:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Monsieur le président, membres du Comité, je souhaite d'abord vous remercier de m'avoir donné l'occasion de me présenter devant vous pour discuter du NORAD. Je voudrais également transmettre les salutations de l'amiral Gortney, commandant du NORAD, qui attend avec impatience votre visite au quartier général du NORAD-USNORTHCOM au début de mai.
[Traduction]
Le 12 mai 2016, le NORAD célébrera son 58e anniversaire. Notre histoire a été marquée par le succès et un excellent service envers le Canada et les États-Unis. Notre commandant aime nous rappeler que le NORAD a été mis sur pied au moment de la guerre froide et que l'organisation a élargi sa mission pour mettre l'accent sur la menace interne à la suite des événements du 11 septembre.
Les attentats du 11 septembre constituent un point tournant de notre histoire, et le NORAD a été en mesure d'évoluer et de s'adapter comme il l'a toujours fait en fonction des préoccupations émergentes en matière de sécurité qui touchent directement ou indirectement l'Amérique du Nord.
Nous ne travaillons pas en vase clos. La nature de nos opérations exige un niveau élevé de coordination avec les organismes d'application de la loi et de sécurité nationale des deux côtés de la frontière. Notre niveau élevé d'intégration avec le commandement de l'Amérique du Nord, notre commandement américain jumelé, et la coordination avec le Commandement des opérations interarmées du Canada entraînent des répercussions continentales qui dépassent de loin le mandat principal actuel du NORAD qui consiste à protéger l'espace aérien de l'Amérique du Nord.
Notre perspective est unique, car nous anticipons volontairement les problèmes potentiels en matière de sécurité sur nos territoires, et notre centre d'intérêt est de nature générale. Ainsi, nous sommes témoins de nombreuses sources de préoccupation qui méritent notre attention. Le spectre des menaces et des menaces potentielles à la sécurité s'étend des capacités militaires de l'État-nation traditionnelles aux personnes qui ont accès à des technologies de plus en plus destructives.
Les grandes puissances se font de nouveau concurrence. II s'agit maintenant d'un point de vue répandu aux États-Unis. Le comportement des adversaires potentiels et leurs efforts continus pour mettre sur pied des capacités militaires avancées, particulièrement celles qui peuvent atteindre l'Amérique du Nord, revêtent une importance cruciale pour nous. Par exemple, cette année, la Russie a été en mesure d'envoyer des missiles de croisière à charge classique de longue portée comparables aux systèmes occidentaux. Effectivement, cette capacité a été exposée alors que la Russie a utilisé des bombardiers lourds, des navires de surface et un sous-marin pour lancer des missiles de croisière conventionnels perfectionnés pour atteindre des objectifs en Syrie. Lorsque cette capacité est combinée à une activité d'aéronefs à long rayon d'action près de nos zones d'identification de défense aérienne au cours des dernières années, cela suscite notre attention.
En outre, nous sommes préoccupés par les extrémistes violents et la menace constante que ces derniers représentent pour l'aviation commerciale et de plaisance. Nous sommes inquiets au sujet des missiles balistiques et du développement des capacités connexes.
Nos missions actuelles comprennent la surveillance et le contrôle aérospaciaux ainsi que les alertes maritimes dans le cadre de la défense de l'Amérique du Nord. De concert avec nos commandements homologues, nous observons le flux de menaces qui nous oblige à adapter notre ouverture et à porter attention à d'autres domaines tels que la cybernétique.
Je ne veux pas crier au loup, bien sûr. Cependant, bien que le pire scénario visant une attaque conventionnelle directe contre l'Amérique du Nord demeure peu probable, le commandant du NORAD, au nom des deux gouvernements, est tenu de se préparer à cette éventualité et de contribuer à décourager la tenue d'une telle attaque. Nous menons les missions du NORAD au moyen d'un spectre couvrant les plans d'action les plus probables et les plans d'action les plus dangereux.
Nous nous faisons un point d'honneur d'être aussi efficaces que possible, en fonction de nos moyens et de nos capacités, lorsque nous traitons le plan d'action le plus probable. Ces plans d'action constituent les opérations que nous menons quotidiennement dans les trois régions du NORAD: l'Alaska, le Canada et la zone continentale des États-Unis. Ils comprennent la partie de l'opération Noble Eagle qui assure la défense contre des scénarios semblables aux attentats du 11 septembre et contre tout acte visant à utiliser les avions commerciaux ou de plaisance pour menacer notre sécurité. Ils englobent également le suivi de nos voies d'accès maritimes en collaboration avec nos partenaires, de même que le contrôle volontaire de la circulation aérienne des aéronefs qui entrent dans nos zones d'identification de défense aérienne sur le périmètre extérieur de l'Amérique du Nord ou qui s'en approchent.
[Français]
Les ressources affectées quotidiennement aux missions du NORAD diffèrent selon les régions, mais étant donné le renseignement et l'évaluation du commandement concernant les nouvelles exigences opérationnelles, les commandants des régions sont en mesure d'augmenter ou de réduire les ressources, au besoin, et de les réaffecter au sein de leur région afin de mieux composer avec les situations en évolution.
Le NORAD maintient des forces à niveau de préparation très élevé dans l'ensemble du continent. Afin de mener des opérations efficaces, nous nous appuyons sur un système de systèmes sophistiqués qui nous permet d'exploiter pleinement un spectre d'engagement, qui comprend les indices et les indicateurs d'alerte, la détection, l'identification et, au besoin, l'envoi de chasseurs pour intercepter et engager les objectifs poursuivis.
Notre première ligne de défense consiste, bien sûr, en la multitude d'hommes et de femmes en uniforme des deux nations qui ont l'honneur de défendre nos pays et les citoyens ici, sur notre territoire.
[Traduction]
Pour être en mesure d'envoyer en mission et de maintenir en puissance des chasseurs à une grande distance de leur base d'opérations principale, on doit assurer l'harmonisation et la coordination de nombreuses parties du système. Qu'il s'agisse d'instruction, de noeuds de commandement et contrôle, de notre infrastructure, d'aéronefs de ravitaillement en vol, de plateformes d'alerte lointaine aéroportée, de radars au sol ou de chasseurs, nous devons être en mesure de communiquer et d'assurer le commandement et contrôle dans l'ensemble de la zone défendue. Toutes ces composantes doivent posséder la meilleure capacité possible et être en mesure de communiquer entre elles. La nécessité de lier les parties dans un système constituera une caractéristique fondamentale des futurs systèmes de défense, quel que soit le domaine.
La structure actuelle du NORAD concernant les bases d'opérations principales, les emplacements d'opérations avancés et le Système d'alerte du Nord a été conçue pour contrer une menace perçue à la fin des années 1970. À ce moment, les missiles balistiques et les aéronefs à long rayon d'action soviétiques armés de missiles de croisière de première génération étaient essentiellement les seuls systèmes capables d'atteindre l'Amérique du Nord et, en raison de l'intention hostile, sont devenus une menace.
Le Système d'alerte du Nord a été mis sur pied entre 1986 et 1992. À ce jour, les parties les plus récentes du système comptent déjà 24 ans. Nous nous attendons à ce que le système soit en oeuvre approximativement jusqu'en 2025. À ce moment, nous étudierons des solutions modernes pour remplacer ses capacités. Nous devons envisager de moderniser les principaux éléments des capacités contemporaines du NORAD, ce qui comprend les solutions matérielles, bien sûr, et les solutions non matérielles, notamment la façon dont nous assurons le commandement et contrôle de nos forces et notre organisation en vue de défendre nos pays.
Compte tenu de ce qui précède, nous poursuivons activement la phase de définition des problèmes concernant les exigences liées à l'évolution du NORAD. Notre commandant offrira des conseils pour examen à ses deux chaînes de commandement, au Secrétaire à la Défense du côté américain et au chef d'état-major de la défense du côté canadien. Ainsi, nous commençons très tôt à penser à l'avenir, mais notre travail est à propos.
Enfin, le NORAD constitue un commandement binational d'une certaine maturité qui tire profit d'un réseau très bien développé de partenaires. Nous sommes prêts à composer avec les menaces les plus probables et disposons de plans pour traiter les scénarios les plus dangereux.
L'Amérique du Nord fait face à de nouvelles menaces, y compris la concurrence accrue entre les États-nations et la prolifération des capacités militaires avancées qui nuisent à notre capacité de défendre avec succès le Canada et les États-Unis.
[Français]
Je vous remercie de votre attention.
Je répondrai à toute question que vous pourriez avoir.
Merci.
:
Je pense qu'il faut que je remonte dans le temps pour faire la distinction entre ce qui pourrait constituer une menace pour les États-Unis, mais peut-être pas pour le Canada, et vice-versa.
En 1957, lorsque le NORAD a été formé, on reconnaissait implicitement qu'il était préférable que l'on assure la défense aérienne d'un point de vue continental. Voilà comment les deux nations ont uni leurs forces et commencé à défendre notre espace aérien avec la capacité d'un système de défense aérienne conventionnel de l'époque.
Au fil de l'histoire — et peut-être que j'y reviendrai — les aéronefs a long rayon d'action soviétiques munis de bombes à chute libre représentaient la menace initiale. Je parlerai peut-être des méthodes que nous employions pour nous défendre contre eux. Plus tard, nous avons eu les missiles balistiques, les missiles balistiques intercontinentaux qui ont fait leur apparition et qui ont commencé à représenter une menace pour l'Amérique du Nord. Par la suite, nous avions toujours des aéronefs à long rayon armés de missiles de croisière de première génération. Nous avons maintenant affaire à une nouvelle génération de missiles de croisière dotés de radars d'observation à très longue portée et de technologies de faible visibilité, qui font en sorte qu'il soit vraiment difficile de poursuivre tout missile qui s'approche de l'Amérique du Nord.
De mon point de vue, il est très difficile de faire la distinction entre une menace pour les États-Unis et une menace pour le Canada. En ce qui concerne les missiles de croisière, les missiles de croisière à longue portée que nous avons observés constituent non seulement toujours une menace dans le domaine aérospatial, mais aussi dans le domaine maritime, car ils sont maintenant lancés à partir de sous-marins et de bâtiments de surface. Le domaine maritime est donc en voie de devenir un domaine d'intérêt qui nous pousse vraiment à penser en termes de défense continentale, plutôt que seulement en termes de défense américaine ou canadienne. Alors je dirais qu'il s'agit d'une préoccupation commune.
Les missiles balistiques existent depuis longtemps, y compris les missiles à courte et à moyenne portée. On a réalisé beaucoup d'avancées au plan technologique dans le monde. Elles sont là pour rester. Les missiles balistiques intercontinentaux sont ceux que nous voyons. Si vous prenez les derniers développements en Corée du Nord, la vérité est que ce pays travaille d'arrache pied pour développer cette capacité, malgré l'échec de son tir d'essai de missile la semaine dernière.
Il est très difficile pour moi d'imaginer qu'un seul tir de missile balistique qui frapperait une ville américaine, par exemple Seattle, n'aurait aucune répercussion pour la souveraineté, l'économie et la survivabilité canadiennes. J'ai aussi de la difficulté à déterminer s'il s'agit uniquement d'une menace pour les États-Unis ou le Canada.
:
Ce n’est que lorsque l’USNORTHCOM et le Commandement Canada ont été créés, puis finalement le COMFEC, qui est devenu le COIC, qu’on a volontairement essayé de protéger l’Amérique du Nord au-delà du seul espace aérien. C’est à ce moment-là que la question du NORAD a été débattue.
Depuis 2006, l’accord du NORAD est renouvelé à perpétuité et nous travaillons donc dans les domaines aérospatial et maritime. L’exécution pratique de la défense du continent, si on peut l’appeler ainsi, se fait dans nos secteurs aux termes du NORAD, mais aussi par un mélange d’opérations du NORTHCOM, du COIC et du NORAD. Les trois commandements ont recommandé que l’état-major discute des moyens de progresser, car nous travaillons en étroite collaboration et suscitons des effets interarmées. Permettez-moi de vous donner un exemple des difficultés qui peuvent se présenter.
Un sous-marin qui approche l’Amérique du Nord est un problème pour le commandant de composante maritime qui relève du COIC au Canada et pour le NAVNORTH aux États-Unis, qui est le commandement de la composante maritime qui relève du NORTHCOM. La réaction à prendre à l’approche du sous-marin relève d’une force opérationnelle interarmées. Bilatéralement, nous unissons nos forces qui sont composées d’un aéronef de patrouille maritime, de navires de surface, et ainsi de suite, et nous poursuivons la cible à son arrivée.
Dès lors que le sous-marin lance un missile de croisière, celui-ci est pris en charge par le NORAD, ce qui est tout à fait conforme. En fait, c’est un peu difficile à expliquer, mais ce que je veux dire, c’est qu’au moment où nous pourchassons le sous-marin au niveau bilatéral, dans le cadre d’une force opérationnelle interarmées, qui est entièrement sous le contrôle du commandant du NORTHCOM, qui est lui-même commandant du NORAD, tout cela aboutit finalement à Colorado Springs.
En envisageant l’avenir sous trois commandements, nous commençons à nous poser certaines questions. Peut-on assurer la défense de l’Amérique du Nord dans le seul domaine aérospatial? Doit-on adopter une approche binationale ou bilatérale? C’est très important pour nous. L’approche binationale suppose que nous sommes intégrés et que nous avons notre mot à dire. L’approche bilatérale nous permet d’arriver à un certain point, mais très souvent, sans faire partie de la chaîne de commandement. S’agit-il d’une bonne structure pour la défense de l’Amérique du Nord? C’est l’avis des commandants qui s’occupent actuellement de mettre au point les deux chaînes de commandement et envisagent l’avenir en ayant comme objectif commun d’offrir une structure de type NORAD, binationale, pour la défense du continent. Je ne sais pas si l’on va trouver une solution, mais voilà ce que nous préparons.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur St-Amand, je vous remercie de votre présence aujourd'hui et de votre service au pays.
[Traduction]
On a discuté du volet contrôle de la surveillance et de la surveillance comme telle. Ma question concerne le sujet dont personne ne veut parler. Nous, les parlementaires, avons une responsabilité à l'égard de nos citoyens en ce qui a trait à leur sécurité, mais nous avons également une responsabilité fiduciaire envers eux.
Au chapitre de l'acquisition d'équipement, des témoins ont évoqué le remplacement de nos chasseurs et la question de l'interopérabilité. À l'heure actuelle, au Canada, nos pistes d'atterrissage dans le Nord et ailleurs ne sont pas assez longues pour accueillir certains appareils.
On nous dit que nos avions de ravitaillement travaillent de près avec nos CF-18. Nous avons récemment appris dans les nouvelles que le Congrès américain est divisé sur le financement de la base aérienne en Alaska. Si je comprends bien, pour leurs F-35, les États-Unis devront dépenser 500 millions de dollars pour rénover la base d'Eielson. Nous avons aussi appris que l'Australie prévoit investir 1 milliard de dollars dans la base de Williamtown.
À votre avis d'expert, dans quelle mesure est-il important que les chasseurs de remplacement soient compatibles avec nos infrastructures actuelles? Advenant que les appareils choisis ne puissent pas atterrir sur les pistes existantes, combien de millions ou de milliards faudra-t-il dépenser pour rénover les infrastructures?
:
Si je comprends bien, madame, votre question comporte deux volets.
Le premier concerne l'interopérabilité et l'utilisation de nos infrastructures actuelles. Nos infrastructures actuelles ne sont peut-être pas un bon point de référence, comme nous le révèle la structure même du NORAD. Par exemple, nos bases d'opérations principales sont en principe permanentes, mais les quatre emplacements d'opérations remontent à une menace qui était perçue dans les années 1970. Je ne peux pas dire que cette structure serait totalement adéquate compte tenu de ce qui nous attend, surtout dans les 30 ou 40 prochaines années. Voilà pour le premier volet.
Mon deuxième commentaire, c'est que l'interopérabilité est absolument cruciale. Quand vous pensez au NORAD, essayez d'imaginer un triangle, puis imaginez qu'à son sommet se trouvent les chasseurs. Les chasseurs sont évidemment essentiels au contrôle aérien; c'est à eux qu'incombe cette tâche. Pour ce faire, ils s'appuient sur un système : nous avons des plateformes, des radars longue portée, l'alerte lointaine aéroportée capable de faire la liaison de données, des personnes qualifiées, un système d'entraînement, des normes, et j'en passe.
Le sommet est le résultat de ce qui forme la base du triangle, c'est-à-dire les infrastructures. Il ne fait aucun doute à mon avis que des changements pourraient être nécessaires, peu importe ce qui remplacera les F-18. Cela va dépendre d'autres facteurs, puisque ce n'est pas uniquement une affaire de pistes, d'opérations ou d'emplacements. C'est le système tout entier qui doit être pris en considération, y compris la communication entre capteurs, l'interface homme-machine et les armes qui seraient utilisées, pour ne donner que quelques exemples.
Il est très difficile de répondre à cette question maintenant. Le coût dépendra également de la plateforme choisie par le gouvernement du Canada. Je vais laisser au gén. Hood le soin de répondre, car je n'en ai vraiment aucune idée.
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L'évolution du NORAD pourrait se diviser en quatre ères distinctes.
La première, c'était la fin des années cinquante, l'époque de l'aviation soviétique à long rayon. Comme les bombes étaient à chute libre, les combats aériens se seraient déroulés juste au nord de la frontière. C'est ainsi que le système de défense était conçu. La menace ne pouvait provenir que du domaine aérospatial. C'était le seul moyen d'atteindre l'Amérique du Nord. Plus tard, lorsqu'il a été question de fusées intercontinentales, le NORAD s'est interrogé sur sa propre existence. Quelle était l'utilité d'un système conventionnel de défense aérienne quand des missiles balistiques pouvaient voler dans l'espace? À l'issue d'un long débat, les deux nations ont conclu que le système conventionnel de défense aérienne contribuait à décourager de telles attaques et le NORAD a survécu.
La deuxième ère a suivi l'avènement des missiles de croisière de première génération. Il fallait alors défendre une région plus au nord, car la zone de combat, si vous voulez, s'était déplacée à la limite nord de notre périmètre et en Alaska. Les attaques sur l'Amérique du Nord ne pouvaient encore provenir que du domaine aérospatial ou de l'espace, dans le cas des missiles balistiques.
La troisième ère, celle du 11 septembre, nous a fait prendre conscience de la menace intérieure. Vous connaissez l'histoire.
Nous sommes maintenant dans la quatrième ère, celle des missiles de croisière perfectionnés, dont la très longue portée les rend difficiles à intercepter et à détruire avant qu'ils n'atteignent leur cible. Ils peuvent maintenant être lancés à partir de plateformes maritimes. Le domaine maritime revêt donc une importance sans précédent, puisqu'il représente maintenant une menace pour l'Amérique du Nord et un moyen de l'atteindre.
Parallèlement à cela, il y a bien entendu le cyberespace, qui présente un défi quotidien. Même si je ne peux pas entrer dans le détail, il semble que ce sujet nous préoccupe tous d'un point de vue continental, mais d'abord d'un point de vue national.
À en juger par ce que nous voyons depuis notre quartier général, il faudrait certainement songer à inclure le domaine maritime.
Le cyberespace est une affaire très compliquée. Je ne suis pas sûr qu'elle se prête à une approche binationale, outre la collaboration et l'échange de renseignements. Nous ne sommes peut-être pas suffisamment mûrs pour envisager une défense continentale du cyberespace, qui est par définition un domaine national et hautement sensible.
En ce qui concerne le domaine terrestre, le seul que je n'ai pas encore abordé, nous ne voyons toujours pas de menace à l'heure actuelle. Je ne parle pas du contre-terrorisme, qui n'est pas du tout la même chose, mais la menace traditionnelle et symétrique pouvant provenir du domaine terrestre n'est pas encore une véritable source d'inquiétude.
Pour résumer, je dirais les domaines aérospatial, maritime, cyberspatial et terrestre, et d'autres s'ajouteront à mesure que le monde continuera d'évoluer.
:
Merci, monsieur le président.
Merci de votre présence.
Je vais revenir sur un sujet dont nous avons déjà discuté. Hier, dans La Presse, on rapportait ainsi les propos de l'expert en sécurité Richard Fadden:
[...] les cyberattaques représentent aujourd'hui une menace tout aussi inquiétante pour le Canada que peut l'être le terrorisme. Or, cette menace est souvent passée sous silence, même si les conséquences néfastes potentielles sont considérables.
M. Fadden a été directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, ainsi que conseiller à la sécurité nationale auprès de deux premiers ministres.
Cela soulève plusieurs interrogations auxquelles vous avez déjà, en partie, répondu.
Compte tenu du fait que l'armée canadienne est chargée de défendre notre territoire, quel est le mandat du NORAD en ce qui concerne de possibles attaques cybernétiques?
L'article dont je vous parle précisait que les réseaux informatiques d'hydro-électricité étaient les moins bien protégés, que ce soit celui d'Hydro-Québec ou celui d'Hydro One, en Ontario.
Le NORAD a-t-il une responsabilité globale à cet égard?
:
C'est une question compliquée, puisqu'il y a un aspect militaire et un aspect politique.
La responsabilité de donner un conseil militaire revient au chef de l'état-major de la Défense, qui s'occupe de tout l'aspect militaire.
J'ai pu constater trois choses qui pourraient vous aider dans vos discussions.
Premièrement, il y a les missiles balistiques.
[Traduction]
Les missiles sont là pour rester.
[Français]
Je ne parle pas seulement des missiles intercontinentaux, mais aussi des missiles à courte et à moyenne portée. Dans le futur, on enverra peut-être des Canadiens dans des théâtres d'opérations qui seront sous la menace de missiles balistiques à courte ou à moyenne portée. Nous serons défendus par des coalitions et par l'OTAN; cela va bien de ce côté.
Des pays, notamment la Corée du Nord, travaillent très fort à développer une capacité pour attaquer l'Amérique du Nord. Alors, les missiles balistiques sont ici et ils y resteront. Je pense que c'est une menace qui continuera à exister.
Voici la deuxième chose que j'ai constatée.
Pour ce qui est des approches nord-américaines, le commandement et le contrôle sont un peu compliqués à Colorado Springs. Le NORAD est chargé d'évaluer une attaque ou de caractériser un missile qui s'approcherait de l'Amérique du Nord. Les Canadiens peuvent dire au NORAD que c'est une attaque contre l'Amérique du Nord, mais aussitôt qu'on a pris une décision ou caractérisé un missile, la défense revient complètement au côté américain.
Le commandement de NORTHCOM et de NORAD est un peu séparé pour la même mission. Concernant le même missile balistique qui s'en vient, une portion relève du NORAD et l'autre portion, de NORTHCOM, qui est seulement américain. Si le missile revenait dans l'atmosphère, le NORAD serait encore responsable de déterminer s'il y a explosion nucléaire.
Pour le NORAD et le NORTHCOM, le commandement et le contrôle sont compliqués. On demande que les décisions soient prises en quelques minutes pour défendre ou pour faire une évaluation d'attaque. C'est un peu compliqué. Si on faisait partie du système du bouclier antimissile, cela permettrait aux commandements binationaux de simplifier le commandement et le contrôle pour cette menace.
Voici la troisième chose que j'ai constatée.
Étant donné que le Canada ne fait pas partie du système, il n'a pas accès à la technologie, à la stratégie et à la planification, et il n'a certainement aucune influence sur les décisions prises. Je vais dire l'expression en anglais, parce qu'elle ne me vient pas en français.
[Traduction]
Les États-Unis ne sont pas tenus de communiquer ces renseignements, et nous n'avons pas le droit de savoir.
[Français]
Ce que nous avons relève de la bonne volonté.
Il est sûr qu'on coopère avec nous. Nous sommes de très proches alliés depuis longtemps, mais nous ne faisons tout simplement pas partie de cette mission.
Les trois choses que je viens de décrire me donnent l'impression que c'est une question importante à revoir. C'est tout ce que je peux dire.
:
Dans le cadre du NORAD, nous surveillons toujours la situation du Nord et nous voyons l'Arctique comme une voie d'approche, plutôt qu'une base d'opérations. Nous menons nos opérations à partir de l'Arctique pour faire notre travail, mais c'est une voie d'approche pour nous. Dans le domaine maritime, nous avons cette mission, une alerte maritime, auquel cas nous serions au courant d'un scénario comme celui que vous venez de décrire, si nous avons ce qu'il faut sur le plan de la détection et du renseignement. Nous obtiendrions l'information et informerions les deux gouvernements de la menace dans le Nord, mais notre rôle se limiterait à cela.
Dans ce cas, notre rôle consiste simplement à indiquer que quelque chose se présentera, mais si le navire n'est pas détecté, bien entendu, s'il devait aboutir dans le passage du Nord-Ouest ou dans notre région arctique et qu'il était capable de lancer un missile de croisière, cela deviendrait notre problème. C'est un problème du NORAD parce qu'il s'agit d'une menace aérobie. Cela caractérise donc la façon dont le NORAD serait préoccupé par le Nord.
Voici un autre aspect sur le Nord. Tandis que nos approches arctiques, ou maritimes, disons, qui sont à près de 12 milles marins au nord de notre masse continentale, sont peut-être en train de fondre, selon le point de vue que l'on fait valoir, il faut regarder de l'autre côté. Les lignes de communications maritimes du nord de la Russie fondent beaucoup plus vite, et pour nous, c'est préoccupant, car elle pourrait mettre des capacités là-bas. Elle pourrait envoyer des choses là-bas qui auraient un effet dissuasif, et lorsqu'il y a un facteur de dissuasion pouvant avoir des répercussions sur l'Amérique du Nord, nous en prenons note. Cela commence à nuire à notre liberté d'exécution, à notre marge de manoeuvre, etc. Voilà pourquoi je dis, du point de vue du NORAD, que notre secteur d'intérêt se situe à l'échelle mondiale. Nous regardons plus loin que nos frontières, et nous surveillons ce qui se passe dans le Grand Nord dans ce cas.
Je ne suis pas certain d'avoir répondu à la question, mais c'est la limite de nos...
:
La perspective d'une défense continentale est ce qui émergerait probablement aujourd'hui. Il s'agit de déclarer que l'Amérique du Nord représente un seul espace de sécurité. Nous ne pouvons pas nous détacher l'un de l'autre; ce qui se produit aux États-Unis nous touche aussi, et vice versa.
On tente actuellement de déterminer dans quels domaines il est approprié d'établir ce contexte de défense continentale plutôt qu'un contexte de défense nationale. L'évolution de la situation suit celle des capacités. Cela me rappelle la bataille d'Angleterre, qui s'est déroulée il y a 75 ans, et que nous avons commémorée l'an dernier. Dans les années précédant le début de la Deuxième Guerre mondiale, la Grande-Bretagne a découvert que la Manche n'était plus le plus long fossé antichar dans le monde, même si elle protégeait le pays des invasions depuis des années. Toutefois, la force aérienne est arrivée; la bataille d'Angleterre a eu lieu, et nous connaissons la suite.
À de nombreux égards, l'Amérique du Nord fait maintenant face aux menaces posées, manifestement, par les missiles balistiques, mais également par les missiles de croisière à longue portée. Cela signifie que l'Arctique, l'Atlantique et le Pacifique ne suffisent peut-être plus à nous protéger. Ils représentent toujours des obstacles considérables, mais si une autre nation souhaitait nous causer du tort, nous sommes maintenant confrontés à de nouvelles menaces dans différents domaines, notamment les menaces cybernétiques, contre lesquelles les océans ne peuvent rien.
Si le NORAD n'existait pas, nous n'aurions pas ce débat. Vous avez raison, ce serait peut-être trop dispendieux. Nous ne pourrions peut-être pas nous le permettre, mais puisque nous l'avons et que nous pouvons [Note de la rédaction: Inaudible].