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Merci, monsieur le président.
Je tiens également à remercier les membres du comité ainsi que votre greffier de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
Vous étudiez présentement les défis auxquels les Forces canadiennes seront confrontés à l'avenir. Plus précisément, vous vous penchez sur la capacité opérationnelle des Forces canadiennes et les obstacles qui pourraient compliquer ou même empêcher le déploiement des forces armées et diminuer leurs compétences lors des différentes missions.
Pour ma part, j'aimerais identifier quatre enjeux qui ont le potentiel de diminuer les capacités des Forces canadiennes. Je discuterai également de la façon que le gouvernement pourrait gérer ces enjeux afin de préserver une force qui sera en mesure de remplir ses obligations ici, au Canada, sur le continent nord-américain, tout en acceptant certaines missions à l'étranger dans le cadre d'une opération onusienne ou de l'OTAN.
En bref, ces quatre défis sont les coûts du personnel et des Forces canadiennes, les infrastructures et les bases militaires, la structure des commandements opérationnels et du quartier général de la Défense nationale et, finalement, le budget d'équipement et la réduction des capacités des Forces canadiennes.
[Traduction]
La Stratégie de défense Le Canada d'abord de 2008 comprenait un plan vaste et ambitieux de revitalisation des Forces canadiennes. La stratégie visait le renouvellement des flottes majeures des Forces, ainsi que l'augmentation des capacités militaires dans des secteurs clés comme la patrouille de l'Arctique ainsi que le transport aérien et maritime. De plus, la stratégie prévoyait l'augmentation de la force régulière de façon à porter son effectif à 70 000 membres, ainsi que des travaux de réparation et de modernisation de l'infrastructure du ministère de la Défense et de l'armée.
Pour financer ces programmes, le gouvernement conservateur a promis de maintenir les augmentations du financement mises en oeuvre pour la défense par le Parti libéral en 2005, soit d'investir des fonds supplémentaires et de fournir au ministère et aux FC des augmentations annuelles constantes et prévisibles au cours des prochaines décennies.
Toutefois, même si elle était fondée sur de bonnes intentions, la Stratégie de défense Le Canada d'abord s'est rapidement révélée irréaliste. Les chiffres prévus dans la stratégie pour remplacer les grandes flottes des FC et maintenir une force polyvalente capable de mener des opérations sur terre, en mer et dans les airs partout au Canada, à l'intérieur de l'Amérique du Nord et un peu partout dans le monde, se sont révélés beaucoup trop optimistes.
En fait, comme le montrent un certain nombre d'acquisitions retardées, dans la stratégie, on a eu tendance à sous-estimer le coût du nouvel équipement, tout particulièrement lorsque l'industrie est appelée à répondre aux besoins précis des militaires canadiens et lorsque l'inflation visant particulièrement la défense entre en ligne de compte. On n'avait pas prévu non plus dans la stratégie que l'augmentation des Forces créerait des difficultés pour le budget de la Défense et pourrait empêcher le ministère de fournir les capacités futures requises.
De la même manière, la stratégie ne s'est pas attaquée aux problèmes manifestes qu'a suscités l'élargissement de la structure de commandement militaire, et elle n'a pas non plus tenu compte du fait que la multitude de bases, d'installations et de bâtiments mène à une utilisation inefficace des ressources qui sont limitées.
En outre, une augmentation importante du nombre d'employés civils au MDN, l'adjudication de contrats de services coûteux et le paiement d'honoraires de consultation considérables ont aggravé les difficultés et contribué à faire augmenter les coûts généraux du personnel à près de 60 p. 100 du budget de la Défense, ce qui représente une augmentation de 10 p. 100 comparativement à ce qui était prévu dans la stratégie. Comme vous le savez tous, ces divers coûts ont été traités en détail dans le rapport du lieutenant-général Andrew Leslie sur la transformation.
Tous ces problèmes font que la Stratégie de défense Le Canada d'abord a donné au Canada des programmes et des politiques de défense non viables. À moins d'une augmentation importante des dépenses de défense, une option difficilement envisageable pour le proche avenir, et à moins d'efforts importants pour rendre le ministère et les Forces plus efficaces, le MDN et les FC connaîtront une réduction graduelle de leurs capacités; ils auront de la difficulté à fonctionner efficacement dans de nouveaux environnements ou à faire face à de nouvelles menaces et ils pourront se voir forcés de faire des choix désagréables entre ce qu'ils aimeraient faire et ce qu'ils pourront effectivement se permettre de faire.
Permettez-moi d'entrer un peu plus dans les détails. S'ils ne sont pas réduits, les coûts élevés en personnel draineront probablement les ressources consacrées actuellement aux opérations et au maintien de la disponibilité opérationnelle ou empêcheront d'investir dans les capacités d'intervention futures. Les fardeaux que constituent le quartier général militaire et l'infrastructure poseront les mêmes problèmes, du fait qu'ils continueront de drainer des ressources qui pourraient être consacrées à l'entraînement, aux unités déployables et au budget des biens d'équipement. En outre, même si ces problèmes pouvaient être surmontés, il demeure peu probable que les dépenses en capital planifiées suffiront à recapitaliser la structure actuelle des FC.
Les gouvernements qui se sont succédé ont essayé de maintenir des forces polyvalentes, des forces entraînées et équipées de façon à posséder des capacités variées et adaptables pour intervenir dans différentes missions et opérations. Les avantages qu'il y a à maintenir ce type de forces sont considérables, et il est tout à fait compréhensible que le gouvernement et les FC souhaitent poursuivre cette politique.
Je ne préconise d'aucune façon l'abandon inconsidéré de cette approche; cependant, comme beaucoup d'alliés du Canada à l'OTAN l'ont constaté, la plupart des pays ne peuvent plus vraiment se permettre de mettre en service des forces polyvalentes modernes. Ils doivent soit accepter d'avoir des forces polyvalentes dotées de capacités moindres et d'une technologie moins avancée, soit adhérer à ce que le secrétaire général de l'OTAN a appelé la « défense intelligente ».
Alors que comporte la défense intelligente? Elle comporte la mise en commun de ressources et le partage de capacités entre des alliés. Elle amène les alliés à développer des capacités dans divers créneaux complémentaires de façon à pouvoir fonctionner ensemble et à former une force multinationale unique pour des opérations outre-mer. Les membres de l'OTAN doivent faire face à des mesures d'austérité et à l'augmentation des coûts de la défense, la mise en commun des ressources et le partage des capacités peuvent donc se révéler nécessaires pour préserver la capacité globale de l'alliance de mener des opérations de grande intensité au cours des prochaines décennies.
Le Canada ne fait pas exception. Il doit lui aussi choisir entre une réduction graduelle — et probablement ponctuelle — de ses capacités et une évolution planifiée vers des forces spécialisées dans des créneaux complémentaires, étant donné qu'il entre dans une période d'austérité financière. Il est temps maintenant, en fait c'est le moment idéal, de faire ce choix. Le remplacement des grandes plates-formes militaires vient tout juste de commencer, et il est donc encore temps de repenser à l'équipement dont des forces bien ciblées pourraient avoir besoin.
Il faut à tout le moins, naturellement, que les FC soient capables de protéger les Canadiens et la souveraineté canadienne et de travailler avec les États-Unis à défendre l'Amérique du Nord. Le succès de ces missions doit être la toute première priorité de la défense pour le gouvernement, mais au-delà de ces missions nationales et continentales, les planificateurs de la défense devraient discuter très soigneusement des capacités expéditionnaires, terrestres, navales, aériennes et spéciales sur lesquelles les FC devraient se concentrer dans l'avenir. Contrairement aux missions nationales et continentales, les opérations expéditionnaires offrent beaucoup de flexibilité et permettent d'être très sélectifs. Bref, on ne s'attend pas à ce que le Canada fasse tout et soit partout.
En conséquence, étant donné qu'on resserre les budgets et qu'on recherche des solutions de rechange, il vaut la peine de se demander quelles sont les capacités sur lesquelles les FC devraient se concentrer dans le cadre d'un effort multilatéral de défense intelligente. Comme nous examinons le maintien de la disponibilité opérationnelle future des FC, cette discussion devrait avoir lieu, que le Canada accepte ou non d'adhérer au concept de la défense intelligente.
[Français]
En somme, le gouvernement canadien fera face à certains défis importants en matière de défense nationale au cours des prochaines années. Le ministère de la Défense nationale devra absorber des coûts très élevés au chapitre du personnel et réduire les dépenses en matière de ressources humaines. Le gouvernement devra aussi trouver des économies en matière de dépenses d'infrastructure. Au-delà de réduire le nombre de bâtiments, il est temps de regarder s'il est possible de réduire le nombre de bases militaires afin d'augmenter l'efficacité des Forces canadiennes et de libérer des ressources. Le même principe devrait être appliqué au commandement opérationnel. La structure actuelle n'est pas abordable et pourrait être réformée.
Finalement, le gouvernement devrait entamer une étude des capacités des Forces canadiennes à la lumière des réductions budgétaires chez ses alliés de l'OTAN et faire appel à l'avenir à une approche coopérative dans la planification des forces alliées. Le gouvernement devrait également se poser la question suivante. Quel rôle les Forces canadiennes devraient-elles jouer à l'étranger pendant une époque de smart defence? Le Canada a-t-il les moyens ou même la volonté nécessaire pour garder une force armée qui est structurée pour entreprendre plusieurs différents types de mission ou devrait-on songer, en coopération avec nos alliés, à créer une force plus spécialisée? Selon moi, le moment est venu de se poser cette question.
Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur le professeur. J'ai beaucoup apprécié votre intervention, qui tombe à point nommé, parce que nous traitons de beaucoup d'aspects très partiels de la situation et certains d'entre nous sont un peu plus préparés maintenant à examiner la situation dans son ensemble, soit à 30 000 pieds. Je crois que c'est ce que vous nous apportez, cette discussion stratégique.
La première chose qui m'est venue à l'esprit lorsque vous parliez de défense intelligente et de forces de créneau, c'est que cela était vraiment utile, étant donné tout particulièrement la visite que nous venons d'effectuer. C'était vraiment bien. J'ai beaucoup appris, étant assez nouveau dans le domaine.
Il a été intéressant d'entendre les personnes qui se définissent elles-mêmes comme étant à l'avant-garde de notre politique étrangère et de notre politique de défense, à savoir la 1re Division, et de connaître ce qu'est pour eux la disponibilité de nos capacités expéditionnaires. D'après ce que j'entends, on nous dit: nous ferons ce que vous voulez que nous fassions; actuellement, vous voulez que nous fassions tout, alors nous nous préparons à tout faire. Il nous appartient donc de déterminer les capacités que nous voulons garder disponibles.
L'idée de mettre en place des forces de créneau est très intéressante, tant sur le plan de l'efficacité que sur celui de la rentabilité. L'idée est pleine de bon sens, mais ce qui m'a frappé, c'est que tout le monde s'accorde pour dire que l'objet premier de nos forces est de protéger notre souveraineté, et cela est assez évident. Lorsque nous parlons des capacités expéditionnaires, les choses deviennent réellement complexes. La première chose qui m'est venue à l'idée, c'est que si nous devions réduire le champ de nos interventions et devenir un créneau ou faire partie d'un grand ensemble, il fallait se reporter à notre mission en Afghanistan pour voir si les choses avaient bien fonctionné, peu importe les considérations politiques entourant cette mission. Le fait est que les partenaires de l'OTAN ne disposaient pas tous d'une capacité égale et cela a créé beaucoup de tensions à l'intérieur de l'organisation. Cela a amené l'OTAN à réexaminer sa situation et elle pose maintenant des questions fondamentales. Les Américains naturellement examinent constamment le rôle qu'ils jouent à l'intérieur de l'OTAN.
En tenant pour acquis que nous conserverons notre capacité de protéger nos trois côtes et notre frontière dans la mesure que nous jugeons appropriée, nous aurions besoin de la collaboration de l'OTAN pour tout ce qui dépasse notre souveraineté nationale. Toutefois, nous constatons actuellement que la collaboration paraît bien sur papier, mais dès que leur réalité politique entre en ligne de compte, certains partenaires sont prêts à collaborer, d'autres non, certains ont des objections et d'autres n'en ont pas.
Dans ce contexte, comment pourriez-vous obtenir des garanties que, si nous faisions partie d'un ensemble et que le gouvernement canadien ou les Canadiens estimaient qu'il serait nécessaire de faire quelque chose... Quel genre de garantie aurions-nous que les autres États membres de l'organisation seraient là pour avancer au rythme et dans la direction convenus, étant donné que c'est tout à fait le contraire qui s'est produit dernièrement en Afghanistan?
Auriez-vous des réflexions à nous communiquer à ce sujet, monsieur le professeur?
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Je reconnais tout à fait le problème, à savoir les objections concernant les opérations locales de l'OTAN. C'est l'une des raisons pour lesquelles il est toujours intéressant de garder des forces polyvalentes, exactement parce que nous ne savons jamais sur qui nous pouvons compter pour ce genre d'opérations.
Malheureusement, nous devons examiner la situation à la lumière des ressources dont nous disposons. Il est bien tentant de dire que nous allons garder des forces polyvalentes qui pourront effectuer toutes les opérations dont nous aurons besoin, mais si les capacités d'intervention de ces forces diminuent graduellement, nous deviendrons nécessairement dépendants des autres jusqu'à un certain point. Il est donc difficile de croire que nous pourrions conserver une certaine capacité de déploiement indépendante, du moins dans le contexte canadien, et nous voyons le même phénomène survenir un peu partout dans les pays membres de l'OTAN.
Pour résoudre le problème, il faudrait fondamentalement procéder à une évaluation plus honnête des pays avec lesquels nous voudrions travailler et des modalités de la collaboration. Le gouvernement peut négocier des protocoles d'entente et d'autres accords avec des partenaires clés sur la façon dont ces derniers pourraient utiliser leurs forces et dans quelle situation. Je crois que nous pouvons dire sans trop nous tromper que c'est avec certains partenaires avec lesquels nous avons travaillé dans le passé et sur lesquels nous avons pu compter que nous conclurions ce genre d'ententes.
Les particularités des politiques internes de l'Allemagne ou de la France pourraient nous amener à éviter de conclure des ententes avec ces pays. Par contre, les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Hollande ou le Danemark se montrent intéressés à mettre en commun leurs ressources et à poursuivre les déploiements. Ce sont des alliés avec lesquels nous pourrions essayer de conclure des arrangements. La collaboration de ces pays est constante dans le secteur maritime; les États-Unis et d'autres alliés de l'OTAN mettent leurs forces en commun dans le secteur aérien. Par exemple, l'OTAN a toujours collaboré pour des missions aériennes stratégiques.
Dans ce contexte, le Canada doit déterminer les capacités qu'il estime pouvoir fournir pour mettre les ressources en commun avec certains alliés. Ces capacités peuvent prendre différentes formes et nous devons y réfléchir. Il ne s'agit pas nécessairement de fournir des forces de première ligne. En effet, le Canada peut fournir diverses sortes de capacités à ses alliés, dans des créneaux qui peuvent être de nature plus délicate.
Les États-Unis ont pris cette direction dans leur dernière stratégie de défense, tout comme la Grande-Bretagne et la France. D'autres alliés ont également fait des coupes dans leurs acquisitions d'équipement de défense pour l'avenir. Si tous les alliés commencent à couper dans leurs capacités et à essayer de conserver une certaine forme de forces polyvalentes, l'alliance aura plus de difficultés à fonctionner sans la collaboration de ses membres. Nous devons tenir cette discussion et voir si certains alliés désirent s'engager fermement à conclure ce genre d'arrangements avec le Canada.
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Je veux être très clair: je parle précisément de capacités expéditionnaires. Ainsi, les FC conservent leur capacité fondamentale d'exécuter leurs fonctions au niveau national et d'intervenir avec la collaboration des États-Unis, pour les opérations continentales.
Il convient de faire une mise au point importante ici. Quel est donc l'équipement militaire qui tend à réellement faire augmenter les coûts et à les rendre très prohibitifs? Ce sont surtout les systèmes d'armement spécifiques et les technologies requises pour maintenir un certain niveau de capacité de combat et d'interopérabilité avec les principaux alliés.
Prenons les besoins en défense côtière. Si nous examinons les besoins réels en défense côtière par rapport aux types d'équipement et de capacités dont nous dotons les navires de guerre affectés aux opérations expéditionnaires, les coûts sont vraiment très différents. Comparons par exemple l'équipement placé sur le patrouilleur océanique de l'Arctique pour les opérations nationales et ce que nous entendons ou espérons trouver sur un navire de guerre, et nous y verrons des capacités et des types d'équipement vraiment très différents.
Naturellement, le navire de guerre sera plus cher que l'autre, simplement à cause des capacités qu'il doit posséder, disons, pour participer à un groupe aéronaval dans le golfe Persique et nous permettre de faire notre part, défendre la flotte, etc. Le patrouilleur, pour sa part, sera doté de capacités bien différentes. De la même manière, il pourrait y avoir des économies considérables à réaliser si nous examinons les types de capacités dont nous devrions doter notre force aérienne pour nous acquitter des obligations qui nous incombent dans le cadre de NORAD par rapport à la capacité de notre flotte de participer à des missions offensives outre-mer avec nos alliés.
Je ne crois pas que les choses soient aussi tranchées que cela. Il y a un juste milieu. Nous pouvons acheter de l'équipement plus adapté à nos besoins nationaux et continentaux qui coûte moins cher que ce que nous pourrions être obligés d'acheter pour des missions expéditionnaires.
Si nous acceptons ce principe de base, il faut maintenant chercher les secteurs où nous pouvons faire des économies. Devons-nous nous doter de toutes les capacités expéditionnaires? Avons-nous besoin d'une marine qui soit capable d'intervenir dans un groupe aéronaval engagé dans des opérations offensives? Avons-nous aussi besoin d'une force aérienne dotée de capacités semblables? En plus, avons-nous besoin d'une armée qui peut faire cela? Peut-être que oui, si nous voulons conserver une souplesse maximale. Alors, nous devons maintenant nous demander si nous voulons payer pour tout cela. Lorsque j'examine les prévisions budgétaires actuelles, il me semble que ce n'est pas le cas.
Globalement, alors, on finit par couper dans l'effectif et par réduire la capacité globale des forces d'agir. Voilà le sujet de préoccupation que nous avons.
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Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Lagassé, pour cet exposé mûrement réfléchi. Comme M. Christopherson l'a souligné, il nous est très utile.
Je comprends le principal point que vous voulez faire valoir, c'est-à-dire qu'il faudra faire un choix maintenant ou plus tard, mais, quoi qu'il en soit, il faudra choisir entre une capacité générale ou spécialisée; c'est la réalité.
On pourrait faire valoir que cette décision a déjà été prise en douce — qu'au cours des cinq à dix dernières années, ce choix a été fait — et que nous n'avons déjà plus la même capacité qu'auparavant.
Nous sommes en train d'avoir une petite discussion sur deux des acquisitions qui font les manchettes ces jours-ci, à savoir les F-35 et les sous-marins. Si je me fie aux déclarations du premier ministre et des ministres concernés — ce qui est toujours dangereux —, je pourrais croire qu'il est certain que le coût d'acquisition des F-35 ne dépassera pas les 9 milliards de dollars, mais en même temps, les Forces canadiennes affirment qu'il leur faut 65 appareils. C'est incohérent. Le gouvernement fait valoir qu'au moment de l'achat, le coût des appareils aura baissé à un point tel qu'il pourra se permettre d'en acquérir 65.
Il me semble que nous sommes en train d'avoir une petite conversation sur votre point de vue général, c'est-à-dire que les Forces canadiennes devront déterminer ce qu'elles sont en mesure d'accomplir et quelles en sont les raisons. Le principal élément qui semble alimenter cette conversation est la capacité de furtivité. Les représentants de l'Institut Rideau ont souligné que le Canada n'a jamais été sur la ligne de front d'une attaque; ce sont habituellement d'autres pays qui le sont. On peut le constater en examinant différents conflits. À mon avis, il s'agit dans une certaine mesure d'une étude de cas qui se rapporte aux questions que vous soulevez.
De même, en ce qui concerne les sous-marins, on prétend que nous en avons besoin à cause notamment de notre long littoral, mais, d'après les échanges que j'ai entendus, il semble qu'en ce qui a trait aux sous-marins, nous devons nous contenter de ceux que nous avons. Nous devrons les réparer, peu importe s'ils présentent un risque d'incendie ou de collisions occasionnelles avec un rocher.
J'aimerais savoir si vous pouvez vous exprimer au sujet de ces deux questions précises dans l'optique du tarif de 35 000 $, car dans une certaine mesure ce sont des études de cas concernant les décisions que le gouvernement devra prendre.
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Je crois que les F-35 constituent un bon exemple. Il est clair que les forces aériennes ont besoin d'un certain nombre d'appareils, et, comme vous l'avez dit, le gouvernement laisse entendre que les sommes qui seront consacrées à l'acquisition de la prochaine génération d'appareils sont fixes. Je crois qu'il faut nuancer cela un peu.
Jusqu'à maintenant, ce qu'on nous a dit, c'est qu'en 2020 les Forces canadiennes cesseront d'utiliser les CF-18. Ce n'est pas tout à fait vrai. Il se pourrait qu'avec ces 9 milliards de dollars, on puisse acheter, disons, 50 ou 40 F-35, et que le gouvernement, pour rétablir la capacité qu'il se trouve à perdre, doive maintenir les CF-18 en service plus longtemps. Il ne faut pas se faire d'illusions. Les forces aériennes auront le nombre d'appareils dont elles ont besoin pour effectuer toutes sortes de missions. Il reste à savoir si elles utiliseront uniquement des F-35 ou si le gouvernement sera forcé de maintenir en service certains CF-18 pour que nous puissions mener diverses autres opérations.
Il s'agirait là d'une solution à court terme tout simplement parce que le coût du maintien en service des CF-18 à long terme sera extrêmement prohibitif. Ce que pensent les forces aériennes, je crois, c'est que nous pouvons attendre que de nouveaux fonds soient enfin alloués pour remplacer les CF-18 que le Canada aura conservés. Donc, nous prévoyons peut-être dépenser 9 milliards de dollars pour l'achat de F-35 au cours de la prochaine décennie, mais il reste à déterminer combien nous en achèterons au cours des deux ou trois décennies suivantes pour remplacer tous les CF-18.
Cela revient au point que vous avez fait valoir. Je ne suis pas tout à fait d'accord avec les représentants de l'Institut Rideau, qui ont affirmé que nous n'avons jamais été sur la ligne front, car nous avons été en Libye, qui est un bon exemple, et au Kosovo, qui en est un autre. Si on estime qu'il est important que le Canada dispose de chasseurs pour pouvoir être sur la ligne de front aux côtés des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France, il faut alors permettre cette capacité et la maintenir. En fin de compte, c'est une question de politique. Est-ce que cette capacité constitue un pilier de la politique du Canada en matière de défense? Sommes-nous absolument convaincus que les Forces canadiennes doivent détenir cette capacité?
Il n'y a pas vraiment de réponse objective à ces questions. Il faut se demander quelles devraient être les priorités des Forces canadiennes dans l'avenir. J'espère que c'est exactement sur ce genre de choses que le gouvernement et d'autres se pencheront. Ils doivent se demander ce que nous pouvons nous permettre et ce que nous voulons être en mesure de faire. Si on estime que ce n'est pas un rôle que doivent absolument jouer les Forces canadiennes au cours des 50 prochaines années, alors il faudrait choisir un autre appareil ou un appareil moins performant.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je remercie aussi le témoin.
Nous examinons la disponibilité opérationnelle. Nous discutons de la prévisibilité et de l'imprévisibilité. J'aimerais parler de l'imprévisibilité. Si vous pensez à notre capacité de prédire des événements comme le printemps arabe, le conflit en Libye ou des catastrophes comme le tremblement de terre en Haïti, dans quelle mesure pensez-vous qu'il est important de planifier stratégiquement pour l'avenir, quand vient le temps d'acquérir de nouvelles capacités modernes, de se préparer pour intervenir lors de situations d'urgence, etc.?
Comme vous l'avez dit, on souhaite que les Forces canadiennes soient prêtes en tout temps à faire face à toute éventualité. Elles nous ont dit qu'elles l'étaient. Mais cela nous force à admettre que nous devons par conséquent maintenir des infrastructures plutôt coûteuses, malgré l'avenir qui demeure imprévisible.
Vous avez parlé des F-35 et des F-18 entre autres. Je vais faire un commentaire qui n'est pas tout à fait lié à ce sujet. J'ai déjà oeuvré au sein d'une organisation paramilitaire, dont 90 p. 100 du budget était consacré à la rémunération et aux avantages sociaux. Vous nous avez dit que, d'après le général Leslie, pour les Forces canadiennes il s'agit de 60 p. 100, et nous avons entendu dire qu'il est possible que ce soit 50 p. 100, alors disons que le pourcentage se situe quelque part entre les deux. Les coûts sont élevés. Le matériel dont les Forces canadiennes ont besoin ne se compare pas à celui utilisé par les services de police ou d'incendie.
Pouvez-vous nous parler de la prévisibilité, de la disponibilité opérationnelle et des attentes des Canadiens dans un monde qui devient de plus en plus petit, où tout ce qui se passe ailleurs a une incidence sur nous, qu'il s'agisse de la faillite d'une banque, d'un très petit pays ou d'une petite économie. Ce genre de choses a des répercussions partout. Comment cette réalité affecte-t-elle les forces armées et la disponibilité opérationnelle?
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La meilleure façon de décrire ce que représentent les forces armées, c'est d'évoquer la police d'assurance. En fin de compte, on choisit d'évaluer le risque futur. Comme vous le dites, c'est très imprévisible. On peut avoir une idée générale des types de dangers qu'on court et de ce qu'on veut être en mesure de faire, mais il n'existe aucun moyen de prédire exactement ce qu'il faut faire. J'aborderais avec prudence toute analyse de l'avenir et toute prédiction de ce que sera le monde. En règle générale, nous nous trompons et nous devons alors nous adapter à des circonstances qui sont tout autres.
Je crois cependant qu'il est possible de prendre des décisions fondamentales. J'ai une anecdote pour illustrer cela. Comme vous le savez probablement, de toutes les options d'assurance habitation qui existent, l'assurance contre les tremblements de terre est l'une des plus coûteuses. Vous pourriez opter pour une telle assurance et en payer le coût, mais vous n'en avez vraisemblablement pas besoin. Vous faites donc le calcul en fonction des besoins que vous pensez avoir et de vos moyens. Si vous redoutez beaucoup les risques, vous allez payer le prix qu'il faut et vous vous sentirez protégé dans la mesure de vos capacités.
C'est très semblable aux moyens que vous consacrez à vos forces armées. En principe, on peut dire qu'on ne sait jamais qui voudra lancer une attaque nucléaire contre le Canada. Faut-il alors se doter d'un dispositif de dissuasion nucléaire? Nous avons fait le calcul, compte tenu de nos alliés et du parapluie nucléaire qui nous protège, et nous arrivons à la conclusion que ce n'est pas nécessaire.
Nous pourrions en arriver à la même conclusion au sujet d'autres moyens de protection. Tout dépend de l'actuel environnement de sécurité international et de nos priorités fondamentales: la défense du Canada et celle de l'Amérique du Nord.
Il est certain que nous sommes touchés par les événements qui se produisent outre-mer, mais nous devons aussi envisager avec réalisme la mesure dans laquelle nous pouvons influer sur ces événements, par comparaison avec nos importants alliés. Si ceux-ci nous disent que nous leur serions beaucoup plus utiles à faire X, Y ou Z, alors pourquoi insistons-nous pour consacrer des moyens à A, B et C, à l'étranger? C'est de cela qu'il est question, quand vous discutez avec vos alliés de ce que vous pouvez faire pour eux, de façon globale, plutôt que de tenir pour acquis que le monde est un endroit dangereux et qu'il faut pouvoir tout faire.
Pour un pays comme le Canada, c'est véritablement excessif et plutôt contraire au principe du risque calculé et de l'évaluation de la façon de faire du Canada à l'échelle internationale, notamment, avec ses alliés — des alliés de taille qui sont en mesure d'influer bien plus que nous sur les événements.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup de votre exposé, monsieur Lagassé.
J'aimerais parler de ce que vous avez dit au sujet de forces polyvalentes. Le Canada arrive au deuxième rang à l'échelle mondiale, pour ce qui est de sa superficie, et nous avons une population de 33, 34 millions de personnes. Nous partageons notre continent avec l'une des plus grandes puissances militaires du monde. Ceci étant dit, d'après vous, est-ce une bonne idée de maintenir des forces polyvalentes, ou envisagez-vous autre chose dans ce contexte?
Je ne veux pas que nous abordions des choses comme le réseau d'alerte avancé, par exemple. Nous n'avons pas beaucoup contribué à l'établissement de la défense nord-américaine, mais s'il y avait eu une force polyvalente — pas nécessairement massive —, nous aurions pu aborder ces questions sous un autre angle et nous aurions pu, entre autres, éviter des désastres environnementaux.
Vous parliez de collaboration internationale avec nos alliés. On estime très généralement que les autres alliés ne se sont pas empressés à intervenir en Afghanistan, ce qui est faux, à mon avis, car nous nous sommes retirés de l'Afghanistan en 2003, et quand nous sommes revenus, nous n'avions que la province de Kandahar. Les autres forces, comme celles de l'Italie ou de l'Allemagne, avaient déployé 4 000 militaires dans diverses zones d'opérations. Question de coopération, nous avons tous les nouveaux membres de l'OTAN, comme la Roumanie, la Hongrie et la Pologne, et je ne crois pas que nous ayons coopéré selon nos différences par rapport aux autres nations. Le Royaume-Uni a recouru aux Estoniens et a travaillé avec les Polonais, et tous les autres alliés ont cherché à miser sur ces nouveaux membres de l'OTAN comme moyen de multiplier la force.
Nous avons donc initialement déployé 2 500 militaires dans la province de Kandahar. Nous n'avons pas suffi à la tâche, et c'était le berceau des talibans.
Vous vous rappellerez qu'en 2010, nous avons cédé le commandement de la province de Kandahar à l'armée américaine et nous avons conservé le commandement de deux districts, ceux de Panjwai et de Zhari. Nous avons alors été en mesure d'y apporter de grands changements; nous avons aussi perdu moins de militaires qu'à l'époque où nous devions couvrir la province de Kandahar en entier. Si vous vous retirez d'une région, les forces s'y réinstallent.
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En ce qui concerne la première question, je ne doute pas un seul instant de la nécessité de préserver les moyens nécessaires pour protéger les eaux canadiennes, l'espace aérien canadien et le territoire canadien. Compte tenu des menaces actuelles, qui sont plutôt faibles — du moins les menaces traditionnelles —, la question est donc de savoir s'il nous faut aussi être en mesure de faire la guerre au niveau supérieur à l'échelle internationale, et ce, avec nos trois forces. C'est ce qui m'intéresse. Le Canada a-t-il les moyens, ou la volonté, de posséder des capacités de combat au plus haut niveau au sein de ses trois forces, et est-ce dans son intérêt?
Même si nous répondons par l'affirmative, ce que les chiffres me disent, c'est qu'en pratique, nous n'en avons pas la volonté. Je crois donc qu'il est temps de faire des choix.
Pour ce qui est de la collaboration avec les alliés, je suis d'accord avec vous. La plupart des alliés de l'OTAN étaient sur le théâtre des opérations. Ce qui pose problème, c'est le nombre de restrictions liées à l'utilisation de leurs forces. D'autres pays ont bien sûr réussi à tirer partie de certains petits pays, mais nous avons essayé sans grand succès de convaincre certains des autres alliés de renoncer aux restrictions qui étaient liées à l'utilisation de leurs forces, ce qui leur aurait permis de nous apporter une plus grande aide.
Je vois aussi ce que vous voulez dire à propos de l'apport important que nous avons obtenu d'un autre pays à compter de 2010, et qui a nettement changé la dynamique pour les forces canadiennes. Vous avez raison. Mais il faut alors se demander ceci: le Canada n'aurait-il pas dû dès le début aborder le problème de cette façon? Je m'inquiète de ce que, parfois, notre enthousiasme à faire le bien et à nous lancer dans de très grandes missions nous amène à surestimer les capacités de nos forces armées et à trop leur en demander. C'est admirable, en effet, et les Forces canadiennes sont toujours prêtes à se dire capables, mais nous devons parfois jeter un regard un peu plus critique sur les moyens qu'elles ont pour faire ce que nous leur demandons.
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Merci, monsieur le président.
Merci de votre présence, monsieur Lagassé.
Je ne suis pas membre du comité, mais je trouve cette conversation fascinante. Vous avez parlé de coalitions, de l'OTAN en particulier, et de l'importance de l'intervention de ce groupe. Soyons honnêtes, cependant: l'OTAN, c'est en réalité les États-Unis. Ils ont 11 porte-avions de classe Nimitz et je ne sais trop combien de sous-marins. Je crois que les Britanniques ont deux porte-avions, et que les Français en ont peut-être aussi deux. Soyons honnêtes: c'est là que se trouve la vraie puissance de l'OTAN. C'est la puissance du monde occidental.
Or, j'ai lu récemment, il y a quelques mois peut-être, que les Chinois ont acquis un des porte-avions que les Soviétiques se préparaient à construire et qu'ils sont à le radouber. D'après ce que j'ai compris, il leur reste à apprendre comment y poser des avions et tout le reste, mais les Chinois s'engagent dans cette voie. J'ai aussi lu dernièrement qu'ils travaillent à une station sous-marine. Nous n'en savons pas grand-chose, car ça ne se passe pas en surface.
Dans l'histoire du monde, il y a toujours eu des alliances, et les nations puissantes ont toujours connu la chute après l'expansion. À votre avis, où en sont les États-Unis pour ce qui est de leur souveraineté en mer, dans les airs et sur la terre? Et où en est la Chine, par comparaison?
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Il ne fait aucun doute que, dans un avenir prévisible, et même au cours du siècle prochain, les États-Unis demeureront la puissance militaire dominante du monde. Ils ont des moyens qui dépassent nettement ceux de tout autre pays du monde. Les États-Unis forment une puissance militaire mondiale; il faut le reconnaître. La Chine est une puissance militaire régionale qui se raffermit. Il faut comprendre la différence.
Les Chinois souhaitent augmenter les sommes qu'ils consacrent à leur défense, pour protéger et soutenir leurs intérêts en Asie-Pacifique. Ils n'ont ni les moyens, ni l'intention — semble-t-il — de devenir une puissance militaire mondiale d'une telle portée. Bien entendu, les États-Unis s'en préoccupent, comme de toute autre puissance concurrentielle, mais il faut bien préciser que la Chine représente pour les États-Unis une puissance concurrentielle en Asie-Pacifique, mais non à l'échelle mondiale. La Chine ne semble pas avoir l'intention d'aller plus loin. J'ai toujours la certitude que la Chine ne constitue pas une menace pour les États-Unis, dont la taille comme puissance militaire mondiale est impressionnante.
La question est plutôt de savoir si les États-Unis devraient se préoccuper de la montée de la Chine comme puissance en Asie-Pacifique. Je me garderais d'essayer d'attribuer des intentions claires au gouvernement chinois en ce moment, à savoir pourquoi il se dote de telles forces et ce qu'il compte en faire. J'espère sincèrement que nous ne plantons pas de nouveau un décor semblable à celui qui a mené à la Première Guerre mondiale. À l'époque, la Grande-Bretagne n'avait pas pu répondre aux aspirations et aux intentions de l'Allemagne, ce qui s'est soldé par une vaste confrontation que nous aurions pu éviter si nous avions laissé aboutir les efforts de diplomatie et si nous avions été plus réceptifs aux demandes de l'autre puissance. J'espère franchement que nous pourrons éviter ce genre de confrontation grâce aux relations économiques et à la création de vastes liens diplomatiques.
Dans toute la mesure possible, nous devons reconnaître qu'il est tout à fait légitime que la Chine développe ses forces dans cette région, compte tenu des menaces que constituent pour elle l'Inde et le Japon, entre autres. Il n'est pas question que des États-Unis et de la Chine. Il est aussi question de la Chine qui doit être consciente des réalités de sa propre région.
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Il ne fait aucun doute que les États-Unis sont affaiblis par leur déficit structurel, attribuable en grande partie à leurs dépenses militaires. Les États-Unis pourraient notamment se tirer de leur situation financière actuelle s'ils se penchaient sur leurs dépenses militaires.
Cependant, je ne m'inquiète pas outre mesure pour eux, parce que même s'ils réduisaient leurs moyens militaires de 25 p. 100, les États-Unis demeureraient quand même la puissance militaire mondiale dominante. Il nous faut garder à l'esprit que, même si les États-Unis passent de 11 à 6 groupements tactiques, ils demeurent une puissance mondiale massive. Donc, quoi qu'il en soit, et peu importe les projections, les États-Unis demeureront une force militaire de taille, et la puissance militaire la plus importante du monde.
Cependant, ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il est temps pour ses alliés, comme le Canada et la Grande-Bretagne, de se pencher sérieusement sur les façons dont ils peuvent travailler avec les États-Unis pendant cette transition. C'est exactement le genre de discussion que nous aurons, je l'espère, parce que c'est nécessaire. Dans leur stratégie de défense, les États-Unis ont déjà affirmé savoir qu'ils doivent réduire leurs moyens. Si nous pouvons compenser ce que les États-Unis ne pourront faire, par exemple, dans l'Arctique ou ailleurs, nous devrions l'envisager.
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Merci, monsieur le président.
À l’instar de mon collègue, je ne suis pas un membre permanent du comité, mais je me réjouis d’être ici aujourd’hui, et j’ai trouvé vos réponses aux questions et votre exposé très informatifs.
Il y a deux ans, à peine quelques jours après le séisme en Haïti, les Canadiens pouvaient voir à la télévision deux de nos navires de guerre quitter le port d’Halifax à destination d’Haïti, pendant que des C-17 atterrissaient déjà là-bas. Au même moment, des troupes canadiennes étaient stationnées en Afghanistan. Si l’on prend également en considération les missions de l’EICC, on constate que nous sommes en mesure d’accomplir pas mal de choses simultanément. Divers niveaux semblent accomplir diverses missions partout dans le monde.
Cela contraste avec la situation dans laquelle nous étions il y a dix ans, lorsque nos troupes partaient pour l’Afghanistan sans même être dotées d’un matériel de camouflage approprié. Il s’agit peut-être d’une légende urbaine, mais on entend souvent cette histoire. De plus, il nous fallait compter sur nos alliés pour nous déplacer là-bas.
Puisque le monde dans lequel nous évoluerons demain sera incertain — et le mot clé ici est « incertain » —, je serais curieux de connaître les choix que vous arrêteriez. À l’heure actuelle, nous nous efforçons de maintenir six missions de base. Est-ce possible? Où envisageriez-vous d’affecter des ressources, ou d’apporter des changements? J’aimerais obtenir des précisions sur la marche à suivre au cours des années à venir.
Je n’ai pas d’autres questions à poser, alors vous pouvez employer tout le temps dont je dispose.
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Je ne dis pas que cette décision était bonne ou mauvaise, mais il est clair qu’il y a eu un débat au sein des FC à propos du genre de capacité dont nous avions besoin à l’époque. Par conséquent, nous pouvons poser la question suivante: quels genres d’opérations pensons-nous que l’armée canadienne entreprendra dans les années à venir? Exigeront-elles les forces plus mécanisées de niveau supérieur que nous développons en ce moment? Est-ce vraiment ce que nous pensons que l’armée réalisera dans les années à venir, ou pourrions-nous nous débrouiller avec une force plus légère qui participerait à des types d’opérations plus précis appartenant à l’extrémité inférieure de l’éventail des conflits?
De même, en ce qui concerne la marine, avons-nous besoin de forces qui sont en mesure d’intéropérer avec les groupes aéronavals américains, ou devraient-elles pouvoir entreprendre d’autres types d’opérations mettant précisément l’accent sur une région particulière du monde, comme les Caraïbes ou l’Arctique? Est-ce le genre de forces qui rendraient service à nos alliés?
Par exemple, l’année dernière lors de la conférence sur la défense et la sécurité tenue à Ottawa, le président du Centre for Strategic and International Studies de Washington, qui est un ancien sous-secrétaire de la Défense aux États-Unis, a fait valoir qu’il serait peut-être plus judicieux que la marine canadienne devienne une force arctique. Ainsi, les États-Unis n’auraient plus à se préoccuper de cette partie du monde.
Voilà donc le genre de discussions qu’à mon avis, nous pouvons avoir, au lieu d’affirmer que nous avons exactement besoin des types de forces que nous possédons à l’heure actuelle. Je ne trouve pas cela très créatif. Cela ne tient pas vraiment compte des différents types de possibilités qui existent dans le monde.
Je ne tiens pas à signaler des capacités précises dont nous pourrions nous passer ou non. Je ne suis pas un planificateur militaire, mais plutôt un analyste de politiques. En fin de compte, cela se résume à une question politique ayant trait à ce que le gouvernement souhaite que les forces accomplissent. Ensuite, permettons aux militaires de nous dire les capacités qu’ils requièrent pour être en mesure de s’acquitter de cette tâche.
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Merci, monsieur le président.
Vous serez heureux d’apprendre à quel point vous avez des dons divinatoires puisque, pendant que vous étiez assis ici, on a apparemment signalé un tremblement de terre à Vancouver ou au large de l’île de Vancouver — quelque part dans ce coin-là. Il est d’ailleurs intéressant de s’interroger sur la raison pour laquelle on s’assure contre les séismes.
Avec l’aide du sénateur Dallaire, vous avez rédigé un article très éloquent à propos de la responsabilité de protéger, de la volonté d’intervenir et d’autres sujets de ce genre, et j’y songeais dans le contexte de cette approche liée aux interventions militaires intelligentes. Il me semble que, compte tenu de nos capacités expéditionnaires, notre réflexion en ce qui concerne non seulement le personnel, mais aussi l’approvisionnement, etc., doit être présentée dans le contexte de la responsabilité de protéger et d’intervenir, et d’autres enjeux de ce genre.
Comme l’OTAN l’affirme, et je vous cite ici: « Comme le concept stratégique de l’OTAN de 2010 l’indique avec raison: ‘La meilleure façon de gérer un conflit, c’est d’éviter qu’il ne survienne.’ » Étant donné le caractère de plus en plus interdépendant de notre planète, c’est probablement très vrai.
Par conséquent, si vous faites abstraction des observations que vous avez formulées jusqu’à maintenant, qui cadrent en grande partie avec le raisonnement militaire traditionnel, que diriez-vous de vos réflexions à propos de la composition du personnel, de la composition du matériel et, je dirais presque, de la composition culturelle et attitudinale?
À mon sens, certains des membres du personnel supérieur, en particulier quelques-uns de ceux affectés aux missions de l’ONU, ne sont pas vraiment, disons, de bons guerriers. Et cela a des conséquences. Je pense que notre gouvernement n’a pas répondu à la demande d’intervention au Congo, sans doute pour des raisons qui n’étaient peut-être pas tellement bonnes.
J’aimerais savoir ce que vous pensez à cet égard.
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La première chose que j’aimerais faire valoir, c’est que cette capacité ne se résume pas uniquement au matériel. Elle dépend aussi du personnel.
En ce moment, nous peaufinons notre capacité de former nos alliés locaux, comme nous le faisons en Afghanistan. Lorsque nous parlons de prévenir des conflits à l’avenir, il semble clair que, pendant une période caractérisée par des compressions budgétaires et des complications, nous allons nous attendre de plus en plus à ce que nos alliés régionaux assument une grande part du travail, en ce qui a trait au maintien de la sécurité dans leur partie du monde.
La mesure dans laquelle nous sommes en mesure de mobiliser ces alliés régionaux et de les aider à développer leur capacité d’intervention, afin que nous n’ayons pas à… Ils sont plus près de la situation que nous le sommes. Ils comprennent la dynamique du conflit beaucoup mieux que nous, et il est très important que nous ne perdions pas de vue ce fait. Parfois lorsque nous intervenons, nous ne connaissons nullement les gens avec lesquels nous collaborons, la façon dont la situation se présente et les structures du pouvoir qui sous-tendent les situations dans lesquelles nous nous immisçons.
Par conséquent, la mesure dans laquelle nous sommes en mesure d’aider nos alliés régionaux partout dans le monde à développer leur capacité, comme nous le faisons, disons, en Jamaïque, juste récemment… Voilà un bon exemple du genre de forces ou de capacités spécialisées que nous pourrions sérieusement envisager de dépêcher auprès de nos partenaires régionaux afin de les aider à développer leurs propres capacités d’intervention dans leur région. Ainsi, nous ne serions pas toujours forcés de demander à l’OTAN de prendre en charge la mission en question.
Voilà un aspect que nous avons vraiment tenté de faire ressortir dans l’article que le sénateur Dallaire et moi avons rédigé. La mesure dans laquelle nous sommes en mesure d’intervenir au début des conflits, au lieu de réagir après coup, avant que ceux-ci ne deviennent aussi violents qu’ils finissent par l’être habituellement, la mesure dans laquelle nous pouvons entraîner des partenaires régionaux qui sont en mesure d’intervenir, qui jouissent d’une légitimité régionale supérieure à la nôtre et dont les interventions sont beaucoup moins coûteuses que les nôtres, voilà des questions que nous devons sérieusement envisager.
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Je crois fermement que nous devrions préserver le pouvoir qu’a la Couronne de déployer l’armée sans avoir nécessairement l’approbation de la Chambre des communes.
Cela étant dit, il reste à déterminer le rôle que la Chambre des communes joue en débattant ces missions et en obligeant, au moins, le gouvernement à exposer ce qu’il a l’intention de faire et les sommes qu’il a l’intention de dépenser. Et, s’il a besoin de fonds supplémentaires, il devrait être en mesure de les obtenir auprès de la Chambre.
Encore une fois, la raison pour laquelle je suis aussi catégorique à ce sujet, c’est qu’à mon sens, dans notre système, la responsabilisation est préservée lorsque les dirigeants sont complètement responsables des décisions qu’ils prennent et qu’ils ne sont pas en mesure d’utiliser la Chambre pour les blanchir, ce qu’à mon avis, le gouvernement actuel a fait à plusieurs reprises. Je trouve que cela obscure la responsabilisation à l’égard de la défense nationale.
Cela étant dit, les députés devraient avoir l’occasion de débattre ces missions à la Chambre et de présenter des motions. Cela devrait être obligatoire. En outre, le gouvernement devrait également être forcé de tout divulguer à propos des coûts, des forces qu’il déploie et de l’objectif ultime qu’il anticipe.
De même, en ce qui concerne votre deuxième question, un comité parlementaire devrait avoir la cote de sécurité nécessaire pour être en mesure d’étudier les secrets opérationnels. Ainsi, les députés auraient une meilleure idée de ce qui se déroule sur le terrain et sauraient si la mission est aussi fructueuse qu’on le leur dit.
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Je commencerai par faire la remarque suivante. L’une des raisons pour lesquelles le Canada a mieux résisté à la crise économique que les autres pays est parce que le gouvernement fédéral a réduit considérablement ses dépenses dans les années 1990. Suite à cette mesure, les dépenses militaires ont sensiblement diminué, ce qui a permis au gouvernement de réduire son ratio dette/budget global.
Cette diminution du ratio n’a été possible qu’en raison des réductions notables des dépenses militaires. Il est facile de voir les sommes dépensées par d’autres pays dans le domaine militaire, mais il faut ensuite déterminer quel en a été l’effet sur leur situation budgétaire globale et aussi considérer, qu’à l’époque, ces pays n’avaient pas fait de compressions où il était nécessaire de le faire.
La décision prise par le Canada dans les années 1990 pour mettre de l’ordre dans ses finances a été pour ainsi dire une bonne décision qui nous permet de pouvoir investir aujourd’hui dans le domaine militaire. Nous devons toujours mettre cela en contexte.
De même, je dirais aussi qu’en dollars réels — qui permettent vraiment de mesurer notre capacité globale —, le Canada se place au sixième rang des pays de l’OTAN. Plus précisément, le pourcentage du PIB en tant que moyen de mesurer les dépenses évalue l’effort relatif de notre pays par rapport à celui d’autres pays alliés. Et la façon dont les forces sont utilisées est également un bon moyen de mesurer l’effort relatif. À cet égard et comparativement à beaucoup d’autres membres de l’alliance qui ont dépensé un pourcentage plus élevé de leur PIB, le Canada a été un modèle exemplaire.
La question qui se pose est la suivante: le Canada devrait-il dépenser plus? La réponse est oui si le pays estime qu’il le faut pour atteindre ses objectifs et respecter ses exigences en matière de sécurité. Il n'est pas nécessaire de permettre que de telles décisions soient prises en s’appuyant sur un chiffre qui doit être mis dans un contexte plus large.
J’hésiterai à dire que nous devrions dépenser un certain pourcentage du PIB, je pencherai plutôt pour une analyse plus approfondie sur la façon dont nous utilisons les forces et sur les raisons pour lesquelles nous dépensons ce que nous dépensons.