[Français]
Monsieur le président, distingués membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui pour parler de l'Aviation royale canadienne et de notre disponibilité opérationnelle, particulièrement dans le contexte de la défense du Canada et de l'Amérique du Nord.
[Traduction]
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de vous parler, car informer les Canadiens sur le rôle et la contribution de la force aérienne à l'égard de leur sécurité est une partie essentielle de mes responsabilités de commandant.
La disponibilité opérationnelle, dans sa forme la plus simple, consiste à se rendre capable de concrétiser les engagements du gouvernement en matière de défense intérieure et internationale dans un environnement très complexe et en évolution constante. La disponibilité opérationnelle englobe nos gens, nos aéronefs et nos systèmes et les autres ressources qui, ensemble, constituent la puissance aérienne dont le gouvernement a besoin pour servir la population canadienne et les intérêts du Canada. Il s'agit d'un concept très important. Nous menons beaucoup de missions dans le cadre desquelles l'erreur n'est pas permise. Les Canadiens dépendent de nous, et c'est la raison pour laquelle nous nous efforçons d'exceller en toute chose.
J'aimerais entamer mon exposé en vous parlant des capacités fondamentales de notre puissance aérienne. La puissance aérienne est agile et rapide, et son rayon d'action lui permet de protéger les Canadiens sur leur territoire et à l'étranger. Le gouvernement nous charge de fournir cinq grandes capacités.
L'ARC est responsable de mener les missions de surveillance et de reconnaissance. Avoir une connaissance de la situation quant à la vaste masse continentale, aux approches maritimes et à l'espace aérien du Canada est une tâche essentielle à la préservation de la souveraineté du pays.
Nous contrôlons notre espace aérien et disposons en tout temps de la puissance nécessaire pour agir de manière à contrôler cet espace aérien, soit pour défendre le Canada et l'Amérique du Nord, soit dans le cadre de déploiements de l'OTAN ou d'opérations coalisées.
Ce pouvoir d'agir nous donne la capacité d'attaquer au besoin, selon la mission qui nous est confiée. L'emploi mesuré de la force, quand le gouvernement décide d'y recourir, est un aspect clé de la puissance aérienne militaire, qui la distingue des ressources civiles.
Nous assurons la mobilité aérienne du personnel, du matériel et des systèmes en instance de déploiement, que ce soit au Canada ou à l'étranger, dans le cadre de missions des Forces armées canadiennes et à l'appui d'autres ministères. Nous permettons au gouvernement d'intervenir très loin et très rapidement, ce qui contribue à la renommée du Canada comme acteur international de premier ordre.
Enfin, nous fournissons des capacités essentielles de soutien, qu'il s'agisse d'appuyer les opérations interarmées avec nos organisations soeurs ou de soutenir les autorités civiles grâce à une aide humanitaire ou à des missions essentielles de recherche et de sauvetage.
Les 18 000 femmes et hommes — membres de la Force régulière, réservistes et civils — qui forment notre effectif exercent tous les métiers, qu'ils soient pilotes, membres du personnel navigant ou du personnel d'entretien, logisticiens ou ingénieurs, et sont basés au Canada et partout dans le monde. Ils exécutent et soutiennent nos missions critiques — celles liées au NORAD, celles de recherche et de sauvetage ou les missions d'appui aux Nations unies — où que nous soyons appelés à contribuer à la réalisation des priorités du Canada. Le gouvernement doit pouvoir compter sur les capacités de la puissance aérienne au besoin, c'est-à-dire chaque jour, 24 heures par jour, 365 jours par année. C'est la disponibilité opérationnelle de nos gens, leur éducation, leur instruction et leur engagement qui rendent cela possible.
[Français]
L'Aviation royale canadienne s'efforce d'être une organisation inclusive, agile et intégrée, dirigée par des personnes faisant preuve d'un très grand professionnalisme et possédant l'expertise ainsi que la maîtrise de la puissance aérienne à laquelle les Canadiens s'attendent.
Il va sans dire que la grande priorité de l'Aviation royale canadienne en matière de défense est la protection du Canada et des Canadiens. Cela exige que l'ARC soit au fait de toute activité hostile potentielle se déroulant en territoire canadien, qu'elle soit prête à protéger toutes les approches du territoire, qu'elle soit capable de contrer efficacement les menaces et en mesure de réagir aux éventualités dans toutes les régions du Canada, qu'il s'agisse d'ouragans dans les Maritimes, d'inondations dans les Prairies ou de problèmes environnementaux en Arctique.
Bien que la protection de la souveraineté du Canada exige une étroite collaboration entre tous les éléments de nos forces armées, il est clair qu'une surveillance exhaustive s'exerce le mieux depuis les airs et l'espace. Ainsi, la vitesse, la portée et l'agilité de la puissance aérienne font de l'Aviation royale canadienne un élément d'importance critique dans la capacité d'intervention du Canada face à toute menace potentielle.
[Traduction]
De plus, en cas de catastrophe naturelle ou d'origine humaine qui viendrait menacer la sécurité publique en territoire canadien, la puissance aérienne est un outil clé permettant de fournir un appui militaire immédiat, coordonné et soutenu à d'autres ministères et organismes gouvernementaux, comme nous l'avons fait dans nombre d'urgences continentales. Et notre disponibilité opérationnelle englobe notre responsabilité principale au chapitre de la recherche et du sauvetage aéronautiques. L'an dernier, les centres de coordination de sauvetage ont reçu 9 534 appels à l'aide. Parmi ceux-ci, 962 ont été confiés aux Forces armées canadiennes, ce qui a entraîné le lancement de 661 avions par l'ARC. Les activités de recherche et de sauvetage sont des tâches où il n'y a pas de place pour l'erreur et nous les menons chaque jour pour les Canadiens.
La défense du Canada ne peut exister sans la défense de l'Amérique du Nord. Du point de vue de la défense, le principe d'indivisibilité de l'Amérique du Nord est mis en évidence par l'existence du Centre de commandement du NORAD, qui a été mis sur pied en 1958. Cette organisation militaire binationale a été établie dans le but de surveiller et de défendre l'espace aérien nord-américain. Le NORAD surveille, suit et valide les attaques potentielles contre l'Amérique du Nord, qu'elles aient pour vecteurs des aéronefs ou des missiles, et sonne l'alarme. Il en fait autant pour les risques de dommages résultant de l'entrée de débris spatiaux.
Le NORAD, depuis les événements du 11 septembre, assure par le biais de l'Opération Noble Eagle la défense contre des attaques aériennes asymétriques auxquelles pourraient servir des aéronefs civils, et il joue un rôle à l'appui de la sécurité lors de grands événements, comme les Jeux olympiques de Vancouver ou les sommets du G7 et du G20, au Canada ou aux États-Unis.
Le Canada contribue au NORAD au moyen de ressources financières, matérielles et humaines et il commande l'une des trois régions du NORAD, la région canadienne, depuis le quartier général opérationnel de l'ARC, à Winnipeg. La région canadienne du NORAD maintient des chasseurs et des avions ravitailleurs en état d'alerte, exploite et entretient la partie canadienne du Système d'alerte du Nord, qui est constitué d'un chapelet de station radar dans le Nord, et exploite quatre emplacements opérationnels avancés pour soutenir des opérations de chasseurs dans l'Arctique.
Ensemble, le Canada et les États-Unis surveillent aussi les approches maritimes du Canada dans le cadre du rôle d'alerte maritime du NORAD. Par conséquent, les responsabilités du Canada en matière de défense et de sécurité sont aussi façonnées par l'exigence générale d'une interopérabilité sans faille dans le domaine de l'air et de l'espace avec nos vis-à-vis américains, c'est-à-dire la force aérienne des États-Unis. Du personnel canadien et américain est intégré dans les structures de commandement de nos deux pays, et ce, dans les trois régions du NORAD. Cette interdépendance et cette interopérabilité nous aident à être un partenaire reconnu et digne de confiance sur le plan de la puissance aérienne, et ce, tant au pays qu'à l'étranger.
Nous maintenons nos unités à des degrés élevés de disponibilité opérationnelle en vue d'opérations expéditionnaires. Nous pouvons, et cela nous est exclusif, déployer n'importe quand la majorité de nos capacités en puissance aérienne, ce qui contribue à notre rapidité à réaliser les objectifs du gouvernement. Mais soyons clairs : notre disponibilité opérationnelle pour le NORAD et les opérations de recherche et de sauvetage est prioritaire.
[Français]
En conclusion, la puissance aérienne procure au gouvernement l'un des instruments militaires les plus souples auxquels il a accès. Elle lui confère la capacité de projeter sa puissance rapidement et précisément ainsi que de se déployer prestement pour intervenir n'importe où au Canada ou dans le monde.
L'Aviation royale canadienne se tient en alerte et utilise des capacités de surveillance et de contrôle de l'espace aérien canadien en tout temps et de façon continue. Sa puissance et son rayon d'action nous permettent de contribuer de façon critique à la défense conjointe du continent, des intérêts du Canada et de la population canadienne.
C'est grâce aux Canadiens et aux Canadiennes extraordinaires qui forment l'Aviation royale canadienne que nous assumons ces responsabilités chaque jour et que nous sommes en mesure de nous préparer à relever les défis de l'avenir.
Votre force aérienne est prête, et je suis pour ma part prêt à répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
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Eh bien, ce serait nettement plus simple s'ils déposaient des plans de vol et nous disaient qu'ils s'en viennent, car nous n'aurions pas besoin de nous rendre là-bas pour les voir. C'est d'ailleurs ce que nous leur avons demandé de faire. En fait, le commandant du NORAD leur a demandé pourquoi ils ne déposent pas tout simplement un plan de vol disant qu'ils vont passer par là, étant donné que c'est un espace aérien international, à l'extérieur de notre ZIDA, notre Zone d'identification de défense aérienne.
En ce qui concerne l'ARC et la souveraineté canadienne, qu'est-ce qu'on entend par souveraineté? Il y a de nombreux éléments. Il y a la souveraineté des données. Pour la souveraineté de base, c'est l'ARC qui en est le garant principal, étant donné la taille et la forme de notre pays. C'est d'après moi une tâche pour laquelle aucun échec n'est permis.
J'ai parlé de recherche et de sauvetage comme étant une tâche où l'échec n'est pas permis. Garantir notre souveraineté devrait être une telle tâche. C'est la raison pour laquelle nous rédigeons un énoncé des besoins: pour nous permettre d'avoir un avantage opérationnel par rapport à nos adversaires éventuels. Je ne peux pas imaginer de quoi cela aurait l'air — eh bien, oui, en fait. Je vais vous donner quelques scénarios.
Est-il inconcevable que quelqu'un installe une plateforme de forage pétrolier à 12 milles de la côte arctique canadienne? Bien sûr que non. Nous avons vu cela dans la mer de Chine du Sud, où divers pays installent des plateformes pétrolières et autres installations. Ce n'est pas inconcevable. Comment répondre à ce genre de menaces?
La capacité de réagir a un effet dissuasif, alors je pense que si le Canada est prêt... L'ARC, en particulier, en tant que garant de la souveraineté, doit être prête à tout un éventail de choses, parce que ne pas l'être équivaut à céder cette souveraineté à quelqu'un d'autre.
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Merci messieurs, de votre présence et de votre expertise, mais aussi du service que vous rendez à la nation. Nous vous en savons gré.
J'aimerais revenir sur la question du contrôle de l'espace aérien et de la dissuasion et m'appuyer un peu sur ce que mes collègues, MM. Gerretsen et Paul-Hus ont dit précédemment pour poser ma question sur les menaces qui évoluent.
J'adopte pour ma première question une perspective plutôt intérieure. Il est question du témoignage que nous avons entendu ici et selon lequel l'une des menaces les plus inquiétantes, sinon la plus inquiétante, est celle du risque accru de terrorisme intérieur. Ma question porte sur la dissuasion et sur la proximité de cette menace, en particulier sur la côte Ouest. Mon collègue a parlé des Jeux olympiques de Vancouver.
Je pense que cette menace est peut-être un peu plus systématique que liée à un événement en particulier, que nos grandes villes sont exposées à une menace de terrorisme intérieur et que des mesures de dissuasion aériennes sont possibles. Si c'est le cas, nous voudrions être le plus près possible de cette menace, physiquement, pour pouvoir prendre des mesures dissuasives.
Ma question vise l'emplacement de notre chasseur à Cold Lake, ainsi que le fait que l'aviation américaine fait assez régulièrement, sinon systématiquement, des atterrissages en sol canadien. J'aimerais avoir votre avis. Compte tenu de ce que je dis à propos des menaces qui évoluent, notre chasseur est-il bien placé, à Cold Lake, ou devrait-il plutôt être à Comox? Je ne dis pas qu'il faut déménager la base, mais plutôt qu'il faut évaluer les menaces du point de vue de l'intérieur. Quelles sont vos idées à ce sujet?
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Dix minutes écoulées. Nous allons avoir un tour gratuit. J'ai beaucoup de questions et je vais en poser une.
Cette question n'était pas prévue, mais, en raison de ce que nous avons entendu, je la pose. Je tiens à parler, très brièvement, des moteurs. Je pense que, en général, on s'accorderait à dire que la probabilité de défaillance des moteurs modernes d'avion est considérablement réduite. On peut l'affirmer sans risque d'erreur.
Comme nous pourrions être un peu trop méprisants pour la technologie, je ferai quelques déclarations et dites-moi ce que vous en pensez. Les avions de chasse dernier cri qu'on construits actuellement à l'étranger, en Russie et en Chine, le PAK FA, le J-31 et le J-20, sont tous bimoteurs. Ces pays possèdent les technologies les plus récentes et ils s'en servent. Ils ne construisent pas de monomoteurs, mais des bimoteurs.
À Bagotville, en 2008, comme on l'a dit, nous avons déployé des avions en Alaska, pour suppléer à toute la flotte de F-15 cloués au sol. Il est sûr que le CONAR aurait pu prendre la relève; il possède des F-16, plus que nous pourrions jamais l'imaginer. Le NORAD a choisi de prélever ces ressources à Bagotville et de les déployer en Alaska. C'était la preuve d'une flexibilité incroyable de notre part. Le CONAR aurait pu prendre des F-16, mais on a délibérément décidé de ne pas le faire.
Le moteur du F-35 a déjà subi une défaillance et, en fait, un appareil a complètement brûlé. L'A380 est flambant neuf, il est doté d'un moteur Trent 700, et il a connu une défaillance.
Dernièrement, je parlais à Billie Flynn, qui m'a dit — il n'est pas à la Défense, mais chez Lockheed Martin — que les avions envoyés à Eielson, comme ç'avait été annoncé à l'origine, ne participeront pas avec le NORAD, pas aujourd'hui, même si cela peut changer ultérieurement.
Cela étant dit, la défaillance du moteur d'un monomoteur a une probabilité très réduite. Si elle survenait dans le Nord canadien, le sort du pilote serait affreux. Je suis allé là-bas. M. Balfe aussi. J'aimerais connaître vos réactions. Vu que les derniers avions construits, ceux de la cinquième génération, sont tous des bimoteurs, je voudrais vous entendre.
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Je vais me permettre une question rapidement avant de céder la parole à M. Garrison.
Nous avons beaucoup parlé des avions ravitailleurs. Je crois que tous ceux qui ont travaillé dans le domaine savent qu'un avion ravitailleur est probablement le plus grand multiplicateur de force quand on possède des chasseurs, et pour toutes sortes de raisons, compte tenu du nombre d'appareils et la taille de l'espace aérien dans lequel on doit évoluer.
J'ai noté que vous aviez dit tout à l'heure, monsieur, qu'on prévoyait remplacer un avion ravitailleur. Je ne sais pas si ce projet est financé. Nous avons bien des projets, mais rien ne garantit qu'ils verront le jour. Je sais aussi qu'il y avait un important manque à gagner en ce qui a trait à la capacité de ces appareils. Le 707 est en baisse, alors que c’est le contraire pour l’Airbus, ce qui fait que notre capacité est un peu affaiblie. Nous avons dû nous débrouiller, mais nous avons réussi.
Notre seule autre grande priorité, mis à part le NORAD, est notre souveraineté autochtone, notre souveraineté canadienne, et notre capacité de fonctionner à l'intérieur de nos propres frontières sans l'aide de personne.
Il y a cinq options, peut-être plus, que nous pourrions envisager pour le remplacement d'un aéronef. Si nous n'optons pas pour un appareil compatible avec notre flotte actuelle, pensez-vous que nous pourrons assurer notre souveraineté à l'intérieur de nos frontières sans l'aide des Américains? De plus, compte tenu de notre infrastructure actuelle, et du fait que n'avons sûrement pas de fonds pour un avion ravitailleur... même si nous les avons, avec nos antécédents en matière d'approvisionnement, nous n'en verrons vraisemblablement pas la couleur avant une dizaine d'années et peut-être plus encore.
Pour ce qui est d'assurer notre souveraineté à l'intérieur de nos frontières, sans l'aide des Américains, craignez-vous que nous ne soyons pas en mesure de le faire si nous achetons quelque chose d'autre?