Traduction]

    Les brevets peuvent servir à attaquer et à se défendre. Nous revenons à la métaphore de la destruction mutuelle. Un brevet permet de menacer un concurrent de poursuites ou de l'obligation de payer des redevances sur licence, s'il s'entête à poursuivre telle activité. Voilà pour l'attaque. Si, cependant, l'adversaire utilise la même tactique, nous pouvons lui répondre que nous allons l'actionner à notre tour pour contrefaçon de brevet. Un brevet canadien ne nous aurait été d'aucune utilité, parce que nous étions poursuivis aux États-Unis.
    Aurions-nous pu poursuivre notre adversaire au Canada? Oui. Qu'est-ce que ç'aurait fait? Probablement peu de choses. Ça ne lui aurait pas fait mal au portefeuille ni fait de tort sur le marché. La différence entre les coûts des procès pour brevet, entre les deux pays, est astronomique. C'est incroyable. Nous avons obtenu un devis, car nous avons été poursuivis au Canada. Depuis le dépôt de l'action jusqu'à la production des renseignements nécessaires, en passant par l'interrogatoire préalable, cela se serait chiffré à environ 500 000 $. Je pense que, aux États-Unis, nos frais, finalement, ont dépassé les 10 millions.
(1130)

[Français]

    C'est vraiment intéressant, parce que...

[Traduction]

    Pardon, combien?
    Au Canada, on les estimait à 500 000 $ et, aux États-Unis, je pense que nous avons fini par dépenser un peu plus de 10 millions de dollars.

[Français]

    Vous nous démontrez qu'il y a vraiment une différence de culture entre les Américains et les Canadiens.
     Vous avez également parlé de l'importance pour les compagnies d'être bien informées avant d'aborder ce genre de situation. Selon vous, quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral? Au gouvernement, il y a certaines choses sur la propriété intellectuelle, les brevets, etc. Selon vous, quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral et de quelle façon pourrait-il être bonifié?

[Traduction]

    Il est très difficile de répondre à cette question. Encore une fois, John et moi, nous nous en sommes parlé hier. Il disait, par exemple, que, peut-être, le gouvernement pourrait financer les demandes initiales de brevet des jeunes sociétés. C'est un moyen. L'information, l'information et encore l'information: nous devons nous assurer que les entrepreneurs, les jeunes comme les vieux, d'ailleurs, soient sensibilisés aux risques. Nous devons les sensibiliser aux différences qu'entraîne la géographie, que, au sud, c'est le terrain de jeu des grands et que les risques, tout comme les gains peuvent être à l'avenant. Concrètement, c'est une question très difficile.

[Français]

    J'ai une dernière question.
    Un témoin qui a comparu devant le comité a mentionné que ce serait peut-être une bonne chose d'avoir, au sein du gouvernement, un conseiller en propriété intellectuelle. Ce conseiller aurait également un bureau qui pourrait aider les entreprises sur les questions de propriété intellectuelle.

[Traduction]

    Au début du procès, des collègues dans la compagnie nous ont conseillé d'obtenir l'aide du gouvernement canadien. Nous avons rapidement appris que nous ne devions compter que sur nos seuls moyens. Dans le système canadien, nous n'avons réussi à trouver personne qui aurait pu nous aider. Je pense que ce serait une bonne idée que de pouvoir compter sur les conseils de quelqu'un. Cela fonctionne pour l'entrepreneur qui cherche à s'établir à l'étranger. L'ambassade canadienne en Colombie nous a beaucoup aidés à cet égard. Au Brésil également. Mais, pour le cas dont nous parlons, vraiment aucun agent fédéral ne pouvait nous aider. Ç'aurait pu nous être utile.

[Français]

    Notre étude porte aussi sur l'innovation. Comment percevez-vous l'acquisition de brevets de propriété intellectuelle? Aident-ils à l'innovation ou l'empêchent-ils?

[Traduction]

    La position de la compagnie est que les brevets de méthodes logicielles en vue de faire des affaires n'aident pas à l'innovation. Ils servent plus aux guerres entre les entreprises qu'à vraiment protéger une innovation unique en son genre.
    L'un des produits canadiens que je préfère est la vis Robertson. Le brevet sur un logiciel n'est pas une vis Robertson qui mériterait la protection de l'État. Cependant, je ne crois pas que des fournisseurs de logiciels canadiens décideraient, pour cette raison, de ne jamais demander de brevet. Nous revenons aux loups: il faut savoir hurler avec eux. C'est pourquoi, autant nous ne sommes pas entichés des brevets pour des logiciels ou des brevets pour des méthodes en vue de faire des affaires, autant nous essayons de demander des brevets, pour nous défendre.
    Je ne dirai jamais que nous n'actionnerons jamais personne, mais nous tenons à utiliser notre arsenal de manière beaucoup plus défensive qu'offensive.
(1135)

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup. C'est la fin de cette intervention.
    Poursuivons avec M. Braid, qui dispose de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également nos deux témoins d'être ici.
    Merci beaucoup, madame Lank, d'être venue de Kitchener-Waterloo pour nous parler des antécédents et des compétences de la société Desire2Learn. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Pour commencer, une question au sujet de Blackboard Inc. Cette compagnie américaine est-elle toujours en activité?
    Oui. Curieusement, au cours des quelques derniers mois, elle a dû mettre à pied environ 200 personnes. C'était une société ouverte, dont les actions étaient cotées. Il y a environ huit mois, je pense, c'est devenu une société fermée. Oui, elle est encore en activité.
    Comment se comparent vos parts de marché respectives aux États-Unis?
    La nôtre a augmenté. La sienne a diminué, je pense. Nous étions en mesure de nous renseigner davantage sur cette compagnie quand elle était ouverte, bien sûr. Maintenant, elle est comme nous, c'est une compagnie fermée.
    Notre part du marché a augmenté aux dépens de Blackboard. Nous affrontons désormais d'autres adversaires. Nous prenons également pied dans des domaines nouveaux, de sorte que nous avons de nouveaux concurrents. Actuellement, nous visons le marché des sociétés, des associations, ce genre d'industries, celles qui sont à intégration verticale. Nous découvrons des joueurs différents sur le marché.
    Blackboard a beaucoup souffert du procès, qui a fini par nous faire paraître immaculés sur le marché. Nous ne nous en sommes pas cachés. Nous avions un registre des brevets dans lequel nous publiions toutes les actions en justice, ce que Blackboard n'appréciait pas beaucoup. Nous affichions tout, le bon comme le mauvais. Tout simplement. C'était une stratégie particulière que nous n'aurions pas adoptée, je pense, si nous avions été dans un scénario de commerce interentreprises, mais nos clients étaient des spécialistes de l'enseignement, des fonctionnaires. Ils tenaient à être au courant. Je pense que, finalement, nous avons gagné la guerre des relations publiques en plus du procès, après un effort très soutenu.
    Je dirais, en employant une métaphore texane, que vous avez gagné une bataille comme celle d'Alamo, une bataille un peu sanglante, sale et longue.
    Oui, et c'était gênant pour l'organisation. Le système judiciaire américain dépend tellement des témoignages, des documents, etc. Toute notre haute direction a dû se déplacer, à quelques reprises, pour des témoignages. Chaque témoignage prend du temps pour se préparer. On a également examiné des documents. C'est vraiment gênant.
    Sur la demande de brevets aux États-Unis, nous avons le témoignage d'autres sociétés. Certaines la justifient par le fait que les États-Unis représentent leur principal marché. Est-ce le cas pour Desire2Learn, est-ce que cela fait partie d'une stratégie défensive ou bien, encore, est-ce un peu des deux?
    Oui.
    Plus précisément?
    Sûrement pour les deux raisons.
    Permettez-moi de préciser. Nous n'ignorons pas le système canadien de brevets ou le système de marques de commerce. Dans ce dernier cas, par exemple, nous déposons toujours, en même temps, une demande de brevet au Canada et aux États-Unis. Nous voulons protéger notre marque de commerce dans les deux pays.
    La demande de brevet coûte un peu plus que l'obtention de la marque de commerce. Nous sommes un peu plus sélectifs. Nous sommes un peu plus prudents dans le choix du moment. Mais je ne crois pas que notre compagnie ne demande que des brevets américains. Nous voudrons toujours être protégés au Canada et dans les autres pays aussi.
(1140)
    Absolument.
    Aux États-Unis, recourez-vous aux brevets provisoires? Avez-vous une opinion à ce sujet? Au Canada, ce système n'existe pas. Nous en entendons parler aussi à nos audiences. D'après certains, c'est une pratique exemplaire.
    Qu'en pensez-vous?
    Nous n'avons pas demandé de brevets provisoires. Je ne suis pas sûre si nous sommes pour ou contre. Nous savons que ça existe. Cela permet de marquer sa place dans la file d'attente.
    Les non-spécialistes sauront que c'est un moyen permettant de déposer un document dans lequel on annonce qu'on a eu un éclair de génie. Si, un an plus tard, cette idée s'est bien cristallisée, on peut déposer ses revendications pour le brevet qui sera daté du moment du dépôt de la demande de brevet provisoire.
    Nos idées, nous tenons maintenant à les déposer. Nous sautons donc directement à l'étape des revendications.
    Le message important de votre exposé d'aujourd'hui, c'est l'importance de l'information, particulièrement pour les jeunes entreprises. L'Office de la propriété intellectuelle du Canada y trouverait-il, peut-être, un rôle et, indirectement, le gouvernement, lui aussi, pour appuyer ou accélérer ce processus d'information?
    Dans un monde idéal, d'où le géant américain serait absent, je dirais qu'ils auraient un rôle très important. Ce serait merveilleux si l'office utilisait une méthode simplifiée de demande de brevet, si, peut-être, il pouvait accompagner la jeune entreprise et la guider.
    La difficulté, c'est que cela ne s'harmoniserait pas très bien avec le système américain. On veut qu'il y ait une certaine parité entre les deux systèmes, qui existe actuellement. Les systèmes de revendications sont à peu près semblables.
    Dans l'éventualité où les sociétés veulent uniquement déposer leurs demandes de brevets au Canada, je pense que l'office pourrait simplifier considérablement la marche à suivre, mais je pense que si les sociétés veulent déposer aussi un brevet aux États-Unis, je ne suis pas sûre que ce serait utile.
    Merci beaucoup, madame Lank et monsieur Braid.
    À M. Regan, maintenant, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci également aux deux témoins d'être ici.
    D'après votre expérience, que peut faire le gouvernement du Canada pour que les entreprises canadiennes soient plus innovatrices?
    C'est une petite question.
    On pourrait faire plus que ce qu'on fait en ce moment. Je sais par exemple que notre entreprise tire profit le plus possible des crédits d'impôt à la RS&DE. On a entendu l'autre soir au débat des présidentielles américaines à quel point le taux d'imposition des sociétés est intéressant au Canada.
    Je pense que les universités peuvent jouer un rôle important dans la promotion de l'innovation. C'est phénoménal. Nos locaux sont situés dans un immeuble appelé « The Tannery », qu'occupe aussi Communitech, notre technopole locale. On y trouve beaucoup de jeunes entreprises, et l'enthousiasme qu'elles suscitent est absolument remarquable. Je n'en suis pas certaine, mais je soupçonne que le gouvernement a quelque chose à voir avec le financement d'organisations comme Communitech.
    Je peux vous dire que Communitech stimule énormément l'innovation. Je ne suis pas convaincue que le gouvernement peut lui-même donner naissance à des entreprises innovatrices, mais je pense qu'il peut encourager l'innovation par l'entremise d'organisations et d'associations diverses, et aider les entreprises qui prennent part à ces initiatives grâce à crédits d'impôt ou à des mesures semblables.
     Je n'ai pas d'autre exemple précis à donner.
(1145)
    Avant de m'adresser à M. Kee, quand vous parlez de crédits d'impôt ou d'autres...
    Je veux parler de mesures d'incitation financière.
    Depuis le dépôt du rapport Jenkins, on se demande s'il faudrait offrir des crédits d'impôt ou des subventions directes. Qu'en pensez-vous? L'ennui évidemment avec les subventions directes, c'est que c'est le gouvernement qui décide des gagnants, plutôt que de laisser le milieu des affaires décider lui-même s'il convient ou non de faire des recherches et de lui accorder des crédits d'impôt en conséquence.
    Puis-je répondre les deux?
    Vous êtes libre de répondre ce que vous voulez.
    C'est intéressant. L'entreprise pour laquelle je travaille en ce moment va tenter d'obtenir des subventions. Nous profitons d'une subvention de l'Ontario en ce moment, du Fonds pour les emplois dans les secteurs émergents, qui nous a été d'une aide immense. Nous avons également reçu une subvention de Terre-Neuve pour établir nos bureaux là-bas. Je pense que les subventions ont absolument leur raison d'être.
    Le problème avec les subventions, c'est qu'il faut être très bien informé pour savoir à quelle porte frapper et comment présenter une demande. Les formalités administratives entourant les subventions peuvent parfois être décourageantes. Les subventions ont leur place, mais les incitatifs financiers comme les crédits à la RS&DE ont aussi la leur.
    Monsieur Kee, deux questions ont été lancées jusqu'à maintenant.
    Pour ce qui est de la deuxième question, je dirais aussi que les deux ont leur place. Je pense que les deux ont un rôle à jouer.
    Je crois que le processus de demande d'une subvention directe peut s'avérer complexe, mais celui des crédits d'impôt l'est autant, sinon plus, particulièrement pour les crédits à la RS&DE.
    Je suis persuadé que le comité a aussi entendu parler de l'industrie artisanale de consultants qui offrent de faciliter le processus, mais qui retiennent 25 p. 100 du montant dès le départ. Cet argent va aux consultants, pas à l'industrie.
    Permettez-moi de vous poser la question suivante. Si on exigeait que les entreprises qui entreprennent des travaux de R.-D. indiquent au préalable leur intention de soumettre une demande de crédit, pensez-vous que cela permettrait d'éliminer une partie de cette industrie artisanale, si je peux m'exprimer ainsi?
    Je ne pourrais pas me prononcer sur les initiatives en cours. Il existe de nombreuses façons de rationaliser les processus pour les rendre plus efficaces, tant pour le gouvernement qui doit administrer tout cela, que pour les entreprises qui tentent d'obtenir des fonds.
    Les crédits d'impôt peuvent être une option préférable compte tenu de la nature impartiale du processus. Si vous êtes admissible, vous pouvez présenter une demande, et c'est tout. Peu importe qu'il s'agisse d'une petite ou d'une grande entreprise, le programme est également accessible à tous. La plupart des travaux importants de R.-D. sont toutefois entrepris par des entités de plus grande envergure.
    Les petites entreprises préfèrent généralement un modèle de financement direct, qui s'avère plus avantageux pour elles. C'est qu'elles n'ont pas le capital nécessaire pour survivre jusqu'au moment de produire leur déclaration d'impôt et de recevoir ce remboursement, qui ne les amènera pas très loin non plus. Dans certaines industries, mais pas toutes, des mesures financières ont été mises en place, notamment dans le secteur des finances, pour offrir des fonds de transition à cet effet, particulièrement pour les crédits à la RS&DE et certains autres. Le secteur des finances n'est pas aussi rompu à l'utilisation de ce type de crédits, alors je pense que le meilleur système réunirait les deux options, car il pourrait répondre aux différents besoins des entreprises de tout type et de toute taille.
    Notre industrie profite certainement de différents types de financement. Les petites comme les grandes entreprises bénéficient en effet de crédits d'impôt et de subventions directes.
    Pour ce qui est de la question sur l'innovation, c'en est une assez large. À mon avis, la propriété intellectuelle joue un rôle clé à cet égard, mais ce n'est qu'une petite partie de la solution. Il faut aussi préciser ce qu'on entend par propriété intellectuelle. Dans sa présentation, Mme Lank a parlé du régime des brevets. Il est aussi question du régime des brevets dans un contexte interentreprise. Même si beaucoup des entreprises membres de notre association ne recourent pas vraiment au régime des brevets, elles ont des droits d'auteur et des marques de commerce, et il n'est pas rare du tout que les entreprises s'affrontent devant les tribunaux à ce sujet.
    L'idée maîtresse de ma présentation ne portait pas là-dessus. Ce qui pose problème pour nous à propos de l'application des lois régissant la PI, c'est la poursuite en justice des criminels, ceux qui s'adonnent à la contrefaçon et au piratage à grande échelle. C'est un tout autre problème. Il s'agit de veiller à fournir les ressources nécessaires aux organismes d'application de la loi pour intenter des poursuites, mais aussi de voir à ce que les mesures appropriées soient en place pour nous permettre de réagir en conséquence. C'est très différent, et il faudrait se pencher sur la question de façon indépendante.
    Il faut ici aussi avoir un régime mixte. Les crimes liés à la PI sont manifestement un enjeu national. Il s'agit de voir ce qui se passe au Canada et ce que nous pouvons faire comme Canadiens et ce que peut faire le gouvernement canadien pour remédier à la situation. Je suis tout à fait d'accord avec Mme Lank pour ce qui est du commerce interentreprise; nous évoluons tous dans un contexte mondial aujourd'hui. Donc, si on se penche sur le régime canadien, il faut reconnaître que le Canada peut contrôler son propre régime et peut-être influer sur celui des autres. Cependant, ce sont les États-Unis qui vont surtout influencer le régime des brevets et le régime de règlement des litiges relatifs aux brevets, car c'est là où les dommages sont les plus importants. Nous n'avons pas les mêmes problèmes ici. Il est important de se le rappeler.
(1150)
    Merci, monsieur Kee.
    Notre temps est écoulé depuis un moment déjà. Merci, monsieur Regan.
    Nous entamons donc le prochain tour. Ce sera des interventions de cinq minutes, et nous allons commencer avec M. Carmichael.
    Merci, monsieur le président.
    Nous tâcherons d'être brefs et de mieux résumer nos questions.
    Pour revenir au piratage, je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Kee. Le Canada a bien sûr un régime de protection du droit d'auteur et des marques de commerce. Vous en avez parlé un peu dans votre déclaration liminaire. Est-ce que le Canada en fait suffisamment à cet égard en ce moment?
    Aussi, on a entendu parler des choses qui se passent aux États-Unis, comme celles auxquelles Mme Lank a fait référence, mais qu'est-ce qui se fait là-bas pour lutter contre les problèmes semblables?
    Le principal défi auquel nous sommes confrontés en ce qui a trait au piratage et à la contrefaçon, ce qui revient à parler du droit d'auteur et des marques de commerce, surtout les marques de commerce, c'est qu'il y a encore bien des lacunes à corriger. La Loi sur la modernisation du droit d'auteur était un grand pas dans la bonne direction pour remédier à certains de ces problèmes. Nous avions tous une opinion différente à propos de cette loi. Elle mettait de l'avant certaines choses qui nous paraissaient souhaitables, et d'autres pas. Elle nous a permis de gagner un peu de terrain en vue de remédier aux principales difficultés. C'était très important pour nous compte tenu des mesures de protection technologiques et de la grande importance qu'elles revêtent pour notre secteur.
    En ce qui concerne les marques de commerce, il y a encore bien des choses à régler. L'application de la Loi sur les marques de commerce pose beaucoup de problèmes à l'égard des dispositions criminelles et des mesures anti-contrefaçon. Il est possible de prendre certaines mesures pour protéger le droit d'auteur, mais pas les marques de commerce en raison de l'application de la loi, qui s'avère difficile pour l'industrie.
    Le plus grand défi réside dans l'application même de la loi et dans l'affectation de ressources suffisantes. La législation comporte des dispositions assez sévères à l'égard de la contrefaçon. Même en présence d'un vrai criminel, qui cadre avec les dispositions en question, des poursuites ne sont pas nécessairement intentées contre lui, et si c'est le cas, les procureurs finissent généralement par y renoncer. Cependant, les infractions relatives à la PI sont prises beaucoup plus au sérieux depuis quelques années.
    La sensibilisation des procureurs de la Couronne pose un réel défi. Au Canada, il n'y a pas de procureurs spécialisés dans le domaine de la criminalité liée à la PI, par exemple. On en trouve quelques-uns aux États-Unis. C'est pour cette raison que les poursuites sont abandonnées. Même si on met la main sur des gens qui ont des entrepôts remplis de produits contrefaits, la Couronne leur impose une pénalité de 5 000 $ et leur donne un sursis, et les voilà repartis vers leur prochaine entreprise. Ce n'est pas vraiment une mesure dissuasive. C'est un prix minime à payer pour faire des affaires. Quand les gens se rendent compte qu'ils peuvent faire autant d'argent en vendant des produits contrefaits, notamment les médicaments, par exemple le Viagra, qu'en vendant les vrais produits, et que la pénalité n'est que de 5 000 $, il est évident qu'ils vont se tourner vers ce secteur, parce que les risques sont beaucoup moins grands.
    Cela revient en réalité à affecter les ressources nécessaires pour remédier à la situation, et franchement à sensibiliser les forces de l'ordre et les procureurs de la Couronne, de même qu'à désigner des personnes-ressources qui pourront se charger d'intervenir dans ces dossiers.
    Tout dépendant de l'étendue de ce marché, l'apprentissage en ligne pourrait constituer une bonne option.
    En effet.
    Qu'en est-il des États-Unis? Est-ce que l'application de la loi se fait de façon rigoureuse? Est-ce une question de sensibilisation ou strictement d'application de la loi?
    C'est probablement l'ensemble de ces réponses. Les forces de l'ordre étant sollicitées de toutes parts, on comprend que la criminalité liée à la PI ne soit pas nécessairement leur priorité numéro un. On voudrait simplement qu'elles prennent la chose au sérieux, ou plus au sérieux que par le passé. Les forces de l'ordre, notamment la GRC, se sont beaucoup améliorées à cet égard. C'est plutôt du côté des procureurs de la Couronne qu'on se heurte à une certaine résistance.
     Les États-Unis ont beaucoup investi dans la sensibilisation. Une de leurs initiatives a été de mettre en place un nouveau bureau à la Maison-Blanche, le Bureau du coordonnateur de l'application des droits de propriété intellectuelle. Son rôle est d'assurer une liaison avec les différents départements, qui ont tous une part de responsabilité à l'égard de la PI, et en veillant à ce qu'ils communiquent entre eux et trouvent ensemble des moyens de mieux faire appliquer les lois à l'aide des ressources disponibles. Il y a d'abord l'aspect sensibilisation. Ils s'assurent également d'allouer des ressources afin de poursuivre en justice ceux qui contreviennent aux lois sur la PI, et ils le font de façon beaucoup plus intensive et sévère que nous, au Canada.
(1155)
    D'accord, merci.
    J'ai une question à poser rapidement à Mme Lank concernant l'adoption d'une position offensive ou défensive à l'égard de la protection des brevets. Quand une entreprise canadienne tente de percer un marché d'envergure comme celui des États-Unis, peut-elle se permettre d'aller de l'avant sans avoir de brevet pour toutes ses créations et innovations?
    Nous l'avons fait.
    Compte tenu des coûts et de l'exposition aux risques qu'on doit assumer quand on entre dans les ligues majeures, n'y a-t-il pas un endroit où vous ne pouvez tout simplement pas vous permettre d'aller sans d'abord prendre ces précautions?
    Dans un monde idéal, oui, mais souvenez-vous que nous avions environ six employés quand nous sommes allés aux États-Unis pour la première fois.
    C'est la réalité des jeunes entreprises, vu les coûts.
    Ce n'est pas du tout une priorité. On veut tout simplement vendre nos produits.
    Je crois que c'est aussi vrai pour un créateur de jeux vidéo que pour un créateur de modules d'apprentissage en ligne. Les petites entreprises n'ont vraiment pas le réflexe d'aller vérifier les brevets pour éviter d'être poursuivies. Ce n'était pas une considération.
    Merci, madame Lank. Je suis désolé, mais le temps est écoulé pour cette intervention.
    La parole est à M. Harris pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Nous sommes toujours à court de temps pour poser toutes nos merveilleuses questions.
    J'aime ce que j'entends ces temps-ci à propos des subventions et des crédits d'impôt. Il faut tâcher trouver le parfait équilibre pour favoriser l'innovation et la recherche-développement.
    Je sais, madame Lank et monsieur Kee, qu'il faut probablement adopter une approche différente pour breveter des logiciels et des méthodes commerciales. C'est évidemment permis aux États-Unis, mais pas en Europe.
     Nous sommes en train de négocier l'accord commercial Canada-Europe. Je vous demanderais à tous les deux de me donner votre avis, à savoir si dans ces négociations le Canada devrait davantage suivre le modèle des États-Unis et inciter l'Europe à faire de même, ou plutôt de suivre le modèle de l'Europe à cet égard.
    Sur ce point, l'industrie du jeu vidéo se sert habituellement de brevets, particulièrement pour tout ce qui est autre que le matériel. Je suis sûr que Microsoft, Nintendo et Sony ont des brevets sur leurs consoles, comme c'est le cas pour tous leurs appareils électroniques grand public. Il n'y a rien d'exceptionnel là-dedans. Cela n'a rien à voir avec les éléments controversés et difficiles des brevets sur les logiciels et les pratiques commerciales, dont nous venons de parler.
    Nous n'avons pas un point de vue bien arrêté sur cette question. Je n'ai jamais entendu de préoccupations au sujet de la situation actuelle au Canada, parce que notre contexte est différent de celui des États-Unis. Nous ne recourons pas au brevetage avec autant d'intensité, et rien ne m’indique que cela va changer.
    Je parle maintenant à titre personnel, et non pour le compte de l'entreprise. J'aurais tendance à souscrire davantage au point de vue européen. Cela dit, nous devons quand même travailler avec les États-Unis. À mon avis, cela ne signifie pas que le Canada devrait suivre le modèle américain, mais même si le Canada adoptait la position européenne au grand complet, je ne pense pas que nos affaires en seraient touchées tant que cela.
    Le fait que notre entreprise soit située au Canada est également un énorme atout pour nos brevets du point de vue de l'Union européenne, particulièrement dans le domaine de la protection des renseignements personnels. Dès que nous disons que notre site d'hébergement se trouve au Canada, cela nous ouvre beaucoup de portes.
    Une des questions qui se posent, c'est le problème de la productivité au Canada. Parfois, la capacité des entreprises d'adopter des pratiques exemplaires passe par la brevetabilité des logiciels ou l’existence de pratiques commerciales.
    Ayant fait des études en programmation informatique, je sais à quel point l'industrie évolue rapidement. C'est pourquoi vous n’utilisez pas beaucoup de brevets, surtout dans le domaine du logiciel de divertissement, ce qui est tout à fait compréhensible.
    J’aimerais poser une question sur le piratage et la contrefaçon. Je suis moi-même un amateur de jeux vidéo. J'ai remarqué, sur votre site Web, que l'âge moyen des joueurs canadiens est de 33 ans, et ça se trouve à mon âge actuel. De plus en plus de jeux sont désormais disponibles uniquement en ligne. Dans bien des cas, cela se fait par le truchement d'autres moteurs comme Steam. D’ailleurs, EA a récemment lancé la plateforme Origin, dans laquelle il faut être branché à Internet pour jouer à des jeux. C'est une nouvelle approche qui vise à lutter contre la contrefaçon et le piratage.
    Monsieur Kee, quel en est l’effet sur le piratage et la contrefaçon? Est-ce que cela ralentit le problème dans le domaine des jeux vidéo?
(1200)
    C'est difficile à mesurer de manière quantitative. On a toujours du mal à évaluer l'ampleur et la portée de cette activité parce qu’elle se fait généralement dans la clandestinité. La migration du marché s’accompagne d’une évolution de la notion même du piratage.
    Vous avez raison de dire qu'on assiste à une migration vers des plateformes numériques comme Origin ou Steam sur PC. De plus, les gens peuvent maintenant télécharger des jeux au complet grâce à leurs consoles, comme le Xbox et le PlayStation. Ils ne vont plus au magasin pour acheter un disque dans son emballage. Ils le font en ligne. Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène. D'abord, cette transition a un effet positif et salutaire sur le piratage au Canada. Il y a aussi le fait que les jeux sont ainsi plus accessibles aux consommateurs. Ces derniers peuvent se les procurer facilement. Pour notre part, c’est moins cher parce que nous n'avons plus à défrayer des frais de transport. Il y a donc beaucoup de forces du marché qui nous poussent à aller dans cette direction.
    Bref, on constate que le piratage évolue. L’ampleur du piratage en ligne a un impact négatif non seulement sur notre industrie légitime, mais aussi sur les types qui vendaient autrefois des copies de jeux vidéo sur disques dans les marchés aux puces. Ces gens sont forcés de se retirer des affaires; ils en souffrent autant que nous.
    Merci, monsieur Kee. Désolé, le temps est écoulé, mais je suis heureux d'entendre que les méchants en arrachent maintenant et que nous leur mettons des bâtons dans les roues.
    Madame Gallant, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Kee, comment un garde-frontière reconnaîtrait-il une version contrefaite d'un de vos produits?
    En fait, nous offrons une formation très poussée aux agents d'application de la loi pour leur permettre de distinguer la version contrefaite de la version légitime. Dans le cas de notre produit en particulier, pour les raisons que je viens d'expliquer, nous observons une baisse du volume de jeux contrefaits sur des supports physiques et dans des emballages physiques — quand cela ressemble à un simulacre de l'original —, parce que les gens optent pour la distribution en ligne. Il leur est beaucoup plus facile de télécharger le jeu gratuitement que d'essayer de se le procurer et d'en vendre une version contrefaite.
    Un phénomène qu'on observe de plus en plus, c'est le problème des dispositifs de contournement dont j'ai parlé. Il s'agit de petites puces, appelées en anglais « modchips », qu'on peut installer dans un Xbox ou un PlayStation pour jouer à des jeux piratés. Les consoles sont munies d’une technologie qui détecte si une version est illégitime — par exemple si vous téléchargez un jeu à partir d’Internet et que vous le gravez sur un disque pour ensuite l’insérer dans la console —, auquel cas le jeu ne fonctionnera pas. Pour contourner cette mesure de protection, on doit ouvrir le dispositif et y souder une puce qui permettra de court-circuiter les instructions. Ainsi, le dispositif passera outre la mesure de protection et considérera la version illégitime comme étant légitime.
    Il faut quand même prendre la peine de suivre cette démarche et de se procurer une puce pour y arriver. C’est d’ailleurs un des articles qui ne sont pas bloqués à la frontière; on doit donc former les agents d'application de la loi pour qu'ils puissent reconnaître ces dispositifs aussi.
    D'accord.
    Au Canada, lorsqu'on dépose des brevets portant sur des technologies ou des produits pharmaceutiques, il faut divulguer une certaine quantité de renseignements. En est-il de même pour le type de protection des brevets que vous réclamez pour les jeunes entreprises canadiennes dans le secteur des logiciels?
    Je ne suis pas sûre d'avoir saisi la question.
    Y a-t-il une exigence de divulgation qui s'applique aux développeurs de logiciels lorsqu'ils font une demande de brevet?
    Oui. La notion de brevet repose sur le principe qu'une personne raisonnablement versée dans la technique peut fabriquer ou mettre au point ce qui est proposé dans le brevet. Alors, oui, il y a une exigence de divulgation.
     Je ne suis pas avocate spécialisée en brevets d’invention, mais je crois qu'au Canada, la publication de la demande survient plus tôt dans le processus comparativement aux États-Unis. Chez nos voisins du Sud, ce n’est pas avant 18 mois; il fallait autrefois attendre presque jusqu'à l'octroi du brevet avant de savoir quoi que ce soit au sujet d'un brevet déposé aux États-Unis. Il y a une différence, mais oui, la divulgation s'impose.
(1205)
    Ce facteur entre-t-il en ligne de compte dans votre décision de faire une demande de brevet?
    Si vous voulez parler de la divulgation des secrets de l'entreprise, la réponse est non, parce que pour protéger votre idée, vous devez divulguer quelque chose en retour pendant une certaine période, du moins en théorie, et durant ce temps, vous êtes libre de l’utiliser comme vous l’entendez. Ainsi, vous pouvez accorder une licence, l'utiliser vous-même ou refuser que toute autre personne s'en serve. Voilà le compromis théorique à accepter dans le système de brevet. Quand quelque chose finit par être divulgué, il y a fort à parier que tout le monde en a déjà eu vent. Nous aimons mettre nos clients au courant de ce qui s'en vient.
    En ce qui concerne le différend aux États-Unis, cela portait-il sur le contenu ou sur le code informatique?
    Il s'agissait du code. Nous ne produisons pas de contenu. Nous créons uniquement des codes dans ce qui est, en quelque sorte, l'arrière-guichet de l'apprentissage en ligne. Le différend portait sur les rôles. Blackboard affirmait avoir inventé les rôles d'enseignant, d'étudiant et d'administrateur dans un système informatique. De notre côté, nous disions que les enseignants, les étudiants et les administrateurs étaient là depuis bien avant Blackboard.
    La cour d'appel fédérale des États-Unis a essentiellement convenu qu'il s'agissait d'une évidence et qu'il y aurait forcément des rôles dans un système d'apprentissage en ligne.
    D'accord. Certains observateurs ont souligné que les États-Unis semblaient, dans ce cas-ci, accorder un brevet trop général. Savez-vous si le Canada a conclu, avec les États-Unis, un accord commercial qui comprend des dispositions sur les brevets? L'octroi d'un brevet à portée excessive est une forme de protectionnisme. Y a-t-il des règles en matière de commerce qui permettraient de contester une telle pratique?
    Très brièvement, je vous prie.
    Je n'en suis pas sûre. Une de mes expressions favorites, c'est qu'il ne faut jamais attribuer à la malignité ce que la stupidité suffit à expliquer.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Diane Lank: Je ne pense pas que la pratique américaine qui consiste à accorder des brevets à portée excessive ait quoi que ce soit à voir avec le protectionnisme. À mon avis, c'est plutôt lié au fait que les examinateurs de brevets aux États-Unis doivent respecter des délais. Ils doivent produire tant de brevets et examiner tant de dossiers; alors, on laisse passer des choses très, très facilement.
    Merci, madame Lank. Merci pour vos observations et aussi pour l'excellente citation.

[Français]

    Monsieur Blanchette, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les invités. Ce qu'on apprend ce matin est très intéressant.
    Madame Lank, je vous remercie du témoignage que vous avez livré. Ça va peut-être encourager le gouvernement à mieux préparer les entreprises à exporter dans un contexte d'innovation.
    Monsieur Kee, l'industrie du jeu vidéo a beaucoup évolué au cours des dernières années. On est passé assez rapidement de l'usage de l'ordinateur à celui des consoles de jeux, qui sont des environnements plus fermés. Vous avez dit que du piratage se faisait au moyen de puces. Selon votre association, le piratage a-t-il diminué de façon considérable depuis que nous sommes passés des microordinateurs aux consoles, en matière de jeux vidéo?

[Traduction]

    Non, malheureusement ce n'est pas le cas. C'est, en partie, parce que la nature du piratage a évolué. Avant, on piratait des articles tangibles pour les vendre sur des disques; maintenant, les gens téléchargent des jeux. Chaque année, on observe une hausse du nombre de violations en ligne à mesure que cette pratique gagne en popularité. Par ailleurs, les moyens mis à la disposition des gens pour contourner la protection contre la copie évoluent, eux aussi, pour devenir de plus en plus perfectionnés. Plus nos méthodes s'améliorent, plus les moyens de les contourner s'améliorent aussi. Ce phénomène est également à la hausse.
    Il ne fait aucun doute qu'au Canada, le nombre de violations détectées chaque année est maintenant plus élevé que jamais. Cela varie habituellement, mais on observe une hausse d'au moins 25 à 50 p. 100 d'une année sur l'autre.

[Français]

    En effet, des générations de consoles sont pratiquement rendues à la fin de leur vie utile et les manufacturiers vont bientôt mettre sur le marché de nouvelles générations d'appareils mieux équipés. On va voir au cours des premières années une baisse draconienne. En effet, comme vous le dites, les histoires de contrefaçon sont toujours une guerre sans fin.
    Comme il est question de propriété intellectuelle, j'aimerais savoir si, du fait qu'il s'agit d'environnements fermés, la propriété intellectuelle peut être aménagée pour favoriser l'innovation chez vos membres. Peut-être est-ce sans rapport et qu'il s'agit simplement d'une réalité commerciale. Maintenant qu'on évolue dans des environnements fermés, entre compétiteurs, on vend des consoles puis on vend le jeu. Quoi qu'il en soit, ce sont avant tout des environnements fermés. Dans ces conditions, le jeu de la propriété intellectuelle a-t-il des conséquences sur vos membres en matière d'innovation?
(1210)

[Traduction]

    Je suis d'accord. Vous avez raison de dire que l'industrie du jeu vidéo a tendance à privilégier des environnements qu'on pourrait qualifier de fermés, dans le cas des consoles. Qu'il s'agisse ou non d'un environnement fermé ou ouvert, je pense que cela dépend beaucoup de ce qu'on entend par « ouvert » selon l'innovation. À mon avis, c'est un bon endroit pour différents types de modèles.
    Vous vouliez aussi un exemple d'un environnement fermé. Selon moi, c'est Apple. Il s'agit d'un écosystème très fermé, mais très innovateur sur le plan de l'exploitation. Apple renouvelle sans cesse ses produits. Chaque année, elle lance la dernière version mise à jour de son téléphone intelligent. Elle offre bien plus d'un demi-million d'applications, dont la plupart sont des jeux. C'est un tout nouveau marché mis à notre disposition.
    Étant donné qu'Apple fournit un écosystème fermé, elle a la cote auprès de l'industrie du jeu vidéo. En effet, nous avons très bien réussi sur cette plateforme. Comparons-la maintenant à la plateforme Android, qui est exploitée par Google et qui reçoit probablement plus d'activations par jour qu'Apple. Android offre une empreinte plus vaste, mais comme il s'agit d'un environnement ouvert, il est plus difficile de gagner de l'argent en distribuant des jeux sur cette plateforme.
    Selon toute vraisemblance, la plupart des gens ont tendance à diffuser des jeux sur Apple plutôt qu'Android, ou sur les deux.
    À mon avis, ce sont là des écosystèmes qui se font concurrence. En fait, Apple est obligée de lancer de nouveaux produits, tout comme les membres de mon association, par exemple Microsoft, Sony, etc., parce qu'il faut soutenir la concurrence d'autres écosystèmes, notamment le PC et Android, pour rester à la hauteur.

[Français]

    Les jeux sont très chers quand ils sont mis sur le marché. Avez-vous évalué à quel moment un prix était suffisamment bas pour permettre à la fois d'éviter le piratage et de générer des profits au sein de vos entreprises?

[Traduction]

    Très, très brièvement.
    C'est une bonne question. Je n'ai pas de réponse, surtout parce que le prix des jeux, en particulier ceux sur console, demeure relativement constant.
    Merci beaucoup, monsieur Kee et monsieur Blanchette.
    Nous passons à M. Wallace, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci à nos invités d'être venus aujourd'hui.
    Monsieur Kee, vos clients ne vont pas m'aimer parce que je n'ai jamais eu de console; c'est interdit chez nous. Nous n'avons aucun jeu vidéo à la maison. Je n'ai jamais joué à des jeux vidéo, sauf peut-être une fois chez quelqu'un.
    D'accord. On réussira à vous faire changer d'avis un jour.
    Ce n'est tout simplement pas mon truc. Mon jeu à moi, ça se passe en 3-D à la Chambre des communes. C'est une autre sorte de jeu.
    Je suis curieux de connaître votre réponse. Le droit d'auteur et les marques de commerce sont importants pour vous, mais les brevets, pas tant que cela.
    En ce qui a trait à votre industrie, qui sont les voleurs, les gens qui commettent ces vols? Quand on prend un matériel protégé par le droit d'auteur, sans rien payer, pour ensuite le reproduire, on commet un vol. Votre organisation se fait voler par ces gens. Qui sont-ils, ces voleurs? Se trouvent-ils au Canada? Vivent-ils ailleurs? Je ne comprends pas l'industrie, alors j'aimerais avoir des précisions.
    C'est tout cela à la fois. Dans notre cas, les principaux groupes qui profitent du piratage général des jeux vidéo et de tout le reste, notamment de la musique, des films et de certains logiciels courants — nous sommes tous dans la même situation — sont ceux qui offrent, souvent en échange d'argent, des moyens de contourner la protection contre la copie. Ils exigent des frais parce qu'ils rendent un service.
    Pour ouvrir une console et y souder une puce, il faut un degré de savoir-faire technique que la plupart des gens ne possèdent pas. On paie donc quelqu'un qui peut le faire. Le prix demandé: 100 $ pour le service et un autre 80 $ pour la puce. Voilà comment ces gens ont amassé une petite fortune. Du coup, la console est ouverte au monde des jeux piratés. Ces types ont tendance à travailler à l'échelle locale. Ils sont nombreux au Canada parce qu'il n'y a aucune interdiction légale de cette activité tant que le projet de loi n'entrera pas en vigueur. Voilà donc une première catégorie de gens.
    L'autre catégorie, ce sont les personnes qui offrent les jeux en ligne. Comme je l'ai dit, on voit de moins en moins de vendeurs de jeux au Pacific Mall ou dans les marchés aux puces, etc. parce que tout le monde opte pour des méthodes en ligne. Les sites Web ou les sites d'hébergement poussent comme des champignons. Megaupload et The Pirate Bay en sont des exemples notoires. Essentiellement, ces gens offrent des jeux et d'autres types de contenu, en échange de quoi ils gagnent des revenus publicitaires. Ils veulent attirer un certain nombre d'utilisateurs. Plus ils en attirent sur leurs sites, plus ils gagnent de l'argent à partir de la publicité. Par conséquent, ils veulent nous offrir gratuitement le contenu appartenant à autrui parce que cela leur rapporte de l'argent.
    Ces gens mènent leurs activités dans de nombreux pays, y compris au Canada. C'était d'ailleurs un autre aspect du projet de loi sur le droit d'auteur, qui prévoit une nouvelle disposition en vertu de laquelle les détenteurs de droits pourront intenter des poursuites contre les personnes qui encouragent la violation. C'est une mesure que nous avions réclamée dans le passé.
(1215)
    Madame Lank, je vis à Burlington, pas très loin de Kitchener-Waterloo. Il y a là-bas une entreprise, un fabricant, que j’ai visité à plusieurs reprises. C’est une entreprise privée, mais elle ne développe pas des logiciels. En fait, elle fabrique un palier pour les grands navires. Ses dirigeants refusent de le faire breveter, parce qu’ils ne veulent pas que qui que ce soit observe la façon dont ils le fabriquent. Même lorsqu’un politicien comme moi visite leur usine, ils installent des écrans autour de l’endroit où les titulaires de doctorat travaillent. La formule et les matériaux qu’ils utilisent pour fabriquer le palier revêtent une grande importance à leurs yeux.
    Corrigez-moi si j’ai tort, mais le conseil que vous leur donneriez serait de faire breveter leur palier, afin de se protéger contre toute personne qui tenterait de dérober leur secret de fabrication. Selon eux, dès que le palier aura été breveté, la formule sera rendue publique, et quelqu’un la remaniera suffisamment pour contourner le brevet et finira par produire pratiquement le même produit. Ont-ils raison ou tort? Qu’en pensez-vous?
    Monsieur Wallace, je ne vais pas vous dire que vous ou votre électeur avez raison ou tort. Je mentionne encore une fois que je ne suis pas une avocate spécialisée en brevets d’invention, mais je crois comprendre que si le produit est essentiellement semblable, le propriétaire du brevet a toujours une cause défendable.
    Je les encouragerais à obtenir les conseils d’un avocat très compétent qui se spécialise dans les brevets d’invention. Nombre d’avocats canadiens spécialisés en brevets d’invention sont également agréés aux États-Unis. De ce point de vue, les deux pays collaborent énormément.
    J’ai le sentiment qu’ils devraient envisager la possibilité de faire breveter leur invention afin de déterminer si, même en remaniait un peu, en particulier, une pièce d’équipement… mais il me semble plus probable que le brevet leur offrirait une bonne protection.
    Merci, madame.
    Merci, monsieur Wallace.
    Nous allons passer de nouveau à M. Harris, qui dispose de cinq minutes.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Il y a bon nombre d’autres aspects qui doivent faire l’objet d’un suivi.
    L’évolution de la piraterie informatique est vraiment renversante. Dans certains cas — sur un Wii de Nintendo, par exemple —, un modchip n’est même pas requis, parce que l’appareil peut lire des cartes SD. On peut télécharger n’importe quoi sur Internet, l’enregistrer sur une carte SD, insérer la carte dans le lecteur de l’appareil et le tour est joué. Il n’est même pas nécessaire d’être techniquement compétent ou d’acheter des produits illégaux ou des produits provenant des États-Unis.
    Il est clair que les modchip et les marchandises contrefaites doivent traverser la frontière. Les membres de la Chambre de congrès — pardon, de commerce — du Canada sont préoccupés.
    La Chambre de congrès du Canada.
    Des voix: Oh, oh!
    C’est parce que nous pensons au Canada et aux États-Unis en même temps.
    Ils sont préoccupés, et ils ont demandé qu’on élargisse les pouvoirs de perquisition et de saisie des agents des services frontaliers, afin de stopper la contrebande de produits de contrefaçon. Cela s’applique un peu moins aux logiciels, mais des disques, que l’on parle de DVD ou de disques Blu-ray, sont certainement trafiqués. C’est peut-être encore plus vrai en ce qui concerne les jeux vidéo contrefaits qu’en ce qui concerne les PC, car c’est ce qui se vend le plus de nos jours.
    Pensez-vous que, si les agents des services frontaliers avaient le pouvoir de saisir les produits contrefaits ou les produits qui favorisent la contrefaçon, c’est-à-dire les articles comme les modchip, cela contribuerait à freiner le piratage?
(1220)
    Oui, assurément. En fait, c’était une façon un peu subtile de l’exprimer, mais quand j’ai parlé de leur accorder d’office le pouvoir de saisie, c’est exactement ce que je voulais dire.
    À l’heure actuelle, les agents des douanes ne peuvent pas, de leur propre initiative, saisir des articles dont ils reconnaissent ou soupçonnent la contrefaçon ou le piratage. Ils ne peuvent le faire que s’ils ont en leur possession une ordonnance d’un tribunal, qu’un titulaire de droit d’auteur comme moi est en mesure d’obtenir — si, par magie, je m’aperçois qu’on s’apprête à introduire clandestinement au Canada des produits contrefaits et que je sais quand cela aura lieu —, ou si la GRC leur a demandé de détenir quelqu’un. Ce sont les seules circonstances dans lesquelles ils peuvent procéder à ce genre de saisie, même s’ils sont en mesure de repérer les produits contrefaits. Dans la plupart des autres pays, on a l’habitude d’accorder aux agents des douanes le pouvoir de saisie. C’est essentiellement ce que nous demandons.
    Comme on l’a fait valoir plus tôt, il s’agit d’un pouvoir temporaire. Évidemment, il y a le problème des soupçons, mais l’application de la loi sur la propriété intellectuelle est l’un des domaines dans lequel les agents d’exécution de la loi et les titulaires de droits doivent collaborer très étroitement, parce que les agents ont besoin que les titulaires leur indiquent les produits qui violent les droits de propriété intellectuelle.
    On veut éviter que les agents des douanes saisissent du matériel qui s’avère légal. La question est qu’ils peuvent essentiellement saisir la marchandise, puis communiquer avec le titulaire des droits afin de l’informer qu’ils ont trouvé des produits qui, selon eux, sont contrefaits. Ensuite, le titulaire des droits dispose de telle ou telle période pour se rendre sur place et leur faire savoir si la marchandise est contrefaite. Si elle ne l’est pas, elle sera relâchée sur le marché. C’est le genre de mesures que les autres pays prennent, et c’est le genre de mesures dont nous parlons en ce moment.
    Madame Lank, vous pouvez également répondre à la question.
    Croyez-vous que si l’on créait au Canada un bureau de la propriété intellectuelle, un organisme responsable de la PI qui serait en mesure d’aider les agents d’exécution de la loi à collaborer avec les agents des services frontaliers, la communication et la collaboration en seraient améliorées? Pensez-vous que cela serait utile?
    Absolument. Un certain nombre de groupes ont recommandé, entre autres, la création d’un groupe de travail sur la violation de la propriété intellectuelle, un groupe composé de représentants des titulaires de droits, de l’industrie privée, des gouvernements et des agents d’exécution de la loi qui se serreraient tous les coudes. Il existe en ce moment un groupe de travail ad hoc, constitué de représentants de la GRC, des services frontaliers et de certains groupes de titulaires de droits, qui se réunit de temps en temps. Toutefois, il est très officieux, et il est privé de toute autorité gouvernementale officielle. Par conséquent, ce qu’il peut accomplir est très limité.
    Il est primordial de favoriser d’une manière plus officielle la mise en commun de renseignements.
    Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Pas vraiment. Nous ne sommes pas aux prises avec la piraterie et les problèmes que M. Kee doit affronter.
    Je pense qu’un bureau de la PI pourrait être utile de bien des façons, si on lui confiait un vaste mandat.
    Formidable.
    Il a été suggéré plus tôt que le gouvernement finance la demande initiale de brevet? À quel point cette question vous tient-elle à coeur? Dans quelle mesure pensez-vous que cela aiderait les entreprises en démarrage?
    La question de l’éducation dont vous parliez est certainement cruciale. Toute personne qui étudie en administration ou en ingénierie et qui est susceptible de démarrer une entreprise ou de participer à des ateliers devrait se renseigner à ce sujet.
    Croyez-vous que ce rôle convienne au gouvernement?
    Veuillez être aussi bref que possible.
    Lorsque notre entreprise comptait 5 ou 10 employés, elle ne disposait pas de 8 000 $, 10 000 $ ou 12 000 $ pour présenter une demande de brevet. C’est une question à laquelle il est difficile de répondre parce que je sais que nous chérissons tous la notion de libre entreprise, mais il pourrait être utile d’encourager, d’une manière ou d’une autre, les entreprises en démarrage à déposer la première demande de brevet.
    Je remercie infiniment Mme Lank et M. Harris.
    Nous allons maintenant passer à M. Norlock, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Par votre entremise, j’aimerais remercier nos témoins de leur présence aujourd’hui.
    Mes antécédents n’ont rien à voir avec la TI. Mes petits-enfants qui sont âgés de sept ans et qui ont reçu un iPad à Noël peuvent me battre à la plupart des jeux vidéo, parce que je n’y joue pas très souvent. Cependant, j’ai de l’expérience dans le domaine de l’exécution de la loi. Par conséquent, j’aimerais parler de la piraterie et des mesures que le gouvernement peut prendre pour lutter contre elle.
    Je suis membre du Comité de la sécurité publique et nationale. Nous avons découvert que les rallonges électriques et tous les autres articles du même genre que l’on peut acheter à très bas prix dans les marchés aux puces et qui, dans certains cas, portent même le seau de la CSA sont, en fait, des produits de contrefaçon. Les experts qui ont témoigné nous ont également appris que la plupart de ces méfaits sont imputables au crime organisé.
    Est-ce une hypothèse que l’on peut avancer dans votre domaine sans crainte de se tromper, ou est-ce plutôt d’une tentative entrepreneuriale de la part des pirates?
(1225)
    Je pense que les deux hypothèses sont justes. Le crime organisé contribue certainement à ce piratage, en particulier en ce qui a trait aux modchip ou aux pièces. Toute organisation dont les activités sont liées à un commerce illégal est, par définition, un exemple de crime organisé. Toutefois, ce qui se passe en ligne est moins imputable au crime organisé qu’à des entrepreneurs. La responsabilité en incombe essentiellement aux pirates informatiques qui ont obtenu la première copie du jeu — peut-être même une copie anticipée de celui-ci — et qui la distribuent en ligne. Ils le font en fait pour renforcer leur crédibilité au sein de leur propre communauté de piratage, et non pour réaliser des profits. Cet aspect du piratage n’intéresse pas le crime organisé. Par conséquent, l’instigateur de ce crime à tendance à être un passionné de jeux vidéo.
    Le crime organisé entre en jeu lorsque ses membres trouvent une façon d’exploiter cette circonstance en vue de commercialiser le produit piraté et de réaliser des profits. C’est dans des situations comme celle-ci que le crime organisé a tendance à intervenir.
    Sur le plan de la lutte contre le piratage, la mise en oeuvre d’un régime raisonnable d’exécution de la loi — et je pense que cet élément figure dans le projet de loi — serait-elle avantageuse pour votre industrie?
    Absolument.
    Madame Lank, je suis surpris qu’une avocate s’étonne de l’attitude procédurière des États-Unis. Mon expérience dans le domaine de l’exécution de la loi m’a démontré que la qualité de la loi est sans importance. Il est toujours possible d’embaucher une personne qui pourra vous éviter la prison, si elle est suffisamment intelligente et talentueuse en droit. Je pense que personne ne devrait s’étonner que, s’ils exercent leurs activités commerciales aux États-Unis, que ce soit dans le domaine de l’agriculture ou du bois d’oeuvre, ils vous traîneront devant les tribunaux, parce que cela fait partie du contexte commercial. Ils embauchent une armée d’avocats; plus l’entreprise est grande, plus l’effectif des services juridiques est important. Ils embauchent ces gens pour acculer les petites entreprises comme la vôtre à la faillite. Heureusement, il y a de bonnes personnes comme vous qui s’emploient à les arrêter.
    Lorsque j’examine une mesure législative, je le fais toujours en tenant compte de l’aspect réglementaire. Pendant que vous parliez, j’ai inscrit la note suivante: réglementation ou étranglement. À quel point le nombre de règlements freine-t-il l’innovation? Approchons-nous de ce stade? La mesure législative risque-t-elle d’étrangler l’innovation? Il ne faut jamais créer un système réglementaire qui empêche les gens ayant de bonnes idées novatrices de les mettre en pratique. La plupart des avocats spécialisés en droit criminel que je connais affirment que les avocats spécialisés en brevet d’invention sont les richards du quartier. À quel moment la réglementation jugule-t-elle vraiment l’innovation?
    Cela étant dit, je tiens à souligner que je ne suis pas une avocate spécialisée en brevets d’invention. Par conséquent, je ne suis pas l’une des richardes du quartier.
    De mémoire, je ne peux penser à aucune réglementation, liée ou non à la PI, qui étrangle en ce moment les Canadiens, et nous n’avons pas observé non plus cet effet dans le domaine de la PI américaine. Toutefois, nous nous heurtons parfois à d’autres aspects de la réglementation. La ligne de démarcation est très floue. Lorsque des règlements sont publiés, il est important qu’ils soient clairs et faciles à comprendre. On ne devrait pas être obligé de s’assurer les services d’un cabinet d’avocats pour se faire expliquer leur signification. Je pense que la clarté est primordiale.
    Excellent.
    Monsieur Kee, je viens d’assister à une collation des grades. Elle est habituellement tenue aux environs de l’Action de grâce parce que tous les nouveaux diplômés sont à la maison pendant cette période. Certains d’entre eux vont intégrer l’industrie dont vous avez parlé. Ils vont s’établir à Kitchener-Waterloo et à d’autres endroits comme celui-là. Dans ma circonscription, il y a un incubateur d’entreprises, conçu à l’image de celui de Kitchener-Waterloo mais à l’intention d’un groupe disparate d’entreprises. Selon vous, avez-vous atteint le stade où la réglementation étrangle l’esprit d’entreprise? Du point de vue d’un jeune professionnel qui veut participer à la création de ce nouveau jeu que j’appelle Abattoir 5, la réglementation intervient-elle, d’une manière ou d’une autre, dans ce processus?
    Monsieur Kee, avant que vous répondiez à la question, je tiens à aviser M. Norlock que la période allouée à la prochaine série de questions a commencé. M. Lake lui accorde tout le temps dont il a besoin, mais l’heure avance.
    D’accord.
    Allez-y.
    Comme dans toutes choses, je pense qu’il est important d’établir soigneusement un équilibre. En ce qui concerne la question de la clarté, je conviens qu’elle est extrêmement importante. Il faut également s’assurer que la réglementation est judicieuse. Lorsqu’on cherche à atteindre un objectif politique, on cherche, encore une fois, à le faire de manière aussi peu envahissante que possible.
    Dans la partie portant précisément sur la propriété intellectuelle, il y a certaines sections qui susciteront diverses opinions de la part des entreprises. La section consacrée aux brevets en est certainement une, selon moi. Je peux dire que je connais des entreprises appartenant aux deux camps. Pour ce qui est des brevets de méthodes commerciales, le point de vue des entreprises varie en fonction de l’élément moteur de leurs activités. Pour être franc, du point de vue des petites entreprises en démarrage, qui sont vraiment le genre d’entreprises dont vous parlez en ce moment, tout règlement est jugé envahissant, tout ce qui, selon elles, les empêche de faire ce qu’elles souhaitent. Cependant, pour fonctionner dans une société civilisée, il faut, entre autres choses, apprendre à s’adapter. À mon avis, il y a quelques règlements, en particulier, qui pourraient être problématiques. Je sais que le milieu des affaires a du mal à accepter la portée très vaste de l’éventuelle loi anti-pourriel mais, malgré les problèmes qui pourraient exister, l’élaboration des règlements se poursuit.
    Toutefois, en général, le Canada n’a pas perdu sa popularité en tant qu’endroit où établir une entreprise; nous n’avons pas encore atteint ce stade.
(1230)
    Merci beaucoup.
    M. Wallace a parlé de son entreprise. Je fais affaire avec une entreprise locale. Je ne dirai pas de quel produit il s'agit, parce que j'identifierais ainsi cet homme qui invente quelque chose de totalement différent. Il m'a dit qu'il n'est pas question pour lui d'obtenir un brevet, parce que ses concurrents sauraient alors ce qu'il tente de faire. Il m'a dit qu'il essaie toujours d'avoir un nouveau produit. Il sait que ce sera bon pour deux ans. Quand les compétiteurs en arrivent à comprendre le procédé, un nouveau produit est déjà sur la table à dessin.
    Je mentionne cela, parce que j'imagine que c'est ainsi qu'a toujours procédé l'industrie de l'électronique. J'ai grandi à l'époque des rubans huit pistes, qui sont les descendants des bobines, et regardez ce que nous avons aujourd'hui. Un de mes amis me dit que tout est planifié. Ce que j'essaie de dire, c'est que je crois dans vos deux industries. Dès que vous obtenez le produit que vous voulez, ne savez-vous pas déjà — comme Apple — quel sera le suivant? D'un point de vue de gouvernance, vous ne voulez pas nuire à vos activités en rendant le régime trop strict, mais vous voulez tout de même protéger les gens qui ont investi énormément dans la recherche et le développement pour en arriver là où ils sont.
    Le Canada est reconnu comme étant l'un des pays qui investissent le plus d'argent par habitant dans la recherche et le développement. Or, comme je le dis aux élèves du secondaire, pour utiliser leur langage, nous sommes nuls en commercialisation. C'est ce que le gouvernement actuel essaie de faire, alors, de votre point de vue, comment fait-on cela? Vous pourriez prendre une minute chacun pour dire comment nous devrions utiliser les fonds destinés à la recherche et au développement, que tout le monde veut, de manière à déployer des efforts de commercialisation qui stimuleront notre économie et garantiront un emploi à nos petits-enfants.
    Que diriez-vous de prendre chacun 35 secondes?
    Ma réponse sera très brève: encourager les universités à transférer la technologie à des entreprises comme la nôtre, à un coût raisonnable.
    Je suis d'accord, et je mettrais l'accent sur toutes les formes de financement, que ce soit des crédits d'impôt ou du financement direct, pour la commercialisation comme telle, et non pour les stricts travaux de recherche et de développement. Ceux-ci sont importants, mais ils ne devraient pas avoir la part du lion.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme LeBlanc pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je viens tout juste d'apprendre que le projet de loi C-14 sur le commerce interprovincial est inclus dans le projet de loi omnibus sur la mise en oeuvre du budget.
    Considérez-vous que ce projet de loi sur le commerce interprovincial devrait être étudié séparément?
    Je me demandais également si vos entreprises fédérales-provinciales seraient touchées en matière de commerce entre les provinces.

[Traduction]

    Je vais plaider l'ignorance.
    Bien que nos activités comportent un élément interprovincial, je ne connais pas assez le projet de loi pour être en mesure de le commenter, malheureusement.

[Français]

    Tournons-nous vers la recherche-développement. On parle d'innovation, de propriété intellectuelle, de recherche-développement. Il y aura des changements aux programmes fédéraux en recherche-développement. Pourriez-vous me dire quelles seraient les conséquences de ces changements sur vos industries?

[Traduction]

    Encore une fois, je ne suis pas suffisamment au courant des changements dont vous parlez. Vous pourriez peut-être nous donner des exemples.
(1235)

[Français]

    Par exemple, les crédits d'impôt vont passer de 20 p. 100 à 15 p. 100. De plus, ils ne tiendront pas compte des investissements, par exemple, en capitaux, en dépenses en immobilisations. Cela pourrait-il avoir des répercussions sur votre type d'entreprise?

[Traduction]

    Je ne suis pas comptable fiscaliste. Je ne suis pas avocate spécialisée en brevets d'invention.

[Français]

    C'est bien.

[Traduction]

    J'imagine que cette mesure pourrait avoir un effet. Je sais que la croissance de notre entreprise dépend des crédits.
    Oui, d'accord.
    Comme le gros des changements vise une forme de recherche et de développement qui est peu courante dans l'industrie du jeu — notre industrie repose surtout sur la main-d'oeuvre; ce n'est pas une industrie capitalistique —, les changements n'ont pas une incidence importante. Nous sommes certes un peu préoccupés. Il s'agit de trouver un juste équilibre entre, d'une part, un régime de crédit d'impôt et, d'autre part, le financement. L'argent a été réaffecté d'un poste à l'autre, et je crois qu'il y a un raisonnement logique derrière cela.
    Nous sommes un peu inquiets que la balance penche plus d'un côté que de l'autre, mais nous travaillons avec des associations semblables à la nôtre et nous essayons d'évaluer l'impact.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je ne voulais pas vous mettre sur la sellette. Vous confirmez, en fait, que dans votre type de secteur, les conséquences ne seront peut-être pas les mêmes que celles que subiront le secteur manufacturier ou d'autres secteurs de l'industrie.
    Par ailleurs, on est maintenant dans un environnement global. On a touché notre relation avec les États-Unis, l'Europe, etc. Considérez-vous que le régime de propriété intellectuelle canadien devrait s'harmoniser avec un régime plus global, c'est-à-dire s'apparenter un peu plus à celui des États-Unis ou de l'Europe? Considérez-vous plutôt que ce n'est pas nécessaire?

[Traduction]

    Dans un monde idéal, les États-Unis et tous les pays auraient un système davantage harmonisé. C'est coûteux pour une entreprise comme la nôtre de se tenir au fait des différences entre le Brésil, les États-Unis, l'Europe, l'Asie, l'Australie, la Nouvelle-Zélande. C'est très coûteux. Il n'y a pas de réponse facile.
    Le régime devrait-il être harmonisé? Oui, mais avec lequel, je ne le sais pas. Compte tenu de la taille du Canada, il est nécessaire, du moins pour notre entreprise, si nous voulons faire des affaires autant en Europe qu'aux États-Unis, de composer avec les deux régimes. Il serait préférable que le Canada n'ait pas un troisième système. Notre système serait harmonisé avec l'un ou l'autre, et nous faisons plus de transactions avec les États-Unis.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Kee, si vous souhaitez répondre à cette question rapidement, je suis certain que nous pouvons vous en donner la possibilité.
    Merci.
    Nous devrions essayer d'harmoniser nos régimes le plus possible, pour une simple question de coûts. C'est très difficile de mener des activités dans des pays où les régimes sont différents.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Carmichael pour cinq minutes.
    J'aimerais commencer avec Mme Lank. Vous avez parlé un peu plus tôt — j'espère avoir la bonne référence — de l'industrie artisanale que nous avons créée dans le développement des brevets, avec les avocats et ceux qui peuvent tracer la voie à suivre dans le domaine des brevets pour les petites entreprises. Vous avez parlé d'une entreprise de démarrage de six personnes et vous avez dit que vous n'y pensiez pas à cette époque. Il est fort probable que vous y pensez davantage aujourd'hui en raison de toute la visibilité.
    Vous avez parlé de l'industrie artisanale et de quelqu'un qui aurait pu vous montrer la voie à suivre. Ce problème est-il lié à l'industrie ou davantage au gouvernement? Vous avez parlé du Brésil. L'ambassade canadienne dans ce pays vous a montré la bonne voie. Était-ce la même chose avec l'ambassade canadienne aux États-Unis? N'était-elle pas présente ou n'avez-vous tout simplement pas pensé à profiter de sa présence à ce moment-là?
    Je crois qu'il y a suffisamment de similitudes entre les États-Unis et le Canada, en ce sens que vous n'avez pas, par exemple, de problèmes de langue comme c'est le cas au Brésil ou en Colombie.
    Que je sache, nous n'avons jamais demandé l'aide de l'ambassade canadienne aux États-Unis. Il arrive à l'occasion, surtout pour des questions d'immigration et de visa, que nous lui écrivions pour lui demander de l'aide à ce chapitre, mais nous n'avons pas vraiment eu affaire avec l'ambassade canadienne aux États-Unis.
(1240)
    Partant de là, vous avez parlé des produits que l'on vous vend à des prix compétitifs, des produits de nouvelle technologie. Quand on regarde les universités aujourd'hui, j'ai l'impression, d'après les témoignages que nous avons entendus d'un certain nombre d'universités qui s'affairent à créer ces grappes de développement et d'innovation, qu'elles essaient de tracer cette voie vers le développement, la créativité et, ultimement, une certaine forme de commercialisation, que ce soit en vendant le produit à une autre entité ou autrement.
    Le milieu universitaire fait-il preuve de leadership en créant ce type de grappe, dans l'un ou l'autre de vos secteurs d'activité?
    Pour sa part, l'industrie du jeu a connu une croissance phénoménale au cours des dernières années. Il y au moins 260 établissements partout au pays qui offrent des programmes liés au jeu, à divers niveaux. Certains sont plus avancés que d'autres.
    Le problème, ce n'est pas tant le leadership que la direction de ce leadership, dans certains cas. La collaboration avec l'industrie n'est parfois pas aussi solide qu'elle devrait l'être. À vrai dire, l'industrie en assume la responsabilité autant que le milieu universitaire. Les diplômés que l'on produit ne sont pas toujours très qualifiés pour travailler dans l'industrie, parce qu'ils ont suivi des cours qui ne sont pas aussi pertinents que les écoles peuvent le penser.
    La recherche avancée que mènent les universités est très intéressante pour les chercheurs, mais elle n'a pas nécessairement une viabilité commerciale qui est utile à l'industrie. Nous avons eu de réelles difficultés à ce chapitre.
    Ce sont aussi des cultures très différentes. Dans le secteur de la technologie en général, le mode de fonctionnement est frénétique, entrepreneurial, très dynamique. Ce ne sont pas des qualificatifs que j'utiliserais normalement pour décrire le milieu universitaire. Culturellement, il peut y avoir de réels défis.
    Je crois que les possibilités sont extraordinaires. Le fait qu'on ne se parle pas autant qu'on le devrait explique en partie les problèmes qu'éprouvent certains établissements dans la mise en marché de leur recherche et développement.
    Je suis d'accord avec M. Kee à ce sujet.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec des établissements de notre région. Nous avons l'Université de Waterloo, Wilfrid Laurier et l'Université de Guelph. Il y a eu des discussions, mais comme je l'ai dit, le premier achat de propriété intellectuelle que nous faisons actuellement se fait auprès d'un client américain, et non auprès d'une de ces universités, ce qui est intéressant, à mon avis. Et il est venu à nous.
    Il est venu à vous en raison de votre expérience, de votre réseau de distribution.
    Oui. C'était un client et il aimait vraiment ce que nous faisions. Il avait développé cette idée et nous a demandé si nous voulions la commercialiser pour lui.
    Très bien. Merci.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Environ 30 secondes.
    J'ai terminé.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Regan, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Lank, vous avez parlé du défi que posent 170 ouvertures à l'heure actuelle. Pour quels types de compétences ou dans quels grands domaines voyez-vous des pénuries?
    Le développement de logiciels est probablement le plus important parmi tous les autres, ainsi que la gestion de projet. C'est de ce côté-là. Différents postes sont offerts, allant des adjoints administratifs jusqu'aux agents supérieurs en marketing, mais je dirais que le développement de logiciels arrive au premier rang.
    Selon vous, quelles sont les perspectives de développement qui amèneront plus de gens dans ces domaines? Je ne crois pas que votre entreprise soit la seule à chercher des développeurs de logiciels.
     Eh bien, il y a beaucoup de pression dans la région de Kitchener-Waterloo, où la technologie est très présente. Nous aimons embaucher de nouveaux diplômés, alors nous allons dans les universités locales pour essayer d'attirer du nouveau monde.
    Communitech a lancé une initiative pour essayer de ramener des gens de Silicon Valley et d'autres endroits. Nous participons à ces démarches également, mais c'est difficile.
    Je crois que nous devrions nous réjouir du fait qu'il y a une pénurie,. D'une façon un peu perverse, cela montre que notre industrie se porte bien. Cela montre que le Canada se porte bien dans ce secteur.
    Il s'agit de former plus d'étudiants et...
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    Dans quelle mesure cette pénurie limite-t-elle la croissance de l'industrie? Je pense à de nombreux secteurs qui ont ce problème. Je m'entretenais ce matin avec des représentants du secteur manufacturier qui sont très préoccupés par la pénurie d'ingénieurs mécaniques, par exemple. Avez-vous une idée de ce qui va arriver?
    Nous regardons d'autres régions, comme Terre-Neuve, par exemple. Nous allons là notamment pour essayer de contribuer au développement de logiciels. Cela peut être certainement tout un défi. Je ne connais pas la réponse.
    Le Canada avait un programme d'immigration, le projet pilote pour les spécialistes en logiciels ou quelque chose de semblable, mais ce programme n'existe plus. Il pourrait être utile de le remettre sur pied et voir si nous pouvons attirer plus d'immigrants dans ces domaines.
    Monsieur Kee, je vais vous donner la chance de répondre à la même question, mais je voudrais vous demander aussi ce que vous pensez de cette idée. On nous a parlé d'un groupe de travail sur les délits associés à la propriété intellectuelle. Selon vous, quels avantages pourrait-on en retirer?
    Pour ce qui est du développement des compétences, je suis d'accord avec Mme Lank sur tout ce qu'elle a dit. C'est un énorme problème pour notre industrie. Nous avons une importante pénurie de compétences, en particulier aux niveaux intermédiaires et supérieurs. Nous embauchons également beaucoup de jeunes diplômés. Je crois que 77 p. 100 de nos entreprises prévoient embaucher des diplômés au cours des deux prochaines années. Ce n'est pas difficile de combler des postes subalternes, contrairement aux postes intermédiaires et supérieurs. À court terme, nous regardons à l'étranger pour essayer d'attirer des gens dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires. Je crois que le programme dont vous avez parlé était peut-être le programme des travailleurs en TI.
    Cela me semble paradoxal en ce sens qu'un grand nombre de jeunes gens, qu'ils aient 33 ans ou moins, jouent des jeux, souvent en ligne, aiment votre industrie, pour ainsi dire, mais ne vont pas devenir des développeurs de logiciels. Ai-je tort de penser qu'il n'y a aucune connection entre les deux?
    C'est possible, et cela nous ramène à un aspect important et concorde aussi avec la littératie numérique. Il y a une grande différence entre savoir comment utiliser un ordinateur et savoir comment programmer.
    Bien sûr.
    Il y a une grande différence entre savoir comment jouer à un jeu et savoir comment programmer un jeu.
    On pourrait croire qu'en utilisant la technologie, les gens seraient plus intéressés à la développer et à apprendre comment faire ces choses, n'est-ce pas? Ce ne semble pas être le cas.
    Concernant ce que vous avez dit, au niveau subalterne, nous avons vu le volume de diplômés que l'on produit. En fait, ce que nous essayons de faire avec d'autres associations du domaine de la TI, c'est notamment d'utiliser l'industrie du jeu comme porte d'entrée. C'est une bonne façon d'attirer les gens. Tout le monde se plaint constamment à propos des emplois dans le domaine des sciences, de la technologie, de l'ingénierie et des mathématiques et du manque d'emplois dans ce domaine. En ingénierie, nous n'en avons pas. C'est parce que, pour bien des jeunes gens, c'est très statique, aride et ennuyant, tandis que les jeux vidéo sont cool. Si vous leur faites comprendre que les jeux vidéo font partie de ce type d'emplois, cela devient tout à coup plus attirant. Nous essayons de travailler davantage sur cet aspect.
    Comme vous l'avez dit, je crois, beaucoup d'efforts doivent être déployés dans ce sens et nous devons faire en sorte d'offrir un perfectionnement durable à long terme à nos diplômés pour que, en l'espace de cinq ans, les postes de niveaux supérieurs soient comblés par des gens d'ici et non par des étrangers.
    Merci beaucoup, monsieur Kee et monsieur Regan.
    Nous avons le luxe d'avoir encore quelques minutes, et je vais donc donner la chance à Mme Lank et à M. Kee de faire une dernière remarque ou de dire tout ce qu'ils n'ont pas eu le temps de dire. Madame Lank, vous avez été la première à faire une déclaration, alors je vais donner trois minutes à M. Kee s'il souhaite conclure ou faire d'autres observations.
    Merci beaucoup.
    Je crois avoir parlé largement de tous les sujets qui ont été soulevés.
    Pour revenir à la deuxième question de M. Regan, concernant le groupe de travail sur les délits associés à la propriété intellectuelle, nous croyons que ce serait extrêmement utile. Comme je l'ai dit, il y a un groupe de travail non officiel qui nous permet d'échanger des renseignements de façon informelle avec les autorités. Ce serait extrêmement utile d'avoir un groupe plus officiel, mieux organisé et auquel participerait toute une brochette de ministères, comme il serait utile d'élaborer des stratégies en matière d'éducation.
    Nous avons présentement l'Office de la propriété intellectuelle du Canada, dont le mandat est d'éduquer la population canadienne au sujet de la propriété intellectuelle. Il y a certains programmes en place, mais reste à savoir si ces programmes sont assez solides. Permettent-ils d'éduquer la population et les petites entreprises comme il le faudrait? Quel est le lien avec les délits associés à la propriété intellectuelle? Lorsqu'une entreprise en démarrage se demande si elle devrait obtenir un brevet, elle ne pense pas aux délits associés à la propriété intellectuelle. Tout est relié. Vous ne pouvez pas séparer les éléments. Il est extrêmement important de bien renseigner les gens à propos de ces choses et sur la façon dont tous ces éléments sont reliés.
(1250)
    C'est tout?
    Oui.
    Il vous reste deux minutes si vous voulez ajouter autre chose.
    Non, je crois que c'est tout. Merci.
    D'accord, très bien.
    Allez-y, madame Lank.
    J'aimerais tout d'abord vous remercier de me donner la chance d'être ici. Je n'ai jamais fait une chose pareille auparavant, et j'étais très emballée à cette idée. Merci de l'invitation, et je remercie mon entreprise de m'avoir choisie comme frappeur de relève à la place de John Baker.
    Je ne sais pas comment vous fonctionnez, mais je crois que ce qu'il faut retenir, c'est que nous devons communiquer avec nos partenaires commerciaux. Nous devons communiquer avec l'Union européenne et avec les États-Unis. Pour répondre à la personne qui m'a posé des questions au sujet de l'ambassade canadienne aux États-Unis, je devrais peut-être appeler l'ambassade canadienne et lui demander ce qui est fait à propos des réexamens du U.S. Patent and Trademark Office et du système judiciaire. L'ambassade canadienne ne va rien changer au système judiciaire américain, mais la communication est critique dans notre cas, tant avec l'Union européenne qu'avec les États-Unis.
    Le reste du monde va devenir de plus en plus important. Nous commençons à tâter le terrain en Chine, et le Brésil est un endroit intimidant pour les affaires. Nous n'avons pas encore examiné le régime de propriété intellectuelle au Brésil. Nous commençons à peine à le faire. Tout cela est très coûteux. Toute aide que peuvent nous donner les ambassades canadiennes dans ces États éloignés serait extrêmement utile. Comme je l'ai dit, nous avons eu une expérience magnifique avec l'ambassade canadienne en Colombie. Il faut communiquer jusqu'à ce que nous puissions envahir le monde.
    Merci beaucoup, madame Lank. Je tiens à vous dire que, lorsque nous avons la chance d'accueillir des gens de votre compétence et de la compétence de M. Kee, c'est nous qui sommes très honorés et emballés de pouvoir entendre vos réponses à nos questions, qui sont parfois déroutantes. Au nom du comité, je vous remercie infiniment d'avoir pris le temps d'être ici pour nous donner vos témoignages.
    Nous n'avons pas d'autre point à l'ordre du jour, mais j'aimerais informer les membres du comité que nous avons des réunions prévues pour la semaine prochaine avec toute une brochette de témoins.
    La séance est levée.
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