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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 025 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 15 mai 2014

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne se réunit aujourd'hui dans le cadre de la séance no 25.
    À l'ordre du jour, il y a des travaux du comité que nous n'avons pas pu terminer à la dernière réunion parce que nos invités ont pris tout le temps que nous avions, et c'était très bien ainsi. Mais nous devons nous occuper du Budget principal des dépenses. Nous y avons jeté un coup d'oeil, ici, en tant que comité, donc, ce qu'il faut que nous fassions, et ce que nous aimerions faire en premier, c'est en discuter. Je veux l'aborder de la même manière que nous l'abordons à la Chambre, donc, je vais lire les éléments qui y figurent, et nous allons procéder au vote avec dissidence, ce qui est la norme.
    Donc, si vous pouviez seulement nous accorder une minute, chers invités, nous allons revenir à vous très rapidement.
    En ce qui concerne le Budget principal des dépenses de 2014, nous allons voter sur ceci:
COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
Crédit 1 — Dépenses de programme........ 19 639 234 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence)
TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE LA PERSONNE
Crédit 1 — Dépenses de programme ........ 4 145 232 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence)
COMMISSAIRE À LA MAGISTRATURE FÉDÉRALE
Crédit 1 — Dépenses de fonctionnement....... 8 643 425 $
Crédit 5 — Conseil canadien de la magistrature — Dépenses de fonctionnement............ 1 513 611 $
    (Les crédits 1 et 5 sont adoptés avec dissidence)
SERVICE ADMINISTRATIF DES TRIBUNAUX JUDICIAIRES
Crédit 1 — Dépenses de programme......... 61 260 445 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence)
JUSTICE
Crédit 1 — Dépenses de fonctionnement.......... 236 861 079 $
Crédit 5 — Les subventions inscrites au Budget des dépenses et contributions........ 317 485 223 $
    (Les crédits 1 et 5 sont adoptés avec dissidence)
BUREAU DU DIRECTEUR DES POURSUITES PÉNALES
Crédit 1 — Dépenses de programme...... 149 579 834 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence)
COUR SUPRÊME DU CANADA
Crédit 1 — Dépenses de programme...... 22 307 652 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence)
    Le président: Le président doit-il faire rapport à la Chambre du crédit 1 sous la rubrique Commission canadienne des droits de la personne, du crédit 1 sous la rubrique Tribunal canadien des droits de la personne, des crédits 1 et 5 sous la rubrique Commissaire à la magistrature fédérale, du crédit 1 sous la rubrique Service administratif des tribunaux judiciaires, des crédits 1 et 5 sous la rubrique Justice, du crédit 1 sous la rubrique Bureau du directeur des poursuites pénales et du crédit 1 sous la rubrique Cour suprême du Canada ?
    Des voix: Oui.
    Une voix: Avec dissidence.
    Le président: Je vais en faire rapport, merci beaucoup.
    Nous avons deux autres affaires rapides.
    D'abord, le Budget supplémentaire des dépenses (A) a été déposé à la Chambre, hier. Il n'y a pas de Budget supplémentaire des dépenses (A) pour notre comité, donc, nous n'avons pas à traiter de cela, ce qui me rend très triste. Quoi qu'il en soit, il n'y en a pas, donc, nous n'avons rien à faire.
    Deuxièmement, nous nous sommes engagés à essayer de regrouper les témoins — vous pouvez voir, ici, aujourd'hui, que nous avons les forces policières. Nous avons une seule question à aborder. Les gens de Facebook ne pourront pas être là le jour où nous allons entendre d'autres fournisseurs d'accès Internet, ici. Ils sont prêts à venir une semaine plus tard, donc, avec la permission du comité, nous allons les intégrer à un autre groupe d'intervenants. Ce ne sera peut-être pas un regroupement complet, mais nous aurons Facebook, en tant qu'organisation.
    Nous voulons qu'ils viennent. J'accepterais leur demande.
    D'accord? Merci beaucoup.
    Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 28 avril 2014, le projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la concurrence et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, des témoins sont venus nous parler aujourd'hui du projet de loi.
    Nous avons Jim Chu, de l'Association canadienne des chefs de police. Il y a Carson Pardy, de la Police provinciale de l'Ontario, il y a Joe Oliver, de la Gendarmerie royale du Canada. Et il y a d'autres personnes, ici, qui les accompagnent, qui se présenteront elles-mêmes. De Halifax, par vidéoconférence, nous avons Jean-Michel Blais, chef de police.
    Merci d'être parmi nous. Chaque organisation aura 10 minutes pour s'adresser au comité, puis il y aura une période de questions et réponses.
    Mon premier témoin, aujourd'hui, représente l'Association canadienne des chefs de police.
    Monsieur Chu, vous avez la parole.
    Je suis ravi d'être ici à titre de président de l'Association canadienne des chefs de police. Je suis également le constable en chef du Service de police de la ville de Vancouver.
    Comme on l'a dit, nous sommes le regroupement appelé l'ACCP. Nous représentons plus de 90 % de la communauté policière canadienne, qui comprend des services de police fédéraux, des Premières Nations, provinciaux, régionaux et municipaux. Nous sommes très heureux de pouvoir vous présenter directement des informations.
    Tout d'abord, laissez-moi dire ceci. L'ACCP appuie entièrement le projet de loi C-13. Sans plus attendre, je vais vous parler des préoccupations que nous voyons sur le terrain dans les collectivités canadiennes, tous les jours. La prolifération du crime est passée à l'environnement informatique.
    Les crimes traditionnels, comme le harcèlement criminel, les menaces, les enlèvements et la fraude, auraient été, il y a 10 ans, commis par l'intermédiaire d'une lettre ou d'un colis par la poste, ou, peut-être, au moyen de la messagerie vocale. Aujourd'hui, comme nous le savons, la grande majorité de ces crimes sont commis en ligne, au moyen de messages textes, de courriels, de messages sur Facebook, de sites Web incitant à la vengeance, de babillards électroniques, comme ask.fm, Kik, et de nombreux autres sites Web qui existent dans le cyberespace.
    Je devrais également ajouter que beaucoup de ces sites Web qui sont utilisés par les jeunes et les moins jeunes proviennent de l'étranger, dans des pays comme la Lettonie ou d'autres endroits en Europe de l'Est.
    Parlons des jeunes d'aujourd'hui. J'ai obtenu cette information de nos agents de liaison avec les écoles, qui travaillent dans les écoles secondaires et les écoles primaires, à Vancouver. Leurs expériences sont semblables à celles qui sont vécues dans l'ensemble du Canada.
    La cyberintimidation, les menaces, l'extorsion sexuelle, le harcèlement et la traque en ligne sont plus répandus que jamais. Pourquoi? Je regarde dans la salle, et je pense que certains d'entre nous, durant notre jeunesse, ont dû faire face à la personne qui nous intimidait au terrain de jeu ou dans les corridors. Les écoles pouvaient gérer cela en vous déplaçant ou en déplaçant la personne qui vous intimidait, et cela mettait fin au problème, tandis que, maintenant, sur Internet, cela ne s'arrête pas. Cela a lieu 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Vous rentrez chez vous, le soir, ou vous sortez, la fin de semaine, l'intimidateur est expulsé de l'école, et cela peut tout de même se poursuivre.
    De plus, il y a beaucoup plus de gens qui peuvent agir comme des intimidateurs. Auparavant, il fallait le faire en face de l'autre personne, tandis que, maintenant, les intimidateurs sont enhardis par l'anonymat d'Internet. Donc, il y a plus de gens qui pratiquent l'intimidation. En fait, il y a également plus de gens qui agissent comme des prédateurs.
    Probablement que chacun de vous, parce que je sais que vous oeuvrez dans le domaine de la politique, a été témoin des commentaires venimeux et violents qui constituent l'un des côtés sombres des médias sociaux. En tant qu'adultes, et en tant que personnes ayant une vie publique, nous sommes habitués d'être confrontés à cela. Mais pensez aux jeunes. Lorsqu'ils vivent une telle expérience, c'est extrêmement traumatisant. Cela fait peur, et cela évolue jusqu'au point où les victimes se font du mal à elles-mêmes parce qu'elles sont trop décontenancées et traumatisées par ce qui leur arrive.
    Ces jeunes n'ont pas de refuge.
    Aussi, si quelque chose figure sur le Web, cela signifie qu'il y sera peut-être pour toujours. Au moins, lorsqu'il s'agit d'une note écrite, on peut la détruire, la mettre à la poubelle. Une note écrite passe entre les mains de seulement quelques personnes. Ce sont seulement ces personnes qui la voient. Aujourd'hui, lorsque quelque chose est affiché en ligne, cela signifie que le monde entier peut le voir.
    Pour lutter contre ce problème, la police a besoin d'outils modernes. Nous devons intervenir rapidement afin d'éviter que la situation s'envenime.
    Pour beaucoup de jeunes, lorsque nous intervenons, cela n'entraîne pas d'accusations. Donnez-nous les outils nous permettant d'aider plus de victimes, et lorsqu'il y a une victime, aidez-nous à mettre un terme à l'intimidation et au harcèlement rapidement et à empêcher la situation de s'envenimer, car plus elle s'envenime, plus elle devient grave. Puis, évidemment, c'est très traumatisant pour la victime.
    Cela pourrait entraîner des accusations criminelles. Dans la majorité des cas que nous gérons actuellement, nous réglons le problème tout simplement au niveau de l'école, et cela ne donne pas lieu à des accusations criminelles.
    Mais rappelez-vous que certains jeunes qui commettent des actes de cyberintimidation prennent de mauvaises décisions, que cela découle de mauvaises influences dans leur vie... Encore une fois, nous voulons les en empêcher de sorte qu'ils n'en viennent pas à faire quelque chose de stupide qui cause du tort à quelqu'un d'autre, ce avec quoi ils devront vivre pour le reste de leur vie. Sinon, s'ils entrent en contact avec le système de justice pénale, encore une fois, cela entraînera des conséquences avec lesquelles ils devront vivre pour le reste de leurs jours.
    Aidez-nous à intervenir rapidement.
    Bien sûr, nous effectuons également de l'éducation et travaillons en partenariat avec nos écoles. À Vancouver, plus particulièrement, nous avons des brochures en plusieurs langues parce que les écoles ont de la difficulté à suivre le rythme de la technologie. Bon nombre de parents ont encore plus de difficulté, particulièrement s'ils viennent d'arriver au Canada, à pouvoir surveiller ce que font leurs enfants et à prendre des mesures de protection de sorte que leurs enfants puissent agir de façon responsable.
     Laissez-moi dire ceci. Les Canadiens ont à coeur les droits à la protection des renseignements personnels, tout comme la police. Nous avons vu que le projet de loi C-13 ne permet pas à la police d'exiger la divulgation d'informations qui ne seront pas présentées devant un tribunal. C'est un point très important. Mais cela nous aide à obtenir certaines informations rapidement, par exemple, le routage du trafic sur Internet, de sorte que nous puissions déterminer qui a envoyé un message menaçant.
(1105)
    Parfois, cela ne nous mènera nulle part. Donc, donnez-nous les outils qui nous aideront à éliminer ces impasses. Par exemple, nous pourrions consulter une compagnie de communications et obtenir de l'information qui nous indique que quelque chose provient d'un café Wi-Fi. Il est à souhaiter que nous puissions résoudre l'affaire en quelques heures, et non pas en plusieurs jours, ce qui peut être le cas, actuellement.
    Laissez-moi conclure en parlant des préoccupations du public et des fausses informations qui sont véhiculées. Je ne sais pas si cela était involontaire ou délibéré, mais je vais vous donner trois exemples d'incidents que j'ai vus récemment dans les médias sociaux, les médias d'information.
    Voici une image d'un agent de police qui écoute un appel téléphonique d'une jeune fille. Il y a également une variante de cette image. Le même agent de police, l'acteur, se tient debout derrière quelqu'un qui navigue sur Internet. Aujourd'hui, pour surveiller des appels téléphoniques en temps réel, nous avons besoin d'un mandat d'écoute électronique. Il est très difficile d'en obtenir un aux termes de la partie VI du Code criminel. Ces mandats d'écoute électronique nécessitent de 500 à 1 000 pages. Il peut falloir des semaines pour en rédiger un. Ce que j'essaie de dire, c'est que le projet de loi C-13 ne change pas cela. Nous ne pourrons pas le faire. En ce qui a trait à la surveillance des habitudes de navigation sur le Web des Canadiens, j'ai interrogé à nos agents du service de police de Vancouver, et ils ont dit qu'ils n'avaient jamais obtenu l'approbation en vertu de la partie VI d'obtenir une adresse IP. Cela se produit rarement.
    Laissez-moi vous parler d'une autre manchette qui m'a, en quelque sorte, porté à réfléchir. Elle est intitulée « Comment le projet de loi fédéral C-13 pourrait donner à des agents du SCRS — ou même Rob Ford », pour faire allusion au maire de Toronto — « accès à vos renseignements personnels en ligne ». Dans le Code criminel, il y a un libellé ancien qui dit qu'un maire est un agent de la paix, et j'imagine qu'un maire pourrait exercer ses pouvoirs et procéder à des arrestations dans les rues de sa collectivité, même si je n'ai jamais entendu dire qu'un maire avait fait cela. Mais je serais abasourdi si un maire voulait rédiger une ordonnance de communication, se présenter à une compagnie de télécommunications et dire: « — Donnez-moi des données privées ». Cela n'arrivera pas. Donc, le fait d'inclure le nom de Rob Ford dans le titre de cette manchette a pour effet, je pense, d'alerter inutilement les Canadiens, et cela est injuste à l'égard de la législation qui sera présentée.
    Le dernier texte argumentatif commence par ceci, et il provient d'un journal de Halifax.
Imaginez-vous ceci: vous arrivez chez vous ce soir et découvrez votre sympathique voisin, qui est un agent de police, en train d'examiner vos documents et vos fichiers informatiques, tout en prenant des notes concernant vos renseignements personnels — sans mandat.
    Si vous vous imaginez cela, c'est préoccupant. Est-ce que cela peut se produire? Tout d'abord, aucune disposition ne nous permet de faire cela aujourd'hui sans un mandat de perquisitionner le domicile, de perquisitionner un ordinateur privé. Les mandats doivent être obtenus auprès de juges selon des motifs raisonnables permettant de croire qu'il s'agit d'une norme de preuve très élevée. Mais le rédacteur compare cela au projet de loi C-13 et dit que, désormais, on peut avoir accès sans mandat aux informations privées de tous les Canadiens.
    Pour terminer, je sais que les Canadiens se préoccupent de leurs renseignements privés. Ce projet de loi ne permet pas à la police, et ce n'est pas ce que nous voulons non plus, d'examiner les renseignements privés des Canadiens sans autorisation judiciaire appropriée. Veuillez nous donner les outils qui nous permettront de faire en sorte que les gens ne soient plus des victimes. Et pour ceux qui ont déjà été victimisés, donnez-nous les outils nous permettant de faire en sorte qu'ils ne le soient plus, parce que l'enquête prend des jours et des semaines, en raison de nos processus encombrants, pour que nous puissions obtenir l'information nécessaire afin d'identifier les malfaiteurs.
    Je vais maintenant céder la parole à mon collègue...
(1110)
    Très bien, merci beaucoup, monsieur Chu.
    Notre prochain témoin est M. Pardy, de la PPO.
    Bonjour, monsieur le président, et bonjour, mesdames et messieurs les députés.
    C'est un plaisir d'être ici, aujourd'hui, et au nom de notre nouveau commissaire, Vince Hawkes, je suis ravi d'être ici pour représenter les quelque 6 200 membres en uniforme et les 2 800 membres civils de la Police provinciale de l'Ontario. Je suis accompagné, aujourd'hui, du sergent d'état-major Carole Matthews, gestionnaire du groupe chargé de la criminalité technologique de la PPO, qui pourra fournir certains renseignements concernant les enquêtes liées aux crimes technologiques à plusieurs niveaux.
    Merci de votre intérêt. Nous vous remercions de l'occasion que vous nous offrez de parler de cette importante législation et de fournir notre soutien à l'Association canadienne des chefs de police.
    Il y a un certain nombre d'aspects du projet de loi C-13 qui sont soutenus par la communauté policière, et la PPO a eu l'occasion de contribuer à certains d'entre eux depuis la présentation du projet de loi, l'automne dernier. La PPO avait participé et contribué au Groupe de travail sur la cybercriminalité, qui fait partie du Comité de coordination des hauts fonctionnaires, Justice pénale, qui a conseillé Sécurité publique Canada avant la présentation de la législation. Le sergent d'état-major détective Frank Goldschmidt, de la section de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants de la PPO, était le représentant de ce groupe.
    Nous avons également soutenu des déclarations faites en janvier 2014 par le président de l'Association canadienne des chefs de police et constable en chef, Jim Chu. Chris Lewis, le commissaire de la PPO, qui est maintenant à la retraite, était également un ardent défenseur d'une version de cette importante législation. Nous avons également essayé d'apporter notre contribution en vue de réduire la criminalité et la victimisation au moyen de diverses initiatives d'éducation et de sensibilisation de la population.
    La PPO s'affaire continuellement à éduquer ses agents de première ligne au sujet de questions comme l'auto-exploitation/l'exploitation par les pairs, de sorte que nous puissions mieux aider les enseignants, les parents et les adolescents eux-mêmes lorsqu'on demande notre soutien. La PPO a créé des comités sur Internet dans les écoles secondaires afin d'informer les adolescents au sujet des graves conséquences de l'auto-exploitation/l'exploitation par les pairs.
    Nous parlons des effets dévastateurs et des risques potentiels sur le plan criminel liés à cette activité. Nous fournissons également de l'information et des liens vers des ressources, comme le site www.youthconnected.ca, qui est mis au point et alimenté par et pour des adolescents, et il y a, bien sûr, le site www.AidezMoiSVP.ca.
    En tant que policiers, notre plus grande crainte, c'est que les adolescents se victimisent involontairement eux-mêmes en envoyant des images inappropriées d'eux à d'autres personnes. Ils ne semblent pas être conscients des conséquences, car les images se propagent souvent très rapidement sur Internet ou sur d'autres sites de médias sociaux. La police constate que bon nombre d'adolescents ne peuvent pas gérer la honte et la gêne liées à ce qu'ils ont fait. Ils sont nombreux à devenir déprimés, anxieux, et parfois, suicidaires.
    L'unité de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants de la PPO reçoit, en moyenne, trois ou quatre plaintes de sextage chaque semaine, ce qui en fait le premier motif d'enquête réactive en importance de l'unité. Selon les circonstances de chaque incident, il se peut qu'il y ait eu, aux termes du Code criminel du Canada, une infraction. Les infractions comprennent la possession et la distribution de pornographie infantile, l'extorsion et les menaces.
    Les agents scolaires de la PPO et les membres de la Section de la prévention des crimes de la PPO chargés des enquêtes sur les questions touchant les jeunes reçoivent régulièrement des plaintes semblables. La PPO est fière d'appuyer le Centre canadien de protection de l'enfance ainsi que Sécurité publique Canada dans le cadre de son initiative intitulée AidezMoiSVP, et d'en être le partenaire. AidezmoiSVP est une ressource sur le Web conçue pour aider les jeunes Canadiens, particulièrement la tranche des 13 à 17 ans, à gérer les conséquences négatives qui peuvent survenir lorsque des images sexuelles sont créées et diffusées en ligne, et pour réduire les torts qui peuvent être causés par la suite.
    AidezMoiSVP.ca indique aux adolescents des étapes pratiques à suivre pour reprendre le contrôle de la situation et fournit de l'information utile sur la façon dont ils peuvent chercher du soutien auprès d'un adulte fiable et digne de confiance ainsi que des stratégies en vue de gérer le harcèlement qui peut avoir lieu tant en ligne que dans la vie, comme l'intimidation.
    La PPO appuie également les efforts constants visant à demander des outils législatifs améliorés et actualisés en vue d'aider nos policiers à avoir accès à l'information dont ils ont besoin pour mener des enquêtes sur les cas de violence sexuelle contre les enfants sur Internet, de cyberintimidation et d'autres activités criminelles fondées sur les dernières technologies et plates-formes.
    Certaines des lois concernant l'accès de la police aux informations électroniques et l'utilisation de celles-ci n'ont pas été mises à jour depuis plus de 40 ans. Les enquêtes concernant les gens les plus vulnérables de notre société, nos futurs dirigeants, nos enfants, et des crimes comme la cyberprédation, la cyberintimidation et l'auto-exploitation/l'exploitation par les pairs, ou le sextage, demandent beaucoup de temps et sont laborieuses, et on protège l'identité des prédateurs d'enfants ainsi que le matériel qu'ils produisent.
(1115)
    Grâce à la récente législation, les fournisseurs d'accès Internet (FAI) — dont la propre association nationale, si on veut, nous perçoit comme leurs partenaires — sont tenus par la loi de le signaler lorsque leurs services sont utilisés à des fins liées à la maltraitance d'enfants.
    Nous cherchons toujours un moyen de réduire la complexité et le coût inhérent de ces enquêtes. Les processus actuels comprennent le fait de fournir aux FAI un mandat de perquisition, une ordonnance de communication ou une demande d'application de la loi concernant des renseignements sur leurs abonnés liés à une adresse de protocole Internet en particulier.
    Bon nombre de gens se sont dits préoccupés concernant leur utilisation personnelle d'Internet ainsi que la protection de leurs renseignements personnels. Ce que nous voulons me fait penser à l'utilisation d'un numéro de plaque d'immatriculation que l'on communique à la police pour l'aviser de la présence d'un conducteur dangereux ou aux facultés affaiblies. C'est la même chose, ici. La PPO et ses partenaires policiers et communautaires croient que la législation du gouvernement du Canada renforce notre capacité d'obtenir rapidement l'information essentielle, qui peut être utilisée à l'égard des prédateurs sur Internet, peu importe d'où ils sévissent.
    Comme l'a démontré la police de l'ensemble de l'Amérique du Nord et de partout dans le monde, nous faisons des progrès dans la lutte contre la prédation, l'exploitation sexuelle et la maltraitance des jeunes sur Internet grâce à un excellent travail de la police, à la mise en commun d'information, à la sensibilisation de la population au moyen de partenariats avec des organismes tiers, comme le Centre canadien de protection de l'enfance, dans le cadre du programme Cyberaide, et grâce à des outils législatifs en constante amélioration, qui doivent être modernisés afin de nous aider à évoluer au même rythme que la société en ligne.
    Le projet de loi C-13, tel que proposé, renforcera notre capacité de mener des enquêtes sur les crimes haineux également.
    Même si Internet et les nouvelles technologies de communication ont une véritable valeur positive pour nous, en tant que société, ils comportent également des inconvénients. Ces nouvelles technologies de communication permettent de commettre de vieux crimes de nouvelles façons, et elles favorisent l'apparition de nouveaux crimes. Il ne fait aucun doute que certaines législations touchant la technologie et les communications au Canada sont désuètes.
    Je peux parler de deux ou trois importantes différences de façon générale, et peut-être que le sergent d'état-major Matthews pourra parler des différences à un niveau plus précis durant la période de questions. Aux termes de la législation actuelle, la police ne peut avoir accès qu'aux renseignements très généraux d'un abonné — le nom et l'adresse, peut-être un numéro de téléphone — de façon tout à fait ponctuelle, en passant par des fournisseurs d'accès Internet. Cela signifie que la fourniture de renseignements n'est pas constante, ce qui nuit aux enquêtes et qui, souvent, prolonge la victimisation.
    Aux termes de la législation proposée, les FAI seront tenus de fournir cette information en temps opportun et de façon constante. L'accès à cette information sera contrôlé de façon stricte et limité aux agents chargés de l'application de la loi, qui seraient pleinement formés sur ces procédures et assujettis à des processus de vérification et/ou des rapports. Cela permettrait à la police d'avoir accès rapidement et de façon constante à l'information qui nous permet d'accroître notre efficacité dans le cadre des enquêtes et de nos activités de prévention à l'égard de la criminalité et de la victimisation.
    Nous voyons très peu d'aspects négatifs à ce projet de loi et aux divers amendements proposés. Si la législation est adoptée et qu'elle entre en vigueur, la PPO reconnaît que nous observerons une augmentation des appels de service et de la charge de travail liés aux enquêtes relatives aux infractions concernant des images intimes. La PPO subirait également des pressions au chapitre des ressources en raison des enquêtes liées aux plaintes concernant ces nouvelles infractions.
    Bien sûr, le rôle de la police ne consiste pas à rédiger les lois. C'est le travail de nos élus. Cependant, dans l'intérêt de la sécurité publique, nous devons parfois engager une discussion prudente dans le cadre d'une tribune publique, qui nous aidera à faire la lumière sur ces questions et à nous forger une opinion. Notre rôle, à titre d'organisme chargé de l'application de la loi, est de réagir de manière efficace à des activités criminelles qui ont élu domicile sur Internet ou qui sont possibles grâce aux nouvelles technologies de communication. La PPO prend son mandat de sécurité publique très au sérieux.
    Les membres de notre bureau provincial de renseignement des opérations, de même que ceux du Bureau de la lutte contre le crime organisé et de l'unité de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants de la PPO, adoptent une approche axée sur le renseignement et coordonnée en vue de mettre en commun et d'obtenir de l'information sur les activités criminelles. Il faut adopter cette approche axée sur le renseignement et intégrée avec nos partenaires de la police et de demander continuellement les outils législatifs dont nous avons besoin pour relever les défis en matière d'application de la loi d'aujourd'hui.
    Nous n'avons pas hésité à insister sur le fait que nous avons besoin d'une législation actualisée qui nous permettra d'avoir des outils efficaces pour prévenir les activités criminelles et mener des enquêtes sur celles-ci. Nous remercions le gouvernement fédéral de nous aider dans notre travail visant à empêcher les personnes vulnérables d'être exploitées et victimisées et à faire en sorte que nos collectivités restent sécuritaires.
    Merci.
(1120)
    Merci, monsieur Pardy, pour votre exposé.
    Notre prochain intervenant est le commissaire Oliver, de la Gendarmerie royale du Canada.
    Monsieur le président, et mesdames et messieurs membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à donner un aperçu des efforts déployés par la GRC pour lutter contre la cybercriminalité, y compris la cyberintimidation.

[Français]

    Je suis le commissaire adjoint Joe Oliver et je suis chargé de la supervision de la Direction des Opérations techniques de la GRC. Les Opérations techniques fournissent directement aux agents de police de première ligne des services opérationnels et des services d'enquête spécialisés. Nous assurons notamment la coordination nationale des enquêtes sur l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet et nous fournissons des outils d'enquête spécialisés pour lutter contre les comportements criminels sur Internet.
(1125)

[Traduction]

    Je suis accompagné aujourd'hui de l'inspecteur Mercer Armstrong, de la Section des politiques opérationnelles et de la conformité de la Direction des services de police contractuels et autochtones de la GRC. Cette Direction est responsable des politiques d'enquête, notamment celle qui régit l'application du Code criminel, qui vise des incidents comme la cyberintimidation dans les administrations contractantes de la GRC partout au Canada. Les Services de police contractuels et autochtones s'occupent également des initiatives d'éducation et de sensibilisation de la GRC pour la prévention de la cyberintimidation et d'autres crimes.
    Tout d'abord, j'aimerais présenter de façon générale le sujet de la cybercriminalité. Par la suite, j'aborderai certains des défis liés aux enquêtes que les agents de police doivent affronter à l'ère numérique: des défis liés au fait que la cybercriminalité est anonyme, difficile à détecter et bien souvent transfrontalière. Je parlerai ensuite de certains types de cybercrimes qui ont des répercussions dévastatrices sur les jeunes, à savoir la cyberintimidation et la distribution non consensuelle d'images intimes.
    Il est important de souligner que la cybercriminalité est, à bien des égards, une façon moderne de commettre des crimes bien connus. Par exemple, les criminels créent et déploient des logiciels malveillants (maliciels) afin de voler des mots de passe ou de subtiliser des renseignements personnels et financiers. Ils peuvent ensuite commettre diverses infractions, comme la fraude, le vol d'identité et d'autres crimes motivés par l'argent. Récemment, la GRC a collaboré avec ses partenaires internationaux pour enquêter sur le déploiement d'un maliciel qui a infecté des milliers, voire des millions d'ordinateurs à des fins criminelles. Dans le cadre de l'opération Clean Slate, la GRC a mené des enquêtes sur des cas d'utilisation non autorisée d'ordinateurs et de méfaits concernant des données, infractions prévues respectivement aux articles 342.1 et 430 du Code criminel.
    Ces dispositions ne traitent toutefois pas de tous les éléments fondamentaux de la cybercriminalité, notamment le fait de posséder un virus informatique en vue de commettre un méfait ou le fait d'importer ou de rendre accessible un virus informatique. Ces menaces criminelles proviennent du Canada et d'ailleurs, circulent sur les réseaux canadiens de télécommunications et, dans bien des cas, constituent une menace à la fois pour les Canadiens et pour nos alliés. À l'heure actuelle, les dispositions du Code criminel qui régissent l'utilisation non autorisée d'un ordinateur et les méfaits concernant des données ne reflètent pas entièrement l'ampleur du contexte actuel de la cybercriminalité ni la portée éventuelle des enquêtes policières à cet égard.
    Pour lutter contre la cybercriminalité, il est essentiel de rassembler rapidement les éléments de preuve numériques provenant du monde virtuel. Comme nous le savons tous fort bien, il est facile de modifier ou de supprimer les données informatiques, que ce soit par inadvertance ou intentionnellement. Durant une enquête sur un cybercrime, il peut arriver que les fournisseurs d'accès Internet suppriment des données informatiques — et donc des éléments de preuve éventuels — dans le cadre de leurs opérations de routine. Dans le contexte de leurs fonctions relatives au maintien de l'ordre prévues par la common law, les organismes d'application de la loi peuvent demander à un fournisseur d'accès Internet de conserver volontairement certaines données. Malgré cette mesure, les services de police n'ont actuellement aucune façon de veiller à ce que les fournisseurs d'accès Internet ne suppriment pas les données s'il y a une raison de croire que des activités criminelles ont été menées. On peut penser à une demande ponctuelle de la part d'un agent de police ou à un ordre à long terme donné en fonction d'une autorisation judiciaire. Le fait qu'il n'existe aucun outil d'enquête de ce genre compromet les éléments de preuve éventuels, car les enquêteurs doivent d'abord étoffer leur dossier afin de satisfaire aux critères judiciaires liés à l'accès aux données.

[Français]

    Il y a aussi la difficulté que présente l'« attribution » de la « preuve numérique ». Autrement dit, comment pouvons-nous identifier un suspect en ligne, surtout quand on sait qu'il peut avoir pris des mesures sophistiquées pour brouiller ses pistes numériques au moyen de réseaux anonymes en ligne, de technologies de chiffrement ou d'autres mesures comme les réseaux de zombies?

[Traduction]

    Dans ce contexte, certains éléments de preuve numérique particuliers, comme les données de transmission et de suivi, sont particulièrement importants au début d'une enquête policière concernant des activités criminelles en ligne.
    Ce genre d'éléments de preuve numérique très précis peut permettre à la police d'attribuer les activités criminelles en ligne à une source et de suivre les pistes d'enquête. À l'heure actuelle, certains types de données, comme les données de transmission et de suivi, peuvent être obtenus par la divulgation volontaire d'un tiers ou grâce à une ordonnance de communication générale ou à un mandat de perquisition autorisé par un tribunal.
    Dans le cas d'une ordonnance de communication générale ou d'un mandat de perquisition, la police doit avoir « des motifs raisonnables de croire » qu'un crime a été commis. Il peut être difficile de satisfaire à cette norme de preuve au début d'une enquête, car l'agent de police peut avoir « des motifs raisonnables de soupçonner », sans plus, que des activités criminelles sont menées en ligne. Dans de tels cas, certains types de données, comme ceux que j'ai mentionnés, peuvent contenir les premiers indices importants d'un comportement criminel — des indices qui sont souvent nécessaires pour pouvoir réellement commencer le travail policier dans le cyberespace.
    Ces défis liés aux enquêtes sont loin d'être limités aux cybercrimes motivés par l'argent. Ils s'appliquent tout autant à d'autres types de crimes en ligne qui sont dévastateurs et qui visent les jeunes, comme l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet et la cyberintimidation. La « jeunesse » est l'une des priorités stratégiques et de grande ampleur de la GRC. Il s'agit d'initiatives d'éducation, de sensibilisation et d'application de la loi qui visent à prévenir la victimisation des jeunes et à intervenir auprès des jeunes qui se livrent à des activités criminelles.
    Par exemple, le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants de la GRC — qui relève de mon portefeuille — collabore avec des partenaires responsables de l'application de la loi au Canada et ailleurs pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants sur Internet. Le Centre travaille également en étroite collaboration avec le Centre canadien de protection de l'enfance. Il s'agit d'un organisme de bienfaisance qui gère le service pancanadien de signalement des cas de violence faite aux enfants et d'exploitation sexuelle des enfants sur Internet (cyberaide.ca).
    Pour lutter contre la cyberintimidation, le Centre de ressources pour les jeunes de la GRC fournit aux agents de police qui travaillent dans plus de 5 000 écoles au Canada des plans de leçon et des outils pédagogiques pour aider les jeunes à reconnaître l'intimidation et la cyberintimidation, à y réagir et à les prévenir. En outre, les Services nationaux de prévention criminelle de la GRC se sont associés au Réseau pour la promotion de relations saines et l'élimination de la violence. PREVNet est un réseau national de chercheurs et d'organismes qui travaillent ensemble pour mettre un terme à l'intimidation et à la cyberintimidation. Il y a également un partenariat avec l'Université de Victoria pour mettre à l'essai le programme WITS, acronyme anglais pour « éloigne-toi, ne t'occupe pas d'eux, parles-en et va chercher de l'aide ». Ce programme vise à prévenir l'intimidation et la victimisation par les pairs, notamment la cyberintimidation, grâce à la mobilisation des jeunes. Le projet pilote a été mis en oeuvre dans 50 écoles et a mobilisé plus de 8 800 élèves. Ces activités sont des mesures de prévention essentielles pour lutter contre la cyberintimidation.
    Malheureusement, lorsqu'il est question de cyberintimidation, la prévention ne suffit pas. Comme l'a signalé le Groupe de travail sur la cybercriminalité du Comité de coordination des hauts fonctionnaires, l'intimidation et la cyberintimidation peuvent prendre la forme de diverses infractions, comme le harcèlement criminel ou la profération de menaces. Des incidents de cyberintimidation très médiatisés nous ont appris que l'intimidation peut être facilitée et amplifiée par les télécommunications. À l'heure actuelle, les dispositions du Code criminel qui visent les faux messages, les propos indécents et les communications harcelantes reflètent mal le rôle de plus en plus universel des télécommunications comme moyen d'intimidation criminelle.
    Les incidents récents de cyberintimidation, en particulier ceux qui portent sur la distribution non consensuelle d'images intimes, présentent d'autres défis liés aux enquêtes. Par exemple, lorsque les victimes sont âgées de moins de 18 ans, il peut être difficile de démontrer que l'intention à l'origine des infractions correspond à ce que prévoient les dispositions sur la pornographie juvénile qui permettent de porter des accusations. En outre, comme l'a signalé le Groupe de travail sur la cybercriminalité — dont j'ai parlé tout à l'heure —, ces dispositions peuvent être considérées comme « trop rigides » pour traiter de la distribution non consensuelle d'images intimes, surtout lorsque le contrevenant est aussi âgé de moins de 18 ans. Les paramètres actuels peuvent limiter le pouvoir discrétionnaire de l'enquêteur et les options qui s'offrent à lui pour déposer les accusations criminelles appropriées.
(1130)

[Français]

    En conclusion, je dirai que, bien souvent, la cybercriminalité est essentiellement une façon plus sophistiquée de commettre des crimes bien connus comme le vol, la fraude, l'intimidation, l'extorsion ou l'exploitation des enfants. Cependant, l'utilisation de technologies de l'information à des fins criminelles pose des défis importants dans le contexte des enquêtes policières.
    Il y a des défis liés à la conservation des éléments de preuve ou à la difficulté d'identifier les criminels en ligne et de leur attribuer des crimes. Il y a également des défis liés à l'application d'une norme de preuve qui correspond davantage aux enquêtes du « monde réel » dans des domaines physiques et « non cybernétiques ».

[Traduction]

    La modernisation du Code criminel, quant aux infractions et aux outils d'enquête prévus, permettrait aux organismes canadiens d'application de la loi de mieux lutter contre l'intimidation criminelle et d'autres crimes à l'ère numérique. J'aimerais également souligner l'importance d'harmoniser les lois pénales et les outils d'enquête au Canada avec ceux de nos alliés. La GRC pourrait ainsi collaborer plus efficacement avec ses partenaires internationaux responsables de l'application de la loi en vue de lutter contre les nombreux crimes en ligne qui sont de nature transnationale. Le projet de loi C-13 cherche à surmonter les défis liés aux enquêtes dont j'ai parlé.
    L'inspecteur Armstrong et moi serions heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup d'avoir présenté votre exposé.
    Notre prochain intervenant est le chef de la Halifax Regional Police.
    Chef Blais, vous avez dix minutes pour présenter votre déclaration préliminaire.

[Français]

     Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour.
     Je m'appelle Jean-Michel Blais et je suis directeur du service de police régional d'Halifax. Malheureusement, je n'ai pas pu me joindre à vous aujourd'hui, à Ottawa, parce que mon horaire était assez chargé et que j'avais d'autres engagements. Cependant, compte tenu du sujet qui est à l'étude, je vais témoigner par vidéoconférence.
(1135)

[Traduction]

    En ma qualité de chef de la Halifax Regional Police, je suis honoré que le comité offre à la police et à mon service l'occasion de prendre la parole pour parler du sujet important qu'il aborde aujourd'hui. J'aimerais également remercier le chef Chu de m'avoir invité à participer à la discussion.
    En tant que membre de l'Association canadienne des chefs de police et en tant que chef de police dont la collectivité a été elle-même aux prises avec les conséquences dévastatrices de comportement d'exploitation en ligne, je suis tout à fait en faveur de l'adoption du projet de loi 13. Celui-ci accroîtra la sécurité en ligne, permettra la tenue d'enquêtes efficaces au sujet des crimes liés à Internet et à la technologie et prévoira des conséquences pour les actes de cyberintimidation et la distribution non consensuelle d'images intimes. Avec l'avènement d'Internet, personne n'aurait pu prévoir le rythme des percées technologiques ni les répercussions qu'elles allaient avoir sur notre société, et en particulier sur nos jeunes, qui sont issus du monde numérique, alors que nous qui sommes un peu plus âgés sommes au fond des immigrants dans ce monde.
    Dans ce paysage technologique en pleine évolution, nous qui assurons les services de police devons actuellement composer avec les lois qui ont été adoptées à l'époque du téléphone à cadran. Nous avons besoin de lois modernisées, comme celles que l'on propose dans le projet de loi C-13, qui soient le reflet de l'ère d'Internet, de sorte que nous puissions mener des enquêtes efficaces et poursuivre adéquatement les gens qui utilisent Internet et les plates-formes technologiques connexes à des fins criminelles. Bref, nous avons besoin de lois reconnaissant l'existence de formes modernes de technologie qui n'existaient pas à l'époque où certaines des dispositions du Code criminel ont été adoptées. En outre, nous avons besoin de lois qui modernisent les outils d'enquête que les services de police pourront utiliser pour repérer les actes criminels et lutter contre la criminalité tout en préservant le droit des citoyens au respect de leur vie privée. Le projet de loi C-13 répondra à ce besoin en nous fournissant un ensemble d'outils qui nous permettront de mener des enquêtes efficaces et efficientes dans l'environnement de haute technologie actuel tout en maintenant les freins et contrepoids judiciaires qui sont nécessaires pour assurer le respect de la vie privée des Canadiens.
    Je voudrais vous faire part de quelques exemples que m'ont donnés mes enquêteurs de la façon dont le projet de loi C-13 renforcera les enquêtes policières et nous permettra de mieux servir nos citoyens et nos collectivités. Comme vous le savez, il n'existe actuellement pas de dispositions dans le Code criminel concernant le fait qu'une personne envoie ou affiche les images intimes d'une autre personne sans son consentement. C'est un problème de plus en plus important dans notre société où, dans le contexte de la prolifération des médias sociaux, des adultes et des enfants sont devenus victimes de cyberintimidation et de harcèlement fondés sur la distribution non consensuelle de leurs images intimes. Les modifications proposées vont changer la situation et nous permettre de mieux protéger l'ensemble des citoyens contre des actes de ce genre.
    Les dispositions du projet de loi C-13 vont également permettre aux enquêteurs d'accuser les délinquants de distribution non consensuelle d'images intimes plutôt que d'infractions liées à la pornographie juvénile lorsqu'il s'agit d'images d'une personne de moins de 18 ans. Nous estimons que cela sera très utile dans les cas où le délinquant est lui aussi un jeune qui, vu son âge et son degré de maturité, n'a peut-être pas pleinement conscience des conséquences dévastatrices de ses actes, mais pourrait se retrouver avec un casier judiciaire pour des infractions liées à la pornographie juvénile aux termes des dispositions actuellement en vigueur. Les lois actuelles n'ont pas été élaborées dans cette intention, et les services de police estiment que les dispositions proposées rendront la démarche et l'intervention plus mesurées et plus adéquates dans ces cas.
    Sur le plan de mon expérience personnelle, je me rappelle que, en 2003, lorsque j'étais à la tête de l'unité intégrée de lutte contre l'exploitation des enfants du Manitoba, tous nos suspects étaient des hommes dans la vingtaine et dans la trentaine issus de divers milieux. Certains vivaient dans le sous-sol de leurs parents, tandis que d'autres étaient des courtiers accomplis et des professionnels de tous les domaines. Si on nous avait demandé ce que l'avenir nous réservait, nous n'aurions jamais imaginé qu'en 10 années seulement, les gens et même les enfants seraient en mesure de transmettre des images constituant de la pornographie juvénile ou entraînant une forme de harcèlement en utilisant simplement un téléphone cellulaire portatif.
    Cela m'amène à réfléchir, tant comme chef de police que comme père de trois enfants, aux nouvelles technologies qui n'ont pas encore été mises au point et qui permettront d'autres formes encore d'exploitation des enfants et des adultes. Dans le projet de loi C-13, on propose que les infractions concernant les appels harcelants ou indécents soient modifiées afin qu'elles reflètent les moyens de communication modernes et qu'elles incluent les communications harcelantes et indécentes par des moyens de télécommunication, la portée de l'infraction étant ainsi élargie pour tenir compte de la technologie avancée d'aujourd'hui.
    Les services de police vont être en mesure de donner les ordres de préservation qui ont toujours été permis et d'obtenir des ordonnances de préservation afin que les données détenues par les fournisseurs de service des communications et les sites de réseaux sociaux soient conservées jusqu'à ce que les enquêteurs puissent obtenir une ordonnance de communication ou un mandat de perquisition leur permettant d'obtenir les éléments de preuve de façon légale. À l'heure actuelle, ces entités peuvent supprimer l'information ou ne pas la préserver, car la loi ne les oblige aucunement à le faire. Ce problème est aggravé par le raccourcissement des périodes de conservation des données, vu les quantités incroyables de données que génèrent les plates-formes technologiques d'aujourd'hui.
    Comme je l'ai mentionné déjà, l'exploitation en ligne a eu des conséquences dévastatrices ici, à Halifax, et les effets se sont répercutés partout dans le monde. Pour reprendre les propos du chef Chu, nous reconnaissons que le fait de modifier la loi n'est qu'une partie de la solution. Toutefois, si on y ajoute l'information, la sensibilisation et les services communautaires intégrés, le projet de loi constitue une mesure importante pour aider les services de police et la communauté en général à lutter de façon efficace et efficiente contre la cyberintimidation et la distribution non consensuelle d'image intimes, actes qui revictimisent perpétuellement les victimes.
    Idéalement, lorsque les démarches d'information et de sensibilisation ne seront plus d'aucun secours, le système judiciaire doit disposer des moyens adéquats pour intervenir. La Nouvelle-Écosse a pris les devants sur cette question, en adoptant la Cyber-safety Act il y a un peu plus d'un an. Grâce à cette loi, et aux modifications du Code criminel apportées par le projet de loi C-13, nous disposerons d'outils puissants pour lutter contre les criminels qui exploitent ou harcèlent les personnes vulnérables en ligne.
    Les services de police étant aux prises avec la cyberintimidation et l'utilisation toujours plus grande d'Internet pour la perpétration de cybercrimes, nous devons être en mesure de mener des enquêtes adéquates au nom de toutes les victimes. Nous devons jouer un rôle de défense des droits de tous les Canadiens et faire entendre le message selon lequel nous ne tolérerons plus la victimisation de nos citoyens en ligne.
    Il va sans dire que nous qui sommes des hommes et des femmes respectueux de la primauté du droit et toujours conscients de leur obligation impérieuse de l'assurer devons faire cela en respectant le droit à la vie privée de tous les Canadiens. C'est pour cette raison que la Halifax Regional Police appuie ce projet de loi important et nécessaire.
    Merci encore une fois de nous avoir invités à prendre parole.
(1140)
    Merci, chef Blais.
    Nous allons maintenant passer à nos tours de questions.
    Notre premier intervenant est Mme Péclet, du Nouveau parti démocratique.

[Français]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Je vous remercie beaucoup d'être présents aujourd'hui. Vos présentations étaient toutes très intéressantes. Je suis très heureuse que chacun d'entre vous ait mentionné la nécessité non seulement d'agir après une infraction, mais d'essayer de prévenir celle-ci par l'éducation et la sensibilisation. Je vous félicite pour les programmes que vous avez mentionnés et je vous remercie de votre travail.
    Si l'un d'entre vous souhaite dire quelque chose ou compléter la réponse d'un de ses collègues, qu'il n'hésite pas à le faire.
    Ma première question s'adresse à M. Oliver. Dans votre présentation, vous parlez de la cybercriminalité en général. On sait que le projet de loi C-13

[Traduction]

cible seulement l'infraction particulière de distribution non consensuelle d'images intimes. Comment procéderiez-vous dans le cas d'un type de cyberintimidation différent? Nous ciblons seulement une infraction particulière pour l'instant. Il s'agit seulement de la distribution d'images intimes sans le consentement de la personne concernée. Mais comment procéderiez-vous dans un cas de cyberintimidation différent? Avez-vous les outils nécessaires pour intervenir, par exemple dans le cas où une personne en intimide une autre en lui envoyant des messages textes ou des messages dans Facebook? Comment procéderiez-vous?

[Français]

    Permettez-moi de répondre en anglais, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Un certain nombre d'infractions prévues dans le Code criminel pourraient s'appliquer à la cyberintimidation, dont l'infraction de harcèlement sexuel, de profération de menaces et de méfait concernant les données.
    En plus de prévoir une nouvelle infraction de publication d'images intimes sans le consentement de la personne concernée, le projet de loi C-13 modifie d'autres dispositions afin de les moderniser, par exemple l'article 342.1, où il parle de quiconque « importe, obtient en vue de l'utiliser, écoule ou rend accessible » — par exemple l'utilisation non autorisée d'un ordinateur.
    Certaines formes de harcèlement ou de vengeance incluent le fait d'utiliser l'ordinateur d'une personne pour afficher des images qui semblent alors provenir de cette personne et autres choses de ce genre. Dans ce cas, on mène une enquête plus complexe qui doit permettre de prouver l'origine du virus ou des modifications apportées au site Web d'une personne. Maintenant pour arriver à le faire, vu les communications modernes... certaines communications passent par de multiples réseaux et de multiples fournisseurs de services.
    Quant aux outils qu'offre le projet de loi C-13, je tiens simplement à préciser qu'il n'y a pas dans celui-ci de dispositions permettant à la police d'accéder à l'information sans mandat: toutes les mesures d'enquête proposées exigent une autorisation judiciaire préalable. Donc, si nous essayons de déterminer d'où une attaque est venue, l'ordonnance de communication de la piste de transmission nous permettrait d'accéder au réseau et de trouver le fournisseur de services qui est en possession du contenu. Ensuite, nous pourrons obtenir une ordonnance de communication qui nous permettra de trouver le contenu et les détails concernant le délinquant. Il y a donc plusieurs moyens dans cet ensemble d'outils d'enquête qui est proposé dans le cadre du projet de loi C-13 qui nous viendraient en aide pour lutter contre d'autres formes d'intimidation. Je dois toutefois insister sur le fait que cela nous aiderait à lutter contre d'autres formes de cybercriminalité.
(1145)

[Français]

    Monsieur Chu, si je peux me permettre, vous avez parlé de la difficulté à gérer les enquêtes parce que les frontières d'Internet sont inexistantes. En fait, ce n'est pas comme une infraction commise sur le terrain. Vous avez parlé de certains sites Web où il est question de revenge porn et des choses comme ça. Or l'article 5 du projet de loi prévoit une procédure pour ordonner la fermeture de ce genre de sites Web qui comportent des images intimes. Par contre, il faut que le serveur sur lequel sont emmagasinées les images soit situé sur le territoire que dessert le tribunal pour rendre l'ordonnance.
    Serait-il possible d'ordonner la fermeture de ce genre de sites? Quelle serait la procédure adéquate? Êtes-vous convaincu que ce projet de loi vous offre les outils nécessaires pour procéder à de telles enquêtes?

[Traduction]

    Oui, certains de ces sites Web dont j'ai parlé sont en réalité utilisés pour effectuer un échange d'information ou une communication légitime. C'est toutefois lorsqu'une personne décide de se livrer à un comportement criminel en utilisant un site Web comme voie de communication légale qu'un problème se pose. Si nous devions demander aux responsables d'un site Web comme ask.fm, par exemple, qui est hébergé en Lettonie, de nous révéler l'identité d'une personne ayant affiché quelque chose ou encore d'un utilisateur ou d'un titulaire de compte, ils ne collaboreraient pas avec les autorités canadiennes. Ils ne répondraient même pas à notre courriel.
    C'est ce qui nous ramène à ce disait mon collègue, le commissaire adjoint Oliver. Nous examinerions le chemin emprunté à partir de l'adresse IP, ce qui pourrait nous permettre d'établir que la personne à l'origine du courriel ou du message affiché vit dans la même ville que la victime. À ce moment-là, nous pourrions procéder et obtenir les ordonnances de communication nécessaires pour découvrir qui est titulaire du compte en question.
    Il y a donc une personne à l'origine du crime. Il se peut qu'elle utilise quelque chose qui est à l'étranger, mais les outils dont nous disposons nous aident à retrouver la trace de la personne qui a commis le crime.
    Merci beaucoup.
    Merci de vos questions et de vos réponses.
    Notre prochain intervenant est M. Wilks, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à vous, messieurs, d'être venus.
    Ma première question s'adresse au chef de la police de Halifax. Malheureusement, des victimes nous ont dit que, au moment des premiers incidents de cyberintimidation, la police n'a aucun recours dans certains cas. Autrement dit, sans le projet de loi C-13, la police ne peut pas faire grand-chose dans le cas de la diffusion à grande échelle non consensuelle d'images intimes.
    Estimez-vous que la police a besoin d'outils supplémentaires pour s'acquitter de sa tâche de protection des gens contre la distribution à grande échelle non consensuelle d'images intimes? Par ailleurs, du point de vue des agents de police de première ligne, pouvez-vous nous faire part de votre expérience de cas de cyberintimidation ou de cas précis concernant la distribution non consensuelle d'images intimes au moment où les premiers incidents surviennent?
    Oui, je vous remercie, monsieur Wilks, par l'intermédiaire du président.
    Pour nous, il s'agit dans ce cas-ci d'une question de temps. Il s'agit que nous soyons en mesure de nous assurer que, une fois que nous savons où se trouve l'information ou de quelle nature elle est, nous pouvons l'obtenir adéquatement avant qu'elle ne soit supprimée, premièrement, et avant qu'elle ne se perde, deuxièmement. Vous comprendrez bien que les divers sites Web et Internet en général créent d'énormes quantités de données. Il est très difficile de remonter quatre, cinq ou six mois en arrière. Cela dit, ce qui compte, c'est évidemment de pouvoir obtenir l'information d'une manière qui nous permette d'amener l'affaire à sa conclusion judiciaire adéquate devant les tribunaux.
    En ce qui concerne les outils supplémentaires, ce qui nous arrive souvent, c'est que des personnes viennent nous voir en nous disant qu'une photo de leur fille ou d'elles-mêmes circule dans Internet. Très souvent, ce que ces personnes veulent, c'est que l'image soit retirée. Nous n'avons pas les outils nécessaires pour le faire pour l'instant. Pour être franc avec vous, je ne sais même pas si de tels outils peuvent vraiment exister.
    D'après l'expérience que j'ai acquise en travaillant dans le domaine de la lutte contre l'exploitation des enfants dans le passé, le problème le plus important qui se pose tient à la revictimisation perpétuelle des victimes. Pour répondre directement à la question concernant la capacité d'enlever les images de la circulation, je dirais donc que c'est très difficile. Oui, nous sommes en mesure d'identifier certaines personnes pouvant avoir une image en leur possession, mais, comme vous pouvez l'imaginer — je suis sûr que beaucoup d'entre vous utilisent Twitter, et, une fois qu'on a affiché un message dans Twitter, il peut faire le tour du monde en quelques instants.
(1150)
    Merci beaucoup de votre réponse, chef Chu et commissaire adjoint Oliver.
    Comme nous le savons tous, l'évolution des technologies informatiques et de communications a rendu certains crimes plus faciles à commettre et plus difficiles à résoudre. Au Canada, les enquêtes sont actuellement fondées sur des pratiques qui ne tiennent pas toujours compte de l'arrivée de ces nouvelles technologies. Vous avez fait allusion à la partie VI. Pour avoir rédigé un affidavit à l'époque, je peux vous dire qu'il a fallu 732 pages et un an et demi pour y arriver. À notre époque, il faut que nous puissions intervenir plus rapidement. Notre gouvernement estime que nos lois doivent être modernisées pour permettre une intervention plus efficace et plus efficiente lorsque des crimes sont commis.
    Pouvez-vous parler de la nécessité de mettre le Code criminel à jour et nous dire en quoi le fait que le Code criminel soit dépassé affecte le travail que les agents de police font au quotidien.
    Chef Chu, j'aimerais vous entendre d'abord, puis je demanderais au commissaire adjoint Oliver de répondre lui aussi.
    Eh bien, je sais que l'aspect économique de l'application de la loi est un sujet très important des études des comités et du gouvernement à l'échelon fédéral. Les services de police coûtent cher, et le nombre d'agents de police est limité. Si ceux-ci doivent suivre des processus fastidieux faisant en sorte qu'il faut beaucoup de temps pour obtenir de l'information qui, dans certains cas, ne mènera nulle part, pendant ce temps-là, les enquêteurs peuvent travailler sur autre chose.
    Très franchement, il y a des types d'enquêtes où nous examinons la probabilité d'une résolution et les abandonnons, surtout si elles font intervenir un élément international. Il y a toutefois aussi des affaires locales à l'égard desquelles nous avons plus de souplesse et nous sommes en mesure de mener l'enquête plus rapidement, ce qui aide à empêcher que d'autres personnes subissent du tort, si nous arrivons à réagir rapidement.
    Merci de me permettre de prendre la parole.
    Eh bien, je pourrais aborder sous deux ou trois aspects l'incidence du projet de loi C-13 sur la modernisation des outils d'enquête.
    D'abord, dans ma déclaration préliminaire, j'ai parlé de la préservation. À l'heure actuelle, nous ne pouvons que compter sur la collaboration des entités concernées lorsqu'il s'agit de la préservation des données. Pour que la police ait le temps d'obtenir l'ordonnance de communication ou une ordonnance de localisation quelconque qui lui permettra d'obtenir les éléments de preuve et de poursuivre l'enquête, comme le propose le projet de loi C-13, elle pourra ordonner aux fournisseurs de services de préserver les données, ce qui nous donnera le temps de poursuivre l'enquête. Et surtout lorsqu'on parle de partenariats internationaux également... S'il s'agit d'une enquête au Canada, nous aurions 21 jours pour demander une ordonnance de communication. Nous collaborons souvent dans ce monde sans frontière qu'est Internet. Cela nous donne 90 jours, à nous et au ministère de la Justice, pour collaborer avec le Groupe d'entraide international et ses partenaires internationaux à l'obtention d'une ordonnance de communication dans le cadre du processus en question.
    L'ordonnance de préservation est un autre outil pouvant être utilisé pour préserver les données de sorte que nous puissions ensuite recourir à d'autres moyens prévus par le projet de loi et par le Code criminel pour obtenir des éléments de preuve supplémentaires.
    En ce qui concerne certaines des autres dispositions, elles modernisent les outils d'enquête accessibles, et, dans certains cas, elles tiennent compte de l'importance de la protection de la vie privée. Prenons l'exemple d'un dispositif de localisation. À l'heure actuelle, l'article 492.1 permet à la police d'utiliser un dispositif de localisation pour surveiller le lieu où se trouve une chose et ses déplacements, ce qui est utile pour la surveillance en temps réel et pour corroborer d'autres renseignements que nous pouvons obtenir durant une enquête. Cela tient compte de l'importance de la protection de la vie privée. Dans le cadre du régime actuel, cela supposerait l'installation d'une espèce d'outil ou d'un dispositif mobile permettant de suivre les allées et venues d'une personne, et le critère à respecter est celui des « motifs raisonnables de soupçonner ». Le projet de loi modernisé fait passer ce critère que doivent respecter les services de police à celui des « motifs raisonnables de croire ». Ainsi, dans le cas d'un appareil qui est normalement transporté ou porté par une personne, disons un téléphone cellulaire, le critère prévu par le projet de loi C-13 pour ce qui est de la localisation est en réalité plus strict.
(1155)
    Merci, commissaire adjoint Oliver. Le temps est écoulé.
    Merci de vos questions et de vos réponses.
    Notre prochain intervenant est M. McKay, du Parti libéral.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais être légèrement désavantagé, car je ne suis pas membre en bonne et due forme du comité, monsieur le président.
    Ce que vous avez dit m'a intéressé, commissaire Oliver, lorsque vous avez parlé du fait de retrouver la personne qui est à l'origine de l'image, car cela me semble être au coeur du problème. Ce qui m'échappe, ce sont les moyens que vous utilisez pour le faire. Devez-vous passer par l'ordinateur de la personne qui a affiché les images, à l'ordinateur de la personne qui figure sur les images et par mon ordinateur pour retrouver celui qui est à l'origine de la chaîne? Le cas échéant, avez-vous besoin d'un mandat ou non?
    Les nouvelles dispositions prévoient de nouveaux outils permettant la communication de la piste de transmission.
    Vous parlez de l'article 164.1 proposé?
    Non, il s'agit de l'article 487.015 proposé, c'est-à-dire de l'ordonnance de communication de la piste de transmission.
    Cette ordonnance vise la communication d'information antérieure dans le cas où le fournisseur de services d'origine ne peut être retrouvé. Dans le cadre d'enquêtes récentes où il y a eu exfiltration de données — disons qu'une personne utilise les justificatifs d'identité d'une autre personne —, nous avons été en mesure d'en découvrir l'origine. Sauf que lorsque nous nous adressons au fournisseur de services, il nous dit que l'exfiltration vient d'ailleurs. Nous passons alors d'un fournisseur de services à l'autre jusqu'à ce que nous retrouvions l'origine...
    Vous passez donc d'un fournisseur de services à l'autre, et non pas nécessairement d'un ordinateur à l'autre.
    Précisément.
    Il s'agit de l'un des outils qui s'offrent maintenant à nous, dans le cadre des nouvelles dispositions législatives. L'autre, c'est la production des données de transmission, ce qui correspond à l'article 487.016 proposé — encore une fois, il s'agit d'informations antérieures. Dans ce cas-ci, le fournisseur de services est connu. Nous pouvons remonter jusqu'à un ordinateur particulier. Prenons le cas où il y a eu une attaque et où nous connaissons le fournisseur de services. C'est Rogers. Nous pouvons obtenir une ordonnance de communication. À ce moment-là, ce que nous disons à Rogers, c'est que nous croyons qu'un compte hébergé par l'entreprise a été utilisé dans le cadre d'une attaque. Ce que nous voulons voir, ce sont les données antérieures, pour arriver à obtenir des éléments de preuve de...
    À ce moment-là, est-ce que Rogers doit vous dire d'où viennent les données?
    Les données de transmission sont très précises. Elles ne révèlent pas le contenu qui a été transmis. Elles ne révèlent pas le fond, le sens ni le but de la communication. Il s'agit plus ou moins de données directionnelles: la date, la durée, etc. Donc quelque chose d'apparenté aux données qui existent aujourd'hui sur les appels téléphoniques. Si je fais un appel, je peux savoir que tel numéro a appelé tel numéro. C'est la même chose dans le cas des ordinateurs. Nous établissons donc le lien.
    Est-ce qu'un juge intervient à ce moment-là?
    Toutes les dispositions du projet de loi C-13 exigent une autorisation judiciaire préalable. Il n'y a pas de dispositions d'accès sans mandat dans le projet de loi.
(1200)
    Le chef Chu a parlé de la partie VI, et, contrairement à M. Wilks, je n'ai jamais rédigé de document de 700 pages. Que suppose la préparation de ce genre de document pour qu'un juge accorde à la police un mandat lui permettant de passer d'un serveur à l'autre?
    Le critère proposé dans le projet de loi est celui des motifs raisonnables de soupçonner.
    Je présume que c'est le critère pour n'importe quoi d'autre, en réalité.
    La police devra préciser les pistes d'enquête. Nous devons préciser ce que nous savons au sujet de la plainte et des infractions criminelles qui pourraient avoir été commises, et nous devons aussi communiquer toute information à notre disposition qui puisse convaincre un juge que nous avons raison de soupçonner que le fournisseur de services de télécommunications en question peut avoir hébergé une transmission ayant servi dans le cadre d'une activité criminelle.
    Permettez-moi de m'adresser au chef Blais pendant un instant. Je pars du principe que, puisque vous venez de Halifax, vous avez dû prendre une part importante à l'affaire Rehtaeh Parsons. Qu'est-ce qui faisait grandement défaut aux dispositions législatives concernant les services de police et aux dispositions pénales pour ce qui est de la tenue d'une enquête adéquate dans ce dossier?
    Eh bien, vous comprendrez bien que le dossier est présentement devant les tribunaux, premièrement, et que, deuxièmement, il va y avoir un examen qui a été demandé par le gouvernement provincial. Je ne peux pas vous donner de détails en ce qui concerne ce dossier, mais je vais essayer de répondre à votre question en vous parlant de certains des problèmes avec lesquels nous sommes aux prises de façon générale.
    Il s'agit d'obtenir l'information en temps opportun. Il y a eu plusieurs autres cas où nous avons présenté des demandes à des fournisseurs d'adresses IP des États-Unis. Dans le cas de Facebook, par exemple, nous devons entreprendre des démarches dans le cadre d'un traité d'entraide juridique, et cela peut prendre des mois. C'est un autre gros problème avec lequel nous avons été aux prises.
    Le projet de loi va-t-il le régler?
    Dans une certaine mesure, mais je pense qu'il va surtout nous donner 21 jours pour obtenir l'information immédiatement s'il s'agit d'un fournisseur local et que nous avons cerné l'information précise qui nous intéresse et que nous sommes en mesure de déterminer où elle se trouve. Au bout de la période de 21 jours, si nous n'avons pas été en mesure d'obtenir l'autorisation judiciaire nécessaire, l'ordonnance ne sera plus en vigueur, et nous ne pourrons pas obtenir l'information. Les nouvelles mesures vont nous aider. Je ne pense pas qu'elles iront aussi loin que nous le souhaiterions pour ce qui est d'obtenir l'information en temps opportun, et quand je dis en temps opportun, idéalement, ce serait dans les jours suivants. Toutefois, comme je l'ai dit déjà, nous avons aussi conscience du fait que, lorsque nous préparons les documents en question, une chose aussi simple qu'un mandat de perquisition n'est plus simple aujourd'hui.
    La dernière fois que j'ai demandé un mandat de perquisition, c'était en 2002, et la demande faisait 15 pages. Il m'a fallu trois jours pour la rédiger, et il s'agissait d'une simple accusation de méfait public.
    Est-ce que le délai de 21 jours est un obstacle qui pourrait être supprimé à cette étape-ci?
    Ce serait possible, mais, encore une fois, si nous n'avons pas l'information, surtout si le critère est celui des motifs raisonnables de soupçonner, il se peut que nous ne l'obtenions jamais. Je pense qu'en tant que législateurs, vous devez décider de ce qui convient le mieux pour ce qui est du critère et des délais prévus. Nous devons être équitables envers la population canadienne et être en mesure d'obtenir toute l'information. Comme le chef Chu le disait au sujet de l'aspect économique de l'application de la loi ou de la sécurité publique, nous devons être en mesure de [Note de la rédaction: inaudible] les ressources nécessaires pour nous acquitter de notre tâche.
    Merci.
    Notre prochain intervenant est M. Dechert, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, je vous suis très reconnaissant d'être venus nous parler de certaines des parties très techniques du projet de loi concernant les outils dont la police a besoin pour enquêter sur les crimes en question, qui, je crois que nous sommes tous d'accord, sont graves, et comme l'un d'entre vous le disait, ont des effets dévastateurs sur les gens.
    Chef Chu, j'aimerais vous poser une question au sujet des processus d'application de la loi actuelle pour ce type d'infractions et des changements que vous envisagez si le projet de loi est adopté. Si vous me permettez de présenter un cas hypothétique, disons qu'une jeune personne discute par Internet avec une autre personne, mais n'a aucun moyen de vérifier son identité et que, après avoir discuté avec elle pendant un certain temps, la jeune personne envoie une image d'elle à l'autre, qui la menace ensuite de faire quelque chose avec cette image. La jeune personne se rend alors compte que la personne avec qui elle discutait n'est pas son ami, et elle est inquiète. Si elle en parle à ses parents ou à un enseignant et que la victime ou l'une de ces personnes s'adresse à la police en ce moment, que faites-vous? Que pouvez-vous faire pour établir l'identité de la personne qui possède l'image et qui menace d'en faire quelque chose?
(1205)
    Le scénario que vous évoquez est courant. Nos agents de liaison avec les écoles craignent les lundis matins, car les jeunes viennent dans leur bureau leur parler de ce qui s'est passé pendant la fin de semaine.
    Dans l'exemple que vous donnez de messages textes et de menaces proférées de cette façon, nous n'avons parfois pas de nom. La personne envoie des messages de façon anonyme, mais il se peut que nous connaissions son adresse IP, qui, comme je le disais plus tôt, peut venir d'un fournisseur en particulier. Dans ce cas, nous pouvons recourir aux dispositions du projet de loi C-13 pour rapidement et efficacement obtenir une ordonnance de communication nous permettant de déterminer d'où les messages sont venus et, au bout du compte, de trouver le suspect. Une fois que nous connaissons le suspect — ce peut être un prédateur vivant en Californie —, nous lançons une enquête internationale en recourant à une aide multilatérale.
    Il se peut toutefois que ce soit simplement un compagnon de classe et que la victime ne sache pas du tout qui lui a envoyé les messages. Si nous pouvons déterminer rapidement qui est la personne, nous pouvons l'empêcher de récidiver. Un avertissement suffit dans bien des cas. Si l'affaire est plus grave et qu'elle concerne des images intimes, encore une fois nous avons maintenant la capacité de porter des accusations moins graves que celle de distribution de pornographie juvénile, en appliquant plutôt les nouvelles dispositions du projet de loi C-13.
    D'accord. À l'heure actuelle, communiquez-vous avec les fournisseurs de services de télécommunications lorsque vous menez une enquête de ce genre?
    Oui, notre organisation a un point de contact central. Toutes les enquêtes en première ligne passent par une coordinatrice qui discute avec les représentants des entreprises de télécommunications.
    Avez-vous le droit d'obliger le fournisseur de services Internet à vous transmettre l'information pour l'instant?
    La seule façon pour nous de l'obliger à le faire, c'est de demander une ordonnance de communication à un juge.
    Est-ce que cela va changer dans le cadre des nouvelles dispositions législatives?
    Souvent, lorsque nous voulons seulement accéder à l'information de localisation, il est plus facile pour nous de rédiger une ordonnance de communication, si nous avons seulement à formuler des motifs de soupçonner, et, bien souvent, c'est un cul-de-sac. S'il s'agit d'un café Internet, c'est une bonne chose, car nous ne perdons pas trois jours à rédiger une ordonnance de communication complète si nous n'avons même pas besoin des autres données.
    Nous pouvons ensuite dire à l'entreprise de télécommunications que nous voulons qu'elle préserve les éléments de preuve. C'est un nouvel outil très puissant. À ce moment-là, si nous devons obtenir une ordonnance de production en bonne et due forme, les éléments de preuve existent toujours; ils n'ont pas disparu. Il faut maintenant plusieurs jours pour obtenir les mandats en question. C'est l'une des choses qui nous préoccupent au sujet d'une ordonnance de communication de nature générale, mais c'est ainsi.
    Vous avez mentionné le fait que les choses peuvent se passer très rapidement sur Internet. Croyez-vous — et je pose aussi la question à n'importe quel autre agent qui voudra bien y répondre — que les gens ont le droit de s'envoyer des messages de façon anonyme au moyen d'Internet?
    Je ne crois pas que les gens aient le droit d'être des criminels sur Internet, et, s'ils se livrent à des actes criminels, nous avons besoin de moyens de les identifier et de les empêcher, de les arrêter.
    D'accord. Si la jeune personne qui est la victime dans le scénario que je vous ai proposé s'adresse à vous et vous dit qu'elle craint que l'autre personne qu'elle ne connaît pas fasse quelque chose avec l'image d'elle qui est en sa possession et nuise grandement à sa réputation, estimez-vous que cette personne a le droit de demeurer anonyme — pas la victime, l'autre personne?
    Non, pas du tout, car une fois qu'il ne s'agit plus de taquineries amicales et que la personne a enfreint la loi en commettant un acte d'extorsion ou de fraude, nous devons pouvoir identifier le suspect.
    À l'heure actuelle, si vous demandez l'information à un fournisseur de services Internet et qu'il vous la remet, puis que vous communiquez avec la personne concernée pour lui dire d'arrêter d'utiliser l'image qu'elle a en sa possession, de ne rien faire de criminel avec cette image, est-ce que le fournisseur de services Internet devrait assumer quelque responsabilité que ce soit s'il se trouve que la victime avait mal interprété les intentions de l'autre personne, qui ne cherchait pas à commettre un crime?
(1210)
    Lorsque nous nous adressons à un fournisseur de services Internet, nous précisons les raisons pour lesquelles nous demandons l'information en question. Nous remplissons un formulaire, et la demande vise un objectif légitime d'application de la loi. Beaucoup de Canadiens souhaitent aider la police; il y a beaucoup de situations où des citoyens nous disent qui a loué un appartement la semaine précédente, par exemple, ou qui a loué une voiture la veille, et certains de ces fournisseurs de services de télécommunications nous viennent en aide, parce qu'ils ne souhaitent pas que leurs réseaux soient utilisés à des fins criminelles.
    Bien sûr. Cela ressemble un peu à la situation qui a été évoquée, je crois, par M. Pardy. Si je vois passer dans la rue une voiture dont le conducteur me semble être en état d'ébriété, je peux prendre en note le numéro de la plaque d'immatriculation et la transmettre à la police. Je suppose que la police peut également me demander de lui transmettre cette information. J'imagine que, si je vois une personne harceler mon voisin devant sa maison, je peux prendre en note le numéro de la plaque d'immatriculation de sa voiture garée dans l'entrée et le communiquer aux policiers, et que les policiers peuvent eux aussi se présenter chez moi et me demander de leur indiquer si j'ai vu une personne harceler mon voisin et de leur fournir toute information qui leur permettrait de l'identifier. Est-ce exact? D'accord.
    Mieux encore: supposons que vous avez dans votre sous-sol un appartement que vous louez à une personne que nous soupçonnons d'avoir commis un crime le mois précédent. Si nous vous demandons de nous indiquer son nom, vous pourriez, avant de vous exécuter, exiger que l'on dispose d'une ordonnance de communication. De telles requêtes exigent beaucoup de temps des policiers au fil des ans.
    Est-ce que les choses devraient être différentes en ce qui concerne les renseignements transmis par Internet?
    Les sociétés de télécommunications avertissent leurs clients, au moment où ils concluent une entente de services avec elles, qu'ils ne doivent pas utiliser leurs voies de communication à des fins criminelles.
    Merci.
    Nous avons entendu de bonnes réponses à d'excellentes questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Garrison, du Nouveau parti démocratique, qui est parmi nous aujourd'hui.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. Je connais bon nombre d'entre eux, vu que je fais partie du comité sur la sécurité publique, qui accueille régulièrement des hommes et des femmes en uniforme.
    Je sais qu'un vaste consensus a été établi au sein du Parlement quant à la nécessité de mesures visant à contrer la diffusion non consensuelle d'images. Cependant, le projet de loi C-13 porte sur bien d'autres questions, et c'est sur quelques-unes d'entre elles que je vais me concentrer.
    À coup sûr, les témoins que nous avons entendus aujourd'hui ont formulé des arguments qui militent en faveur de la modernisation du Code criminel et de la création d'outils permettant d'obtenir en temps opportun des informations dans le cadre d'enquêtes liées à la cybercriminalité. Cela dit, d'autres témoins et d'autres membres du public ont indiqué qu'ils étaient préoccupés par le fait que les outils fournis par le projet de loi C-13 étaient parfois d'une trop vaste portée. Je mettrai donc l'accent sur la question de l'accès légal.
    Parmi les nouveaux outils créés par le projet de loi C-13, mentionnons l'ordre de préservation et l'ordonnance de préservation de données. Je serais probablement prêt à admettre que ces outils peuvent être nécessaires, mais j'aimerais savoir ce qui justifie la modification de la norme de preuve. Pourquoi est-on passé des « motifs raisonnables de croire » aux « motifs raisonnables de soupçonner », à savoir une norme de preuve moins contraignante? Le nouvel outil ne fonctionnerait-il pas si la norme de preuve était plus élevée? Ne croyez-vous pas qu'il serait efficace même si la norme des « motifs raisonnables de croire » s'appliquait?
    Je suppose que ma question s'adresse principalement à M. Chu, en sa qualité de président de l'Association canadienne des chefs de police.
    Au moment de tenter d'obtenir un mandat ou une ordonnance de communication, on doit satisfaire à la norme des « motifs raisonnables de croire », laquelle, à juste titre, est très contraignante. C'est une norme de cet ordre que nous devons remplir afin d'accéder à des renseignements personnels. Si nous décidons d'attendre un peu avant de tenter d'obtenir une ordonnance et que nous poursuivons nos travaux, il se peut que nous constations que, en fin de compte, nous n'avons pas besoin d'accéder à tous ces renseignements. En fait, cela nous permettra de faire progresser plus rapidement notre enquête.
    Le fait d'être incapable de satisfaire à cette norme plus élevée ne mènerait-il pas au même résultat? En d'autres mots, si vous êtes incapable de satisfaire à la norme plus élevée, c'est peut-être que l'affaire dont vous vous occupez ne mènera à rien.
    Une fois que les données ont été préservées, nous pouvons mener une enquête plus poussée. Nous pouvons interroger un plus grand nombre de témoins. Nous pouvons examiner d'autres facettes de l'affaire, et si nous constatons que nous ne disposons pas de tous les renseignements qui nous permettraient d'obtenir une ordonnance complète de communication, les données seront supprimées, et il n'y aura aucune intrusion dans la vie privée de la personne concernée. Toutefois, si nous rassemblons les éléments de preuve requis pour convaincre un juge du bien-fondé de notre démarche, nous pourrons accéder aux données probantes, vu qu'elles auront été préservées — c'est la suppression de ces données qui nous préoccupe.
    D'accord, mais la même chose ne se passe-t-elle pas dans le cadre de tous les autres types d'enquêtes policières? Les policiers ne doivent-ils pas toujours répondre à une norme de preuve plus élevée avant qu'ils puissent aller de l'avant avec les autres volets de leur enquête? Selon vous, s'agit-il là d'une difficulté courante, ou alors d'une difficulté propre aux enquêtes liées à la cybercriminalité?
    M. Oliver souhaitera peut-être intervenir à ce sujet.
    J'aimerais d'abord ajouter à ce qui vient d'être dit que le critère des « motifs raisonnables de soupçonner » n'est pas étranger au Code criminel. En fait, des dispositions du Code criminel s'assortissent déjà de ce critère. Cependant, d'autres dispositions s'accompagnent du critère des « motifs raisonnables de croire », vu qu'elles portent davantage atteinte à la vie privée.
    À mon avis, dans le cadre d'affaires comme celles dont nous parlons, les éléments importants sont ceux qui ont trait à la préservation. Une ordonnance de préservation ne nous permet pas de recueillir des renseignements — elle exige simplement que les données pertinentes soient préservées en attendant que nous ayons rassemblé un plus grand nombre d'éléments de preuve relatifs au crime que nous soupçonnons d'avoir été commis. Par la suite, grâce à une ordonnance de communication en bonne et due forme, nous pourrons accéder aux données probantes qui auront été préservées.
    Par contre, d'autres dispositions, notamment celles touchant l'obtention, auprès d'une institution financière, de renseignements concernant un compte bancaire et son titulaire, s'assortissent du critère des « motifs raisonnables de soupçonner ». À l'heure actuelle, les dispositions relatives aux dispositifs de repérage et aux enregistreurs de numéro de téléphone sont également visées par ce critère, ce qui cadre avec les nouveaux outils institués par le projet de loi, à l'exception... En fait, le critère lié à l'une des dispositions a été accru — je fais allusion à la disposition concernant un dispositif qu'une personne porte normalement sur elle-même. Je pense que les rédacteurs du projet de loi ont reconnu que cela risquait de porter atteinte à la vie privée, et qu'ils ont donc accru la norme de preuve à celle des « motifs raisonnables de croire ».
(1215)
    J'ai une meilleure analogie à vous proposer afin de répondre à votre question.
    Supposons que nous devions fouiller une maison, mais que nous devions, au préalable, obtenir un mandat de perquisition. Dans l'intervalle, des policiers pourraient demeurer présents sur les lieux afin de s'assurer que tout reste en place jusqu'à ce que leurs collègues reviennent munis du mandat en question. Toutefois, si les éléments probants à recueillir sont de nature électronique, il est possible de les faire disparaître.
    D'accord.
     Il semble que le projet de loi C-13 comporte des dispositions qui permettraient à des personnes autres que des agents de la paix d'utiliser quelques-uns des outils en question. M. Chu a donné l'exemple des maires, mais certaines dispositions du texte législatif sont plus explicites. Les dispositions relatives aux personnes pouvant accéder à certains de ces outils mentionnent les fonctionnaires publics désignés pour l'application ou l'exécution de toute loi fédérale... Cela est énoncé à quelques endroits. Je suppose que je vais enfoncer une porte ouverte, mais je vous poserai tout de même ma question: De telles dispositions sont-elles réellement nécessaires? La définition d'« agents de la paix » englobe toutes les personnes pertinentes, de sorte que je ne suis pas certain de comprendre pourquoi le projet de loi étend cela à toute autre personne responsable de l'administration d'une loi fédérale. Cela ne nuirait pas à votre travail. La définition d'« agents de la paix » englobe assurément toutes les personnes pertinentes.
    Nous ne pouvons parler que de ce qui concerne l'exécution de la loi.
    Eh bien, je vous pose en quelque sorte une question dont la réponse est évidente — la définition d'« agents de la paix » — qui, en fait, est d'une très vaste portée — englobe quiconque serait en mesure de recourir à l'un de ces pouvoirs...
    Oui, cela engloberait les membres de l'ACCP.
    D'accord.
    J'ai une dernière question à vous poser, et il se peut que vous me donniez une réponse semblable à celle que vous venez de fournir. Le projet de loi semble accroître la portée de l'immunité accordée aux fournisseurs de services qui communiquent volontairement des données. Ma question porte sur la raison d'être de ces dispositions; vous ne serez peut-être pas en mesure d'y répondre, mais je vous la pose quand même: pourquoi accorder une immunité d'une vaste ampleur aux fournisseurs de services qui communiquent volontairement des données, vu que les policiers disposent déjà d'un outil leur permettant de les obliger, sur demande, à préserver ces données? Cette immunité était peut-être nécessaire lorsque les policiers n'avaient pas le pouvoir d'exiger la préservation des données, mais à présent qu'ils détiennent ce pouvoir, pourquoi cette immunité est-elle nécessaire?
    Nous croyons que ces dispositions relatives à l'immunité existent déjà. Leur inscription dans la loi est une simple mesure d'ordre administratif. La loi et la jurisprudence prévoient déjà cette immunité.
    Ainsi, monsieur Oliver, vous croyez que cela n'aura pas véritablement d'incidence sur ce qui se passe sur le terrain?
    Je reprendrai à mon compte les propos tenus par M. Chu selon lesquels les dispositions en question se trouvent déjà dans le Code criminel.
    J'ajouterai simplement un commentaire qui ne concerne pas expressément la question dont nous parlons. Le modèle canadien de services de police est fondé sur la notion selon laquelle la police et la collectivité ne font qu'un. La réalité, c'est que la police ne peut pas fonctionner en vase clos ni imposer partout sa volonté. Dans le cadre de toutes ces enquêtes, elle doit s'appuyer sur la coopération des citoyens, des témoins et des tierces parties. On a évoqué plus tôt l'exemple d'un vol à main armée commis dans un centre commercial — il se peut que des témoins aient fourni des renseignements à la police, et que la direction du centre commercial lui ait transmis un enregistrement vidéo de la scène. Nous tentons d'obtenir tous ces renseignements en temps opportun, surtout s'il s'agit d'un groupe de voleurs en série, car dans un tel cas, nous voudrons mettre le grappin sur ces membres le plus rapidement possible.
    Nous croyons que la coopération des citoyens est un élément fondamental du maintien de l'ordre au Canada. Nous établissons avec les citoyens un partenariat en matière de sécurité communautaire.
    Merci beaucoup.
    Merci de ces questions et de ces réponses.
    Le prochain intervenant est M. Brown, du Parti conservateur.
    Je vais céder une partie de mon temps à mon collègue, Kyle Seeback, qui a besoin, je crois, d'une trentaine de secondes.
    C'est bien le cas. Je vous remercie, Patrick.
    M. Garrison a posé des questions à propos de l'ordre de préservation, et il a soulevé des préoccupations concernant la norme de preuve moins élevée des « motifs raisonnables de soupçonner ». J'estime que vos réponses étaient très claires, mais j'aimerais simplement obtenir des précisions.
    En vertu d'un ordre de préservation, les données sont conservées pendant un certain temps, et si les policiers veulent y accéder, ils doivent obtenir une ordonnance de communication, laquelle est assujettie à la norme de preuve plus élevée des « motifs raisonnables de croire », n'est-ce pas? Le critère moins élevé ne s'applique qu'à la préservation des données qui pourraient être ultérieurement utilisées dans le cadre d'une enquête, est-ce exact?
(1220)
    C'est exact.
    C'est exact, en fonction du type d'information que l'on souhaite obtenir.
    S'il s'agit non pas de renseignements personnels, mais simplement du saut ou de la communication entre différents réseaux, nous nous appuyons sur d'autres nouvelles dispositions contenues dans le projet de loi, et nous pourrions devoir satisfaire à la norme des « motifs raisonnables de soupçonner ». Cependant, d'autres dispositions s'assortissent du critère des « motifs raisonnables de croire ».
    Tout dépend des circonstances et de... Les dispositions relatives à ces outils sont claires — elles indiquent très précisément ce que l'on est autorisé à faire. Elles définissent très clairement la nature et la portée des « données de transmission ».
    Excellent. Merci.
    Merci.
    Je suppose que la rapidité à laquelle la technologie évolue constitue une des difficultés auxquelles nous nous heurtons. À la lumière des témoignages que le comité a entendus, je crois qu'il est juste de dire que les actes de cyberintimidation sont malheureusement de plus en plus fréquents. Lorsqu'il est question des outils qui nous permettent de communiquer très rapidement avec les autres, on songe tout de suite à Facebook et, évidemment, à Twitter, mais selon ce que me disent des cousins et des amis plus jeunes que moi, de nouveaux moyens de communication font sans cesse leur apparition, et ils sont utilisés à une échelle proprement ahurissante. Je viens de jeter un coup d'oeil à l'application Snapchat — il paraît qu'elle diffuse chaque jour quelque 700 millions de photos et de vidéos. Les adolescents représentent son public cible. Est-ce que le projet de loi vous confère des outils qui vous permettront de suivre l'évolution de la technologie? Les problèmes auxquels nous devrons faire face dans quelques années pourraient être encore plus difficiles à régler que ceux auxquels nous sommes actuellement confrontés. Nous savons que cette application est certainement dotée d'impressions; vous avez fait allusion aux préoccupations liées à la diffusion d'images intimes, et quelques-uns des utilisateurs de cette application utilisent évidemment des outils de ce genre. Comment vous y prenez-vous pour suivre l'évolution de la technologie? Est-ce que le projet de loi vous permet de le faire?
    Le projet de loi constitue assurément un pas dans la bonne direction. Il modernise de nombreuses parties du Code criminel qui, en fait, décrivent la nature du crime commis dans le cyberespace. Il est possible que, dans cinq ans, nous devions demander au Parlement d'adopter de nouvelles dispositions législatives, mais pour l'instant, il s'agit d'un bon début.
    Nous tentons d'établir le profil du cyberintimidateur. Il y a certainement divers points de vue sur la question de la cyberintimidation chez les jeunes. Pourriez-vous aider le comité à établir le profil du cyberintimidateur moyen en nous fournissant des renseignements sur son âge et le lieu où il se trouve?
    Il est facile de répondre à cette question. Lorsque vous étiez en septième année, l'intimidateur de votre classe était facile à repérer. Aujourd'hui, n'importe quel élève d'une classe de septième année peut être l'intimidateur. Voilà en quoi consiste la différence.
    Sans égard au sexe, à l'âge ou au lieu...?
    C'est exact.
    Dans le passé, l'intimidateur s'attaquait à ses victimes en personne — on savait à qui l'on avait affaire. Aujourd'hui, il peut s'agir de l'élève le plus timide, le plus réservé et le plus respectueux, mais qui a subi un affront ou qui est en colère, ou il peut s'agir d'un groupe de filles qui n'aiment pas telle ou telle élève parce qu'elle s'habille de telle ou telle façon. Voilà des exemples de situations réelles auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui. Si la prévention et l'intervention précoces revêtent toujours une si grande importance, c'est que, dans la majeure partie des cas, nous parvenons à découvrir l'identité de l'intimidateur, mais cela n'aboutit à aucune accusation pénale. Le dépôt d'accusation dans de tels cas finirait par engorger le système de justice pénale. En tant qu'agents de la paix, notre principal objectif consiste à tenter de prévenir les crimes.
    J'ajouterai uniquement que, vu qu'il commet ses actes au moyen d'Internet, l'intimidateur peut se trouver n'importe où dans le monde. Il peut s'agir d'un prédateur qui se fait passer pour un jeune de 14 ans et qui réussit à engager une relation avec un autre jeune, à échanger avec lui des images intimes, qui obtient de lui, par extorsion, des images encore plus suggestives et qui menace de les diffuser sur Facebook s'il ne répond pas à toutes ses demandes.
    Quelque 700 millions d'images sont diffusées chaque jour au moyen de cette application. C'est phénoménal.
    Le témoin qui se trouve à Halifax souhaite intervenir.
    Monsieur Blais, vous avez la parole.
    Merci.
    J'aimerais ajouter quelque chose aux propos tenus par le commissaire adjoint concernant les frontières géographiques. Nous devons cesser de penser que l'intimidateur se trouve dans la même ville ou, du reste, dans la même province que sa victime. Comme je l'ai expliqué plus tôt, les jeunes d'aujourd'hui sont nés à l'ère numérique, contrairement à nous, qui devons nous y adapter. Mon fils de 11 ans, qui s'y retrouve avec beaucoup plus d'aisance que moi et est capable d'utiliser tous les outils technologiques qui se trouvent dans notre maison. Son réseau d'amis s'étend bien au-delà des frontières canadiennes et s'étend à l'Europe et à bien d'autres régions. Vu l'anonymat que procurent Internet et d'autres technologies, il est très difficile de savoir à qui l'on a affaire. Il est très important d'être conscient du fait que, au cours des années à venir, la technologie continuera de prendre de l'ampleur, d'évoluer, de se complexifier et de se perfectionner, et que cela rendra les choses encore plus difficiles. Je crois que le chef Chu a absolument raison de dire que dans quelques années, nous devrons demander que l'on nous fournisse de nouveaux outils.
(1225)
    Merci de ces questions et de ces réponses.
    Le prochain intervenant est M. Jacob, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'être parmi nous, aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à MM. Chu, Pardy, Oliver et Blais. Je suis très heureux d'apprendre que la prévention est très importante pour vous. Selon l'adage populaire, on dit qu'il vaut mieux prévenir que guérir. Cela reste vrai en 2014.
    En collaboration avec les écoles et les organismes communautaires, quels sont les principaux programmes que vous avez mis sur pied dans vos coins de pays respectifs?
    Monsieur Chu, nous allons débuter par vous.

[Traduction]

    Nous avons établi un solide partenariat avec les conseils scolaires de notre région. Nous envoyons régulièrement des dépliants bilingues aux parents multilingues. Nous avons créé un partenariat avec Telus Cares, qui fournit des services dans notre communauté. Là encore, cela permet de sensibiliser les gens à l'égard des protocoles à utiliser et des mesures de sécurité à prendre lorsqu'on navigue sur Internet.
    Nous aiguillons aussi les gens vers plusieurs sites Web comme NeedHelpNow.ca et stopcyberbullying.org, de même que vers de nombreuses autres merveilleuses ressources.
    Je vais laisser mon collègue répondre à votre question, vu que sa connaissance de nos initiatives de prévention est meilleure que la mienne.
    Partout au pays, il est extrêmement important pour la GRC de jouer un rôle dans la collectivité, et surtout auprès des jeunes de nos collectivités. C'est la raison pour laquelle la GRC a créé un certain nombre de programmes par elle-même ou en collaboration avec diverses organisations.
    Un peu plus tôt, durant son exposé, le commissaire adjoint Oliver a mentionné un partenariat avec PREVnet — le Réseau pour la promotion de relations saines et l'élimination de la violence —, de même qu'un partenariat avec l'Université de Victoria dans le cadre du programme WITS. Ces activités ne font que s'ajouter à une kyrielle d'autres initiatives que nous avons lancées. Nous avons conçu un programme éducatif que nos membres utilisent lorsqu'ils se rendent dans des salles de classe de toutes les régions du pays et dont les enseignants peuvent aussi se servir. En outre, tout le matériel didactique dont nous disposons à propos de la cyberintimidation et d'autres questions touchant les jeunes peut être consulté sur notre site Web. Ce matériel a été conçu à l'intention non seulement de nos membres, mais également de la population et des organismes communautaires. Toutes ces ressources sont à leur disposition.
    Par exemple, nous offrons aux jeunes des documents d'autoévaluation. L'un d'entre eux s'intitule « Élimine la cyberintimidation de ta vie en ligne! », et un autre s'appelle « L'intimidation — Est-ce que j'ai été victime d'intimidation ?» En outre, nous avons établi des liens avec une kyrielle d'organisations, notamment la Croix-Rouge, qui fournissent d'excellents documents sur l'aide et les ressources accessibles partout au pays, et ce, non seulement aux personnes qui veulent faire de la prévention, mais également aux jeunes eux-mêmes. Il ne s'agit là que de quelques-unes des mesures prises par la GRC.
    Tous nos membres de première ligne doivent jouer un rôle au sein de la collectivité. Ainsi, dans les provinces contractantes, c'est-à-dire partout au pays où nous faisons essentiellement office de police provinciale, à savoir dans toutes les provinces sauf l'Ontario et le Québec, nos membres s'investissent dans la collectivité et les écoles afin de régler les problèmes de ce genre.
    Monsieur Pardy, voulez-vous ajouter quelque chose au nom de la PPO?
    Oui. Je vais tenter de vous donner un aperçu des programmes mis en place en Ontario. Tout d'abord, je vous parlerai de la stratégie provinciale que nous avons mise en oeuvre afin de prévenir la violence à l'endroit des enfants.
    Cette stratégie, qui met à contribution 18 services de police de l'Ontario, a été lancée en 2006. Elle a permis de mener des enquêtes à propos de plus de 22 000 incidents de violence sexuelle faite à des enfants, et elle a donné lieu au dépôt de plus de 8 000 chefs d'accusation et à plus de 2 500 arrestations. Il s'agissait de tirer parti de notre force collective de manière à ce que nous puissions, en tant que police communautaire, faire porter nos efforts sur les problèmes communs à toutes les administrations. Comme on l'a dit plusieurs fois aujourd'hui, le crime dont nous parlons ne connaît aucune frontière. Cette stratégie met davantage l'accent sur l'application de la loi.
    À l'échelon communautaire, nous disposons d'agents qui se rendent dans les écoles et d'agents qui fournissent des services communautaires. Ils sont en contact permanent avec les médias. Nous considérons que les médias sont des partenaires essentiels au moment de communiquer à l'ensemble de la population des messages à propos de la sécurité. Quant à nos agents qui se rendent dans les écoles, ils travaillent sur place auprès des jeunes. Au moyen d'affiches et de dépliants, ils les informent continuellement à propos d'un merveilleux outil mis à leur disposition, à savoir AidezMoiSVP. Il s'agit d'un site Web très intuitif qui contribue à orienter les jeunes, qui leur fournit de très brèves réponses à leurs questions et qui leur fournit des conseils sur la manière de s'attaquer à ce problème.
    J'ai mentionné plus tôt le site Web youthconnected.ca, qui a été créé par des adolescents eux-mêmes dans le cadre d'un programme entièrement financé par la PPO, la Fondation pour la jeunesse de la PPO et quelques partenaires du secteur privé. Il fournit notamment des plans de leçon que les enseignants et les parents peuvent utiliser afin d'apprendre aux enfants à naviguer sur Internet de façon plus sûre.
    Une Journée de la sécurité sur Internet a lieu chaque année, et les événements de ce genre nous permettent d'informer constamment le public quant à la manière de naviguer en toute sûreté dans le cyberespace. Tout juste hier, à Brockville, dans le cadre de la semaine de la police, on a installé un kiosque dans un centre commercial afin de fournir de l'information concernant principalement l'utilisation sûre d'Internet et la manière d'orienter et d'éduquer nos enfants quant aux pratiques à adopter à l'égard de divers phénomènes, notamment les « sextos ».
    Nous menons bien d'autres activités, mais nous mettons actuellement l'accent sur la formation de nos agents de première ligne. Nous voulons qu'ils soient en mesure de prodiguer de bons conseils aux parents, aux enseignants et aux adolescents eux-mêmes de façon à éviter qu'ils soient induits en erreur et se sentent démunis et pour nous assurer que nous faisons notre part pour régler le problème.
    Cela dit, de façon plus générale, nous sommes conscients du fait que, en raison des coûts liés au maintien de l'ordre, nous devons tirer davantage parti du partenariat que nous avons établi dans le cadre du plan d'action pour la prévention du crime en Ontario et mobiliser davantage les intervenants au sein de la collectivité. Nous ne parviendrons pas à régler seuls ces problèmes. Nous sommes là pour appliquer la loi. Nous pouvons faire preuve d'excellence en matière d'enquête. Toutefois, si nous ne disposons pas de partenaires à tous les échelons de la collectivité, nous ne serons pas en mesure de nous acquitter de notre mandat consistant à assurer la sécurité de nos collectivités.
(1230)
    Chef Blais, la question s'adressait également à vous, et vous avez peut-être une réponse à nous fournir.

[Français]

    Monsieur Jacob, à l'instar d'autres corps policiers du Canada, nous avons des officiers de liaison dans les écoles et des officiers de ressources communautaires qui, eux, mènent des campagnes de sensibilisation sur la cyberintimidation. Comme l'a indiqué mon confrère de la Police provinciale de l'Ontario, la semaine dernière, c'était la Semaine nationale de la police.
    Ces dernières années, on a observé un changement dans ce que nous disent les gens lors de ces événements, que ce soit dans un centre d'achat ou dans les écoles. On n'y parle plus seulement des méfaits de la drogue, mais également des méfaits de la cyberintimidation, du sexting, etc.
    Dans la formation qui est donnée à l'interne à nos policiers et policières, nous axons nos interventions sur le traumatisme, afin éviter la victimiser à nouveau des victimes.
    Nous sommes très présents sur les médias sociaux comme Facebook et Twitter. Nous avons réduit notre présence sur les sites Web traditionnels pour assurer une présence continue sur Twitter et Facebook. Je sais que plusieurs corps policiers du Canada font de même.
    Dans une certaine mesure, nous sommes très chanceux. Au niveau provincial, il y a l'unité CyberSCAN qui mène des enquêtes aboutissant à des conséquences dites pénales et non criminelles. C'est la province qui est chargée de cette unité.
    Voilà la situation ici, à Halifax.
(1235)

[Traduction]

    Merci, chef.
    Le prochain intervenant est M. Seeback, du Parti conservateur.
    L'une des autres préoccupations qui ont été soulevées à l'intention des membres du comité tient à la définition de « données de transmission ». Je crois que M. Fraser y a fait allusion. Il a indiqué que la définition énoncée dans le projet de loi C-13 était d'une portée beaucoup plus vaste que celle du Code criminel qui s'applique aux appels téléphoniques.
    Je crois comprendre que les données de transmission indiquent seulement le type, la date, l'heure, le point d'envoi, la destination ou le point d'arrivée d'une communication. Elles ne révèlent pas son contenu en tant que tel. En outre, il n'est pas possible d'accéder à toutes les métadonnées. Si j'ai bien compris, c'est de cette façon que les données de transmission sont définies dans le Code.
    Est-ce que l'un d'entre vous a des commentaires à fournir sur les données de transmission et sur la question de savoir si, comme il a été avancé, leur définition est d'une trop vaste portée?
    Nous croyons comprendre que les données de transmission... en fait, les dispositions du projet de loi indiquent très clairement que les données de transmission « ne révèlent pas la substance, le sens ou l'objet de la communication », qu'elles doivent être divulguées à la police et qu'il n'est pas possible d'obtenir une ordonnance de communication ou d'utiliser ces dispositions afin d'accéder au contenu de la communication. À cette fin, on doit recourir à d'autres moyens, notamment à une ordonnance générale de communication, dont l'obtention est assujettie à une norme de preuve plus élevée.
    Si vous voulez obtenir de plus amples renseignements à propos de ces données de transmission, quelle procédure devez-vous suivre?
    Nous devrions obtenir un mandat de perquisition afin de mettre la main sur l'appareil contenant les données et en analyser le contenu, et il nous faudrait obtenir une ordonnance générale de communication afin d'obtenir des données historiques.
    Quelle serait la norme de preuve applicable dans un tel cas?
    L'obtention d'une ordonnance générale de communication est assujettie à une norme de preuve plus élevée, à savoir celle des « motifs raisonnables de croire ».
    Et vous devez également obtenir une autorisation judiciaire.
    Exact. Toutes les dispositions du projet de loi sont fondées sur l'obtention préalable d'une autorisation judiciaire. D'après ce que nous croyons comprendre, la définition des données de transmission et les normes régissant son application sont l'équivalent moderne des dispositions touchant les appels téléphoniques pour ce qui est du type et du point d'envoi de la communication. Elles sont d'une portée un peu plus vaste en ce qui a trait au volume et au type, mais la majeure partie du reste est... en règle générale, lorsque nous obtenons une ordonnance en vue d'accéder à des renseignements liés à une communication téléphonique, c'est pour obtenir de l'information quant à la direction, à la date, à l'heure, au point d'envoi et à la destination de la communication.
    Excellent. C'est tout.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre Mme Péclet, du Nouveau Parti démocratique.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager le temps dont je dispose avec mon collègue, M. Garrison.
    Ma question s'adresse à M. Oliver. L'un des témoins que nous avons entendus a soulevé des doutes à propos de la section principale du projet de loi. Il a indiqué qu'elle posait une difficulté, et comme il a parfaitement expliqué en quoi elle consistait, je vais vous lire les propos qu'il a tenus. Il a dit que la véritable difficulté concernait les tiers qui ne connaissent pas la personne figurant sur l'image et n'ont aucune idée des circonstances où elle a été prise.
    Ainsi, les dispositions du projet de loi énoncent une norme relative à l'insouciance qui n'est pas suffisamment élevée. Que devrions-nous faire à cet égard? J'aimerais savoir si vous croyez que l'on devrait revoir la section en question et, par exemple, rehausser la norme, vu que des tiers pourraient se trouver dans une situation où ils ne possèdent aucune information à propos de l'image. Les dispositions proposées portent ce qui suit: « sans se soucier de savoir si [...] ». Cette norme relative à l'insouciance est-elle trop peu élevée?
    Monsieur Chu, avez-vous des commentaires?
    Cette norme fait intervenir un critère lié à la négligence criminelle, dans la mesure où il s'agit de savoir si la personne a commis sciemment l'acte ou si elle a fait preuve d'insouciance en le commettant. Au moment de déposer des accusations, nous devons, à tout le moins en Colombie-Britannique, satisfaire à la norme de l'approbation de l'inculpation et à celle de la probabilité raisonnable d'une condamnation. Il revient ensuite au juge de déterminer si, dans les faits, le comportement insouciant était involontaire ou s'il était délibéré à un point tel qu'il constituait une infraction criminelle.
(1240)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Le projet de loi C-13 comporte une foule de dispositions. L'une d'entre elles a pour effet d'ajouter des groupes désignés à ceux figurant dans la section sur les crimes haineux du Code criminel. Comme le chef Chu le sait, mon projet de loi d'initiative parlementaire, à savoir le projet de loi C-279, a été adopté par la Chambre il y a plus d'un an, et depuis, il est bloqué à l'étape de l'examen par le Sénat.
    Nous avons indiqué que, comme on s'apprête à réécrire cette section du Code criminel, nous avions l'intention de proposer au comité un amendement visant à ce que l'identité sexuelle figure dans la section des crimes haineux du Code criminel, ce qui constitue la moitié de l'objectif poursuivi par mon projet de loi d'initiative parlementaire.
    Je vais poser une question simple au chef Chu. La police est souvent appelée à s'occuper de problèmes liés à la violence dans les rues. Les personnes transgenres sont plus souvent victimes de violence que les autres. J'aimerais savoir si vous croyez que l'on pourrait ajouter au projet de loi des dispositions en vue de les protéger.
    Oui, nous serions favorables à cela.
    Y a-t-il d'autres témoins qui...?
    Je suis du même avis.
    À ma connaissance, tous ceux qui sont chargés d'assurer le maintien de l'ordre dans les rues reconnaissent que les personnes transgenres sont plus souvent victimes d'actes de violence que les autres.
    Je me réjouis que des représentants de la police soutiennent ma proposition. Lorsqu'il s'est présenté ici, le ministre a indiqué qu'il ne s'y opposait pas.
    Il est à espérer que des dispositions de ce genre seront ajoutées au projet de loi du gouvernement. Je vous remercie.
    Le membre n'a pas utilisé tout le temps dont il disposait, et je sais que M. Jacob a une autre question à poser.
    Allez-y, monsieur Jacob.

[Français]

    J'aimerais savoir quel pourcentage approximatif de votre travail ou de votre budget est alloué à la prévention.
    Nous allons commencer par M. Chu et passer ensuite à MM. Armstrong, Pardy et Blais.

[Traduction]

    Il s'adresse aux quatre groupes de témoins.

[Français]

    Je veux savoir quel est ce pourcentage, approximativement.

[Traduction]

    La prévention du crime représente une part non négligeable du travail que doit accomplir chaque policier. Il est difficile d'indiquer la proportion de son travail que cette tâche représente. Par exemple, pendant une intervention, lorsqu'il remplit son rapport, un agent de première ligne peut transmettre à la victime des renseignements à propos de mesures préventives. Même nos agents de liaison avec les écoles doivent consacrer une part considérable de leur temps à faire de la prévention; ils doivent aussi, bien entendu, s'acquitter de leurs tâches d'enquêteur.
    La prévention est un élément central du maintien de l'ordre à l'échelle du pays. Une part considérable de notre travail consiste à faire de la prévention.

[Français]

    Est-ce qu'on peut dire que ça représente à peu près 25 %?

[Traduction]

    Vous voulez obtenir un pourcentage approximatif?
    Est-ce que les représentants de la PPO ont un pourcentage approximatif à fournir?
    Je dois dire que toutes nos activités, de l'application de la loi aux conférences dans les écoles, constituent une forme de prévention. Il est extrêmement difficile de quantifier cela.
    Nous disposons d'agents qui sont expressément chargés de faire de la prévention dans le cadre d'un programme sur les ressources scolaires, nous disposons d'agents chargés de fournir des services communautaires, nous disposons d'une unité qui se consacre aux problèmes liés aux jeunes et d'une autre qui s'occupe des relations avec les médias, mais pour ce qui est de quantifier cela... Je dirais 100 p. 100.
    Monsieur Blais, avez-vous des observations supplémentaires à formuler en réponse à la question?

[Français]

    Monsieur Blais, nous vous écoutons.
    C'est un peu difficile à quantifier. M. Pardy n'a pas tort lorsqu'il dit que la prévention des crimes représente en quelque sorte 100 % de notre travail. C'est vous, je crois, qui avez dit que la prévention, en matière criminelle, avait une grande valeur. Il en va de même pour la maladie, quand on est capable de la prévenir là où c'est possible. Pour chaque corps de police, des policiers sont affectés à la prévention proprement dite. Pour ce qui est des montants, on parle ici d'au moins 10 % de nos effectifs, et il y a évidemment des montants consacrés à cela. Quoi qu'il en soit, ça peut varier entre 10 % et 100 %.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nos amis de la GRC seront les derniers à faire des commentaires à ce sujet.
    En ce qui a trait aux coûts, je vous dirai que nous finançons assurément des programmes dont l'objectif consiste à mener des activités de prévention. Toutefois, en ce qui concerne les coûts liés aux personnes, je dois abonder dans le sens des autres intervenants et indiquer que la prévention est une préoccupation constante de nos membres — toutes les activités qu'ils mènent dans la collectivité sont axées sur la prévention. Bien entendu, ils participent à des programmes de prévention en bonne et due forme et ils prennent des mesures qui visent expressément à prévenir des problèmes dans les collectivités, mais la prévention fait partie de tout ce qu'ils font. Je vous répondrai donc moi aussi que la proportion est de 100 p. 100.
(1245)
    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier les témoins d'avoir été parmi nous aujourd'hui. Leurs propos ont été très instructifs, et ils ont fourni de très bonnes réponses à nos questions.
    Comme vous le savez, nous disposons d'une semaine de relâche durant laquelle nous retournerons dans nos circonscriptions. Nous reprendrons ensuite notre étude du projet de loi, et ce, jusqu'à la mi-juin environ, et à ce moment-là, si tout va bien, nous procéderons à l'étude article par article à la Chambre. Voilà à quoi ressemblera le calendrier de la suite des travaux du comité concernant le projet de loi.
    Avant de lever la séance, je dois vous demander d'approuver un budget pour des dépenses de témoins. Un certain nombre de témoins se sont présentés devant vous, et d'autres le feront. Le montant est d'environ 18 000 $. Le greffier m'a indiqué qu'il s'agit d'un montant un peu plus élevé que celui dont nous avons habituellement besoin, mais comme nous ne savons pas d'où viendront ces témoins, il préfère jouer de prudence.
    Est-ce que quelqu'un veut proposer l'adoption du budget?
    J'en fais la proposition.
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup.
    Merci de votre présence.
    La séance est levée.
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