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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 17 juin 1996

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

CHYPRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-45. Reprise de l'étude en deuxièmelecture 3901

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ENVIRONNEMENT

LE COMITÉ D'ACTION NATIONAL SUR LE STATUT DE LA FEMME

L'AGRICULTURE

LE VOL AIR INDIA 182

LES PASSAGERS CLANDESTINS

LA JOURNÉE DES AUTOCHTONES

LE MARATHON DE BOSTON

LES MINES

M. ROBERT THIRSK

HOMMAGE À CLAUDE COULOMBE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3918

L'ENVIRONNEMENT

LE PILOTE AUTOMOBILE JACQUES VILLENEUVE

LA MARCHE CONTRE LA PAUVRETÉ

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA LUTTE CONTRE DE LA DÉSERTIFICATION

LA RÉDUCTION DES EFFECTIFS DE LA FONCTION PUBLIQUE

    M. Hill (Prince George-Peace River) 3919

LA MARCHE CONTRE LA PAUVRETÉ

LA CONDITION FÉMININE

QUESTIONS ORALES

LA CONFÉRENCE DES PREMIERS MINISTRES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3920
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3920
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3921

LES AVIONS AIRBUS

    M. Harper (Calgary-Ouest) 3921
    M. Harper (Calgary-Ouest) 3922
    M. Harper (Calgary-Ouest) 3922

LA CONFÉRENCE DES PREMIERS MINISTRES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3922
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3923

LES AVIONS AIRBUS

LA CONDITION FÉMININE

    Mme Gagnon (Québec) 3923
    Mme Gagnon (Québec) 3924

L'AFFAIRE DES AIRBUS

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

LES PÊCHES

LA LOI AMÉRICAINE HELMS-BURTON

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LA FISCALITÉ

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE GEORGE HEES

    Mme Stewart (Northumberland) 3931

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

LA SANTÉ

LOI SUR LE DÉDOMMAGEMENT DES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

    Projet de loi C-314. Adoption des motions de présentationet de première lecture 3933

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-315. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 3933
    Mme Gagnon (Québec) 3933

PÉTITIONS

LE POUVOIR JUDICIAIRE

LES PROFITS DE LA CRIMINALITÉ

LES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA CONSTITUTION

L'ÉNERGIE

LES PRODUITS DE LA CRIMINALITÉ

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-45. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 3935
    Report du vote sur la motion 3935

LA LOI BUDGÉTAIRE CONCERNANT L'IMPÔT SUR LE REVENU

    Projet de loi C-36. Étape du rapport 3935
    Motion portant approbation 3935
    Adoption de la motion 3935
    Motion portant troisième lecture 3935
    Le président suppléant (M. Kilger) 3944
    Report du vote sur la motion 3945

LOI SUR LES PROGRAMMES DE COMMERCIALISATION AGRICOLE

    Projet de loi C-34. Motion 3945
    M. Chrétien (Frontenac) 3947
    Adoption de la motion 3953

LA LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

    Projet de loi C-38. Motion 3954
    M. Chrétien (Frontenac) 3955
    Adoption de la motion; et renvoi du projet de loi àun comité 3963

LOI CONCERNANT LA PREMIÈRE NATION DE YORK FACTORY RELATIVEMENTÀ LA SUBMERSION DE TERRES

    Projet de loi C-39. Motion de deuxième lecture 3963
    M. Harper (Churchill) 3963
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 3971

LA LOI CONCERNANT LA PREMIÈRE NATION DE NELSON HOUSERELATIVEMENT À LA SUBMERSION DE TERRES

    Projet de loi C-40. Motion de deuxième lecture 3971
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 3975

LA LOI DE 1996 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES

    Projet de loi C-37. Motion portant deuxième lecture 3975
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 3979

LOI SUR LE CONSEIL CANADIEN DES NORMES

    Projet de loi C-4. Étude à l'étape du rapport 3979
    Motion d'approbation 3979
    Adoption de la motion 3979

MOTION D'AJOURNEMENT

LA SÉCURITÉ FERROVIAIRE


3893


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 17 juin 1996


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

CHYPRE

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait appuyer toutes les mesures visant à démilitariser la République de Chypre de manière à améliorer les chances d'un règlement paisible et durable du différend chypriote qui bénéficierait à tous les habitants de Chypre et mettrait un terme à plus de deux décennies de division.
-Monsieur le Président, je me lève avec tristesse aujourd'hui pour parler d'une tragédie qui dure depuis près de 22 ans et qui met en lumière l'incapacité de la communauté internationale de trouver une solution juste et durable à une grave injustice du siècle. Cette tragédie ne fait pas la manchette chaque semaine, mais cela ne veut pas dire pour autant que le problème est réglé à Chypre.

Le fait qu'un soldat chypriote ait été tué dans la zone tampon de l'ONU rappelle clairement à tous que la crise peut éclater à tout moment.

[Français]

Pour moi, cette motion représente mon engagement envers les droits de la personne et la résolution des conflits mondiaux sans guerre. Au moment où le respect des grands principes du droit international et des droits fondamentaux de la personne représente des conditions essentielles à un ordre international juste et stable, Chypre demeure une exception inacceptable et tragique.

(1105)

[Traduction]

Le problème chypriote a trait à l'occupation illégale d'un petit pays par un voisin plus grand, militarisé et nettement plus puissant. Ce problème suppose la violation de traités internationaux, la destruction généralisée du patrimoine culturel d'un vieux territoire, dont l'histoire et la civilisation remontent à des milliers d'années, le déplacement de plus du tiers de la population de Chypre et la tragédie que représente la disparition de 1 619 personnes.

Ce qui donne à la question chypriote un caractère particulier, c'est que, contrairement aux nombreux conflits qui se déroulent dans le monde sans qu'une solution semble possible, à Chypre, une solution s'offre à la communauté internationale. Il s'agit de la militarisation que je propose à la Chambre des communes d'appuyer aujourd'hui.

[Français]

Les Nations Unies, à plusieurs reprises, ont tenté de réconcilier les deux communautés amies sans succès. Parmi les plus récentes initiatives des Nations Unies, notons le rôle joué par le très honorable Joe Clark comme représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies de mai 1993 à mai 1996. Malheureusement, aucune entente n'a été conclue à cause du manque de souplesse nécessaire de la part du côté turc. Nous sommes présentement dans une impasse.

[Traduction]

Le maintien de la présence des troupes d'occupation turques et le nombre écrasant de leurs effectifs, qui s'élèvent à environ 30 000 à l'heure actuelle, constituent peut-être l'un des principaux obstacles à la solution du problème chypriote.

Cette situation alarmante a porté le Secrétaire général des Nations Unies, dans son rapport de décembre 1995 au Conseil de sécurité, à décrire le territoire occupé de Chypre comme étant «l'une des zones les plus militarisées dans le monde pour ce qui est du rapport entre les effectifs militaires et la population civile».

La situation a mené à la création de conditions instables qui menacent la paix et la sécurité, non seulement à Chypre, mais dans la grande région du sud-est de la Méditerranée. Les préoccupations et les inquiétudes en matière de sécurité revêtent une importance cruciale pour les deux côtés et servent à nourrir la méfiance persistante qui, nous le savons tous, nuit à toute solution.

La situation exige une solution tenant compte des préoccupations des deux côtés en matière de sécurité, une solution qui contribuera à restaurer la confiance et à améliorer les chances d'une solution pacifique et durable à ce grave problème.

La proposition soumise par le président de Chypre, M. Glafcos Clerides, en vue de la démilitarisation complète de la république de Chypre représente une telle solution. S'il était mis en oeuvre, ce plan global, présenté officiellement à l'Organisation des Nations Unies en décembre 1993, permettrait, entre autres mesures, de


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disperser la Garde nationale chypriote et d'en remettre toutes les armes et tout le matériel militaire à la force de maintien de la paix de l'ONU afin de la renforcer substantiellement.

L'argent consacré aux dépenses de défense que cette mesure permettrait d'économiser servirait à financer entièrement cette force, et le reste des économies servirait à des projets de développement qui pourraient être bénéfiques pour les deux communautés. Cette offre est conditionnelle au retrait parallèle de Chypre, également exigé dans les résolutions de l'ONU, des troupes turques et des colons turcs-dont un certain nombre y sont installés-ainsi qu'au dispersement des unités armées chypriotes turques.

Si elles étaient mises en oeuvre, ces mesures en vue d'une réduction réciproque des dépenses de défense et du nombre des militaires à Chypre contribueraient à calmer les préoccupations en matière de sécurité de toutes les parties en cause et amélioreraient les chances d'une solution pacifique et durable du conflit chypriote. Elles seraient bénéfiques pour tous les chypriotes et mettraient un terme à deux décennies de division de l'île.

Des événements récents ont amené de nouveau la communauté internationale à se préoccuper de la solution du problème chypriote.

[Français]

En effet, l'Union européenne devait débuter six mois après la conclusion de la conférence intergouvernementale de 1996, soit dans un horizon d'environ deux ans.

(1110)

Cette perspective pousse donc l'Europe à s'impliquer plus sérieusement dans la résolution de la question chypriote. L'Union européenne, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont, eux aussi, nommé des représentants spéciaux pour Chypre. L'opportunité pour une solution est peut-être plus possible qu'aucune autre fois.

[Traduction]

La dernière question que je veux aborder est peut-être la plus pertinente pour la Chambre et les députés. Pourquoi nous, députés, devrions-nous appuyer cette motion? Tout le monde se posera la question aujourd'hui. La réponse est très évidente pour moi: c'est à cause de l'engagement que le Canada a pris depuis longtemps en faveur de la solution pacifique des conflits et à cause de sa préoccupation à l'égard des violations des droits de la personne où qu'elles se produisent. Les Canadiens ne sont pas étrangers au problème chypriote, ayant participé aux forces de maintien de la paix de l'ONU à Chypre depuis près de 30 ans.

Nous tenons aujourd'hui une occasion d'unir nos voix respectées à celles de la communauté internationale afin d'assurer la mise en oeuvre réussie de ce plan et de faire comprendre clairement que le statu quo n'est plus une solution acceptable.

La proposition a déjà recueilli un large soutien. Lors d'une réunion du Commonwealth, en novembre 1995, les chefs de gouvernement, dont notre premier ministre, ont appuyé sans réserve la proposition de démilitarisation faite par le président du gouvernement chypriote. Le Sénat et la Chambre des représentants du Congrès américain ont également adopté des résolutions. L'Union européenne a elle aussi pris une résolution saluant la proposition. Tout récemment, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont adopté des résolutions pour soutenir cette proposition.

Le Canada a contribué aux efforts des forces de maintien de la paix de l'ONU pendant près de trois décennies. Nous n'avons pas oublié cette question ni perdu de vue son importance pour tous les Canadiens, plus particulièrement ceux qui sont d'origine chypriote.

Cette motion réaffirmera la conviction du Canada selon laquelle seules des négociations pacifiques peuvent aboutir à un règlement pacifique et juste. Le Canada a fait preuve de leadership dans le domaine des droits de la personne et s'en est rigoureusement tenu à son engagement à respecter le droit international. Les Canadiens ont une nouvelle occasion d'assurer le leadership, par l'entremise du ministre des Affaires étrangères et du premier ministre, en appuyant cette motion. J'invite tous les députés des deux côtés de la Chambre à appuyer cette motion. Ce sera notre première étape dans la recherche d'une solution juste et applicable au problème de Chypre.

Pourquoi Nicosie demeurerait-elle la seule capitale divisée du monde? Nous avons vu le mur de Berlin s'effondrer, et le processus de paix au Moyen-Orient a été amorcé. Pourquoi ne pouvons-nous pas travailler ensemble comme membres responsables de la communauté internationale pour mettre un terme, une fois pour toutes, au problème chypriote.

J'entends aborder le sujet demain à la Chambre en posant une question au ministre des Affaires étrangères. Il a dit qu'il appuierait cette motion et travaillerait ferme, avec des membres du comité Canada-Chypre de la Chambre afin de trouver une solution juste et applicable au problème, une tragédie qui dure depuis 22 ans.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de me lever en cette Chambre pour appuyer la motion M-239 déposée le 1er mai dernier par la députée de Saint-Denis. Par cette motion, la députée demande au gouvernement «d'appuyer toutes les mesures visant à démilitariser la République de Chypre de manière à améliorer les chances d'un règlement paisible et durable du différend chypriote».

Je félicite ma collègue de Saint-Denis pour cette initiative. C'est en sa compagnie et celle d'autres parlementaires que j'ai visité ce pays en janvier 1995. Ce fut pour moi une expérience extraordinaire. Malheureusement, nous n'avons pu parcourir que la partie sud de Chypre, soit celle qui est sous le contrôle de la communauté grecque et du gouvernement du président Glafcos Cléridès, gouvernement reconnu par la communauté internationale. Il nous a quand même été possible de regarder de loin la ville fantôme de Famagusta, aujourd'hui abandonnée, mais qui a joué un grand rôle dans l'histoire de Chypre.


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(1115)

Chypre constitue une synthèse des valeurs de l'Orient et de l'Occident. Petite île de la Méditerranée orientale de 240 kilomètres de long sur 100 kilomètres de large, ayant une superficie de 9 251 kilomètres carrés, Chypre a plus de 3 000 ans d'histoire. Ce pays subit malheureusement les effets de l'antagonisme gréco-turc qui remonte à la prise de Constantinople en 1453.

Chypre a aussi été marquée par 82 ans de présence britannique. Entre 1878 et 1960, Chypre a été effectivement une colonnie britannique qui a acquis son indépendance en août 1960. À ce moment-là, 574 000 habitants peuplent l'île dont 81 p. 100 d'hellénophones et 18 p. 100 de turcophones. Au Parlement de Nicosie, 35 sièges étaient attribués aux hellénophones et 15 sièges aux turcophones, soit un ratio de 70 p. 100 contre 30 p. 100.

Quelques années après, une flambée de violence interethnique s'est tranformée en conflit sanglant dans toute l'île. Les turcophones décidèrent de créer un gouvernement séparé sous le nom de PTCA, Provisional Turkish Chypriot Administration.

En 1964, les Casques bleus des Nations Unies, dont un contingent canadien, remplacèrent les soldats britanniques. Cette année, la Grèce envoya environ 5 000 soldats, alors que la Turquie augmenta ses effectifs militaires jusqu'à 10 000 soldats. C'est ce qu'on appelle le début de la «green line», zone neutre entre les quartiers turc et grec de Nicosie.

De 1964 à 1974, Chypre connaît une période relativement calme. L'île de Chypre a eu un grand président, l'archevêque Makarios, qui a fait une bonne administration et fut un leader des pays non alignés. J'avais eu l'honneur de le rencontrer au Chili lors d'une visite dans ce pays. En 1974, la dictature des colonels en Grèce organisa un coup d'État à Chypre. Ankara profita de cette occasion pour envoyer 7 000 soldats qui occupèrent un tiers de l'île.

Il faut chercher un règlement négocié à Chypre. En mai 1994, dans son rapport au Conseil de sécurité, le secrétaire général de l'ONU disait: «Le Conseil de sécurité se trouve en face d'un scénario déjà familier, l'absence d'une entente due essentiellement au manque de volonté politique du côté turco-chypriote.»

À mon avis, il faudrait d'abord mettre fin à l'occupation par les troupes turques sur cette île soit environ 40 000 soldats. D'ailleurs, le sécrétaire général de l'ONU identifie Chypre comme «l'une des zones les plus militarisées dans le monde en termes de soldats et de population civile». En novembre 1993, le secrétaire général de l'ONU affirmait que le Conseil de sécurité jugeait inacceptable le statu quo à Chypre, lequel «a été établi et maintenu par l'usage de la force».

Une partie de la solution à ce problème se trouve, à mon avis, dans la proposition du président de Chypre, M. Glafcos Cléridès, pour la démilitarisation complète de cette île. Cette proposition a été soumise à l'ONU en décembre 1993 et réaffirmée par la suite à maintes reprises. Ce plan comprend l'élimination de la Garde nationale chypriote et la remise de toutes les armes et de l'équipement militaire à une force de paix des Nations Unies.

J'appuie la motion M-239 visant à la démilitarisation de Chypre. J'étais très sensible à l'initiative du Dr Oscar Arias, ancien président du Costa Rica, qui mène une campagne extraordinaire pour mettre fin à l'armement. Costa Rica est déjà un pays démilitarisé ainsi que le Panama et dernièrement, Haïti. Je suis d'accord avec la démilitarisation de ces trois pays. L'argent ainsi économisé pourrait être consacré au développement économique et social de l'île.

(1120)

La force de paix de l'ONU doit continuer à jouer un rôle primordial dans le processus de paix. Cette proposition de démilitarisation a déjà été appuyée par la Chambre des représentants des États-Unis et par les Parlements européens, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, ainsi que par les chefs de gouvernement du Commonwealth qui se sont rencontrés en Nouvelle-Zélande en novembre 1995. Maintenant, c'est au tour de cette Chambre des communes d'appuyer cette initiative qui amènera, je le crois, la paix et la stabilité à cette île.

Je remercie la communauté chypriote du Canada et particulièrement celle du Québec qui nous rappelle, d'une façon constante, le problème de Chypre et qui fait des pressions légitimes pour qu'une solution soit trouvée à ce problème dans les plus brefs délais.

Le Canada, membre du Commonwealth comme Chypre, devrait jouer un rôle plus important dans le maintien de la paix et de la recherche d'une solution au problème chypriote. Ce problème est laissé sans solution depuis trop longtemps. J'exhorte le gouvernement canadien à intensifier ses efforts en cette matière.

Je trouve déplorable, d'une part, que le Canada ait retiré, en 1992, ses Casques bleus de Chypre après 29 ans de présence dans l'île. La présence de la force de paix de l'ONU est indispensable. Elle peut aider à la négociation et à un règlement politique de la question chypriote.

D'autre part, les démarches de médiation entamées par l'ancien premier ministre du Canada, Joe Clark, en tant que représentant du secrétaire général Boutros Boutros-Ghali, n'ont malheureusement pas donné les résultats escomptés.

Je déplore également que le Canada ne soit que représenté par un consul honoraire en poste à Chypre. Je pense que la situation là-bas et l'importante communauté chypriote au Canada méritent que le Canada soit représenté par un consul général de carrière qui travaille à temps plein.

J'espère que la république de Chypre, comme l'a dit ma collègue, pourra adhérer prochainement à l'Union européenne. Cela va contribuer à solutionner le problème.

Les Chypriotes grecs et turcs ont vécu pacifiquement ensemble pendant quatre siècles. La crise de 1974 a laissé plus de 3 500


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morts, dont 3 000 Chypriotes grecs, sans oublier les 1 619 personnes disparues dont on ignore encore le sort.

Au cours de ma visite, j'ai été sensibilisé à cette tragédie des personnes disparues, que j'ai connue, au Chili, en Argentine et dans plusieurs autres pays. La question de la disparition des personnes est un problème très grave aujourd'hui. Sans mentionner, d'autre part que seulement à Chypre, il y a plus de 200 000 citoyens déplacés.

Chypre est un pays que j'ai beaucoup aimé lors de ma visite et qui a joué un grand rôle. Malheureusement, depuis 1974, les populations demeurent séparées, car aucune solution n'est acceptée à la fois par la communauté grecque au sud et par la communauté turque au nord.

J'ai pu constater également que la partie que nous avons visitée enregistre une très forte croissance économique et que le niveau de vie est très élevé. Des milliers de touristes visitent chaque année cette belle île. J'aimerais que Chypre dans son ensemble puisse bénéficier d'une prospérité et d'un niveau de vie encore plus élevé.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, la motion no 239, proposée par la députée de Saint-Denis, reflète l'intention déjà déclarée par les Nations Unies, le Parlement australien, le Parlement néo-zélandais, le Sénat et la Chambre des représentants des États-Unis. En appuyant cette motion, le Canada se joindra à tous ces leaders mondiaux pour demander un règlement paisible du différend chypriote et assurer la stabilité et le bien-être du peuple chypriote.

En s'alliant aux pays et aux organisations internationales qui ont déjà manifesté leur appui à la démilitarisation de Chypre, le Canada se trouve à déclarer que cela apaiserait les préoccupations de sécurité de toutes les parties intéressées. Cela rehausserait les possibilités de paix et de règlement durable du différend chypriote. Cela profiterait à tous les Chypriotes et mériterait donc l'appui du monde entier.

(1125)

Chypre est secoué par un conflit depuis 1963, lorsque la violence est née de tensions accumulées entre les collectivités grecques et turques. Chypre avait obtenu son indépendance de la Grande-Bretagne trois ans plus tôt, avec une Constitution qui était censée équilibrer les intérêts des communautés grecques et turques de l'île.

Un traité conclu entre Chypre, la Grèce, la Turquie et le Royaume-Uni garantissait les dispositions fondamentales de la Constitution et l'intégrité territoriale et la souveraineté de Chypre. Malheureusement, les dispositions de la Constitution n'ont pas été faciles à appliquer et, avec le temps, les tensions entre les deux communautés se sont aggravées et ont finalement mené à la violence.

Dès 1964, les Nations Unies ont établi une force de maintien de la paix à Chypre. Depuis lors, le Conseil de sécurité a périodiquement prolongé le mandat de la mission de maintien de la paix et tout récemment encore, il l'a prolongé jusqu'au 30 juin 1996. Quoique manifestant le regret qu'on n'ait accompli aucun progrès vers une solution politique finale et pressant les dirigeants des deux communautés de promouvoir la tolérance et la réconciliation, ces forces vont sans doute continuer à patrouiller la zone tampon entre les 30 000 soldats turcs qui demeurent à Chypre et les forces chypriotes grecques.

La présence des troupes turques dans le nord de l'île de même que l'occupation de la région par les troupes grecques nuisent à la recherche d'une solution librement négociée du conflit. Ces soldats représentent une menace potentielle pour la sécurité et le bien-être de tous les Chypriotes et compromet la paix et la stabilité de cette région.

Tant que la république ne sera pas démilitarisée, les négociations risquent grandement de demeurer stériles et aucun règlement ne sera conclu. Le conflit dure depuis trop longtemps et nous, en tant que représentants élus d'une nation influente, devrions exprimer nos inquiétudes pour les habitants de Chypre qui continuent de souffrir de l'avenir incertain de leur pays.

L'expérience de Chypre sert aujourd'hui à évaluer l'efficacité des Nations Unies et de l'application des règles fondamentales du droit international. Depuis que ce conflit a éclaté, les Nations Unies ont proposé un certain nombre de plans de paix afin de créer un État chypriote fédéral, indépendant et non aligné. Ils ont aussi appuyé de nombreuses rondes de négociation entre les parties en cause, qui, pour la plupart, n'ont rien donné.

En 1992, M. Boutros Boutros-Ghali a fait rapport au Conseil de sécurité des Nations Unies des résultats de la dernière ronde de négociation. Il a annoncé avec regret que le manque de volonté politique continuait d'entraver la ratification d'un accord.

La même année, le Conseil de sécurité a réaffirmé que tout règlement doit prévoir la création d'un État chypriote unique sur le plan de la souveraineté, de la personnalité internationale et de la citoyenneté, dont l'indépendance et l'intégrité territoriale seraient protégées. En 1994, la résolution 939 a effectivement reconnu que, en l'absence d'accords sur les questions fondamentales, les mesures d'instauration de la confiance ne représentaient pas une solution réaliste au conflit. Malheureusement, la présence de troupes étrangères à Chypre a miné la capacité des négociateurs d'élaborer ces accords sur les questions fondamentales qui étaient mentionnés dans la résolution 939.

Le Parlement européen a adopté une résolution conjointe où il exhortait l'Union européenne, ses États membres et la Turquie à appuyer fermement la poursuite d'un vaste dialogue visant à promouvoir le respect des libertés et des droits de la personne. Voilà


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une résolution dont nous devons nous faire l'écho à la Chambre des communes du Canada.

Dans ce dossier, nous devons nous préoccuper d'abord et avant tout des Chypriotes. Ce sont eux qui souffrent de cette interminable guerre et de l'absence de négociations politiques entre les pays en conflit. C'est seulement grâce à des accord négociés entre la Grèce et la Turquie qu'on pourra rétablir la paix. C'est seulement en rétablissant la paix que les droits de la personne et la démocratie pourront à nouveau être respectés dans cette région.

Le Canada a à coeur les droits de la personne et la liberté fondamentale de tous. Cela ne peut être qu'une simple promesse verbale. Nous devons aussi prendre des mesures à cet égard. Nous pouvons commencer par approuver la motion visant à rétablir la paix et la stabilité à Chypre par le retrait de tous les militaires étrangers de la région.

(1130)

Malheureusement, bien que la nécessité et la valeur de cette motion soient indiscutables, on ne peut en dire autant de son efficacité. Parce que le Canada est loin de Chypre, nous ne pouvons participer activement au règlement du problème. C'est aux autorités de la région visée qu'il appartient de le faire. Ce sont elles qui doivent se réunir autour de la table de négociation et arriver à un règlement qui se traduira par la démilitarisation de Chypre et qui permettra aux Chypriotes de vivre en paix. Nous devrions préconiser et promouvoir le rôle de la diplomatie dans cette région.

Je demande au gouvernement d'exhorter l'Union européenne à participer plus activement au règlement du conflit à Chypre. L'Union européenne a, sur ce conflit, une influence que le Canada n'a pas. Premièrement, ses États membres sont dans une position beaucoup plus stratégique que ne l'est le Canada pour contribuer au règlement du conflit chypriote. Ils jouent aussi un rôle unique dans le conflit étant donné qu'en juillet 1990, Chypre a demandé officiellement de devenir un membre à part entière de la Communauté européenne.

En réponse à la demande d'adhésion de Chypre, les dirigeants de l'Union européenne ont convenu, lors du sommet de Corfou, que la prochaine fois où l'union élargira ses rangs, elle inclura Chypre, à condition que le problème chypriote soit réglé. Cela donne à l'Union européenne un outil de négociation qu'elle pourra utiliser pour finalement résoudre le problème.

Pour que cette question reçoive toute l'attention qu'elle mérite, il importe que nous mettions un terme au conflit et que nous le fassions dès maintenant. Nous exhortons toutes les parties en cause dans le dossier chypriote à faire preuve de bonne volonté et à montrer une nouvelle détermination pour arriver à un règlement politique durable et pacifique. C'est ainsi que le Canada peut être le plus utile.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion de prendre part au débat sur cette importante motion, la motion no 239, qui fait la promotion de la démilitarisation de Chypre. D'entrée de jeu, je dois dire que j'appuie cette motion. Je voudrais féliciter le député de Saint-Denis de l'avoir présentée.

Depuis quelques années, nous avons été témoins de l'émergence de foyers de tensions et de conflits causés par les forces destructrices du chauvinisme et des luttes ethniques. Parallèlement, dans nombre de parties du monde, nous avons également été témoins du triomphe de la raison, de l'établissement de la démocratie et de la naissance d'économies de marché.

En juillet 1974, le gouvernement turc a lancé une brutale offensive. Il en est résulté une invasion illégale d'un État souverain et d'un membre des Nations Unies, l'île de Chypre. Jusqu'à présent, 37 p. 100 du territoire de Chypre est illégalement occupé.

Des Chypriotes turcs et grecs ont été évincés de leur foyer par la force et sont devenus des réfugiés dans leur propre pays. Près de 50 000 Chypriotes turcs ont été forcés, par l'armée turque, à abandonner leur foyer, perdant ainsi tous leurs biens. Des milliers de Chypriotes grecs ont été déplacés, leur biens, volés, et les membres de leur famille, tués. Près de 2 000 Chypriotes grecs sont disparus sans laisser de traces.

Pour les personnes manquantes et leur famille constamment sous surveillance, cela représente une violation flagrante des élémentaires droits de la personne.

J'ai rencontré le père d'une de ces personnes disparues. Il s'appelle John Kasapis. M. Kasapis est un citoyen américain dont le fils de 16 ans était en vacances à Chypre en 1974. À ce jour, ce père au coeur brisé n'a jamais eu de nouvelles de l'endroit où se trouverait son fils, qui aurait maintenant 38 ans. Est-il vivant ou mort? Est-ce que ce père, ou les familles des 1 619 autres personnes disparues-dont, je le souligne, beaucoup ont des parents au Canada-trouveront un jour le repos? Est-ce qu'ils pourront un jour vivre en paix? Leurs blessures se cicatriseront-elles un jour?

Le 20 juillet, la population de Chypre et le reste du monde civilisé commémoreront le 22e anniversaire de cette invasion brutale et illégale. Je suis triste de dire qu'il ne semble y avoir aucune solution en vue. Apparemment, aucune n'est acceptable pour le régime turc illégal.

(1135)

J'ai récemment assisté à une réunion de l'OTAN et de l'Alliance de l'Atlantique Nord où il a notamment été question de l'immigration illégale. J'ai été choqué d'apprendre qu'il y avait plus de 20 000 immigrants turcs en situation irrégulière qui demandaient l'asile en Allemagne.

M. Katlu Adali, du journal turc Yeniduzen, a décrit comment la population chypriote turque était passée de 70 000 à 60 000 habitants. Les Chypriotes turcs qui vivent dans la zone occupée par les Turcs, au nord, fuient vers le sud libre et ce n'est pas uniquement pour trouver des emplois ou pour vivre mieux, mais de plus en plus, pour y demander l'asile politique.

Selon Ortam, un autre journal turc, la république de Chypre reconnaît aux Chypriotes turcs le statut de citoyens au même titre que les membres de bien d'autres groupes de l'île, dont les Maronites, les latins et les Arméniens, pour ne nommer que ceux-là. En


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lisant cela, je me demande quel genre de régime les autorités turques imposent dans le nord de Chypre.

Des milliers de nouveaux colons turcs ont été amenés du continent dans la zone occupée. Cela modifie radicalement la composition démographique de Chypre aux dépens des Chypriotes turcs et grecs.

En janvier 1992, M. Cuco, parlementaire espagnol, a déclaré au comité des migrations, des réfugiés et de la démographie du Conseil de l'Europe que l'occupant turc, en amenant des Turcs du continent pour coloniser des régions de Chypre, nuisait sérieusement au processus de paix et créait le problème démographique le plus grave depuis l'invasion de 1974. Je tiens à dire que ces remarques étaient fondées sur l'enquête que M. Cuco a menée sur les lieux.

De plus, le Conseil de l'Europe a condamné les violations des droits de la personne commises par la Turquie et, selon un rapport publié par le conseil en 1983, la Commission européenne des droits de l'homme a déclaré que l'occupation continue de Chypre par la Turquie constituait une infraction aux dispositions 5, 8, 14, 26 et à l'article 1 du protocole 1 de la Convention européenne des droits de l'homme. La commission a clairement condamné les violations des droits de la personne par la Turquie relativement aux personnes disparues, à leur famille et à leurs biens.

Plus il y aura de gens qui sont au courant de ces violations des droits de la personne, plus il y a de chances qu'on prenne des mesures pour y mettre fin. Plus les gens apprennent, plus ils deviennent sensibles et moins ils risquent de faire du mal aux autres.

Par mon discours, je veux que les gens apprennent à travailler afin de trouver une solution non seulement pour Chypre, mais pour toute l'humanité. Les mesures d'instauration de la confiance sont un pas dans la bonne direction. C'est pourquoi cette motion est des plus importantes et c'est pourquoi je demande à mes collègues à la Chambre de l'appuyer sans réserve.

Tout comme nos homologues américains, le Parlement européen, la Chambre des représentants de la Nouvelle-Zélande et la Chambre des communes de l'Australie travaillent énergiquement pour aider à trouver une solution juste et rapide au problème qui existe à Chypre, je signale que nous aussi, parlementaires canadiens, nous contribuons à la recherche d'une solution juste par l'intermédiaire de l'association d'amitié Canada-Chypre.

Il est aussi important de mentionner à la Chambre qu'il y a environ deux ans, le groupe d'amitié Canada-Chypre, sous la direction de son président, le député de Kent, a appuyé une proposition de démilitarisation de Chypre présentée par le président de la République de Chypre, M. Clerides, au secrétaire-général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali.

Par conséquent, je n'exposerai pas en détail le plan de démilitarisation en six points, car mon collègue l'a déjà décrit avec beaucoup d'éloquence, mais je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter le président Clerides de son initiative audacieuse.

Les chefs de gouvernement des pays membres du Commonwealth qui se sont réunis au Zimbabwe ont appuyé à l'unanimité la résolution réitérant son appui en ce qui concerne la souveraineté indépendante, l'intégrité territoriale, l'unité et le statut de pays non aligné de Chypre, ainsi qu'en ce qui concerne la conformité à toutes les résolutions des Nations Unies sur Chypre. En outre, elle appuie sans réserve la proposition du président concernant la démilitarisation de Chypre.

Ce qui est important, c'est que le gouvernement canadien et les membres du Commonwealth aient appuyé en gros cette proposition. Avec la réunion qui a eu lieu au Zimbabwe, la Chambre a encore davantage de raisons d'appuyer cette motion.

On se demande combien de temps les Chypriotes devront attendre que l'envahisseur s'en aille de chez eux. Pendant combien de temps les Chypriotes seront-ils encore témoins d'une purification ethnique?

(1140)

Les forces d'occupation turques continuent à piller systématiquement et à détruire le patrimoine culturel chypriote dans la zone occupée de l'île. Ils s'en prennent surtout aux biens religieux. Les églises continuent d'être converties en mosquées, d'être vandalisées et d'être transformées en centres de spectacles et en tavernes. Ce qui se passe dans les zones de Chypre qui sont occupées par les forces turques est absolument révoltant et cela va à l'encontre de tous les principes sur lesquels sont fondés les droits et libertés de la personne.

Vingt-deux années se sont écoulées et la Turquie ne donne pas suite aux nombreuses résolutions du Conseil de sécurité, qu'elle ignore totalement. À moins que l'agresseur ne soit puni de plus en plus sévèrement pour son manque de respect à l'égard de l'ordre juridique international, je dois malheureusement dire que le problème ne sera pas résolu, la justice ne régnera pas à Chypre, et les Nations Unies perdront leur crédibilité.

Chypre n'essaie pas de se faire prendre en pitié. Elle veut ce que nous voulons tous, nous qui sommes des êtres humains civilisés. Chypre veut ce que préconisent toutes les institutions progressistes, à savoir la justice.

J'appuie non seulement cette motion en faveur de la démilitarisation de la République de Chypre, mais que j'exhorte tous les députés de faire la même chose pour que nous participions tous à un processus qui permettra d'apporter une solution juste et pacifique à cette île éprise de paix. Unissons nos efforts pour redresser ce tort. Pansons les plaies.

M. John English (Kitchener, Lib.): Monsieur le Président, je suis extrêmement heureux de prendre la parole au sujet de la motion no 239, qui propose la démilitarisation de l'île de Chypre.

Je tiens à remercier la députée de Saint-Denis d'avoir présenté cette motion et je lui accorde mon appui. Ma collègue a fait preuve


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d'un grand esprit d'engagement et d'une persévérance remarquable en présentant cette très importante motion. Ceux d'entre nous qui connaissent bien les initiatives parlementaires et leurs difficultés pensent qu'il est important de souligner les efforts de notre collègue.

Tous les députés savent que le Canada est depuis longtemps voué au règlement pacifique des conflits à Chypre. Depuis plus de trente ans, le Canada participe activement au règlement de ces différends et nous avons acquis une connaissance approfondie de la situation qui prévaut dans l'île.

Bien que les troupes canadiennes aient quitté l'île en 1993, nous entretenons un intérêt marqué pour Chypre en raison de nos liens communs avec le Commonwealth, de l'expérience acquise par de nombreux Canadiens et du fait que de nombreux Canadiens ont des origines chypriotes.

Nous ressentons aujourd'hui une grande inquiétude. Le secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros-Boutros-Gahli a dit ceci: «Chypre est une île dangereuse.» La partie nord de l'île est, selon lui: «l'une des régions les plus militarisées du monde.» On y voit partout des armes et des soldats, et la presse fait état quotidiennement des dangers qui y sont présents.

La semaine dernière, la députée de Saint-Denis a mentionné qu'un Chypriote grec avait été tué par un soldat turc. Nous avons entendu parler cet été du conflit qui sévit dans la Méditerranée. Tout l'est du bassin méditerranéen est en train de devenir très dangereux et cette situation pose un risque réel pour la paix sur une échelle beaucoup plus étendue.

Le Canada a toujours appuyé les efforts des Nations Unies et de la communauté internationale en faveur de la réunification de l'île. C'était inscrit dans la résolution no 939 du Conseil de sécurité, et nous sommes d'accord avec le principe de la résolution, c'est-à-dire qu'un règlement de paix négocié, fondé sur une structure fédérale qui tienne compte des intérêts et des préoccupations légitimes des deux parties, est la solution la plus prometteuse.

Tout récemment, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité ont réaffirmé leur appui total aux bons offices du secrétaire général et souligné qu'il était très important de régler le problème chypriote dans une perspective globale en s'appuyant sur les résolutions pertinentes du conseil de sécurité ainsi que sur les discussions de 1977 et 1979.

C'est pourquoi nous tenons aujourd'hui ce très important débat. Le Canada a une chance de jouer un rôle de premier plan en réclamant la démilitarisation de l'île. Comme vous le savez, monsieur le Président, parce que vous avez vous-même effectué des travaux très importants sur le règlement des conflits, la démilitarisation est une première étape fondamentale dans le processus de règlement des conflits, pour des situations semblables à celle de Chypre.

À bien des endroits, nous sommes intervenus de façon dynamique et avons contribué à maintenir la paix mondiale grâce à nos efforts de maintien de la paix, mais dans le cas de Chypre, des militaires canadiens y sont depuis plusieurs décennies sans parvenir à leurs fins. Nous avons donc pris des mesures déterminantes, par l'intermédiaire de M. Clark, à titre de représentant du secrétaire général, pour tenter d'arriver à une solution. D'après les États-Unis, cette année devait être « l'année de Chypre ». Il semble qu'on soit parvenu à des solutions pour d'autres conflits qui sévissaient dans cette région du monde, comme en Bosnie et en Israël. Peut-être ne vont-ils pas dans le sens où nous souhaiterions les voir aller, mais c'est l'année où devait être examinée la question de Chypre.M. Holbrooke devait être le représentant personnel du président Clinton, mais, malheureusement, rien de tout cela n'a été fait.

(1145)

Aujourd'hui, la démilitarisation du nord de Chypre pose un sérieux problème et la résolution que nous espérions voir adoptée il y a quelques mois ne l'a pas été.

Comme la députée de Saint-Denis l'a fait remarquer, de nombreux pays ont adopté une motion dans le même esprit que celle que nous sommes en train d'examiner. Les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Parlement européen et le gouvernement canadien, par l'entremise des chefs de gouvernement du Commonwealth, ont accepté d'appuyer le fondement de cette résolution. Étant donné le rôle historique qu'a joué notre pays dans le domaine du maintien de la paix, n'est-il pas logique d'appuyer la démilitarisation de Chypre?

Il est malheureux et à vrai dire tragique que nous débattions de cette question aujourd'hui, car cela témoigne d'un échec de la part de la communauté mondiale et des Nations Unies. Plus de vingt ans d'engagements, de résolutions du Conseil de sécurité et de discussions à des niveaux élevés n'ont abouti à aucune solution. Si nous appliquions la politique de la guerre froide à cette question, quelle serait la solution? Comme l'a dit le député qui a pris la parole avant moi, nous devons tenir compte de l'intransigeance du gouvernement chypriote turc et de la Turquie.

En tant que Canadiens, nous sommes convaincus que des négociations pacifiques sont la seule solution. Depuis l'échec des négociations de 1993-1994, nous avons lancé des appels répétés aux deux parties afin qu'elles redoublent d'efforts pour résoudre le différend qui les opposent. Bien sûr, il n'existe pas de solution simple à ce problème complexe. Toutefois, comme le président de Chypre l'a fait remarquer dans une lettre qu'il a fait parvenir àM. Boutros Boutros-Ghali, le secrétaire général des Nations Unies, la démilitarisation est une étape importante si l'on veut réduire l'anxiété et la méfiance des parties au conflit. Sans la démilitarisation, une prolifération des armes est inévitable et l'on peut facilement en prédire les conséquences.

Beaucoup de gens, tant des des Grecs que des Turcs, se réjouissent à l'idée que, pour la première fois, la communauté internationale pourrait appuyer une résolution visant à rétablir la paix dans cette île, belle certes, mais dangereuse.

Ce qui est important, à présent, ce n'est pas de pointer un doigt accusateur, mais c'est la réconciliation, le désir de voir la paix rétablie et le règlement de ce conflit. En tant que nation, le Canada peut aider en appuyant cette motion et en faisant clairement savoir à


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ceux qui veulent le statu quo qu'une telle intransigeance ne sera plus tolérée.

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour appuyer la motion présentée par ma collègue de Saint-Denis.

Quand je lis cette résolution, j'ai une impression de déjà-vu. J'ai écrit de la Constitution chypriote de 1960, qui a donc était adoptée voici plus de 30 ans, que c'était le parfait exemple d'un document constitutionnel conçu avec toute la rigueur de la raison, mais que sa capacité de survivre était en doute. Les solutions juridiques ne sont pas viables si elles sont conçues isolément de la société à laquelle elles s'appliquent.

Je connaissais le spécialiste allemand qui fut en grande partie responsable de la Constitution de 1960. L'équilibre des pouvoirs est là. Les forces sont parfaitement équilibrées. Mais cela n'a pas fonctionné. Je pense que c'est sans doute un exemple de l'optimisme de la fin des années 50 et des années 60 qui faisait qu'on pensait qu'il était possible de parvenir à une solution juridique sans nécessairement comprendre les forces sociales sous-jacentes.

La motion de la députée de Saint-Denis, qui arrive fort à propos, est très utile, et ce pour plusieurs raisons. Il est connu qu'en matière de règlement de conflits, il est difficile de trouver une solution lorsque les protagonistes en sont aux coups et que le sang coule. Toutefois, il arrive un moment où l'épuisement et l'usure font leur oeuvre et c'est presque une lapalissade de dire que c'est précisément à ce moment-là qu'il faut intervenir. On aurait cru qu'après plus de 20 ans d'hostilités, les initiatives venant de tierces parties seraient bienvenues, particulièrement une solution aussi fermement neutre dans son application que la proposition de procéder à la démilitarisation de la région par les Nations Unies et de remplacer les forces armées des adversaires par des casques bleus.

(1150)

Le maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies est une idée canadienne. C'est le premier ministre Pearson qui a été le premier à en faire la propostion et il a obtenu le prix Nobel pour l'avoir proposée essentiellement à un moment où les parties avaient tout à gagner d'une telle intervention qui permettait de sauver la face, en laissant une force neutre s'interposer entre les belligérants.

Si nous regardons les possibilités d'accession de Chypre à l'Union européenne, on constate qu'elles dépendent du rétablissement de la paix. Ce serait une bonne chose pour les deux communautés de Chypre. Par conséquent, il serait bon de redoubler d'efforts.

Il y a, là-bas, un rôle pour le Canada. D'une part, il consiste, de toute évidence, à offrir nos services dans le cadre d'une force des Nations Unies. D'autre part, il s'agit d'offrir notre expérience de pays ayant une société pluraliste et notre solution en ce qui concerne la Constitution. Ce qui est très clair, c'est que ni le modèle Westminster, un type de fédéralisme trop rigide du fait de ses catégories à priori, ni même le modèle allemand, le modèle de Bonn de 1949, qui a été utilisé par le juriste allemand Forsthoff pour servir de base à la constitution de 1960, ne conviennent. Ni l'un ni l'autre de ces modèles n'ont la vision ni les aspects pragmatiques de la résolution des conflits que notre Constitution, le modèle Westminster de 1867, a intégrés avec le temps.

Je peux envisager un rôle pour une initiative parlementaire canadienne, avec l'appui de notre ministre des Affaires étrangères, qui nous amènerait à dire que le fédéralisme est plus que des structures à priori rigides. C'est un processus. Quelque chose que l'on peut réaliser progressivement, ce que l'on a appelé l'étapisme dans la terminologie conventionnelle. Nous sommes prêts à offrir l'aide des parlementaires canadiens de tous les partis pour réaliser une coopération institutionnelle des différentes communautés sur la base du respect du droit dans les relations entre les citoyens. C'est un exemple de fédéralisme évolutif, d'un fédéralisme en mouvement qui s'inspirerait avantageusement de l'expérience canadienne.

Je demanderais aux députés d'exprimer, comme ils l'ont fait dans ce débat, leur appui à l'égard de cette excellente idée qui arrive à point. C'est une bonne idée qu'une force des Nations Unies remplace les forces armées des parties en présence, car nous pourrions offrir notre aide pour fédéraliser les relations entre les parties, non pas nécessairement en fournissant une constitution idéale qu'elles pourraient trouver difficile à accepter, mais en leur proposant des étapes concrètes de collaboration institutionnelle qui nous permettront d'apporter un appui constant.

La bonne chose au sujet de ce débat, c'est que les intervenants des trois partis, les principaux partis, ont parlé dans le même sens en ce qui concerne la recherche d'une solution pacifique, et cela, dans un esprit constructif. C'est quelque chose qui devrait encourager notre ministre des Affaires étrangères à offrir les bons offices canadiens, afin de lancer un pont facilitant le genre d'arrangements dont nous avons longuement parlé ici.

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté une partie du débat et j'ai suis heureuse d'exprimer mon appui à l'égard de cette motion.

J'aimerais la lire à nouveau:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait appuyer toutes les mesures visant à démilitariser la République de Chypre de manière à améliorer les chances d'un règlement paisible et durable du différend chypriote qui bénéficierait à tous les habitants de Chypre et mettrait un terme à plus de deux décennies de division.
Des électeurs de ma circonscription m'ont décrit la situation qui règne à Chypre; ils m'ont parlé des souffrances, des conflits, des difficultés qui durent depuis de nombreuses années dans cette île.

(1155)

Durant le débat aujourd'hui, nous avons entendu parler des mesures que la communauté internationale a prises dans ce dossier, notamment dans ses recommandations, la résolution 939 du Conseil de sécurité, qui recommandait en fait un processus de règlement du conflit chypriote. Malheureusement, nous avons aussi vu à quel point la communauté internationale se montre suffisante à l'égard d'une situation qui perdure depuis 24 ans sur cette île.

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Nous débattons aujourd'hui d'une motion qui propose une solution dans deux domaines, encore une fois liés à la sécurité qui inquiète les habitants de l'île et leurs parents et amis à travers le monde, et nous espérons que cette solution contribuera à un règlement paisible et durable.

Il n'existe pas de solution simple, mais ce que nous faisons aujourd'hui pourrait représenter une première étape. Cette première étape vers le règlement du conflit est sans doute la démilitarisation de l'île. Le Canada a l'occasion de faire partie de la solution en s'exprimant. Comme nous l'avons dit, les trois partis s'entendent sur ce point.

Notre parti est convaincu que les motions d'initiative parlementaire doivent être prises au sérieux. Nous félicitions la députée qui a présenté celle-ci. Selon nous, une heure de débat ne suffit pas pour une question de cette importance, ni pour toute autre proposition préparée par un député.

Je voudrais demander le consentement unanime pour que la motion 239 fasse l'objet d'un vote. Ainsi, tous les partis auront l'occasion de manifester leur appui à l'égard de la paix dans le monde.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que la motion no 239 soit mise aux voix?

Des voix: Non.

Le vice-président: Il n'y a pas consentement unanime. Le débat se terminera donc à 12 h 3. Puisque aucun autre député ne réclame la parole, je demande à la députée présentant la motion de reprendre le débat.

Mme Bakopanos: Monsieur le Président, je remercie tous les députés au nom des Canadiens, notamment ceux d'origine chypriote, d'avoir appuyé cette motion. Elle a été appuyée à l'unanimité par les députés des deux côtés de la Chambre. Le gouvernement l'appuie, et le ministre a dit aujourd'hui, par l'intermédiaire du secrétaire parlementaire, que le gouvernement irait de l'avant avec cette motion et demanderait à la communauté internationale de l'appuyer.

Je remercie encore une fois tous les députés de leur appui et d'avoir prêté leur voix pour dire que c'en était trop. Que cette année soit celle de Chypre, comme un député l'a dit à la Chambre. Travaillons ensemble pour amener les deux parties à trouver une solution, cette année, à la tragédie qui s'est produite au cours du siècle actuel.

Le vice-président: L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. L'article est rayé du Feuilleton.

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3901

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 14 juin 1996, de la motion: Que le projet de loi C-45, Loi modifiant le Code criminel (révision judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ce projet de loi d'initiative ministérielle propose d'amender un seul article du Code criminel, soit l'article 745, qui est en vigueur depuis 1976. Cependant, ce n'est qu'en 1987 que cet article a été appliqué pour la première fois.

Cette disposition permet à un condamné pour meurtre de présenter une demande de libération conditionnelle après avoir purgé 15 ans de détention. Ce recours sera utilisé de plus en plus fréquemment avec les années, au fur et à mesure que les détenus susceptibles de s'en prévaloir auront purgé 15 ans de leur peine.

(1200)

Actuellement, sur 2 085 personnes condamnées pour meurtre, seulement 175 ont purgé les 15 ans de détention préalables à la présentation de cette requête. De ce nombre, 74 détenus ont effectivement exercé leur droit à travers le Canada et 63 ont obtenu une audition devant jury. Dans 13 cas, le jury a rejeté la demande de réduction du délai d'admissibilité à la libération conditionnelle, et dans 50 cas, le jury a réduit le délai.

Qu'arrive-t-il lorsque le jury accueille la demande et réduit le délai? Le détenu peut alors s'adresser à la Commission des libérations conditionnelles qui tiendra une audition, entendra des témoins, notamment la victime, et accordera ou non une libération conditionnelle. Des 50 qui ont obtenu la possibilité de s'adresser à la Commission, seulement 17 ont obtenu une libération conditionnelle totale, 6 d'entre eux se sont vu refuser toute forme de libération conditionnelle, 8 sont en semi-liberté et six bénéficient de sorties temporaires.

Comme on le voit, cet article 745 du Code criminel ne donne aux détenus que la chance d'obtenir d'un jury la permission de présenter une demande de libération conditionnelle plus tôt que prévu. Ce délai serait normalement de 25 ans dans le cas de meurtre au premier degré et dans le cas d'un meurtre au deuxième degré, ce délai est normalement de 10 ans, mais peut être porté à au plus 25 ans par le juge du procès sur recommandation du jury.

L'article 745 du Code criminel est une mesure d'exception. Cependant, la Commission des libérations conditionnelles conserve le dernier mot. Donc, l'article 745 actuel n'est pas une porte de sortie grande ouverte par en arrière, comme certains veulent le faire croire. C'est une lueur d'espoir pour ceux qui se réhabilitent. Cette mesure incite les détenus concernés à adopter un comportement responsable pendant leur détention.

Le juge en chef adjoint de la Cour suprême de l'Ontario a émis l'opinion que ce processus de révision établit un juste milieu entre la nécessité de faire preuve de clémence à l'égard du condamné qui affiche une bonne conduite durant l'exécution de sa peine, ce qui peut contribuer à la réinsertion sociale, et les intérêts de la communauté qui exigent qu'on condamne l'acte ayant mené à l'incarcération du délinquant.

C'est la seule disposition du Code criminel qui confie à des citoyens la responsabilité de prendre une décision quant au caractère juste et équitable d'une peine. Le Code criminel dans ses dispositions actuelles prévoit donc un mécanisme de reconsidération judiciaire qui semble approprié.

En 1994, le député libéral de York-Sud-Weston avait présenté un projet de loi qui visait à abroger purement et simplement cet article. Nous, du Bloc québécois, avions défendu le maintien de


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l'article 745 et son projet de loi a été adopté, malgré tout, en deuxième lecture, par un vote de 136 contre 103. Par contre, la session s'est terminée avant qu'il ne soit présenté en troisième lecture. Le 12 mars 1996, le même projet de loi était de nouveau présenté en Chambre et est maintenant devant le Comité permanent de la justice.

Aujourd'hui, le ministre de la Justice revient à la charge en nous proposant de maintenir cette procédure de révision avec quelques modifications cependant. Nous sommes favorables aux amendements proposés parce qu'ils maintiennent ce recours, tout en apportant quelques changements qui se justifient. Il faut se rappeler que cet article n'a pas été modifié du tout depuis ses origines, c'est-à-dire en 1976.

Le ministre de la Justice propose tout d'abord de retirer ce recours à la personne déclarée coupable de plus d'un meurtre. Nous appuyons cette mesure qui crée une différence de traitement entre celui qui a tué une personne et celui qui tue en série. C'est tout à fait logique, évidemment, enfin, c'est ce que nous croyons. L'article 745 se veut une mesure exceptionnelle, on comprend que le meurtrier en série en soit exclu tout comme celui qui représente toujours un danger pour la société.

Cet amendement permettra à l'avenir d'exclure les Fabrikant, Olson et Bernardo. Ils devront purger la sentence telle qu'imposée par le tribunal avant de présenter une demande de libération conditionnelle. On voit d'ailleurs très mal comment un récidiviste ou un tueur en série pourrait obtenir gain de cause dans une demande de révision judiciaire.

(1205)

Il est convenable de modifier en ce sens l'article 745. Cet amendement permettra, à juste titre, d'exclure du nombre des requérants ceux qui avaient très peu de chances de toute façon d'obtenir une libération conditionnelle. C'est une mesure qui accroît la sécurité de la population et lance un message que le meurtre est inacceptable.

Un deuxième amendement proposé vise à exiger l'unanimité des membres du jury lorsqu'ils décident de réduire le délai avant demande de libération conditionnelle. Actuellement, il suffit que les deux tiers des jurés accueillent la demande. Cette mesure augmentera la sécurité du public et réduira le nombre de demandes accordées.

Si les jurés sont unanimes pour réduire ce délai, une majorité des deux tiers suffira pour décider du nombre d'années de réduction ou de la suppression immédiate du délai. La règle du deux tiers est maintenue dans la détermination du nombre d'années de réduction, ce qui maintient un certain équilibre.

Nous sommes favorables à cette mesure parce que l'article 745 offre une mesure d'exception. L'unanimité requise a pour effet de faire ressortir ce caractère exceptionnel. Par ailleurs, en cas de refus, le jury pourra fixer à la majorité des deux tiers le délai à l'expiration duquel le requérant pourra formuler une nouvelle demande.

Ce projet de loi exige donc l'unanimité des jurés, mais maintient la possibilité actuelle de reformuler une nouvelle demande après un délai de deux ans. Encore une fois, un certain équilibre est conservé entre la protection de la société et la reconnaissance des efforts faits par le détenu.

Enfin, un dernier amendement proposé est à l'effet de soumettre à un examen préalable par un juge toute demande de révision. Cette mesure vise de toute évidence à éliminer les demandes sans fondement, celles qui n'ont aucune possibilité raisonnable d'être acceptées. À cet effet, le juge se fonde sur la demande, le rapport du service correctionnel et tout autre document soumis par le procureur général ou le requérant.

Le juge prend une décision en fonction du caractère du requérant, de sa conduite et de la nature de l'infraction pour laquelle il a été condamné. Il s'agit d'une étape additionnelle qui, à prime abord, semble alourdir la procédure, mais vise selon toute évidence à éviter d'avoir à former un jury et de communiquer avec la victime pour lui demander des informations.

Si le juge décide que le requérant a démontré qu'il existe une possibilité réelle que la demande soit accueillie, le juge en chef charge un juge de la Cour supérieure de juridiction criminelle de constituer un jury pour entendre la demande.

Si le juge décide que le requérant n'a pas démontré qu'il existe une possibilité réelle que la demande soit accueillie, il peut fixer dans quel délai une nouvelle demande pourra être formulée ou décider qu'aucune nouvelle demande ne pourra être formulée. Le requérant ou le procureur général peuvent interjeter appel à la Cour d'appel de toute décision rendue par le juge.

Ces trois modifications permettront de réduire le nombre de demandes. Avec l'exclusion de ceux qui ont commis plus d'un meurtre et l'instauration d'un examen au préalable de la demande par un juge, on peut croire que seules les demandes vraiment sérieuses seront portées à l'attention du jury. Et en exigeant l'unanimité des jurés pour accueillir la demande, on s'assure d'une décision plus mûrie. Il restera à la Commission des libérations conditionnelles de prendre la décision ultime.

En somme, ce projet de loi a su nous rallier parce qu'il maintient un recours approprié tout en cherchant à éliminer les abus qu'il pourrait entraîner. Par ailleurs, rien quant à nous ne justifiait de bousculer les procédures en Chambre afin de faire adopter ce projet de loi. C'est purement et simplement de l'improvisation. En plus, je dois vous dire et ce en terminant, que le Comité de la justice devra se réunir ce soir, de façon exceptionnelle évidemment, pour entendre le ministre de la Justice, pour entendre les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice et un autre témoin. Le Comité de la justice devra également continuer ses auditions demain, à la vapeur, puisque nous manquons de temps.

(1210)

Il s'agit, quant à moi, je dois bien le dire, d'un simulacre d'audition de témoins, tout étant fait pour bâcler le plus rapidement possible le projet de loi C-45. Il s'agit là, quant à moi, d'une manoeuvre pas très orthodoxe. C'est le terme que je trouve le plus judicieux et le plus convenable en cette Chambre.


3903

Le ministre de la Justice a décidé de procéder à la dernière minute, il faut bien le dire. Il y a quand même eu quelques mois auparavant durant lesquels nous aurions pu discuter de ce projet de loi. Nous aurions pu convoquer des témoins au Comité permanent de la justice. Non. Le ministre de la Justice a décidé d'agir à la dernière minute, en improvisant.

Est-ce que c'est pour redorer son blason? Est-ce que c'est pour redorer son image qui, ces derniers temps, semble pâlir dû à certaines affaires en cour actuellement dont, pour ne pas la nommer, l'affaire Airbus? Peut-être. Enfin, nous allons laisser la population décider là-dessus. Mais je tenais quand même à vous mentionner que ce n'est pas une façon normale de procéder. Faire un simulacre d'audition, quant à moi, n'est pas la façon normale de procéder pour un ministre de la Justice.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je signale que les réformistes qui vont se prononcer sur ce projet de loi ne partageront pas leur temps de parole dorénavant.

Je me réjouis de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-45 proposé par le ministre de la Justice. Cette mesure législative vise la modification, et non pas l'abrogation, de l'article 745 du Code criminel du Canada.

Je tiens à informer au départ la Chambre qu'il m'est impossible d'appuyer la mesure législative. J'ajouterai que mes collègues du Parti réformiste, à moins que leurs électeurs ne leur demandent de voter autrement, ne souscriront pas au projet de loi.

Lors du congrès national de Vanvouver du Parti réformiste duweekend dernier, les membres nous ont donné des instructions on ne peut plus claires. En effet, les délégués ont proposé une résolution en faveur, non pas de la modification de l'article 745 du Code criminel, mais de son abrogation. Parmi toutes les résolutions adoptées à cette assemblée, c'est celle-là qui a reçu le plus grand nombre de voix. Elle a été appuyée par 98,8 p. 100 des délégués réformistes. Elle est maintenant la politique officielle du Parti Réformiste.

Les réformistes réunis à Vancouver ont été unanimes à voter en faveur de l'abrogation de l'article 754 parce que, à l'instar de la plupart des Canadiens, nous reconnaissons que cet article est en quelque sorte le symbole de tout ce qui ne va pas dans notre système de justice pénale. Cette disposition, qui accorde aux tueurs le droit de demander une libération conditionnelle anticipée après avoir purgé seulement 15 ans d'une peine d'emprisonnement à vie, symbolise la décadence qui frappe le système de justice pénale au Canada. La plupart des Canadiens en sont donc venus à la conclusion que notre système de justice pénale traite favorablement les éléments criminels de notre société et méprise les victimes. Quel triste tableau!

Si on remonte aux deux ou trois dernières années, je remarque que le Parti réformiste demande au ministre depuis 1993 d'abroger l'article 745. Un ancien député ministériel, le député de York-Sud-Weston, a présenté le 14 mars 1994 un projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-226, qu'on a présenté de nouveau plus tard en tant que projet de loi C-234.

La Chambre des communes a décidé à l'étape de la deuxième lecture de renvoyer le projet de loi C-226 au comité permanent. À l'époque, 74 libéraux, y compris le ministre des Transports, ont voté contre le ministre de la Justice et appuyé l'abrogation de l'article 745. Ce n'est pas que de ce côté-ci de la Chambre que nous défendons cette position. Les députés qui reflètent le point de vue de leurs électeurs du côté ministériel veulent qu'on abroge cet article.

On a enterré le projet de loi C-226 au comité. On n'a pas encore étudié le projet de loi C-234 même si un ministériel membre du comité de la justice a demandé par écrit d'accorder la priorité à ce projet de loi d'initiative parlementaire. On n'est pas sur le point de le faire. Cela ne va pas être une priorité du côté ministériel.

(1215)

Le ministre de la Justice a eu l'occasion d'abolir l'article 745. Il a eu près de trois ans pour le faire, sans compter les huit ou neuf ans où les libéraux ont siégé dans l'opposition. Ils entendaient clairement le point de vue de leurs électeurs et de leurs propres députés à l'époque. Les libéraux n'ont aucune excuse. Une mesure de ce genre serait un premier pas important pour rétablir aux yeux des Canadiens la crédibilité du système de justice pénale.

Il est évident que le ministre de la Justice n'a pas la force de caractère pour prendre des mesures concrètes. Il peut être certain que les Canadiens s'en rappelleront au moment des prochaines élections. Le ministre de la Justice prétend que le projet de loi dont la Chambre est saisie va réduire la chance des tueurs d'obtenir une libération anticipée et une libération conditionnelle. Voyons ce qu'il en est.

La vérité, c'est que si le Parlement adopte le projet de loi C-45, la modification proposée à l'article 745 va, en fin de compte, diviser les meurtriers entre les bons tueurs et les mauvais tueurs. Le projet de loi C-45 dit aux Canadiens que les gens qui assassinent une personne ne sont pas si mauvais que cela et méritent donc qu'on leur donne une autre chance de recouvrer leur liberté, alors que les gens qui ont tué deux fois, trois fois ou plus sont de mauvais citoyens qu'on devrait punir différemment.

En étudiant ce projet de loi, je ne peux m'empêcher de penser à la tuerie de l'École polytechnique, au Québec, et de me demander dans quelle catégorie il faudrait classer l'auteur du massacre Marc Lépine, qui a enlevé tant de vies. Ne devrait-il pas y avoir un article à son intention? Devrions-nous prescrire qu'après cinq meurtres, un criminel est pire que méchant? Devrions-nous dresser une liste spéciale pour ceux qui sont responsables de dix meurtres? Je trouve curieux de parler d'une vie ou de dix vies. Je considère qu'enlever une vie, c'est déjà trop et qu'aucune catégorie ne tient dans ce cas.

D'après ce que j'ai entendu, les Canadiens ont un point de vue qui diffère de celui du ministre. Mes collègues, les porte-parole du Parti réformiste en matière de justice, et moi-même avons parcouru le pays pour parler aux Canadiens ordinaires. Nous avons reçu un même message, selon lequel celui qui commet un meurtre au premier degré avec préméditation ne devrait jamais avoir droit à la libération conditionnelle. Pour les Canadiens, un emprisonnement à


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perpétuité, c'est pour toujours. De toute évidence, c'est une opinion que le ministre de la Justice ne connaît pas ou qu'il a vraisemblablement intérêt à ignorer.

Au fil des ans, la question a fait l'objet d'un grand nombre de sondages et d'études au Canada. La majorité des Canadiens, au moins 75 p. 100 d'entre eux, veulent le rétablissement de la peine capitale. Étant donné que le gouvernement actuel a tant de mal à traiter d'une simple libération conditionnelle pour les auteurs de meurtres au premier degré, on peut difficilement prévoir qu'il présente un projet de loi visant l'exécution d'un délinquant ou d'un meurtrier. Je trouve sa réticence inacceptable. Si les Canadiens demandent que la peine capitale soit rétablie au Canada, ils devraient avoir le droit de l'exprimer clairement et d'exiger que le gouvernement légifère en ce sens.

Le fait que des tueurs ne purgent plus vraiment la peine qui leur est imposée scandalise les Canadiens. En conséquence, une opinion particulière se répand dans les discussions dans les cafés et à table. Selon cette opinion, il faudrait que la peine capitale soit rétablie dans le cas d'un meurtre au premier degré avec préméditation et qu'elle soit appliquée dans de brefs délais.

Le Parti réformiste s'est engagé à donner l'occasion aux Canadiens d'exprimer démocratiquement leur volonté à l'égard de la peine capitale dans un référendum national à caractère exécutoire. Nous sommes d'avis qu'il revient finalement aux Canadiens de décider si Clifford Olson et Paul Bernardo méritent de vivre confortablement en prison, en ayant droit à la télévision en couleur, à l'éducation gratuite, à trois bons repas par jour et à divers autres avantages.

(1220)

En y réfléchissant bien, je trouve que notre système carcéral est absolument désastreux. Le fait de pourvoir aux besoins, autres que le strict nécessaire, de ces individus pas très catholiques qui ont enlevé la vie d'autrui est répréhensible. Or, le ministre de la Justice, le solliciteur général et ses amis y sont favorables.

Les Canadiens connaissent la perspective du ministre de la Justice concernant la peine de mort. En effet, les modifications qu'il propose d'apporter à l'article 745 témoignent de sa croyance que même 25 années de prison pour Clifford Olson, le tueur d'enfants, constituent une sentence beaucoup trop sévère. J'ai souvent entendu le ministre dire à la Chambre qu'envoyer quelqu'un en prison constituait un gaspillage d'une vie. Cette opinion est partagée par son collègue qui a introduit cette mesure il y a quelques années. Je ne pense pas que la plupart des Canadiens trouvent cela acceptable.

Nous savons que telle est vraiment l'opinion du ministre de la Justice, car aucune des dispositions de la mesure qu'il a proposée, le projet de loi C-45, n'empêchera Olson de demander sa mise en liberté anticipée en vertu de l'article 745, dans deux mois, en août. Je reviendrai sur ce sujet dans un instant.

Depuis maintenant deux ans et demi que je siège au Parlement, j'ai observé comment le ministre de la Justice fait adopter ses mesures. Il est évident qu'au lieu d'écouter les groupes de victimes, les Canadiens ordinaires, les agents de police ou les gardiens de prison, le ministre de la Justice prête plutôt l'oreille aux groupes d'intérêts spéciaux, aux avocats de la défense de l'aide juridique et à d'autres lobbys de gauche indulgents pour les criminels. La liste des intérêts spéciaux que j'énumère n'est probablement pas complète. Les groupes de défense des victimes grandissent au Canada, de même que les groupes qui les appuient.

J'ai eu l'occasion d'entendre Mme Debbie Mahaffy vendredi à Hamilton. Elle n'abandonnera pas sa lutte pour que justice soit faite après l'expérience qu'elle a connue en rapport avec la mort de sa fille. Je compte bien l'appuyer chaque fois et partout où je le pourrai, et je sais que mon collègue de Crowfoot en fera autant. Mme Mahaffy a à livrer un message qui vaut la peine d'être entendu et retenu de la part de tous les Canadiens. Je vais l'appuyer, comme le feront sûrement mes collègues à la Chambre.

Il est évident que le ministre de la Justice a tenté de faire croire à tort aux Canadiens que son gouvernement bénéficie de l'appui général des victimes à l'égard du projet de loi C-45. C'est absolument absurde. C'est le contraire qui est vrai.

J'ai participé vendredi à un rassemblement dans la circonscription de Hamilton-Est, la circonscription de l'ancienne députée disgraciée, Sheila Copps. Mme Mahaffy a parlé de sa fille, Leslie, qui a été brutalement violée, torturée et assassinée par Paul Bernardo. Elle a dit aux gens présents que le ministre de la Justice lui avait téléphoné peu avant d'annoncer les modifications qu'il proposait d'apporter au projet de loi 45. La réaction de Mme Mahaffy a été de demander au ministre de la Justice comment il pouvait dormir la nuit en sachant que la proposition qu'il fait dans le projet de loi C-45 n'empêchera pas Clifford Olson ni la plupart des autres meurtriers de demander une libération anticipée en vertu de l'article 745. Elle se demande, comme la plupart des Canadiens, comment le ministre de la Justice peut soutenir que la plupart des détenus, hommes ou femmes, condamnés pour meurtre au premier degré méritent de se promener de nouveau en toute liberté dans nos rues.

Un grand nombre de mes collègues ont parlé des lacunes du projet de loi C-45 sur le plan juridique. Je voudrais moi aussi parler longuement des lacunes du projet de loi, mais, étant donné la durée du débat, je voudrais explorer une autre avenue. Je vais faire part à la Chambre de deux exemples personnels qui montrent pourquoi il faut abolir, et non simplement modifier, l'article 745 du Code criminel, et pourquoi, par conséquent, le projet de loi C-45 est une demi-mesure.

(1225)

Avant les élections de 1993, j'ai été policier pendant 22 ans. J'étais de service le 24 mai 1977, au moment où mon collègue, l'agent William Shelever, a été tué d'une balle à l'arrière de la tête. Le même soir, l'agresseur, Roy Glaremin, a également tiré sur un autre agent, qui a été blessé. En 1993, Glaremin a demandé une révision judiciaire en vertu de l'article 745. Il est revenu à la charge afin d'obtenir une révision plus tard cette année. Les avocats me disent qu'il aura probablement gain de cause cette fois-ci. Il n'y a rien, dans les propositions du ministre de la Justice, pour empêcher Glaremin de demander une remise en liberté anticipée.

La pure vérité à propos de l'article 745 du Code criminel, c'est que près de 50 des 60 derniers meurtriers ayant demandé une révision ont obtenu une réduction de leur période d'inadmissibilité. C'est donc dire que 80 p. 100 des demandes présentées par des meurtriers aux termes de l'article 745 sont accueillies. Au moins 18 de ces meurtriers ont vu le délai d'inadmissibilité à la libération conditionnelle qui s'appliquait dans leur cas passer de 25 à 15 ans. Comme la plupart d'entre eux en étaient à leur premier meurtre, ils sont admissibles à la libération conditionnelle anticipée, conformé-


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ment à l'article 745. Rien dans le projet de loi C-45 ne change quoi que ce soit à cette réalité.

Au sujet du processus de demande, permettez-moi de signaler que l'auteur d'un meurtre au premier degré ne présentera pas sa demande directement à un jury, puisqu'il aura désormais une autre étape à franchir. Sa demande devra être soumise à un juge de la Cour supérieure. Toutefois, combien cela coûtera-t-il? Le projet de loi C-45 renferme une recommandation royale, quelle belle expression ronflante, qui autorise l'attribution de fonds supplémentaires. Le projet de loi étend le droit d'appel accordé au requérant aux termes de l'article 745. Le requérant peut ainsi en appeler à la cour d'appel d'une décision rendue par un juge de la Cour supérieure. Il a aussi le droit de demander une révision judiciaire plus d'une fois. Cela crée un autre niveau de bureaucratie à l'intérieur du système judiciaire, à l'étape des audiences.

Pendant plusieurs mois, j'ai agi à titre de porte-parole de mon parti en matière d'immigration. Je me suis vite aperçu que la série d'appels possibles ne profitait qu'à un seul groupe. Sauf le respect que je vous dois, monsieur le Président, à vous et à tous les autres avocats du pays, je dois dire que les appels ne profitaient qu'à ce groupe, les plus habiles parmi les lobbyistes du Canada. Qui a l'oreille du ministre de la Justice? Qui a l'oreille du ministre de l'Immigration? Qui a l'oreille du solliciteur général? Ce n'est sûrement pas les habitants de notre pays, le Canada. Les choses doivent changer, mais elles ne changeront pas sous le régime actuel, car le gouvernement libéral tend plutôt à élargir le processus, la fonction juridictionnelle des tribunaux et de tout le système judiciaire. Le système deviendra de plus en plus lourd.

Il est faux de prétendre que les petits rajustements que le ministre veut apporter à l'article 745 rendront plus sévères les critères relatifs à l'admissibilité à la libération conditionnelle. On a voulu faire croire aux Canadiens que des mesures allaient vraiment être prises pour garder les meurtriers en prison. La vérité, c'est que le ministre de la Justice n'a aucunement l'intention de se montrer plus sévère avec les criminels, comme le prouve la proposition concernant l'article 745.

Je tiens à déclarer officiellement que le Parti réformiste n'acceptera rien de moins que l'abrogation pure et simple de l'article 745 du Code criminel. Les propositions du gouvernement libéral ne satisfont pas les préoccupations de la majorité des Canadiens. Toute peine inférieure à une vraie peine d'emprisonnement à perpétuité est inacceptable dans le cas de quelqu'un qui commet un assassinat prémédité assorti de circonstances aggravantes.

L'article 745 est loin de donner de faux espoirs. Au contraire, c'est une valeur sûre pour les meurtriers et il doit être abrogé et supprimé, non pas modifié ni bricolé. Nous n'accepterons rien de moins.

(1230)

Un autre cas qui illustre la nécessité d'abroger l'article 745 est celui de Clifford Olson. En avril dernier, ce tueur d'enfants en série m'a envoyé une note sarcastique dans laquelle il se vantait de pouvoir obtenir une libération conditionnelle anticipée conformément à l'article 745. Il écrivait ceci: «Je vais sortir, Art. Dépêche-toi de faire abroger l'article 745. Souris, la poire». La note était signée comme ceci à la machine: «Mes salutations distinguées. La brute de la Colombie-Britannique, Clifford Olson».

Plus tard, cet automne, clifford Olson aura purgé 15 années de ses nombreuses peines d'emprisonnement à perpétuité pour une série de meurtres et pour viol, peines qui sont purgées simultanément. C'est le 12 août qu'il va présenter une demande de libération anticipée conformément à l'article 745.

Le cas de Clifford Olson montre clairement qu'une peine inférieure à une vraie peine d'emprisonnement à perpétuité pour les meurtriers, qu'ils aient tué une ou plusieurs fois, est absolument inacceptable. Une peine d'emprisonnement à vie devrait vraiment être pour la vie.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'ai apprécié le discours du député de Calgary-Nord-Est dans le cadre du débat sur le projet de loi C-45. Il a parlé longuement de l'abrogation de l'article 745 du Code criminel.

Il a aussi parlé d'une rencontre à laquelle des gens ont participé à Hamilton pour discuter de la criminalité. Comme lui, je pense que bien des Canadiens sont mécontents de la lenteur du gouvernement actuel à réformer notre système de justice pénale.

La situation doit être une source de confusion pour les Canadiens. Le député pense-t-il que les Canadiens comprennent les signaux étranges qu'ils reçoivent de la Chambre? Lorsque nous nous sommes prononcés sur un projet de loi d'initiative parlementaire visant à abroger cette partie du Code criminel, plusieurs députés libéraux ont voté en faveur de ce projet de loi qui prévoyait la prise de mesures dans de très brefs délais.

Nous voilà tout à coup saisis d'une autre mesure émanant aussi du parti ministériel, mais présentée cette fois-ci par le ministre; cette mesure ne propose toutefois pas d'abroger l'article du Code criminel, mais bien d'établir une distinction entre les auteurs de meurtres en série et ceux qui n'en ont commis qu'un seul. Cela revient presque à dire que certains meurtres ne sont pas aussi répréhensibles que d'autres.

Le député discute des questions de justice avec la population. Quel genre de signaux les Canadiens reçoivent-ils? Comprennent-ils ce qui se passe ici à la Chambre? Sont-ils mêlés? Que disent-ils de ce projet de loi présenté par le ministre et de l'autre d'initiative ministérielle qui, elle, prévoit l'abrogation de l'article du Code criminel?

M. Hanger: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Le débat concernant l'article 745 a été très animé depuis deux ou trois ans, particulièrement depuis que le député de York-Sud-Weston a présenté, il y a deux ans, un projet de loi d'initiative parlementaire préconisant l'abrogation pure et simple de cet article. C'est ce que souhaitent la plupart des gens. Ils voudraient voir disparaître l'article 745.


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Qui plus est-je vais parler à nouveau des études et sondages réalisés depuis plusieurs années-les Canadiens souhaiteraient le rétablissement de la peine de mort pour les meurtres au premier degré, qui sont prémédités. C'est ce que me disent les gens, non seulement à Hamilton, mais aussi à Toronto et dans la plupart des grands centres urbains du Canada. Partout dans notre pays, les Canadiens veulent que le système et les peines redeviennent plus sévères, ce qui n'est pas le cas.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais demander au député qui vient de faire son discours s'il peut nous expliquer en vertu de quelle logique les députés réformistes vont voter contre les amendements du ministre de la Justice-c'est ce qu'on comprend-parce qu'ils sont pour l'abrogation totale de l'article 745, mais d'un autre côté, ils favorisent l'adoption rapide de ce projet de loi par la Chambre.

J'aimerais savoir en vertu de quelle logique les députés réformistes sont contre le projet de loi, alors que d'un autre côté, ils veulent faciliter, pour le ministre de la Justice, l'adoption très rapide de ce projet de loi.

[Traduction]

M. Hanger: Monsieur le Président, il serait absolument bénéfique de pouvoir débattre de ce projet de loi plus longtemps.

Mais qui est à blâmer? Ce sont les ministres qui ont présenté le projet de loi dix jours avant l'ajournement de l'été. Ce sont eux les responsables du fait que le débat est raccourci. Le ministre, le solliciteur général et le premier ministre savent pertinemment qu'il n'y a pas assez de temps pour débattre de ce projet de loi. Ils vont le faire adopter à la vapeur. Ils ont imposé une situation où il n'y a pas de marge de manoeuvre.

(1235)

Je sais que la députée est en faveur de ce projet de loi. Cependant, elle n'exprime peut-être pas le point de vue de ses électeurs. Je ne sais pas. La majorité des gens à qui j'ai parlé veulent que ce projet de loi soit abandonné. C'est pourquoi nous allons voter contre en tant que parti.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, pour ceux qui suivent les débats à la télévision, je voudrais décrire brièvement ce dont nous débattons aujourd'hui. Il s'agit du projet de loi C-45, dans lequel un certain nombre de modifications sont proposées à l'article 745 du Code criminel, qui prévoit la libération anticipée de meurtriers condamnés, dans certaines circonstances.

En 1976, soit il y a 20 ans, le Parlement a aboli la peine capitale. À ce moment-là, il a également décidé que toute personne trouvée coupable de meurtre au premier degré ne pourrait obtenir une libération conditionnelle avant 25 ans et que toute personne trouvée coupable trouvée coupable de meurtre au second degré ne pourrait en obtenir une avant 10 ans. Cette modification apportée au traitement des meurtriers en 1976 sert de toile de fond au débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-45.

L'article 745 du Code criminel, qui a également été adopté en 1976, comprend, outre la disposition selon laquelle toute personne trouvée coupable de meurtre au premier degré ne peut obtenir une libération conditionnelle avant d'avoir purgé 25 ans d'une peine d'emprisonnement à vie, des dispositions permettant à un meurtrier condamné de demander une libération anticipée. La demande est entendue par un jury de 12 membres de la société, lequel tient compte de facteurs comme la réhabilitation, la protection des gardes de prison et l'intérêt public avant de décider qu'un meurtrier condamné peut faire une demande de libération anticipée.

Le projet de loi C-45 propose de modifier ce processus par lequel un meurtrier condamné peut demander une libération anticipée. Cette proposition d'amendement vise, selon le ministre de la Justice, à mieux cibler l'application de l'article 745. Autrement dit, il s'appliquerait d'une manière moins large et à moins de délinquants condamnés, selon le ministre de la Justice, ne concernant que les cas qui le méritent le plus. Le ministre de la Justice n'a pas encore expliqué ce qu'il veut dire par l'expression «meurtrier méritant», mais peut-être la population pourra-t-elle l'y forcer un jour.

Le projet de loi C-45 fait trois choses. Premièrement, les individus condamnés pour meurtre n'auront plus automatiquement le droit de demander une libération conditionnelle anticipée aux termes de l'article 745. L'auteur d'un meurtre au premier degré ne pourra demander une telle libération que s'il n'a commis qu'un meurtre. Ceux qui en ont commis plus d'un devront d'abord présenter une demande à un juge d'une cour supérieure. Ce juge déterminera alors s'il y a une «possibilité réelle» que la demande de libération conditionnelle anticipée soit approuvée avant d'en autoriser l'audition par le jury de 12 membres dont j'ai parlé tout à l'heure.

Deuxièmement, le jury doit approuver à l'unanimité la libération anticipée. Actuellement, deux tiers des membres du jury suffisent. Il est donc plus difficile pour le contrevenant de sortir de prison.

(1240)

Troisièment, les auteurs de meurtres multiples n'auront pas le droit de demander une libération conditionnelle anticipée aux termes de l'article 745. En d'autres mots, ils purgeront la totalité de leur peine de 25 ans. Ce sont les trois modifications prévues dans le projet de loi C-45.

Je voudrais consacrer l'essentiel de mon intervention à parler de ce que le projet de loi C-45 ne fait pas. J'ai parlé un peu du contexte historique dans lequel il s'inscrit. J'ai parlé des trois changements qu'il apporte, mais il y a sept choses qu'il ne fait pas. Je crois que ces sept choses sont importantes pour les Canadiens.

Tout d'abord, le projet de loi C-45 ne répond pas à deux demandes clairement formulées par les Canadiens. La première réclame beaucoup plus de rigueur envers les gens qui violent les droits des autres, particulièrement de ceux qui commettent, de sang froid, des


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meurtres prémédités, des gens qui ont planifié enlever la vie d'un innocent.

Les Canadiens en ont assez de la mollesse dont on fait actuellement preuve envers ceux qui violent les droits des citoyens respectueux des lois. À Calgary, ma ville, 35 000 lecteurs du Calgary Sun ont pris la peine de découper un coupon demandant l'abrogation de l'article 745 du Code criminel, de le signer et de le retourner par la poste. Ce sont là 35 000 citoyens d'une seule ville qui ont saisi une occasion d'exprimer leur indignation et de réclamer du changement.

Lors de notre congrès national, il y a deux semaines, les membres du parti ont voté à 98 p. 100 en faveur de l'abrogation de l'article 745. Même à la Chambre des communes, comme d'autres l'ont rappelé, beaucoup de députés ont voté pour l'abrogation de cet article. Par conséquent, le projet de loi C-45 ne tient aucunement compte d'une volonté clairement exprimée par les Canadiens.

La justice se veut le reflet de la réponse de la société aux violations des droits d'autrui. La société réclame une réponse dont son ministre de la Justice et son gouvernement élu font fi dans cette mesure législative.

Deuxièmement, le projet de loi ne traduit pas l'aversion de la société pour l'acte que constitue le meurtre. Comme la plupart des députés le savent, les sondages menés auprès des Canadiens ont montré de façon claire et constante que beaucoup d'entre eux estiment que, lorsqu'un membre de notre société viole le code d'éthique de cette société au point d'enlever délibérément la vie à une personne innocente, il devrait lui-même payer de sa vie.

Les Canadiens réclament le rétablissement de la peine de mort. Pourtant, nous n'avons pas eu l'occasion d'avoir un débat sur cette importante question, même s'il y a des sentiments forts et des arguments solides des deux côtés. C'est quelque chose que les Canadiens demandent afin de montrer leur indignation à l'égard de ce genre d'activité, mais le gouvernement n'a pas acquiescé à leur demande.

La société a également été éveillée par le fait que, depuis 1976 et depuis que ces demandes de libération anticipée existent, une peine d'emprisonnement à vie ne veut plus dire cela du tout. Cela veut dire au plus 25 ans, peu importe à quel point le crime commis était violent, atroce et répugnant.

Parfois, cela veut dire seulement 15 ans. Au total, 80 p. 100 des meurtriers qui présentent une demande de libération anticipée voient leur peine réduite. Ce que nous disons, dans ce genre de réponse, c'est que la société considère que le meurtre d'une personne innocente vaut entre 15 et 25 ans de la vie du meurtrier. Cela ne montre pas le genre d'indignation que beaucoup de Canadiens m'ont exprimée. Ils veulent que leur message soit transmis.

(1245)

La troisième chose que ce projet de loi ne fait pas, c'est voir à ce que la peine imposée reflète la réalité. Paul Bernardo, par exemple, a été condamné à la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans, sauf que ce n'est pas vraiment le cas. Ce n'est pas une peine d'emprisonnement à vie, c'est une peine maximale de 25 ans. En fait, il peut même demander que cette peine soit réduite. La peine imposée ne reflète donc pas la réalité.

Les familles, les amis et les défenseurs des victimes ont dit qu'au moins on a envoyé le gars derrière les barreaux. Il ne se promènera plus jamais dans les rues. Sa liberté et sa capacité d'être accepté par la société lui ont été enlevées à tout jamais. Maintenant ils se rendent compte que ce n'est pas le cas. La peine imposée ne reflète pas la réalité. Une peine d'emprisonnement à vie ne veut pas dire que c'est pour la vie. Une peine de 25 ans ne veut pas dire que cela durera nécessairement 25 ans.

La quatrième chose que ce projet de loi ne fait pas, c'est tenir les meurtriers responsables de leurs meurtres. Il laisse entendre que certains meurtriers sont moins responsables que les autres. Il dit que s'il n'a commis qu'un meurtre, le meurtrier aura droit à certains égards. Ce ne sont que les auteurs de meurtres multiples commis de sang-froid qui auront droit à moins d'égards. Cela ne se justifie absolument pas. C'est un scandale d'envisager ne fut-ce que cette possibilité.

Si Clifford Olson n'avait tué qu'un jeune enfant de sa localité, il aurait droit à des égards, d'après ce projet de loi. Par contre, parce qu'il en a tué plus d'un, ses privilèges et les égards auxquels il aura droit seront réduits. Si Paul Bernardo n'avait torturé, gardé en captivité et tué qu'une seule jeune fille, on jugerait qu'il mérite plus d'égards.

Quelle image de notre société cela reflète-t-il? Un meurtre est un meurtre. Une vie est précieuse. La valeur n'est pas déterminée par la quantité. C'est la qualité d'une vie que l'on devrait protéger.

Cinquièmement, le projet de loi permettrait toujours à des gens comme Clifford Olson et Paul Bernardo de demander à un juge de la cour supérieure de réduire leur peine. Et pourtant ce sont des gens qui ont complètement enfreint les lois de la société. Ils ont violé les principes sur lesquels est fondé le gouvernement. Le gouvernement est là pour protéger la vie et les biens des citoyens. Voilà deux hommes qui ont complètement enfreint des principes de base sur lesquels repose l'organisation de notre société et malgré cela, ils auront le droit de faire leur boniment pour que l'on réduise leur peine. Ils seront en mesure de justifier leur requête devant un juge de cour supérieure.

Il y a deux choses à signaler. Pour permettre à la demande de suivre son cours, le juge de la cour supérieure doit être convaincu que les chances de réussite sont raisonnables. Qu'est-ce que cela veut dire dans la pratique? Cela n'a pas été précisé. Sur quels critères le juge se basera-t-il? Il n'existe aucune ligne directrice à ce sujet. Cela veut-il dire que le juge doit tenir compte du comportement en prison du tueur reconnu? Le juge va-t-il s'intéresser à l'enfance du tueur ou aux études qu'il a faites? Quel rôle la famille de la victime joue-t-elle dans tout cela, parce que ces considérations vont être fondées sur des critères couchés par écrit? La famille de la victime et ses amis comptent-ils là-dedans? Pourront-ils se faire entendre? Ce projet de loi ne répond pas à ces questions.


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En outre, lorsque le juge de la cour supérieure prend sa décision concernant les chances raisonnables de réussite, si cette décision est défavorable à l'égard du tueur reconnu, celui-ci pourra faire appel. On lui fournira des fonds supplémentaires pour couvrir les frais de l'appel. Je le répète, le système sera encore plus compliqué. On créera des paliers supplémentaires de processus judiciaire, tout cela pour protéger et aider des gens qui ont déjà été reconnus coupables d'avoir tué de sang-froid des innocents. Nous devrions être honteux de laisser présenter ce genre de mesure à la Chambre et de l'accepter alors qu'il existe un moyen décisif, appuyé par la Chambre, de mettre fin à cette farce une bonne fois pour toutes.

(1250)

Sixièmement, le projet de loi C-45 a été présenté de telle façon que l'on n'a pas le temps de débattre ni d'examiner suffisamment cette mesure et les considérations qui s'y rattachent. Le projet de loi n'a été présenté que la semaine dernière. La Chambre doit s'ajourner cette semaine. Dans ce bref délai, elle doit le débattre en deuxième lecture, l'examiner en comité en convoquant des témoins, proposer des amendements et des améliorations au projet de loi au comité et le faire revenir à la Chambre pour la dernière lecture, le débat et son adoption.

D'autres projets de loi doivent être adoptés au cours de cette session. Le gouvernement prend-il au sérieux ses responsabilités à l'égard des citoyens canadiens lorsqu'il présente à la toute dernière minute un projet de loi aussi capital pour les intérêts des Canadiens, alors qu'il reste encore des projets de loi à adopter? On n'est pas en mesure de faire du bon travail, de le faire examiner par des experts, des commentateurs ni de peser le pour et le contre en toute connaissance de cause ou d'expliquer à la population pourquoi il a été présenté, au lieu d'abroger purement et simplement l'article 745. Non. On fait cela pour ainsi dire au pied levé. Ce n'est pas une façon pour un gouvernement responsable de se comporter à la Chambre à l'égard d'un projet de loi substantiel.

Enfin, le projet de loi ne répond pas aux appels à la justice lancés au nom des victimes. Dans notre pays, il y a des gens qui ont perdu un être cher, leur fils ou leur fille, leur mari ou leur épouse, leur frère ou leur soeur, de la façon la plus inhumaine et la plus horrible. La justice est la moindre des choses que ces gens puissent attendre de leur gouvernement, du système judiciaire et de la société, dont le rôle est de les protéger. Ils veulent que la société réagisse de façon adéquate aux actes terribles qui sont commis.

Au lieu de cela, nous sommes saisis d'un projet de loi qui dit en substance qu'un individu qui tue quelqu'un volontairement aura droit à beaucoup de considération et qu'il ne passera probablement que quinze ans en prison.

Il y a quelques semaines, j'ai assisté à une veille à la chandelle organisée à Calgary pour les familles de victimes de la violence. Beaucoup de ces gens avaient perdu des membres de leur famille, et parmi eux Darlene Boyd, dont la fille a été assassinée, et Bev Smith ainsi que d'autres. J'ai pu voir la douleur, l'angoisse et le bouleversement de ceux qui ont perdu des personnes aimées, victimes d'une violence délibérée et brutale. J'ai pu constater leur frustration et leur colère face au système judiciaire et à la faiblesse des mesures prises à l'encontre d'un acte aussi terrible. Cela m'a permis de comprendre un peu mieux pourquoi nous devons, en tant que députés, réagir beaucoup plus énergiquement contre ceux qui violent les droit des honnêtes citoyens.

Nous croyons que la loi doit montrer son efficacité à tous les Canadiens, y compris les victimes de la criminalité et leurs familles. Il n'y a aucune raison de maintenir la libération anticipée des criminels car les survivants des victimes de crimes ne trouvent, eux, aucun apaisement.

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, nous avons entendu des députés libéraux dire que la vie, c'est la vie, et que tout ce dont il est question ici, c'est de savoir où sera purgée la condamnation à vie, en détention ou au sein de la collectivité en vertu d'une libération conditionnelle sous surveillance. Certainement, si quelqu'un est libéré sous condition, il purge bien une peine à vie, mais il passera le restant de sa vie en liberté conditionnelle.

En tant qu'ancien agent de libération conditionnelle, je suis en mesure de parler des limites et des difficultés inhérentes à la surveillance des libérations conditionnelles, surtout lorsqu'il s'agit de contrevenants particulièrement manipulateurs. Les gens doivent comprendre ce que c'est que de surveiller un libéré conditionnel. En moyenne, les entrevues avec les libérés conditionnels se passent dans un bureau, une fois par mois, et durent une demi-heure.

(1255)

Maintenant, s'il s'agit d'une surveillance intensive, c'est peut-être une entrevue d'une demi-heure à une heure, une fois par semaine, dans un bureau local, avec une visite de vérification de temps à autre aux lieux de résidence ou de travail de la personne. Quand on parle de libérer conditionnellement un tueur en série, les gens doivent bien savoir quelle sorte de surveillance sera exercée. On vérifie aussi que la personne suit effectivement son programme de traitement antidrogue ou antialcoolique ou qu'elle voit son psychologue.

Quoi qu'il en soit, il est capital que le public sache exactement de quoi il est question, quand on dit que les libérés conditionnels feront l'objet d'une surveillance très intensive et qu'ils purgeront leur peine à vie sous libération conditionnelle.

Ce projet de loi propose de confier à un juge le soin d'évaluer le bien-fondé de la demande visant à raccourcir le délai d'admissibilité à la libération conditionnelle, qui est de 25 ans. Le juge devra motiver sa décision. Comme il s'agit d'un processus judiciaire, cela veut-il dire que les règles de droit s'appliquent normalement et qu'il y a la possibilité d'interjeter appel? L'une ou l'autre partie peut interjeter appel et s'il y a des erreurs de droit, nous savons tous à quel point les avocats peuvent couper les cheveux en quatre sur ces questions. Ils peuvent toujours trouver une erreur de droit qui donne peut-être lieu à appel. Cela veut-il dire que presque tous les jugements concernant ces demandes feront l'objet d'appels jusqu'au niveau de la Cour suprême du Canada? Et bien sûr, dans ce genre de situation, est-ce que ce ne sont pas les contribuables qui vont payer tous les frais de justice des contrevenants?


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Je trouve que tout cet aspect des possibilités d'appel n'a pas été défini et je veux savoir si la députée pourrait m'en dire plus long sur cette possibilité.

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, le projet de loi C-45 contient ce qu'on appelle une recommandation royale. Il s'agit d'affecter des fonds supplémentaires pour la mise en oeuvre des mesures prévues dans ce projet de loi. Ces fonds serviront à financer les demandes d'appels des décisions du juge de la cour supérieure en cas de rejet des demandes initiales. Appel peut être fait de la décision auprès d'une instance supérieure, mais des fonds sont nécessaires pour financer la procédure d'appel.

En vertu de cette disposition, le coût sera plus élevé et la durée de la procédure plus longue. Il est difficile à ce stade dire comment ça fonctionnera en pratique car, pour l'instant, ce n'est qu'une mesure législative. Toutefois, ce genre de choses a toujours des conséquences, probablement non intentionnelles-soyons justes envers les législateurs-des conséquences qu'on ne peut parfois prévoir et qui entraînent une augmentation des coûts et de la durée de la procédure.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, je sais que les propositions des députés de l'autre côté sont dans l'intérêt national, du moins dans ce qu'ils considèrent comme l'intérêt national.

Je me demande s'il existe des données disponibles sur l'application de l'article 745. Combien de fois a-t-il été utilisé, combien de gens ont eu droit à une réduction de leur peine et, le cas échéant, qu'est-ce que ces réductions ont donné?

Mme Ablonczky: Monsieur le Président, il existe des données quant au recours à l'article 745. J'ai dit dans mon intervention que 80 p. 100 des individus qui avaient fait une demande d'examen en vertu de l'article 745 avaient eu droit à une réduction de leur peine.

La question que nous devons nous poser en tant que législateurs, est celle-ci: quand une personne a délibérément ôté la vie à un innocent, à un citoyen respectueux de la loi, est-il juste de donner à cette personne la possibilité de voir réduite la peine à laquelle elle ont été condamnée pour l'acte qu'elle a commis et d'avoir tous ces mécanismes en place à cet effet, est-ce une chose que nous devrions approuver, est-ce une chose que nous devrions permettre et encourager? C'est en fait cela la question. Je pense que pour les Canadiens, pour un grand nombre de députés, la réponse est non. Le gouvernement dit oui, et c'est ce à quoi nous nous opposons.

(1300)

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour commenter le projet de loi C-45 que le ministre de la Justice a présenté le 11 juin. J'avais hâte de pouvoir le faire.

Le projet de loi C-45 inquiète énormément tous les Canadiens et les députés, d'autant plus que le député de York South-Weston a proposé d'éliminer l'article 745 dans un projet de loi d'initiative parlementaire. Ce projet de loi, qui a franchi l'étape de la deuxième lecture, en est à l'étape de l'étude en comité depuis 17 mois. Nous nous demandions pourquoi les libéraux ne l'avaient pas remis à l'ordre du jour.

L'audace du ministre de la Justice est étonnante. Pense-t-il qu'il peut leurrer les Canadiens et leur faire croire que lui et son gouvernement prennent des mesures concrètes à l'égard de l'article 745 du Code criminel? En fait, rien ne change et ce projet de loi était inutile avant même d'être déposé à la Chambre des communes.

Ce projet de loi modifierait l'article 745 du Code criminel, lequel accorde une lueur d'espoir aux criminels. Pour nous, la seule lueur d'espoir, c'est que le ministre de la Justice et les libéraux réforment le système de justice pénale, particulièrement en ce qui concerne la détermination de la peine et la libération conditionnelle. Mais la lueur est bien faible. Le seul véritable espoir que nous pouvons entretenir, c'est que le Parti réformiste remplace un jour les députés d'en face et qu'on apporte de véritables changements au Code criminel. C'est le seul véritable espoir!

À l'heure actuelle, l'article 745 permet aux gens condamnés à vie d'obtenir, après 15 ans, une révision de leur inadmissibilé à la libération conditionnelle. Ce sont des gens reconnus coupables de meurtre au premier degré, un crime odieux, des gens qui ont sauvagement enlevé la vie à un autre être humain, des gens qui, sans hésitation et avec préméditation, ont supprimé une vie humaine. Cet article porte sur les criminels condamnés à vie. Naturellement, pour les libéraux, la vie équivaut à 25 ans. Je pense que les Canadiens estiment que la vie, c'est pour la vie. Autrement dit, si vous commettez un crime odieux et enlevez la vie à quelqu'un, vous devriez passer le reste de vos jours derrière les barreaux et disparaître de la société, car vous ne méritez plus d'en faire partie.

L'article 745 permet à ceux qui ont été condamnés pour meurtre au premier degré de demander la réduction du délai préalable à la libération conditionnelle, après avoir purgé 15 ans de leur peine. Autrement dit, on peut demander à être libéré sous condition après 15 ans si l'on a été condamné à la prison à perpétuité pour un meurtre odieux.

Il n'y a pas de doute qu'il faut faire quelque chose au sujet de cet article du Code criminel. Comme beaucoup d'autres réformes qui ont été entreprises par le ministre de la Justice et le gouvernement libéral, ce projet de loi n'apporte aucun des changements réclamés par les Canadiens. Tout simplement, il ne répond pas aux besoins.

Nous avons vu maintes et maintes fois que le ministre et le Parti libéral aiment tripoter des articles du Code criminel, mais sans réellement faire quoi que ce soit. Ils essaient de duper la population et, en l'occurrence, le projet de loi C-45 est une tentative pour faire croire aux Canadiens que l'on fait quelque chose. C'est une mesure législative inutile au départ, et je vais y revenir un peu plus loin dans mon discours.

Le ministre de la Justice et le gouvernement libéral continuent à refuser d'entendre les plaintes, les demandes, les supplications de la population canadienne qui veut que l'on se montre plus sévère, en particulier à l'égard des coupables de meurtres odieux. Elle veut que le Code criminel soit plus sévère à l'égard des criminels.


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La majorité des Canadiens veut l'abrogation de l'article 745. Je le crois vraiment. La majorité des Canadiens veut également que la condamnation à perpétuité signifie réellement à vie. Il n'y a que les libéraux qui interprètent perpétuité comme étant 25 ans, ou 15 ans ou même 10 ans de prison. Jusqu'où irons-nous? Alors que les Canadiens estiment que la perpétuité devrait signifier à vie, et que les coupables de meurtres odieux devraient être traités comme ils le méritent par les tribunaux de ce pays, le ministre lui ne croit pas cela, ni le ministre libéral, ni les libéraux en face, sauf quelques-uns.

(1305)

Le projet de loi C-45 démontre de quelle façon le ministre voit la condamnation à perpétuité pour les mauvais meurtriers, ceux qui tuent plus d'une personne, mais pas pour les bons meurtriers, ceux qui s'arrêtent à une. Lorsque l'on analyse la façon de penser du ministre, on se demande si, en fait, le premier ministre ne s'est pas trompé dans son choix de ministre. Il ne nous a jamais rien proposé d'autre que des mesures législatives tendres pour les criminels et qui ne répondent en rien aux inquiétudes des Canadiens.

Venons-en à la question de l'inutilité. Le projet de loi C-45 interdirait le recours à l'article 745 pour ceux qui commettent plusieurs crimes. Cette disposition est absolument inutile. Déjà, actuellement, les auteurs de crimes multiples ne sortent pas de prison. Historiquement, ils ne sortent jamais de prison. Alors qu'est-ce que le ministre de la Justice essaie de prouver? Est-il en train de dire aux Canadiens qu'en dépit du fait que les auteurs de meurtres multiples ne sortent jamais de prison, cet article va faire en sorte qu'ils ne sortent jamais? Qu'est-ce à dire? Ils obtiennent une libération anticipée ou ils ne l'obtiennent pas, un point c'est tout. En fait, ils ne l'obtiennent pas. À quoi sert donc ce projet de loi?

Je le répète, la raison d'être de ce projet de loi, c'est que le ministre veut tromper les Canadiens, les amener à croire que le gouvernement libéral tient compte de leurs sentiments. Voilà l'objectif de ce projet de loi. Malheureusement, nous avons un ministre qui n'est pas honnête envers la population canadienne.

Je voudrais revenir aux tueurs en série. J'ai présenté, l'année dernière, un projet de loi d'initiative parlementaire qui aurait réglé ce problème. Il proposait que des peines consécutives soient imposées aux coupables d'un ou de plusieurs crimes. Si le gouvernement n'avait pas eu peur d'adopter ce projet de loi, le ministre n'aurait même pas eu à présenter le projet de loi C-45, car les peines consécutives auraient réglé le problème de la durée de l'emprisonnement des meurtriers en série. Grâce à mon projet de loi, ces gens n'auraient jamais été libérés.

Ceux qui tuent une seule personne ont droit à une révision en vertu de l'article 745. Le ministre nous dit maintenant qu'il peut classer les meurtriers en deux catégories, les bons meurtriers et les mauvais. Cette façon de penser est tout à fait insolente.

La question s'impose: une vie a-t-elle moins de valeur que trois, deux ou cinq? Une seule vie est-elle moins précieuse? La destruction d'une seule vie a-t-elle moins d'impact sur la famille et les amis de la victime? Le ministre semble croire qu'il est convenable de leur imposer la torture d'une révision en vertu de l'article 745. Si un meurtrier ne tue qu'une personne, on peut faire subir la révision aux parents et amis de cette victime. On peut convoquer les parents et amis à une révision et leur faire revivre l'horreur à nouveau, leur faire voir et entendre cette bête sauvage qui a enlevé la vie à un membre de leur famille ou à un de leurs amis.

Le ministre doit croire que tout cela est convenable, car c'est ce qu'il essaie de nous faire accepter aujourd'hui. Aux yeux du ministre, il ne convient pas de soumettre à une révision en vertu de l'article 745 les parents et amis des victimes de meurtriers en série. Non, dans ce cas, ce n'est pas acceptable. Si quelqu'un tue cinq ou six personnes, il n'y a pas lieu de faire passer les amis et les parents des victimes par le processus de révision, mais, selon le ministre, les parents et amis de la victime doivent prendre part à la révision si le détenu n'a tué qu'une personne.

(1310)

C'est la logique du ministre de la Justice. Il n'y a aucune justification à cela. Est-ce que la famille d'une victime est mieux à même de revivre le pire cauchemar lors d'une révision en vertu de l'article 745? Est-ce là ce que pense le ministre? Seul le ministre peut répondre à ces questions. Songeons-y bien. Seul ce ministre peut avoir l'audace de créer des catégories de meurtriers, certains étant dignes de clémence et d'autres pas. Seul ce ministre libéral de la Justice. Cela dépasse l'entendement.

Ce n'est là qu'un aspect du projet de loi C-45. Deux autres modifications sont prévues à l'article 745. L'une d'elles voudrait que le dossier des personnes qui ont droit à une audition soit au préalable étudié par un juge de la Cour supérieure. Le juge examinerait les faits et déterminerait si le requérant a des chances que sa demande soit acceptée, avant que l'on procède à l'audition.

Dans le système actuel, les meurtriers ont automatiquement droit à la révision prévue à l'article 745. Compte tenu du fait que plus de 72 p. 100 des requérants aux termes de l'article 745 obtiennent une réduction du délai applicable à leur libération conditionnelle, il est très peu probable que les juges vont rejeter quantité de demandes. Le scénario est écrit d'avance, pourrait-on dire, en ce qui concerne ces révisions.

N'oublions pas que les juges sont nommés. En règle générale, pour ne pas dire dans tous les cas, les juges qui sont nommés ont tendance à épouser les positions du gouvernement au pouvoir. Nous savons pertinemment que le gouvernement libéral a nommé des juges qui épousent ses positions. Nous l'avons vu dans la détermination des peines.

Cela me fait penser au projet de loi C-201. Dans notre pays, les gens peuvent boire et prendre le volant. Ils peuvent tuer une, deux ou trois personnes et n'être condamnés pour ce crime, un crime qui pouvant être évité, qu'à trois ans de prison. Tout cela parce que les juges épousent les positions du gouvernement libéral. Quand j'ai présenté le projet de loi à la Chambre, le ministre de la Justice a donné instruction à son secrétaire parlementaire de n'autoriser aucun député du Parti libéral à se prononcer en faveur de cette mesure législative. Pour quelle raison? Parce que les libéraux ne


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veulent pas alerter l'opinion publique au point d'être obligés de modifier bien des choses importantes. Voilà pourquoi.

C'est pourquoi le ministre de la Justice ne laissera pas ses collègues ministériels parler en faveur de projets de loi qui reflètent la position des Canadiens. C'est pourquoi le ministre de la Justice menotte ses collègues ministériels qui sont en faveur d'imposer des peines plus sévères et de traiter les criminels plus durement. Parce que ce n'est pas dans la philosophie des libéraux.

Cela remonte à l'époque de Pierre Elliott Trudeau. Lorsque M. Trudeau et son gouvernement sont arrivés au pouvoir, tout à coup les gens n'étaient plus responsables de leurs actions. C'était la société qui les incitait à agir ainsi. Cette idéologie est encore bien ancrée chez tous les libéraux qui siègent en face de nous, mis à part quelques-uns plus sensés que les autres.

Le ministre insère sans cesse des modifications de pure forme comme celle-ci pour donner l'impression qu'il renforce cet article. Cependant, l'insertion de ce nouveau obstacle sur le plan de la procédure n'est pas le type de changement que les Canadiens réclament. Il ne donne tout simplement pas les résultats voulus et ce ne sera pas le cas. Les Canadiens ne veulent pas d'un système où les meurtriers doivent simplement franchir une couple d'obstacles de plus pour sortir de prison, où quelques modifications de forme suffiront pour que ces individus puissent être libérés. Les libéraux ne prônent pas un système qui traite les criminels comme il se doit. Les libéraux ne veulent pas un système qui reflète les sentiments des Canadiens à l'égard des criminels. Les Canadiens réclament qu'on garde à jamais ces criminels en prison lorsqu'ils tuent brutalement quelqu'un. Cependant, ce n'est pas la position du ministre ni de la plupart des libéraux d'en face.

(1315)

Pour les Canadiens, il faut incarcérer les tueurs pour une période minimale de 25 ans. En fait, si le gouvernement avait le courage de tenir un référendum national sur la peine de mort pour meurtre au premier degré, il s'apercevrait qu'une très grande majorité des Canadiens voterait en faveur de la peine de mort. Ce n'est pas la position de ces libéraux ni du ministre de la justice libéral. Ils n'ont tout simplement pas le courage de faire face à la réalité, car cela va à l'encontre de l'idéologie de M. Trudeau qu'ils partagent.

Les Canadiens veulent l'abolition pure et simple de l'article 745 comme dans le cas de la TPS. Ils veulent qu'on retire cet article du Code criminel. Pour les Canadiens, toute personne condamnée pour avoir tué brutalement une autre personne devrait être mise en prison à jamais, et les libéraux ne peuvent le nier. Ils en sont conscients, mais ils ont peur d'agir, car ils manquent de courage.

La dernière modification proposée dans le projet de loi s'assure que les jurys examinant une demande présentée aux termes de l'article 745 devront être unanimes dans leur décision de réduire la période d'inadmissibilité d'un demandeur à une libération conditionnelle. Aux termes du système actuel, il ne faut obtenir que l'assentiment de deux tiers des jurés pour que la demande soit acceptée.

Nous vivons, à l'heure actuelle, une situation incroyable qui remonte à 1976 et que nous devons à qui, pensez-vous? Un gouvernement libéral hypersensible. Beaucoup de députés arrivés à la Chambre en 1976 dictent toujours cette doctrine pleine de sensiblerie à l'endroit des criminels.

La nouvelle disposition représente une amélioration par rapport au système actuel, mais il n'en demeure pas moins que l'article 745 ne devrait même pas exister. Il faudrait le supprimer. À la deuxième lecture d'un projet de loi d'initiative parlementaire, la Chambre a voté par une majorité écrasante pour que le projet de loi soit adopté. Les libéraux ont voté pour. Où est-il maintenant? Il est coincé au comité et y restera probablement en plan, parce que le gouvernement n'a pas de cran.

M. Hanger: Et il n'y a pas de votes libres non plus.

M. Harris: Le 13 décembre 1994, la Chambre a voté pour que le projet de loi C-226, présenté par le député de York-Sud-Weston, soit envoyé au Comité de la justice. Récemment, ce député a eu le bon sens de quitter le Parti libéral et d'aller siéger de l'autre côté de la Chambre. Nous le félicitons de son bon jugement. Il savait ce que le gouvernement avait dit à propos de la TPS lors des dernières élections. Son intégrité lui a interdit de siéger avec les libéraux pendant qu'ils continuaient d'induire les Canadiens en erreur au sujet de la TPS. Les propos qu'ils ont tenus avant les élections, ce qu'ils ont déclaré dans le livre rouge et ce qu'ils ont dit quand ils ont fait du porte-à-porte ne concordaient pas toujours.

Son projet de loi demandait la suppression de l'article 745. Les libéraux et d'autres députés de la Chambre ont voté pour. Où est-il? Il est bloqué au comité parce que le ministre de la Justice n'a pas le courage de l'examiner.

Les actes que la majorité des Canadiens appuient ne signifient pas grand-chose aux yeux du ministre de la Justice ou des libéraux. Ce qui compte, c'est le programme personnel du ministre de la Justice et de ses conseillers libéraux.

CAVEAT, les victimes de violence, les Canadiens veulent la suppression de l'article. Mais, pour une raison ou pour une autre, le ministre de la Justice s'y refuse. Pourquoi?

Quand le gouvernement va-t-il gouverner selon les désirs des Canadiens? Quand commencera-t-il à écouter les Canadiens? Quand descendra-t-il de sa tour d'ivoire et écoutera-t-il les gens? Quand abrogera-t-il l'article 745? Même un simple d'esprit n'aurait pas pu appuyer cette mesure législative bâclée, ce qui est un euphémisme, même avant qu'elle ne soit présentée à la Chambre.

(1320)

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais que le député donne des précisions sur la possibilité qu'une personne déclarée coupable de plusieurs meurtres, par exemple, demande à un juge d'une cour supérieure de réduire le délai d'inadmissibilité à la libération conditionnelle.

Sauf erreur, ce projet de loi s'accompagne d'une recommandation royale visant à couvrir les frais administratifs additionnels qu'il entraîne. Si je ne m'abuse, ce projet de loi ouvre également, à l'intention de meurtriers condamnés, des possibilités d'appel auxquelles ils n'avaient pas droit jusqu'à maintenant.


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Si une personne condamnée pour meurtre comparaît devant un jury pour demander une réduction du délai préalable à sa libération conditionnelle et si le jury s'y oppose, il ne peut y avoir d'appel. Désormais, un appel pourrait être interjeté auprès d'un juge de la cour supérieure. L'appel pourrait même se rendre jusqu'à la Cour suprême. Ces modalités d'appel doivent bénéficier d'un financement quelconque.

Une recommandation royale est liée à ce projet de loi. Je me demande si le député a songé au lien entre cette recommandation royale et les nouvelles modalités d'appel dont ne pouvaient bénéficier jusqu'à maintenant les personnes condamnées pour meurtre. Le député peut-il nous décrire ce lien?

M. Harris: Monsieur le Président, la recommandation royale à laquelle la députée vient de faire allusion prévoit des fonds additionnels pour faciliter ces appels.

Tout au long du débat, nous avons dit que, si le gouvernement savait ce que les Canadiens veulent et s'il avait le cran nécessaire pour s'occuper convenablement de ceux qui commettent des meurtres au premier degré, il répondrait non seulement aux volontés, aux besoins et aux exigences des Canadiens, mais il permettrait aussi aux contribuables de réaliser des économies considérables. Il n'y aurait aucun droit d'appel.

Voilà l'argument que nous, les réformistes, voulons faire valoir. C'est aussi l'argument qui sous-tendait le projet de loi C-226 parrainé par le député de York-Sud-Weston. Il faut tout simplement supprimer l'article 745. De cette façon, il n'y aurait plus aucun droit d'appel. Une peine d'emprisonnement à perpétuité voudrait dire au moins 25 ans. Il n'y aurait pas d'appels.

Nous permettrions aux contribuables d'économiser plusieurs millions de dollars et nous éviterions que des meurtriers circulent dans nos rues pendant au moins 25 ans, réduisant ainsi le risque qu'un criminel ne bénéficie d'une mise en liberté anticipée et tue de nouveau. Nous satisferions les Canadiens qui demandent que justice soit faite à l'endroit de ceux qui suppriment une vie humaine de façon préméditée: ils reevraient une peine appropriée.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais demander au député comment il se fait que ce projet de loi est présenté à ce moment-ci.

L'été dernier, avant l'ajournement estival, le gouvernement a présenté un projet de loi sur l'analyse génétique. Ce projet de loi donnait aux services de police un autre moyen de retrouver les violeurs et les meurtriers et d'établir leur culpabilité. C'était certainement un avantage pour l'application de la loi.

Le projet de loi a été étudié à toute vapeur. C'était pendant les derniers jours de la session, avant l'été. Les dispositions de la mesure comportaient des lacunes. Les services de police ne pouvaient pas conserver les informations ainsi recueillies dans une banque de données. Ils ne le peuvent toujours pas, et la loi est adoptée depuis un an. Le ministre de la Justice n'a pas consulté les solliciteurs généraux et ministres de la Justice des provinces. Par conséquent, des coûts importants ont été refilés aux services policiers des municipalités, ainsi qu'aux procureurs généraux et solliciteurs généraux des provinces.

(1325)

Étant donné la manière dont les choses se sont passées l'an dernier pour le projet de loi sur l'analyse génétique, je voudrais savoir comment le député perçoit le projet à l'étude, qui est lui aussi présenté tout à la fin de nos travaux. Est-ce qu'on a fait justice à tous les intéressés dans le débat? Quelles réactions le député reçoit-il de ses électeurs? Il est important que les députés, et surtout les députés libéraux, sachent ce qui se passe sur le terrain. On dirait qu'ils se sont mis la tête dans le sable pour faire adopter ces projets de loi à toutes les étapes.

M. Harris: Monsieur le Président, pour répondre à la question du député, c'est tout simplement de la bonne vieille supercherie politique.

Le gouvernement sait que le projet de loi concernant l'analyse génétique, qui avait été présenté juste avant l'ajournement de l'été dernier, présentait de graves imperfections. Il ne voulait pas donner au Parti réformiste l'occasion de signaler toutes les imperfections et toutes les iniquités du projet de loi. Il ne voulait pas entendre nos suggestions pour l'améliorer.

Le ministre de la Justice fait exactement la même chose avec la mesure à l'étude. Il sait que c'est une mesure faible et qu'elle est totalement superflue. Il sait que les personnes déclarées coupables de plusieurs meurtres ne sortent pas de prison de toute façon. Il essaie tout simplement de berner les Canadiens en leur faisant croire qu'il fait vraiment quelque chose.

S'il présente ce projet de loi maintenant à la Chambre, qui s'ajournera probablement vendredi pour l'été, c'est qu'il ne veut pas donner aux réformistes le temps de débattre de la question comme il le faudrait à la Chambre. Le ministre ne veut surtout pas que le débat se prolonge au point où les Canadiens inquiets pourraient se mettre à comprendre à quoi il veut en venir. Il joue à faire semblant que cette mesure fera du bien.

En présentant son projet de loi à la fin de la session, quelques jours avant l'ajournement, il ne nous donne pas le temps de tenir un véritable débat, qui s'imposerait certainement en l'occurrence.

M. Julian Reed (Halton-Peel, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais demander au député s'il sait combien des détenus libérés conformément à l'article 745 ont commis encore d'autres meurtres.

M. Harris: Monsieur le Président, je sais qu'il y en a. Je me ferai un plaisir d'envoyer les statistiques au député.

Le fait est que même si un seul meurtre est commis par quelqu'un qui est libéré après seulement 15 ans d'emprisonnement conformément à l'article 745, c'est un meurtre de trop. Les Canadiens demandent qu'on ne libère pas ainsi les meurtriers. Le député libéral le sait. Le ministre de la Justice sait qu'un meurtre, c'est un meurtre de trop. Toute personne qui met sauvagement fin à une vie humaine devrait passer le reste de ses jours derrière les barreaux. Le


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Canadiens voudraient bien pouvoir se prononcer dans le cadre d'un référendum sur la peine capitale.

Le député d'en face connaît le sentiment des Canadiens, mais le ministre de la Justice lui ordonne de rester tranquille. C'est le ministre de la Justice qui est aux commandes et personne ne va altérer son programme personnel.

M. Reed: Monsieur le Président, à ma connaissance, aucun meurtre n'a été commis par quelqu'un qui a été libéré conformément à l'article 745.

(1330)

M. Harris: Monsieur le Président, je me ferai un plaisir de communiquer les statistiques au député d'en face. Je vais lui fournir aussi les statistiques concernant les meurtres qui ont été commis par des criminels qui ont bénéficié d'une libération conditionnelle pendant qu'ils purgeaient une peine pour un délit moins grave que le meurtre. Ces gens-là, qui étaient en prison pour voies de fait, agression sexuelle, viol et enlèvement et qui ont purgé une partie de leur peine, ont tué quelqu'un après avoir bénéficié d'une libération conditionnelle.

Je vais fournir ces données au député et il fera bien de les lire, car les Canadiens les ont lues. Les Canadiens veulent savoir quand le gouvernement va se décider à faire quelque chose. Le Parti réformiste parle au nom des Canadiens de tout le pays. Nous avons mis au point le projet de loi concernant les droits des victimes, que nous allons présenter à la Chambre et que le ministre de la Justice approuve avec tiédeur.

Très franchement, nous nous moquons pas mal de ce que le ministre de la Justice peut penser à cet égard. Ce sont les Canadiens que nous écoutons et que nous allons continuer d'écouter, car ils comprennent mieux que le ministre de la Justice et le gouvernement libéral.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir participer au débat à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-45 d'initiative ministérielle, qui vise à modifier l'article 745 du Code criminel.

Ce débat revêt une importance particulière pour les Canadiens. On y aborde une question qui tient beaucoup à coeur aux habitants de Cariboo-Chilcotin. À l'instar des autres députés, j'ai reçu énormément de lettres, d'appels et de communications de gens non seulement de ma circonscription, mais de toutes les régions du Canada, qui voulaient me parler du système judiciaire. Ces gens m'ont exprimé leur mécontentement, les craintes qu'ils éprouvent et la difficulté qu'ont les policiers non seulement à faire respecter la loi, mais aussi à faire condamner les contrevenants qu'ils ont réussi à arrêter.

Les gens me disent que le système judiciaire ne fonctionne plus et doit être révisé. Les Canadiens méritent de se sentir en sécurité dans leur communauté; ils en ont besoin et ils y ont même droit. On me dit que le système doit être modifié et amélioré. C'est d'ailleurs l'un des grands objectifs du Parti réformiste depuis sa création. Les Canadiens méritent de vivre en sécurité. Ils ont besoin de se sentir en sécurité afin de marcher dans la rue, dans n'importe quelle rue de n'importe quelle ville du Canada, sans craindre d'être attaqués, menacés, blessés ou même tués.

Pourquoi les Canadiens ressentent-ils ces craintes? La réponse est fort simple. Les Canadiens ne se sentent plus en sécurité tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de leur foyer. Ils craignent pour la sécurité de leurs enfants dans leur propre quartier. Dans certaines villes, comme Vancouver, les parents doivent nettoyer les rues avant de laisser les enfants sortir pour aller à l'école, à cause de certaines substances, d'objets ou de personnes nuisibles que les jeunes pourraient rencontrer sur leur chemin. Les gens pensent aussi que le système de justice protège les droits des criminels au lieu de prendre en considération les besoins des victimes ainsi que les souffrances et les pertes qu'elles subissent.

Le projet de loi à l'étude ne fait que perpétuer cette situation. Le projet de loi C-45 ne fait rien pour protéger les victimes ni pour les aider à surmonter la perte, la douleur et les souffrances horribles qu'elles subissent.

Comme vient de le dire le député de Prince George-Bulkley Valley, le projet de loi C-45 est une mesure tout à fait redondante. Il y a deux principales raisons à cela. Avant de parler de ces raisons, permettez-moi d'abord d'expliquer qui sont les victimes du crime. Comment l'article 745 du Code criminel peut-il faire fi de leurs besoins légitimes?

(1335)

Les victimes dont je parle sont les amis et les parents de ceux qui ont été impitoyablement assassinés dans notre société. Une peine leur est infligée par un meurtrier. Celle-ci est vraiment une peine à perpétuité, car les victimes pleureront à jamais la perte d'un être cher.

Voilà qui m'amène à parler de la peine pour meurtre au premier degré qui équivaut à 25 ans et que l'on appelle une peine d'emprisonnement à perpétuité. À mon avis, 25 ans, cela n'équivaut pas à la perpétuité. Le fils, l'ami ou le conjoint qui est ravi à quelqu'un sans égard pour la perte que ce dernier subit et sans aucune compensation est disparu à tout jamais. Il n'y a pas de limite à cette absence.

De nombreuses victimes du crime considèrent l'article 745 du Code criminel comme un moyen pour le système de justice de protéger les droits des meurtriers au lieu de tenir compte des besoins des victimes. L'article 745 date de 1976, année où le Parlement a aboli la peine de mort en adoptant le projet de loi C-84.

Le projet de loi C-84 comportait aussi une disposition obligeant quelqu'un trouvé coupable de meurtre au premier degré à purger un minimum de 25 ans avant d'être admissible à la libération conditionnelle. Cette disposition s'accompagnait aussi de l'article 745, l'article qui offre une lueur d'espoir et qu'un nombre croissant de victimes considèrent comme l'article du pari sûr. Cet article donne à tous ceux qui sont trouvés coupables de meurtre au premier et au deuxième degrés le droit de demander d'être admissibles à la libération conditionnelle après avoir purgé seulement 15 ans d'une prétendue peine d'emprisonnement à perpétuité de 25 ans.

C'est le droit absolu du meurtrier condamné, mais 79 p. 100 de ceux qui demandent une réduction de peine aux termes de l'article 745 ont gain de cause. Il s'ensuit que seulement 21 p. 100 des


3914

condamnés doivent continuer de purger leur peine d'emprisonnement à vie de 25 ans.

L'article 745 a été ajouté à la loi parce que le gouvernement du jour estimait que, dans certains cas, les intérêts des criminels devaient passer avant ceux du public. C'est ce que le ministre de l'époque a très clairement affirmé. En effet, Jean-Pierre Goyer, un ancien solliciteur général, a dit en réponse à la tentative du premier ministre Trudeau de réformer le système de justice dans les années 70: «Nous avons décidé de mettre l'accent sur la réhabilitation des détenus plutôt que sur la protection de la société.»

C'est justement là où nous ne sommes pas d'accord. En effet, nous sommes d'avis que le gouvernement de l'époque a pris une mauvaise décision et qu'il a, se faisant, sacrifié la sécurité des citoyens pour les droits et la réhabilitation de criminels condamnés.

C'est exactement ce que les victimes déplorent. L'article 745 viole les besoins de la justice fondamentale. Ce sont les victimes qui doivent rentrer chez elles tous les soirs pour ne trouver qu'une maison ou un lit vide. Puis elles vivent chaque jour avec la douleur, la peine et la souffrance de savoir que la personne qu'elle aime ne reviendra jamais. Leur seule consolation, c'est d'avoir la certitude que la personne qui a tué leur être cher est derrière les barreaux et qu'elle ne peut plus faire de mal à personne.

(1340)

Quinze ans après ce genre de douleur, nombre de victimes découvrent, pour la première fois, l'existence de l'article 745 et que le meurtrier de leur être cher a le droit d'office de demander une audience à laquelle il sera déterminé s'il peut obtenir une libération anticipée. Le criminel obtient une autre occasion de dire pourquoi il mérite d'être libéré alors que la victime continue de subir les souffrances que cette personne lui a infligées. Même si le meurtrier n'obtient pas de libération anticipée, la victime doit quand même revivre l'horreur, l'anxiété et la douleur de la mort de leur être cher.

Darlene Boyd, dont la fille a été assassinée il y a 14 ans, a dit qu'elle ne croyait pas que sa famille pouvait passer à travers une autre audience judiciaire. Cela sera traumatisant pour elle.

Les victimes sentent aussi que l'article 745 est injuste envers elles. Elles demandent souvent: «Pourquoi la personne qui a tué quelqu'un que j'aimais et qui été condamnée à 25 ans de prison après avoir été reconnue coupable de meurtre serait-elle libérée plus tôt ou pourquoi aurait-elle même le droit de demander une libération conditionnelle anticipée? Je n'ai rien pour réduire ma peine, pas de libération conditionnelle, pas d'examen judiciaire, pas de disposition pouvant me donner une lueur d'espoir.»

Mme Rose Onofrey, dont le fils, Dennis, a été tué, a dit: «Est-ce tout ce que vaut la vie de mon fils? Quinze ans? Pourquoi fait-un de nouveau de moi une victime?» Dorothy Mallet, qui a été reconnue coupable de meurtre et à qui on a accordé une libération conditionnelle en vertu de l'article 745, veut visiter ses enfants. «Je dois aller au cimetière lorsque je veux rendre visite à mon fils,» dit Mme Onofrey.

Le problème que pose l'article 745, c'est qu'il fait passer les droits du meurtrier avant les droits et les besoins des victimes. Le projet de loi est une faible tentative en vue de corriger ce déséquilibre. En fait, ce n'est pas une tentative valable. Cette mesure est tout à fait redondante. Le projet de loi C-45 ne fait vraiment rien pour protéger les victimes et pour répondre à leurs besoins.

Il y a deux grandes raisons à cela. La première est que le projet de loi C-45 enlève le droit de présenter une demande aux termes de l'article 745 seulement aux auteurs de meurtres multiples et aux tueurs en série. Si cette mesure législative est adoptée avant l'ajournement de la Chambre, et on s'attend à ce qu'elle le soit, les tueurs en série comme Clifford Olson pourront encore présenter une demande de libération conditionnelle anticipée parce que les restrictions relatives aux tueurs en série ne sont pas rétroactives.

Il est vrai que les tueurs comme Olson auraient peu de chance de se voir accorder une libération conditionnelle anticipée de toute façon, mais là n'est pas la question. La question, c'est que Clifford Olson et les personnes comme lui ne devraient même pas avoir le droit de présenter une telle demande. Le fait de donner à un criminel comme Olson le droit de demander une audience visant à déterminer son admissibilité à une libération conditionnelle anticipée est une atteinte sérieuse aux droits des victimes d'Olson.

Gary Rosenfeldt, le père d'un des 11 victimes d'Olson, a dit la semaine dernière: «Cette disposition législative est une insulte aux victimes.» Je suis d'accord avec M. Rosenfeldt. Il a tout à fait raison. Les familles qu'Olson a blessées et traumatisées souffrent depuis des années en pensant aux crimes atroces qu'il a commis. Le projet de loi C-45 lui donne quand même le droit de demander une audience de libération conditionnelle anticipée. C'est insultant. Les victimes méritent plus de respect que cela et le public mérite un degré plus élevé de sécurité.

La deuxième raison, c'est que le projet de loi C-45 ne va pas assez loin puisque ceux qui ont tué une seule personne ont encore le droit d'en appeler de leur inadmissibilité à la libération conditionnelle. Les auteurs de meurtres multiples et les tueurs en série n'auront pas ce droit. Cela crée diverses catégories de tueurs dans notre société, c'est-à-dire diverses catégories de meurtriers au premier degré.

Ceux qui ont tué une seule personne auront accès au processus de libération anticipée, mais ceux qui en ont tué plus d'une n'y auront pas accès. Pour les Canadiens, un meurtre est un meurtre et tous les meurtres sont aussi répréhensibles les uns que les autres. Pourquoi le ministre de la Justice estime-t-il que tuer une personne est moins grave qu'en tuer deux ou plus?

(1345)

J'ai peine à imaginer qu'il pense cela. Je peux difficilement imaginer le ministre en train de dire aux amis et aux parents de Lisa Clausen, de la Colombie-Britannique, qui a été assassinée par Paul Kocurek en 1980, que celui-ci pourra demander une libération conditionnelle anticipée le 2 août 1996 parce que Lisa est la seule personne qu'il a tuée.

Et la famille de Kenneth Kaplinski? Kenneth a été enlevé en 1977, amené dans le bois et exécuté par Edward Sales et Allan Kinsella. La demande de libération conditionnelle anticipée de Kinsella a été rejetée tandis que Sales attend sa réponse. Comment


3915

le ministre de la Justice peut-il dire à la famille de Ken que Sales et Kinsella seront autorisés à demander une libération conditionnelle anticipée parce qu'il n'ont commis qu'un seul meurtre?

Je peux difficilement croire que le ministre de la Justice dirait à Janet Shelever, de Calgary, que le meurtrier de son mari peut demander une libération anticipée parce qu'il n'a tué que son mari. C'est exactement ce que le ministre de la Justice dira aux familles de ces victimes et de bien d'autres si le projet de loi C-45 est adopté.

Qu'un meurtrier tue une seule personne ou plusieurs, la tristesse, la douleur et les souffrances des familles sont les mêmes. Si le projet de loi C-45 est adopté, ces familles continueront de souffrir et la personne qui leur a enlevé un être cher pourra demander et obtenir une libération conditionnelle anticipée.

Le projet de loi C-45 respecte-t-il les victimes et accorde-t-il une grande importance à leurs souffrances? Je dis non et beaucoup de Canadiens pensent comme moi. Tout ce que le projet de loi protège, c'est le statu quo.

Quelques questions ont été posées au sujet du nombre de personnes tuées par des individus libérés aux termes de l'article 745. En fait, cet article, adopté en 1976, ne permet aux meurtriers de demander une libération que depuis cinq ans. La période de référence est donc très courte. Cependant, nous savons qu'un meurtrier qui a obtenu une libération conditionnelle en vertu de l'article 745 a tué à nouveau. Mais le plus important, nous savons que 15 meurtres ont été commis par des individus ayant obtenu une libération conditionnelle. C'est la vérité. C'est cela qu'il faut examiner.

Je mets le ministre de la Justice au défi de faire deux choses. Tout d'abord, traiter de la même manière tous les individus reconnus coupables de meurtre au premier degré. Deuxièmement, faire preuve d'égards pour les survivants des victimes et pour leur douleur perpétuelle.

Le seul moyen d'atteindre ces objectifs, c'est d'abroger l'article 745 du Code criminel, et pas de le modifier. Ceux qui commettent des meurtres, que ce soit un seul ou toute une série, n'auraient pas le droit de demander ou d'obtenir une libération conditionnelle anticipée. Leurs privilèges en matière de libération conditionnelle seraient les mêmes et les survivants des victimes n'auraient pas à revivre l'horreur, l'angoisse et la douleur causées par la mort d'un être cher. Personne ne se sentirait lésé parce que celui qui a tué leur fils, leur frère, leur soeur ou leur mère ne purge qu'une partie de la peine d'emprisonnement à vie qu'il mérite pour avoir causé tant de mal et une perte irremplaçable.

Je vais faire une petite digression. Pourquoi le gouvernement libéral essaie-t-il presque systématiquement de régler des problèmes graves en présentant des projets de loi qui ne sont au mieux que des demi-mesures. Le projet de loi C-45 ne sert à rien. Il ne changera absolument rien. Cela devient une habitude qui ne se limite pas au projet de loi C-45.

(1350)

Songez à la douleur, à l'angoisse et à l'horreur subies par bien des Canadiens parce que le projet de loi C-33 avait été adopté à la hâte. Après avoir dit qu'ils formeraient un gouvernement plus ouvert que leurs prédécesseurs, les libéraux n'ont pas donné la moindre occasion aux Canadiens de dire ce qu'ils pensaient de cette mesure sur les droits de la personne. Ce projet de loi a été expédié en 10 jours.

C'est la même chose pour la TPS. Quelle façon de tenir la promesse qui avait été faite dans le livre rouge! Parce qu'ils ne sont pas arrivés à s'entendre avec les provinces, les libéraux se sont arrangés avec les plus petites en leur proposant une meilleure affaire, une entente différente, et en laissant les autres marchander avec le gouvernement.

Et le projet de loi sur l'assurance-chômage, qui touche des millions de Canadiens? Le gouvernement propose de chambarder complètement de force la politique en la matière, sans consultation, et il compte laisser les victimes livrées à elles-mêmes.

Ce n'est pas une façon de présenter des projets de loi à la Chambre. Les projets de loi devraient être le reflet des valeurs sur lesquelles on s'entend, ils devraient émaner de la volonté et des désirs du peuple canadien. Mais ce n'est pas ce que fait le gouvernement avec le projet de loi C-45, qui modifie l'article 745 du Code criminel.

Ce projet de loi ne changera absolument rien au fait que les Canadiens ne peuvent plus être en sécurité dans la rue ou chez eux et il ne leur procurera pas un sentiment de sécurité absolue. Ce projet de loi ne contribue pas à fournir aux forces policières les outils et les mesures nécessaires pour faire condamner les criminels.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'ai suivi le débat sur le projet de loi C-45 ce matin, mais mon attention s'est évidemment portée sur la rapport de Willie Gibbs, qui a comparu devant le Comité permanent de la justice et des affaires juridiques. Il nous a appris que l'année dernière, au Canada, 15 personnes ont été tuées par des individus qui avaient obtenu une libération anticipée ou une libération conditionnelle. Ces chiffres sont horrifiants.

Quinze personnes ont été assassinées parce que les responsables des libérations anticipées et des libérations conditionnelles ont libéré des individus qui avaient déjà commis des délits moins graves qu'un meurtre au premier degré. Les fonctionnaires responsables les ont tout de même libérés. Ma crainte est que les auteurs de meurtre au premier degré qui réussiront à se faufiler dans les échappatoires que le ministre de la Justice leur offre se retrouveront devant la Commission des libérations conditionnelles, celle-là même qui a autorisé la remise en liberté des individus qui ont tué ces 15 innocentes victimes. Qu'est-ce que le député trouve à dire à ce sujet?

Outre ces 15 meurtres, soit plus d'un par mois, on a dénombré 15 tentatives de meurtres, 22 agressions sexuelles, 21 cas de voies de fait graves, 71 vols à main armée, soit 165 délits graves en tout. Depuis 1987, des criminels bénéficiant d'une forme quelconque de libération anticipée ont commis 206 meurtres et 162 tentatives de meurtre. En tout, ils ont commis 2 097 délits très graves pendant cette période.

M. Mayfield: Monsieur le Président, je reconnais bien là la façon de mon collègue, un ancien policier, de fouiller les faits, de les mettre à jour et de les expliquer.

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(1355)

Le député soulève toute la question de la sécurité publique, ce à quoi je voulais venir. Pour être en sécurité, les gens ont besoin de savoir avec certitude quels sont les individus en liberté qui peuvent leur faire du mal. Comment pouvons-nous savoir qui sont ces individus et où ils se trouvent? Si nous ne savons pas que ces personnes dangereuses sont emprisonnées, nous continuerons de vivre sous la menace de la récidive.

Tout cela tient à l'attitude du gouvernement et, sans doute, à notre philosophie voulant que l'on n'est pas vraiment responsable de ses actes. Si la mère d'un criminel est une prostituée et son père alcoolique, comment peut-on lui reprocher ses actes? Pourtant, nous savons tous depuis notre prime jeunesse qu'il existe une différence entre le bien et le mal. Nous savons tous ce que c'est que d'avoir mauvaise conscience et chacun a sa voix intérieure qui lui parle. Pourtant, on a délibérément tenté d'éliminer cette conscience intérieure, de faire croire aux gens qu'ils ne sont pas responsables et qu'ils ne peuvent pas l'être, compte tenu des malheurs qu'ils ont connus dans leur passé.

Je ne dis pas qu'il ne faut pas tenir compte du passé de personnes qui ont eu une enfance difficile. Nous voulons que tous les Canadiens aient la possibilité de s'épanouir pleinement et de faire ce qu'ils ont choisi de faire. Toutefois, quand quelqu'un décide de commettre un meurtre, il doit exister un moyen de lui faire comprendre que c'est inacceptable et que nous ne pouvons lui permettre de continuer d'agir de la sorte. Les meurtriers doivent comprendre qu'ils sont responsables de leurs actes, peu importe le genre d'enfance qu'ils ont vécue ou les circonstances qui les ont conduits à commettre un meurtre.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, dans son intervention, le député a mentionné qu'on ne suivait pas les règles dans l'examen de certaines mesures législatives importantes à la Chambre. Il a rappelé qu'il est souvent fait recours à l'attribution de temps, à la clôture, et que la présentation, à la fin de la session, de mesures législatives comme celle-ci, laisse très peu de temps pour les examiner. Le député a entièrement raison. Pourquoi, à son avis, en est-il ainsi? Pourquoi le gouvernement a-t-il si souvent recours à l'attribution de temps et empêche-t-il que d'importantes questions soient débattues de façon appropriée, non seulement à la Chambre mais partout au pays?

M. Mayfield: Monsieur le Président, sans vouloir être cynique, c'est une question sérieuse. Elle a à voir en grande partie avec les aspirations politiques et le désir du gouvernement de se faire réélire. Les libéraux sont prêts à proposer n'importe quoi au public pour se faire réélire. Le fait que le gouvernement entame la dernière année de son mandat avant les élections n'est pas un secret.

Le fait que le projet de loi C-45 n'accomplira rien n'en est pas un non plus. Comment expliquer que cette mesure législative soit soumise à la Chambre et aux Canadiens à cette période, sauf pour des raisons politiques? C'est un stratagème des libéraux pour faire croire qu'ils veulent réformer le système judiciaire alors qu'ils ne font rien du tout, car ils n'ont pas réfléchi à la question. Ils ne savent pas où ils vont. Ils n'ont aucun plan. C'est le résultat de leur immobilisme, d'un simple désir de plaire à l'opinion publique sans objectif réel à l'esprit.

Le Président: Monsieur le député, je ne sais pas si vous avez l'intention de continuer, mais si vous voulez le faire, vous disposerez de quelques minutes après la période des questions. Comme il est 14 heures, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.

______________________________________________


3916

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, il y a trois formes de richesses dans notre société: matérielle, culturelle et biologique.

Malheureusement, nous tenons souvent notre richesse biologique pour acquise. Nos pratiques absurdes dégradent nos richesses naturelles. Nous consommons à un rythme plus rapide que nos ressources ne peuvent se régénérer. Nous rejetons nos déchets dans les écosystèmes plus rapidement qu'ils ne peuvent être assimilés.

(1400)

Le changement climatique est réel. Ses effets néfastes sont bien documentés. Avec la réduction de l'ozone, les rayons UV nocifs détruiront la base de notre chaîne alimentaire. Notre richesse biologique est la base de toutes les autres richesses. Cette relation est très claire, directe et simple. En faisant comme si nous ne le savions pas, nous mettons notre subsistance en péril.

* * *

[Français]

LE COMITÉ D'ACTION NATIONAL SUR LE STATUT DE LA FEMME

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, 5 000 à 10 000 femmes et hommes sont venu réclamer du gouvernement libéral qu'il respecte ses engagements électoraux à l'égard des plus démunis. Le Parti libéral avait promis qu'il ne couperait pas dans les programmes sociaux, il l'a fait.

Il avait promis la création de 150 000 places en garderie, il a largué cette promesse également. Le Bloc québécois mènera une lutte acharnée afin de savoir ce que ce gouvernement a fait avec l'argent réservé aux services de garde.

Le Bloc québécois s'est engagé, ce matin, à collaborer étroitement avec la nouvelle présidente du Comité d'action national sur le statut de la femme, Mme Joan Grant-Cummings, afin de s'assurer que ce gouvernement s'attaque à la pauvreté et non aux pauvres.

Le Bloc s'assurera que le message des manifestants du week-end soit entendu auprès d'un gouvernement qui semble plutôt faire la sourde oreille à l'égard de ceux et celles dans le besoin.


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«Les femmes, a dit la présidente sortante du Comité, Mme Sunera Thobani, ne demandent pas la charité, mais l'égalité.» Le Parti libéral doit comprendre le message.

* * *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, à l'approche du congé parlementaire d'été, il me semble qu'il conviendrait de faire le bilan du gouvernement libéral pour les trois prochaines années.

Le livre rouge est truffé de promesses non tenues, et un examen des activités des ministres et des ministères le prouve bien.

Le ministre de l'Agriculture est l'un des pires. Il a dit qu'il conserverait l'article XI du GATT. Il a signé le document qui l'oblitérait. Il a dit qu'il conserverait la subvention du Nid-de-Corbeau. Il l'a éliminée trois mois plus tard. Il a dit que les chèques pour le paiement de cette subvention seraient postés en janvier. On est à la mi-juin, et des milliers de chèques n'ont pas encore été émis. Il a dit qu'il créerait tout un plan de stabilisation du revenu agricole. Il n'a pas pu obtenir l'accord des provinces. Il a dit qu'il appuierait un plébiscite sur le marché continental de l'orge. Il ne l'a pas fait et il ne respectera même pas les résultats d'un plébiscite réalisé récemment en Alberta sur la mise en marché de l'orge et du blé. Le ministre est l'ironie et le cynisme incarnés quand il dit: «Je représente le gouvernement et je suis ici pour vous aider.»

Durant des années, les agriculteurs se sont dits qu'il fallait faire le contraire de ce que le gouvernement leur disait de faire. Il semble que le ministre de l'Agriculture ait aussi adopté ce principe, puisqu'il n'a rien fait de ce qu'il disait qu'il ferait.

* * *

LE VOL AIR INDIA 182

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, dimanche marquera le 11e anniversaire du pire acte terroriste de l'histoire canadienne, je veux parler de l'explosion d'une bombe à bord du vol Air India 182. Au nombre des victimes innocentes de ce massacre se trouvaient 278 Canadiens d'origine indienne.

Les familles de ces innocentes victimes attendent patiemment que justice soit faite, mais la GRC, après avoir lancé la plus vaste enquête de son histoire, n'a encore porté aucune accusation. La GRC a même offert une récompense d'un million de dollars pour tout renseignement conduisant à l'arrestation des responsables. C'était il y a un an et les familles des victimes attendent toujours.

Au nom des familles des victimes, j'exhorte le gouvernement à instaurer immédiatement une commission royale d'enquête pour faire le jour sur l'acte de terrorisme le plus grave qui ait jamais été commis sur le sol canadien. Ces familles ont le droit de connaître les faits entourant cette tragédie. Ils méritent rien de moins que la vérité et que le gouvernement fasse preuve d'honnêteté.

* * *

LES PASSAGERS CLANDESTINS

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NDP): Monsieur le Président, le meurtre tragique des passagers clandestins roumains à bord du Maersk Dubai devrait nous inciter à prendre d'urgence des mesures pour contrer le problème des passagers clandestins.

L'amende de 7 000 $ imposée aux navires transportant des passagers clandestins vise à encourager les capitaines à prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher les passagers clandestins de se cacher à bord de leur navire. Toutefois, non seulement une telle amende encourage certains à se débarrasser des passagers clandestins, mais dans la pratique ce sont généralement les membres de l'équipage, déjà mal payés, qui sont tenus responsables par le capitaine et forcés de payer l'amende. Cette dernière a donc pour effet de les inciter à jeter les passagers clandestins par-dessus bord. Selon le syndicat des dockers, loin d'être un incident isolé, la tragédie du Maersk Dubai se répète trop souvent.

Le régime actuel n'offre pas de garanties suffisantes que ceux qui sont accusés du meurtre de passagers clandestins en haute mer seront traduits en justice. Dans le cas le plus récent, les accusés ont été poursuivis par les autorités compétentes. Toutefois, que serait-il arrivé si les victimes avaient été originaires du Libéria ou d'un autre pays où ces autorités n'existent pas?

Le NPD demande au gouvernement de revoir sa politique actuelle en matière de passagers clandestins et de travailler en collaboration avec les Nations Unies pour faire adopter une convention sur la prtoection des passagers clandestins.

* * *

LA JOURNÉE DES AUTOCHTONES

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, du 21 juin au 1er juillet, les Canadiens pourront célébrer la diversité et la richesse de notre nation. Le 21 juin sera la première journée nationale des autochtones. Ce sera une occasion pour les Canadiens de célébrer les peuples autochtones, de reconnaître leurs diverses cultures et de réfléchir sur leurs contributions au Canada.

(1405)

[Français]

Le 24 juin, les Canadiens français de toute l'Amérique vont célébrer leur culture et leur langue, comme ils le font depuis le XIXe siècle. Que tous les Canadiens et les Canadiennes prennent part aux activités et à la fête de la Saint-Jean-Baptiste.

[Traduction]

Cette célébration de notre nation se terminera le 1er juillet, le Jour du Canada, une journée qui nous permet de nous montrer fiers de notre patrimoine, de notre histoire, de notre diversité et de notre richesse en tant que nation.


3918

[Français]

Du 21 juin au 1er juillet, le «Canada en fête» nous donnera l'occasion de redécouvrir et de partager nos trésors, d'apprécier davantage ce que nous étions, ce que nous sommes et ce que l'avenir nous réserve. Célébrons ensemble.

* * *

[Traduction]

LE MARATHON DE BOSTON

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais féliciter aujourd'hui Ian Moorhouse et Marcel Crête d'avoir terminé le 100e marathon de Boston.

Les deux coureurs sont de Haliburton, en Ontario. Les deux hommes faisaient partie des 38 000 coureurs qui ont essayé de finir cette course de 26 milles. Leur objectif était simple, c'était de finir la course, et ils ont réussi.

Il y avait des compétiteurs de 100 pays. Leur objectif était encore plus difficile, car ils ont dû s'entraîner à l'intérieur pendant tout l'hiver et courir dehors pour la première fois de l'année.

Le classement de ces deux hommes, ou de n'importe quel Canadien d'ailleurs, n'a pas d'importance. Ce qui importe, c'est qu'ils ont terminé la course, une course que d'autres n'ont pas pu finir et que beaucoup ne tenteraient même pas. Je les félicite d'avoir accompli une performance réellement remarquable.

* * *

LES MINES

M. George S. Rideout (Moncton, Lib.): Monsieur le Président, il est certain que la campagne «Les mines, une industrie à appuyer» a fait une excellente sélection en choisissant M. Brad Simser, de la Division du Nouveau-Brunswick de Noranda Mining and Exploration, comme l'une des nouvelles personnalités de l'exploitation minière.

[Français]

Il me fait plaisir de souligner la contribution de M. Simser.

[Traduction]

À bien des égards, Brad peut être considéré comme un pionnier pour son travail de mise en oeuvre d'un système sismique intégré unique en Amérique du Nord. Cette technologie informatisée de pointe permet à Brad de surveiller de quelle façon les formations rocheuses s'ajustent aux activités minières. Le résultat ultime, c'est que Noranda peut améliorer la sécurité, tout en travaillant plus profondément.

On se fait souvent de fausses idées au sujet de l'exploitation minière. En tant que nouvelle étoile montante, Brad représente l'avenir de l'exploitation minière en tant qu'industrie technologique de pointe, essentielle non seulement pour l'économie canadienne, mais pour de nombreux produits et services que les Canadiens utilisent quotidiennement.

[Français]

Je tiens à féliciter Brad Simser pour avoir réalisé tant de progrès dans sa carrière.

[Traduction]

Je lui souhaite de continuer son travail avec succès.

* * *

M. ROBERT THIRSK

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Monsieur le Président, lorsque Robert Thirsk fréquentait l'école élémentaire Glenmore et l'école Dr. Knox à Okanagan Centre, il caressait un rêve. Il voulait devenir astronaute. Le 20 juin, ce rêve se réalisera. Officiellement, la charge utile de la mission 78 doit servir à étudier la microgravité et les effets des séjours dans l'espace sur le corps humain.

Toutefois, M. Thirsk réalisera aussi certaines expériences conçues par de jeunes Canadiens et il s'entretiendra directement avec eux par radio, à partir de l'espace.

Il faut soutenir l'enthousiasme de nos jeunes scientifiques car l'avenir économique du Canada dépend de notre excellence en sciences et en génie. Comme M. Thirsk me l'a dit, nous avons réussi à exploiter nos ressources naturelles, mais nous n'avons pas aussi bien réussi le développement de nos ressources intellectuelles.

Le chandail de hockey de Bobby Orr s'envolera aussi dans l'espace lors de la mission 78, en hommage à l'excellence des Canadiens.

Si nous pouvons produire les meilleurs joueurs de hockey au monde, il est évident que nous pouvons aussi produire les meilleurs scientifiques et les meilleurs ingénieurs. Tous les jeunes ont des rêves; nous devons les encourager et leur donner des objectifs.

* * *

[Français]

HOMMAGE À CLAUDE COULOMBE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je veux rendre hommage à M. Claude Coulombe, un étudiant de 19 ans du Centre de formation Rimouski-Neigette qui accumule les prix en mécanique automobile. Il s'est d'abord classé deuxième au concours de la commission scolaire La Neigette, puis premier aux Olympiades régionales tenues à Carleton et second à la sélection provinciale. Le 4 mai dernier, il a obtenu une médaille d'or aux Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique.

Ces épreuves regroupaient des étudiants de l'Alberta, du Manitoba, de la Colombie-Britannique, de l'Ontario et du Québec. Elles étaient constituées essentiellement de tests pratiques visant à mettre en lumière les connaissances techniques et les capacités de diagnostic des candidats.

À l'automne 1997, M. Coulombe se rendra à Saint-Gall, en Suisse, pour participer aux Olympiades mondiales des métiers. Je tiens aujourd'hui à le féliciter chaleureusement et à lui souhaiter les plus grands succès.


3919

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, les Nations Unies ont proclamé le 17 juin la journée mondiale de lutte contre la désertification.

La désertification est due aux changements climatiques, à la détérioration de la végétation par surexploitation, au pacage excessif, à la déforestation et aux incendies de forêts et à l'érosion par le vent ou l'eau, à cause de pratiques agricoles inadéquates.

(1410)

La désertification est plus prononcée en Afrique et en Asie, mais elle se produit aussi dans nos prairies. En 1995, le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification. Celle-ci engage les pays partisans à fournir des ressources pour la réalisation de programmes et de projets visant à freiner, et même à renverser, la progression du désert. Nous devons de toute urgence faire des efforts en ce sens si nous voulons préserver la productivité des terres et des forêts pour les générations à venir.

* * *

[Français]

LE PILOTE AUTOMOBILE JACQUES VILLENEUVE

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, le Grand Prix du Canada de formule 1 a été disputé sur la piste Gilles-Villeneuve de l'île Notre-Dame de Montréal devant plus de 100 000 spectateurs qui s'étaient massés tout au long du parcours afin de venir acclamer leur héros.

[Traduction]

Âgé de 25 ans à peine et alors qu'il en est à sa première année de coureur sur Formule Un, Jacques Villeneuve s'est classé deuxième et était de loin le préféré de la foule. Ce fut un moment d'intense émotion pour les Montréalais qui ont pu admirer le fils de leur héros Gilles Villeneuve courir sur la piste qui porte le nom de son père, le jour même de la fête des pères.

[Français]

Jacques Villeneuve mérite bien l'affection que lui témoignent les Canadiens et les Québécois et nous lui souhaitons de toujours continuer à courir avec la même fougue et le même enthousiasme qu'il a su démontrer depuis le début de sa carrière. Il est un modèle pour notre génération québécoise et canadienne.

* * *

[Traduction]

LA MARCHE CONTRE LA PAUVRETÉ

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 14 mai, deux marches des femmes contre la pauvreté ont débuté, une dans l'Ouest et l'autre dans l'Est. Samedi, elles ont convergé sur la colline du Parlement.

Cette marche avait pour thème le droit de vivre à l'abri de la violence, de la pauvreté et du chômage. Cela n'a rien à voir avec la politique partisane ni avec le féminisme à strictement parler. Ces questions qui préoccupent les femmes touchent également les hommes et les familles, sans égard à l'appartenance politique.

Je félicite les organisatrices d'avoir assuré le grand succès de cette marche et d'avoir attiré l'attention sur des questions qui revêtent une si grande importance pour l'ensemble des Canadiens.

* * *

[Français]

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA LUTTE CONTRE DE LA DÉSERTIFICATION

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, une centaine de pays, dont 80 en développement, sont aux prises avec la désertification qui résulte de pratiques non durables d'utilisation des sols. En conséquence, 900 millions de personnes risquent d'être affectées par ce désastre écologique qui entraîne famine et déplacements de populations.

Les Nations Unies ont décrété le 17 juin Journée mondiale de la lutte de la désertification. Cette décision est une des suites de la Conférence de Rio tenue en juin 1992. Des négociations internationales entreprises par la suite ont débouché sur la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification. Jusqu'à maintenant, 29 des 115 pays signataires l'ont ratifiée, dont le Canada. Mais pour qu'elle entre en vigueur, cette Convention doit être ratifiée par 50 pays.

En cette Journée mondiale de la lutte de la désertification, j'invite le gouvernement du Canada à assumer son leadership auprès des autres pays afin que cette Convention entre en vigueur le plus rapidement possible.

* * *

[Traduction]

LA RÉDUCTION DES EFFECTIFS DE LA FONCTION PUBLIQUE

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens qui vivent dans les régions nordiques ou isolées en ont assez.

Alors que les citadins du Sud n'ont que quelques pas à faire pour rencontrer un agent des ressources humaines, les gens qui vivent dans les régions rurales doivent attendre des heures pour avoir accès à des lignes 1-800 où il n'y a pas assez de personnel, mais qui sont censées leur offrir un meilleur service.

Cinq centres d'emploi du Canada viennent tout juste de fermer leurs portes dans ma circonscription. Aux termes du nouveau régime d'assurance-chômage, les gens doivent travailler plus longtemps pour toucher des prestations moindres, mais leurs questions restent sans réponse parce que les lignes téléphoniques sont toujours occupées.

Des retraités désespérés qui ne peuvent pas payer leur loyer à cause de chèques perdus appellent à mon bureau parce que tout ce qu'ils obtiennent de la ligne «sécurité vieillesse», c'est la tonalité indiquant qu'elle est occupée. Des mères seules qui tentent désespérément de joindre les deux bouts ne parviennent pas à obtenir réponse à leurs questions parce que la ligne «prestation fiscale pour enfants» ne répond pas.

Dans sa sagesse réductiviste, le gouvernement a conservé les cadres supérieurs et réduit le personnel des points de service. Les

3920

Canadiens ruraux sont disposés à faire des sacrifices pour nous débarrasser de la dette, mais il faudrait au moins embaucher assez de personnel pour s'occuper des lignes 1-800. Les habitants du Nord en ont assez d'être des laissés-pour-compte.

* * *

LA MARCHE CONTRE LA PAUVRETÉ

Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, cette fin de semaine, des femmes de tout le Canada ont complété un périple qui les a amenées à Ottawa pour venir réclamer des emplois, la justice et l'égalité. Aujourd'hui, le Comité canadien d'action sur le statut de la femme a fait part de leur position aux parlementaires.

Le message que ces organisations féminines populaires transmettant au gouvernement est essentiel à l'élaboration d'une loi qui renforcera l'égalité entre les sexes et remédiera à la pauvreté dans laquelle de nombreuses femmes vivent à l'heure actuelle.

(1415)

À la Conférence des Nations Unies sur les femmes qui s'est tenue à Beijing, l'année dernière, on s'était entendu sur le fait que les organisations non gouvernementales et les associations féminines devaient collaborer avec leurs gouvernements pour mettre au premier plan les questions touchant le sexe. Le gouvernement ne ménage pas ses efforts pour s'attaquer aux questions de pauvreté, de chômage, d'inégalité et il fait tout en son pouvoir pour intégrer les besoins des femmes à tous nos programmes et à toutes nos mesures législatives à l'avenir.

Je viens de revenir de la Conférence Habitat II des Nations Unies et je considère que cet engagement des ONG et des gouvernements de collaborer est notre point le plus fort. Je suis heureuse de l'engagement de toutes les femmes ici aujourd'hui, alors que nous continuons de collaborer pour parvenir à une plus grande égalité entre les sexes.

* * *

[Français]

LA CONDITION FÉMININE

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, au cours du week-end qui vient de se terminer, des milliers de femmes et d'hommes se sont donné rendez-vous sur la Colline parlementaire afin de souligner l'incroyable exploit de dizaines de femmes qui ont traversé le pays pour livrer un important message à notre gouvernement.

Cette marche, qui a débuté le 14 mai dernier à Vancouver, avait pour but de sensibiliser l'ensemble des gouvernements de notre pays à l'importance de prendre des mesures concrètes pour venir à bout des problèmes sociaux et économiques qui affectent particulièrement les femmes.

Nombre des mesures que nous avons prises depuis notre élection convergent vers cet objectif. Nous sommes déterminés à faire tout ce qu'il faut pour sensibiliser et inviter les gouvernements provinciaux à agir de concert avec nous afin de répondre aux attentes légitimes que nous ont communiquées les Canadiennes au cours de cette grande marche.

Bravo à tous!


3920

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA CONFÉRENCE DES PREMIERS MINISTRES

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, à l'occasion de la Conférence des premiers ministres, le gouvernement fédéral proposera aux provinces sa soi-disant nouvelle philosophie pour renouveler le fédéralisme canadien, c'est-à-dire étape par étape, pièce par pièce.

Ma question s'adresse bien sûr au premier ministre. Le gouvernement fédéral a-t-il l'intention d'inclure une compensation financière pleine et entière, sans condition, pour tous les champs de compétence provinciale desquels il entend se retirer prochainement?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous nous retirons de champs provinciaux et lorsque nous dépensons de l'argent dans certains programmes, dans certaines circonstances, nous allons offrir l'argent, comme c'est le cas pour la main-d'oeuvre et les mesures positives.

La discussion aura lieu au niveau des ministres, mais je suis très content de voir que l'opposition s'aperçoit que nous allons améliorer la fédération et que nous allons nous retirer des champs que nous occupions auparavant. J'espère que les provinces en seront très heureuses.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, c'est présomptueux de la part du premier ministre de se réjouir que l'opposition admette qu'il va améliorer la fédération. Compte tenu de son record précédent, nous n'avons aucune illusion en ce qui concerne ses intentions. Je suis désolé de lui faire de la peine, mais enfin, je suis obligé de lui dire la vérité.

Le premier ministre admettra-t-il que la seule façon acceptable de se retirer de champs de compétence provinciale, c'est de le faire en transférant en même temps les points d'impôt aux provinces pour que celles-ci puissent assumer pleinement et entièrement, et de façon tout à fait autonome, leurs propres responsabilités, comme l'avaient permis, à l'époque, les ententes signées par les gouvernements Lesage et Pearson?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque nous nous serons retirés des programmes mentionnés dans la lettre que j'ai adressée aux premiers ministres, le chef de l'opposition sera bien obligé de le reconnaître, malgré ses prédictions, et j'aurai malheureusement l'obligation de lui faire retirer les paroles qu'il vient de prononcer. Je le ferai très gentiment; je ne voudrais pas causer quelque problème que ce soit au chef de l'opposition.

Quant aux formes de compensation, prenez par exemple la question de l'assurance-emploi, on ne peut pas le faire par points d'impôt, parce que la perception des fonds est faite des employeurs et des employés partout au Canada. Cet argent est rediriger vers les gens qui ne travaillent pas au Canada. Il faut que ce soit un transfert direct et non par points d'impôt, parce que les montants vont nécessairement varier avec le niveau de chômage d'une partie à l'autre du Canada. D'une année à l'autre, on ne le sait pas exactement. Une situation peut être désastreuse dans une province


3921

aujourd'hui et s'améliorer rapidement, ou se détériorer dans une autre partie du Canada.

(1420)

C'est pourquoi nous avons ce mécanisme de redistribution de la richesse à travers le pays en faveur de ceux qui en ont besoin. Il faut que ce soient des transferts directs et non pas des points d'impôt pour garder la flexibilité nécessaire.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, j'entends le premier ministre se positionner en défenseur des contribuables canadiens, alors qu'on sait qu'il prend cinq milliards de dollars dans la Caisse de l'assurance-chômage, fournis par les travailleurs et les employeurs, pour le mettre sur son déficit, et il voudrait qu'on le considère comme la norme en ce qui concerne la défense des intérêts des gens. Voyons!

Le premier ministre admettra-t-il que ce qu'il se prépare à faire à la Conférence des premiers ministres est une négociation qui porte sur le retrait partiel et conditionnel de son gouvernement de champs de compétence qui appartiennent déjà aux provinces, et cela, moyennant l'entrée à pieds joints dans d'autres champs de compétence qui appartiennent également aux provinces, comme par exemple celui des valeurs mobilières?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord l'assurance-chômage est constitutionnellement la responsabilité du gouvernement canadien. Il n'y a aucun doute là-dessus. Il y a eu un amendement constitutionnel, je pense en 1947 ou 1949, à ce sujet. C'est de notre juridiction et nous offrons de partager les revenus avec les provinces.

Quant au déficit de l'assurance-chômage, lorsque nous avons pris la tête du gouvernement, nous avions un déficit d'au-delà de six milliards de dollars. Nous avons réussi à réduire le déficit et, maintenant, la sagesse impose de rebâtir un surplus pour les jours où nous devrons utiliser ce surplus pour payer l'assurance-emploi aux gens qui en ont besoin. C'est strictement une bonne gestion.

Quant à offrir, à la demande des provinces, une commission des valeurs mobilières au Canada, je pense, du moins j'espère, que la grande majorité des provinces voudront y participer, parce que les investisseurs, au lieu de remplir 10 ou 12 formulaires pour avoir la permission de vendre des obligations, en auront beaucoup moins à remplir. Si une province ne veut pas y participer, la grande flexibilité que je représente leur permettra de ne pas y participer.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, c'est beau de voir un premier ministre soucieux de respecter les juridictions quand ce sont les siennes, mais qui ne respecte par les juridictions des provinces.

Dans les faits, le premier ministre, lorsqu'il dit vouloir se retirer des champs de juridiction des provinces, sait pertinemment que tout retrait de la part du fédéral qui ne s'accompagne pas d'un transfert inconditionnel des ressources financières appropriées n'est que de la poudre aux yeux.

Le premier ministre admettra-t-il que, peu importe les ententes administratives qu'il pourra négocier avec les gouvernements provinciaux, tant qu'il se gardera la possibilité d'édicter des normes nationales et tant qu'il gardera la main sur le «cash», c'est le fédéral qui imposera ses conditions dans des champs de compétence qui ne lui appartiennent pas?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le poids financier des provinces par rapport au gouvernement fédéral n'a cessé de croître depuis les années 1960.

Est-ce que le livre Option Québec de René Lévesque dit quelque chose à l'opposition officielle? L'opposition officielle y trouvera une conférence donnée par Jacques Parizeau, vers la fin des années 1960, où Jacques Parizeau observe la décentralisation qui commençait, à l'époque, à s'opérer au Canada et disait: «On va trop loin. Cette décentralisation sera trop poussée, ce pays sera ingérable. Le Québec doit en sortir.»

Voilà comment on doit poser le problème: sommes-nous trop décentralisés? Je ne crois pas. Peut-on améliorer notre décentralisation? Je le crois. Mais parler d'une fédération centralisée, c'est une chimère que seuls les leaders indépendantistes d'aujourd'hui essaient de faire croire aux gens, mais c'est inexact.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre admettra-t-il que la décentralisation par étapes, reléguant les provinces au simple rôle de figurant, est en quelque sorte ramener par la porte d'en arrière l'Accord de Charlottetown qui prévoyait que le fédéral se désengage des champs de compétence provinciale dans quelques secteurs, mais uniquement à certaines conditions?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, on a déjà répondu en ce qui concerne la formation professionnelle: la nécessité d'avoir un partenariat efficace entre le gouvernement fédéral et les provinces dans un secteur qui concerne à la fois les provinces par la formation professionnelle et à la fois le gouvernement fédéral par l'assurance-chômage et l'union économique.

(1425)

Dans les autres domaines, mais de quoi parle l'honorable député? Logement social: où sont les conditions? Le gouvernement fédéral se retire. Tourisme: il y a un partenariat qui fonctionne très bien et qu'on peut peut-être améliorer. Quel est le secteur, au fait, où on pourrait dire. . .? Les forêts? Les loisirs? L'exploitation minière? Ce sont autant de secteurs desquels le gouvernement fédéral se retire sans condition. Mais qu'est-ce qu'invente l'honorable député?

* * *

[Traduction]

LES AVIONS AIRBUS

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice et a trait à l'affaire Airbus.


3922

Jeudi dernier, en réponse à une question du député de Fraser Valley-Est, le ministre a affirmé catégoriquement: «J'assume toute la responsabilité au nom du ministère de la Justice, qui a très bien agi depuis le début de cette affaire.»

Puisque le ministre maintient que les fonctionnaires de la Justice, y compris Kimberley Prost, ont agi très correctement, donnera-t-il pour instructions à ses avocats de ne pas conclure de règlement à l'amiable avec Brian Mulroney et de ne pas dépenser des millions de dollars de l'argent des contribuables?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous nous défendons dans le procès qui a été intenté contre le gouvernement du Canada. Nous avons l'intention de continuer à nous défendre. Nous exposerons tous les arguments de défense que nous avons fait valoir et nous ferons de notre mieux pour les faire accepter dans la salle du tribunal. Voilà notre intention et voilà la voie que nous suivons.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je crois comprendre d'après cette réponse que le gouvernement ne tient pas à conclure un règlement à l'amiable et qu'il se défendra devant le tribunal.

Le ministre reconnaîtra-t-il qu'il a toujours dit, tout comme le premier ministre, qu'il s'agit d'une enquête policière, que les autorités policières en ont pris l'initiative et qu'on ne doit pas s'ingérer dans leur travail? Admettra-t-il qu'il ne devrait pas donner pour instructions à ses avocats de conclure un règlement à l'amiable avec Brian Mulroney, de sorte que les policiers puissent poursuivre leur enquête sans ingérence du ministre ni de ses avocats?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les policiers doivent bien sûr poursuivre toutes les activités qu'ils veulent sans ingérence politique.

L'enquête policière est distincte de la poursuite au civil intentée par M. Mulroney, qui se dit victime de diffamation, et le député le sait.

J'ai dit bien clairement que nous avons soumis des arguments pour nous défendre dans cette poursuite au civil et que nous nous défendons dans ce procès.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre sait aussi que la poursuite est également intentée contre la GRC.

Le ministre de la Justice a déclaré vendredi, comme le hansard en fait foi: «Je ferai rapport de tout nouveau développement à la Chambre lorsqu'il y en aura.» Nous craignons évidemment beaucoup que le gouvernement, à cause de son incompétence, ne s'apprête à conclure un règlement et à verser des millions de dollars à Brian Mulroney cet été, lorsque la Chambre ne siégera pas.

Le gouvernement tiendra-t-il sa parole, et, s'il se produit des faits nouveaux importants, y compris un règlement à l'amiable, promettra-t-il de rappeler la Chambre, de sorte qu'elle puisse examiner l'entente?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député ne devrait jamais douter que je dois rendre des comptes à la Chambre en tant que membre du Cabinet, tout comme le gouvernement.

Le député devrait également savoir, puisque je l'ai dit clairement, que nous nous défendons dans ce procès.

* * *

[Français]

LA CONFÉRENCE DES PREMIERS MINISTRES

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Dans la lettre qu'il a adressée à ses homologues provinciaux pour les informer de l'ordre du jour de la conférence, le premier ministre écrit et je cite: «Au cours de la séance de l'après-midi, les dimensions sociales de nos politiques et programmes seraient abordées et l'accent serait mis en particulier sur la protection d'un régime de sécurité sociale sûr et viable pour les Canadiens.» Or, nous sommes, au Canada, fort loin d'un régime de sécurité sociale.

Par ces propos, doit-on comprendre que loin de se retirer des champs de compétence provinciale, le premier ministre s'apprête à entrer de plain-pied dans l'ensemble des programmes sociaux, à en prendre le contrôle et ce, malgré la diminution radicale des paiements de transfert aux provinces?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à ce sujet, nous allons étudier collectivement le rapport préparé par les gouvernements provinciaux eux-mêmes. Ils ont préparé un rapport qu'ils ont soumis au gouvernement fédéral et nous en avons fait l'étude.

(1430)

Je trouve qu'on s'entend sur bien des éléments de cette étude qui a été préparée par les gouvernements provinciaux eux-mêmes. Alors, nous allons pouvoir comparer nos notes là-dessus et améliorer, si possible, le système de sécurité sociale au Canada. Nos positions sont bien connues. Prenez les cinq conditions pour le service de santé, elles sont respectées par tout le monde. Et même dernièrement, le gouvernement de l'Alberta, qui ne voulait pas s'y conformer ou avait des réticences, a conclu une entente avec le ministre de la Santé pour que les cinq conditions de la Loi canadienne sur la santé s'appliquent en Alberta comme ailleurs.

Alors, je pense que nous faisons des progrès considérables dans le domaine. La réunion de vendredi après-midi à ce sujet nous permettra de continuer dans la même voie, c'est-à-dire nous assurer qu'on a un système de sécurité sociale au Canada qui garantit à tous les Canadiens un minimum de protection, comme tout le monde le désire, ou presque tout le monde le désire en cette Chambre.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le rapport auquel le premier ministre fait référence est un rapport qui est basé sur l'avis de la majorité des provinces. Le Québec a toujours tenu à assurer lui-même le contrôle et l'intégration des politiques sociales selon ses décisions.


3923

En voulant prendre le contrôle, parce que c'est effectivement cela, de l'ensemble des programmes sociaux canadiens, en voulant aussi imposer des normes nationales, comme on l'a vu dans le domaine de la main-d'oeuvre, des forêts, des mines et j'en passe, le premier ministre ne joue-t-il pas à l'illusionniste et n'est-il pas en train, en fait, de procéder à une centralisation sournoise en conservant entre ses mains les vrais leviers de décision?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai beaucoup de mal à comprendre qu'on me traite tout à coup de centralisateur au moment où nous proposons de nous retirer de certains domaines. J'ai du mal à comprendre, mais je vais réfléchir. Ils veulent que le gouvernement continue à s'occuper de la main-d'oeuvre. Très bien. S'ils voulaient que le gouvernement reste présent dans les domaines forestier et minier et dans bien d'autres, il resterait, mais il n'est pas intéressé.

Nous voulons améliorer la fédération et clarifier les responsabilités pour que les citoyens aient un meilleur système de gouvernement aux niveaux provincial et fédéral. C'est l'objectif que nous poursuivons. D'ici à vendredi, je suis convaincu que la plupart des provinces seront très heureuses d'assumer de nouvelles responsabilités et accepteront que le gouvernement se retire de certains champs d'activité.

Si la députée veut dire au gouvernement du Québec que je dois conserver les mêmes responsabilités et les accroître, je n'ai pas d'objection.

* * *

LES AVIONS AIRBUS

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice a maintenant admis que ses avocats discutent d'un éventuel règlement à l'amiable avec Brian Mulroney au sujet de l'affaire des avions Airbus. Il a même dit que ce règlement «serait très souhaitable».

Je vais dire à la Chambre ce que signifierait la conclusion d'un règlement avec Brian Mulroney. Ce serait avouer que le ministère de la Justice a bâclé son enquête. Ce serait avouer que, dès le début, il n'avait aucun élément de preuve et avait tenté de dissimuler ce fait aux Canadiens.

Si le ministre de la Justice dit que son ministère agit de façon responsable à toutes les étapes, promettra-t-il ici et immédiatement de ne pas négocier de règlement en secret avec Brian Mulroney?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la députée fait erreur sur deux aspects lorsqu'elle pose sa question. Tout d'abord, elle a parlé d'une enquête du ministère de la Justice.

Ce sont les forces policières qui enquêtent et c'est la Gendarmerie royale du Canada qui a mené et mène toujours une enquête dans cette affaire. Comme la députée le sait ou devrait peut-être le savoir, voici le rôle qu'a joué le ministère de la Justice. On a demandé au groupe d'aide internationale de communiquer avec un gouvernement étranger pour obtenir l'aide de ce gouvernement afin de poursuivre cette enquête.

La deuxième erreur qu'a commise la députée a été d'affirmer qu'il n'y avait aucun élément de preuve depuis le début. Cela aussi c'est une question qui concerne l'enquête des forces policières. C'est à la Gendarmerie royale du Canada de décider d'ouvrir une enquête ou d'y mettre fin en se basant sur les éléments de preuve dont elle dispose ou non. Au Canada, les forces policières mènent des enquêtes en se fondant sur leur jugement.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, c'est justement là où je veux en venir. Si c'est la GRC qui enquête, qu'on la laisse enquêter. Ne parlons pas de règlements négociés dans les coulisses et de règlements à l'amiable. C'est tout simplement ridicule.

Je vais dire à la Chambre ce que signifierait également un règlement à l'amiable. Ce serait une gifle dans la figure de millions de Canadiens qui débourseraient des millions de dollars pour payer ce règlement à cause de l'incompétence du ministre.

(1435)

Je veux que le ministre me promette, à moi et aux Canadiens, ici et immédiatement, que, dès qu'il aura signé ce règlement à l'amiable avec Brian Mulroney, il signera sa propre démission. Le fera-t-il, oui ou non?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la seule personne qui parle de règlements négociés dans les coulisses est la députée de Beaver River. La seule personne qui parle de payer des millions de dollars aujourd'hui est la députée de Beaver River.

Je suis occupé à assurer la défense du gouvernement du Canada et des Canadiens dans une poursuite judiciaire.

* * *

[Français]

LA CONDITION FÉMININE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Samedi dernier, entre 5 000 et 10 000 femmes et hommes sont venus manifester sur la Colline parlementaire pour exiger que le gouvernement respecte ses engagements de la dernière campagne électorale, notamment en matière de services de garde et de création d'emplois. D'ailleurs, le Bloc québécois a rencontré les groupes de femmes, ce matin, et partage leurs préoccupations.

Étant donné que l'enveloppe fédérale pour les services de garde est passée, sans explication, de 630 millions à 250 millions de dollars, le premier ministre va-t-il nous expliquer ce qu'il a fait de l'argent qui manque et quand il entend remettre aux enfants tout l'argent qui leur est dû, et cela, via les provinces, comme il se doit?


3924

[Traduction]

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, cet argent ne fait pas mystère, loin de là. L'accord en question a été proposé aux provinces, mais elles l'ont rejeté. Le gouvernement fédéral s'est donc remis à l'ouvrage et veut discuter avec les provinces.

Si les provinces entendent faire une proposition au gouvernement fédéral, nous l'étudierons volontiers. Dans ce cas, nous dirons ce que nous en penserons quand nous saurons ce qu'elles veulent au sujet des garderies.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, c'est ce qui arrive quand on pose ses conditions.

Vendredi dernier, le premier ministre déclarait que pour enrayer la pauvreté chez les enfants, il fallait donner du travail aux parents. Étant donné qu'il a l'intention de discuter d'un programme de création d'emplois lors de la Conférence des premiers ministres, va-t-il s'assurer que cette fois-ci, contrairement au dernier programme des infrastructures, il y aura de l'emploi pour les femmes?

[Traduction]

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'ignore où étaient les députés de l'opposition, parce que, de notre côté, au Parlement, nous avons discuté encore et encore de la création d'emplois et de la situation économique.

Franchement, si nos vis-à-vis se donnaient la peine de regarder ce que fait le gouvernement, ils sauraient que nous avons créé plus de 600 000 emplois grâce aux améliorations que nous avons apportées à la situation économique et au suivi que nous assurons.

Si la députée manque de renseignements et ignore comment nous avons amélioré l'économie et comment nous allons continuer de l'améliorer, elle n'a qu'à demander une séance d'information et nous lui montrerons que le gouvernement a vraiment fait du bon travail et qu'il continuera à apporter des améliorations. Nous lui montrerons les résultats que produisent déjà les autres programmes que nous avons mis en place.

* * *

L'AFFAIRE DES AIRBUS

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, en décembre, le ministre de la Justice a dit à des journalistes qu'il avait transmis de l'information à la GRC au sujet de l'affaire des Airbus. Il a dit que jamais auparavant il ne lui était arrivé de transmettre de l'information à la GRC et de ne plus en entendre parler par la suite.

Jeudi dernier, le ministre a toutefois dit à la Chambre que la GRC lui avait bel et bien réécrit. Le ministre pourrait-il tout simplement nous expliquer cette contradiction?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Je le ferai avec plaisir, monsieur le Président, mais permettez-moi d'abord de rectifier une autre regrettable inexactitude.

Comme le service de recherche sur lequel s'appuie le parti du député est un service de coupures de presse de la chaîne de journaux dont le Sun fait partie, il est très difficile pour les députés de continuer de faire tout un plat.

Permettez-moi d'apporter une rectification. Le député dit qu'en décembre dernier, j'ai déclaré avoir communiqué de l'information sur l'affaire des Airbus, et c'est faux.

Ce que j'ai dit publiquement, c'est que, dans l'exercice de mes fonctions, lorsque j'ai pris connaissance d'allégations de fautes commises par l'ancien gouvernement, j'en ai informé la GRC, après avoir consulté mon sous-ministre et le solliciteur général, pour qu'elle agisse alors comme bon lui semblait. La GRC a examiné la question et elle a répondu qu'elle ne ferait rien parce que les allégations n'étaient pas fondées.

(1440)

Quant à la dernière coupure de presse dont s'est inspiré le député, je puis ajouter que, lorsque M. Koring, du Globe and Mail, m'a interviewé et m'a posé la question en décembre dernier, j'ai effectivement répondu que je n'avais pas réentendu parler de l'affaire. Dans les jours qui ont suivi, on m'a rappelé que j'avais eu des nouvelles, ce que j'ai alors signalé au Globe and Mail. Voilà ce qu'il en est.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière et cette semaine, le ministre a tenté habilement de se distancer de toute cette histoire. Il faut presque le féliciter de son tour de passe-passe. Il s'imagine peut-être duper la population, mais il n'en est rien.

Je veux donner au ministre une autre chance de clarifier la situation. Il nous a relaté le souvenir qu'il a des événements, mais par souci de transparence et de clarté, je demande au ministre de bien vouloir déposer la lettre de la GRC à la Chambre. Le fera-t-il?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Oui, monsieur le Président, je le ferai.

Permettez-moi aussi de répondre au député. Il dit que j'ai tenté habilement de prendre mes distances par rapport aux événements. Ce n'est pas le cas. Ce que j'ai essayé de faire la semaine dernière et aujourd'hui, c'est d'expliquer et de signaler au député et à ses collègues qu'il s'agit de deux questions différentes. Il n'est ni juste ni opportun de les confondre.

D'une part, le ministre de la Justice est informé d'allégations concernant des fautes qu'aurait commises le gouvernement précédent et, dans l'exercice de ses fonctions, après avoir consulté le


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sous-ministre et le Solliciteur général, il en informe la police. La semaine dernière, le député de Calgary-Sud-Ouest a reconnu que c'était ce qu'il fallait faire.

L'autre question distincte, c'est le fait que la Gendarmerie royale du Canada a décidé ultérieurement, pour des raisons qui lui sont propres, d'amorcer son enquête sur l'affaire des Airbus. C'est une affaire distincte. C'est une autre chose. C'est une question qui est du ressort de la police.

Si le député arrive à comprendre qu'il s'agit de deux affaires distinctes, il aura progressé grandement dans la compréhension de ces questions.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice se réfugie derrière de beaux principes pour masquer l'improvisation dont il a fait preuve dans l'affaire Airbus. Mais au-delà des discours, le ministre doit répondre des faits.

Le ministre de la Justice confirme-t-il qu'il a mené une enquête personnelle et partisane dans l'affaire Airbus, alors qu'il était candidat libéral aux élections générales de 1993?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Non, monsieur le Président, je ne sais pas de quoi parle la députée. J'ai signalé à la Chambre en quoi consiste le dossier. Il s'agit d'une enquête policière. Le rôle qu'a joué le ministère de la Justice dans cette enquête a été expliqué. Les faits sont là.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice peut-il nous dire sur son honneur, de son siège que d'aucune façon. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chère collègue, il n'est pas question de donner sa parole d'honneur; c'est toujours ainsi à la Chambre des communes. Alors, nous n'avons pas besoin d'en parler.

Mme Venne: Monsieur le Président, je demande donc au ministre de la Justice s'il peut nous dire de son siège que d'aucune façon il n'avait entrepris une enquête personnelle auprès de qui que ce soit dans l'affaire Airbus au moment où il était candidat libéral, en 1993?

(1445)

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas à quoi la députée fait allusion ou ce qu'elle veut me demander. Je pense que les faits ont été présentés à la Chambre et que j'ai bien répondu aux questions qui m'ont été posées.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. John English (Kitchener, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international et concerne la Loi Helms-Burton. Que fait le ministre pour contrecarrer cette tentative du Congrès américain de priver les Canadiens de leur droit légitime de faire affaire avec Cuba?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères et moi-même avons annoncé aujourd'hui la réponse du gouvernement à la Loi Helms-Burton.

Nous nous efforçons de protéger la souveraineté, la politique étrangère et la politique commerciale du Canada de même que les activités légitimes d'entreprises canadiennes à Cuba. Nous avons proposé de modifier la loi sur les mesures extraterritoriales étrangères de façon à bloquer toute tentative par une entreprise étrangère d'exécuter au Canada une ordonnance judiciaire en application d'une loi aussi contestable que la loi Helms-Burton. Nous avons prévu une disposition de récupération permettant de récupérer au Canada les fonds et les biens perdus aux États-Unis dans des poursuites intentées en vertu de cette loi. Enfin, nous allons rendre plus sévères les peines prévues à l'égard des sociétés qui respecteront la loi d'un pays étranger plutôt que celle de notre pays.

Nous espérons que cela découragera le genre de mesures ou de poursuites judiciaires que prévoit la loi Helms-Burton aux États-Unis, qui est un acte unilatéral dont le principe, l'objet et l'application nous semblent illégitimes.

En outre, nous allons poursuivre un recours prévu par l'Accord de libre-échange nord-américain. Il s'agit du recours devant la Commission du libre-échange de l'ALENA.

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, il semble que, ces jours-ci, les libéraux soient toujours en train d'essayer de concocter des ententes pour se sortir d'impasses dans lesquelles un gouvernement plus compétent ne se serait jamais engagé. Le fiasco des Airbus de Mulroney n'en est qu'un exemple.

Gardant cela à l'esprit, le ministre de la Justice peut-il dire à la Chambre s'il a l'intention de conclure une entente à l'amiable avec la Pearson Development Corporation ou d'adopter une loi qui va à l'encontre de la primauté du droit et qui intervient dans le processus judiciaire en cours?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la primauté du droit comprend le droit démocratique du Parlement de légiférer, et c'est exactement ce qui a été fait dans le cas qui nous occupe.


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Nous avons fait adopter le projet de loi C-28, qui met en oeuvre une promesse que nous avons faite durant la campagne électorale. Nous avons donc examiné cette question sérieusement et en sommes venus à la conclusion qu'il n'était pas dans l'intérêt public de laisser tomber le projet de loi.

Si le député se préoccupe de la loi, de la légalité ou de questions constitutionnelles, il devrait savoir que le témoin expert qui a comparu devant le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles au sujet du projet de loi C-28, le même expert constitutionnel de la Osgoode Hall Law School sur lequel les conservateurs se sont appuyés pour critiquer le projet de loi, a dit, lors de sa comparution la semaine dernière, qu'avec les modifications que nous avons proposées le projet de loi est maintenant tout à fait constitutionnel et légal.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, si les beaux discours étaient de l'argent, les libéraux épongeraient le déficit.

Pendant deux ans, le gouvernement a affirmé qu'il avait annulé le contrat de l'aéroport Pearson parce que, comme l'a dit l'ancien ministre libérale des Transports, ce contrat était la plus grande escroquerie de l'histoire du Canada. Maintenant, le ministère de la Justice se porte à la défense du gouvernement, dans l'une des diverses poursuites judiciaires dont il fait l'objet, en affirmant que le contrat était si mauvais pour les promoteurs que ceux-ci auraient perdu des millions de dollars.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre laquelle de ces deux déclarations il entend retirer? Celle utilisée pour justifier l'annulation du contrat ou celle maintenant utilisée pour défendre le gouvernement, car il est impossible que les deux soient vraies?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, si les préoccupations du député n'ont pas trait à la constitutionnalité, mais plutôt à la cohérence, il pourrait peut-être commencer par expliquer pourquoi son collègue qui se trouve à ce bout-ci des banquettes m'a demandé il y a dix minutes comment je pouvais envisager de verser de l'argent aux demandeurs dans une poursuite contre la Couronne et pourquoi le député suggère maintenant qu'au lieu d'adopter le projet de loi C-28 nous devrions indemniser les demandeurs relativement à la question de la constitutionnalité?

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice n'a pas vraiment répondu à la question de ma collègue de Saint-Hubert, il y a quelques instants.

Je lui demande aujourd'hui s'il n'a, d'aucune façon, entrepris une enquête dans l'affaire Airbus, au moment où il était candidat libéral en 1993, et je ne parle pas nécessairement et seulement d'enquête auprès de la GRC ou d'autres corps policiers, mais également auprès d'autres personnes, lobbyistes ou journalistes?

(1450)

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la question est aussi illogique venant du député que venant de sa collègue. Je réponds aux questions à la Chambre lorsqu'elles portent sur des faits. En l'occurrence, les faits parlent d'eux-mêmes.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je redemande ceci au ministre: si je le comprends bien, je dois conclure que jamais et d'aucune façon, pendant la campagne de 1993, il n'a mené une enquête auprès de journalistes concernant l'affaire Airbus et le rôle qu'aurait présumément joué l'ancien premier ministre Mulroney. Je parle donc de discussions, de débats, d'enquêtes avec des journalistes avant d'être nommé ministre de la Justice.

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député peut tourner sa question comme il l'entend, je m'en tiendrai aux faits.

En l'occurrence, les faits sont clairs. Ils sont du domaine public. Une journaliste m'a contacté pour me faire part d'allégations visant des faits délictueux d'une très grande gravité. J'ai donc demandé conseil à mon sous-ministre et au solliciteur général. Je crois avoir fait ce que tous les députés attendent de la part d'un ministre de la Justice.

C'est une simple question de principe. Si on vous fait part d'allégations visant des faits délictueux, vous demandez conseil à votre sous-ministre et au solliciteur général, vous transmettez les renseignements à la Gendarmerie royale du Canada, puis vous laissez les policiers faire leur travail. Si je n'avais pas fait cela, j'imagine le genre de cris de protestation que lanceraient mes vis-à-vis. Dans cette affaire, j'ai fait ce qu'il fallait faire.

Le Président: Chers collègues, les questions posées doivent porter sur la responsabilité administrative des ministres ou du gouvernement pendant qu'ils sont en fonctions.

Je vous prie donc de garder vos questions dans ces limites et d'éviter de poser des questions concernant des événements survenus avant que la personne accède à un poste particulier de responsabilité.

* * *

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, lundi dernier, le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans a dit à la Chambre que la pêche commerciale exclusive aux


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autochtones dans le passage Alberni, sur l'île de Vancouver, était fondée sur l'article 35 de la Constitution.

Le ministre accepte-t-il la position énoncée par son secrétaire parlementaire selon laquelle la pêche commerciale exclusive aux autochtones est effectivement prévue dans la Constitution?

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je dirai au député ce que j'ai dit et répété maintes et maintes fois à lui et à d'autres députés de son parti. Les priorités en ce qui concerne la pêche au saumon sont, premièrement, la préservation et l'échappée, deuxièmement, la pêche autochtone, troisièmement, la pêche récréative et commerciale. C'est conforme à la Constitution et à la politique gouvernementale. C'est conforme à la stratégie de la pêche autochtone et à toutes les lois jamais adoptées dans notre pays. Je ne peux pas être plus clair.

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, je suis entièrement d'accord avec le ministre.

Le fait est que, en plus de l'article 35, le ministre et son gouvernement ont ajouté un autre type de pêche, soit la pêche commerciale exclusive aux autochtones. Ce type de pêche n'est pas prévu dans la Constitution. Dans la décision Sparrow, cela a été rejeté ou la question de la pêche commerciale n'a pas été examinée. Dans la plus récente décision rendue par la Cour suprême du Canada, cette dernière a déclaré que les autochtones avaient le droit de pêcher pour se nourrir ou encore pour des raisons à caractère cérémonial et religieux. Il n'a pas été question de pêche commerciale.

Le ministre accepte-t-il l'entière responsabilité de la pêche commerciale exclusive aux autochtones qui se fait actuellement dans le passage Alberni?

(1455)

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je dirai au député que les politiques sont clairement énoncées. Elles sont claires et tout le monde les comprend.

Je me demande si le député ne pourrait pas essayer de comprendre, lui aussi, les politiques du gouvernement afin de pouvoir les appuyer.

* * *

[Français]

LA LOI AMÉRICAINE HELMS-BURTON

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, les ministres des Affaires étrangères et du Commerce international ont annoncé que le gouvernement fédéral déposera, à l'automne, un projet de loi modifiant la Loi sur les mesures extra-territoriales étrangères dans le but de contrer les effets de la loi américaine Helms-Burton à portée extra-territoriale.

Devant cette législation inacceptable et maintes fois dénoncée par le Canada et une grande partie de la communauté internationale, comment le ministre du Commerce international peut-il faire fi de l'urgence de la situation et reporter à l'automne les modifications envisagées à la Loi canadienne sur les mesures extra-territoriales étrangères?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi Helms-Burton n'entrera pas en vigueur avant le 1er août, c'est-à-dire qu'aucune action en justice ne pourra être intentée avant cette date. Le président des États-Unis peut encore retarder la date. Nous espérons qu'il le fera parce que nous espérons envoyer un signal vigoureux par l'initiative que nous prenons aujourd'hui et par celles d'autres pays également.

Et même si la loi entre en vigueur le 1er août, cela voudra dire que les actions en justice ne pourront pas être intentées devant les tribunaux américains avant le 1er novembre. D'ici là, la Chambre connaîtra tous les détails sur notre projet de loi.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, le Canada s'est battu longtemps et avec acharnement pour la création de l'Organisation mondiale du commerce, mais en cédant dans l'affaire du bois d'oeuvre, nous avons permis aux États-Unis de s'en tirer avec une autre tactique d'intimidation bilatérale. Ce faisant, nous avons non seulement fait du tort à notre industrie du sciage, mais aussi à l'organisation même vers laquelle nous devrions nous tourner pour régler des différends de cette nature.

Maintenant que le ministre a vu les résultats de son entente mal conçue sur le sciage de résineux, n'admettra-t-il pas qu'il aurait dû s'adresser à l'Organisation mondiale du commerce pour qu'elle règle ce conflit une bonne fois pour toutes?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous avons évalué nos chances de réussite en recourant à l'ALENA et à l'OMC. Les entreprises qui créaient des emplois importants pour la survie de cette industrie l'ont fait également.

L'industrie nous a dit clairement qu'elle voulait que nous lui procurions une certaine sécurité d'accès au marché américain. Nous y sommes parvenus. Nous sommes parvenus à obtenir un accès assuré pour une période de cinq ans, ce qui n'était encore jamais arrivé. C'est avec l'appui de l'industrie du bois de sciage que nous y sommes parvenus.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international. Elle porte sur la question du commerce et de l'environnement et découle de l'évaluation de la performance du gouvernement actuel dans ce domaine, qui a été faite par des groupements écologiques. Ils ont dit que c'était probablement le pire gouvernement qu'Environnement Canada ait jamais connu depuis 25 ans qu'il existe.

Dans le cadre de ses négociations avec le Chili, le gouvernement insiste-t-il sur le fait qu'une des conditions de la conclusion d'un accord commercial est la signature par ce pays d'une entente accessoire sur l'environnement? Compte-t-il respecter cette promesse?


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L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les ententes accessoires sur la main-d'oeuvre et l'environnement sont des cas uniques à l'ALENA. Elles ont été prévues dans les dispositions mises en place par l'ALENA. Nous voulons que, s'il veut faire partie de l'ALENA, le Chili respecte également les mêmes ententes. Par conséquent, nous sommes en train de négocier avec ce pays une amélioration de l'accord environnemental.

* * *

LA FISCALITÉ

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, les personnes qui fraudent la TPS le font pour se soustraire à l'impôt sur le revenu.

La ministre du Revenu peut-elle nous expliquer les mesures qui ont été entreprises pour réduire et coincer l'économie souterraine?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'impression que les Canadiens comprennent de plus en plus que la participation à l'économie souterraine n'est pas une infraction sans victimes. Quand un Canadien décide de ne pas payer ses impôts, c'est un autre qui doit combler la différence.

Revenu Canada prend ce problème très au sérieux et notre programme en sept points axé sur l'économie souterraine a permis de récupérer plus d'un milliard de dollars.

(1500)

Plus récemment, avec le concours de l'industrie canadienne du bâtiment, nous avons mis en oeuvre un système de déclaration volontaire qui fournira à Revenu Canada les renseignements nécessaires pour limiter encore davantage l'activité dans ce secteur important.

Si vous me le permettez, je vais faire les louanges de l'Association canadienne de la construction, de l'Association canadienne des constructeurs d'habitations et du Syndicat canadien des travailleurs de construction pour leur participation à ce programme et dire qu'ensemble, nous ferons en sorte que ce secteur important de l'économie canadienne sera mis sur le même pied que les autres.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je signale aux députés la présence à la tribune de Son Altesse Royale le prince El-Hassan Bin Talal du Royaume hashémite de Jordanie.

Des voix: Bravo!

Le Président: Chers collègues, avant de passer aux affaires courantes, je rappelle que nous avons récemment perdu un des parlementaires qui a servi le plus longtemps dans toute l'histoire du Canada. Je parle évidemment de l'honorable George Hees.

Nous allons maintenant rendre hommage à l'honorable George Hees.

* * *

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE GEORGE HEES

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, il y a quelques jours, nous avons effectivement perdu un des députés qui a siégé le plus longtemps à la Chambre. M. Hees s'est acquitté de ses fonctions de député avec grande distinction pendant 37 ans.

M. Hees a eu une carrière on ne peut plus distinguée. Il a également eu une vie bien remplie dans la joie et la gaieté. Il a été assez bon pour partager ses grands talents avec les Canadiens.

M. Hees a étudié à l'Université de Toronto, dont il était diplômé. Il a également étudié à Cambridge, en Angleterre. C'était un athlète qui a joué pour les Argonauts de Toronto et qui a eu le privilège d'appartenir à une équipe qui a gagné la Coupe Grey.

Il a servi dans les Forces canadiennes, lors de la Seconde Guerre mondiale, comme major de brigade dans la cinquième brigade d'infanterie. Il a été blessé et rapatrié en 1945. Lors du service en son honneur, un de ses bons amis a mentionné une histoire typique de George Hees concernant son retour au Canada. Le héros fringant est arrivé avec le bras en écharpe et appréciait hautement toute l'attention dont il était l'objet à des réceptions et partout où il allait. Selon cet ami, un soir, M. Hees est rentré chez lui, après une de ces réceptions en son honneur, avec le mauvais bras en écharpe.

M. Hees s'est intéressé à la vie publique. Il s'est présenté comme député en 1945, mais il a été battu et il a dû attendre 1950 pour être élu. Il est ensuite devenu président du Parti conservateur du Canada dans les années précédent l'élection du gouvernement minoritaire Diefenbaker, en 1957, puis du gouvernement majoritaire, en 1958.

(1505)

Dans le gouvernement Diefenbaker, il a été nommé ministre des Transports et il a servi avec grande distinction dans ce porte-feuille. Il a ensuite été ministre de l'Industrie et du Commerce et ceux qui ont travaillé avec lui à cette époque-là s'en souviennent avec affection.

M. Hees était un promoteur infatigable du Canada. Il appuyait ses fonctionnaires et son ministère, et travailler avec lui pouvait être extraordinaire. Ceux qui ont travaillé avec lui, à cette époque, se souviennent encore de la présence de ce ministre qui leur a démontré que, de fait, le ministre pouvait faire une différence considérable dans un ministère.

Sous sa direction à Industrie et Commerce, le ministère a commencé à promouvoir les échanges avec d'autres pays avec un niveau de succès sans précédent.

M. Hees a quitté la politique 1963. C'était une époque difficile, comme certains s'en souviendront, pour le gouvernement deM. Diefenbaker. M. Hees a choisi de se retirer de la politique active. Il est alors devenu président de la Bourse de Montréal. Originaire de


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Toronto, il vivait maintenant à Montréal. Il a également très bien réussi dans ce poste.

Il est retourné à la politique active en 1965 et a été réélu. Il a ensuite servi comme député, jusqu'à sa nomination au Cabinet, en 1984, dans le gouvernement de Brian Mulroney. Cette fois, il a été nommé ministre des Anciens combattants. M. Hees ne s'est jamais autant distingué que dans ce portefeuille. Aujourd'hui encore, il y a, dans ce ministère, des gens que je connais et que je rencontre de temps à autre, et des anciens combattants qui se souviennent de lui avec nostalgie.

Monsieur le Président, vous vous souviendrez peut-être du PAAC, qu'il a étendu à 10 000 anciens combattants à cette époque. Lorsqu'il était ministre des Anciens combattants, M. Hees saisissait toutes les occasions pour dire que chaque Canadien était une personne spéciale. Il faisait alors une pause et nous rappelait que ceux qui avaient servi dans ces circonstances extraordinaires étaient, à son avis, d'une importance exceptionnelle pour le pays. On se souvient encore de lui pour ce qu'il a fait pour chacun d'entre eux.

M. Hees a servi jusqu'en 1988, lorsqu'il a décidé de ne pas se représenter et qu'il a été nommé ambassadeur. Là encore, on se souvient de lui pour ce qu'il a fait à ce titre.

J'ai une histoire personnelle à raconter qui remonte à la première réunion du Cabinet à laquelle j'ai jamais assisté. Je ne pense pas que je divulgue là un bien grand secret. Nous étions assis autour de la table, pour la première fois, et le premier ministre nous a rappelé qu'il y avait deux personnes autour de la table qui, en raison de leur âge, ne pourraient pas siéger au Sénat. C'était moi, parce que j'avais moins de 30 ans, et M. Hees, qui avait plus de 75 ans. La réponse de M. Hees a été elle-ci: «Au moins, dans le cas de Charest, cela peut s'arranger.»

M. Hees avait aussi beaucoup d'enthousiasme pour le pays et pour ses concitoyens. Ce qui m'a le plus impressionné à son sujet, c'est l'aisance qu'il avait. Voilà quelqu'un qui avait une bonne idée de qui il était et de son expérience de la vie. Il était extrêmement généreux et partageait beaucoup. Sa femme, Mabel, partageait également sa vie politique. Son surnom était Mibs. C'était une personne extraordinaire. Je voudrais présenter à ses trois filles, aujourd'hui, nos sincères condoléances et celles de tous les Canadiens qui se souviennent de M. Hees.

[Français]

M. Hees était également un ancien du Collège militaire royal et il s'était battu-je le souligne en passant parce que c'est intéressant pour les Québécois et les Québécoises de le retenir-avec George Drew, ici à la Chambre des communes, pour mettre en place le Collège militaire royal de Saint-Jean.

Je me souviens d'une recherche qu'on avait faite sur la création du Collège militaire royal où George Hees avait fait un discours à la Chambre des communes avec Léon Balcer, soit dit en passant, un ancien député de Trois-Rivières, défendant l'idée de mettre en place un collège militaire royal au Québec. Dans son esprit et de par son expérience, c'était extrêmement important. C'était donc un homme qui avait un sens profond du Canada et il va nous manquer.

[Traduction]

À sa famille, à tous ses amis et à ceux qui ont eu le plaisir de travailler avec M. Hees, nos sincères condoléances.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'ai appris avec grande tristesse le décès de mon bon ami George Hees.

(1510)

J'ai eu l'honneur de siéger au Parlement en même temps que lui pendant dix ans. Il représentait Toronto-Broadview, la première circonscription où j'ai habité en arrivant au Canada, et il participait très activement à la politique locale dans l'est de Toronto.

Il a eu une longue et remarquable carrière. Il aimait profondément l'institution que représente le Parlement. C'était, dans le meilleur sens du terme, un pilier de la Chambre des communes. Il a été élu pour la première fois en 1950 et a été témoin d'époques fort intéressantes de l'histoire du Canada, comme l'a souligné le député de Sherbrooke.

George Hees est demeuré imperturbable durant toutes les guerres politiques. Il avait un grand sens de l'humour, un oeil rieur et raillait légèrement toutes les situations.

Je me souviens des échanges verbaux qui survenaient régulièrement entre George Hees et Pierre Trudeau à la Chambre des communes. Ils s'étaient peu à peu transformés en un rituel qui captait l'attention de tous les députés et les présidents de l'époque,M. Jerome et Mme Sauvé, n'ont jamais eu à ramener les députés à l'ordre, car ils écoutaient tous attentivement pour voir qui l'emporterait. Malgré tout le respect que je porte à Pierre Trudeau, mon ancien chef, je dois admettre que George Hees l'emportait souvent sur Pierre Trudeau parce qu'il était rapide, il avait un esprit vif, il connaissait l'histoire et il pouvait facilement soutenir un duel verbal avec le premier ministre de l'époque.

Comme quelqu'un l'a déjà souligné, George Hees a fait carrière dans trois domaines. Ce fut un parlementaire, un soldat et, bien entendu, un sportif. Le jeune George Hees était un athlète accompli. Il a remporté la Coupe Grey, avec les Argonauts de Toronto, en 1938. On pourrait certainement profiter de la présence de George Hees aujourd'hui. Si l'on songe à toutes les difficultés de notre équipe de football, on aurait profité de sa présence au cours des 20 ou 30 dernières années. George est de l'époque où la Coupe Grey passionnait les Canadiens et certainement les Torontois; il a beaucoup contribué à l'excellence dans le sport, non seulement en sa qualité de joueur de football professionnel, mais aussi à d'autres titres.


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En tant que soldat, il était prêt à faire le sacrifice suprême. Blessé à la bataille de Schelde, il en a gardé des séquelles toute sa vie.

Je pense qu'on se souviendra particulièrement de l'empathie avec laquelle il s'acquittait de ses fonctions à la tête du ministère des Affaires des anciens combattants. Il pensait que les anciens combattants des deux grandes guerres étaient les Canadiens les plus remarquables de notre génération, car ils s'étaient battus non seulement pour la démocratie et la liberté, mais également pour notre survie économique pendant la dépression. C'étaient des gens qui avaient eu la vie dure, mais qui avaient compris que, après la guerre, il faudrait édifier une nouvelle société. Selon lui, ils avaient compris que l'essence même de l'expérience canadienne, c'était une société juste, une société pour laquelle nous nous étions battus et qu'il fallait continuer à édifier pour les générations à venir, dont je fais partie comme ceux qui sont plus jeunes.

Comme je l'ai dit plus tôt, c'était un homme plein d'humour. On m'a dit que, lors de l'inauguration de l'aérogare d'Ottawa, en 1962, George Hees attendait son tour pour prendre la parole en tant que ministre lorsque l'Aviation royale canadienne a survolé l'aérogare de si près que toutes les fenêtres ont éclaté en morceaux. Cela ne l'a pas ébranlé. Il a prononcé son discours comme si de rien n'était, avec le professionnalisme que nous lui connaissions.

Son épouse, Mabel, s'était gagné l'affection du Parlement. Elle était toujours à ses côtés, toujours d'une aide précieuse. Comme George, c'était une personne fort sympathique.

Si ceux d'entre nous qui servent à la Chambre aujourd'hui ne possédaient qu'une fraction des qualités de George Hees, je pense que nous pourrions dire que nous sommes de bons parlementaires.

Au nom du premier ministre et du gouvernement, je voudrais offrir nos condoléances les plus sincères à ses filles et au reste de sa famille. Nous avons perdu un grand parlementaire, un grand soldat et un grand homme.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je voudrais joindre ma voix à celle des députés des autres partis pour offrir nos plus sincères condoléances à sa femme et à ses trois filles et rappeler son souvenir quelques instants.

(1515)

M. Hees était un grand sportif, un parlementaire exceptionnel, un militaire de carrière, de même qu'un ministre reconnu comme très efficace. Il a été connu également plus que n'importe quel autre ministre anglophone de ce temps au Québec par le fait que, lorsqu'il a interrompu sa carrière pendant une couple d'années, en 1963, il a été un des directeurs de l'Expo internationale de Montréal et aussi président de la Bourse de Montréal. On sait également l'action qu'il avait menée, ses interventions surtout en vue de la fondation du Collègue militaire de Saint-Jean. C'est donc un politicien que le Québec reconnaît comme ayant été un bon porte-parole pour ses intérêts.

Il a été un des rares politiciens également à être ministre de deux gouvernements à 20 ans d'intervalle. Il a été ministre sous Diefenbaker et ministre sous le dernier gouvernement Mulroney.

Son action auprès des anciens combattants est reconnue dans toutes les légions canadiennes et également à travers le monde. On l'a cité en exemple souvent pour ce qu'il a pu mettre non seulement comme esprit mais comme action concrète pour soutenir les anciens combattants et les faire reconnaître à leur juste valeur.

J'ai eu l'honneur de le connaître personnellement, surtout après 1984. Pendant l'école des candidats conservateurs qui a précédé l'élection de septembre 1984, alors que j'étais venu ici, à Ottawa, pour trois jours en août, un des conférenciers était justementM. Hees. Il nous avait vanté ses méthodes, la façon d'être élu à chaque élection et sa façon de faire du porte à porte. Sa façon de contacter les gens et sa bonne humeur communicative m'avaient énormément frappé.

Il était un communicateur exceptionnel, très perfectionniste aussi dans tout ce qu'il faisait. Il savait être extrêmement respectueux de ses confrères et avait un sens de l'équipe tout à fait exceptionnel.

Nous perdons donc un grand démocrate. Nous voulons offrir à sa famille les condoléances les plus sincères, particulièrement à sa femme et à ses trois filles, et le remercier sincèrement pour la part qu'il a donnée à la démocratie canadienne et québécoise.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais également formuler quelques observations au nom du Parti réformiste du Canada. Je tiens à adresser nos sincères condoléances aux filles de George Hees, à ses petits-enfants, à son arrière-petit-fils et aux nombreux amis qu'il s'est fait, j'en suis persuadée, au fil des décennies.

George a toujours servi son pays, qu'il s'agisse de servir dans les forces armées durant la Seconde Guerre mondiale ou de servir à la Chambre, comme il l'a fait pendant presque quatre décennies.

George Hees a été élu, pour la première fois, dans une élection partielle, en 1950, et il a remporté toutes les élections à partir de là jusqu'à sa retraite en 1988, à l'exception des élections de 1963. Imaginez, remporter toutes les élections auxquelles on se présente. C'est un exploit extraordinaire.

Il a été membre des cabinets de John Diefenbaker et de Brian Mulroney. Il s'est révélé être un ministre et un administrateur extrêmement compétent et efficace.

En 1988, à sa retraite, on l'a nommé conseiller personnel et ambassadeur extraordinaire du premier ministre Brian Mulroney et,


3931

à ce titre, il a supervisé le transport, l'entreposage et la distribution de l'aide alimentaire canadienne dans les pays du tiers monde.

On lui a offert une nomination au Sénat à plusieurs reprises, mais il a toujours refusé. C'est une chose extrêmement remarquable. Même si on lui a offert un contrat garanti, il a toujours refusé, car il a jugé qu'il y avait autres choses qu'il pourrait faire.

M. Hees était populaire et respecté par les députés de tous les partis politiques. Lorsqu'il s'est retiré de la Chambre, il a déclaré que servir à la Chambre des communes était la plus belle profession qu'un Canadien pouvait exercer parce qu'on était en relation avec les députés de tous les partis et que tout le monde était ici pour essayer de servir les Canadiens. C'est vraiment très noble. C'est certes pour cette raison que nous siégeons tous ici.

Je suis très chanceuse, car une de mes collaboratrices a travaillé pour George Hees un certain temps. Lorsqu'il s'est retiré en 1988, j'ai été en mesure de l'engager lorsque je suis arrivée ici, pour la première fois, en 1989. Je lui ai parlé au téléphone très brièvement ce matin. Je lui ai demandé si elle se rappelait de George Hees. Elle m'a répondu qu'il faisait bon travailler pour lui. Un témoignage personnel comme celui-là a une très grande valeur. Elle a ajouté qu'il était charmant et que tout le monde le connaissait par son prénom. Lorsqu'il se promenait dans la rue, dans Northumberland, dans sa propre région, les gens s'approchaient de lui et lui disaient: «Salut George, comment ça va?» Il appartenait à ses électeurs. Ils ne s'adressaient pas à lui de façon très cérémonieuse, car il était l'un d'eux. Ils l'appréciaient en tant que George.

(1520)

Il s'est retiré en 1988, mais il a laissé un héritage incroyable, en tant que ministre de premier plan. Une des choses qui m'a vraiment beaucoup impressionnée, c'est le fait qu'il était très économe. Il ne pensait pas qu'il convenait de simplement consacrer les deniers publics à toutes sortes de choses.

Ainsi, un jour, il a emménagé dans un bureau dont le tapis était plutôt usé et il a déclaré qu'on n'avait pas l'argent pour le remplacer. Le tapis est donc resté là et, au fil des ans, il est devenu de plus en plus usé. Enfin, lorsqu'il a été temps de remplacer le tapis et que les travailleurs sont venus enlever l'ancien, ils ont pensé qu'on devrait peut-être le mettre au musée, car il paraissait très vieux et constituerait sûrement une belle pièce pour le musée.

Cette idéologie du service du public était au coeur même de la vie de George Hees. Il n'a jamais oublié pourquoi il était ici et pour quelles raisons il luttait. Même s'il n'est plus parmi nous, je suis persuadée qu'il laisse tout un héritage à la Chambre et que son souvenir demeurera dans l'esprit et le coeur des Canadiens.

Au nom du Parti réformiste, nous adressons nos condoléances à sa famille et nous tenons à dire merci pour tout ce qu'il a fait pour nous.

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, je ne puis souligner le décès de M. George Hees sans faire part à la Chambre des condoléances et du respect de mes électeurs de la circonscription de Northumberland.

La population de Northumberland est très fière de M. George Hees, qui l'a représentée avec compétence pendant 23 ans. La ténacité et le dur labeur de George Hees et son sens politique inné lui ont valu le soutien des électeurs de Northumberland pendant 23 ans.

Comme nous l'avons entendu, pendant toute sa carrière militaire et politique, George Hees a servi le Canada et ses électeurs au-delà de ce que lui dictait le devoir. Parlementaire dévoué, il croyait dans les grandes possibilités du Canada et des Canadiens.

En tant que successeur de M. Hees dans la circonscription de Northumberland, je sais qu'il était aimé de tous ses électeurs. Tous le respectaient et l'admiraient sans parti pris politique. M. Hees était un homme d'honneur. Il laisse à notre région un vivant héritage. On entend encore des histoires sur George Hees un peu partout dans Northumberland.

Je me souviens que la veille de ma première élection, il m'avait déclaré que j'avais mené une très bonne campagne. J'ignore s'il se doutait alors que j'allais l'emporter avec une éclatante majorité de 27 voix, mais je sais cependant que ma victoire en 1988 est en grande partie attribuable au fait que j'ai parlé de George Hees avec beaucoup de respect et d'admiration pendant ma campagne.

La population de Northumberland et moi sommes très fiers de George Hees et de la manière dont il nous a représentés. J'offre mes plus sincères condoléances à la famille et au nombreux amis deM. George Hees.

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, au nom des députés néo-démocrates qui sont à la Chambre aujourd'hui, je me joins à mes collègues pour rendre hommage à George Hees et souligner ses longs états de service dans la fonction publique, dans les forces armées et au Parlement.

J'ai siégé neuf ans à la Chambre des communes auprès deM. Hees. Je fais écho aux observations du ministre de la Défense nationale: George Hees était un pilier de la Chambre des communes. Il a donné à la Chambre et aux députés nouvellement arrivés une idée juste de la responsabilité que supposent les fonctions de député, ainsi que du bonheur et de la collégialité que peuvent apporter ces fonctions.

J'avoue avec un certain regret que je n'ai pas toujours l'impression que la Chambre est aussi collégiale qu'elle l'était lors des législatures précédentes ou que George Hees aurait souhaité qu'elle soit encore.

J'étais à la Chambre lorsque George Hees et l'ancien premier ministre Trudeau ont échangé certains propos. Je me souviens fort bien du jour où il est sorti de la Chambre, a levé les poings, pour ainsi dire, et a invité le premier ministre, un peu à la blague, à aller régler ses comptes avec lui à l'extérieur.

3932

(1525)

Je me rappelle très bien ses promenades quotidiennes. Je le rencontrais parfois par hasard près de la flamme, et ailleurs, parce que j'avais moi aussi l'habitude de me promener. À bien des reprises, j'ai eu l'occasion d'avoir des conversations à bâtons rompus avec M. Hees. J'en suis venu à beaucoup l'apprécier.

Je faisais de la natation à la piscine du Château Laurier et j'avais l'habitude de bavarder avec lui là-bas. Il était le genre de personne qui se laisse connaître facilement. Il était très intéressé par les jeunes députés qui avaient été élus au Parlement. Il nous donnait un peu l'historique de la Chambre et des conseils pour nous mettre à l'aise dans nos nouvelles fonctions.

Un article paru dans le Globe and Mail de ce matin et intitulé «Lives Lived» portait sur George Hees. Aux fins du compte rendu, car je sais qu'il ne voudrait pas qu'on déforme le souvenir d'un autre joyeux guerrier de ce lieu, lorsqu'il a battu Pauline Jewett en 1965, elle n'était pas socialiste, mais libérale. Ce n'est que plus tard qu'elle est devenue socialiste, lorsqu'elle a connu plus de succès.

Je peux vous dire que, lorsque George Hees est devenu ministre des Anciens combattants en 1985, mon volume de travail au sujet des anciens combattants a rapidement diminué. En tant que ministre des Anciens combattants, il a sûrement dit aux fonctionnaires: «Remettez de l'ordre dans vos dossiers et accordez le bénéfice du doute aux anciens combattants. Je ne veux plus d'atermoiements et de retards.» Cela a fait une nette différence. Tous les députés de l'époque ont pu le constater. Les cas à l'étude ont disparu du jour au lendemain lorsque George Hees est devenu ministre. Je tiens à lui rendre hommage pour cet aspect de sa carrière.

Au nom du NPD, j'adresse mes condoléances à sa famille. Je suis très désolé qu'il nous ait quittés.

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, le 30 juin 1934, George Hees a épousé Mabel Dunlop, de Pembroke, en Ontario. Mabs Dunlop, comme on l'appelait, était la fille de A.E. Dunlop qui avait été pendant de nombreuses années le trésorier du gouvernement conservateur de la province de l'Ontario. George était très fier de s'être allié à cette famille par le mariage. L'honorable A.E. Dunlop, l'ancien trésorier de l'Ontario, est mort cette année-là, juste avant le mariage de George et de Mabs.

En tant que ministre des Affaires des anciens combattants, l'honorable George Hees m'a invité, ainsi que d'autres députés à la Chambre, aux cérémonies du 45e anniversaire du raid de Dieppe. Je me rappelle combien il était ému à certains moments de cette visite. Il a fait un travail excellent, en tant que porte-parole du Canada et que représentant des anciens combattants. Plusieurs hommages ont été rendus aux monuments aux morts érigés à la mémoire de ceux qui sont tombés à la bataille de Dieppe.

En tant que ministre des Affaires des anciens combattants, George Hees a fait preuve dans l'exercice de ses fonctions d'une grande empathie. Tous les anciens combattants ont eu le bénéfice du doute, quand ils ont demandé à George Hees d'examiner un cas.

L'une des raisons pour lesquelles George Hees a vécu de 1910 à 1996, c'est qu'il croyait beaucoup à l'exercice physique. Un député l'a déjà dit. Tous les matins et tous les soirs, il sortait faire de l'exercice. En parfaite forme physique, il n'était jamais non plus à court de mots.

Élu pour la première fois en 1950, il a été réélu successivement en 1953, 1957, 1958 et 1962. Il ne s'est pas présenté aux élections en 1963. Il est revenu à la Chambre en 1965, quand j'ai été élu pour la première fois. Après cela, il a passé 23 ans à la Chambre.

(1530)

Je crois que presque tous les ministres du Cabinet de l'Ontario sont venus à Pembroke assister aux obsèques de son beau-père en 1934.

George était un homme très liant. À notre retour des cérémonies marquant le 45e anniversaire du raid de Dieppe, j'ai prononcé un discours à la Chambre dans lequel je faisais l'éloge de George Hees et le remerciais pour avoir si bien mené cette délégation à la commémoration de cet événement très important. Je me souviens qu'à l'époque, Mary Collins, de Vancouver, m'avait fait parvenir de l'autre côté de la Chambre une petite note pour me remercier des propos aimables que j'avais tenus envers George Hees, car c'était une époque où les gens étaient peu nombreux à dire du bien de qui que ce soit. En tous cas, c'était un homme extraordinaire.

Je ferai un dernier commentaire au sujet des beaux-parents de George. Il est intéressant de noter que Paul Martin père s'est présenté pour la première fois dans l'ancienne circonscription de Renfrew-Nord contre A.E. Dunlop, qui était le beau-père de George. Le plus intéressant, dans toute cette histoire, c'est que le père de Paul Martin père travaillait dans la cour à bois pour A.E. Dunlop, alors que son fils était son adversaire aux élections provinciales. Cela a suscité un certain intérêt. George racontait toujours beaucoup d'histoires sur sa famille.

Aujourd'hui, nous célébrons vraiment la vie d'une personne qui, en tant que représentant élu, a passé 35 années à la Chambre des communes. En tant que député de Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lois et moi adressons aujourd'hui nos sincères condoléances à la famille de George et à tous ses parents et amis.

Le vice-président: Pour conclure, je remercie tous les députés qui, cette dernière demi-heure, ont rendu hommage à M. George Hees.

______________________________________________


3932

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragra-


3933

phe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 15 pétitions.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité permanent de l'environnement et du développement durable sur la deuxième conférence des parlementaires de la région de l'Arctique, qui a eu lieu à Yellowknife, les 13 et 14 mars 1996, et la troisième rencontre ministérielle sur la Stratégie pour la protection de l'Arctique, qui a eu lieu à Inuvik, les 19 et 21 mars 1996.

[Traduction]

Le comité recommande que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour appliquer les recommandations de la déclaration faisant suite à la deuxième conférence des parlementaires, soit que le comité permanent de parlementaires de l'Arctique ait un rôle permanent et influent au sein du Conseil de l'Arctique et que le Parlement du Canada reconnaisse officiellement le comité permanent de parlementaires de l'Arctique.

[Français]

Conformément à l'article 109 du Règlement, le Comité demande au gouvernement de déposer une réponse à ce rapport.

[Traduction]

Je tiens à remercier les représentants d'Environnement Canada pour leur excellent travail de coordination de la conférence des parlementaires.

LA SANTÉ

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, le Comité permanent de la santé a l'honneur de présenter son premier rapport, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 7 mars 1996.

Votre comité a examiné les crédits nos 1, 5, 10, 15, 20, 25 et 30 prévus au chapitre de la santé du budget des dépenses principal pour l'exercice se terminant le 31 mars 1997, et en fait rapport.

* * *

(1535)

LOI SUR LE DÉDOMMAGEMENT DES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-314, Loi concernant la prestation d'un dédommagement aux agents de la sécurité publique qui perdent la vie dans l'exercice de leurs fonctions.

-Monsieur le Président, c'est un honneur et un plaisir pour moi de présenter aujourd'hui à la Chambre, de concert avec la députée de Mississauga-Est, ce projet de loi qui vise la création d'un fonds en fiducie enregistré à titre d'oeuvre de charité vouée à aider les familles des policiers et des pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.

Ce fonds serait administré par un conseil indépendant et pourrait être alimenté par le Parlement ou une assemblée législative ou encore par les dons ou les legs de particuliers.

Les Canadiens sont conscients des risques que nos policiers et pompiers prennent quotidiennement pour servir le public. Quand l'un d'eux meurt dans l'exercice de ses fonctions, tout le monde est en deuil. Ce fonds serait une manière concrète, pour les Canadiens, de rendre hommage à leur courage et d'aider leurs proches à ce moment critique.

J'espère donc que mon projet de loi bénéficiera d'un appui ferme de tous les députés.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

[Français]

LE CODE CRIMINEL

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) demande à présenter le projet de loi C-315, Loi modifiant le Code criminel (protection des témoins).

-Monsieur le Président, il me fait plaisir de déposer un projet de loi modifiant le Code criminel. Ce projet de loi vise à protéger les témoins plaignants dans les causes d'infraction de nature sexuelle, d'agression sexuelle et dans les causes où il y a menace, tentative ou usage de violence.

Ce projet de loi vise à empêcher les accusés qui se défendent eux-mêmes à interroger leurs victimes dans ces causes. Les victimes âgés de moins de 14 ans, tout comme les témoins, pourront également bénéficier des dispositions sur le huis-clos. Ce projet de loi s'inscrit dans le cadre de la lutte à la violence envers les femmes. J'espère qu'il recevra l'approbation de la Chambre.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LE POUVOIR JUDICIAIRE

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une pétition qui demande la tenue d'une enquête publique en bonne et due forme sur les relations existant entre les institutions financières et le pouvoir judiciaire, ainsi que l'adoption d'une mesure législative qui restreigne la nomination de juges possédant des liens avec des institutions prêteuses.


3934

LES PROFITS DE LA CRIMINALITÉ

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter conformément à l'article 36 du Règlement.

Les deux premières pétitions, portant chacune 43 signatures, demandent que la Chambre adopte le projet de loi d'initiative parlementaire visant à interdire de par la loi à tout criminel de profiter d'un crime qu'il a commis.

LES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, la troisième pétition contient les signatures de 48 électeurs de la circonscription de Simcoe-Nord que je représente et prie le Parlement de maintenir la longue tradition canadienne qui consiste à commercialiser des médicaments génériques semblables aux produits de marque quant à la grosseur, à la forme et à la couleur.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le devoir et l'honneur d'intervenir à la Chambre pour présenter deux pétitions dûment certifiées par le greffier des pétitions au nom de 139 électeurs de Saanich-Les Îles-du-Golfe.

Les pétitionnaires demandent humblement au Parlement de ne pas modifier la Loi sur les droits de la personne ni la Charte des droits et libertés de manière à laisser entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe, ou l'homosexualité, en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle».

LA CONSTITUTION

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter plusieurs pétitions signées par environ 150 électeurs de ma circonscription qui viennent de Port au Port est et de Port au Port ouest, d'Agathuna, de Stephenville, de Kippens et St. George's.

(1540)

Les pétitionnaires demandent humblement qu'il plaise au Parlement de ne pas modifier la Constitution, comme le demande le gouvernement de Terre-Neuve, et de renvoyer le problème de la réforme de l'enseignement dans cette province à ce gouvernement pour qu'il le règle des moyens non constitutionnels.

L'ÉNERGIE

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une pétition dénonçant une répartition inégale des subventions fédérales versées aux producteurs d'énergie renouvelable et non renouvelable.

Les pétitionnaires soutiennent que le transfert immédiat d'une grande partie du financement de l'EACL vers l'industrie productrice d'énergie renouvelable stimulerait cette dernière et lui permettrait de répondre à la demande énorme des consommateurs qui est refoulée et qui vise l'énergie produite au Canada par processus photovoltaïque ou par éolienne. Jointe à des incitatifs fiscaux, cette mesure aiderait à créer des milliers de nouveaux emplois durables.

Les pétitionnaires invitent le Parlement à se rendre compte de l'avantage immédiat que présentent la production d'énergie propre et la création d'emplois, compte tenu de l'engagement du Canada dans le cadre d'Action 21, et à agir dans les plus brefs délais.

LES PRODUITS DE LA CRIMINALITÉ

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente une pétition, dûment certifiée par le greffier quant à sa forme et à son contenu, au nom de résidents de Pickering, d'Etobicoke, de Mississauga et d'autres collectivités. Les pétitionnaires prient le Parlement de mettre en vigueur le projet de loi C-205, parrainé par le député de Scarborough-Ouest, aussitôt que possible, afin que la loi canadienne interdise à quiconque de tirer profit de ses actes criminels.

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, voici deux pétitions qui ont circulé partout au Canada.

La première vient de Gloucester, en Ontario. Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que diriger un foyer et prendre soin d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société. Ils déclarent aussi que la Loi de l'impôt sur le revenu exerce une discrimination contre la famille traditionnelle qui choisit de prendre soin à la maison d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de gens âgés.

Les pétitionnaires demandent donc humblement au Parlement de poursuivre des initiatives visant à supprimer cette discrimination contre les familles qui décident de s'occuper à la maison de ces personnes.

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient de Kingston, en Ontario. Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut entraîner des problèmes de santé ou affaiblir les facultés, et notamment sur le fait qu'il est possible de prévenir totalement le syndrome d'alcoolisme foetal ainsi que d'autres anomalies à la naissance liées à l'alcool en évitant de consommer de l'alcool pendant la grossesse.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'adopter une mesure législative visant à rendre obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcoolisées d'étiquettes mettant en garde les futures mères et autres consommateurs contre les risques associés à la consommation d'alcool.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Est-ce d'accord?

3935

Des voix: D'accord.

M. Hermanson: Monsieur le Président, la question no 9, à laquelle j'ai demandé une réponse dans les 45 jours, figure au Feuilleton depuis septembre 1984.

Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, à qui j'en ai parlé il y a quelques jours, m'a dit que quatre ministères seulement n'avaient pas encore fourni leur réponse. Je me demande si le gouvernement pourrait dire quels sont les quatre ministères qui sont si lents à fournir une réponse à ma question.

M. Campbell: Monsieur le Président, je vais certainement aborder cette question avec les ministres concernés pour savoir à quoi ce retard peut bien tenir.

______________________________________________


3935

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-45, Loi modifiant le Code criminel (révision judiciaire de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle) et une autre loi en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

(1545)

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Le whip du gouvernement m'a demandé de reporter le vote à demain, le mardi 18 juin, à17 h 30.

LA LOI BUDGÉTAIRE CONCERNANT L'IMPÔT SUR LE REVENU

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-36, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur l'accise, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la Loi sur la marine marchande du Canada, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.

L'hon. David Anderson (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose: Que le projet de loi C-36, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur l'accise, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la Loi sur la marine marchande du Canada, modifié, soit agréé à l'étape du rapport.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (M. Kilger): Quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois? Maintenant, avec votre consentement?

Des voix: D'accord.

M. Anderson (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-36, qui donne suite aux mesures fiscales prévues dans le budget de 1995.

Les députés s'en souviendront, le budget visait non seulement à comprimer les dépenses au titre des programmes, mais aussi à garantir une plus grande équité fiscale, ce qui demeure une priorité du gouvernement.

Sur le plan de la réduction des dépenses, pendant la période de trois ans visée par le budget de l'an dernier, soit de 1995-1996 à 1997-1998, il y a eu des compressions de dépenses de 7 $ pour chaque dollar en impôts nouveaux. Les réductions de dépenses de cette période de trois ans ont totalisé 25,3 milliards de dollars, dont le fardeau a été équitablement réparti.

En ce qui concerne l'équité fiscale, nous avons proposé dans le budget de 1995 des mesures fiscales qui reposent toutes sur le principe de la justice et de l'équité dans le régime fiscal. Ces mesures assurent une administration plus rigoureuse du régime fiscal, la suppression ou la réduction d'un certain nombre de préférences fiscales et une plus grande équité dans le régime.

Depuis le dépôt du budget de 1995, le gouvernement a réagi aux préoccupations des Canadiens et des députés au sujet des répercussions de certaines de ces mesures, et des modifications ont été apportées. Le gouvernement est convaincu qu'il faut consulter les Canadiens et prendre des mesures en conséquence lorsqu'il y a lieu.


3936

Je voudrais passer rapidement en revue quelques-unes des principales mesures du projet de loi qui portent la trace de ces consultations.

Le gouvernement croit qu'il faut accorder une aide fiscale aux Canadiens pour les inciter à économiser pour leur retraite et que le coût fiscal de cette aide doit être partagé équitablement. Les changements prévus dans le projet de loi C-36 aident à atteindre cet objectif. Aux termes de ce projet de loi, la limite des contributions aux régimes enregistrés d'épargne-retraite et aux régimes à cotisations déterminées est ramenée à 13 500 $ cette année. Elle sera relevée progressivement pour atteindre 15 500 $ en 1998 et 1999. Par la suite, le budget de 1996 a bloqué la limite à 13 500 $ pour six ans. Un projet de loi qui viendra ultérieurement traitera de ces nouvelles limites.

Le projet de loi C-36 réduit également de 8 000 $ à 2 000 $ la contribution excédentaire qu'on peut faire un REER. Au départ, cette disposition visait les contribuables qui, par inadvertance, faisaient une contribution trop élevée. Le projet de loi imposera des restrictions aux contribuables qui ont fait délibérément des contributions excessives. La sanction ne vise toutefois pas les contributions en trop qui ont été faites avant le budget.

En outre, le projet de loi C-36 élimine progressivement le transfert en franchise d'impôt d'allocations de retraites à un REER. Vu les autres modifications apportées au régime d'épargne-retraite, cette mesure n'a plus d'utilité.

Les fiducies familiales sont également visées par le projet de loi. Comme les députés le savent fort bien, ces fiducies préoccupent beaucoup de Canadiens. Dans le budget de 1994, le ministre des Finances renvoyait la question de l'imposition des fiducies familiales au Comité des finances, afin que celui-ci examine, entre autres, le choix spécial permettant de proroger la règle sur la réalisation réputée aux 21 ans, choix offert par le gouvernement précédent. Pour veiller à ce que les biens en immobilisation ne soient pas conservés pour le bénéfice de plusieurs générations de bénéficiaires, il y a présomption de disposition de ces actifs tous les 21 ans. Le gouvernement précédent avait apporté des modifications afin que la date de réalisation réputée aux 21 ans soit reportée jusqu'à la mort des bénéficiaires qui ne sont pas séparés de la personne ayant établi la fiducie par plus d'une génération.

(1550)

Le projet de loi C-36 renferme deux mesures qui touchent l'imposition de ces fiducies familiales. La première porte sur le report indu des gains en capital. La deuxième a trait au fractionnement du revenu de la fiducie, grâce au mécanisme de sélection de bénéficiaires privilégiés.

Le mécanisme de sélection de bénéficiaires privilégiés permet l'attribution, pour fins fiscales, du revenu à des bénéficiaires privilégiés, sans que les bénéficiaires reçoivent dans les faits le montant qui leur est attribué. Le projet de loi C-36 ne permet que la sélection de personnes handicapées comme bénéficiaires privilégiés. On veille ainsi à ce que le revenu de la fiducie ne soit pas arbitrairement attribué à un bénéficiaire et imposé au niveau du bénéficiaire plutôt qu'à celui de la fiducie, simplement à cause du taux marginal d'imposition peu élevé s'appliquant au bénéficiaire.

Le projet de loi élimine aussi le choix permettant de proroger la règle sur la réalisation réputée aux 21 ans, c'est-à-dire de reporter indûment l'imposition des gains en capital. Ainsi, les fiducies familiales ne pourront plus être considérées comme des abris fiscaux.

Les fiducies qui ont déjà choisi de reporter l'impôt sur les gains en capital seront assujetties à une réalisation réputée de leurs éléments d'actif selon la juste valeur marchande au 1er janvier 1999.

Le budget de 1995 faisait augmenter la surtaxe sur les bénéfices des entreprises, la faisant passer de 3 à 4 p. 100. Par conséquent, cela devrait produire des recettes additionnelles s'élevant entre 115 million et 120 millions de dollars par année.

De plus, le gouvernement fait passer de 0,2 p. 100 à 0,225 p. 100 l'impôt des grandes corporations, qui s'applique à toutes les entreprises dont les capitaux dépassent 10 millions de dollars. Cette mesure devrait rapporter 150 millions de dollars de plus par année.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit l'application, entre le 26 février 1995 et le 31 octobre 1996, d'une surtaxe temporaire de 12 p. 100 sur le capital des banques et des autres grandes institutions de dépôt, aux termes de la partie VI de la Loi de l'impôt sur le revenu. On fait en sorte que ces institutions participent aux efforts de réduction du déficit.

Les députés ne sont pas sans savoir que l'application de cette surtaxe a été prolongée d'un an dans le budget de 1996. Cela sera abordé dans un autre projet de loi dont la Chambre sera saisie plus tard.

Enfin, l'augmentation de 6,66 p. 100 de l'impôt sur le revenu de placement des sociétés privées sous contrôle canadien tendra à réduire les possibilités avantageuses que représente le report.

[Français]

Au sujet du rapport d'impôt, permettez-moi de souligner que le projet de loi C-36 met fin au report d'impôt sur le revenu des entreprises.

Alors qu'auparavant elles avaient le choix de déterminer la date de leur fin d'exercice, le 31 décembre sera désormais la date de fin de l'exercice financier des entreprises.

Toutefois, le gouvernement a reçu nombre de commentaires sur cette mesure, et certaines modifications ont été apportées de manière à répondre à l'avis exprimé au sein de certaines entreprises concernant notamment les activités saisonnières.

Une méthode spéciale «de rechange» dans le calcul du revenu sera maintenant offerte à certaines entreprises qui préfèrent un exercice financier autre que l'année civile.

Ces contribuables devront procéder à des corrections de leur revenu pour prendre en compte le revenu gagné entre la fin de leur exercice financier et la fin de l'année civile.

Le projet de loi C-36 instaure également le crédit d'impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique canadienne dont bénéficieront directement les entreprises de production cinématographiques canadiennes. Il remplace l'ancienne déduction pour amortissement, un programme périmé d'abri fiscal qui était motif de préoccupation pour les producteurs de films canadiens portant visa.


3937

Le producteur cinématographique recevra la totalité des avantages tirés du nouveau crédit d'impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique canadienne. En outre, le crédit sera offert exclusivement aux entreprises dont la principale activité d'affaires est la production au Canada de films ou vidéoclips canadiens. Cette clause expresse devrait restreindre le recours au crédit en vue d'éviter l'imposition de revenus d'autres sources.

(1555)

[Traduction]

Permettez-moi de signaler maintenant d'autres points marquants du projet de loi. Le projet de loi C-36 prévoit une aide fiscale spéciale accrue pour les dons de biens écosensibles. Le don d'un bien écosensible certifié à un organisme de bienfaisance ou à une municipalité ne sera assujetti à aucune restriction quant au revenu annuel du donneur. À l'heure actuelle, la limite est de 20 p. 100 du revenu du donneur.

Le projet de loi C-36 élimine le gonflement de certains crédits d'impôt pour des activités de recherche scientifique et de développement expérimental (RS et DE) et améliore l'application de ces mesures incitatives.

Les dépenses donnant droit à des crédits d'impôt de RS et DE seront limitées et les sociétés de RS et DE sans but lucratif qui sont exemptées de l'impôt devront faire rapport de leurs activités et dépenses de RS et DE.

Une autre mesure prévue dans ce projet de loi vise à protéger les retenues à la source en faisant que les créanciers garantis qui nuisent à la remise de retenues à la source soient tenus de les remettre avec intérêt et amende au même titre que les contribuables.

Avec le projet de loi C-36, les personnes âgées ayant un revenu supérieur à 53 215 $ qui doivent remettre une partie de leurs prestations de sécurité de la vieillesse au moment où elles présentent leur déclaration de revenu verront l'impôt retenu sur les prestations à mesure qu'elles sont versées.

Enfin, Revenu Canada pourra échanger le numéro d'entreprise, soit le numéro d'enregistrement des entreprises, avec d'autres ministères fédéraux et provinciaux qui ont légalement droit à cette information. Cela réduira les chevauchements et les doubles emplois et accroîtra l'efficacité des entreprises et du gouvernement.

Voilà quels sont, en résumé, les points marquants du projet de loi C-36. Celui-ci contient des mesures fiscales directes qui illustrent l'engagement du gouvernement à l'égard d'une fiscalité juste et équitable. Je me réjouis aussi que le projet de loi, dans sa forme actuelle, reflète les préoccupations des Canadiens et des députés auxquelles nous avons répondu.

Je tiens à remercier les députés pour l'aide accordée à toutes les étapes de l'étude du projet de loi. J'exhorte vivement mes collègues à adopter le projet de loi C-36.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur la troisième lecture du projet de loi C-36, projet de loi qui met principalement en application des mesures du budget 1995, mais aussi quelques mesures du dernier budget de 1996 du ministre des Finances.

Comme le gouvernement a l'habitude de le faire avec la majorité des projets de loi, il a mis une série de mesures éparses, disparates, qui visent des clientèles différentes à l'intérieur d'un même projet de loi. Bien entendu, quand on s'attarde à certains articles du projet de loi C-36, on peut dire qu'il contient des choses positives. Effectivement, il y a des choses positives là-dedans, lorsqu'on parle du report d'impôt, des dons de terres écosensibles, des mesures touchant des numéros d'entreprises et surtout du crédit d'impôt pour l'industrie cinématographique, section que nous avons appuyée avec vigueur lors des travaux du Comité des finances, puisqu'elle est bénéfique à l'ensemble de l'industrie.

Mais là où cela ne fonctionne plus, c'est lorsque, au travers de toutes ces mesures positives, fidèle à son habitude, le gouvernement introduit quelques mesures particulièrement négatives et sensibles ou des mesures qui sont tellement couvertes de velours rose pour présenter à la population un semblant de mesures concrètes et positives en sa faveur, que là, cela ne fonctionne plus. Dans le projet de loi C-36, c'est le cas.

Rappelez-vous, lors du budget du ministre des Finances, lorsqu'il nous a annoncé en grandes pompes que oui, le gouvernement avait entendu les hauts cris de l'opposition officielle, qu'il allait réformer le régime des fiducies familiales. Trois constatations ont été faites par l'opposition officielle à ce moment-là. La première, c'est que nous étions contents parce qu'enfin, le gouvernement entendait l'opposition officielle et ses arguments et procédait à une réforme de ce régime odieux. La deuxième, ce fut une réaction de déception, parce que les mesures qu'on disait mettre en application ne le seraient qu'à partir de 1999.

Alors, s'il y avait un tant soit peu de mesures positives pour corriger les iniquités fiscales liées aux fiducies familiales, on donnait l'occasion à ceux et celles qui profitaient de ce régime inéquitable de se préparer, d'ici 1999, et de transférer des fonds, des actifs de leurs fiducies familiales vers d'autres véhicules de planification fiscale tout aussi puissants que le premier.

(1600)

Je vais m'attarder à deux mesures du projet de loi, celle touchant les fiducies familiales, bien entendu, en utilisant un exemple récent pour illustrer mes propos, celui que nous a servi le vérificateur général, et je terminerai avec une mesure positive du projet de loi C-36, soit celle qui touche les crédits d'impôt pour production cinématographique.

Dans le premier cas, on parle des fiducies familiales. Comme je le mentionnais, nous attendions cette mesure depuis longtemps et le gouvernement nous a déçus. Pourquoi nous a-t-il déçus? Lorsque l'opposition officielle, le Bloc québécois, dès la campagne électorale de 1993, a souligné le problème lié au régime des fiducies familiales, nous poursuivions deux objectifs. Le premier était d'illustrer à partir de cet exemple que la fiscalité canadienne est malade, que la fiscalité canadienne a besoin d'être réformée, pas par des petites réformettes, mais par des réformes en profondeur.

Le deuxième objectif que nous poursuivions était d'en arriver à démontrer qu'il y avait des gens au Canada qui ne payaient pas leur part d'impôt, et que ce n'était pas les plus pauvres, comme c'est encore le cas aujourd'hui, mais les plus riches. Ceux et celles qui ont l'occasion d'utiliser ce véhicule des fiducies familiales, ce ne sont pas les gens à revenu moyen, ce ne sont pas les gens avec des revenus normalement élevés, ce ne sont pas des gens qui ont moins


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de 200 000 $ par année, ce ne sont pas des gens qui ont 35 000 $ de revenu. Pour la plupart, ceux qui profitent des fiducies familiales comme outil de planification fiscale sont pour la plupart des gens allant de riches à très riches.

Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour répondre à nos deux objectifs? Premièrement, il a dit: «Nous allons rétablir la règle de 21 ans.» Qu'est-ce que cette règle de 21 ans? C'est très simple. Les conservateurs, avant l'actuel gouvernement, avaient changé cette règle qui existait auparavant et qui faisait en sorte que, au bout de la 21e année de la création d'une fiducie familiale, les fiduciaires devaient réaliser leur actif, autrement dit faire une évaluation de leur actif et payer le gain en capital accumulé durant ces 21 années.

Les conservateurs avaient changé cette règle pour faire en sorte que, jusqu'à la mort du dernier bénéficiaire, on puisse reporter cet impôt à payer sur la taxation en gains de capital. Donc, si le bénéficiaire de cette fiducie vivait jusqu'à 80 années, pendant 80 ans, on ne payait pas d'impôt sur les gains en capital.

C'était vraiment inéquitable et franchement inéquitable pour tout le monde. Mais nous, ce que nous demandions, ce n'était pas uniquement de revenir à la règle des 21 ans, comme le propose le projet de loi C-36, mais d'en arriver à réviser l'ensemble des fiducies familiales et non pas revenir uniquement à la règle de 21 ans, parce que déjà, si on étale de l'impôt sur 21 ans, entre la première et la 21e année, laissez-moi vous dire qu'un dollar d'impôt la première année ne vaut pas exactement la même chose qu'un dollar d'impôt la 21e année. Déjà, nous questionnions le principe, la logique sous-jacente à cette règle de 21 ans, encore plus à la règle de 80 ans.

Deuxièmement, et cela a été le cas non seulement durant la campagne électorale de 1993, mais aussi dans toutes les sessions où on a pu le faire, où l'opposition officielle a pu le faire, dans toutes les sessions du Comité des finances, nous demandions de réviser l'ensemble, de revoir de fond en comble la fiscalité canadienne en faisant en sorte que, dans des cas comme les fiducies familiales, avec des véhicules comme les fiducies familiales conjugués à d'autres dispositions de la Loi de l'impôt, des conventions fiscales internationales, etc., toutes ces lois intégrées ne puissent pas servir de prétexte à de riches familles canadiennes pour éviter de payer leur dû à Revenu Canada.

(1605)

Le gouvernement ne nous a pas écoutés. Le gouvernement nous présente C-36 où on améliore un peu les règles des fiducies en passant de 80 ans, à peu près, de réalisation d'actifs à 21 ans. Mais une révision globale ferait en sorte qu'on étudie le régime des fiducies familiales, la Loi de l'impôt, certaines dispositions fiscales générales et les conventions internationales; il faut revoir l'ensemble.

Il faut voir qu'en utilisant chacune de ces dispositions éparses on n'en arrive plus pour les grandes familles les plus riches au Canada d'éviter de payer leurs taxes et leurs impôts au gouvernement fédéral.

Pour illustrer ce que nous entendions, nous de l'opposition officielle, depuis deux ans et demi de combat ou presque, sur le régime des fiducies familiales et sur la révision de la fiscalité globale, récemment le vérificateur général, lorsqu'il a déposé son rapport le 7 mai dernier, a mis vraiment en lumière ce que nous soupçonnions depuis longtemps et que nous dénoncions jour après jour, ici à la Chambre des communes et au Comité permanent des finances ou au Comité permanent des comptes publics présidé par mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans.

Le vérificateur général nous a dit dans son rapport qu'en décembre 1991, un propriétaire de fiducie familiale avait transféré aux États-Unis deux milliards de dollars d'actifs sans payer un cent d'impôt. Ce cas de décembre 1991, tout le processus, tous les règlements et toute l'analyse utilisés pour transférer ces milliards exempts d'impôts aux États-Unis n'a été rendu public qu'en mars et en mai, cette année, lorsque le vérificateur général a dénoncé ce cas.

Comment en est-on arrivé à transférer ces deux milliards? Exactement de la façon dont on le disait à chaque fois qu'on se levait ici, en Chambre, pour questionner le ministre des Finances sur le régime des fiducies familiales. On a utilisé les dispositions des fiducies familiales. On a utilisé la Loi de l'impôt sur les gains en capital. On a utilisé l'obscurité entourant la Loi de l'impôt pour les non-résidants et cinquièmement, on a utilisé la convention fiscale signée entre le Canada et les États-Unis.

On a fait un mélange de tout ça. Pour faire ce mélange, il faut être millionnaire et savez-vous pourquoi? Parce qu'il faut faire appel aux plus grands fiscalistes du Canada pour savoir comment utiliser toutes ces règles de la fiscalité, comment utiliser le régime des fiducies familiales, comment être vraiment à l'affût des nouvelles décisions rendues par Revenu Canada ou des nouvelles analyses faites par Revenu Canada. Ce que le vérificateur général nous a dit est l'illustration exacte de ce que nous présentons ici depuis belle lurette, depuis que nous avons été élus. Deux milliards de dollars d'actifs transférés aux États-Unis par un résidant canadien sans qu'un sou d'impôt soit prélevé ni maintenant ni dans l'avenir.

Ce cas illustre tellement bien les vices du régimes, illustre tellement bien les relations entre le régime et les grands fiscalistes représentant des familles de millionnaires et de milliardaires canadiens que le gouvernement fédéral s'est senti obligé, suite à la publication du rapport du vérificateur général, de tenter d'étouffer l'affaire.

C'est un signal double. Le premier est qu'il n'y a aucune volonté politique de l'autre côté pour vraiment corriger les vices de la fiscalité et en particulier ceux liés aux différents jeux qu'on peut faire entre les fiducies familiales, l'impôt général, les conventions fiscales et, deuxièmement, le gouvernement a des choses à cacher.

Pourquoi une telle affirmation? Parce que si on avait cette volonté de corriger les choses, ce n'est pas la simple disposition sur les fiducies familiales qu'on retrouverait dans le projet de loi C-36 avec deux mesures mineures, à mon avis, mais on ferait d'abord toute la lumière sur le cas des fiducies transférées aux États-Unis. Une fiducie de deux milliards, il faut que quelqu'un ait de l'argent, sans paiement d'impôt. On ferait toute la lumière là-dessus et deuxièmement, on réviserait rapidement l'ensemble de la fiscalité au vu et au su de tout le monde, pas à l'insu de tout le monde, pas derrière des portes closes.

(1610)

On a eu une petite amélioration par rapport à ce que le ministre des Finances nous annonçait lors de son dernier budget. Au lieu d'être un groupe de huit experts derrière des portes closes, ils sont toujours huit experts derrière des portes closes, mais ils sont obligés de faire rapport au Comité permanent des finances, dans toute étape de révision de la fiscalité des entreprises en particulier. C'est déjà une légère amélioration, mais comme je le démontrerai plus tard il faut être vigilant, parce que la volonté politique n'est pas là de réviser quoi que ce soit d'un système qui sert bien les gens qui sont près du pouvoir, pour ne pas dire aussi les gens qui sont au pouvoir.


3939

Pourquoi j'affirme que j'ai une analyse négative du gouvernement à cet égard? Justement. Les premiers jours suivant la sortie du rapport du vérificateur général sur les fiducies familiales cette année, le 7 mai dernier, le Comité permanent des comptes publics reçoit, comme à son habitude, c'est la normalité, le rapport du vérificateur général. Je rappelle que le Comité permanent des comptes publics est présidé par mon collègue de Beauport-Montmorency-Orléans et qu'un autre membre éminent de ce comité est le député de Trois-Rivières. Ce comité reçoit le rapport du vérificateur général et normalement, il l'analyse de a à z.

Lorsqu'est venu le temps d'analyser le chapitre I où on retrouvait le scandale de deux milliards de fiducies familiales dont je faisais mention, le député libéral de Brome-Missisquoi, le frère de l'autre, disait: «Il faut analyser rapidement et de toute urgence ce cas-là. C'est un scandale, un des pires scandales.» Il a même fait deux opérations de communication majeures. Il est sorti et il a fait une déclaration aux médias électroniques, à la télévision, disant qu'il y a un scandale derrière tout ça et qu'il faut connaître les dessous de tout ça parce que c'est une histoire qui est vraiment nébuleuse.

Il a même écrit un communiqué de presse émanant de son bureau et répétant exactement la même chose. Il y a un scandale là-dedans. Il faut revoir l'ensemble des fiducies familiales, la politique fiscale et surtout faire la lumière sur le cas d'une fiducie de deux milliards de dollars transférée aux États-Unis exempte d'impôt à partir des trous de la fiscalité.

Ça n'a pas duré deux jours son histoire. Aussitôt qu'il y a eu la rumeur que ça pouvait être une très riche famille canadienne, qu'il pouvait y avoir non pas seulement du bleu, mais si on grattait en arrière de la décision conservatrice de 1991, peut-être qu'on arriverait à trouver du rouge, là, l'attitude a complètement changé. On n'a pas revu le député de Brome-Missisquoi pendant plus d'une semaine. Il était très occupé dans son comté, disait-on.

Pendant ce temps-là on s'est livré, du côté du gouvernement, à une opération assez spectaculaire de camouflage de la vérité. On a transféré le mandat qui, normalement, est dévolu au Comité permanent des comptes publiques qui peut agir en tant qu'une véritable commission d'enquête. Il a tous les pouvoirs d'agir comme une commission d'enquête, et il a le mandat de le faire à partir du rapport du vérificateur général. On a transporté le chapitre I seulement, pas l'ensemble du rapport du vérificateur général, où celui-ci mettait le doigt sur le scandale des milliards qui sortent et qui s'en vont aux États-Unis sans qu'on paie d'impôt.

Là, le mandat donné au Comité permanent des finances est à peu près ceci: Analyser la politique fiscale de façon générale, surtout celle qui s'adresse aux résidants et aux non-résidants, de façon telle que des cas qui ont pu se produire par le passé ne se reproduisent plus dans l'avenir. C'est ça, le mandat du Comité permanent des finances.

Jamais, si on se fie au gouvernement, la lumière ne sera faite sur le scandale de 1991. Jamais la lumière ne sera faite sur le système qui est là parce qu'il fait en sorte-on s'en est aperçu la semaine dernière-que d'éminents fiscalistes-parce qu'il n'y a que des experts qui peuvent comprendre les méandres de la fiscalité-qui sont collés sur Revenu Canada, sur les hauts fonctionnaires de Revenu Canada, les sous-ministres, sous-ministre adjoints, les analystes senior, permettent que ce système continue, se perpétue, profite à une poignée de privilégiés, une poignée d'initiés.

Aux États-Unis, lorsqu'on parle des initiés, c'est un crime grave; c'est quasiment le crime le plus grave après un meurtre au premier degré. Aujourd'hui, on le voit, le vérificateur général met des choses en lumière.

(1615)

Il énonce un processus dont il manque à peu près 95 p. 100 des cartes, des informations. Il nous dit que d'une semaine à l'autre, on a changé complètement d'idée dans l'interprétation qu'on faisait des lois fiscales qui ont conduit au transfert de deux milliards de dollars aux États-Unis sans impôt. Cela est passé d'un refus de Revenu Canada, en passant par des pressions du ministère des Finances d'on ne sait trop qui, à une décision finale qui permettait ce transfert de la fiducie aux États-Unis, exempte d'impôt.

Quand on est en face de choses comme ça, cela devient inquiétant. C'est la raison pour laquelle le projet de loi C-36, qui contient par ailleurs de bonnes mesures, mais qui noie le poisson des fiducies familiales, comme on tente de noyer le chapitre 1 du rapport du vérificateur général, ça ne fonctionne plus.

Malgré mon jeune âge, j'ai suivi les débats de la Chambre des communes, surtout les dossiers concernant les finances publiques, le vérificateur général, les comptes publics, et même les procès-verbaux des travaux en Chambre. J'avoue que je n'ai jamais vu une situation comme je vis depuis environ un mois où des députés du gouvernement, membres du Comité des finances, tentent de dénigrer le vérificateur général, de dénoncer son attitude.

Le vérificateur général est l'homme le plus respecté et le plus respectable de la haute fonction publique. Pourquoi? Parce qu'il est redevable au Parlement. Il vient rendre compte au Parlement, au nom des ministères, de la bonne ou mauvaise gestion des finances publiques. Il force aussi les fonctionnaires à rendre des comptes. Là, on vient dire-et ça, je l'ai entendu de la bouche même du président du Comité des finances-que le vérificateur général a peut-être erré un peu. On a eu droit à un interrogatoire en règle par les membres libéraux du Comité des finances, non pas pour éclairer la situation ou pour éclaircir certains points qui sont particulièrement complexes de la fiscalité liés aux fiducies familiales, mais pour «planter», coincer le vérificateur général.

Pour ceux qui s'intéressent encore plus à cette question, et je pense qu'il va y en avoir de plus en plus parce que les gens en ont assez de ces histoires, du petit système où les gens se connaissent et vont jouer au golf ensemble en Floride, la semaine dernière, six fiscalistes comparaissaient defant le comité alors qu'on y étudiait la question des fiducies familiales, qui devrait nous concerner au premier chef dans le projet de loi C-36. Sur les six fiscalistes, un avait été invité par l'opposition officielle et un autre, par le deuxième parti d'opposition.


3940

Croyez-le ou non, les quatre fiscalistes invités par le gouvernement ont fait un tour de table vers le milieu de la soirée pour expliquer leur analyse du cas dénoncé par le vérificateur général et de tout le système qu'on appelle le système des décisions anticipées à Revenu Canada permettant d'avoir des analyses, pour les contribuables, sur certaines dispositions fiscales. Le jeu s'est poursuivi. Les fiscalistes ont douté de l'analyse du vérificateur général, des fiscalistes qui gravitent autour du pouvoir, du ministère du Revenu, du sous-ministre du ministère du Revenu, de ses principaux conseillers, et de la division des décisions anticipées qui a rendu une décision en décembre 1991 quant aux transferts de la fiducie familiale de deux milliards de dollars aux États-Unis, exempte d'impôt. Ce sont des gens qui gravitent aussi autour du sous-ministre des Finances, M. Dodge, et de M. Farber qui est un conseiller spécial qui fait plus de politique, comme j'ai pris l'habitude de dire, que son ministre responsable.

La semaine dernière, était étalé là ce qu'on soupçonne toujours, lorsqu'on est un contribuable moyen, c'est-à-dire qu'il y a des gens qui en profitent rondement et que ce ne sont pas les faibles, moyens ou hauts revenus, mais les plus riches Canadiens et Canadiennes, des millionnaires ou des milliardaires qui sont représentés par ces fiscalistes. On a vu que le pouvoir se jouait là. Ces quatre fiscalistes dénigrent l'homme le plus respecté de la fonction publique fédérale et de l'assemblée parlementaire ici. Ces fiscalistes qui, normalement, nous regardent d'une certaine hauteur, en disant: «Écoutez, nous comprenons une fiscalité qui est tellement complexe, mais vous ne la comprenez pas et s'il vous plaît, ne vous posez pas de questions», là, ils étaient nerveux pour se raidir, se braquer contre le vérificateur général, tant et si bien qu'on a été obligés de faire une mise au point.

(1620)

Ce qu'on posait comme question aux fiscalistes, c'est: Est-ce qu'on a eu raison d'analyser, de la façon dont on l'a fait, les dispositions fiscales qui ont permis ce transfert de deux milliards de dollars exempté d'impôt? On ne leur demandait pas de porter un jugement politique et de dire: «Vous ne devriez pas vous poser de questions là-dessus. Le vérificateur général n'aurait pas dû dénoncer cette chose.»

M. Goodman, un fiscaliste réputé, est venu nous dire, dans le cadre des travaux de ce Comité, télévisés aussi: «C'est trop complexe, ces choses-là. Le vérificateur général n'aurait jamais dû dénoncer cette chose. Il a jeté un discrédit sur le processus qui conduit aux décisions anticipées de Revenu Canada et qui ont permis de transférer l'argent des milliardaires aux États-Unis sans payer d'impôt. Vous avez-et ce sont ses paroles-vous êtes en train de semer un état de siège face à Revenu Canada. Revenu Canada, les hauts fonctionnaires ne voudront plus rendre ce genre de décision.»

Mais tant mieux s'ils n'en rendent plus, parce que les deux milliards qui ont été transférés aux États-Unis, ce sont des centaines de millions de dollars en impôts qui n'ont pas été prélevés ici et ce sera aux Québécois et aux Canadiens de payer pour cela.

Je disais donc que l'on fait face à un cas qui a d'ailleurs été dénoncé par un journaliste fort connu du Journal de Montréal,M. Martin Leclerc. Le 10 juin dernier, M. Leclerc disait même: «On veut sa tête-en parlant du vérificateur général-parce qu'il a dénoncé le scandale des fiducies familiales.» On disait même: «Le libéral-je ne nommerai pas le nom, mais c'est un collègue qui est président du Comité des finances-tente de le discréditer».

Discréditer le vérificateur général. Tout le monde a vu cette chose. En même temps, un sous-titre: Trois grands mandarins de Revenu Canada, qui n'ont de comptes à rendre à personne, Gravelle, Dodge et Farber, laissent un milliardaire transférer deux milliards de dollars aux États-Unis sans payer d'impôt. On n'est plus les seuls à voir que l'iniquité fiscale est instaurée en système et peut-être depuis plusieurs décennies aussi.

Comme je vous le mentionnais tout à l'heure, des gens parmi les fiscalistes qui ont comparu la semaine dernière sur les fiducies familiales, qui devaient nous donner des trucs pour boucher les trous de la fiscalité, ont réduit leur intervention à dénigrer le travail fait par le vérificateur général et à dénoncer les pauvres parlementaires que nous sommes, qui essayons de connaître la vérité sur ce processus de 1991 qui a conduit à cette décision de transférer deux milliards de dollars et qui a servi de précédent possiblement depuis ce temps pour transférer d'autres centaines de millions aux États-Unis. Ils sont venus nous dire: «Ne vous posez pas de question.»

Il y a un gros problème. C'est tellement un gros problème que certains des fiscalistes qui étaient là, lorsqu'on leur a posé la question: Est-ce que vous êtes liés d'une façon ou d'une autre avec des fonctionnaires ou d'anciens hauts fonctionnaires qui ont pu passer par Revenu Canada ou par le ministère des Finances, ayant pu être des acteurs dans l'analyse qui a conduit à la décision de 1991 de transférer deux milliards exempts d'impôt de dollars aux États-Unis, ou ayant pu prendre connaissance de cette décision rendue par Revenu Canada et qui n'a été rendue publique qu'en mars 1996, en mars dernier, et qui auraient pu, à ce moment-là, en faire bénéficier d'autres, agir comme initiés d'une décision, d'un précédent créé en 1991 et connu par une poignée de gens seulement? Lorsqu'on leur posait cette question, les gens ne répondaient pas, alors que nous avons mis le doigt sur un cas, par exemple.

Il y avait un fiscaliste qui était là, qui représentait Stikeman Elliott, une boîte de fiscalistes professionnels très connue, et jusqu'à tout récemment, il y avait un M. Tilack qui travaillait à la division des décisions anticipées de Revenu Canada qui aurait pu prendre connaissance de la décision rendue en 1991 et en faire profiter Stikeman Elliott, qui est une boîte de fiscalistes qui donne des conseils aux millionnaires, aux milliardaires et à d'autres. Lorsqu'on a demandé à M. Wilkie qui était là, représentant de Stikeman Elliott, s'il y avait des contacts avec certaines de ces personnes, il nous a dit en blague que oui, il y avait un ancien ministre qui était là, en riant.

Mais lorsqu'on lui a nommé M. Tilack, par exemple, il riait jaune. La même chose pour le conseiller spécial aux finances,M. Farber, qui était derrière et qui s'est levé, qui est sorti avec la face longue aussi.

(1625)

Au fur et à mesure qu'on met en lumière les liens qui existent entre les boîtes de fiscalistes reconnues, certaines de ces boîtes, et les hauts fonctionnaires, sous-ministres, sous-ministres adjoints et


3941

autres de Revenu Canada et du ministère des Finances, on leur fait mal un peu.

Si on arrivait à briser ce système de contacts privilégiés, de décisions anticipées pour les millionnaires et les milliardaires, ces firmes feraient peut-être un peu moins d'argent qu'elles n'en font aujourd'hui en prodiguant leurs précieux conseils aux millionnaires et aux milliardaires pour qu'ils sauvent de l'impôt.

Elles feraient moins d'argent en prodiguant des conseils étriqués, comme ceux qui ont conduit, à partir de cinq dispositions de la fiscalité nationale liée aux conventions signées par le Canada et les États-Unis, au transfert de deux milliards en franchise d'impôt. Elles feraient moins d'argent en comprenant ces choses-là. Elles feraient aussi moins d'argent si, à l'invitation du vérificateur général dans son rapport de 1993, on rendait publiques toutes les décisions anticipées.

Il n'est pas normal que dans le cas des fiducies familiales de 1991, on ait fait jouer cinq dispositions ou à peu près de la fiscalité; qu'on ait conservé secrète, face au Parlement, cette possibilité de transférer des fonds; que ni Revenu Canada ni le ministère des Finances, aux dires des sous-ministres et des sous-ministres adjoints, n'aient cru bon d'informer les élus de l'époque de quelque façon que ce soit des failles dans l'interprétation fiscale qui ont permis que deux milliards de dollars soient transférés sans impôt. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. On est dans le trouble, comme on dit, si on laisse se perpétuer ce genre de choses.

Quand on pointe du doigt le système érigé depuis plusieurs années entre Revenu Canada et les fiscalistes ça commence à faire mal et le gouvernement commence à paniquer. On ne sait plus où se lancer, on bâillonne le Comité des comptes publics qui normalement aurait dû analyser ce cas, on transfère la responsabilité au Comité des finances à qui on donne un mandat le plus large possible afin que la lumière ne soit jamais faite.

Je n'ai jamais vu un tel cas ni un tel acharnement du côté du gouvernement à vouloir voiler la vérité, à vouloir cacher à l'ensemble des Québécois et des Canadiens tous les dessous de cette nébuleuse affaire qualifiée comme telle par le vérificateur général et par bien des observateurs depuis qu'il a mis ce cas en lumière.

Je vous dirais que cela augure très mal pour le processus de révision générale de la fiscalité que le ministre a annoncé récemment. Vous vous rappelez que lors du dernier budget en 1996, le ministre des Finances, nous annonçait qu'il mettait en place un groupe de huit experts pour réviser la fiscalité, derrière des portes closes, et que ce groupe nous présenterait son rapport à l'automne.

Depuis, le ministre des Finances a changé un peu d'idée lorsque le scandale a éclaté concernant les fiducies familiales, il nous a mis dans le coup, comme on dit. Les membres du Comité permanent des finances pourront suivre la progression des travaux des huit experts et avoir un rapport de suivi tout au long de leur travaux avant la publication du rapport final.

À en juger par l'attitude du gouvernement dans le dossier précis des fiducies familiales dénoncé par le vérificateur général, je me demande jusqu'à quel point il y aura une volonté de faire en sorte que la fiscalité canadienne soit équitable pour chacun et non pas équitable seulement dans un sens, c'est-à-dire équitable uniquement pour une poignée de gens qui peuvent bénéficier des mêmes informations, du même soutien monétaire face à des fiscalistes qui comprennent très bien la complexité de la fiscalité et qui savent en tirer profit énormément non seulement pour les familles riches mais aussi pour leurs propres bénéfices.

C'est ce que je voulais dire au sujet des fiducies familiales. Ce ne sont pas les dispositions qu'on retrouve dans le projet de loi C-36 qui changera quoi que ce soit au scandale dénoncé par le vérificateur général et aux autres qu'on ne connaît pas, mais qui se sont probablement produits à partir du précédent créé par ce cas de deux milliards d'actifs transférés exempts d'impôt.

Permettez-moi de conclure avec une disposition du projet de loi C-36 dont nous acceptons les termes et que nous appuyons. Il s'agit de la mesure touchant les crédits d'impôt pour production cinématographique. J'ai l'honneur de vous signaler que l'opposition officielle a travaillé très fort pour que cette disposition soit inscrite.

(1630)

Je pense en particulier à mon collègue de Richmond-Wolfe, porte-parole de l'opposition officielle en matière de patrimoine, qui a insisté pour que cette disposition, amendée lors de l'examen par le Comité des finances, soit adoptée avant l'ajournement pour la saison estivale.

Nous avons insisté puisque cette disposition sera fortement bénéfique au domaine cinématographique et à d'autres représentants du monde culturel tels l'ADISQ ou le Spectra de M. Rozon. Nous sommes fiers d'avoir contribué à l'avancement du débat sur cette clause particulière.

Malheureusement, comme je vous le disais tout à l'heure, le gouvernement a le défaut de tout mettre dans le même paquet, des bonnes mesures très positive, avec des mesures qui sont, à mon avis, plus que vicieuses comme celles entourant les fiducies familiales et de demander au Parlement de se prononcer. Comme je vous le dis, il y a de bonnes mesures comme celle du crédit d'impôt pour les productions cinématographiques, mais à cause des mauvaises mesures, je me vois dans l'obligation de demander à mes collègues de voter contre le projet de loi.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-36, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur l'accise, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la Loi sur la marine marchande du Canada.

D'abord, je voudrais faire quelques observations au sujet du gouvernement libéral et de ce qu'il propose dans ces mesures budgétaires, que met en oeuvre ce projet de loi. Ensuite, je parlerai de ce que le Parti réformiste propose dans le domaine de l'imposition et de ce que les réformistes feront quand ils formeront le gouvernement.

Il y a trois mois, je me souviens, on a beaucoup applaudi le ministre des Finances quand il a promis dans son budget de ne pas augmenter l'impôt sur le revenu des particuliers, ni l'impôt sur le revenu des sociétés, ni la taxe d'accise, bref de ne pas augmenter les impôts. Je ne pense pas que les Canadiens croient vraiment ce que le


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ministre des Finances leur a dit dans le discours du budget. Tout à l'heure, je vous lirai la liste des augmentations d'impôt.

Le ministre des Finances semble s'attendre à ce que les Canadiens le remercient de faire semblant de maintenir le cap sur sa promesse de ne pas augmenter les impôts. Je trouve consternant qu'il ose dire ce qu'il dit à la Chambre, même si c'était vrai, mais ça ne l'est pas. Je trouve consternant qu'il tente de rassurer les Canadiens en leur disant, même si c'était vrai, qu'il n'y aura pas de hausses d'impôt.

Les Canadiens s'attendent non seulement à ce que les impôts n'augmentent pas, mais à ce qu'ils diminuent. Les Canadiens ont vu les impôts augmenter année après année depuis trente ans. Il y a eu plus de 1 000 hausses d'impôts depuis trente ans sous les conservateurs et les libéraux. Les Canadiens souhaitent maintenant voir leurs impôts réduits. Ils viennent au deuxième rang des habitants des pays du G-7 qui sont le plus lourdement imposés, précédés seulement des Allemands. C'est consternant.

Entre 1985 et 1993, les impôts fédéraux de la famille canadienne moyenne ont augmenté de manière spectaculaire. Avant le dépôt du dernier budget, les Canadiens ne pouvaient tout simplement plus accepter de nouvelles hausses d'impôt.

Le ministre des Finances a donc décidé de ne pas augmenter expressément les impôts, préférant passer les hausses en douce. Dans un instant, je vais énumérer les hausses d'impôt qui sont survenues même si le ministre des Finances prétend qu'il n'y en a pas eu.

Je voudrais tout d'abord résumer la liste que j'ai devant moi. Elle comprend les hausses d'impôts prévues depuis 1994-1995 jusqu'à 1998-1999. Il s'agit des hausses d'impôt qui ont été proposées, année après année, par le gouvernement et le ministre des Finances.

(1635)

En 1994-1995, le total s'établissait à 575 millions de dollars. En 1995-1996, la situation s'aggrave. Les hausses d'impôt totalisent 2,3 milliards de dollars. Le ministre des Finances s'est targué de ce que, pour cet exercice, il n'y avait pas de hausses d'impôt importantes, les réductions étaient nettement supérieures aux hausses d'impôt.

Pour 1996-1997, les hausses d'impôt totalisent 3,1 milliards de dollars. Pour 1997-1998, seulement à cause des budgets que le ministre des Finances a déposés, les hausses d'impôt atteindront 3,2 milliards de dollars. Voilà autant d'argent que l'on ira chercher dans les poches des Canadiens. C'est inacceptable.

Les budgets du ministre des Finances vont jusqu'à 1998-1999 et même au-delà. Dans ses budgets passés, le ministre des Finances a déjà annoncé plus de 400 millions de dollars en nouveaux impôts pour 1998-1999. Il reste encore un ou deux budgets à venir avant 1998-1999.

Le ministre des Finances prétend être contre les hausses d'impôts, pourtant, nous avons une liste de majorations qui est trop longue pour que j'aie le temps de la lire au cours des minutes dont je dispose. C'est intolérable.

Je vais énumérer les hausses d'impôts découlant du budget de cette année. Souvenez-vous que le ministre des Finances avait présenté ce budget en déclarant sous les applaudissements: «Nous n'augmenterons pas les impôts des particuliers. Nous n'augmentons pas l'impôt sur les sociétés. Nous n'augmentons pas la taxe d'accise. En fait, nous n'augmentons aucun impôt ou taxe.»

Je vais donc expliquer comment le ministre des Finances n'a pas augmenté les impôts dans le budget de cette année. Premièrement, depuis que les libéraux sont arrivés au pouvoir, ils ont réussi à aller chercher, au bas mot, entre neuf et onze milliards de dollars de plus dans les poches des contribuables. Le budget de 1996 ne contenait explicitement aucune nouvelle taxe, au moins aucune que les Canadiens pouvaient déceler facilement. En tout cas, il n'y en avait pas comme la taxe sur l'essence qui nous a frappés à la pompe l'an dernier. À cet égard, ce que disait le ministre des Finances était exact. Cependant, je pense que les Canadiens s'attendent à plus de transparence et de précision de la part d'un ministre des finances.

Ainsi, avec les hausses d'impôts déjà prévus, le gouvernement accroîtra ses recettes de 145 millions de dollars au cours des trois prochaines années en réduisant le crédit accordé aux placements dans les sociétés de capital de risque administrées par les syndicats et en réduisant la contribution maximale à ces sociétés pour la ramener à 3 500 $. Cela s'est fait une année où le ministre des Finances a déclaré qu'il n'y avait pas de hausses d'impôts.

En abaissant, de 71 à 69 ans, l'âge auquel il est obligatoire de retirer les fonds du REER, le gouvernement accroîtra ses recettes d'environ 100 millions de dollars en 2000. «Il n'y a pas de hausses d'impôts» qu'il disait!

En outre, le gouvernement a annoncé qu'il n'acceptait plus la déduction des frais d'administration des REER, ce qui lui rapporte encore 10 millions de dollars. Il a aussi gelé le maximum des cotisations à 13 500 $ par année jusqu'à l'an 2003. Le gouvernement se contredit ouvertement. D'une part, il s'attend à ce que les Canadiens assument davantage de responsabilités dans la préparation de leur propre retraite, mais il dit et redit que les assises financières du Régime de pensions du Canada ne sont pas solides.

Dans son budget de cette année, le ministre des Finances a mis fin à l'universalité de la sécurité de la vieillesse. Pourtant, pendant la dernière campagne électorale, il ne se gênait pas pour reprocher au Parti réformiste de préconiser cette mesure. Cependant, le gouvernement a mis fin à l'universalité à un niveau de revenu beaucoup moins élevé que ce que le Parti réformiste a jamais proposé.

(1640)

Le fait de limiter les cotisations à un REER rend les choses très difficiles pour les Canadiens qui essaient de préparer eux-mêmes leur retraite parce qu'ils savent qu'ils ne peuvent pas vraiment compter sur la sécurité de la vieillesse et sur le Régime de pensions du Canada étant donné la façon dont fonctionne le gouvernement actuel. Ils savent que le gouvernement n'est pas déterminé à limiter


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les dépenses et à éliminer le déficit afin de pouvoir commencer à réduire les impôts.

Le gouvernement commencera à imposer les non-résidents pour le revenu qu'ils reçoivent de l'extérieur du pays. Cela rapportera 30 millions de dollars de recettes fiscales dans une année où il n'y a pas de hausses d'impôt.

Le gouvernement prévoit de dépenser 50 millions de dollars pour intensifier sa lutte contre l'économie souterraine. Ottawa s'attend à ce que cette mesure lui rapporte 185 millions de dollars au cours des trois prochaines années. Le gouvernement devrait peut-être examiner attentivement la cause de l'économie souterraine, soit la portion de plus en plus grande des chèques de paye des Canadiens dont s'accapare le gouvernement.

J'étais à Hamilton-Est jeudi et vendredi de la semaine dernière. La plus grande plainte des gens de cette circonscription, c'est que, dans bien des cas, leur salaire brut est très intéressant, mais leur salaire net est plutôt maigre. Les impôts et autres retenues à la source sont tout simplement trop élevées et ne cessent d'augmenter. Et on ne verra pas la lumière au bout du tunnel tant que ce gouvernement sera au pouvoir.

Le ministre des Finances a également annoncé la formation d'un comité technique chargé d'examiner la fiscalité des entreprises et de proposer des mesures visant à promouvoir la création d'emplois et les investissements. Ce n'est rien d'autre que de la frime pour donner l'impression que le gouvernement fait vraiment quelque chose sur le plan de la création d'emplois.

Combien coûtera ce comité? D'après l'expérience du passé, ce comité coûtera entre 500 000 $ et 5 millions de dollars. C'est beaucoup d'argent pour un comité qui n'est que de la frime. Le gouvernement a un bien piètre bilan pour ce qui est de tenir compte des recommandations des comités qui ont voyagé d'un bout à l'autre du pays. Souvent le gouvernement annonce des changements avant même que le comité ne présente son rapport. Pourquoi alors gaspiller autant de temps et d'argent pour former un comité?

En ce qui concerne les entreprises, la razzia fiscale est assez inoffensive lorsqu'on regarde l'histoire récente, mais elle est quand même importante. Comme on s'y attendait, le gouvernement a maintenu la taxe sur les profits réalisés par les banques, qui rapportera 65 millions de dollars au cours des deux prochaines années. Même si les banques ont payé 4 milliards de dollars d'impôt en 1993, la taxe sur les profits est un autre moyen d'obliger les entreprises les plus rentables de notre société à payer toujours plus.

La plupart des Canadiens ne seront pas très choqués de voir les banques payer plus d'impôt. L'impôt sur les profits élevés des banques ne les troublera pas beaucoup, mais un précédent a été créé. Cet impôt va-t-il maintenant frapper les dépanneurs qui ont des profits élevés? On a créé un précédent concernant l'impôt supplémentaire sur les profits élevés. Qui sera la prochaine cible? Le propriétaire du commerce de quartier? Les Canadiens doivent se poser la question. Le gouvernement est déterminé à aller chercher de l'argent partout où il le pourra.

Je vais continuer d'énumérer la liste des ponctions fiscales annoncées dans le dernier budget. Le problème de la TPS n'y était à toutes fins utiles pas abordé. Le gouvernement n'a pourtant pas encore tenu sa promesse d'abolir cette taxe, même si la plupart des Canadiens seraient satisfaits qu'il fasse ce qui était annoncé dans le livre rouge et la remplace par autre chose.

(1645)

Sheila Copps, la députée qui a démissionné parce que le gouvernement n'avait pas tenu sa promesse de se débarrasser de la TPS, défend maintenant sa carrière politique dans une élection partielle. Les Canadiens n'ont pas oublié que la TPS n'a été ni remplacée ni éliminée, et qu'elle ne sera pas éliminée. Je ne suis pas sûr qu'ils se contenteront d'obtenir un remplacement. Nous attendrons de voir s'ils sont prêts à tolérer cela.

Au cours de la campagne de l'élection partielle, j'ai entendu des électeurs de Hamilton dire que les Canadiens s'attendent à ce que les politiciens tiennent les promesses qu'ils font. La promesse concernant la TPS pourrait très bien revenir hanter le gouvernement aux prochaines élections et même plus tard.

Le gouvernement n'a pas de quoi se vanter de ce qu'il propose dans le budget, sur les questions fiscales. Non seulement il n'a pas présenté d'allégements fiscaux, mais il a haussé les impôts, même si les Canadiens avaient bien fait savoir qu'ils sont écoeurés des hausses d'impôt.

Le budget influe aussi indirectement sur les impôts. En évitant les compressions de dépenses, le gouvernement a signé l'arrêt de mort des allégements fiscaux pour les trois prochaines années au moins. Le ministre des Finances et le gouvernement n'ont pas montré autant de force qu'il l'aurait fallu pour équilibrer le budget très rapidement. Le ministre des Finances n'a toujours pas de plan pour équilibrer le budget. Les Canadiens peuvent dire avec certitude qu'il n'y aura pas de réductions d'impôts importantes pour un bon bout de temps.

Dan un moment, je montrerai comment les choses se seraient passées si le Parti réformiste avait été élu en 1993 et si notre plan zéro sur trois ans avait été appliqué à ce moment-là.

Pour conclure au sujet de l'effet du budget du gouvernement, je dirai simplement qu'il n'a pas offert d'allégements fiscaux. Il a détruit tout espoir d'allégement fiscal, du moins dans un avenir prévisible. Il a giflé les Canadiens, s'attendant à qu'ils le remercient de ne pas avoir ouvertement augmenté les impôts alors qu'il les a augmentés de plusieurs centaines de millions de dollars dans le dernier budget. C'est ça qu'ont fait les libéraux.

Qu'aurait fait le Parti réformiste s'il avait été élu en 1993? Il avait fait campagne en promettant d'éliminer le déficit en trois ans. Il avait un plan détaillé, un plan sain pour équilibrer le budget en trois ans. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire qu'aujourd'hui nous serions dans la troisième année de notre plan. Les Canadiens auraient su que le budget serait équilibré d'ici la fin de l'exercice financier actuel et que nous aurions au moins diminué nominalement les impôts. C'est ce que les Canadiens réclament à grands cris.


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Les Canadiens veulent garder une portion plus importante de leur chèque de paye. Ils en ont assez des déductions sans cesse croissantes. Ils en ont assez des salaires qui ont l'air décents mais qui, en fin de compte, ne permettent pas à leurs familles d'être à l'aise. Si notre plan d'élimination du déficit en trois ans avait été mis en place par le ministre des Finances, ils auraient été heureux. Ils auraient pu voir leurs impôts diminuer cette année. C'est quelque chose que les Canadiens désirent ardemment.

Qu'ont fait les réformistes dernièrement en matière de réduction des impôts? Je vais vous expliquer quatre résolutions adoptées lors de notre congrès à Vancouver. Ces résolutions ont été adoptées par des réformistes venus des quatre coins du Canada. Le ministre des Finances devrait y prêter attention car ces résolutions reflètent non seulement les souhaits des délégués réformistes, mais aussi des Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

La première résolution dit:

Il est résolu que le Parti réformiste réaffirme son engagement concernant la création d'un impôt unique, simple et visible.
(1650)

Les Canadiens veulent non seulement un taux d'imposition moins élevé, mais aussi un régieme fiscal plus simple. Quatre-vingt-douze pour cent des délégués ont ratifié cette résolution.

La deuxième dit ceci:

Il a été résolu que le Parti réformiste supprimera la TPS, dès qu'un système d'impôt uniforme simple et visible aura été mis en place.
Nous nous sommes engagés à supprimer la TPS, dès que nous aurions instauré notre système d'impôt uniforme.

La troisième dit:

Il a été résolu que le Parti réformiste appuiera la réduction du fardeau fiscal total, tout en admettant que les réductions d'impôt devront respecter le plan actuel de lutte contre le déficit.
Nous affirmons que nous pouvons offrir un allégement de l'impôt, même si nous devons très rapidement, en deux ans, parvenir à un budget équilibré. Cette résolution a été acceptée par 95 p. 100 des délégués.

La quatrième résolution se rapporte directement à l'impôt et stipule:

Il est résolu que le Parti réformiste appuiera l'allégement du fardeau fiscal pour les familles et les couples mariés où un seul des conjoints travaille.
Il s'agit ici de rendre le système plus juste. Dans le budget de cette année, le ministre des Finances a longuement traité de l'importance d'améliorer l'équité du système. Or, dans ce domaine pourtant fondamental, il n'a rien fait. Les Canadiens veulent une véritable justice et demandent surtout que les familles soient traitées équitablement, ce qui n'est actuellement pas le cas. Voilà ce que le Parti réformiste a proposé et c'est ce qu'il fera.

Je terminerai en proposant l'amendement suivant. Je propose:

Que tous les mots après «que» soient supprimés et remplacés par ce qui suit:
Que cette Chambre refuse d'accorder la troisième lecture au projet de loi C-36, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur l'accise, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur la sécurité de la vieillesse et la Loi sur la marine marchande du Canada, étant donné que ce projet de loi ne cherche pas à régler le problème des pavillons de complaisance qui permettent aux propriétaires de navires canadiens d'éviter de payer des impôts au Canada.
Après la période des questions et réponses, j'aimerais intervenir et invoquer le Règlement pour expliquer pourquoi j'estime que l'amendement est recevable.

Le président suppléant (M. Kilger): Le député de Végréville a présenté un amendement. Je voudrais demander conseil auprès du bureau. Je voudrais d'abord informer le député de Végréville que, à cette étape-ci du débat, les trois premières interventions durent au plus 40 minutes. Au nom du Parti réformiste, le député avait droit à ce maximum, de sorte qu'il n'y aura pas de période de questions ou d'observations.

(1655)

Je demande qu'on passe au débat. Comme il n'y a pas d'autre débat, je vais prendre un instant pour rendre une décision sur l'amendement, puis nous passerons au vote.

M. Benoit: J'invoque le Règlement, monsieur le Président, avant que vous ne rendiez votre décision au sujet de l'amendement. S'il y a un doute quant à l'admissibilité de mon amendement, je vous renvoie au commentaire 568 de la sixième édition de Beauchesne, qui dit ceci:

Une règle absolue prescrit que tout amendement doit se rapporter à la proposition visée.
Ce projet de loi a trait à diverses lois fiscales, dont la Loi de l'impôt sur le revennu et la Loi sur la marine marchande du Canada. L'immatriculation des navires sous pavillon étranger figure dans la Loi sur la marine marchande du Canada que ce projet de loi modifie. C'est un aspect de la Loi de l'impôt sur le revenu que ce projet de loi modifie également. Cette mesure législative vise à éliminer une échappatoire fiscale. Je vous renvoie aux dispositions du projet de loi qui ont trait à la question des fiducies familiales. L'immatriculation de navires sous pavillon de complaisance n'est qu'une autre échappatoire à l'intention de riches et il y a tout lieu de l'éliminer.

Le gouvernement ne devrait pas mener ce projet de loi à terme, mais présenter un projet de loi qui règle le cas de toutes les échappatoires, en particulier la question de l'immatriculation de navires sous pavillon de complaisance.

Je vous renvoie au commentaire 733 de la sixième édition de Beauchesne:

La recevabilité des amendements en troisième lecture n'est pas illimitée. Ils doivent avoir trait au projet de loi à l'étude.
Mon amendement a trait à la Loi de l'impôt sur le revenu et à la Loi sur la marine marchande que ce projet de loi vise à modifier. Le commentaire dit aussi que l'amendement:

. . .ne doit pas aller à l'encontre du principe affirmé par l'adoption du projet de loi en deuxième lecture.
Le projet de loi vise une échappatoire si controversée à laquelle ont recours les fiducies familiales. Mon amendement se rapporte à une échappatoire qui profite aux riches. Comme je l'ai dit tout à l'heure, mon amendement a trait à des lois que vise à modifier ce projet de loi.


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Le commentaire 670 de Beauchesne expose certains critères auxquels doit répondre un amendement motivé. Au paragraphe 2 de ce commentaire, on peut lire ceci:

Il ne doit pas proposer une mesure de remplacement.
Mon amendement ne propose pas une telle mesure. Je veux tout simplement aller plus loin pour éliminer des échappatoires fiscales à l'usage des riches. Au paragraphe 5 du commentaire 670 de Beauchesne, on peut lire ceci:

Il peut commenter les circonstances relatives à la présentation ou à l'examen du projet de loi. . .
Nous devrions profiter du fait que nous étudions la Loi sur la marine marchande et la Loi de l'impôt sur le revenu pour nous pencher sur la question de l'immatriculation de navires sous pavillon de complaisance et éliminer cette échappatoire dont profitent les riches et les puissants.

L'amendement est réglementaire parce qu'il se rapporte au projet de loi. Par ailleurs, il lancera le débat sur la pratique consistant à éviter de payer des impôts en recourant à des moyens légaux. C'est légal, mais ce n'est sûrement pas une façon de faire qui va dans le sens des intérêts du Canada. C'est une échappatoire qu'il faut examiner au même titre que celle qui a trait aux fiducies familiales.

C'est honteux qu'il y ait des gens dans notre pays qui cherchent à tirer parti. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! Ces commentaires relèvent du débat. Le député de Végréville s'est reporté aux citations 658, 733 et 670; s'il a d'autres passages à citer, je le prie de le faire très brièvement. Il n'en a aucun.

(1700)

Après consultation auprès de nos greffiers, la présidence déclare que l'amendement n'est pas recevable.

J'attire l'attention de la Chambre sur le commentaire 568 de la sixième édition de Beauchesne, qui est le suivant:

Une règle absolue prescrit que tout amendement doit se rapporter à la proposition visée.
Je suis d'avis que la question des pavillons de complaisance est nouvelle et dépasse la portée du projet de loi.

J'attire également l'attention de la Chambre sur le commentaire 671 de la sixième édition de Beauchesne, selon lequel:

Les règles suivantes régissent le contenu d'un amendement motivé: 1) Le principe de la pertinence d'un amendement vaut pour toutes les propositions du genre qui doivent, par conséquent, «se rapporter strictement au projet de loi que la Chambre, par son ordre, a décidé d'étudier». . .
(1705)

C'est donc avec respect que je remercie le député de Végréville qui, de toute évidence, a pris le temps et la peine de préparer son argument. Dans ce cas, la présidence n'est pas d'accord et juge que l'amendement n'est pas recevable.

Nous reprenons le débat sur le projet de loi C-36. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote sera pris demain à 17 h 30.

En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qui sera soulevée ce soir à l'heure de l'ajournement: l'honorable député de Lévis-La sécurité ferroviaire.

* * *

LOI SUR LES PROGRAMMES DE COMMERCIALISATION AGRICOLE

L'ordre du jour appelle: Ordres émanant du gouvernement:

3 mai 1996-Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire-Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire du projet de loi C-34, Loi constituant des programmes de commercialisation des produits agricoles, abrogeant la Loi sur l'Office des produits agricoles, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles, la Loi sur le paiement anticipé des récoltes et la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies et modifiant certaines lois en conséquence.
L'hon. David Anderson (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) propose:

Que le projet de loi C-34, Loi constituant des programmes de commercialisation des produits agricoles, abrogeant la Loi sur l'Office des produits agricoles, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles, la Loi sur le paiement anticipé des récoltes et la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies et modifiant certaines lois en conséquence, soit renvoyé tout de suite au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'ouvrir le débat sur la motion visant à renvoyer le projet de loi C-34, Loi sur les programmes de commercialisation agricole, au comité avant la deuxième lecture.

Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a demandé à la Chambre d'approuver cette procédure parce qu'il veut que le comité fasse en sorte que tous les députés le moindrement intéressés au projet de loi puissent se faire entendre.


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Durant la campagne électorale de 1993, nous nous sommes engagés à donner aux députés une influence accrue dans le processus législatif. En proposant de renvoyer le projet de loi directement au comité, nous tenons parole à cet égard.

Même si nous avons procédé à de vastes consultations d'un bout à l'autre du pays à propos de ce projet de loi, nous adoptons cette procédure pour veiller à ce qu'aucune opinion ou idée ne soit négligée.

Le projet de loi C-34 a pour objectif de fournir une assise législative commune aux programmes de commercialisation agricole et de rétablir les dispositions relatives aux avances sans intérêt.

À l'heure actuelle, quatre lois concourent à assurer une commercialisation efficace et ordonnée des produits agricoles. D'abord, la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, ayant pour objet d'aider les producteurs qui commercialisent les récoltes relevant de la Commission canadienne du blé, c'est-à-dire le blé et l'orge, en leur assurant des liquidités immédiatement après la récolte, au moment où il y a souvent des disponibilités excessives sur les marchés.

Il y a ensuite la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, qui aide les producteurs à écouler toutes les autres récoltes entreposables; la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles, qui est conçue pour inciter les producteurs à s'unir pour transformer leurs produits; et la Loi sur l'Office des produits agricoles, qui a servi à faciliter les ventes de gouvernement à gouvernement ainsi que l'achat de produits excédentaires sur les marchés nationaux en vue d'une revente ultérieure dans de meilleurs conditions.

(1710)

Ces lois ont toutes été élaborées à des époques différentes. Elles portent l'empreinte des marchés et des régimes de commercialisation nationaux, nord-américains et mondiaux qui existaient au moment de leur conception. Elles ont donné de bons résultats, mais bon nombre d'agriculteurs et de groupements agricoles estiment que l'existence de quatre lois distinctes était source de confusion.

Ils ont aussi dénoncé le fait que ces lois ne traitaient pas tous les producteurs sur le même pied. Pour ces raisons, le gouvernement propose de remplacer ces quatre lois par une seule, la Loi sur les programmes de commercialisation agricole.

Cette loi est l'aboutissement de nombreuses consultations dans tous les secteurs. Le gouvernement s'est adressé directement à plus de 80 groupements de producteurs pour leur demander leur avis sur tous les programmes financiers du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Nous avons aussi fourni un rapport sommaire sur ces consultations à plus de 160 groupements de producteurs et autres organisations, incluant les gouvernements provinciaux, et leur avons demandé de nous faire part de leurs observations.

La loi proposée prend en compte le plus grand nombre possible de suggestions formulées par les producteurs. Elle jouit d'un large soutien parmi les groupements qui les représentent.

La nouvelle loi répond aux besoins des producteurs. Elle traitera sur un même pied tous les secteurs de production et toutes les régions du pays. En même temps, elle sera suffisamment souple pour s'adapter aux particularités des divers régimes de commercialisation qu'utilisent les producteurs au Canada.

Une autre amélioration importante est que cette nouvelle loi resserrera les contrôles administratifs, réduisant ainsi les frais d'administration. Elle supprimera les disparités et les injustices des deux anciens programmes de paiements anticipés. On peut donc affirmer qu'elle cadre avec l'engagement du gouvernement d'en arriver à une plus grande efficacité budgétaires et d'assainir la structure de l'État.

Cette nouvelle loi remplit une promesse que nous avons faite lors de la dernière campagne électorale et reprise dans le budget de février 1995, soit d'établir un programme législatif d'avances sans intérêt pour remplacer l'actuel Programme d'accroissement des liquidités, qui expirera l'an prochain.

J'insiste sur le fait qu'il s'agira d'un programme législatif. On éliminera ainsi les incertitudes auxquelles les producteurs à court de liquidités devaient faire face par le passé lorsqu'ils devaient attendre que le gouvernement annonce si des avances en espèces leur seraient temporairement consenties ou non.

Comme toute autre industrie évoluant dans un contexte de concurrence, les agriculteurs ont besoin de capitaux au cours de certaines périodes de pointe, pour payer leurs dettes. Cela les force parfois à écouler leurs récoltes et leurs produits à un moment où les prix ne sont pas avantageux.

La nouvelle loi leur fournira des avances pour leur permettre de patienter quelque peu et de ne pas avoir à vendre leurs produits dès la récolte de leurs cultures. Ils pourront ainsi stocker leurs produits en attendant un redressement des prix, plutôt que de les brader tous en même temps, pratique qui fait fléchir les prix.

En vertu de la Loi sur les programmes de commercialisation agricole, les producteurs admissibles toucheront des avances pouvant atteindre 250 000 $, dont la première tranche de 50 000 $ sera exempte d'intérêt. Le reste sera assujetti à un taux d'intérêt préférentiel, généralement inférieur au taux de base.

La nouvelle loi sera également avantageuse pour les coopératives. Les dispositions de mise en commun y seront maintenues, mais simplifiées de façon à inciter un plus grand nombre de producteurs à écouler leurs produits selon la formule coopérative et à accroître leurs recettes grâce à une transformation à valeur ajoutée.

Les dispositions en question établissent le prix de vente moyen prévu pour le produit mis en commun et assurent aux producteurs une garantie de prix pouvant atteindre 80 p. 100 de celui-ci. Les coopératives éviteront ainsi de subir de lourdes pertes advenant un effondrement imprévu des prix. La garantie de prix leur permettra également de négocier de plus gros emprunts, à des taux d'intérêt moindres, auprès des institutions financières.

D'autre part, la nouvelle loi s'attaque efficacement aux problèmes de non-conformité décelés dans le cadre de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies.


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(1715)

Ces dernières années, ce programme a donné lieu à un taux élevé de défauts de paiement. Une campagne d'inspection a grandement contribué à réduire ce taux, mais les producteurs ont demandé que le gouvernement trouve une solution permanente à ce problème afin qu'ils puissent avoir l'assurance que tous respectent la loi.

En réduisant le nombre de défauts de paiement, la nouvelle loi rétablira la confiance de producteurs. Il est établi dans la loi que les producteurs défaillants devront acquitter tous les coûts raisonnables de recouvrement des montants en souffrance. En outre, ils paieront de l'intérêt sur ceux-ci à partir du moment où l'avance a été consentie jusqu'à son remboursement intégral. Enfin, le producteur ne pourra se prévaloir de tout autre carnet de permis ou d'une participation à toute autre entreprise commerciale pour obtenir une autre avance avant d'avoir remboursé intégralement ses avances antérieures et tous les montants en souffrance.

Il n'est que juste pour la majorité des producteurs qui respectent leurs engagements que nous resserrions ces mesures. En fait, bon nombre de ces mesures ont déjà été mises en oeuvre par voie administrative et ont donné des résultats positifs. Les montants en souffrance sont passés de 64 millions de dollars en 1993-1994 à moins de 10 millions en 1994-1995.

Avec la mise en oeuvre de cette mesure législative, le nombre des paiements en souffrance sera maintenu à un niveau acceptable par des moyens législatifs plutôt qu'administratifs. Cela va faire épar-gner considérablement d'argent aux contribuables.

Comme la majorité des changements introduits par la Loi sur les programmes de commercialisation agricole visent à réduire les défauts de paiement, les participants respectueux des règles ne verront probablement aucune différence par rapport aux programmes mis en oeuvre ces dernières années dans le cadre de la LPAR et de la LPAGP.

En conclusion, donc, j'estime que cette nouvelle loi représente un progrès réel, un progrès pour les agriculteurs, car ils pourront exploiter leur entreprise dans un contexte plus stable, et un progrès pour les contribuables, puisque les deniers publics seront utilisés à meilleur escient.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole cet après-midi dans le débat concernant le projet de loi C-34 déposé en cette Chambre le 3 mai dernier par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Ce projet de loi constituant des programmes de commercialisation des produits agricoles était en effet une mesure législative très attendue tant par les producteurs eux-mêmes que par les multiples organismes de mise en marché des produits agricoles.

Dans cette perspective, j'aimerais apporter certaines précisions sur la nature même de mon intervention en ce qui touche la portée conséquente de ce projet de loi. D'une part, je tiens à souligner mon appui à cette mesure législative qui améliorera substantiellement le sort des agriculteurs dans leur cheminement à travers la complexité bureaucratique caractérisant le secteur agricole de ce pays.

D'autre part, je m'interroge sérieusement sur les véritables préoccupations du gouvernement en matière d'agriculture et d'agroalimentaire. Le ministre, lui-même, pourrait témoigner de l'ampleur des rectifications législatives à apporter au secteur agricole canadien de manière à le rendre conforme au courant moderniste et autonomiste qui caractérise notre époque.

À ce titre, le projet de loi C-34 représente un effort louable du ministère afin de faciliter l'accès pour les agriculteurs à des moyens simples et efficaces de mettre en marché leur récolte et ce, dans une optique de maximisation des profits.

Toutefois, une analyse détaillée de ce projet de loi m'a permis de découvrir certaines lacunes quant à l'esprit même de cette ébauche de la loi.

Je me permets de vous exposer ce qui m'apparaît comme un paradoxe flagrant découlant d'un manque de rigueur analytique de la part du gouvernement. Toutefois, je vous fais grâce de tous les détails et de toutes les modalités d'application de ce projet de loi, afin d'exposer, de manière concise, ce que le gouvernement devra justifier pour faire accepter unanimement cette mesure législative.

(1720)

Si l'on considère l'aspect budgétaire du projet de loi C-34, on note qu'au chapitre du programme de paiements anticipés, 120 millions de dollars seront alloués sur une période de trois ans. Il est inutile de préciser que cet élément du projet constitue le fondement même d'un paiement monétaire pour l'ensemble des producteurs agricoles du pays.

Or, on note une absurdité relativement évidente orchestrée par le gouvernement dans la mise en marché de ces mêmes récoltes. Je m'explique. Agriculture et Agroalimentaire Canada utilisera des sommes considérables afin de faciliter la mise en marché des récoltes annuelles. Mais ces fonds proviennent de l'enveloppe budgétaire originalement consacrée aux programmes de protection du revenu. Vous conviendrez avec moi qu'il y a là une incohérence de taille. Le gouvernement ne fait que camoufler les coupures budgétaires qu'il impose à une catégorie de contribuables, lesquels doivent déjà jongler avec une certaine précarité financière.

Dans cette perspective, l'enveloppe budgétaire des programmes de protection du revenu d'Agriculture et Agroalimentaire Canada pour la campagne 1997-1998 subira une baisse de 30 p. 100 par rapport aux prévisions prébudgétaires, ce qui représente aisément une somme de 250 millions de dollars, c'est un quart de milliard de dollars. Je suis d'avis que le gouvernement poursuive ici ses objectifs d'assainissement des finances publiques, mais pas à n'importe quel prix. Cette façon de cacher les coupures est, à mon sens, scandalisante.

Les agriculteurs du Québec et de l'ouest du Canada, notamment, ne sont pas dupes. Ils subissent déjà les fourberies du ministère depuis 1992, mais toujours en échange de faux espoirs. Si l'on fait le calcul réel des sommes devant être affectées aux différents programmes de ce projet de loi, on obtient deux résultats. Le premier, on constate le manque à gagner pour financer réellement les initiatives du gouvernement.

Dans le deuxième cas, on obtient les modalités financières qui sont exposées dans le projet de loi C-34, un amalgame de détails qui


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n'ont pour objet que de compliquer le cadre administratif et ainsi en faciliter son adoption devant l'urgence de la situation.

Toutefois, je tiens à saluer l'initiative du gouvernement de vouloir actualiser les programmes de mise en marché des produits agricoles. Je suis d'accord avec les grandes lignes de ce projet de loi et j'avoue que, n'eut été de l'aspect budgétaire déficient que j'ai souligné tout à l'heure, je cautionnerais cette mesure législative sans aucune réticence.

Dans cette perspective, j'ose espérer que le gouvernement prendra en considération les éléments factuels que j'ai évoqués. Il en va de sa crédibilité auprès d'un groupe populaire important de ce pays, et surtout de son honneur et de son intégrité. Récemment, certains agriculteurs de ma circonscription me demandaient, avec une attitude tout à fait désabusée: «Quand le ministre des Finances dépose son budget, est-ce qu'il le fait dans l'intention de tromper les contribuables canadiens et québécois?» Voilà la question que, souvent, nous posent les agriculteurs.

(1725)

Au-delà de toutes les considérations partisanes, il importe de légiférer dans l'intérêt réel de la population. Dans le cas des agriculteurs, ceux-ci doivent composer avec une situation qui varie au gré du temps. Il importe donc de leur assurer un minimum de stabilité et surtout de faire en sorte que les chiffres qui leur sont présentés reflètent fidèlement la situation dans laquelle ils évoluent.

Voilà l'essentiel de la position que nous allons défendre ici avec mon collègue, le député de Québec-Est. Donc dans l'ensemble nous allons donner notre appui au gouvernement dans l'adoption rapide du projet de loi C-34, compte tenu du fait qu'il y a certaines lacunes, bien sûr, mais qu'à tout prendre le projet de loi est acceptable.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer, au nom du caucus réformiste, au débat sur la motion visant à renvoyer le projet de loi C-34 au comité avant la deuxième lecture. Le projet de loi C-34 s'intitule la Loi sur les programmes de commercialisation agricole. Il remplace plusieurs lois qui prévoient actuellement le paiement anticipé de diverses récoltes.

Cette façon de procéder est nouvelle pour le Parlement. Nous avons eu de bonnes et de mauvaises expériences lorsque nous avons renvoyé des projets de loi à un comité avant la deuxième lecture. J'espère que cette expérience-ci sera heureuse. J'ai obtenu du président du comité l'assurance que nous pourrons entendre des témoins avant de procéder à l'étude du projet de loi article par article. J'ose espérer que le comité nous donnera suffisamment de temps pour entendre des témoins et pour procéder ensuite à l'étude article par article du projet de loi.

Certains présidents se sont montrés plutôt autocratiques et antidémocratiques, mais je suis certain que celui du comité de l'agriculture nous permettra d'examiner à fond le projet de loi et que, si des amendements sont nécessaires, nous aurons le temps de les examiner comme il faut et le comité acceptera peut-être que nous les soumettions dans une présentation améliorée.

Il est évident qu'il ne s'agit pas du projet de loi le plus controversé dont la Chambre soit saisie. Le fait que ce soit le secrétaire parlementaire du ministre, et non pas le ministre lui-même, qui ait fait le discours de présentation au nom du parti ministériel montre bien qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi qui propose des changements stupéfiants dans le secteur agricole.

Ce projet de loi n'est pas controversé; il est plutôt destiné à faire diversion. Il tente de détourner l'attention des lacunes du ministre de l'Agriculture et de son gouvernement vers des projets susceptibles d'être plus largement appuyés par l'industrie.

Cela me rappelle un peu la scène où quelqu'un s'apprête à manger un biscuit et quelqu'un d'autre détourne son attention pour le lui voler.

Je crois que le ministre de l'Agriculture tente de détourner notre attention de certains problèmes en présentant un projet de loi qui n'est pas de première importance pour l'industrie.

D'aucuns pourraient demander à savoir quels sont ces problèmes qu'on tente de cacher. Dans un débat comme celui-ci, il convient de parler de ces problèmes. Le projet de loi qui devrait être débattu, plutôt que d'être renvoyé au comité, est le projet de loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé. Il est bien plus intéressant, pour les Prairies surtout, que l'on réforme la Loi sur la Commission canadienne du blé plutôt que la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, comme il est proposé dans le projet de loi C-34.

Il suffit d'examiner la situation dans les Prairies, où des agriculteurs habituellement respectueux des lois transportent leur blé et leur orge aux États-Unis sans les permis que la Commission canadienne du blé les oblige à demander. Pourquoi donc agissent-ils ainsi? Ce n'est pas parce que la Loi sur le paiement anticipé des récoltes ne fonctionne pas bien sous la gouverne de la Commission canadienne du blé. Des changements ont été apportés à cette loi en fonction du parti qui était au pouvoir ces dernières années.

Année après année, des paiements anticipés pour des récoltes ont été faits, mais cela n'a pas empêché les producteurs d'essayer de transporter leur grain aux États-Unis sans demander un permis de la Commission canadienne du blé. Pourquoi? Peut-être faut-il modifier la Loi sur la Commission canadienne du blé pour amoindrir certaines tensions et réduire le nombre de saisies effectuées par les agents des douanes et par la GRC.

(1730)

Pourquoi une telle situation existe-t-elle? Pourquoi le gouvernement libéral ne règle-t-il pas cette situation en priorité? Pourquoi ne discutons-nous pas de cette situation plutôt que du projet de loi C-34? Pourquoi les agents des douanes et la GRC envahissent-ils des maisons? Peut-être est-ce là une situation sérieuse qui mérite


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d'être étudiée mais le ministre, bien sûr, n'est pas pressé de s'en occuper.

La Commission canadienne du blé a organisé une conférence à Saskatoon pour tenter d'encourager la diversification et faire mousser le concept de valeur ajoutée. La Commission a eu la merveilleuse idée de dégager 10 millions de dollars pour aider les agriculteurs à diversifier leur production en adoptant de nouveaux plans d'entreprise. C'était une tactique de diversion, comme le projet de loi C-34, pour éviter d'aborder la vraie question qui est que le gouvernement n'a pas de plan d'entreprise. Entre-temps, nos producteurs ratent des ventes et rongent leur frein.

Plutôt que de discuter du projet de loi C-34, peut-être devrions-nous étudier la réforme de la gestion de l'offre. C'est là un sujet qui préoccupe beaucoup plus de producteurs que les sujets contenus dans le projet de loi C-34.

Le gouvernement libéral s'opposait à l'ALENA avant les élections, celles de 1988, bien sûr. Les libéraux déclaraient que l'ALENA était un accord épouvantable et qu'il ne fallait pas le signer. Ils affirmaient que s'ils formaient le gouvernement, ils se hâteraient de le corriger. C'était leur première priorité, une priorité beaucoup plus importante que les modifications de pure forme à la Loi sur le paiement anticipé des récoltes.

Finalement, les libéraux sont arrivés au pouvoir en 1993, mais ils ont complètement oublié leurs promesses concernant l'ALENA. Ils ne sont pas même pas retournés à la table de négociations pour renégocier l'ALENA, contrairement à ce qu'ils avaient dit. Ils sont plutôt allés à la table du GATT et ont rompu une autre promesse. Ils se sont débarrassés de l'article XI du GATT. Ils ont dit aux entreprises des secteurs soumis à la gestion de l'offre qu'ils ne le feraient jamais, mais ils l'ont fait. Ces entreprises se demandent si le projet de loi C-34 ne pourrait pas être une manoeuvre de diversion pour détourner l'attention des producteurs des problèmes et des incertitudes auxquels elles sont confrontées.

Les libéraux ont même échoué quand ils ont signé l'entente du GATT portant sur le dépôt d'un addendum au GATT en indiquant quelle était leur position sur les tarifs qui avaient été convenus en ce qui concerne l'ALENA. Je ne peux pas m'empêcher de considérer cela comme une gaffe.

Actuellement, les États-Unis contestent nos tarifs en invoquant l'ALENA et une commission de règlement des différends est saisie de l'affaire. Les résultats devraient être déposés dans le courant du mois d'août. C'est beaucoup plus important pour les producteurs. Ils voudraient que le gouvernement s'occupe de cela au lieu de ceci.

L'indemnité globale versée pour remplacer les subventions du tarif de la Passe du Nid-de-Corbeau et certains problèmes que cela pose préoccupent bien plus l'industrie que le projet de loi C-34.

Si le projet de loi C-34 est adopté sous sa forme actuelle, les libéraux auront une fois de plus manqué à leur promesse. J'ai en main une lettre du premier ministre. Elle a été écrite quand il était chef de l'opposition. Elle est datée du 8 septembre 1993. Cette lettre s'adresse aux producteurs de maïs de l'Ontario. Le premier ministre y parle de la Loi sur le paiement anticipé des récoltes et des modifications que son gouvernement y apporterait s'il était élu.

La lettre dit ceci: «En mai, nous avons annoncé que nous rétablirions le programme d'avances en espèces sans intérêts aux termes d'une loi et que nous en ferions un programme de fonds de roulement en versant aux producteurs la moitié du maximum de 50 000 $ auquel ils ont droit après les semailles du printemps et le reste en automne». Il n'en est pas question dans le projet de loi. Je l'ai lu d'un bout à l'autre et ce n'est pas là. La totalité de la somme est versée après la récolte. Il n'est pas question de verser la moitié de l'avance en espèces après les semailles.

Si le projet de loi est adopté sous son libellé actuel, le gouvernement libéral aura une fois de plus rompu une promesse. Les libéraux présenteront peut-être un amendement à cause de cet oubli ou ils n'ont nullement l'intention de tenir cette promesse. Je leur recommande toutefois d'y songer. Je leur conseille également de mettre de l'ordre dans leurs priorités en ce qui concerne cette industrie.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse d'appuyer le projet de loi C-34 et la motion visant à le renvoyer au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire avant la deuxième lecture.

(1735)

Le projet de loi C-34 fait suite à un engagement pris dans le livre rouge et réitéré dans le budget de février 1995 en ce qui concerne le rétablissement de l'autorisation législative permettant au gouvernement fédéral de consentir des avances de fonds sans intérêt aux agriculteurs d'un bout à l'autre du pays.

La nouvelle loi, qui se fait attendre depuis longtemps, sera connue sous le nom de Loi sur les programmes de commercialisation agricole, ou LPCA. Elle remplacera, entre autres choses, le Programme d'accroissement des liquidités du gouvernement précédent, qui doit prendre fin l'an prochain. Il est très important d'adopter une telle loi pour assurer la sécurité financière de nos agriculteurs.

Le projet de loi C-34 résulte de la fusion de quatre lois existantes, soit la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles et la Loi sur l'Office des produits agricoles, et d'un programme ponctuel que j'ai déjà mentionné, le Programme d'accroissement des liquidités.

En plus de toute la confusion qui existe, les producteurs ne sont pas traités également en vertu des quatre lois. Afin d'éliminer cette confusion et cette injustice, la nouvelle Loi sur les programmes de commercialisation agricole traitera tous les groupes de produits de la même façon. Cela veut dire que les inégalités et les irrégularités des anciens programmes ont toutes été éliminées. En termes simples, les avances de fonds donnent aux agriculteurs la flexibilité de respecter leurs obligations financières après la récolte et avant la vente de leurs produits, en dépit des limites du marché ou des prix défavorables au moment où ils ont désespérément besoin de liquidités.


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Au Canada, ces avances de fonds n'ont pas porté d'intérêt avant 1989, année où le gouvernement précédent a modifié la loi. Depuis, les frais d'intérêt sont décidés chaque année de façon empirique dans le cadre du Programme d'accroissement des liquidités. Cette politique a donné des résultats qui sont loin d'être satisfaisants et elle a engendré confusion, instabilité, anxiété et injustice. Par souci d'efficacité, la nouvelle loi est répartie en trois volets: le Programme de paiement anticipé, le Programme de mise en commun des prix et le Programme des achats gouvernementaux.

En vertu du Programme de paiement anticipé, le montant maximal des avances aux producteurs sera de 250 000 $ , les premiers 50 000 $ ne portant pas d'intérêt. En cas de pertes de récoltes dues à des conditions météorologiques inhabituelles ou à une maladie, une avance de secours de 25 000 $ pourra être octroyée, mais le ministre ne sera pas tenu de payer les intérêts.

Cette partie du projet de loi est semblable à la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, mais elle permet en outre d'effectuer des ajustements pour tenir compte de la situation particulière des producteurs qui relèvent de la Commission canadienne du blé. Aux termes du projet de loi et à la différence des modalités actuelles, les paiements anticipés seraient faits directement aux producteurs et non pas aux détenteurs des carnets de permis de la Commission canadienne du blé. En outre, l'article 14 du projet de loi permettrait de verser des avances sous forme de bons de paiement aux producteurs qui relèvent de la Commission canadienne du blé. Cet exemple montre la souplesse avec laquelle la nouvelle loi permettra de répondre aux besoins des producteurs qui sont régis par un vaste éventail de systèmes de commercialisation à la grandeur du Canada.

Dans le cas où un producteur serait en défaut auprès d'un associé, d'un membre ou d'un actionnaire d'une autre association, cette dernière ne serait pas admissible à des avances de paiement, et inversement. Pour plus de précision, la règle applicable aux associations entre conjoints, parents ou enfants serait la même que celle applicable aux déclarations d'impôt sur le revenu de Revenu Canada.

Un objectif important du projet de loi C-34 consiste à de réduire les défauts de remboursement qui ont malheureusement coûté cher aux contribuables au fil des ans. Les défauts de remboursement des avances versées en vertu de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies ont atteint plusieurs millions de dollars. En vertu de ce projet de loi, les producteurs qui ne rembourseraient pas les avances qui leur auraient été versées auraient à payer tous les frais de recouvrement et les intérêts sur les avances versées qui n'ont pas été remboursées. De même, ils ne pourraient obtenir d'autres avances ou éviter de rembourser celles qui leur ont été versées en établissant une autre compagnie ou entreprise. L'obtention d'un nouveau carnet de livraison de la Commission canadienne du blé ne permettrait pas à un producteur d'être exempt de l'obligation de rembourser les avances qui lui ont été versées sur présentation d'un autre carnet de livraison.

Les récoltes admissibles sont énumérées à l'article 2 du projet de loi. Néanmoins, les critères suivants s'appliquent également: la récolte doit avoir été faite et entreposée; Elle doit être entreposée non transforme. Le producteur reste propriétaire de la récolte et est responsable de la commercialiser. Dans certains secteurs de l'agriculture, notamment l'horticulture, ces critères ont été considérés comme étant trop restrictifs car beaucoup de produits non transformés sont difficiles à entreposer ou sont achetés sitôt récoltés.

L'Association des producteurs de maïs de l'Ontario est l'un de trois groupes agricoles qui ont demandé que les avances soient versées à l'époque de l'ensemencement et soit fixées non pas à 50 p. 100, mais à 70 p. 100 de la valeur de la récolte.

(1740)

J'insiste sur le fait que cette loi se fonde essentiellement sur le principe de l'égalité des récoltes, des régions et des producteurs d'un bout à l'autre du Canada.

Si ce projet de loi ne prévoit pas d'avances pour le printemps, c'est que le gouvernement a consulté plus de 160 groupes de producteurs, aux quatre coins du Canada avant sa rédaction. La plupart de ces groupes sont restés neutres sur cette question ou se sont opposés à l'idée des avances pour le printemps.

La grande majorité des groupes de producteurs avait l'impression que ces avances pour le printemps ne seraient pas conformes à l'objectif du programme de paiement anticipé, qu'elles changeraient l'orientation actuelle du système de mise en marché puisqu'elles ne feraient plus qu'assurer le crédit de fonctionnement. Les producteurs avaient l'impression que, en bout de ligne, cette façon de faire réduirait les avantages et augmenterait le coût du programme au-delà du seuil acceptable.

Le projet de loi établira un nouveau programme de partage des risques qui déterminera la responsabilité de l'agent d'exécution en cas de défaut de paiement selon le rendement passé du producteur. Cette responsabilité sera fixée entre 1 et 15 p. 100, plutôt que les 2 p. 100 prévus actuellement dans la Loi sur les paiements anticipés des récoltes et l'absence de garanties de la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies. Le projet de loi déterminera aussi plus clairement la taille des récoltes et éliminera les possibilités de recoupement avec le programme de mise en commun des prix.

Le projet de loi permettra aux producteurs de continuer à utiliser les mécanismes de mise en commun, mais le processus d'approbation nécessaire sera grandement simplifié. Comme il confierait les pouvoirs au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, en vertu des articles 26 à 30, sous réserve des conditions générales imposées par le ministre des Finances, il éliminerait la nécessité de nommer des vérificateurs et des comptables professionnels pour chacun des accords.

Ayant éliminé ces couches de bureaucratie, le gouvernement fédéral pourra beaucoup plus facilement établir un prix minimum garanti pour tous les produits issus d'une mise en commun par catégorie, variété et type de produits. Ce prix garanti couvrira le prix initial aux producteurs et le coût d'exploitation de la mise en commun.


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Pour les achats gouvernementaux prévus par le projet de loi C-34, on incorpore les dispositions de la Loi sur l'Office des produits agricoles. On maintient la capacité pour Agriculture et Agroalimentaire Canada d'acheter et de vendre des denrées agricoles, en cas de conditions commerciales inhabituelles, en éliminant une autre couche de bureaucratie, c'est-à-dire l'office de commercialisation des produits agricoles.

Pour terminer, je voudrais résumer brièvement les avantages qui découleraient de la Loi sur les programmes de commercialisation agricole une fois entrée en vigueur le 1er janvier 1997. Il y aura une seule loi au lieu de quatre actuellement, ce qui réduira les inégalités actuelles en ce qui concerne les cultures et les régions. De même, cela réduira les frais d'administration et les frais généraux. Le financement sera également plus facile à accepter pour les producteurs. Tous les producteurs pourront obtenir des avances en espèces dans les mêmes conditions administratives. Les défaillances seront réduites par un meilleur filtrage avant le versement des avances, par des contrôles améliorés, des méthodes de perception améliorées, ainsi que des pénalités plus fortes contre les producteurs défaillants.

La loi sera conforme à la politique actuelle du gouvernement en matière de recouvrement des frais administratifs, d'un partage accru des risques avec les participants, et de réduction de la bureaucratie, du fait qu'il y aura une seule loi combinée.

Une grande majorité des producteurs et organismes agricoles de tout le Canada ont appuyé la direction prise par le gouvernement. J'encourage les députés à faire de même et à appuyer la motion de renvoi du projet de loi C-34 à un comité, avant la deuxième lecture, de sorte que mes collègues et moi-même puissions accorder à ce projet de loi toute notre attention.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, c'est avec grand intérêt et devoir que je m'adresse aujourd'hui à cette Chambre sur le projet de loi C-34, Loi sur les programmes de commercialisation agricole.

Je suis heureux de constater que le projet déposé vise à fusionner quatre lois existantes et à faciliter ainsi la commercialisation des produits agricoles. Ces lois sont: la Loi sur le paiement anticipé des récoltes, la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies, la Loi sur la vente coopérative des produits agricoles et enfin, la Loi sur l'Office des produits agricoles.

En plus, le projet de loi C-34 regroupe le programme d'accroissement des liquidités. Si mon parti, le Bloc québécois, est en faveur, en général du moins, avec les objectifs du projet de loi C-34, c'est que celui-ci est essentiellement conforme à ce que l'industrie demande, et apparaît plus conforme aux valeurs et au modèle de développement agricole que nous avons dans la province de Québec.

(1745)

Néanmoins, je me permets de relever une incohérence importante en matière d'imputation budgétaire. Les articles 25 et 30 sont d'ordre financier. Par ces deux articles, le gouvernement espère pouvoir verser de l'argent aux agriculteurs dans le cadre du programme de paiements anticipés et dans le cadre de la mise en commun des prix.

On a appris que les fonds prévus au programme des paiements anticipés seraient de 40 millions de dollars par année, et ce, pour une période de trois ans. Si l'on fait le calcul, on devrait avoir 120 millions de dollars après ces trois années. Là où cela fait très terriblement mal, c'est quand Agriculture et Agroalimentaire Canada vont puiser les fonds pour le programme de commercialisation à même l'enveloppe budgétaire réservée au programme de protection du revenu.

Ce transfert, que dis-je, ce détournement de fonds de l'enveloppe vient amputer d'autant les montants disponibles pour les agriculteurs dans ce dernier domaine. En agissant de la sorte, le fédéral viendra malheureusement et encore une fois réduire davantage la part du Québec.

Ne vous en déplaise, la part du Québec dans les programmes de protection du revenu pour les agriculteurs est déjà inférieur à ce que la province est en mesure d'exiger et d'obtenir, compte tenu du poids relatif de l'agriculture dans la belle province.

On aurait tendance à croire que l'histoire se répète: le Québec est toujours plus fortement pénalisé en bout de ligne.

L'enveloppe budgétaire des programmes de protection du revenu d'Agriculture et d'Agroalimentaire Canada, ene 1997-1998, est de 600 millions de dollars. Il s'agit d'une diminution de 250 millions de dollars, soit 30 p. 100 par rapport au niveau prébudgétaire de 850 millions de dollars. Si le fédéral va de l'avant avec ce détournement de fonds en allant puiser dans les fonds destinés au programme de protection du revenu, ce sera 120 millions de dollars dans trois ans qui manqueront dans cette enveloppe.

En termes clairs et brefs, il est indécent qu'une partie du budget destiné à la protection des revenus agricoles soit utilisée pour financer le programme de paiements anticipés qui, faut-il le rappeler, est un programme de commercialisation des produits agricoles.

Quel lien peut-il y avoir entre le programme des paiements anticipés et le programme de protection du revenu? Aucun.

Que ce soit clair, quand le ministre des Finances, l'honorable Paul Martin, dépose son budget, est-ce qu'il le fait dans l'intention de tromper les contribuables canadiens et les contribuables québécois? L'objectif budgétaire ne devrait-il pas refléter ce qu'il est prévu? Ce serait la logique; d'autres préfèrent dire le gros bon sens.

Au contraire, si on suit la logique du présent gouvernement, faut-il comprendre que les chiffres en place ne voudraient rien dire car ils ne correspondraient plus du tout à ce à quoi ils étaient destinés? C'est terrible. J'en suis atterré.

Si le gouvernement fédéral, par le biais du ministère concerné, prend des fonds prévus au programme de protection du revenu pour financer les programmes des paiements anticipés, qui est un programme de commercialisation des produits agricoles, pourquoi n'y aurait-il pas à présent des modifications à ce sujet?


3952

Tout d'abord, il faudrait une réelle volonté politique pour faire changer cette situation et faire en sorte que les fonds prélevés pour le programme des paiements anticipés viennent directement des fonds réservés au programme de commercialisation des produits agricoles.

Je crois que le gouvernement devrait injecter davantage d'argent au budget des programmes de commercialisation et qu'il cesse ces coupures et ces détournements de fonds d'une enveloppe budgétaire à une autre. Il s'agit d'une solution toute simple, mais combien importante.

Cela ferait en sorte qu'à l'avenir, les agriculteurs québécois seraient mieux desservis en matière de protection du revenu. On pourrait également soustraire 120 millions de dollars de l'enveloppe budgétaire réservée au programme de protection du revenu, mais ceci reviendrait en fait à la situation actuelle où il y aurait moins d'argent pour les agriculteurs québécois dans ce domaine, et ce, dans une proportion plus inéquitable que pour les neuf autres provinces de la fédération canadienne. D'autres diront qu'il y a aussi la possibilité pour le gouvernement d'injecter de l'argent neuf dans le budget des programmes de commercialisation des produits agricoles et où l'on couplerait celle-ci avec un transfert d'argent de l'enveloppe budgétaire des programmes de protection du revenu.

(1750)

À mon avis, il s'agirait là d'une solution partiellement acceptable. C'est pour ces raisons que mon parti, le Bloc québécois, demande au gouvernement fédéral d'apporter les changements qui s'imposent, que le gouvernement corrige la situation et qu'il rende justice aux agriculteurs et aux agricultrices du Québec.

En termes clairs, on demande simplement au gouvernement de soustraire le budget dévolu au programme de paiements anticipés du budget des programmes de protection du revenu. Je ne vous cacherai pas qu'il s'agit là d'un irritant majeur pour les producteurs agricoles du Québec.

Par ailleurs, le projet de loi C-34, avec ses nouvelles règles d'admissibilité, viendra exclure toute forme de mise en marché collective. En effet, il faut refuser l'une des conditions d'admissibilité des producteurs et spécialement celle qui spécifie que celui-ci doit pouvoir décider du moment pour vendre sa récolte. Cette condition a pour effet d'exclure les cultures placées dans un système de mise en commun des prix à la récolte. L'un des plus touchés serait le groupe VEGCO Inc. du Québec.

En terminant, je suis d'accord à ce que le gouvernement fédéral utilise les taxes des contribuables de façon efficiente en rationalisant ses programmes, tout cela afin que les agriculteurs reçoivent les mêmes avantages et respectent les mêmes obligations. Cependant, il y a une incohérence de taille dans l'imputation budgétaire et si on laisse faire le gouvernement du présent premier ministre, ce dernier réduira encore davantage la part du Québec dans les programmes de protection du revenu.

Je crois que c'est important de défendre les intérêts des agriculteurs du Québec et de souligner que ce n'est pas uniquement dans les matières agricoles que ce présent gouvernement semble vouloir étouffer et égorger les gens. Dans d'autres domaines aussi on peut noter plusieurs programmes dans lesquels le gouvernement fédéral retire des sommes du Québec et on se demande ce qui se passe effectivement non seulement dans le domaine agricole, mais dans d'autres domaines, par exemple dans le domaine maritime, dans le projet Tokamak et d'autres projets au Québec où le gouvernement retire des fonds, retire son appui.

On a comme l'impression que ce gouvernement fédéral est en train de retirer de plus en plus d'argent des projets au Québec et de retirer ses installations du Québec. Pourquoi? Je me demande en fait si ce n'est pas que le gouvernement a un plan B, mais sur le plan économique, c'est-à-dire un plan B qui veut mettre la pression sur tous les secteurs économiques.

Mais je suis soulagé, cependant, sachant que les agriculteurs, tout au moins dans notre belle province du Québec, sont très bien organisés avec l'UPA et peuvent de plus en plus se défendre et développer leur commercialisation non seulement sur le continent nord-américain, mais en Europe et partout dans le monde.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de parler du projet de loi C-34, Loi sur les programmes de commercialisation agricole.

Comme d'autres députés l'ont expliqué avant moi, le projet de loi réunit quatre lois différentes. On pourrait croire qu'il en résultera des économies au titre de l'administration. À la réunion d'information, les représentants du ministère ont prétendu que cette fusion engendrerait des économies de plus d'un million de dollars. Nous devrons attendre pour voir si ces économies se réaliseront vraiment. Je n'ai pas beaucoup confiance que ce soit le cas.

Je m'inquiète de l'administration du projet de loi. Si l'efficacité du gouvernement ne s'améliore pas, l'administration des programmes prévus dans ce projet de loi se soldera par un véritable désastre. Prenons, par exemple, le programme de rachat de la subvention du Nid-de-Corbeau, mis en oeuvre à la suite du budget de l'année dernière. Aux termes de ce programme, 75 p. 100 de l'argent qui doit être versé aurait dû l'être à la fin de janvier. Nous n'avons pas encore atteint ce niveau de 75 p. 100. Si le bilan en ce qui concerne l'administration des programmes ne s'améliore pas, ce programme sera peu utile aux agriculteurs.

(1755)

En ce qui concerne les paiements anticipés, il est absolument nécessaire que l'administration soit simple et que le processus soit très rapide, car autrement, cela va tout à fait à l'encontre de l'objectif qui consiste à verser de l'argent aux agriculteurs à l'automne avant qu'ils puissent, en fait, vendre leurs récoltes. C'est souvent difficile de vendre les récoltes à l'automne pour obtenir l'argent nécessaire pour payer les factures. Ce programme a pour objectif de verser l'argent aux agriculteurs très rapidement. Si l'administration est lente, comme je pense qu'elle l'est peut-être, en fonction du bilan du gouvernement, c'est un pas en arrière. Nous devrons simplement attendre et voir ce qui se passe à cet égard.

Le projet de loi parle simplement de modifier la Commission canadienne du blé. À l'heure actuelle, c'est la commission qui administre la Loi sur les paiements anticipés pour le grain des Prairies. À la suite de cette modification, ce programme deviendra l'un des quatre programmes visés par la Loi sur les programmes de commercialisation agricole.


3953

Il s'agit de faire beaucoup plus que de simplement apporter de petites modifications à la Loi sur la Commission canadienne du blé. Je me rappelle de l'époque où j'étais simplement un petit môme autour de 1960. Une fois la récolte commencée, mon père, qui avait enfin du grain à vendre et avait un besoin désespéré d'argent pour les fournitures scolaires et d'autres choses, se plaignait du fait que la Commission canadienne du blé ne lui fournissait tout simplement pas un moyen assez rapide de commercialiser son grain. Même à l'époque, il y a 35 ou 36 ans, il voulait avoir le choix de passer par la Commission canadienne du blé ou de vendre directement lui-même pour qu'il puisse obtenir l'argent quand il voulait et au moment où il en avait besoin. On lui refusait ce droit à l'époque et voilà que 35 ans plus tard on nie aux agriculteurs canadiens un droit qui devrait leur revenir, c'est évident, c'est-à-dire celui de commercialiser leur grain comme bon leur semble, que ce soit en passant par la Commission canadienne du blé ou en utilisant d'autres moyens de leur choix.

Cela semble tout simplement absurde. C'est si absurde que je ne peux le comprendre. J'ai fait campagne jeudi et vendredi derniers dans la circonscription d'Hamilton-Est dans le cadre de l'élection partielle. En faisant du porte à porte, j'ai rencontré une personne qui m'a parlé de la Commission canadienne du blé et qui m'a demandé pourquoi les agriculteurs ne pouvaient commercialiser leurs produits eux-mêmes. Même les Canadiens qui habitent au coeur de nos villes comprennent enfin à quel point il est ridicule d'interdire aux agriculteurs de vendre leurs propres céréales, leur propre produit. Il est temps de passer aux actes, au lieu de se contenter d'y songer.

Quand je suis sorti de l'université, en 1974, je me souviens qu'à la faculté de l'agriculture, il était déjà question de modifier la Loi sur la Commission canadienne du blé et la Commission canadienne du blé, afin de permettre aux agriculteurs d'exercer un plus grand contrôle. Même à cette époque, la Commission faisait problème et les étudiants constataient la nécessité d'un changement. Cela fait donc plus de 30 ans que j'ai commencé à promouvoir le changement de la Commission canadienne du blé. Je ne voulais pas l'éliminer, mais seulement la modifier pour qu'elle soit tenue de rendre des comptes aux agriculteurs et pour que les agriculteurs aient le choix de vendre leurs produits sans son intermédiaire.

Pendant toutes ces années, un grand nombre de mes amis et de mes connaissances ont milité en faveur d'une modification à la Commission canadienne du blé, mais elle est restée pratiquement inchangée.

(1800)

Enfin, depuis un an, le gouvernement de l'Alberta a pris l'initiative de défendre les agriculteurs contre le monopole de la Commission canadienne du blé. Un plébiscite équitable a eu lieu et un très fort pourcentage des producteurs agricoles y ont participé. Par une majorité écrasante des deux tiers, ils ont dit appuyer l'élimination du monopole sur la commercialisation de l'orge et 62 p. 100 d'entre eux ont appuyé l'élimination du monopole sur la vente du blé.

Les agriculteurs albertains ont tranché la question. Ils ont pris position et le dossier est clos. Le ministre de l'Agriculteur n'a plus qu'à exécuter leur volonté. Ils savent ce qu'il faut. Ils ont voté pour pouvoir choisir de vendre leurs produits par l'intermédiaire de la commission ou sans son intermédiaire.

Or, le ministre de l'Agriculture résiste en proposant d'apporter à la Commission canadienne du blé ces changements mineurs qui ne résoudront pas le problème. Il nous dit sans cesse d'attendre de voir les résultats du comité d'étude sur la commercialisation. Je puis dire tout de suite à la Chambre quels seront ces résultats. Ils seront exactement comme j'ai dit qu'ils seraient avant que le comité commence son étude. Les travaux du comité n'aboutiront pas aux changements que les agriculteurs souhaitent voir apporter à la Commission canadienne du blé. On y apportera quelques retouches en parlant d'un changement important. Il reste que les travaux du comité d'étude n'aboutiront pas à la fin du monopole de la Commission sur la commercialisation du blé.

C'est dommage. Pourquoi devrait-on refuser aux agriculteurs canadiens le droit de commercialiser leur produit? Ils l'ont cultivé. Personne d'autre ne paie ce qu'il en coûte d'entreprendre une culture, la sueur et le travail que cela exige pour ensemencer et veiller sur la culture jusqu'à la récolte et ensuite récolter le produit. Personne d'autre ne prend les risques inouïs que les agriculteurs prennent pour produire une récolte.

Puisque le gouvernement ne prend pas ces risques à la place des producteurs, pourquoi donc leur refuse-t-il le droit, car il s'agit bien d'un droit, de commercialiser leur produit comme ils l'entendent? Le temps est venu de faire plus que des retouches.

Viendra un temps où les producteurs seront tellement fâchés et exaspérés par cette inaction qu'ils réclameront le démantèlement de la commission en disant qu'ils ne veulent plus rien avoir à faire avec elle.

Pourquoi le ministre n'agit-il pas avant que cela ne se produise pour parer à l'élimination complète de la commission? Je ne crois pas que la majorité des agriculteurs le souhaitent. Ils veulent cependant le droit de commercialiser leur produit par l'intermédiaire de la commission ou par eux-mêmes. Ils veulent avoir le choix. Quel autre secteur ne possède pas ce choix? Je n'en vois pas d'autre. Qu'est-ce qui retarde le processus? Pourquoi cette résistance? Cela a-t-il quelque chose à voir avec ce qui se passe au sein de la Commission canadienne du blé? Se passe-t-il quelque chose à l'intérieur de cet organisme qui échappe à l'accès à l'information? J'ai invoqué plusieurs fois la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir des renseignements au sujet de la Commission canadienne du blé. Je ne peux les obtenir. Ceci explique-t-il cela? Je ne puis trouver de réponse.

Le ministre de l'Agriculture ferait mieux d'agir rapidement à cet égard, sinon la Commission canadienne du blé finira par disparaître. Ce serait dommage.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée.)


3954

(1805)

LA LOI SUR LA MÉDIATION EN MATIÈRE D'ENDETTEMENT AGRICOLE

L'ordre du jour appelle: Initiatives ministérielles:

17 juin 1996-Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire-Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire du projet de loi C-38, Loi visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers, modifiant la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Madame la Présidente, je propose:

Que le projet de loi C-38, Loi visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers, modifiant la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire et abrogeant la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, soit renvoyé sur-le champ au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Madame la Présidente, Je suis très heureux d'entamer le débat sur la motion demandant le renvoi, devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, du projet de loi C-38 sur la médiation en matière d'endettement agricole, préalablement à la deuxième lecture.

Le gouvernement a promis de donner plus d'influence aux députés et aux comités parlementaires. C'est cette promesse qu'il honore en soumettant les projets de loi aux comités avant leur deuxième lecture, une démarche rarement accomplie par le passé. Le gouvernement entend ainsi donner aux comités la possibilité d'apporter des amendements majeurs aux projets de loi. Il nous permet aussi de vraiment nous assurer qu'aucune préoccupation n'a été négligée.

Le ministre d'Agriculture et d'Agroalimentaire Canada tient à faire suivre cet itinéraire à ce projet de loi parce qu'il veut être certain que toutes les parties intéressées auront l'occasion de donner leur avis sur cet important texte législatif.

En tant qu'ancien président du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, je partage avec le ministre la certitude que les membres du comité sont à même d'apporter des modifications constructives au processus de médiation en matière d'endettement agricole, à la faveur de leurs délibérations et de leurs audiences.

La question de l'endettement agricole ne se pose pas d'hier; elle nous hante depuis longtemps. Les agriculteurs sont obligés d'investir des sommes importantes pour acquérir les semences ou le cheptel, les engrais ou les aliments du bétail, les machines ou les installations, et ils attendent longtemps avant de toucher le premier produit de cet investissement. Sans compter qu'ils sont à la merci des caprices de la nature et des aléas des marchés. Quand la nature et les marchés s'en mêlent, l'endettement des agriculteurs atteint des proportions dramatiques.

C'est en substance le scénario dont ils ont souffert dans les années 1980. À cause de la cherté du loyer de l'argent au début de cette décennie, les agriculteurs ont dû consacrer une part énorme de leur trésorerie à assurer le service de la dette, alors que dans le même temps leurs ventes ne leur laissaient qu'une faible marge de profit. De surcroît, ils ont vu diminuer la valeur marchande de la plupart des éléments d'actifs agricoles, en particulier des terres, au cours de cette même période.

Au milieu des années 80, de nombreux agriculteurs avaient accumulé des arriérés de paiements. Cet état de choses avait conduit à proclamer la Loi sur l'examen de l'endettement agricole en 1986. La loi a eu pour effet de constituer, dans chacune des provinces, un bureau d'examen de l'endettement agricole, le BEEA, qui est chargé d'assurer un processus de médiation impartial, par tierce partie, entre les agriculteurs et leurs créanciers.

Dans notre plate-forme électorale de 1993, nous avons promis de renforcer le processus d'examen de l'endettement agricole. C'est précisément ce que nous entendons faire aujourd'hui en proposant la nouvelle loi. Celle-ci prévoit la création d'un nouveau service de médiation en matière d'endettement agricole, qui est appelé à remplacer progressivement les BEEA.

Ce nouveau service de médiation aidera les agriculteurs à se positionner sur les marchés et à s'orienter vers de nouvelles sources de revenu; il aidera en outre ceux qui sont aux prises avec des difficultés financières.

Trois grandes considérations ont présidé à la conception du service. Le service doit suppléer aux services existants et non les dédoubler. Son administration doit être efficace. Ses coûts doivent être inférieurs à ceux du processus appliqué par les BEEA.

Le nouveau service sera financé par le Fonds canadien d'adaptation et de développement rural, doté de 240 millions de dollars, qui avait été annoncé dans le budget 1995 pour aider le secteur à négocier le virage vers une économie de marché plus efficace et plus compétitive.

(1810)

Cette proposition n'a pas été élaborée dans une tour d'ivoire par des bureaucrates coupés du monde. Au cours de l'été dernier, Agriculture et Agroalimentaire Canada a consulté des représentants des principales organisations agricoles, de ministères provinciaux de l'agriculture et d'institutions de crédit. Le ministère a aussi organisé sept groupes de discussion régionaux auxquels ont participé des agriculteurs et des conseillers en gestion d'entreprise agricole.

Ces consultations ont permis de définir les composantes d'un nouveau service d'examen du revenu agricole ainsi que ses mécanismes possibles d'administration. Le ministère a ensuite tracé les grandes lignes du programme en fonction de ce qui était ressorti des consultations comme étant les éléments importants du nouveau service.

Le ministère a également mis sur pied un comité consultatif national d'examen auquel siègent des représentants des organisations agricoles, des institutions de crédit et de deux gouvernements provinciaux. Le comité s'est réuni en décembre dernier pour discuter des grandes lignes du programme proposées par le Ministère et entendre les préoccupations et les suggestions.

En janvier, les BEEA et tous les gouvernements provinciaux ont été invités à présenter leurs avis sur le programme proposé. Ayant pris dûment note de ces avis, le gouvernement propose donc la création du Service de médiation en matière d'endettement agricole. Le nouveau service de médiation en matière d'endettement agricole accordera à l'agriculteur insolvable les mêmes avantages que les actuels bureaux d'examen de l'endettement agricole, à savoir la suspension des procédures engagées par les créanciers, l'examen de la situation financière et la médiation.

En substance, il continuera de permettre à l'agriculteur en difficulté de bénéficier d'un processus de médiation et de s'entendre avec ses créanciers sur un moyen de régler ses dettes. Toutefois le


3955

nouveau service se différencie du processus actuel par la possibilité qu'il offre à l'agriculteur et à ses créanciers de porter en appel, devant un comité d'appel, les décisions relatives à la suspension des procédures.

Les membes actuels de BEEA pourront être nommés au nouveau comité d'appel, tandis que les services des médiateurs compétents pourront être retenus par le processus normal d'adjudication des contrats publics. Les membres des bureaux d'examen de l'endettement agricole qui exercent actuellement les fonctions de médiateur en application de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole pourront être inscrits sur la liste des médiateurs auxquels le nouveau programme fera appel. Les médiateurs exerceront seuls leurs fonctions, et non plus au sein d'un comité d'examen, composé de trois personnes, comme le prévoit la loi actuelle.

Ces changements, et le fait que seuls les agriculteurs insolvables pourront se prévaloir de la nouvelle loi, permettront d'économiser plus d'un million de dollars par an. Le programme, qui a coûté estimativement 3,5 millions de dollars en 1995-1996, ne coûterait plus que 2,2 millions de dollars par an.

Il est également ressorti des consultations que les agriculteurs, les organisations agricoles, les agronomes provinciaux et le secteur privé seraient en mesure de prendre en charge un service de consultation s'adressant aux agriculteurs qui ne sont pas aux prises avec un endettemement excessif. Le Service de consultation agricole offrirait essentiellement des services d'évaluation financière et aiderait les agriculteurs qui connaissent des difficultés de trésorerie à déterminer des moyens de réorienter leurs activités et de réduire leurs coûts afin de rendre leurs exploitations agricoles plus rentables.

En fonction de leur situation et de leurs besoins particuliers, les agriculteurs seraient dirigés vers des agents provinciaux de vulgarisation, d'autres programmes provinciaux ou fédéraux, ou des intervenants du secteur privé, auprès de qui ils pourront obtenir d'autres types de services.

Comme l'aiguillage des agriculteurs vers d'autres services et programmes serait l'un des éléments clés du Service de consultation agricole, il est important que les mécanismes de prestation de ce service soient conçus au terme de consultations approfondies avec les organisations agricoles et les autres parties intéressées comme les institutions de crédit, ou les membres du Programme canadien de la gestion d'entreprise agricole.

Il serait également important de créer et de tenir à jour un répertoire des services offerts dans chaque province. Les coûts de prestation du Service de consultation agricole pourraient être maintenus à un niveau minime. Ce service pourrait être fourni par les bureaux du Service de médiation en matière d'endettement agricole; il pourrait aussi être élaboré et administré en collaboration avec les provinces ou avec d'autres programmes existants le cas échéant. Le service aiderait les agriculteurs à établir des plans d'exploitation, à s'orienter vers d'autres activités ou modes de production afin de diversifier et d'agrandir leur exploitation, et de créer des ateliers de production à valeur ajoutée.

Je viens d'expliquer la façon dont s'appliquerait la nouvelle Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. J'aimerais demander aux députés d'adopter la motion de renvoi du projet de loi au comité, maintenant, avant sa deuxième lecture.

(1815)

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, mon intervention, dans le cadre du débat entourant la deuxième lecture du projet de loi C-38, se fonde d'abord sur des préoccupations d'ordre éthique et philosophique, ces deux problématiques relevant de mes obligations parlementaires de porte-parole de l'opposition officielle en matière agricole et agroalimentaire.

Cet état de fait peut sembler un tantinet obscur, mais vous saisirez rapidement mon point de vue à la lumière des informations que je vous exposerez.

Ainsi, le projet de loi C-38 visant à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers fournira une base juridique importante dans la résolution de conflits à connotation financière. Cette nouvelle loi abrogera et remplacera la Loi sur l'examen de l'endettement agricole, ce qui aura comme conséquence directe de faciliter les procédures administratives pour les agriculteurs et également de permettre un règlement plus équitable pour les créanciers.

De prime abord, nous devons saluer cette initiative du ministère qui semble démontrer davantage de considération à l'égard de l'ensemble des agriculteurs. Dans cette même foulée, plusieurs regroupements de producteurs agricoles, par le biais de leur conseil exécutif, ont donné leur aval, leur accord à ce projet de loi. Il en sera probablement de même pour le Bloc québécois lorsqu'on sera rendu en comité pour l'étude du projet de loi C-38 article par article.

Or, certaines appréhensions se font sentir en ce qui concerne les producteurs qui se trouveront inévitablement un jour ou l'autre dans une situation financièrement précaire. En effet, le projet de loi C-38 prévoit le remplacement de l'ancienne Loi sur l'examen de l'endettement agricole. Cette dernière proposait, en outre, la possibilité pour les agriculteurs en difficulté financière de recourir à l'expertise du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire du Canada en matière économique, ceci, pour éviter des situations encore plus graves. En d'autres termes, le ministère offrait un service de prévention de l'endettement en plus de fournir des moyens techniques et le support requis pour pallier ces situations difficiles.

Dans cette perspective, on pourrait croire que les agriculteurs bénéficieront de l'appui le plus complet de la part du ministère, mais dans les seuls cas où l'intimé lui-même n'aura plus la capacité ou la possibilité de fixer les règles du jeu. En d'autres termes, le producteur qui aura recours aux modalités du projet de loi C-38 sera dans une situation de grâce face à ses créanciers.

Autrement dit, pour que le producteur agricole puisse bénéficier de ce nouveau projet de loi, il faudra, à toutes fins utiles, qu'il ait la corde au cou. Alors là, il sera à l'extrême limite, alors qu'avant, il pouvait commencer à étudier les possibilités avant d'être enlisé dans son endettement jusqu'au cou.

Voilà donc la dimension éthique et philosophique que je vous exposais au début de mon allocution. Comment l'État peut-il refuser ou du moins limiter les recours d'un individu face à une situation de crise latente? Il y aurait peut-être lieu de s'interroger davantage sur cet aspect du projet de loi qui, somme toute, représente un caractère novateur et conforme au courant de modernisme qui anime le secteur agricole depuis plusieurs années au pays.

Nous savons pertinemment bien que l'initiative du gouvernement de réformer ce secteur de la législation agricole s'inscrit dans une optique de redressement des finances publiques.


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(1820)

En effet, cette modification permettra d'économiser un million de dollars. C'est énorme, compte tenu du fait qu'en 1995-1996, à cet égard, le gouvernement a investi 3,2 millions. Économiser un million sur trois millions, c'est 33 p. 100. C'est énorme en pourcentage. Ce n'est pas énorme en termes de dollars, un million pour la grandeur du pays, mais c'est quand même un début. C'est un pas dans la bonne direction.

Cependant, il est primordial de s'assurer que cette économie ne sera pas réalisée aux dépens de citoyens dans une situation financière précaire. Car si tel était le cas, cette mesure perdrait tout son aspect louable et profitable. En effet, on peut se demander si les coûts sociaux engendrés par cette mesure seront plus élevés que les économies réalisées par celle-ci.

Dans un autre ordre d'idées, le projet de loi C-38 prévoit l'abolition des bureaux chargés d'effectuer la médiation entre le producteur agricole et ses créanciers pour les remplacer par un organe similaire d'une autre instance. Si l'on considère cette option dans les termes précis du projet de loi, la responsabilité de médiateur incomberait dorénavant à un seul individu nommé par un administrateur régional, lui-même nommé par le ministère et chargé de l'application de la loi à l'échelle régionale.

Il va sans dire que cette alternative, laissant poindre à l'horizon un autre problème éthique de taille en ce qui concerne la nomination d'un fonctionnaire pour assurer la médiation en matière d'endettement, laisse ici la porte toute grande ouverte à une forme de patronage latent. Il est logique de croire que certains critères d'embauche pourraient être formulés de manière à contourner la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

À ce titre, il est fondamental qu'un débat public ait lieu concernant la nomination de ces administrateurs de manière à s'assurer qu'aucune partie ne puisse tirer avantage de cette nomination. De plus, on devra s'assurer de pouvoir compter sur les services de plusieurs médiateurs, de manière à éviter que les mêmes personnes soient toujours appelées à exercer cette fonction.

La même logique s'applique en ce qui concerne la désignation aux comités d'appel, lesquels seront également constitués par le ministre. Sans vouloir sombrer dans la paranoïa, l'opposition officielle est en droit d'exiger davantage de précisions sur ces aspects précis du projet de loi. Nous appuyons le principe selon lequel le projet de loi C-38 responsabilisera davantage les agriculteurs dans la façon de gérer leurs affaires. D'autant plus que cette mesure législative aura pour effet de générer une économie d'un million de dollars.

En terminant, je voudrais attirer votre attention sur la façon de nommer le médiateur. Il faudrait éviter de répéter-et je termine là-dessus-les gestes souvent disgracieux qu'on voit dans les centres d'emploi du Canada, notamment lorsqu'on nomme le président et le comité pour réviser les causes d'arbitrage. Souvent, on nomme des personnes seulement pour leurs opinions politiques, celles-ci n'ayant jamais vu un chômeur de près.

J'espère que le médiateur saura ce que c'est, un agriculteur, et qu'il saura ce que c'est, l'endettement.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, je vais faire une intervention de 10 minutes sur le projet de loi C-38, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Comme le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire l'a signalé dans ses observations, qui sont semblables à celles qu'il avait faites sur le projet de loi C-34, mes remarques pourraient être semblables aussi.

(1825)

Je présume que nous aurons amplement le temps d'examiner ce projet de loi au comité, puisqu'il lui est renvoyé avant la deuxième lecture et que des amendements pourront être envisagés. Nous croyons que le projet de loi C-38, comme le C-34, pourrait être approuvé après l'audition des témoins et un examen plus approfondi. Nous pensons pouvoir donner à cette mesure une forme acceptable, si le gouvernement accepte les amendements.

Le projet de loi sur la médiation remplace la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. Il ne va pas secouer le secteur agricole. Il ne transformera pas beaucoup le paysage agricole au Canada et ne prête pas tellement à controverse. On pourrait peut-être dire à son sujet, comme je l'ai fait à propos du C-34, que c'est une tactique de diversion. Il vaudrait peut-être mieux parler dans ce cas-ci de tactique dilatoire.

À l'heure actuelle, la situation est désespérée pour les libéraux dans le Canada rural. Ils ont snobé les préoccupations et les valeurs rurales dans leur programme législatif, ou plutôt l'absence de programme législatif, depuis qu'ils ont pris le pouvoir, en octobre 1993. Un seul mot suffit à expliquer rapidement l'impopularité des libéraux dans le monde rural: projet de loi C-68. En effet, la loi sur le contrôle des armes à feu a été une insulte pour les ruraux. Le ministre leur a dit: «Je ne vous fais pas confiance, je n'aime pas votre mode de vie, et je pense que je dois le rectifier.» Le ministre de la Justice a montré qu'il ne comprenait pas le Canada rural, et les députés libéraux représentant des régions rurales attendent désespérément une loi qu'ils pourront brandir comme une preuve que les libéraux se préoccupent du Canada rural.

Pour les ruraux, le C-68 a été comme si on disait à des citadins quelle marque de voiture ils doivent acheter. Ce projet de loi, c'était comme dicter à quelqu'un la façon dont il devait s'habiller. Cette façon de procéder moyenâgeuse n'est pas très bien acceptée par les Canadiens des régions rurales. Ces derniers ne sont pas très satisfaits du gouvernement libéral, et les libéraux cherchent des semblants de solutions pour apaiser un peu le mécontentement qu'ils ont créé parmi les électeurs des régions rurales d'un océan à l'autre.

Le projet de loi C-33 est une autre mesure législative que le gouvernement libéral estimait extrêmement prioritaire-il l'a adoptée à toute vapeur en quelques semaines. Cette mesure n'a pas été très bien acceptée non plus dans les régions rurales du Canada. Les libéraux prétendaient que ce projet de loi empêcherait la discrimination contre les gais et les lesbiennes, alors que les réformistes voyaient là un précédent dans l'octroi d'avantages particuliers à un groupe de la société. Nous avons raison de dénoncer ainsi le projet


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de loi. L'autre jour, le Tribunal des droits de la personne a dit que le projet de loi C-33 obligeait les employeurs à consentir les avantages aux conjoints, quels qu'ils soient.

Les libéraux se disent ceci: «Il nous faut contrer cette critique d'une façon ou d'une autre. Présentons le projet de loi C-38, mesure visant à faciliter la médiation et à remplacer la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.»

Comme certains libéraux semblent mécontents lorsque je parle du projet de loi C-33, je devrais peut-être mentionner quelques statistiques à l'appui. Un sondage réalisé récemment par la firme Angus Reid révèle comment la question des prestations au conjoint est perçue dans les régions rurales canadiennes. J'allais passer à autre chose, mais les libéraux semblent vouloir que j'en parle encore un peu.

Au Manitoba et en Saskatchewan, 54 p. 100 de la population des régions tant urbaines que rurales des Prairies-et je suis certain que la proportion est encore plus élevée dans les régions rurales de ces provinces-est contre l'octroi de ces prestations au conjoint, et un autre 4 p. 100 est indécis. L'opposition est vive. En Alberta, elle l'est encore plus, 55 p. de la population s'opposant à cette idée et la proportion d'indécis atteignant 7 p. 100. Une minorité encore plus faible a appuyé les mesures que le gouvernement libéral a proposées dans le projet de loi C-33.

Pour essayer de panser les blessures, les libéraux ont présenté les projets de loi C-34 et C-38. Ils peuvent parler des effets merveilleux qu'auront ces deux projets de loi qui seront mis en veilleuse durant l'été. Nous les étudierons à notre retour à l'automne.

Pourquoi l'endettement agricole constitue-t-il un problème? Car c'en est un, et depuis un certain temps déjà. Voyons ce que la Société du crédit agricole a fait à ce sujet il y a une dizaine ou une vingtaine d'années. Elle est devenue un prêteur de dernier recours.

(1830)

Elle a consenti des prêts assez stupides, des prêts qu'elle n'aurait jamais dû consentir. Elle a poussé bien des banques et des coopératives de crédit à l'imiter. Elle prêtait de l'argent en fonction de prévisions bien trop optimistes dans le secteur agricole.

Puis ce dernier a été frappé par la hausse des taux d'intérêt, qui ont atteint 19, 20, 21, voire 25 p. 100, et la baisse du prix des produits agricoles durant les années 80. Soudainement, une foule d'agriculteurs ont perdu leurs biens, croulant sous les dettes et ne pouvant supporter une telle charge.

La Société du crédit agricole et les banques ont pris possession de leurs terres. Le Bureau d'examen de l'endettement agricole a été formé pour faciliter la conclusion d'ententes entre les prêteurs et les producteurs afin d'atténuer les difficultés que traversaient ces derniers quand ils ne pouvaient pas faire leurs paiements à la Société du crédit agricole et aux autres créanciers.

La Société du crédit agricole semble recommencer à consentir des prêts qu'elle ne devrait pas consentir. Le ministre a parlé d'un élargissement du rôle de la Société du crédit agricole. On constate encore une hausse de la valeur des terres. On peut se demander si la situation des années 80 ne va pas se reproduire. Ce projet de loi sur la médiation en matière d'endettement agricole pourrait avoir des effets bien plus considérables dans l'avenir que nous ne l'imaginons à l'heure actuelle.

C'est certes une bonne chose que de présenter des projets de loi comme celui sur la médiation en matière d'endettement agricole pour tenter de régler des problèmes avec lesquels les agriculteurs sont aux prises quand ils manquent de liquidités et qu'ils sont incapables de faire leurs paiements sur des prêts leur ayant été consentis.

Mais il faut examiner la situation dans son ensemble et chercher à savoir pourquoi les agriculteurs et d'autres entrepreneurs ont des difficultés. Il faut déterminer pourquoi il y a tant de faillites, de forclusions et de mises sous séquestre. C'est parce que les coûts d'exploitation d'une entreprise sont très élevés au Canada.

Si le gouvernement libéral tentait de régler ce problème d'abord au lieu d'essayer de détourner notre attention en remplaçant la Loi sur le Bureau d'examen de l'endettement agricole par la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, cela vaudrait bien mieux pour les producteurs, qui ressentent actuellement un resserrement des marges de profit.

Les agriculteurs canadiens paient des impôts élevés. Le gouvernement libéral a augmenté les impôts et semble être enclin à maintenir les coûts d'exploitation d'une entreprise à un niveau élevé au Canada. Les intrants agricoles coûtent cher. Le comité s'est penché sur le coût des intrants agricoles. Il a constaté que le coût élevé de certains intrants était attribuable au fardeau administratif imposé aux agriculteurs.

Nous avons eu récemment une conférence agro-biotechnologique en Saskatchewan durant laquelle le premier ministre de la Saskatchewan a dit que les coûts de production élevés du secteur agricole étaient en partie attribuables à une réglementation excessive. La loi sur l'enregistrement des pesticides doit être modifiée en raison du fardeau administratif qui est transmis aux consommateurs.

C'est certes une bonne chose que de tenir un débat sur le projet de loi C-38, comme nous le ferons sans doute à notre retour à l'automne, mais ce n'est pas ce projet de loi qui réglera le problème de l'endettement agricole. Les agriculteurs sont endettés parce que leurs coûts d'exploitation sont très élevés, parce que les impôts sont élevés et parce que leur secteur est suréglementé.

Notre autre préoccupation relative au projet de loi a trait aux nominations partisanes, comme celles qui ont été faites au Bureau d'examen de l'endettement agricole. Nous voulons nous assurer que les médiateurs seront nommés ou choisis en fonction du mérite et de leur crédibilité plutôt que de leur affiliation au Parti libéral. C'est extrêmement important.

Nous avons hâte de proposer des améliorations au projet de loi quand nous reviendrons cette automne.

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureuse de pouvoir intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-38, sur la médiation en matière d'endettement agricole, qui est très important pour les familles d'agriculteurs.


3958

La nouvelle loi remplacera la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. La mise en place d'un système de médiation en matière d'endettement agricole est un autre exemple de la haute priorité que le gouvernement libéral accorde au Canada rural, aux familles d'agriculteurs et aux agriculteurs eux-mêmes. Ce projet de loi n'est qu'une de nos nombreuses initiatives visant à améliorer le système de manière à mieux servir le secteur agricole.

La nouvelle loi apporte des solutions aux problèmes que les agriculteurs ont dit eux-mêmes avoir rencontré au fil des ans dans leurs rapports avec le Bureau d'examen de l'endettement agricole. La nouvelle loi apportera une nette amélioration à la position des agriculteurs dans les poursuites pour insolvabilité.

(1835)

La Loi sur l'examen de l'endettement agricole est entrée en vigueur il y a 10 ans. Elle répondait aux problèmes d'endettement que vivait le secteur agricole à cette époque. Des bureaux d'examen de l'endettement agricole avaient été établis dans toutes les provinces pour offrir une médiation de tiers entre les agriculteurs et leurs créanciers.

Avec la nouvelle loi, ces bureaux seraient remplacés par un service d'examen du revenu agricole dont le mandat reposerait sur des bases plus larges. Ce nouveau service aidera les agriculteurs à se préparer à saisir les possibilités d'accroître leurs revenus en s'adaptant, ce qui devrait être très utiles à ceux qui éprouvent des difficultés financières attribuables à l'insuffisance de leurs revenus ou à l'incapacité de payer leurs créanciers.

Il s'agit d'une mesure progressiste. Nous mettons en place un système qui aidera les agriculteurs avant que leurs difficultés se transforment en problèmes d'endettement. Nous étendons le choix d'options des agriculteurs et nous élargissons leurs possibilités pour qu'ils puissent rendre leurs activités rentables et s'occuper de ce qu'ils font le mieux, soit produire des produits de haute qualité et nourrir le monde.

Le gouvernement a élaboré le concept de ce nouveau service comme complément aux autres excellentes initiatives qu'il a prises dans le domaine de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

La mesure législative est le fruit de consultations menées partout au Canada auprès des agriculteurs et de leurs créanciers, de même qu'auprès de gouvernements provinciaux. Il n'est donc pas étonnant que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ait obtenu un tel soutien.

Fidèle à la tradition de consultation du gouvernement libéral, nous proposons de renvoyer le projet de loi au comité permanent avant son adoption en deuxième lecture pour donner aux agriculteurs la possibilité de faire connaître leur opinion.

Les meilleures solutions émergent de la consultation et de la collaboration. C'est exactement ce que fait le gouvernement avec un nouveau service pour les agriculteurs, qui est conçu pour faire partie intégrante d'une série d'initiatives d'adaptation visant à aider le secteur à s'adapter et à profiter des occasions qui se présentent, pour renforcer l'économie rurale.

Le service sera financé à même le fonds d'adaptation et de développement rural qui a été annoncé dans le budget de 1995 pour aider le secteur à faire la transition vers une économie de marché plus efficace et plus concurrentielle.

Le nouveau projet de loi maintient la suspension, l'examen et la médiation, mais en légiférant celle-ci. De la sorte, les agriculteurs sont assurés que le processus de médiation sera impartial et que le médiateur n'est pas le conseiller de l'agriculteur ou ne négocie pas en son nom ou au nom du créancier.

En outre, les agriculteurs ont dorénavant la possibilité de porter en appel les décisions rendues concernant l'octroi, la prolongation et la levée de la suspension, ce qui n'est pas prévu dans la loi actuellement en vigueur.

En instaurant un processus d'appel et un comité d'appel officiel, le gouvernement libéral offre un recours supplémentaire aux agriculteurs. Compte tenu du fait que le gouvernement a promis de réduire le coût de l'administration gouvernementale et d'économiser l'argent des contribuables, ce nouveau service serait moins coûteux à administrer par le biais de l'actuel Bureau d'examen de l'endettement agricole.

Étant donné que c'est moins lourd sur le plan administratif, ce serait une meilleure occasion de réduire le dédoublement et de faire intervenir les services de médiation provinciaux. Le nouveau service d'examen du revenu agricole comprendrait deux services différents: un service de médiation de la dette et un service de consultation agricole non lié à une crise d'endettement.

Le nouveau service de médiation de la dette serait également basé sur un modèle prévoyant un seul médiateur au lieu du groupe actuel de trois personnes. Il n'y aurait plus de Bureau d'examen de l'endettement agricole et les médiateurs ne seraient pas nommés par le ministre.

Nous dépolitisons le processus dans l'intérêt des agriculteurs. Ces changements réduiraient le coût du programme de plus d'un million de dollars par an.

L'autre volet du nouveau service d'examen du revenu agricole, le service de consultation agricole, fournirait des consultations financières aux agriculteurs ayant des urgences ou lorsque les familles agricoles cherchent des possibilités.

Le service serait de nature préventive et il fournirait des conseils sur les problèmes de liquidités tout en aidant les agriculteurs à examiner diverses options pour la diversification, l'expansion, le rétrécissement et la restructuration de leur exploitation.

Ce projet de loi aidera les agriculteurs à mieux gérer leur avenir économique et à accroître la prospérité du secteur agricole et des collectivités rurales en général.

L'optimisme règne plus que jamais dans le secteur agricole. Cet optimisme est le résultat des politiques constructives que le gouvernement libéral met en place, comme un nouveau projet de loi visant à aider les agriculteurs.

(1840)

J'ai constaté cet optimisme au cours de la fin de semaine dernière, lorsque j'ai eu l'honneur d'assister à une fête organisée pour la ferme centenaire de la famille Dalgeish de Grandview. Quatre générations de Dalgeish ont travaillé de longues heures dans des conditions très difficiles pendant la crise des années 30, par des chaleurs torrides et par un froid intense, en temps de sécheresse et en période d'inondations, à des moments où les marchés étaient vigoureux et pendant des guerres de prix mondiales. Ils ont persévé-


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ré et cultivé la même exploitation agricole pendant 100 ans, ce qui mérite d'être fêté. Je suis une agricultrice de troisième génération et je sais qu'il importe de maintenir les traditions agricoles.

Je suis heureuse de faire partie d'un gouvernement qui instaure des politiques agricoles préventives afin d'assurer à la longue la survie et la prospérité des exploitations agricoles familiales, des politiques qui font en sorte que nous aurons de nombreuses exploitations agricoles centenaires à fêter.

J'ai toujours été et je reste une ambassadrice du milieu rural, une ambassadrice du développement économique rural. Jamais dans les annales du Canada, l'avenir du milieu rural n'a semblé aussi prometteur et c'est au moins en partie à cause des initiatives très constructives que le gouvernement libéral a prises pour renforcer le secteur agricole. Le gouvernement met en place les fondements nécessaires pour permettre aux régions rurales et aux agriculteurs de faire la transition au XXIe siècle et c'est pour cette raison que j'appuie ce projet de loi de tout coeur.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, premièrement, j'aimerais saluer un de mes amis qui réside à North Bay, en Ontario, qui s'appelle Jean Tanguay. Il est peut-être en train de nous écouter et je voulais, non seulement souligner sa présence, mais lui dire aussi que je n'ai pas l'occasion maintenant de parler de questions francophones ou des problèmes se rapportant aux francophones de l'Ontario. Aujourd'hui, je me lève pour parler sur un sujet qui porte sur l'agriculture, et c'est le projet de loi C-38.

Il s'agit en fait de la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Je suis heureux de voir que l'on veuille, d'ailleurs, rafraîchir la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. On se souviendra que cette dernière avait été adoptée en 1986, il y a dix ans, au moment où, au sein de l'industrie agricole, il y avait un nombre exceptionnellement élevé de familles agricoles qui avaient été forcées d'abandonner l'agriculture parce qu'elles étaient incapables de respecter leurs obligations d'emprunt.

Des bureaux d'examen de l'endettement ont alors été créés dans chacune des provinces. Le projet de loi C-38 vise à faciliter la médiation entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers. Il vise aussi à modifier la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire. Il est évident que le texte du projet de loi C-38 vient abroger et remplacer la Loi sur l'examen de l'endettement agricole et prévoir, pour un agriculteur insolvable, qu'il y ait, dans un premier temps, une étude de sa situation financière et, dans un deuxième temps, que l'on procède à des arrangements financiers avec les créanciers, d'où l'importance d'une médiation et, le cas échéant, la suspension des recours des créanciers contre l'agriculteur en sérieuses difficultés.

D'autre part, le projet de loi C-38 prévoit, en cas de contravention, l'application de la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

Mon parti, le Bloc québécois, est en faveur des objectifs du projet de loi C-38, en général du moins. D'ailleurs, il ne s'agit pas d'un projet de loi qui soit controversé. Il semble répondre adéquatement aux préoccupations des agriculteurs, à l'exception des institutions financières.

Le présent projet de loi fait suite à de nombreuses consultations avec les partenaires, lesquelles ont révélé que malgré la nécessité de maintenir le sursis des procédures et de conserver l'aide au niveau de la médiation, des changements pourraient être apportés pour rendre le tout plus efficient et moins coûteux.

Quand on regarde attentivement le projet de loi déposé, on constate que les agriculteurs en difficultés financières ne seraient plus admissibles. Ils l'étaient par contre, selon l'article 20 de la Loi sur l'examen de l'endettement agricole.

(1845)

Maintenant, ce que je comprends, c'est qu'il y a deux créneaux visés pour être admissible. Ce sont, en premier lieu, les agriculteurs qui s'adonnent à l'agriculture à des fins commerciales et, en deuxième lieu, les agriculteurs insolvables, c'est-à-dire ceux qui ne peuvent respecter leurs obligations lorsqu'elles deviennent exigibles ou que leurs biens, une fois vendus, ne suffissent pas à couvrir l'ensemble de leurs dettes.

Le projet de loi C-38, tel que présenté, restreint les critères d'admissibilité. Devant cet état de fait, on peut se demander ce qu'il adviendrait des agriculteurs en difficultés financières. Pour être admissibles à une aide, faudrait-il attendre qu'ils soient insolvables? Permettez-moi de souligner qu'il s'agit là d'une bien drôle de médecine. J'opterais plutôt pour qu'on aide les agriculteurs en difficulté afin de les aider à redresser leur situation financière avant l'insolvabilité. Bien qu'il soit un peu tard pour agir, mieux vaut tard que jamais. Il faut agir tandis qu'il est encore temps. C'est pourquoi je demande au gouvernement de faire quelque chose pour que les agriculteurs en difficulté méritent, eux aussi, le respect de la part du gouvernement.

On nous dit que le nouveau service sera moins coûteux et moins lourd. Bref, c'est l'un des aspects bien précis du projet de loi C-38 qui me dérangent. Un autre aspect de cette révision est l'enchâssement dans la loi de la médiation. Bien sûr qu'il y en avait de la médiation avec la loi actuelle, la Loi sur l'examen de l'endettement agricole. Toutefois, avec le projet de loi C-38, cette dernière sera partie prenante de la loi et assurera l'impartialité du processus parce que le médiateur sera le médiateur. En d'autres mots, le médiateur ne pourra conseiller ni l'agriculteur ni ses créanciers. Son titre l'indique. Il se doit d'agir en tant que médiateur.

Un autre aspect qui m'agace, c'est au sujet de la possibilité qu'aura le ministre, en vertu de l'alinéa 4.a) du projet de loi, de désigner les administrateurs. Je m'explique. Avec le projet de loi C-38, on abolit les bureaux régionaux qui ont été nommés par décret puisque les services fournis le seront dorénavant par des administrateurs régionaux chargés d'appliquer la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole. Ces derniers seront nommés conformément à la Loi sur la fonction publique du Canada.

Là où j'accroche, c'est que le ministre pourra nommer des personnes autres que des fonctionnaires au sens de la Loi sur la fonction publique s'ils remplissent les conditions que le ministre estime indiquées. Faut-il comprendre qu'une partie des administrateurs régionaux seront nommés sur la base des critères édictés par le ministre? Si tel est le cas, je crois que ceci devrait faire l'objet d'un débat. En effet, si le ministre peut nommer des administrateurs selon des critères autres que ceux contenus dans la Loi sur la fonction publique du Canada, comment peut-on s'assurer que lui--


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même ou un éventuel successeur ne se servirait pas de cet article pour des fins partisanes?

Quant au choix des médiateurs, nous apprenons que ceux-ci seront choisis au moyen du processus des marchés concurrentiels et qu'un bassin étendu de médiateurs sera établi. Là aussi, nous sommes en droit de nous questionner sur le processus entourant le choix d'un ou des médiateurs. Y aura-t-il place au patronage, étant donné que nous connaissons les agissements de ce gouvernement dans plusieurs dossiers? Le gouvernement est évidemment trop ouvert au patronage. D'ailleurs, il y avait même à un certain moment un député conservateur, député de Joliette, qui était même ministre, l'honorable Roch LaSalle, qui avait dit que le patronage était une réalité politique.

La preuve est faite dans plusieurs dossiers d'ailleurs. Ce n'est pas uniquement dans la question de l'aéroport Pearson, mais c'est aussi d'Expressvu et d'autres. Il y a beaucoup de patronage qui se fait dans ce gouvernement, surtout dans la sous-traitance des travaux publics. Là aussi, il y a beaucoup de patronage et j'ose dire que je n'aimerais pas voir le patronage s'étendre dans le domaine agricole, domaine tellement important pour l'avenir de bien des gens. Je crois que c'est au gouvernement, par le biais de son ministre, de nous convaincre et de nous rassurer que de telles situations ne se produiront pas.

(1850)

De plus, nous devrions être attentifs aux normes applicables en matière de rémunération tant pour les administrateurs régionaux que pour les médiateurs. Sur un autre plan, l'administrateur du programme pourra désigner tantôt un expert chargé de l'évaluation financière et tantôt un expert qui élaborerait des options à considérer au cours de la médiation.

Une fois de plus, quels sont les critères pour le choix de ces experts? On nous dit qu'on pourrait laisser à l'agriculteur, en lui fournissant les ressources nécessaires, le choix d'engager l'expert ou le conseiller financier de son choix. Quels sont les critères ou les exigences? Vous savez, quand on dit «pourrait», ça ne veut pas nécessairement dire que c'est un droit inaliénable.

En plus, il y a la vingtaine de membres qui feront éventuellement partie du comité d'appel. Ces derniers seraient, une fois de plus, nommés par le ministre. On nous dit qu'ils feraient dans la mesure du possible partie de la communauté agricole. Encore là, il n'y a qu'un voeu peut-être pieux, mais, à mon avis, sans garantie sérieuse.

[Traduction]

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de faire quelques observations au sujet du projet de loi C-38, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole.

Si ma mémoire est fidèle, c'est la deuxième fois seulement de notre histoire que les agriculteurs doivent avoir recours à ce genre de mesure pour demeurer solvables. La première mesure du genre, dont je peux à peine me souvenir car j'étais enfant, avait créé la commission d'ajustement des dettes, que le gouvernement avait mise en place peu après la Crise de 1929.

Cet organisme avait été créé pour permettre aux agriculteurs de conserver leurs terres. Ces derniers avaient la possibilité de rééchelonner leur dette, ce qui leur permettait d'écarter temporairement la menace de saisie de leurs créanciers et de se remettre à flot.

Le projet de loi C-38, Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole, paraît comme un moyen de mettre un terme rapidement à la misère des agriculteurs qui éprouvent déjà des difficultés financières. Une période de grâce de 120 jours ne donne même pas une lueur d'espoir à un agriculteur qui connaît déjà de sérieuses difficultés financières.

Il faut au moins un an et demi à la Commission canadienne du blé pour vendre le grain des agriculteurs et leur verser leur paiement final. Comment, dans ce cas, un agriculteur peut-il mettre ses finances en ordre en 120 jours, c'est-à-dire le tiers seulement d'une campagne agricole?

Voyons les origines du problème. J'ai entendu beaucoup de propos élogieux à l'endroit du gouvernement libéral actuel. J'aurais souhaité que les gouvernements libéraux des années 70 et du début des années 80 soient tout aussi dignes d'éloges. Ce sont les gouvernements de cette époque qui ont laissé l'inflation grimper à 15 p. 100 et même 18 p. 100 et les taux d'intérêt à 24 p. 100. Les banquiers, comptables et planificateurs financiers disaient aux agriculteurs qu'ils devaient se spécialiser, réorganiser leur exploitation agricole en remplaçant leurs 25 vaches, 10 cochons et quelques poules par 100 vaches laitières. Ils avaient toutes les solutions pour les agriculteurs et leur promettaient qu'ils vivraient mieux.

Puis subitement, en 1981-1982, les choses se sont gâtées et les taux d'intérêt on grimpé jusqu'à 24 p. 100. Seul des gens comme Gordon Sinclair pouvaient se permettre de dire qu'il n'y avait pas de crise, ni de problème d'endettement. Les gens comme lui réalisaient des profits énormes pendant que les agriculteurs souffraient. Ces derniers n'ont pas été capables d'éliminer leur endettement.

Sans l'intervention des conservateurs en 1986, qui ont versé des sommes considérables aux agriculteurs, il ne resterait probablement plus un seul agriculteur dans l'Ouest aujourd'hui. Sans les mesures de soutien et d'adaptation en agriculture MSAA I et II, qui ont permis de distribuer non pas des millions de dollars, mais des milliards, les agriculteurs n'auraient pas survécu.

Comme les conservateurs ont mis sur pied le Bureau d'examen de l'endettement agricole, qui a aidé beaucoup d'agriculteurs à rééchelonner leurs dettes, ce bon gouvernement libéral essaie maintenant de dire qu'il va aider les rares agriculteurs qui sont encore en difficulté, et ce, rapidement en seulement 120 jours. Je ne vois pas où est cette bonté du gouvernement dont on nous a parlé ce soir.

(1855)

Pourquoi un agriculteur qui a des difficultés depuis dix ans devrait-il maintenant se faire servir un ultimatum? Pourquoi devrait-il apprendre que, dans 120 jours, on ne joue plus? Est-ce là le bon gouvernement plein de compassion qu'on veut nous montrer à la Chambre des communes ou est-ce rien qu'un moyen de nous entraîner dans un système d'agriculture du genre de ceux qu'on voit dans les pays communistes?


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Cela m'ennuie d'avoir entendu les conseillers financiers et les planificateurs nous dire quoi faire pendant dix ans pour apprendre qu'on nous coupe maintenant l'herbe sous le pied, sans avertissement, et que nous devrons faire autre chose.

Je me demande pourquoi les agriculteurs sont mis en prison ou condamnés à payer des amendes de milliers de dollars pour avoir essayé de vendre leur grain à un meilleur prix. Je ne vois pas où est la bonté du gouvernement libéral.

Je veux lire quelques mots extraits d'un article dans la Glenboro Gazette, journal du centre de ma circonscription: «Peu m'importe que vous pensiez que la commission du blé est un cadeau du ciel. Si elle n'est pas tenue de rendre des comptes, elle continuera à s'emplir les poches avec l'argent durement gagné des agriculteurs. Et aucun représentant du gouvernement ne mérite de vivre mieux que les gens qui l'ont élu.»

Si c'est vrai, pourquoi ne donnerions-nous pas à ces agriculteurs qui ont des difficultés financières un régime de pension d'un million de dollars comme celui des députés fédéraux? Ce serait la bonne manière de régler leurs problèmes et ce serait dès lors bien plus facile pour eux de poursuivre leurs travaux agricoles. Les gens qui ont été élus à la Chambre leur disent maintenant que, dans 120 jours, ce sera terminé. Ce n'est pas ce que je considère être une solution généreuse et rationnelle.

Je veux rapporter quelques lignes d'un autre article: «Des agriculteurs ont fait 302 000 $ en exportant illégalement du grain.» Il s'agit de deux agriculteurs. Parce qu'ils ont vendu eux-mêmes leur grain, ils ont gagné 302 000 $. Les libéraux essaient de me dire que c'est ce système de commercialisation, qu'ils considèrent plus ou moins comme un don de Dieu, qui retient ces agriculteurs sur leurs terres. C'est le contraire, et 302 000 dollars, ça paierait une partie de la dette.

M. Brooks dit que la perte pourrait être encore plus grande parce qu'une partie de l'orge que nous avons classée comme aliment s'est vendue comme orge de brasserie. Que se passe-t-il exactement? Nous avons une Commission canadienne du blé qui ne sait pas classer le grain? Pourquoi les libéraux ne restructurent-ils pas la Commission canadienne du blé de façon à ce que le grain soit au moins classé correctement?

Je trouve étranges la base et l'intention des arguments que nous avons entendus ici ce soir. Ce qui m'étonne encore plus, c'est de lire :«Les difficultés pour les agriculteurs qui s'insurgent contre la Commission canadienne du blé ne sont pas encore terminées.» M. Sawatsky a gagné son procès. Le juge a déclaré qu'il n'y avait pas infraction à la loi, que la Loi sur les douanes n'avait pas été violée. Le bon gouvernement libéral va encore le rouler.

Un conseiller de la Commission canadienne du blé a dit: «Un appel est nécessaire parce qu'on ne peut pas appliquer le décret pour inculper qui que ce ce soit tant que cette échappatoire n'aura pas été bouchée. Il y a encore un nombre important d'accusations en instance.» Pourquoi ne pas aider ces agriculteurs, ces pauvres agriculteurs auxquels le gouvernement libéral va accorder un nouveau délai de 120 jours pour mettre fin à tout cela? Il me semble que les arguments que j'ai entendus cet après-midi ont pour but de dire, plus vite on viendra à bout d'eux, mieux ce sera. C'est la justice sélective des libéraux.

Quand je regarde le nombre de projets de loi que j'ai vus dans cette Chambre, ça me rappelle un troupeau de moutons. Quand un troupeau de moutons est mécontent, il tourne en cercle autour du pâturage à la recherche d'un meilleur endroit pour brouter. Ils ne savent pas très bien s'ils devraient s'arrêter pour brouter ou s'ils devraient sortir du pâturage et aller peut-être dans le champ de luzerne et se gaver à en mourir. C'est ce que semblent faire tous ces projets de loi.

Les libéraux ne savent pas très bien comment régler le problème, alors ils tournent autour du pâturage, essayant de détourner l'attention pendant qu'ils cherchent un trou dans la clôture pour s'échapper sans que personne ne les voie. Ils vont finir par trop manger, par avoir l'estomac tout ballonné et mourir. C'est le sort que je prédis aux deux derniers projets de loi que les libéraux ont déposés.

(1900)

Je suis stupéfait, chaque année, lorsque je vois les statistiques indiquant qu'il y a de moins en moins d'agriculteurs. On dit que, si le gouvernement aide un agriculteur une fois, il peut survivre; s'il l'aide une deuxième fois, ça va bien mal; mais s'il l'aide une troisième fois, alors il est fini, à coup sûr.

Je me demande ce que sera le troisième projet de loi. Nous en avons vu déjà deux aujourd'hui. Je suppose que le prochain prévoira que si un agriculteur fait pousser un boisseau de blé, il ne devrait pas en avoir le contrôle du tout. Il ne devrait même pas être capable de le vendre à un éleveur de bétail ou de porc. Peut-être que le gouvernement devrait lui enlever ce droit également, comme c'était autrefois.

Il faut qu'on se rende compte que nos agriculteurs sont parmi les meilleurs gestionnaires du monde, bien que le gouvernement insiste encore pour dire que c'est lui qui sait le mieux et qu'il peut les aider. La seule chose qu'il aide à faire, c'est vider leurs poches. Cela fait, l'agriculteur a habituellement des problèmes, alors le gouvernement lui donne un autre coup de pied au cul en lui disant: «Voilà, encore 120 jours et c'est fini.»

Peut-être que nous devrions avoir un autre projet de loi ou autre chose pour compléter cette série de projets de loi, alors on pourrait finir d'un seul coup. Les projets de loi C-34 et C-38 font déjà un bon travail. On se souviendra longtemps du bon coeur des libéraux, tout comme de celui des libéraux des années 1970 et 1980. On se souvient toujours de l'époque des intérêts à 24 p. 100 et de l'inflation de 18 à 20 p. 100.

Je suis heureux d'avoir eu l'occasion de parler de ce projet de loi. Cela a été un plaisir. Les libéraux écoutaient, je pouvais le voir sur leur visage. Ils faisaient attention.

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, avant de parler du projet de loi C-38, je tiens à répondre à deux ou trois observations du député qui m'a précédé.

Les réformistes continuent d'utiliser toutes les occasions qu'ils ont de s'attaquer à la Commission canadienne du blé. Ils le font en retenant les faits qui font leur affaire. Je tiens à le signaler.


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Disons que, si on compare le bilan de la Commission canadienne du blé, le système de commercialisation ordonné par rapport au système de commercialisation libre, la Commission canadienne du blé brille tous les ans depuis 20 ans. Lorsqu'on tient compte de tous les faits et qu'on se penche sur toutes les années, on s'aperçoit que la Commission canadienne du blé a obtenu pour les producteurs un rendement supérieur à celui obtenu par n'importe quel autre organisme n'importe où dans le monde.

Je veux que le député le reconnaisse. Je sais qu'il est difficile pour lui d'admettre qu'il a tort sur ce point, mais en fin de compte, il devra le faire. Nous allons discuter de cette question au comité, et j'espère que nous pourrons l'éclairer sur cette question.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de parler du projet de loi C-38, qui va abroger la Loi sur l'examen de l'endettement agricole et mettre en oeuvre une nouvelle loi pour faciliter les ententes financières entre les agriculteurs insolvables et leurs créanciers.

Permettez-moi de dire dès le départ, et je suis d'accord avec mon collègue de Lisgar-Marquette là-dessus, qu'il est regrettable que nous ayons besoin de lois comme la Loi sur la médiation en matière d'endettement agricole qui aidera les agriculteurs insolvables à parvenir à une entente avec leurs créanciers, car cela donne à penser que les exploitations agricoles éprouvent parfois des problèmes financiers, ce qui est certes le cas.

Certains sont reliés à une mauvaise gestion mais beaucoup d'autres sont causés par des problèmes qui n'ont rien à avoir avec la capacité de gérer du producteur primaire. C'est peut-être le fait des flux monétaires internationaux. C'est peut-être attribuable aux prix mondiaux des produits ou aux fluctuations rapides des taux d'intérêt. Beaucoup d'entre nous, votre serviteur y compris, qui sont du secteur agricole, ont été confrontés à des situations de ce genre dans le passé.

Dans le cadre du débat sur cette loi ce soir, jusqu'à maintenant, on a très peu parlé du terrible traumatisme que subissent les familles agricoles confrontées à l'insolvabilité. Je soulève cette question, car si on modifie la loi, c'est notamment parce que le Bureau d'examen de l'endettement agricole est saisi, à l'heure actuelle, de beaucoup moins de cas financiers difficiles qu'il y a 10 ou 12 ans. C'est une bonne chose. Lorsqu'il s'agit de traiter de cette question, étant donné que la situation s'est quelque peu améliorée depuis, nous avons tendance à la Chambre à en parler dans l'abstrait. Être aux prises avec des difficultés financières, c'est très difficile à expliquer dans le cas d'une ferme. Pour comprendre cette situation, il faut l'avoir vécue.

(1905)

Quand une famille agricole est confrontée à une crise financière sérieuse, c'est pénible à la fois pour l'homme, pour sa femme et pour leurs enfants, car c'est perdre sa fierté et, dans bien des cas, perdre son héritage et perdre confiance en soi, même s'il n'y a pas à l'origine un problème de gestion. Ce peut être un problème de marketing à l'échelle internationale qui est la cause des difficultés financières de cette famille. C'est extrêmement difficile à supporter. On a déjà enregistré de nombreux suicides dans le secteur agricole à la suite d'une crise financière.

Dans le cadre de ce projet de loi, il nous faut d'abord et avant tout protéger les agriculteurs, leurs familles et les collectivités rurales qui sont confrontés à des difficultés financières. Par le truchement de ce projet de loi, il nous faut trouver les moyens de traiter non seulement l'aspect pécuniaire mais aussi l'aspect humain que comporte toute crise financière.

Il y a onze ans, à titre de président du Syndicat national des cultivateurs, j'ai dirigé un groupe de pression spécialisé dans le financement agricole pour faire avancer ce dossier sur la colline du Parlement. Oui, nous réclamions plus de pouvoirs et nous demandions un processus d'appel. Nous avons alors dépassé l'objectif que vise ce projet de loi. Mais il n'en reste pas moins que cette mesure législative est un pas dans la bonne direction puisqu'elle confère à la loi certains pouvoirs et crée un processus d'appel grâce auquel les appels en bonne et due forme pourront être entendus.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous devons tout mettre en oeuvre pour que les revenus agricoles soient supérieurs aux dépenses agricoles. Dans le cadre de toutes les dispositions législatives dont nous traitons à la Chambre, nous devons veiller à ce que les organismes de commercialisation, les offices de gestion de l'offre et la Commission canadienne du blé restent forts afin que le gouvernement, par le truchement de ses institutions, puisse faire son possible pour maximiser les prix et les revenus que les producteurs tirent du marché.

J'ai dit que le gouvernement ne pouvait plier l'échine devant quelques délinquants qui veulent violer les lois de notre pays en passant outre aux directives de la Commission canadienne du blé, pas plus, d'ailleurs, que nous ppouvons céder devant les quelques réformistes qui parlent contre les bons organismes de commercialisation dont nous sommes dotés.

Permettez-moi de toucher un mot du projet C-38 lui-même. J'approuve la portée générale du projet de loi et je suis tout à fait d'accord pour que cette mesure législative soit renvoyée à un comité pour faire l'objet de discussions. Un grand nombre d'éléments de ce projet de loi ont été exposés dans le document du Parti libéral intitulé La sécurité alimentaire pour les Canadiens et des revenus corrects pour nos agriculteurs, dans lequel nous avons présenté nos engagements envers le Bureau d'examen de l'endettement agricole.

Le rôle initial et actuel du Bureau d'examen de l'endettement agricole est décrit à la page 111 du dernier budget des dépenses d'Agriculture et Agroalimentaire, de la façon suivante: «Les Bureaux d'examen de l'endettement agricole ont été implantés dans chaque province en 1986 pour veiller à ce que les agriculteurs en difficulté financière ou risquant réellement de se faire saisir leur exploitation bénéficient d'un examen impartial, par une tierce partie, des circonstances qui leur sont propres.» C'est important.

Comme ma collègue de Dauphin-Swan River l'a déclaré tout à l'heure, ce projet de loi permettra de centrer l'attention sur les agriculteurs insolvables. Il inscrit dans la loi le recours à un administrateur impartial et prévoit un processus d'appel.

(1910)

De prime abord, les dispositions de ce projet de loi semblent toutefois restreindre plutôt qu'étendre l'accès au processus d'examen de l'endettement agricole. Cela me préoccupe et je soulèverai la question au comité.


3963

Une question à traiter, entre autres, c'est que, selon le budget des dépenses du ministère, toujours à la page 111, 24 000 demandes ont été présentées au Bureau d'examen de l'endettement agricole depuis 1986. Les deux articles invoqués ont été l'article 16, agriculteurs en difficultés financières, et l'article 20, agriculteurs insolvables.

Combien de ces agriculteurs auraient été exclus du processus si la règle d'insolvabilité avait été appliquée depuis l'implantation du Bureau d'examen de l'endettement agricole? Selon les fonctionnaires d'Agriculture Canada, environ la moitié des demandes présentées en vertu de l'ancienne loi l'étaient en raison d'insolvabilité et l'autre moitié, de difficultés financières.

Cependant, certains agriculteurs éprouvant des difficultés financières se sont révélés être insolvables, de sorte que le tiers des demandes présentées au Bureau d'examen de l'endettement agricole n'auraient jamais été admissibles puisqu'elles ne portaient pas sur des agriculteurs insolvables. Je maintiens que ces agriculteurs ont pu s'adresser au Bureau d'examen de l'endettement agricole, bénéficier des services de médiation et obtenir de l'aide, ce qui a permis à un grand nombre d'entre eux de garder leur exploitation agricoles et d'occuper leur terre aujourd'hui.

Au bout du compte, au cours du débat sur le projet de loi C-38, il importe de penser aux autres éléments qui entrent en ligne de compte. Je crois que nous devons revoir. . .

Le vice-président: Le temps de parole du député est écoulé.

[Français]

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Avec dissidence.

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est renvoyé à un comité.)

* * *

[Traduction]

LOI CONCERNANT LA PREMIÈRE NATION DE YORK FACTORY RELATIVEMENT À LA SUBMERSION DE TERRES

L'hon. David Anderson (au nom du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) propose: Que le projet de loi C-39, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de York Factory sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre pour aborder le projet de loi C-39, Loi concernant la première nation de York Factory relativement à la submersion de terres.

Les députés n'ont sûrement pas oublié que, en juin 1994, la Chambre a lu pour la deuxième fois le projet de loi C-36, Loi concernant la première nation crie de Split Lake relativement à la submersion de terres. Les terres submergées dont il était question dans ces mesures législatives font partie de la circonscription de Churchill que je représente. Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, la Loi concernant la première nation de York Factory relativement à la submersion de terres, est très semblable au projet de loi C-36, Loi concernant la première nation crie de Split Lake relativement à la submersion de terres, que nous avons adopté en 1994.

(1915)

L'objet de la mesure législative est de mettre en oeuvre certains éléments des conventions négociées avec la première nation de York Factory, en conformité de certaines obligations découlant de la convention sur la submersion de terres du Nord. Pour bien situer ce projet de loi dans son contexte, permettez-moi de rappeler rapidement aux députés les événements qui ont mené à son étude.

En décembre 1977, le gouvernement du Canada, celui du Manitoba, Hydro-Manitoba et le Northern Flood Committee, Inc., représentant cinq premières nations manitobaines, la nation crie de Split Lake et les premières nations de Nelson House, de York Factory, de Norway House et de Cross Lake, ont signé la convention sur la submersion de terres du Nord.

Cette convention visait à contre-balancer les répercussions négatives des projets hydroélectriques exécutés sur la rivière Churchill et le fleuve Nelson, qui ont entraîné la submersion de près de 12 000 acres de terres de réserves, dans le nord du Manitoba.

Ces projets ont aussi entraîné la submersion de plus de 525 000 acres de terres qui n'étaient pas situées dans les réserves, mais qui, traditionnellement, étaient beaucoup utilisées par les cinq premières nations pour la chasse et le piégeage. Les cours d'eau visés étaient aussi utilisés comme source d'eau potable, pour des activités sportives, pour la pêche de subsistance et la pêche commerciale ainsi que pour le transport.

La submersion a eu des répercussions énormes sur ces collectivités. Elle a privé bien des familles de leur mode de subsistance traditionnel et a forcé de nombreuses personnes à quitter leur collectivité pour chercher du travail et une meilleure existence ailleurs. À cause de cela, certains ont perdu leurs maisons et leurs biens personnels. Au total, quelque 9 000 membres des premières nations ont été directement touchés pas la submersion.

La Convention sur l'inondation des terres du nord était censée régler les problèmes causés par la submersion et indemniser les cinq premières nations pour les terres perdues et les répercussions négatives sur leur mode de vie. La convention détermine les indemnités financières, les programmes d'infrastructure communautaire ainsi que les avantages fonciers et autres dont bénéficieront les parties visées.

Les députés se souviendront sûrement qu'il est ressorti du débat sur le projet de loi C-36 que la Convention sur l'inondation des terres du nord n'est pas à la hauteur de ses promesses. Elle est formulée vaguement et n'a pas prévu toutes les difficultés qui se sont posées depuis. Elle n'a pas défini les rôles et les responsabilités des parties aussi clairement que nous l'aurions souhaité. Par conséquent, peu de progrès ont été accomplis, voire aucun, dans la mise en oeuvre de nombreux éléments de la convention.

Lorsque le processus de mise en oeuvre s'est enrayé, les premières nations du Manitoba qui étaient touchées ont eu recours au


3964

mécanisme de règlement des différends prévu dans la Convention sur l'inondation des terres du nord. Avec le temps, plus de 170 demandes d'arbitrage ont été présentées. Comme bien d'autres aspects de la convention, ce processus s'est avéré à la fois inefficace et coûteux pour toutes les parties.

Une importante percée a été réalisée en juillet 1990 lorsque les quatre parties à la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba ont négocié un accord de base en guise de règlement des revendications et des obligations en litige. Cet accord de base sert maintenant de fondement pour la conclusion d'ententes avec les premières nations individuelles.

Un accord semblable a été conclu avec la première nation crie de Split Lake en 1992, et est maintenant mis en oeuvre. Il prévoit une indemnisation pécuniaire, accroît les possibilités socio-économiques offertes à la première nation en cause et libère le Canada de toutes les questions traitées dans l'accord.

Des ententes de mise en oeuvre ont maintenant été conclues avec deux autres nations. Après sa ratification par la communauté à la fin de l'année dernière, l'entente de mise en oeuvre de la première nation de York Factory a été signée en janvier. Je suis heureux d'annoncer que des négociations sont en cours avec les deux dernières premières nations touchées par l'inondation, celles de Norway House et de Cross Lake.

Le projet de loi C-39 ne donnera pas force de loi aux accords de mise en oeuvre conclus avec la première nation de York Factory. Les accords ont force de loi et les parties ont déjà commencé à les mettre en oeuvre. Cependant, comme cela été le cas avec la première nation de Split Lake, une loi a été nécessaire pour exécuter certaines dispositions des accords. C'est l'objet du projet de loi C-39.

(1920)

Ce projet de loi est pratiquement identique au projet de loi C-40. Néanmoins, il est important que des mesures législatives distinctes soient adoptées pour montrer que cette question délicate a été réglée de façon positive dans chacune des communautés. À cause des difficultés qu'a posées la mise en oeuvre de la convention sur la submersion des terres, l'adoption de mesures législatives distinctes pour chaque bande sera perçue comme une réalisation importante par les membres de chaque communauté.

Comme je l'ai dit il y a quelques instants, les projets de loi C-39 et C-40 visent à mettre en oeuvre certains éléments des accords d'application des premières nations de Nelson House et de York Factory. De façon précise, ces projets de loi atteindront quatre objectifs. Premièrement, ils verront à ce que les terres transférées aux premières nations en fief simple ne deviennent pas des réserves spéciales aux termes de l'article 36 de la Loi sur les Indiens.

Cela veut dire que la première nation de York Factory-tout comme la première nation crie de Split Lake-pourra vendre les terres qu'elle détient en fief simple, les aménager, prendre des hypothèques et établir un régime d'impôts fonciers conformément aux arrangements avec la province. En fait, elle peut utiliser et gérer ces terres comme bon lui semble, pourvu qu'elle respecte les paramètres du régime foncier provincial.

La propriété en fief simple protégera aussi les intérêts de la province en assujettissant les terres au régime foncier provincial. Cette mesure réduira le fardeau administratif du ministère des Affaires indiennes car il ne sera pas responsable de la gestion de ces terres comme il l'est dans le cas des réserves.

Deuxièmement, ce projet de loi prévoit que toutes les sommes dues en vertu de l'accord d'application de la première nation de York Factory ne seront pas versées à la Couronne et ne seront donc pas administrées comme de l'argent des Indiens au sens de la Loi sur les Indiens. Ces sommes seront plutôt versées en fiducie à la première nation de York Factory et administrées par elle.

C'est là une disposition importante. Elle donnera aux bandes concernées plus de flexibilité quant à l'administration de ces sommes qu'elles n'en auraient en vertu de la Loi sur les Indiens. Cela élimine une source possible de friction entre les bandes et le ministère des Affaires indiennes pour ce qui est de la façon dont cet argent devrait être administré.

Du point de vue du gouvernement, cette disposition réduira encore davantage le fardeau administratif du ministère. La première nation aura accès plus rapidement à ces fonds pour répondre à ses besoins prioritaires. Il y aura toutefois des contrôles importants sous la forme des dispositions prévues dans la loi provinciale concernant les fiducies.

Troisièmement, ce projet de loi prévoit que certains types de demandes peuvent encore être faites en vertu de la convention sur la submersion des terres. Cependant, si l'accord relatif à l'application prévoit également que la question doit être réglée ou arbitrée, les dispositions de l'accord se rapportant spécifiquement à la bande auront préséance sur le processus de la convention sur la submersion de terres qui, je l'ai déjà dit, est coûteux et inefficace.

Le projet de loi permet au Canada de recourir à la loi du Manitoba sur l'arbitrage dans le règlement de tout différend entre les parties concernant la convention sur la submersion de terres. En ce moment, le Canada est la seule partie à la convention qui ne peut pas recourir aux mécanismes d'arbitrage.

Je tiens à ce que les députés sachent que le projet de loi ne crée aucun nouveau programme et n'accorde aucun nouvel avantage aux premières nations. Il ne crée pour le gouvernement du Canada aucun engagement n'étant pas déjà prévu dans les accords. Nous ne faisons que nous acquitter d'engagements pris envers les peuples autochtones, comme nous l'avions dit dans le livre rouge et comme nous le faisons progressivement depuis deux ans et demi.

Je suis heureux que l'accord, et particulièrement les éléments sur lesquels nous légiférons, nous rapproche de l'autonomie gouvernementale. Le projet de loi C-39 habilite les chefs autochtones visés et


3965

les dispositions sur l'indemnisation des accords permettront d'améliorer les conditions de vie de la collectivité.

Les dispositions se rapportant à la propriété des terres en fief simple et le transfert des sommes versées comme indemnités à la collectivité représentent des étapes importantes sur la voie de l'auto-suffisance et de l'autonomie gouvernementale.

(1925)

Dorénavant, les chefs autochtones devront rendre compte directement aux membres de leur bande de leurs décisions concernant les dépenses, les placements et la gestion des terres. C'est dire que l'on s'éloigne de la Loi sur les Indiens pour se rapprocher de l'autonomie gouvernementale, ce qui constitue une évolution que j'appuie avec enthousiasme.

Quant à la question de l'amélioration des conditions de vie de la collectivité, il suffit de regarder la situation de la bande indienne crie de Split Lake, qui applique son propre accord depuis 1992, pour voir les progrès possibles.

L'accord a, d'abord et avant tout, mis un terme à des dissensions qui régnaient au sein de la collectivité. La bande de Split Lake peut maintenant gérer le débit de l'eau, ce qui signifie que les membres de la collectivité sont dans une meilleure position et peuvent maintenir leur mode de vie traditionnel.

Par l'intermédiaire du Tataskweyak Trust, la première nation crie de Split Lake utilise ses indemnités avec sagesse et dans l'intérêt de ses membres. Cet argent sert à favoriser le développement socio-économique, à financer la récolte des ressources, à indemniser les membres pour certains types de pertes dues aux inondations, à construire des ouvrages de protection et à bien d'autres choses.

Le chef Norman Flett, qui a négocié l'Entente de règlement de Split Lake, a comparu devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Nord pendant que celui-ci examinait le projet de loi C-36. À cette occasion, il a dit au comité que l'accord d'exécution avait énormément aidé sa première nation à essayer d'améliorer la condition de la collectivité.

Ses commentaires ont été réitérés par John Peter Mayham, un autre témoin de la première nation de Split Lake qui a déclaré ceci au comité permanent:

L'argent et les prestations que nous recevons grâce à notre règlement servent surtout à édifier la collectivité. Nous réinvestissons l'argent dans la collectivité. Avant, 60 p. 100 du revenu d'une réserve était dépensé ailleurs. C'est pourquoi nous essayons d'investir l'argent de la réserve dans la collectivité; nous encourageons les membres de la bande à se charger eux-mêmes de leur développement économique, à créer leur propre entreprise.
Les bienfaits de l'Entente de règlement sont visibles dans toute la collectivité crie de Split Lake. L'argent provenant du règlement a déjà servi à construire un stade, des locaux résidentiels et un mini centre d'achats. On a créé des programmes d'expansion des entreprises, de piégeage, ainsi que des programmes culturels et récréatifs.

Dans le cas des programmes d'expansion des entreprises, tout membre de la bande, qu'il vive dans la réserve ou à l'extérieur, peut demander des fonds.

Lorsque M. Mayhem a comparu devant le comité permanent, il a dit que la bande examinait la possibilité de créer des partenariats importants avec des entreprises de construction de l'extérieur. Par exemple, un contrat de 2,7 millions de dollars de Hydro-Manitoba a été obtenu dans le cadre d'une co-entreprise entre la compagnie de construction de Split Lake et la société Comstock Canada. Un autre contrat de 640 000 $ de Hydro-Manitoba a été accordé à la compagnie de construction de Split Lake.

La première nation de Split Lake est également devenue un des principaux actionnaires d'une entreprise qui gère des projets d'immobilisations pour les premières nations de plusieurs provinces. Je suis tout particulièrement impressionné par une initiative de la Tataskweyak Environmental Agency, qui a également été créée par la première nation crie de Split Lake. Le programme de contrôle de la qualité de l'eau de cette agence est tellement efficace que les responsables du programme ont été invités à se rendre dans bien d'autres collectivités pour donner des renseignements et des conseils dans ce domaine.

Étant parties aux accords d'exécution, la province du Manitoba et Hydro-Manitoba appuient le projet de loi C-39. En fait, le gouvernement provincial est en train de rédiger un projet de loi parallèle à ce projet de loi, tel que prévu par les accords d'application. Le projet de loi provincial protégera encore davantage les intérêts des bandes.

Ce projet de loi a été élaboré à la suite de nombreuses consultations avec les premières nations. Des réunions auxquelles ont participé des représentants du gouvernement fédéral, de la province du Manitoba, de Hydro-Manitoba et de la première nation de York Factory ont encore eu lieu pas plus tard que la semaine dernière, pour discuter du projet de loi.

(1930)

Des révisions mineures ont été faites pour répondre aux préoccupations des premières nations. Je vous assure que ces lois ne toucheront nullement les trois autres bandes qui sont parties à la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba, y compris les deux qui n'ont pas encore signé d'accord d'application, c'est-à-dire celles de Cross Lake et de Norway House.

Je tiens à préciser que le projet de loi n'est pas nécessaire pour mettre en application l'accord d'exécution avec la première nation de York Factory. Cependant, il est nécessaire si l'on veut s'éloigner du processus coûteux et frustrant de la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba.

Il est nécessaire si l'on veut donner à la première nation le contrôle de l'argent reçu à titre d'indemnité et des terres en fief simple. Il est nécessaire si l'on veut continuer à s'éloigner de la Loi sur les Indiens, qui est paternaliste, et tendre vers une autosuffisance, ainsi qu'une autonomie administrative et gouvernementale accrues.

En approuvant le projet de loi C-36 il y a plusieurs mois, la Chambre a déjà avalisé la démarche que le gouvernement a entreprise pour résoudre les litiges concernant la Convention sur la submersion de terres du nord du Manitoba. Par conséquent, je prie mes honorables collègues d'appuyer avec moi ce projet de loi qui permettra d'atteindre les mêmes objectifs constructifs dans d'autres


3966

collectivités concernées. J'appuie ce projet de loi et je tiens à vous remercier de m'avoir permis de faire des commentaires, monsieur le Président.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir aujourd'hui de m'adresser à la Chambre sur le projet de loi C-39. D'ailleurs, je vous avoue qu'on est un peu en terrain connu parce que les mêmes dispositions ou à peu près s'appliquaient dans un projet de loi qu'on a adopté dans cette Chambre il y a plus d'un an qui portait sur Split Lake.

En effet, il y a cinq communautés autochtones cries autour de l'ensemble de la convention dont on va traiter ici aujourd'hui et York Factory est une de ces communautés. On est donc un peu en terrain connu.

Fidèle à mon habitude, j'ai fait quelques recherches cet après-midi parce que j'adore mettre les situations en perspective et plutôt que de sauter directement dans quelque chose de très aride, j'ai lu à propos des traditions et des habitants de cet endroit, depuis combien de temps ils sont là, etc. J'ai découvert qu'il y a environ 200 ans, lorsque les Européens sont arrivés sur place, ils appelaient les Cris les «Cristinos». Je ne sais pas si j'apprends quelque chose à mon honorable collègue de Churchill, mais c'était le nom employé à l'époque. Il semblerait qu'avec le temps qui s'est écoulé, le nom a été changé pour devenir par la suite les Cris.

Disons que ces gens-là revendiquent un territoire extrêmement grand que je vais me faire un plaisir de décrire. On pourrait même prétendre et ils pourraient prétendre et ils allèguent, probablement avec raison, que ces premiers habitants ont occupé ce territoire au cours des 15 000 dernières années. Ça fait donc longtemps qu'ils sont sur place. Le territoire est immense, je vous l'ai dit. Ça va du côté est de la baie James et ça s'étend à toutes les rivières du Nord qui mènent aussi à la baie James. Ça va même jusqu'à la pointe nord du lac Winnipeg.

De plus, des choses intéressantes ont été trouvées. Les anthropologues et archéologues ont, entre autres, trouvé des poteries datant de plus de 1 000 ans qui proviennent justement de ce peuple. Je vous disais tantôt que le peuple cri allègue sa présence sur ce territoire depuis près de 15 000 ans maintenant. Il y avait au-delà de 15 000 Cris, il y a 200 ans, lorsque les Européens sont entrés en contact avec eux, qui parlaient la langue crie et aujourd'hui, il y en a encore 11 000, dans les cinq communautés, qui parlent toujours la langue crie.

Du côté de leur culture et de leur art, et c'est reflété aujourd'hui aussi, on a trouvé beaucoup de choses sur la broderie, particulièrement avec le poil d'orignal et le poil de renne. On a retrouvé des artefacts de l'époque et encore aujourd'hui, on voit que c'est imprégné de leur art. Il s'agit de voir l'art et les vêtements cris pour comprendre l'importance de la broderie et c'est encore une caractéristique aujourd'hui.

(1935)

J'ai aussi retrouvé comment les Européens qualifiaient, caractérisaient les Cris de l'époque, il y a 200 ans. On nous disait que c'étaient des gens fougueux, de belle allure, avec beaucoup d'entregent et beaucoup d'éloquence. Les caractéristiques appliquées à l'époque, je les retrouve facilement aujourd'hui, pour avoir parlé régulièrement avec M. Coon-Come et aussi les chefs cris du Manitoba. On comprend que ces gens ont beaucoup d'entregent, sont de fiers défenseurs de leur culture et des gens qu'ils représentent. Ils sont aussi très éloquents.

Il s'agit d'écouter M. Coon-Come parler le cri, parce que d'ordinaire, c'est une tradition aussi lors de ces réunions, les gens vont commencer à s'adresser entre eux dans leur langue maternelle, je suis toujours ébloui par la richesse de la langue. On écoute ce qu'ils disent par l'entremise des interprètes et, de temps en temps, on peut enlever l'appareil et on écoute la richesse de la langue. C'est toujours très plaisant de constater que ces gens s'expriment, au départ, dans leur langue maternelle.

Après cette petite entrée en matière, je vais aller plus avant; je ne veux pas tout de suite envisager les arcanes du projet de loi, parce que ce projet de loi n'est pas tellement compliqué, il ne contient que sept ou huit articles. J'aimerais vous entretenir de ce que ce projet de loi sous-tend.

Pour présenter un tel projet de loi, comme celui se rapportant à Split Lake, on a dû examiner ce qu'on appelle le Northern Flood Agreement. C'est un accord qui a été conclu en 1977, et j'ai les détails ici. Cet accord a été signé un peu hâtivement, parce que Hydro Manitoba avait déjà entrepris des travaux depuis sept ans et pendant que les travaux avançaient, on s'est dit: «Il faudrait peut-être s'entendre avec les autochtones qui revendiquent ces réserves et qui sont dans l'entourage de l'ensemble des méga-travaux qui se passent ici.»

Alors donc, en 1977, on a signé cette convention, qui s'appelle le Northern Flood Agreement, et il y avait quelques signataires à la convention, dont le ministère des Affaires indiennes, le Manitoba et le Northern Flood Committee. À l'époque, les cinq communautés autochtones s'étaient créé un organisme pour les représenter qui s'exprimait au nom des cinq communautés, et on pourrait peut-être les nommer. Il y a Split Lake, qui a déjà conclu l'accord sur lequel on a déjà légiféré ici. Ce soir, à l'instant même, c'est au tour de York Factory et, un petit peu plus tard dans la soirée, ce sera Nelson House. Il y a toujours Norway House et Cross Lake, deux autres nations qui doivent être en négociations, j'imagine, actuellement et qui n'ont toujours pas signé.

Donc, après la signature un peu hâtive de 1977, Hydro Manitoba s'est empressée d'inonder 11 861 acres de terrain. Cela représentait presque 10 p. 100 du territoire cri traditionnellement revendiqué. Donc, ils ont pu constater, et on le verra tout au long des études environnementales qui ont été faites, que cela a eu un impact assez désastreux sur les terres traditionnelles autochtones, entre autres, sur les terres de piégeage et de chasse.

Il faut bien comprendre qu'on s'inscrit dans une mentalité qui est peut-être un peu différente de la nôtre, surtout de la mienne, moi qui suis un gars urbain qui aime bien aller en canot et peut-être en chaloupe sur la rivière Richelieu, mais de là à être ancré dans la chasse et la pêche, non. Mais du côté des autochtones, il faut comprendre que c'est une manière de vivre et une tradition de vie importante pour eux. J'ai souvent dit que, actuellement dans la


3967

société, ce qui est important, c'est l'heureux mariage probablement entre la modernité et la tradition autochtone.

Donc, on venait détruire de larges pans de leurs traditions de chasse, de piégeage et de pêche aussi et tout le long, on a essayé de rétablir cela par toutes sortes de comités, mais finalement ce que je vais vous décrire n'est quand même pas non plus très agréable, parce qu'il faut voir de quelle façon le gouvernement a procédé.

Le gouvernement a procédé en regardant les principaux effets néfastes. Il s'est dit: «Est-ce qu'on ne pourrait pas trouver un mécanisme d'arbitrage pour le faire?» À l'origine, ce qui était dans la convention, c'était d'essayer d'avoir quelque chose de consensuel, ce qui est d'ailleurs aussi une tradition autochtone d'essayer d'arriver aux buts par consensus. Finalement, en instaurant un mécanisme d'arbitrage pour l'ensemble des effets néfastes-qu'ils n'ont même pas définis, je vous l'expliquerai plus loin-on s'est retrouvés, non pas dans un contexte consensuel, mais dans un contexte conflictuel. Cela a bien mal parti.

(1940)

Il faut comprendre qu'une fois la convention signée, il devrait y avoir une exécution courante. Les autochtones s'en étaient remis au Northern Flood Committee qui avait un peu fait figure de précurseur pour regrouper les nations autochtones et affronter des géants comme Hydro Manitoba, le gouvernement du Manitoba et le ministère des Affaires indiennes.

Donc le Northern Flood Committee avait un peu un rôle d'exécuteur de tous les aspects de la convention. Puisqu'on avait maintenant quelqu'un pour assurer l'exécution au jour le jour de la convention, on a vite réalisé l'importance du financement. C'est là que les choses se sont mises à mal aller. Je vous annonce que le Northern Flood Committee a été dissous au mois de mai. Au mois de mai, le gouvernement fédéral a arrêté le financement. Cela a eu comme conséquence de briser la solidarité dont faisaient preuve les autochtones et les cinq communautés pour affronter le gouvernement fédéral. Bien sûr ce qui s'est passé avec la disparition du comité, c'est que peu à peu ça c'est étiolé, les communautés ont commencé à négocier sur leurs propres bases.

Donc le gouvernement a réussi une percée en isolant tranquillement les communautés. Split Lake a été la première à régler, non sans anicroche avec les autres communautés qui entouraient ces grands mégaprojets. Je me rappelle qu'au Comité permanent des affaires indiennes, on avait fait comparaître certaines communautés qui nous disaient ne pas vouloir accepter le règlement de Split Lake et que les mégaprojets avaient des incidences non seulement pour la communauté de Split Lake, mais aussi pour elles et qu'en acceptant ils brisaient le front commun des cinq communautés qui existait auparavant.

Le financement a cessé le 1er avril et ça a brisé cette solidarité. Je ne suis pas le seul à avancer ces allégations. On avait fait faire une revue de programme par quelqu'un, ce qu'ils appellent en anglais task force on program review. Cet individu disait:

[Traduction]

«Des rapports internes du MAINC indiquent que, de 1977 à 1983, les bandes de la CITNM ont reçu une somme représentant 10 000 $ par personne tandis que d'autres bandes du Manitoba recevaient 26 000 $ par personne.»

[Français]

La deuxième citation est beaucoup plus importante.

[Traduction]

«Si l'on voulait annuler l'effet de cette entente et refuser les sommes prévues aux bénéficiaires convenus, tout ce qu'il faudrait faire serait de veiller à ce que la CITNM ou le Comité des inondations dans le Nord ne fonctionnent pas en ne leur accordant pas le financement nécessaire ou le recours aux spécialistes dont il a besoin.»

[Français]

C'est un peu ce qui s'est passé. On a tout simplement arrêté le financement, la solidarité s'est brisée et les communautés ont été prises au piège et ont dû négocier sur une base individuelle avec le résultat qu'on connaît aujourd'hui.

Je vous parlerai maintenant un peu de la portée et des répercussions du projet hydroélectrique. C'est quelque chose de majeur. On parle souvent de la baie James au Québec qui, supposément, aurait dévasté les paysages, bouleversé les traditions de vie des Cris, je ne peux pas nier cela, cependant c'est toujours arbitraire.

Une chose est sûre, le projet de Northern Flood Agreement au Manitoba a vraiment eu des effets majeurs sur l'environnement. Si on regarde le principe de dérivation puisque c'est ce qui s'est passé, Hydro Manitoba a dérivé jusqu'à 90 p. 100 des eaux de la rivière Churchill dans le fleuve Nelson. Il faut comprendre pourquoi. Les centrales situées le long du fleuve Nelson avaient besoin d'un apport d'eau plus grand, on a donc dérivé la rivière Churchill dans le fleuve Nelson. Cela a eu des impacts sur le lac Winnipeg.

Ce sont des travaux très importants qui se sont faits à cet endroit. On comprend le bouleversement que cela a pu causer aux nations autochtones. Le ministère lui-même reconnaît les effets néfastes de ce projet. J'en ai parlé tantôt, il y a eu l'inondation de quelque 2 134 kilomètres carrés où vivaient 10 000 Cris inscrits, détérioration des zones commerciales et récréatives.

(1945)

Je vous ai parlé tout à l'heure des territoires de chasse et des territoires de piégeage. Ces gens-là, avec le fruit de leur chasse et de leur piégeage, avaient développé des zones commerciales qui ont été bouleversées par la dérivation de ce que je vous ai dit tout à l'heure.

Diminution de la qualité et de la quantité de poissons, y compris un accroissement de la contamination par le mercure. C'est bien sûr que quand on dérive des rivières dans des fleuves comme ça, avec la grandeur et l'immensité de ces travaux on inonde des terres ce qui cause l'apparition du mercure. Là, on assiste à une contamination de plus en plus grande de la chaîne alimentaire.

Contamination de l'eau potable. On va y arriver un petit peu plus tard. Vous verrez que cela a dû engendrer des travaux d'infrastructure importants pour corriger justement cette contamination de l'eau potable.

Rareté accrue de la faune aux fins de chasse et de piégeage. Je pense que je vous ai suffisamment parlé de ce point.

Risques liés au déplacement par eau attribuable au faible niveau d'eau.


3968

Risques accrus liés aux déplacements en hiver, compte tenu de l'impossibilité de prévoir la solidité des glaces en raison des niveaux d'eau anormaux.

Vous voyez, il y a des autochtones qui sont là depuis 15 000 ans, qui ont connu ces rivières et ce fleuve. Ils savent exactement comment se déplacer, et l'été et l'hiver, sur ces voies navigables pour eux, en canot ou à pied.

En hiver il y a des dangers de fonte ou des dangers que les endroits traditionnels où ces gens faisaient leur traversée ne soient plus fiables aujourd'hui. Même le ministère l'a reconnu. Ce sont des mots qui proviennent du ministère, ce ne sont pas juste les miens.

Donc, le Canada a reconnu, par le Northern Flood Agreement, ses responsabilités. En effet, vous savez que l'article 35 reconnaît un certain nombre de droits, et il autorise aussi un organisme provincial à prendre où à utiliser des terres de réserve indienne avec le consentement du gouverneur en conseil et aux conditions prescrites par ce dernier.

Donc, avec le projet de loi qui est devant nous et le projet de loi de Split Lake, c'était la responsabilité du gouvernement fédéral de le faire de cette façon.

En plus, le gouvernement du Canada s'engageait à participer activement à la mise en oeuvre des moyens propres à assurer la viabilité des collectivités touchées. Là-dessus, un peu plus tard, je vous ferai une description de ce sur quoi le gouvernement a procédé. Je pense qu'il a eu certains problèmes d'application de la part du gouvernement, justement pour favoriser ces collectivités.

Il y a aussi énormément d'ambiguïté dans les dispositions de l'accord, dans le Northern Flood Agreement. C'est absolument bizarre ce qui s'est passé, c'est qu'on a semblé signer une convention, une entente. Par la suite, quelque six années après, vu la difficulté d'application, on a décidé de passer à une analyse juridique. Une analyse juridique six ans après la signature d'une convention, c'est presque inexplicable. D'ailleurs, ils ont engagé des juristes pour expliquer les différents pourcentages de responsabilité de chacun des paliers là-dedans. La convention elle-même contient une centaine de pages, et il en est sorti des documents d'interprétation de quelque deux cents pages qui ont été plus ou moins mis en application.

Sur l'approvisionnement d'eau, entre autres, ce qu'on dit est loin d'être précis. On prévoit que le Canada a comme obligation principale d'assurer un approvisionnement continu en eau potable. Et Hydro Manitoba doit financer cela à 50 p. 100.

Donc, il n'y a absolument rien sur les échéances de financement, sur l'achèvement des projets ni sur le mode d'acheminement de l'eau. Au moment où on se parle, c'est le Canada qui a payé la facture complète, alors qu'Hydro Manitoba n'a pas encore versé un seul sou. Alors il y a certains problèmes d'application.

Ce sont les contribuables canadiens qui sont en train de payer pour des infrastructures au Manitoba. D'ailleurs, je vous avoue que, là-dessus, au Québec, ça ne s'était pas passé de cette façon. Les engagements qu'Hydro-Québec avait pris dans le cas de la baie James ont été respectés à la lettre. On a même fait des représentations pour exiger du gouvernement fédéral qu'il paie sa juste part au Québec, parce qu'il y a eu quelques dossiers litigieux dernièrement, dont l'éducation des jeunes autochtones cris à la baie James. C'est plus le gouvernement du Canada qui était en faute de payer le gouvernement du Québec, alors qu'ici c'est le gouvernement du Manitoba qui est en faute de payer le Canada.

(1950)

Donc, Hydro Manitoba n'a rien donné et, plus loin que ça, on nous explique même qu'il n'y a pas d'échéance à l'entente comme telle. Alors, on prend pour acquis qu'à partir du moment où les cinq communautés auront signé, l'entente s'arrêtera. Mais il est quand même curieux qu'on signe un document en 1977 et que presque 20 plus tard, on n'ait pas encore terminé les lois entourant tout ça et qu'il n'y ait toujours pas d'échéance au Northern Flood Agreement.

Il y a aussi eu beaucoup de carences dans la mise en application de la convention comme telle. Je vous parlais, entre autres, tantôt du problème consensuel versus conflictuel. C'est beau quand on est habité de belles intentions au départ et qu'on dit qu'on fera un consensus. Les cinq communautés s'entendent avec Hydro Manitoba. On presse un peu le pas pour la signature parce qu'on sait qu'on a entrepris les travaux il y a sept ans. On se dit qu'on essaiera d'établir un consensus, on signe et voilà le consensus établi. On se retrouve plus tard avec 150 plaintes en arbitrage. On voit donc, et je le disais tantôt, que le consensuel s'est transformé en conflictuel. Je pense que ce n'était pas le but au départ mais, malheureusement, ce fut peut-être signé dans l'improvisation. On s'est retrouvé avec énormément de problèmes.

On ne peut pas même dire aujourd'hui que les problèmes sont réglés parce que plus loin, je parlerai des impacts environnementaux. Ces gens sont toujours aux prises avec des impacts environnementaux. Il y a plusieurs allégations de non-respect à la convention. Les dommages liés à la contamination au mercure, ce n'était pas assez spécifique alors on s'obstine sur les prix, qui doit payer, qui est responsable, qui doit faire le suivi environnemental. Il y a aussi l'absence de mécanismes et de surveillance et de rapports en matière d'environnement, des lacunes dans l'approvisionnement en eau potable et de manquement aux engagements pris en ce qui a trait aux mesures correctives.

Donc, même avec l'aide de juristes et d'études juridiques, on est toujours en train de se demander qui a la responsabilité de cela et les problèmes perdurent. En outre, le Canada a présenté cinq plaintes contre le Manitoba ou contre Hydro Manitoba. Je vous ai parlé tantôt de 88 millions de dollars qui étaient investis dans un système pour l'approvisionnement en eau potable. Alors, la facture totale en 1984-et je retourne à 1984-était de 160 millions de dollars. Alors, 160 millions de dollars de réclamation du gouvernement canadien à l'égard du Manitoba. Je vous parlais de 80 millions de dollars tantôt, mais le gouvernement canadien a mis beaucoup plus d'argent dans ce projet-là, et finalement, ce sont les contribuables canadiens qui ont payé pour les gens du Manitoba.


3969

Naturellement, le vérificateur général a aussi dénoncé certaines choses qu'il m'apparaît important de soulever ici. Un certain nombre de difficultés viendraient du fait qu'il n'y a pas eu de plan de mise en oeuvre acceptable. Entre autres, la convention aurait dû porter sur des points un peu plus stratégiques, c'est-à-dire les priorités et les échéanciers de mise en oeuvre. Il n'y a pas ça dans le Northern Flood Agreement. Il y a donc eu des ententes signées sans échéancier, sans priorités. Alors, les gens commençaient à un endroit, ne finissaient pas, continuaient ailleurs. Comme il n'y avait pas d'échéance, personne n'était pressé. Il y a eu certains problèmes du côté de la mise en oeuvre. Comme il n'y a pas eu de plan de mise en oeuvre, les difficultés ont donc surgi.

À propos des sources de financement des diverses obligations, c'est sûr que dans l'accord comme tel il y avait des obligations ayant trait au Canada, à Hydro Manitoba, au gouvernement du Manitoba, aux autochtones comme tels, mais il n'y avait pas suffisamment décrites, de telle sorte qu'on assiste à une foire d'empoigne entre les différentes composantes de la signature de l'accord et les gens se retrouvent en difficulté parce que personne ne veut payer les factures.

Il n'y a pas eu d'établissement d'un mécanisme de surveillance approprié par toutes les parties. Les critères et méthodes d'évaluation de la conformité du processus de mise en application, cela non plus n'a pas été fait. Donc, on s'est retrouvé avec des problèmes quand même assez importants et le vérificateur général les a dénoncés à plusieurs reprises. Il a aussi dénoncé les lacunes en matière de surveillance aussi. Il existait des groupes de surveillance environnementale, entre autres, pour surveiller et regarder un peu les impacts sur l'environnement.

(1955)

Ils étaient visibles, mais vous savez que dans ce type de mégaprojets, il est toujours important d'avoir un processus environnemental scrupuleux et suivi pour voir les choses qui ne sont pas nécessairement apparentes au premier coup d'oeil. Il y a eu beaucoup de problèmes de ce côté-là. On s'est rendu compte qu'un comité interministériel fédéral avait été mis sur pied, que les divers ministères fédéraux pouvaient se parler entre eux, mais qu'il n'y avait pas de suivi spécifique.

En ce qui concerne le fardeau de la preuve, les parties reconnaissent qu'il pourrait continuer d'y avoir des effets néfastes sur les terres, les activités et les habitudes de vie des résidants des réserve. C'est Hydro Manitoba qui avait cette juridiction. Imaginez qu'on n'a pas défini «effets néfastes». Donc, depuis ce temps, Hydro Manitoba se décharge de sa responsabilité et dit que n'ayant pas de définition spécifique dans l'accord de ce que sont les «effets néfastes», il ne faut pas leur facturer des choses qu'ils considèrent comme néfastes.

Cependant, des effets néfastes, on en voit. Je vous en ai parlé un peu tantôt. Il y a l'effet du mercure qui contamine la chaîne alimentaire. Tout cela a fait en sorte qu'on s'est retrouvé avec d'énormes problèmes.

Je dois me garder un peu de matériel parce que le projet de loi C-40 sera à l'étude dans quelques minutes. Ce projet de loi porte sur les mêmes caractéristiques que celles qu'on soulève ici aujourd'hui. Ce sont deux communautés voisines qui se côtoient. Mais ce soir, ce projet de loi s'applique à York Factory, alors que le projet de loi C-40 porte sur Nelson House.

Je ne veux pas m'éterniser sur le contenu de l'entente comme telle, mais j'aimerais y revenir lors des discussions sur C-40. Il y a des questions concernant l'entente du Northern Flood Agreement qui doivent être soulevées. Il est très facile de faire un projet de loi de huit articles, mais si on regarde ce qu'il y a derrière, je pense qu'en tant qu'opposition officielle, on se doit de dire qu'il y a eu des choses et qu'il continue d'y avoir des choses questionnables. Ce n'est pas parce qu'on a conclu des ententes avec les cinq communautés qu'on pourra dire que notre devoir est fait. Je pense qu'il y a encore beaucoup de choses à corriger.

Le projet de loi sur York Factory prévoit que les terres actuellement en fief ne doivent pas devenir des réserves en vertu de l'article 35 de la Loi sur les Indiens. Je vous en parlerai dans les prochains discours, car pour chaque acre utilisé, on en redonne quatre. D'après mes informations, on n'a pas encore complété cette opération et il ne faudrait surtout pas transformer ces terres en réserves indiennes.

Le projet de loi prévoit également que les sommes payées ne le seront pas à la Couronne, comme la Loi sur les Indiens le prévoit, mais à une fiducie autochtone. Nous sommes tout à fait d'accord avec ça. Je me rappelle avoir relu un de mes discours alors qu'on étudiait le projet de loi se rapportant à Split Lake dans lequel je commençais mon exposé en disant que les autochtones ne sont pas des gens sur des îles du sud, et à l'époque, un collègue du Parti réformiste avait soulevé cela. Donc, sur les fiducies autochtones, personnellement, je vais entièrement confiance aux autochtones.

Quand ils obtiennent leur indépendance financière, ils développent leurs propres besoins et ils n'ont surtout pas besoin du ministère des Affaires indiennes pour leur donner la permission de construire une maison ou une école. Quand ils sont financièrement indépendants, c'est formidable ce qui se passe sur les réserves.

L'été passé, j'ai visité une réserve au Québec qui s'appelle Les Escoumins. Ils ont développé un complexe hôtelier de toute beauté sur les rives du fleuve Saint-Laurent. C'est rempli de touristes tout l'été. Ils ont aussi plusieurs pourvoiries. J'estime qu'avec cet argent, ils sont en train de développer une des plus belles réserves au Québec. Ils sont même prêts à prendre de l'expansion et à acheter des terres privées.

Quand on accorde l'indépendance financière aux autochtones et qu'on brise cette dépendance à l'égard de la Loi sur les Indiens, ils volent de leurs propres ailes et les résultats sont remarquables.

(2000)

Le projet de loi prévoit aussi que le Canada aura recours à la Loi sur l'arbitrage du Manitoba pour le règlement de tout différend. Je n'ai pas réussi à pousser mon étude là-dessus bien loin. J'imagine que la Loi sur l'arbitrage du Manitoba doit être un modèle d'arbitrage. Si le York Factory et le gouvernement sont d'accord pour confier le rôle d'arbitrage au Manitoba, à la Loi sur l'arbitrage du Manitoba, c'est que j'estime que le contexte s'y prête et qu'on a fait une juste appréciation du travail qui pourrait être fait par cet organisme.


3970

Donc je conclus là-dessus, parce que je vais devoir revenir tout à l'heure-ainsi que mon honorable collègue, j'imagine-sur le C-40. Le Bloc québécois votera favorablement, même si on sait que le tout a été ratifié par les gens de York Factory au mois de décembre l'an dernier, je crois. Cela vient d'être ratifié il n'y a pas tellement longtemps. Nous sommes obligés de faire une loi d'application. Le tout ayant été conclu à la satisfaction des deux partis, avec York Factory et le gouvernement fédéral, le Bloc québécois votera en faveur du projet de loi C-39.

[Traduction]

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, je présenterai la position du Parti réformiste sur le projet de loi C-39, Loi concernant la première nation de York Factory relativement à la submersion de terres, et le projet de loi C-40, Loi concernant la première nation de Nelson House relativement à la submersion de terres, au nom de mon collègue, le député de North-Island-Powell River.

Nous sommes ici pour débattre le deuxième et le troisième d'une série de cinq projets de loi portant sur des terres de réserve qui appartiennent aux cinq premières nations du nord du Manitoba et qui ont été submergées dans les années 70.

En juin 1994, nous avons débattu du premier projet de loi de cette série, le projet de loi C-36, Loi concernant la première nation crie de Split Lake relativement à la submersion de terres. Le projet de loi C-36 était un accord éclairé pour mettre fin aux revendications en suspens des autochtones et avait reçu l'appui du Parti réformiste. Les projets de loi C-39 et C-40, qui traite de la même question, sont uniques pour les premières nations de York Factory et de Nelson House et méritent quelques commentaires.

Dans les années 70, les projets liés à l'aménagement hydro-électrique sur les rivières Nelson et Churchill, et le projet de régulation du niveau des eaux du lac Winnipeg, avaient entraîné la submersion de près de 4 800 hectares de terres de réserve appartenant aux cinq premières nations du nord du Manitoba. En outre, plus de 208 000 hectares d'autres terres, utilisées traditionnellement par les membres des premières nations pour la chasse et le piégeage, avaient été également submergées.

Pour compenser l'impact de l'inondation des terres, le Canada, le Manitoba, Manitoba Hydro et le Comité des inondations dans le Nord, composé des cinq premières nations du Manitoba-les Cris de Split Lake, et les bandes de la Nelson House, de York Factory et de Norway House ont signé La Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. L'accord incluait une indemnisation financière, des programmes d'infrastructures communautaires et l'acquisition de nouvelles terres.

Durant les années qui s'écoulèrent entre sa signature et sa mise en oeuvre, l'accord qui ne définissait pas clairement les rôles et les responsabilités des parties et ne prévoyait pas les difficultés de conclure de tels accords tomba à l'eau. En 1990, les parties à la Convention sur l'inondation des terres du nord négocièrent une proposition pour la base d'un règlement. Cette proposition assurait la base nécessaire pour la négociation de la mise en oeuvre des accords conclus avec chacune des cinq bandes autochtones.

Je voudrais parler, si vous le voulez bien, des objectifs des projets de loi C-39 et C-40 que nous avons devant les yeux. Ils sont identiques du point de vue de leur portée, mais non du point de vue de l'indemnisation. Ces projets de loi contiennent quatre éléments fondamentaux dont mes collègues ont déjà parlé.

Le premier élément est de veiller à ce que les terres en fief simple ne deviennent pas des réserves spéciales aux termes des articles 35 et 36 de la Loi sur les Indiens.

Le deuxième élément est de s'assurer que les sommes versées à l'État en vertu de l'accord avec la première nation de Nelson House et de l'accord avec la première nation de York Factory constituent de l'argent des Indiens au sens du paragraphe 35(4) de la Loi sur les Indiens, mais soient administrées par un fonds en fiducie géré par les premières nations.

Le troisième élément est de s'assurer que les demandes présentées en vertu de la Convention, de l'accord avec la première nation de York Factory ou de l'accord avec la première nation de Nelson House soient examinées selon les modalités fixés par l'accord d'application en question.

Le quatrième élément est de permettre au Canada d'appliquer la loi manitobaine sur l'arbitrage lorsqu'un différend entre le parties est soumis à l'arbitrage aux termes de l'accord avec la première nation de York Factory ou de l'accord d'application avec la première nation de Nelson House.

(2005)

Les deux projets de lois ont une portée globale et limitent la responsabilité du fédéral à ses obligations fiduciaires. Toute responsabilité présente ou à venir revient au promoteur du projet, Manitoba Hydro. En bref, le gouvernement canadien n'aurait jamais dû signer un accord aussi général en 1977 concernant la submersion de ces terres, pour ensuite s'en décharger sur les cinq bandes touchées.

Quoi qu'il en soit, nous sommes maintenant saisi d'une mesure législative éclairée et il est temps d'aller de l'avant comme nous l'avons fait avec le projet de loi C-36 concernant la première nation crie de Split Lake, et comme nous le ferons probablement dans un an ou deux avec les projets de lois traitant de la submersion de terres des premières nations de Cross Lake et de Norway House.

Un élément commun à tous ces projets de loi est que les sommes versées seront administrées par une compagnie de fiducie tenue de rendre des comptes. À titre de dédommagement pour la perte de terres de réserve, le gouvernement fédéral versera environ 6,25 millions de dollars à la première nation de York Factory et environ 15,25 millions de dollars à la première nation de Nelson House.

Le gouvernement du Manitoba et Hydro-Manitoba verseront aussi des contributions additionnelles en terres et en argent. La province est particulièrement satisfaite des accords. Lors de conversations avec les ministres et les fonctionnaires, mon collègue de North Island-Powell River a conclu que les accords étaient justes et équitables et que les cinq premières nations avaient été patientes et avaient mené des négociations réalistes.


3971

Les projets de loi C-39 et C-40 autorisent les sociétés autochtones respectives à détenir des terres en fief simple auxquelles ne s'appliqueront pas les charges normales prévues dans la Loi sur les Indiens. Ces terres en fief simple seront assujetties à l'impôt foncier et tout profit d'entreprise réalisé sur ces terres sera aussi assujetti à l'impôt. L'utilisation de ces terres à des fins de développement économique sera instructive et favorable à la nouvelle indépendance des premières nations en cause.

Les projets de loi C-39 et C-40 autorisent les membres des bandes indiennes en cause à interjeter appel, en vertu de la Manitoba Arbitration Act, si ils ne sont pas satisfaits des décisions les concernant prises par leurs propres bandes. Naturellement, ces accords ont été ratifiés par les bandes. La province du Manitoba est satisfaite de ces accords et elle s'efforce de les promouvoir.

Comme mon collègue de North Island-Powell River l'a dit en concluant son discours, lors du débat en deuxième lecture sur le projet de loi C-36 concernant les Cris de Split Lake, nous avons affaire à des griefs légitimes. Les projets de loi C-39 et C-40 sont des copies conformes du projet de loi C-36 adopté il y a un an, tant par leur portée que par leur intention. Par conséquent, le Parti réformiste les appuie. Certains détails devront être clarifiés et explicités; cependant, le comité convient mieux à l'examen de ces détails.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée. En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)

* * *

[Traduction]

LA LOI CONCERNANT LA PREMIÈRE NATION DE NELSON HOUSE RELATIVEMENT À LA SUBMERSION DE TERRES

L'hon. Jane Stewart (pour le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) propose que le projet de loi C-40, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de Nelson House sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-40, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de Nelson House sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres, qui est pratiquement identique au projet de loi C-39 dont mon collègue de Churchill a parlé si éloquemment il y a un moment.

En votant en faveur du projet de loi C-40, nous pouvons régler la question en attente depuis longtemps de l'application de la Convention sur la submersion de terres à la première nation de Nelson House. En échange, la communauté peut commencer à bâtir son avenir, au lieu de travailler constamment à obtenir un redressement des torts du passé.

(2010)

Les aménagements hydroélectriques des fleuves Churchill et Nelson sont des projets importants qui ont apporté de nombreux avantages économiques à la province. Malheureusement, ils ont également eu un effet important et durable sur le mode de vie de milliers de membres des premières nations dans le nord du Manitoba.

L'inondation provoquée par les projets d'aménagement a privé de nombreuses communautés autochtones de leurs zones de pêche, de cueillette, de chasse et de trappe. L'inondation a également perturbé ou détruit des voies de transport par eau traditionnelles et des points d'accès sur la rive.

Dans bien des cas, des propriétés personnelles et des infrastructures communautaires ont été endommagées ou détruites. Parallèlement, les bandes ont tiré peu d'emplois ou d'autres avantages des projets hydroélectriques. La convention sur la submersion de terres était une entreprise bien intentionnée, visant à résoudre les nombreux problèmes et griefs des populations vivant dans les communautés touchées. Elle contenait des dispositions prévoyant des indemnités en espèces, la gestion des terres, le développement des ressources, des infrastructures communautaires, la navigation, etc.

Malheureusement, pour diverses raisons, la convention n'a pas répondu aux espoirs. En conséquence, les parties ont entrepris de négocier des ententes de mise en oeuvre particulières à chaque bande. C'est pourquoi nous avons ces deux projets de loi à l'étude aujourd'hui. Il est temps de nous attaquer à cette question, au nom de la première nation de Nelson House qui demande simplement que le Canada, le Manitoba et Manitoba-Hydro respectent les engagements pris dans la convention sur la submersion de terres.

Le gouvernement du Canada a clairement l'obligation, comme les autres parties à la convention, d'aider les collectivités à s'adapter aux conséquences de la submersion de terres. Avec cet accord de mise en oeuvre, nous nous engageons à faire en sorte que les obligations soient respectées, une fois pour toutes, d'une manière conforme à la lettre et à l'esprit de la convention.

Il est clair que le but du projet de loi n'est pas de faire appliquer la convention, son but est d'exempter certains aspects de la convention des dispositions de la Loi sur les Indiens en ce qui concerne les terres et l'argent, des dispositions qui pourraient nuire à la mise en oeuvre de la convention. Nous savons bien que la Loi sur les Indiens est une mesure législative périmée et ce projet de loi donnera à la première nation de Nelson House la possibilité d'échapper à certaines de ses dispositions encombrantes.


3972

La loi proposée permettra au Canada d'utiliser la législation du Manitoba sur l'arbitrage en relation avec la convention sur la submersion de terres. Finalement, elle fera en sorte que certains types de demandes pourront encore être faites contre Manitoba-Hydro et que le processus d'arbitrage prévu par les accords de mise en oeuvre aura préséance sur le processus d'application de la convention.

On a pris grand soin de faire en sorte que la loi proposée ne porte pas préjudice aux autres premières nations parties à la convention sur la submersion de terres. En fait, le projet de loi C-40 a été rédigé de telle façon qu'il ne s'applique à aucune des premières nations, sauf celle qui est nommée dans le projet de loi. Nous ne sommes pas, et je tiens à le répéter, en train de miner la convention sur la submersion de terres. Nous établissons seulement un processus de mise en oeuvre qui permettra d'arriver plus facilement aux résultats prévus par la convention.

Je veux insister également sur le fait que la négociation d'accords de mise en oeuvre particuliers à chacune des bandes est tout à fait optionnelle. Les trois premières nations qui ont des accords de mise en oeuvre, ainsi que les deux qui sont actuellement en cours de négociation, peuvent continuer de mettre en oeuvre la convention sur la submersion des terres du nord du Manitoba sans ces accords.

À l'instar du gouvernement, les premières nations sont persuadées que cette nouvelle façon de procéder offre les meilleures chances de réussite. Même s'il y aura toujours une certaine opposition au changement, les collectivités touchées semblent, en général, en faveur d'aller de l'avant rapidement et efficacement. Ces engagements ont suffisamment attendu. Les députés devraient savoir qu'on a tenu des réunions de consultation des collectivités dans le cas des premières nations de Nelson House et de York Factory tout au cours des négociations respectives. Le processus de consultation faisait partie intégrante des accords de mise en oeuvre. On a également consulté les dirigeants de ces deux premières nations au sujet du contenu de ces projets de loi. Ils appuient ces mesures et ont hâte de voir la Chambre les adopter le plus rapidement possible.

(2015)

Il convient de noter que le Canada a respecté pratiquement toutes ses obligations aux termes de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. L'accord de mise en oeuvre signé avec la première nation de Nelson House plus tôt cette année prévoit une exonération définitive au sujet des obligations du Canada.

Aux termes de l'accord, le Canada devait notamment et surtout veiller à ce que les cinq réserves aient un approvisionnement continu en eau potable. Cela a exigé un investissement de plus de 88 millions de dollars par le gouvernement. Aujourd'hui, je suis heureux de signaler que toutes les maisons des premières nations de York Factory et de Nelson House ont l'eau potable.

Le Canada a également respecté son obligation aux termes de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba, en soutenant l'élaboration de plans de développement communautaires globaux, contribuant à la société de développement économique Nevanun, ainsi qu'en parrainant le programme fédéral quinquennal de surveillance écologique.

Les obligations qu'il reste à remplir en vertu de la convention sur la submersion des terres du nord sont réparties principalement entre le Manitoba, qui doit fournir des terres aux premières nations touchées, et la Régie de l'hydroélectricité du Manitoba, qui doit les indemniser pour les effets négatifs de la centrale hydroélectrique. Les accords précis de mise en oeuvre de la convention qui ont été conclus avec chaque bande prévoient la prise d'autres mesures par ces parties.

Par exemple, la Régie d'hydroélectricité du Manitoba continuera d'être responsable pour les blessures et les décès causés par la centrale ou imputables à ce dernier. En outre, le service d'utilité publique sera chargé de l'exploitation sans danger du régime des eaux dans les collectivités de Nelson House et de York Factory.

En ce qui concerne cette dernière obligation, la Régie d'hydro-électricité du Manitoba est tenue de fournir des prévisions par écrit sur le niveau hydrostatique prévu pour les mois courant et suivant, avec des détails complets sur les changements prévus et sur l'estimation du nombre de changements. La régie doit également radiodiffuser ces prévisions mensuelles sur une station radio qui dessert ces collectivités.

Pour sa part, le gouvernement du Manitoba est tenu de fournir des terres de la Couronne provinciale aux premières nations, en remplacement de leurs terres inondées.

En vertu des conditions de l'accord de mise en oeuvre de la convention qui a été conclu avec la première nation de Nelson House, environ 53 000 acres de terres seront mises de côté à son usage et à son profit. Une grande partie de ces terres s'ajouteront aux réserves actuelles de la première nation. En fait, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a déjà engagé le processus d'ajout aux réserves pour assurer la cession de ces terres. Cependant, comme on l'a mentionné, certaines terres seront également occupées en fief simple.

La première nation créera une société chargée de détenir ses terres en fief simple au nom de la bande. La société émettra une action ordinaire que le chef de la bande détiendra en fiducie pour tous les membres. Le chef doit signer la déclaration de fiducie et son acceptation.

Aux termes de l'accord de mise en oeuvre, la bande peut vendre les terres occupées en fief simple sous réserve de certaines exigences. Ainsi, on doit tenir une réunion publique pour expliquer toute transaction et pour prendre des décisions au sujet de la façon de disposer du produit de la vente. Les terres en fief simple seront assujetties à des impôts fonciers à la discrétion du gouvernement du Manitoba.

L'accord de mise en oeuvre donnera également à la première nation de Nelson House une compensation financière équitable et raisonnable. Elle recevra une contribution fédérale de 15,25 millions de dollars. Le gouvernement du Manitoba et Hydro Manitoba verseront le reste des fonds qui totaliseront plus de 65 millions de dollars pour la bande de Nelson House, sous la forme de versements en espèces, d'obligations et de prêts-subventions. Ces fonds seront versés sur plusieurs années. Ils serviront à tout un éventail d'objec-


3973

tifs, notamment le développement socio-économique, l'exploitation des ressources, le dédommagement et les ouvrages de protection. Ils ne toucheront en rien les programmes normaux des premières nations.

(2020)

Lorsqu'on tient compte des dépenses passées, on peut avoir l'impression que le Canada apporte la contribution la plus importante dans la mise en oeuvre de la Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba. Cependant, on n'a pas établi le coût d'autres obligations importantes prévues dans les accords de mise en oeuvre, comme l'octroi de meilleures terres par le Manitoba, le maintien des responsabilités de la Régie de l'hydroélectricité du Manitoba en ce qui concerne les blessures personnelles et les décès, et l'obligation d'offrir un dédommagement supplémentaire si on dépasse le régime des eaux établi.

Chaque première nation établira un fonds en fiducie pour détenir et gérer l'argent versé au titre du dédommagement. Je peux garantir aux députés que ces fiducies vont être administrées selon les principes comptables généralement reconnus et les lois provinciales sur les fiducies.

On a rédigé avec soin les dispositions sur les fiducies contenues dans les accords de mise en oeuvre pour répondre aux besoins immédiats de dédommagement des gens ayant subi des dommages du fait du projet hydroélectrique, tout en s'assurant qu'on aura l'argent disponible pour répondre aux besoins des générations futures.

Les députés doivent aussi savoir que l'application des ententes permet aux membres qui vivent hors de la réserve d'obtenir dédommagement grâce à ces fonds en fiducie.

Les premières nations de Nelson House et de York Factory continueront à déposer annuellement un état financier vérifié auprès du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. De même, l'acte de fiducie, document connexe à chaque accord d'exécution, exige qu'un rapport annuel des activités de la fiducie soit remis à toutes les parties.

Je veux prendre un moment pour renseigner les députés sur l'état des négociations avec les deux premières nations visées par la convention qui n'ont pas encore conclu d'accord, Cross Lake et Norway House.

Dans le cas de la bande de Cross Lake, un protocole d'entente a été signé en décembre 1993, suivi de la signature d'un accord d'exécution provisoire en juin 1994. Les négociations officielles entre les premières nations, le Manitoba, Hydro-Manitoba et le Canada sont restées en suspens durant la plus grande partie de 1995, en attendant l'élaboration d'un plan de travail et d'un budget réalistes et conformes au mandat fédéral. Je suis heureux d'apprendre à la Chambre que les discussions préliminaires à quatre ont repris un peu plus tôt cette année.

Un protocole d'entente et une entente de principe ont aussi été signés avec la première nation de Norway House. En décembre 1995, un groupe de membres de cette première nation ont demandé et obtenu une injonction suspendant les négociations. Cette injonction a cependant été révoquée au début de 1996 et les discussions ont repris depuis.

Pour revenir à la question dont nous sommes saisis, ce projet de loi est nettement dans l'intérêt de la première nation de Nelson House. Il est aussi dans l'intérêt du Canada et des contribuables canadiens.

La loi proposée n'imposera pas d'obligations supplémentaires au Canada mais fera en sorte que le gouvernement respecte ses engagements envers les premières nations.

J'exhorte mes collègues à reconnaître les nombreux avantages que présente ce projet de loi simple et bref et à l'appuyer à l'étape de la deuxième lecture, afin qu'il puisse franchir rapidement toutes les étapes à la Chambre.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je vous ai dit tantôt que je continuerai à parler de la récrimination qui a existé autour du Northern Flood Agreement.

(2025)

Mon honorable collègue vient de nous expliquer, dans la langue de Shakespeare, le positivisme de tout cela, mais à titre d'opposition officielle, on est souvent obligés de soulever des choses qui sont plus ou moins acceptées dans le milieu.

J'avais commencé à vous faire part, plus tôt, d'une certaine liste de mises en garde et je dois la continuer, même si on est effectivement en faveur des projets de loi C-39 et C-40. Il y a quand même des choses qui sont encore inexplicables dans cette démarche. Je m'étais arrêté tantôt, entre autres, à la démarche environnementale et j'aurais pu continuer parce que cela s'applique autant à York Factory qu'à Nelson House. Alors, je continue sur Nelson House, mais tout le monde comprendra que cela s'applique aux cinq communautés.

Lors de cette inondation, dans les différents comités, il s'est exercé ce que j'appelle une espèce de gestion de crise. Chaque fois qu'on constatait un problème environnemental spécifique, que ce soit le gouvernement ou les nations autochtones, il y avait parfois des comités paritaires tripartites ou bilatéraux. Quoi qu'il en soit, ces gens n'avaient jamais le soutien financier nécessaire. On faisait un bout de chemin et, finalement, on constatait qu'il n'y avait pas de suivi. Ce fut d'ailleurs aussi dénoncé par le vérificateur général et cela nous a conduit directement au processus d'arbitrage, parce qu'effectivement, on n'arrivait pas à trouver de méthode consensuelle. Donc, le conflictuel ressurgissait et cela s'acheminait vers l'arbitrage comme tel, ce qui était une perte de temps, de la lenteur et beaucoup de frustrations.

D'ailleurs, on prévoyait aussi, dans certaines de ces études, faire des rapports annuels à chaque bande. Là-dessus, le vérificateur général a constaté qu'il n'y avait jamais eu de ces rapports annuels non plus. Pire encore, c'est que dans l'ensemble du processus, je vous avais parlé tantôt de la dérivation dans le fleuve Nelson et la rivière Churchill, on n'a pas fait d'évaluation d'impacts globaux. Donc, on a géré crise après crise. On s'est dit qu'on détournait et qu'après, on verrait ce que cela aurait comme portée sur l'environnement. Depuis ce temps-là, des comités ont été mis sur pied, se


3974

sont démantibulés à la fin des échéances et on s'est acheminé vers des processus d'arbitrage et des lenteurs administratives conséquentes.

Mon collègue a parlé aussi du réseau d'alimentation en eau. Effectivement, tout cela a bouleversé les habitudes de consommation d'eau et l'eau potable est devenue presque inexistante. Le gouvernement a donc été obligé de venir en aide à ces communautés. C'était un projet de 88 millions de dollars. Il en a fait aussi mention. Il n'a peut-être pas rajouté que la facture qui devait être payée par le Manitoba n'a jamais été payée et ils sont probablement encore en pourparlers ou même devant le tribunal pour obtenir l'argent que le Manitoba doit au Canada.

Alors, il faut comprendre que les égouts sont un système d'eau potable doté aussi d'un système d'aqueduc et qu'environ 1 500 logements en sont touchés. Alors, on comprend que le coût de tout cela oscille autour des 90 millions de dollars. L'ensemble des travaux pour cinq communautés qui sont quand même assez distantes a occasionné ces coûts-là. Donc, le projet de réseau d'alimentation en eau a coûté extrêmement cher pour compenser pour la perte d'eau potable survenue avec les travaux comme tels.

J'ai parlé aussi tantôt très brièvement, mais je veux y revenir un peu plus, de l'échange de terres. Ce qui avait été conclu, c'est qu'à chaque acre de terre qui serait endommagé ou inondé, les gouvernements devraient compenser par quatre acres de terres. Jusqu'à maintenant, mon collègue n'en a peut-être pas suffisamment parlé, mais seulement 10 p. 100 des terres qui ont été remises. Donc, il y a certains problèmes là aussi.

La première entente prévoyait une terre pour quatre, et aujourd'hui, on a à peine 10 p. 100 de ces terres qui sont remises. Même s'il reste deux communautés à régler, je ne pense pas qu'on puisse atteindre le fameux un pour quatre et c'est dommage pour les autochtones parce que-je ne veux pas revenir là-dessus, je l'ai expliqué pour ce qui est de York Factory-c'étaient des terres extrêmement riches en gibier et traditionnelles pour les autochtones. Je ne pense pas qu'ils pourront en récupérer l'équivalent.

(2030)

Ce qui était prévu aussi dans l'entente originale, c'était des plans de développement communautaire, parce qu'il y a dû y avoir des déménagements à cause de ces inondations qui ont bouleversé un peu le régime de vie des autochtones eux-mêmes. Donc, il devait y avoir des plans de développement communautaire pour ces gens afin de les aider un peu à restructurer leur vie et leur façon traditionnelle de vivre. Le voisinage dans lequel ils avaient vécu souvent depuis des siècles était bouleversé. Alors il fallait quand même apporter un certain soutien. Il y a eu certains plans de développement communautaire. Malheureusement, il n'y a eu aucun suivi de ces développements communautaires. Même le vérificateur général l'a dénoncé à sa juste mesure dans les documents que j'ai devant moi. Le vérificateur général a dit que les gouvernements n'avaient pas été au bout de leurs engagements, c'est-à-dire de faire des plans de développement communautaire, mais aussi faire le suivi continu pour faire en sorte que ce bouleversement puisse être contrôlable par l'ensemble de ces communautés.

Personne n'en a parlé encore, mais j'ai aussi sorti un aperçu des coûts reliés à tout ça. Pas les coûts passés mais les coûts actuels, c'est-à-dire ce que prévoit l'entente. J'ai additionné Nelson House et York Factory ensemble. Ce sont quand même des coûts assez importants. Entre autres, le gouvernement fédéral va contribuer dans ce désastre écologique et dans ce redéploiement des communautés autochtones. Il donnera 21 millions de dollars pour satisfaire la partie qui relève de sa responsabilité. Le Manitoba paiera environ 19 millions de dollars. Et Hydro Manitoba paie 2,5 millions, mais fournira également 54 millions d'obligations d'Hydro Manitoba qui sont payables dans des délais que je ne veux pas vous énumérer. Il me paraissait important de soulever le coût de toute l'opération.

Comme je vous le dis, c'est le coût à partir de la mise en application, à partir de la signature. Il commence déjà à s'accumuler. Mais il faut compter aussi l'ensemble des coûts occasionnés à l'environnement. Entre autres le coût du système d'eau de 88 millions dont je vous parlais tantôt n'est pas compris. Alors c'est une aventure qui coûte cher au gouvernement canadien et à celui du Manitoba, mais probablement plus encore aux autochtones qui ont vu leur régime de vie bouleversé.

Je pense que c'est un rôle important de l'opposition d'en faire mention. Du côté du gouvernement, on nous présente tout le temps le côté positif de la chose, que tout le monde est très heureux. Nous, quand on se met à faire nos recherches, on constate que ce n'est pas tout à fait le cas. Je n'ai pas entendu ça ni de mon collègue de Churchill ni de mon collègue de Pontiac-Gatineau-Labelle. Je n'ai pas vu mes collègues parler des doléances et des récriminations faites par les autochtones. Pourtant, il y en a eu, parce que ces gens ont comparu au Comité permanent des affaires indiennes et ça n'a pas été relevé dans leurs discours. Il n'y a pas seulement du positif dans ce qui est devant nous, il y a beaucoup de négatif aussi que je me devais de signaler.

Cependant, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, dans York Factory comme dans Nelson House, comme dans Split Lake, comme dans Norway House, comme dans Cross Lake, à partir du moment où on a réussi à détacher ces gens les uns des autres et de briser la solidarité, ils se sont vus condamnés à négocier un à un avec le gouvernement. C'était un peu le combat de David contre Goliath, et dans le cas qui nous concerne c'est Goliath qui a vraiment gagné.

On ne peut pas s'objecter au fait que des ententes ont été conclues et ratifiées par ces peuples, souvent par référendum, par les communautés autochtones. Conséquemment, on est un peu pris pour dire qu'on est obligé de l'accepter parce qu'on ne peut pas voter contre et reprendre la négociation à zéro si ces gens se sont entendus. Mais je pense qu'on les a placés dans une position de vulnérabilité où ils n'avaient pas beaucoup de choix, où, s'ils voulaient résister, ils se confrontaient à des années et peut-être même à des décennies de lutte en cour, alors qu'ils n'avaient absolument pas les moyens de faire cela. Ils ont donc dû convenir d'accepter ces ententes, avec toutes les doléances et les récriminations qui y sont raccrochées.

Tout comme le projet de loi C-39, le Bloc québécois appuiera le projet de loi C-40.


3975

(2035)

[Traduction]

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, je serai très bref, puisque le projet de loi C-39, dont nous avons débattu il y a environ une heure, et le projet de loi C-40, dont nous débattons actuellement, sont pratiquement identiques, ne différant que par le nom de la bande concernée et le montant de l'indemnisation prévue.

Comme il a appuyé le projet de loi C-39, le Parti réformiste appuiera le projet de loi C-40.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé au comité.)

* * *

LA LOI DE 1996 POUR LA MISE EN OEUVRE DE CONVENTIONS FISCALES

L'hon. Jane Stewart (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose: Que le projet de loi C-37, Loi mettant en oeuvre un accord conclu entre le Canada et la Fédération de la Russie, une convention conclue entre le Canada et la République sud-africaine, un accord conclu entre le Canada et la République-Unie de Tanzanie, un accord conclu entre le Canada et la République de l'Inde et une convention conclue entre le Canada et l'Ukraine, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre aujourd'hui la parole pour exhorter la Chambre à approuver sans délai le projet de loi.

La mesure législative que je présente aujourd'hui est la conclusion d'un travail qui a duré des mois. C'est le genre de projet de loi qui, généralement, ne retient pas beaucoup l'attention du public. Il encourage toutefois une fiscalité juste ainsi que de saines relations internationales et commerciales.

Le projet de loi C-37 vise à mettre en oeuvre des conventions fiscales réciproques que le Canada a signées avec la Russie, l'Ukraine, l'Afrique du Sud, la Tanzanie et l'Inde. Ces cinq conventions fiscales, qui s'inspirent d'un modèle de convention fiscale de l'OCDE, ont deux grands objectifs: éliminer la double imposition et empêcher l'évasion fiscale.

Même si ce projet de loi ne pique pas beaucoup la curiosité des Canadiens, il ne faut pas minimiser l'importance des conventions fiscales et des avantages qui en découlent. Les conventions comme celles qui sont incluses dans le projet de loi que je présente aujourd'hui encouragent la clarté et la stabilité entre les régimes fiscaux internationaux et elles permettent l'accroissement des relations commerciales et des investissements.

Il vaut la peine de parler plus particulièrement des conventions conclues avec la Russie et l'Ukraine. Étant donné les bouleversements politiques qui sont survenus dans cette région du monde à la fin des années 80 et 90, il est grand temps que nous renoncions à la convention fiscale que le Canada et l'URSS ont conclue en 1985 et que nous adaptions nos relations fiscales avec les pays concernés de manière à assurer un renouvellement et un accroissement des relations économiques que nous entretenons avec eux.

Les conventions fiscales dont je parle aujourd'hui éliminent ou allègent la double imposition lorsque des transactions internationales sont en cause et que le même revenu d'un particulier risque d'être imposé dans plus d'un pays. Elles mettent aussi en oeuvre des mesures destinées à contrer l'évasion fiscale dans le cadre de transactions internationales. Cela garantit que les pays qui ont légitimement droit à de précieuses recettes fiscales seront entièrement indemnisés.

Je tiens aussi à rappeler à la Chambre que les conventions que le projet de loi met en oeuvre sont l'aboutissement d'un processus de longue date qui permet le renouvellement ou l'évolution des conventions fiscales que nous concluons avec ces nouveaux pays. En 1971, l'importante réforme de la législation fiscale canadienne a obligé le Canada à multiplier les conventions qu'il conclut avec d'autres pays pour éviter la double imposition.

Avant d'énumérer les principaux éléments de ces nouvelles conventions fiscales, je tiens à rassurer ceux qui pourraient craindre les effets que ces conventions auront sur les recettes. En d'autres termes, les concessions prévues dans les cinq conventions ne devraient entraîner aucune perte de recettes pour le gouvernement du Canada. Au contraire, le Canada profiterait des réductions de divers taux de retenues d'impôt et des autres concessions qui ont été faites par les cinq pays concernés ainsi que de l'accroissement des échanges commerciaux et des investissements résultant de la conclusion fructueuse de ces traités.

(2040)

Le seul fait d'entendre parler de convention fiscale porte certains députés à faire une association avec une possibilité d'évasion fiscale. En fait, il s'agit d'une possibilité de promouvoir l'investissement et la libre circulation du capital et des citoyens.

Permettez-moi de décrire brièvement les principaux aspects du projet de loi C-37 qui apporte des solutions équitables aux divers problèmes fiscaux qui se posent entre le Canada et certains partenaires étrangers.

Les conventions prévoient généralement que les dividendes peuvent être imposés dans le pays d'origine en y appliquant des taux maximums qui varient. En Russie, en Ukraine et en Afrique du Sud, ce taux maximum sera de 15 p. 100. Dans la République-Unie de Tanzanie, il sera de 25 p. 100. En ce qui concerne l'Inde, la convention conclue en 1985 avec le Canada fixe des taux maximums de 15 p. 100 sur les dividendes directs sur les intérêts et de 25 p. 100 sur les autres dividendes. Ces taux ne changeront pas.


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Dans le cas des dividendes versées par une société à une autre, le taux est souvent réduit si celle qui touche les dividendes détient une certaine part des actions de celle qui les verse. Ce taux réduit a été fixé à 5 p. 100 en Afrique du Sud et en Ukraine, à 10 p. 100 en Russie et à 20 p. 100 en Tanzanie.

Une des principales raisons d'être des conventions fiscales est d'éviter que les sociétés puissent faire baisser les impôts en créant des filiales au Canada et à l'étranger. Par conséquent, les taux d'imposition des succursales ont été calqués sur les taux s'appliquent aux dividendes versés par une société à une autre.

En ce qui concerne les intérêts versés par un résident d'un pays à un résident d'un autre pays, le taux prévu dans le projet de loi est de 10 p. 100 dans le cas de la Russie, de l'Ukraine et de l'Afrique du Sud, et de 15 p. 100 dans celui de la Tanzanie. Il existe toutefois certaines exceptions.

Les taux maximums s'appliquant aux intérêts versés sur une obligation émise par un gouvernement national seront réduits à zéro dans tous les pays participants. En outre, ces conventions renferment une clause qui appliquera un taux d'imposition zéro sur l'intérêt versé sur des prêts ou du crédit accordé, garanti ou assuré par certaines entités gouvernementales dans le pays d'origine. Ce serait le cas pour la Société pour l'expansion des exportations au Canada.

Ces conventions règlent aussi la question de l'imposition des redevances. Elles instaurent un taux d'imposition général à la source de 10 p. 100 en Russie, en Ukraine et en Afrique du Sud et de 20 p. 100 en Tanzanie. En ce qui concerne l'Inde, le taux sera réduit à 10 ou 15 p. 100 d'ici cinq ans, selon le type de redevances.

Les traités avec la Russie, l'Ukraine et l'Afrique du Sud vont plus loin pour reconnaître que l'autoroute de l'information a d'énormes répercussions sur les frontières mondiales. L'Afrique du Sud ramène à 6 p. 100 la retenue d'impôt sur les redevances pour les logiciels. La Russie et l'Ukraine suppriment complètement ces retenues.

Il est également question des pensions dans ces traités. Ainsi, dans le cas de la Russie, de l'Ukraine et de l'Inde, les pensions et d'autres paiements semblables ne seront imposables que dans le pays d'origine. Quant à l'Afrique du Sud, la situation sera légèrement différente, puisqu'on précise que les pensions sont imposables dans le pays d'origine sans limite. Dans ce cas, le pays dans lequel le bénéficiaire habite accordera un crédit pour les impôts versés dans le pays d'origine.

Dans le cas de la Tanzanie, les pensions et les paiements semblables provenant d'un pays et versés à un habitant d'un autre pays peuvent être imposés par les deux pays. Cependant, le taux d'imposition du pays d'origine sera généralement réduit à 15 p. 100.

En résumé, les cinq conventions fiscales contenues dans ce projet de loi offrent des solutions mutuellement profitables à de nombreux problèmes d'imposition qui existent entre le Canada et nos partenaires internationaux. Les pays que j'ai mentionnés aujourd'hui se préparent à mettre en oeuvre la convention bilatérale le plus tôt possible.

Je rappelle aux députés le rôle important que les conventions fiscales jouent pour ce qui est de favoriser l'investissement d'étrangers au Canada, ainsi que de Canadiens dans d'autres pays, comme ceux qui sont visés par ce projet de loi, ainsi que pour ce qui est de promouvoir le traitement équitable des contribuables et de s'assurer qu'on perçoit bien les impôts. J'exhorte la Chambre à adopter rapidement ce projet de loi.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait toujours plaisir, même à une heure aussi tardive, d'intervenir sur un projet de loi aussi important que le projet de loi C-37, Loi mettant en oeuvre des conventions fiscales signées entre le Canada, la Russie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Inde et l'Ukraine.

(2045)

Contrairement à ce que disait mon collègue tout à l'heure, il est faux de dire que la plupart des députés du Parlement ou de l'opposition officielle s'opposent à la signature de conventions fiscales. Au contraire, nous encourageons la signature de conventions fiscales entre le Canada et les États-Unis. Pourquoi? Parce qu'il est de notre intérêt que les entreprises québécoises et les entreprises canadiennes ne paient qu'une seule fois de l'impôt et non pas deux fois. C'est de cette façon qu'on évite ce double paiement d'impôt, en signant des conventions fiscales qui établissent des règles de fonctionnement pour les revenus des entreprises, même les revenus des particuliers, même les revenus des diplomates canadiens versus les diplomates étrangers. C'est tout à l'honneur d'un pays comme le Canada de signer ces conventions.

Là où ça ne fonctionne pas, et nous avons toujours été clairs à ce sujet, c'est lorsqu'on signe des conventions fiscales ou qu'on évite d'adopter des règles avec des pays qui ont des taux de taxation qui sont largement inférieurs aux taux de taxation canadiens. Ça ne fonctionne plus, puisque par différents subterfuges, par différents moyens détournés, les entreprises qui ont des filiales dans des pays considérés comme des paradis fiscaux peuvent faire jouer les taux de taxation qui sont inférieurs dans ces pays au détriment des rentrées fiscales qu'ils paieraient normalement dans les coffres fédéraux.

À la lumière des conventions signées avec les cinq pays en cause, vérification faite, ces pays ne sont pas des pays avec des taux de taxation passablement différents de ceux du Canada pour ce qui est de la taxation des profits des entreprises.

Prenons par exemple la Russie. La Fédération de Russie taxe les profits autour de 13 p. 100 et les États fédérés à des taux variant entre 9 p. 100 et 25 p. 100. C'est donc dire que les taux combinés d'États fédérés et de la Fédération représentent environ entre 22 p. 100 et 35 p. 100, donc c'est passablement comparable à un taux qui varie entre 32 p. 100 et 40 p. 100 au Canada.

Lorsqu'on regarde l'Afrique du Sud, nous n'avons pas d'information récente pour l'année 1996 pour ce qui est du taux de taxation des entreprises, mais pour l'année 1995, au 31 mars 1995 plus particulièrement, le taux de taxation des entreprises en Afrique du Sud était de 35 p. 100.

La même chose pour l'Inde. Le taux de taxation des entreprises indiennes est de 40 p. 100 et une surtaxe de 15 p. 100 est imposée si le revenu imposable est supérieur à 75 000 roupies, donc supérieur


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à 3 200 $. Donc non seulement le taux de taxation n'est-il pas inférieur en Inde par rapport au Canada, mais il lui est supérieur.

Quand on regarde la Tanzanie, le taux standard d'imposition sur les profits tourne autour de 30 p. 100, 35 p. 100.

Finalement, en regard de la convention fiscale signée entre le Canada et l'Ukraine, on remarque que jusqu'en 1992, dernière année disponible, le taux de taxation des profits des entreprises en Ukraine était de 35 p. 100. Il a été révisé récemment pour se situer entre 20 p. 100 et 28 p. 100. C'est un peu inférieur à ce qu'on retrouve au Canada, mais quand même on est loin des différentiels qui peuvent survenir quelquefois entre des pays qui sont considérés comme des paradis fiscaux et où on retrouve entre 2 p. 100 et 3 p. 100 d'imposition sur les profits des entreprises comparé à un taux affiché théorique au Canada d'autour de 40 p. 100.

Donc il n'y a pas de problème là, mais il y en a d'autres ailleurs, par exemple. Je profite de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui, en regard de l'analyse du projet de loi C-37, pour rappeler au gouvernement qu'il a signé par le passé des conventions fiscales avec des pays qui sont considérés comme de véritables paradis fiscaux, d'où transitent des centaines de millions sinon des milliards de dollars tous les ans qui ne sont pas payés à Revenu Canada, parce qu'il y a un taux de taxation ridiculement bas dans ces pays, et puisque la convention fiscale fait en sorte que ces entreprises ne paient qu'une seule fois un impôt, naturellement, par différents canaux, ils en arrivent à faire taxer leurs profits canadiens à un taux ridiculement bas.

Ces profits sont rapatriés au Canada exempts d'impôt et on épargne de cette façon entre 35 p. 100 et 38 p. 100 de taux de taxation tous les ans. Il reste toujours, malgré les nombreux efforts faits par les années passées par le gouvernement fédéral, 11 pays signataires de conventions fiscales avec le Canada qui sont considérés comme de véritables paradis fiscaux. Les principaux sont la Barbade, Chypre, Malte et même la Suisse.

(2050)

Il y a aussi onze autres pays qui offrent des exemptions qui réduisent grandement leur taux d'imposition pour parvenir à certains objectifs économiques et commerciaux. Avec ces pays, qui sont, entre autres, la Barbade, l'Irlande, Malte et les Pays-Bas, il faut que le Canada en arrive à mettre le poing sur la table et dire que s'il y a des conventions fiscales, elles doivent être respectées. Pour que les conventions soient respectées, il faut que les taux de taxation continuent d'être comparables, et non pas varier au gré des pays qui ont signé ces conventions.

La différence est très grande et il me semble que lorsqu'on est dans un pays comme le nôtre, qui éprouve des difficultés financières, on ne doit pas lever le nez sur des centaines de millions de recettes fiscales supplémentaires qui pourraient être créées si le gouvernement fédéral corrigeait les lacunes des conventions fiscales et des autres accords qu'il a avec d'autres pays qui ont des taux de taxation vraiment très bas.

Prenons trois pays. Premièrement, la Barbade. La Barbade a un taux d'imposition sur le profit des entreprises de 2,5 p. 100; 2,5 p. 100, cela signifie qu'il manque environ 36 points de pourcentage si on compare le taux de taxation affiché au Canada pour le profit des entreprises.

La Suisse a un taux de taxation de moins de 10 p. 100. Ce sont tous des pays avec lesquels on a signé des conventions fiscales. Ce ne sont pas des pays qui ont un taux de taxation comparable au nôtre et c'est là que le bât blesse dans les conventions fiscales. Ce n'est pas le principe des conventions fiscales, c'est merveilleux le principe des conventions fiscales. Le principe des conventions fiscales est souhaitable et nécessaire.

Mais il faut les conclure avec des pays qui ont des taux de taxation comparables, sinon, il faut qu'il y ait un facteur de correction lorsque les profits reviennent dans ces pays, une fois imposés, à taux réduits.

Le troisième pays, les Bahamas, est le paradis idéal. C'est la crème des paradis, car le taux de taxation sur les profits est de 0 p. 100. Autrement dit, une entreprise canadienne qui disposerait de filiales aux Barbades pourrait faire des profits, se faire imposer à un taux de 0 p. 100 aux Barbades, et rapatrier ses profits totalement exempts d'impôts au Canada.

Je parle toujours d'une entreprise canadienne, d'une entreprise détenue par des résidants canadiens qui devraient normalement payer leur dû à Revenu Canada, mais à cause de ces taux de taxation réduits entre le Canada et des pays considérés comme des paradis fiscaux, on perd de l'argent par notre faute autrement dit. Cela fait deux ans et demi qu'on demande au gouvernement de corriger ces choses. On se demande encore pourquoi il ne le fait pas.

Les paradis fiscaux deviennent tellement populaires que des entreprises très bien connues au Canada profitent de ces échappatoires. On parle de six grandes banques canadiennes. Savez-vous que les six grandes banques canadiennes ont la moitié de leurs filiales internationales, donc la moitié des 119 filiales qu'elles ont à l'extérieur du Canada, uniquement dans la région des Antilles. Cinquante-sept filiales des six grandes banques canadiennes se retrouvent dans les Antilles. Ce n'est pas là que se trouve la plus forte densité de population.

Il n'est pas normal que la moitié des filiales des banques à charte canadiennes se retrouvent dans les Antilles. Il y a sûrement une raison quelque part. Justement, dans les Antilles pullulent les pays considérés comme les plus généreux paradis fiscaux au monde.

C'est la même chose aux îles Cayman, ce paradis fiscal par excellence. On y retrouve 28 000 compagnies qui sont pour la plupart des filiales d'entreprises canadiennes, américaines, japonaises. Il y a 28 000 sociétés pour 30 000 habitants. Là aussi on peut s'imaginer qu'il y a des raisons, ce n'est sûrement pas les 30 000 habitants qui disposent de la totalité des actions des 28 000 sociétés.

On parle aussi des 16 000 sociétés qui sont constituées aux îles Turks et Caicos qui appartiendraient à des intérêts canadiens.

(2055)

Il y a une raison pour ça. C'est justement le fait que le Canada signe des conventions fiscales avec différents pays. Il ne se soucie pas des taux de taxation. Où quand il n'y a pas de convention fiscale comme telle, il n'y a aucun arrangement qui fait en sorte, lorsque des profits canadiens sont réalisés dans ces pays, qu'on comble la


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différence entre le taux de taxation ridiculement bas de ces pays et le taux de taxation d'environ 40 p. 100 au Canada.

Ce n'est pas une mince affaire, cette chose-là. On pense que ce sont de petits montants qui sont impliqués et que c'est la raison pour laquelle le gouvernement ne prend pas la peine de corriger cela. Le gouvernement sait fort bien que ce sont des montants faramineux, que ce sont des montants énormes. Mais le gouvernement continue à faire la sourde oreille à nos cris.

Vous savez que, seulement en 1990, on parlait d'investissements réalisés ailleurs qu'au Canada, aux alentours de 92 milliards. Je répète, 92 milliards. Ces sociétés, qui investissent à l'étranger, recevaient 4,2 milliards de dollars de dividendes des compagnies établies ailleurs.

De ces 92 milliards, plusieurs se sont retrouvés dans des pays étrangers considérés comme de véritables paradis fiscaux. La somme de 5,2 milliards, par exemple, si on se fie au vérificateur général, a été investie dans des entreprises de la Barbade, au taux d'imposition maximum de 2,5 p. 100, comme je le mentionnais tout à l'heure. Il y a eu 400 millions de dollars en dividendes qui ont été versés à des compagnies canadiennes par des compagnies de la Barbade, et probablement exemptes d'impôt. Ce n'est pas des pinottes, comme on dit, 400 millions de dollars.

Par ailleurs, le vérificateur général souligne un autre cas, la somme de 10,9 milliards de dollars a été investie à Chypre, en Irlande, au Liberia, aux Pays-Bas et en Suisse, tous des pays considérés comme des paradis fiscaux. Dans ce cas-là, il y a plus de 200 millions de dollars en dividendes qui ont été versés par des compagnies de ces pays à des corporations canadiennes, possiblement aussi exemptées d'une bonne partie des impôts qu'elles auraient dû normalement payer si on avait eu des arrangements corrects entre le Canada et ces pays.

Lorsqu'on a souligné cela au gouvernement, il y a environ deux ans et demi, il nous disait: «Ah, il faut faire attention, parce que si on est trop sévères, si on est trop restrictifs, on sera moins compétitif sur le plan international. Et avec la mondialisation des marchés, l'ouverture des frontières, le fait qu'il n'y a plus de barrière, la Terre est un gros village planétaire, et bientôt nous irons à la conquête de l'univers.» Bref, toutes les fois qu'on a soulevé cela auprès du gouvernement, il nous disait: «Il faut être très prudent parce que si on est trop sévères les capitaux risquent de sortir. Si on est trop sévères, la compétitivité internationale du Canada, sa capacité d'attirer des investissements étrangers, de les sauvegarder, de faire en sorte qu'il y ait des investissements directs au Canada dans la construction d'usines, dans la création d'emplois, etc., sera minée si on serre trop la vis aux conventions fiscales ou si on en arrive à des arrangements autres avec des pays considérés comme des paradis fiscaux. Autrement dit, nos millionnaires vont s'en aller ailleurs.»

Notre principal concurrent en Amérique du Nord, ce sont les États-Unis. Depuis un bon bout de temps, les États-Unis ont instauré une mesure. Puisqu'ils n'arrivaient pas à contrôler, comme c'est le cas au Canada, les entrées et les sorties, les taxations à faible niveau versus les taxes ici, ils ont décidé de soumettre tout profit réalisé par des entreprises américaines à l'étranger au taux de taxation américain. On taxe littéralement ces profits. Mais ce qu'on fait, c'est qu'on regarde les profits payés ailleurs, par ces mêmes entreprises américaines pour des profits réalisés à l'étranger, on regarde le taux de taxation payé sur ces profits et on donne une exemption d'impôt pour les taxes déjà payées ailleurs.

Autrement dit, on est sûr que les entreprises américaines paient l'impôt sur leurs profits et on vérifie, cas par cas, ce qu'elles ont déjà payé ailleurs et on fait la déduction des deux. Il me semble que c'est logique. Ça ne prend pas la tête à Papineau, comme on dirait, pour comprendre ces principes. Tu paies 2 p. 100 ailleurs, le taux est de 40 p. 100 ici. Tu rapatries tes profits ici, mais tu vas payer le différentiel de 38 p. 100 au net, parce qu'on va t'accorder une déduction pour les 2 p. 100 que tu as déjà payé ailleurs, mais on va te faire payer la différence que toute entreprise nationale doit payer.

(2100)

Il me semble que c'est logique. Et ça, c'est aux États-Unis. On ne peut pas dire que les Américains sont très socialistes. On ne peut pas dire que les Américains traitent leurs entreprises et leurs corporations avec désinvolture. On ne peut pas dire que ce n'est pas le paradis de l'entreprise privée, aux États-Unis. On a des hauts fonctionnaires ici qui arrivent à influencer les décideurs, qui sont très facilement influençables du côté libéral, en leur disant qu'il faut faire attention pour ne pas maltraiter les entreprises, et que si on les maltraite, elles vont se sauver. Un peu de sérieux quand même. Quand, en plus, on est dans une situation financière comme celle du Canada, il me semble qu'on doit profiter de toutes les avenues pour boucher les fuites et ça, c'est une fuite par excellence.

L'autre moyen d'en arriver à récolter ce que normalemement on devrait récolter, c'est de réviser les hautes conventions fiscales que je mentionnais tout à l'heure. On sait où sont ces conventions fiscales. On sait qu'elles sont signées avec des pays qui ont un taux de taxation trop faible par rapport à ce qu'on a, nous, comme taux de taxation. Il faut réviser ces conventions. C'est facile de les réviser. Vous prenez le téléphone, vous appelez les représentants de ce pays, vous redéfinissez des clauses et vous leur dites que ce n'est pas parce qu'on ne les aime pas, mais parce qu'il n'est pas normal qu'il y ait de telles fuites de capitaux engendrées par des taux de taxation qui sont ridicules. Soit que vous révisez en déchirant la convention fiscale, soit que vous révisez en ayant un mécanisme de compensations qui fait en sorte que lorsque des profits transitent de ce pays vers le Canada, il y ait un taux de taxation acceptable qui soit appliqué et que ça rentre dans les coffres du gouvernement.

Le projet de loi C-37, comme je le mentionnais, nous présente des conventions fiscales signées entre le Canada, la Russie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Inde et l'Ukraine. C'est un exemple, finalement, de ce qu'on devrait utiliser comme critères de comparaison des conventions fiscales déjà signées entre le Canada et certains pays qui sont considérés comme des paradis fiscaux. Les taux de taxation sont à peu près similaires ou du moins, il n'y a pas un différentiel comme on peut observer dans des pays comme les Bahamas par exemple. Les conventions semblent, à moins qu'on ait mal fait notre travail, équitables ou, enfin, le traitement fiscal donné par le Canada et le traitement fiscal donné par ces pays.

3979

Finalement, l'opposition officielle appuiera le projet de loi C-37, mais en espérant, comme je vous le mentionnais tout à l'heure, que le gouvernement fédéral révise, comme nous lui demandons depuis deux ans et demi, les onze conventions fiscales signées avec des pays considérés comme des paradis fiscaux. Deuxièmement, qu'on réfléchisse à notre proposition d'établir un mécanisme tel que celui qui existe aux États-Unis pour faire en sorte qu'on arrive à compenser les pertes qu'on pourrait voir surgir dans l'avenir, comme les pertes de taxation actuelles parce qu'il y a un trop grand différentiel entre les pays qui font affaire avec le Canada.

Les États-Unis, comme je vous le mentionnais, ont fait un excellent travail là-dessus. On taxe au taux américain et on en arrive à donner des déductions aux entreprises qui ont déjà payé 2 ou 3 p. 100 ailleurs, aux Bahamas, à Chypre, à Malte ou un peu partout à travers le monde.

C'est une voie à envisager et à étudier sérieusement parce que le Canada, comme je le mentionne assez souvent, est à la remorque de plusieurs pays industrialisés. Le Canada est à la traîne aussi, lorsqu'on regarde les innovations, les originalités un peu partout à travers le monde relativement à la taxation des entreprises. Je pense qu'il serait temps que le gouvernement se réveille.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le projet de loi C-37 a pour objet de la mise en application de conventions fiscales déjà conclues avec la Russie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Inde et l'Ukraine.

Ces conventions fiscales ont pour but d'empêcher la double imposition, d'une part, et de prévenir l'évasion fiscale, d'autre part. Comme elles contiennent des dispositions qui diffèrent de celles de la Loi de l'impôt sur le revenu, elles ne peuvent s'appliquer que dans la mesure où nous leur donnons priorité sur les lois internes en faisant adopter une loi par le Parlement.

(2105)

Les conventions et les protocoles que l'on trouve dans la loi s'inspirent du modèle de convention sur la double imposition préparé par l'OCDE. Cette loi expose un système de protocoles et de conventions d'imposition conclus avec des pays qui n'avaient pas encore passé de telles conventions avec le Canada.

La loi vise à éliminer la double imposition lorsque quelqu'un doit payer un impôt sur le revenu et dans son pays et dans un autre, et à restreindre la capacité de frauder l'impôt en faisant transférant ses revenus ailleurs. Elle reproduit les conventions déjà conclues avec la Russie, l'Afrique du Sud, la Tanzanie, l'Inde et l'Ukraine.

Le Parti réformiste souscrit au principe de l'équité horizontale et verticale, et empêcher l'évasion fiscale va en ce sens. La loi simplifie sensiblement le système d'imposition du fait qu'elle s'applique aux personnes et aux sociétés résidant au Canada ainsi qu'aux propriétaires de revenus produisant des actifs au Canada, ou à l'un des États signataires. Voilà pourquoi je suis heureux, au nom du Parti réformiste, d'appuyer ce projet de loi.

[Français]

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Avec dissidence.

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée avec dissidence. En conséquence, ce projet de loi est renvoyé au Comité permanent des finances.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)

* * *

LOI SUR LE CONSEIL CANADIEN DES NORMES

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur le Conseil canadien des normes, dont le comité a fait rapport sans amendement.

L'hon. Jane Stewart (au nom du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)) propose: Que le projet de loi C-4 soit agréé à l'étape du rapport.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

M. Boudria: Je crois que vous obtiendrez le consentement unanime de la Chambre pour dire qu'il est 21 h 30.

Le président: Y a-t-il unanimité?

Des voix: D'accord.

______________________________________________

3979

MOTION D'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA SÉCURITÉ FERROVIAIRE

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, le 12 juin dernier, je posais une question au ministre des Transports concernant la sécurité ferroviaire à la suite de la décision du Canadien National de fermer l'atelier Joffre à Charny. Pourquoi est-ce que je me suis inquiété de cela? C'est qu'il y avait trois ateliers au Canada, avant cette décision, qui s'occupaient de la réparation et de l'entretien des voies ferroviaires au pays.

(2110)

On a décidé soudainement de ramener cela à Winnipeg. Étant donné que le Canadien National est privatisé depuis l'année dernière, je me suis inquiété de la sécurité et j'ai demandé au ministre des

3980

Transports s'il ne pensait pas que s'il arrivait quelque chose d'important à la voie ferroviaire que de compter sur l'atelier situé à Winnipeg pour couvrir tout le Canada jusqu'à Halifax, cela faisait beaucoup de voie ferrée. Le ministre a dit qu'il avait étudié ça lui-même, qu'il avait regardé le suivi et qu'il n'y avait pas de problème, ça serait sécuritaire.

Le 28 mars 1995, le quotidien Le Soleil a publié les résultats d'une étude qui démontrait l'état de la voie ferrée au Québec. Au Québec, il y a jusqu'à 10 fois plus de défectuosités que dans certaines autres régions du pays; ça varie de 3 à 10 fois plus.

Par exemple, et je cite l'article du quotidien Le Soleil: «Pour les trains qui se mettent en branle dans la région du Québec, qui englobe Ottawa, mais qui s'arrêtent avant la Gaspésie, les inspecteurs des rails comptent 51 défectuosités par 100 milles ou 160 kilomètres de voies principales appartenant au CN. Ils en notent 31 par 100 milles de voies principales du Canadien pacifique. Le CN détient plus de 80 p. 100 des voies ferrées.»

Comme je vous le disais, ailleurs ça va jusqu'à 10 fois moins. Malgré cela, le CN décide d'installer le seul atelier de réparations à Winnipeg.

Je profite de la présence du ministre. Maintenant qu'il est averti de la question depuis jeudi dernier, je lui demande s'il peut déposer des rapports sur lesquels il peut se baser, qu'il vaudrait mieux que l'amélioration soit arrivée depuis un an, pour dire qu'au Québec il n'y a pas de danger. J'aimerais que le ministre nous parle de ces rapports et, encore mieux, s'il pouvait déposer, dans les prochains jours, les rapports sur lesquels il se base pour dire que les voies ferrées au Québec sont en excellente condition.

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de répondre à l'honorable député de Lévis. Je le remercie de me fournir l'occasion de dire quelque chose au sujet de la sécurité ferroviaire.

Premièrement, je peux l'assurer que oui, il y a des chiffres qui indiquent qu'il n'y a pas vraiment de différence très importante entre le nombre d'accidents, le nombre de problèmes dans le système ferroviaire dans la province de Québec et les autres provinces du Canada. Je peux lui fournir les chiffres exacts, malheureusement je ne les ai pas avec moi à ce moment-ci.

Il est bien malheureux que des gens perdent leur emploi à Charny. Je peux assurer la Chambre qu'il n'y a aucun problème lié à la sécurité. Le CN a décidé de centraliser les principales activités de réparations d'équipement destiné à l'entretien de la voie, mais l'entretien courant s'effectuera sur place. Enfin, le CN accroîtra ses activités d'entretien courant d'équipement. L'entretien des voies, élément essentiel à la sécurité, se poursuivra avec l'équipement toujours en bon état.

Transports Canada collabore avec les chemins de fer afin d'offrir aux Canadiens le plus haut niveau de sécurité ferroviaire qui soit. Les chemins de fer sont tenus de respecter la Loi sur la sécurité ferroviaire et il incombe à Transports Canada de veiller à ce que les normes de sécurité soient respectées conformément à la loi.

Les agents de sécurité ferroviaire de Transports Canada surveilleront les opérations ferroviaire et l'entretien des voies, l'équipement et les passages à niveau pour garantir la sécurité ferroviaire.

La loi leur donne le pouvoir de restreindre les opérations ferroviaires s'ils découvrent une condition non sécuritaire et d'imposer des amendes aux compagnies en cas de violations.

La décision prise par le CN de centraliser l'entretien de l'équipement est une décision d'affaires et ne concerne pas la sécurité.

Le vice-président: Chers collègues, la motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures.

(La séance est levée à 21 h 15.)