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Monsieur le Président, je suis très fière de prendre la parole pour appuyer le projet de loi , Loi visant à accroître la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada.
Peu d'institutions nationales ont une valeur symbolique plus forte que la Gendarmerie royale du Canada, dont l'histoire remonte à la fondation même du pays. Pour beaucoup de Canadiens et d'étrangers, les agents de la GRC ont fini par représenter certaines valeurs associées au Canada: l'intégrité, l'honnêteté, le courage et la détermination. Or, la remise en cause et la détérioration de ces valeurs, en plus de nuire au fonctionnement de la GRC, infléchissent la façon même dont on nous perçoit et dont nous nous percevons nous-mêmes.
C'est pour cette raison que le gouvernement souhaite vivement moderniser la GRC afin de lui permettre de répondre aux exigences du XXIe siècle. Je rappelle aux députés que la dernière révision majeure de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada remonte à 1988, il y a 25 ans. Le monde a beaucoup changé depuis. C'est à juste titre que les Canadiens réclament une meilleure reddition de comptes et une transparence accrue de la part de la GRC. Le cadre de gestion des ressources humaines de la GRC, qui est lourd et repose largement sur le papier, ne fait qu'empirer la situation. Sans compter les accusations très médiatisées de harcèlement sexuel, qui sont une indication de plus que des changements en profondeur s'imposent au sein de cette institution. Il est vrai que celle-ci a déployé des efforts louables pour corriger ses problèmes à l'aide de son programme de transformation, mais ce genre de changements internes a ses limites. Ce qu'il faut à l'heure actuelle, c'est une réforme globale des dispositions législatives qui touchent aux mécanismes de surveillance de la GRC et à ses opérations.
La GRC et la population canadienne comprennent la nécessité de ces modifications législatives. Il est malheureux que le NPD ne la voit pas et qu'il ait décidé de rejeter cet important projet de loi. À la lumière de ce que le comité a entendu pendant ses audiences, il ne fait aucun doute que la GRC doit faire face à des problèmes structurels. Il lui faut régler certains problèmes de gestion et de confiance. Le gouvernement est déterminé à s'y attaquer franchement.
Comme les députés s'en souviendront, notre parti a été porté au pouvoir grâce à son programme reposant sur des priorités claires, notamment le renforcement de la sécurité publique et l'amélioration de la reddition de comptes et de la transparence. Le projet de loi reprend un grand nombre des dispositions qui se trouvaient dans une mesure présentée lors de la dernière législature et visant à régler les problèmes de responsabilité au sein de la GRC.
Permettez-moi de revenir sur les éléments essentiels du projet de loi et sur des amendements qui ont été présentés au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Les Canadiens reconnaissent les limites des mécanismes actuels de surveillance de la GRC. Ils veulent avoir l'assurance que les plaintes du public à l'endroit d'agents de la GRC seront traitées rapidement, avec rigueur et impartialité. Ils réclament une transparence accrue non seulement pour que justice soit faite, mais pour qu'on sache qu'elle a été faite. Le gouvernement a prêté une oreille attentive et reconnu la nécessité de renforcer les mécanismes de surveillance externe de la GRC.
Ces modifications ne diminuent en rien le travail précieux qu'a accompli la Commission des plaintes du public contre la GRC depuis sa création, en 1988. Elle a fait de l'excellent travail, mais nombreux sont ceux qui estiment que la loi actuelle l'empêche de s'acquitter de son mandat sérieusement. Ainsi, le projet de loi propose de remplacer la commission actuelle par un organe indépendant qui portera le nom de Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada.
Le projet de loi rehausse les pouvoirs de la Commission des plaintes du public. Par exemple, la nouvelle entité continuerait de se concentrer sur l'examen des plaintes du public grâce à un meilleur accès à l'information. Elle pourrait aussi convoquer des témoins à une audience. De plus, le nouvel organisme serait en mesure d'examiner plus en profondeur les activités de la GRC dans un domaine d'intérêt particulier, et de faire rapport de ses conclusions. En outre, la nouvelle commission serait habilitée à échanger des renseignements ou à mener des enquêtes conjointes sur les plaintes avec des homologues d'autres entités. Elle pourrait ainsi produire des rapports personnalisés sur les plaintes du public pour chaque entité liée à la GRC par contrat. Ces rapports contiendraient une analyse du nombre et de la nature des plaintes pour une période donnée, ce qui permettrait de repérer des tendances parmi les plaintes. De cette façon, la commission présenterait un rapport sur mesure qui répondrait aux besoins et aux attentes des administrations contractantes. Ces nouvelles mesures sont devenues des outils courants pour les organismes d'examen modernes.
Parmi les questions les plus délicates sur la conduite de la GRC, il y a ce qu'on appelle les « incidents graves ». Ce sont des cas où la rencontre entre des agents de la GRC et des citoyens a entraîné des blessures graves ou la mort. Dans ces situations très médiatisées, il est essentiel que l'enquête soit menée de façon indépendante, transparente et impartiale. Comme je l'ai dit plus tôt, il est important que l'impartialité soit visible dès le tout début de l'enquête afin de protéger l'intégrité de ces enquêtes et la réputation de la GRC. C'est pourquoi le projet de loi proposé exigerait que la GRC confie tous les cas d'incidents graves à un organisme civil d'enquête de la province concernée. Cet organisme veillerait à ce que l'enquête soit menée de manière impartiale et transparente.
Évidemment, ce ne sont pas toutes les provinces qui disposent d'un organisme d'enquête civil apte à traiter les cas de ce genre. En l'absence d'un tel organisme, le cas sera confié à un autre corps policier. Mais parfois, il n'existe ni organisme civil ni corps policier qui pourrait faire enquête. La mesure législative prévoit donc une troisième possibilité, qui pourra servir, par exemple, pour certains lieux de travail de la GRC en région éloignée. En effet, en l'absence d'un organisme d'enquête externe, la GRC devra mener enquête elle-même. Mais comme cela entraînerait des préoccupations tout à fait valides à propos de l'indépendance de l'enquête, de sa transparence et des risques de conflits d'intérêt, le projet de loi irait encore plus loin. Si la GRC ou un autre corps policier mène enquête sur ces graves incidents, l'administration concernée ou la nouvelle commission pourra nommer un observateur indépendant qui jugera de l'impartialité de l'enquête.
Le gouvernement a déployé beaucoup d'efforts pour favoriser la reddition de compte et la transparence qu'exigent les incidents graves. Je sais que les dispositions du projet de loi vont tout à fait en ce sens.
Jusqu'ici, j'ai surtout expliqué comment le projet de loi contribuerait à renforcer l'obligation de la GRC de rendre des comptes aux Canadiens. Mais la GRC doit aussi rendre des comptes à ses propres membres. Au cours de la dernière année, les médias ont beaucoup parlé d'allégations d'inconduite et de harcèlement sexuel au sein de la GRC. Actuellement, le cadre de gestion des ressources humaines n'autorise pas le commissaire à régler rapidement ces problèmes internes. C'est pourquoi une grande partie du projet de loi porte sur la refonte et la modernisation des pratiques entourant la gestion de la discipline, des plaintes et des ressources humaines à la GRC. En ce qui concerne les mesures disciplinaires, la seule préoccupation touche l'obligation de confier les cas graves à un comité d'arbitrage. La politique rattachée aux lois actuelles entraîne parfois deux résultats. Premièrement, elle déclenche un cauchemar bureaucratique, c'est-à-dire un processus lourd de multiples délais, qui peut s'étendre sur plusieurs années et créer des frictions néfastes au climat de travail. Deuxièmement, parce que cette politique enlève aux gestionnaires de première ligne la possibilité d'agir, ils ne peuvent pas corriger les comportements fautifs, ramener l'employé au travail rapidement et l'aider à tourner la page, ni montrer aux autres employés que les comportements inappropriés ne seront pas tolérés. Actuellement, les gestionnaires de première ligne de la GRC ne peuvent pas poser ces gestes. Il est temps qu'ils puissent utiliser des stratégies modernes et efficaces pour gérer les employés avec qui ils travaillent.
Le projet de loi modifierait en grande partie cette procédure. Plus particulièrement, il donnerait plus de pouvoirs aux gestionnaires de première ligne au sein de la GRC. Selon les dispositions de la mesure législative, ces gestionnaires pourraient imposer des conséquences ou prendre des mesures en ce qui concerne la plupart des infractions au code de conduite. Par exemple, les gestionnaires pourraient prévoir des mesures éducatives ou correctives ou, dans certains cas, suspendre le salaire de l'agent. Les gestionnaires confieraient le dossier à un comité de déontologie uniquement lorsque l'examen pourrait mener au congédiement d'un agent.
La procédure de règlement des griefs est tout aussi déconcertante que la procédure disciplinaire, et peut-être même encore plus déconcertante, si une telle chose est possible. En effet, il semble y avoir une procédure différente pour chaque situation. Ainsi, un membre de l'organisation qui n'est pas satisfait de ses conditions d'emploi doit suivre une procédure donnée. Un membre qui fait appel d'un congédiement doit quant à lui suivre une procédure différente. Enfin, un membre qui fait appel d'une mesure disciplinaire doit pour sa part suivre une troisième procédure. Il y a tant de procédures et d'administrateurs différents pour chacun de ces incidents qu'au bout du compte, dans de nombreux cas, les gestionnaires de première ligne ne savent même pas ce qui se passe. Le moment est venu d'établir des responsabilités et de trouver des solutions.
Le projet de loi prévoit l'établissement d'une seule procédure pour les griefs et les appels des membres, qui sera gérée par les mêmes administrateurs. Ainsi, les conclusions seraient examinées par les mêmes instances. Le système serait donc plus simple, plus uniforme et beaucoup plus efficace. En guise de complément à cette approche officielle, on encouragerait les gestionnaires de première ligne à régler les problèmes mineurs de façon informelle, dès qu'ils surviennent, comme les gestionnaires des ressources humaines des autres corps policiers du pays peuvent le faire avant que de telles situations ne donnent lieu à des plaintes officielles et minent un environnement de travail positif.
Les améliorations que nous entendons apporter en ce qui concerne la direction de la GRC ne seraient pas complètes si nous ne tenions pas compte du rôle important joué par le commissaire. En résumé, à l'heure actuelle, le commissaire n'a pas le pouvoir de prendre des décisions qui pourraient faire partie des moyens mis à la disposition des cadres supérieurs, y compris des autres chefs de police. Afin de combler ces lacunes, la mesure législative proposée donnerait de nouveaux pouvoirs au commissaire. Ainsi, il aurait par exemple le pouvoir de rétrograder ou de congédier des membres, de nommer des officiers commissionnés et de faire enquête sur des conflits associés à du harcèlement en milieu de travail.
J'ai présenté les principales dispositions du projet de loi afin que la Chambre les étudie. J'aimerais maintenant exposer et expliquer les changements qui ont été adoptés par la Chambre des communes à l'étape du rapport. Le comité a accepté trois amendements importants. Ainsi, il s'agissait de questions qui avaient été soulevées par les témoins. Nous sommes heureux d'avoir pu renforcer la mesure législative grâce à ces amendements.
Tel qu'amendé, le projet de loi appuie la création d'un programme amélioré de réserve, qui reposerait en grande partie sur la participation de membres de la GRC à la retraite et sur celle de policiers d'autres services. À l'heure actuelle, il existe une limite quant à la période consécutive durant laquelle on peut servir au sein de la réserve. Il s'agit d'un amendement important pour de nombreuses raisons, notamment pour la souplesse accrue au plan de la gestion des effectifs. En effet, les gestionnaires seront désormais mieux en mesure de veiller à maintenir un climat de travail sain en réduisant la quantité d'heures supplémentaires que les membres réguliers doivent effectuer. Je suis heureuse que le comité ait accepté de faciliter l'accès de la GRC au programme de réserve sans qu'il y ait d'interruption dans les années de service.
Le deuxième amendement vient éclaircir le concept d'immunité lorsqu'il s'applique au président de la commission. Initialement, la disposition du projet de loi accordait l'immunité à tous les membres, officiers et employés de la nouvelle commission exerçant les pouvoirs ou fonctions attribués à la commission. Il a toujours été prévu que cette disposition vise aussi le président. Aussi, le comité a cru bon d'indiquer explicitement dans la loi que le président jouissait aussi de l'immunité. Le dernier amendement vient préciser que le commissaire de la GRC ne peut refuser d'enquêter sur les plaintes présentées par le président de la commission.
Le projet de loi, y compris ces trois amendements importants, permet d'adapter aux réalités du XXIe siècle les lois qui régissent la GRC. Il est déconcertant de voir les néo-démocrates manigancer ainsi à l'étape du rapport et refuser leur appui à cet important projet de loi, eux qui ont pourtant collaboré avec nous pendant les travaux du comité pour renforcer le projet de loi. Je prie sincèrement le NPD d'appuyer ce projet de loi et d'aider le gouvernement à faire cesser le harcèlement à la GRC.
Nous avons entendu de nombreux témoins nous dire lors des séances du comité que le projet de loi donnerait à la GRC la souplesse dont elle a besoin. En réglant en même temps les problèmes structuraux de l'organisation, le projet de loi contribuera à une meilleure reddition de comptes et à une plus grande transparence et, ce faisant, permettra à la GRC de raviver la confiance que lui vouent les Canadiens.
Alors que, malheureusement, les néo-démocrates refusent de laisser tomber leur opposition partisane à notre réforme fondée sur le bon sens, je peux assurer aux Canadiens que les conservateurs appuieront le projet de loi à l'étape de la troisième lecture.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi à l'étape de la troisième lecture.
Je tiens tout d'abord à rendre hommage aux femmes et aux hommes qui servent dans la GRC et qui, tous les jours, s'emploient à protéger les Canadiens. Nous parlons souvent des fabuleuses richesses dont regorge notre pays, qui est vaste et diversifié, mais il faut reconnaître qu'il peut être aussi vaste que froid, ce qui peut se révéler une malédiction ou une bénédiction. Étant donné les conditions météorologiques qu'on a connues au pays la semaine dernière, il ne faut pas oublier les intervenants d'urgence, que ce soit les membres de la GRC ou les autres travailleurs de première ligne, qui bravent le froid pour nous protéger malgré les conditions météorologiques difficiles qui amènent bon nombre d'entre nous à rester à la maison.
Puisque nous commençons le débat à l'étape de la troisième lecture, il convient, à mon avis, de rappeler pourquoi la Chambre a été saisie du projet de loi. Le gouvernement aime parler de modernisation; il affirme qu'il est grand temps de revoir la loi, qu'il s'agit de la première véritable réforme en 25 ans et qu'il faut donc tenir compte des changements survenus depuis la dernière fois que la Chambre a débattu de cette question en 1988.
Je dirais pour ma part que, si ce projet de loi est soumis à la Chambre, ce n'est pas uniquement parce que le temps passe et que nous devons nous pencher maintenant sur des modifications de la loi existante. C'est parce que nous avons de sérieux problèmes à régler concernant la GRC.
Je tiens à exprimer mon indignation à l'égard de la position énoncée ce matin, selon laquelle le NPD défend ses intérêts dans ce dossier. Nous ne faisons que rappeler ce que nous avons entendu dire de la bouche des témoins et des principaux intéressés. Ils nous ont dit que le projet de loi aurait dû contenir certaines dispositions qui ne s'y trouvent pas. Nous avons proposé des amendements, lors de l'étude du projet de loi par le comité, puis encore une fois à l'étape du rapport, afin de résoudre ces problèmes sérieux. Je voudrais rappeler à la Chambre ce que sont ces problèmes.
Premièrement, la population fait de moins en moins confiance à la GRC, malgré le bon travail accompli quotidiennement par les femmes et les hommes qui oeuvrent sur le terrain. Dans l'ensemble, nous avons pu observer, au sein du public, une diminution de la confiance ayant fait pendant longtemps de la GRC un symbole national à bien des égards.
Le public fait encore confiance à la GRC, bien sûr, mais que cette confiance diminue doit être une source d'inquiétude pour les députés, même si la diminution est faible.
Deuxièmement, il existe nettement à la GRC un problème de harcèlement sexuel. Lors des réunions du comité, nous avons entendu parler d'autres formes de harcèlement. Par conséquent, nous devons nous occuper directement de ce problème. Il ne s'agit pas seulement de mettre à jour la loi, mais bien de nous occuper d'un problème qui existe à la GRC depuis longtemps et qui a amené 200 femmes à intenter une poursuite judiciaire contre la GRC pour le préjudice qu'elles ont subi et qui a nui à leur avancement, à cause du harcèlement sexuel à la GRC.
Troisièmement — et c'est la question néanmoins importante sur laquelle le gouvernement se concentre presque exclusivement —, il nous faut nous occuper des sérieux problèmes de gestion des ressources humaines et des relations de travail au sein de la GRC.
Permettez-moi de vous donner davantage de détails sur chacune de ces questions, en commençant par la perte de confiance.
La GRC a été impliquée dans des incidents malheureux très médiatisés au cours des dernières années, incidents au cours desquels des gens ont été tués ou sérieusement blessés. Il faut s'attendre à une perte de confiance lorsque des incidents graves de ce genre se produisent.
Cependant, je pense que la perte de confiance est largement attribuable au fait que c'est la police qui enquête sur elle-même. Dans les cas où se sont produits, comme je l'ai dit, des blessures corporelles ou des décès, le public craint que, si l'enquête est menée par la police, celle-ci ait tendance à protéger les siens plutôt que de chercher à découvrir tous les faits.
J’estime que, de façon générale, la police fait bien son travail lorsqu’elle est chargée d’enquêter sur des membres de son personnel. Pour autant, il me semble évident que, si le public ne partage pas cette confiance, il faut s’y prendre autrement.
Si le public a perdu confiance, c’est parce qu’il se méfie des mécanismes de reddition de comptes que nous imposons à la GRC.
Certes, comme l’a dit la secrétaire parlementaire, et je suis assez d’accord avec elle sur ce point, il y a tout un entrelacs de sphères de compétences qui se recoupent, mais c’est justement la raison pour laquelle nous avons proposé, en comité, la création d’un organisme indépendant qui serait chargé de faire enquête dans ce genre d’incidents. Nous proposons non pas d’ajouter un nouveau palier aux structures existantes, mais plutôt de créer un organisme civil national qui diligenterait des enquêtes dans ces affaires très graves, et en qui le public et la police pourraient avoir confiance.
Deuxièmement, j’ai déjà parlé du problème du harcèlement sexuel au sein de la GRC. Nous ne pouvons pas nous en laver les mains et laisser la GRC s’en occuper, car il est évident qu’elle ne réussit pas à le régler. Quand on pense, comme je l’ai déjà fait remarquer, qu’à tout moment il y a 200 membres de la GRC qui, pour une raison ou une autre, refusent de se prévaloir des mécanismes de la GRC et préfèrent s’adresser à un tribunal externe pour dénoncer des pratiques et des politiques de la GRC qu’ils jugent extrêmement répréhensibles, il est manifeste que nous faisons face à un grave problème — et il ne s’agit pas seulement de quelques pommes pourries, c’est un problème systémique au sein de la GRC.
Notre parti craint que ce problème ne soit profondément ancré dans la culture de la GRC. C’est une culture qui tolère trop facilement le harcèlement au travail, notamment le harcèlement sexuel. En conséquence, nous soumettons un amendement à l’article où sont énumérées les responsabilités du commissaire de la GRC. Cet article énumère certaines tâches dont le commissaire doit s’acquitter, mais pas toutes celles qu’il exécute en réalité, ce qu’a laissé entendre la députée de l’autre parti. Il définit certaines responsabilités claires.
En comité, nous avons entendu des représentants des femmes qui ont intenté des poursuites. Nous avons également entendu des spécialistes du harcèlement sexuel, qui nous ont dit qu’au lieu de traiter le problème après coup, par des mesures disciplinaires, il fallait absolument changer la culture de la GRC par une formation préalable, afin de sensibiliser les gens à un comportement qu’ils ne perçoivent pas toujours comme du harcèlement.
J’ai eu l’occasion de siéger à une commission municipale des services policiers. Et il y a une dizaine d’années, nous avions obligé tous les employés de la commission à suivre des cours sur le harcèlement. À la fin de cette formation, des agents que je respectais m’avaient dit avoir fait certaines choses, dans le passé. sans se rendre compte qu'elles avaient un impact sur des collègues.
Il importe donc de souligner que, si la formation en matière de harcèlement faisait partie des responsabilités du commissaire, il serait plus facile de modifier la culture qui a pour effet d'entraver la carrière des femmes au sein de la GRC. Nous consacrons énormément d'argent à la formation des agentes. Elles acquièrent beaucoup d'expérience, puis voient leur carrière freinée par une pratique inacceptable, le harcèlement sexuel.
Je le répète, quand les cas sont aussi nombreux, c'est qu'il existe un problème généralisé. Lutter contre le harcèlement sexuel dès le début en donnant de la formation n'est pas une idée du NPD qui profiterait au parti, c'est ce que font la plupart des organismes. C'est pourquoi je n'arrive vraiment pas à comprendre pourquoi les conservateurs n'acceptent pas au moins cet amendement, qui est très simple, et qui ajouterait la formation en matière de harcèlement aux responsabilités du commissaire.
De plus, cette responsabilité particulière engendrerait la reddition de comptes. Lorsque le commissaire se présente devant le Comité de la sécurité publique, si une responsabilité donnée est prévue par la loi, les députés peuvent lui poser des questions sur la façon dont il s'acquitte de la responsabilité que lui confère la loi et ce qu'il a fait dans le domaine, au lieu que la loi reste muette sur la question du harcèlement sexuel.
Comme l'a indiqué le député dans sa question, l'expression « harcèlement sexuel » ne figure même pas dans le projet de loi présenté comme solution au problème de harcèlement sexuel. Je veux bien concéder à la secrétaire parlementaire que le harcèlement n'est pas uniquement sexuel, et qu'il y a un problème plus important dans la culture de la GRC. Toutefois, c'est pour cela que nous avons présenté cet amendement, afin que le projet de loi fasse d'emblée partie des efforts visant à changer la culture à la GRC, mais les conservateurs l'ont rejeté. À mon avis, il s'agit d'une mesure qui, de concert avec une surveillance indépendante, contribuerait grandement à restaurer la confiance envers la GRC.
En ce qui a trait à notre troisième sujet de préoccupation, soit la gestion des ressources humaines, je crois qu'il s'agit en fait du problème soulevé par la secrétaire parlementaire. Le processus disciplinaire semble compliqué, parfois arbitraire et souvent inefficace. Nous en avons vu des exemples flagrants, surtout dans le cas des mesures disciplinaires concernent le harcèlement sexuel.
Par exemple, dans l'une des provinces, le processus interne a reconnu un officier supérieur coupable de nombreux cas de harcèlement sexuel de ses collègues féminines. À l'issue du processus disciplinaire, on lui a imposé comme punition — il approchait de la retraite — un transfert d'une région très froide du pays à l'une des régions offrant, à mon avis, l'un des meilleurs climats du pays. Il était difficile d'y voir une punition. En effet, le simple transfert d'une personne, sans exiger de sa part la moindre formation ou la moindre réparation, ne m'apparaît pas comme une punition bien efficace. On a tout simplement transféré la personne dans une autre région, et il y a fort à parier qu'on a transféré les problèmes du même coup.
Par conséquent, nous convenons que le processus disciplinaire peut être compliqué, lent, arbitraire et inefficace. Manifestement, si le processus disciplinaire n'est pas efficace, il est plus difficile de lutter efficacement contre les autres problèmes auxquels est confrontée la GRC.
La Chambre a été saisie du projet de loi à la présente session, et l'opposition l'a appuyé à l'étape de la deuxième lecture parce que nous reconnaissons la gravité des problèmes à la GRC, et nous espérions que l'étape de l'étude en comité permettrait la tenue d'un dialogue qui mènerait à l'amélioration du projet de loi. Nous avons entendu de nombreux témoins et, comme je l'ai dit dans ma question à la secrétaire parlementaire, aucun des témoins indépendants — c'est-à-dire les témoins autres que les représentants de la GRC — n'appuyait le projet de loi.
Je me suis entretenu longuement avec le président de l'Association canadienne des policiers et, en dépit de ce que soutient la secrétaire parlementaire, il a quelques réserves à l'égard du projet de loi.
Les conservateurs ont présenté le projet de loi à la Chambre l'été dernier, juste avant la pause estivale. De ce côté-ci de la Chambre, nous avons en retour pris part à une série importante d'audiences de témoins à l'automne. J'estime que ces audiences ont été fort utiles. Nous avons traité des questions à fond.
Or, il en est ressorti que le projet de loi laisse beaucoup à désirer. Une fois de plus, nous avons proposé un ensemble d'amendements en vue de renforcer le projet de loi et de régler les graves problèmes qu'il comporte. Chacun de ces amendements a été rejeté. Nous avons également proposé des amendements à l'étape du rapport, mais ceux-ci ont aussi été rejetés.
Le gouvernement ne doit donc pas s'étonner si, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes incapables d'appuyer le projet de loi à l'étape de la troisième lecture, puisqu'il comporte toujours de graves problèmes.
Le projet de loi aggrave les problèmes qui découlent de l'adoption du modèle paramilitaire à l'origine de la GRC. Lorsqu'il a créé la GRC, le gouvernement du Canada s'est inspiré de la force constabulaire irlandaise royale, fondée en Irlande en 1822. Il s'agit d'un modèle paramilitaire conçu pour contribuer au maintien de l'ordre au sein d'une population irlandaise qui était hostile envers ce qu'elle percevait comme étant l'occupation britannique.
À mon avis, un autre modèle britannique conviendrait davantage à la réalité canadienne. Ce modèle date d'il y a presque aussi longtemps. Il a été créé en 1829 pour la police métropolitaine de Londres, basée à Scotland Yard. La police métropolitaine n'est pas une organisation paramilitaire. Elle fonctionne plutôt d'après un modèle de police communautaire et un modèle de gouvernance partagée, où le policier sur le terrain est davantage consulté sur la façon d'assurer le maintien de l'ordre et où la structure est moins hiérarchique.
Sur le plan de l'administration et des relations de travail, la solution proposée par le gouvernement consiste à accorder plus de pouvoirs au commissaire. Je crois que bon nombre des problèmes auxquels nous devons faire face découlent de cette concentration des pouvoirs entre les mains d'une seule personne. Nous avons proposé certains amendements qui répartiraient ces pouvoirs, qui donneraient plus d'influence au comité externe d'examen, et qui augmenteraient la confiance des membres subalternes envers le processus disciplinaire interne de la GRC et, par le fait même, la confiance de la population envers la GRC.
Nous sommes contre ce projet de loi parce que nous croyons que la Chambre des communes doit faire de son mieux pour réformer la loi, surtout quand ce genre de question n'est étudié par la Chambre qu'une fois tous les 25 ans.
Je répète qu'il n'y a toujours rien dans le projet de loi au sujet du harcèlement sexuel. Nous avons, dès le début, proposé de combattre le harcèlement sexuel en misant sur la formation et un changement de culture, une approche que les conservateurs ont rejetée, plutôt que sur de simples mesures disciplinaires.
Sur le plan de la surveillance, nous avons proposé, parmi nos amendements, la mise sur pied d'une commission de traitement des plaintes entièrement indépendante qui relève de la Chambre des communes. Que trouve-t-on dans le projet de loi? Une commission de traitement des plaintes qui continue de relever du ministre, et une commission qui peut seulement donner des recommandations non exécutoires au ministre et au commissaire.
Pour que nous ayons une commission plus indépendante, nous croyions que certains changements étaient nécessaires: faire rapport à la Chambre des communes, permettre des recommandations exécutoires. Les conservateurs ont rejeté ces propositions.
Même la secrétaire parlementaire a dit que quatre province et, bien sûr, les trois territoires ne sont dotés d'aucun mécanisme d'enquête indépendante sur les services de police. Même après l'adoption de ce projet de loi, ce seront encore des policiers qui, dans quatre provinces, mèneront les enquêtes sur les services de police lorsque surviendront ces graves incidents causant des blessures importantes ou la mort. Cette situation continue de miner de façon considérable la confiance de la population.
Le ministre et la secrétaire parlementaire ont affirmé, à tort, que nous proposions d'alourdir le fardeau administratif. Nous proposions plutôt de mettre en place un organisme d'enquête national et indépendant composé de civils qui pourrait remplacer certains autres organismes, éliminant ainsi le chevauchement des tâches, mais qui donnerait surtout à la population l'assurance que les incidents malheureux feront l'objet d'une enquête exhaustive dont les conclusions permettront de prendre des mesures appropriées.
Je veux prendre quelques minutes pour parler de deux déclarations faites par des témoins au Comité de la sécurité publique. Ils ont les deux parlé de la proposition d'accorder des pouvoirs supplémentaires au commissaire. Un des témoins était le président de l'Association canadienne des policiers, M. Tom Stamatakis. Voici ce qu'il a dit à la réunion du comité du 29 octobre:
Le projet de loi C-42 accorde au commissaire des pouvoirs extraordinaires qui vont au-delà de ceux qu'on pourrait trouver dans d'autres services de police au Canada. Par exemple, en Ontario, un policier qui fait l'objet d'un processus disciplinaire conserve le droit d'interjeter appel de la décision à la Commission civile des services policiers de l'Ontario, organe quasi judiciaire qui mène un examen impartial du processus et qui rend ensuite une décision. Je dirais que, sans possibilité additionnelle d'interjeter appel ou — chose encore plus importante — de le faire à un organisme indépendant, il est possible que les membres de la GRC perdent confiance dans l'impartialité du processus auquel ils sont soumis, surtout dans les situations où le commissaire a délégué son pouvoir disciplinaire.
Bref, ce que M. Stamatakis dit est conforme à l'amendement que nous avons proposé. Il y a un comité externe d'examen qui se penche sur les décisions disciplinaires de la GRC, mais il fait seulement des recommandations au commissaire. Si un simple agent interjette appel d'une décision disciplinaire, l'appel est soumis au comité externe d'examen indépendant, mais le commissaire n'a pas à tenir compte des décisions de ce dernier. Nous avons proposé un amendement afin d'accroître l'indépendance du comité externe d'examen, amendement qui a obtenu l'appui de l'Association canadienne des policiers.
D'autres témoins au Comité de la sécurité publique ont également critiqué le déséquilibre qui existe dans le projet de loi en ce qui concerne les pouvoirs en matière de relations de travail. Récemment, nous avons entendu le témoignage de Rob Creasser, relationniste de presse en Colombie-Britannique pour l'Association professionnelle de la police montée du Canada. Comme la GRC n'a pas le droit d'avoir de syndicat, cette association est parfois appelée le pseudo-syndicat. Voici ce que M. Creasser a dit au comité:
L'un des principaux problèmes actuels au sein de la GRC, c'est les énormes déséquilibres de pouvoir au sein de l'organisation. Le projet de loi C-42, plutôt que d'atténuer ces problèmes, les accentue de façon exponentielle.
Si le projet de loi C-42 est adopté tel quel, y compris les violations de la Charte et les moyens qui permettent aux gestionnaires de continuer à abuser de leurs pouvoirs, plutôt que de corriger les problèmes qui ont miné la GRC, notre Parlement fait la promotion de comportements répréhensibles et du copinage en légitimisant ce type de comportement.
Je ne me serais pas nécessairement exprimé de façon aussi percutante, mais la citation illustre néanmoins la raison d'être de notre amendement, nommément la nécessité d'encourager la collaboration dans la structure de gestion au lieu de renforcer les pouvoirs d'une seule personne et de concentrer les pouvoirs entre les mains du commissaire.
Les témoins, dont des experts, nous ont fait comprendre que le projet de loi est si profondément vicié qu'il ne pourra répondre aux préoccupations du grand public et des membres ordinaires de la GRC.
Depuis l'adoption du projet de loi par le comité, 2 000 membres de la GRC ont signé une pétition dans laquelle ils affirment ne pas avoir été dûment consultés en ce qui concerne les modifications législatives proposées et que le projet de loi du gouvernement n'est pas dans leur intérêt. Deux mille membres en service de la GRC ont signé une pétition pour s'opposer au projet de loi.
Aux termes de celui-ci, dans quatre provinces, la police pourra toujours faire enquête sur la police. En fait, la solution préconisée par les conservateurs consiste à transférer les responsabilités aux organismes d'enquête provinciaux au lieu de mettre en place un organisme civil performant à l'échelle nationale.
Les amendements proposés par le NPD s'inspirent de ce que les témoins indépendants ont affirmé au comité et permettraient de résoudre, selon nous, les trois principaux problèmes dont j'ai parlé dans mon discours.
Afin de réellement changer la culture à la GRC, il faut avant tout s'assurer que les membres de l'organisation reçoivent la formation nécessaire en matière de harcèlement. Afin de rétablir la confiance du public dans la GRC, il est essentiel de renforcer l'indépendance des organismes d'examen.
Les conservateurs croient dur comme fer qu'en accroissant les pouvoirs du commissaire en matière de congédiements, on pourra régler tous les problèmes à la GRC. Bien au contraire, nous sommes d'avis que de concentrer ainsi les pouvoirs entre les mains du commissaire ne fera que contribuer aux problèmes.
En conclusion, j'aimerais dire que le NPD aurait voulu appuyer le projet de loi à l'étape de la troisième lecture, ce qu'il aurait fait si le gouvernement avait été disposé à accepter ne serait-ce que quelques-uns des amendements que nous avons proposés en réponse à ces graves problèmes.
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Monsieur le Président, je suis ravi d'intervenir à propos du projet de loi .
Je tiens a préciser les deux grands objectifs qui sont visés selon le sommaire du projet de loi, que voici:
Le texte accroît la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada en modifiant deux aspects essentiels de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. D’abord, il renforce l’organe d’examen et de traitement des plaintes et met en place un cadre régissant les enquêtes sur les incidents graves mettant en cause des membres. Ensuite, il modernise l’application des mesures disciplinaires, le traitement des griefs et la gestion des ressources humaines pour les membres, dans le but de prévenir, de régler et de corriger de manière rapide et équitable les problèmes de rendement et de conduite.
Que de beaux principes, mais je dois souligner que même les meilleures idées ne fonctionnent pas toujours. Je me souviens lorsque le gouvernement a présenté la Loi fédérale sur la responsabilité, et la mesure à l'étude va dans le même sens. J'ai en effet entendu la parler de responsabilité et de transparence. Je me rappelle que, lors du débat sur la Loi fédérale sur la responsabilité, le gouvernement parlait aussi de transparence et de responsabilité. Or, nous avons pu constater que le gouvernement actuel bafoue complètement ces principes. Jamais un gouvernement canadien n'aura été si peu transparent. Les demandes d'accès à l'information prennent de plus en plus de temps. Il est impossible d'avoir des réponses du gouvernement. L'étude de simples motions lors des séances des comités se déroule à huis clos, en secret, alors que ces questions devraient être débattues en public.
Je tenais à le mentionner en préambule parce que, lorsque le gouvernement parle de responsabilité et de transparence, il ne joint pas le geste à la parole. J'espère que les changements au sein de la GRC amélioreront la transparence et la reddition de comptes, mais le bilan du gouvernement ne va pas dans ce sens.
Bien qu'il soit ici question de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, je tiens à dire que je suis inquiet pour la Chambre parce que les débats aux comités ne sont pas aussi ouverts et transparents qu'ils devraient l'être. Les tactiques adoptées par le gouvernement sont une calamité pour le Parlement du Canada. En tant qu'ancien procureur général, je ne veux pas que la GRC, notre service de police national, -- qui est aussi un symbole de notre pays reconnu partout dans le monde --, soit atteint du même mal. Je veux que la GRC soit renforcée. Les objectifs louables énoncés dans le projet de loi sonnent bien en théorie, mais il faut qu'ils soient menés à bien en pratique tel que prévu.
Le porte-parole libéral souscrit à l'idée maîtresse qui sous-tend le projet de loi, c'est-à-dire qu'il faut renforcer la capacité du commissaire de gérer les questions disciplinaires et simplifier le processus à cet égard. En posant des questions précédemment, j'ai exprimé certaines de mes préoccupations. J'y reviendrai dans un instant. Cela dit, le projet de loi représente assurément un pas en avant. Comme c'est le cas de toutes les mesures législatives, il aura peut-être besoin qu'on lui apporte des améliorations plus tard.
Le porte-parole libéral affirme également qu'on pourrait apporter quelques changements mineurs aux pouvoirs et au champ d'action de la nouvelle commission civile d'examen et de traitement des plaintes. Il précise que cet organe a été renforcé conformément à ce qu'a déjà préconisé le Parti libéral. Les libéraux voient donc d'un bon oeil cette mesure législative et les efforts du gouvernement pour régler les problèmes auxquels se heurte la Gendarmerie royale du Canada.
On l'a fait valoir au cours du présent débat et on le répétera sûrement dans le cadre d'autres débats: il est indéniable que la GRC éprouve de nombreux problèmes. La presse fait trop souvent état de cas d'harcèlement sexuel. Je le redis: dans le monde entier, la GRC est un symbole du Canada. Nous en sommes fiers et nous ne voulons pas voir cette image ternie par quelques employés. En effet, quiconque ternit l'image de la GRC entache celle du Canada. Il faut mettre en oeuvre les mesures correctives nécessaires pour permettre à notre force de police nationale de résoudre ces problèmes efficacement.
Le projet de loi vise à s'attaquer au harcèlement et aux problèmes disciplinaires en remaniant le système bureaucratique de traitement des griefs et en accordant plus de pouvoirs au commissaire. Il donnerait également aux cadres supérieurs un plus grand nombre d'options pour punir des membres immédiatement, par exemple la cessation du versement de la solde.
J'ai fait part tout à l'heure de certaines réserves. Ce n'est pas tant contre les pouvoirs supplémentaires accordés aux cadres supérieurs comme équipe de gestion que j'en ai, mais contre les pouvoirs dont jouira le commissaire. Comme un des députés à qui j'ai parlé ce matin l'a dit, le projet de loi habilite le commissaire à embaucher, congédier du personnel, et tout le reste. Voilà une affirmation lourde de sens. Évidemment, le commissaire doit pouvoir prendre des mesures disciplinaires. Toutefois, ayant été solliciteur général, je vois là un dilemme.
Le commissaire doit voir au bon fonctionnement de la GRC. Quant au , il est responsable de la GRC et des politiques qui ont rapport à l'organisme. Cette structure est bien différente de celle de beaucoup d'autres ministères. Les ministres peuvent habituellement intervenir lorsqu'un problème de dotation se pose. Or, ce n'est pas le cas à la GRC parce qu'il y a une sphère sur laquelle le ministre ne peut pas exercer son pouvoir. Les simples membres de la GRC ne peuvent donc pas vraiment s'adresser au gouvernement ou au ministre lorsqu'ils ont des problèmes avec le commissaire. Beaucoup de choses à la GRC dépendent donc de la personne qui occupe le poste de commissaire, de l'étendue de ses pouvoirs et de la façon dont elle s'en sert. Cette personne peut s'en servir à bon ou à mauvais escient.
Qu'on le veille ou non, il y a des jeux politiques dans toutes les organisations, et la GRC ne fait pas exception. Il s'agit d'une chaîne de commandement où on finit par monter dans la hiérarchie et où une personne est nommée commissaire par le ou par le . On y retrouve toujours le même problème politique interne. Mon collègue néo-démocrate en a parlé tout à l'heure et il a soulevé des questions légitimes.
En toute justice pour le gouvernement et pour mon propre parti, j'estime qu'il faut adopter la mesure législative. Même s'il n'a pas tendance à le faire, j'aurais aimé que le gouvernement accepte les amendements judicieux des partis de l'opposition, qui auraient pu améliorer le projet de loi. C'est pour cette raison que j'ai parlé tout à l'heure de reddition de comptes et de transparence au sujet de la Loi fédérale sur la responsabilité. Le gouvernement n'accepte tout simplement pas les amendements des autres, aussi bons soient-ils, ce qui empêche la Chambre de fonctionner. Cette attitude pourrait poser problème dans le cas qui nous occupe.
Il faut adopter le projet de loi, mais cette mesure législative aurait pu être améliorée. Je l'avoue franchement. Si le projet de loi ne progresse pas, c'est en partie parce que la Chambre et ses comités ne fonctionnent pas comme ils le devraient, car le gouvernement ne fait qu'à sa tête. C'est aussi simple que cela. C'est bien dommage que le Parlement fonctionne de cette façon.
En ce qui concerne les pouvoirs du commissaire, il doit effectivement détenir le pouvoir d'imposer des mesures disciplinaires. Selon moi, le fait qu'un agent ordinaire puisse s'en remettre au nouvel organisme d'examen pour se protéger peut fonctionner ou non. La GRC est une structure de commandement. Si le chef use d'intimidation, les effets peuvent être forts et puissants. Quand des gens sont en désaccord, ils ont tendance à simplement s'effacer et à trouver un autre emploi, comme agent de sécurité, officier de police ou autre. Je suis très franc. Il y a de quoi s'inquiéter. C'est dommage que cet aspect du projet de loi n'ait pas pu être amélioré.
Compte tenu des incidents qui sont survenus à la GRC, de l'image de cette dernière et de son caractère unique au pays, nous devons aller de l'avant avec le projet de loi , mais nous devons nous méfier des problèmes qui pourraient surgir. Le ministre, le gouvernement et nous tous, parlementaires, devons être vigilants et ne pas avoir peur d'apporter des mesures correctives plus tard si cela semble nécessaire. À mon avis, le gouvernement devrait être vigilant.
Il est vrai qu'il faut trouver des moyens d'imposer la discipline et d'aborder certains problèmes internes spécifiques à la GRC. Il faut régler ces problèmes. Nous devons être absolument certains que, si nous créons d'autres problèmes qui amèneront des agents ordinaires à se désintéresser de leur travail et à ne pas contester une décision du commissaire même s'ils ont des raisons légitimes de le faire, les pouvoirs accordés au commissaire par cette mesure législative n'empêcheront pas un agent de contester une décision. Par conséquent, je recommande que nous suivions cette question de près. Si cela devient un problème un jour, nous devrions être prêts à agir rapidement pour le régler.
Le projet de loi remplacerait l'organisme de surveillance existant, la Commission des plaintes du public contre la GRC, par la nouvelle Commission civile d'examen et de traitement des plaintes.
Paul Kennedy a témoigné devant le comité. Il a déjà été président de la Commission des plaintes du public contre la GRC. Il a fait un travail remarquable. Il n'a pas eu peur de s'opposer à la GRC ou même au gouvernement. Il fait partie des gens qui ont perdu leur emploi, comme Adrian Measner et d'autres personnes, au cours des six dernières années, pour avoir été parfaitement honnêtes et avoir remis en question les décisions du gouvernement du Canada. Ces congédiements n'auraient jamais dû avoir lieu.
C'est l'une des raisons pour lesquelles le nouvel organisme doit être mis sur pied. Nous avons besoin de ces titulaires de charge publique indépendants. M. Kennedy n'était pas aussi indépendant qu'il le croyait. Si sa nomination n'a pas été reconduite, c'est qu'il a fait son travail et a tenu tête au système.
La commission civile d'examen et de traitement des plaintes que l'on s'apprête à créer jouira-t-elle d'une indépendance suffisante? Détiendra-t-elle les pouvoirs voulus? Aura-t-elle l'épine dorsale suffisamment solide pour s'opposer au système comme Paul Kennedy l'a fait du temps où il était président?
Il y a beaucoup de plaintes, mais nombre d'entre elles ne parviennent pas aux oreilles des gens qui, comme moi, ne font pas partie du comité. Toutefois, je tiens pour acquis que les membres du comité ont pu, eux, être mis au courant de ces plaintes. Toutes sortes de plaintes sont déposées contre la GRC pour diverses raisons. Des plaintes proviennent du personnel, pour cause de harcèlement sexuel ou pour d'autres motifs. Des plaintes proviennent du public et concernent le traitement subi par les gens, aux mains de la GRC. Est-elle intervenue assez promptement? Les gens ont-ils été rudoyés lors d'une arrestation? Y a-t-il eu d'autres problèmes? Le dossier Arar a été soumis à la Commission des plaintes du public contre la GRC à un certain moment. Une vaste gamme de problèmes font l'objet de plaintes.
Selon moi, l'organisme de traitement des plaintes doit avoir les moyens de les traiter efficacement. Il doit être disposé à recevoir les plaintes venant du personnel et à écouter les plaignants. Je crois que cette nouvelle proposition le prévoit du reste. L'organisme doit pouvoir s'opposer au système et oeuvrer dans l'intérêt du public, qui a le droit d'obtenir des réponses à la suite de ses plaintes. C'est un organisme qui joue un rôle très important. Il est essentiel. Nous avons absolument besoin d'un mécanisme permettant au public de faire entendre sa voix, que ses plaintes portent sur de petits problèmes ou sur de gros problèmes. Il doit pouvoir demander des comptes à la GRC sur le traitement d'un dossier.
Je tiens à souligner qu'étant donné ce à quoi le gouvernement nous a habitués, qu'il s'agisse de renvoyer quelqu'un ou de ne pas procéder à une nomination — d'ailleurs, il ne fait aucun doute que la même chose se produira dans le cas du directeur parlementaire du budget —, il est essentiel que nous puissions compter sur une personne et une entité qui n'hésiteront pas à remettre en question les faits et gestes du gouvernement. Il est essentiel qu'ils aient cette indépendance et ils doivent avoir la force de caractère nécessaire pour contester les faits et gestes de ces personnes.
J'ai soulevé certaines questions. Il ne fait aucun doute que nous allons appuyer cette mesure législative, car je suis d'avis que des décisions doivent être prises. Je crois que le projet de loi aurait pu être amélioré. Or, il ne l'a pas été parce que le gouvernement n'accepte tout simplement pas d'autres points de vue en ce qui concerne ses champs de compétences; selon lui, seules ses idées ont du bon.
Je terminerai en disant qu'il est nécessaire d'apporter certains changements au sein de la GRC, qui est notre corps policier national et une organisation unique au monde. Pour bien des gens, il s'agit d'un symbole canadien. Ce projet de loi est un pas en avant qui nous permettra de rétablir la réputation de cette organisation.
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Monsieur le Président, je tiens à dire dès le début que je partagerai mon temps de parole avec le député de .
J'ai lu le projet de loi quand il a été déposé à la Chambre, avant la pause de l'été.
La lecture du projet de loi m'a vraiment déçue. Ce n'est qu'un autre exemple de l'égarement des conservateurs et de leur inaction dans les dossiers qui concernent l'égalité des femmes.
Le gouvernement semble penser qu'il n'aura qu'à faire adopter ce projet de loi pour que le problème de harcèlement disparaisse des rangs de la GRC. Or c'est malheureusement faux. Ce projet de loi est loin de représenter une solution complète.
Dans une situation grave comme celle-ci, il faut vraiment aller à la racine du problème. Le climat de travail et la culture professionnelle ne seront pas changés par un projet de loi aussi vague qui a si peu de mordant.
Même dans les milieux de travail syndiqués, ce qui n'est pas le cas de la GRC, ayant de bonnes politiques contre le harcèlement, ce que la GRC n'a pas, le harcèlement est encore présent.
Il faut aller très loin pour changer la culture de nos milieux de travail et être capable d'y éradiquer ce genre de comportement.
Donner le pouvoir au commissaire de la GRC de congédier directement des agents ne réglera pas les problèmes de culture de l'organisation. Le pouvoir arbitraire, surtout quand on parle du modèle conservateur, ne résout pas de problème.
Il faut de la sensibilisation, de la surveillance et des mesures concertées pour changer les comportements. Or ce projet de loi ne le fait pas.
Le Comité permanent de la sécurité publique et nationale a étudié le projet de loi. Or les témoins ont souligné les uns après les autres qu'à lui seul, le projet de loi seul ne pouvait pas régler la situation et que les pouvoirs arbitraires ne sont malheureusement que la source de plus d'abus. Le problème est systématique et complexe.
Le commissaire de la GRC, Bob Paulson, l'a affirmé lui-même lorsque nous l'avons reçu au Comité permanent de la condition féminine le printemps dernier:
[...] à mon avis, la GRC n'a pas évolué au même rythme que la société quand celle-ci a introduit des systèmes et des processus réclamant l'égalité [...] C'est la culture de l'organisation qui n'a pas évolué. [...] Nous n'avons pas été capables de changer nos pratiques et nos politiques ou d'offrir des systèmes qui permettraient aux femmes de gravir les échelons dans l'organisation et de contribuer au maintien de l'ordre, ce qu'elles doivent faire.
Pour que la GRC soit une organisation policière de premier ordre, la contribution des femmes doit être importante. Je pense à la façon dont l'organisation gère l'autorité et les pouvoirs... Je l'ai dit publiquement, et je le répéterai. Je crois que le problème dépasse largement le harcèlement sexuel. Il s'agit de l'idée qu'on se fait du harcèlement. L'idée que nous avons d'une organisation hiérarchique qui surveille des hommes et des femmes qui ont des pouvoirs extraordinaires sur leurs concitoyens et l'exercice de tels pouvoirs demande énormément de discipline.
Au comité, j'ai interrogé le commissaire spécifiquement sur la culture de l'organisation. Sa réponse était éclairante à propos du problème de fond qui existe et qui ne sera pas réglé par une loi:
[...] si nous réussissons à changer la culture de la GRC et à faire en sorte que les employés, peu importe leur rang, prennent des décisions de principe en fonction de la situation, au lieu de défendre leurs gallons, leurs médailles et leur rang en démontrant leur puissance ou leur influence, nous aurons réussi à changer la culture.
Je rappelle également qu'à cause des incidents rapportés par des femmes très braves de la GRC l'an dernier et qui ont été très bien diffusés, le Comité permanent de la condition féminine avait décidé d'étudier la question du harcèlement dans les milieux de travail de la fonction publique.
Le 6 décembre 2012, Vicky Smallman, du Congrès du travail du Canada, est venue au Comité permanent de la condition féminine. Je vais la citer également concernant le milieu de travail et la culture.
[Traduction]
L'un des meilleurs moyens de prévention du harcèlement, quel qu'il soit, est un milieu de travail sain et inclusif, soucieux de respecter l'égalité des sexes. La sécurité d'emploi, une charge de travail raisonnable et de bonnes relations du travail, tout cela offre un sentiment de stabilité et de confort professionnels. Cela n'empêchera pas totalement certains comportements de harcèlement, mais cela pourrait créer un climat rassurant pour les femmes qui veulent porter plainte.
La culture du milieu de travail est importante. Au cours de votre étude, j'espère que vous songerez à examiner celle des milieux de travail fédéraux et tous les facteurs qui peuvent créer un climat favorable au harcèlement ou qui risquent d'empêcher la prévention du harcèlement — c'est-à-dire qui pourraient inciter les femmes à garder le silence.
Malheureusement, un grand nombre d’employées de la GRC ont gardé le silence, comme c’est le cas dans bien d’autres milieux de travail.
Le projet de loi a été présenté avant qu’on ne connaisse les conclusions de la vérification interne sur l'égalité entre les sexes entreprise par la GRC sur l’ordre du commissaire, puisque cette vérification n’est pas encore terminée. La situation des femmes à la GRC n’est manifestement pas une priorité pour les conservateurs, qui font fi des conclusions d’une vérification interne portant précisément sur le sujet. C’est déplorable. Sans parler des autres études qui sont en cours sur le harcèlement sexuel et les autres formes de discrimination sexo-spécifique qui existent à la GRC et dans d’autres milieux de travail fédéraux, notamment l’étude entreprise par le Comité permanent de la condition féminine, qui ne sont même pas prises en considération. C’est vraiment déplorable.
Le NPD estime qu’il faut aller plus loin, et que la GRC doit adopter une véritable politique anti-harcèlement assortie de normes de comportement et de critères précis pour évaluer les comportements de tous les employés. Il est impératif de mettre en place une politique de ce genre, qui puisse servir d’assise à des procédures disciplinaires équitables et bien définies. Il faut absolument améliorer le climat de travail au sein de la GRC, ainsi que dans les autres milieux de travail qui tolèrent que, de par l’autorité dont elles jouissent, certaines personnes puissent exercer leur domination sur d’autres. Certes, il faut bien que l’autorité puisse s’exercer, dans une organisation comme la GRC, mais cela ne doit pas se traduire par du harcèlement. Il nous faut agir plus concrètement dans ce sens.
[Français]
Malheureusement, ce projet de loi échoue donc en permettant encore à la GRC d'enquêter sur elle-même dans certaines situations, en créant un système décousu qui laisse aux provinces le fardeau de la supervision, en créant une commission des plaintes qui n'est pas complètement indépendante et qui se rapporte au ministre avec des recommandations non obligatoires et en limitant l'accès des informations sensibles à cette commission.
Pour parvenir à régler les lacunes de ce projet de loi, afin de s'attaquer réellement à ce problème, le NPD a voté, en deuxième lecture, en faveur du renvoi en comité du projet de loi . Là, nous avons présenté plusieurs amendements qui exigeaient de la formation obligatoire en matière de harcèlement. C'est quelque chose qui serait absolument nécessaire dans tous les emplois où on veut vraiment considérer l'égalité homme-femme. Nos amendements auraient fait en sorte qu'un organisme civil — qui aurait eu plus d'indépendance — soit responsable des plaintes contre la GRC. Ils prévoyait la création de politiques de ressources humaines plus harmonieuses en retirant les pouvoirs draconiens proposés pour le commissaire.
Les conservateurs ont rejeté tous les amendements à ce projet de loi, comme cela a été dit aujourd'hui en cette Chambre. Nous sommes quand même habitués à ce genre de chose, mais cela ne veut pas dire que nous devrions arrêter de nous battre pour ce qui est bon. Ces amendements visaient à améliorer ce projet de loi et ils faisaient suite à des recommandations de témoins en comité.
Pour conclure, il est évident que nous ne pourrons pas appuyer ce projet de loi. Il ne va vraiment pas assez loin. Je ne crois pas qu'on devrait dire aux femmes canadiennes que quand il y a un problème, on apporte seulement une demi-solution et que c'est correct. On devrait vraiment s'attaquer à la racine du problème et s'assurer de l'égalité dans ce pays.
C'est dommage parce que ce projet de loi aborde vraiment un sujet urgent. Les femmes, la GRC et les Canadiens veulent des actions efficaces de leur gouvernement, plutôt que des projets de loi condamnés à l'impuissance dès le départ.
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Monsieur le Président, le projet de loi aborde tout un sujet. D'entrée de jeu, j'avoue que c'est plutôt avec amertume et déception que j'entreprends de participer à ce débat. Il m'apparaît encore une fois qu'on fait face à un rendez-vous manqué. Ce gouvernement nous habitue à des demi-mesures, à des phrases creuses, à des coquilles vides et à un show de lumière ou de boucane pour épater la galerie.
Dans un cas comme celui qui nous préoccupe à l'intérieur du projet de loi , il me semble que faire un pas dans la bonne direction est loin d'être suffisant. Comme équipe de parlementaires, tous partis confondus, il ne s'agit pas de faire un pas dans la bonne direction, mais bien de solutionner les problèmes au moment où ils se présentent, ce que le projet de loi ne fait résolument pas.
Bien des angles d'attaque et bien des sujets auraient pu faire l'objet de ma présentation, mais j'essaierai de me concentrer sur deux choses, en abordant d'abord la question du décalage entre le fond et la forme et, ensuite, toutes les questions qui ont trait au harcèlement sexuel.
Sur la question de la forme, les citoyens que je côtoie, dans ma circonscription et un peu partout au Québec, sont de plus en plus nombreux à avoir énormément de problèmes avec ce qu'ils appellent un déni de démocratie. Force m'est d'admettre que malgré le travail qu'on fait en cette Chambre et en comité, je dois de plus en plus leur donner raison et toute la procédure entourant le projet de loi le démontre, ma foi, de façon plus qu'éloquente.
Je partage avec vous quelques idées. Bien sûr, tout s'est fait dans les règles de l'art, mais ce n'est pas suffisant. Par exemple, on pourrait se demander si le projet de loi a fait l'objet d'une motion d'attribution de temps ou d'une quelconque procédure visant à réduire le temps qui permettrait aux parlementaires de débattre et d'aller plus loin dans leurs propositions envers ce projet de loi. La réponse est oui. Pour ne parler que des motions d'attributions de temps, on en est presque rendu à la trentième depuis le début du mandat de ce gouvernement majoritaire il y a à peu près deux ans.
Au lendemain de mon élection, je me souviens qu'à mon arrivée sur la Colline, lors de ma formation, on m'avait dit que je pourrais constater que le travail à la Chambre était relativement partisan, alors qu'en comité, on faisait vraiment un meilleur travail. On faisait avancer les projets de loi, on les bonifiait, ce qui donnait tout le sens nécessaire à ce travail de représentation de nos populations respectives. Pourtant, des 18 amendements proposés par le NPD au projet de loi , je vous donne en mille le nombre d'amendements qui ont été retenus: zéro. C'est devenu presque une tradition: si ça ne vient pas du parti ministériel, ce n'est pas bon. On est à des années-lumière de l'adage qui veut que du choc des idées jaillisse la lumière. Désormais, si on a une idée semblable à celle des conservateurs, c'est forcément une bonne idée, sinon, on peut la garder pour nous.
On a effectivement accepté des amendements en comité, mais ceux-ci émanaient de députés du parti ministériel. Pour la plupart, ces amendements portaient sur des corrections de coquilles grammaticales dans la version française. Loin de moi l'idée de dire que ces amendement ne sont pas importants, j'ai trop de respect pour ma langue pour dire qu'il fallait passer à côté, mais, sur le fond, on aurait pu faire mieux.
On pourrait également se questionner sur l'indépendance même des témoins qui viennent apporter un éclairage et une expertise permettant au comité d'aller plus loin dans ses propositions. Il semble que la majorité des témoins convoqués par le gouvernement provenaient, soit du gouvernement, soit de la GRC, ce qui donne une image de totale impartialité, on en conviendra! De ce que j'ai pu en apprendre, parce que je ne siégeais pas à ce comité, les témoins convoqués par l'opposition officielle ont été traités avec une équité pour le moins douteuse. On les a appelés à la toute dernière minute et leurs comparutions ont été concentrées dans la dernière journée. Il y a là, sur la forme même, plein de questions qui méritent de meilleures réponses que celles qu'on a reçues.
Voyons sur le fond maintenant. J'ai dit tantôt que j'allais me consacrer aujourd'hui à dénoncer le traitement réservé aux questions liées au harcèlement sexuel, compte tenu de l'importance des sujets abordés dans ce projet de loi.
Pour une question aussi importante que l'équité et l'égalité entre les genres, faire un pas dans la bonne direction n'est pas suffisant. On avait l'occasion de régler le problème. Cependant, une fois de plus, on nous propose une façon de passer à côté en se donnant l'air d'y avoir prêté attention.
J'aimerais citer Yvonne Séguin, directrice générale du Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province de Québec
Forts de nos 32 ans d'expérience, nous avons constaté que lorsque des entreprises ont une politique claire, que les employés savent ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas, c'est beaucoup plus facile pour les gestionnaires de régler les problèmes.
On pourrait donc s'attendre à trouver dans le projet de loi des outils clairs qui permettraient à la fois aux gestionnaires et aux employés de savoir de quoi il retourne.
Le projet de loi se veut la réponse du gouvernement aux plaintes de longue date de harcèlement sexuel au sein de la GRC et à une tonne d'événements plus récents portant sur le même sujet.
Difficile à croire, mais dans tout ce projet de loi, pas une fois, nil, niet, zéro, on ne mentionne le mot « harcèlement ».
Pour un projet de loi censé régler la question du harcèlement, on n'a même pas le courage de mentionner le mot. Il y a là un problème.
On dit souvent que lorsque les enfants posent des questions, on doit donner des réponses claires avec le vocabulaire exact. Dans le cas qui nous occupe, il aurait dû y avoir un premier pas à tout le moins.
Le NPD fait des pressions depuis le début, en fait, depuis le jour où le projet de loi portait un autre numéro et appartenait à une autre législature. Le NPD préconise que le ministre fasse de la lutte contre le harcèlement une priorité et qu'il solutionne le problème. Tous les employés, et non seulement ceux de la GRC, de tous les milieux de travail ont droit à un milieu de travail ouvert et sécuritaire. Ce n'est vraisemblablement pas tout à fait le cas.
Sans prétendre qu'une organisation syndicale est le rempart par excellence à la défense des droits des travailleurs, il est quand même révélateur de constater que la GRC est le seul corps de police au Canada qui n'a pas de convention collective. Ainsi, les représentants des relations fonctionnelles élus pour gérer les questions relatives à l'emploi relèvent d'un processus qui s'apparente davantage à de la consultation qu'à de la négociation collective.
Malgré tout, le NPD a proposé des amendements qui étaient presque l'enfance de l'art, parce qu'il croit fermement à l'égalité, à l'équité et au respect entre les genres.
Tous les amendements ont été rejetés. Toutefois, pour ceux qui suivent nos débats, il m'apparaît important de parler de trois ou quatre amendements proposés par le NPD. Les gens pourront ainsi juger du bon sens ou non des amendements et de leur pertinence.
Ce n'était pas le premier amendement dans l'ordre, mais le premier que je cite proposait d'obliger tous les membres de la GRC à suivre une formation sur le harcèlement sexuel.
L'éducation ou l'information a toujours été la base même de tout règlement et de tout avancement. Cependant, il semble que le fait même d'en parler soit déjà trop pour le gouvernement.
Le deuxième amendement concernait la mise sur pied d'un organisme civil complètement indépendant chargé d'étudier les plaintes contre la GRC pour éviter que la police enquête sur la police. Cette recommandation commence à faire un très large consensus dans la société civile.
Enfin, comment a-t-on pu refuser de créer un corps de police mieux équilibré sur le plan des ressources humaines en réduisant les pouvoirs conférés au commissaire de la GRC et en renforçant ceux du comité d'examen externe? Le projet de loi s'en va dans la direction diamétralement opposée. On renforce encore une fois les pouvoirs du commissaire, comme on a renforcé ceux de certains ministres pour contrôler l'information dans plusieurs autres projets de loi.
En conclusion, je réaffirme la position du NPD qui continuera de travailler avec les femmes pour que le principe d'équité devienne, jour après jour, une réalité incontournable. Nous ferons beaucoup plus qu'un pas en avant.