La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 novembre, du projet de loi , dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement, ainsi que du groupe de motions no 1.
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Monsieur le Président, j'interviens pour appuyer le projet de loi . Je me pencherai aujourd'hui sur les modifications proposées dans cette mesure législative qui auraient une incidence sur la communauté LGBTQ2, la traite des personnes et la suramende compensatoire.
À titre de conseiller spécial auprès du sur les enjeux LGBTQ2, je suis particulièrement fier que le gouvernement fasse valoir les droits des Canadiens LBGTQ2. Je salue également le travail du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, qui s'emploie à apporter des changements législatifs concrets et tangibles susceptibles d'améliorer la vie de nos concitoyens des communautés lesbienne, gaie, bisexuelle, transgenre, queer et bispirituelle.
Aujourd'hui, c'est la Journée internationale du souvenir trans, qui nous donne l'occasion de penser aux personnes transgenres au Canada et partout dans le monde qui ont été assassinées, se sont suicidées ou ont été victimes de haine et de discrimination; aux personnes dont la vie a été affectée par une transphobie et une misogynie manifestes; et à la discrimination à laquelle sont confrontés au quotidien les enfants trans ainsi que leurs frères, soeurs, parents et êtres chers. En tant que premier député albertain ouvertement gai élu à la Chambre des communes, je me réjouis que le Parlement ait adopté le projet de loi qui prévoit l'ajout de protections pour les personnes trans dans le Code criminel et la Loi canadienne sur les droits de la personne. Je suis particulièrement fier que le gouvernement ait pris l'initiative de ces changements.
Je suis également fier que le gouvernement ait oeuvré pour adopter un projet de loi permettant aux Canadiens qui se sont retrouvés avec un casier judiciaire pour avoir exercé une activité sexuelle consensuelle avec une personne du même sexe de demander la suppression de ce casier. Je reconnais le leadership dont a fait preuve le dans ce dossier.
Je veux également remercier la d'avoir inclus, dans le projet de loi , l'abrogation de l'article 159, qui était discriminatoire à l'endroit des jeunes hommes gais ou bisexuels. Cet article ne fera plus partie du Code criminel après l'adoption du projet de loi C-75.
J'applaudis également le travail du comité et du ministère, qui ont tenu compte des témoignages d'experts quant à l'abrogation des dispositions sur les maisons de débauche et le vagabondage qui étaient appliquées par les forces policières pour arrêter des hommes gais dans les bars gais et les saunas. Les hommes arrêtés lors de ces rafles, qui ont maintenant 60, 70 ou 80 ans, ont toujours un casier judiciaire en raison des accusations portées aux termes de ces dispositions. Nous avons entendu des témoins, et tant le ministère que le comité ont tenu compte des témoignages qu'ils ont livrés. Si le projet de loi est adopté, ces odieuses dispositions du Code criminel seront supprimées et nous pourrons réparer les erreurs du passé.
Une partie du projet de loi concerne la traite des personnes et les amendes compensatoires.
[Français]
Je pense qu'il est très important d'annoncer que la traite des personnes est intolérable et représente une préoccupation très sérieuse pour le gouvernement. C'est pourquoi nous continuons de travailler en étroite collaboration avec les provinces, les territoires, les organismes responsables de l'application de la loi, les services d'aide aux victimes, les organisations qui représentent les peuples autochtones et d'autres groupes communautaires ainsi que nos partenaires internationaux. Nous travaillons ensemble en vue de prévenir toutes les formes de traite des personnes au Canada et à l'étranger, d'offrir aux victimes une protection et un appui particulier, de traduire en justice tous les auteurs de ces crimes et de veiller à ce que la sévérité de leur peine reflète la gravité du crime commis.
[Traduction]
La traite des personnes est un crime très difficile à détecter en raison de sa nature clandestine et de la réticence des victimes à signaler leur situation par crainte des réactions de ceux qui en sont les auteurs. Nous avons entendu des témoignages à ce sujet lorsque le Comité permanent de la justice et des droits de la personne s’est déplacé d’un bout à l’autre du pays pour écouter les victimes de la traite des personnes et pour voir comment nous pourrions modifier le Code criminel afin d’offrir aux services de police davantage d’occasions de collaborer avec les organisations qui travaillent auprès des victimes.
Les modifications législatives prévues dans le projet de loi offriraient davantage d'outils aux services de police et aux poursuivants pour mener des enquêtes et intenter des poursuites. Ces mesures permettraient de traduire en justice les auteurs de la traite des personnes afin qu’ils aient à répondre de la gravité de leurs actes.
Les modifications proposées dans le projet de loi mettraient en vigueur des modifications qui ont déjà été adoptées par le Parlement, mais qui n’ont pas été promulguées dans l’ancienne initiative parlementaire, le projet de loi . Elles renforceraient également les dispositions législatives pour lutter contre toutes les formes de traite des personnes, que ce soit par l’exploitation sexuelle ou le travail forcé, tout en respectant les droits et libertés garantis par notre Constitution.
Nous avons entendu parler de crimes odieux commis non seulement contre des inconnus, mais aussi contre des membres de la famille. La traite de membres de la famille existe au Canada, et nous devons nous assurer que les forces policières disposent des outils dont elles ont besoin pour mettre fin à ces crimes odieux.
[Français]
Plus précisément, les changements proposés faciliteraient les poursuites en matière de traite des personnes en faisant entrer en vigueur une présomption qui permettrait à la Couronne d'établir que l'inculpé exerçait un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements de la victime en démontrant que l'inculpé vivait avec la victime ou se trouvait habituellement en sa compagnie.
De plus, ils intégreraient l'infraction de traite de personnes à la liste des infractions auxquelles s'appliquent les dispositions relatives à l'inversion du fardeau de la preuve pour ce qui est de la confiscation de produits de la criminalité.
[Traduction]
J’aimerais maintenant parler des changements qui touchent la suramende compensatoire. Le projet de loi propose de rétablir le pouvoir discrétionnaire des juges d’exempter un contrevenant de la suramende compensatoire uniquement lorsque celui-ci est vraiment incapable de la payer. Pour certaines infractions contre l’administration de la justice, lorsque le cumul des suramendes serait disproportionné dans certaines circonstances, le projet de loi prévoit également un pouvoir discrétionnaire limité des juges pour ne pas imposer de suramende compensatoire fédérale pour chaque infraction.
La suramende compensatoire fédérale, qui est prévue dans le Code criminel, est imposée au moment de la détermination de la peine, et les recettes sont perçues et utilisées par la province ou le territoire où l’acte criminel a été commis pour aider au financement des services aux victimes, dans le cadre du processus de détermination de la peine. Aux termes du projet de loi , la suramende compensatoire fédérale continuerait d'être imposée d’office et à s’appliquer de façon cumulative à chaque infraction. Toutefois, pour répondre aux préoccupations concernant l’effet négatif des dispositions actuelles concernant la suramende compensatoire fédérale sur les délinquants marginalisés, un pouvoir discrétionnaire limité serait accordé aux juges en ce qui concerne l’imposition obligatoire et cumulative de la suramende dans certaines circonstances.
Le projet de loi comporte des lignes directrices claires sur ce qui constitue un préjudice injustifié. Ces lignes directrices feraient en sorte que l’exemption obligatoire, ou la renonciation, serait appliquée de façon uniforme et seulement aux délinquants qui sont vraiment incapables de payer la suramende. De plus, le projet de loi précise que le préjudice injustifié se rapporte à la capacité financière de payer et n’est pas simplement lié à l’incarcération. Nous essayons d’éviter la judiciarisation et la surjudiciarisation des gens simplement parce qu’ils sont incapables de payer une suramende compensatoire fédérale.
Pour certaines infractions contre l’administration de la justice, si la suramende cumulative était disproportionnée dans les circonstances, le projet de loi contient des dispositions permettant une exception au ratio de la suramende compensatoire. Cette exception s’appliquerait à deux types d’infractions contre l’administration de la justice: défaut de comparaître en cour et violation des conditions de mise en liberté sous caution par un agent de la paix ou en vertu d’une ordonnance judiciaire, et seulement si ladite violation n’a pas causé de dommages moraux, corporels ou financiers à la victime.
[Français]
Des études révèlent que les délinquants marginalisés, notamment les délinquants autochtones et ceux atteints de troubles de santé mentale et de problèmes de toxicomanie, sont surreprésentés parmi ceux qui ont été déclarés coupables d'infractions contre l'administration de la justice.
Selon l'application actuelle des dispositions sur la suramende compensatoire, il est peu probable que les groupes de délinquants qui ne sont pas en mesure de payer les montants de la suramende compensatoire ou qui sont seulement en mesure d'en payer une partie, tant à cause de leur situation de vie que du cumul d'infractions contre l'administration de justice, ne soient pas de grands contributeurs aux recettes tirées des suramendes compensatoires fédérales qui sont versées aux provinces et aux territoires.
[Traduction]
En outre, les délinquants que la suramende compensatoire obligatoire punit trop sévèrement ne réussissent plus à rétablir leur stabilité financière à cause de l’application actuelle de ces dispositions. Cette suramende les empêche donc de réintégrer la société après avoir purgé leur peine ou après avoir payé toutes leurs amendes. Ils risquent donc de récidiver. Ces situations ne soutiennent aucunement les survivants ou les victimes d’actes criminels. Ils ne financent pas non plus les services qui pourraient les aider. L’exception proposée serait donc conforme aux principes de justice et d’équité.
Je suis sûr qu’en maintenant une suramende obligatoire plus élevée, ce projet de loi soutiendrait l’objectif de l’amende compensatoire, qui est de financer les services provinciaux et territoriaux offerts aux victimes tout en consolidant la responsabilisation des délinquants face à leurs victimes et envers le reste de la société. Il respecterait également les principes de la proportionnalité, de l’équité et du respect de la Charte canadienne des droits et libertés.
Comme je n’ai pas étudié le droit, je vous dirai que je suis honoré de siéger à ce comité et de participer aujourd’hui aux débats de la Chambre sur le projet de loi .
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Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole pour faire part de mes réflexions au sujet du projet de loi , qui est la réponse du gouvernement, nous dit-on, à l’arrêt Jordan portant sur les longs délais du système de justice pénale au Canada. L’arrêt maintenait que les affaires devaient être jugées dans un certain délai, sans quoi les personnes accusées d’un crime pourraient échapper à un procès. Nous avons vu au Canada des cas où des personnes accusées de crimes très graves ont échappé à un procès parce que les délais n’avaient pas été respectés.
Il est très important, selon moi, que le gouvernement et le Parlement fassent quelque chose. Il s’agit d’une plainte de longue date, et pas seulement pour certains des crimes et des procès les plus graves. Des Canadiens qui ont eu l’occasion, d’une façon ou d’une autre, de participer à des procédures judiciaires, surtout s’ils sont des victimes ou des proches de victimes, se sont dits outrés de tout le temps qu’il faut pour obtenir justice. Bien sûr, justice différée est trop souvent justice refusée. L’arrêt Jordan insiste encore davantage là-dessus et augmente l’importance de pouvoir régler les causes rapidement. Si nous ne le faisons pas maintenant, des personnes ne seront jamais jugées pour des crimes qu’elles sont accusées d’avoir commis.
Notre responsabilité, en tant que parlementaires, est de juger, dans l’ensemble, cette mesure législative présentée par le gouvernement, qui n’a pas fait l'objet de beaucoup d’amendements en comité. Je sais que le député de et le caucus néo-démocrate ont accompli de l’excellent travail sur ce projet de loi et qu’ils ont fait de nombreuses propositions au comité que le gouvernement n’a pas acceptées. Il s’agit donc véritablement d’un ensemble de réformes gouvernementales. En tant que parlementaires, nous avons le devoir de décider si, dans l’ensemble, cette mesure permettra de régler les problèmes soulevés dans l’arrêt Jordan et d’accélérer nos processus judiciaires afin que les Canadiens puissent s’attendre à obtenir justice par l'entremise des tribunaux.
Avant de présenter un projet de loi à la Chambre, le gouvernement aurait pu faire diligence pour nommer des juges fédéraux. On n'a cessé de répéter ici que la n’a pas veillé à ce que l’effectif des juges soit complet. Nous avons entendu à maintes reprises à la Chambre que le gouvernement aurait dû agir plus vite. Il y a encore des postes vacants à la magistrature. Le fait est que même si nous avons des lois parfaites, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui et ne le sera pas après l’adoption du projet de loi , si nous n’avons pas de juges pour entendre les causes, les lois en vigueur ne serviront pas à grand-chose. Ce sont les juges qui entendent les causes et qui rendent les décisions.
Le gouvernement a donc le devoir d’agir plus rapidement dans ce dossier. Trois années ont passé. Le gouvernement ne va évidemment pas faire valoir que le Canada manque de personnes qualifiées pour ces postes. Ces personnes existent. Il s’agit que le gouvernement décide de faire de ces nominations une priorité. Mais il ne suffit pas de dire que c’est une priorité. Il faut qu’il nomme les juges. Je ne veux pas entendre des députés ministériels nous expliquer combien c’est important pour eux. J’attends de voir quand ces postes seront pourvus. C’est à cela qu’on verra si c’est vraiment important pour le gouvernement et jusqu'à maintenant, on ne voit aucun signe que c'est le cas.
Nous savons aussi que les peines minimales obligatoires sont l'un des facteurs à l'origine de l'arrêt Jordan et qu'il faut en tenir compte dans ce que le gouvernement semble nous présenter comme une réforme phare du système de justice. Les peines minimales obligatoires étaient très populaires du temps où le parti conservateur formait le gouvernement précédent. Les conservateurs ont rattaché des peines minimales obligatoires à un large éventail d'accusations au criminel. Nous savons qu’elles sont problématiques à plusieurs égards. Je pense qu’elles le sont par principe.
Il n’y a pas deux crimes qui soient identiques. Les circonstances sont différentes selon le crime commis et les personnes impliquées. Les personnes les plus qualifiées pour décider de la durée appropriée de la peine d’emprisonnement, des autres mesures devant être prises, comme le traitement des dépendances, et de tout ce qui entoure la détermination de la peine, ce sont celles qui occupent les fonctions de juge. Je ne crois pas qu’il revienne au Parlement de décider à l’avance de ce qui est la sanction appropriée pour un cas en particulier ou un ensemble de cas. Nous avons des juges pour ce faire. Ils ont été formés comme juristes et ont vu beaucoup de dossiers dans leur carrière, ce qui leur permet de prendre des décisions judicieuses.
Il convient de confier ce travail aux juges, car c'est leur profession. Les peines minimales obligatoires les empêchent de l'exercer pleinement. Ces peines ont entre autres pour conséquence, surtout dans le cas des accusations les moins graves, comme les infractions mineures de possession de drogue et les accusations de cette nature, que l'accusé n'a vraiment pas envie de plaider coupable lorsqu'il sait qu'il en résultera pour lui une peine minimale obligatoire de deux, trois, quatre ou cinq années d'emprisonnement. Nous pouvons faire en sorte que les affaires les plus graves soient entendues rapidement et que les meurtriers et les membres des gangs ne s’en tirent pas à bon compte à cause de l’arrêt Jordan. L'un des moyens que nous pouvons prendre consiste à obtenir de l'accusé qu'il plaide coupable dans le cas des infractions les moins graves. Or, personne n'accepte de plaider coupable si la conséquence est une sévère peine d'emprisonnement.
Comme je l'ai dit, des personnes sont capables de prendre des décisions judicieuses, dans les tribunaux et dans la police, si elles en ont la latitude. Il est important de laisser aux juges, aux procureurs et à la police le soin de classer les affaires par ordre de priorité, précisément pour s’assurer que les pires et celles qui ont les meilleures chances d’aboutir à une condamnation soient jugées. Justice est alors faite, et les tribunaux ne sont pas encombrés par toutes sortes d’affaires sans que l'on puisse juger de celles qui sont relativement importantes et de celles qui le sont moins.
Les changements apportés au système judiciaire pendant la dernière législature ont causé ce problème majeur. À part le Parti conservateur et ceux qui l'ont appuyé aux dernières élections, on s’entendait généralement pour dire que les peines minimales obligatoires devaient être abrogées. Pourtant, ce n'est pas le cas dans ce projet de loi. On n'y trouve pas ces modifications législatives, qui iraient pourtant de soi, qui auraient été utiles pour donner suite à l’arrêt Jordan et qui auraient été importantes aussi par principe.
Par ailleurs, le projet de loi crée des infractions mixtes, qui relèvent à la fois des intervenants provinciaux et fédéraux. Or, on craint vraiment que le raccourcissement des délais dans les tribunaux fédéraux ne se fasse aux dépens des délais dans les tribunaux provinciaux. D’une certaine manière, c’est typiquement libéral.
Je ne veux pas me montrer trop partisan à ce sujet, mais je me rappelle que, dans les années 1990, le gouvernement fédéral a décidé d’équilibrer le budget à tout prix. Il a procédé à des coupes majeures dans le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Cela a plombé les finances des gouvernements provinciaux, qui ne disposaient plus des mêmes fonds pour les services de santé et les autres services offerts à leur population. Les provinces se sont mises soit à accuser des déficits pour pouvoir maintenir les services qui étaient financés jusqu’alors par le gouvernement fédéral, soit à prendre d’autres mesures, comme réduire les services ou hausser le fardeau fiscal.
Les finances fédérales ont été assainies, mais comme ce sont les mêmes contribuables qui versent de l'argent dans les coffres provinciaux et fédéraux, ils se sont mis à payer au fisc provincial ce qu'ils payaient au fisc fédéral auparavant. Ce qui semblait bon pour le gouvernement fédéral n’a finalement pas changé grand-chose pour les Canadiens. Ils en ont fait les frais, que ce soit par une hausse des prélèvements fiscaux effectués par les provinces ou par une nette réduction des services.
Malheureusement, nous avions un gouvernement conservateur dans les années 1990 et cela nous a valu des coupes dans les services. Nous avons perdu des infirmières et des enseignants, et le gouvernement fédéral, qui se pavanait, faisait semblant de ne pas être responsable de ces pertes. Pourtant, en fin de compte, c'était le résultat des compressions budgétaires fédérales.
Ce projet de loi nous prépare une situation qui pourrait être similaire, où le gouvernement fédéral dira que les délais à la Cour fédérale ont beaucoup diminué, tandis que les délais resteront trop importants dans les tribunaux provinciaux parce que des personnes qui, auparavant, auraient été traduites devant un tribunal fédéral seront désormais jugées par un tribunal provincial. Les délais seront toujours là, et on n'aura fait que changer le mal de place. Les listes d'attente seront déplacées des tribunaux fédéraux aux tribunaux provinciaux.
Quiconque y regarde de près ne peut être dupe de ce que proposent les libéraux. Si notre travail est de nous assurer que les délais diminuent et que justice soit faite rapidement, il est vraiment important que nous nous y employions sérieusement, plutôt que de simplement donner au gouvernement fédéral un argument pour se vanter aux dépens des provinces.
Mon temps de parole est écoulé, mais je répondrai avec plaisir aux questions.
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Madame la Présidente, c’est un honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre au sujet du projet de loi . Comme les députés le savent, le projet de loi C-75 confirme l’engagement du gouvernement de faire en sorte que le système de justice pénale continue de servir les citoyens canadiens de la manière la plus efficace, la plus équitable et la plus accessible possible.
Grâce au projet de loi , le gouvernement tient sa promesse de moderniser le système de justice pénale et de réduire les retards dans les tribunaux. Le gouvernement précédent n’ayant rien fait à cet égard, ces retards perdurent dans le système de justice pénale. Le problème n’est pas nouveau.
Cependant, le gouvernement reconnaît que nous pouvons et devons mieux faire. Depuis 2015, nous avons entendu d’innombrables intervenants, membres de la collectivité, avocats et autres au sujet de la nécessité de réformer le système de justice pénale.
En fait, les arrêts rendus par la Cour suprême dans les affaires Jordan et Cody le justifient davantage encore. Donc, grâce à des efforts de collaboration définis par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, le projet de loi vise à remédier à ces lacunes importantes.
Entre autres réformes, le projet de loi propose de limiter le recours aux enquêtes préliminaires aux infractions rendant leur auteur passible d'une peine maximale d'emprisonnement, de moderniser les pratiques et la procédure en matière de remise en liberté provisoire pour améliorer l’accès à la justice, de mieux protéger les victimes de violence entre partenaires intimes, d'élargir les pouvoirs des juges en matière de gestion des instances et du règlement efficace des affaires criminelles, d'ériger en infractions mixtes les actes criminels passibles d'un emprisonnement maximal de 10 ans ou moins, et de porter à deux ans moins un jour la peine maximale pour toutes les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Aujourd’hui, je me concentrerai sur les infractions mixtes que prévoit le projet de loi . Les mesures qu’il contient confèrent aux procureurs de la Couronne le pouvoir discrétionnaire de choisir le mode de poursuite le plus efficace, évalué au cas par cas. Ce système de reclassification permettra aux tribunaux de consacrer moins de temps aux infractions moins graves et de réaffecter des ressources limitées à des actes criminels plus graves. En outre, le projet de loi empêche de classer des actes criminels sans suite ou de suspendre les poursuites parce que le système est dans l’incapacité de juger l’accusé dans des délais raisonnables.
Le projet de loi transforme plus de 115 infractions en infractions punissables soit par mise en accusation, soit par procédure sommaire. Comme le projet érige en infractions mixtes toutes les infractions punissables sur acte d'accusation et passibles d’un emprisonnement maximal de 10 ans ou moins, les actes criminels liés au terrorisme et au génocide sont donc visés. Ces dispositions renvoient à l’article 83.02 du Code criminel, « Fournir ou réunir des biens en vue de certains actes »; à l’article 83.03, « Fournir, rendre disponibles, etc. des biens ou services à des fins terroristes »; à l’article 83.04, « Utiliser ou avoir en sa possession des biens à des fins terroristes »; à l’article 83.18, « Participation à une activité d’un groupe terroriste »; à l’article 83.181, « Quitter le Canada: participation à une activité d’un groupe terroriste »; au paragraphe 83.221(1), « Préconiser ou fomenter la perpétration d’infractions de terrorisme »; aux paragraphes 83.23(1) et 83.23(2), « Cacher une personne qui s’est livrée à une activité terroriste » et « Cacher une personne qui se livrera vraisemblablement à une activité terroriste »; et, enfin, au paragraphe 318(1), « Encouragement au génocide ».
Le Canada joue un rôle de premier plan dans la lutte en faveur des droits universels de la personne et de la primauté du droit international. Notre pays a été l'un des premiers signataires du Statut de Rome et le premier à ratifier son adhésion à la Cour pénale internationale. De plus, le Canada a, à plusieurs reprises, dénoncé publiquement les agissements d'autres gouvernements qui maltraitaient leurs citoyens et milité afin que la Cour pénale internationale enquête sur ces situations, notamment au Myanmar et au Venezuela. Les Canadiens sont fiers de la diversité de leur pays, un pays reconnu à l'échelle mondiale pour sa défense des droits de la personne.
Étant donné la grande rareté des affaires soumises aux tribunaux canadiens qui portent sur des infractions en matière de génocide et de terrorisme, ainsi que l'extrême gravité de ces enjeux et l'obligation morale du Canada, qui se doit de continuer à promouvoir la justice sur la scène internationale, je suis fier d'informer la Chambre que les huit dispositions mentionnées plus tôt, qui portent sur des infractions relatives au génocide et au terrorisme, ont été retirées de la liste des infractions reclassifiées. Ainsi, toutes les infractions liées au génocide et au terrorisme demeureront punissables par mise en accusation et assorties d'une peine maximale de 10 ans moins un jour.
Pendant les témoignages présentés au comité, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes a fortement appuyé ces modifications, en ces termes:
[...] le terrorisme est un phénomène haineux et potentiellement catastrophique. De nos jours, des groupes terroristes partout dans le monde, dont certains s'emploient activement à inspirer des recrues au Canada, sont souvent motivés par des idéologies empreintes d'antisémitisme. Dans le monde entier, les communautés juives — de l'Argentine au Danemark, et de la France à Israël — sont trop nombreuses à avoir subi des attentats terroristes meurtriers.
Par ailleurs, l'organisme B'nai Brith Canada s'est dit préoccupé par une éventuelle reclassification des infractions en matière de génocide et de terrorisme en infractions mixtes:
Il serait inacceptable de permettre que ces infractions soient punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Il faut les traiter avec tout le sérieux qu'elles méritent, c'est-à-dire voir à ce qu'elles soient toujours punissables par mise en accusation.
Après les recommandations demandant que les huit dispositions concernant le génocide et le terrorisme soient retirées du projet de loi , notre gouvernement continuera à envoyer un message clair, moral et symbolique condamnant ces crimes. Cependant, je dois préciser que la reclassification des infractions ne change en rien les principes fondamentaux de détermination de la peine appliqués par les tribunaux. Selon la gravité du cas, le poursuivant sera tenu de prendre en compte une multitude de facteurs et, en fin de compte, décider s’il va procéder selon la voie de mise en accusation ou la déclaration sommaire de culpabilité.
Avant de terminer, en ma qualité de membre du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, j’aimerais saisir cette occasion pour présenter mes sincères remerciements à tous les témoins qui ont comparu pour présenter leur opinion experte concernant le projet de loi . Je peux leur assurer que toutes leurs demandes et recommandations ont été examinées attentivement et prises en considération.
Bien qu’il n’y ait pas de solution simple pour régler le problème des retards des tribunaux, notre gouvernement prend des mesures pour introduire dans le système de justice pénale un changement de culture qui permettra d’aller au fond du problème. Nous prenons des mesures importantes pour agir en fonction de ce que nous avons entendu. De plus, nous profitons pleinement de cette occasion de créer un système de justice pénale qui soit compatissant et opportun, un système qui fasse état des besoins et des attentes de tous les Canadiens.
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Monsieur le Président, je suis ravie de prendre la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois.
Il est décevant de voir qu’encore une fois, le gouvernement libéral dépose un projet de loi omnibus de 300 pages après avoir promis explicitement en campagne électorale qu’il n’allait pas le faire. Cependant, les promesses non tenues semblent être monnaie courante pour le gouvernement libéral ces jours-ci.
Cela dit, pensons aux résultats que nous souhaitons obtenir dans le système de justice et voyons si le projet de loi y parviendra ou non.
Nous souhaitons tout d’abord définir les comportements qui sont criminels dans notre système de justice. Nous souhaitons déterminer ce qui n'est pas acceptable dans la société canadienne. Voilà l’objectif premier. Le second serait de nous assurer que des peines adéquates sont établies pour dissuader les gens de commettre ces infractions. Nous tenons à nous assurer de définir ce qu’est une peine adéquate. Nous voulons nous assurer que les droits des victimes sont protégés, que nous ne nous attardons pas seulement au criminel, mais que nous veillons aussi à protéger les droits des victimes. Puis, nous tenons à nous assurer que, quelles que soient les règles que nous établissons, nous les appliquions en temps opportun.
Je crois que c’est réellement ce que nous attendons du système de justice pénale.
Si l’on regarde le bilan des conservateurs, tout le monde sait au Canada que les conservateurs veulent que l’on soit sévère envers les criminels. Nous voulons nous assurer qu'une personne qui commet un crime reçoit la peine assortie à ce crime. Nous voulons nous assurer qu’elle ne s’en tire pas sans conséquence.
Si l’on regarde le bilan des libéraux, celui-ci n’est pas aussi clair. Je dirais même que les criminels se portent plutôt bien sous le régime libéral.
Pour commencer, le gouvernement libéral n’a pas encore pourvu les postes de juge nécessaires pour que les causes puissent être entendues en temps opportun. Selon le principe Jordan, si la cause n’est pas entendue dans les deux ans, les personnes sont libérées. Il y a eu des meurtriers et des violeurs dont les procès ont été annulés parce qu’il n’y avait pas assez de juges en poste. C’est un échec flagrant du gouvernement libéral. Nous en sommes à la quatrième année d’un mandat de quatre ans, et il y a toujours des postes de juge vacants, ce qui entraîne l’annulation répétée de procès pour cause de retard.
Si le gouvernement était sérieux, il aurait dû à un moment donné jeter un coup d’œil à des crimes moins graves. Par exemple, s’il pensait qu’il allait légaliser la marijuana, peut-être que les accusations se rapportant à la possession de marijuana qui étaient en attente de traitement auraient pu être écartées pour permettre que des causes de crimes plus graves, comme le meurtre et le viol, soient entendues. Cela n’a pas été fait.
On peut constater aussi que le gouvernement libéral tente continuellement de réduire les peines imposées.
Aujourd’hui, dans la société canadienne, c’est un crime que de perturber une cérémonie religieuse ou de menacer un ministre du culte. Le gouvernement libéral a tenté de supprimer ces protections à l'endroit des ministres du culte au moyen du projet de loi , qui a déclenché une réaction adverse d'un bout à l'autre du Canada. Je sais que toutes les églises de ma circonscription ont envoyé des lettres. De nombreuses pétitions ont été déposées. Les Canadiens ont protesté si fort que le gouvernement a fait marche arrière. Maintenant, avec le projet de loi , c’est une des choses pour lesquelles le gouvernement veut réduire la peine sur déclaration sommaire de culpabilité, ce qui représente moins de deux ans de prison ou une amende pour avoir gêné ou arrêté un ministre du culte, ou lui avoir fait violence. C’est un peu sournois de la part du gouvernement de tenter de glisser cela dans un autre projet de loi, alors qu’il avait entendu le message clair des Canadiens. Ce n’est pas très louable.
Jetons un regard sur les autres crimes qui sont considérés dans le projet de loi comme étant mineurs et assujettis à la décision d’un juge à savoir si le coupable reçoit simplement une amende ou une peine d’emprisonnement maximale de deux ans sur déclaration sommaire de culpabilité.
Il y a le bris de prison. Vraiment, une personne qui s’échappe de prison recevra une amende. Cela ne devrait même pas être une option. On a aussi les actes de corruption dans les affaires municipales, ainsi qu’influencer ou négocier une nomination ou en faire commerce. Nous avons déjà parlé du fait de gêner ou d’arrêter un ministre du culte ou de lui faire violence.
On a la conduite avec capacités affaiblies causant des lésions corporelles. C’est incroyable, surtout en ce moment, alors qu'ils viennent tout juste de légaliser la marijuana et que toutes les administrations voient les décès sur la route tripler en raison de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue, que les libéraux décident que ce crime est moins grave et que les coupables puissent s’en tirer avec une peine sur déclaration sommaire de culpabilité ou même une amende.
En ce qui concerne l’enlèvement d’une personne âgée de moins de 16 ans ou de moins de 14 ans, y a-t-il un crime plus grave que l’enlèvement d’un enfant? Je ne peux le concevoir. Imposer à une personne une amende ou une peine sur déclaration sommaire de culpabilité donne l’impression qu’il n’y a plus aucun guide moral.
Il est intéressant de voir que la polygamie est sur la liste. Elle ne nous a pas causé beaucoup de problèmes. La polygamie a toujours été illégale au Canada. Pourquoi disons-nous maintenant qu’on réduirait la peine imposée à la polygamie et la convertirait en une amende?
Qu’en est-il du mariage forcé? J’étais au comité des affaires étrangères hier et nous avons entendu des témoignages du Congo, de la Somalie et du Soudan du Sud au sujet des situations catastrophiques là-bas et du fait que 50 % des filles sont forcées au mariage, avec les conséquences horribles que cela a sur leur vie. Les députés libéraux membres du comité s’exclamaient : « Oh, c’est terrible. » Cependant, dans notre propre pays, nous avons décidé que la peine pour mariage forcé sera une amende ou une peine maximale de deux ans moins un jour sur déclaration sommaire de culpabilité. C’est ridicule.
L’incendie criminel, pour plusieurs raisons, fait partie maintenant de la liste et est considéré comme n’étant pas un crime grave quand, en fait, il pousse à la hausse le coût des assurances et il fait perdre aux gens leurs logements. De toute évidence, c’est un crime grave.
La participation aux activités d’une organisation criminelle est maintenant considérée comme n'étant pas trop grave. Les députés ministériels se dressent quotidiennement pour parler de tenter d’éliminer le crime organisé au Canada. Maintenant, apparemment, si des personnes participent à un crime organisé, ce n’est pas une infraction très grave.
Par conséquent, le projet de loi ne répond pas à ce que nous avons déclaré vouloir initialement pour notre système de justice pénale. Nous souhaitions des peines adaptées aux crimes pour décourager le crime. Ce n’est pas ce qui se passe ici.
En plus de toutes ces choses, d’autres changements sont aussi recommandés dans ce projet de loi. Il y a l’élimination des changements liés à la suramende compensatoire adoptés par les conservateurs. Il est crucial que nous protégions les droits des victimes et qu’il y ait un fonds qui permette d’aider les victimes d’une certaine façon après l'épreuve qu'elles ont vécue.
Retirer le pouvoir de demander l’imposition à un jeune de la peine applicable aux adultes m’inquiète quelque peu. Il y a certains crimes particulièrement graves dans le cas desquels le juge a encore besoin d’avoir ce pouvoir.
Retarder les peines consécutives pour ceux qui font la traite des personnes était une mesure législative importante mise en place sous le gouvernement conservateur. Nous avons un énorme problème de traite des personnes. De ma circonscription à Toronto, il y a un énorme réseau. Si quelqu’un se livre à la traite des personnes, plus d’une vie est bouleversée. On parle de centaines de jeunes filles. Les peines consécutives permettaient de condamner le trafiquant pour chacune des victimes, c’est-à-dire de l’enfermer pour très longtemps pour ce qui est un crime odieux.
J’aime toujours souligner les bonnes et les mauvaises choses dans un projet de loi. Je vois ici que les seules augmentations de peines concernent les récidivistes dans les cas de violence contre un partenaire intime. Je m’en réjouis parce que la réponse du gouvernement face à la violence contre les femmes était totalement insuffisante. J’ai présidé le comité de la condition féminine, où nous avons étudié la question et constaté qu’une Canadienne sur trois est victime d’actes violents au cours de sa vie. Il est décevant de voir que le gouvernement actuel, tout en prévoyant 400 millions de dollars dans le dernier budget pour permettre à Statistique Canada de voler des données personnelles de citoyens, consacre 20 millions par an à la lutte contre la violence faite aux femmes. C’est totalement insuffisant. Au moins, les libéraux font quelque chose dans ce projet de loi pour essayer d’avancer sur ce front.
En résumé, je dirai que le projet de loi n’atteint pas les objectifs. Il n’aide pas à mettre des sanctions en place. En fait, je dirai qu’il réduit les sanctions auxquelles les contrevenants s’exposent.
Je demande à la de faire son travail, de nommer les juges qui manquent et de mettre en place des sanctions qui correspondent aux crimes. J’ai présenté de nombreuses pétitions à la Chambre visant à éliminer le projet de loi .
Les libéraux parlent d’essayer de réduire les délais. Ils le pourraient en ne jugeant aucun criminel et en ne mettant aucun d’eux derrière les barreaux. Cela réduirait les délais, mais nous n’aurions pas ce que nous souhaitons avoir dans notre système de justice, qui est de définir les crimes et les sanctions adéquates et de veiller à ce qu’elles soient appliquées en temps voulu.
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Monsieur le Président, c'est un honneur et un plaisir pour moi de prendre la parole au sujet du projet de loi .
La nécessité de moderniser notre système de justice pénale est incontestable. Pour atteindre cet objectif, des modifications au Code criminel, à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d'autres lois s'imposent. Des problèmes tels que les longs délais avant les procès, les changements dans la façon de gérer les enjeux concernant l'administration de la justice, les modifications législatives ainsi que la gestion judiciaire des dossiers font partie des questions qui doivent être révisées. Cependant, à mon humble avis, la modification la plus importante concerne le traitement réservé par le système de justice à certains accusés.
Des groupes, comme les populations autochtones, les minorités et les personnes atteintes d'une maladie mentale ou qui ont un problème d'abus de substances, occupent une place disproportionnée dans notre système de justice pénale. Ces groupes font partie des gens les plus vulnérables de notre société. Malgré cela, lorsqu'ils sont confrontés au système de justice, ils reçoivent parfois un traitement injuste. On peut aller jusqu'à parler de traitement hostile. On ne peut pas avoir un système de justice qui s'applique différemment selon les personnes. C'est inacceptable, et cette situation dure depuis bien longtemps.
Le projet de loi nous permet de corriger ces inégalités présentes dans le système de justice. Des plaignants qui attendent depuis de nombreuses années pour témoigner, ainsi que des victimes qui souhaitent tourner la page et reprendre une vie normale n'ont pas d'autre choix que d'attendre, et ce, à cause des retards dans le système. Leur besoin de se sentir en sécurité ainsi que la mission du système de justice de maintenir l'ordre public sont freinés par ces délais. Il y a également les cas de personnes accusées qui attendent des années pour être innocentées ou de personnes ayant commis des crimes odieux qui réussissent à s'en sortir à cause de l'inefficacité du système.
À cause du manque de temps, la modification sur laquelle je porterai mon attention concerne la question du cautionnement. Cela est un des aspects du droit criminel qui touche directement à la présomption d'innocence. Ce concept fondamental est protégé par l'article 11(d) de la Charte canadienne des droits et libertés. La Charte garantit à tout inculpé le droit d'être présumé innocent tant qu'il n'est pas déclaré coupable par un tribunal indépendant et impartial. L'article 11(e) de la Charte prévoit le droit ne pas être privé sans juste cause d'une mise en liberté assortie d'un cautionnement raisonnable. L'article 7 de la Charte prévoit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne. Il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.
Par conséquent, en matière de cautionnement, il est impératif de pouvoir bénéficier pleinement des garanties offertes par la Charte. Chacun d'entre nous doit être traité de manière égale, conformément à la Charte des droits et libertés et d'autres lois. Malheureusement, cela n'est pas toujours le cas. À titre d'exemple, les accusés qui habitent dans des communautés éloignées sont affectés disproportionnellement par le système de caution tel qu'il existe présentement. Statistiquement, on constate que ceux qui vivent dans des réserves sont touchés de façon importante par la pauvreté, un taux de chômage élevé et des problèmes d'abus de substances. Conséquemment, ils ne possèdent que très peu de biens. On requiert également des cautions de ceux qui doivent se déplacer de leur communauté éloignée vers les grandes villes car le système judiciaire ne dessert pas ces endroits. Comment ces gens peuvent-ils fournir une caution? Lorsque le fardeau imposé est si coûteux, cela ne signifie-t-il pas qu'il y a une violation des droits garantis par la Charte?
C'est la raison pour laquelle le projet de loi est si important. Il permettrait une forme de mise en liberté moins contraignante pour ceux qui sont déjà défavorisés par rapport aux autres membres de notre société.
Cela contribuera également à briser le cycle de la représentation disproportionnée de ceux qui sont les plus vulnérables dans le système de justice.
J'ajouterai aussi que le projet de loi revêt une grande importance, car il touche à la question des comparutions à distance. Ce projet de loi se mettrait au diapason de la technologie actuelle avec tous ses avantages. La possibilité de faire usage de l'audioconférence et de la vidéoconférence en permettant à toutes les parties impliquées dans le processus pénal, y compris les juges, d'y participer serait inestimable.
Au lieu de dépenser des ressources importantes pour faire venir par avion les accusés de communautés éloignées, il serait judicieux de leur permettre de comparaître en utilisant les technologies susmentionnées, ce qui allégera le fardeau financier pour l'ensemble de la société, en plus de donner un meilleur accès à la justice aux accusés. En outre, les plaignants seraient déchargés de se déplacer de leur communauté éloignée, car ils pourraient réclamer justice par l'entremise de ces canaux.
Avec l'autorisation discrétionnaire du tribunal, qui prendrait en considération toutes les circonstances propres à chaque dossier, ces moyens technologiques pourraient être utilisés afin de faciliter la comparution à distance à chaque étape du processus judiciaire.
La raison derrière les modifications concernant les comparutions à distance est de contribuer à la bonne administration de la justice, qui comprend des procédures judiciaires justes et efficaces, tout en respectant les droits de l'accusé d'avoir un procès juste et équitable et de bénéficier d'une défense pleine et entière, tel que garanti par les articles 7 et 11(d) de la Charte canadienne des droits et libertés.
Lorsqu'on passe en revue les négociations de plaidoyers, beaucoup de choses peuvent mal tourner. À titre d'exemple, il arrive assez souvent qu'un accusé plaide coupable afin de minimiser les dépenses de sa défense. Ceux qui vivent dans la précarité seront moins enclins à se défendre adéquatement. Cette réalité démontre une fois de plus la nécessité du projet de loi . C'est effectivement très triste lorsqu'une personne innocente décide de plaider coupable parce que c'est plus rapide et moins coûteux.
L'article 270 de ce projet de loi fait ressortir un fait important. En effet, plusieurs personnes vulnérables telles que les adolescents, qui ne sont pas toujours conscients de l'ampleur de leurs gestes et de leurs décisions, les peuples autochtones, les minorités, ainsi que ceux qui souhaitent éviter le stress des longs délais avant les procès, sont plus susceptibles de plaider coupable pour toutes ces raisons.
En plus des dispositions prévues à l'article 606 du Code criminel, la modification exigerait que le juge soit satisfait quant aux faits présentés pour justifier l'accusation avant d'accepter le plaidoyer de culpabilité.
[Traduction]
Dans le projet de loi , la modernisation de la mise en liberté sous caution prévoit aussi des changements au sujet de la violence entre partenaires intimes. Il est malheureux que, jusqu’à récemment, la question de la violence entre partenaires intimes n’ait pas reçu l’attention qu’elle mérite. Les changements apportés au système de justice pénale à cet égard vont dans le sens de l’engagement du gouvernement actuel à soutenir davantage les victimes de violence familiale.
Statistiquement, la violence contre un partenaire intime est la forme de violence le plus souvent signalée à la police. Une femme sur deux est victime de violence conjugale. C’est une statistique désastreuse. Autrement dit, 50 % de la population féminine a été victimisée dans une relation intime. C’est très difficile pour les gens qui sont déjà vulnérables, comme les personnes âgées, trans ou handicapées, ou encore les Autochtones. Une fois, c’est une fois de trop quand une personne accusée de violence contre un partenaire intime est libérée sous caution et qu'elle retourne s’en prendre au même partenaire. Cette raison montre à elle seule l’urgence de traiter directement la violence entre partenaires intimes lors des audiences de libération sous caution.
Les amendements que j’ai mentionnés sont essentiels pour protéger les personnes exposées à de telles formes de violence. Pour toutes ces raisons, j’appuie le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d'autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois. Ce projet de loi omnibus compte plus de 200 pages. Il comprend d’importantes réformes de notre système de justice pénale.
Compte tenu du niveau inquiétant de la criminalité en milieu rural dans ma circonscription, la sécurité de mes électeurs est ma grande priorité. La sécurité des Canadiens devrait être la première priorité de tout gouvernement.
Certes, j’en conviens, il contribuera, par certains aspects, à réduire les délais du système judiciaire, mais il comporte plusieurs problèmes qui me préoccupent.
Premièrement, je veux parler du projet de loi lui-même. Comme je l’ai mentionné, ce projet de loi omnibus a 204 pages. Je rappelle aux libéraux que, pendant la campagne électorale, ils ont promis de ne jamais déposer de projets de loi omnibus, mais voilà qu’ils l’ont fait. Mais 80 autres promesses ont été rompues ou n’ont même pas encore commencé.
C’est toujours sur la page Web des libéraux, que j’ai consultée l’autre jour. On y lit que les projets de loi omnibus « empêche[nt] les parlementaires d’étudier [les] propositions [du gouvernement] et d’en débattre convenablement. Nous mettrons un terme à cette pratique antidémocratique en modifiant le Règlement de la Chambre des communes. » Et nous voici aujourd’hui en train de débattre d’un projet de loi omnibus.
Ce texte fourre-tout modifie de diverses façons un total de 13 lois différentes. Il faut le diviser en parties plus faciles à gérer pour pouvoir l’étudier convenablement. Qui plus est, le gouvernement en a profité pour y englober trois projets de loi qui ont déjà été déposés, le projet de loi , suramende compensatoire; le projet de loi , peines consécutives pour la traite de personnes; et le projet de loi , dispositions inconstitutionnelles. S’il pouvait mieux gérer son programme législatif, le gouvernement n’aurait peut être pas besoin de déposer de nouveau ses projets de loi, de faire adopter des projets de loi omnibus à toute vapeur ou d’imposer à répétition l’attribution du temps pour limiter les débats.
Les libéraux ne prennent pas au sérieux les questions de justice pénale. En mars, ils ont déposé ce projet de loi à la veille d’une pause de deux semaines dans notre calendrier des séances. Puis, ils ont attendu six mois. Et voici qu’ils le ramènent au moment où il ne reste plus que quelques semaines avant notre relâche de six semaines. Cela ne renvoie pas une image de grande priorité de la justice pour le gouvernement libéral.
À cause de l’absence de nominations à la magistrature par le gouvernement, des criminels violents ont pu s’en sortir sans procès. En date du 2 novembre, 54 postes à la magistrature fédérale demeuraient vacants. La nomination des juges est une solution efficace qui est beaucoup plus rapide que l’adoption forcée d’un projet de loi omnibus au Parlement. Je me rappelle qu’en avril la ministre avait parlé de 54 nouveaux juges fédéraux. Pourtant, nous voici, presque à la fin de l’année, et elle n’a toujours rien fait.
Je veux aussi parler de ce qui se trouve dans le projet de loi. Encore une fois, je peux appuyer certaines parties du projet de loi. Par exemple, je suis d’accord avec les efforts visant à moderniser et à clarifier les dispositions relatives à la mise en liberté provisoire et à faire adopter des dispositions plus onéreuses pour la la mise en liberté provisoire dans le cas des infractions avec violence contre un partenaire intime.
La modernisation et la simplification des dispositions relatives à la mise en liberté provisoire constituent une étape importante pour aider de nombreuses collectivités rurales du pays qui n’ont pas les ressources nécessaires pour s’y retrouver dans de longues procédures et formalités administratives. Pour cette raison, je suis en faveur.
Toutefois, j'aurais souhaité que les exigences plus rigoureuses pour la mise en liberté ne se limitent pas aux infractions relatives à la violence conjugale. Étant donné que le taux de criminalité en milieu rural dans ma circonscription et partout au Canada est alarmant, ce qui est souvent le fait de récidivistes, nous devons faire en sorte qu'il soit plus difficile pour les criminels violents d'être libérés. Autrement, il s'agit d'une porte tournante: les gens commettent un crime, ils se font arrêter, ils sont libérés, puis ils recommencent.
Vendredi dernier, j'ai assisté à un colloque sur la criminalité en milieu rural à Red Deer. Un ancien policier du service de police de Calgary nous a parlé de l'une des affaires sur lesquelles il a travaillé récemment. Un délinquant de l'Alberta a été accusé de 130 infractions, allant de l'introduction par effraction au vol de voiture, en passant par le vol de matériel et la possession de biens volés.
Lors de la dernière audience en Alberta, le juge l'a remis en liberté. On lui a montré la porte. Où est-il allé? Il est parti en Colombie-Britannique. On sait maintenant qu'il est recherché en Colombie-Britannique, où une centaine d'accusations en instance pèsent contre lui, celles-ci ayant été portées en très peu de temps. Cette personne n'aurait pas dû être libérée.
Ces criminels s'en prennent aux agriculteurs et aux aînés. Ils savent que les ressources de la GRC dans ces régions sont inadéquates et ils en profitent pleinement. Le gouvernement doit offrir aux forces de l'ordre les outils dont elles ont besoin pour mettre un terme au syndrome de la porte tournante qui touche les tribunaux et qui incite au récidivisme. C'est ce qui se passe constamment.
On devrait placer les victimes au coeur du système de justice pénale du Canada plutôt qu'offrir un traitement spécial aux criminels. Voilà pourquoi notre parti a présenté la Charte des droits des victimes. Malheureusement, le gouvernement n'en convient pas, étant donné que le projet de loi abrogera les changements que nous avons apportés à la suramende compensatoire et qu'il en réduira son utilisation et son efficacité globales.
À mon avis, il faut protéger les victimes d'actes criminels, c'est pourquoi j'ai présenté mon propre projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi , qui garantira que les criminels qui abusent des personnes vulnérables, plus précisément les adultes qui dépendent des autres pour subvenir à leurs besoins, s'exposent à des peines sévères et fermes.
Le mois dernier, un homme de ma circonscription, Yellowhead, a témoigné devant le comité de la sécurité publique et nationale. Il nous a fait part de son expérience personnelle, une histoire terrible. Cet homme, que je considère comme un ami, a 83 ans. Un jour, il a entendu son camion démarrer pendant qu’il dînait avec sa femme. Dehors, il a constaté que son camion se dirigeait vers la sortie de la cour. Il habite à environ 70 kilomètres de la ville d’Edson, où se trouve le poste de police local. Il a pris son téléphone et était sur le point d’appeler quand le véhicule est revenu dans la cour. Deux jeunes, l’un âgé de 18 ans et l’autre de 17 ans, en sont sortis, l’ont renversé au sol, lui ont donné des coups de pied au visage, à la poitrine et aux côtes, ont essayé de lui couper la gorge, puis se sont enfuis de nouveau. Ce monsieur a 83 ans. L’affaire est toujours devant les tribunaux même si l’événement remonte à un an. Ce monsieur a dû se présenter devant les tribunaux 10 fois jusqu’à maintenant et l’affaire n’est toujours pas réglée.
De ce côté-ci de la Chambre, nous nous efforcerons toujours de renforcer le Code criminel du Canada et de faire en sorte qu’il soit plus difficile pour les criminels de s’en sortir.
Je crains que certaines parties du projet de loi n’affaiblissent notre système de justice. Grâce à ce projet de loi, les libéraux réduiraient les peines imposées pour les crimes suivants: participation aux activités d’organisations criminelles, divers actes de corruption, bris de prison, conduite avec facultés affaiblies, enlèvement, traite de personnes, mariage forcé et incendie criminel, pour n’en nommer que quelques-uns. La participation à des activités terroristes et la promotion du génocide ont été supprimées de cette liste uniquement parce qu’un amendement conservateur a été accepté au comité. Ce ne sont là que quelques exemples de plus d’une centaine de crimes graves qui pourraient faire l’objet de poursuites par procédure sommaire et entraîner des peines plus légères, voire des amendes.
Le gouvernement ne prend pas au sérieux les questions de justice pénale. La réduction des peines pour les crimes graves envoie le mauvais message aux victimes, aux Canadiens respectueux des lois et aux criminels.
Je m’inquiète également du libellé utilisé dans l’article qui augmenterait les peines maximales pour les récidives impliquant la violence entre partenaires intimes. Je suis en faveur de l’augmentation de ces peines, mais je ne suis pas en faveur de remplacer le mot « conjoint » par « partenaire intime ». Je crois qu’il faudrait inclure les deux. Je comprends que la violence familiale ne se produit pas toujours dans le cadre d’une relation conjugale et qu’il convient d’inclure l’expression « partenaire intime ». Toutefois, celle ci ne devrait pas remplacer le mot « conjoint ». Il faudrait plutôt inclure les deux termes.
Un autre problème que me pose le projet de loi , c’est le renversement des mesures de protection pour les autorités religieuses.
Lorsque le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne en janvier, deux amendements ont été proposés par mes collègues conservateurs. Le premier amendement proposait de conserver l’article 176 dans le Code criminel du Canada, tandis que le deuxième visait à moderniser le libellé de cet article. Les libéraux étaient d’accord avec ces amendements et c’était bien, mais ils doivent écouter davantage.
Imaginez ma déception quand j'ai lu dans le projet de loi que l’article 176 du Code criminel avait encore une fois été ciblé. Les voies de fait contre les ministres du culte pendant un service religieux sont très graves et devraient demeurer un acte criminel.
Je suis reconnaissant d'avoir pu présenter mon point de vue.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur la troisième lecture du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d’autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois. Mes observations porteront principalement sur des questions liées à la détermination de la peine.
D'entrée de jeu, il est important de répondre aux critiques formulées à maintes reprises par l’opposition selon lesquelles le reclassement en infraction mixte des infractions punissables par mise en accusation et passibles d’un emprisonnement maximal de dix ans -- soit autoriser la Couronne à procéder par procédure sommaire dans les cas appropriés -- diminuerait la gravité de ces infractions. Ces préoccupations témoignent d’un manque de confiance envers les magistrats et les procureurs de la Couronne, qui prennent déjà ces décisions au quotidien. Elles témoignent également d’une profonde incompréhension des objectifs du reclassement de certaines infractions dans le projet de loi .
Le projet de reclassement des infractions est de nature procédurale et vise à permettre les poursuites par procédure sommaire pour une infraction qui n’entraîne pas actuellement une peine de plus de deux ans. Par exemple, il est faux d’affirmer que par le reclassement des infractions prévues à l’article 467.11 du Code criminel, sous la rubrique Participation aux activités d’une organisation criminelle, le projet de loi laisse entendre que les infractions liées aux organisations criminelles ne sont pas graves.
L’amendement proposé reconnaît simplement que cette infraction peut, selon l’éventail des comportements ciblés, comprendre des situations où une peine adéquate est une déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Une déclaration de culpabilité par procédure sommaire dans ces circonstances permet d’accélérer les procédures sans compromettre la sécurité publique ou avoir de conséquences sur la fourchette des peines pour cette infraction.
Dans les faits, en 2011-2012, 49 verdicts de culpabilité ont été rendus au titre de l’article 467.11 du Code criminel. Une peine d’emprisonnement a été prononcée dans seulement 34 de ces 49 affaires. Parmi ces cas, une peine d’un mois ou moins a été prononcée dans un cas, d’un à trois mois dans six cas, de trois à six mois dans dix cas, de six à douze mois dans neuf cas, de douze à vingt-quatre mois dans quatre cas et les quatre autres ont fait l'objet d'une peine d’emprisonnement de vingt-quatre mois ou plus.
Au moment du prononcé de ces peines, l’article 467.11 du Code criminel prévoyait des infractions punissables par mise en accusation, mais dans la majorité de ces cas, la peine imposée relevait d’une déclaration de culpabilité par procédure sommaire, ce qui inclut 15 peines sans mise sous garde. Il est évident que le fait de conserver les infractions prévues à l’article 467.11 du Code criminel en tant qu’infractions punissables par mise en accusation n’empêcherait en aucun cas la Couronne de demander une peine sans mise sous garde ou une peine d’emprisonnement par déclaration de culpabilité par procédure sommaire dans les cas appropriés.
Je tiens à être clair. Aucune mesure du projet de loi ne laisse entendre aux poursuivants et aux tribunaux que la mise en place de ces nouvelles infractions devrait les pousser à demander et à imposer des peines moins sévères que celles que prévoit en ce moment la loi. Les poursuivants continueront d'évaluer les faits de chaque affaire, les circonstances du prévenu et la jurisprudence pour déterminer la peine qui s'impose. Les juges continueront d'imposer des peines proportionnelles à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du prévenu, comme le prévoit le principe fondamental de la détermination de la peine à l'article 718.1 du Code criminel.
Les fausses idées concernant les modifications visant la reclassification font inutilement de l'ombre à d'autres réformes importantes. Le projet de loi propose notamment de durcir les lois pénales en ce qui concerne la violence contre un partenaire intime, ce qui nous permettra d'améliorer la sécurité publique et la sécurité des victimes.
Le projet de loi comprend une disposition prévoyant l'inversion du fardeau de la preuve pour la libération conditionnelle d'un prévenu accusé d'avoir commis une infraction relative à la violence contre un partenaire intime, peu importe qu'il s'agisse d'un même partenaire, d'un ancien partenaire ou d'un partenaire amoureux. Dans ce contexte, pour améliorer la sécurité des victimes de ce genre de violence, le prévenu, et non le poursuivant, aura à justifier sa libération conditionnelle devant les tribunaux et le public. Cela veut dire que la présomption voulant que le prévenu soit libéré en attendant son procès ne s'applique plus.
La proposition vise le risque accru auquel font face les victimes de violence de la part d'un partenaire intime, et reflète les renseignements dont nous disposons sur ce sujet. En général, les victimes de violence de la part d'un partenaire intime ont été violentées de multiples fois avant qu'elles en aient fait part aux autorités ou à la police. Selon les données de 2014 de Statistique Canada, 17 % des victimes de violence conjugale ont indiqué qu'elles avaient été maltraitées par leur partenaire actuel ou précédent à plus de 10 reprises.
Je crois comprendre qu'une des critiques formulées en comité était que l'inversion du fardeau de la preuve serait problématique dans les endroits où l'on a recours à des mises en accusation doubles. Il s'agit d'une pratique où les deux partenaires sont accusés criminellement, car, parfois, l'autodéfense de la part de la victime est considérée comme une voie de fait. Je comprends également que dans ce contexte, souvent, ce n'est pas la loi qui est le problème, mais la manière dont elle est appliquée.
Les mises en accusation doubles représentent une question opérationnelle dont les provinces et les territoires s'occupent dans le cadre de l'élaboration et de la mise en oeuvre de politiques et de programmes de formation. Par exemple, en mars 2016, l'Association canadienne des chefs de police a publié un document, le « Cadre national d'action policière collaborative en matière de violence entre partenaires intimes », qui traite des mises en accusation doubles et offre des conseils pour les cas où l'on envisage de porter des accusations contre une victime.
Sachant que les études montrent que les victimes présentent un risque accru de violence à la suite d'un signalement à la police, surtout dans les cas où il existe des antécédents de violence dans la relation, je suis convaincu que l'inversion du fardeau de la preuve proposée ici est minutieusement conçue pour tenir compte des préoccupations soulevées.
Le projet de loi obligerait également le tribunal à tenir compte des accusations d'infraction avec violence commise à l'égard d'un partenaire intime pour déterminer s'il y a lieu de mettre en liberté ou de détenir l'accusé pendant l'audience sur le cautionnement. En outre, le projet de loi C-75 préciserait que l'étouffement, la suffocation et l'étranglement constituent une forme de voie de fait avec circonstances aggravantes et définirait l'expression « partenaire intime » pour toutes les fins du Code criminel, précisant que cette expression s'entend de l'époux, du conjoint de fait ou du partenaire amoureux, actuel ou ancien.
Par ailleurs, le projet de loi préciserait que les dispositions actuelles relatives à la détermination de la peine, aux termes desquelles les mauvais traitements infligés à un époux ou conjoint de fait constituent une circonstance aggravante, s'appliquent à l'époux, au conjoint de fait ou au partenaire amoureux, actuel ou ancien. De plus, le projet de loi C-75 permettrait au poursuivant de demander une peine d'emprisonnement maximale supérieure pour les récidivistes de violence contre un partenaire intime.
Je crois que nous convenons tous que, en permettant l'imposition de peines supérieures à la peine maximale applicable dans les cas de récidive de violence contre un partenaire intime, le Parlement envoie un message clair aux poursuivants et aux tribunaux, selon lequel les récidivistes de violence contre un partenaire intime doivent recevoir des peines exemplaires sévères.
Dans ces cas, lorsque la Couronne avise, conformément à l'article 727 du Code criminel, qu'une peine maximale supérieure est demandée, le tribunal qui détermine la peine jouira d'un pouvoir discrétionnaire supplémentaire lui permettant d'imposer une peine excédant la peine maximale autrement applicable. Cela reflétera mieux la gravité du comportement en question et aidera les tribunaux à imposer des peines qui protègent mieux les victimes.
J'exhorte tous les députés à appuyer ce projet de loi très complet qui réduira les délais et rendra le système de justice pénale plus efficace et efficient en se fondant sur des données probantes, et non sur l'idéologie.
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Monsieur le Président, j'ai l'honneur de prendre la parole aujourd'hui, à l'étape du rapport du projet de loi . Il s'agit d'un projet de loi omnibus qui porte sur des questions relatives au Code criminel du Canada.
Au début, toutes les personnes de notre société qui s'occupaient des questions importantes relatives à la justice étaient vraiment satisfaites des paroles de la . Il est évident que nous avons besoin d'une réforme. Malheureusement, plusieurs avocats et personnes de la société qui exigent de vraies réformes sont déçus.
[Traduction]
Leur déception est vive. Plus on travaille sur le projet de loi , plus cette déception grandit. Michael Spratt, l'ancien président de la Criminal Lawyers' Association, a déjà été cité dans ce débat. Comme il l'a dit: « Tout cela semblait si beau. Mais tout a si mal tourné. »
J'ai essayé d'apporter des améliorations au projet de loi. Comme tous les députés le savent, ma position en tant que chef du Parti vert du Canada ne me donne pas le droit de siéger aux comités. Cependant, grâce aux efforts du Cabinet du premier ministre, d'abord sous l'ancien premier ministre Stephen Harper et maintenant sous le actuel, j'ai ce que certaines personnes considèrent comme un privilège. Je dois toutefois avouer qu'il s'agit d'un énorme fardeau qui augmente ma charge de travail. C'est plutôt injuste parce que, n'eût été le travail des comités, j'aurais pu présenter des amendements de fond au Parlement à l'étape du rapport. C'est mon droit à titre de députée qui n'est pas membre de l'un des trois grands partis. Je jouis de très peu de droits en tant que députée qui a un siège pour le Parti vert, mais l'un de ces droits me permet d'apporter des amendements de fond à l'étape du rapport. Mes droits ont été amalgamés au privilège qui, comme je l'ai indiqué, m'a été accordé d'abord par le gouvernement conservateur et maintenant par le gouvernement libéral, c'est-à-dire le privilège de présenter des amendements au cours de l'étude article par article au comité, même si je ne suis pas un membre du comité. Je n'ai pas de droit de vote, mais j'ai l'occasion de parler de mes amendements.
C'est grâce à la motion du comité que j'ai eu l'occasion de proposer 46 amendements. J'ai pris part activement à l'étude article par article du projet de loi . Ce fut un processus particulièrement décourageant, dans la mesure où très peu d'amendements proposés par les partis d'opposition ont été acceptés. La plupart des amendements que j'ai moi-même présentés étaient directement inspirés par les témoignages de personnes qui souhaitaient voir le projet de loi amélioré. Je suis déçue de constater qu'aucun de mes 46 amendements n'a été adopté.
Je dois dire que certains des pires aspects du projet de loi ont été changés du fait d'amendements proposés par le gouvernement. Parmi les aspects qui m'inquiétaient énormément, on retrouvait le principe selon lequel, dans le cadre d'un procès criminel, un policier pouvait présenter une déclaration écrite en guise de preuve sans être lui-même soumis à un contre-interrogatoire. Heureusement, cet aspect a été amendé pour faire en sorte que les procureurs ne pourront plus se servir de ce qu'on appelle les éléments de preuve de routine sans que la personne qui a présenté ces éléments soit contre-interrogée. De plus, les dispositions sur les maisons de débauche et le vagabondage ont été supprimées.
Toutefois, de nombreux autres articles du projet de loi doivent impérativement être amendés et je vais vous en donner des exemples. Nous sommes à l'étape du rapport, et celle de la troisième lecture ne devrait pas tarder. Nous sommes déjà limités par l'attribution de temps. J'espère que lorsque le projet de loi arrivera à l'autre endroit — et il y arrivera inévitablement —, il fera l'objet des amendements nécessaires.
Il est très clair que, dans certains domaines clés, le projet de loi donnera des résultats contraires à ceux que le gouvernement avait promis, surtout par rapport aux personnes désavantagées, au statut des Autochtones dans les prisons, ainsi qu'à l'accès à la justice et à l'équité, autant de circonstances qui s'aggraveront aux termes du projet de loi. Je ne pensais pas devoir intervenir pour dire cela à l'étape du rapport et pourtant… C'est profondément décevant et j'espère que le Sénat apportera des améliorations.
L'une des choses que l'on a faites et je ne sais pas si c'était la meilleure solution, mais c'était certainement pour donner suite à l'affaire Stanley dans laquelle on a eu un profond sentiment d'injustice, a été de décider que le jury serait composé de pairs de la personne accusée. Si cette dernière est Autochtone et que le jury est entièrement composé de Caucasiens, ce n'est pas exactement ce que l'on peut qualifier de jury de pairs. L'une des raisons en est le recours à la récusation péremptoire. Je comprends donc l'intention du projet de loi d'éliminer les récusations péremptoires. Or, je veux vous montrer comment le projet de loi nous fait faire un pas en arrière.
Bien sûr, dans le cas présent, comme beaucoup d'autres députés l'ont dit, ce projet de loi vise à répondre à la décision prise par la Cour suprême du Canada en 2016 dans le cadre de l'affaire Jordan. Dans cette affaire, les retards étaient tels que le procès a avorté. Il est très évident, je pense, que tous les Canadiens ont des doutes sur la validité des nouveaux délais pour la tenue des procès, à savoir 18 mois pour les cours provinciales et 30 mois pour les cours supérieures. Personne ne veut voir d'accusés — à ce stade, ils bénéficient encore de la présomption d'innocence — libérés parce que leur procès n'a pas pu avoir lieu. Si la preuve est suffisamment solide, les procureurs présentent les cas. Cela offense notre sens de la justice de penser qu'ils ne sont libérés qu'en raison des délais excessifs enregistrés dans la conduite des procès. La Cour suprême du Canada a remis vite fait le gouvernement du Canada et le Parlement sur la voie de la justice. Avons-nous, cependant, fait les choses comme il le fallait?
Je parlerai d'abord d'une mesure visant à accélérer la tenue des procès, c'est-à-dire la suppression des enquêtes préliminaires. D'après de nombreux témoignages entendus au comité, les données dont disposaient le gouvernement du Canada et le ministère de la Justice ne pouvaient pas leur permettre de voir que les enquêtes préliminaires étaient une source de grands retards.
J'aimerais citer un des juristes, Bill Trudell, qui est le président actuel du Conseil canadien des avocats de la défense. Selon lui, les enquêtes préliminaires équivalent à une séance de rayons X avant une opération. C'est un outil très intéressant. Ces enquêtes n'ont pas toujours lieu, mais si nous n'avons pas de bons arguments pour expliquer pourquoi nous les supprimons, il se pourrait que des personnes innocentes soient inculpées. De fait, Bill Trudell a déclaré, aussi difficile que cela soit pour lui de tenir de tels propos, qu'un plus grand nombre d'innocents seraient inculpés parce que nous avons supprimé les enquêtes préliminaires sans avoir vraiment prouvé que cela contribuait à accélérer la tenue des procès.
Les députés du caucus conservateur nous ont beaucoup parlé de la reclassification. Le problème c'est qu'étant donné que l'éventail des peines a été modifié le projet de loi aura également pour effet de faire passer de six mois à deux ans la durée de la peine pour une déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Dans le projet de loi , les libéraux ont également ajouté des dispositions sur le représentant. À mon avis, celles-ci n'ont pas été mûrement réfléchies. Pour mieux saisir de quoi il en retourne avec le représentant — et il est ici question de l'accès à la justice —, prenons des gens qui ne sont pas assez pauvres pour obtenir un avocat de l'aide juridique, qui n'ont pas les moyens de payer un avocat, mais qui essaient de se retrouver dans le système judiciaire. Dans bon nombre de ces cas, depuis très longtemps, les accusés dans les affaires criminelles peuvent s'adresser, surtout s'ils ont un faible revenu, aux cliniques d'aide juridique offertes par les facultés de droit. Il s'agit de jeunes avocats en formation. Ces étudiants en droit offrent des services juridiques aux personnes accusées d'infractions moins graves. Il est trop tard pour apporter des amendements, car nous en sommes à l'étape du rapport. J'espère que l'autre endroit modifiera cette disposition pour permettre l'accès aux cliniques d'aide juridique à l'extérieur des facultés de droit afin d'aider les groupes marginalisés à se retrouver dans le système judiciaire. Je pense que c'est une conséquence imprévue. Je suis certaine que les gens du ministère de la Justice n'y ont pas pensé et qu'ils n'ont pas songé que l'un des problèmes est que trop de personnes pauvres reçoivent de l'aide d'étudiants en droit. Ce n'était pas un problème qu'il fallait régler, c'était un très bon processus qui est compromis de façon imprudente dans le projet de loi. J'espère qu'à l'autre endroit, ce problème pourra être réglé et que la définition de « représentant » exclura les étudiants en droit et les cliniques offertes par les facultés de droit.
Il y a d'autres aspects du projet de loi où les libéraux n'ont pas abordé la question de la surreprésentation des Autochtones derrière les barreaux. Ils ont tenu compte de certains des aspects liés à cette question. Cependant, un des amendements que j'avais proposés et qui, fort malheureusement, n'a pas été retenu, concernait l'absence d'une définition de « populations vulnérables », alors que bien des témoignages entendus au comité de la justice laissaient entendre qu'il faudrait une définition. J'en ai proposé une, mais elle n'a pas été retenue. Peut-être que l'autre endroit pourra essayer à nouveau. J'espère que le projet de loi sera amélioré davantage à l'autre endroit avant d'être adopté.
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Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi , qui s'intitule officiellement « Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d'autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois ». De nouveau, la Chambre est saisie d'un projet de loi omnibus.
Il y a à peine deux semaines, j'ai pris la parole au sujet de la Loi no 2 d'exécution du budget, qui était aussi un projet de loi omnibus. Évidemment, elle faisait suite à la Loi no 1 d'exécution du budget, aussi un projet de loi omnibus. Ces projets de loi contenaient des dispositions à l'intérieur de dispositions, qui visaient à apporter des modifications législatives.
Lorsqu'ils occupaient les banquettes de l'opposition, les libéraux pestaient contre les projets de loi omnibus. En fait, ils les détestaient tellement qu'ils ont pris une promesse électorale à ce sujet. Cette promesse figure encore sur le site Liberal.ca. Voici ce qu'on peut y lire en ce qui concerne les projets de loi omnibus. Bien entendu, les libéraux s'en prennent d'abord à Stephen Harper. Quel discours partisan des libéraux serait complet sans quelques pointes à l'endroit de l'ancien premier ministre Harper? La promesse se lit comme suit: « Stephen Harper [...] s'est [...] servi des projets de loi omnibus pour empêcher les parlementaires d'étudier ses propositions et d'en débattre convenablement. Nous mettrons un terme à cette pratique antidémocratique [...] »
Évidemment, quand on fait une telle promesse, on se met la main sur le coeur. Or, malgré la promesse prise par les libéraux, la Chambre est de nouveau saisie d'un projet de loi omnibus. Cette promesse voulait peut-être dire que les libéraux empêcheraient les autres partis de présenter des projets de loi omnibus, mais qu'eux pourraient le faire.
Si on se reporte à l'outil de suivi des fameuses lettres de mandat des libéraux, que peut-on lire à propos de cette promesse? Dans la section sur un gouvernement ouvert et prétendument équitable, les libéraux font état de leur intention de mettre fin au recours aux projets de loi omnibus. Or, nous sommes actuellement saisis d'un projet de loi omnibus, et les deux lois d'exécution du budget qu'ils ont présenté en étaient aussi.
Pourtant, dans le suivi des lettres de mandat, il est indiqué que l'objectif qui consiste à mettre un terme à l'utilisation inappropriée des projets de loi omnibus est entièrement atteint. Évidemment, ce même outil de suivi des mandats prévoit le retour à l'équilibre budgétaire pour l'exercice 2019-2020. Il y est indiqué que le retour à l'équilibre budgétaire est amorcé en dépit de certains défis. Or, le gouvernement a déclaré, par l'entremise du ministère des Finances, que l'équilibre budgétaire ne sera pas rétabli avant 2045. Le gouvernement avait promis le retour à l'équilibre budgétaire en 2019, mais cet objectif ne sera atteint qu'en 2045. Le processus est amorcé mais des défis sont présents. Cette situation me donne à penser que s'ils étaient à la barre du Titanic, après avoir frappé l'iceberg et alors que le navire est en train de couler, les libéraux répondraient vraisemblablement à la direction des lignes Cunard venues aux nouvelles « Nous maintenons le cap mais nous sommes confrontés à des défis ».
Pour revenir au projet de loi , j'appuie un certain nombre de mesures dans ce projet de loi omnibus. Dans ces 300 pages de modifications, on peut certainement trouver quelques bonnes mesures. Par exemple, le projet de loi C-75 abrogerait des dispositions inconstitutionnelles du Code criminel. C'est juste et bon. On augmenterait la peine d'emprisonnement maximale pour les récidives de violence contre un partenaire intime. On considérerait que les mauvais traitements infligés à un partenaire intime constituent une circonstance aggravante lors de la détermination de la peine. Nous sommes d'accord et nous appuyons sans réserve ces modifications. Le projet de loi prévoit des exigences plus rigoureuses pour la mise en liberté provisoire. Encore une fois, nous pouvons appuyer cela. Pour réduire les délais dans le système de justice, on propose notamment de permettre la tenue d’une enquête préliminaire seulement dans certains cas, de permettre une utilisation accrue de la technologie afin de faciliter la présence à distance d’une personne, et de prévoir une comparution pour manquement à l’égard d’infractions contre l’administration de la justice relatives à l’omission de se conformer aux conditions de mise en liberté ou au défaut de comparaître.
Cela dit, j'ai de sérieuses réserves à l'égard du projet de loi, notamment parce qu'il allège les peines pour certaines infractions criminelles. Pour justifier l'attribution de temps, les libéraux disent vouloir faire adopter le projet de loi à toute vitesse afin d'accélérer le processus judiciaire et de répondre à l'arrêt Jordan. Le principal problème, c'est que les libéraux sont incapables de s'organiser et de nommer des juges. Le gouvernement a beau prendre des mesures aussi modestes, mais, s'il n'arrive pas à faire son travail en nommant des juges, on verra encore des délais dans le système de justice et des gens qui seront libérés en raison de l'arrêt Jordan. Des centaines de causes ont été rejetées à cause de délais déraisonnables parce que le gouvernement a été incapable de faire son travail en nommant des juges.
Les tribunaux sont toujours saisis d'environ 2 000 requêtes en arrêt des procédures pour délais déraisonnables. À Calgary, un tueur à gages membre d'un gang était accusé de trois meurtres et soupçonné par la police de Calgary d'en avoir commis vingt. Il a été libéré sans subir de procès pour les trois meurtres, car il y avait trop de retards — car nous n'avons pas assez de juges. À Edmonton, un homme accusé de meurtre a été libéré à cause des retards, car le gouvernement n'arrive pas à faire ce qu'il devrait et nommer des juges. Au Québec, un meurtrier a été libéré à cause des retards. Peut-être le pire cas est celui d'un monstre en Nouvelle-Écosse qui a cassé les chevilles et les tibias de son bébé avec un bâton de baseball. Cet homme a été libéré parce que le gouvernement est trop incompétent pour faire son travail et nommer des juges. C'est un problème qu'il doit régler, car il manque à ses obligations envers les Canadiens.
Je suis content qu'au comité, les libéraux aient écouté les conservateurs et le reste de l'opposition et aient renoncé à alléger les peines associées à certains crimes, comme les infractions de terrorisme et d'encouragement au génocide. Une question se pose toutefois: pourquoi a-t-il fallu que nous forcions la main du gouvernement pour qu'il renonce à alléger la peine d'une personne qui préconiserait un génocide?
Il y a à peine deux semaines, le , le , le leader parlementaire du NPD, la chef du Parti vert et des représentants des autres partis ont tous adressé d'émouvants discours à la Chambre pour s'excuser au nom du Canada d'avoir renvoyé le Saint Louis d'où il venait et d'avoir ainsi contribué au génocide qui a suivi. La même semaine, le comité a demandé à la Chambre d'adopter un rapport sur le génocide des yézidies. C'est d'ailleurs à la suite de ce rapport — et c'est tout à l'honneur de ma collègue de — que le gouvernement a fini par reconnaître qu'il s'agit bien d'un génocide, même si c'était à son corps défendant. En effet, malgré toutes les atrocités dont l'EIIS s'était rendu coupable, les libéraux s'étaient entêtés jusque-là à répondre qu'ils ne pouvaient pas affirmer qu'il s'agissait d'un génocide puisque l'ONU n'avait pas conclu que c'en était un.
Au moins, le gouvernement a fini par le reconnaître et il a renoncé à alléger les peines associées à l'encouragement au génocide. Je repose néanmoins la question: pourquoi a-t-il fallu que l'opposition lui force la main pour en arriver là?
Comme je l'ai dit, j'ai de graves inquiétudes à l'égard de ce projet de loi, parce qu'il allège les peines pour de nombreux crimes graves, allant parfois jusqu'à les réduire à une simple sanction pécuniaire. J'aimerais revenir sur certains de ces crimes.
Il y a d'abord le bris de prison.
Ensuite, je pense à la corruption municipale et à l'influence exercée sur des élus municipaux. Les députés se souviendront d'anciens ministres libéraux qui ont entamé une carrière sur la scène politique municipale et ont été accusés de fraude. Peut-être voulaient-ils simplement faire une faveur à leurs compatriotes.
Un autre crime est d'influencer ou négocier une nomination ou en faire commerce. À l'heure actuelle, le est visé par une enquête en raison du rôle qu'il aurait joué dans l'escroquerie de la mactre de l'Atlantique. En allégeant la peine pour ce genre d'infraction, les libéraux essaient peut-être de lui faire une fleur.
Une autre infraction est celle qui consiste à gêner ou arrêter un ministre du culte, ou lui faire violence. Ce cas est particulièrement scandaleux. Des mesures de protection spéciale avaient été mises en place pour les ecclésiastiques qui procèdent à des cérémonies, que ce soit des messes, des funérailles ou d'autres cérémonies religieuses. Les libéraux ont tenté de suspendre ces protections, prévues à l'article 176 du Code criminel. L'opposition s'est battue pour que ces mesures de protection soient conservées. Les libéraux avaient promis qu'ils ne modifieraient pas la peine pour ce genre d'infraction, mais voilà que ce projet de loi l'allège.
Pensons-y. Il y a deux semaines, nous avons eu une démonstration de l'antisémitisme crasse qui en pousse certains à tuer des Juifs, et ce, deux ans seulement après le massacre qui a secoué la mosquée de Québec et à peine un mois après les actes de vandalisme contre l'école juive de ma circonscription, l'école Talmud Torah, sur les murs de laquelle des croix gammées ont été dessinées. De son côté, le gouvernement nous dit aujourd'hui que tout va bien, que les ministres du culte et les personnalités religieuses n'ont pas besoin de protection particulière.
Les libéraux veulent aussi alléger les peines associées à la tenue d'une maison de débauche. Les parlementaires y voient peut-être une bonne nouvelle, mais pas les Canadiens.
Que dire des peines associées aux infanticides? Comme je le disais tout à l'heure, un type d'Halifax — un véritable monstre — a été relâché même s'il avait rompu les os de son bébé. Les libéraux, eux, voudraient qu'on allège la peine associée à ce type de crime.
Il y a aussi la suppression de part, c'est-à-dire faire disparaître le cadavre d'un enfant.
Passons maintenant à la conduite avec capacités affaiblies causant des lésions corporelles. Je ne crois pas avoir besoin de rappeler que nous venons de légaliser la marijuana et que nous n'avons pas encore de moyen de mesurer précisément la capacité de conduire d'une personne. Les policiers nous disent qu'ils ne sont pas prêts, mais le gouvernement, lui, n'en fait qu'à sa tête et veut alléger les peines connexes.
Je pense aussi au fait de recevoir un avantage matériel pour la traite de personnes ainsi qu'à l'enlèvement d'une personne âgée de moins de 16 ans ou de moins de 14 ans.
Vient enfin le mariage forcé. Pas plus tard qu'hier, le comité a appris qu'au Soudan, en Somalie et au Congo, environ la moitié des jeunes filles sont forcées de se marier. Le gouvernement dit qu'il faut en faire plus pour lutter contre cette pratique, et c'est ce qu'il fait à l'extérieur de nos frontières, mais pourquoi veut-il atténuer la gravité de ce crime ici, au Canada?
Je répète en terminant que je ne doute pas un seul instant que ce projet de loi parte de bonnes intentions, mais au lieu de faciliter la vie des criminels, le gouvernement devrait penser aux victimes et au bien commun et s'acquitter de ses responsabilités en nommant des juges aux postes encore vacants.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui au sujet du projet de loi . Je me propose de parler maintenant des modifications prévues dans le projet de loi concernant la constitution des jurys. Les députés n'ignorent pas que la question de la réforme du jury est une compétence partagée. Le Parlement a la responsabilité de la législation pénale et des règles du Code criminel qui régissent la sélection des jurés en cour. Les provinces et les territoires ont la responsabilité de déterminer, par exemple, qui peut être juré et comment doit être dressée la liste des jurés. Le projet de loi propose plusieurs changements au processus de sélection des jurés en cour.
Tout d'abord, il y a l'abolition des récusations péremptoires. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a entendu plusieurs témoins sur la question de la réforme du jury. De nombreux spécialistes juridiques ont fortement appuyé leur suppression, car cela mettrait finalement un terme à l'exclusion discriminatoire de certains jurés.
Kent Roach, de l'Université de Toronto, a dit:
L'abolition proposée des récusations péremptoires dans l'article 271 du projet de loi C-75 est la façon la plus efficace de veiller à ce que ni la Couronne ni l'accusé n'exerce de discrimination contre les Autochtones et d'autres groupes défavorisés et identifiables au moment de sélectionner les jurés.
Brent Kettles de Toronto a affirmé:
[...] les récusations péremptoires ne peuvent que réduire la confiance du public à l'égard de l'administration de la justice, lorsque des membres du public et des éventuels jurés constatent que certains d'entre eux sont exclus sans raison, sans preuve et sans information.
Lorsque ces exclusions sont fondées essentiellement sur des impressions quant aux personnes susceptibles d'être sympathiques à une partie ou à l'autre, cela ne donne pas au public ou aux jurés le sentiment que la sélection des jurés se fait de façon juste et impartiale et qu'elle est aussi représentative de la collectivité.
Selon l'experte en droit, Vanessa McDonnell:
Il est important de reconnaître que ces récusations ont toujours été et peuvent être utilisées contre des accusés à leur détriment. Nous devons trouver un équilibre entre l'avantage, tel qu'il est perçu, de la procédure de récusation péremptoire pour avoir la possibilité de récuser une personne au sujet de laquelle l'avocat de la défense a un sentiment mitigé et le risque très réel, je crois, que cette procédure soit employée au détriment de l'accusé. À mon avis, dans l'ensemble, le préjudice potentiel, non seulement pour le système, mais aussi pour les accusés, est plus grand que tout avantage qui en découlerait.
On constate de la discrimination dans la sélection des jurés depuis des décennies. En 1991, le sénateur Murray Sinclair, qui était juge à l'époque, dénonçait, dans le cadre de l'enquête sur la justice autochtone réalisée au Manitoba, le caractère discriminatoire de la récusation péremptoire et son incidence sur les Autochtones, qui se retrouvaient sous-représentés au sein des jurys.
Plus récemment, l'ancien juge de la Cour suprême Frank Iacobucci a étudié ces questions dans son rapport de 2013 sur la représentation des Premières Nations sur la liste des jurés en Ontario. Ayant lu ces rapports et écouté les témoignages d'un grand nombre de spécialistes de la question, je suis convaincu que l'abolition de la récusation péremptoire, dans le projet de loi est un pas dans la bonne direction. C'est une façon simple et efficace de prévenir la discrimination délibérée et l'exclusion arbitraire de jurés qualifiés.
De plus, afin de rendre le processus de sélection du jury plus efficace et plus impartial, le projet de loi propose de permettre à un juge de décider si le motif de récusation des jurés est fondé, comme c'est le cas lorsque la défense ou la poursuite fait preuve de parti pris.
À l'heure actuelle, ce type de récusation est déterminé par des profanes, deux « vérificateurs » qui n'ont pas de formation en droit. Cette procédure pose des problèmes, car elle occasionne des retards même avant le début du procès, ainsi que des appels qui nécessitent un nouveau procès.
Le projet de loi propose de transférer la responsabilité de la récusation aux juges qui ont reçu une formation d'arbitre et qui sont donc mieux placés pour dépister les jurés impartiaux. Le changement proposé fait suite à la recommandation faite en 2009 par le Comité directeur sur l'efficacité et l'accès en matière de justice, qui avait été créé par les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux de la Justice et qui réunissait des juges, des sous-ministres de la Justice de partout au Canada, des avocats de la défense, des représentants des barreaux du pays et des membres des corps policiers. Ce changement s'aligne également sur ce qui a été fait dans d'autres pays où la common law est appliquée, comme l'Angleterre, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
Je suis convaincu que cette nouvelle procédure permettra de renforcer l'efficacité générale de nos procès avec jury.
Plusieurs autres changements visent à moderniser et à actualiser la procédure de récusation motivée. On propose notamment de réduire le nombre de jurés ayant un casier judiciaire pour des infractions mineures qui pourraient être exclus d'un jury, de sorte qu'on pourra moins prétendre que l'exclusion systématique d'individus ayant un casier judiciaire mineur a une incidence disproportionnée sur certains segments de la société, y compris les Autochtones, comme l'a fait remarquer le juge Iacobucci. Cela permettra aussi d'encourager la participation à des jurys et, partant, améliorera leur représentativité.
En conclusion, les réformes du jury proposées dans le projet de loi contribueraient considérablement à promouvoir l'équité, la diversité et la participation au processus de sélection des jurés. À leur tour, ces améliorations renforceraient l'efficacité et rétabliraient la confiance du public dans le système de justice pénale.
J'invite donc tous les députés à appuyer ce projet de loi transformateur.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur cet important projet de loi qui se penche sur des pans entiers de notre système de justice. Il s'agit de quelque chose de fondamental pour l'organisation de notre société.
Cependant, je ne peux que commencer cette brève allocution en disant à quel point il me reste un goût amer. J'ai quelque chose de pris dans la gorge: un bâillon.
Le gouvernement libéral nous impose encore une fois un bâillon. Depuis les trois dernières années, le gouvernement libéral a utilisé cet outil plus de 50 fois pour empêcher les parlementaires de discuter et de débattre à fond de ce genre de projet de loi qui a des conséquences sur notre système de justice, sur la façon de rendre la justice au pays, sur les droits des victimes et sur les droits des accusés.
Encore une fois, le gouvernement libéral refuse que nous prenions le temps normalement consacré à l'étude entière et exhaustive d'un projet de loi. C'est le même disque qui saute, c'est la même histoire qui se répète. Les libéraux avaient promis de raviver la confiance envers les institutions, de redonner au Parlement ses lettres de noblesse et de remettre les parlementaires, les députés, au centre des discussions. Toutefois, ce n'est pas le cas. Encore une fois, le gouvernement nous bâillonne et nous écrase.
Le projet de loi , que l'on étudie aujourd'hui, est la réponse du gouvernement à l'arrêt Jordan de la Cour suprême. La Cour s'est penchée sur les très longs délais de certains procès complexes. Ces délais engendraient une négation de la justice ou empêchaient de rendre justice de manière crédible. En effet, cela n'en finissait plus et cela prenait des années.
L'arrêt Jordan fixe des limites. Le délai entre le dépôt des accusations et la clôture du procès doit être de 18 mois pour un cas normal. Toutefois, il y a certaines exceptions. En effet, dans certains cas, le délai peut être de 30 mois.
L'arrêt Jordan vise à éviter des situations de déni ou de négation de justice à cause de délais indus, mais il a aussi eu des effets collatéraux ou des effets qui n'étaient pas prévus au départ et qui ont mené à la libération de criminels qui ont pu, dans un sens, échapper à la justice. Comme le délai prescrit par l'arrêt Jordan était terminé, ces gens ont pu retrouver leur liberté, alors qu'ils n'ont pas fait face à la justice et aux accusations qui étaient légitimement portées contre eux.
Cela étant dit, la réponse du gouvernement doit être de chercher comment faire pour désengorger le système de justice et d'éviter que les criminels puissent ne pas subir leur procès, échapper à certaines accusations et retrouver leur liberté.
Du point de vue de la sécurité publique, ce ne serait pas nécessairement une bonne chose. Nous voulons éviter que cela se reproduise. Nous sommes d'accord sur l'arrêt Jordan, puisqu'il a de bonnes raisons, de bons motifs, mais il a des conséquences inattendues et dangereuses pour la société et pour nos concitoyens.
Est-ce que la réponse du gouvernement est adéquate? C'est là où nous sommes en désaccord avec le gouvernement libéral. Nous ne pensons pas que les solutions qui sont sur la table à propos du projet de loi C-75 permettront d'atteindre l'objectif d'accélérer le système judiciaire, pour que les accusés puissent avoir un procès en bonne et due forme et dans les délais prescrits par l'arrêt Jordan. La solution la plus simple et la plus efficace, c'est de mettre davantage de ressources dans le système, pour qu'il puisse traiter plus rapidement davantage de dossiers, davantage de cas, davantage d'accusations. Pour faire cela, il y a plusieurs choses que l'on peut faire. La chose la plus simple, c'est de nommer des juges. S'il y a plus de juges, il y a plus de procès. S'il y a plus de procès, ces derniers seront menés de manière beaucoup plus diligente et vont durer moins longtemps.
Or le gouvernement libéral se traîne les pieds depuis trois ans. De plus, un paquet de postes de juges fédéraux ne sont toujours pas remplis. Nous attendons encore que ces décisions soient prises.
Selon le NPD, tant que le gouvernement n'instaurera pas de mesures, non pas sévères mais permettant des investissements, l'ouverture des cours, la nomination de juges et l'embauche de greffiers, ce qui ferait que tout le personnel serait en mesure de respecter les délais, on n'a que des demi-solutions. Parfois, on risque même d'aggraver la situation.
Avant de parler des enquêtes préliminaires ou des éléments de preuve de routine présentés par la police, je voudrais prendre deux minutes pour déplorer une autre promesse brisée des libéraux.
On aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement libéral profite d'un changement aussi majeur à notre système judiciaire — le projet de loi fait quand même 300 pages et touche un paquet de choses — pour donner suite à sa promesse de mettre fin aux peines minimales obligatoires, qui avaient été fixées par le gouvernement précédent de Stephen Harper.
En campagne électorale, les libéraux nous avaient dit qu'ils aboliraient ces peines minimales obligatoires parce que c'était un mauvais système qui empêchait les juges d'agir adéquatement. Ils disaient vouloir redonner au système judiciaire sa flexibilité et aux juges leur capacité d'exercer leur jugement, puisqu'il n'y a pas deux cas, deux situations ou deux processus qui soient identiques comme des frères jumeaux. C'est toujours un peu différent.
Du côté conservateur, on avait fait un peu de populisme de droite au sujet de ces peines minimales obligatoires. On voulait faire une démonstration de force et dire que les criminels ne s'en sortiraient pas. En réalité, on menottait plutôt les juges en leur retirant leur capacité de déterminer, selon leur pleine conscience et la preuve présentée devant eux, la meilleure décision à prendre et la peine appropriée à infliger à un accusé.
La déception est d'autant plus grande que cela faisait non seulement partie du programme libéral et des promesses des libéraux, mais également de la lettre de mandat de la . Cette lettre de mandat indiquait que les peines minimales obligatoires constituaient une question prioritaire pour les libéraux, mais les libéraux n'ont pas inclus cet élément important dans leur projet de loi de réforme de la justice. C'est une occasion ratée de mettre en oeuvre une véritable réforme significative.
Ainsi, ce sera le statu quo et les juges n'auront toujours aucune latitude dans la détermination des peines qu'ils imposent. Les avocats de la défense ne seront pas incités à négocier leur plaidoyer, et le nombre d'affaires portées devant les tribunaux risque d'augmenter. Encore là, on a manqué le bateau. On aurait pu régler un problème.
Je voudrais prendre le temps de citer quelques personnes: Amanda Carling, Emily Hill, Kent Roach et Jonathan Rudin, qui ont écrit un article cette année dans le Globe and Mail. Selon eux, les peines minimales obligatoires sont une mauvaise idée. Ils estiment qu'il est impossible que le législateur connaisse toutes les variétés d'infractions et de délinquants pouvant les commettre. Qui plus est, elles ne tiennent pas compte des différentes situations dans lesquelles certains délinquants se retrouvent, comme ceux qui vivent dans la pauvreté la plus totale, ceux qui ont des déficiences intellectuelles ou des problèmes de santé mentale, ceux qui ont déjà été victimes de racisme ou d'agressions dans le passé et ceux qui ont des enfants qui dépendent d'eux. Ils ajoutent que les peines minimales obligatoires ne permettent pas au juge d'établir si l'incarcération est nécessaire à des fins de dissuasion, de réadaptation ou de punition du délinquant en question.
Je pense que c'est un point majeur que les libéraux auraient dû inclure dans ce projet de loi, mais ils ont raté la cible. Rappelons que les tribunaux sont un reflet des problèmes sociaux dans nos communautés et de la réalité sociale. Or non seulement le projet de loi offre des solutions qui ne permettront pas de désengorger le système, mais il en fait très peu pour reconnaître les causes profondes de l'engorgement des cours, c'est-à-dire la myriade de problèmes sociaux tels que la pauvreté, la toxicomanie, les problèmes de santé mentale, la marginalisation, etc. Des investissements et du soutien social sont requis de toute urgence pour réduire le fardeau des tribunaux et s'attaquer à la question complexe de la surreprésentation des minorités, surtout les personnes autochtones ou racisées, dans le système carcéral.
En conclusion, je veux souligner que le NPD est particulièrement inquiet de la disposition autorisant l'admission d'un élément de preuve de routine présenté par la police au moyen d'un affidavit. En d'autres mots, si l'on considère qu'il s'agit d'une preuve de routine et qu'elle a été présentée au moyen d'un affidavit, il n'y aura aucune possibilité, lors du procès, de contre-interroger le policier sur cet élément de preuve. À notre avis, cela risque de porter atteinte au droit des accusés à une défense pleine et entière.